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Mobilité: ça bouge! 3/2012 Les véhicules de demain > La mobilité a des limites > Treize exemples à suivre > Les avantages du trafic marchandises combiné Hors dossier: Les réserves forestières grandissent > Initiatives pour le climat Les ressources naturelles en Suisse environnement

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Mobilité: ça bouge!

3/2012

Les véhicules de demain > La mobilité a des limites > Treize exemples à suivre> Les avantages du trafic marchandises combinéHors dossier: Les réserves forestières grandissent > Initiatives pour le climat

Les ressources naturelles en Suisse

environnement

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environnement 3/20122

Sommaire

> Dossier Mobilité

03 Editorial de Gérard Poffet, sous-directeur de l’OFEV

04 Les engins du futurLes laboratoires nous ouvrent leurs portes

08 Quand les Suisses se déplacentChiffres et faits

12 Vers les loisirs en TPLes alternatives à la voiture existent

16 La mobilité a des limitesInterview avec Peter Füglistaler, directeur de l’OFT

20 Dans la pratiqueTreize approches éprouvées et innovantes

30 L’espace urbain autrementEntretien avec Saskia Sassen, sociologue et experteen mobilité

33 Deux palettes en voyageLe rail-route représente une alternative intéressante

> Hors dossier

39 Réserves forestières en augmentationUn plus pour la biodiversité

44 Polluants atmosphériquesLe Protocole de Göteborg se renforce

46 Protection du climatInitiatives prometteuses

50 Recyclage du plastiqueLimites et possibilités

54 Un wagon de mesuresLe transport de marchandises par le raildevient moins risqué

> Rubriques

36 A notre porte38 En politique internationale57 Filières et formations58 Du côté du droit / Paru récemment60 Faits et gestes61 Impressum62 A l’office63 Portrait

> Abonnement gratuit / commandes

environnement, Swissprinters St.Gallen AGservice lecteurs, 9001 Saint-Galltél. +41 (0)58 787 58 65fax +41 (0)58 787 58 [email protected]/magazine

> Dans le prochain numéro

Les villes et les agglomérations accueillent troisquarts de la population suisse. Le prochain numéro,qui paraîtra fin novembre, sera consacré aux habitatsurbains. L’OFEV s’engage en faveur d’un aménage-ment et d’une utilisation durables des zones bâties.Elles devraient accorder suffisamment de place à labiodiversité et faciliter le contact avec la nature.

> En couverture

La mobilité grandissante porte atteinte à la qualité devie et altère la santé de la population, surtout dansles villes. La pollution atmosphérique, due en ma-jeure partie aux véhicules à moteur individuels, et lebruit sont les problèmes principaux. En comparaison,transports publics et mobilité douce ménagent biendavantage l’environnement.Photo: Keystone

> Infos pratiques

A part les rubriques, le contenu de ce numéro estégalement disponible sur Internet:www.bafu.admin.ch/magazine2012-3Les articles sont pour la plupart accompagnés d’uneliste de liens et de sources bibliographiques.L’OFEV sur Internet: www.bafu.admin.ch/fr

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Mobiles et futés

Les Suisses ne se sont jamais autant déplacés. Nos

aïeux auraient peine à le croire: on vit à Nyon, mais

on passe les fins de semaine dans le val d’Anniviers;

on travaille à Zurich alors qu’on habite le canton de

Schwytz; ou par passion de l’escalade, on quitte

régulièrement Lyss (BE) pour rejoindre le canton

du Jura. Sans oublier les vacances: en 2010, nos

concitoyens ont entrepris quelque 10 millions de

voyages à l’étranger.

La société et l’économie profitent largement de

la mobilité presque sans limite des personnes et des

marchandises. La médaille a toutefois son revers. En

2010, on a recensé 16 000 heures d’embouteillages,

près de 44 heures par jour, un nouveau record! Pour

les émissions de CO2, le résultat ne s’est guère amé-

lioré depuis le pic enregistré en 2008. Le bruit des

transports dégrade souvent la qualité de vie. De plus,

les infrastructures routières et ferroviaires accaparent

d’énormes surfaces, alors que le sol est déjà restreint

en Suisse. La croissance ininterrompue du trafic me-

nace ainsi les acquis de notre société en perpétuel

mouvement. Il est l’heure de repenser nos déplace-

ments. C’est la raison pour laquelle le Conseil fédé-

ral et le Parlement souhaitent encourager la mobilité

douce, entre autres.

Dans ce numéro, nous montrons – exemples à l’appui –

qu’il est déjà possible de se mouvoir en respectant

l’environnement. Nous pénétrons aussi dans les la-

boratoires de recherche et les entreprises qui déve-

loppent les véhicules économiques de demain.

Si le progrès technique contribuera sans doute à

atténuer nos problèmes de trafic, il n’apportera pas

de solution à lui seul. La mobilité écologique est un

puzzle qui se compose d’un grand nombre de pièces,

combinant différents moyens de transport et remet-

tant en cause nos besoins et nos habitudes.

Car une chose est sûre: même sous sa forme éco-

logique, la mobilité finit par atteindre ses limites. Quel

que soit le mode de déplacement choisi, il vaudra tou-

jours mieux travailler à proximité de son domicile. Et

un week-end à Barcelone aura toujours un plus gros

impact environnemental qu’un tour à vélo dans la

campagne à notre porte.

Gérard Poffet,sous-directeur de l’OFEV

La Suisse à l’envers: ici, lesmontagnes se dressent surle Plateau. C’est que lessommets visualisent le niveaude desserte des localités parles transports publics.Source: Office fédéral du développementterritorial (ARE)

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MOBILITÉ DU FUTUR

La pile à combustible remplacera-t-elle les carburants fossiles? Quand les premières voitures àconstruction légère apparaîtront-elles sur nos routes? Les trains de demain seront-ils à susten-tation magnétique? Réponses dans les laboratoires de recherche en motorisation et en mobilité.

Entre science-fictionet réalité

Tout à coup, le voilà, le premier car postal àpile à combustible de Suisse. Plongés dans lalecture matinale du journal, nous ne l’avons nivu ni entendu arriver devant la gare de Brugg.Le silence excepté, la différence avec les carspostaux conventionnels est minime. Son toit estsurélevé de cinquante centimètres et il arbore cefier slogan: « Je roule sans émissions. Pour l’envi-ronnement. »

Ce véhicule d’essai, qui dessert les lignespostales de Brugg (AG) depuis décembre 2011,fait partie du projet international de rechercheCHIC (« Clean Hydrogen in European Cities »).Pendant cinq ans, cinq villes européennes entesteront l’usage quotidien. Une station-servicefixe les approvisionne en hydrogène produitlocalement, non pas par le processus chimiquehabituel à partir de gaz naturel ou de charbon,mais par électrolyse de l’eau au moyen d’éner-gies renouvelables, hydraulique, éolienne ousolaire. La pile à combustible installée sur letoit du car transforme l’hydrogène en énergie depropulsion. Pour augmenter leurs performances,les véhicules sont équipés d’une batterie li-thium-ion qui assure le stockage intermédiairede l’électricité. Lorsqu’ils freinent, le moteurélectrique produit du courant qui est acheminévers la batterie. C’est là un gain important pourles cars postaux, qui freinent, s’arrêtent et accé-lèrent fréquemment.

La pile à combustible suisse. Le car parcourt sansfaiblir le trajet par monts et par vaux de Brugg

à Villigen. Les pannes sont rares, nous expliquele chauffeur, ravi et fier de participer à cette ex-périence – « un projet d’avenir ». Nous passonsdevant l’accélérateur d’électrons de l’InstitutPaul Scherrer (IPS), gigantesque OVNI posé surun pré, puis quittons le car pour franchir le pontmenant au bâtiment principal. Nous y sommesaccueillis par Philipp Dietrich, responsable duprojet de motorisation par pile à combustible. Ilnous fait traverser le laboratoire jusqu’au cœurde son activité de recherche – la « pile à com-bustible suisse ». En collaboration avec la sociétéde Nick Hayek, Belenos SA, l’IPS développe unsystème pour petites voitures. Objectif: parve-nir à des performances et à des coûts (achat etutilisation) comparables à ceux des véhiculesconventionnels sur tout le cycle de vie, soitenviron dix ans. Il n’est pas encore atteint. « Lepotentiel d’optimisation reste considérable, tantpour les coûts que pour la durée de vie », ditPhilipp Dietrich. Mais les chercheurs sont surla bonne voie, comme l’a récemment confirmél’Office fédéral de l’énergie (OFEN) en décernantle Prix Watt d’Or 2011 à Belenos SA et à l’IPS.

Pour des raisons de secret industriel, il nousest impossible de voir le système de propulsionde Nick Hayek, mais notre interlocuteur nousmontre une machine analogue conçue pourun moteur de bateau, bardée d’appareils demesure. « Le principe de la pile à combustibleest simple », explique-t-il en nous tendant unecellule de la taille d’une boîte d’allumettes.Une membrane située au milieu contrôle le

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Il faut réduire le poidsdes voitures et élec-tromobiles si l’on veutdiminuer radicalementleur consommationd’énergie. La sociétéESORO, à Fällanden (ZH),est spécialisée dansle développement devéhicules légers. La car-rosserie est loin d’êtrele seul aspect: tous leséléments doivent êtrerepensés, les siègespar exemple, dont lasécurité reste l’objectifdominant. Leur stabilitéest testée à l’ordina-teur dès la phase deprojet (en haut). Ils sont

fabriqués à base de composites de fibres synthétiques recyclables (aucentre à gauche). Un robot industriel place les matériaux dans le systèmede production (au centre à droite). Comparés à des sièges convention-nels (en bas à gauche, à l’arrière-plan), les nouveaux modèles sont ainsi

allégés de 30 %. Une petite voiture de construction légère comme leprototype ESORO H301 (en bas à droite) pèse un quart de moins qu’unevoiture habituelle.

Photos: Hans Schürmann

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flux des molécules d’hydrogène qui, de l’autrecôté, rencontrent de l’oxygène. La réaction pro-duit de l’électricité. « Enfantin », déclare PhilippDietrich. Comprendre et optimiser les phéno-mènes à l’échelle du nanomètre et du micro-mètre, voilà la mission des chercheurs. Et àquand la percée décisive? « Pour ce qui concernela densité de puissance, nous en sommes toutprès », dit-il. L’hydrogène est plus cher quel’essence, mais deux fois plus efficace. Son prixélevé est dû à la complexité du processus de pro-duction et à un bilan énergétique relativementmauvais: pour fabriquer une quantité d’hydro-gène dont la puissance énergétique équivautà celle d’un litre d’essence, il faut une énergieapprochant celle de trois litres d’essence. Phi-lippe Dietrich ajoute que contrairement à l’Alle-magne, qui est en train de le mettre en place, laSuisse n’a pas de réseau de stations-service à hy-drogène. Le public ne suivra que si cette lacuneest comblée. Le passage à l’hydrogène est plusfacile pour les bus urbains et les cars postauxqui, comme dans l’essai pilote de Brugg, peuvent« faire le plein » en un seul et même endroit.

Gaz naturel: un important potentiel. Quelques joursplus tard, Christian Bach, concepteur de mo-teurs au Laboratoire fédéral d’essai des maté-riaux et de recherche (Empa) à Dübendorf (ZH),nous tient des propos semblables. Il travailledepuis plusieurs années au développement d’unvéhicule à faible consommation fonctionnantau gaz naturel. « Le gaz naturel et le biogaz sontdes carburants très intéressants dont les émis-sions de CO2 sont nettement inférieures à celles

de l’essence ou du diesel », explique-t-il en nousconduisant vers son laboratoire. Un mécanicienest en train de bricoler une Volkswagen Touranverte qui, vue de l’extérieur, n’a rien de parti-culier. Elle abrite toutefois un moteur hybridegaz naturel-électricité mis au point dans le cadredu projet CLEVER (« Clean and Efficient VehicleResearch »), cofinancé par Bosch, Volkswagen,l’OFEN et l’OFEV. Les chercheurs de CLEVER ontrécemment démontré que ce système permetd’éviter 35% d’émissions de CO2, et plus encoresi on ajoute du biogaz. Etonnamment, sur uncycle de vie complet, une voiture hybride gaznaturel-électricité ne coûte pas plus cher qu’unevoiture à essence. L’avenir lui appartient-il pourautant? « Le problème, c’est le réseau d’approvi-sionnement », dit Christian Bach. On ne trouvedu gaz que dans 132 stations-service en Suisseet dans 25 seulement en France, ce qui com-plique la planification d’un voyage. Mais Chris-tian Bach est convaincu que les choses change-ront. « Le potentiel d’efficacité énergétique desmoteurs au gaz naturel est encore considérable.C’est un carburant bon marché. En outre, lesnouvelles dispositions sur le CO2 entreront envigueur en 2015. On verra s’accroître le nombrede véhicules au gaz naturel, et les stations-service suivront le mouvement. »

Le constructeur de machines Lino Guzzella,nouveau recteur de l’EPF de Zurich, ne croit pasplus que ses collègues au déclin prochain dumoteur à combustion: « La plupart des voiturescontinueront à être équipées de moteurs à es-sence ou diesel », dit-il. Contrairement au railet aux transports urbains, essentiellement ali-

A gauche: des systèmesde sécurité automatiséspréviendront à l’avenir lesaccidents de la route, parexemple en faisant com-muniquer les véhiculesentre eux (Car2Car). Lesinformations échangéesservent à identifier dessituations critiques.

A droite: le système radioutilisé pour la commu-nication d’une voiture àl’autre utilise le réseaulocal sans fil (WLAN) dansun rayon de quelquescentaines de mètres. Dèsque deux ou plusieursvéhicules pénètrentdans ce rayon, un réseauad hoc s’établit.Photos: Car2Car

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CONTACTGiovanni D’UrbanoChef de la section Trafic, OFEV031 322 93 [email protected]

mentés par des lignes électriques, le trafic indi-viduel doit transporter sa propre énergie. Sortantdu chocolat de son tiroir, il demande: « En ran-donnée, préférez-vous, pour la même quantitéd’énergie, emporter une plaque de chocolat oudeux kilos de brocolis? » Et d’ajouter: « C’est lamême chose pour le carburant: l’essence et le die-sel présentent des valeurs énergétiques extraordi-naires, bien supérieures à celle des batteries. » Enplus, l’essence est très bon marché, à peine pluschère au litre que l’eau minérale. Ce manqued’incitation financière a donné naissance à desvoitures trop lourdes et trop puissantes.

Véhicules pilotés par ordinateur. Lino Guzzellaespère que les voitures deviendront plus légèreset plus économes. Son pari: de petits moteursturbo et des hybrides pneumatiques combinantair comprimé et combustion, comme ceux quisont testés au sous-sol de son institut. A cela doitvenir s’ajouter une construction radicalementlégère en aluminium, fibre de carbone ou ma-gnésium telle qu’en développent les entreprisessuisses Georg Fischer, Esoro ou Horlacher, maisaussi de grands constructeurs comme Audi etBMW. « Le poids va devenir capital », prédit-il. Enconséquence, la voiture du futur ne devra plussubir aucun choc. Et comme les conducteurssont responsables de la grande majorité des acci-dents, elle devra être dotée de systèmes de sécu-rité automatisés.

L’éventail des solutions envisagées est vaste:ordinateur de bord, navigation par satellite,profils routiers préprogrammés, aides à la con-duite, communication des véhicules entre eux

(Car2Car) et avec les signaux routiers. Le groupeinternet Google teste même une voiture high-tech capable de passer en fonctionnementautonome, pour laquelle le bureau américaincompétent a récemment délivré un brevet. Lestechniciens de Google sont convaincus qu’ellepermettrait d’éviter les accidents, mais aussi lesembouteillages. Selon leurs calculs, nos routespourraient accueillir un nombre deux fois plusélevé de véhicules s’ils étaient pilotés par ordi-nateur. « Techniquement, tout cela est faisable »,dit Lino Guzzella. « La principale résistance sesitue dans nos têtes, car nous ne pourrions plusaccélérer à notre guise. »

Systèmes sans conducteur. Giovanni D’Urbano,ingénieur en mécanique et chef de la sectionTrafic de l’OFEV, envisage un couplage des véhi-cules sur les voies de circulation très fréquen-tées comme les autoroutes. En agglomération,la solution réside à ses yeux dans le systèmePRT (« Personal Rapid Transit ») tel que le testeactuellement l’aéroport de Londres Heathrow.Les passagers sont transportés des parkings auxterminaux dans de petites voitures électriquessans conducteur.

Dans le train qui relie Berne à Zurich, nousdemandons à Giovanni D’Urbano de quoi serafait le trafic individuel dans vingt ou trente ans.Il nous dépeint une combinaison de divers sys-tèmes de propulsion et de carburants: voituresdiesel propres, petits véhicules à essence, auto-mobiles hybrides, au gaz naturel ou électriques,vélos électriques et conventionnels. L’évolutiondu prix des carburants et la législation, commela loi sur le CO2, les prescriptions sur les gazd’échappement ou les taxes d’incitation, serontaussi des éléments décisifs. « Il est très pro-bable que les carburants fossiles renchériront,ce qui permettra aux modèles plus économesde s’imposer », dit l’ingénieur en sortant sonabonnement et en le tendant au contrôleur. Etles transports publics? Des trains à sustentationmagnétique sillonneront-ils le Plateau comme leprévoient les projets Swissmetro (souterrain) etSwiss Rapid Express? « Il est encore trop tôt pourle dire », répond-il. « La recherche doit d’abordmontrer ce qui est réalisable sur le plan tech-nique et financier. »

Les trains de demain ne seront donc pasvraiment différents de ceux d’aujourd’hui. Celadit, les CFF ont l’intention de nous proposer deswagons plus spacieux et des cadences au quartd’heure sur les grands axes.

Nicolas GattlenPour en savoir plus:www.bafu.admin.ch/magazine2012-3-01

Le poids des véhicules vadevenir capital. En consé-quence, la voiture du futur nedevra plus subir aucun choc.Et comme les conducteurs sontresponsables de la grandemajorité des accidents, elledevra être dotée de systèmesde sécurité automatisés.

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La Suisse en mouvementbjo. En Suisse, les gens se déplacent chaque jour par millions sur laroute et le rail. La mobilité caractérise notre société. Elle fait partie denotre qualité de vie et nous procure des avantages économiques. Maiselle a des effets néfastes sur l’environnement et sur notre santé.

Surtout le long des routes très fréquentées, des centaines de mil-liers d’habitants souffrent du bruit des véhicules à moteur et de leursgaz d’échappement. Le tracé des axes à grande circulation se retrouvequasi identique sur les cartes d’immissions signalant une pollution so-nore et atmosphérique excessive, comme dans le cas du gaz irritantqu’est le dioxyde d’azote (NO2).

La croissance incessante des besoins de transport, tant de person-nes que de marchandises, a intensifié aussi les impacts écologiques:les émissions de gaz à effet de serre, la consommation de sol et lemitage du paysage, le morcellement des habitats ont fortement aug-menté dans les dernières dizaines d’années. Les infrastructures detrafic – des routes, pour près de 90% – occupent aujourd’hui untiers environ de l’étendue des agglomérations, soit quelque 130 mètrescarrés par personne: le triple de la surface de logement.

Il existe cependant aussi un réseau bien aménagé de mobilitédouce: chemins de randonnée, sentiers de montagne et voies cyclistes(pages 10 et 11).

NOMBRE DE VÉHICULES à MOTEUR IMMATRICULÉS EN SUISSE (2011)

4 163 003 348 553 60 324 665 870

Durant la journée,

1200 000personnes souffrent du bruit routier

70 000du bruit ferroviaire

65 000du bruit aérien

Durant la nuit,

700 000personnes souffrent du bruit routier

140 000du bruit ferroviaire

95 000du bruit aérien

Longueur du réseau routier: 71452 km Longueur du réseau ferroviaire: 5124 kmPOLLUTION SONORE DUE AU TRAFIC ROUTIER (2008)

très dangereux pour la santé (> 55 dBA)dangereux pour la santé (40 – 44,9 dBA)peu perturbant (30 – 39,9 dBA)sans danger pour la santé (< 30 dBA)Evaluation selon l’OMS

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15 000

30 000

45 000

60 000

75 000

90 000

jusqu’à 5000

25 000

50 000

100 000

15

22

29

23

10

9

120 000 22 910 504

4 095 626

11 845 379

30 074

Aéroports etnombre de passagers par an

Nombre de passagers(moyenne journalière)dans les plus grandes gares

Héliports de montagne

Nombre de bateaux à passagerssur les plus grands lacs

300 000

REJETS ANNUELS DE CO2 DUS AU TRAFIC ROUTIER, EN MILLIONS DE TONNES

RÉSEAU à GRANDE CIRCULATION (ROUTE ET RAIL)

1950 1960 1970 1980 1990 2000 2010

POLLUTION AU DIOXYDE D’AZOTE (NO2; 2010)

125 000

120 000

150 000

85 000

81 113

18 697

100 704

69 336

Nombre de véhicules à moteur, par jour

Nombre de passagers dans les trains,par jour

1716151413121110

987654321 > 36

33–3630–3325–3020–2515–2010–15≤ 10

169 082

µg NO2/m3

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Chaque année, la population suisse parcourt – la moitié de la circonférence de la Terre.

40% sont imputables aux loisirs,

18%36%Des distances couvertes dans le pays,

au travail et à la formation et aux courses et accompagnements.

10 m2

BESOINS EN SURFACE DES DIVERS MOYENS DE TRANSPORT,PAR PERSONNE(durant le déplacement, écarts compris)

115 m2

7 m2

3 m2

LES MÉNAGES SUISSES ET LEURS VÉHICULES

20,5 %

22,6 %

25,5 %

et plus…

31,4 %

48,7 %

24,8 %

5,7 %et plus…

20,8 %

11 %

2 %et plus…

87 %

20500 km

DISTANCES PARCOURUES PAR MOYEN DE TRANSPORT, EN POURCENTAGE

3,7 %

49,6 %

25,6 %

18,7 %

Sources: ARE, CFF, OFAC, OFEV, OFROU, OFS, OFT, ville de Zurich

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66 000 km de chemins de randonnée ainsi que de nombreux itinéraires cyclables:9 nationaux,

53 régionaux et 59 locaux, avec plus de100 stations de location de vélos.

VITESSE MOYENNE DE DÉPLACEMENT (en kilomètres-heure):

4,9 km 13,4 km 33,5 km 38,6 km 61,4 km

TP

TEMPS PASSÉ EN DÉPLACEMENT (en minutes par jour):

en vert: itinéraires cyclables nationauxpoint vert: station de location de vélosen jaune: chemins de randonnéeen rouge: chemins de randonnée de montagneen bleu: chemins de randonnée alpine

UN RÉSEAU DENSE DE MOBILITÉ DOUCE

Pour en savoir plus: www.bafu.admin.ch/magazine2012-3-02

La Suisse propose

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environnement 3/2012 > Dossier Mobilité12

La Course Féminine de Berne est une mani-festation sportive qui fait bouger davantagede monde que les grands matchs de foot orga-nisés au Stade de Suisse. Et ceci au sens littéraldu terme: la mobilité ce jour-là ne concernepas seulement les 14000 participantes qui par-courent un demi à quinze kilomètres en mar-chant ou en courant. Les sportives et le publicnombreux qui les accompagne franchissent desdistances bien plus longues pour venir sur placeet rentrer à la maison le soir.

Train compris. Les organisateurs de la manifesta-tion ont déployé des trésors d’imagination pourrendre ce trafic aussi compatible que possibleavec l’environnement. Les frais d’inscriptionenglobent un billet de train aller-retour valabledans toute la Suisse. Un tarif forfaitaire a éténégocié avec les CFF. Les participantes ayant unabonnement général bénéficient d’une réduc-tion tout comme celles venant de Berne et desenvirons, qui ont souvent seulement besoind’un ticket de bus. Les documents fournis auxsportives signalent clairement qu’il n’y a pasde places de stationnement. Ainsi combinées,ces mesures font leur effet: « Nos sondages in-diquent que 95% des coureuses arrivent par lestransports en commun », dit Catherine Imhof,du comité d’organisation.

