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Étude AdCF Les relations entre communes et communautés, entre continuités et ruptures 2013

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Étude AdCF

Les relations entre communes et communautés, entre continuités et ruptures

2013

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SommaireSommaire 3

Abréviations 4

Remerciements 5

Introduction 6

Périmètre de l’étude 7

Panel de collectivités retenues pour l’étude (caractéristiques détaillées en annexe) 8

Plan et problématiques traitées 9

I - Gouvernance : le consensus peut-il perdurer ? 11

1.1 - La gouvernance communautaire et les processus de décision ont trouvé un rythme de croisière, les clivages initiaux se sont estompés mais n’ont pas disparu 12

1.2 - Des processus de décision aujourd’hui intrinsèquement marqués par la recherche du consensus : frein ou levier de l’action communautaire ? 16

1.3 - En matière de gouvernance externe, la refonte de la carte communale a modifié la donne, que la communauté soit elle-même touchée ou qu’il s’agisse de son environnement 19

1.4 - L’intercommunalité en devenir : entre simples péripéties et ouverture d’un nouvel acte de l’intégration communautaire 21

II - Rationalisation des compétences : une relation de confiance à renouveler ? 31

2.1 L’intérêt communautaire a moins servi à tracer ex ante la carte rationnelle d’un partage des compétences, qu’à enregistrer pragmatiquement les besoins avérés d’action communautaire 32

2.2 - Les modalités organisationnelles et managériales au niveau communautaire se sont formalisées depuis 2005 33

2.3 L’exercice des compétences comme baromètre de la relation de confiance et de l’intégration communautaire 37

2.4 - Projets de loi de décentralisation et exercices des compétences 42

III - Relations financières : la solidarité mise à l’épreuve 45

3.1 - Si la structure financière des communautés s’est affermie, leur conférant une relative bonne santé financière, celle-ci pourrait être à l’avenir menacée 46

3.2 - Aujourd’hui, les relations financières sont en apparence sous le signe de la solidarité, mais aussi en attente de pactes fiscaux et financiers qui pourraient les formaliser 48

3.3 - Des perspectives fiscales et financières sous contraintes 54

CONCLUSION 57

ANNEXES 59

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Abréviations AdCF : Assemblée des Communautés de France

ATR : Loi n° 92-125 du 6 février 1992 relative à l'administration territoriale de la République

CAPI : Communauté d'agglomération Porte de l'Isère

CET : Contribution économique territoriale

CGCT : Code général des collectivités territoriales

DGS : Directeur général des services

DSC : Dotation de solidarité communautaire

EPCI : Établissement public de coopération intercommunale

FPIC : Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales

INET : Institut national des études territoriales

MNT : Mutuelle nationale territoriale

RCT : Loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales

SDCI : Schéma départemental de coopération intercommunale

Sivom : Syndicat intercommunal à vocation multiple

Sivu : Syndicat intercommunal à vocation unique

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Remerciements Nous souhaitons ici associer à notre travail toutes les personnes qui ont apporté leur contribution à cette étude, rencontrées aux quatre coins de France et qui ont accepté de nous consacrer du temps.

Nous remercions en premier lieu l’Assemblée des Communautés de France et tout particulièrement Daniel Delaveau, Nicolas Portier et Floriane Boulay, pour la qualité de la commande passée, pour les échanges toujours très enrichissants qui ont nourri notre réflexion. Nous remercions également les élus de la commission « Institutions et pouvoirs locaux » de l’AdCF, tout particulièrement son président Jo Spiegel.

Nous remercions l’Institut National des Études Territoriales, son directeur Jean-Marc Legrand, ainsi que toute l’équipe pédagogique et administrative chargée du suivi de la promotion Paul Eluard.

Enfin, nos remerciements les plus chaleureux vont aux élus locaux et directeurs qui nous ont reçus et qui nous ont parlé de leurs projets, de leurs problématiques, de leurs réussites, de leurs territoires. Par leur connaissance du fait intercommunal, la maîtrise de leurs dossiers, ils nous ont fourni la matière première de cette étude (la liste de l’ensemble des personnes rencontrées est détaillée en annexe).

Étude réalisée par Emilie Becouze, Paul Bouriat, Juliette Kupecek, François Mesure, Simon Moulines, Mireille Pillais, Pierre Stecker, élèves administrateurs territoriaux de la promotion Paul Éluard

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Introduction Réaliser en 2012/2013 une étude portant sur les relations entre les communes et leur communauté peut paraître surprenant tant l’environnement des collectivités territoriales en général, et du bloc communal en particulier, est changeant. En effet, à peine l’encre de la dernière loi réformant les collectivités territoriales1 est-elle sèche que le législateur issu des élections de 2012 s’apprête à modifier à nouveau le paysage institutionnel local : c’est la sixième fois, en une trentaine d’années 2, qu’il est apparu utile de modifier les équilibres locaux. Car malgré le nombre de réformes, c’est le même « millefeuille territorial » et son enchevêtrement complexe de compétences qui fait l’objet de critiques récurrentes. La loi RCT de 2010 devait rationaliser la carte intercommunale ; début 2013, l’objectif aura été quasiment atteint quant à l’achèvement de celle-ci puisque seules 614 communes demeuraient isolées fin 2012, dont seulement 59 hors petite couronne parisienne et îles mono-communales, mais il l’est moins en matière de regroupement des syndicats existants 3.

Le nouveau projet de loi de décentralisation présenté au Conseil des ministres du 10 avril 2013 part du principe que la diversité des territoires doit être mieux prise en compte, ce qui nécessite une organisation de ceux-ci adaptée à cette diversité. Pour mesurer l’impact de cette nouvelle réforme, il conviendra d’attendre le résultat du processus parlementaire qui promet d’être long, puisque ce « paquet législatif » comportera trois textes distincts : un projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, un projet de loi de mobilisation des régions pour la croissance et l’emploi et de promotion de l’égalité des territoires, et un projet de loi de développement des solidarités territoriales et de la démocratie locale.

Dans ce contexte juridique mouvant, le bloc local composé des communes et de leur communauté tente d’inscrire son action dans la durée, malgré l’incertitude qui pèse sur les finances locales. La crise des finances publiques, et particulièrement de celles de l’État (dette publique en constante augmentation, ressources limitées par l’atonie de la croissance du produit intérieur brut), a imposé une baisse des dotations aux collectivités locales. Cette baisse fait suite à la réforme fiscale que ces dernières ont connue avec la suppression de la taxe professionnelle et son remplacement par la contribution économique territoriale ; cette redistribution des cartes au plan financier a mis en lumière les enjeux de la péréquation horizontale entre territoires – la péréquation verticale étant elle-même contrainte à mesure que les dotations de l’État se réduisent –, pour mieux assurer la solidarité financière entre les territoires.

On peut par ailleurs noter que les relations entre l’État et les collectivités ont toujours été marquées par une certaine ambivalence. Les transferts de compétences « déguisés » et les coûts qu’ils induisent sont décriés par les collectivités au même titre que la compensation imparfaite des prestations sociales, l’inflation de normes coûteuses ou la restructuration des services déconcentrés de l’État et ses conséquences, notamment la quasi-suppression de l’ingénierie publique mise au service des communes. Pour autant, c’est l’État qui reste régulièrement appelé en renfort par les collectivités, comme par exemple face à la crise du crédit local ou pour la gestion de la sortie des emprunts toxiques.

Enfin, le futur mode de scrutin des conseillers communautaires dans les communes de plus de 1 000 habitants (élection directe par « fléchage » lors des élections municipales) pourra modifier des équilibres et être perçu par certains comme une complexification (cf. 1.3.).

Pourtant, cet environnement incertain ne doit pas masquer les changements qui sont en train de se produire dans la relation entre communes et communautés (urbaines, d’agglomération, de communes). Pour tenter d’évaluer et de mesurer une certaine « maturité » intercommunale, l’AdCF a souhaité que soit réalisée une étude prenant en compte les facteurs et paramètres locaux pouvant expliquer l’état de cette relation.

1- Loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales.2- Loi n° 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions ; loi d'orientation n° 92-125

du 6 février 1992 relative à l'administration territoriale de la République ; loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire ; loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale ; loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales ; loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales ; loi n° 2012-281 du 29 février 2012 visant à assouplir les règles relatives à la refonte de la carte intercommunale.

