Lille by Inria n°6 : quel monde numérique dans 50 ans ?

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FOCUS > BLOCKCHAIN : COLLABORATION AVEC UTOCAT BD > GO TOUCH VR : LE VIRTUEL AU BOUT DES DOIGTS FOCUS > ClinMine : ANALYSER LES PARCOURS PATIENTS À L’HÔPITAL #06 LE MAGAZINE DU CENTRE INRIA LILLE - NORD EUROPE DEC. 2017 DOSSIER QUEL MONDE NUMÉRIQUE DANS 50 ANS ?

Transcript of Lille by Inria n°6 : quel monde numérique dans 50 ans ?

focus >

Blockchain : collaBoration avec Utocat

BD >

Go toUch vr :le virtUel aU BoUt des doiGts

focus >

ClinMine :analyser les parcoUrs patients à l’hôpital

#06

LE MAGAZINE DU CENTRE INRIA LILLE - NORD EUROPE

DEc. 2017

DossIER

Quel monde numériQuedans 50 ans ?

EDITo

Créé en 1967, Inria célèbre cette année ses 50 ans. Pour cette occasion, l’institut a choisi de se tourner vers l’avenir et les célébrations d’anniversaire se sont déroulées autour du mot d’ordre « imaginons notre futur numérique ».

Le centre Inria Lille – Nord Europe a organisé, le 5 octobre à la Plaine Images, l’événement « Forum numérique 2067 ». Cette manifestation a été conçue pour confronter les points de vue entre les experts des différentes disciplines abordées et les passionnés du numérique. Quatre tables rondes thématiques ont ainsi permis au public de dialoguer et d’interroger les experts, en abordant la prospective du numérique dans le contexte du travail, de l’environnement, de la santé et des loisirs. Vous avez été près de 200 à être présents à cet anniversaire participatif, contribuant à la richesse et à la qualité des échanges.

Le dossier de ce numéro « Lille by Inria » revient donc sur le « Forum numérique 2067 » et sur les débats passionnants qui s’y sont déroulés. Ce magazine fait également honneur à de beaux projets, dont la création de la start-up Go Touch VR, spécialisée en réalité virtuelle et issue de recherches menées dans le centre.

Le 31 janvier 2018, nous aurons le plaisir d'accueillir un cours de Gérard Berry, informaticien et professeur émérite du Collège de France. Je vous invite tous et toutes à venir assister à cette conférence unique, qui aura lieu au learning center LILLIAD de l’Université de Lille.

En 2018, nous célébrerons cette fois les 10 ans du centre Inria Lille – Nord Europe, et l’inauguration de notre nouveau bâtiment, le bâtiment Place situé sur le site d’excellence d’EuraTechnologies. Ces deux événements phares de 2018 nous permettront de vous convier, à nouveau, pour fêter ensemble l’excellence scientifique d’Inria, mise au service du transfert technologique et de la société.

Je vous souhaite à tous et toutes de passer de très belles fêtes de fin d’année avec vos familles et vos proches.

Isabelle HERLIN

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sommAIRE

DEssInE-moI lA REchERchE 12-13

focus 14-15• Blockchain : collaboration avec Utocat

focus 16-17• ClinMine : analyser les parcours patients à l’hôpital

BEsT-of 18-19

poRTRAIT 20-21

REnDEz-vous 22

conTAcT 23

DossIER

• Forum Numérique 2067 : quel monde numérique dans 50 ans ?

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fAcE A fAcE• Antoine Petit 04• Nicolas Lebas 05

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Semestriel édité par Centre de recherche Inria Lille - Nord Europe : Parc scientifique de la Haute Borne, 40, avenue Halley. Bât. A, Park Plaza, 59650 Villeneuve d’Ascq. [email protected]. Directrice de publication : Isabelle Herlin. Rédactrice en chef : Marie-Agnès Enard. Coordinatrice : Marion Blasquez. Conception graphique et mise en page : Élise Cattoire agence KaméléCom, 11/1 sentier du Christ, 59960 Neuville-en-Ferrain. Rédacteurs : Franck Deflandre agence KaméléCom et service communication et médiation Inria Lille - Nord Europe. Crédits photos : © Inria / Photo C.Mangin - Inria / Photo C. Morel - Inria / Photo G. Scagnelli - Inria / Photo A. Decarpigny - Inria / Photo Kaksonen - Inria / Photo C. Tourniaire - Inria / Photo P. Caron - Inria / Photo N. Fagot © Photo N. Lebas - © Photo J. Niehren. © Fotolia. Impression : C&P Partenaires Conseil - 03 20 27 11 89. Le centre remercie chaleureusement l’ensemble des contributeurs, collaborateurs et partenaires de ce sixième numéro de Lille by Inria. Imprimé en décembre 2017 - Série limitée à 1000 exemplaires.

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> Quels sont les grands enjeux à venir dans le domaine des sciences du numérique ?

La recherche, dans les sciences du numérique comme ailleurs, s ’ inscrit sur le long terme. Les enjeux de demain ne sont pas nécessairement connus

aujourd’hui. C’est ce qui fait le charme et la difficulté de la recherche. Dans les sciences du numérique, pour l’instant, l’attention médiatique se concentre autour de sujets comme la vision par ordinateur, le traitement automatique

de la parole, la cybersécurité, les m o d è l e s m a t h é m a t i q u e s , l e s interfaces, le big data, l’internet des objets, le calcul haute performance, le tout étant souvent regroupé, un peu abusivement , sous le concept d’intelligence artificielle. Les interactions avec les autres sciences mais aussi avec le monde économique et la société de manière générale représentent un autre enjeu important. Nos scientifiques doivent répondre à des sollicitations de nombreux secteurs qui veulent maîtriser la transition numérique de leurs activités. Cette demande sociale de compréhension et d’explications incite en particulier les sciences du numérique à être très vigilantes sur les questions d’éthique.

> Quelle sera la stratégie d’Inria pour répondre à ces défis ?

La reconnaissance de la qualité de ses activ i tés et la mise en pratique de sa devise « Excellence scientifique au service du transfert technologique et de la société » offrent à Inria de formidables opportunités de coopération. L’institut a la capacité de mobiliser ses chercheurs et chercheuses sur des sujets clés issus de problématiques internes aux sciences du numérique mais aussi en réponse à des demandes extérieures. Face à l’ampleur du défi, Inria devra sélectionner ses collaborations afin d’être en mesure d’y consacrer à chaque fois une « force de frappe

scientif ique » suff isante. Notre institut doit continuer à tenir compte de l ’ impact des recherches qu’il conduit, pouvant prendre des formes très diverses allant de l’avancée des connaissances, à la création de spin-offs en passant par la production de logiciels, tout en rappelant que l’impact ne signifie pas forcément court terme.

