l'Institut Botanique et de la Flore Laurentienne' au ...

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l'Institut Botaniqu e et de la "Flore Laurentienne' 7 au Jardi n Botaniqu e Un live nouveau , une oeuvre d'éqiip un Projet magnifique (Par le R . F . Marie-Vict-orin ) -Yo/re camarade Dupire a ffné en son temps If dîner offert au R. F. Marie-Victorin, à l'occasion de la publication, de sa magistrale Flore laurcntienne. L'auteur avait prononcé à cette occasion un dis- cours toul plein de substance cl que nous aurions voulu depuis long- temps publier, il a malheureuse- ment fallu compter avec In polili- ane. provinc'alc. municipale fl fé- dérale.. ci tant d'autres choses. Au- jourd'hui même nous ne pouvons donner encore que des extraits de .ce discours, mais on u trouvera de •fo*l'intére,ssantr. détails, et qui gar- \dcnt toute leur actualité, sur l'Insti- tut Botanique, la "Flore Lauren- tienne" et le Jardin botanique. Nous les livrons au public en expri- mant tout notre regret de n'avoir pu les publier plus tôt et d'être 'Contraint de , /PS écourter encore. Me permettrez-vous d'abord de ! vous dire pourquoi, malgré mon ' peu de goût pour les fonctions of- ficielles, j'ai accepté avec recon- naissance l'hommage que vous avez voulu me rendre ce soir? i C'est que, chers collaborateurs. : chères collaboratrices, et vous aus- j si qui êtes nos élèves ou nos amis, jnous formons ensemble une fa- : mille, si je ne me trompe, la plus ] belle et la plus unie des familles, et ] que la rie de famille ne se conçoit 'pas sans ces haltes. ces récollec- tions, comme on dit dans le langa- jge hermétique des cloîtres, -- où j des gens qui vivent ensemble se î rapprochent un peu plus, se tou- Ichenl de la main, et se disent les uns aux autres: "Nous sommes là. jun seul coeur, une seule âme. rien ne saurait nous diviser!" L Institut Botaniqu e L'Institut Botanique es! une hum- ble chose dans le monde botatii- jque, dans le monde universitaire let, vous le pensez bien, dans le j monde tout court. Il a commencé pied d'oeuvre , pauvre et nu. 11 a j dû créer lui-même son instrument i vous n'avez été si puissant qu'au- | jourd'hui. Au fond, dans la métro- pole, votre volonté fait loi. 11 y a quelques années, dans une grande assemblée publique à Mai- sonnet] ve. vous promeiliez à notre ville un grand Jardin Botanique. Après l'élection, vous avez noble- ment tenu votre promesse. Puis, les jours sombres sont venus, la faveur capricieuse du peuple vous a laissé tomber. Durant ces années noires, j'ai porté avec précaution l'oeuvre qui avait reçu un com- mencement d'exécution, essayant rie lui garder la vie, en attendant des jours meilleurs. Vous êtes re- venu au pouvoir, porté par un nou- veau mouvement de la faveur po- pulaire. Pourquoi ne pas reprendre sé- rieusement cette belle idée? Pour- quoi ne pas attacher votre nom a une oeuvre d'intelligence au sujet de laquelle, il v a une remarquable unanimité dans l'opinion, dans la presse surtout? à une oeuvre qui serait peul-èlre la plus durable et la plus positive de votre adminis- tration? Quand on aura oublié les taxes que (".amillien Houde imposa pour sauver le crédit de Montréal, on se souviendra encore du Jardin magnifique qu'il donna à ses con- citoyens et au Canada dont notre ville esî le porlique. Bientôt, on célébrera le tricente- naire de Montréal. A la ville, à vo- ire ville, il vous faudra faire un cadeau, un royal cadeau. Mais Montréal c'est Ville-Marie, ("'est âne femme... Vous ne pouvez tout dc_ même pas lui offrir un égout collecteur ou un poste de. po- lice. . . Alors, pardieu! Mettez des fleurs à son corsage! Jetez-lui dans les bras toutes les Rosés, et tous les Lis des Champs! Kt puis, ne serait-il pas gentil que l'histoire de Montréal racontât quelque chose comme ceci: "11 y avait une fois, non