Les Ruines d'Aegae en Éolie 1886

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Michel Armand Clerc Les ruines d'Aegae en Éolie In: Bulletin de correspondance hellénique. Volume 10, 1886. pp. 275-296. Citer ce document / Cite this document : Clerc Michel Armand. Les ruines d'Aegae en Éolie. In: Bulletin de correspondance hellénique. Volume 10, 1886. pp. 275-296. doi : 10.3406/bch.1886.4026 http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bch_0007-4217_1886_num_10_1_4026

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An article about the ruins in the Aiolis region

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  • Michel Armand Clerc

    Les ruines d'Aegae en olieIn: Bulletin de correspondance hellnique. Volume 10, 1886. pp. 275-296.

    Citer ce document / Cite this document :

    Clerc Michel Armand. Les ruines d'Aegae en olie. In: Bulletin de correspondance hellnique. Volume 10, 1886. pp. 275-296.

    doi : 10.3406/bch.1886.4026

    http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bch_0007-4217_1886_num_10_1_4026

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    nora animadvertunt non intellegit, Canachi signa igidiora ess, quam ut imitentur veritatem? Calamidis dura illa qui- dem, sed. taraen molliora quam Canachi, cet. . Ainsi, la raideur, la duret, voil, au jugement de Cicron, les dfauts distinctifs des uvres du matre de Sicyone, et ces dfauts c'est chose claire devaient se retrouver en particulier dans une statue en bois,comme celle d'Apollon ismnien. Or, cette apprciation de Cicron n'est pas pour contredire l'hypothse que j'ai avance plus haut propos du torse de Perdicovrysi et l'origine que j'ai attribue ce fragment. Dans cette uvre le model, dont j'ai lou les qualits vigoureuses, pche a et l par un peu de scheresse et de rigidit.

    MAURICE HOLLEAUX.

    LES RUINES D'jEGM EN OLIE

    Les ruines de ISfimroud-Kalessi (vilayet d'Adin, sandjak de Smyrne, caza de Magnsie) sont indiques exactement sur la carte de Kiepert,sous le nom de Memrud-Kalessi. Elles sont situes au nord-est d'Aii-Aga, une distance de cinq heures de cheval, et deux heures environ l'est du fond du golfe de Tchandarli. Elles sont compltement inhabites; 'le village Yourouck le plus rapproch, Kieusler, est trois quarts d'heure de marche. Les restes de l'acropole couvrent une haute colline boise qui, s'avancant en pente fort raide sur le Kodja-Tchai, lui fait faire un brusque dtour au nord-est. Trs abrupte au nord et l'est, elle s'abaisse au contraire en pente assez douce au sud et l'ouest. On peut descendre ainsi sur une seconde colline moins leve, puis sur une troisime encore plus basse.

  • %H tS HUNEf Q^aM EN

    La ncropole s'tend sur ces deux dernires collines et sur l'troite valle qui les spare et que suit une route qui va de Pergame par Kiiss-keui (Elaea) Magnsie du Sipyle. Elle est tout entire du mme ct du fleuve.

    Ce fleuve, qui est bien le Kodja-Tchai, l'ancien Pylhicos, celui qui se jette dans la mer un peu au sud du pont de Ka- labassary (1), est dj Nimroud-Kalessi un cours d'eau important. Au plus fort de l't il a encore beaucoup d'eau, et en plusieurs endroits une profondeur considrable. 11 m'a t malheureusement impossible de le remonter jusqu' sa source; mais tous les paysans que j'ai interrogs m'ont affirm qu'elle tait fort loigne de Nimroud-Kalessi. La carte de toute cette rgion de l'Asie Mineure est donc refaire; la chane qui, sur la carte de l'amiraut anglaise et la carte particulire dont se sont servis MM. Pottier et Reinach (2), rejoint le mont Doum- suli au mont Dirlit, en ralit, n'existe pas. 11 n'y a l que les collines isoles entre lesquelles le fleuve se fraie un passage en venant de fort loin du nord-est.

    L'Acropole (3).

    La colline leve qui porte l'acropole est domine par une grande construction que l'on aperoit d'assez loin. Le chemin par lequel on arrive aujourd'hui au sommet est encore le chemin antique: on le reconnat, quand on est peu prs mi- hauteur, son dallage en belles pierres de 0ra*48 de largeur, il est large de 2m'10, et monte dans la direction du nord- nord*-est au sud-sud-ouest.