3- Selon la DGCL, « le nombre de syndicats a diminué d’environ 3 % en 2012, ce qui porterait leur nombre à 14 350 au 1er janvier 2013 contre 14 800 au 1er janvier 2012. La réduction du nombre de syndicats amorcée depuis plusieurs années se confirme. Sur la base des arrêtés de projet portant sur les syndicats, signés en 2012 mais non suivis d’un arrêté définitif, il semble que les opérations de fusion et de dissolution de syndicat devraient être nettement plus nombreuses en 2013. »

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Ce n’est pas la première fois qu’une telle étude est menée : en 2005, dans le cadre d’un partenariat avec l’INET, l’AdCF avait commandité un travail approfondi4 sur les relations au sein du bloc communal, plus particulièrement entre communauté d’agglomération et communes membres, en interrogeant 22 communautés, à la fois sur les modes de gouvernance et les mécanismes de prise de compétences.

L’objectif à l’époque (six ans seulement après le vote de la loi Chevènement5, qualifiée parfois de « révolution silencieuse ») était de mesurer l’avancée des communautés d’agglomération dans le paysage intercommunal.

Au total, 230 personnes, élus et responsables administratifs relevant de communautés réparties sur l’ensemble du territoire national, avaient été interrogées, tant sur des questions politico-juridiques (notion d’intérêt communautaire peu précise à l’époque, mode d’élection des dirigeants) que sur l’organisation administrative (structuration des administrations communautaires, apparition des premières formes de management intercommunal) et l’équilibre fragile des relations financières dans le bloc local.

En un mot, il s’agissait de mieux appréhender la forte hétérogénéité des situations territoriales.

Parmi les constats dressés par cette étude, on peut noter :

• la grande hétérogénéité des relations des agglomérations avec leurs communes membres ;

• la recherche permanente de complémentarités au sein du bloc local, qui se traduisait par un besoin d’innovation et de souplesse dans l’organisation ;

• la nécessité d’inventer et de faire vivre des modes de relation sous le signe de l’efficacité et de l’efficience ;

• la volonté d’approfondissement du dialogue entre responsables communaux et communautaires.

En 2008, l’AdCF a renouvelé son analyse de la gouvernance communautaire en menant une enquête auprès de 1 540 communautés représentant environ 60 % des communautés existantes (soit 50 % des communautés urbaines, 61 % des communautés d’agglomération et 59 % des communautés de communes), en vue d’explorer les mécanismes de désignation et de représentation au sein des conseils intercommunaux et d’en saisir les évolutions 6.

L’objectif était ici d’informer les élus communautaires sur les acquis de la gouvernance communautaire et de les éclairer sur les enjeux des réformes à venir (future loi de réforme des collectivités territoriales notamment). Le principal enseignement de cette étude fut que les intercommunalités avaient développé des formes de gouvernance originales, sous-tendues par le principe du « consensus ».

Ce mode de gouvernance a par ailleurs fait l’objet d’une étude plutôt critique de la part de chercheurs en science politique et sociologie. Publiée en 2011 sous le titre La politique confisquée. Sociologie des réformes et des institutions intercommunales, les auteurs7 montraient comment, selon eux, l’intercommunalité était « confisquée » en raison de son fonctionnement politique singulier, marqué par des consensus inter-partisans établis à l’abri des regards des citoyens et des élus municipaux.

Elle le serait également au nom ou du fait de sa technicité présumée empêchant les citoyens de s’approprier les débats qui se font jour en son sein ainsi que les décisions prises, pourtant nombreuses et ayant un impact grandissant sur leur vie quotidienne.

Périmètre de l’étude

Il ne s’agira pas, dans le cadre de la présente étude, de reprendre systématiquement les résultats des études précédentes, mais plutôt de faire un point d’étape des relations au sein du bloc local alors que s’ouvrent les débats sur les nouvelles lois de décentralisation.

Évidemment, le contexte des finances publiques, le nouveau cadre réglementaire et organisationnel posé par la loi de réforme des collectivités de décembre 2010, le redécoupage intercommunal dû aux schémas départementaux de coopération intercommunale ou encore le renouveau du paysage politique local (avec

4- - Les relations communes - communautés dans la gouvernance des agglomérations, étude INET-AdCF, 05/12/2005. - Agglomérations 2015. L'intercommunalité à la recherche de son second souffle, étude AdCF, 30/09/2007. - Nouveaux élus, premiers repères pour l’Intercommunalité, étude AdCF, 28/04/2008. - Élus communautaires et gouvernance. État des lieux, enjeux et perspectives, étude AdCF, 13/08/2009. - Portrait des intercommunalités rurales : périmètres, compétences et actions, étude AdCF, 12/02/2010. - État de l'intercommunalité 2010 - Données et commentaires par département, étude AdCF, 01/12/2010. - Ressources humaines. La mutualisation des services : un enjeu d'intégration intercommunale. Études de cas, étude AdCF. - L’évolution des effectifs intercommunaux, note technique AdCF, juillet 2012.

5- . Loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale6- Élus communautaires et gouvernance : état des lieux, enjeux et perspectives. Étude AdCF parue dans Intercommunalités (AdCF) n° 136 -

été 2009, disponible sur le site www.adcf.org/études.7- F. Desage et D. Guéranger, La politique confisquée. Sociologie des réformes et des institutions intercommunales, Éditions du Croquant,

2011.

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une possible limite du cumul des mandats et un suffrage universel légitimant l’élu communautaire dans le concert électoral) s’imposeront comme des sujets incontournables conditionnant désormais l’ambition intercommunale.

Ces éléments pris en compte, la commande qui nous a été passée par l’AdCF relève à la fois d’un état des lieux qualitatif et d’une approche prospective, nécessitant d’engager la réflexion à l’aune d’un cadre institutionnel et réglementaire en mutation.

À défaut de procéder à un exhaustif et délicat inventaire des singularités locales, les enquêtes de terrain (cf. infra les éléments de méthodologie) devront davantage révéler la volonté ou non d’affermir le fait intercommunal au travers de choix assumés, tant en termes de gouvernance, de solidarité financière que de mise en œuvre concrète des compétences.

La présente étude reposera donc sur l’analyse des interactions de ces trois dimensions (politique, financière et exercice des compétences), avec in fine la volonté de dégager des « bonnes pratiques » en matière d’intégration communautaire.

Enfin, l’analyse des relations entre communes et communautés impliquera de considérer des situations très différentes d’échelle, selon qu’il s’agit de communautés de communes, d’agglomération ou urbaines, voire de métropoles, ou encore selon le contexte historique et géographique.

Le panel choisi (une quinzaine de communautés), bien que modeste, se veut tout de même représentatif de collectivités de tailles diverses et couvre au mieux la diversité du territoire national.

Panel de collectivités retenues pour l’étude (caractéristiques détaillées en annexe) :

Communauté de communes Sarlat - Périgord NoirCommunauté de communes Montfort CommunautéCommunauté de communes du Pays de Château-GontierCommunauté de communes de la région de SaverneCommunauté d’agglomération PérigourdineCommunauté d’agglomération du Sicoval (Sud-Est toulousain)Communauté d’agglomération Saint-Malo AgglomérationCommunauté d’agglomération Laval AgglomérationCommunauté d’agglomération Porte de l’IsèreCommunauté d’agglomération de Valenciennes MétropoleCommunauté d’agglomération de Reims MétropoleCommunauté d’agglomération de Nîmes MétropoleCommunauté d’agglomération Versailles Grand ParcCommunauté urbaine de Toulouse MétropoleCommunauté urbaine de Bordeaux

Éléments de méthodologieL’étude repose à la fois sur l’analyse d’un corpus documentaire et sur une série d’entretiens avec les acteurs des collectivités du panel constitué. Un questionnaire type a été réalisé à partir du cadrage du commanditaire, avec l’objectif d’identifier les facteurs clés (accélérateurs et freins) de l’intégra-tion intercommunale. Les questions ont ainsi porté sur la gouvernance (impact du mode de scrutin, modalités de prise de décision, organisation politique…), les relations financières et les modalités d’exercice des compétences communautaires (intérêt et solidarité communautaires, mutualisation, budget…). Un échantillon d’une quinzaine de communautés de diverses tailles, degrés d’intégra-tion, orientations politiques et localisations géographiques a été défini avec le commanditaire. Les entretiens ont été réalisés d’octobre 2012 à janvier 2013 avec trois à quatre personnes « ressources » par communauté : président(e), vice-président(e) et/ou maire d’une commune membre, plus rare-ment directeur de cabinet, et dans tous les cas avec le directeur général des services.