pas un roi et une reine, mais un jeune pro- fesseur qui s'appelait Marie-Victo- rin. il avail un élève, à peine plus jeune que lui. plein de talent e! de tempe rame ni, qui s'appela il Carn il- lien Houde. l'ne belle el durable amitié lia bientôt les deux bomine.s, amitié qui avait son sif'se dans le sommet de l'âme, el qui devait par là résis- ter à l'usure des années. Or i! advint que le jeune .profes- seur, déjà voué à une grande mis- sion é duc air if p. reçut une petit;.' vocation dans la grande. Tl devint un i vers i la ire-botaniste cm botanis- lo-uni versitaire. on n'a jamais bien su lequel. Son obstinatio n ilut fit des disciples Ensemble, ils ouvri- rent le.s yeux de ie.urs compatriote s et leur révélèrent les trésors de la grgnde nature de Dieu. Il advint en même temps que l'élève d'autrefois. ,par la seule force de son intelligence et de sa- volonté, devint le maître incontesté fie sa vilU', îa métropole du pays Les deux amis s'en allaient ainsi par la vie, servant leur pays cha- cun à sa façon. Un jour, iis se ren- contrèrent. .Le Botaniste de-mand.i ait Maître de la C.ité de fonder un arand Jardin Botanique qui serait à la fois une institution scientifi- que, une école pour le peuple, et un joyau pour la métropole. Le Maître de lu Cité, conscient des difficultés d'ordre pratique, se fit 'de "travail, comme le protoplasme i crée la chlorophylle qui travaillera 1 pour lui. Il a dû faire plus. Il a dû créer son substratum, conquérir le plancher par empiétements suc- cessifs et gradués. Il a dû créer l'atmosphère, l'environnement, fai- re la lutte à de séculaires préjugés, ; et exiger le respect de la Science. Rappelez-vous les jours il fal- ilait supporter courageusement l'i- jSoJement splendide des idées nou- velles! Rappelez-vous les batailles que nous dûmes livrer, le beau chahut que créèrent certains arti- cles: "La Science et nous", "Dans le maëlstrom universitaire", et d'autres plus récents, Hâtons-nous de dire que les es- prits ont changé. On ne parle plus de la science aussi légèrement qu'autrefois. On la tolère. Quelque- fois même on l'encourage, moyen- ! nant docilité. Et, le dirai-je, les princes des lettres nous envoient même des ambassadeurs. Dans cette révolution,—car c'en est une. et profonde, et définitive, - nous avons peut-être été pour quelque chose. Pour peu de chose sans doute, car notre bonne for- tune a été de lever la voile au mo- ment où le vent passait. En croy- ant à des fleurs, nous les avons fait naître. Nous avons essayé de fonder nuelqiie chose de très hum- ble sur le plan scientifique, et puis un jour, nous avons organisé la Croisade des Enfants', la milice sou- riante des C.J.N. dont je salue ici ce soir le généralissime, mon vieil ami le F. Adrien. Mais quelque modestes que puis- ' sent être ces réalisations, il est une chose que tout Je monde autour de nous reconnaît. C'est que, depuis bientôt quinze ans. nous avons été capables de collaboration, que nous avons pu pratiquer à l'Institut Bo- tanique et dans sa sphère d'influ- ence, le difficile travail d'équipe. Mes chers collaborateurs, c'est ; votre grand honneur et votre grand mérite. Ça été aussi votre grande sagesse. En dépouillant l'individu- alisme haïssable, vous avez élevé une maison qui est la vôtre, que vous agrandirez quand je ne serai plus, et que vous embellirez: Thaï which thé foiiulain sends forth Rcturns again to thé fountafn. La Flor e Laurentienn e II y a .quelques jours, errant dans les sombres lieux mon très cher confrère, le F. Julien, avec un plomb viî. concoctait la foelle cho- se que vous savez, j'entendis un ty- pographe faire la réflexion qu'à l'Institut Botanique, tout le monde paraissait s'intéresser vimement à la Flore Laurentienne. -que tous les membres du personnel étaient ve- nus à tour de rôle suivre les pro-