    Ce chemin aboutit un passage pratiqu entre deux murs,

    (1) Voir Bull de Corr. helln., 1882, pi. IX. (2) Ibid., et p. 198, note 2. (3) Le Directeur de l'Ecole Franaise d'Athnes m'avait charg de diriger

    des fouilles dans la ncropole; je rendrai compte dans un autre article des rsultats obtenus. Dans celui-ci, je me propose de faire connatre les observations que j'ai recueillies sur les ruines de la ville mme. A mon grand regret, j'ai d borner ces recherches, n'ayant ma disposition ni architecte ni photographe, et je ne puis donner que des croquis assez sommaires.

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    tous deux de basse poque, mais videmment reconstruits, et qui forment couloir, C'est l'entre de l'acropole, la porte de fer, comme l'appellent encore aujourd'hui les paysans des en* virons (Demir-eapou).

    Avant de franchir cette porte, nous allons jeter un coup d'il sur l'enceinte.

    On peut, en effet, faire le tour de l'acropole en retrouvant sur presque tout le parcours les traces plus ou moins visibles du mur d'enceinte. On s'aperoit immdiatement qu'il a t reconstruit un grand nombre de fois. Sur un trs petit espace seulement, on retrouve la construction grecque primitive: c'est droite du chemin, quand on monte. Encore n'en reste- t-il plus qu'une assise au-dessus du sol: elle consiste en un petit moellon entre deux grands, alterns trs rgulirement; le tout est construit sans ciment. C'est certainement, de toutes les constructions qui couvrent l'acropole, le fragment le plus ancien, et le seul incontestablement grec.

    Sur tout le reste du pourtour, le mur d'enceinte est romain et souvent mme byzantin, il affecte les formes les plus diverses, preuves videntes de nombreuses reconstructions successives.

    Quand on fait le tour en allant de gauche droite partir du chemin antique, on le trouve d'abord sous la forme d'une sorte de bastion carr. Les pierres qui le composent sont antiques, mais la construction ne l'est pas: elle imite la construction hellnique, sans qu'on puisse s'y mprendre. On a voulu reproduire l'aspect d'une construction plus ancienne, proccupation qui, comme nous le verrons, a prsid la construction de tout ce qui subsiste aujourd'hui Nimroud- Kalessi.

    Immdiatement aprs ce bastion, on se trouve en face d'un mur d'apparence plasgique, perc d'une lucarne. C'est encore un mur de basse poque, une reconstruction. On peut, je crois, en conclure sans tmrit qu'avant l'poque hellnique il y avait l une acropole plasgique; cette partie du mur

    bull, de corbesp hellnique, x. xu

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    d'enceinte se sera conserve plus longtemps que tout le reste et aura donn lieu une imitation quand il aura fallu la refaire. Ce fragment de mur est construit sans ciment.

    Aprs une brche assez considrable, le mur d'enceinte reparat, en appareil rgulier, comme celui qui compose le bastion, puis disparat bientt de nouveau; mais, aux nombreux dbris qui jonchent le soi, on voit qu'il continuait sans interruption.

    A une dizaine de mtres en dedans de ce mur d'enceinte extrieur, apparat alors une nouvelle muraille d'un bel aspect, mais dont les pierres sont relies entre elles par du ciment; elle est conserve sur une longueur de 40 mtres. A un mtre au-dessus du sol court un cordon en saillie, form par une pierre pose de champ. La muraille elle-mme se compose de deux parois, relies entre elles par un blocage form de petites pierres et de chaux. Elle se termine de deux cts angle droit et s'y relie d'autres murs qui forment une srie d'angles saillants et rentrants.

    Un de ces murs est doubl, 0m>60 de distance, en dedans, d'un autre mur de construction identique. Tous deux se prolongent sur un espace de 90 mtres; mais en s'cartant l'un de l'autre: la fin, ils sont distants de 3 mtres. Ils se terminent en venant buter contre un troisime mur qui ferme ainsi l'espace compris entre eux. A une poque encore postrieure, cet espace vide fut recouvert d'une vote dont les traces se voient au point de jonction des trois murs.

    La partie de l'enceinte que je viens de dcrire sommairement est de beaucoup la mieux conserve. Sur tout le reste du pourtour, les murailles sont trs ruines; d'ailleurs elles n'offrent plus rien d'intressant. Si je suis entr dans tous ces dtails, c'est que je voulais faire voir combien de fois toutes ces constructions ont t remanies. En rsum: 1 II y a un premier mur d'enceinte, reconstruit diverses poques, mais o on aperoit encore les traces d'une construction purement hellnique. 2 Une seconde ligne d'enceinte, enferme dans la premire, lui est videmment postrieure; les parties les plus

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    anciennes de cette seconde ligne paraissent mme postrieures aux parties les moins anciennes de la premire.

