Litiges entre freteurs

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1 Université Paul Cézanne- Aix Marseille Faculté de droit et de science politique d’Aix- Marseille CENTRE DE DROIT MARITIME ET DES TRANSPORTS LITIGES ENTRE FRETEURS ET AFFRETEURS AU VOYAGE Année 2008. Master 2 Droit maritime et des transports Sous la direction de Me Christian Scapel Pierre Izenic

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Université Paul Cézanne- Aix Marseille

Faculté de droit et de science politique d’Aix- Marseille

CENTRE DE DROIT MARITIME ET DES TRANSPORTS

LITIGES ENTRE FRETEURS ET

AFFRETEURS AU VOYAGE

Année 2008. Master 2 Droit maritime et des transports Sous la direction de Me Christian Scapel Pierre Izenic

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Remerciements Je remercie tous mes professeurs et particulièrement Le Commandant Figuière pour son dévouement et sa générosité

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PREAMBULE

Il existe deux façons de transporter les marchandises par mer.

Les confier à un transporteur

louer tout ou partie d’ un navire pour le voyage envisagé et s’occuper de

sa marchandise.

Peu de différences apparaissent à première vue : dans les deux cas, la

marchandise est chargée à bord,(mais sur quel navire ?), puis transportée vers

le port convenu.

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4Ces deux prestations apparemment équivalentes s’effectuent sous des aspects

bien différents.

Sans qu’il soit utile, dans le cadre de cette étude, de dresser un tableau de

comparaison entre le transport maritime et l’affrètement au voyage, on pourra

mettre en évidence les différences essentielles au travers des personnalités

des acteurs, fréteur et affréteurs, et du particularisme de leur contrat, la charte-

partie.

Les clauses contractuelles sont adaptées, âprement discutées d’égal à égal.

Les liens qu’ils nouent sont étroits.

Malgré leur professionnalisme, des divergences apparaissent, soit dans

l’interprétation des clauses convenues, soit dans l’exécution de leurs obligations.

.

L’intérêt commercial commande de régler au plus vite et à l’amiable les

différends mineurs.

Si le désaccord persiste, une solution doit être trouvée.

Nous proposons d’exposer, en respectant la chronologie du voyage, les

principaux litiges et la manière dont ils ont été résolus.

On évoquera, en fin d’étude, un point clé de la procédure, la clause

compromissoire .

Certains exemples, bien qu’anciens, illustrent notre étude. Nous les présentons

lorsqu’ils créent une jurisprudence, qu’ils sont toujours d’actualité, ou bien

lorsque la solution apportée ne semble pas évidente.

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Introduction Les données économiques

• Les besoins en transport.

Par le plus grand des hasards, les richesses naturelles de notre planète ne se

trouvent pas sur les lieux mêmes de leur emploi.

Minerais et charbons sont aux antipodes : Chine, Australie, Amériques et

Afrique du Sud.

L’or noir le plus proche repose sous les sables du Moyen Orient.

Les bois précieux proviennent des forêts équatoriales.

Les besoins alimentaires, sans cesse croissants, imposent d’aller chercher :

-Le riz en extrême orient.

-Les grains principalement dans les grandes plaines canadiennes et

américaines.

La révolution industrielle engagée au XIXème siècle en Europe du nord a eu

vite raison des maigres ressources qui s’y trouvaient.

L’essor économique et industriel se propage dans le monde entier : les quatre

pays émergents, désignés sous l’acronyme BRIC(Brésil, Russie, Inde ,Chine)

occupent déjà une place de premier rang dans l’économie mondiale ; la Chine,

à elle seule ,consomme 37% de la production mondiale d’acier et l’Inde est

devenue importatrice d’acier en 2007. 1

.

Ces matières, devenues précieuses au vu de l’envolée de leurs cours, intéresse

bien des nouveaux clients.

Face à une telle demande, la flotte mondiale est à la traine; les ports sont

engorgés; Les taux de fret flambent.

1 http://www.oecd.org

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6 Les affaires sont donc juteuses pour les propriétaires de navires et les fréteurs.

Il suffit d’ailleurs d’observer le carnet de commande des chantiers : Dans tous

les secteurs, hormis la pêche, ils affichent complet jusqu’en 2011.Il y a peu

d’espoir de négocier les prix.

C’est ce que tous s’accordaient à dire fin 2007.

• Une activité liée aux cycles économiques Ce ciel radieux s’assombrit : la demande s’affaiblit, la croissance chute, la

récession menace.

Le 12 mai 2008, les échos titraient : « La baisse des commandes de navires tire

les prix du transport vers le haut »2

2Les échos.fr du 12 mai 2008 extraits : Le boom historique de la construction navale se heurte aux restrictions de crédit. Résultat : les armateurs annulent leurs commandes et les taux de fret s'envolent.

Aujourd'hui, les chantiers navals à travers le monde redoutent l'annulation de 14 milliards de dollars de commandes. Ainsi, le plus grand constructeur naval au monde, le coréen Hyundai Heavy Industries Co, se voit menacée par des annulations et des retards de livraison sur un volume qui représente 94% de son chiffre d'affaires annuel par Hyundai. La cause de ce malaise ? "Le durcissement des conditions de crédit qui conduit les prêteurs à demander aux emprunteurs de plus grande garanties de dépôt pour leurs financements à court terme", a déclaré Tobias Backer, le responsable de la division Shippers Amériques chez Fortis. Et le mouvement ne fait que commencer.

Pour l'heure, les annulations ou les retards de livraisons portent sur 250 navires environ, ou 10% du carnet de commandes, ce qui va rendre le marché de la construction navale plus difficile. Ceci au moment où la demande de navires neufs émanant de la Chine et de l'Inde pour toutes sortes de marchandises _ des graines de soja au charbon _ n'a jamais été aussi soutenue. Conséquence : faute de faire face à la demande par l'augmentation de la flotte (et sur la base des commandes en cours, soit 2.561 navires), les prix du transport maritime devraient progresser de 56% au cours des trois prochaines années, estiment les professionnels des marchés à terme. "Ces annulations conduiront certainement la hausse des taux de fret maritime du fait du manque de navires,'' explique ainsi Natasha Boyden, analyste chez Cantor Fitzgerald à New York.

Niveaux records

L'enjeu ne porte pas seulement sur la construction navale mais aussi sur les profits des armements spécialisés dans un secteur qui, malgré le ralentissement économique aux Etats-Unis, a sur-performé l'an passé grâce à l'appétit de la Chine pour les matières premières. Ainsi, le Bloomberg Dry Ships Index, qui regroupe 12 compagnies maritimes, a-t-il progressé de 69% en 2007, alors que l'indice Standard & Poor's 500 Index perdait 7,8% sur la même période. Deux exemples : STX Pan Ocean Co., une compagnie maritime coréenne, a gagné 62% en 2007 et DryShips Inc, un armement basé à Athènes, a plus que doublé.

Les stocks de navires en commandes ont été poussés par les taux de fret maritime, qui ont atteint, le 9 mai dernier, leur plus haut niveau depuis cinq mois - s'inscrivant 7,3% sous le niveau record du 13 novembre 2007. La courbe des taux a suivi celle de la baisse des commandes. Ainsi, pour les frets secs, le Dry Baltic Index (voir encadré) a augmenté de 58% l'an dernier, alors que le nombre de navires en cours de construction diminuait de 21% au cours de cette période, selon les données du Lloyd's Registre Fairplay.

Le chargeur Jinhui Holdings Ltd de Hong Kong est un cas d'espèce. En janvier dernier, il a annulé une commande de deux navires et il est prêt à payer 4 millions de dollars pour sortir du contrat. "Lorsque les gens paient 4 millions de dollars pour sortir d'un chantier, c'est une dynamique intéressante dans le marché'', estime-ton chez Fortis.

(Source : Bloomberg)

(*) Un nouveau navire Le Cap, un des plus grands navires de charge, coûte environ 155 millions de dollars.

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7 « c’est la débandade sur le pacifique nord »3

L’observation de la courbe des taux de fret du Baltic Dry index montre une

variation, sur les douze derniers mois, à la hausse(+100%) comme à la baisse(-

50%) à quatre reprises.4

INDICE BALTIC DRY INDEX

Les taux de fret miraculeux dureront-ils ?Les plans d’amortissement des

navires payés au prix fort sont-ils réalistes ?

C’est le risque majeur supporté par les propriétaires de navires. Le frètement

doit donc couvrir cette exposition. L’affrètement coque- nue ou à temps sur une

longue durée est une solution appropriée.

Libéré de toute contrainte patrimoniale, le transporteur maritime se concentre

sur son métier: Il organise les rotations des navires qu’ il arme et entretient,

mais surtout cherche activement à tisser un vaste réseau commercial, essence

même de l’emploi des navires.

3 Propos de Mr. Bernard Dreyer, Mars 2008, au sujet du trafic conteneurs 4 Source Les échos. Fr. http://bourse.lesechos.fr/bourse/matieres/details_matieres.jsp?

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8 Il assure la desserte régulière de ports prédéterminés avec toutes sortes de

marchandises.

C’est le trafic de ligne.

Le tramping

Le trafic ponctuel est traditionnellement schématisé par un navire unique

chargé d’une cargaison unique provenant d’une zone de production vers un

pays de transformation.

Il existe un marché spot pour l’affrètement de ces navires.

Rien, cependant, n’interdit de ne louer qu’une partie de navire, d’affréter des

espaces, de prévoir des voyages consécutifs ou encore de charger plusieurs

marchandises.

Ces transports sont assurés dans le cadre de l’affrètement au voyage.

_ _ _ _ _ _

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9

Le cadre du contrat d’affrètement au voyage On peut « reconnaître schématiquement les trois catégories de contrat tendant

à l'exploitation commerciale des navires par les traits suivants : le time-charter

porte sur un navire : l’affrètement au voyage intéresse un navire et une

cargaison : le transport sous connaissement porte sur une cargaison »5.

La liberté contractuelle

D’emblée, la loi française6,par son art.1,titre1, précise le caractère supplétif du

contrat d’affrètement:

« Par le contrat d’affrètement, le fréteur s’engage, moyennant rémunération, à

mettre un navire à la disposition d’un affréteur.

Les conditions et les effets de l’affrètement sont définis par les parties au

contrat et, à défaut, par les dispositions du présent titre et celles du décret pris

pour son application. »

Fréteur au voyage et affréteur au voyage ont donc toute latitude pour convenir,

sauf à enfreindre des dispositions d’ordre public, de leurs droits et obligations

respectifs.

Il est bien normal qu’entre professionnels aguerris aux pratiques du commerce

maritime,de surcroît international, la plus grande liberté contractuelle soit de

mise.

Le contrat conclu peut être, en cours d’exécution, modifié au gré des parties,

permettant ainsi une grande souplesse et une capacité d’adaptation aux

circonstances7

5 " (R. Rodière, Traité général de droit maritime : Dalloz 1970, t. I, p. 53) 6L. n°66-420 du 18 juin 1966

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Les cocontractants

Le fréteur Le fréteur au voyage est un transporteur maritime.

Ses navires n’assurent pas une desserte régulière de ports prédéterminés. Il

recherche un commerçant disposant d’une cargaison et lui propose de la

transporter.

Mettre un navire à disposition suppose :

• d’en posséder un : c’est le cas du propriétaire de navires dont les

revenus proviennent du courtage (achat et vente) de navires neufs et

d’occasion .

C’est une activité essentiellement financière, bien souvent réalisée derrière

des sociétés écran, laquelle, compte tenu des sommes en jeu et des très

fortes volatilité des taux de fret, nécessite une prise de risque et un flair

certains.

• d’en exploiter un : c’est le schéma traditionnel de la compagnie de

navigation qui tire ses revenus de la gestion nautique et commerciale d’

une flotte. Ses contraintes principales sont d’armer correctement le

navire et surtout d’assurer sa navigabilité.

• Mais l’exploitant n’est pas forcément armateur : le fréteur au voyage peut

être lui-même affréteur coque nue ou à temps, ainsi que le stipule l’art.12

de la loi précitée ;c’est le principe des sous-affrètements. Cette

exploitation est alors purement commerciale.

7 Droit Maritime Français - 2007 - n°685 - 10-2007 Mtre Marie Noëlle Raynaud,avocat à la Cour

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L’ affréteur L’affréteur au voyage ne transporte pas de marchandise.

L’acheminement de sa cargaison est très souvent la conséquence ou la suite

logique d’un contrat de vente ou d’achat, dont l’exécution finale requière un outil

de transport (navire vecteur) et une capacité d’emport (navire volume)8.

Son profil type est celui du négociant, grossiste en matières premières

(commodités), généralement en vrac (minerais, grains, tourteaux, ciment

ferrailles, déchets…) , en citerne (huiles végétales, pétroles brut ou raffinés,

produits chimiques de base, gaz liquéfiés, vin…),en sac ou sachet (engrais,

ciment, riz).

Mais rien n’empêche toute autre personne, tel le commissionnaire de transport,

dès lors qu’il intervient en son nom et pour son compte.

Pareillement, s’il agit pour le compte de son commettant, par exemple le

réceptionnaire, c’est ce dernier qui aura qualité d’affréteur 9 .

.: « Rien ne s'oppose à ce qu'un commissionnaire de transport chargé

d'organiser un transport maritime décide de recourir aux services d'un fréteur

au voyage. Au demeurant, si la marchandise est un peu particulière et n'est pas

susceptible d'être « conteneurisée », le commissionnaire n'aura guère d'autres

possibilités. Le commissionnaire prend alors la qualité d'affréteur : c'est bien lui

le cocontractant de l'armateur, fréteur au voyage »..…. « et la qualité d'affréteur

ne peut être reconnue qu'à celui qui a donné pouvoir au commissionnaire. Si

c'est le réceptionnaire, celui-ci aura la qualité d'affréteur. C'est cette solution

que la Cour de cassation a récemment consacrée »

Ses deux obligations fondamentales sont :

8 Exprimée enTPL(tonnes de port en lourd) pour les masses,TxJ N (tonneaux de jauge nette) pour les volumes.EVP(équivalent 20 pieds) pour les conteneurs. 9Navire Inger riis(Cass. com. 14 janv. 2004, navire Inger Riis, DMF 2004, 979.voir également les observations du Pr. Ph. Delebecque, dmf 2004 n°654 12-2004.

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• Le paiement du fret à la date convenue. En droit français, le fréteur

bénéficie d’un privilège légal sur le paiement du fret.10

• Charger et décharger la quantité de marchandises convenue.

Compte tenu du caractère international de l’activité maritime, nous ne pouvons

passer sous silence la position des juristes étrangers :

• Le Professeur Arroyo11 distingue très nettement l’affrètement au voyage

du transport de marchandise par mer.

• Maitre Luis Cova Arria12 souligne l’importance de la C/P au voyage dans

le droit maritime vénézuelien :

“Thus the Italian Shipping Code, which has marked the way, contains

a classification of contracts containing the following categories :

contracts for the leasing of vessels, like contracts for the leasing of

abjects ; charterparties which include the well known voyage and

time charters...”

L’intérêt d’affréter au voyage En l’absence de stipulations contraires13, « Le fréteur est responsable des

marchandises reçues à bord par le capitaine dans les limites prévues à la

charte-partie.

Il se libère de cette responsabilité en établissant, soit qu’il a satisfait à ses

obligations de fréteur précisées par décret, soit que les dommages ne tiennent

pas à un manquement à ces obligations, soit que le dommage est dû à la faute

nautique du capitaine ou de ses préposés ».14

10 Loi du 18 juin 1966 art.2 11 Professeur de droit maritime à l’université autonome de Barcelone. « curso de derrecho maritimo » éd.2001,JM Bosch éditor. 12 Avocat au barreau de Caracas. The venezuela legislative treatment of maritime law dmf 1990 n°497. 13 La responsabilité du fréteur est librement négociée. 14 Loi du 18 juin 1966, art.6

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13Le fardeau de la preuve incombe donc au fréteur au voyage. En cas de perte

ou d’avarie à la marchandise, le fréteur devra prouver qu’il a rempli ses

obligations pour s’exonérer de sa responsabilité.