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l'Institut Botanique e t de la "FloreLaurentienne'7 a u Jardi n Botaniqu e

Un l ive nouveau , une oeuvre d'éqiipun Projet magnifique

(Par l e R . F . Marie-Vict-orin )

-Yo/re camarade Dupire affné en son temps If dîner offert auR. F. Marie-Victorin, à l'occasionde l a publication, de sa magistraleFlore laurcntienne. L'auteur avaitprononcé à cette occasion un dis-cours toul plein de substance clque nous aurions voulu depuis long-temps publier, il a malheureuse-ment fallu compter avec In polili-ane. provinc'alc. municipale fl fé-dérale.. ci tant d'autres choses. Au-jourd'hui même nous ne pouvonsdonner encore que des extraits de

.ce discours, mais on u trouvera de•fo*l'intére,ssantr. détails, et qui gar-\dcnt toute leur actualité, sur l'Insti-tut Botanique, la "Flore Lauren-tienne" et le Jardin botanique.Nous les livrons au public en expri-mant tout notre regret de n'avoirpu les publier plus tôt et d'être

'Contraint de , /PS écourter encore.

Me permettrez-vous d'abord de! vous dire pourquoi, malgré mon' peu de goût pour les fonctions of-ficielles, j 'a i accepté avec recon-naissance l 'hommage que vous avezvoulu me rendre ce soir?

i C'est que, chers collaborateurs.: chères collaboratrices, et vous aus-j si qui êtes nos élèves ou nos amis,jnous formons ensemble une fa-: mille, si je ne me trompe, la plus] belle et la plus unie des familles, et] que la rie de famille ne se conçoit'pas sans ces haltes. — ces récollec-tions, comme on dit dans le langa-

jge hermétique des cloîtres, -- oùj des gens qui vivent ensemble seî rapprochent un peu plus, se tou-Ichenl de la main, et se disent lesuns aux autres: "Nous sommes là.

jun seul coeur, une seule âme. rienne saurait nous diviser!"

L Institut Botaniqu eL'Institut Botanique es! une hum-

ble chose dans le monde botatii-jque, dans le monde universitairelet, vous le pensez bien, dans lej monde tout court. Il a commencé;à pied d'oeuvre , pauvre et nu. 11 a

j dû créer lui-même son ins t rumenti vous n'avez été si puissant qu'au-| jourd 'hui . Au fond, dans la métro-pole, votre volonté fait loi.

11 y a quelques années, dans unegrande assemblée publique à Mai-sonnet] ve. vous promeiliez à notrev i l l e un grand Jardin Botanique.Après l 'élection, vous avez noble-ment tenu votre promesse. Puis,les jours sombres sont venus, où lafaveur capricieuse du peuple vousa laissé tomber. Durant ces annéesnoires, j 'ai porté avec précautionl 'oeuvre q u i a v a i t reçu un com-mencement d'exécution, essayantrie lui garder la vie, en attendantdes jours meilleurs. Vous êtes re-venu au pouvoir, porté par un nou-veau mouvement de la faveur po-pulaire.

Pourquoi ne pas reprendre sé-rieusement cette belle idée? Pour-quoi ne pas attacher votre nom a

une oeuvre d'intelligence au sujetde laquelle, il v a une remarquableunanimité dans l 'opinion, dans lapresse sur tout? à une oeuvre quiserait peul-èlre la plus durable etla plus positive de votre adminis-t ra t ion? Quand on aura oublié lestaxes que (" .ami l l ien Houde imposapour sauver le crédit de Montréal,on se souv iendra encore du J a r d i nm a g n i f i q u e qu'il donna à ses con-citoyens et au Canada dont notreville esî le porl ique.

B i e n t ô t , on célébrera le tr icente-naire de Montréal. A la ville, à vo-ire v i l l e , i l vous faudra faire uncadeau, un royal cadeau. MaisMontréal c'est Vi l le -Mar ie , ("'estâne femme... Vous ne pouveztout dc_ même pas lui of f r i r unégout collecteur ou un poste de. po-lice. . . Alors, pardieu! Met tez desfleurs à son corsage! Jetez-lui dansles bras toutes les Rosés, et tousles Lis des Champs!

Kt puis, ne serait-il pas gent i lque l 'h is toire de Montréal racontâtque lque chose comme ceci:

"11 y avait une fois, non pas unroi et une r e ine , mais un jeune pro-fesseur qui s ' appela i t Marie-Victo-r i n . il a v a i l un élève, à peine p lusj eune que lui. plein de t a l e n t e! detempe rame n i , q u i s 'appela i l Carn i l -lien Houde.

l'ne bel le el d u r a b l e ami t ié l iabientôt les deux bomine.s, amitiéqui a v a i t son sif'se dans le sommetde l 'âme, el qui d e v a i t par là résis-ter à l 'usure des années.