    Le caractre dfinitif de ces deux lignes d'enceinte n'est pas douteux. Derrire elles, peu prs l'endroit o j'ai arrt ma description, c'est--dire sur le ct Sud-Ouest Nord-Est de la colline, s'lvent les restes d'une autre construction qui devait aussi servir la dfense; nanmoins la destination n'en est pas vidente.

    C'est une srie de couloirs vots assez compliqus qui forment plusieurs angles. Les deux extrmits sont malheureusement dmolies, de sorte qu'on ne peut voir s'ils se reliaient l'enceinte, ni comment ils s'y reliaient. 11 y a une distance de 30 mtres environ entre l'ouverture actuelle de ces couloirs et la seconde enceinte.

    Les murs qui forment ces couloirs ont lra10 d'paisseur. Us sont btis en appareil rgulier et forms de deux parois que runit un blocage ml de chaux. Le mur extrieur est perc de meurtrires. Les votes sont formes de pierres longues et plates, longues de Om#77 et hautes de 0m13; elles sont appareilles et plein ceintre. Elles tmoignent d'ailleurs d'une singulire inexprience, en ce sens qu'elles viennent simplement buter les unes contre les autres sans aucunement se relier.

    Peut-tre ne faut-il voir dans cette construction que des curies et des magasins.

    Cependant la forme qu'elle affecte, avec ses angles saillants et rentrants, et la prsence des meurtrires feraient plutt croire que c'tait un passage conduisant des murs d'enceinte l'intrieur de l'acropole, passage l'abri des traits et o on pouvait encore tenir tte quelque temps un ennemi matre des remparts.

    Une de ces votes offre une particularit curieuse. Sur chacun des voussoirs qui la composent est grave une lettre de l'alphabet, et dans l'ordre alphabtique. La vote tant enterre jusqu' une certaine hauteur, les quatre premires lettres manquent,

  • [) . LS ftUINES 'MM EN OLI

    Les dix lettres visibles sont ainsi figures:

    11 est vident que les voussoirs avaient t prpars d'avance; la suite des lettres indiquait l'ordre dans lequel l'ouvrier devait les superposer. Le voussoir marqu | avait d'abord, par erreur, t marqu A; on avait corrig en rajoutant l'iota.

    Quand on a franchi le mur d'enceinte de l'acropole et qu'on arrive au sommet de la colline, on se trouve en face de nombreuses constructions en ruine. La plus importante de ces constructions, et la mieux conserve de beaucoup, est un grand monument qui a l'aspect d'une forteresse (1).

    (Voir la page 281 ).

    Il se dresse sur le ct de la colline qui surplombe le fleuve, vers lequel il tourne sa face principale; il est orient du Sud- Sud-Ouest au [Nord-Nord-Est.

    Cette face principale, entirement conserve, sauf en hauteur, a une longueur totale de 81'" 95. La partie suprieure s^est croule sur toute ia longueur du monument. Actuellement, la partie centrale, ia mieux conserve, s'lve 14 mtres.

    L'difice tout entier a la forme d'un rectangle, dont les pe-

    (1) Le plan ci-joint n'est pas exact dans le dtail des mesures; il montre simplement la disposition de l'ensemble.

  • RUINES

    EN OLIB

    > 05

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    tits cts ont une longueur de 28 mtres. Les quatre grandes murailles qui forment ce rectangle sont d'une belle construction et n'ont pas subi de remaniements. Chacune d'elles se compose de deux parements. Chaque parement est form de grandes pierres bien tailles, disposes par assises rgulires, et non cimentes. Dans chaque assise, deux pierres,gnrale- ment d'une longueur de 0m#59,se suivent, et sont spares des deux suivantes par un moellon plus petit, de 0m32. La hauteur de l'assise est de 0m*25. Toutefois la rgularit de cet appareil n'est pas absolue: assez souvent deux petits moellons encadrent une seule grande pierre.

    Il est surtout remarquer que le parement intrieur est beaucoup moins soign que le parement extrieur: les lignes formes par les assises n'y sont horizontales qu' peu prs, et les joints y sont beaucoup moins rguliers.

    L'paisseur de chacun des parements est en moyenne de 0m-22; ils sont relis l'un l'autre par les petits moellons, qui forment parpaings. Tout l'espace laiss vide par ces parpaings est rempli par un blocage sans chaux. L'paisseur totale est de 0m*86 pour la faade principale et pour celle de droite (quand on entre), de 0m-85 pour celle de gauche.