Il s’agit là d’un chiffre de rêve pour le traficde loisirs. Selon l’enquête publiée en 2012 parles offices fédéraux de la statistique (OFS) et dudéveloppement territorial (ARE) sur la mobilitéen Suisse, près de la moitié de tous les dépla-cements sont effectués à pied, mais 67% desdistances parcourues dans le temps libre sont

couvertes en voiture ou en moto. Si la part dutrafic individuel motorisé a légèrement reculédans son ensemble, l’auto reste sans conteste laprincipale compagne des loisirs. Le train et lebus gagnent du terrain auprès des pendulaires,mais à la fermeture des bureaux, chacun préfères’asseoir dans son propre véhicule.

Mon auto, ma liberté. Les sondages montrent bienpourquoi la voiture reste si populaire: trajetsplus courts d’une part, destinations mal desser-vies par le bus et le train de l’autre. Le coût joueun rôle secondaire. Effectivement, les lieux dedétente sont moins faciles d’accès que les lieuxde travail, et les cadences sont moins rapidesle soir, le week-end et les jours fériés qu’auxheures de pointe.

Andreas Blumenstein, du Bureau de la mo-bilité (Büro für Mobilität) à Berne, voit encoreune autre explication au manque de popularitédes transports publics (TP) en dehors de la vieprofessionnelle. « Le choix du moyen de trans-port est aussi une affaire de sentiments », dit-il.« Faire la navette, c’est la routine. Pour en sor-tir, nous tenons à décider spontanément quandet où partir. La voiture répond davantage à cetétat d’esprit que les TP, dont l’utilisation exigeune certaine organisation. » Le temps libre, c’estla liberté, sur laquelle les horaires menacentd’empiéter.

Loisirs très gloutons. Notre société n’a jamaisété aussi mobile. Les Suisses parcourent enmoyenne 37 kilomètres par jour, dont 40% pen-dant leurs loisirs et 24% seulement pour leurtravail. Ces chiffres ne tiennent pas compte des

TRAFIC DE LOISIRS

Les embouteillages et les trains surchargés en début et en fin de journée sont trompeurs: cen’est pas pour se déplacer vers le lieu de leur travail que les Suisses sont le plus mobiles, maispendant leurs loisirs. Et pour ces derniers, ils utilisent souvent un véhicule privé. Pourtant, desalternatives existent.

La voiture encoretrop présente

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excursions plus étendues et des voyages, quireprésentent 6700 kilomètres par personne etpar an, les quatre cinquièmes étant consacrésà la détente. Plus de la moitié de ces distancessont parcourues en avion. Pour trois tonnesd’émissions de CO2 produites par le trafic indi-viduel motorisé, plus d’une tonne est à mettreau compte des transports aériens. Les experts dutourisme pensent que l’avion va encore gagneren importance. L’étude sur le marché suisse dutourisme (Reisemarkt Schweiz) réalisée par l’Institutde prestations publiques et de tourisme de l’Uni-versité de Saint-Gall en 2008 a montré que lesvols courts et bon marché ont le vent en poupe.

Comment assouvir cette soif de mobilitésans que l’environnement en souffre? Ce n’estpas si simple. « Jusqu’à présent, les stratégies etles politiques en matière de planification destransports étaient surtout orientées vers le traficpendulaire des travailleurs et le trafic longue dis-tance », indique le Conseil fédéral dans sa Straté-gie pour le trafic de loisirs publiée en 2009. «Maisles aspects spécifiques au trafic de loisirs ont ététrop peu pris en compte dans les réflexions surla politique des transports durable, d’où la pos-sibilité et la nécessité d’intervenir aujourd’huidans ce domaine. » La stratégie vise à stabiliserl’utilisation de la voiture et de la moto dans letrafic privé d’ici à 2020, à augmenter la partdes TP et de la mobilité douce et à raccourcir lestrajets.

Si les objectifs sont clairs, la manière de lesatteindre l’est moins. Une des raisons en estque les comportements pendant le temps libresont difficiles à cerner, le trafic de loisirs étanttrès hétérogène. C’est pourquoi il n’y a pas de

La grande manifestationsportive qu’est la CourseFéminine de Berne misesur les transports publics:95 % des participantesrejoignent le centre-villeen train, en tram ou en busdepuis leur domicile.Toutes les photos: Ruben Wyttenbach

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environnement 3/2012 > Dossier Mobilité14

remède miracle pour les influencer. Il faut untrain de mesures diversifiées et harmonisées.

Au match en TP. Presque deux tiers des trajetsprivés quotidiens ne dépassent pas les limitesde l’agglomération. On rend visite à des amis,mange au restaurant, se rend à l’entraînementou dans la forêt la plus proche. Un tiers voirela moitié de ces trajets font moins de deux kilo-mètres. Autrement dit: un bon réseau de TP etdes chemins agréables pour cyclistes et piétonspourraient faire renoncer à la voiture. C’estsurtout vrai dans les domaines où le trafic indi-viduel est particulièrement développé, commele sport. Rien d’étonnant à ce que de nombreuxprojets s’attachent à convertir les sportifs.

Les parents d’enfants qui jouent au foot semuent souvent en chauffeurs le week-end: ilsemmènent leur progéniture au match. Les tra-jets sont longs pour les tournois que de nom-breux clubs de Zurich, par exemple, organisentau printemps et à l’automne. Pour épargner desdéplacements aux parents et ménager l’envi-ronnement, le bureau de conseil Synergo a misau point, avec le soutien de l’OFEV et d’autrespartenaires, le projet Soccermobile. Synergofournit aux organisateurs et aux clubs desinformations sur l’accès aux tournois par lesTP. Les clubs bénéficient également d’un billetcollectif gratuit, valable sur tout le réseau detransports zurichois.

Après cinq tournois, les résultats du testsont prometteurs: une équipe sur trois a profitéde l’offre. Le projet s’est terminé en juin 2012.On ne sait pas encore s’il sera poursuivi et sousquelle forme. « Les billets de groupe ne peuventêtre gratuits éternellement », dit Dominik Oet-terli, responsable du projet chez Synergo. Nulne sait si les clubs resteront fidèles aux TPlorsqu’ils devront les payer de leur poche.

Alpentaxi et Bus alpin. Les amateurs de naturese rendent souvent à la montagne en voiture.Il y aurait pourtant moyen de rejoindre desrégions écartées sans son véhicule personnel.L’association Mountain Wilderness entend fairemieux connaître l’une de ces possibilités. Souswww.alpentaxi.ch, elle donne un aperçu detoutes les entreprises de taxi locales des Alpessuisses: le taxi alpin prend en charge les dernierskilomètres séparant l’arrêt du car ou la gare dupoint de départ ou d’arrivée de la randonnée.

L’association Bus alpin vise elle aussi à amé-liorer le réseau touristique des TP. En 2005 et2006, de nouvelles offres ont vu le jour dansquatre régions pilotes – Gantrisch (BE), Binntal(VS), Greina (GR/TI) et Moosalp (VS). Ainsi, unbus sur appel achemine les randonneurs vers le

point de départ des pistes ou des chemins. Plusde 25 000 personnes en ont profité pendantles deux années d’essai. Entre-temps, d’autresrégions ont rejoint le projet. L’association lesconseille et commercialise leurs offres sur sonsite internet www.busalpin.ch. Taxi et bus al-pins sont soutenus financièrement par l’OFEV.

L’office encourage aussi le projet « MobilesEntlebuch », qui propose aux visiteurs de laréserve de biosphère de l’UNESCO des minibuspour les amateurs de sports d’hiver ou des bonsde train pour accéder au point de départ desexcursions. Ces offres trouvent preneurs, mêmes’ils ne sont pas très nombreux. Un contrôledes résultats réalisé par l’Institut d’économietouristique de l’Université de Lucerne a montréqu’en un an, 1200 automobilistes environ sontpassés de cette manière aux TP et à la mobilitédouce.

L’herbe n’est pas plus verte ailleurs. Les offres desTP ne sont pas le seul moyen de rendre le traficde loisirs plus écologique. De nombreux dépla-cements pourraient être évités si nous n’avionspas besoin des Alpes ou du Jura pour trouverla nature. Autrement dit: les zones de détenteagréables et bien desservies situées à proximitédes villes rendent les longs voyages superflus.Les paysages renaturés le long des fleuves ontun rôle important à jouer – comme celui duBirspark, dans les cantons de Bâle-Campagneet de Soleure, qui a été élu paysage de l’année2012 par la Fondation suisse pour la protectionet l’aménagement du paysage (FP). Les bordsde la Birse étaient naguère considérés commeles arrière-cours des communes riveraines.Aujourd’hui, ils sont prisés par la populationcomme oasis de verdure et zones de détente.

Les berges de l’Aar en amont de Berne sontelles aussi très fréquentées quand le soleilbrille. Cela n’a pas toujours été le cas: l’Hun-zigenau n’a acquis sa popularité qu’en 2006,quand des mesures de protection contre lescrues ont élargi le lit de la rivière. Un nouveaubras a donné naissance à deux îles, dont l’uneest accessible par une passerelle. Ce paysage al-luvial sauvage en miniature se situe à quelquesminutes à pied des communes de Rubigen et deMünsingen.

Les zones de détente agréables et biendesservies situées à proximité des villesrendent les longs voyages superflus.

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15Dossier Mobilité > environnement 3/2012

Des mesures de renaturation analogues sont éga-lement mises en œuvre ou prévues sur d’autrestronçons de l’Aar entre Thoune et Berne. Or 68%des visiteurs vivent dans les communes alen-tour. C’est ce qu’a révélé une enquête récente.Et 65% d’entre eux s’y rendent par les TP, à véloou à pied. Quant à savoir si ces revalorisationsentraîneront une diminution des déplacementsen voiture, rien n’est moins sûr. Comme larégion attire de plus en plus de monde, il fautplutôt s’attendre à une augmentation du traficindividuel motorisé. Telle est la conclusion durapport sur la stratégie adoptée pour l’ensembledu tronçon de l’Aar entre Thoune et Berne.

Qu’il s’agisse de farniente au bord de l’eau,d’activités sportives à la montagne, de grandesmanifestations ou de tournois de football, lechemin menant à une mobilité écologique estlong. Et il faudra encore bien des idées lumi-neuses et des projets novateurs pour que nouscessions d’associer le sentiment de liberté à lavoiture.

Hansjakob Baumgartner

Pour en savoir plus:www.bafu.admin.ch/magazine2012-3-03

CONTACTDoris Ochsner TannerSection Trafic, OFEV031 322 96 [email protected]

Chaque année, quelque 14 000 coureuses s’alignent au départ de la Course Féminine deBerne. Il n’y a pas de places de stationnement, mais de nombreux trains spéciaux. Le billetaller-retour, valable quatre jours, est compris dans les frais d’inscription.

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environnement 3/2012 > Dossier Mobilité16

Pour Peter Füglistaler, directeur de l’Office fédéral des transports (OFT), le réseau exemplaire de transportsen commun de la Suisse est l’un de ses principaux atouts face à la concurrence internationale. Dans un entretienavec environnement, il explique comment maîtriser la croissance de la mobilité et pourquoi l’Etat doit fixerdes limites.

POLITIQUE DES TRANSPORTS

environnement: Monsieur Füglistaler, faut-il aspirer àune liaison Berne-Zurich en une demi-heure?Peter Füglistaler: Aller plus vite, c’est créer de lamobilité. Or nous ne cherchons pas à augmen-ter la mobilité, mais à la maîtriser, de la façon laplus écologique possible. C’est pourquoi nous vi-sons à développer non la rapidité, mais la capa-cité du réseau, avec des offres plus intéressanteset plus pratiques. Nous sommes donc opposés àune ligne à grande vitesse entre Zurich et Berne.

Ce n’est pas l’avis des responsables des CFF, quiaffirment satisfaire les besoins de leurs clients et agiren fonction du marché.Le développement prévu de la capacité répondaux attentes du marché. Mais nous ne voulonspas créer de nouveaux marchés en réduisant lestemps de parcours. Accélérer encore les dépla-cements reviendrait à renforcer la consomma-tion de terrain, ce qui serait contraire au Projetde territoire Suisse ainsi qu’à la politique fédé-

« La mobilité a des limites »

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17Dossier Mobilité > environnement 3/2012

« Le gain de mobilité élargit surtout notre horizonet nous donne un peu plus de cette liberté individuellequi, parallèlement à la liberté de pensée, est trèsimportante pour beaucoup de gens. »

Peter Füglistaler, directeur de l’OFT

rale des transports et de l’aménagement duterritoire.

Quels sont les avantages d’une meilleure mobilité?Nous en profitons pendant toute notre vie: du-rant la scolarité et la formation, pour trouver unemploi intéressant et, bien sûr, pour les loisirs etla détente. Mais le gain de mobilité élargit sur-tout notre horizon et nous donne un peu plusde cette liberté individuelle qui, parallèlementà la liberté de pensée, est très importante pourbeaucoup de gens.

Combien de mobilité faut-il pour que la Suisse puissepoursuivre son développement économique?On part généralement du principe qu’il existeun rapport entre la prospérité et le développe-ment des transports, tout essor économiquese répercutant sur le trafic. D’après nos esti-

mations, la croissance de la Suisse nécessiterad’ici à 2030 une augmentation considérable desdéplacements: environ 60% pour les personneset 70% pour les marchandises. En tant que paysexportateur, nous devons bien desservir nosmarchés et faciliter les déplacements des pendu-laires vers les centres économiques. Et pour rem-plir notre vocation touristique, il nous faut aussiorganiser de façon convaincante les transportsde loisirs.

La Suisse peut-elle supporter une telle hausse dutrafic?De fait, les inconvénients se font sentir de plusen plus. Je pense au morcellement du paysageou à la pollution sonore et atmosphérique. Enoutre, les infrastructures prennent toujours plusde place. Nous devons donc maîtriser les dépla-cements de la façon la plus écologique possible:

Photos: Hansueli Trachsel

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environnement 3/2012 > Dossier Mobilité18

les canaliser et dans les zones sensibles –notamment les régions très peuplées ou lesAlpes – freiner leur croissance ou les transfé-rer sur des moyens de transport propres.

Y a-t-il des limites à la mobilité personnelle?Dès lors que la liberté individuelle affecte tropla communauté, il faut la restreindre. Cela vautaussi pour les transports. En fermant des ruesde transit, nous plaçons la protection de lapopulation dans les quartiers d’habitation au-dessus du droit à la libre mobilité. De même,nous aménageons des zones piétonnes dansles centres-villes. L’interdiction pour les poidslourds de rouler la nuit et le dimanche consti-tue aussi une restriction légale au profit del’intérêt général. Nous ne voulons pas d’unemobilité illimitée, le trafic doit rester suppor-table pour l’homme et l’environnement.

L’Etat restreint donc la mobilité?Oui, et le nouveau projet de financement etd’aménagement de l’infrastructure ferroviaire(FAIF) prévoit une plus grande contributiondes utilisateurs, par une augmentation des prixd’un peu plus de 5% fin 2012. La populationdoit sentir que la mobilité a un coût. Le projetlimite aussi à 3000 francs par an la déductiondes frais de transport pour le calcul de l’impôtfédéral direct. Certains automobilistes dédui-saient jusqu’à présent 70000 francs. Le messageau Parlement est clair: la mobilité – surtoutprofessionnelle – est nécessaire, mais elle nedoit être favorisée fiscalement qu’au sein des

agglomérations. Les personnes qui parcourentde grandes distances pour se rendre au travailne doivent plus être récompensées.

Aux heures de pointe, les trains sont souvent bondés.Est-il encore possible de transférer davantage le traficde la route au rail?Il le faut. Ces dix dernières années, la part destransports publics a augmenté, et cela doitcontinuer. Une grande efficacité et une faiblepollution sont les critères déterminants pourmaîtriser le trafic le plus écologiquement pos-sible. Les transports collectifs tels que le train ysatisfont bien davantage que le trafic individuelmotorisé. A eux donc de maîtriser la croissanceannoncée.

Comment nous déplacerons-nous en 2050?Je ne sais pas si nous utiliserons des trains àsustentation magnétique ou des avions légers:la technique n’est pas vraiment mon domaine.Mais il est très probable que nous continueronsà voyager en train et en voiture. L’important,pour moi, ce n’est pas le moyen de locomo-tion. Mon idée, c’est qu’en 2050, chacun ait sacarte de mobilité. Elle permettra de calculer lesfrais en fonction de la distance parcourue etde l’heure, avec des réductions pour les modesde transport écologiques et des supplémentspour les déplacements dans les zones sensiblestelles que les villes ou les zones de détente, toutcomme pour les personnes qui utiliseront tou-jours des véhicules à essence.

Est-ce que le développement des transports publicsne présente pas aussi des inconvénients? Il n’incitepas à marcher ou à prendre son vélo, par exemple.Transports en commun et mobilité douce sontcomplémentaires. Le potentiel de la mobi-lité douce n’est certainement pas encore en-tièrement exploité. Les vélos électriques, parexemple, qui permettent de parcourir de pluslongues distances, nous font presque vivreune révolution. Mais il ne faut pas oublier quela population vieillit et ne veut pas perdre samobilité pour autant. L’offre des transportspublics garantit aux personnes âgées des dépla-cements confortables avec un bilan de CO2 plusou moins neutre.

La mobilité douce est pénalisée par l’Etat: piétons etcyclistes ne bénéficient pas d’avantages fiscaux,alors que ce sont eux qui pèsent le moins surl’environnement et le système de transport.La réduction de la déduction fiscale pour lespendulaires, que nous avons déjà évoquée,permettra de mettre fin à une certaine injus-tice. Pour aller plus loin, il faudrait une tarifi-cation beaucoup plus différenciée qu’elle nel’est actuellement. Et cela impliquerait ausside remettre en question l’abonnement général:la possibilité de se déplacer autant qu’on veutpour moins de 3400 francs par an ne va pasdans le sens d’une tarification équilibrée. Maisles discussions à ce sujet sont loin d’être termi-nées. Cyclistes et piétons devront probablementse contenter de leur bonne conscience pendantencore quelques années.

Combien de temps pourrons-nous maintenir unréseau de transports publics aussi développé?La Suisse peut-elle se permettre de renoncer àl’un de ses principaux atouts face à la concur-rence internationale?

« Nous pouvons épargner davantage surles réseaux très fréquentés que dans les zonespériphériques. »

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Quand les cars postaux circulent dans les vallées lesplus reculées avec seulement quelques personnes àbord, on est tenté de se demander si cette offre n’estpas un luxe.C’est une erreur de le penser. En voyant ces buspresque vides, on s’imagine que ces prestationsne sont pas nécessaires. Mais leur coût est relati-vement faible par rapport à celui du train régio-nal qui, même dans la région zurichoise, est endéficit. Nous pouvons épargner davantage surles réseaux très fréquentés que dans les zonespériphériques. Le dernier plan d’austérité dela Confédération l’a montré: il faudrait suppri-mer un nombre considérable de lignes dans cesrégions avant de réaliser la moindre économie.De plus, nous avons un mandat de desserte: laSuisse se doit de relier la plupart des villages demontagne au réseau de transports publics. C’estune question de cohésion sociale!

Vous avez déjà souligné que les voyageurs devraientpayer davantage à l’avenir.Oui, j’en suis convaincu. Il ne faut pas se faired’illusions: nous assumons toujours les frais dela mobilité. Quand ce n’est pas par le prix desbillets, c’est par les impôts. Il convient donc queles utilisateurs directs paient plus. Aujourd’hui,ils financent la moitié des coûts, le reste étantà la charge des contribuables. Ce rapport va semodifier peu à peu dans les prochaines années,car la part payée par les passagers devrait êtrenettement plus importante.

Comment se fera la répartition des coûts?La hausse des prix sera progressive: un peu plusde 5% fin 2012, on ne peut pas faire plus. Ilfaut relever les tarifs pour pouvoir financer lesinfrastructures. L’OFT considère que cela ne de-vrait pas entraîner une augmentation du traficroutier. Peut-être la progression des transportspublics fléchira-t-elle légèrement, ce qui neserait pas un mal. Le taux de croissance de cesdernières années, jusqu’à 8%, était parfois pro-blématique.

Mais pourquoi une telle promotion des transportsen commun? Du point de vue environnemental, lesfonds publics pourraient être utilisés de manière plusefficace ou affectés à d’autres secteurs, notamment àla santé.Cela fait l’objet de discussions permanentes auConseil fédéral et au Parlement dans le cadredes décisions budgétaires et des débats sur lesdifférents dossiers. Les transports publics sonttoujours en concurrence avec d’autres secteurs.En Suisse, le mécanisme d’attribution des fondspublics est relativement simple, puisqu’il s’agitde scrutins, soit parlementaires, soit populaires.

Max Friedli, votre prédécesseur, parlait d’un« engouement presque irrationnel » de la Suisse pourles transports publics. Est-ce aussi votre avis?Je pense que ce sont des réflexions très ration-nelles qui nous amènent à promouvoir les trans-ports en commun. Leur qualité figure en bonneplace dans tous les sondages sur les atouts de laSuisse en tant que place économique. Si le paysattire les entreprises étrangères, c’est notam-ment parce que nous parvenons à résoudre demanière exemplaire les problèmes de trafic.

Propos recueillis par Kaspar Meuli

Pour en savoir plus:www.bafu.admin.ch/magazine2012-3-04

Peter Füglistaler. Né en 1959, Peter Füglistaler dirigedepuis 2010 l’Office fédéral des transports (OFT) et, à cetitre, contribue à définir la politique suisse en la matière.Après un apprentissage bancaire, il a passé sa matu-rité par correspondance et fait des études d’économieà l’Université de Saint-Gall. Sa thèse de doctorat étaitconsacrée aux mesures à prendre pour combattre la pau-vreté. Avant d’être nommé à la tête de l’OFT, il a travaillé àl’Administration fédérale des finances, puis aux CFF, où ila occupé durant 14 ans différents postes à responsabilité.Peter Füglistaler est marié et père de deux filles. Il vit àBinningen (BL).

« La qualité des transports en commun figureen bonne place dans tous les sondages surles atouts de la Suisse en tant que placeéconomique. »

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environnement 3/2012 > Dossier Mobilité20

EXEMPLES PRATIQUES

Il est déjà possible aujourd’hui de se déplacer en ménageant l’environnement. Des exemples suisseset étrangers en témoignent. environnement présente treize approches éprouvées, originales ouparticulièrement innovantes telles que le système Mobility, l’abonnement écologique ou encore la gestionde la mobilité dans les villes et les entreprises.

Ecologique, ici et maintenant

L’avancée de la flotte rouge

Pourquoi avoir une voiture si c’est pour la lais-ser souvent au garage? Pourquoi ne pas partagerun véhicule et ne l’utiliser que quand on en avraiment besoin? Ces questions sont à l’ori-gine du modèle de covoiturage lancé dans lesannées 1980. Elles ont débouché sur la créationde Mobility Carsharing en 1997, engendrantune mutation de la société. De plus en plus degens – pas seulement des jeunes – choisissentde renoncer à l’automobile comme symbolede statut social, pour lui préférer une carte demembre Mobility. Ils ont ainsi accès à 2600 véhi-cules – de la petite voiture au cabriolet et à lacamionnette – disponibles en 1300 endroits deSuisse. Chaque mois, Mobility crée jusqu’à dixnouveaux sites. Il y a donc toujours davantagede voitures atteignables en quelques minutes àpied ou à vélo.

Les véhicules rouges de la flotte Mobility fontdésormais partie du paysage routier suisse. En2002, grâce à la coopération avec les CFF et àla stratégie de la mobilité combinée, le systèmes’est hissé au rang d’entreprise hautement pro-fessionnelle et orientée client. Le voyageur peutsauter directement du train dans la voiture quil’attend à la gare. Aujourd’hui, Mobility compteplus de 100000 membres, et son potentiel théo-rique est même estimé à un demi-million.