Or i! advint que le jeune .profes-seur, déjà voué à une grande mis-sion é duc air i f p. reçut u n e petit;.'v o c a t i o n dans la grande. Tl dev in tun i vers i la i re -botanis te cm botanis-l o - u n i ve rs i t a i re . on n'a jamais biensu lequel . Son obstinatio n i lu t f i tdes disciples Ensemble, ils ouvri-rent le.s yeux de ie.urs compatriote set l eu r r évé lè ren t les trésors de lag r g n d e n a t u r e de Dieu.

I l a d v i n t en même temps quel 'é lève d 'au t re fo is . ,par la seuleforce de son intell igence et de sa-volonté , d e v i n t le maî t re incontes téfie sa vi lU' , îa métropole du pays

Les deux a m i s s'en a l l a i e n t a insipar la vie, servant leur pays cha-c u n à sa façon. Un jour, iis se ren-c o n t r è r e n t . .Le B o t a n i s t e de-mand.iait M a î t r e de la C.ité de fonder unarand J a r d i n Botanique qui seraità la f o i s une i n s t i t u t i o n sc ient i f i -que , une école pour le peuple, etun joyau pour la métropole. LeMaî t re de lu Cité, conscient desdifficultés d 'ordre p ra t ique , se fit

' d e "travail, comme le protoplasmei crée la chlorophylle qui travaillera1 pour lui. Il a dû faire plus. Il a dûcréer son substratum, conquérir leplancher par empiétements suc-cessifs et gradués. Il a dû créerl'atmosphère, l'environnement, fai-re la lutte à de séculaires préjugés,

; et exiger le respect de la Science.Rappelez-vous les jours où il fal-

i l a i t supporter courageusement l'i-jSoJement splendide des idées nou-• velles! Rappelez-vous les bataillesque nous dûmes livrer, le beauchahut que créèrent certains arti-cles: "La Science et nous", "Dansle maëlstrom universitaire", etd'autres plus récents,

Hâtons-nous de dire que les es-prits ont changé. On ne parle plusde la science aussi légèrementqu'autrefois. On la tolère. Quelque-fois même on l'encourage, moyen-

! nant docilité. Et, le dirai-je, lesprinces des lettres nous envoientmême des ambassadeurs.

Dans cette révolution,—car c'enest une. et profonde, et définitive,

- nous avons peut-être été pourquelque chose. Pour peu de chosesans doute, car notre bonne for-tune a été de lever la voile au mo-ment où le vent passait. En croy-ant à des fleurs, nous les avonsfait naître. Nous avons essayé d efonder nuelqiie chose de très hum-ble sur le plan scientifique, et puisun jour, nous avons organisé laCroisade des Enfants', la milice sou-riante des C.J.N. dont je salue icice soir le généralissime, mon vieilami le F. Adrien.

Mais quelque modestes que puis-' sent être ces réalisations, il est unechose que tout Je monde autour denous reconnaît. C'est que, depuisbientôt qu inze ans. nous avons étécapables de collaboration, que nousavons pu pratiquer à l 'Institut Bo-tanique et dans sa sphère d'influ-ence, le difficile travail d'équipe.

Mes chers collaborateurs, c'est; votre grand honneur et votre grandmérite. Ça été aussi votre grandesagesse. En dépouillant l'individu-alisme haïssable, vous avez élevéune maison qui est la vôtre, quevous agrandirez quand je ne seraiplus, et que vous embellirez:

Thaï which thé foiiulain sends forthRcturns again to thé fountafn.

La Flor e Laurentienn e

II y a .quelques jours, errant dansles sombres l ieux où mon très cherconfrère, le F. Julien, avec unplomb vi î . concoctait la foelle cho-se que vous savez, j 'entendis un ty-pographe faire la réflexion qu'àl ' Ins t i tu t Botanique, tout le mondeparaissai t s'intéresser vimement àla Flore Laurentienne. -que tous lesmembres du personnel étaient ve-nus à tour de rôle suivre les pro-

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grès du travai l , que l'enthousiasmeavait gagné jusqu'à leurs épouses.e n f i n .rue cette oeuvre semblaitbien 1X Juvre de tous.