Il faut souligner à ce stade que le matériau recueilli est très hétérogène, et qu’il s’agit d’un travail relevant de l’analyse qualitative, sous la forme d’un regard croisé sur les territoires visités, et non d’une modélisation des dynamiques intercommunales. Malgré le panel resserré, les faits stylisés illustrent des tendances à l’œuvre dans les relations au sein du bloc communal, que nous avons aussi replacées dans une logique prospective.

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Plan et problématiques traitées

Nous avons fait le choix de croiser des approches à la fois thématique et chronologique : thématique à partir des trois champs sur lesquels a porté l’analyse – gouvernance, organisation et exercice des compétences, relations financières –, chronologique en prenant pour point de repère l’étude AdCF-INET de 2005 pour constater les évolutions intervenues depuis lors, et aussi mettre en perspective les trois champs de réflexion au regard des réformes en cours et à venir.

En matière de gouvernance tout d’abord, il est apparu que, depuis 2005, les communautés semblent avoir trouvé un « rythme de croisière », avec des clivages amoindris. Aujourd’hui, la fabrique de la décision, placée sous le signe du consensus, mobilise des instances multiples, formelles et informelles, qui illustrent une capacité d’adaptation forte du modèle intercommunal. L’analyse portée sur la gouvernance interne doit être complétée d’un regard sur la place occupée par les communautés dans leur environnement territorial, entre affirmation et expectative.

L’évolution des « règles du jeu », depuis la loi RCT jusqu’au changement des modes de scrutin tout juste adopté, et certains points envisagés dans les futurs projets de décentralisation questionnent ces différents aspects de la gouvernance.

Sur l’organisation des communautés et l’exercice des compétences, une tendance à la formalisation a pu être constatée, dans le même temps qu’une grande flexibilité dans la prise de compétences, en fonction des besoins des territoires, de choix politiques, d’enjeux financiers. Le tour d’horizon des communautés rencontrées met en lumière des bonnes pratiques, des modèles types auxquels les communautés peuvent s’identifier sans pour autant s’y enfermer. Les évolutions législatives annoncées ne remettent pas en question la possibilité d’adaptation des organisations, mais exercent une contrainte accrue sur les choix de répartition des compétences dans le bloc communal, entre rationalisation et responsabilisation.

Enfin, en matière de relations financières, nous avons fait le choix d’une analyse prudente : de par l’hétérogénéité et l’incomplétude des données recueillies, mais aussi en raison d’un contexte fiscal et financier en mutation profonde depuis la réforme de la taxe professionnelle – dès aujourd’hui avec une contrainte financière accrue, des mécanismes de péréquation (FPIC) qui montent en charge mais sur lesquels le recul manque, et demain des hypothèses d’évolutions avec le projet de décentralisation ou encore à travers une réforme fiscale plus profonde (révision des valeurs locatives). Depuis 2005, l’écosystème financier du bloc local – et par là même celui des communautés – a donc évolué, mais semble toujours fragile malgré l’apparente bonne santé financière des communautés visitées. L’avenir devrait rendre indispensables, dans toutes les communautés, la remise à plat des relations financières ainsi que la formalisation de pactes financiers et fiscaux.

Au final, nous avons le sentiment que les communautés sont à un tournant décisif de leur histoire, en marche vers le statut de véritable collectivité de plein exercice.

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Partie 1

Gouvernance : le consensus

peut-il perdurer ?

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1 - Gouvernance : le consensus peut-il perdurer ? Au regard des constats de l’étude de 2005, la gouvernance au sein du bloc communal semble s’être apaisée, au point de faire du consensus le mode de décision privilégié. Mais les mécanismes de décision nous ont révélé une réalité contrastée, de même que la « gouvernance externe » n’est pas encore stabilisée. Les effets à venir des deux réformes – nouveaux modes de scrutin et projets de loi de décentralisation – viendront-ils remettre en cause l’existant, ou au contraire permettre son approfondissement ?

1.1 - La gouvernance communautaire et les processus de décision ont trouvé un rythme de croisière, les clivages initiaux se sont estompés mais n’ont pas disparuEn 2005, deux constats s’imposaient : le rôle des maires était prépondérant dans les modes de gouvernance quels qu’ils soient (instances dédiées, cumuls systématiques avec les fonctions clés des communautés…), et le clivage ville centre/périphérie servait de grille de lecture des rapports de force.

Les maires conservent une place déterminante dans le processus de décision mais leur positionnement se différencie

L’étude réalisée en 2005 avait mis en lumière que le gouvernement d’agglomération était composé du président de la communauté et des maires des communes membres.

Les « réunions » ou « conférences » des maires étaient de facto au cœur des processus décisionnels des communautés et le poids de leurs décisions apparaissait, dans bien des cas, comme plus important que celui des décisions du bureau.

Cette prédominance de la figure du maire au sein de la gouvernance des communautés reste vérifiable aujourd’hui et ce à proportion de la maturité intercommunale : plus celle-ci est palpable, moins la prédominance des maires se fait sentir. Les fusions en cours relancent parfois le débat du même effet, en mettant en scène le retour des maires dans des postures parfois de résistance. Si tous les maires ne sont plus forcément vice-présidents, chaque commune conserve souvent une vice-présidence. On peut valablement citer l’exemple de Saint-Malo Agglomération, où les vice-présidences sont construites non pas sur les compétences transférées à l’agglomération mais sur le nombre de communes membres.

Quelques présidents reconnaissent que certains maires entendent encore « utiliser l’intercommunalité pour maximiser les retombées sur leur territoire » : le choix de l’implantation d’un équipement (sportif, culturel, etc.) reste ainsi âprement discuté. Si un tel choix répond à des logiques de territoires (quels besoins à l’échelle du bassin de vie ? Quels sont les déplacements existants ? Les modes de transport sont-ils adaptés ?), les tractations sont également d’ordre politique (ne pas concentrer tous les équipements structurants sur la ville centre, équilibrer les investissements communautaires sur le territoire). Ce réflexe communal est le signe que le chemin vers la solidarité communautaire n’est toujours pas achevé. Pour autant, dépasser les logiques communales reste l’objectif de tous les présidents et vice-présidents rencontrés, qui se positionnent en garant de l’équilibre des projets sur le territoire communautaire.

Ce qu’écrivait Sébastien Vignon en 2005 reste vrai : « Ce sont les élus qui détiennent les positions les plus élevées au sein de la hiérarchie des postes électifs municipaux qui sont les plus à même de s’imposer sur le marché politique intercommunal8 », un marché politique unique car les acteurs y sont déjà élus.

Si la figure politique du maire reste prépondérante, on voit néanmoins se mettre en place d’autres lieux de gouvernance comme par exemple le « comité transversal » de la CAPI, instance de réflexion stratégique qui ne rassemble qu’une partie des vice-présidents de l’agglomération. Ce n’est cependant pas une instance de décision.

8- Sébastien Vignon, Les effets de l’intercommunalité, ouvrage dirigé par Rémy Le Saout et François Madoré, Presses universitaires de Rennes, 2004.

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FOCUS : communauté d’agglomération Porte de l’Isère

« La mise en place d’un comité transversal »

À côté du conseil communautaire et du bureau (comprenant le président et les vice-présidents), a été créé un comité transversal. Il est composé de moins de 10 personnes, le président et les vice-présidents en charge de pôles (un pôle regroupe plusieurs vice-présidents sous l’autorité de l’un d’entre eux).

Cette structure particulière à la CAPI est une instance où se discutent les questions stratégiques. Elle est un organe plus politique (au sens général du terme) que les commissions préparant le conseil communautaire. Dans ces commissions, c’est la gestion d’un équipement ou d’une politique parti-culière (culture, sport, etc.) qui est évoquée.

Ainsi, la commission (lieu de négociation) précède le bureau (qui « décide ») avant l’intervention du conseil (lieu formel de décision). Le comité transversal est à part et s’occupe de questions générales, à plus long terme.

En poussant plus loin l’analyse, on peut se demander si la capacité d’un maire à peser sur la décision ne serait pas désormais moins assise sur le poids démographique de la commune qu’il représente, que sur son implication et son soutien au quotidien apportés aux projets intercommunaux. De la définition de la stratégie au portage politique des dossiers, jusqu’au vote au sein de l’assemblée communautaire, c’est souvent la capacité de l’élu à s’engager au sein de la communauté qui fonde ensuite son leadership au sein de l’exécutif.