Les adeptes de Mobility réservent chaque an-née entre dix et quinze trajets de 40 kilomètresen moyenne. Est-ce vraiment moins qu’avec unevoiture individuelle? «Ce modèle est écologique-ment durable », explique Hermann Scherrer, col-

laborateur à l’Office fédéral de l’énergie (OFEN).«Un client moyen réduit ses émissions de CO2d’environ 200 kilos par an. Cela représente20000 tonnes au total. » Parmi les utilisateursde Mobility, 20% possédaient une voiture par lepassé. Il y a donc 20000 autos en moins sur lesroutes suisses grâce au covoiturage – un beausuccès, en vérité!

Stefan Hartmann

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La Suisse est le berceau du covoiturage. L’invention des trajets combinésvoiture-transports publics est une histoire à succès.

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21Dossier Mobilité > environnement 3/2012

Un plan rassembleurLa zone industrielle de Plan-les-Ouates (ZIPLO) dans le canton de Genève se développe à lavitesse grand V, avec pour corollaire des problèmes d’accès et de stationnement. Un plan demobilité inter-entreprises réunissant un grand nombre de partenaires fournit des solutions.

La ZIPLO regroupe 330 entreprises et près de8000 collaborateurs qui se déplacent essentielle-ment en voiture. Et l’extension se poursuit. D’ici2015, quelque 2000 personnes supplémentairesvont travailler dans la zone.

Pour réduire le trafic motorisé individueltout en garantissant une bonne accessibilité dusite, il fallait d’abord une concertation large desdifférents acteurs. Pari réussi: la commune dePlan-les-Ouates, l’Association des entreprises dela ZIPLO, la Fondation pour les terrains indus-triels de Genève et la Direction générale de lamobilité ont mis sur pied un plan d’envergure.« La complémentarité des outils et des ressourcesn’a jamais été réalisée à un tel niveau », affirmeSandra Brazzini, la cheffe de projet. « Plus lesentreprises impliquées sont nombreuses et lespartenaires divers, plus les offres peuvent êtreavantageuses et les services optimisés », ajoute-t-elle.

La Centrale mobilité représente la chevilleouvrière de ce plan. Opérationnelle depuisl’été 2010, elle est plus qu’un simple bureaud’information. Services encadrés, conseils per-sonnalisés, site internet percutant, fiches pra-

tiques, animations, tout est mis en œuvre pourinciter les collaborateurs à opter pour des modesde déplacement plus doux. Comme alternative à« l’autosolisme », la centrale prône notamment lecovoiturage. La prestation s’axe principalementsur la mise en relation par téléphone, simpleet flexible. Le contact direct permet de prendreen compte les spécificités des demandes. Autresmesures actives: le grand compte Unireso, untarif préférentiel pour les abonnements annuelsaux transports publics; et, à venir, une flotte devélos ou encore des navettes ciblées.

Afin de pousser les entreprises à s’engagermoralement, la ZIPLO a instauré une charte.Pour l’heure, 19 entreprises, couvrant près de80% des employés, l’ont signée et ont désignéchacune un répondant mobilité pour faciliter lacommunication. « L’important, dans un premiertemps, est que les plus grandes d’entre elless’impliquent et jouent le rôle de locomotives »,dit Sandra Brazzini. A terme, il s’agit de touchertoutes les entités.

Cornélia Mühlberger de Preux

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Toutes les illustrations: Anna Luchs

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environnement 3/2012 > Dossier Mobilité22

Le télétravail réduit le flux de pendulaires

Grâce à Internet et à l’ordinateur por-table, il est désormais possible de tra-vailler quasiment partout – et notam-ment chez soi. Cette forme moderne detravail à domicile a un grand potentiel.« En Suisse, quelque 450000 employéspourraient travailler un jour par se-maine à la maison », précise NorbertEgli, de la section Consommation etproduits de l’OFEV. « Cela permettraitd’économiser 67000 tonnes de CO2 paran. » A titre de comparaison: dans uneentreprise de 150 employés, le poten-tiel d’économies qu’apporterait un jourde télétravail par semaine équivautà la charge en CO2 de cinq tours dumonde et demi en avion! « Le télétravailest non seulement écologique, maisaussi intéressant sous un angle écono-mique », souligne Norbert Egli. « Il per-met d’atténuer la demande de mobilitéaux heures de pointe. » A eux seuls, lesCFF pourraient, selon leurs calculs, éco-nomiser chaque année des dizaines demillions de francs pour l’élargissementde leurs capacités si un pendulaire surcinq travaillait un jour par semaine àdomicile.

De nombreux employeurs s’en-gagent d’ailleurs activement pourle télétravail, à l’instar du WWF etde ses 120 employés. « Il n’y a guèred’autre domaine où l’on puisse autantréduire les émissions de CO2 à si peude frais », dit Thomas Vellacott, PDG duWWF Suisse. « C’est pourquoi presquetous nos collaborateurs disposent desmoyens techniques leur permettantd’accéder à tous les serveurs depuischez eux. » Une offre très appréciée,précise-t-il. C’est Microsoft qui a la plus

grande expérience en matière de télé-travail. Lors de la rénovation du siègeprincipal suisse à Zurich-Wollishofenen 2011, l’entreprise a tenté un essaipuisque les 500 employés ne pouvaientse rendre au bureau durant trois moisen raison des travaux. « De manièregénérale, nos collaborateurs ont ap-précié de pouvoir choisir librementleur lieu de travail », explique BarbaraJosef, porte-parole de Microsoft. « Nousavions aménagé un bureau collectifà Wollishofen en cas de besoin. » Lesemployés ont trouvé qu’il était plusfacile ainsi de concilier travail et viede famille. Mais certains se sont sentis

socialement et professionnellementisolés. Dans l’ensemble cependant,l’expérience semble s’être révéléepositive: chez Microsoft, on choisitbeaucoup plus souvent de travail-ler depuis la maison que par le passé.

« Il faut trouver la bonne mesure »,dit Norbert Egli. « Le but n’est pas desupprimer le bureau. » Car cela feraitdisparaître le réseau social créé surle lieu de travail et les échanges deconnaissances en pâtiraient. «Mais ilvaut la peine de chercher le bon équi-libre, car le gain écologique est évident:moins de déplacements – sans équipe-ment supplémentaire. »

Vera Bueller

Un quart des kilomètres parcourus en Suisse sont dus aux trajets entre maison et bureau. Mais cen’est pas une fatalité. Le travail régulier à domicile réduit les déplacements nécessaires au quotidien.

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23Dossier Mobilité > environnement 3/2012

Aux HUG, mais à véloMis en place par Pro Vélo Suisse et soutenu parl’OFEV, Biketek, vélosuisse et Velopa, le PrixVélo distingue les entreprises qui ont un tempsd’avance en matière de promotion du vélo. C’estsans conteste le cas des HUG, qui se sont démenéspour à la fois fluidifier le trafic, protéger l’environ-nement et encourager l’exercice physique de leurs12000 employés. «Depuis 2008, le plan de mobilitéfait partie du management environnemental desHUG », précise Mouna Asal, chargée du plan.

Pour doper l’utilisation de la petite reine, troismesures principales ont été imaginées: des réduc-tions à l’achat de deux-roues, des bons d’essai pourvélos électriques et des prêts à taux zéro. Par ail-leurs, les parkings à cycles ont été agrandis et opti-misés. Ils peuvent actuellement accueillir quelque

« Les entreprises suisses pourraient éviter un voyaged’affaires sur sept, soit environ 15% des kilomètresparcourus », déclare l’économiste Peter Masciadri,directeur du projet Switch au Bureau de la mobi-lité (Büro für Mobilität) à Berne. Ce projet entendconvaincre les entreprises de recourir davantageaux rencontres en ligne pour réduire le trafic. Latechnique nécessaire existe depuis longtemps: unelarge offre de systèmes tels que Webex, Skype ouLync permet d’organiser des séances virtuelles entrecollaborateurs, clients et partenaires. Les vidéo-conférences peuvent être suivies par 25 personnes.Les systèmes sont basés sur le web et prévoientaussi l’échange de documents. «Ces solutions ne re-quièrent aucune infrastructure spéciale. Elles sontavantageuses et judicieuses même à l’intérieur dupays », explique Peter Masciadri.

Utiliser Skype plutôt que voyager: telle est la de-vise, et pas uniquement pour des motifs écologiques.L’entreprise Contec d’Uetendorf près de Thoune(BE), par exemple, a réalisé qu’avec Switch, elle pou-vait économiser chaque année quelque 4000 francspar collaborateur mobile grâce à une technologiemoderne et des conseils individuels. La société, quicompte quatre sites en Suisse et une cinquantained’employés, produit des colmatages en caoutchoucpour les toits plats et les étangs. «Nos collaborateurs

Remplacer les voyages d’affaires par des vidéoconférences:même à l’intérieur de la Suisse, les rencontres virtuelles permettentde considérablement réduire le trafic.

« Skyper » plutôt que voyager

Les Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG) ont reçu en 2011 le Prix Vélopour entreprises cyclophiles. Une récompense plus que méritée.

passent trois mois par an au volant pour se rendre dans une filialeou chez les clients », commente le propriétaire, Erwin Gyger, « c’esttotalement inefficace! » Thomas Bucheli, qui travaille à la sectionPolitique climatique de l’OFEV, estime lui aussi que les vidéocon-férences ont un grand potentiel. «Elles ne peuvent certes pas rem-placer complètement les contacts personnels, mais constituent bienplus souvent qu’on ne le pense une bonne solution dans le travailquotidien. » Car elles ont trois gros atouts: elles sont meilleur mar-ché, moins polluantes et font gagner beaucoup de temps.

Vera Bueller

1300 engins. Depuis peu, les usagers disposent même d’un atelierde réparation en libre-service. Les HUG possèdent aussi une flottede 368 bicyclettes à usage interne, permettant au personnel d’al-ler d’un site à l’autre par des passages souterrains, et 32 à usageexterne pour les déplacements professionnels. Il existe enfin une«vélothèque », un distributeur de vélos pliables à l’essai. « L’engage-ment de l’établissement est exemplaire », estime Harald Jenk, de lasection Trafic de l’OFEV.

Jamais à court d’idées et d’actions, l’équipe de Mouna Asalencourage les employés à participer à l’opération « Bike to work »,qui connaît chaque année plus d’adeptes. Elle a également adopté«Green monkeys », un nouveau système de covoiturage convenantparticulièrement aux horaires irréguliers du personnel de soins.Ce qui fait le succès d’un plan de mobilité, c’est le dynamisme in-terne, Mouna Asal en est persuadée. Et les HUG le prouvent.

Cornélia Mühlberger de Preux

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Mobile chez OrangeL’installation du siège de Renens a été l’occasion pourOrange Suisse d’organiser autrement travail et mobilité dansses sites. L’entreprise a notamment repensé sa gestion desplaces de parc.

Chez Orange Suisse, la majorité des collaborateurs ne possè-dent plus de poste de travail fixe et personnel. Au siège prin-cipal de Renens, ils évoluent avec un bureau mobile, composéd’un ordinateur portable et d’un bagage à roulettes, voire d’unsac à dos, et s’installent là où ils trouvent une table libre dansl’espace dévolu à leur département. De même, la souplesse estmaintenant de mise en ce qui concerne la mobilité. Les em-ployés varient leur mode de transport pour se rendre au travaildans les différents sites suisses de Renens, Bienne et Zurich. Lesplaces de parc, autrefois gratuites, sont payantes.

Orange avait tout d’abord envisagé d’aménager de nom-breux lieux de stationnement pour véhicules près de ses nou-veaux bureaux à Renens. Mais début 2009, avec le concours del’Association Transports et Environnement (ATE), l’entreprise asaisi la balle au bond pour élaborer une stratégie de mobilité.

Le plan qui s’applique aux trois sites helvétiques d’Orangea démarré avec une sorte de mise aux enchères des placesde parc. L’idée était de faire réfléchir les collaborateurs. Laconcertation a permis de définir l’attribution de ces espaces etde fixer le montant de la location d’une place. Actuellement,à Renens, il s’élève à environ 70 francs par mois. Les recettesdégagées sont rassemblées dans un pot commun et ensuitereversées deux fois par an à tous les employés. Autre mesureoriginale instaurée lors du lancement du projet: le « MobilityJackpot », un tirage au sort récompensant ceux qui font desefforts dans le domaine.

Orange dispose par ailleurs d’une information interneactive autour de la mobilité. Les employés sont par exempleincités à tester la leur sur www.mobilitaetsdurchblick.ch. Ilspeuvent également avoir recours au carpooling, un système devoitures communes mises à disposition par la société pour lestrajets professionnels. Parallèlement, des cours d’éco-conduite sont organisés et on a amélioré l’infras-tructure pour les vélos. « Les incitations parlesquelles Orange encourage ses colla-borateurs à changer de comportementdans leurs déplacements sont promet-teuses. La réduction réelle du traficdépend néanmoins de l’utilisationeffective de ces offres. Un suiviest dans tous les cas souhai-table », estime Iris Oberau-ner, de la section Econo-mie de l’OFEV.

Cornélia Mühlberger de Preux

Des voituresen libre-service

Les géants de l’automobile réfléchissenteux aussi à de nouveaux types de mobi-lité et les diffusent à grande échelle,forts de leur présence sur le marché. Legroupe allemand Daimler a ainsi lancédeux projets pilotes Car2go en 2009,l’un en Allemagne (Ulm) et l’autre auxEtats-Unis (Austin). Trois ans plus tard,son idée s’est concrétisée dans onzevilles d’Europe et d’Amérique du Nordet devrait encore s’étendre. Car2gos’inspire du covoiturage, qu’il souhaitepopulariser en le rendant plus souple:les voitures – toutes des Smart à deuxplaces – ne sont pas stationnées à desemplacements fixes, mais réparties auhasard sur tout l’espace urbain. Uneflotte typique comporte 300 véhicules.L’offre s’adresse aux personnes désirantse déplacer en ville, et surtout à cellesqui veulent pouvoir se décider en der-nière minute. Les clients localisent etréservent le véhicule le plus proche parune application pour smartphone, parun service téléphonique ou sur Inter-net. Contrairement au covoiturage clas-sique tel que Mobility, ils ne doivent an-noncer ni lieu ni heure de restitution,mais peuvent laisser leur véhicule surn’importe quel parking public quand ilsn’en ont plus besoin.

L’idée de location brève se reflètebien dans les tarifs, calculés en minutes.Une minute coûte 29 centimes, une jour-née entière 39 euros, à quoi s’ajoute unmontant pour les kilomètres parcourus.Ce prix comprend les assurances, l’es-sence et les frais de stationnement.

L’offre est alléchante, mais est-elleécologique? « Cela dépend du nombred’automobilistes qui, grâce à Car2go,renoncent à posséder un véhicule », es-time Harald Jenk, de la section Trafic del’OFEV. Andreas Blumenstein, conseil-ler au Bureau de la mobilité (Büro für

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Car2go est une nouvelle forme delocation de voiture pour petits tra-jets en milieu urbain. Ses atouts: unsystème de réservation simple et unegrande souplesse.

environnement 3/2012 > Dossier Mobilité

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Une vague de vélos électriques submerge nosroutes. En 2008, ces engins ne représentaientque 4% des bicyclettes vendues en Suisse. Cetaux avait déjà triplé en 2010, avec 40 000 piècesécoulées, et depuis, la tendance se confirme.Une étude menée en ville de Bâle a montréque leurs acquéreurs ont 49 ans en moyenne etqu’une grande majorité d’entre eux a le permisde conduire. Le vélo électrique remplacerait-il la voiture, du moins pour de courts trajets?« Oui, estime Urs Schwegler, un tiers des kilo-mètres parcourus avec ces bicyclettes l’auraientété avec des vélos ordinaires, un tiers en trans-ports publics et un tiers en voiture ou à moto. »Urs Schwegler est membre de la direction deNewRide, une organisation qui encourage ladiffusion des vélos et scooters électriques touten jetant un regard critique sur leur utilisation.NewRide, qui bénéficie du soutien de l’OFEV etde l’Office fédéral de l’énergie (OFEN), a notam-ment mandaté l’étude bâloise sur les adeptes desnouveaux vélos. Et l’enquête atteste que ces der-niers prennent la place d’autres moyens de trans-port.

Les scooters électriques font eux aussi une ap-parition remarquée. Selon NewRide, ils consom-ment 8 kilowattheures aux 100 kilomètres, soit0,8 litre d’essence. Ils sont imbattables dans ledomaine de l’économie d’énergie, avant tout surde brefs trajets comportant de fréquentes haltes.Ce détail n’a pas échappé à la Poste, qui les uti-lise depuis 2008 pour la distribution du courrier.Alors qu’il faut éteindre une moto et faire redé-marrer son moteur à chaque arrêt, il suffit, avecun scooter électrique, de stopper et d’accélérerpour repartir.

Toutefois, c’est l’absence presque totale debruit qui frappe le plus. « La différence de pol-lution sonore entre un scooter électrique et undeux-roues ordinaire est encore plus importantequ’entre une voiture électrique et un véhiculeà essence », confirme Dominique Schneuwly,de la section Routes et véhicules à l’OFEV.La lutte contre le bruit ne peut donc que pro-fiter des scooters électriques, pour autant queceux-ci remplacent des scooters conventionnels

et non des vélos.Lucienne Rey

Deux-roues branchésMobilität) à Berne, émet des réserves:dans les grandes villes, ces modèles nesont pas forcément favorables à l’envi-ronnement. Des offres comme Car2gopourraient même concurrencer lestransports publics et dissuader les au-tomobilistes de passer au bus.

Le groupe Daimler, par contre,est convaincu de son idée. Car2go sepropage rapidement dans le mondeentier. En automne 2011, l’entreprisea démarré à Vienne avec 500 Smarts.Elle s’est aussi établie à Amsterdamainsi qu’à San Diego (Etats-Unis), avecdes parcs de 300 Smarts électriques.Et le modèle fait déjà des émules: en2012, après des débuts prometteurs àMunich et Berlin, BMW, Mini et Sixtont lancé DriveNow à Düsseldorf.

Stefan Hartmann

Les vélos et scooters électriques ontle vent en poupe et ménagent tant nospoumons que nos oreilles.

Dossier Mobilité > environnement 3/2012

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Petites reines en partage

On la reconnaît de loin, la bicyclettevelospot. Elle est rouge vif et arboreun large panier noir à l’avant. Aprèsune phase de test durant laquelle denombreuses optimisations ont pu êtreopérées, la capitale du Seeland dis-pose maintenant de 40 stations de prêtavec une flotte de 250 véhicules. Pourenfourcher une petite reine coqueli-cot, il suffit de s’inscrire en ligne surwww.velospot.ch. L’usager reçoit en-suite une carte à puce qu’il place sur lelecteur du cadenas électronique pourlibérer l’engin. Après utilisation, il leramène sur une aire de stationnementde son choix. « Le système est simpleet flexible, il ne nécessite pas d’infra-structure spécifique et peut s’intégrerdans n’importe quelle station de par-cage », avance Jonas Schmid, porte-parole du projet velospot.

Pour jouer un rôle déterminantdans la mobilité urbaine, favoriser letransfert modal et motiver de nou-veaux groupes, il faut disposer d’unréseau dense, qui couvre toute la ville.velospot est soutenu par le Centre deservices pour une mobilité innovatricedu Département fédéral de l’environ-nement, des transports, de l’énergie etde la communication (DETEC). L’entre-tien des bicyclettes est assuré par uneentreprise sociale. L’abonnement coûte50 francs par an et donne droit à unnombre illimité de courses de moinsde 30 minutes. « Si le trajet est pluslong, un petit supplément est perçu.Il y aura également des cartes journa-lières », fait remarquer Jonas Schmid.

D’autres initiatives semblables dé-roulent leur potentiel en Suisse. Auprintemps 2012, CarPostal a reprisvelopass, le plus grand prestatairesuisse en la matière, implanté dansplus de vingt villes romandes et tessi-noises. En collaboration avec les CFFet Rent a Bike, CarPostal avait déjàlancé en 2011 un service analogueappelé PubliBike, qui regroupe un

grand nombre de réseaux urbainsau niveau national. Pour l’heure,Lucerne, Brigue, Soleure, Bâle, Frauen-feld (TG), Winterthour (ZH) et Kreuz-lingen (TG) sont équipées. Delémont,Rapperswil (SG) et Zurich vont lesrejoindre dans le courant de l’année.Le système nextbike, lui, vient d’Alle-magne et concerne surtout la Suisseorientale. A noter que Genève prévoitde mettre prochainement en place150 stations de vélos en libre-servicesur l’ensemble du canton, en collabo-ration avec les Transports publics gene-vois. L’idée est d’offrir une complé-

Inspiré du Vélib’ à Paris, le vélo en libre-service conquiert la Suisse. Il s’y propage sous formede différentes offres: velopass, PubliBike ou encore nextbike. La ville de Bienne, de son côté, alancé velospot, un projet qui a plus d’un atout dans sa corbeille.

mentarité entre transports collectifset trajets plus individuels.

L’Office fédéral des routes (OFROU)suit ces développements avec intérêt.« Nous aimerions savoir si les utilisa-teurs d’autres moyens de transportliés à des offres de bikesharing sontsusceptibles de passer au vélo, ou en-core si ce genre de prestations permetde réduire la quantité de bicyclettesutilisées rarement qui bloquent néan-moins des places de parc à des pointscentraux », confie Niklaus Schranz, del’OFROU.

Cornélia Mühlberger de Preux

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Le plein électrique, en un éclair

La mobilité électrique suscite de nom-breux espoirs: on attend d’elle qu’elleréduise l’impact du trafic sur l’environ-nement et diminue notamment la pollu-tion par le bruit, les particules fines et leCO2. Selon l’entreprise Alpiq, spécialistede l’énergie, 15% du parc automobilesuisse, soit 720 000 véhicules, pourraitd’ici à 2020 rouler à l’électricité et contri-buer ainsi à ce qu’une bonne partie desobjectifs suisses en matière climatiquepuissent être atteints. L’Office fédéral del’énergie (OFEN) table sur une évolutionmoins marquée et s’attend à quelque300 000 voitures électriques dans lemême délai.

Si l’on veut que les voitures électriques supplantent les moteurs àessence, il faut densifier le réseau de bornes de recharge. Mais lecourant ainsi distribué en masse sera-t-il vert?

Ces visions ne deviendront pas réalitésans l’infrastructure nécessaire. Pourgarantir le fonctionnement de la flotteprévue par Alpiq, 753 000 bornes derecharge devraient être installées dansles immeubles, les entreprises et l’espacepublic, sans compter 250 stations d’ap-provisionnement rapide à placer en despoints stratégiques du réseau routier. Etmême une fois ces conditions techniquesremplies, rien ne garantit un bilan éco-logique positif. Les voitures électriquesdoivent en effet consommer du courantrenouvelable pour que, sur leur durée devie, leur bilan écologique s’approche decelui d’une petite voiture diesel récente.

Comparer avec exactitude l’impactenvironnemental des véhicules élec-triques et des véhicules à essence est unetâche complexe. Outre l’origine du cou-rant, il faut tenir compte des émissionsengendrées par la production de l’enginet des batteries. L’Ecole polytechniquefédérale de Zurich (EPFZ) et l’Institut PaulScherrer s’y sont attelés dans le cadred’un projet de plusieurs années, THELMA(« Technology-centered Electric MobilityAssessment »). Les chercheurs analysentégalement les effets des deux types delocomotion sur la société.

Quel que soit le mode de fabricationdu courant, les propriétaires de véhi-cules électriques connaissent encore desproblèmes pratiques: il faut jusqu’à huitheures pour recharger totalement unebatterie. « Il existe certes des systèmesqui permettent une recharge à 80% enune ou deux heures », explique Felix Reu-timann, de la section Trafic de l’OFEV.Mais ce procédé diminue la durée de viedes accumulateurs, si onéreux à l’achat.De plus, une surcharge du réseau localn’est pas exclue si de nombreux véhi-cules se branchent en même temps.