De sentir que tout le monde voit,ce que je vois moi-même, cela m'arajeuni , véritablement! Le seul mé-rite que Je me reconnaisse en toutceci, c'est d'avoir réussi à forgeravec ces matériaux précieux et di-vers que sont les riches personna-lités de mes collaborateurs un êtremnral orienté 'dans un sens défini.

Il ne .faut donc pas s'étonner siune si -belle .famille a produit sonfruit naturel: un enfant. Commel'amour lui-même, l ' ami t i é et le dé-vouement sont de merveilleux créa-teurs. Et il a été (prouvé encore unefois que ce que le coeur veut etcherche sera trouvé...

l! me souvient du jour déjà loin-1tain où, .pour la première fois, j'ou- }vris subitement les yeux à la ma- 'jesté de Ja nature canadienne.C'était dans la forêt du Nord, Lafeuille tremblante de l'Eraîble. Deslichens sur les tron.cs gris. Un raide soleil sur le bloc erratique quicommençait déjà à me parler de laprofondeur du passé, à redresser

i ma perslpective_^u_.monde..,

Ce jour-là, je conçus le -projet dela Flore Laurentienne.

j Un bloc de marbre était si beau .Qu'un statuaire en fit l'emplette.Qu'en fera, dit-il, mon ciseau?

'Sera-t-il dieu, table ou cuvette?Durant trente ans. Je ciseau a

travaillé, aidé par le poussoir dela critique constructive que j 'avaisl'immense avantage de trouver au-tour de moi. L'oeuvre est -devantvous. Ce Tt'^st pas un dieu- Ce n'estpas. non plus, je l'espère, une cu-vette. C'est une oeuvre de dur la-beur et de bonne volonté.

Si je ne craignais que l'on m'ac-cusât d'incohérence dans les ima-ges, je vous dirais que c'est aussiune clef d'or qui pourra ouvrir ànos 'comjpatriotes, et .parliculière-

; ment à la Jeunesse nouvelle, le seulj Paradis que nous n'avons pas per-du. Pour oeuvrer cette clef, l'au-

! teur a employé toutes les modestes! ressources de son intelligence, eny ajoutant celles du coeur et del'imagination, ressources qui nesont pas & -dédaigner, même dan"l'oeuvre scientifique, .malgré Irdanger des "petits romans".

Autour de moi, d'excellents col-laborateurs se sont appliqués à po-

| lir cette clef, à Incruster, a lai rendre plus belle et plus utile. Ces! collaborateurs à tous les degrés.: depuis l'artiste-illustrateur jusqu'autypographe, je ne les nommerai pasici, parce que la liste en est longueet que j'aurais peur de faire desoublis et des comparaisons odieu-ses.

Mais vous les connaissez foien,puisque vou êtes tous des membresde notre -famille. Ifs sont ici autou"de moi, et TOUS lirez leurs noms el

.leurs mérites dans les .pages de la.préface.

Je ,me contenterai de dire d'uneseule venue, que sans leur vai l lantecollaboration et leur admirable

, désintéressement, jamais n'auraitété possible cette oeuvre qui. si im-parfai te qi^'ollp soit, est encore

assez importante 'du point de vuescientifique, et du point de vue na-tional, pour jus t i f i e r à elle seulel'existence de l 'Institut Botanique,s'il en était encore besoin.

Si imparfaite qu'elle soit, ai-jedit. Oui! et ce n'est pas là un cli-ché poli destiné à provoquer desprotestations et des compliments.Je le -disais il n'y a jpas longtempset je le répète ici: la Flore Lauren-tienne e.sl une suite ordonnée debalbutiements, en réalité une Joa-guc confession d'ignorance.

Le jardi n botaniqu e

Après avoir salué ses collabora-teurs, ses parents, ses amis, présent, 1'à la réunion, l'orateur, s'adressant

j tout particulièrement au maire deMontréal, qui fut son élève, pour-suivait :Monsieur 1g Maire et cher ami.

J'apprécie comme je le. dois vo-tre présence ici. Je sais de combiend'églises plus ou inoins profanesvous avez la sollicitude, et je re-grette vivement d'ajouter encoreune corvée à celle du jour qui v ien tde s'écouler.

Votre présence ici. et celle devieux amis comme Emile Rochon.Ernest Loiselle, Paul Boucher, Kr-nest MacKay, Orner Lefcbvre P!d'autres, me reporte à une périodeantérieure de ma vie qui fut rlfgrand labeur, et qui ne fut pas san,<joie.