Pour illustrer la montée d’élus incarnant le projet communautaire, on peut citer le cas de la présidence de la communauté d’agglomération de Valenciennes Métropole, qui n’est pas assumée par le maire de la ville centre, mais successivement par Jean-Louis Borloo puis Valérie Létard, personnages politiques de premier plan.

Cette différenciation des rôles à proportion de l’investissement de l’élu dans le projet communautaire est aussi observable lorsqu’elle concerne des maires de petites communes, qui obtiennent plus de marges de manœuvre et peuvent porter des projets de plus grande envergure en tant que membres de l’exécutif de la communauté qu’en tant que maires de leur commune.

À titre d’exemple d’un leadership pouvant être exercé par un cercle plus restreint que celui de l’assemblée des maires, on peut citer le cas de Toulouse Métropole, où un vice-président a le statut de « président délégué » et a délégation pour assurer la coordination des travaux des commissions et le suivi des relations avec les communes membres. Maire d'une ville de la périphérie de Toulouse, ce président délégué agit aux yeux des autres maires comme le garant de l’intérêt de toutes les villes périphériques. Le leadership serait ainsi exercé par un trio président/maire de la ville centre, président délégué/représentant des communes périphériques et directeur général des services, dont l’expérience passée qui a présidé à la construction de Nantes Métropole a été réutilisée pour conduire la constitution de Toulouse Métropole.

On peut aussi faire mention de l’exemple de la communauté de communes de Sarlat - Périgord Noir avec Jean-Jacques de Peretti, ancien ministre et maire de Sarlat, qui porte et fédère le projet intercommunal depuis ses débuts malgré les oppositions locales. Pour autant, le tourisme, vitrine de la ville centre et moteur de l’économie sarladaise, est resté très longtemps du ressort communal et indifférent au projet communautaire, jusqu’à la récente fusion.

Concernant les autres élus des communes, la situation est variable : ils ne sont pas toujours étroitement associés au fonctionnement de la communauté. De nombreux présidents estiment qu’il est très difficile d’informer les conseillers municipaux qui ne sont pas élus communautaires.

Les conseillers communautaires peinent eux-mêmes à mobiliser les autres conseillers municipaux sur les sujets communautaires. À l’inverse, trop souvent, certains maires partagent peu leurs initiatives avec l’instance communautaire. À la communauté d’agglomération du Sicoval, une expérimentation d’instance de gouvernance spécifique – le « comité de bassin » – vise notamment à associer les élus non communautaires et les élus communautaires à la conduite de projets à l’échelle de territoires infra-communautaires (cf. encadré concernant ce groupement) ; ce mode de fonctionnement n’est cependant pas généralisé.

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Les communautés visitées expérimentent néanmoins diverses méthodes pour susciter et partager l’esprit communautaire. Ainsi, de 2001 à 2008, la communauté de communes du Pays de Château-Gontier a ouvert les commissions communautaires à tous les conseillers municipaux. Elle a toutefois renoncé à cette pratique, qui s’est avérée trop lourde à gérer (impactant 300 conseillers) et s’est heurtée à un niveau d’exigence parfois disproportionné d’élus non communautaires – donc non associés directement à la gestion budgétaire de la communauté et n’ayant pas à assumer les responsabilités des décisions communautaires. Cependant, cette communauté n’a pas renoncé à mobiliser et associer les forces vives de son territoire : pour ce faire, elle utilise des comités consultatifs.

FOCUS : Montfort Communauté

« Avoir toujours en tête les équilibres précaires entre communes et communauté »

Il n’est pas toujours aisé de bien communiquer sur les projets communautaires, notamment auprès des conseillers municipaux (manque de lisibilité de la part de la communauté parfois, mais aussi manque de disponibilité de la part de certains élus communaux). Pour Joseph Le Lez, président de la communauté de communes Montfort Communauté et maire de Breteil, le président d’une com-munauté est le seul garant de « l’esprit communautaire ». Il doit veiller pour cela à deux aspects :

1 - Informer constamment les élus, et notamment les conseillers municipaux non communautaires ; dans cette optique, Montfort Communauté organise ponctuellement une assemblée des conseils municipaux, réunie par exemple pour présenter les attendus de la réforme territoriale, pour les 20 ans de la communauté, etc. Chaque temps fort doit être partagé le plus largement avec les élus locaux du territoire pour construire une « identité communautaire ».

2 - Garantir un développement équilibré et solidaire du territoire ; en effet, l’identité communautaire se construit à travers la réalisation des projets communautaires. La question des investissements est toujours primordiale : elle fait l’objet de nombreuses discussions. Le consensus est systématique-ment recherché. Le président veille à minimiser les éventuels « réflexes communaux » des conseillers communautaires. Par exemple, les élus communaux demandent régulièrement un document de suivi des retombées financières (projets, crédits) de la communauté sur leur commune respective. Pour l’instant, la communauté préfère mettre en avant l’équité et la solidarité entre communes, ou encore la hausse du niveau et de la qualité de service public sur l’ensemble du territoire.

Certains des élus rencontrés en milieu rural nous ont aussi fait part de leur inquiétude concernant la difficulté à mobiliser des volontaires pour s’engager dans des mandats de conseillers municipaux alors même que l’exercice d’un réel pouvoir s’exprime désormais au sein de l’intercommunalité : la montée en puissance de cette dernière contribue à limiter l’attractivité des mandats de conseillers municipaux.

Par ailleurs, comme déjà relevé dans l’étude de 2005, l’apolitisme des assemblées communautaires se confirme dans le temps, se révélant moins le fait de la jeunesse des structures que la conséquence de leur mode de fonctionnement : le clivage gauche-droite y est peu présent, voire totalement absent. Par exemple, au sein de Reims Métropole, les engagements politiques nationaux des différents maires ne sont pas affichés ni même toujours connus.

Les oppositions ou les soutiens se définissent dossier par dossier selon l’adhésion au projet communautaire et l’espoir de gain stratégique que celui-ci peut représenter pour la commune. Le mode de fonctionnement privilégié était et reste avant tout la recherche du consensus (cf. infra 1.2.).

C’est d’ailleurs afin de se donner le temps de partager cette culture du consensus – qui peut contraster avec celle des assemblées communales, souvent objets d’importation des débats politiques nationaux – que Reims Métropole a choisi de conserver jusqu’en 2014 un nombre bonifié de vice-présidents après son passage de 6 à 16 communes membres en janvier 2013.

Élément significatif voici encore quelques années, le poids des maires dans la gouvernance est donc à nuancer, tout comme l’importance de la ville centre. En revanche, on voit la figure du président de la communauté s’affirmer en tant que figure politique connue comme telle des citoyens ; c’est notamment ce que constate le sénateur-maire de Nîmes, qui relève que Nîmes Métropole et son président sont désormais clairement identifiés aux services rendus par la communauté à la population.

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Le clivage ville centre/périphérie, qui paraissait fonder les relations communes/communauté, est toujours présent mais semble néanmoins avoir perdu de son importance

Le fonctionnement au consensus semble avoir apaisé les craintes des communes périphériques de ne pas être suffisamment considérées. Le sacrifice, par la ville centre, d’une partie de ses voix a permis dans bien des cas d’installer la confiance.

C’est notamment le cas à Périgueux (nombre de délégués plafonné à 40 % alors que la ville représente 42 % des habitants de l’agglomération), à Toulouse Métropole et à Reims, où la ville centre a systématiquement accepté de disposer d’un nombre de sièges moindre que celui auquel son poids démographique lui aurait permis de prétendre. De la même manière, à Laval Agglomération, les modalités de répartition des sièges ont été définies pour contrebalancer le poids de la ville centre : les statuts prévoient que Laval dispose de 30 délégués et que les autres communes soient représentées par deux délégués en dessous de 2 000 habitants, auxquels s’ajoute un délégué par tranche supplémentaire de 1 000 habitants.

L’ancien président de la communauté de communes de la région de Saverne a même renoncé à son mandat de président au profit de son mandat de maire (c’est cependant la règle de limitation du cumul des mandats qui l’y a contraint). Le président de Montfort Communauté est le maire de la deuxième commune de la communauté (en termes de démographie) : Breteil.