« Pour faire le plein d’électricité aussivite que d’essence, il faudrait changerles batteries », affirme Felix Reutimann.C’est exactement l’idée de l’entreprisecalifornienne Better Place: ses clients nelui achètent que le véhicule et louent lesbatteries. A des stations de recharge ultra-rapides, ils échangent en cinq minutesleur batterie vide contre une pleine,dans un processus géré par ordinateur ettotalement automatisé. Des stations de cegenre sont déjà en fonction en Israël etau Danemark.

Lucienne Rey

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En Hollande, les rues des centreshistoriques sont souvent étroites,trop étroites pour les camions qui, ens’y frayant un passage, polluent l’at-mosphère et gênent les piétons. C’està partir de ce constat que la ville deNimègue a créé en 2009 le « Binnen-stadservice », un service logistique des-tiné à assurer la distribution durabledes marchandises dans les centres-villes. Les produits, déposés dans desentrepôts à la périphérie des localités,sont acheminés au moyen de vélos élec-triques ou de véhicules roulant au gazou à l’électricité jusque dans les maga-sins et restaurants, qui sont livrés àtemps sept jours sur sept. Ce service no-vateur, qui a bénéficié à ses débuts desubventions publiques, est aujourd’huirentable. Son succès est tel qu’il a déjàpu être proposé dans dix autres villes,selon le système de franchise. De l’avisdes spécialistes, ce modèle pourrait trèsbien être appliqué chez nous.

Mais la Suisse a aussi des pionniersdans ce domaine: il y a 15 ans, le pre-mier service de livraison à domicile à

vélo a vu le jour à Berthoud. A la dif-férence de la vente sur Internet, ilpermet aux clients de choisir dans lesmagasins les fruits, légumes et autresproduits qu’ils achètent, sans avoir àles porter. Une offre qui a fait école,puisqu’elle a été reprise dans 16 villeset communes. « On évite ainsi un grandnombre de trajets motorisés », expliqueMartin Wälti, initiateur de ce service etmembre du conseil d’administration duBureau de la mobilité (Büro für Mobili-tät), une entreprise bernoise fondée en2002 pour le développement de solu-tions taillées sur mesure. A Langnau(BE), par exemple, 20 000 courses ontété effectuées l’année dernière, alorsque le service local n’a que quatre ans.Ce succès s’explique notamment par leprix modéré des prestations: 3 francspour une livraison et 150 francs pourun abonnement annuel.

Le transport écologique des mar-chandises est plus compliqué à grande

échelle. La bourse du transit alpinproposée dans le cadre de l’Initiative

des Alpes vise à améliorer la gestiondu trafic de marchandises. Il s’agit desoumettre le transit des poids lourdssur les grands axes alpins à des autori-sations en nombre limité, qui seraientmises aux enchères. Leur prix dépen-drait donc de la demande et se situeraità un niveau proche de la différenceentre les frais du transport routier etcelui du transport ferroviaire. Dès qu’ilaugmenterait, le recours au chemin defer serait plus avantageux. « Un systèmeinternational de ce type permettrait deréduire considérablement les transportsroutiers dans les Alpes », affirme KlausKammer, de la section Observation del’environnement à l’OFEV. Mais il fautpour cela qu’il soit largement acceptédans tous les pays concernés, ce quiexige un important travail de persua-sion.

Stefan Hartmann

environnement 3/2012 > Dossier Mobilité28

Livraisons doucesS’il semble difficile d’organiser le transport des marchandises de manière écologique, ce n’estpas impossible. Exemples à Berthoud (BE) ou aux Pays-Bas.

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29Dossier Mobilité > environnement 3/2012

Abonnements:l’œuvre des pionniers

Services pyjama

« Mobilis », « Vagabond », « Frimobil »: ces nomsde communautés tarifaires régionales sont syno-nymes de liberté et de mobilité. La communautéSuisse du nord-ouest (Tarifverbund Nordwest-schweiz, TNW) fut pionnière avec son «Umwelt-abo » lancé en 1984. Cet abonnement, le premierd’Europe qui ait donné accès à tous les transportspublics d’une région, connaît un grand succès:les ventes n’ont cessé d’augmenter jusqu’à dépas-ser les deux millions de forfaits aujourd’hui. Lestrois quarts des passagers sont en possession d’un« U-Abo ». Il représente plus de deux tiers desrecettes annuelles de la TNW, qui se montent àplus de 200 millions de francs.

De toute évidence, les communautés tarifairesont incité de nombreux pendulaires à préférerles transports publics à la voiture. Mais les abon-nements sont beaucoup utilisés également pourles loisirs, ce qui entraîne une augmentation pro-blématique du volume du trafic. Du point de vueenvironnemental, les transports publics sont toute-fois avantageux tous les jours, dimanche compris:« Dans la plupart des cas, pour un même trajet,leur écobilan est meilleur que celui de la voitureindividuelle », confirme Doris Ochsner, de la sec-tion Trafic à l’OFEV.

Mais la promotion d’une mobilité plus écolo-gique a un prix: les transports publics régionauxsont déficitaires dans toute la Suisse, des fondssupplémentaires doivent être injectés partout. Enpériode de crise économique, cela pose problème,et l’introduction de différentes zones de tarifica-tion est envisagée même pour le fameux «U-Abo »bâlois. Pour aller plus loin, il faudrait alors payerplus, ce qui irait d’ailleurs dans le sens du principedu pollueur-payeur. « L’augmentation des prix doitcependant rester acceptable, pour éviter que lesusagers ne reprennent la voiture », explique IrisOberauner, de la section Economie. «Mais la véritédes coûts exigerait aussi un relèvement des prix dutrafic routier, afin de couvrir les frais environne-mentaux. »

Des abonnements pratiques et bon marchépour garder la clientèle ou des tickets plus chersqui reflètent le prix effectif de la mobilité? Lesdeux solutions comportent des risques. Au final, lechoix relève d’une décision politique.

Lucienne Rey

Les bus de nuit assurent une mobilité respectueuse de l’environ-nement. « Ces offres ont largement contribué à réduire le traficet le bruit la nuit, surtout dans les grandes villes où de nom-breuses lignes parcourent non seulement le centre, mais presquetoute l’agglomération », explique Peter Schild, collaborateur à lasection Politique des transports de l’Office fédéral du développe-ment territorial (ARE). Le Tessin n’est pas en reste, même s’il estparticulièrement difficile de convaincre ici les jeunes noctam-bules d’utiliser les transports publics: ils préfèrent les scooterspersonnalisés ou les vieilles vespas italiennes. En outre, les vil-lages et vallées du canton sont mal desservis, surtout le soir etla nuit.

Toutefois, en 2003, CarPostal Suisse a introduit dans la ré-gion de Lugano le « Capriasca Night Express », qui a séduit lesjeunes. La demande a augmenté rapidement, si bien qu’unenouvelle ligne a été ouverte en 2005 entre Lugano et la com-mune de Collina d’Oro. « Jusqu’à présent, les expériences sontabsolument positives », affirme Paolo Solari, directeur de CarPos-tal pour le Tessin. Il est encore impossible d’évaluer l’effet deces offres sur les conducteurs, car les bus de nuit sont surtoututilisés par des jeunes qui n’ont pas encore de voiture. Cepen-dant, Paolo Solari en est convaincu, « les bus de nuit améliorentl’image des transports publics auprès des jeunes et les attirent,à condition que les lignes soient pratiques et confortables ». Entout cas, les parents, eux, sont moins sur les routes. Et ils sontplus tranquilles s’ils savent qu’une navette ramène leurs enfantsen toute sécurité.

Vera Bueller

Nombre de pendulaires ont adopté les transportspublics en raison d’abonnements bon marché etpratiques. Mais ce succès a un prix.

Les bus de nuit connaissent un grand succès dans toute laSuisse. Le Tessin aussi espère attirer les jeunes avec sonoffre « Night Express ».

CONTACTSHarald Jenk, voir page 35Doris Ochsner, voir page 15

Pour en savoir plus:

www.bafu.admin.ch/magazine2012-3-05

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environnement 3/2012 > Dossier Mobilité30

RECHERCHE

« Penser l’espace urbain comme sinous étions nous-mêmes des villes »

environnement: Le besoin de mobilité est-il uneconstante dans l’évolution de l’homme?Saskia Sassen: Oui, cela semble être le cas. Maisla mobilité peut être comprise de manières trèsdifférentes. On peut dire qu’avec la technologienumérique, cette notion est entrée dans unenouvelle phase et a été réinventée. La possibi-lité de communiquer simultanément avec lemonde entier en restant sur place est aussiune forme de mobilité. Peu importe que notre

corps soit immobile si notre voix, notre discoursbougent.

Jusque dans les années 1960, seuls les richesconduisaient une voiture et partaient à l’étranger. Lamobilité individuelle est-elle une acquisition de ladémocratie?Oui et non. Dans la phase industrielle du déve-loppement, elle est en grande partie motivée pardes besoins économiques. Les systèmes de trans-

Saskia Sassen compte parmi les sociologues et économistes les plus renommés et perspicaces de notre époque.Dans une interview accordée à environnement, elle évoque les limites de la mobilité, l’urbanisation de la voiture etl’écriture en voyage.

Photo: agence de presse Dukas

Les idées de SaskiaSassen, sociologue répu-tée, fascinent les milieuxles plus divers:elle participe tant auxassises des Verts alle-mands qu’à des congrèsde l’industrie automobile.

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ports publics rendent surtout service aux em-ployeurs, mais sont financés par le contribuable.

Cette présentation n’est-elle pas un peu simpliste?Naturellement, les transports publics sont bienplus que ça. Il s’avère néanmoins que le marchédu travail est un facteur clé de leur élargissementdans de nombreux pays. Ce que nous considé-rons comme de la mobilité individuelle n’est enréalité qu’un besoin dû à des facteurs structurels.

La mobilité est-elle un droit fondamental?A certains points de vue, oui, mais je le répète, cedroit est limité: il existe là où il y a de l’emploi.

Qu’en est-il des pays du Sud, qui veulent combler leurretard dans le domaine? Tout habitant de cette Terrea-t-il droit à sa propre voiture?Je parlerais plutôt de droit à la mobilité.

Partout dans le monde, la voiture semble être unsymbole de liberté. Cette conception pourrait-ellechanger? Aujourd’hui, les citadins suisses sont moinsnombreux à posséder une voiture qu’il y a quelquesannées.Tant mieux pour les Suisses! Mon mari et moivivons dans deux villes – New York et Londres.Nous n’avons pas de voiture et cela ne nous poseaucun problème. Nous nous déplaçons en taxi,en transports publics, à pied. En ville, les auto-mobilistes me disent souvent: c’est beaucouptrop loin pour marcher! Sur quoi je réponds: non,absolument pas– ah, cet héroïsme bourgeois...

La voiture n’est pas seulement synonyme de liberté,mais aussi de statut social. Comment ce rôle a-t-il pudevenir universel à ce point?C’est étonnant, en effet. Mais la voiture est unobjet extrêmement visible – et les stratégies pu-blicitaires sont très efficaces dans ce domaine. Deplus, une auto peut être quelque chose de trèsbeau, que l’on regarde, touche et conduit volon-tiers. Or un bel objet procure beaucoup de plai-sir. Qui plus est, un véhicule peut être très utile.

Que pensez-vous de l’idée de ralentir notre vie – dumouvement Slow Food par exemple?Ce genre de mouvement est très important. Jedéveloppe actuellement un projet comparableque je pourrais décrire ainsi: comment ramenerle plus possible de notre économie dans uneville ou une région au lieu de continuer à délo-caliser et à acheter les marchandises produitesloin de chez soi?

Quand la mobilité devient-elle un fardeau?La mobilité est pareille à beaucoup d’autreschoses: tout est bien et souhaitable jusqu’à un

certain point, avant de devenir problématique.La grande étendue des faubourgs américains,par exemple, est pour moi un élément indé-sirable de la courbe de mobilité. Pourquoi neconstruit-on pas des banlieues compactes où lesgens puissent davantage se déplacer à pied?

Vous êtes constamment en déplacement pour desraisons professionnelles. Ressentez-vous cetteextrême mobilité comme une liberté ou commeune charge?Les vols court-courriers sont pénibles – ils n’oc-casionnent que des frais de transaction. Maisj’aime les longs trajets en train ou en avion, àcondition d’avoir du confort! Je ressens alors levoyage comme un espace de liberté parce que jeme trouve dans des locaux neutres. Il y a tantde choses que je ne peux faire en route et quidevront attendre mon retour au bureau ou àla maison. C’est une qualité fondamentale duvoyage, car elle me permet d’écrire, heure aprèsheure. Comme si je volais le temps…

La mobilité individuelle implique des coûts pour lasociété: pollution, accidents, embouteillages. Leprogrès technique suffit-il à résoudre ces problèmesou faut-il pour cela que les comportements changent?Ces problèmes peuvent et doivent être résolus.Mon projet de regagner la plus grande activitééconomique possible va dans cette direction.Pourquoi délocaliser la production de meublesou de jouets au bout du monde pour les en ra-mener ensuite, alors que ce travail pourrait êtrefait chez nous? L’économie n’épargne pas endélocalisant, car les coûts externes des atteintesà l’environnement dues aux transports – pol-lution de l’air et des océans, consommation deressources – sont supportés par la collectivité.En outre, tous les sans-emploi des pays indus-trialisés doivent être assistés par la société, ce nesont pas les entreprises qui paient les frais. Nousdevons prendre ce type de calculs au sérieux, carils constituent le fondement d’une économieverte.

Les gouvernements ont-ils le droit de restreindre lamobilité individuelle pour résoudre les problèmesécologiques – par des quotas par exemple?Oui, mais en veillant à ne pas privilégier lesgens riches et puissants. Il ne faut pas que les

« Pourquoi ne construit-on pas des banlieuescompactes où les gens puissent davantage sedéplacer à pied? »

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pauvres soient contraints à utiliser les transportspublics alors que les familles riches possèdentplusieurs voitures.

Vous participez aussi bien aux assises des Verts alle-mands qu’à des congrès de l’industrie automobile.Les idéologies sont-elles mises de côté dans la discus-sion sur la mobilité?Je n’en suis pas si sûre. Cela pourrait plutôtmontrer que je propose des synthèses inhabi-tuelles.

Dans l’un de vos essais, vous parlez de l’urbanisationde la voiture. Que voulez-vous dire?Je fais mes recherches avec une bourse d’Audi.L’entreprise exploite un laboratoire d’idéesconsacré au développement urbain. Des spé-cialistes défendant des opinions intéressantessur de nouvelles conceptions de l’automobiley collaborent. Il est notamment question de lavoiture en ville. Je pars de l’idée que les villesinfluencent la technologie. Les nouvelles voi-tures très petites, destinées aux centres urbains,illustrent ce phénomène. Je trouve aussi passion-

nant que des véhicules conçus pour rouler viteet sur de longues distances en soient réduits àavancer très lentement dans les centres denses.La ville est une sorte de loupe qui permet demieux reconnaître les innovations techniquesefficaces pour les systèmes urbains. Mais l’urba-nisation de la voiture soulève pour l’instantencore plus de questions qu’elle n’apporte deréponses. Une direction possible est de créer denouveaux espaces de mobilité.

Que faut-il entendre par là?L’idée est que les offres de mobilité soient inté-grées dans des lieux plutôt que dans des véhi-cules en déplacement. Il existe déjà toute unegamme de nouvelles technologies qui encou-ragent le développement de ce genre d’espaceset pourraient changer le rôle de la voiture. Pourarriver au cœur de la question, nous devonsconsidérer l’espace urbain comme si nous étionsnous-mêmes des villes. C’est-à-dire jongler avec

les différents éléments constituant cet espaceet les examiner sous plusieurs angles. Ce typed’analyse évite de se focaliser sur la seule ap-proche technologique.

Propos recueillis par Kaspar MeuliPour en savoir plus:www.bafu.admin.ch/magazine2012-3-06

Saskia Sassen. Née à La Haye (NL) en 1949, SaskiaSassen a étudié les sciences politiques, la sociolo-gie et l’économie. Elle est professeur à l’UniversitéColumbia de New York et enseigne également à laLondon School of Economics. Ses recherches por-tent entre autres sur la mondialisation et ses effetssur le développement des villes. Saskia Sassen estmembre du Club de Rome. Elle est mariée au socio-logue Richard Sennet. Elle a publié notamment LaVille globale. New York, Londres, Tokyo (Descarteset Cie, 1998); Critique de l’Etat. Territoire, Autorité etDroits, de l’époque médiévale à nos jours (Demopo-lis / Le Monde Diplomatique, 2009); La globalisation.Une sociologie (Gallimard, 2009).> www.saskiasassen.com

« Il ne faut pas que les pauvressoient contraints à utiliser lestransports publics alors queles familles riches possèdentplusieurs voitures. »

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33Dossier Mobilité > environnement 3/2012

Rail-route: le périplede deux palettesLe trafic marchandises a un impact particulièrement lourd sur l’environnement. Les entreprisessont toujours plus nombreuses à se fixer des objectifs climatiques pour leur logistique. Leur margede manœuvre est cependant limitée, comme le montre un transport combiné d’emballages demédicaments entre Saint-Gall et Nyon.

Les cartons imprimés filent à toute vitesse à traversla plieuse. Et pourtant, la mise en forme d’embal-lages de médicaments exige une extrême précision:« Imaginez les conséquences si on intervertissaitles indications de dosage », souligne Urs Metzler,directeur adjoint de l’imprimerie K +D. Les clientsde cette entreprise de Saint-Gall – en grande majo-rité des firmes pharmaceutiques – sont très exi-geants non seulement en matière de fiabilité, maisaussi de logistique. Les commandes se font selon leprincipe du flux tendu: les emballages doivent êtrelivrés au moment précis où le client en a besoin, niplus tôt ni plus tard. Maher Ben Hedi, responsablede l’expédition, n’apprend souvent que vers midicombien de cartons il doit encore envoyer dansla journée. Il transmet immédiatement les com-mandes au transporteur de l’imprimerie.

Héritiers de Cargo Domicile. Avec ses 500 camions et200 millions de francs de chiffre d’affaires annuel,l’entreprise familiale Camion Transport de Schwar-zenbach (SG) est l’une des grandes de la branche.Son activité principale est l’acheminement des co-lis de détail, soit des marchandises ne remplissantpas un véhicule et ne pesant en moyenne qu’unedemi-tonne, de loin la catégorie la plus importantedu trafic marchandises en Suisse. Camion Trans-

TRAFIC MARCHANDISES

port poursuit des objectifs ambitieux, notammenten matière environnementale: elle ne veut rienmoins que devenir numéro 1 des transporteursécologiques. Elle se propose en conséquence deréduire de 5% ses émissions de CO2 d’ici à 2015.Son vice-directeur, Franz Meienhofer, précise:« Ce pourcentage peut sembler modeste, mais nosémissions sont déjà inférieures d’un quart envi-ron à celles de la plupart de nos concurrents. » Larecette écologique de Franz Meienhofer est la com-binaison rail-route, autrefois pièce maîtresse dutrafic marchandises des CFF sous le nom de CargoDomicile. Ce service ayant aligné des années du-rant des pertes de dizaines de millions de francs,Camion Transport, Galliker et Planzer ont rachetéce secteur en 1996. Elles en ont fait une perle delogistique. Le centre de Camion Transport, inau-guré à Schwarzenbach en 2003, charge jusqu’à30 wagons par jour. Ensemble, les trois entreprisesremplissent quotidiennement 250 wagons, soit 80de plus qu’aux meilleurs jours de Cargo Domicile.

Les grands distributeurs ont tracé la voie. Le traficmarchandises par voie ferrée joue un rôle impor-tant notamment pour Coop et Migros, qui confientau rail respectivement deux tiers et trois quartsdes transports entre leurs centres nationaux et

De l’imprimerie aucentre de transborde-ment ferroviaire…Photos: Stefan Bohrer

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environnement 3/2012 > Dossier Mobilité34

Tester sa mobilité

Plusieurs sites internet aident les entreprises et les particuliers à examinerleur mobilité.

www.mobitool.ch: mis au point avec le soutien de l’Office fédéral de l’énergie(OFEN), cet outil est utilisé par plus de 500 entreprises. Son offre va d’unsurvol rapide de la question à des analyses approfondies réalisées par desspécialistes: tout ce qu’il faut pour contrôler ses déplacements.

www.ecotransit.org: plusieurs compagnies de chemin de fer européennes ontélaboré cet instrument qui permet de comparer en détail la charge envi-ronnementale de plusieurs moyens de transport sur un parcours donné.

www.ecopassenger.org: ce calculateur est l’aide parfaite pour les particu-liers. Pour chaque trajet indiqué, il combine horaires, temps de voyageet charge en CO2. Cela réserve quelques surprises, car le train ne gagnepas forcément sur de longues distances: une voiture écologique chargeantquatre passagers n’a pas à rougir de son écobilan devant un train rapide.

www.saisir-la-mobilite.ch: ce test de la mobilité privée confronte différentsmodes de transport et signale les améliorations possibles.

régionaux. Les logisticiens sont unanimes: il estpratiquement impossible de faire mieux, car lalivraison aux points de vente ne peut en générals’effectuer autrement que par camion. Les deuxgéants de la distribution ont déjà rendu leur fluxde produits plus écologique ces dernières annéeset estiment maintenant qu’ils ne pourront plusfaire de gros progrès, mais seulement optimiser lesystème. La performance de la Poste n’est pas nonplus négligeable: colis et lettres sont tous achemi-nés par le train entre les centres logistiques. EnSuisse, la distribution du courrier affiche un bilande CO2 neutre grâce à l’achat de certificats d’émis-sions, et l’entreprise devrait n’utiliser plus que des

vélomoteurs électriques d’ici à 2016. Selon son di-recteur, Jürg Bucher, les avantages de ces mesuressont également économiques.

Dans un bureau paysager de Camion Trans-port, des coordinateurs dirigent la flotte de l’entre-prise. Ils pilotent chaque véhicule de manière àce que son parcours soit le plus efficace possible.Ils se fondent pour cela sur trois critères détermi-nants: la capacité de chargement restante, la dis-tance du client et le temps à disposition. EraldoBraun est ainsi envoyé à Saint-Gall, à l’imprimerieK+D. Il y arrive à 13 heures 30 au volant de soncamion remorque. Sur la route depuis 6 heuresdu matin, il a déjà desservi trois destinations. Son36 tonnes respecte la nouvelle norme européenneantipollution Euro V, mais consomme tout demême 31 litres de diesel en moyenne, soit guèremoins que les engins qu’il conduisait il y a 40 ans,au début de sa carrière professionnelle.

18 heures de voyage. A 14 heures 30, les emballagesfraîchement imprimés et pliés sont prêts à quitterSaint-Gall pour rejoindre une entreprise pharma-ceutique sur la Côte lémanique. La première sta-tion est le centre logistique de Camion Transport àSchwarzenbach. Eraldo Braun manœuvre pour ga-rer son camion devant un sas de chargement. Unchariot élévateur charge les deux palettes de l’im-primerie K+D dans un wagon de chemin de ferdoté de codes, en partance pour le CTL, le centrede transbordement de Lausanne. A ce moment-là,les CFF prennent la relève. Le train de marchan-dises quitte Schwarzenbach à 21 heures 45, à des-tination d’Olten (SO), où les conducteurs de loco-motives en provenance des 14 centres logistiquesde Suisse se retrouvent pour un café de minuit.Pendant leur pause, les trains sont recomposés etretournent avec leur nouveau chargement à leurgare de départ, Lausanne par exemple. A l’arrivée,leur cargaison est transbordée sur camion au petitmatin. Les emballages de médicaments imprimésà Saint-Gall sont destinés à une fabrique de Nyon(VD), un saut de puce. A 6 heures 15, un chauffeur

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35Dossier Mobilité > environnement 3/2012

prend en charge plusieurs envois pour Nyon. A8 heures 30, il livre les deux palettes de K+D.