Je veux vous (lire ce soir, cherami, avec combien d'attention ïevous suis pas à pas dans la vie pu-

, blique, et combien j'admire votrei courage et votre sincérité. Les hon-| neurs dont on vous a comblé ré-cemment et qui nous ont réjouis,

'n'ajoutent rien à votre mérite.Pour tous ceux qui croient en vous— et .j'en suis - vous restez Ca-millien Houde tout court. C'estbeaucoup dire. Comme nous tous.sans doute, vous vous êtes Irompéparfois, mais vous avez une façonà vous de vous tromper qui n'estpas sans charme et sans panache....

Mon cher ami. j'ai maintenantquelque chose à vous dire, et jevous demande de m'êcouter com-me vous m'écotitiez autrefois auCercle LaSalle, alors que jeunesl'un et l'autre, nous cherchions no-tre voie. Vous êtes à un grand mo-ment de votre vie publique. Jamaisfit ibien un peu t i rer l'oreille. IL yavait les échevins, i î y avait lesbanques, il y avait le Board o fTrade.

Mais C a m i l l i e n Houde a v a i t laY Aiglon, — il le savait par coeur.— et il se rappelait ies râlineriesdu duc de Reichsladt demandantun tronc au v ie i l empereur autri-chien :Ce seraïl joli qu'un jour.'un Empe-

l retirPour yâler .son enfant, bouleversai

l'Histoire!El r.araiî î l ien Houde fonda le Jar-

din B o l u n i c j u e de M o n t r é a l . Leséchevins s'jnrlinèren!. f . c Board o fTrade dm a:;cepk jr que, pour tnu>fois, l'est de Montréa l s 'embell i td'autre chose -Que d ' inc iné ra teur set d'abattoirs.

l'ne ocsis f u i créée. l ' n e griM'?en fer forgé avec en exergue:Voyez le s Li s de s Champs! Des ar-

bres, des fleurs. Des bassins cons-tellés de nénuphars, l.e gazouille-ment de l'eau et le babil des en-fants. L'Ecole de la Route grandeouverte pour le peuple. Touïe laLaurentie rassemblée comme surles pages d 'un grand livre.

Le botaniste avai t écri t : L a Flo-re Laurentienne qui é ta i t une sym-phonie inachevée, Ca.mill ien Houdetermina l 'oeuvre en la déployant surle sol. face au soleil, en la transcri-vant dans la réalité des formes, descouleurs, des parfums. . .

Donnez-nous ce Jardin, qui serale premier Jardin b o t a n i q u e muni-cipal du Canada, el je vous pro-mets que nous en ferons l 'un desplus beaux, el des plus remarqua-bles de l 'Amér ique du Nord.

Vers l'aveni r

Et . m a i n t e n a n t ' ? .pour f i n i r , jem'adresse encore à toi, ô mon .beaulivre, enfant de t a n ! de labeurs ïlde t a n t d 'amour.

Mieux .que personne, je connaistes lacunes, tes faiblesses.

"Un livre, a d i t quelqu'un qui s'yconnaissait, on n'apprend à l'écrire,comme on le devrait , que lorsqu'ona f i n i de l'écrire. Arrivé au derniermot, avec l'expérience acquise à lupeine, il faudrai t le recommenceret le refaire entièrement/'

Mais je t ' a ime-quand même, et jet 'a ime coimme cela, parce que lues une sorte de poème esotériqueoù je puis lire des souvenirs, dessymboles intelligibles à moi seul,et aussi une oeuvre d'alluvion à la-quelle chacun des très chers amisqui m'entourent est venu apporter&a .parcelle. Tu vas qui t ter dans uninstant le -berceau de rosés où de.smains discrètement dévouées t'ontplacé, pour l'en voler, en ba t t an tdes pages, vers ton destin, qui seranon seulement la Grande Vallée,mais le monde lui-même.

Je te vois sur les rayons des -bi-bliothèques .botaniques, partout oùl'on se .penche sur la brillante ta-pisserie de la flore du monde, surles bords de la Neva et -sur ceuxde J'Jsar. à Paris et à Berlin, àLon3res et au Cap.