Il répondra également des fautes commerciales de son capitaine.

Si la dissociation des taches permet à chacun, fréteur et affréteur, de se

concentrer sur le cœur de son métier, d’autres considérations, moins nobles,

peuvent motiver ce choix.

Mr. Jean Pierre Beurier, dont nous reproduisons un extrait de son article15 ,

démontre l’intérêt qu’un industriel peut trouver à commercer sous le régime de

l’affrètement au voyage.

. « Le montage pour l’affrètement au voyage de l’Erika restera comme un

modèle du genre. La discrétion de l’affréteur est tout aussi remarquable, en

effet la Convention de 1969 (art. III§4) précisait que pour bénéficier du fonds

d’indemnisation aucune demande de réparation de dommage par pollution ne

pouvait être introduite contre les préposés ou mandataires du propriétaire, mais

la convention n’abordait pas la question de l’affréteur. Le protocole additionnel

du 27 novembre 1992 modifie le paragraphe 4 de l’article III en ajoutant le pilote,

les personnels des opérations de sauvetage et surtout (al. c) « tout affréteur,

armateur ou armateur gérant du navire ». Ce remarquable dispositif a permis de

protéger des demandes de réparation les opérateurs intermédiaires, et surtout

les principaux affréteurs, c’est-à-dire les compagnies pétrolières. Le système a

très bien fonctionné dans le cas de l’Erika mettant l’affréteur au voyage à l’abri

des recours. »

.

15Mr JP Beurier est professeur à l’université de Nantes et directeur du CDMO. DMF 2004,n°645

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14

La charte-partie au voyage Dans le monde des affaires, rien n’est figé ; l’opportunité crée la fonction.

Selon les perspectives comme des besoins ponctuels, l’affréteur deviendra

armateur, propriétaire ou non, voire fréteur sur certains marchés et affréteur sur

d’autres. Chacun se retrouve d’un coté comme de l’autre de la charte; c’est

dire la maitrise que ces industriels du transport ont des clauses du contrat

d’affrètement, la charte –partie au voyage.

Forme Liberté contractuelle et consensualisme prévalent.

Les charte-parties au voyage sont généralement des documents pré-

imprimés16, adaptés aux types de marchandises transportées. Des clauses

particulières complètent les clauses types. En cas d’indications contradictoires

ou d’effets contraires, les clauses particulières, à fortiori si manuscrites,

l’emportent sur les clauses générales dactylographiées17.

Loi applicable Contrairement au transport maritime, il n’existe aucune convention

internationale régissant les contrats d’affrètement.

L’art.3 de la loi du 18 juin 1966 précise : « En matière internationale, le contrat

d’affrètement est régi par la loi du pavillon du navire, sauf convention contraire

des parties ».

16 On trouvera sur le site www.bimco.dk/ une large palette de C/P spécialisées et leurs clauses additionnelles.17 Camp sentence 1027 du 28 janvier 2000

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15

En droit civil anglais, en l’absence de loi expressément définie par les parties, la

loi régissant le contrat est la loi « with which the contract is most closely

connected »18

Cette règle s’applique.

Cette alternative revêt toute son importance depuis l’émergence de nombreux

petits états souverains, dont les systèmes juridiques sont souvent peu connus

des acteurs du commerce maritime, entrainant incertitude et insécurité

commerciales.

Il sera néanmoins appliqué,en dernier ressort,la loi du pavillon « when the

evidence is so evenly balanced that a fair and just conclusion cannot otherwise

be reached »;19

S’il est prévu une clause compromissoire fixant le lieu d’arbitrage, sans autre

précision, ce choix traduira la volonté forte des parties de soumettre la charte

partie à la loi du for.

Ainsi la clause 17 de la charte Synacomex stipulant l’application de la loi française, pour la procédure comme pour le fond.20

« Sur la loi applicable, le Tribunal Arbitral a constaté que la clause 17 de la

charte-partie Synacomex renvoie expressément à la loi française, qu’il n’est pas

précisé que celle-ci ne s’appliquerait qu’à la procédure et que l’exigence de

l’article 3 § 1( Le contrat est régi par la loi choisie par les parties. Ce choix doit

être exprès ou résulter de façon certaine des dispositions du contrat ou des

circonstances de la cause. Par ce choix, les parties peuvent désigner la loi

applicable à la totalité ou à une partie seulement de leur contrat.) de la

Convention de Rome était ainsi satisfaite. »

Enfin, une clause valide sous un système de loi et invalide sous un autre est un

indice permettant de déterminer la loi applicable.21

18 Scrutton on charterparties and bills of lading, 18ème éd. Sweet & Maxwell 1974, page 11. 19 Idem ci-dessus, page 12

20 Camp sentence 1127 du 20 décembre 2005 ; extrait : 21 Idem ci-dessus, page12.

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16Quelques exemples synthétisés ci-dessous,(traduction libre) illustrent le

propos22.

Cas 1 : L’affréteur, anglais, affrète un navire français dans un port danois pour

un voyage Haïti- France ou Angleterre ; dans un port portugais, le capitaine fit

un emprunt à la grosse, engageant navire, fret et cargaison. Le propriétaire de

la marchandise, devant payer plus que l’emprunt, réclama des indemnités au

propriétaire du navire. Celui-ci lui abandonna navire et fret. Loi du pavillon

appliquée. (le délaissement étant une solution avantageuse en droit français).

Cas 2 : Un navire allemand, capitaine allemand, fut affrété par un allemand

pour un voyage de Russie vers l’Angleterre/P et B/L rédigés en anglais.

Solution : .La loi germanique doit régir ces contrats.

Cas 3 : Un affrètement fut conclu en Angleterre, en langue anglaise,

concernant un navire allemand, clause stipulant : « freight payable …per ton

delivered ».Le capitaine vendit la marchandise endommagée dans un port de

refuge. En droit germanique, le fret devait être payé intégralement,

contrairement au droit anglais.la Cour se détermina sur l’ intention des parties

d’établir un contrat anglais ; le fret ne fut pas payé.

Cas 4 : Une compagnie britannique fréta un navire anglais à un citoyen des

Etats-Unis pour transporter du bétail de Boston vers l’Angleterre. La Charte fut

conclue à Boston avec une clause exonérant le propriétaire des fautes de son

capitaine et de l’équipage. Une telle condition est contraire à l’ordre public dans

le Massachussetts, mais légale en droit anglais. La négligence du capitaine et

de l’équipage provoqua la perte du bétail En défense, la compagnie plaida

l’exonération de responsabilité. Solution : le droit applicable est la loi anglaise,

d’une façon générale au vu du pavillon, et notamment l’existence même d’une

telle clause démontrait l’intention des parties de s’y conformer. Décision

confirmée en appel.

22 : On Charter-parties Scutton p. 12. Lloyd v. Guibert (1865) L.R. 1 Q.B.115 The Express (1872) LR 3 A & E. 597 . The Industrie[1894] P 58 (CA). Re Missouri S.S.Co.(1889) 42 Ch.D.321.

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17 .

Validité

Alors que la loi 23portant statut des navires impose, à peine de nullité, que

soient constatés par écrit « les contrats d’affrètement à temps et contrats

d’affrètement coque-nue conclus et délégations de fret consenties pour une

durée de plus d’un an ou dont la prorogation peut aboutir à une pareille

durée »,on admet ,comme c’est la règle en matière commerciale, toutes formes

de preuves, telles qu’ échanges de courriers, fax, télex ainsi que, depuis juin

200524, le recours, en droit français, aux courriers électroniques « pour mettre à

disposition des conditions contractuelles ou des informations sur des biens ou

services ».

A fortiori, « les informations destinées à un professionnel peuvent lui être

adressées par courrier électronique dès lors qu’il a communiqué son adresse

électronique ».25 26

Ce n’est pas le principe retenu par la Cour de Cassation27, certes un an avant

les assouplissements évoqués ci-dessus, qui, sans remettre en cause

l’existence du contrat d’affrètement, a jugé « inopposable »à l’ayant-droit de

l’affréteur par le fréteur au voyage la C/P Gencon au motif que l’affréteur ne l’a

pas signée.

Il faut souligner que dans le cas de l’ espèce, l’affréteur était à la fois chargeur

et destinataire ; il est permis de penser que les magistrats ont accordé au

connaissement de charte-partie la qualité d’un connaissement ne pouvant plus

faire référence à la C/P et accordé à ce connaissement la qualité et la portée

prééminentes du contrat de transport signé par le capitaine(ou son agent) ,(bien

qu’il soit largement admis qu’un tel document ne circulant pas n’a que valeur

d’un reçu de marchandises), en se fondant sur l’unicité des personnalités,

23 N°67-5 du 03 janv.1967, art.10 al.2 24 C.com.,art. L.10-3 25 Ord.n°2005-674,16 juin 2005 ; C.civ., art.1369-1&3. 26 Lamy transport,tome2,éd.2008,chap.1049 & 1050,page486 27 Cass.com, 5 mai 2004, navire Hella,DMF 2005, obs .F.Arradon

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18chargeur-affréteur-destinataire pour établir le lien contractuel fréteur / affréteur,

ce qui conduit à l’application des règles strictes du contrat de transport au lieu

de règles contractuelles librement débattues.

Bien souvent, les parties s’accordent rapidement sur les grandes lignes du

contrat. En cas de relations suivies, elles font référence aux « conditions

habituelles ».

De nombreux points « de détail » restent à négocier. Si les choses trainent,

l’existence ou la validité du contrat peut être menacée. La Commercial Court a

réaffirmé, dans son jugement du 9 février 2004, que l’utilisation de l’idiome

« subject details » (ou « sub details »), dans une « recap » (un document

récapitulant les termes d’un contrat de vente ou d’affrètement de navire), a pour

effet de prévenir la conclusion définitive d’un contrat tant que les « details » ne

sont pas satisfaits ou levés.

Les parties peuvent ainsi librement négocier les termes principaux et

subsidiaires du contrat, qui ne sera définitivement conclu, que lorsque les

« details » seront satisfaits ou levés.

Il est donc souhaitable, au moment où les négociations ont abouti, d’incorporer

une mention « all subjects lifted » ou « all subjects agreed » dans la « recap »

finale d’un contrat d’affrètement de navire afin de minimiser les risques de

litiges relatifs à l’existence d’une convention liant les parties.28

Résolution

Les chartes parties contiennent souvent des clauses résolutoires dont les trois

plus fréquentes sont les suivantes :

• Défaut de paiement du fret

28 Thoresen & Co (Bangkok) Ltd v Fathom & Others [2004] EWHC 167 (Comm). « subject details »Alexandre Besnard, solicitor, Londres. Dmf 2005 n°655 01-2005

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19La charte Baltime 1939 dispose que le paiement du loyer sera fait d'avance

tous les trente jours et, qu’à défaut, l'armateur aura le droit de retirer le navire

du service des affréteurs, sans préavis et sans intervention judiciaire ou

quelque formalité que ce soit, et sans préjudice de toute réclamation que

l'armateur pourrait par ailleurs avoir à faire à l'affréteur en vertu de la charte.29

• L’absence du navire promis aux lieu et date prévus (« cancelling date »).

Seul l’affréteur peut l’invoquer, passé un délai raisonnable.

• Le chargement de marchandises illicites ou expressément interdites,

Y compris si le capitaine accepte un tel chargement, car le capitaine (non

partie à la C/P) n’a pas le pouvoir de modifier les clauses contractuelles.30

Sans qu’il soit nécessaire de le stipuler, l’inadéquation manifeste d’un navire

entraine la résolution de plein droit.31

La sentence arbitrale rendue le 5 novembre 1974 sous la présidence du doyen

Chauveau, précise :

(Extrait)

« L'armateur qui a frété son navire au voyage pour le transport d'une certaine

marchandise (ici du toluène) a l'obligation de fournir non pas un bâtiment

quelconque, mais un navire apte à effectuer le transport de la marchandise

envisagée et spécifiée à la charte-partie. Cette obligation étant de l'essence du

contrat, le fréteur ne peut, sans qu'il soit besoin d'un texte pour le préciser, ni

s'en exonérer, ni soutenir qu'il n'en est pas garant. Il en est particulièrement

ainsi aux termes des dispositions claires et précises du titre VI du Code

maritime grec…. Toutefois, si l'affréteur, dûment avisé par les services de

contrôle de l'inaptitude du navire au transport de la marchandise, ordonne

néanmoins de procéder au chargement, il accepte sciemment les risques de

l'opération et ne peut se plaindre de la détérioration de la marchandise

constatée à l'arrivée ».

29 Jurisclasseur Transport Fasc.1205 30 Chandris v.Isbrandtsen Moller, 1951 Handy book for shipowners and masters p.196. 31, dmf 1975,p.297.

Page 20: Litiges entre freteurs

20 La résolution d'une charte-partie exige de la part de celui qui l'invoque une

déclaration formelle, à défaut de quoi la charte reste en vigueur, tout

particulièrement quand des amendements ultérieurs y font une référence

explicite.32

La résolution doit être demandée en justice.

Toutefois, la Cour d’appel de Paris a retenu que l’affréteur au voyage n’avait

commis aucune faute en affrétant un navire de remplacement avant l’échéance

de la « cancelling date » sur le fondement de la clause « Lay/Can ».

Le fréteur avait été dans l’incapacité de fournir le navire initialement convenu et

n’avait proposé que tardivement un navire de remplacement, incapable de

surcroit de faire escale dans le port prévu.33

Enfin, la résolution, sauf en cas de force majeure,34 ne dispense pas le

contractant défaillant de réparer le préjudice subi par son cocontractant en

prenant, par exemple, en charge la compensation de différentiel de fret.35

• La force majeure

Lorsque la force majeure est invoquée, celle doit rendre définitive l’impossibilité

de poursuivre l’exécution du contrat36.

Ainsi la Chambre a jugé que l'état de siège ne constituait pas un événement

définitivement insurmontable et que rien ne prouvait que cette situation difficile 32 Camp,sentence n°213 du 8 juin 1977 ; dmf 1977 , p.626 . 33 Navire Santa Rita Dmf 1996n°564. 34 Décret 66-1078 du 31 Décembre 1966 art.12 « le contrat est résolu sans dommages-intérêts de part ni d'autre si, avant le départ du navire, survient une interdiction de commercer avec le pays pour lequel il est destiné ou tout autre événements de force majeure qui rend impossible l'exécution du voyage ». 35 Camp sentence n°899 du 26 novembre 1994 36Décret 66-1078 du 31 décembre 19966, art. 14 Si la force majeure retarde simplement la sortie du navire, le contrat doit être maintenu et le retard ne donne lieu à aucune indemnité. Si la force majeure arrive pendant le voyage, on ne peut pas considérer le contrat comme non avenu puisqu'il a reçu un début d'exécution. Dans ce cas le contrat est maintenu et il n'y a lieu à aucune augmentation du fret.

Néanmoins, si l'affréteur préfère rompre le voyage il peut décharger la marchandise à ses frais, mais il doit alors le fret entier (art. 14 in fine).

Page 21: Litiges entre freteurs

21avait rendu impossible l'exécution de la charte-partie ; il appartenait à l'armateur

seul de juger des inconvénients en résultant pour lui, et d'accepter ou de

refuser la résiliation proposée par l'affréteur. La résiliation unilatérale est donc

le fait de l'affréteur, qui doit indemniser l'armateur de ses conséquences. 37

Incidence du connaissement sur les relations fréteur – affréteur

Le connaissement matérialise la relation entre le fréteur et le porteur du

connaissement.

• S’il s’agit de l’affréteur, la charte-partie régit les relations fréteur-affréteur.