Pour un trajet qui n’aurait pris que quelquesheures à un camion roulant directement de Saint-Gall à Nyon, le transfert combiné rail-route a duré18 heures au total. Mais son bilan écologiqueest indéniable: il n’a engendré que 16,2 kilos deCO2, soit 19,6 kilos de moins que ne l’aurait faitun acheminement uniquement par camion. Ceschiffres révélateurs sont fournis par les coordi-nateurs de Camion Transport grâce à un logicielnommé EcoBalance. Sur l’ensemble des marchan-dises qu’elle livre, l’entreprise a réduit d’un quartses émissions de carbone grâce à la solution com-binée. « Nous sommes aux limites de nos possibi-lités », affirme Franz Meienhofer. Les objectifs deréduction actuels sont donc plutôt modestes. Ilexiste cependant un potentiel d’économie à moyenterme, surtout avec des véhicules énergétiquementplus efficaces. De l’avis de notre interlocuteur, descamions hybrides ou fonctionnant au gaz naturelpermettraient de réduire encore de 20 à 30% lesémissions de CO2, mais la technologie nécessairen’est pas encore mûre pour la production en série.

19 % d’émissions de CO2 en moins. Avec le logicielEcoBalance, Camion Transport informe directe-ment ses clients de la charge environnementaleoccasionnée par chaque expédition. Elle leur trans-met également en fin d’année un bilan détaillé desémissions de CO2. Harald Jenk, de la section Traficde l’OFEV, trouve cette transparence exemplaire. Al’OFEV, on sait qu’il n’est pas toujours facile d’enarriver là. C’est pourquoi l’office participe à l’éla-boration de normes européennes en matière d’éco-bilans pour le trafic. Des calculateurs d’écobilanspermettent cependant déjà de comparer la chargeenvironnementale des divers moyens de transport,pour les personnes comme pour les marchandises.

Avec le transfert combiné, l’imprimerie saint-galloise K+D, qui a totalement externalisé la livrai-son de ses produits, a réduit de 19% – soit de18,5 tonnes – ses émissions de CO2 en 2011. Cette

CONTACTHarald JenkSection TraficOFEV031 322 93 [email protected]

diminution correspond au carbone rejeté parune voiture de classe moyenne sur un trajet de120000 kilomètres environ. Et ces progrès écolo-giques n’ont pas augmenté les coûts pour l’entre-prise.

La route récupère du terrain. Eviter autant que pos-sible la route et privilégier le rail: telle est encorela devise d’un trafic marchandises écologique.Mais les choses pourraient changer, ou du moinsla tendance s’inverser. Une étude mandatée parl’Office fédéral des transports (OFT) conclut que letrafic routier pourrait, ces deux prochaines décen-nies, rattraper son retard écologique par rapportau rail, que ce soit par des mesures librementconsenties ou en raison de l’introduction de nou-velles normes. Ce sont surtout les oxydes d’azote(NOx) et les poussières fines (PM10) dans les gazd’échappement qui devraient reculer. « Pour leCO2, par contre, il ne faut pas s’attendre à desmiracles », observe Harald Jenk. « Si, comme on s’yattend, le volume des transports continue à aug-menter, parvenir à stabiliser les émissions de CO2générées par le trafic marchandises serait déjà unsuccès. »

K+D n’a pas opté pour le transfert combinépar conviction: c’est avant tout la ponctualitédu transporteur qui a dicté son choix, commel’explique son directeur adjoint, Urs Metzler. Unelogistique plus verte que la concurrence ne suffitpas à gonfler un carnet de commandes. Mais desexemples tirés d’autres secteurs économiques lemontrent: non seulement la clientèle s’intéressede plus en plus aux écobilans, mais les entre-prises cherchent aussi à adopter un comportementenvironnemental exemplaire. Et parmi elles setrouvent de nombreux clients potentiels pour lespionniers de la mobilité écologique.

Urs Fitze

Pour en savoir plus:www.bafu.admin.ch/magazine2012-3-07

Page 36: Les ressources naturelles en Suisse environnement · les cars postaux, qui freinent, s’arrêtent et accé-lèrent fréquemment. La pile à combustible suisse. Le car parcourt sans

environnement 3/201236

VD

Un prix pour la gare de Renens

Le projet de requalification de la gare de Re-

nens a été désigné, conjointement au nœud de

communication de Wil (SG), comme lauréat du

prix Flux 2011, qui distinguait les meilleures

démarches de mobilité douce. A un endroit

stratégique pour l’Ouest lausannois, l’agglo-

mération Lausanne-Morges et le canton, il est

notamment prévu de créer une nouvelle passe-

relle reliant les quais et la ville. Les places sud

et nord de la gare seront également réamé-

nagées. Le projet a été développé en concer-

tation avec les quatre communes de Renens,

Chavannes-près-Renens, Crissier et Ecublens,

le canton de Vaud, les CFF et les Transports

lausannois. Les travaux devraient commencer

en 2014.

> Martin Hofstetter, Service d’urbanisme, Renens,

021 632 74 11

VS

Sierre économise l’énergieLa Ville de Sierre a signé un contrat avec ener-

go. Ce programme soutenu par l’Office fédéral

de l’énergie (OFEN) met à disposition des com-

pétences et des outils ainsi qu’un site internet

permettant un suivi de la consommation d’eau,

de mazout, de gaz, de chaleur et d’électricité.

L’objectif est de réduire de 10 % la voracité en

énergie d’une trentaine de bâtiments commu-

naux à Sierre. La cité valaisanne est la pre-

mière commune de Suisse à utiliser la lecture

à distance et en temps réel de la plateforme

energo. L’offre s’adresse également aux parti-

culiers et aux entreprises.

> Daniel Rey, délégué à l’énergie, Sierre,

027 452 04 06, www.sierre.ch > Vivre à Sierre >

Energie et Environnement > Suivi de consommation,

www.energostat.ch

JU

Pour un environnement construitet paysager de qualité

La Commission cantonale des paysages et

des sites (CPS) a précisé ses lignes directrices

dans le domaine des installations solaires in-

dividuelles et des constructions agricoles en

publiant une directive et un guide. La directive

entend faciliter la pose de panneaux solaires

en indiquant la marche à suivre et en don-

nant quelques principes simples pour atteindre

une bonne intégration au bâtiment et au site.

Le guide, quant à lui, aide les concepteurs à

réduire l’impact des bâtiments agricoles sur le

paysage.

> Alain Beuret, Commission cantonale des

paysages et des sites, Jura, 032 420 53 10

ARC LÉMANIQUE

Le Léman oxygéné naturellementLes températures glaciales qui ont régné durant

les deux premiers mois de l’année, avec

des minima en dessous de –10 °C au bord du

Léman et de fortes périodes de bise, ont refroi-

di l’ensemble des eaux du lac et les ont bras-

sées. Les eaux de surface plus froides et donc

plus denses ont été entraînées vers le bas,

permettant l’oxygénation des couches pro-

fondes. Le phénomène est bénéfique à double

titre: la vie aquatique redevient possible dans

les profondeurs et on évite la libération du

phosphore par les sédiments. Les brassages

complets sur la totalité du Léman sont rares.

> Audrey Klein, secrétaire générale de la CIPEL,

022 363 46 69, www.cipel.org

GE

Réserves naturelles valorisées

Le canton de Genève procède à une mise à

jour de ses 60 réserves naturelles. Parmi les

34 déjà validées, dix ont été (re)définies der-

nièrement. Cinq d’entre elles sont des sanc-

tuaires forestiers d’une surface d’environ

20 hectares chacun. Ces zones ne seront plus

entretenues ni exploitées afin de favoriser une

évolution naturelle de la forêt. Cinq autres péri-

mètres protègent des biotopes variés, comme

des marais ou des prairies sèches. Parmi eux,

mise à disposition

Anotreporte

CIPEL

Page 37: Les ressources naturelles en Suisse environnement · les cars postaux, qui freinent, s’arrêtent et accé-lèrent fréquemment. La pile à combustible suisse. Le car parcourt sans

37environnement 3/2012

on trouve le lieu-dit « Passe de Peney », recon-

verti en milieu pionnier après le démontage de

l’ancienne STEP du Nant d’Avril. Une nouvelle

signalisation informera le public sur ces sites

et les richesses qu’ils abritent.

> Bertrand von Arx, conservateur de la nature

et du paysage (Département du territoire), canton de

Genève, 022 388 55 37

NE

Marais réhabilitésà la Grande Cariçaie

Début 2012, deux hectares de forêt ont été

rasés au lieu-dit « Le Canada » dans la zone

de Portalban, située dans la Grande Cari-

çaie, sur la rive sud-est du lac de Neuchâtel.

Abattre des arbres dans une réserve peut

étonner. Pourtant, cette coupe exceptionnelle a

un but précis, celui d’éviter la disparition des

marais d’origine. Elle rétablit l’équilibre entre

les zones forestières et marécageuses afin de

favoriser la biodiversité et de permettre aux

espèces rares de se nourrir et de se dévelop-

per. Avant la Seconde Guerre mondiale, des

marais recouvraient en effet ce secteur. Ils

ont ensuite été drainés pour créer des terres

agricoles dans le cadre du plan Wahlen, avant

d’être abandonnés.

> Christophe Le Nédic, collaborateur scientifique

de l’Association de la Grande Cariçaie,

024 425 18 88

CH

Inclure les servicesécosystémiques

Tout le monde profite des prestations offertes

par notre environnement et ses écosystèmes:

eau potable, protection contre les dangers

naturels, sol pour la production agricole ou

espace de détente. Mais bien des personnes

le font sans s’en rendre compte, notamment

parce que ces biens sont le plus souvent

gratuits. Jusqu’ici, ces services n’ont pas

été pris en compte systématiquement dans

l’aménagement du territoire, mais cela devrait

changer: une aide de travail conçue par l’OFEV

et l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich

(EPFZ) montre comment les intégrer et les pro-

téger dans la planification de projets et de pro-

cessus touchant le paysage. Cet outil informa-

tique peut être utilisé lors de l’élaboration de

lignes directrices, de conceptions d’évolution

du paysage (CEP) ou d’études de l’impact sur

l’environnement (EIE).

> Roger Keller, division Espèces, écosystèmes,

paysages, OFEV, 031 322 15 16,

[email protected],

http://oesl-check.ethz.ch (en allemand)

LU

Halte au bois flottant!En 2005, les crues de la Petite Emme et de

la Reuss ont provoqué des dommages pour

quelque 345 millions de francs. En réaction

à ces événements, le canton de Lucerne a

mis en place la première grande installation

d’évacuation du bois flottant de Suisse. Celle-

ci peut enlever jusqu’à deux tiers des troncs

et branches emportés par un cours d’eau en

crue. Pour cela, le lit de la Petite Emme a été

élargi de 60 mètres à Ettisbühl, dans la com-

mune de Malters. Le bois est ainsi détour-

né de l’écoulement principal et entraîné vers

l’installation. Dès que la crue atteint environ

250 mètres cubes à la seconde, la vanne-

clapet de l’ouvrage de détournement s’ouvre:

une partie des eaux se déverse alors avec le

bois qu’elles charrient dans l’espace de ré-

tention, où des grilles arrêtent les arbres.

L’installation est combinée à une nouvelle pe-

tite centrale électrique, qui produit 4,5 millions

de kilowattheures par an.

> Albin Schmidhauser, division Transports

et infrastructures, canton de Lucerne,

[email protected],

www.hochwasserschutz-emme-reuss.lu.ch

BS/SG/BE/GE

Rouler à l’hydrogèneUn camion balayeur équipé d’une pile à com-

bustible a été testé sur les routes de Bâle de

2009 à début 2012. Ce véhicule conçu par le

Laboratoire fédéral d’essai des matériaux et de

recherche (Empa) et l’Institut Paul Scherrer (IPS)

doit aider à faire passer la technique de l’hydro-

gène « du laboratoire à la rue ». L’expérience a

montré que ce genre de balayeuse économise

de l’énergie et préserve l’environnement, sans

engendrer de difficultés techniques insur-

montables. Par rapport à un véhicule diesel,

la consommation d’énergie recule presque de

moitié. Les émissions de CO2 diminuent d’envi-

ron 40 % même si l’hydrogène est produit à l’aide

de sources fossiles. Toutefois, le prix de la cellule

à combustible, du réservoir sous pression et du

moteur électrique devra encore beaucoup baisser

pour que ces équipements deviennent rentables.

Le camion parcourt maintenant les rues de Saint-

Gall jusqu’en septembre 2012. D’autres tests

seront menés à Berne et à Onex (GE).

> Christian Bach, département Moteurs

à combustion, Empa, 058 765 41 37,

[email protected]

mise à disposition

mise à disposition

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environnement 3/201238

En politique internationale

Vingt-et-un enjeux pour le XXIe siècle

Le cinquième rapport de l’ONU sur l’avenir de l’environne-

ment mondial, GEO-5 (www.unep.org/geo), à l’élaboration

duquel la Suisse a participé, tire la sonnette d’alarme: les

changements qui affectent l’environnement de nos jours

n’ont pas d’équivalent dans l’histoire humaine. Les mesures

prises pour protéger le climat ou accroître l’efficacité des

ressources ont certes apporté des améliorations, mais elles

sont insuffisantes. Il est nécessaire d’en faire davantage,

notamment dans les domaines du climat, de la biodiversité,

de l’eau, des déchets et des produits chimiques, sans quoi

les écosystèmes de la planète subiront des dommages irré-

versibles. A partir de cet état des lieux, le rapport formule

21 enjeux pour le XXIe siècle.

Selon GEO-5, la politique environnementale internatio-

nale se base actuellement sur un système trop compliqué

et inapte à résoudre les problèmes globaux. Elle manque en

outre de transparence et, bien souvent, de fondement démo-

cratique. Le deuxième grand défi concerne le passage à l’éco-

nomie verte. Pour le réaliser, des investissements s’imposent,

notamment dans la formation et le perfectionnement pro-

fessionnels. La troisième difficulté à surmonter concerne la

sécurité alimentaire des neuf milliards d’humains que comp-

tera la Terre. Afin de la garantir, il faut mettre en place un

système d’alerte complet, favoriser une production agricole

efficace, soutenir les petits paysans et réduire le gaspillage de

denrées.

Protéger les zones humides

Les zones humides – mangroves, récifs coralliens, marais,

paysages lacustres et fluviaux – sont essentielles au main-

tien de la biodiversité, à l’approvisionnement en eau potable

et à l’atténuation des crues. La Convention de Ramsar règle

leur protection à l’échelle mondiale. L’objectif premier de

cette convention est la désignation des zones humides d’im-

portance internationale et l’engagement des gouvernements

à les gérer de manière durable. A l’heure actuelle, les sites

Ramsar reconnus sont au nombre de 2040 et couvrent une

superficie de plus de 193 millions d’hectares.

Des 162 Etats membres de la convention, 115 se sont

retrouvés au cours de la première moitié de juillet 2012 à

Bucarest (Roumanie) pour la onzième Conférence des Parties.

Parmi les thèmes abordés figuraient les synergies à trouver

avec d’autres accords internationaux, l’évitement et la com-

pensation des pertes en zones humides ainsi que les effets

des changements climatiques sur ces précieux écosystèmes.

La délégation suisse a proposé une résolution visant à pro-

mouvoir des investissements responsables dans ces milieux

protégés. Il s’agit d’assurer que des projets financés par

des fonds publics ou privés ne puissent pas conduire à une

dégradation écologique des zones humides ni détériorer les

conditions de vie des espèces qui y vivent.

Nicolas PerritazSection Europe, commerce et coopérationau développement, OFEV031 325 81 [email protected]

Du 3 au 7 septembre 2012Réunion de la commission inter-gouvernementale de négociationpour une convention européennesur les forêts (INC2) à Bonn(Allemagne)

Du 17 au 21 septembre 2012Séance de l’Approche stratégiquede la gestion internationale desproduits chimiques (SAICM) àNairobi (Kenya)

Du 24 au 28 septembre 2012Réunion du Comité des forêts(COFO) de la FAO à Rome(Italie)

Du 1er au 12 octobre 2012Conférences des Parties à laConvention sur la diversitébiologique et au Protocole deCartagena à Hyderabad (Inde)

Ces prochains mois

Sibylle VermontSection Affaires globalesOFEV031 322 85 [email protected]

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39Diversité des espèces > environnement 3/2012

La Confédération et les cantons veulent transformer 10 % de l’aire boisée suisse en réserves d’ici 2030.Un bilan intermédiaire montre que grâce aux efforts consentis dans de nombreux cantons, cet objectifdevrait être atteint. Mais il manque encore des surfaces protégées de grande étendue, surtout en plaine.

Des réserves plus vasteset plus nombreuses

FORêT

Bien des voyageurs s’extasient devant lesimmenses parcs nationaux américainsde Redwood, Sequoia ou Yellowstone. Ilest vrai qu’à part les forêts sauvages duParc national des Grisons, il n’existe riende semblable chez nous. L’idée de créerde grandes réserves forestières a misdu temps à s’imposer. Dans les années1990, à peine 1,5% de l’aire boisée était

protégée. A l’époque, beaucoup de pro-priétaires et de responsables politiquesestimaient que c’était suffisant. Depuisla création des districts francs et le réta-blissement des populations de gibier,les principaux objectifs de la protec-tion de la nature paraissaient atteints.Gérée dans le respect de la nature, laforêt suisse était déjà considérée en

elle-même comme une grande réserve,comparée aux peuplements souventartificiels des autres pays.

Cependant, des voix se sont élevéespour réclamer davantage de réservesforestières: le WWF en demandait 10%,Pro Natura 18%, et un jeune activistesur la Place fédérale en exigeait même50%! C’est que lors du premier Som-

Situé sur un versant raide, difficile d’accès, le bois de Scatlè près de Brigels (GR), dans laSurselva, a été préservé durant des décennies de toute intervention humaine. C’est pourquoi cettepremière réserve forestière naturelle de Suisse abrite l’une des rares forêts primitives d’épicéassubsistant dans les Alpes.

Page 40: Les ressources naturelles en Suisse environnement · les cars postaux, qui freinent, s’arrêtent et accé-lèrent fréquemment. La pile à combustible suisse. Le car parcourt sans

environnement 3/2012 > Diversité des espèces40

met de la Terre de 1992 à Rio, les Etatssignataires de la Convention sur ladiversité biologique, dont la Suisse,s’étaient engagés à créer des zonesprotégées étendues dans lesquelles labiodiversité aurait la priorité sur lesautres fonctions de la forêt, commel’exploitation du bois ou la détente. Lestade pionnier et la phase de sénescence,peu intéressants du point de vue écono-mique mais d’une grande valeur écolo-gique, y seraient maintenus afin d’offrirdes habitats diversifiés aux animaux etplantes rares.

La stratégie. La Confédération a doncfait élaborer un document décrivant lesprincipes de la politique suisse dans cedomaine, tout en laissant aux cantonsla tâche de l’aménager et de la mettreen pratique. Publiée en 1998, cette stra-tégie présentait le potentiel existant et

donnait des indications concernant laplanification et la création de réservesforestières. Elle contenait en annexedes cartes qui signalaient les régionsadaptées, fournissant ainsi matière àmaintes discussions. En 2001, l’OFEVet les chefs des départements fores-tiers cantonaux adoptaient un docu-ment commun définissant les objectifsconcrets de la politique en matière deréserves forestières.

D’ici 2030, 10% de l’aire boisée doitêtre délimitée comme réserve. Unemoitié sera constituée de réserves natu-relles où la forêt peut se développerlibrement. Autrement dit, les interven-tions y sont totalement ou en grandepartie supprimées. Seules la régulationdes effectifs de gibier par la chasse, lescoupes de sécurité au bord des routeset la lutte contre les incendies sontadmises. L’objectif est de renforcer des

organismes tels que les insectes et leschampignons du bois, sachant qu’uncinquième environ de la faune et desvégétaux de nos forêts, soit 6000 es-pèces, ont besoin de l’habitat et de lanourriture offerts par le bois mort.

L’autre moitié de la surface délimitéesera affectée à des réserves particulières.Dans celles-ci, des interventions cibléessont possibles, voire nécessaires pourconserver la qualité écologique de cer-tains biotopes et favoriser des espècesvégétales et animales déterminées. Ilpeut s’agir du débroussaillage d’éboulisabritant des populations de reptiles, ouencore du dégagement de clairières pro-pices aux papillons, aux orchidées ouau grand tétras. Autre exemple, les pro-grammes de développement du chênesoutenus par l’OFEV, qui visent notam-ment à sauvegarder un oiseau et un sca-rabée: le pic mar et le cerf-volant.

La réserve forestière de Mettlenrein-Höchi (en haut à gauche), à Wynau (BE), fait 168 hectares, ce qui estplutôt grand sur le Plateau. Dans celle de Leihubel (en bas à gauche), près de Giswil (OW), des sapins et desépicéas hauts parfois de 42 mètres attestent le retour de la forêt naturelle. Parmi les organismes qui dégradentle bois mort, les champignons supérieurs tels que ce polypore marginé (Fomitopsis pinicola) photographié dansla réserve forestière naturelle du Bois Banal (JU) constituent le groupe le plus efficace.

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41Diversité des espèces > environnement 3/2012

Dans la réserve fores-tière naturelle du BoisBanal, sur la communede Clos du Doubs (JU),le hêtre évince de plusen plus le sapin. Lebois mort abrite desmilliers d’insectes, dechampignons et delichens.

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environnement 3/2012 > Diversité des espèces42

La stratégie prévoit, au sein de ceterritoire, la création de 30 grandesréserves d’au moins 500 hectares répar-ties de façon équilibrée dans les diffé-rentes régions de Suisse. Elle formuleégalement des objectifs qualitatifs.Ainsi, les associations végétales recen-sées chez nous – il en existe plus de120 – doivent être bien représentées,en tenant spécialement compte destypes forestiers rares et menacés pourlesquels notre pays assume une respon-sabilité internationale. C’est le cas desforêts de mélèzes et arolles des Alpescentrales, ou des pinèdes de montagneà rhododendron et à sphaigne.

Bilan intermédiaire positif. Selon un pre-mier bilan intermédiaire de l’OFEV,dix ans après le lancement de ce pro-gramme étalé sur 30 ans, une bonnemoitié des objectifs quantitatifs ontété atteints. Actuellement, 4,6% de lasurface forestière est délimitée sousforme de réserves naturelles (2,5%) etde réserves particulières (2,1%). Cette

proportion varie toutefois suivant lesrégions. « Les chiffres fournis par lescantons nous permettent d’être opti-mistes », constate Markus Bolliger, dela section Chasse, faune sauvage etbiodiversité en forêt de l’OFEV. Pourpouvoir affiner l’analyse qualitative, laConfédération a encore besoin des don-nées géographiques exactes de chaqueréserve. L’OFEV est en train d’établirune statistique détaillée qui devrait êtredisponible fin 2012.

Selon Markus Bolliger, « ces pro-chaines années, il sera plus difficile dedélimiter des réserves étendues d’unseul tenant. Car les propriétaires fores-tiers disposés à se priver à long terme

Dans les réserves forestières, le stade pionnier et laphase de sénescence, d’une grande valeur écologique,offrent des habitats diversifiés aux animaux etplantes rares.

RÉSERVES FORESTIèRES: PROPORTION PAR RAPPORT à LA SURFACE BOISÉE (POURCENTAGE)ET ÉTENDUE EN HECTARES (COLONNES)

de l’exploitation de leur bois sonttoujours moins nombreux. » Certainslui sont attachés sentimentalement,d’autres ne veulent pas engager leur

avenir ou estiment que les aides pu-bliques sont insuffisantes.