    Quant la faade postrieure, elle offre une disposition plus complique.

    Elle se compose en effet de trois murs parallles. Le premier mur, celui qu'on trouve l'intrieur, pais de 0m

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    II faut dire en effet que l'difice n'est pas situ exactement au sommet de l'acropole. Ce sommet vient apparatre derrire lui, et le terre-plein semble justement avoir eu pour objet de relier la face postrieure du monument au sol du sommet de la colline.

    Dans l'tat actuel, le troisime mur est ras du sol du plateau, qui est lui-mme la hauteur du milieu de la faade principale, peu prs, il n'a jamais d tre trs haut, s'il ne devait servir, comme je le crois, qu' soutenir des terres rapportes et former une large terrasse par o l'on pt aborder la faade postrieure du monument.

    La distribution intrieure de l'difice est simple et trs rgulire.

    Il est divis, dans le sens de la longueur, en deux parties gales, par un mur intrieur de 0m-88 de largeur. Chacun de ces deux grands compartiments est son tour partag en 16 parties peu prs gales, formant ainsi 32 chambres rparties en deux sries parallles. Les chambres de la premire srie ont 4m-20 de profondeur, celles de la seconde 4m'38. Leur largeur varie lgrement: depuis 4m'26 jusqu' 4m*54. Dans chaque srie, les chambres sont spares l'une de l'autre par des murs pais de 0^56^

    Douze portes s'ouvrent sur la faade antrieure de l'difice. Chacune d'elles donne accs dans une chambre de la premire srie; les quatre chambres de droite en sont prives.

    Ces portes, qui sont leves de 0m#75 au-dessus du sol, ont une forme trapzodale trs prononce. Hautes de 2m-06, elles ont la base lm-02 et 0m>90 la partie suprieure. A gauche de chaque porte est une fentre de mme forme, lm*75 au-dessus du sol, haute de lmO4, large en bas de lm 04 galement, et en haut de 0m

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    terticales; une pierre semblable borde l'autre ct de la fentre; enfin trois autres bordent la porte droite.

    Sur la droite du btiment, l o il n'y a ni portes ni fentres, se trouvent quatre lucarnes, mais une hauteur de 5m# 15 au-dessus du sol. Longues de O1U'41 et hautes de 0ra'30, elles sont surmontes d'une pierre qui fait une saillie de 0m13, et qui, longue de 0m>85, les dpasse de chaque ct. Elles sont les unes des autres une distance de 4m>50.

    Quatre autres lucarnes semblables se voient sur la gauche du monument, mais une beaucoup plus grande hauteur; la destruction du reste de l'assise o elles se trouvent empche de voir si elles continuaient sur toute la longueur du btiment.

    Deux portes et deux fentres semblables sont, perces sur la faade de droite, donnant accs dans la premire chambre de chaque srie. Comme le sol est plus bas de ce ct que sur la facade principale, et que, pour la symtrie, ces ouvertures sont pratiques dans les mmes assises que les autres, elles se trouvent ici 3 et 4m au-dessus du sol.

    Enfin, des fentres clairaient encore la partie suprieure de l'difice, aujourd'hui ruine. Il n'en reste que deux, de mme forme que les fentres infrieures. L'assise qui les supporte est compose de grandes pierres poses debout.

    Chacune des chambres de la premire srie communique avec la chambre correspondante de la seconde au moyen d'une porte et d'une fentre semblables et disposes de la mme faon. Les dimensions en sont les mmes que celles des portes et fentres extrieures.

    Mais les chambres d'une mme srie ne communiquent pas entre elles, disposition bizarre qui fait que, pour aller de la premire chambre d'une srie la seconde, il faut passer par dehors ou traverser les deux chambres correspondantes de l'autre srie. Peut-tre y avait-il une communication entre la quatrime chambre partir de la droite en entrant (la dernire de celles qui n'ont pas d'ouvertures extrieures) et la cinquime, dans les deux sries. Cela est mme probable: sans

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    cela l'difice et t divise en deux parties de grandeur ingale, sans communication l'une avec l'autre. Mais l'tat des ruines m'a empch de m'en assurer.