Dans les communautés visitées ont été développées, sur le long terme, de véritables stratégies pour mettre en confiance les communes membres et équilibrer les relations avec la ville centre.

FOCUS : communauté d’agglomération Laval Agglomération

« Veiller à la bonne représentativité des membres au sein des instances de travail et de réflexion » Un soin particulier a été apporté à la composition des neuf commissions thématiques afin que les communes y soient représentées équitablement. Chacune est ainsi présidée par un triumvirat, com-posé d’un vice-président accompagné d’un deuxième élu de la première couronne et d’un second élu de Laval. Ces commissions sont par ailleurs ouvertes à tous les élus des communes, même non délégués communautaires.

Pour mieux réguler la relation de pouvoir entre les communes et la ville centre et donner des gages de confiance aux communes périphériques, certaines communautés ont développé des mécanismes de contre-pouvoir.

FOCUS : communauté de communes du Pays de Château-Gontier

« Instaurer des contre-pouvoirs »

La communauté s’est dotée d’une commission interne singulière : le « conseil de surveillance ». Pré-sidée par un maire rural, cette instance est chargée de garantir la bonne gestion de la convention de moyens établie entre la ville centre et la communauté.

Cet apaisement des relations entre la ville centre et les communes périphériques, la montée en puissance de l’élu communautaire aux côtés du maire et des élus communaux (et non en opposition), nous amènent aujourd’hui à une culture du consensus et des mécanismes de décision que nous avons analysés dans les collectivités rencontrées.

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1.2 - Des processus de décision aujourd’hui intrinsèquement marqués par la recherche du consensus : frein ou levier de l’action communautaire ?Dans les communautés, les décisions se prennent sans forte polarité politique. Nombre d’arguments ont été avancés pour expliquer cet état de fait : mode de scrutin (« troisième tour des municipales »), technicité des débats, tradition locale particulière, pragmatisme, réponse salutaire à la concurrence des territoires, etc. Le consensus est souvent présenté comme participant à la réalisation – pragmatique – des projets. Il est parfois également vu comme la recherche d’un plus petit dénominateur commun au détriment de l’intégration et de la solidarité communautaires.

La fabrique de la décision : recherche d’un consensus pacificateur ou plus petit dénominateur commun ?

Les présidents rencontrés ont invariablement indiqué que les décisions, à quelques rares exceptions près, étaient prises à l’unanimité. Aussi, les commissions et, a fortiori, les assemblées communautaires sont-elles fréquemment des enceintes politiques mais non politisées (au sens d’un conseil municipal par exemple).

La présentation des dossiers par un vice-président rapporteur est souvent succincte, les questions éventuelles sont plutôt d’ordre technique. L’opposition y est souvent peu active, quelquefois inexistante (Saint-Malo Agglomération, communauté d’agglomération Périgourdine).

Les exceptions à ce large consensus peuvent concerner des projets particulièrement polémiques, présentant par exemple des externalités négatives (implantation d’une station d’épuration, d’un centre technique d’enfouissement des déchets, etc.). Dans ce cas, les cristallisations politiques dépassent le traditionnel clivage gauche-droite : les oppositions peuvent être de natures très différentes : petites communes/ville centre ; communes périurbaines/première couronne, communes « riches »/communes « pauvres », etc.

Mais ces cas sont rares. Les conseils communautaires sont des cénacles pacifiés, et ce depuis la création même de l’intercommunalité. Ce mode de décision, consubstantiel à la communauté, a été largement commenté9 et a peu évolué.

Dans les communautés étudiées, la gouvernance, du point de vue de la prise de décision, est très classique : préparation des décisions en amont des assemblées au sein de diverses commissions, et vote à l’unanimité des rapports (Saint-Malo Agglomération, communauté urbaine de Bordeaux). Trois positionnements peuvent néanmoins être relevés :

• Le consensus comme force du projet politique : à Valenciennes Métropole, le consensus est mis en avant comme un objectif en soi de la gouvernance ; à Versailles Grand Parc où l'agglomération est avant tout l’incarnation du travail en commun des communes et non un projet de territoire, le plus petit dénominateur est ainsi recherché et fédère les communes de cette communauté ;

• Le consensus comme mode de gouvernance efficace pour la conduite des projets : la communauté de communes de la région de Saverne met en avant une culture locale du consensus (qui serait proprement alsacienne) permettant de dépasser les clivages politiques ; à Reims Métropole et Saint-Malo Agglomération, la faible polarisation gauche-droite des débats permet de se concentrer sur les stricts enjeux territoriaux ;

• Le consensus découlant d’un leadership fort et suivi de la ville centre : Toulouse Métropole, communauté de communes de Sarlat - Périgord Noir.

La décision exprimée en conseil est prise bien en amont, dans des instances multiformes qui peuvent être informelles et ouvertes

Les décisions sont traditionnellement travaillées en commissions. De manière générale, ces instances possèdent les mêmes caractéristiques que les commissions mises en place au sein des communes :

• Elles sont animées par un petit nombre d’élus très mobilisés, accompagnés d’un responsable de service (certaines communautés ont formalisé un binôme vice-président/responsable de service, comme à Montfort Communauté) ;

9- Voir par exemple : • Ronan Doare et Danielle Charles-Le Bihan, Les cadres renouvelés de l'intercommunalité, du territoire de projet à l’identité politique, Presses universitaires de Rennes, 2009. • Rémy Le Saout et François Madore, Les effets de l’intercommunalité, Presses universitaires de Rennes, 2004. • F. Bachelet, Démocratie locale et coopération intercommunale, CNRS Éditions, 2001. • Fabien Desage et David Guéranger, La politique confisquée. Sociologie des réformes et des institutions intercommunales, Éditions du Croquant, coll. « Savoir/Agir », 2011.

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• Les commissions sont présidées par un vice-président qui donne un cap (dans la majorité des cas, toutes les communes ont un vice-président au conseil communautaire ; chacune d’elles « préside » donc une commission : on observe une répartition égale mais non équitable des pouvoirs) ;

• Elles sont souvent présentées comme des instances de discussion, de travail (lieu de production où l’on examine les modalités techniques, concrètes des projets), leur caractère non public peut d’ailleurs être regretté ;

• Elles sont le plus souvent réunies mensuellement ; leur périmètre est en lien étroit avec la nature des compétences transférées, elles sont donc relativement cloisonnées, un effort de transversalité est d’ailleurs recherché (à la communauté d’agglomération Périgourdine par exemple) ;

• Elles viennent en amont de l’assemblée et/ou du bureau pour « préparer le consensus » ; le bureau et l’assemblée communautaires sont d’ailleurs souvent peu différenciables, tant du point de vue de la composition que des sujets évoqués.

La prise de décision est caractérisée par deux phénomènes :

• D’une part, il apparaît que les sujets discutés en commission ont souvent été traités, voire validés, au préalable. La décision se prend toujours plus en amont du processus délibératif prévu par les textes. En amont de l’assemblée, la décision est discutée par une commission. En amont de la commission, la décision est travaillée au sein d’un groupe de travail, comité technique ou groupe d’experts. En amont de ce groupe de travail, la décision fait l’objet d’une discussion entre le vice-président et les services techniques. La validation du président est souvent déjà requise à ce moment-là. Finalement, les instances qui viennent ensuite ne modifieront que très peu les arbitrages pris ; au mieux, elles ne feront qu’ajuster la décision à la marge. Le bureau demeure in fine un lieu pivot de la décision, bien que celle-ci soit élaborée plus en amont.

• D’autre part, la diffusion du mode « conduite de projet » a également participé à la multiplication des instances de travail : comité technique, groupe de pilotage, groupe d’experts, commission ad hoc.

FOCUS : communauté urbaine de Bordeaux (CUB)

« Une gouvernance stratégique en plusieurs étapes au sein de la CUB » Pour répondre à l’objectif politique fixé en début de mandat, il convenait de « reva-loriser la parole de l’élu », pour reprendre les termes d’une des vice-présidentes. Concernant le processus décisionnel, le projet métropolitain s’est construit au travers d’un pilotage des projets revisité. Une réorganisation sous la forme de comités stratégiques, de comités de projet et de comités partenariaux a vu le jour fin 2010, épousant les vœux de transparence émis par le conseil de communauté.

Les élus se retrouvent ainsi, au sein d’instances intermédiaires de réflexion et de concertation, asso-ciés aux différentes étapes du projet. La dimension stratégique est essentielle pour envisager la transversalité des politiques publiques communautaires.