40 hectares et plus. Parmi les autresproblèmes relevés par Markus Bolligerfigurent la répartition régionale desréserves, leur étendue et la représen-tativité des types de forêts. Ainsi, leshêtraies, les hêtraies à sapin et à érable,les pessières-sapinières, les pinèdes etles forêts alluviales sont sous-repré-sentées. Cela dit, on dénombre tout demême 18 réserves d’une surface mini-male de 500 hectares, mais elles sontconcentrées dans quelques régions.« Pour pouvoir créer de grandes réservesdans les autres parties de la Suisse, il

faut que les cantons collaborent étroi-tement », constate Jasmin Bernasconi,chercheuse à l’EPFZ. Dans le cadre d’untravail de bachelor, elle a dressé unbilan intermédiaire des dix ans de poli-tique commune de la Confédération etdes cantons en la matière. Il en ressortque plus de la moitié des cantons n’ontpas encore coopéré avec leurs voisinspour délimiter de grandes réserves. Lesservices forestiers devraient investirdavantage dans ce domaine, car la tailleest un paramètre important. « Beau-coup de réserves forestières naturellessont trop petites pour pouvoir remplirles fonctions écologiques recherchées »,explique Markus Bolliger. « Pour quetoutes les phases évolutives puissent seformer sur une surface donnée, celle-cidevrait mesurer au moins 40 hectares,si possible 100 hectares et plus. »

Le Bois de Chênes. La diversité des es-sences n’est pas forcément plus élevéedans une réserve que dans une forêt gé-rée de manière naturelle. Par exemple,comme son nom l’indique, la réservedu « Bois de Chênes », près de Nyon(VD), renferme de nombreux chênes. Ilsne sont toutefois pas le résultat d’unedynamique naturelle, mais le produit

4000 hectares

%10,1 – 135,1 – 103,1 – 5,02,0 – 3,01,6 – 2,01,0 – 1,5

Source: OFEV

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43Diversité des espèces > environnement 3/2012

CONTACTMarkus BolligerSection Chasse, faune sauvage etbiodiversité en forêt, OFEV031 324 77 [email protected]

d’anciennes méthodes sylvicoles dontles traces sont encore bien visibles. Lessouches coupées et les peuplements àforte proportion de chênes indiquentque par le passé, cette forêt était ex-ploitée en taillis sous futaie. On y lais-sait vieillir certains chênes et on ne lesabattait que lorsqu’ils avaient atteintun diamètre suffisant pour donner dubois d’œuvre. Entre-temps, le bois defeu était récolté tous les 30 ans dans lastrate inférieure. Le «Bois de Chênes »renferme encore d’autres essencestémoignant de ces pratiques culturales,dont des arbustes comme le cytise etle cornouiller mâle ou des résineuxtels que l’épicéa, le sapin, le mélèzeet le douglas. On y a même planté dupeuplier d’Amérique destiné à une fa-brique d’allumettes située à proximité.

L’ambivalence du hêtre. En 1961, lacommune vaudoise de Grenolier acédé l’usufruit du «Bois de Chênes »au canton, qui a édicté en 1966 uneordonnance mettant sous protection

160 hectares de forêt et de prairieforestière. Depuis lors, le hêtre est enforte progression, comme dans toutesles autres régions suisses de bassealtitude. Peter Brang, collaborateurà l’Institut fédéral de recherches surla forêt, la neige et le paysage (WSL)et co-auteur d’un ouvrage publiéen allemand sur un demi-siècle dedéveloppement naturel dans les forêtssuisses (Waldreservate. 50 Jahre natürlicheWaldentwicklung in der Schweiz, Haupt,2011), esquisse la macroévolution ences termes: « Le hêtre possède unecouronne dense et projette beaucoupd’ombre, faisant ainsi pression sur denombreuses autres essences. La diver-sité recule ainsi peu à peu. Par contre,la quantité de bois mort augmentefortement, et avec elle le nombred’espèces d’insectes, d’oiseaux et dechampignons qui en dépendent. Avecle temps, quand la génération dehêtres en train de pousser et de vieillircédera sa place, les essences devraientrecommencer à se diversifier, surtout

après des perturbations comme desdéracinements dus au vent. »

La richesse en espèces observée àun moment donné dans une forêt na-turelle ne représente donc qu’un ins-tantané d’un film sans fin, qui tournelongtemps au ralenti, puis semble sou-dain accélérer lorsque les événementsse précipitent suite à une tempête ouun incendie. Alors que dans une forêtde production avec ses abattages systé-matiques, le film s’interrompt brutale-ment avant même que tous les prota-gonistes ne soient entrés en scène.

Nicolas GattlenPour en savoir plus:www.bafu.admin.ch/magazine2012-3-08

Une hêtraie à aspérule dans la réserve de Schlossflue, au-dessus de Douanne (BE), sur le lac de Bienne. Outre cette associationforestière très répandue également sur le Plateau, l’aire protégée de 68 hectares compte différentes forêts mixtes de feuillusthermophiles, typiques du pied sud du Jura.

Toutes les photos: Markus Bolliger, OFEV

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environnement 3/2012 > Protection de l’air44

L’Europe respire aujourd’hui un air beaucoup moins pollué. Les progrès réalisés depuis1990 au niveau international n’assurent toutefois pas une protection suffisante de la santéhumaine et des écosystèmes sensibles. Mais l’effort se poursuit: de nouveaux objectifsintermédiaires fixés pour 2020 et une révision du Protocole de Göteborg améliorerontencore la qualité de l’air.

La lutte contre les polluantss’affine

PROTOCOLE DE GÖTEBORG

L’air pollué ignore les frontières. Mêmeau fond des mers apparemment intactesde l’Arctique, une équipe de l’Univer-sité de Washington (Seattle) a mesurédes concentrations d’azote supérieuresà la normale. Fin 2011, les scienti-fiques ont expliqué dans le magazineScience que les analyses entreprises surles sédiments de 36 mers témoignentdepuis 1895 environ d’une hausse desapports d’azote atmosphérique. Depuisle milieu du XXe siècle, l’augmentationindésirable de nutriments (eutrophisa-tion) dans les eaux de Scandinavie, duCanada et des Etats-Unis s’est nettementaccélérée. Et la remarque vaut autantpour les lacs de montagne isolés deszones tempérées que pour ceux des ré-gions polaires.

Les eaux naturellement pauvresen éléments nutritifs, caractéristiquesdes régions de montagne et du GrandNord, ne sont de loin pas les seuls éco-systèmes à souffrir de surfertilisationet d’acidification. Forêts, pâturages,prairies maigres, tourbières et maraisabritent eux aussi une végétation spé-cialisée. Au fil de l’évolution, celle-cis’est idéalement adaptée à l’austérité dumilieu. En cas d’eutrophisation, phéno-mène qui peut prendre des décennies,ces adeptes d’un régime draconien sont

peu à peu remplacés par des plantesplus gloutonnes, et la diversité de lafaune locale diminue d’autant.

La pollution, grande voyageuse. Les pol-luants atmosphériques nocifs pour l’en-vironnement et la santé, tels les oxydesd’azote (NOx), le dioxyde de soufre (SO2)et les poussières fines, sont transportéssur des centaines de kilomètres au grédes vents. Des émissions dont la sourcese trouve en Italie, en France ou enAllemagne peuvent ainsi influer surla pollution en Suisse. A l’inverse, nosémissions parviennent jusque dans lespays voisins.

Conscients de ce phénomène, lesEtats membres de la Commission écono-mique pour l’Europe des Nations Unies(CEE-ONU) ont adopté, en 1979 déjà, laConvention sur la pollution atmosphé-rique transfrontière à longue distance.«Ratifiée aujourd’hui par une cinquan-taine de pays, c’est la plus ancienneconvention sur l’environnement »,explique Richard Ballaman, chef de lasection Qualité de l’air à l’OFEV. «Grâceà l’élaboration régulière de protocolesadditionnels qui apportent des solu-tions aux problèmes actuels et futurs,elle n’a toutefois rien perdu de sa mo-dernité. »

Un instrument décisif. L’adoption, en1999, du Protocole de Göteborg rela-tif à la réduction de l’acidification, del’eutrophisation et de l’ozone tropo-sphérique a marqué un tournantmajeur dans la protection de l’air. Cetaccord limite en effet les émissions desquatre principaux polluants atmosphé-riques, soit le SO2, les NOx, l’ammo-niac (NH3) et les composés organiquesvolatils (COV), tous particulièrementnuisibles pour les écosystèmes et lasanté humaine. Les 26 signataires duprotocole – dont la Suisse, l’Unioneuropéenne (UE) et les Etats-Unis – sesont engagés à réduire leurs rejets aucours d’une première étape qui s’estachevée en 2010. Les exigences fixéespour chaque pays s’appuyaient sur uneméthode d’appréciation promettant unmaximum d’efficacité.

Selon le polluant considéré, lesémissions devaient être réduites en Eu-rope de 40 à 60% par rapport à 1990.Alors que la Suisse a tenu tous ses enga-gements et même largement dépassé lesexigences internationales pour le SO2 etles COV, dix pays n’ont pas diminué suf-fisamment leurs émissions de NOx. C’estdu moins ce qui ressort d’une évalua-tion de l’Agence européenne pour l’en-vironnement (AEE). «De toute manière,

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« Située au cœur de l’Europe, la Suisse bénéficieradirectement de toute amélioration supplémentaire dela qualité de l’air dans les pays de l’UE. »

Richard Ballaman, OFEV

si les efforts consentis jusqu’ici sontlouables, ils ne réduisent pas assez lesapports nocifs dans les écosystèmes sen-sibles ni la charge d’ozone », constateRichard Ballaman. « Pour y parvenir,tous les pays d’Europe doivent abaisserdavantage leurs émissions. » Présidentdu groupe de travail « Strategies and Re-view », le spécialiste de l’OFEV a dirigéces dernières années les négociationsdestinées à renforcer le Protocole deGöteborg et à fixer de nouveaux objec-tifs pour 2020. Malgré son importance,cette nouvelle étape ne pourra pas ré-soudre tous les problèmes de l’hygiènede l’air.

Sus aux poussières fines. Le protocolerévisé s’attaque désormais aussi auxparticules fines respirables. Des étudesscientifiques ont en effet démontré quel’exposition actuelle de la population àcette pollution diminue sensiblementl’espérance de vie. Or les réglementa-tions en vigueur jusqu’ici ne portaientque sur les gaz précurseurs des parti-

cules fines secondaires formées dansl’atmosphère et ne limitaient pas lesémissions de suie. « Située au cœur del’Europe, la Suisse bénéficiera direc-tement de toute amélioration supplé-mentaire de la qualité de l’air dans lespays de l’UE », relève Richard Ballaman.«Mais nous avons tous encore fort à faireavant de venir à bout de certains phé-nomènes persistants, comme le smogestival dû aux concentrations exces-sives d’ozone, les apports préoccupantsd’azote ou la charge trop élevée de pous-sières fines. »

Des valeurs limites plus strictes. En ren-forçant les exigences applicables auxinstallations de combustion, les normesrégissant les gaz d’échappement desnouveaux véhicules à moteur ou lesprescriptions techniques visant à ré-duire les émissions diffuses de solvantsdans l’industrie et l’artisanat, la révi-sion du Protocole de Göteborg va dansla bonne direction. En comparaison,les buts fixés dans le secteur agricole

paraissent bien modestes. C’est que lacommunauté internationale n’est pasparvenue à s’entendre sur des mesuresambitieuses afin de réduire les émis-sions d’ammoniac dans l’élevage.

Pour pouvoir atteindre les objec-tifs de la deuxième période couvertepar le protocole, la Suisse devra adap-ter certains types d’installations auxtechniques les plus récentes, mais cesadaptations s’avèrent mineures et sontd’ores et déjà prévues dans la Straté-gie de lutte contre la pollution de l’airadoptée en 2009 par le Conseil fédéral.

Beat Jordi

Pour en savoir plus:

www.bafu.admin.ch/magazine2012-3-09

45Protection de l’air > environnement 3/2012

CONTACTRichard BallamanChef de la section Qualité de l’airOFEV031 322 64 [email protected]

Au-dessus de Sankt Peter,dans le Schanfigg (GR), levaste panorama qui s’offreau regard sur les chaînesde l’Oberland grison esttroublé par l’air pollué de lavallée du Rhin de Coire.Photo: Keystone, Arno Balzarini

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environnement 3/2012 > Protection du climat46

Les négociations internationales sur la protection du climat mondial ne progressent qu’avec peine.Conscientes du problème et lassées d’attendre, nombre de villes et d’entreprises ont pris sur ellesde passer à l’action. Avec l’appui de leur population ou de leur clientèle, elles pensent à l’échelle globalepour agir au niveau local.

Des petits pas prometteursINITIATIVES ICI ET AILLEURS

La première période durant laquellela communauté internationale s’estengagée à réduire les émissions mon-diales de gaz à effet de serre arrivera àéchéance fin 2012. Il aura fallu plus desix années de négociations pour parve-nir au Protocole de Kyoto, qui complé-tait la Convention-cadre des NationsUnies sur les changements climatiques,puis encore sept ans entre son adop-

tion, lors de la Conférence sur le climatau Japon, et son entrée en vigueur en2005. De plus, malgré d’intenses tra-vaux, les Etats n’ont toujours pas réussià s’entendre sur le calendrier et les ob-jectifs de la prochaine période d’enga-gement. Cette tâche incombe aux pro-chaines conférences sur le climat, quidevront aussi faire participer davantageles gros émetteurs, tels les Etats-Unis,

la Chine et l’Inde, à l’effort commun.Dans le domaine du climat, pourtant, lefacteur temps s’avère particulièrementdécisif. Si l’on veut éviter une pertur-bation grave du système climatique, lahausse de la température mondiale nedoit pas dépasser 2 degrés Celsius parrapport à l’ère préindustrielle. Selon leGroupe d’experts intergouvernementalsur l’évolution du climat (GIEC), il faut

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47Protection du climat > environnement 3/2012

pour cela réduire de moitié les émis-sions de gaz à effet de serre d’ici à 2050.

La campagne 10:10. Aujourd’hui, beau-coup de gens ont conscience du pro-blème et œuvrent en faveur du climat.Preuve en est la campagne «10:10 » ini-tiée en Grande-Bretagne, dont les signa-taires s’engagent à réduire leurs émis-sions de CO2 de 10% par an: trois joursà peine après son lancement, en 2009,quelque 10000 particuliers, écoles, en-treprises et organisations l’avaient déjàrejointe. Fin avril 2012, on dénombrait120000 adhérents répartis dans plu-sieurs pays. La campagne part d’une idéetoute simple: il est plus facile de réaliserdes progrès modestes, mais constants,que d’atteindre des objectifs ambitieuxet trop lointains. Pour beaucoup, 10%par an sont plus tangibles que 50% d’icià 2050, sans compter que cet effort pro-gressif mène plus rapidement au but.

Alliances en Suisse. En Suisse, c’estsurtout la loi sur le CO2 qui fonde lapolitique climatique. Dès l’entrée envigueur de sa révision, en 2013, lesautorités fédérales joueront un rôleplus actif dans la protection du climatau niveau local, car le Parlement les achargées d’informer et de conseillercommunes, entreprises et consomma-teurs. « Je suis persuadée qu’il y a là unpotentiel énorme à exploiter », affirmeAndrea Burkhardt, qui dirige la divisionClimat à l’OFEV.

Chez nous aussi, de multiples ini-tiatives ont déjà vu le jour. Vingt etune grandes communes se sont ainsiregroupées au sein d’une alliance pourle climat. Elles mènent des projets lo-caux communs afin de le protéger, ap-pliquent une politique communale du-rable dans les domaines de l’énergie etdes transports, privilégient la construc-tion respectueuse du climat ainsi que

des marchés publics écologiques et sen-sibilisent leur population.

Objectif 2000 watts. Par ailleurs, prèsde 300 communes suisses portent déjàle label « Cité de l’énergie ». Celui-cicertifie notamment qu’elles mènentune politique énergétique durable,encouragent les énergies renouve-lables, misent sur la mobilité douce etutilisent efficacement leurs ressources.Reprenant les objectifs de la société à2000 watts, ces communes sont prêtes àabaisser graduellement leur consomma-tion d’énergie à 2000 watts, ce qui équi-vaut à 1 tonne de CO2 par personne etpar an.

Dans ce sens, le canton de Genèvemérite d’être cité en exemple. Depuisqu’il a inscrit l’objectif des 2000 wattsdans son programme énergétique, illance des projets phares pour l’at-teindre. D’ici à 2014, une friche indus-

Un oui à la sociétéà 2000 watts, affiché surla façade d’un nouvelimmeuble dans le quartierzurichois Kreis 4 : « Leshabitants de cet immeubles’engagent à réduire leurconsommation énergétiquetotale à 2000 watts parpersonne. S’ils rompentcet engagement, le restedu monde aura droit à unecompensation sociale ouà des dédommagements. »Ce bâtiment doit sonexcellent bilan énergétiqueet climatique au matériauprincipal utilisé pour saconstruction: du bois issudes forêts suisses.Photos: OFEV/AURA, E. Ammon

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environnement 3/2012 > Protection du climat48

trielle sur le quai du Rhône, au cœur dela cité, abritera le premier écoquartiergenevois, qui comptera 300 logements.Auparavant, il faudra toutefois assainirles eaux souterraines et le sol, tous deuxcontaminés par des métaux lourds, deshydrocarbures et du cyanure.

Zurlinden innove. A Zurich, les locatairesd’un immeuble de six étages sur laBadenerstrasse, dans le fameux Kreis 4,affichent leur résolution sur la façadeen bois du bâtiment: « Les habitants decet immeuble s’engagent à réduire leurconsommation énergétique totale à2000 watts par personne. S’ils rompentcet engagement, le reste du monde auradroit à une compensation sociale ou àdes dédommagements. »

« Cette décoration artistique estévidemment sans valeur juridique. Iln’empêche que nous tenons à la socié-té à 2000 watts », explique Rolf Hefti,président de la coopérative immobi-lière Zurlinden. Zurich a d’ailleursété la première ville suisse à organiserun vote sur les objectifs de la société à2000 watts. Résultat: trois votants surquatre ont demandé à les inclure dansle règlement communal. « C’était unebonne raison pour privilégier désormaisla construction durable, raconte RolfHefti. Nous voulons prouver qu’il estpossible d’atteindre ces objectifs dès àprésent. »

L’immeuble de la Badenerstrassedoit son excellent bilan énergétique etclimatique au matériau utilisé pour saconstruction. Issu des forêts suisses et

neutre du point de vue du CO2, il pour-ra même servir de combustible aprèsdémolition. Pour remédier aux défautsd’une construction classique en bois –isolation phonique, protection contrel’incendie – on a trouvé des solutionsnovatrices: remplir les planchers enbois de gravillons atténue par exemplela propagation du bruit.

Pour réduire les quantités d’éner-gie grise, la coopérative applique aussiune stratégie climatique en matière demobilité. Les loyers de ses prochainsimmeubles (projet Sihlbogen dans leKreis 2) comprendront un abonnementdes transports publics zurichois et lesplaces de stationnement seront quasiinexistantes. La coopérative mettracependant des véhicules Mobility ouses propres voitures électriques à dis-position. «Quand on habite si près ducentre, il est facile de renoncer à la voi-ture », déclare Rolf Hefti.

FGZ et son réseau de chauffage à distance.Contrairement à la coopérative Zur-linden, qui regroupe une majorité depetites et moyennes entreprises (PME)du bâtiment, la coopérative d’habi-tation FGZ (« Familienheimgenossen-schaft Zürich ») réunit des locataires. En2011, ils ont décidé, presque à l’unani-mité, de contracter un crédit d’environ16 millions de francs afin de construireun réseau qui chauffera 2200 ménagesavec de la chaleur résiduelle (anergie).D’ici à 2050, la coopérative réduiraainsi sa consommation de 35 à 15 giga-wattheures. Les émissions annuellesde CO2 diminueront davantage encore,puisque chaleur résiduelle et énergiesolaire remplaceront l’essentiel descombustibles fossiles (mazout et gaz)utilisés. « La densité de l’habitat facilitela construction du réseau de chauf-fage à distance », souligne le présidentde la FGZ Josef Köpfli. Si les loyers vont

Un projet phare pour la ville internationale del’environnement qu’est Genève: d’ici à 2014,un premier écoquartier – le « Carré Vert » –s’érigera en plein centre, sur une friche indus-trielle au bord du Rhône. Il proposera300 logements énergétiquement efficaces.Photos: « Carré Vert »; Dreier Frenzel, Lausanne

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commencer par augmenter de 10 à 15francs par mois, l’investissement serapayant sur le long terme.

Lorsque les prix de l’énergieprennent l’ascenseur, l’usage mesurédes combustibles fossiles préserve nonseulement le climat, mais aussi le porte-monnaie. Tel est le précepte appliquépar la Fondation suisse pour le climat,qui aide les PME à économiser l’énergie.Régi par le principe « les grands aidentles petits », le programme est financépar 21 entreprises du tertiaire, telles desbanques et des assurances, à partir duremboursement de la taxe sur le CO2.L’argent soutient des projets novateurs,comme le refroidissement d’entrepôts àl’aide d’eau de pluie au lieu d’air froidou la mise au point d’un sèche-lingefonctionnant sous vide, qui fournit unrendement équivalent avec la moitié del’énergie requise par les modèles clas-siques.

Gagner plus en polluant moins. La prise deconscience écologique influence aussiles modes de consommation. « La de-mande de produits sociaux, éthiques etdurables ne cesse de croître », constateJürg Peritz, responsable du marke-ting chez Coop. Depuis le début desannées 1990, le chiffre d’affaires de la

ligne textile Naturaline, complètementneutre en termes de CO2, est ainsi passéde 3 à près de 60 millions de francs.Environ 60% des vêtements en cotonvendus par Coop sont des produits Na-turaline. «Nous voulons prouver que lamode n’exclut pas le commerce équi-table », souligne Jürg Peritz.

Pour ce qui est de l’électricité, Coopmise tout sur l’énergie hydraulique.Depuis 2008, le grand distributeur adiminué ses propres émissions de CO2de 9500 tonnes, soit de 7%. Membredu WWF Climate Group, il s’est fixédes objectifs concrets dans ce domaine.Outre Coop, d’autres entreprisescomme Migros, Ikea, Swisscom ou laPoste prennent part au projet. Malgrédes chiffres d’affaires en hausse, lesonze participants ont réduit leurs émis-sions de CO2 de 150000 tonnes au total,soit de 21%, entre 2005 et 2010.

Un sentier didactique sur le sujet. Chan-gement de décor: du grand parkingde l’hôtel Wetterhorn, à Grindelwald(BE), on a une vue imprenable sur leglacier supérieur de Grindelwald. Sor-tant de l’iPhone préalablement louéà la station, une voix commente pour-tant: «Dans les années 1980, le glacierdescendait encore jusqu’à la forêt. Au

cours des décennies à venir, ce pay-sage va se transformer complètement. »Smartphone en main, les hôtes inté-ressés s’engagent ensuite sur l’un dessept sentiers pédagogiques pour en ap-prendre davantage sur les conséquenceslocales des changements climatiques.

Par cette offre, les responsables dela région touristique de la Jungfrauattirent l’attention sur les effets duréchauffement dans les Alpes. Simulta-nément, ils s’efforcent de diminuer lesémissions de gaz à effet de serre et decontribuer eux aussi à la protection duclimat. Après une visite dans l’Oberlandbernois, certains vacanciers ne manque-ront pas de se joindre au mouvement.

Andres EberhardPour en savoir plus:www.bafu.admin.ch/magazine2012-3-10

Lorsque les prix de l’énergie prennent l’ascenseur,l’usage mesuré des combustibles fossiles préservenon seulement le climat, mais aussi le portemonnaie.