    Les murs de refend qui, formant chaque chambre de la premire srie, divisaient la faade l'intrieur en seize compartiments, se prolongeaient sur toute la" hauteur de cette faade, telle au moins qu'elle est aujourd'hui. Ils n'ont plus maintenant qu'une hauteur de cinq six mtres, de mme que le mur de sparation des deux sries; mais les traces d'arrachement sont visibles sur toute la hauteur de la grande muraille. Il y avait donc deux ou plusieurs tages superpo* ses. Mais toutes les parties hautes se sont croules l'intrieur, et les trente-deux chambres sont remplies jusqu' une hauteur de six mtres d'un prodigieux amas de dcombres, o figurent des pierres normes, entre autres des morceaux d'architraves.

    Je n'ai pu dblayer compltement que deux chambres, une dans chaque srie. Il faudrait une trs grande dpense de temps et de travail pour nettoyer de cette faon tout le monument, car on n'a pour se dbarrasser des pierres que l'* troite ouverture des portes et des fentres, places fort au* dessus du sol.

    Les morceaux d'architecture qui remplissent ainsi les chambres, compliquent encore le problme qu'offre ce singulier monument.

    J'ai trouv en effet, dans ces deux chambres seulement, des fragments de cinq espces diffrentes de colonnes: 1 Colonne en pierre, non cannele, de 0ra#41 de diamtre. 2 Colonne en pierre, cannelures larges et plates, de 0m*55 de diamtre. 3 Chapiteau en pierre, dorique; le ft, de 0m*53 de diamtre, est cannel 21 cannelures et reli l'chin par trois moulures. 4 Colonne en pierre, cannelures ioniques, de Qra*48 de diamtre. 5 Enfin, un chapiteau ionique en marbre. Le ft, de 0m-43 de diamtre, a 24 cannelures de 0m-06. Ce chapiteau, trop orn, est na,nmoii;s de forme lgante et d'ufl

    bon travail,

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    O pouvaient se placer toutes ces colonnes? Et d'abord elles ne peuvent pas venir d'ailleurs. Les restes d'difices situs par derrire sont assez loigns et ne comportent ni une si grande quantit de colonnes, ni dtelles dimensions. Ces colonnes semblent enlever au monument le caractre militaire qu'on est au premier abord tent de lui donner. On ne voit pas, en effet, de quel usage elles pourraient tre dans une forteresse. D'ailleurs, un examen attentif de la disposition gnrale du monument et de certains dtails dmontre que ce n'est point une construction militaire, ou, pour parler plus exactement, que ce n'est point un fort.

    D'abord, la position serait mal choisie. Le mur d'enceinte masquant le fort, celui-ci ne pourrait servir la dfense qu'en seconde ligne, en cas de prise du rempart. Mme en ce cas il serait de peu d'utilit, puisqu'il ne domine la colline que du ct du fleuve et ne commande pas le plateau.

    La distribution intrieure ne se prte pas non plus la dfense. Comment rpartir des troupes dans ces petites chambres de 4 mtres de long et de large? Le maniement de la lance y serait impossible, celui de l'arc mme, difficile.

    A la vrit, le monument pouvait tre surmont d'une plate-forme protge par un parapet crnel. Mais, dans tous les cas, le grand nombre des portes ouvertes sur le dehors ne s'explique pas, pas plus que le manque de portes l'intrieur pour faire communiquer entre elles les chambres de chaque srie. Les besoins de la dfense exigent au contraire que les ouvertures sur le dehors soient aussi rduites que possible, et les communications intrieures faciles et rapides. De plus, toute porte expose l'ennemi est toujours dfendue, soit par sa position mme, lorsqu'elle est place dans un renfouce- ment, soit par une tour.

    Dans la citadelle de Lpron en Triphylie, on voit une distribution intrieure assez semblable celle du monument de Nimroud-Kalessi. Le rempart se compose de deux murs distants de 3m>60; des murs transversaux, galement distants de 3m10, divisent l'intrieur du rempart en une srie de petites

  • LES RUINES O'MGcM EN OLIE 287

    chambres carres (1). Toutefois, le Commandant de Rochas, qui cite cette disposition, ajoute que ces chambres ont probablement servi d'habitation la garnison.

    On pourrait tout au plus admettre ici quelque chose de semblable. Etant donne la proximit des remparts, ces chambres infrieures auraient pu servir de caserne. Dans cette hypothse, le manque de communications n'est plus un obstacle absolu, mais" il est encore fort gnant. Dans ces chambres qui ne communiquent que deux deux dans le sens de la profondeur et forment ainsi des sries d'appartements indpendants, j'aimerais mieux voir des magasins, des dpts.

    Quant la partie suprieure de l'difice, le terre-plein qui la relie au sol suprieur et la grande quantitit des colonnes tombes feraient supposer qu'elle formait un vaste portique de plain pied avec le plateau. Tout le monument ne serait ainsi que l'immense soubassement de ce portique ou de cette srie de portiques, soubassement utilis d'ailleurs par l'amnagement l'intrieur de nombreux magasins.