Ces instances politiques ad hoc, créées au fil des projets, le sont pour les actions d’envergure et les thématiques prioritaires demandant une vision à long terme.

Aujourd’hui, elles fonctionnent concomitamment aux commissions traditionnelles. L’ouverture régu-lière de ces dernières aux partenaires de la CUB, aux personnalités qualifiées et de la société civile témoigne du besoin d’inscrire la réflexion urbaine dans une démarche collective et non sectorielle.

Leur existence et leur fonctionnement contribuent néanmoins à alourdir le processus administratif et donc décisionnel. Une quarantaine de comités de pilotage est recensée, mais tous n’ont pas la même activité et réactivité. Leur multiplication peut être source de dysfonctionnements internes dénoncés par les élus et certains services. Pour ces instances, une priorisation s’impose au même titre qu’une programmation régulée.

Il existe ainsi une myriade d’instances hétérogènes dans leur fonctionnement et dans leur composition. Le mode « conduite de projet » implique également d’ouvrir les instances de travail aux partenaires (autres collectivités, services déconcentrés de l’État, associations, etc.). La composition des commissions a ainsi évolué en association avec les acteurs des territoires.

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À Valenciennes Métropole, la commission habitat et logement est, à certains moments, ouverte aux partenaires (associations, techniciens, autres élus…), à d’autres moments irriguée par la réflexion et la production de multiples groupes de travail (par exemple sur les projets de rénovation urbaine qui concernent un secteur déterminé : ce fonctionnement repose en outre sur la complémentarité entre l’élu communal – qui « assume » le projet face aux habitants – et l’élu communautaire qui veille à la cohérence d’ensemble des projets).

À Saint-Malo Agglomération, la démarche Scot a facilité l’association des élus locaux et des représentants de la société civile, de même à la communauté de communes du Pays de Château-Gontier avec l’élaboration de la stratégie de développement du territoire 2005-2015.

FOCUS : communauté d’agglomération du Sicoval

« Expérimenter une nouvelle échelle de gouvernance : le bassin de vie » Le Sicoval a adopté en 2012 une « charte de gouvernance de proximité », issue du cadre plus général de l’Agenda 21 de la communauté. Cette charte propose le déploiement d’un échelon de gouvernance (le bassin de vie) et d’outils (comité de bassin, comité de pilotage, lettre de mission du comité de bassin), afin de rapprocher l’agglomération des acteurs locaux autour d’une logique de projets.

Les acteurs locaux sont à la fois des élus communautaires et non communautaires du territoire concerné, mais aussi les associations, les partenaires, les acteurs économiques et/ou les habitants selon les besoins des projets envisagés. La logique de projet peut être descendante (décliner à l’échelle du bassin une des politiques de la communauté) ou ascendante (besoin repéré, projet expérimenté localement, qui peut bénéficier du soutien politique, technique voire dans un second temps financier de l’agglomération).

Le bassin de vie est un périmètre de projet qui, par nature, est lui-même intercommunal et ne recoupe pas nécessairement des frontières communales ; il s’agit d’un territoire correspondant à « une réalité de vie » et « une continuité géographique ». Indirectement, c’est un moyen d’associer des élus non communautaires à une dynamique de la communauté. Pour l’heure, cette expérimen-tation n’en est qu’à ses débuts et bénéficie d’une évaluation chemin faisant ; un vice-président de la communauté est dédié à son portage et son suivi.

S’il y a un risque de démultiplication des instances participatives, de dilution de la décision, cette expérimentation mérite pourtant d’être suivie, particulièrement au moment où les conseillers communautaires sont appelés à être moins nombreux, où le travail entre élus des deux niveaux nécessitera de nouvelles modalités, et où les politiques publiques peuvent gagner à être adaptées à des territoires qui ne correspondent pas au seul découpage administratif

Aux instances « projet », s’ajoutent bien sûr les instances dites « réglementaires » : commission d’appel d’offres, comité technique, comité hygiène et sécurité, etc.

De plus, certaines communautés ont mis en place des instances de coordination (bureau exécutif à la communauté d’agglomération du Sicoval : émanation du bureau qui, lui, est centré sur « le débat, la stratégie, la préparation du consensus »10 ; le bureau exécutif se consacre au suivi des décisions du conseil communautaire et à la gestion des affaires courantes).

Ces modes de faire ont plusieurs conséquences :

• Il existe un « temps caché » de la prise de décision. Avant que le projet ne soit présenté en commission – et a fortiori en assemblée –, il a déjà fait l’objet de discussions puis de validations. Les négociations interpersonnelles (le plus souvent entre le président et le vice-président porteur du projet) permettent de préparer la décision avant de la présenter dans les instances formalisées ; la décision est ainsi « débarrassée » de ces éventuels éléments polémiques.

10- Extrait du Guide des élu-es en Sicoval, 2010.

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• Le binôme vice-président/cadre administratif revêt une importance particulière : il est coproducteur de la décision et co-animateur des instances de travail. Ainsi, à Montfort Communauté, il existe une réunion hebdomadaire formalisée du binôme vice-président/chef de service pour préparer les commissions et suivre l’état d’avancement des projets.

• Les commissions sont très « opérationnelles » : il s’agit de discuter une action, un projet, un dispositif, un soutien à une structure, etc. Rares sont les commissions dont l’objet est la prospective, l’évaluation des politiques publiques ou encore la définition d’une stratégie de développement territorial. À noter que la communauté d’agglomération Porte de l’Isère a structuré un « comité transversal » : instance de réflexion et de stratégie, organe plus politique que les traditionnelles commissions, ce comité est composé du président et de 10 des 30 vice-présidents ; la communauté d’agglomération Périgourdine a également mis en place un « bureau stratégique » pour piloter les grands projets de la mandature.

En conclusion, il existe une grande dichotomie entre les faits (hétérogénéité des instances de travail, souvent non publiques, validation des décisions en amont des instances formalisées, vote à la majorité qualifiée) et le droit (formalisation des décisions par le vote en assemblée, vote à l’unanimité).

À noter de manière subsidiaire que les commissions locales d'évaluation des charges transférées et les conseils de développement ont été peu évoqués dans les entretiens, sauf pour souligner leur rôle marginal, respectivement dans les processus de transfert de compétences ou de projet de territoire.

Les liens avec les communes et les structures communales qui jouxtent les communautés, voire avec des territoires plus lointains dont les zones d’attraction sont étendues, le rayonnement propre aux communautés et celui de leurs communes membres provoquent des synergies et des interactions qui impactent les relations communes-intercommunalité. Dès lors, l’observation des relations communes-communauté ne se résume pas aux seules questions de gouvernance interne et l’on peut entrevoir dans ce champ de « gouvernance externe » des axes d’évolution des relations nouées au sein du bloc communal.

1.3 - En matière de gouvernance externe, la refonte de la carte communale a modifié la donne, que la communauté soit elle-même touchée ou qu’il s’agisse de son environnementLes découpages territoriaux sont actuellement réinterrogés à la faveur de la mise en œuvre des dispositions de la loi du 16 décembre 2010 qui ont conduit à la production, à fin 2011, des schémas départementaux de coopération intercommunale (SDCI). Les rapports de force existants sont susceptibles de s’en trouver plus ou moins modifiés. Les acteurs locaux rencontrés ont été interrogés sur l’impact de ces nouveaux schémas qui varient selon les territoires.

Certains territoires sont directement impactés et voient s’amorcer les premiers effets des redécoupages issus des SDCI

Toutes les intercommunalités touchées ne le sont pas dans les mêmes proportions. Ainsi, selon le nouveau schéma, la communauté d’agglomération Périgourdine passe de 19 à 33 communes ; cette nouvelle donne institutionnelle et financière trouvera son plein effet à compter du prochain mandat. La communauté d’agglomération de Reims Métropole, quant à elle, est passée de 6 à 16 communes au 1er janvier 2013. Il s’agit là de défis majeurs à relever qui impliquent une mise à niveau aussi rapide que possible des services offerts par ces intercommunalités à tous leurs membres. La priorité est donnée à l’intégration des nouveaux membres et donc les compétences ne sont volontairement pas élargies. Les nouvelles modalités de gouvernance induites, notamment sur le nombre de vice-présidents, vont se mettre en place progressivement.