> Et vous, en tant que citoyen, comment imaginez-vous notre monde numérique en 2067 ?

Un scientifique n’a aucune capacité particulière à se transformer en prospectiviste. Cependant, je suis convaincu que le futur sera numérique ou ne sera pas. Dans 50 ans, le monde dans lequel nous vivrons sera celui que nous aurons choisi de construire en fonction de nos valeurs, de nos cultures et de nos choix de sociétés. Dans ce futur numérique, les logiciels et les environnements scientifiques seront de plus en plus performants. Il appartient à la société de faire en sorte que ces progrès bénéficient au plus grand nombre et ne soient pas accaparés par quelques uns, individus ou grandes firmes internationales, pour leur seul profit.

º 50ans.inria.fr

// fAcE A fAcE

InTERvIEwsantoine petit > président directeUr Général d'inria

#06 DEcEmBRE 2017 05

nicolas leBas >vice-président charGé de l’enseiGnement sUpérieUr, la recherche et les Universités réGion haUts-de-France

> Inria célèbre ses 50 ans, l’occasion de faire un exercice de prospective à l’horizon 2067. Quels sont les grands enjeux à venir autour du numérique à l’échelle d’une région ?

Pour accompagner la révolution numérique dans laquel le nous sommes engagés, l’action publique est essentielle. Elle doit permettre à la Région Hauts-de-France de saisir les opportunités en matière d’innovation et d’emploi mais son rôle est aussi de veiller à limiter les inégalités que pourrait engendrer la transformation de notre société. Depuis de longues années, le dynamisme de la Région dans le domaine du numérique est porté par des pôles d’excellence reconnus mais aussi par des expérimentations réussies dans les domaines de la formation, de la santé, de l’e-administration, des arts numériques ou des transports par exemple. Désormais, de plus en plus de territoires s’approprient cette transformation numérique à travers le développement d’infrastructures à très haut débit et la mise en œuvre de plans d’action numériques locaux. Au niveau de la Région, l’accompagnement de la transition numérique s’inscrit dans un projet global pour plus d’innovations, plus d’équité et plus d’emplois. Cette orientation est étroitement liée à la Troisième révolution industrielle (Rev3) basée sur la transition énergétique et les technologies numériques.

> Quelle stratégie déployez-vous pour répondre à ces enjeux ?

À travers notre politique régionale, incarnée par Christophe Coulon, Vice-président en charge du développement numérique, nous entendons relever quatre défis majeurs : Garantir une égalité dans l’accès au très haut débit; Encourager le développement des usages numériques dans nos politiques régionales mais aussi dans le quotidien des habitants en accompagnant les pro je ts d’innovation numérique et sociale et l’émergence d’un réseau de Tiers Lieux; Favoriser la création d’emplois en développant une filière numérique, en aidant les entreprises à aborder cette transition digitale et en formant

aux nouveaux métiers ; Fédérer les acteurs de la transition numérique et coordonner notre action avec celle de nos partenaires extérieurs pour être à la hauteur de nos ambitions dans le domaine. > Et vous, en tant que citoyen, comment imaginez-vous notre monde numérique en 2067 ?

Dans mon idéal, en 2067, le numérique aura aboli les distances. Il rendra l’excellence accessible à l’ensemble du territoire et on pourra par exemple se faire soigner à distance. Dans 50 ans, le numérique saura traiter des volumes de données qui nous dépassent aujourd’hui et dont nous saurons faire un usage prédictif, donc préventif sans oublier les garde-fous éthiques indispensables.

º hautsdefrance.fr

// DossIER

_environnement

_santé

_Loisirs

_travaiL

QUeL MoNde NUMériQUe dANs 50 ANs ?

06

sommAIRE

lEs 50 Ans D'InRIA 07

lE TRAvAIl 08

l'EnvIRonnEmEnT 09

lA sAnTE 10

lEs loIsIRs 11

#06 DEcEmBRE 2017 07

forum numérique 2067 < DossIER \\

lEs 50 Ans D'InRIA :

Un anniversairetoUrné vers l'avenir

En 2017, Inria célèbre ses 50 ans. L’évolution de l’institut, créé en 1967, est étroitement liée à l’essor des sciences informatiques. Née d’une volonté politique forte de

donner à la France les moyens de se doter de technologies de pointe, Inria (IRIA à ses débuts) s’est toujours développé dans un souci de proximité avec le monde de l’industrie. Dès le début des années 80, Inria mise sur l’excellence de ses recherches pour renforcer ses actions de transfert de compétences et de technologies. Parallèlement, l’institut, à l’origine de la création d’un réseau de chercheurs européens, affirme encore un peu plus sa vocation internationale. En 1994, un premier plan stratégique engage Inria dans de nouveaux défis scientifiques dans des thématiques très précises.

En 2002, l’institut continue de grandir avec l’ouverture de nouveaux centres de recherche (Bordeaux, Lille, Saclay) qui viennent s’ajouter aux cinq sites historiques (Rocquencourt, Rennes, Sophia Antipolis, Nancy et Grenoble). De nouveaux moyens qui permettent à Inria de contribuer au rayonnement des sciences du numérique à travers le monde entier. À l’occasion de ses 50 ans, l’institut souhaite proposer d’imaginer ensemble le monde numérique à l’horizon 2067, dans un jeu de prospective collective. Le centre Inria Lille – Nord Europe a donc organisé le « Forum Numérique 2067 » à la Plaine Images localisée à Tourcoing. L’objectif était de proposer au public d’échanger sur le monde numérique en 2067 et de confronter les points de vue avec des spécialistes du monde économique, académique ou

médiatique sur quatre grands thèmes à fort impact sociétal. Près de 200 personnes ont participé à 4 sessions sur les thèmes du travail, de la santé, de l’environnement et des loisirs qui ont été préparées en collaboration avec des scientifiques du centre Inria de Lille. Nous vous proposons de revenir sur ces sessions pour en évoquer les grandes idées qui ont émergé lors de ces échanges.