• S’il s’agit d’un tiers, les relations fréteur-affréteur restent sous l’égide de

la charte-partie et le connaissement, contrat de transport impératif,

s’impose aux relations fréteur (transporteur) et au porteur du

connaissement (destinataire)38, ceci en dépit de clauses de la charte

transférant la responsabilité de l’arrimage et la conservation de la

cargaison à l’affréteur.39

« Attendu que la S.E.I.M reproche à l’Arrêt , qui a laissé à l’Armement une

partie de la responsabilité de l’avarie, d’avoir, pour décider ainsi totalement

ignoré la clause 5 de la charte partie rendant les affréteurs responsables

des effets d’un mauvais arrimage et la « refrigorating clause » annexée à

la charte partie, alors que les premiers juges avaient fait état de ces

dispositions conventionnelles et licites pour exonérer la S.E.I.M de toute

responsabilité, que cette société avait repris leur argumentation dans les motifs

et le dispositif de ces conclusions et qu’il appartenait donc à la Cour, pour

justifier son infirmation du jugement, d’examiner et de réfuter cette

argumentation ;

37 Camp Sentence n°255 du 06 janvier 1978, dmf 1978, p.575 38 Loi du 18 juin 1966, art. 17 :” Titre II : Transport de marchandises Les dispositions du présent titre s’appliquent : 1° Entre tous les intéressés au transport, en l’absence de charte-partie ; 2° Dans les rapports du transporteur et des tiers porteurs, aux connaissements émis en exécution d’une charte-partie. 39 : C. Cass. Ch.civ.3, 23 Mars 1965 Ste Emeraude Industrielle et Maritime / Ste comptoir français de l’industrie des conserves alimentaires

Page 22: Litiges entre freteurs

22Mais, attendu que l’Arrêt constate que le thon congelé, chargé par COFICA, a

été transporté de Dakar à Bordeaux, suivant connaissement intervenu

directement entre la société COFICA et la société S.E.I.M, que la demande

d’indemnisation de la société COFICA est fondée sur un rapport d’expertise

amiable dressé par deux experts choisis d’un commun accord par les deux

sociétés précitées…et que DELHOMMES ,affréteur du navire, est demeuré

étranger au connaissement et à l’expertise amiable… »

Nota : Le fréteur tentera souvent d’opposer les clauses de la C/P au porteur du

connaissement en y incorporant des références, renvois, etc. Il existe une

jurisprudence anglaise et française abondante 40 .Dans le cas, normal, de

l’inopposabilité, les relations fréteur- affréteur s’exerceront dans le cadre d’une

action récursoire.

En revanche, il a été jugé que l'affréteur qui a délivré des connaissements sous

son seul en-tête a la qualité de transporteur41.

Si les connaissements, bien qu’il y soit mentionné l’existence d’une charte-

partie, sont délivrés sans en-tête, la jurisprudence Vomar s’applique42.

Dans le cas de l’espèce, la Cour d’Aix en Provence réaffirme le principe selon

lequel « la seule mention sur les connaissements de l’existence d’une charte-

partie, sans que soit désigné le transporteur réel, ne saurait autoriser l’armateur

à invoquer une connaissance par les chargeurs de son identité ».

Incidence du connaissement sur le calcul du fret

Sur quelles bases l’assiette du fret sera t’elle établie ?

40 Voir en ce sens art. du Pr.Y. Tassel »De la clause fio ou bord-à-bord et du destinataire tiers à la charte-partie », dmf 2007 n°684 09-2007 41 (T. com. Marseille 22 févr. 1972 : DMF 1972, 731).

42C. Aix-en-Provence (2e Ch.), 26 juin 2006, navire Fortune Bay . DMF HS no 11, juin 2007, no 82.

Voir : Y. Tassel, Le connaissement de charte-partie sans en-tête, DMF 1987. 547.

Page 23: Litiges entre freteurs

23Les mentions de poids et quantité portées au connaissement peuvent t’elles

être prises en compte si elles sont différentes de celles figurant sur la C/P ?

Il faudra, dans chaque cas, se référer aux clauses de la charte.

Ports sûrs, quais sûrs Définition

Désignent toutes les zones ou le navire est susceptible de réaliser, en toute

sécurité, ses opérations commerciales et son avitaillement : amarrage à quai ou

au large sur coffres, mouillage en rade, etc.

La notion peut prêter à confusion : on devrait parler de « navire en sécurité

dans un port » car un même port peut, le même jour, être sûr pour un navire et

non sûr pour un autre43. De même, le quai d’une darse peut être sûr, et non

celui d’en face.

Lord Justice Seller, en a donné une définition aujourd’hui encore la plus

partagée :

« The safety of the port should be viewed in respect of a vessel properly

manned and equipped,and navigated and handled without negligence and in

accordance with good seamanship »

Très proches, les termes de l’arrêt rendu dans le procès concernant le navire

Eastern City” fait également autorité :

« A port will not be safe, unless, in the relevant period of time, the particular

ship can reach it, use it and return from it without, in the absence of some

abnormal occurrence, being exposed to danger which cannot be avoided by

good navigation and seamanship”.

Qui garantit le caractère sûr du port ?

Contrairement à l’affrètement à temps, le fréteur au voyage conserve la

direction nautique de l’expédition; il est réputé connaître les difficultés de 43 Leeds Shipping Co. V. Bunge, 1958.Handy book for shipowners and masters, by H.Holman,16ème éd. M.R HOLMAN.,1964.,pages 183 à 185.

Page 24: Litiges entre freteurs

24navigation à l’approche et dans les ports qu’il a contractuellement accepté de

desservir.

C’est pourquoi l’affréteur garantit souvent, via les clauses générales des C/P,

uniquement les ports non encore désignés. Ainsi, en l’absence de clause

particulière, le fait, pour l’affréteur, de désigner, sans autre précision, les ports

de chargement et/ou déchargement l’exonère de toute garantie.44

L’expression « safe port Rouen »suppose que le fréteur ait une connaissance

précise de toutes les conditions d’accès, notamment courants et marées. Le

chargement terminé, le temps d’attente d’une marée favorable sera à la charge

du fréteur.

La sécurité nautique (phares opérationnels, alignements, chenal correctement

sondé et balisé45, zones d’évitage appropriées, défenses de quai, bittes

d’amarrages suffisantes, etc.) ne suffit pas, à elle seule, à qualifier un port sûr.

Le juge du fond ou l’arbitre appréciera la présence, même à distance

raisonnable (par exemple Le Havre –Antifer) de remorqueurs portuaires, en

nombre et puissance suffisants, disponibles, l’existence et la qualité d’aides à la

navigation, d’informations nautiques et météorologiques.46

:”En émettant un bulletin météorologique approprié dont la qualité n’est pas

contestée et en mettant en œuvre les moyens d’urgence nécessaires à toute

demande de mise en sécurité d’un navire, les autorités portuaires ont assuré la

sécurité du séjour des navires dans le coup de vent survenu le 31 décembre

2000 ( mise en alerte de six remorqueurs et de deux pilotes) .Par ailleurs,

aucun autre navire présent dans le port de Skikda le 31 décembre n’a subi de

dommages ni même signalé une situation mettant en péril sa sécurité ».

Le port doit être sûr dès la conclusion du contrat, pendant le voyage aller,

durant l’escale et jusqu’à l’éloignement du navire.

Physiquement sûr, le port doit aussi l’être politiquement47.

44 Camp sentence 1099 du 25 juin 2004 45 A contrario l’absence de balisage d’un haut fond situé dans le chenal de sortie de port a contribué a qualifier un port « non sur ». Sentence camp1099 du 25 juin 2004. 46Sentence 1088 du 11 Aout 2003. 47 Ogden v. Graham (1861)

Page 25: Litiges entre freteurs

25 Traduction libre : Un navire fut affrété pour se rendre, chargé, « to a safe port in

Chile (with leave to call at Valparaiso) ». A Valparaiso, il reçu l’ordre de se

rendre à Carrisal Bajo, lequel se trouvait fermé sur ordre des autorités

chiliennes pour cause d’émeute. Les affréteurs ignoraient ce fait au moment de

la conclusion de la C/P. Ce port était naturellement sur, mais tout navire qui y

déchargeait sans autorisation risquait la saisie. Le navire attendit à Valparaiso,

38 jours durant, l’autorisation de décharger. Le navire assigna l’affréteur pour

détention. Solution/ Carrisal Bajo fut déclaré non sûr et les propriétaires furent

indemnisés pour rupture du contrat.

A également été jugé raisonnable le déroutement d’un navire vers un port

autre que celui initialement prévu pour le déchargement en raison d’une

situation devenue notoirement insurrectionnelle, compte tenu de manifestations

violentes et de grèves menaçant le pouvoir en place dans le premier port . 48

Ses accès, ‘au sens large, y compris la route suivie pour l’atteindre, doivent être

sûrs.49 &50

Il existe donc une infinité de conditions, propres à chaque cas, pour qu’un port

soit réputé sûr.

En cas de protestation, la preuve de l’insécurité doit être rapportée51

Depuis le 1er juillet 2004, date d’entrée en vigueur du code ISPS, de nouvelles

adaptations contractuelles sont nécessaires pour déterminer, d’une part,

l’incidence et la répercussion financières de ces nouvelles dispositions, d’autre

part du caractère sûr du port en fonction du niveau atteint52

48 Société maritime Delmas Vieljeux/Société Cie Groupe Concorde et autres. Bulletin des transports et de la logistique, n°2698,17Mars 1997,p.227. 49 Palace Co. v. Gans line,1916 risque de torpillage en temps de guerre 50Grace v. General steam Navigation Co., 1950 “if there is a serious danger of the vessel being damaged by ice en route to the port.” 51 Sentence camp 1088 du 11 aout 2003. 52Voir article »les clauses de sûreté maritime dans les chartes parties, auteur Phlilippe Boisson, La Gazette de la Chambre, n°6. Voir également sur site Web http://www.nepia.com/risk/publications/newsletters/pdf/Signals54.pdf l’article « cracking the code » revue en ligne Signal, page 5, auteur Phil Anderson

Page 26: Litiges entre freteurs

26Choix du quai Le poste précis de chargement ou déchargement est rarement défini dans la

charte. Sous réserve qu’il soit sûr et prévu pour ce type d’opérations, le

capitaine doit se soumettre aux instructions de l’affréteur. Par contre, une fois

ce poste désigné, il devra supporter les frais de déhalage s’il veut

ultérieurement en changer.53

Traduction libre : le vapeur Novington fut affrété pour acheminer une cargaison

de mais de Durban à destination de Liverpool. A son arrivée, le fréteur informa

l’autorité portuaire de la nature de la cargaison et un poste de déchargement lui

fut attribué dans la darse Langton. L’agent de l’affréteur et la majorité des

intérêts cargaison sollicitèrent de décharger dans la darse East Waterloo. Ordre

fut donné au fréteur de faire mouvement, mais le navire acheva son

déchargement au quai initial.

Le fréteur soutint qu’il est d’usage dans ce port que les autorités portuaires

désignent un poste en accord avec les représentants du fréteur. Solution :

l’usage invoqué n’a pas été établi ; le choix du poste incombait aux intérêts

cargaison et affréteurs.

Le navire, objet du contrat Il appartient à l’affréteur, éventuellement assisté d’un courtier en affrètement54,

de choisir un navire parfaitement adapté au voyage prévu. L’âge, la

classification et l’état du navire auront une incidence sur le taux de fret, mais

aussi sur la qualité des performances auxquelles il peut prétendre.55

Le courtier est responsable de ses fautes conformément au droit commun; ainsi

constitue une faute le choix d’un navire ne correspondant pas au transport

envisagé en raison de la configuration des cales.56

53 Handy book for shipowners and masters, déjà cité, p.192 Ireland & Sns v. Southdown S.S Co., Ltd. (1928). 54 On peut lire le statut et les obligations du courtier sur le site : www.french-shipbrokers.org/55 Camp sentence n°1075 du 13 décembre 2002. 56 Com .20 janv.1987, n°84-17.738, dmf 1988, p.182.

Page 27: Litiges entre freteurs

27En revanche, bien qu’il soit fait obligation au courtier de « se tenir, pour autant

que possible, documenté sur la moralité et la solvabilité des parties qu'il met en

rapport et de les renseigner respectivement, avec la discrétion voulue sur la

crédibilité de leur cocontractant. »57, la Cour de Paris a jugé « qu’ un armateur,

victime d’un affréteur insolvable n’était pas fondé à agir en responsabilité contre

le courtier ayant négocié l’affrètement de son navire, au motif que le

renseignement favorable donné par ledit courtier sur la fiabilité de l’affréteur ait

été déterminant pour son engagement alors qu’il avait exprimé lui-même ses

doutes sur la solvabilité de cet affréteur et sur sa capacité à obtenir la cargaison

prévue en exigeant des garanties pour le paiement de son fret et de dix jours de

surestaries au port de charge ».58

Navigabilité et aptitude commerciale. Tout navire, affrété ou non, doit être, du point de vue de la sauvegarde de la vie

humaine, « apte au service auquel il est destiné »59

Nous n’évoquerons donc que les incidences contractuelles découlant d’un

défaut de navigabilité

Pour sa part, Le fréteur « s’oblige à présenter à la date et au lieu convenus et

à maintenir pendant la durée du contrat le navire désigné en bon état de

navigabilité, armé et équipé convenablement pour accomplir les opérations

prévues à la charte-partie. »60.

Cette obligation fondamentale est sans commune mesure avec celle édictée

par la loi du 18 juin 1966(Titre II, art.21).61

57 Art.5 des obligations professionnelles des courtiers adhérant à la chambre syndicale des courtiers d’affrètement maritime et de vente de navires de France. 58 Paris, 30 juin 1989, dmf 1990,p.480. 59 Conv.int. de 1974 pour la sauvegarde de la vie humaine en mer (convention Solas) , art.1er,al.2 60 Décret66-1078 du 31 décembre 1966, art.19 « Nonobstant toute disposition contraire, le transporteur sera tenu, avant et au début du voyage, de faire diligence pour : a) Mettre le navire en état de navigabilité, compte tenu du voyage qu’il doit effectuer et des marchandises qu’il doit transporter ; b) Convenablement armer, équiper et approvisionner le navire ; c) Approprier et mettre en bon état toutes parties du navire où les marchandises doivent être

Page 28: Litiges entre freteurs

28

Dans l’affrètement au voyage, l’obligation de résultat permanente se substitue

donc à l’obligation de moyen (diligence) imposée « avant et au début » du

contrat de transport62.

L’innavigabilité ne concerne pas uniquement la coque et les équipements

principaux ;

Dans l’affaire suivante, l’état du navire (par ailleurs voué à la casse) et les

manquements du fréteur fournissent un très bel exemple.63

extraits : « les nombreux manquements du fréteur aux obligations de la charte-

partie (navire non mis en état pour le bon déroulement de l’expédition,

nombreuses avaries avant et pendant le voyage, incompétence du Capitaine,

carences des services de l’armement dans l’opération du navire, impossibilité

de tenir la vitesse décrite causant un retard ayant aggravé la situation, non-

respect du code ISM), et, d’autre part, la responsabilité pleine et entière du

navire, de son Capitaine et du fréteur quant à la cause des avaries à la

cargaison résidant dans l’incapacité à tenir la température contractuelle requise

pour le transport, les arbitres déclarèrent le navire innavigable au départ du

voyage, et, au cours du voyage, le fréteur et le Capitaine furent reconnus

défaillants dans leurs obligations liées au transport, à la garde et aux soins à la

cargaison. »

Le soin apporté à l’armement du navire pour réaliser le voyage promis est d’une

exigence absolue ;

Le fréteur est tenu de déterminer, avant le voyage, ses prévisions de soutage ;

Un navire quittant un port avec des soutes ne lui permettant pas de rallier le

prochain port de soutage prévu sera déclaré innavigable, même s’il existe sur

sa route un port où il peut souter.