Pour la communauté de communes de la région de Saverne (CCRS), les évolutions ont commencé par l’intégration d’une petite commune isolée (124 habitants) au 1er janvier 2012. Toutefois, le SDCI évoque aussi la fusion avec une communauté de communes voisine (ce qui implique, pour la CCRS, 5 000 habitants supplémentaires, soit une augmentation de 17 % de sa population initiale et l’apport par cette nouvelle entité de gros équipements dont un golf et le Centre européen de l’orgue) et l’absorption d’un syndicat mixte. Les conséquences de ces modifications seront donc importantes, tant en termes de gestion que de gouvernance.

Pour d’autres, il ne s’agit que de petits ajustements n’ayant aucun effet sur les équilibres existants. La communauté d’agglomération Porte de l’Isère intègre deux nouvelles communes, l’une en 2013 et l’autre en 2014. Des évolutions marginales qui ne remettent pas en cause l’équilibre des relations communes-agglomération, car ces deux communes sont de taille modeste. De son côté, la communauté urbaine de Bordeaux intègrera la commune de Martignas-sur-Jalle.

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Des échanges avec les dirigeants des intercommunalités concernées, il ressort que lorsque le SDCI impacte un redécoupage important, l’enjeu est alors, en premier lieu, d’absorber les changements avant de poursuivre l’intégration communautaire.

Les redécoupages subis ou souhaités ne sont pas sans incidence sur la gouvernance des communautés : nouveaux rapports de force, nouvelles alliances, remise à plat des mécanismes de prise de décision… Par exemple, l’élargissement de la communauté d’agglomération Périgourdine (issu de la fusion avec la communauté de communes Isle Manoire en Périgord) demandera de repenser totalement la gouvernance, quel que soit le choix ou la personnalité du futur président.

La redéfinition de la carte intercommunale marque durablement l’évolution du fait intercommunal

Au Sicoval et à la communauté de communes du Pays de Château-Gontier, certains dirigeants locaux nous ont exposé que leurs territoires n’étaient pas impactés par le SDCI. Sur ces territoires, le statu quo s’impose. Ainsi, à Château-Gontier, le préfet a estimé que « compte tenu de la pertinence des périmètres, du nombre de communes membres, du dynamisme démographique du territoire et de l’absence de souhait des élus, aucun ajustement de la taille de l’EPCI n’apparaît nécessaire ».

Bien que leurs territoires ne soient pas directement impactés, les dirigeants locaux restent vigilants quant aux évolutions des découpages de ceux qui les jouxtent, car l’évolution des structures voisines peut impacter les rapports de force existants et avoir des conséquences sur les conditions de développement des territoires.

À Saint-Malo Agglomération, la seule commune isolée jouxtant le territoire (Dinard) a intégré la communauté voisine, la communauté de communes Côte d’Émeraude. À Montfort Communauté, l’environnement immédiat est bouleversé par la fusion/modification/disparition des intercommunalités voisines. À Valenciennes Métropole, la communauté voisine (communauté d’agglomération de la Porte du Hainaut, 38 communes) absorbe la communauté de communes rurales de la Vallée de la Scarpe (7 communes).

Enfin, si la révision des SDCI n’a pas abouti partout, elle a néanmoins permis de mener une réflexion approfondie sur la pertinence des découpages territoriaux et l’équilibrage des pouvoirs locaux, et produira sans doute des effets à moyen ou long terme, comme peut le laisser penser le cas de la Laval Agglomération.

FOCUS : communauté d’agglomération Laval Agglomération

« Un statu quo transitoire ? » À l’occasion du SDCI élaboré en 2011, le préfet a pu envisager la fusion de cette communauté avec la communauté de communes voisine du Pays de Loiron (CCPL), compte tenu notamment du périmètre du Scot, du périmètre cantonal, du bassin de vie et des unités urbaines (l’aire urbaine lavalloise rayonne sur 8 des 15 communes de la communauté du Pays de Loiron). Il a pu estimer que la fusion de ces deux communautés s’inscrirait dans une logique de territoire et per-mettrait de créer un ensemble unique supérieur à 100 000 habitants entre les intercommunalités d’Ille-et-Vilaine et celles de la Sarthe.

Cependant, il a observé qu’une telle fusion ne pouvait être mise en œuvre compte tenu de freins liés à l’absence de volonté politique locale, au coût d’une telle opération et aux effets induits sur la nouvelle structure à naître, contrainte d’absorber des compétences lourdes. Cela reviendrait ainsi à intégrer 17,6 % d’habitants en plus en leur proposant des services de qualité équivalente.

Laval Agglomération possède en effet un certain nombre de compétences dont l’extension au terri-toire de la communauté de communes du Pays de Loiron pourrait s’avérer coûteuse (élimination et valorisation des déchets ménagers et assimilés, transport, établissement et exploitation d’un réseau communautaire de communications électroniques à très haut débit).

Le préfet a ainsi conclu au maintien du périmètre, estimant que « la fusion de Laval Agglomération et de la CCPL, si elle paraît largement incontournable à moyen terme, s’opérera de façon plus aisée après l’apurement d’un certain nombre d’opérations techniquement lourdes (en complément des compétences mentionnées ci-dessus peuvent être cités la réalisation du parc d’activités Laval-Mayenne, la reconversion du site du 42e RT, l'aménagement de la gare de Laval) ».

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Déjà bousculée par les rebonds de la loi RCT, assurément transformée par le changement des modes de scrutin prévus par la loi dite « Valls » du 17 mai 2013, la gouvernance du bloc communal sera questionnée par les projets de loi de décentralisation, quelle qu’en soit la teneur définitive.

1.4 - L’intercommunalité en devenir : entre simples péripéties et ouverture d’un nouvel acte de l’intégration communautaireCertains, dès 2012, évoquaient déjà un « big bang »11 pour la gouvernance des intercommunalités, du fait des dispositions de la loi dite « Richard » (cf. infra) ; aujourd’hui, les réformes en cours à la fois sur les modes de scrutin et les futurs projets de décentralisation, malgré les incertitudes qui pèsent sur ces derniers, s’annoncent comme des évolutions majeures pour les relations au sein du bloc communal, tant en termes d’exercice des pouvoirs que de répartition des compétences.

Les élus que nous avons rencontrés début 2013 se sont exprimés sur le sujet ; des négociations avaient d’ores et déjà lieu sur les futures répartitions des sièges dans les communautés, les projets du prochain mandat étaient en préparation.

Reste à savoir si les transformations institutionnelles confirmeront le nouveau partage des rôles au sein du bloc local, entrevu et commenté dans ce rapport.

Nous avons donc décidé de confronter notre matériau recueilli auprès d’élus et de DGS aux réformes adoptées et en cours dans ce qu’elles prévoient, mais aussi ce qu’elles ne prévoient pas ou de façon imprécise à ce stade, à savoir la place des citoyens dans une configuration démocratique nouvelle ou le positionnement des intercommunalités dans l’écosystème territorial.

Au niveau institutionnel, sommes-nous à l’aube d’une révolution ou d’une simple transformation des jeux d’acteurs ?

La loi RCT de 2010 imposait de redéfinir la gouvernance des intercommunalités en matière de répartition des sièges et de nombre d’élus communautaires ; la loi dite « Richard » du 31 décembre 201212 devait faciliter ce processus, qui donne actuellement lieu à d’âpres négociations pour préparer la composition des futures assemblées.

Parmi les principales dispositions de la loi Richard, peuvent être citées les deux suivantes :

• L’assouplissement de la répartition des sièges au sein de la communauté en cas d’accord amiable : 25 % de sièges peuvent être ajoutés au total des sièges à répartir par rapport au tableau du nombre de sièges figurant dans la loi RCT en fonction de la strate démographique à laquelle la communauté appartient ;

• Là où la loi RCT encadrait strictement le nombre de vice-présidents (20 % du nombre maximum de conseillers communautaires, dans la limite de 15 vice-présidents), la loi Richard porte à 30 % du conseil le nombre de vice-présidents possible, toujours dans la limite de 15 au total (et ce sans incidence financière dans la mesure où l’enveloppe indemnitaire globale est plafonnée).