    Pour l'aspect militaire qu'offre inconstestablement l'extrieur de l'difice, on peut l'attribuer sa proximit des murs d'enceinte de l'acropole. Outre que les deux constructions s'harmonisaient bien ainsi, ce grand mur solide pouvait la rigueur, en cas de dfaite, servir de seconde ligne de dfense.

    La date de cette construction n'est gure plus facile dterminer que sa destination. *

    A premire vue, cette grande faade assises rgulires avec joints verticaux, et ces portes et fentres en trapze, paraissent remonter une poque purement grecque.

    Je crois pourtant que ce monument est une construction ou une reconstruction, de l'poque romaine impriale,

    J'ai dj dit que le parement intrieur des murailles tait beaucoup moins rgulier que le parement extrieur. Cela me semble indiquer une reconstruction faite d'aprs un modle plus ancien, mais moins soigne. De mme, l'irrgularit

    (1) Expdition scientifique de More, t. I, pi. 50, et Rochas d'Aiglun, Principes de la fortification antique, p. 78,

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    dans les dimensions des chambres parat dnoter une poque relativement assez basse.

    J'ai eu l'occasion de voir en deux endroits, prs de Pergame, c'est--dire dans la mme rgion de l'Asie Mineure, des constructions d'aspect tout fait identique.

    Prs de Dikli, ou l'on place gnralement Atarne, se voient sur une colline les restes d'un fort. L'appareil est exao tement le mme qu' Nimroud-Kalessi. La rgularit parfaite des moellons et des assises semble indiquer une poque plus ancienne.

    A Kosak,au contraire, cinq heures environ au Nord-Ouest de Pergame, l'aspect gnral est encore le mme, mais le peu de soin avec lequel sont disposs les matriaux et la faon sommaire dont les pierres sont tailles indique n'en pas douter une poque beaucoup plus basse (1).

    Il y a donc l un systme gnral de construction dont l'origine est vraiment ancienne, puisque le tumulus d'Attale Pergame prsente la mme disposition, mais qui s'est prolong durant des sicles dans toute cette partie de l'Asie Mineure.

    Les rares fragments d'inscriptions trouvs sur l'acropole confirment cette manire de voir (2).

    Trois grands morceaux d'architrave, qui se faisaient videmment suite, ont t trouvs dans l'intrieur du grand monument. Ils sont orns de cartouches o sont inscrits des noms propres; une autre inscription .en grandes lettres court sur la partie suprieure.

    I

    ... . CKAFTAAC

    MY ..OI

    I

    KAAAOCNII

    (1) On dsigne sous le nom gnral de Kosak une runion de 18 villages Youroucks contigus Outre ces restes de muraille, on y voit un thtre et quelques autres construction en fort mauvais tat.

    (2) Toutes ces inscriptions, graves sur une pierre assez tendre qui s'est effrite, sont trs difficiles lire.

  • Les ruks tfjM en o ?S9

    Le premier morceau, long de 2 10, large de O1* 63, et haut de 0m"38, est bris droite.

    Le second est intact; il mesure seulement 0m

  • LES RUINES d'jEG^! EN OLl

    La premire est grave sur deux pierres d'une longueur totale de 3m-50 sur Om'5O de large et 0ra-30 de haut.

    .

    [] ' [] OU [ ]

    La seconde est grave sur une corniche en marbre bleutre.

    A

    ]

  • LES RUtNES tfjGJ EN OL $91

    Ions sont petits, et la construction mdiocre. Les colonnes sont des demi-colonnes engages deux par deux dans un pilier; chaque demi-colonne a onze cannelures. La longueur totale du pilier est de 0m\38, et l'intervalle compris entre les deux demi-colonnes est de 0m-22. Elles sont tailles dans des blocs d'une longueur moyenne de 0m

  • LIS S fcJINES TMGM EN EOLI

    une ruine isole qui se dresse quelques pas du fleuve. Les paysans l'appellent Tcha-Capou, la Porte du fleuve.

    La seule partie intacte aujour'h.ui consiste en effet en une porte haute de 6m#05 et dont l'ouverture est large de 2m*37. Elle est forme de trois blocs de pierre, deux formant chambranles et le troisime formant linteau. Ces pierres sont larges de 0m39. Elles sont ornes de trois moulures en saillie l'une sur l'autre, de l'intrieur l'extrieur.