L’exemple suivant illustre ce degré d’exigence (traduction libre)

Le « Patapsco » fut affrété pour un voyage aller et retour Liverpool-Rivière plate

chargées ». 62 voir en ce sens P. Bonassies-Chr.Scapel Traité de droit maritime (déjà cité) chap. 765 p.496 et suiv.

63 Camp sentence arbitrale 1125 du 24 décembre 2005.

Page 29: Litiges entre freteurs

29(Canada, près de Tadoussac).Les soutes étaient à la charge de l’affréteur et il

ne faisait aucun doute pour chacune des parties que le navire

s’approvisionnerait en charbon dans les différents ports qu’il était amené à

desservir au cours de son voyage. La charte prévoyait l’exonération des

responsabilités de chacune des parties, sauf le cas d’innavigabilité. Le navire

appareilla de la Rivière Plate pour St. Vincent, mais, en raison d’une erreur de

calcul du chef mécanicien, les existants de charbon s’avéraient insuffisants

pour rallier St. Vincent, l’obligeant à ravitailler à Pernambuco.

Les affréteurs réclamèrent réparation au fréteur pour violation des dispositions

contractuelles et le paiement des dépenses supplémentaires qu’ils avaient

engagées.

La Chambre des Lords jugea, en dernier ressort, que le « Patapsco » était

sous-armé lorsqu’il appareilla de Rivière Plate, cette responsabilité incombant

au fréteur qui devait s’assurer de l’approvisionnement suffisant pour assurer

chaque traversée, malgré l’obligation des affréteurs de fournir et payer le

combustible64

L’arrimage ayant une influence directe sur le comportement du navire à la mer,

la question se pose souvent de savoir si un mauvais arrimage rend le navire

innavigable.

On considère qu’un mauvais arrimage qui compromet la sécurité du navire rend

celui-ci innavigable

(Traduction libre) Trois blindés pesant chacun 18 tonnes environ furent

embarqués à Hull sur le navire des défendeurs et furent arrimés sous la

responsabilité des défendeurs au dessus d’un lot de rails de chemin de fer puis

saisis sur des sabots de bois.

Dans le mauvais temps, l’un des blindés se désarrima et traversa le bordé,

provoquant le naufrage du navire.

Le navire fut déclaré en état d’innavigabilité dès son départ d’Hull.65

64 Mc Iver &Co., Ltd v. Tate steamers Ltd. (1903) Handy book for shipowners and masters p.151 65 Kopitoff v. Wilson (1876) ) Handy book for shipowners and masters p.154

Page 30: Litiges entre freteurs

30

Son aptitude commerciale revêt également une obligation de résultat.

Le port en lourd (deadweight) comprend le port en marchandises (peu usité)

ainsi que les soutes, eau douce, eaux alimentaires des chaudières ; les

équipements de rechange (ancre, hélice..), outillage, etc. sont comptabilisés

dans le Poids lège (lightweight).

Afin de ne pas obérer la capacité commerciale du navire, seules les quantités

raisonnablement nécessaires doivent se trouver à bord66.

Sauf à prouver l’existence d’un dysfonctionnement, le fréteur sera responsable

d’une altération des marchandises résultant du fonctionnement normal des

éléments du navire.67

Enfin, soulignons l’application, obligatoire depuis 2002, des contraintes du code

« ISM » concernant l’organisation de la sécurité à bord et, élément novateur,

l’obligation formelle imposée à « la compagnie » (propriétaire, armateur,

affréteur coque-nue) de mettre en œuvre et d’appliquer à la lettre la gestion de

tous les risques et les moyens pour les résoudre.

Un manquement grave constaté à terre pourra, à notre avis, conduire à

l’innavigabilité du navire.

Citons le Cdt. Georges Figuière, expert reconnu:68

A propos du chimiquier « Torpido », navire bien entretenu et sérieusement

armé, victime d’un échouement dans le détroit de Magellan suite à une

succession d’erreurs humaines :

66 Darling v. Raeburn (1907). 67 Camp sentence n°1037 du 22 juin 2000( échauffement d’une partie de la cargaison de riz en vrac dû au réchauffage des soutes à combustible) 68 Cours du Cdt G.Figuière : »Le code ISM et la notion de navigabilité »

Page 31: Litiges entre freteurs

31

« A l’étude de ce cas, on ne peut que conclure, que dès lors que l’erreur

humaine est inévitable et que la perfection reste un rêve, les tribunaux jugent

avec sagesse que dans la mesure ou l’armement apporte la preuve de sa

diligence pour la mise du navire en état de navigabilité, de son maintien en cet

état, du soin qu’il apporte au choix de ses capitaines et des principaux de

l’équipage, du respect tant de la lettre que de l’esprit du code ISM, une erreur

humaine ne saurait empêcher l’armateur, le transporteur de limiter sa

responsabilité ».

L’inverse est tout aussi vrai.

La clause standard Bimco stipule :

:” From the date of coming into force of the International Safety Management

(ISM) Code in relation to the Vessel and thereafter during the currency of this

Charterparty, the Owners shall procure that both the Vessel and "the Company"

(as defined by the ISM Code) shall comply with the requirements of the ISM

Code. Upon request the Owners shall provide a copy of the relevant Document

of Compliance (DOC) and Safety Management Certificate (SMC) to the

Charterers”.

Erreur sur la capacité d’emport L’erreur doit être suffisamment conséquente pour autoriser l’affréteur à résilier

la Charte –partie. C’est au cas par cas.

Une réduction de la capacité d’emport peut résulter de clauses imprécises :

Les armateurs du Norway garantissaient 3000 tonnes pour un tirant d’eau

maximal de 26 pieds. Il était prévu, dès la conclusion de la charte, que le

chargement aurait lieu en rivière ; en conséquence, la garantie s’appliquait

aussi bien en eau douce qu’en eau de mer.69

69 The Norway (1865), Handy book for shipowners anr masters p.351.

Page 32: Litiges entre freteurs

32Les contraintes liées au ballastage, nécessaire à la stabilité et à la navigabilité,

sont de la responsabilité du capitaine. Une partie de la marchandise chargée

pourra faire office de ballast sans toutefois pouvoir diminuer la capacité

contractuelle d’emport du navire ni conduire à décharger dans un port

intermédiaire70.

Ce point avait toute son importance à l’époque ou la stabilité était assurée soit

par du ballast solide (gueuses de béton, lingots de fonte) soit par une partie de

la marchandise. Les soutes et l’eau de mer ballastée assurent actuellement les

tirants d’eau et la stabilité appropriés, mais les navires seront-ils indéfiniment

autorisés à ballaster et déballaster n’importe où et n’importe quand ?

Mise à la disposition “Le fréteur au voyage doit mettre à la disposition de l’affréteur, au lieu et en

temps convenus par la charte-partie, le navire prévu, en bon état de navigabilité,

prêt en tous points à exécuter le voyage »71

Il ne faut néanmoins pas négliger l’importance des usages du port .Ainsi la Cour

d’appel de Paris a jugé que les règles et usages du port de Rouen, que le

fréteur ne peut ignorer, consistant notamment à organiser la mise à quai des

navires suivant l’ ordre d’arrivée, s’imposait sur une clause »Free in custom of

port quai fournisseur/liner out » de surcroit complétée d’ une garantie écrite de

l’affréteur promettant le quai disponible à l’arrivée du navire, alors même qu’il

s’agit d’un quai privé.72

Chronologiquement, cette obligation est prioritaire sur l’obligation qu’a l’affréteur

de présenter la marchandise73.

70 Towse v.Henderson (1850). 71 Camp sentence n°530 du 5 mai 1985 dmf 1985, p.114 72 C.Cass. (ch. com.) – 9 MAI 2007 – Navire Trade Swan - no 06-12644 Sté BOCS GmbH c/ Sté SUCRIMEX, commentaires Mtre M ;N. Raynaud.dmf 2007 n°685 10-2007 et Pr Y. Tassel dmf 2006 n°669 04-2006 73 Camp sentence n°1098 du 27 mai 2004.dmf 2004. 1040

Page 33: Litiges entre freteurs

33Voir, toutefois, le cas du navire Aello, House of Lords qui, bien que jugé « non

arrivé », a été dédommagé pour l’absence de marchandise prête à être

chargée.74

Le bon état de navigabilité, rappelons-le, est fondamental ; c’est une obligation

de résultat ; la diligence du fréteur ne suffit pas.75

L’inexécution d’une de ces deux obligations autorise l’affréteur à résilier

unilatéralement la C/P, sans préjudice de dommages-intérêts dûment

justifiés76&77, par exemple le paiement par le fréteur du surcoût résultant de

l’affrètement d’un autre navire à un taux de fret supérieur.78

Si l’innavigabilité résulte de la vétusté ou de multiples avaries techniques,

l’affréteur prudent aura tout intérêt à exercer sans délai cette faculté;

l’innavigabilité découverte après le chargement rend la solution plus délicate :

en cas de poursuite du voyage, il devra démontrer le lien de causalité entre

l’inexécution fautive du fréteur et les préjudices allégués79.

L’heure limite prévue par la « cancelling clause »est impérative ; le délai de

grâce, possible, est court 80(généralement 15 mn.).

Bien souvent, le fréteur est contraint de proposer une nouvelle date, acceptée

par l’affréteur en contrepartie de la prise en charge des surcoûts et préjudice

en résultant.81

Comme dans tout contrat, bonne foi et sincérité sont de mise.

Ainsi le fréteur qui cache sciemment son impossibilité manifeste de présenter

son navire avant la « cancelling date » verra la C/P valablement résiliée à

l’initiative de l’affréteur, et cela avant même la date limite. 82

74 Navire Aello Hand book for shipowners and Masters, 16ème éd. 1964p.196. 75 Idem ci dessus 76 Idem ci-dessus 77 Camp sentence n°968 du 6 juin 1997 78 Camp sentence n°1023 du 22 décembre 1999 79 Voir supra 33 80 Idem ci dessus 81 Camp sentence n°1024 du 20 décembre 1999 82 Camp sentence n°899 du 26 novembre 1994, dmf 1995,p.647.

Page 34: Litiges entre freteurs

34Dans cette espèce, les arbitres ont souligné que « le fréteur, en parfaite

connaissance de la position de son navire dans le temps, avait communiqué à

l’affréteur, jour après jour, des prévisions qui ne pouvaient pas être réalisées,

qu’il lui avait donné des informations qui, dans les faits, se sont révélées

inexactes et que, par ailleurs, il n’avait jamais justifié des prétendues

circonstances imprévues, qu’il avait évoquées ». Ils ont ajouté : « il est

manifeste que cette attitude, probablement due à la crainte de perdre

l’affrètement, relève de la « mispresentation ».

Le paiement du fret L’affrètement au voyage est un contrat de louage de services à titre onéreux. Il

s’exécute donc en contrepartie du paiement du fret.

Logiquement, le fréteur est en droit de percevoir l’intégralité du fret convenu dès

lors qu’il s’est acquitté de toutes ses obligations.

Toutefois, soucieux de ne pas avoir à supporter tous les périls de la mer et

autres aléas du transport maritime, les fréteurs, par le passé, prévoyaient « un

fret acquis à tout évènement ».

L’aventure maritime est aujourd’hui moins périlleuse, mais la tradition demeure.

Détermination du fret

On applique généralement un taux à l’unité choisie83, masse ou volume,

fonction de la quantité convenue à la conclusion de la C/P ou réellement

chargée ou déchargée, ou tout autre calcul aux libre choix des parties.

Il peut aussi être forfaitaire « lumpsum freight », donc indépendant de la

quantité réellement chargée84

83 D.66-1078, art.5 84 Trib .com. de la Seine, 15 janvier 1960, dmf 1960, p. 363

Page 35: Litiges entre freteurs

35

Non-paiement du fret.

En droit français, le fréteur jouit d’un « privilège sur la marchandise pour le

paiement de son fret »85.Il ne peut toutefois la garder à bord86, mais doit la faire

saisir à terre en main tierce.

Seule une décision de justice peut l’autoriser à procéder à la vente.

C’est ce qu’a rappelé la Chambre arbitrale à l’armateur qui, prétextant avoir

subi des dommages (attentes et surestaries) a vendu la cargaison, sans

pouvoir justifier d’une quelconque décision de justice, dans le port de Mombasa,

au mépris de son engagement de se rendre à Tamatave pour y délivrer la

marchandise87.

Le fréteur à temps, en raison de la défaillance de son cocontractant, l’affréteur à

temps, peut-il user d’un droit de rétention d’une marchandise embarquée dans

le cadre d’un affrètement au voyage ?

Cette clause de rétention liant le fréteur à temps à l’affréteur à temps, lui-même

fréteur au voyage est inopposable à l’affréteur au voyage88.

Une autre voie, en droit français, est d’agir, comme le souligne le Pr. A.

Vialard89, en action directe sur le fondement de l’art. 14 de la loi du 18 juin

1966.90

85 Art.2 de la Loi du 18 juin 1966 86 Sentence arbitrale du 31 janvier 1997, n°958, JMM 1997,p.2047. 87 Camp sentence 1132(second degré) du 3 octobre 2006. 88 Navire Symplea,, Ch. Com. Du 18 mars 2003. dmf 2005 n°9 sup. 89 Dmf 2005 n°9 sup. 90 Art. 14 Loi du 18 juin 1966 : « Le fréteur, dans la mesure de ce qui lui est dû par l’affréteur, peut agir contre le sous-affréteur en paiement du fret encore dû par celui-ci ».

Page 36: Litiges entre freteurs

36

Arrivée du navire Le capitaine déclare le navire « arrivé » et prêt à charger en émettant la

« notice of readineess », oralement (VHF) ou par écrit (mail, télex, lettre remise

en main propre…).

La première contestation porte sur la validité de la « notice of readiness », c’est

à dire l’instant précis ou le capitaine notifie à l’affréteur la mise à disposition de

son navire.

Sauf dispositions contractuelles contraires, telles que les clauses « whether in

port or not, wibon, wifpon, wechon ou wwww 91 », et si la zone prévue pour les

opérations commerciales est libre, la « notice of readiness » est réputée valide

une fois le navire à quai (ou au mouillage)92.

Obligation de charger

C’est, avec le paiement du fret, la deuxième obligation fondamentale de

l’affréteur. Elle est « absolue et non délégable »93

Nous citerons Lord Selborne94 : « It would appear to me to be unreasonable to

suppose that the shipowner has contracted that his ship may be detained for an

unlimited time on accounts of impediments, whatever their nature may be , to

those things whith which he has nothing whatever to do, which precede the

operation of loading and which belong to that which is exclusevely the

charterer’s business ».

91 Voir en annexe glossaire des acronymes utilisés dans l’affrètement 92 Camp sentence 1054 du 22 octobre 2001 93 Pr. P.Bonassies, Traité de droit maritime Pierre Bonassies Christian Scapel 2006 L.G.D.J.,page512 94 Grant v. Coverdale 1884

Page 37: Litiges entre freteurs

37L’acheminent de la cargaison est impérative. Si le navire n’est pas autorisé à

accoster en raison de l’absence de tout ou partie de la cargaison, l’affréteur

sera responsable des dommages résultant du délai supplémentaire95.

La résiliation de la C/P par l’affréteur, du fait de la non-exécution d’un contrat

de vente est une résiliation fautive ,96le cas de force majeure invoqué n’étant

pas retenu.

Plus sévère encore a été la sanction infligée à l’affréteur qui, en raison d’une

interdiction d’exporter du tournesol imposée par le gouvernement, n’a pu

assumer son obligation de charger.97,98

Par contre, l’interdiction de charger à destination d’un port précis (embargo)

libère l’affréteur de son obligation99.

Un navire est affrété pour embarquer du bétail dans un port anglais; bien que

l’embarquement d’un tel cheptel ne fût pas interdit, son acheminement vers ce

port l’était par ordre du Conseil. Les affréteurs furent responsables du délai

consécutif.

Si, à la mise à disposition du navire, l’affréteur constate une défaillance

entrainant l’innavigabilité, il peut refuser d’entreprendre le chargement jusqu’à

la remise en état du navire, sans préjudice d’une action en réparation pour les

dommages consécutifs au retard.