49Protection du climat > environnement 3/2012

CONTACTAndrea BurkhardtCheffe de la division ClimatOFEV031 322 64 [email protected]

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environnement 3/2012 > Gestion des déchets50

Bientôt un conteneur de plus?RECYCLAGE DU PLASTIQUE

La part de plastique dans les ordures ménagères ne cesse de croître. Or certainesfractions présentes dans les déchets peuvent très bien être valorisées,comme l’indiquent des études récentes. Mais le développement du recyclage seheurte toujours au financement et à l’emplacement des systèmes de collecte.

On le voit bien en rangeant les achatsdu week-end dans le réfrigérateur et surles étagères: les sacs en plastique videss’accumulent et les multipacks doiventêtre débarrassés d’une feuille synthé-tique qui part immédiatement à lapoubelle. Des aliments vendus autrefoisdans des récipients en verre, métal oucarton sont de plus en plus empaquetésdans du polyéthylène, polystyrène, PETou autre matière plastique. Ces embal-lages représentent déjà 15% du poidsdes sacs à ordures et leur proportion necesse d’augmenter.

Hormis les bouteilles en PET, dontle réseau de collecte serré permet d’at-teindre un taux de recyclage de 80%,la plupart des emballages en plastiquefinissent aux ordures. Ne pourrait-onpas recueillir et recycler séparémentd’autres fractions jetées par les mé-nages? « La collecte et la valorisation derésidus mélangés ne permettent pas defabriquer des produits neufs », expliqueMichel Monteil, chef de la section Valo-risation et traitement des déchets del’OFEV. «Avant de les fondre, il faut lestrier, les broyer et les laver soigneuse-ment. Ce traitement préalable est oné-reux, surtout lorsque le plastique estsale. »

Un recyclage qui vaut la peine. Le volumeconsidérable de nombreux emballagesrenchérit leur reprise et leur trans-port. C’est donc essentiellement soncoût relativement élevé qui a freiné lacollecte sélective d’autres contenantsen plastique. De plus, il n’y a aucuneurgence écologique en Suisse, car laplupart des résidus synthétiques abou-tissent dans les déchets urbains, aveclesquels ils sont valorisés sous formed’énergie dans une usine d’incinérationdes ordures ménagères (UIOM). Il en vaautrement dans certains pays comme laGrande-Bretagne et l’Italie, où l’on mettoujours de grandes quantités de dé-chets urbains en décharge: des résidusde plastique emportés par le vent défi-gurent le paysage et polluent les eaux.

Une étude récente montre cepen-dant que la valorisation spécifiquede certains déchets de plastique peuts’avérer écologiquement efficace cheznous également. «Cela concerne notam-ment le recyclage des corps creux etdes grandes feuilles », précise MichelMonteil. « Il pourrait soulager l’envi-ronnement et bénéficier à l’économiepublique en ménageant des matièrespremières précieuses comme le pétrole,pour n’en citer qu’une. »

Depuis le printemps 2010, des spécia-listes de la Confédération, des cantons,des communes, du commerce de détailet du secteur concerné se rencontrentrégulièrement autour d’une Tableronde sur le recyclage des matières plas-tiques. Ce groupe élabore des bases dedécision et recherche comment exploi-ter au mieux les potentiels. Il a notam-ment commandé une étude destinée àidentifier les nouvelles fractions suscep-tibles d’être valorisées sélectivement.Il examinera ensuite si certains par-tenaires – communes, commerce dedétail ou organisations privées – sontdisposés à les reprendre, la question dufinancement jouant bien sûr un rôleclé.

En 2011, la Communauté d’inté-rêt du commerce de détail suisse (CICDS) a étudié de sa propre initiative lafaisabilité d’une collecte combinée decorps creux tels que bouteilles en plas-tique, bouteilles à lait en polyéthylèneet cartons de boissons dans ses pointsde vente. Mais elle a renoncé à propo-ser une reprise à grande échelle au vude la place restreinte à disposition dansles petites enseignes et de la lourdeurdes investissements à consentir pourla logistique. Il n’est cependant pas

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51Gestion des déchets > environnement 3/2012

PRODUCTIONGranulés, produitsfinis et semi-finis

CONSOMMATIONannuelle en Suisse

1 000 000 t

DÉCHETS(de la consommation, dustockage provisoire et de

la production suisses)780 000 t

STOCKAGE PROVISOIRE(selon durée de vie)

DÉCHETS DEPRODUCTION

TRICONDITIONNEMENT

145 000 t

VALORISATION MATIèRE80 000 t matière recyclée

VALORISATIONÉNERGÉTIQUE

50 000 tINCINÉRATION DESDÉCHETS URBAINS

650 000 t

635 000 t

10 000 t

5000 t5000 t

90 000 t

110 000 t

80 000 t

570 000 t

320 000 t

430 000 t

30 000 t

EMBALLAGES 37 %

CONSTRUCTION 25 %

AUTRES 24 %

VÉHICULES9 %

APPAREILSÉLECTRIQUES5 %

La quantité de matières plastiques stockées sous forme de biens à longue durée de vie tels que deséléments de construction et des véhicules augmente chaque année de quelque 255 000 tonnes.Actuellement, 70 % du plastique consommé est valorisé énergétiquement. Flux de produits = flèchesbleues; flux de déchets = flèches vertes; processus industriels en Suisse ou à l’étranger = jaune.

45 000 t

Flux de matières plastiques en Suisse en 2010

Graphique: Redilo GmbH / OFEV / RuthSchürmann

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environnement 3/2012 > Gestion des déchets52

exclu que certains grands vendeurs oudétaillants reprennent les bouteilles enplastique, comme c’est déjà le cas dansla région de Lucerne.

«Nous conseillons aux communessouhaitant introduire ce genre de col-lectes à l’essai de définir précisémentles déchets qu’elles vont reprendre »,indique Michel Monteil. « Elles peuventainsi éviter que des feuilles, pots à

yaourt ou emballages composites for-tement souillés se retrouvent dans lesconteneurs et doivent quand même êtreincinérés dans une UIOM à cause deleur saleté. » La législation en vigueurdonne déjà aux cantons la compétencede décider si les communes peuvent oudoivent assurer la collecte sélective dedéchets en plastique.

Les fractions relativement homo-gènes provenant de l’industrie et del’artisanat posent moins de problèmes.Par exemple, les feuilles de polyéthy-lène entières ou fragmentaires issues dela diffusion commerciale et les bidons àparoi épaisse peuvent très bien être re-cyclés et procurent parfois des recettesintéressantes.

Valorisation thermique et financements.La valorisation thermique peut suivredeux filières. Soit le plastique est lais-

sé dans les déchets urbains et il seratransformé avec eux en chaleur et enélectricité dans une UIOM, soit il est uti-lisé comme combustible de substitutiondans une cimenterie. L’industrie suissedu ciment en brûle des quantités consi-dérables, essentiellement des résidus deproduction de l’industrie et de l’artisa-nat. Mais le droit de l’environnementen vigueur ne permet pas de retirer

les matériaux synthétiques des déchetsurbains mélangés.

Pour financer la valorisation duplastique conformément au principedu pollueur-payeur, le secteur privépourrait prélever une contribution anti-cipée de recyclage (CAR) au momentde l’achat, comme celle qui est déjà envigueur pour valoriser les bouteillesde boissons en PET et les canettes enaluminium. «Ce système devrait resterstable malgré les fortes fluctuations duprix du pétrole, car nous devons impé-rativement assurer l’élimination desdéchets sur le long terme », souligneMichel Monteil. Si le secteur concernén’arrivait pas à se mettre d’accord là-dessus, la Confédération pourrait impo-ser une taxe d’élimination anticipée(TEA), ainsi qu’elle le fait déjà pour lesbouteilles en verre et les piles. La Tableronde sur le recyclage des matières

plastiques est en train d’évaluer la fai-sabilité de divers systèmes de collecteet de recyclage. Si les intéressés ne par-venaient pas à s’entendre sur une solu-tion librement consentie, les instancespolitiques devraient trouver un consen-sus avant d’introduire une taxe.

125 kilos par habitant et par an. Pour fon-der les décisions à prendre, le groupede spécialistes a d’abord recensé préci-sément les flux massiques et filières devalorisation actuels du plastique. Sonenquête a révélé qu’en 2010, l’écono-mie suisse en a utilisé un million detonnes, soit 125 kilos par habitant. Ony trouve notamment 26% de polyéthy-lène, 16% de polypropylène et 15% dePVC – essentiellement sous la formed’éléments de construction. Les embal-lages représentent 37% du total et lesecteur de la construction 25%. L’agri-culture, qui consomme toujours plus defeuilles synthétiques pour envelopperles balles de foin, en rejette aussi unvolume considérable.

Il est surprenant de constater queseules 430000 tonnes de matières plas-tiques, soit 43% de la consommationannuelle, aboutissent directement dansles déchets. Plus de la moitié est stockéetemporairement, par exemple dansdes cadres de fenêtres ou des articlesde sport, qui sont parfois utilisés plu-sieurs dizaines d’années avant d’alimen-ter les flux de déchets. C’est ainsi que650 000 tonnes sont valorisées ther-miquement chaque année dans uneUIOM. Parmi les 780 000 tonnes derésidus en plastique produites en

« La collecte et la valorisation de résidus mélangés nepermettent pas de fabriquer des produits neufs. »

Michel Monteil, OFEV

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53Gestion des déchets > environnement 3/2012

2010, 145000 ont été triées et réuti-lisées, dont 35 000 comme combus-tible de substitution dans des cimen-teries suisses et 10 000 pour en tirerde l’énergie dans des fours à lits flui-disés. Quelque 90000 tonnes, soit9% de la quantité mise en circula-tion, ont été valorisées en tant quetelles. Provenant essentiellement del’industrie et de l’artisanat, dont lesdéchets de production revêtent en par-tie une forme pure, elles ont donné80000 tonnes de matière recyclée.

Un potentiel inexploité. « Certains paysvoisins comme l’Allemagne atteignentdes taux de recyclage de 40%, alorsque la Suisse n’arrive pas à 10% », faitremarquer Martin Model, directeur del’entreprise Innoplastics à Eschlikon(TG). Il estime qu’il y a encore un grospotentiel à exploiter dans l’industrie,l’artisanat, l’agriculture et l’horticul-ture, mais aussi dans le secteur descosmétiques et des produits de vaisselledomestiques. «Ces déchets ne devraientpas être incinérés. »

La valorisation du plastique est eneffet loin d’avoir atteint ses limites. Lescimentiers affichent notamment leurintérêt. «A l’heure actuelle, les combus-tibles de substitution couvrent déjà lamoitié de nos besoins en énergie, maisnous pourrions utiliser bien plus deplastique », indique Heiner Widmer, leresponsable environnement, techniqueet science de l’association profession-nelle cemsuisse. L’industrie suisse du ci-ment brûle des huiles usagées, des sol-vants, des boues d’épuration séchées,

de vieux pneus ou des farines animalesdepuis le milieu des années 1980 et di-minue d’autant ses besoins en charbon.«Grâce à cette stratégie, notre secteurréduit ses émissions de CO2, exploitedes ressources indigènes et limite ainsi

sa dépendance vis-à-vis de l’étranger »,déclare Heiner Widmer. Mais il devienttoujours plus difficile d’acquérir cescombustibles. D’une part, certainsproducteurs transforment eux-mêmesleurs déchets riches en calories – lessolvants, par exemple – en chaleur.D’autre part, on voit apparaître desentreprises qui valorisent sélectivementcertaines matières, comme c’est le caspour le plastique.

L’OFEV s’engage. L’OFEV préconise unesérie de mesures visant à limiter aumaximum l’impact écologique de cematériau synthétique. Elles s’adressenttout d’abord aux producteurs d’embal-lages, invités à fabriquer des feuillesplus fines et des contenants plus légersou à proposer des récipients remplis-sables pour atténuer la consommationde plastique. Les acheteurs sont priésde renoncer aux emballages inutiles etde privilégier les systèmes réutilisables,comme il en existe déjà pour les pro-duits de lessive et pour la vaste gammede céréales. L’OFEV souhaite aussi queles entreprises valorisant le plastique

améliorent l’efficacité des filières d’in-cinération et de recyclage actuelles. «Denombreux exploitants d’UIOM peuventencore augmenter le rendement deleurs installations et la quantité de cha-leur distribuée », déclare Michel Mon-

teil. « En accroissant cette productionde chaleur et d’électricité, nous contri-buons entre autres à ménager les éner-gies fossiles primaires. »

Pieter Poldervaart

Pour en savoir plus:www.bafu.admin.ch/magazine2012-3-11

CONTACTMichel MonteilChef de la section Valorisation ettraitement des déchetsOFEV031 325 91 [email protected]

En 2010, l’économie suisse a utilisé un millionde tonnes de plastique, soit 125 kilos par habitant.

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environnement 3/2012 > Prévention des accidents majeurs54

Prévenir signifie penser au pire et faire son possible pour qu’il ne se produise pas. Maintenant quenous avons réduit les risques encourus par les personnes à cause du transport de marchandisesdangereuses sur le rail, nous devons juguler les menaces pesant sur l’environnement. Et cela en dépitdes obstacles méthodologiques.

Un train de mesures en voied’élaboration

TRANSPORTS PAR LE RAIL

A proximité des eaux scintillantes del’Aar, un autre puissant courant parcourtla vallée de Thoune à Berne: la napped’eau souterraine qui percole à traversles graviers déposés dans un ancien litde la rivière. Cette ressource invisible estune artère vitale pour la population desenvirons. Le consortium des eaux de la

région de Berne en retire 55000 litresd’eau potable par minute, dans quatrepuits de pompage implantés près de Kie-sen. Ils couvrent les besoins de la capi-tale et de huit autres communes. La sta-bilité du débit et la qualité de l’eaucaptée, filtrée efficacement par les sableset les éboulis fins du sous-sol, sont re-

marquables. «Nous obtenons une eauexcellente, qu’il n’est même pas néces-saire de traiter », indique BernhardGyger, directeur du consortium.

Danger pour les aquifères de Berne.Comme dans presque toutes les grandesvallées fluviales de Suisse, les diverses

Des mesures techniques – telles que le renforcement de l’enveloppe des wagons-citernespour le transport de substances particulièrement dangereuses comme le chlore – ontlargement contribué à réduire les risques encourus par les personnes. Maintenant, ce sontles risques pour l’environnement qui font l’objet d’une analyse approfondie. Photos: CFF

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55Prévention des accidents majeurs > environnement 3/2012

utilisations de l’espace restreint entrentparfois en conflit. C’est ainsi que la zonede protection des eaux souterraines estlongée par la route nationale A6 etmême traversée par la voie de cheminde fer à grand trafic reliant Thoune àBerne. Les camions et les trains de mar-chandises transportant de grandes quan-tités de substances nocives pour les eauxprésentent un danger pour l’aquifère.En cas d’accident majeur à Kiesen, des li-quides tels qu’essence, mazout ou pro-duits chimiques peuvent se répandredans l’environnement et menacer grave-ment cette ressource en eau.

«Le rail est un moyen de transportefficace, globalement plus sûr pour l’en-vironnement que la route », note DanielBonomi, de la section Prévention des ac-cidents majeurs et mitigation desséismes de l’OFEV. «Mais en cas d’acci-dent, un train de marchandises dange-reuses peut causer des dommages biensupérieurs parce que son chargement estde loin plus volumineux. » Il serait tou-jours possible d’alimenter la ville fédé-rale en eau potable si les captages de Kie-sen devaient être fermés. «A courtterme, nous pourrions amener suffisam-ment d’eau de l’Emmental et de laplaine alluviale de Belp », précise Bern-hard Gyger. Sa qualité serait toutefoisinférieure et elle coûterait plus cher. Letransport depuis le captage de Belpaudemande des pompes, alors que l’eau deKiesen est acheminée vers Berne sans ap-port d’énergie. Mais ce n’est pas ce quicause le plus de soucis à Bernhard Gyger.«Si les eaux étaient contaminées à Kie-sen, nous devrions épuiser toutes les ré-serves d’eau disponibles, ce qui nousmettrait dans une situation très diffi-cile. »

Etudes de risques éprouvées. Depuis 1991,la question des risques liés à l’utilisationet au transport de substances dange-reuses pour la santé et pour l’environne-ment est régie par l’ordonnance sur les

accidents majeurs (OPAM). Les déten-teurs d’installations sont tenus deprendre toutes les mesures nécessairespour les diminuer préventivement. Sielle le juge nécessaire, l’autorité peut de-mander qu’une entreprise ou une voiede communication fasse l’objet d’uneétude de risque. Son but est d’estimer lesdommages possibles en cas d’accident etla probabilité qu’il survienne.

En 1998, des spécialistes ont réaliséune première analyse pilote visant à dé-terminer les risques encourus par les

personnes à cause du transport de mar-chandises dangereuses sur le rail. Ils ontd’abord examiné des questions métho-dologiques. «Que peut-il se passer etcomment, qui peut être touché et com-ment? Les auteurs de l’étude devaientd’abord s’entendre sur les hypothèses etles estimations fondant les analyses, afinque leurs résultats soient largement ac-ceptés », explique Daniel Bonomi. Le butétait d’élaborer une méthode bienétayée pour identifier les périls impu-tables au rail et les évaluer en appli-quant des critères définis. La méthode aété mise en œuvre depuis lors à quatrereprises sur l’ensemble du réseau afind’apprécier sommairement les risquespour la population liés au transport fer-roviaire de marchandises dangereuses.Ces travaux ont permis d’améliorerconstamment les bases de données et lesméthodes de calcul.

Détecteurs de déraillement et enveloppesrenforcées. La première estimation a ré-vélé que 135 kilomètres de voie ferréerecelaient des risques inacceptables. Cerésultat alarmant a incité les exploitants,

les services fédéraux et le secteur indus-triel concernés à élaborer une stratégiede mesures et à vérifier les calculs. Unenouvelle analyse réalisée en 2002 avecdes données plus précises a encore signa-lé des risques intolérables sur 34 kilo-mètres de voie. Il s’agissait essentielle-ment de tronçons traversant des régionstrès peuplées, où un accident aurait misen danger la vie de nombreuses per-sonnes.

Différentes interventions de nature àatténuer ces périls ont permis aux auto-

rités de lever l’alerte dès 2006. «L’essen-tiel a été l’installation des détecteurs defreins bloqués et de boîtes d’essieuxchaudes », détaille Markus Ammann, ex-pert en accidents majeurs à la sectionEnvironnement de l’Office fédéral destransports (OFT). Une autre approcheconsiste à poser des détecteurs de dérail-lement, surtout sur les wagons transpor-tant des substances particulièrementdangereuses comme le chlore. Le but deces équipements complémentaires estd’arrêter les trains à temps pour éviter lacatastrophe.

Quelques accidents majeurs survenusen Suisse fournissent des enseignementsconcrets. Un train de marchandisestransportant 350000 litres de kérosèneest par exemple sorti de la voie prèsd’Au, dans le Rheintal saint-gallois, en1988. Une partie du carburant a pris feuet près de 260000 litres se sont infiltrésdans le sol où ils ont pollué l’aquifère.Les travaux d’assainissement ont duréplusieurs années. En 1994, des wagons-citernes remplis d’essence ont déraillé àZurich-Affoltern. Ils ont poursuivi leurroute sur plusieurs kilomètres avant de

« Le rail est un moyen de transport efficace, globalementplus sûr pour l’environnement que la route. »

Daniel Bonomi, OFEV

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environnement 3/2012 > Prévention des accidents majeurs56

percuter un poteau de caténaire, de serenverser et de s’enflammer.

En plus des mesures déployant deseffets sur l’ensemble du réseau, commele renforcement de l’enveloppe deswagons-citernes, des décisions d’ordreorganisationnel ont été prises à l’échellelocale. C’est ainsi qu’aucun train chargéde marchandises dangereuses n’a ledroit de manœuvrer à la gare de triagede La Praille (GE) lorsqu’un match defootball se déroule au Stade de Genèvetout proche.

Les CFF mieux outillés. La dernière estima-tion, réalisée en 2011, rend compte del’utilité des mesures de sécurité mises enœuvre ces dernières années. Elle attestequ’il n’y a plus de risque inacceptablesur le réseau ferroviaire suisse. De plus,la longueur des tronçons tombant dansle domaine des risques dits intermé-diaires – juste acceptables – a diminuéde 579 à 68 kilomètres depuis 2006, cequi correspond encore à 2% du réseauhelvétique. Cette amélioration est essen-tiellement due à la diminution des tauxde déraillement et des probabilités de re-jet de substances dangereuses.

En outre, les CFF disposent mainte-nant de plus amples données sur les ins-tallations et leur exploitation. Ils peuventintégrer chaque aiguillage dans lescalculs et préciser l’occupation destrains. «Ainsi, les résultats s’approchenttoujours davantage de la réalité, si bien

qu’il est de moins en moins nécessairede fonder les calculs sur des hypothèsespessimistes », déclare Daniel Bonomi.

Les bases méthodologiques désormaisdisponibles pour estimer les risques en-courus par les personnes facilitent la dé-termination des menaces pesant surl’environnement. Les données concer-nant le tracé des voies, les quantités demarchandises transportées et le nombred’aiguillages par tronçon, tout commel’estimation des quantités de substancesrépandues, restent les mêmes.

Un projet pilote s’attaque aux questions deméthode. Contrairement aux dangerspour les personnes, exprimés en nombrede victimes, l’évaluation des risquespour les eaux souterraines s’avère cepen-dant assez complexe. « Les différentespollutions sont difficiles à quantifier »,constate Daniel Bonomi. De plus, lesprocessus à l’œuvre dans un environne-ment souillé par un accident majeur nesont guère généralisables. « Il faudraitpar exemple savoir où l’essence rejetées’écoulerait à chaque lieu d’accident en-visageable. Mais la présence d’un muretou d’un fossé de drainage peut déjàchanger complètement la donne. »

Ces difficultés requièrent une ap-proche pragmatique. Comme les grandsaquifères revêtent une importance vi-tale, l’OFEV examine le site de Kiesendans le cadre d’un projet pilote conjointavec l’OFT et les CFF. Ils étudient les pa-

ramètres essentiels pour estimer lesrisques en cas d’accident ferroviaire im-pliquant des marchandises dangereuseset le coût des mesures de sécurité.

Bernhard Gyger estime que la misehors service des captages de Kiesen coû-terait 50000 francs par jour. Or il a falludeux ans rien que pour nettoyer la terrecontaminée par le kérosène infiltré à Au.Le canton de Berne a évalué le coût duremplacement complet des captagesd’eau potable de Kiesen dans le cadre duprojet «Eau de l’Aar ». Il a obtenu lechiffre de cent millions de francs. Au vudes montants en jeu, il vaut donc lapeine d’étudier à fond les risques que lestransports dangereux font peser sur l’en-vironnement et les actions préventivespossibles.

Lucienne Rey

Pour en savoir plus:www.bafu.admin.ch/magazine2012-3-12

CONTACTDaniel BonomiSection Prévention des accidentsmajeurs et mitigation des séismesOFEV031 322 93 [email protected]

Contrairement aux dangers pour les personnes, expri-més en nombre de victimes, l’évaluation des risquespour les eaux souterraines s’avère assez complexe.

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57environnement 3/2012

Filières et formations

Quoi de plus banal, désormais, qu’un téléphone portable? A la

fois outil de communication et accessoire de mode, cet appareil

cache pourtant une complexité technique et des enjeux bien plus

importants qu’on ne le croirait de prime abord. Trois organismes –

Swico, Pusch et la Cosedec – se sont associés pour élaborer un

dossier pédagogique sur ce thème, à l’intention des classes de

la 3e primaire à l’école secondaire. Constitué de quinze modules,

celui-ci part des composants du téléphone pour aborder la ques-

tion du transport, du cycle de vie, du recyclage, etc., sans oublier

la durée d’utilisation!