_Isabelle Decoopman_Docteure en sciences de gestion,

professeure et chercheuse au sein de SKEMA Business School

_Gilles Saint Paul_Économiste, enseignant à l’ENS Paris et à l’École d’économie de Paris, travaille

sur la croissance et le marché du travail

_Christophe Bys_Journaliste à l'Usine Nouvelle,

spécialisé sur l'emploi numérique,le management et transformation digitale des médias et des industries culturelles

i n t e r v e n a n t. e . s :

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// DossIER > forum numérique 2067

Selon une étude menée par le député et mathématicien Cédric Villani, en col-laboration avec des experts mondiaux en intelligence artificielle, seuls 10 % des emplois actuels devraient être détruits par les prochaines évolutions dans le domaine. En revanche, la moitié de ces emplois devront vraisemblable-ment être revisités. Les changements liés au numérique auront aussi inévi-tablement un impact important sur notre façon de travailler. « Il y aura plus de liberté dans la façon de concevoir le travail. Il sera organisé de façon plus autonome. La question du télé-travail continuera de se poser dans

beaucoup de secteurs d’activités », ajoute Christophe Bys, journaliste à l’Usine Nouvelle. Les transformations dans le domaine du travail s’ac-compagneront de changements de société importants notamment en matière d’éducation. Le développe-ment de la robotique pourrait affaiblir l’impact du service éducatif sur les humains et creuser des inégalités de richesse importantes entre les pro-priétaires de robots et les autres. « L’avenir s’annonce multidisciplinaire et il faudra adopter une autre logique de formation continue pour les tra-vailleurs afin qu’ils puissent pouvoir

appréhender les outils numériques », selon Isabelle Decoopman. Enfin, les institutions joueront un rôle déter-minant dans l’accompagnement de cette révolution numérique au niveau éthique. Pour qu'un territoire comme les Hauts-de-France, reste « cette région digitale au service de l’emploi et du vivre-ensemble » portée par une politique dynamique et ambitieuse, comme l'a ainsi évoqué en introduc-tion André-Paul Leclercq, président de la commission "Au travail" du Conseil régional Hauts-de-France.

T r a v a i lQuel travail et quel statut pour le travailleur dans le monde numérique de 2067 ? Tous nomades ? Tous indépendants ? Les avancées de la robotique vont-elles mener à la fin du travail ? Quel est l’impact sur la distribution des richesses ?

L’impact du numérique sur le travail est déjà un sujet qui fait couler beaucoup d’encre. Jusqu’à présent, le progrès technique ne s’est pas traduit par une disparition des emplois. Il a au contraire contribué à améliorer les salaires et les conditions de travail en réduisant les tâches pénibles et répétitives. Mais pour l’avenir, plusieurs scénarios s’opposent autour de différentes ques-tions : le développement du domaine de la robotique, dont les limites sont en permanence repoussées par les

travaux de recherche, aura-t-il sonné la fin du monde du travail d’ici 2067 ? Le numérique sera-t-il devenu un subs-titut ? Selon la théorie défendue par l’économiste Gilles Saint-Paul, la si-tuation va progressivement s’inverser dans le domaine de la complémenta-rité homme-machine d’ici 2067. « On pourrait assister à une robotisation extrême du travail. La productivité du travail humain pourrait donc devenir de plus en plus faible et nous pour-rions devenir les clients de robots ». Si

tous les experts s’accordent à penser que la nature du travail va considéra-blement évoluer, la place des robots dans notre société de demain fait débat. Isabelle Decoopman préfère parler d’une nouvelle forme de com-plémentarité. « La technologie devra toujours être accompagnée d’une réflexion stratégique en amont qui devra être assurée par un humain. L’évolution dépendra aussi des choix de société qui seront faits ».

l a r é vo lu t i o n r o b ot i q u e

v e r s u n e n o u v e l l e é t h i q u e d u t r ava i l

Animé par Laurent Tricart_Directeur de développement de la Plaine Images

_Isabelle Attard_Docteure en archéologie

environnementaleet ancienne députée du Calvados

_Eric Vidalenc_Responsable pôle transition énergétique

ADEME Hauts de France. Conseiller scientifique de Futuribles. Blogueur

chez Alternatives Economiques

_Sébastien Denvil_Ingénieur de recherche en sciences

du climat au CNRS

i n t e r v e n a n t. e . s :

#06 DEcEmBRE 2017 09

forum numérique 2067 < DossIER \\

l e n u m é r i q u e p o u r m o d é l i s e r l’ e n v i r o n n e m e n t

Au sein d’Inria, les défis environne-mentaux, notamment autour de la numérisation de l’énergie, ne manquent pas. Si on se projette en 2067, à l’échelle des évolutions du climat, une période de 50 ans ne représente qu’un délai très court. Pourtant, notre société doit faire face à des échéances encore plus urgentes. L’un des défis, désormais inscrit dans la loi, est de réussir à diviser par 4 nos émissions de gaz à effet de serre. Pour y par-venir, selon les experts, il nous reste plutôt 30 ans avant que le réchauf-fement climatique ne provoque des

réactions en chaîne problématiques. « Dans le domaine, le numérique peut nous aider à accélérer certains pro-cessus. L’enjeu est de pouvoir passer de l’optimisation du système actuel à la transformation de ce système », précise Eric Vidalenc. Alors que notre société en est encore au stade de la prise de conscience, l’environnement et le climat représenteront certainement des enjeux politiques essentiels dans les années et les décennies à venir. « Pour prendre des décisions, les élus ont besoin de modélisations des dif-férents scénarios. Nous devons avoir

ces projections qui tiennent compte d’un maximum de données possibles et c’est là que le numérique peut nous aider. Ensuite, ce sera aux politiques de les entendre », précise Isabelle Attard. Ce travail des chercheurs sur des modèles numériques pourrait aussi permettre de savoir comment évoluera le climat, une donnée essen-tielle pour l’avenir de notre planète. Pour qu’elle soit préservée en 2067, c’est une mission collective que nous devons tous mener en tant que citoyens, déci-deurs politiques et chercheurs.

e n v i r o n n e m e n T

« Nos changements d’habitude actuels n’auront de conséquences sur le climat qu’après 2050. Il y a beaucoup de développement et de potentiel au niveau du numérique. Maintenant, il faut encadrer ces évo-lutions en prenant des décisions stratégiques fortes », pour Sébas-tien Denvil. Et une question se pose : « Est-on en mesure d’inventer un modèle économique qui ne détériore pas encore plus la planète sur la-quelle nous vivons ? Si elle n’est plus capable d’accueillir l’espèce humaine, tous les autres débats n’auront plus lieu d’exister, l’environnement doit

rester une question centrale », ajoute Isabelle Attard. Aujourd’hui, grâce aux avancées dans le domaine du numé-rique, nous sommes déjà capables de mesurer l’impact de nos démarches sur l’environnement mais il existe encore des divergences au niveau des solutions à adopter pour y faire face. « Le numérique peut nous aider à aller vers des modes de production moins carbonés. Dans le domaine des objets connectés, il serait par exemple possible de déployer davan-tage de petits capteurs pour mesurer l’impact de nos comportements dans les villes sur l’environnement », selon

Sébastien Denvil. Heureusement, le numérique a déjà commencé à favori-ser des changements d’habitudes vers un comportement plus responsable notamment chez les jeunes généra-tions. « Nous devons compter sur la jeunesse pour que le pays change dans les prochaines années. Ce sont par exemple les 20/25 ans qui uti-lisent le plus souvent les applications de co-voiturage. Chacun doit prendre conscience de ce qu’il est possible de faire à son échelle », conclut Isabelle Attard.

v e r s d e s c o m p o rt e m e n t s p lu s r e s p o n s a b l e s

Quelles conséquences le numérique aura-t-il sur l’environnement ? Quel impact sur nos mobilités, nos productions et consommations d’énergie ? dans 50 ans, l’évolution du climat sera-t-elle contrôlable ?