Il ne pourra cependant pas résilier la charte, sauf à démontrer que le délai

nécessaire à la remise en état, eu égard à la nature de la marchandise prévue

(marchandise à caractère saisonnier, denrées périssables, etc..), est

déraisonnable.

D’une façon générale et sauf stipulations contraires, l’affréteur ne sera pas

dispensé de son obligation en cas de grève, faillite du vendeur ou de l’acheteur,

inexistence de la marchandise100

95 The Aello[1961]A.C. 135 applying Ardant Sco. V. Weir 96 Australia Federal Court (Queensland District) (11 October 2006), Hyundai Merchant Marine Co Ltd v Dartbrook Coal(Sales) Pty Ltd - ([2006] FCA 1324) - Australian Federal Court Website - at <http://www.fedcourt.gov.au>.97 Camp sentence 79 du 13 mars 1972 98Scrutton on charters parties, page 150 exemple 1 Adams v. Royalmail Steam Co.(1858): 99 Ralli v.compania Naviera Sola, 1920 Handy book for masters and shipowners p.197 100 Scrutton on charters parties, page 150 exemple 2 (Fenwick v. Schmalz (1868).

Page 38: Litiges entre freteurs

38Un navire fut affrété pour charger du charbon »in regular and customary turn,

except in case of riots, strikes, or others accidents beyond charterer’s contol

delaying or preventing loading ». Une tempête de neige retarda l’acheminement

de la cargaison .Les affréteurs furent déclarés responsables.

Mais c’est encore le cas suivant qui illustre le mieux la portée de cette

obligation101

(Traduction libre).

Le navire Aello fut affrété sous C/P Centrocon (port charter) pour charger du

grain dans un port de la rivière Panama et compléter à Buenos Aires. En raison

d’une restriction sur les exportations de grain en 1954 au départ de

l’Argentine,et compte tenu de la présence de nombreux navires affrétés pour

ce type de transport, les autorités portuaires avaient instauré un tour d’attente,

interdisant aux navires d’accoster immédiatement , lesquels devaient aller

mouiller dans une zone située à 22 milles des darses, en attente de leur tour.

Pour accoster, la marchandise devait être prête à être chargée et accompagnée

d’un certificat délivré par le Bureau des Grains.

Le 12 octobre 1954, l’Aello se présenta et ne put accoster que le 29 octobre,

pour charger.

Les armateurs réclamèrent :

Soit des surestaries au motif que l’aire de mouillage se situait à l’intérieur de la

zone commerciale de Buenos Aires et que la planche courrait dès l’arrivée du

navire au mouillage.

Soit des indemnités au motif que, si le navire n’est pas « arrivé », il doit

néanmoins être considéré comme tel en raison de l’indisponibilité de la

cargaison.

La Chambre des Lords jugea la zone d’attente en dehors des limites

commerciales du port, mais jugèrent les affréteurs en violation de leur obligation

absolue de fournir la marchandise à l’heure et permettre ainsi au navire d’être

un navire arrivé.

Les affréteurs furent donc condamnés à indemniser le fréteur.

101 Navire Aello (1961) Handy book for masters and shipowners 16ème éd. 1964 p. 196

Page 39: Litiges entre freteurs

39

De son coté, le fréteur, s’il n’ignore pas les difficultés ou l’impossibilité

d’approvisionnement, doit néanmoins présenter le navire s’il veut prétendre au

paiement du fret. 102

De la même façon, si l’affréteur refuse ou se trouve dans l’incapacité de charger,

le fréteur n’a pas intérêt d’attendre la fin de la planche pour dénoncer la charte

pour refus de charger, faute de quoi il laisse à l’affréteur l’initiative de charger

quand bon lui semble, avant l’expiration des staries.

Si, pendant cette attente, un événement rend l’exécution du contrat impossible

avant l’expiration du temps de planche, l’affréteur sera libéré de ses

obligations.103

Exemple (traduction libre) : Un navire anglais fut affrété pour se rendre au port

X et y charger une cargaison en 45 jours. Le navire était près à charger le 9

Mars. Du 1er Mars au 1er Avril, l’affréteur a maintes fois confirmé son refus de

charger, mais le capitaine maintint son navire à quai, paré à charger. Le 1er

Avril, avant la date butoir du temps de planche, la guerre éclata entre

l’Angleterre et la Russie. Le capitaine fit appareiller le 22 Avril.

Il fut jugé que le capitaine, n’ayant jamais accepté le refus de charger, l’affréteur

disposait de tout le temps de planche pour satisfaire à ses obligations ;

l’affréteur fut déchargé de ses obligations, l’impossibilité de les exécuter étant

intervenue avant la fin des staries.104

Le refus de charger sera considéré définitif si le fréteur l’accepte expressément.

La marchandise doit correspondre à ce qui a été convenu.

Pour toute quantité supérieure ou qualité différente (mais raisonnablement

proche), le fréteur pourra exiger un taux de fret supérieur, fonction des

conditions du marché105.

102 Camp sentence n°858 du 7 décembre 1992 103 Scrutton on charter-parties p.157 104 Reid v. Hoskins (1856) 6 E.& B. 953. scrutton on charter-parties p.157 105 Steven v. Bromley[1919] 2 K.B. 722. Chandris v. Isbrandtsen- Moller [1951] 1 K.B. 24

Page 40: Litiges entre freteurs

40Beaucoup plus contraignante est la clause « full and complete cargo » ; Elle

impose à l’affréteur de charger autant de marchandises que le navire peut

emporter, c’est à dire au delà de la quantité minimale convenue.106

Les deux exemples suivants montrent combien il est malaisé de déterminer à

qui incombe le choix de la quantité :

Cas 1 : Les affréteurs avaient convenu de charger « a cargo of beans, not less

than 6500 tons, but not exceeding 7000tons… ».Les affréteurs soutenaient

avoir entièrement satisfait à leur obligation en chargeant tout tonnage compris

entre 6500 et 7000 tonnes.

Les armateurs obtinrent gain de cause en exigeant que soient chargées 7000

tonnes dès lors que le navire pouvait les embarquer.107

Cas2 : La charte partie incluait la clause stipulée ci-avant. Arrivé au port de

chargement, le capitaine notifia aux affréteurs la disposition suivante : »la

quantité « approximative » de marchandises en cale sera de…au total 10400

tonnes ».Les affréteurs mirent cette quantité à disposition mais le capitaine

avait surestimé les capacités de son navire qui chargea 331 tonnes de moins.

Les affréteurs réclamèrent le remboursement des débours engagés pour cet

approvisionnement inutile.

La Court of Appeal jugea que cette option avait pour effet de permettre au

fréteur, via son capitaine, d’indiquer toute quantité comprise dans les limites

convenues et que cette quantité ainsi déclarée devenait « the full and complete

cargo ».En conséquence, le fréteur avait, dans ce cas ,l’obligation de charger

« approximativement »10400 T. Ce mot « approximatif » signifiait « environ » et

la Court jugea que les 331T. Manquantes, représentant 3,18% de 10400 se

situait à l’intérieur de la fourchette définie. Les affréteurs furent déboutés.

En revanche, le fréteur, qui, sans raison valable, ne charge pas la quantité

maximale à laquelle peut prétendre l’affréteur (généralement +/- 5% au choix de

l’affréteur) viole une disposition contractuelle et devra réparation108.

106 Handy book for shipowners and masters p.209. 107 Jardine Matheson v. Clyde Shipping Co. (1910)Handy book for shipowners and masters p.209. 108 Camp sentence 844 du 26 juin 1999

Page 41: Litiges entre freteurs

41

De même, il ne peut faire interrompre le chargement sans raison sérieuse.

Ainsi, un capitaine, dont la C/P exigeait un connaissement « clean on board »

qui a interrompu le chargement de grains au motif que les quelques impuretés

présentes ne garantissait pas une pureté à 100%, exigeait le remplacement

d’une partie de la cargaison.

Le temps perdu en négociations pour accepter que soit portée la

mention »foreign matters 2% max- clean on board » ne put être compté en

temps de planche.109

L’intervention des manutentionnaires La majorité des dommages et avaries aux marchandises survient au cours des

opérations de chargement et de déchargement.

L’intérêt commun est de faire vite et bien.

Il va falloir se répartir les taches, choix du manutentionnaire, accord sur le plan

de chargement, mais surtout les frais, les risques et les responsabilités

découlant des opérations de mise à bord, arrimage et saisissage, puis

inversement au déchargement.

C’est dire le soin que fréteurs et affréteurs vont consacrer, lorsqu’ils le peuvent,

à la rédaction de ces clauses.

Depuis la deuxième moitié du XIXème siècle (XVème à Marseille), les bords

n’assurent plus les opérations de manutention.

Sauf clause contraire (Master’s servants), les manutentionnaires sont les

préposés de l’affréteur. Il lui appartient de faire appel à une entreprise de

manutention ; cette obligation découle de son obligation de

charger/décharger110.

109 Camp sentence 1112 du 19 mai 2005 dmf 2006 n°666 01-2006 110 (V. T. com. Seine, 13 sept. 1978 : DMF 1979, 293).

Page 42: Litiges entre freteurs

42

Les clauses répartissant les frais, risques et responsabilités relatifs à

l’intervention des manutentionnaires sont d’interprétation difficile.

Dans l’affaire Blaikie v. Stembridge111, la clause de la C/P précisait « stvedore

to be appointed by the charterer but to be paid by and act under the captain’s

orders »

Une action en responsabilité engagée par un chargeur contre le capitaine ne

put aboutir, le manutentionnaire n’étant pas le préposé du capitaine (ou de

l’armateur ?). Cet avis fut controversé, puis confirmé.

Dans l’affaire Swainston v. Garrick112, par accord hors C/P, les affréteurs ont

engagé leur propre manutentionnaire ; les armateurs engagèrent une action

contre leur capitaine en garantie des dommages dont ils ont été tenus pour

responsables en raison d’un mauvais arrimage.

On jugea que l’accord de l’armateur d’autoriser l’affréteur à engager son

manutentionnaire s’est substitué à l’obligation d’arrimage soigneux qu’a le

capitaine envers son armateur.

Dans l’affaire Catherine Chalmers, au vu de la clause stipulant que le navire

devait être « stowed by charterer’s stevedore at the expense and risk of the

vessel », Sir R. Phillimore dégagea toute responsabilité du fréteur envers

l’affréteur pour un arrimage défectueux.

Cette décision est contestable car elle néglige l’effet de l’expression « and risk »

laquelle fut incontestablement incluse pour ce cas précis.

La clause précisant « charterers are to provide and pay a stevedore to do the

stowing of the cargo under the supervision of the master” a rendu les affréteurs

responsable du paiement du faux fret après avoir démontré la faute du

stevedore à réaliser un chargement complet.113

A l’inverse, d’autres clauses sont plus favorables à l’affréteur :

111 (1860) 6 C.B. 894. Scrutton on charter-parties p.169. 112 Idem ci-dessus 113 Brys & Gylsen v. Drysdale, idem ci-dessus.

Page 43: Litiges entre freteurs

43Au travers de la clause : “the charterers are to have liberty to employ

stevedores and labourers to assist in the... stowage of the cargo ; but such

stevedoresbeing under the control and direction of the master, the charterers

are not in any case to be responsible to the owners for damage or improper

stowage...the liability shall remain the same as if there where carrying out a

voyage on their own account”, les affréteurs ont, avec succès, engagé la

responsabilité du fréteur pour mauvais arrimage. 114

A l’époque de la négociation de cette charte, les taux de fret devaient être

particulièrement bas...115

La marchandise se trouve le long du bord ; l’affréteur n’engage pas de manutentionnaire… Un navire fut affrété en vue de charger la quantité maximale possible de

marchandises. La clause précisait « Charterer’ s stevedore to be employed by

the ship, and the cargo...to be brought alongside at charterer’s risks and

expense”

L’affréteur n’engagea pas de manutentionnaire et le fréteur ne chargea pas une

cargaison complète. Pour les juges, la clause stipulant que l’affréteur devait

engager les manutentionnaires n’avait pas un caractère essentiel et,116 malgré

la défaillance de l’affréteur, le fréteur et son capitaine devaient

contractuellement charger toute la cargaison possible et qu’il était du ressort du

capitaine de se substituer au manutentionnaire (ou d’assurer son embauche).

L’arrimage « the stowage is the sole act of the shipowner »117

Soulignons en préambule que les opérations de déchargement,(y compris

dessaisissage et désarrimage, comme celles concernant le chargement

114 Sack v. Ford (1860) 13 C.B. 90 Scrutton of charter-parties p.170 115 Voir en annexe courbe des taux de fret. 116 Anglo-African Co.v. Lamzed (1866) Scrutton on charter-parties p.171. 117 Lord Esher in Harris v.Best, 1892, Handy book for shipowner and masters,p.203

Page 44: Litiges entre freteurs

44(arrimage, saisissage, fardelage, choulage inclus),sont, pour des raisons

impératives de sécurité, de stabilité et d’efforts sur les structures, supervisées

par le capitaine, préposé du fréteur ; ce qui n’exonère pas l’affréteur de sa

responsabilité en cas de dommage résultant d’un mauvais arrimage.

Une C/P à temps NYPE stipulait :

« Charterers are to load, stow and trim the cargo at their expense’ under the

supervision of the captain ».

La marchandise fut avariée en raison de son arrimage défectueux. Les

affréteurs soutinrent que le fréteur était responsable car il lui appartenait de

vérifier, via son capitaine, que l’arrimage avait été correctement réalisé.

La chambre des Lords rejeta l’argument et jugèrent que le fréteur ne pouvait

être tenu pour responsable, au travers de cette clause, que si le capitaine avait

imposé son propre plan de chargement .La preuve n’en étant pas rapportée, les

affréteurs furent déclarés responsables.

Lord Atkin déclara : « The supervision of the stowage by the captain is in any

case a matter of course; he has in any event to protect his ship from being

made unseaworthy; and in other respect, no doubt he has the right to interfere if

he considers that the propose stowage is likely to impose a liability upon his

owners.

If it could be proved by the charterers that the bad stowage was caused only by

the captain’s orders, and that there own proposed stowage would have cause

no damage, no doubt that might enable them to escape liability”.118

A l’inverse, la responsabilité du fréteur a été retenue car son capitaine avait

laissé charger, d’une manière manifestement contraire aux règles de l’art, des

rails et s’était présenté au port de déchargement avec une cargaison dont la

manutention allait à l’évidence créer des dangers, entrainer des coûts et des

délais extraordinaires, normalement imprévisibles.119

118 Court Line v. Canadian Transport Co. (1940) Handy Book for shipowners and masters p.215 119 Com. 7 novembre 1986, Bull.civ., IV, n°202.L’affrètement maritime, collection maritime, IETM, p.68.

Page 45: Litiges entre freteurs

45Certaines lois nationales interdisent cependant toute clause exonérant

totalement ou partiellement l’armateur de la responsabilité pour les dommages

résultant d’un mauvais arrimage.

La loi anglaise tolère, hors transport sous Convention de1924 ou autre, que le

fréteur puisse s’exonérer de sa responsabilité résultant d’un mauvais arrimage

si et seulement si le mauvais arrimage ne peut pas compromettre la

navigabilité120.

Toute atteinte à la navigabilité rend la clause inopérante.

Les pressions exercées par l’affréteur sur les bords en vue d’accroitre les

cadences au détriment de la stabilité ou pour surcharger le navire impliquera la

coresponsabilité de l’affréteur.121

Voyage en droiture Le déroutement, s’il ne met pas en péril l’équipage et le navire, est obligatoire

pour répondre à un appel de détresse, facultatif pour porter assistance.

D’une façon générale et sans même qu’il soit besoin de le préciser dans la

charte, le navire doit réaliser son voyage en empruntant la route, soit prévue,

soit celle étant à la fois la plus courte, la plus sûre et convenant le mieux à la

marchandise. En principe, les cocontractants s’accordent sur une route contractuelle.

