Livret - École de Monde
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Les langues et les cultures qui nous parlent en couleurEn images, en photos, en mots
Mobilité et transnationalisme: histoire d’enfants et de jeunes dans la redéfinition de l’espace scolaire
Cette étude traite de la mobilité géographique des élèves et de leur parcours scolaire. Elle vise à faire connaître les histoires de vie et trajets migratoires des élèves, de leur famille et du personnel de l’école afin de mieux saisir les transformations actuelles du monde scolaire. La recherche porte plus spécifiquement sur les écoles de langue française en Ontario.
La mobilité fait appel, d’une part, aux déplacements dans la vie de tous les jours (venir à l’école, en autobus ou à pied, ou encore, faire un voyage, par exemple) et d’autre part, à la migration sous ses diverses formes. Nous avons inclus, dans notre étude, la mobilité virtuelle.
La mobilité est une ressource ou un capital que l’on développe graduellement et qui devient un enjeu pour l’école, non seulement au plan de l’insertion sociale mais surtout dans le redressement des inégalités sociales.
Il s’agit d’une étude ethnographique menée sur une période de trois ans et à laquelle votre école a participé. Voici quelques témoignages que nous avons recueillis lors de notre visite. Nous avons mis l’accent sur le regard de l’élève sur sa vie à l’école, en relation avec les adultes de son entourage et, plus largement, sur sa vie en société.
Équipe de recherche : Diane Farmer, chercheure principale Alyssa Adair, Michelle Fazioli, Hind Morsli et Gail Prasad, assistantes de recherche
Description du projet
“Dessine sur la silhouette les langues et les
cultures qui t’habitent, avec lesquelles tu as
développé un lien au courant de ta vie.”
Les chercheurs ont de plus en plus recours au dessin dans les études menées auprès d’enfants et de jeunes pluriculturels et plurilingues. Nous avons demandé aux élèves de réaliser leur portrait de langues. Il s’agit d’un outil précieux qui permettait à ces derniers de réfléchir à la formation de leur identité et à leur parcours de vie. Ce ne sont pas les portraits en soi mais bien la réflexion suscitée chez les jeunes et l’occasion qu’ils ont eue de présenter leur biographie, en fonction de leurs propres repères, que nous tenions à souligner.
Ces portraits mettent en valeur l’histoire familiale, l’apprentissage entre amis (de nouvelles langues, par exemple) et l’impact parfois inattendu d’une leçon (je connais des mots de latin!).
Portraits langagiers
Un collage de mots qui représente, par la taille du
mot, combien de fois ce mot ressort en discussion (dans le
discours des jeunes)
« Je voyage
beaucoup pour
voir de la
famille. »
« J’ai fait moitié
bleu et moitié
orange pour
représenter que je
parle plus l’anglais
et le français. »
« J’ai mis le rouge
aussi ici parce
que c’est à côté
de mon cœur et
toute ma famille
est au Liban. »
« Moi, je suis
francophone. »
« Ma famille
vient du Liban et
je suis libanaise
et ça va rester
toujours dans
mon cœur. »
« Sur mes bras, j’ai mis le français parce que
… Bon, le français, je l’ai mis en rouge parce
que ça me rappelle plutôt le sirop d’érable du
Québec. Et j’écris beaucoup en français ici à
l’école alors c’est approprié pour les mains et
les bras. »
« Dans mon cœur,
c’est toujours
l’arabe que je veux
parler. Je ne veux
pas, comme,
oublier cette
langue. »
« Ma culture,
c’est beaucoup
de moi. »
« Pour mon corps,
j’ai choisi
canadien car je
suis canadien
avant tout. »
« J’utilise le Skype
avec ma mère pour
voir mon grand-
père, ma grand-
mère, mon oncle,
mes cousins, tous,
en Italie. »
« J’ai dessiné ma
tête en rouge car
je parle beaucoup
la langue arabe.
C’est ma langue
officielle. »
« Le Canada, je l’ai fait
en noir parce que ici au
Canada nous sommes
multiculturels et le noir,
si tu mélangeais toutes
les couleurs ensemble
ça serait noir. »
« J’ai choisi le vert
pour l’Algérie car
chaque fois que
mon pays joue au
soccer, ils [les
joueurs] portent le
vert. Parce que
c’est une couleur
qui a beaucoup de
sens dans mon
pays. C’est parce
que la liberté,
c’est vert pour
nous. »
« Elle me téléphone
toujours : Go to
Facebook. Go to MSN.
Je dis : Oh no, je n’ai
pas un Facebook, mais
j’ai un MSN. Après je
leur dis : Je peux pas
aller maintenant. Je suis
encore en train de faire
les devoirs. »
« Je suis tombée
amoureuse de cette
école. »
« Notre école sert de
centre pour la
communauté. »
« Je trouve que je suis
chanceuse. »
“Avec cet appareil photo, je prends des photos des
endroits, des personnes, et des objets qui me
branchent.”