Animé par Antoine Rousseau_Chargé de recherche Inria, responsable scientifique de l’équipe Lemon (littoral, environnement : méthodes et outils numériques)

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En matière de santé, l’évolution des techniques numériques génère beaucoup de fantasmes quand on évoque le futur. Si le robot n’est pas encore sur le point de remplacer notre médecin ou notre chirurgien, le numé-rique vient déjà aider la médecine. Des équipes Inria travaillent sur la concep-tion de modèles numériques précis qui permettent de mieux connaître le corps humain ou de mieux com-prendre l’évolution de certaines

pathologies grâce à la simulation nu-mérique. En 2067, la médecine sera vraisemblablement moins hospita-lière. « Le principe de la médecine connectée nous permet de pouvoir surveiller les constantes vitales d’un patient, comme le rythme cardiaque, en dehors de l’hôpital pour anticiper les pathologies. L’objectif sera de le prendre en charge avant que la maladie se déclare », précise Mercè Jourdain. Parallèlement, la formation

des chirurgiens a déjà commencé à évoluer. « Les élèves bénéficient de techniques plus poussées dans un environnement 3D et virtuel. En 2067, l’enseignant viendra à la faculté pour faire de la simulation. Aujourd’hui ce type d’enseignement ne représente que 20% de ce qui est dispensé ».

Quand le numérique se met au service de la science et de la médecine, il joue indirectement un rôle déterminant dans l’évolution de l’espérance de vie des patients traités. « Le traite-ment des données issues d’objets connectés dans notre corps permet-tra d’anticiper le diagnostic et de mieux traiter la pathologie », ajoute Dominique Tierny. La science avance également dans le domaine de la bio-impression, une technologie qui sera capable de reproduire tous les organes. Le traitement de la douleur par le numérique représente aussi un enjeu important.

« Nous pourrons par exemple utiliser les casques de réalité virtuelle pour détourner l’esprit du patient ». La ca-pacité cérébrale pourra être améliorée par l’intermédiaire de jeux. « Il existe déjà des systèmes d’exercices céré-braux. Des tests cognitifs montrent que les joueurs ont plus de facilité à prendre des décisions », précise Rémi Sussan. En 2067, il faudra savoir col-lecter et gérer un nombre de données important lié aux pathologies. « Dans le domaine de la formation, on peut travailler à partir de ces données pour améliorer les pratiques. Il sera par exemple possible de travailler

sur les erreurs identifiées comme étant les plus courantes, au centre de simulation », ajoute Mercée Jour-dain. L’analyse de toutes ces données issues de milliers de patients, qui pourra permettre par exemple de personnaliser des traitements, sou-lèvera aussi des questions délicates en matière d’éthique. « L’intelligence artificielle ne pourra pas remplacer l’éthique. Le numérique peut aider le praticien mais la décision pour le remplacement d’un organe doit rester entre le médecin et le patient ».

// DossIER > forum numérique 2067

i n t e r v e n a n t. e . s :

s a n T éQuel impact du numérique sur la santé ? Quel modèle de médecine pour demain ? Quel impact du numérique sur le fonctionnement de l'esprit ? serons-nous augmentés par la technologie comme le pensent les transhumanistes ? Quelles spéculations pour 2067 ? Corps physique et données, quelles frontières ? À quelles disruptions s'attendre ?

_Dominique Tierny_Présidente déléguée du pôle de compétitivité "nutrition, santé et

longévité" (NSL)

_Mercè Jourdain_Professeure de réanimation polyvalente

à l’université de Lille – droit et santé, et directrice du centre de simulation

Presage (Plate-forme de recherche et d’enseignement par la simulation pour

l'apprentissage des attitudes et des gestes)

_Rémi Sussan_Journaliste à InterneActu.net spécialisé

sur les technologies futuristes, biotechnologie, cognition, réalité

virtuelle, transhumanisme

Animé par Sophie Maheo_Responsable valorisation et copilote du cycle de prospective "questions numériques" à la Fing

a n t i c i p e r l e s d i a g n o s t i c s

s i m u l e r p o u r m i e u x s o i g n e r

11 #06 DEcEmBRE 2017

forum numérique 2067 < DossIER \\

Dans les loisirs, l’arrivée du numérique démontre que les règles du jeu ne sont pas immuables. Le e-sport n’est qu’à ses balbutiements mais déjà le comité olympique réfléchit à son intégration comme discipline

officielle pour de prochains jeux. En 2067, les olympiades des jeux vidéo devraient rencontrer un grand succès. « Les convergences sont nombreuses entre le sport et le e-sport. Il y a une dimension stratégique très

importante. Dans le futur, le e-sport pourrait devenir aussi plus physique avec le développement de capteurs de mouvement et d’avatars virtuels », précise Matthieu Dallon.

Dans les prochaines décennies, le numérique devrait aussi révolution-ner le domaine du tourisme. En 2067, une part de ce secteur d’activité sera devenue virtuelle, une tendance qui commence déjà à se dessiner et qui n’inquiète pas les professionnels du secteur. « La numérisation des musées n’a pas eu d’effets négatifs. Ceux qui ne peuvent pas se dépla-cer y ont plus facilement accès. Les autres peuvent préparer et person-naliser leur visite. La virtualité nous apportera des choses intéressantes mais ne remplacera pas une visite ou

un voyage », précise Sophie Lacour. Si la virtualité renforce déjà l’attractivité de certaines de nos visites, comme dans les châteaux de la Loire où des personnages virtuels accompagnent les touristes, à l’avenir, elle nous per-mettra de nous rendre dans un pays depuis notre salon grâce aux casques de réalité, une nouvelle façon de pré-parer nos futurs voyages. D’ici 2067, on pourra même choisir une destina-tion complètement virtuelle ou encore visiter Mars ou la Lune, sans quitter la Terre, dans la peau d’un avatar. Le numérique renforcera-t-il l’individua-

lisme de notre société dans les loisirs ? Pas forcément, selon les projections de nos experts. Dans le domaine du e-sport, des compétitions régulières de jeux en réseau permettent par exemple aux joueurs de se rencontrer. « Dans les prochaines années, on pourra se déplacer en marchant dans un univers complètement virtuel mais la technologie doit rester un moyen et pas un but. Dans le loisir, l’objec-tif est de ressentir des émotions, ce qui passe forcément par du vivre en-semble », précise Bertrand Lagrange.