Les usages comptent beaucoup dans le choix des grandes routes

commerciales : saisons, phénomènes climatiques, prix des soutes, etc.…

Le capitaine peut, en cours de route, la modifier au gré des circonstances :

météo, houles, glaces, conflits, etc. Ce n’est pas un déroutement.

120 Handy book for masters and shipowners,p.211 121 Camp sentence 1082 du 14 mars 2003

Page 46: Litiges entre freteurs

46Clause ou non, on admettra qu’un navire se déroute pour les besoins du

voyage (avitaillement, réparations) ou raisons sanitaires.

Un capitaine dont le navire a subi des avaries à cause du mauvais temps a le

droit et le devoir de relâcher afin de procéder aux réparations nécessaires et

raisonnables à la sauvegarde du navire, de la cargaison et de l’équipage122.

Cette notion « raisonnable » dépend des circonstances et de la nature de la

marchandise.

Citons Lord Justice Scrutton : “Now it is clear that some delays on a voyage

may amount to a deviation.It is not an easy case to prove...But it is quite clear

that every delay is not a deviation.You must have such a delay that it makes the

voyage a different voyage from the contract voyage”.

-Un capitaine qui fait relâche pour éviter d’affronter une tempête exceptionnelle,

telle un ouragan perdra un temps raisonnable.

-A l’inverse, le « Renée Hyaffil » resta à quai durant 23 jours pour éviter une

tempête, qui, compte tenu du lieu et de la saison, n’avait rien d’exceptionnel.

La cargaison de fruits fut perdue et le fréteur fut tenu pour responsable du délai

déraisonnable.

Si l’affréteur décide de « fermer les yeux », et pourvu que la cargaison arrive

sans dommage à bon port, on considère l’affréteur redevable de l’intégralité du

fret.

S’il décide de rompre le contrat, il devra probablement acquitter un fret calculé

sur la base du parcours réalisé.

Si la charte-partie prévoit plusieurs voyages consécutifs, l’affréteur aura loisir de

mettre fin à ses obligations en refusant d’entreprendre le voyage suivant si le

navire s’est dérouté au cours du voyage précédent.

Ces voyages formant un seul et indivisible contrat par l’emploi de l’expression

« consécutifs », la charte- partie tout entière sera résiliée.123

122 Kish v. Taylor, (1912) Handy book for shipowners and masters p165 123 Cprimera v. Compania Arrendataria (1940) Handy book for shipowners and masters p.173

Page 47: Litiges entre freteurs

47Mais un navire peut-il se dérouter pour compléter un chargement que l’affréteur n’a pu lui fournir ? Le fréteur peut être autorisé à entreprendre les démarches raisonnables pour

charger le navire, il peut aussi y être contraint pour limiter ses pertes dues au

faux fret. 124.

L’exemple suivant, un peu ancien, s’applique mal sur un vraquier contemporain,

mais pourrait trouver tout son intérêt dans les affrètements d’espace.

Le vapeur Storviken fut affrété pour acheminer une cargaison de sucre de Java

à destination du Royaume Uni. Les affréteurs s’engagèrent à charger « une

pleine et entière cargaison », mais ne le firent pas.

Au cours du voyage retour, les armateurs décrochèrent un chargement

d’environ 1000 tonnes de tourteaux à Alexandrie et, sans solliciter l’accord des

affréteurs, ni même les informer de leur projet, chargèrent les tourteaux à bord.

Le chargement dura trois jours.

Les armateurs engagèrent une action en paiement du faux fret, les affréteurs

soutinrent que le temps perdu à charger les tourteaux caractérisait un

déroutement justifiant la rupture du contrat, ôtant tout droit d’action aux

armateurs.

Les juges ont estimé que les armateurs avaient raisonnablement agi en

réduisant ainsi le faux fret et leur action ne pouvait être qualifiée de

déroutement125.

.

Obligation de décharger Désignation du port de déchargement L’affrètement au voyage est souvent l’une des composantes d’une vente.

124 Handy book for shipowners and masters p.329 125 Wallem Rederi v. Muller & Co. (1927) ; Handy book for shipowners and masters p.329

Page 48: Litiges entre freteurs

48Cette vente n’est pas toujours finalisée lorsque le navire est en cours de

chargement : recherche d’acheteurs plus généreux, spéculation sur les

fluctuations des cours, etc.

C’est pourquoi, bien souvent, seule une zone de déchargement ou une liste de

ports figure dans la charte-partie.

L’affréteur va devoir se déterminer dans un temps imparti.

Une clause précisant “The vessel, on being loading should proceed as ordered

on signing bills of lading” signifie que les ports doivent être désignés avant et

non pas après la signature des connaissements.126

Ce choix fait est irréversible, sauf à renégocier les termes de la charte avec le

fréteur.

Certaines chartes prévoient que le navire entreprenne son voyage vers la zone

ou un port d’attente.

Le temps d’attente peut être déterminé mais ne doit pas être excessif.

Ces clauses doivent être scrupuleusement respectées en raison de leur

probable incidence sur la vente de la cargaison :

Le « Watsness » fut affrété pour transporter une cargaison de grain de Rivière

plate vers l’Europe. La charte prévoyait certains ports d’escale où le navire

devait se rendre et être aux ordres, ordres devant être donnés dans un délai de

24 heures par les destinataires dès réception par câble de l’escale du navire.

Dès son arrivée à Saint Vincent, port nommé, le capitaine informa par câble les

destinataires à Londres, mais, le soir même, sans attendre de réponse à son

câble, appareilla pour Las Palmas, en laissant pour consigne qu’on lui adressât

par morse les ordres concernant le port de déchargement.

Les destinataires vendirent la cargaison comme « arrivée à St. Vincent ».

Les acheteurs, constatant l’absence de la marchandise, dénoncèrent le contrat.

126 A/S Tank v. Agence maritime L.Stranose, (1939) Handy book for shipowners and Masters p. 241

Page 49: Litiges entre freteurs

49Les destinataires réclamèrent réparation de leur préjudice au fréteur pour

rupture de la Charte.

La Court of Appeal confirma la rupture de la charte :

-pour ne pas avoir respecté le temps d’attente minimal de 24 heures.

-Que l’expression « arrivé à St. Vincent » matérialisant une condition de la

vente, les acheteurs étaient donc en droit de résoudre le contrat

.

Le déchargement Cette obligation fondamentale incombe à l’affréteur ; il ne peut y déroger, quand

bien même le réceptionnaire, tiers à la charte, refuserait la marchandise,

avariée ou non.127

Néanmoins, la faute du fréteur (par ex. innavigabilité commerciale) peut

exonérer l’affréteur de son obligation si le lien de causalité entre la faute du

fréteur et l’interdiction (par les autorités) de décharger est « suffisamment étroit

et direct »128.

Pour un cas, heureusement rare, dont l’origine fut la découverte de passagers

clandestins décédés conduisant à l’interdiction totale de décharger par les

autorités marocaines, le tribunal a conclu à l’entière responsabilité du fréteur

au motif que le cas excepté invoqué (fait du Prince) n’était que la conséquence

d’une faute première, le manque de diligence du fréteur dans la surveillance du

navire lors des escales de Cotonou et de Conakry, et alors même qu’il était

admis que le décès des malheureux provenait des suites d’une fumigation des

cales opérée par l’affréteur. 129

L’affréteur doit entreprendre les opérations techniques et administratives de

déchargement dès l’arrivée du navire.

127 Camp sentence(second degré) 1102 du 02 aout 2004 128 Camp sentence arbitrale 1125 du 24 décembre 2005 129 Camp sentence (second degré) du 24 octobre 1997. Voir également la thèse du Pr.A. Sériaux : « la faute du transporteur »éd. Economica 1984, p.97 et suiv.

Page 50: Litiges entre freteurs

50Ainsi, le retard consécutif aux opérations tardives de dédouanement est

imputable à l’affréteur130.

Les apparaux de levage du navire, lorsqu’ils existent, sont mis à la disposition

de l’affréteur et conduits par les manutentionnaires.

La délicate question de savoir qui est responsable des avaries subies par le

navire et provenant d’un incident sur une grue du bord va également se poser.

La Chambre arbitrale maritime de Paris, par sa sentence 1114 rendue le 14 juin

2005 a répondu à cette question :

« Au stade du déchargement, l'obligation principale de l'affréteur(FIOS) est de

pourvoir au débarquement de la cargaison. Obligation contractuelle, c'est aussi

une obligation de résultat en ce sens qu'il y a une nécessité matérielle à

décharger la cargaison pour libérer le navire.

L'affréteur est en même temps débiteur envers l'armateur d'une seconde

obligation qui, pour être l'accessoire de la première, n'en est pas moins

importante, celle de ne pas causer ou laisser causer, durant le déchargement

auquel il pourvoit, de dommages au navire ni à ses apparaux, et ceci d'autant

plus qu'il a, en l'espèce, le libre usage de ces apparaux. Cette seconde

obligation est indissociablement liée à l'obligation principale : il s'agit d'une

obligation de résultat.

Dans ces conditions, la simple constatation de l'inexécution par l'affréteur de

son obligation de pourvoir au déchargement de la cargaison sans qu'il soit

causé de dommage au navire suffit à engager sa responsabilité contractuelle

sans qu'il soit besoin d'établir une quelconque faute de sa part ou de celle de

ses préposés manutentionnaires ; et sans même que la faute de ces derniers,

fût-elle établie, puisse être opposée à l'armateur.

Par ailleurs, l'affréteur n'a pas apporté d'éléments suffisants quant à une

défaillance de la grue qui aurait pu constituer un cas fortuit, ce qui l'aurait

exonéré de toute responsabilité.

Il est cependant communément admis que si la victime a contribué, même

partiellement, par sa faute à la réalisation du dommage, l'indemnisation qui lui

130 Camp sentence 1044 du 16 janvier 2001

Page 51: Litiges entre freteurs

51est due peut se trouver réduite sur le fondement d'un partage de responsabilité.

Force est pour le Tribunal de constater que l'armateur a commis au moins deux

fautes, ou séries de fautes, parmi celles relevées par l'affréteur, qui n'ont pu

que participer à la réalisation du dommage :

D'une part la désactivation des sécurités de la grue avec clé sur le tableau de

bord, en l'absence d'une présence de l'équipage.

D'autre part l'inexistence de toute procédure écrite quant au maniement des

grues et de leurs sécurités, bien que requise tant par le simple bon sens que

par application du Code ISM.

Le Tribunal, compte tenu de l'importance des fautes relevées à l'encontre de

l'armateur et du lien de causalité partielle mais certaine entre ces fautes et la

réalisation du dommage, considère que s'impose un partage de responsabilité,

dans la proportion de 50 % à la charge de l'affréteur et de 50 % à la charge de

l'armateur.

En ce qui concerne le préjudice, le coût d'immobilisation n'a pas été retenu

aucune preuve de perte de revenu susceptible d'indemnisation n'étant

rapportée ».

Les chartes stipulent généralement que la marchandise est déchargée « aux

frais et risques de l’affréteur ».

Si la cadence prévue avec les équipements du bord ne peut être tenue, les

moyens complémentaires engagés seront à la charge de l’affréteur131.

Par conséquent, sauf stipulation expresse contraire et sauf à démontrer la

négligence fautive du fréteur, il répond des avaries causées au navire par les

manutentionnaires.132

131 Camp sentence1093 du 21 février 2004 132 Camp sentence 1027 du 28 janvier 2000

Page 52: Litiges entre freteurs

52

-Staries, surestaries Fréteur et affréteur sont convenus d’une durée précise impartie aux opérations

commerciales : le temps de planche ou staries.

Le décompte des staries est complexe et varie beaucoup d’une charte à l’autre.

Bien souvent, les temps de chargement et de déchargement sont dissociés.

Pour pallier la difficulté d’interprétation et d’application de ces clauses, le CMI,

puis la BIMCO, FONASBA et INTERCARGO ont publié, sous l'appellation de

"Voyage Charterparty Laytime Interpretation Rules 1993", un mémento

proposant des solutions d’interprétation des staries.133

En cas de différend entre les parties à un affrètement sur le sens ou

l'interprétation à donner à tel ou tel mot ou à telle ou telle expression d'une

charte au voyage, les Règles d'interprétation 1993 pourront aider à trouver la

solution convenable, - que celle-ci soit demandée ou non à un tribunal arbitral. Il

apparaît souhaitable qu'elles soient incorporées dans les chartes au moyen

d'un renvoi explicite.

Elles ne seront opérantes que dans le cas où le contexte de la négociation

ayant conduit à l'affrètement ne permet pas de donner une réponse certaine au

point litigieux. C'est leur effet supplétif.134

D’autre part, la charte ne dit pas tout : certains principes, non écrits, sont

appliqués : « une fois en surestaries, toujours en surestaries »135

En cas de dépassement du temps de planche, l’affréteur devra, sur la demande

du fréteur, indemniser ce dernier par le versement des surestaries, dont le taux

a été négocié dans la C/P.

En droit français, les surestaries sont un « supplément de fret »136 les anglo-

saxons l’assimilent à une indemnité.

133 Voir en annexe Règles d’interprétations des staries sous charte-partie au voyage de 1993 Auteur Jean yves Grondin. 134 Raymond Achard Jurisclasseur transport,fasc.1221, 02-2005 135 Cours du Cdt G.Figuière « once in demurrage, always in demurrage » 136 Art.11 du décet 66-1078 du 31décembre1966.

Page 53: Litiges entre freteurs

53 Le fréteur peut, en principe, valablement exercer le privilège offert par l’art.2 de

la loi de 1966.

Le temps gagné par l’affréteur peut lui être partiellement (50%) ou totalement

(rare) crédité : c’est la prime de célérité. « Despatch money ».

Enfin, alors même que le décret de 1966 prévoit le contraire137, le temps

gagné au chargement pourra abonder le temps de planche du déchargement;

c’est la clause de réversibilité.

Le cumul des temps de planche, à fortiori lorsqu’il y a pluralité de ports, et du

temps sauvé, générateur de « despatch money » est la méthode la plus

avantageuse pour l’affréteur.

En voici un exemple :

Le navire « Azuero » charge une cargaison de grains en vrac à Philadelphie

pour Avonmouth et Belfast. Cette cargaison devra être déchargée à la cadence

moyenne de 1000 tonnes minimum par jour ouvré, temps permettant,

(dimanches et fériés exclus). A Belfast, la marchandise fut déchargée à la

cadence prévue, mais à une cadence inférieure à Avonmouth. Le fréteur établit

une feuille de calcul pour chaque port, réclama 300 £ par jour supplémentaire à

Avonmouth et proposa 150£ par jour gagné à Belfast. Ce calcul rendait

l’affréteur finalement redevable de 1600£.Ceux-ci réclamèrent que ces deux

opérations soient regroupées en une seule, ramenant ainsi les surestaries à

30£.

Le calcul de l’affréteur fut jugé conforme.

Le coût du navire, même à quai, (rémunération du capital, salaires, combustible

des auxiliaires, frais de port), auquel, naturellement, le fréteur ajoutera un profit

identique à celui qu’il retire lorsque le navire est en mer, est élevé, générant

ainsi des taux de surestaries conséquents et dissuasifs.

Les staries sont donc un élément important du contrat ; les litiges sont fréquents.

Les surestaries sont toujours à la charge de l’affréteur.

137 Décret n°66-1078 du 31 décembre 1966, art. 9 al.2 : » Si celle-ci (la charte-partie) établit distinctement un délai pour le chargement et un délai pour le déchargement, ces délais ne sont pas réversibles et doivent être décomptés séparément [*computation*]. »

Page 54: Litiges entre freteurs

54

Toutefois, par le jeu de l’incorporation des clauses de la C/P au connaissement,

le destinataire peut se voir réclamer par le fréteur le paiement de surestaries138.