    L'ouverture de la porte est oriente d'Est en Ouest. A dix mtres l'Est de la porte, en allant vers le fleuve, on trouve des traces de soubassement, qui semblent indiquer que la porte tait sur la faade de l'difice tourne l'Ouest.

    a et l sont pars Hes tambours d colonnes de deux dimensions diffrentes. Ce sont des colonnes ioniques 24 cannelures, ayant, les unes 0m'92 et les autres 0m#88 de diamtre.

    Il subsiste seulement quelques fragments de chapiteaux, trs chargs et d'un trs mauvais style.

    Deux grandes pierres, ornes de moulures comme les pierres qui composent la porte, et qui proviennent d'une architrave, prsentent les deux fragments d'une inscription.

    Les lettres sont disposes sur deux lignes; celles de la ligne suprieure ont 0m 12 de hauteur, celles de la ligne infrieure 0m10; la gravure en est trs rgulire.

    A M !

    A la fin de la premire ligne, aprs A, je distingue avec quelque peine deux traits verticaux. On pourrait restituer: , []. Il serait d'autant plus convenable d'ajouter le nom du peuple que le temple a t construit hors de la cit. Dans ce cas, l'tendue de la lacune tant dtermine par la restitution de la seconde ligne qui n'est pa

  • tES RUINES '& EN OUE ' S93

    drait un nom de dieu trs court; comme Aif. Mais on ne connat pas de Zeus avec Fpithte . Au contraire celle ci convient Apollon, et celui-ci avait prcisment sur la cte un oracle d'Apollon signal par Strabon (X 111,622) et dans les ruines duquel Cyriaque d'Ancne a trouv une ddicace d'Attal. Il vaut donc mieux' regarder les deux traits verticaux comme les restes d'un et lire:

    [ ] [

    [ ] ' (1).

    P. Servilius Isauricus, aprs avoir t le collgue de Csar pendant son consulat de 48, fut proconsul d'Asie entre 46 et 44 (2). Son gouvernement est connu par plusieurs lettres de Cicron (ad Fam. XIII, 66-72) et par quelques inscriptions. Un texte latin apport de Smyrne Londres fait mention de la restauration d'un difice par ce proconsul: [P.] Serveilius P. [f.] Isauricus procos. res[tit]uit (C. /. L. I, 622). M. Newton a communiqu M. Waddington une inscription de Kalymna relative au mme personnage: '* [/. . NOUS avons publi plus haut un fragment d'inscription latine prouvant que Servilius avait restaur un des monuments d'iEg. Le service qu'il avait rendu la ville consista probablement lui rendre ses lois nationales et la dmocratie, comme il le fit Pergame. Une inscription dcouverte dans les fouilles du gouvernement allemand sur l'Acropole de cette ville est ainsi conue: [/. () ,

    , ~

    (1) M. Fabricius qui a visit les ruines de ce temple en novembre 1885 lit la premire ligne un TT aprs A du premier fragment et aprs la moiti d'une lettre ronde. (Mittheil. Jnstit. Athen, X, p. 273).

    (2) Waddington, Fastes de la province d'Asie, n 37.

    ' BULL. DE flOHRESP HELLENIQUE, X. *v

  • 294 LES RUINES tijtZGM EN OLIE

    ( (CoDze, Ergebn. der Ausgr. von Pergamon, p. 76). Il est probable que les habitants d'JSgae avaient fait valoir auprs du proconsul un oracle d'Apollon; ils levrent le temple au dieu en tmoignage de reconnaissance et rappelrent dans la ddicace le nom du gouverneur romain leur bienfaiteur. Ces marques de l'activit rparatrice de P. Servi- lius doivent peut-tre engager regarder comme ayant plus de valeur qu'un compliment banal l'loge que lui adressa Ci- cron pendant son gouvernement de la.province d'Asie: Sed si tibi utilius est, id est gloriosius Asise presse et istam partent reipublic maie affectant tueri, mihi quoque idem optatius dbet esse (1).

    Il reste identifier les ruines de Nimroud-Kalessi avec une ville ancienne.

    Les monnaies trouves dans les fouilles ne permettent pas elles seules d'tablir que Nimroud-Kalessi soit iEgae. Ces monnaies ne sont en effet qu'au nombre de 25, dont dix-neuf absolument frustes. Des six monnaies dont la lgende est encore lisible, trois sont d'iEg, deux autonomes et une impriale. Mais, outre les quatre autres pices l'empreinte d'vE- gae qui ont t prsentes sur les lieux M. Reinach (2), je sais qu'un certain nombre d'autres semblables, trouves l par les paysans, ont t vendues Smyrne.