Vous pouvez revoir l’intégralité de ces sessions sur la chaîne Inria Youtube :º youtube.com/InriaChannelRetrouvez également le programme détaillé sur la page dédiée à cet événement :º inria.fr/ForNum2067

_Matthieu Dallon_Directeur de la stratégie de Webedia et

ancien président de France eSports

_Bertrand Delgrange_Fondateur et président de Koezio

_Sophie Lacour_Directrice générale advanced tourism. Docteure en science de l'information et

de la communication. Experte en prospective et e-tourisme

i n t e r v e n a n t. e . s :

l o i s i r sQuelle influence les technologies auront-elles sur les activités ludiques et culturelles de demain ? nous dirigeons-nous vers des olympiades des jeux-vidéo ? Quelles opportunités dans le futur pour les espaces de loisir ? dans 50 ans, visiterons-nous des villes et pays de la même manière ?

Animé par Christophe Chaillou_Chargé de missions "industries culturelles et créatives" à la COMUE Lille Nord de France

J o u e r e n s e m b l e d a n s u n m o n d e v i r t u e l

v o ya g e r s a n s b o u g e r d e c h e z s o i

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// DEssInE-moI lA REchERchE

13 #06 DEcEmBRE 2017

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Dans le monde du numérique, une nouvelle technologie est en passe de changer complètement les usages dans plusieurs secteurs de l'économie : la blockchain. Encore peu connue du grand public, cette « chaîne de blocs » est un système de stockage qui permet d'automatiser une opéra-tion, de l'authentifier, de certifier

sa date et l'identité des parties concer-nées. Cette base de données plané-taire est sécurisée, transparente et fonctionne sans organisme central de contrôle : elle est donc partagée par ses différents utilisateurs. Certains obser-vateurs spécialisés parlent déjà de « ré-volution conceptuelle » ou encore d'un « outil qui va révolutionner nos vies ».

Une technoloGie pointUe La blockchain est en tout cas une technologie très pointue dont les spé-cialistes sont pour l'instant encore peu nombreux. La société Utocat en fait partie. Basée à Lille, cette start-up s'est spécialisée dès 2014 dans la connexion à la blockchain dédiée aux banques et aux assurances. Sa plateforme « Blockchainiz » leur fournit une solu-tion facilitant l'usage de la technologie en vue de réussir une automatisation de leur processus sans avoir besoin de développer les fonctions de base telles que les recours aux Wallet et Smartcontracts. « Par exemple, quand on veut ouvrir un compte bancaire, il

faut fournir une preuve de domicile », explique Clément Francomme, le fon-dateur et CEO d’Utocat. « En faisant le lien avec l’organisme choisi pour récupérer son justificatif de domi-cile, la blockchain permet de certifier automatiquement que le document en question est authentique. Dans ce cas-là, la technologie est utilisée comme une certification d'identifica-tion digitale. C'est une garantie que les parties prenantes d'un réseau sont bien celles qu'elles prétendent être ».

Pour aller plus loin dans les fonctions d’automatisation, la société Utocat a développé Catalizr qui est un connec-teur entre banque, investisseur et entreprise qui permet d’automatiser la gestion des titres non cotés entre ces 3 acteurs et facilitent l’investis-sement dans les TPE/PME par un processus entièrement numérisé et sécurisé dans la blockchain. D’au-tant, ajoute Clément Francomme, qu’ « aujourd’hui, il y a trop de déperdition en matière d’investissement du fait de ralentissements, souvent sources d’abandons, lors des échanges entre les différents acteurs de la chaîne ».

Les usages de la blockchain sont très variés mais le niveau de maturité de cette technologie reste l'un des princi-paux freins à son développement. Pour permettre le succès auprès du grand public, plusieurs défis techniques doivent ainsi être surmontés.

Un partenariat poUr repoUsser les limites

Pour simplifier les usages, Utocat a noué un partenariat privilégié avec Inria. La start-up a ainsi décidé de fi-nancer le contrat d'un post-doctorant à temps plein pour une durée de deux ans. Recruté par Inria et basé au centre Inria Lille - Nord Europe, ce chercheur a pour mission de faire évoluer la re-cherche sur la blockchain et plus parti-culièrement d'améliorer la visualisation de la base de données ainsi que la na-vigation. « Les échanges avec Utocat ont débuté il y a deux ans lorsque Clément Francomme est venu sur le Plateau Inria à EuraTechnologies pour savoir ce qu’Inria faisait sur la techno-logie blockchain. », explique Margot Corréard, chargée de partenariats pour le centre Inria de Lille. « Il nous a fallu un an pour définir le sujet stratégique pour la start-up, échanger avec diffé-rentes équipes de recherche de notre centre avant de nouer un partenariat avec l’équipe-projet Rmod, spécia-lisée en analyse d’applications exis-tantes pour leur évolution et en nou-veaux langages de programmation. » C’est le rôle du service transfert pour l’innovation et partenariats de rappro-cher les mondes de l’entreprise et de la recherche pour allier challenge scienti-fique et retombées pour l’entreprise.

noUvel élan poUr la recherche sUr lA BlockchAInavec la star-Up Utocat

// focus > blockchain

La blockchain fait partie des technologies émergentes. Elle pourrait révolutionner plusieurs secteurs de l'économie, à commencer par la banque et l'assurance. La start-up Utocat, précurseuse et experte dans ce domaine, a fait appel à Inria pour faire avancer la recherche appliquée à cette technologie de pointe. Un partenariat fructueux, même si rien n'était joué d'avance.

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Pourtant, au départ, ce partenariat n'avait rien de naturel. « Nous ne connaissions pas cette technologie dans le détail ! » admet Stéphane Ducasse, le responsable de l'équipe-projet Rmod*. « Nous pensions pouvoir appliquer nos techniques d’analyses. Apporter un regard différent avec de la visualisation de données sur la blockchain et aider Utocat tout en apprenant un nouveau domaine est excitant ! » Un défi que l'équipe Rmod a bien sûr immédiatement voulu relever ! Dans un premier temps, nous avons réalisé une preuve de concept afin de valider que nos techniques d’analyses soient efficaces pour la blockchain. Grâce à InriaTech, un dispositif innovant dont la vocation est le transfert de technologies vers les entreprises, nous avons pu missionner de suite un ingénieur durant deux mois pour travailler avec Utocat. Cette première phase a été couronnée de succès puisqu'en deux mois, l’ingénieur, rattaché à l'équipe Rmod, a mis au point un outil prototype baptisé "smart inspect", sorte de petit

inspecteur qui peut permettre à un développeur d'identifier des bugs dans la blockchain. Ainsi, petit à petit, les avancées se matérialisent. À court-terme, les recherches du post-doctorant devraient aboutir à la mise au point d'un outil de visualisation des opérations dans la blockchain.