Nous avons demandé aux élèves de prendre des photos au sein de l’école et à la maison ou encore dans leur voisinage. Par cette activité, nous voulions mieux comprendre comment se vit la mobilité au quotidien et surtout quelles interprétations les jeunes font du va-et-vient de la vie de tous les jours. Ils ont photographié des endroits qui sont importants pour eux, que ce soit le parc, le centre commercial, les ruelles, le gymnase, la bibliothèque, le secrétariat de l’école ou le bureau de la directrice. Ils ont aussi largement choisi de prendre en photo des membres de leur famille, le personnel de l’école et leurs amis. De nouveau, ce sont les élèves qui ont donné un sens à ces images en nous expliquant les raisons qui ont motivé leurs choix. Les photos illustrent la sensibilité des élèves et l’importance des liens affectifs, soutenus dans les rencontres réelles et virtuelles, dans ce monde mondialisé qui est le leur.
Photographies
« Quand ta
famille est tout
ensemble tu te
sens très fier. »
« Je suis
canadienne, c’est
ça qui me tient
ensemble. »
« Je n’ai pas un ordinateur à la maison
ni une télévision donc quand je veux
utiliser l’ordinateur, je dois marcher à la
bibliothèque qui est juste à dix minutes
de ma maison. »
« On ne veut pas
perdre nos
langues, c’est
notre identité. »
« La technologie
crée la proximité,
on se sent
ensemble. La
distance, ce n’est
plus important. »
« Je voyage beaucoup. Moi j’étais
allée en France deux fois, à Germany
une fois, j’étais allée au Caribbean sur
une croisière. J’étais allée beaucoup
aux États-Unis et puis je vais aller à
England. »
« On est
tellement habitué
au va-et-vient des
élèves que ça ne
nous dérange
plus. »
« Le
multiculturalisme
qu’on vit ici est
très riche. »
La migration sous ses multiples visages (internationale, transnationale, régionale) contribue à transformer le paysage scolaire. Dans certains milieux, les contextes scolaires se renouvellent constamment alors que de nouvelles familles arrivent et d’autres repartent tout au long de l’année.
La mobilité géographique est un phénomène de société, plus largement, qui nous invite à repenser les espaces locaux et à mieux comprendre les nouvelles formes de migration. Cette question est très importante pour les écoles de langue française de l’Ontario où la population étudiante est aujourd’hui plus mobile. Notre étude porte ainsi sur ce contexte particulier.
À l’image de la métaphore d’un monde mondialisé, la mobilité évoque les liens que tissent les individus entre eux. Elle constitue, par ailleurs, une nouvelle forme de capital, tout comme le capital économique, culturel
Réflexions
et social. Il est alors important de comprendre ce phénomène en lien avec la production des inégalités, que ce soit à l’école, sur le marché de l’emploi ou encore dans la communauté.
Trois séries de questions guident notre cheminement. Tout d’abord, quel sens les jeunes donnent-ils à cette culture de mobilité ? En deuxième lieu, quelle place l'école occupe-t-elle dans le trajet migratoire des familles ? Enfin, dans quelle mesure l'école rend-elle possible le mouvement complexe des populations et surtout, comment est-elle transformée par les nouveaux contextes de mobilité ?
Nous présentons ici les thèmes dominants qui sont ressortis de l'enquête menée à l'école. Ces thèmes sont aussi illustrés dans un collage de mots en fin de texte.
L’étude a été menée en 2011. Nous avons rencontré les élèves de 4/5e et 5/6e.
Le thème qui ressort le plus souvent est celui de la famille et des réseaux familiaux un peu partout dans le monde. Les liens sont maintenus à travers les voyages dans la grande famille et la communication virtuelle, au jour le jour. C’est ainsi pour les élèves et pour le personnel de l’école.
L’amitié est aussi un thème très fort. Les réseaux se tissent au sein de l’école mais aussi à l’extérieur, à l’école arabe par exemple, et parfois en lien avec des amitiés forgées dans une école précédente.
L’école est un milieu accueillant et sécuritaire. Elle sert de point de référence et d’élément de stabilité pour l’enfant et sa famille. Les familles migrantes ont tendance à revenir à cette école, d’une année à l’autre. Pour d’autres familles, l’établissement fait partie d’un circuit plus complexe. Mais l’expertise développée par l’institution auprès
de familles en mouvement facilite le processus d’intégration de l’élève.
Les élèves ont identifié divers endroits qui sont importants à leurs yeux. Les photos et discussions ont révélé que l’apprentissage se vit dans tous les lieux de l’école – les couloirs qui servent aussi de lieux de célébration des productions de l’élève, le gymnase, les rassemblements à la ca fé tér ia , la bibliothèque, la salle d’anglais, la salle d’ordinateurs et bien sûr, la cour d’école.
Les élèves ont partagé leurs inquiétudes dans ce contexte de mobilité et en particulier la difficulté de voir des amis ou membres de la famille les quitter.
Enfin, les portraits ont fait ressortir le plurilinguisme des élèves et des enseignants ainsi que les éléments de convergence des histoires de vie. Le dessin multicolore illustre la richesse des parcours.
Apprentissage
Émotions
Histoires de vie
Famille
Amitié
École
Livre créé par les élèves de 4/5e et de 5/6e d’une école de langue française du sud de l’Ontario, avec les enseignantes titulaires, la direction et le personnel de l'école, et
Alyssa Adair et Diane Farmer de l'équipe de recherche, OISE, Université de Toronto. Nous aimerions remercier l'école, les parents et le conseil scolaire qui ont appuyé
cette étude. Nous aimerions également remercier le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada qui a subventionné cette recherche.
© Diane Farmer 2011