    D'ailleurs les rares donnes topographiques fournies sur iEgae par les auteurs anciens s'accordent bien avec cette hypothse. Strabon, en parlant de l'iEoiide, dit: ' ... ' ' , { , ' "^ . (XIII, 622).

    Pline l'Ancien, aprs avoir numr les villes maritimes du sud de l'Eolide, ajoute: Intus iEgae, Attalia, Posidea, Neon- tichos, Temnos. (V, xxxii de l'd. Littr).

    M) Ad. Fam XIII, 68. (2/ Bull, de corr. helln., 1881, p. 136.

  • LS RUINES tiMGM EN OLlE 595

    iEgae tait donc situe dans l'intrieur et au pied de la chane de montagnes dont l'extrmit sud aboutit l'Hermus.

    A vrai dire," ces renseignements vagues s'appliquent tout aussi bien Guzel-Hissar, o on place gnralement iEgae; mais comme on n'a jamais trouv Guzel-Hissar de monnaies d'iEgae, il faut, au moins jusqu' preuve du contraire, identifier cette ancienne ville de l'Eolide avec Nimroud- Kalessi.

    On trouve et l dans les auteurs anciens quelques renseignements intressants sur l'histoire d'iEgae.

    Lorsque Thmistocle proscrit \oulut se rfugier la cour du grand roi, il dbarqua Cym et de l se rendit iEgae , , o il resta quelques jours cach dans la demeure de son ami Nicogns. C'est de l qu'il partit pour Suse, dans une voiture de femme. Tel est du moins le rcit de Plutarque (Themist. XXVI).

    Pendant la guerre du Ploponnse, au moment o Conon et Pharnabaze runis chassaient des les et des villes de la cte les harmostes lacdmoniens, l'un de ces derniers, Der- cyllidas, tcha de rassurer les partisans de Sparte Sestos. Il leur dit entre autres choses qu'en Asie mme, dans l'empire du grand roi, il y a des villes comme Temnos - , igae, et d'autres encore qui sont indpendantes (Xno- phon, Hellen. IV, vin, 5).

    Polybe parle deux reprises d'igae. Dans la lutte qui eut lieu entre Achaeus, prfet de l'Asie en-de du Taurus pour Antiochus, et Attale, les habitants d'iEgae, d'abord partisans d'Achaeus, firent dfection l'approche de l'arme d'Attale (V, 77). Plus tard, en Tan 600 de Rome, le Snat imposa la paix Attale et Prusias. Celui-ci, entre autres conditions, devait rparer les dommages qu'il avait causs aux villes de Mthymne, iEg, Cym et Hracle, et leur payer cent talents (XXXIII, 11).

    Sous l'empire, on. ne cite plus iEgae qu' propos du fameux tremblement de terre de Fan 47 ap. J. C, qui la ruina ainsi que onze autres villes d'Asie-Mineure, suivant

  • 8THIGILE GRAV

    Tacite (1) et le Syncelle (2), avec treize autres en ralit, comme le prouve la base de la statue colossale leve cette occasion Tibre par les quatorze cits reconnaissantes (3).

    Les auteurs byzantins ne parlent pas d'iEgae. Les catalogues et notices ecclsiastiques de Hirocls, Lon le Philosophe, etc., ne la mentionnent pas, attendu qu'elle ne fut pas, comme Myrina, le sige d'un vch.

    Dj la Table d Peutinger omet iEg. Mais cela s'explique par la position mme de la ville, qui ne se trouvait sur aucune des grandes voies de communication. De nombreux restes de constructions byzantines encore debout sur. l'acropole prouvent en effet que la ville d'iEgae a travers une grande partie au moins du moyen-ge.

    M. CLERC.

    MANCHE DE STRIGILE GRAVE DCOUVERT A MYRINA (4)

    En 1866, le P. Raphal Garrucci fit connatre l'Institut de Correspondance archologique trois strigiles manche histori, appartenant des amateurs italiens (5). Le premier portait la gravure d'un phbe nu, tourn vers la gauche, la tte ceinte d'une tiare leve; sur le second, on voyait un nain pugiliste avec le nom []; sur le troisime, un nain, les

    (1) Ann., II, 47. (2) P. 254. (3) Orelli, 687. (4) Cf. Bull, de Gorr. helln., t. IX, p. 168, o nous avons signal cet ob

    jet avee promesse d'y revenir. (5) Bullettino, 1866 p. 59. Ces monuments n'ont pas encore t gravs.

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