Suspension des staries

La notice valablement remise, les staries courent à partir de l’heure

contractuellement convenue ;

.toutefois, des cales jugées sales, insuffisamment sèches font cesser le

décompte dès lors que l’exigence de l’affréteur est justifiée.139

L’encombrement du port est un risque que doit supporter l’affréteur, y compris

si le retard du navire est consécutif à l’innavigabilité fautive du fréteur. L’attente

est décomptée de la planche.140

L’affréteur peut utiliser les staries à sa convenance. Ainsi n’a pas été jugé

abusive l’immobilisation d’un vracquier du samedi midi au lundi matin, heure de

reprise du travail pour achever le déchargement d’un reliquat de marchandise

ne nécessitant qu’une heure de travail.141

Par contre la clause « always afloat »interdira l’affréteur de charger pendant les

périodes de basse mer menaçant la libre flottabilité du navire142.

Le tribunal arbitral peut recalculer les staries lorsque des évènements

imputables au fréteur diminuent les cadences : panne d’une grue, ordre donné

au navire de déhaler vers un quai moins équipé en raison de la mouille

constatée dans la marchandise143, etc.

Certains temps d’attente peuvent être assimilés à des staries. Doit-on dès lors y

intégrer les suspensions de staries contractuellement définies (samedis,

dimanches et jours fériés si non utilisés) ?

138 Miramar v. Holborn Dmf 2004 n°684 commentaires Y.Tassel. 139 Camp sentence 1139 du 09 mai 2007 140 Camp sentence 1075 du 13 décembre2002 141 Idem ci-dessus 142 Scrutton Carlton SS Co. V. Castle (1898) 143 Camp sentence 1089 du 23 octobre 2003

Page 55: Litiges entre freteurs

55

La question s’est posée pour un navire faisant escale l’hiver à St.Pétersbourg et

devant attendre la présence d’un brise –glace pour entrer et sortir en convoi.

Une clause additionnelle prévoyait que tout le temps d’attente devait « to be

counted as laytime », déduction faite d’une franchise de 12 heures.

Le fréteur soutenait que le temps d’attente devait être compté en staries dès la

13ème heure, les suspensions n’étant applicables qu’aux opérations de

chargement et déchargement.

Après recherche de la volonté des parties, la chambre arbitrale a jugé que la

C/P assimilait clairement le temps d’attente aux staries, intégrant par

conséquent les suspensions prévues144.

La « Conoco weather clause » et l’encombrement portuaire. Sauf à pratiquer des taux de contre- surestaries145 exorbitants, les

dépassements du temps de planche contrarient la profitabilité et l’organisation

commerciale du fréteur : incertitude sur la date de fin de voyage, risque de ne

pouvoir honorer de nouvelles obligations, etc.

On peut donc être amené à lisser le coût de ces aléas.

Aussi, le partage des surestaries peut être envisagé, notamment dans la

situation fréquente du port engorgé et du mauvais temps (l’un aggravant l’autre),

par application de la clause de type « conoco wheather clause ».146

« Un des rôles essentiels d’une charte-partie est de répartir les risques de

retard dans les opérations portuaires, dont les conséquences affectent les

résultats de voyage aussi bien des armateurs que des affréteurs.

144 Camp sentence 1120 du 12 septembre 2005,dmf n°673 09-2006 145 Contre surestaries ou sur surestaries : taux majoré se substituant aux surestaries passé un certain délai. 146 Dmf 2007 n° 680- Dominic O’SULLIVAN (Avocat Essex Court Chambers – Brisbane)

Page 56: Litiges entre freteurs

56La « Conoco weather clause » prévoit un partage par moitié entre armateurs

et affréteurs des risques de mauvais temps, le retard pour mauvais temps

comptant pour la moitié du temps de planche ou la moitié des surestaries »

Les retards à l’accostage dus à la combinaison de l’encombrement portuaire

et du mauvais temps sont fréquents. Cependant, aucune réponse n’est donnée

par la jurisprudence lorsque le navire « arrivé » est retardé en raison de la

congestion et du mauvais temps, provoquant une file d’attente de navires.

S’il est normal que la congestion portuaire soit un risque supporté par les

affréteurs, puisque ceux-ci sont responsables de la désignation des ports, la

solution d’un litige issu de la combinaison des deux risques, encombrement et

mauvais temps, n’est pas évidente, en présence de la « Conoco weather

clause ».

D’autre part, bien d’autres litiges, étrangers aux opérations de chargement et de

déchargement ont pour conséquence un allongement de la durée de l’escale

générant des surestaries; citons :

-contestation de la qualité de la marchandise par le réceptionnaire147.

-saisie conservatoire du navire.

-paiement partiel du fret.148

-vice propre de la marchandise.149

La « cesser clause » Cette clause de « cessation de responsabilité » bénéficiant à l’affréteur trouve

sa justification dans le privilège possessoire dont jouit le fréteur (légalement ou

contractuellement en droit anglais) en garantie du paiement du fret et

suppléments.

Cette clause permet d’exonérer l’affréteur de sa responsabilité à l’issue du

chargement.

147 Camp sentence 1096 du 14 juin 2004 148 Camp sentence 1097 du 17 juin 2004 149 Camp sentence 1138 du 27 juillet 2007

Page 57: Litiges entre freteurs

57Elle est d’une application logique dans l’hypothèse habituelle d’un affréteur-

vendeur et d’un destinataire- acheteur et justifiée par les obligations qu’a

contractées, via le connaissement, le fréteur à l’égard du destinataire. Là

encore ressurgit la question de l’opposabilité des clauses de la C/P au tiers

porteur du connaissement.

Il est dangereux de dissocier la « cesser clause » du privilège du fréteur :

En l’absence de ce privilège contractuellement accordé au fréteur, les tribunaux

anglais se montrent peu enclins à autoriser l’exonération de la responsabilité de

l’affréteur.

Mais s’ils concluent, après analyse des clauses de la charte, que telle était la

volonté des parties, ils accorderont le bénéfice de l’exonération à l’affréteur,

même si cette décision laisse le fréteur sans recours150.

La saisie du navire Ce risque pèse lourdement sur les épaules du fréteur ; les litiges nés de

créances alléguées sur le navire surviennent généralement au pire moment :

marchandise déchargée et livrée, donc fin du contrat, navire en route pour un

nouvel affrètement.

En droit international, la Convention de 1952 autorise151 toute personne titulaire

d’une créance sur le navire à saisir ce navire(ou un autre navire appartenant à

l’affréteur), alors même qu’il n’appartient pas au débiteur.

150 Scrutton on charter parties p.175. 151 Art 3, § 4, al.1&2 Dans le cas d'un affrètement d'un navire avec remise de la gestion nautique, lorsque l'affréteur répond seul d'une créance maritime relative à ce navire, le demandeur peut saisir ce navire ou tel autre appartenant à l'affréteur..., mais nul autre navire appartenant au propriétaire ne peut être saisi en vertu de cette créance maritime (§ 4, al. 1er).

L'alinéa qui précède s'applique également à tous les cas où une personne autre que le propriétaire est tenue d'une créance maritime (§ 4, al. 2).

Page 58: Litiges entre freteurs

58Il faut et il suffit que la créance porte sur le navire et non pas sur le fréteur. (Le

non-paiement de la « despatch money » n’autoriserait pas une telle saisie.)

Mainlevée de la saisie est assez facile à obtenir ; une lettre de garantie établie

par le P&I club de l’armateur suffit en général. La saisie abusive expose le

saisissant à des dommages intérêts conséquents.

Lorsque sont constatées des avaries à la marchandise provenant du navire

affrété, la créance d’indemnité qui en résulte autorise l’affréteur au voyage ou le

réceptionnaire152 à saisir le navire 153 ;

Ont également été considérées comme née d’un contrat de transport ou

d’affrètement une créance pour frais de recherche de conteneurs passés par

dessus bord154.

La clause compromissoire

• Les chambres arbitrales Rares sont les litiges nés des contrats d’affrètement atterrissant sur le bureau

d’un juge d’Etat.

Abraham Lincoln disait:” Discourage litigation. Persuade your neighbors

compromise whenever you can . . . the nominal winner is often a real loser in

fees”.

Il existe en effet des tribunaux de droit privé spécialisés dans ce genre de

règlement auprès desquels les parties choisissent librement de régler leurs

différends.

152 Camp sentence( second degré) n°1132 du 3 octobre 2006 153 Conv. de 1952,art.1,lettre e 154 Rennes,23 décembre 1993 dmf 1995. 301.Pr. P. Bonassies, Traité de Droit maritime, LGDJ, éd. 2006 p.394.

Page 59: Litiges entre freteurs

59Toutes les grandes nations maritimes disposent de telles chambres

arbitrales.155

La Chambre Arbitrale de Paris a, par exemple, vocation à traiter les litiges de

droit maritime en tant que juridiction de droit commun (y compris les injures !, à

condition qu’elles émanent d’un cocontractant et non pas d’un tiers au contrat

d’affrètement).156

L’arbitre, souvent unique, est seul maitre de ses choix ; il n’est pas tenu de

suivre la jurisprudence ou d’appliquer les décisions de la Cour de Cassation.

L’appel est possible, mais rare.

Il peut aussi, sur la demande d’un contractant, être amené, au vu de l’économie

du contrat, à redéfinir la nature juridique d’un contrat, par exemple requalifier

une C/P à temps de type NYPE en affrètement au voyage en raison de sa

courte durée (42 jours)157.

Dans le cas d’affrètements en cascade, le moindre litige entrainera toute une

série de recours, compliquant sérieusement l’aboutissement de l’affaire. Les

protagonistes auront alors tout intérêt à s’accorder sur une procédure

d’arbitrage réglant les grandes lignes, calendrier et sentence en dernier

ressort.158

Enfin, grand intérêt pour les parties, les sentences sont confidentielles.

C’est donc une juridiction rapide et efficace, convenant parfaitement aux

différends commerciaux.

155 www.arbitrage-maritime.org/ (Paris)www.lmaa.org.uk (Londres). www.cmac-sh.org/en/home.aspris) (Shanghai). www.scma.org.sg/ (Singapour). www.kernkamp.nl/arbitration.html (Rotterdam) www.allbusiness.com/business-services/miscellaneous-business-services/4030892-1.html (New york) www.mararbpiraeus.eu/ (Le Pirée)156camp sentence n°1028 du 8 mars 2000 157 Camp sentence 1082 du 14 mars 2003 158 Camp sentence 1099 du 25 juin 2004

Page 60: Litiges entre freteurs

60

• Validité de la clause compromissoire Avant d’arbitrer sur le fond du litige, l’arbitre, en application du principe

compétence-compétence, va statuer sur sa propre compétence159.

Compte tenu des intérêts en jeu et des systèmes de droit aux faveurs, selon la

nature du litige, très différentes pour les parties, chacun s’échinera à soulever

l’incompétence du tribunal et la validité de la clause compromissoire au profit

d’une autre juridiction.

• Recevabilité de l’action du tiers porteur du connaissement Bien que le porteur du connaissement autre que l’affréteur soit, par définition,

exclu du contrat, on remarque que l’imbrication des clauses de la C/P avec

celles des connaissements émis peuvent faire « entrer » les ayants-droit

marchandises dans les relations fréteur-affréteur.

Le tiers porteur d’un connaissement Congenbill 1978, lequel incorpore les

termes et les conditions de la C/P Synacomex1976 et prévoit l’application de la

Convention de Bruxelles 1924 au transport entre pays non signataires, a-t’il

qualité à agir en arbitrage ?

Dans sa sentence 1038 du 15 juin 2000, l’arbitre de la CAMP a repris l’attendu

de la sentence 653 du 8 avril 1987 :

« Quand un connaissement fait référence explicite à la charte –partie et que

celle –ci s’y est trouvée incorporée par la formule « all terms and conditions

liberties and exceptions of the charte party dated as overleaf are herewith

incorporated », il y a lieu de considérer que la clause de la charte partie

attribuant compétence à la Chambre Arbitrale Maritime se trouve par là même

incorporée au connaissement ».

159 Principe réaffirmé par la 1ère Chambre civile ,C. Cass 16 mars 2004

Page 61: Litiges entre freteurs

61Le Congenbill 1994 est encore plus explicite, y est ajouté « including the law

and arbitration clause ».

Dans un cas analogue160, le fréteur a tenté de contester la compétence du

tribunal arbitral en se fondant, sans succès, sur l’effet relatif des contrats161,

lequel ne permet pas, selon lui, d’opposer la clause d’arbitrage à des tiers au

contrat.

Le tribunal a considéré que le fréteur ne pouvait ignorer l’existence et la portée

de la clause générale figurant au verso du connaissement incorporant toutes

les autres clauses (dont la clause compromissoire), le connaissement étant

établi à son en- tête et signé au nom de son préposé, le capitaine du navire.

En revanche, peut-on attraire le tiers porteur de bonne foi d’un connaissement

dans l’arbitrage ?162

Le connaissement, de type Congenbill, comportait une clause générale

analogue au cas précédent.

Le collège arbitral a rappelé que ce problème avait déjà été clairement tranché,

tant par les tribunaux que par la chambre arbitrale de Paris :

« Le porteur de bonne foi d’un connaissement émis dans le cadre d’un

affrètement au voyage ne peut se voir opposer une clause de la charte qui ne

s’y trouve pas reproduite et qui n’a pas fait l’objet d’une acceptation certaine de

sa part ».

Il est bien légitime que le destinataire, totalement étranger à la C/P, le moins au

fait des péripéties du voyage et rentrant dans le contrat de transport à la toute

dernière minute, c'est-à-dire à la livraison, soit protégé de clauses

fondamentales, bien souvent savamment noyées dans un océan de banalités.

L’affréteur doit établir que le destinataire a connaissance de la clause et l’a

expressément acceptée.

160 Sentence 1045 du 31 Janvier2001 161 Art.1165 c.civ 162 Sentence 1044 du 16 janvier 2001

Page 62: Litiges entre freteurs

62Le destinataire averti peut-il donc, au gré de ses intérêts faire valoir ou non

l’applicabilité des clauses de la C/P, notamment la clause compromissoire et

ainsi déséquilibrer la C/P au profit du connaissement ?163

Mais les choses se compliquent lorsque l’affréteur devient cessionnaire des

droits du destinataire n’ayant connu ni accepté la clause compromissoire, donc

inopposable en sa qualité de destinataire et inopposable en sa qualité de

cessionnaire car incluse par principe dans les droits du cédant.

Ce cas très particulier permettrait l’affréteur, cessionnaire des droits du

destinataire de se soustraire (à dessein ou non) à la clause compromissoire de

la C/P., donc à bafouer sa parole initialement donnée,

La qualité de cessionnaire doit-elle l’emporter ?

Une analyse rapide ne pouvant résoudre un problème d’une telle complexité,

prière de se référer aux commentaires cités en bas de page164

Conclusion

Il n’est pas facile de conclure un chapitre qui ne se termine jamais.

La nature même du voyage maritime réserve beaucoup d’événements

imprévus venant contrarier, voire anéantir le contrat.

La délicate interprétation des expressions contractuelles exige des juges et des

arbitres de rechercher la volonté des parties.

163 Voir en ce sens « vues sur mer, charte partie et connaissement » éditorial par François Arradon, président de la CAMP, Gazette de la Chambre, automne 2003 n°2. 164 O. Cachard . « Honi soit qui mal y pense ! L’opposabilité de la clause compromissoire au cessionnaire du tiers porteur du connaissement de charte-partie En sens contraire, voy. Cass. com., 8 octobre 2003, Rev. arb. 2004, p. 77, note O. Cachard ; DMF, 2004, p.339, note Mme M. Rémond-Gouilloud.

Page 63: Litiges entre freteurs

63Malgré le soin apporté à la rédaction des chartes-parties, sans cesse

remaniées pour coller le mieux aux conditions actuelles, tout ne peut être prévu.