« En travaillant avec Inria, nous profitons de l'expérience, de l’expertise et de structures dont nous ne pourrions pas disposer dans d'autres configurations et cela nous permet des progrès fondamentaux sur les solutions techniques, tout en faisant avancer la recherche », se réjouit Clement Francomme. « Le but final est de s'adapter plus facilement à nos clients en apportant de nouvelles solutions développées grâce au partenariat avec Inria ». Pour Clément Francomme la blockchain est porteuse de promesses fortes : « Cela va améliorer les relations de confiance dans les échanges numériques et ouvrir de nouvelles possibilités ».Au-delà des avancées pour l'activité d'Utocat, le partenariat avec Inria

va profiter à l'ensemble de la communauté des développeurs. L’institut et la start-up ont en effet décidé de partager l'objet de la recherche sur la blockchain en "open source", c'est-à-dire accessible gratuitement à tous. Un partenariat décidément fructueux pour tout le monde.

º rmod.inria.fr

º utocat.com

unchAllEngE !

* l'équipe-projet Rmod est commune avec l'Université de Lille − sciences et technologies. Au sein de l'UMR 9189 CNRS-Centrale Lille-Université de Lille − sciences et technologies, CRIStAL.

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// focus > anr clinmine

clInmInE : analyser les parcoUrs patients à l’hôpital

Durées d’hospitalisation, protocoles de soins, résultats d’examens, dossiers de transmission entre médecins… Les hôpitaux français génèrent un nombre important de données. Savoir les traiter et les analyser pourrait permettre d’op-timiser la prise en charge des patients. C’est précisément l’objet du projet ANR ClinMine, auquel ont participé, notamment, des membres de l’équipe-projet Modal* du centre Inria Lille – Nord Europe.

« Dans un hôpital, le parcours d’un malade engendre une importante quantité de données complexes, explique Cristian Preda, professeur à l'Université de Lille et porteur du projet ClinMine côté Inria. De plus en plus, les hôpitaux pensent

qu’exploiter ces données de façon plus approfondie pourrait être intéressant. » C’est dans ce contexte que s’est créé le projet ClinMine, en janvier 2014, réunis-sant six partenaires d’horizons variés : hôpitaux, centres de recherche, entre-prises... Soutenu par l’Agence nationale de recherche (ANR), ce programme de recherche visait alors à développer des méthodologies d’analyses statistiques des informations recueillies par les Programmes de médicalisation des systèmes d’information (PMSI) des hôpitaux, pour en dégager des typolo-gies de parcours de soin. Les méthodes ont ensuite été appliquées dans le cadre d’études de cas, comme par exemple l’analyse des résistances à certaines bactéries.

Les chercheurs ont été confrontés à une difficulté : le parcours du patient à l’hôpital est, par définition, dynamique, ce qui complexifie le traitement les données de santé. « Aujourd’hui, en matière de statistique, nous savons plutôt bien analyser les données qui évoluent dans le temps, lorsqu’elles sont quantitatives. C’est le cas par exemple pour une courbe de température. À l’hôpital, le patient passe d’un service à l’autre, il y a un diagnostic différent, un acte médical différent... Tous ces paramètres qua-litatifs évoluent dans le temps. Et c’est quelque chose qui n’est pas simple à traiter, et dont les méthodes de calculs sont relativement récentes », précise Cristian Preda.

analyse des coUrriers de l’institUt catholiqUe de lille

Au centre Inria de Lille, Modal est jus-tement spécialisée dans le traitement

des données complexes, que ce soit par leur taille ou leur structure. Au sein de cette équipe-projet, Cristian Preda analyse spécifiquement les questions de temporalité. Accompagné par quatre chercheurs, dont un post-doctorant, il s’est donc particulièrement penché sur cette question dans le cadre de ClinMine. Pour ce faire, ils ont travaillé sur une étude de cas, l’analyse de tous les courriers envoyés aux patients entre janvier 2012 et mai 2016 par le Groupe Hospitalier de l’Institut Catholique de Lille (GHICL).

« Nous avons commencé par un important travail de simulation, remarque le chercheur. Il s’agissait de valider nos calculs et le volume de données qu’ils pourraient traiter. » Ensuite, il a fallu appliquer ces mé-thodes aux données réelles. Une étape qui s’est révélée longue et compliquée. L’équipe s’est retrouvée avec 400 000 courriers de consultations et 600 000 courriers d’hospitalisations à extraire

cl

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* l'équipe-projet Modal est commune avec avec le CNRS, l'Université de Lille − sciences et technologies et l'Université de Lille − droit et santé. Au sein de l'UMR 8524 CNRS-Université de Lille − sciences et technologies, Laboratoire Paul Painlevé, et de l'EA 2694 "Santé Publique : épidémiologie et qualité des soins" de l'Université de Lille − droit et santé.

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partenaires dU projet

Six partenaires sont associés au projet coordonné par le laboratoire CRIStAL de l’Université de Lille : l’entreprise Alicante, l’Equipe d'Accueil (EA) 2694 "Santé Publique : épidémiologie et qualité des soins", le Groupe Hospitalier de l'Institut Catholique de Lille (GHICL), l’EA 1046 « Maladie d’Alzheimer et pathologies vasculaires », le LIFL Laboratoire d'Informatique de Lille, et le centre de recherche Inria Lille – Nord Europe.

en données. Et beaucoup se sont avérées incomplètes ou fausses. « Il y avait de nombreuses incohérences. Nos outils techniques détectaient des paternes que nous ne pouvions pas interpréter. Or, pour l’analyse des données complexes il faut impérati-vement partir d’une matière fiable. » L’équipe a donc dû faire un grand travail de « nettoyage ». « Nous avons organisé plusieurs réunions avec les services informatiques de l’hôpital pour trouver des explications et des solutions à ces anomalies. Cette étape de préparation des données a représenté 50% de notre travail. Nous n’avions pas anticipé à ce point ce problème. Même si nous

savons qu’en analyse de données réelles, le facteur surprise est toujours très important. »

L’analyse des courriers a permis de dégager plusieurs typologies, dont certaines traduisaient un dysfonction-nement. Par exemple des courriers dont la rédaction a pris trop de temps, des délais de validation trop important ou encore des différences de traitement des courriers selon les services. In fine, ces données ont donc mis en évidence des problèmes au sein de l’hôpital que ce soit au niveau informatique ou en matière de ressources humaines. « Après notre analyse, l’hôpital va s’ap-

proprier les résultats pour expliquer ou comprendre les différents paternes identifiés », remarque Cristian Preda.