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Yverdon, 024 423 44 50, [email protected], www.cosedec.ch >

Ressources pédagogiques > Mon portable et moi

Pionniers du climatL’initiative « Pionniers du climat », lancéepar Swisscom, soutient les classes quisouhaitent réaliser des projets liés auréchauffement climatique. De l’école en-fantine au degré secondaire, les élèvespeuvent bénéficier de leçons d’initiationinteractives et variées, qui les aidentà développer et mettre en œuvre leurspropres idées. Plus de 3000 écoliers enont déjà profité.> www.pionniersduclimat.ch

Les apprentis aussiSur le même thème, les apprentis de lapremière à la quatrième année ont lapossibilité de concilier théorie et pratiquedans le cadre de l’Atelier pour le cli-mat. Leurs projets, qui doivent porter surl’énergie (économies, efficacité ou sourcesrenouvelables), doivent être réalisés entreseptembre 2012 et mars 2013 pour parti-ciper au concours.> www.atelierpourleclimat.ch

C’est le moment de se former!Le sanu propose une nouvelle édition deson Guide de formation en environne-ment et développement durable. Avec150 offres (un quart de plus qu’aupa-ravant) en Suisse et en Europe voisine,cette version s’enrichit de nombreuxcursus non universitaires. Des informa-tions pratiques sont fournies pour cha-cun des cours.> www.sanu.ch > Boutique(prix: 35 francs + 5 francs de frais de port)

Bouger dans les boisEn forêt, quelques cordes judicieuse-ment nouées offrent d’innombrablespossibilités de jeux créatifs pour lesenfants. Alexandra Schwarzer, diplôméeen pédagogie sociale, propose des coursdans ce domaine aux éducateurs deSuisse romande. Elle a également publiéun livre (en allemand) à ce sujet.> 055 266 14 55,www.naturundbewegung.de

BLOC-NOTES

La plateforme www.educ-envir.ch propose une multitude de

supports d’enseignement pour les domaines liés au dévelop-

pement durable. A côté de ressources évaluées par des pro-

fessionnels, elle offre aussi de bons exemples de matériel créé

et testé par des enseignants. La Fondation suisse d’éducation

pour l’environnement s’est maintenant donné pour objectif

d’élaborer de grands dossiers thématiques. Le premier d’entre

eux, conçu avec SILVIVA, concerne la forêt. Les suivants porte-

ront sur l’énergie et le climat.

> Fondation suisse d’éducation pour l’environnement (FEE), Berne,

031 370 17 70, [email protected], www.educ-envir.ch > Ressources

évaluées / Bonnes pratiques / Dossiers thématiques

Longue vie aux portables!

Un site plein de ressources

Dans le cadre de son programme Ad’eau, l’Association pour la

sauvegarde du Léman propose un choix d’activités ludiques et

didactiques pour découvrir et comprendre la richesse des mi-

lieux aquatiques et leur fonctionnement écologique. Destinée en

priorité aux enfants et jeunes de 6 à 16 ans ainsi qu’à leurs

familles, cette offre permet en outre d’explorer le lac en toute

sécurité et dans une ambiance sympathique. Les entreprises,

sociétés, clubs ou groupes d’amis peuvent aussi commander

des sorties « clés en main », par exemple pour marquer un évé-

nement spécial.

> Association pour la sauvegarde du Léman, Genève,

022 736 86 20, www.asleman.org

A la découverte du Léman

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mise à disposition

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environnement 3/201258

Les sites marécageux sont protégésL’île d’Ufenau, dans le lac de Zurich, fait partie du sitemarécageux « Frauenwinkel ». Pour cette zone d’unebeauté particulière et d’importance nationale, l’abbayed’Einsiedeln (SZ) avait déposé quatre demandes de per-mis liées à des projets de transformation. Elle prévoyaitnotamment la construction d’un restaurant en forme defeuille par l’architecte Peter Zumthor. Le tribunal admi-nistratif cantonal a rejeté une opposition d’Aqua Viva àce sujet, si bien que l’association a porté l’affaire devantle Tribunal fédéral (TF).

Ce dernier a annulé le permis de construire pour lerestaurant parce que l’article 78 de la Constitution fédé-rale met les sites marécageux sous protection. Cette dis-position est concrétisée dans la loi sur la protection dela nature et du paysage (LPN). Les interventions dans lessites marécageux ne sont pas absolument impossibles,mais une nouvelle construction n’ayant aucun lien avecl’objectif de protection ne saurait être admise, selon leTF.Christoph Fisch, division Droit, OFEV, 031 324 78 35,[email protected]. Tribunal fédéral: ATF 138 II 23

Qui paie pour les détritus en ville?A Berne, le règlement sur les déchets en vigueur depuisle 1er mai 2007 disposait que l’élimination des détritusabandonnés dans les espaces publics ou déposés dansles poubelles municipales était financée par une taxe ac-quittée par tous les propriétaires d’immeubles. Des com-merces se sont défendus avec succès contre ce principeauprès du tribunal administratif cantonal.

Par la suite, le TF a rejeté le recours déposé par laville, mais a contredit le tribunal cantonal sur plu-sieurs points. Les juges de Mon-Repos estiment que lescoûts occasionnés par les déchets laissés dans la ruedoivent être couverts par une taxe conforme au prin-cipe de causalité, comme le veut l’article 32a de la loisur la protection de l’environnement (LPE). Or les per-sonnes qui abandonnent leurs détritus ne sont passeules responsables, selon le TF: les points de vente demets à l’emporter, par exemple, sont aussi impliqués,puisqu’ils écoulent des produits présentant une propor-tion élevée d’emballages qui sont généralement éliminésdans l’espace public. Les communes auront donc la pos-sibilité de faire passer à la caisse ce type d’entreprises.Berenice Iten, division Droit, OFEV, 031 322 93 53,[email protected]. Tribunal fédéral: ATF 2C_239/2011

Du côté du droit

Paru récemment

Environnement en généralL’environnement suisse – Statistique de poche 2012. Petite bro-chure publiée par l’Office fédéral de la statistique (OFS); 36 p.; F, D, I, E;gratuit; à commander auprès de l’OFS, 2010 Neuchâtel, 032 713 60 60,fax 032 713 60 61, [email protected], www.bfs.admin.ch; numérode commande: 522-1200. Avec des données clés, des graphiques et descommentaires succincts, la statistique de poche présente l’évolution del’environnement en un bref tour d’horizon.Cette publication est jointe au présent magazine.

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59environnement 3/2012

AirMoins de suies de diesel. Comment la Suisse a réduit ses émissions.28 p.; F, D, I, E; gratuit; commande de la version imprimée:www.publicationsfederales.admin.ch, n° 810.400.068f;téléchargement: www.bafu.admin.ch/ud-1057-f

Biodiversité, organismesListe rouge Mollusques (escargots et bivalves). Espèces me-nacées en Suisse, état 2010. Publié par l’OFEV et le Centre Suissede Cartographie de la Faune (CSCF), Neuchâtel. 148 p.; F, D, I; gratuit; commandede la version imprimée: www.publicationsfederales.admin.ch, n° 810.100.095f;téléchargement: www.bafu.admin.ch/uv-1216-f

Bref portrait de la Stratégie Biodiversité Suisse. Agir en communpour préserver la diversité de la vie et bénéficier durablement deses prestations. Dépliant; F, D, I; gratuit; commande de la version impri-mée: www.publicationsfederales.admin.ch, n° 810.400.067f;téléchargement: www.bafu.admin.ch/ud-1056-f

DéchetsMouvements de déchets spéciaux et d’autres déchets soumis àcontrôle en Suisse. Aide à l’exécution. F, D; pas de version imprimée;téléchargement: www.bafu.admin.ch/uv-1215-f

EauZones de protection des eaux souterraines en roches meubles. Unmodule de l’aide à l’exécution protection des eaux souterraines.58 p.; F, D; gratuit; commande de la version imprimée:www.publicationsfederales.admin.ch, n° 810.100.094f;téléchargement: www.bafu.admin.ch/uv-1207-f

Micropolluants dans les eaux usées urbaines. Etape de traitementsupplémentaire dans les stations d’épuration. Traduction abrégée dela version intégrale allemande (uw-1214-d, 210 p.); 87 p.; F; pas de versionimprimée; téléchargement: www.bafu.admin.ch/uw-1214-f

Recueil des fiches sur l’aménagement et l’écologie des cours d’eau.Résultat du projet de « gestion intégrale des zones fluviales ». 58 p.;F, D; 12 francs; commande de la version imprimée:www.publicationsfederales.admin.ch, n° 810.300.126f;téléchargement: www.bafu.admin.ch/uw-1211-f

ElectrosmogHypersensibilité électromagnétique. Evaluation d’études scien-tifiques. Etat fin 2011. Résumé de la version intégrale allemande(uw-1218-d, 103 p.); 2 p.; F; pas de version imprimée;téléchargement: www.bafu.admin.ch/uw-1218-f

Forêts et boisRéseau d’exploitations forestières de la Suisse. Résultats pour lapériode 2008 – 2010. Publié par l’OFEV et l’Office fédéral de la statistique(OFS). 32 p.; F, D; gratuit; commande de la version imprimée:www.bfs.admin.ch; téléchargement: www.bafu.admin.ch/ud-1059-f

Cynips du châtaignier – Dryocosmus kuriphilus. Aidez-nous àcombattre un ravageur particulièrement dangereux! 4 p.; F, D, I;gratuit; commande de la version imprimée:www.publicationsfederales.admin.ch, n° 810.400.073f;téléchargement: www.bafu.admin.ch/ud-1061-f

HydrologieImpacts des changements climatiques sur les eaux et les res-sources en eau. Rapport de synthèse du projet « Changement cli-matique et hydrologie en Suisse » (CCHydro). Résumé de la versionintégrale allemande (uw-1217-d, 76 p.; traduction française en préparation);2 p.; F, I, E; pas de version imprimée;téléchargement: www.bafu.admin.ch/uw-1217-f

Toutes les publications de l’OFEV sont disponibles sous formeélectronique; les fichiers PDF peuvent être téléchargés gratuite-ment sous www.bafu.admin.ch/publications

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environnement 3/201260

Je trottine dans ma ville

L’aventure commence au coin de la rue. Il

suffit de mettre un pied devant l’autre et de

regarder… C’est le credo de Floriane Nikles,

une enseignante lausannoise qui organise des

promenades découvertes en famille pour les

3 à 7 ans et plus. L’initiative vise à promouvoir

la marche auprès des petits tout en éveillant

leur curiosité. Onze parcours différents, dans

lesquels la nature tient une large place, sont

proposés. Cinq d’entre eux sont réunis dans

une brochure.

> www.jetrottinedansmaville.ch, 021 616 00 49

Les chauves-sourisà Champ-Pittet…Cinq centimètres de long sans la queue, 5 à

12 grammes pour une envergure d’environ

24 centimètres et d’immenses oreilles qui

bougent séparément, telles sont les caractéris-

tiques de l’oreillard brun, élu animal de l’année

par Pro Natura. C’est aussi un as de la voltige.

Si vous désirez en savoir plus sur ce spécimen

et ses semblables, embarquez dans le bat-

mobile mis en place au Centre Pro Natura de

Champ-Pittet (VD).

> www.pronatura-champ-pittet.ch, 024 423 35 70

… et à Pointe-à-la-BiseLes petits mammifères volants sortent sur-

tout à la tombée du jour. L’exposition « Songe

d’une nuit » organisée au Centre Pro Natura de

Pointe-à-la-Bise (GE) jusqu’à fin octobre vous

projette dans leur monde nocturne.

> www.pronatura-pointe-a-la-bise.ch,

022 752 53 59

La botanique avec RousseauJean-Jacques Rousseau n’était pas seulement

un écrivain, un philosophe et un musicien, il

était aussi passionné par l’étude du monde

végétal. On peut se familiariser avec sa pen-

sée « botanique » sur un parcours-promenade

situé aux Conservatoire et jardin botaniques de

Genève. Onze postes à thèmes y évoquent ses

rapports avec les jardins, le paysage alpin, la

botanique exotique, les botanistes genevois et

la valeur utilitaire des plantes. On y découvre

également son legs à l’histoire de cette dis-

cipline et ses écrits sur le sujet. L’exposition

« Je raffole de la botanique » dure jusqu’au

14 octobre.

> www.ville-ge.ch/cjb/, 022 418 51 00

Nouveaux jardinsL’Entraide protestante suisse (EPER) a déve-

loppé un nouveau projet d’intégration axé sur

le jardinage. Elle loue des parcelles au sein

de différents jardins urbains et met celles-ci

à disposition des migrants. Les bénéficiaires

cultivent chacun un petit potager à leur guise

et suivent des ateliers hebdomadaires con-

sacrés au jardinage biologique et à des thèmes

de la vie quotidienne en Suisse. En Romandie,

il existe de tels jardins à Villeneuve, Yverdon et

Lausanne.

> www.eper.ch, 021 613 40 70

Mers jurassiquesIl y a 150 à 200 millions d’années, la région

jurassienne était baignée par les eaux chaudes

d’une mer tropicale. Coraux, oursins, poissons,

tortues et crocodiles peuplaient les eaux ma-

rines alors que, sur le rivage, les dinosaures

déambulaient sur de vastes plages. A Por-

rentruy, l’exposition « Jura, dans les profon-

deurs des mers jurassiques » montre jusqu’au

30 novembre 2012 quelque 500 fossiles de

cette époque, tout en abordant l’écologie et la

biologie des espèces concernées.

> Musée jurassien des sciences naturelles,

www.mjsn.ch, 032 420 37 10

Quand Finges se dévoileLe parc naturel de Finges (VS) met sur pied

nombre d’excursions passionnantes. Ainsi, tous

les mercredis après-midi de mai à fin octobre,

on peut découvrir les plus beaux endroits du

parc en compagnie d’un guide. Le site orga-

Faitsetgestes

mise à disposition

Page 61: Les ressources naturelles en Suisse environnement · les cars postaux, qui freinent, s’arrêtent et accé-lèrent fréquemment. La pile à combustible suisse. Le car parcourt sans

61environnement 3/2012

nise également des rencontres avec des spé-

cialistes sur des thèmes spécifiques. A venir:

le 6 octobre, la géologie de l’Illgraben; du 5 au

7 octobre, week-end ornithologique dédié au

gypaète barbu; et le 24 novembre, la parade du

chamois.

> www.pfyn-finges.ch, 027 452 60 60

A vélo, à bon rythme

La « Route du Cœur » permet de découvrir les

Préalpes suisses à bicyclette, de Lausanne à

Zoug en passant par Romont, Laupen, Thoune,

Langnau, Berthoud et Willisau. A chaque étape,

il est possible de louer des vélos électriques.

Des offres spéciales sont disponibles pour le

transport des bagages et l’hébergement.

> www.herzroute.ch

Dix bougies pour le festivalde la SalamandreLe festival de la Salamandre est un rendez-

vous incontournable pour tous les amoureux de

la nature en Suisse romande. Cette année, il

fêtera son dixième anniversaire. A cette occa-

sion, la manifestation investira un plus grand

espace et s’étendra sur trois jours au lieu

de deux, soit du 26 au 28 octobre 2012. Un

programme enrichi de nombreuses surprises,

expositions, animations et films attendra le

public.

> www.salamandre.net/Festival, 032 710 08 25

Guides utilesL’association NiceFuture a sorti une édition plus

étoffée de son Guide du shopping durable. Elle

a également actualisé et enrichi son Guide de

l’habitat durable. Les deux brochures offrent

une quantité d’adresses et de conseils dans

les domaines de la consommation et de l’habi-

tat. On peut se les procurer chez NiceFuture

(www.nicefuture.com, 021 647 25 29) ou à la

librairie Payot.

Impressum 3/12, août 2012 | Le magazine environnement paraît quatre fois par an; l’abonnement est gratuit; n° ISSN 1424-7135 | Editeur: Office fédéral de l’environnement

(OFEV). L’OFEV est un office du Département fédéral de l’environnement, des transports, de l’énergie et de la communication (DETEC) | Direction du projet: Bruno Oberle,

Thomas Göttin | Conception, rédaction, production: Georg Ledergerber (direction), Charlotte Schläpfer (suppléante); Doris Ochsner, Harald Jenk et Kaspar Meuli (dossier Mobi-

lité); Beat Jordi (articles hors dossier); Luc Hutter (version en ligne); Cornélia Mühlberger de Preux (responsable rédaction Suisse romande); Valérie Fries (secrétariat de la

rédaction) | Collaborations externes: Hansjakob Baumgartner, Vera Bueller, Andres Eberhard, Urs Fitze, Nicolas Gattlen, Oliver Graf, Stefan Hartmann, Pieter Poldervaart, Lucienne

Rey; Peter Bader – textatelier.ch (rubriques); Danielle Jaurant (coordination et rédaction linguistique de la version française) | Traductions: Anne Anderson, André Carruzzo,

Nadine Cuennet, Stéphane Cuennet (éditorial, rubriques), Milena Hrdina, Tatiana Kolly, Christian Marro, Stéphane Rigault, Anne-Catherine Trabichet | Réalisation et mise en page:

Atelier Ruth Schürmann, Lucerne | Délai rédactionnel: 30 juin 2012 | Adresse de la rédaction: OFEV, Communication, rédaction environnement, 3003 Berne, tél. 031 323 03 34,

fax 031 322 70 54, [email protected] | Langues: français, allemand; italien (extraits) uniquement sur Internet | Publication sur Internet: sauf les rubriques, le contenu du

magazine se retrouve sur www.bafu.admin.ch/magazine | Papier: Cyclus Print, 100 % de vieux papier sélectionné | Tirage: 18 500 environnement, 47 500 umwelt | Impression

et expédition: Swissprinters AG, 4800 Zofingue, www.swissprinters.ch | Abonnement gratuit, changement d’adresse et commande de numéros supplémentaires:

environnement, Swissprinters St.Gallen AG, service lecteurs, 9001 Saint-Gall, tél. 058 787 58 65, fax 058 787 58 15, [email protected], www.bafu.admin.ch/magazine |

Copyright: reproduction du texte et des graphiques autorisée avec indication de la source et envoi d’un exemplaire justificatif à la rédaction.

mise à disposition

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environnement 3/201262

A l’office

Les décisions prises de nos jours auront encore des conséquences sur l’état del’environnement et des ressources naturelles dans un avenir assez lointain. C’est la raisonpour laquelle des experts de quatre divisions de l’OFEV ont défini des objectifs environne-mentaux, imaginé des actions possibles et élaboré des représentations de la situation futuredans le cadre du projet « Perspectives 2050 ». Les prévisions à long terme établies dans lesdomaines pilotes du climat, de la biodiversité et des matières premières doivent permettrede mieux gérer les évolutions écologiques, économiques et sociales. Par exemple, pour éviterdes changements climatiques dangereux, un des objectifs prévoit de réduire les émissions degaz à effet de serre de la Suisse de 80% d’ici à 2050, par rapport à leur niveau de 1990.

L’application concrète nécessite la mise en place de jalons politiques, pour la plupartavant 2020. Les résultats des projets pilotes montrent qu’on peut en tirer des prioritésd’action communes, par exemple une hausse marquée de l’efficacité ou une évolution dumodèle de consommation. Afin de réduire suffisamment l’utilisation d’énergie et de ressour-ces, les incitations économiques devront être renforcées, grâce notamment à une réformefiscale écologique imposant davantage énergie et matières premières plutôt que travail etcapital.

Les divisions concernées de l’OFEV vont tenir compte des conclusions obtenues dansleurs activités courantes. Des perspectives à long terme seront également développées pourd’autres domaines.

Vers une utilisation durable des ressources

A la mi-mai, le jury de la Fondation suisse pour l’environnement a décernéà Franz-Sepp Stulz son Prix environnemental 2012. Il récompense ainsi lesdécennies de travail que ce collaborateur de l’OFEV a mises au service de laconservation de la diversité naturelle et paysagère.

Après l’acceptation inattendue de l’initiative de Rothenthurm, en 1987,l’Office fédéral de l’environnement a été chargé du mandat constitutionnel

de protéger les marais contre les atteintes pouvant les détruire. Dans le cadre d’un dialogueconstructif, M. Stulz – qui dirigeait alors la division Nature et paysage et conseille au-jourd’hui la direction – est parvenu à obtenir un équilibre des intérêts en présence, grâce àbeaucoup de pragmatisme et de force de conviction. L’établissement de l’inventaire des sitesmarécageux fait aussi partie de ses mérites professionnels, auxquels on peut encore ajouterdes documents semblables sur les zones alluviales, les sites de reproduction de batraciens,les prairies sèches ou les marais.

Le lauréat s’est engagé en faveur du Parc national en tant que vice-président de la com-mission fédérale qui s’en occupe. Avec tact et patience, il a fait progresser les projets d’autreszones protégées nationales, de la réserve de biosphère de l’Entlebuch (LU) ainsi que des parcsnaturels régionaux (il y en a déjà quinze), qui allient protection et utilisation économique.«Cette œuvre de toute une vie, qui s’est imposée face à des résistances diverses, réjouirade nombreuses générations après nous », a affirmé Reto Locher, de la Fondation suisse pourl’environnement, lors de la remise du prix. M. Locher a également évoqué l’engagement deFranz-Sepp Stulz auprès du Fonds suisse pour le paysage, de la Foire NATURE, de la Commis-sion fédérale pour la protection de la nature et du paysage, ou du conseil de la FondationNature & Economie.

Un prix pour Franz-Sepp Stulz

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63environnement 3/2012

Tom Kestell, un éleveur bovin du Wisconsin,détient un record du monde particulier depuis2010 grâce à un animal nommé « Ever-Green-View My 1326-ET »: en une année, cette cham-pionne de la race Holstein a fourni à sa trayeusemécanique plus de 32700 kilos de lait! L’orga-nisme d’une vache n’est pas vraiment conçupour de telles performances, mais plutôt pourcouvrir les besoins d’un veau, qui atteignent6 à 8 kilos par jour. Au début du XXe siècle,les vaches de Suisse pesaient rarement plus de250 kilos et ne donnait guère plus de 2000 kilosde lait par an. Actuellement, les représentantesdes races Holstein et Brown Swiss, qui ont étédéveloppées spécialement pour la productionlaitière, pèsent le triple et certaines d’entre elles,chez nous aussi, produisent plus de 12000 kilospar an si elles sont gardées à l’étable.

Pour cela, l’homme doit toutefois veiller à ceque l’animal enchaîne les périodes de gestation.Souvent, quelques jours après la mise bas, lepetit est déjà séparé de sa mère. Une période delactation normale dure environ dix mois: troismois après la naissance d’un veau, sa génitriceest à nouveau portante – situation qui, géné-

ralement, n’est pas l’œuvre du taureau mais del’inséminateur. Même dans cet état, la patienteruminante rejoint la machine à traire jusqu’àtrois fois par jour. Pour la mère, le « sevrage »n’intervient que deux mois avant la naissancesuivante.

Le rendement atteint son sommet – jusqu’à50 kilos par jour – après la quatrième ou cin-quième phase productive. Ensuite, malgré unealimentation spécifique composée de maïs, desoja et d’autres aliments riches en protéines,l’animal est le plus souvent épuisé. La périodeutile d’une vache à lait, de nos jours, n’est quede quatre à cinq ans, soit environ un cinquièmede son espérance de vie naturelle. En Suisse, oùles prairies sont prédestinées à la production delait, la pression s’accroît également pour queles 565000 vaches laitières s’adaptent aux exi-gences de la production alimentaire industrielle.

Beat Jordi

Pour en savoir plus:www.bafu.admin.ch/magazine2012-3-13

Une vie de vache à lait

Portrait

Un nombre croissant devaches laitières trèsspécialisées passent leurvie à l’étable. Commeelles ne peuvent guèrebouger, leur fourrageest utilisé presque exclusi-vement pour la productionde lait.Wikipedia commons

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> Les articles de ce numéro sont disponibles également sur Internet –avec une liste de liens et des sources bibliographiques:www.bafu.admin.ch/magazine2012-3

> Rendez-vous sur le site de l’OFEV:www.bafu.admin.ch/fr