Ainsi, de nouvelles formes d’affrètements au voyage voient le jour ; Leur

jeunesse ne nous a pas permis d’exposer beaucoup de litiges.

L’affrètement d’espaces répond à la généralisation du trafic conteneurisé et à la

volonté des opérateurs commerciaux, tels les NVOCC, de maitriser la chaine

logistique.

Il conserve les caractéristiques des affrètements au voyage consécutifs, avec,

toutefois, une forte dérive vers la convention de 1924.

Ainsi, la Charte-partie SLOTHIRE Standard précise, dans article 14, (a),

« Owners Responsabilities and liabilities » le ralliement avantageux à

l’obligation de moyens imposée par les art.3 &4 de la Convention.

L’affréteur, de son coté, étant dans la quasi impossibilité d’assurer les

opérations de chargement et de déchargement, mandate le fréteur. (Art. 11, (a)).

Les différences entre transport de marchandises et affrètement paraissent

s’amenuiser.

Une chose, fondamentale n’apparaît cependant pas dans la comparaison de

formulaires, c’est la volonté souveraine des parties qui leur permet d’établir tout

ce que bon leur semble.

___________________________________________

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BIBLIOGRAPHIE OUVRAGES GENERAUX -Traité général de droit maritime, Dalloz, 1970, René Rodière. -Traité de droit maritime, L.G.D.J. éd. 2006 Pierre Bonassies et Christian Scapel. -Lamy Transport, Tome 2, éditions Lamy, éd. 2008. -Lexis Nexis, juris classeur transport, site internet : http://www.lexisnexis.fr/ - Le Droit Maritime Français, éditions Lamy, de 1990 à 2007. OUVRAGES SPECIALISES - On Charter-parties and Bills of Lading 18ème éd. Sweet & Maxwell 1974, Scrutton. -Handy book for shipowners & Masters, The United Kingdom mutual steamship assurance association (Bermuda) limited. 16ème éd. By M.R. Holman, 1964. ANNEXES -Règles d’interprétation des staries sous charte partie au voyage ; Mr. Jean Yves Grondin. -Abréviations et glossaire du shipping : Groupement Maritime Saunier-Dreyer ; Mr. Bernard A.M. Dreyer.

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REGLES D’INTERPRETATION DES STARIES SOUS CHARTE-PARTIE AU VOYAGE, DE 1993

Nom de code : VOYLAYRULES 93

Émises conjointement par BIMCO, CMI, FONASBA et INTERCARGO Préambule Les interprétations des termes et phrases utilisés dans une charte-partie, comme exposées ci-après et les abréviations usuelles correspondantes s’appliquent lorsqu’elles sont expressément incorporées en tout ou partie dans la charte-partie, sous réserve qu’elles n’en contredisent pas une disposition expresse. Lorsque le terme « charte-partie » est utilisé, il doit être entendu comme s’appliquant à toute forme de contrat de transport ou d’affrètement, y compris les contrats établis par un connaissement. Liste des règles 1. « PORT » 2. « POSTE » 3. « ACCESSIBLE A SONARRIVEE » OU « TOUJOURSACCESSIBLE » 4. « STARIES » 5. « PAR PANNEAU PAR JOUR » 6. « PAR PANNEAU TRAVAILLEPAR JOUR » OU « PAR PANNEAU TRAVAILLABLEPAR JOUR » 7. « JOUR » 8. « JOURS FRANCS » 9. « JOUR FERIE » 10. « JOUR OUVRE » 11. « JOURS COURANTS » OU« JOURS CONSECUTIFS » 12. « JOUR OUVRE DE TEMPS TRAVAILLABLE» OU « JOUR OUVRE DE 24 HEURES DE TEMPS TRAVAILLABLE » OU« JOUR OUVRE DE 24 HEURES CONSECUTIVES DE TEMPS TRAVAILLABLE»

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6613. « TEMPS PERMETTANT » 14. « EXCEPTE » OU « EXCLU » 15. « SAUF SI COMMENCE PLUSTOT » 16. « SAUF SI UTILISE » 17. « COMPENSER LES STARIES » 18. « STARIES REVERSIBLES » 19. « AVIS DE MISE ADISPOSITION » 20. « PAR ECRIT » 21. « TEMPS PERDU DANS L’ATTENTE D’UN POSTE COMPTANT COMME TEMPSDE CHARGEMENT OU DEDECHARGEMENT » OU« COMME STARIES » 22. « NAVIRE A POSTE OU NON »OU « POSTE OU NON » 23. « NAVIRE AYANT REÇU LALIBRE PRATIQUE » ET/OU« AYANT ETE ENTRE ENDOUANE. » 24. « SURESTARIES » 25. « PRIME DE CELERITE » OU« DESPATCH » 26. « PRIME DE CELERITE SUR (TOUT) LE TEMPS OUVRE ECONOMISE » OU « SUR (TOUTES) LES STARIES ECONOMISEES » 27. « PRIME DE CELERITE SUR TOUT LE TEMPSECONOMISE » 28. « GREVE » REGLES 1. « PORT » signifie une zone dans laquelle les navires chargent ou déchargent des marchandises à un poste, un mouillage, une bouée ou un autre lieu similaire, et englobe aussi les lieux habituels où les navires attendent leur tour ou reçoivent l’ordre d’attendre leur tour ou y sont contraints, quelle que soit la distance entre ceux-ci et le port. Si le terme « PORT » n’est pas employé, mais que le port est (ou doit être) identifié par son nom, cette définition reste applicable. 2. « POSTE » signifie l’endroit spécifique dans un port où le navire doit charger ou décharger. Si le mot « POSTE » n’est pas employé mais que l’endroit spécifique est (ou doit être) identifié par son nom, cette définition reste applicable. 3. « ACCESSIBLE A SON ARRIVEE » ou « TOUJOURS ACCESSIBLE » signifie que l’affréteur s’engage à ce qu’un poste de chargement ou de déchargement disponible soit mis à la disposition du navire à son arrivée au port, qui doit pouvoir être atteint en sécurité et sans retard en l’absence d’évènement anormal. 4. « STARIES » signifie la période de temps convenue entre les parties durant laquelle le fréteur doit mettre et maintenir le navire à disposition pour le chargement ou le déchargement sans paiement de fret supplémentaire. 5. « PAR PANNEAU PAR JOUR » signifie que les staries doivent être calculées en divisant (A), la quantité de marchandises, par (B), le produit de la cadence journalière convenue par panneau par le nombre de panneaux du navire. Ainsi : Staries = Quantité de marchandises = Jours Cadence journalière x Nombre de panneaux Chaque paire de panneaux jumelés parallèles comptera pour un panneau.

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67Toutefois, un panneau apte à être travaillé par deux équipes simultanément comptera pour deux panneaux. 6. « PAR PANNEAU TRAVAILLE PAR JOUR » ou « PAR PANNEAU TRAVAILLABLE PAR JOUR » signifie que les staries doivent être calculées en divisant (A), la quantité de marchandises dans la cale la plus chargée, par (B), le produit de la cadence journalière convenue par panneau travaillé ou travaillable par le nombre de panneaux servant cette cale. Ainsi : Staries = Quantité dans la cale la plus chargée = Jours Cadence journalière par panneau x Nombre de panneaux utilisés pour cette cale Chaque paire de panneaux jumelés parallèles compte pour un panneau. Toutefois un panneau apte à être travaillé par deux équipes simultanément comptera pour deux panneaux. 7. « JOUR » signifie une durée de 24 heures consécutives courant de 0 heure à 24 heures. Toute partie de jour sera comptée à proportion. 8. « JOURS FRANCS » signifie des jours consécutifs commençant à 0 heure le jour suivant celui où une notification est faite et se terminant à 24 heures au dernier des jours dont le nombre a été stipulé. 9. « JOUR FERIE » signifie un jour ou une partie de jour, en dehors des périodes de repos hebdomadaire normales, où, selon la loi ou la coutume locale, le travail concerné durant ce qui aurait constitué des heures ordinaires de travail, n’est pas normalement effectué. 10. « JOURS OUVRES » signifie les jours qui ne sont pas expressément exclus des staries. 11. « JOURS COURANTS » ou JOURS CONSECUTIFS » signifie des jours qui se succèdent sans interruption. 12. « JOUR OUVRE DE TEMPS TRAVAILLABLE », ou « JOUR OUVRE DE 24 HEURES DE TEMPS TRAVAILLABLE » ou « JOUR OUVRE DE 24 HEURES CONSECUTIVES DE TEMPS TRAVAILLABLE » signifie un jour ouvré de 24 heures consécutives à l’exclusion de toute période durant laquelle les conditions météorologiques empêchent le chargement ou le déchargement du navire ou l’auraient empêché si les opérations avaient été en cours. 13. « TEMPS PERMETTANT » signifie que toute période durant laquelle les conditions météorologiques empêchent le chargement ou le déchargement du navire ne compte pas comme staries. 14. « EXCEPTE » ou « EXCLU » signifie que les jours indiqués ne comptent pas comme staries même si le chargement ou le déchargement est effectué pendant ces jours. 15. « SAUF SI COMMENCE PLUS TOT » signifie que si le chargement ou le déchargement est effectué alors que les staries n’ont pas commencé, le temps utilisé compte comme staries.

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6816. « SAUF SI UTILISE » signifie que si le chargement ou le déchargement est effectué pendant des périodes exclues des staries, alors que les staries ont commencé, le temps utilisé compte comme staries. 17. « COMPENSER LES STARIES » signifie que des calculs distincts doivent être faits pour le chargement et le déchargement et que tout temps économisé dans une de ces opérations doit être déduit de tout dépassement du temps alloué dans l’autre. 18. « STARIES REVERSIBLES » signifie qu’une option est donnée à l’affréteur d’additionner le temps alloué pour le chargement et le déchargement. Lorsque l’option est exercée, l’effet est le même que si une durée globale était spécifiée pour couvrir les deux opérations. 19. « AVIS DE MISE A DISPOSITION » signifie l’avis donné à l’affréteur, au chargeur, au réceptionnaire ou une autre personne comme requis par la charte-partie, que le navire est arrivé au port ou au poste, selon le cas, et qu’il est prêt à charger ou décharger. 20. « PAR ECRIT » signifie toute forme de reproduction de mots exprimée visiblement ; le mode de transmission peut inclure les moyens électroniques telles que les communications radio et les télécommunications. 21. « TEMPS PERDU DANS L’ATTENTE D’UN POSTE COMPTANT POUR UN TEMPS DE CHARGEMENT OU DE DECHARGEMENT » ou « COMME STARIES » signifie que si aucun poste de chargement ou de déchargement n’est disponible et que le navire ne peut pas remettre l’avis de mise à disposition depuis son lieu d’attente, tout temps perdu pour le navire compte comme si les staries couraient ou comme surestaries si les staries sont épuisées. Ce temps cesse de compter dès que le poste est disponible. Lorsque le navire atteint un lieu où il peut remettre l’avis de mise à disposition du navire, les staries ou les surestaries reprennent leur cours après cette remise, et dans le cas des staries, à l’issue de toute franchise de temps prévue dans la charte-partie . 22. « NAVIRE A POSTE OU NON » ou « POSTE OU NON » signifie que lorsqu’aucun poste de chargement ou de déchargement n’est disponible à son arrivée, le navire, dès qu’il atteint un lieu d’attente habituel au port ou hors du port, y est en droit de remettre l’avis de mise à disposition et les staries commencent conformément à la charte-partie. Les staries ou les surestaries cessent de courir dès que le poste devient disponible et reprennent leur cours lorsque le navire y est prêt à charger ou à décharger. 23. « NAVIRE AYANT RECU LA LIBRE PRATIQUE » et/ou « NAVIRE AYANT ETE ENTRE EN DOUANE » signifie que l’accomplissement de ces formalités n’est pas une condition préalable à la remise de l’avis de mise à disposition, mais que tout le temps perdu en raison du retard du navire dans l’accomplissement de l’une de ces formalités ne compte pas comme staries ou comme surestaries.

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6924. « SURESTARIES » signifie une somme contractuelle payable au fréteur en raison du retard causé au navire au-delà des staries dont le fréteur n’est pas responsable. Les surestaries ne sont pas sujettes aux exceptions applicables aux staries. 25. « PRIME DE CELERITE » ou « DESPATCH » signifie une somme contractuelle payable par le fréteur si le navire achève le chargement ou le déchargement avant que les staries n’aient expiré. 26. « PRIME DE CELERITE SUR (TOUT) LE TEMPS OUVRE ECONOMISE » ou « SUR (TOUTES) LES STARIES ECONOMISEES » signifie qu’une prime de célérité est due pour le temps compris entre la fin du chargement ou du déchargement et l’expiration des staries, à l’exception des périodes exclues des staries. 27. « PRIME DE CELERITE SUR TOUT LE TEMPS ECONOMISE » signifie qu’une prime de célérité est due pour le temps compris entre la fin du chargement ou du déchargement et l’expiration des staries, y compris les périodes exclues des staries. 28. « GREVE » signifie un mouvement social concerté de personnels causant un arrêt complet de leur travail lequel interfère directement avec les opérations du navire. Le refus de travailler en heures supplémentaires, la grève perlée ou le travail à la norme et toutes actions similaires qui ne causent pas un arrêt complet ne sont pas considérées comme une grève. Une grève s’entendra comme excluant ses conséquences lorsqu’elle a pris fin, telles que l’encombrement du port, ou les effets sur les moyens d’acheminement des marchandises vers le port ou à partir du port.

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ABREVIATIONS ET GLOSSAIRE DU SHIPPING

Groupement Maritime Saunier-Dreyer

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Table des matières

Préambule........................................................................................................3

Introduction .....................................................................................................4

Les données économiques ...........................................................................4

• Les besoins en transport maritime .....................................................4

• Une activité liée aux cycles économiques ..........................................6

• Le tramping ........................................................................................8

Le cadre du contrat d’affrètement au voyage ..........................................9

• La liberté contractuelle ......................................................................9

• Les cocontractants ...........................................................................10

Le fréteur.................................................................................10

L’affréteur................................................................................11

• L’intérêt d’affréter au voyage ............................................................12

La charte partie au voyage.........................................................................14

• Forme...............................................................................................14

• Loi applicable ...................................................................................14

• Validité..............................................................................................17

• Résolution ........................................................................................18

La force majeure....................................................................20

Incidence du connaissement sur les relations fréteur –affréteur .......................22

Incidence du connaissement sur le calcul du fret..............................................22

Ports sûrs, quais sûrs..................................................................................23

• Définition ................................................................................................23

• Qui garantit le caractère sûr ..................................................................23

• Choix du quai .........................................................................................26

Le navire, objet du contrat..........................................................................26

• Navigabilité et aptitude commerciale ......................................................27

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83• Erreur sur la capacité d’emport ..............................................................31

• Mise à la disposition ...............................................................................32

Le paiement du fret ......................................................................................34

• Détermination du fret ..............................................................................34

• Non paiement du fret ..............................................................................35

Arrivée du navire ..........................................................................................36

Obligation de charger ..................................................................................36

• L’intervention des manutentionnaires.....................................................41

• L’arrimage ..............................................................................................43

Voyage en droiture.......................................................................................45

Obligation de décharger..............................................................................47

• Désignation du port de déchargement ...................................................47

• Le déchargement ...................................................................................49

Staries, surestaries ......................................................................................51

• Suspension des staries ..........................................................................53

• La conoco weather clause......................................................................55

La cesser clause ...............................................................................................56

La saisie du navire ...........................................................................................57

La clause compromissoire..........................................................................58

• Les chambres arbitrales .........................................................................58

• Validité de la clause compromissoire .....................................................60

• Recevabilité de l’action du tiers porteur du connaissement...................60

Conclusion .....................................................................................................62

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Bibliographie..................................................................................................64

Annexes..........................................................................................................65

• Règles d’interprétation des staries .........................................................65

• Abréviations et glossaire du shipping .....................................................70

Table des matières.......................................................................................83

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