Dans le cadre de cette étude de cas, l’équipe a conçu un logiciel libre de dis-tribution. « Il pourrait par exemple être utilisé par d’autres statisticiens pour étudier des trajectoires d’évolution des paramètres qualitatifs dans divers contextes (santé publique, économie, etc.) ».

º modal.lille.inria.fr

Après 42 mois de recherche , le pro je t A Nr prendra f in en d é c e m b r e p r o c h a i n . C r i s t ia n Preda en tire un bilan positif : « D’un point de vue humain, c’est une réussite d’avoir pu réunir des informaticiens, des statisticiens et des hospitaliers au sein d’un même programme de recherche. D’un point de vue scientifique, nous avons réussi à développer des méthodes innovantes, qui ont été reconnues dans différentes publications. »

Mais l ’équipe n’a pas l ’intention de s’arrêter là. Plusieurs axes de recherche du projet n’ont en effet pas pu aboutir. « Nous n’avons n ota m m e nt p a s e u l e te m p s d’analyser les données du CHU de Lille dans le temps imparti. » Pour cette étude de cas, les chercheurs espéraient trouver une méthode pour détecter un éventuel début de déficience cognitive en analysant l’historique médical des patients. en ligne de mire : trouver des facteurs prédictifs de déclenchement de la maladie d’Alzheimer. « C’est un sujet qui intéresse beaucoup de monde. Et maintenant que nous avons les données, nous pensons que ce serait une bonne idée de poursuivre le travail au sein de ClinMine 2 ».

clinmine 2 ?

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// BEsT-of

il ne Fallait pas manqUer...

priXretoUr sUr...

> christophe Biernacki, noUveaU déléGUé scientiFiqUe

Nommé par Antoine Petit, Christophe Biernacki est le nouveau délégué scientifique du centre Inria Lille – Nord Europe depuis juin. Statisticien et responsable de l’équipe-projet Modal depuis 2010 et précédemment adjoint du délégué sortant, c’est tout naturellement qu’il occupe aujourd’hui cette fonction.

> GaBriele perozzi oBtient Un Best stUdent paper à eUcass 2017

Gabriele Perozzi effectue son doctorat en bilocalisation chez Onera et au sein de l’équipe-projet Non-A de notre centre. Une de ses publications vient d’être récompen-sée par un best student paper lors de la conférence européenne en aéronautique et sciences spatiales EUCASS.

> Fête de la science

Chaque année, la fête de la Science est l'occasion pour le centre Inria Lille - Nord Europe d'organiser l'opération Chercheurs itinérants. Cette opération, qui se déroule durant deux semaines en octobre, est l'occasion pour nos scientifiques d'intervenir auprès des élèves dans les établissements scolaires. En octobre 2017, ce sont 1950 élèves qui ont été touchés par notre action, répartis sur 32 établissements de la région Hauts-de-France.

zoom sUr...> Bâtiment place inria

Au cœur de l’écosystème de la French Tech, Inria a fait l’acquisition d’un troisième bâtiment localisé à EuraTechnologies, af in de développer son activ i té de recherche au service du transfert et de l’innovation. Inscrite dans le contrat de plan État-Région, cette acquisition a été financée par Inria, la Région Hauts-de-France, la MEL et par l’Union européenne avec le Fonds européen de développement régional (FEDER). Le bâtiment accueillera, fin 2018, l’équipe Bonus spécialisée en optimisation, et Cirrus, la première équipe mixte associant une partie de l’équipe-projet Spirals et une partie de l’entreprise Scalair spécialisée dans les solutions de

cloud. Notre service transfert pour l’innovation et partenariats sera également localisé dans ce nouvel espace, comprenant les ingénieurs InriaTech, dispositif favorisant le transfert de technologies vers les entreprises.

Enfin, le bâtiment Place sera équipé d’un espace de démonstrateurs, présentant les travaux des équipes de recherche du centre Inria Lille - Nord Europe. Notre objectif étant de renforcer toujours plus les interactions entre la communauté scientifique, le monde économique et la société. Rendez-vous fin 2018 pour célébrer avec nous l’inauguration de ce nouveau bâtiment.

sUr twitter...

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// poRTRAIT

Le Web est devenu de plus en plus sémantique, nous permettant de trouver des informations de manière concise. Une simple recherche par mot clé comme « Mozart » nous permet par exemple de trouver la date de

naissance ou la liste des œuvres du musicien, reflétant le progrès dont ont bénéficié les moteurs de recherche depuis ces 10 dernières années. Ces moteurs présentent des connaissances précises sur les sujets recherchés par requête mots clés, en posant eux-mêmes des requêtes logiques à des bases de connaissances du type de Wikipédia, où sont stockées des informations e n c y c l o p é d i q u e s d e m a n i è r e digitalisée.

Ces bases de connaissances, dont on rêve en intelligence artificielle depuis une trentaine d’années, sont devenues aujourd’hui une réalité. L’évolution rapide du concept et des technologies de type bases de données en bases de connaissances, permet aujourd’hui de stocker et interroger du contenu beaucoup plus vaste et hétérogène. C’est ainsi une grande partie des connaissances de l’humanité qui est de plus en plus concernée, et plus seulement les données tabulaires d’une entreprise par exemple. Ces bases de connaissances n’ont pu émerger que grâce à l ’évolution du rô le de l ’usager, devenant contributeur actif du Web. C’est ce que l'on appelle l'aspect « crowd » du Web, qui désigne la saisie par la foule de connaissances stockées

dans ces bases en format RDF. Nous avons donc à faire à une toute nouvelle génération de bases de données avancées incluant les bases de connaissances qui, contrairement à la situation d’il y a 20 ans, ne nécessitent plus d’ingénieur experts pour leur utilisation. Ces bases de connaissances, du type de Wikipédia, sont enrichies par tout le monde via leurs propres interfaces Web et peuvent simplement être interrogées via des moteurs de recherches.

inria, Un environnement idéal

Chez Inria, les 13 membres de l’équipe-projet Links (dont 8 enseignants chercheurs permanents) dirigés par Joachim Niehren, travaillent dans le domaine des requêtes logiques et développent de nouvelles techniques d e re c h e rc h e e t d ’ex t r a c t i o n d’information à partir de bases de données et de connaissances. Face à la masse de données et connaissances croissante sur le Web, l’enjeu est de taille. « Le défi est de réussir à interroger et croiser un maximum de bases de données et de bases de connaissances simultanément de façon plus intelligente, tout en tenant compte de l’origine des informations, pour trouver les réponses les plus complètes et les plus pertinentes possibles. Il faut aussi tenir compte des nouveaux formats de bases de données comme NoSQL, Graph ou RDF knowledge bases », précise le chercheur.