Je vois les botanistes chenusfeuilleter tes pages, cherchant con-firmation ou opposition à leursidées favorites. Je vois, à New-York,Mackenzie horrifié par la nomen-clature conformiste. A Ro-jton. Fer-nald réagissant avec énergie de-vant la trilogie des Actaea. et de-vant l'Oenothera Victorinii, une es-pèce fai te par de simples cytolo-gistes! Je vois, à Paris, l 'antiqueConstantin se délectant dans lesétudes sur les mycorrhizes que jen'ai jamais faites, et à Montréal,mon ami Lîovd dire en secouant sapipe: "A;o Ctricularia ever looï:edthat way!"

Mais je te vois su r tou t , ô monbeau livre, semant partout, dans laVallée, la Joie de Connaître. Entreles mains des professeurs: laïques,religieux, religieuses, à qui tu révé-leras, je l'espère, sinon de nouveaux(•Jeux, au moins une nouvelle terre.Je te vois sur le bureau de la petiteinstitutrice de l'école du Rang, quiaura commencé à le connaître àson Ecole Normale et qu i , grâce àtoi. apprendra à écouler la grandevoix qui monte de ia terre.

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Je te vois e n f i n , et c'est sur celtevision que je m'arrête avec le plusde bonheur, sur le coin de la tablede famil le , à la campagne, sous lalampe à pétrole, l.a tête appuyéesur son poing, un petit garçon re-garde les belles images. Ail leurs.une t ' ÎUet le aux yeux bleus, les t r a i t slendus d 'é tonnemeni . demande à laNa tu re ta leçon du Célastre el dela Sarracénie. O les enfan t s , pourqui tout est perpétuel miracle! gé-nies méconnus uni mon ten t à l'as-saut du monde, par la connaissanceel la possession, d 'un j e t !

On n'a pas passé v i n g t années desa vie en contact avec les âmes jeu-nes sans en avoi r gardé l ' empre in -te profonde. sans porter sur lenouveau théâ t re où la vie vous amè-ne, ia nostalgie de cet âge délicieuxde l ' enfance .

De voir tout cela, par les yeuxde mon i m a g i n a t i o n . - qui sont en-core bons, me dit-on - mon coeurse réchauffe , et soudain, pris àmon propre piège, comme JohnKeats. je sens sur moi pousser desfleurs!

Mais l a Providenc e ne m'a paslaissé dans ce jardin de l 'enfance,le plus beau qui soit . Elle m'a as-signé une autre tâche, très précise,dans un autre milieu. Cette soiréeel cet anniversai re i n v i t e n t à la ré-f l ex ion , à la révision du but de. lavie.

Dans t a barqu e universitair e

Avec l'habit que je porte, cl quim'honore, qu'est-ce que je f a i s dansla barque j ' a l la i s dire dans la ga-lère un ivers i ta i re? Qu'esl-ce quim'y relient?

La ferme conviction que la Con-naissance, la Science, J3 Nature .

' l 'Amour et la Foi que tout ceialest Un. Qu'à une époque où t a n tde dévots à courte vue d'une part.

i c i t a n t d e prétentieu:. d i l e t t an tes: d ' a u t r e oart, déchirent chacun fiei son côté la tunique sans coulurei de la Vérité, c'est fa i re oeuvre deVie, oeuvre de Vérité, que de bran-dir humblement , mais courageuse-ment, d'une seule m a i n , ces deuxflambeaux d iv ins de la Connaissan-ce et de l 'Amour, d'essayer de lespasser aux autres hommes, en at-tendant que nous soit donné celuique nous at tendons.

Celui que nous at tendons? Oui!! Celui (m'attendent nos âmes mo-j dénies, bouleversées par la con-

f r o n t a t i o n i n a t t e n d u e d 'un riche hé-ritage sp i r i tue l venu du fond desâ#es chré t iens , et de la r é v é l a t i o n

d'une perspective nouvelle et d'uneeffarante profondeur : la Science.

Celui que nous at tendons devraêtre à la foi François d'Assise, etFrançois Bacon. 11 réunira en laforte matrice de son âme les deuxpensées, les deux sagesses, et decette puissante féconda t ion na î t rale salut spirituel du monde ou. sivous le voulez, le saint du mondede l 'esprit. Car le .salut du monde,qu'est-ce autre chose que le bonheurdes hommes? El ie bonheur deshommes, n'est-ce pas la communionà la beauté essentielle de la véri té,de toute la Vér i lé , c'est-à-dire auD i v i n !

Frère MARIE-VICTORI N