Après avoir suivi des études dans les domaines de l’informatique et des mathématiques avec des applications en intelligence artificielle, en particulier sur des langages de programmation et la linguistique informatique, Joachim Niehren a commencé sa carrière de chercheur dans son pays à Sarrebruck en Allemagne. C’est en arrivant à Lille en 2003 qu’il choisit d’orienter ses recherches vers les bases de données pour le Web - dont sont issues les bases de connaissances, mixant des méthodes de représentation des données en intelligence artificielle. Chez Inria, Joachim Niehren trouve des conditions de travail favorables pour mener à bien ses recherches jusqu’à prendre la direction de l’équipe Links en 2012. « Inria est un institut de renommée internationale où nous pouvons travailler en équipe dans un environnement idéal avec nos collègues chercheurs, doctorants et post-doctorants ».

les limites de l’intelliGence artiFicielle en permanence repoUssées

Face aux enjeux que représentent les bases de données pour les entreprises, Links est régulièrement sollicitée par le monde industriel. « Nous devons travai l ler dans une logique de transfert sur le long terme. Il est donc important pour nous de coopérer avec des industriels sur des sujets d’aujourd’hui tout en continuant à préparer le futur à travers nos travaux

interroGerles bases de donnéesde Façon plUs intelliGente

Joachim Niehren

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de recherche plus fondamentale en parallèle. Inria favorise les contacts avec les entreprises et des rencontres sont régulièrement organisées à Paris pour l’international et national, et à Lille pour le régional. Je suis aussi très fier quand les doctorants que nous formons vont travailler dans des entreprises innovantes de renom ou des start-up issues du monde de la recherche, et y véhiculent nos idées », ajoute Joachim Niehren.

Et dans un domaine aussi passionnant que la recherche en informatique, même si l 'on sait comment faire évoluer les fondements des bases de données, i l est en revanche compliqué d'anticiper précisément les prochains défis applicatifs à venir. « Les avancées du Web correspondent à des avancées dans le domaine des bases de données mais les limites de l’intelligence artificielle sont en permanence repoussées. Qui aurait pu prévoir les applications d’informatique que nous utilisons aujourd’hui sur le Web ? » Google, Facebook, Wikipédia représentent des exemples d’applications de bases de données d’une importance énorme qu’il était impossible d’imaginer il y a quelques dizaines d’années.

º team.inria.fr/links

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// REnDEz-vous

Fic 2018 :

10ème ForUm internationalde la cyBersécUritéLes 23 et 24 janvier, Lille Grand Palais

coUrs de Gérard BerrydU collèGe de FranceMercredi 31 janvier, dès 16h, amphi A, LILLIAD - Cité scientifique, Villeneuve d’Ascq

Nous aurons le plaisir d'accueillir un cours de Gérard Berry, informaticien et professeur émérite du Collège de France. Ce cours, intitulé « La photo-graphie numérique, un parfait exemple de la puissance de l’informatique », sera suivi d'un séminaire de Stéphane Huot,

chercheur en interaction Homme-machine et responsable de l’équipe de recherche Mjolnir de notre centre. Cet événement sera également l’occasion pour notre directrice Isabelle Herlin de formuler ses vœux.

Retrouvez ces évènements et bien d'autres dans l'agenda du centre !

º inria.fr/lille

Le Forum International de la C ybersécur i té s ’ inscr i t dans une démarche de réflexions et d’échanges visant à promouvoir une vision européenne de la cybersécu-rité. Dans la continuité du marché unique numérique et du projet de règlement sur la protection des données personnelles, le FIC est l’évènement européen de référence

réunissant tous les acteurs de la confiance numérique. Vous pourrez découvrir l’excellence d’Inria dans ce domaine en visitant notre stand localisé sur l’espace Recherche – Allistene, l’alliance des sciences et technologies du numérique.

º forum-fic.com

colloqUiUm polarisLes chercheurs en informatique et automatique de la métropole lilloise forment une communauté scientifique dynamique, en forte croissance ces dernières années. Cette communauté s’est fédérée autour de la constitution d’un colloquium, baptisé Polaris. Il réunit deux entités : le centre de recherche Inria Lille – Nord Europe et le laboratoire uni-versitaire CRIStAL, Centre de Recherche en Informatique, Signal et Automatique de Lille. De dimension internationale, le colloquium Polaris accueille des orateurs, personnalités de premier plan, français ou étrangers, informaticiens, mathématiciens ou spécialistes de domaines scientifiques dans lesquels l’informatique joue un rôle majeur. Il pro-pose huit à dix rendez-vous par an à tous les scientifiques, étudiants et industriels concernés par l’avenir des sciences et technologies dans les domaines de l’informatique et de l’automatique.

º colloquiumpolaris.frDu 4 au 8 juin, LILLIAD - Cité scientifique, Villeneuve d’Ascq

SMF 2018 a pour objectif de regrouper les mathématiques françaises sur une semaine, des thèmes les plus fondamentaux aux aspects les plus appliqués, afin d’en afficher le dyna-misme et l’unité. Ce congrès, à travers ses nombreux orateurs prestigieux, permettra d’établir un panorama des avancées en mathématiques.

conFérence Grand pUBlic de vincent Borrelli

Durant SMF, un après-midi sera consa-cré à une conférence grand-public en français avec Vincent Borrelli, maître de conférences à l’Institut Camille Jordan - Université Lyon 1. Cette conférence, ouverte à tous, intéressera particulièrement les lycéens.

º smf2018.sciencesconf.org

smF 2018 :

le conGrès de la société mathématiqUe de France

Parc scientifique de la Haute Borne40, avenue HalleyBât A - Park Plaza59650 VILLENEUVE D’ASCQFRANCE

(+33) 03 59 57 78 00 (+33) 03 59 57 78 50

º inria.fr/lille º [email protected] @Inria_Lille

Découvrez les coulisses du centreau travers de notre Tumblr Between us !

º inrialille.tumblr.com

// centre de rechercheinria lille - nord eUrope

// plateaU inria, eUratechnoloGiesInria est présent au sein d'EuraTechnologies avec un plateau de 200 m² présentant les travaux de ses équipes de recherche. L’objectif est de favoriser les interactions entre la communauté scientifique, le monde économique et la société par le biais de démonstrateurs et d'un programme d’animation thématique proposé tout au long de l’année.

Suivez les activités du Plateau sur Twitter @Plateau_Inria

conTAcT \\

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L isez le journal du

futur

À l'occasion du Forum numérique 2067, le centre de recherche inria lille – nord europe a réalisé un journal imaginaire. membres du personnel et partenaires d’inria ont contribué à la rédaction de ce journal daté du 5 octobre 2067.

º inria.fr/Journal2067