Ces dispositions devraient avoir des conséquences pour une partie des communautés de notre panel, qui se trouveront concernées par une nouvelle répartition des sièges et une diminution du nombre de vice-présidents :

• Concernant le nombre total d’élus, il s’agira de prendre en compte son inévitable diminution : c’est le cas par exemple pour la communauté d’agglomération Périgourdine (passage de 60 à 40 conseillers en l’absence d’accord, 50 maximum en cas d’accord adopté à la majorité qualifiée des communes), mais bien plus encore pour Saint-Malo Agglomération (passage de 80 à 42 élus en l’absence d’accord, 53 en cas d’accord), les changements les plus lourds impactant la CAPI (de 111 à moins de 50 sans accord et 60 après accord) et la communauté d’agglomération du Sicoval (de 127 à 40 sans accord, in fine 76 après accord) ;

• Concernant le nombre de vice-présidents, c’est là encore une transformation majeure qui s’amorce : le plafonnement à 15 vice-présidents va nécessiter de revoir les périmètres de délégation des élus et de fonctionnement des instances de gouvernance (commissions notamment) dans 7 des 15 communautés de notre panel.

À ces transformations déjà en cours s’ajouteront deux réformes essentielles qui vont changer les règles du jeu : la modification du mode de scrutin, et le nouvel acte de décentralisation, quel qu’en soit le format définitif.

11- Éric Landot, « Interco, l’heure du big bang », La lettre du cadre territorial, 15 février 2013.12- Loi n° 2012-1561 du 31 décembre 2012 relative à la représentation communale dans les communautés de communes et d'agglomération.

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Il importe, à ce stade, d’évoquer certaines dispositions ou grandes tendances de ces deux réformes (avec les précautions qui s’imposent concernant des textes en cours de discussion), notamment parce que nos interlocuteurs se sont exprimés sur ces sujets, et de les confronter aux pratiques observées.

a) Analyse et perspectives au regard du futur mode de scrutin

La loi relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des délégués communautaires, et modifiant le calendrier électoral – que nous appellerons « loi Valls » –, était, au moment de la rédaction du présent document, à peine adoptée (vote définitif du Sénat le 17 avril).

Aujourd’hui, pour ce qui concerne le bloc communal, trois dispositions du texte retiennent l’attention :

• La dénomination des futurs élus intercommunaux retenue est celle de « conseillers communautaires » ; elle paraît préférable à celle initialement en débat de « délégués », qui restreignait leur rôle à celui de seuls représentants des communes ;

• Le seuil à partir duquel s’appliquera le futur scrutin sous la forme d’un fléchage doit correspondre au seuil d’application des scrutins de liste dans les communes : alors que les positions des parlementaires oscillaient entre 500 et 1 000 habitants (ce qui signifie tout de même une différence conséquente, puisque 16 566 communes auraient été concernées dans le premier cas, contre seulement 9 550 dans le second13), c’est finalement le seuil de 1 000 habitants qui a été retenu ;

• Le mode de désignation des élus communautaires sera dual : par fléchage au-delà de 1 000 habitants (deux listes distinctes sur un même bulletin, et paritaires pour les deux niveaux, avec des têtes de listes communes jusqu’au premier quart de chacune d’elles) ou par désignation dans les autres communes (soit dans plus de 20 000 d’entre elles) selon l’ordre du tableau (maire de la commune en premier, puis premier adjoint…).

S’il est prématuré d’envisager des scénarios précis de mise en œuvre de la loi Valls, plusieurs questions peuvent d’ores et déjà être soulevées :

• La complexité du nouveau mode de scrutin n’est pas d’une lecture aisée, notamment pour les citoyens ;

• La persistance d’un mode de scrutin différent selon la taille des communes rend le système peu lisible ; surtout, dans les communautés comprenant des communes relevant des deux systèmes, elle ne permet pas d’unifier la gouvernance des communautés : dans certains cas, des maires de petites communes siègeront de fait aux côtés d’autres élus de communes plus grandes désignés par scrutin de liste, au risque de renforcer un biais dans la représentativité (les maires privilégiant « leur » commune et leurs prérogatives de maires, par rapport à d’autres élus dont la participation à la communauté peut être considérée comme une « extension » de leurs prérogatives) ;

• Le futur mode de scrutin va de fait renforcer une forme de concentration des pouvoirs, à la fois par l’obligation de placer les mêmes candidat(e)s en tête des deux listes soumises au vote et, pour les autres communes, par l’obligation de désigner les élus dans l’ordre du tableau : les heureux élus aux deux niveaux risquent fort, en sus du cumul des mandats exercés, de cumuler les fonctions (adjoint et vice-président).

Si, au moment des entretiens, la plupart de nos interlocuteurs semblaient favorables au principe d’un mode de scrutin qui leur confère une plus grande légitimité, aucun ne s’était exprimé de façon précise sur les modalités qui permettraient de le concrétiser. On peut néanmoins relever plusieurs points :

• L’attente est grande mais, bien souvent, les élus souhaitent ménager un compromis, n’affichant pas une position défavorable aux prérogatives des maires ; le fléchage semble globalement convenir, notamment parce qu’il préserve l’influence des maires dans le processus décisionnel ; à l’époque, l’idée de listes distinctes n’avait pas trouvé d’écho auprès des élus audités ;

• Plusieurs craintes se sont exprimées, notamment la difficulté à arbitrer entre différents mandats locaux : le président du Sicoval figure parmi les rares personnes interrogées à avoir clairement affirmé sa préférence pour le mandat communautaire ;

• Les positions sur le cumul des mandats sont empreintes de la situation de nos interlocuteurs : la majorité des élus rencontrés pour cette étude est en position de cumul multiple (parfois local et parlementaire, parfois également cantonal ou régional, dans tous les cas cumulant des fonctions) et, plus largement, celles et ceux qui exercent des fonctions exécutives au niveau communautaire sont aussi majoritairement présents dans les exécutifs communaux.

À titre d’illustration, le tableau suivant récapitule les mandats cumulés par les têtes d’exécutif dans les collectivités que nous avons rencontrées (cumul de mandats auquel peuvent s’ajouter des cumuls de fonctions – présidence de syndicats, sociétés locales – que nous ne signalons pas ici).

13- Source : Insee, données locales 2011.

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Communauté Nombre d'habitants

Fonction cumulée avec celle de président(e)

Député Sénateur Maire Conseiller général

Conseiller régional

CC Sarlat - Périgord Noir 19 000 X

CC Montfort Communauté 23 722 X

CC Pays de Château-Gontier 29 134 X X

CC région de Saverne 30 771 X

CA Périgourdine 69 860 X

CA Sicoval 70 186 X

CA Saint-Malo Agglomération 83 000

CA Laval Agglomération 94 031 X X

CA Porte de l’Isère 100 000 X X

CA Valenciennes Métropole 192 000 X

CA Reims Métropole 218 000 X

CA Nîmes Métropole 240 000 X X

CA Versailles Grand Parc 250 000 X X

CU Toulouse Métropole 711 000 X

CU Bordeaux 721 744 X

Considérant ce que nous avons dégagé de la loi Valls et ce qui ressort de nos entretiens, les effets potentiels de l’application du nouveau mode de scrutin à moyen terme seront donc de plusieurs ordres :

• Sur les équilibres politiques : un mouvement de politisation des assemblées peut s’amorcer (cf. supra concernant la fabrique du consensus) ;

• Sur la relation aux citoyens (cf. infra), le projet communautaire va devenir un objet électoral (il l’est déjà pour quelques-uns), tout en tenant compte du fait que le territoire d’élection demeurera communal (au risque d’une certaine confusion sur la responsabilité des élus communautaires). Cela nécessitera de réinterroger plus largement l’association des citoyens à la gouvernance, les communautés effectuant déjà des démarches en ce sens auront une longueur d’avance sur les autres (communauté de communes de la région de Saverne, communauté de communes du Pays de Château-Gontier, communauté d’agglomération du Sicoval…) ;

• Sur la gouvernance : avec une représentativité modifiée, des formats d’exécutif plus standardisés et resserrés, des commissions au périmètre refondu, c’est toute l’organisation de la gouvernance des communautés qui sera à revoir ; les communautés sauront-elles utiliser et dépasser ce nouveau cadre règlementaire comme elles ont su le faire jusque-là ?

b) Analyse et perspectives pour la gouvernance des intercommunalités au stade actuel des projets de loi de décentralisation

Le futur projet de loi de décentralisation ne peut pas aujourd’hui faire l’objet d’une analyse détaillée, puisque son redécoupage en trois volets a été annoncé à la suite du Conseil des ministres du 10 avril 2013. Les influences des différentes associations d’élus, selon les niveaux de collectivités et les modes d’élection, pèsent sur un texte pourtant qualifié de nécessaire.

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Sans nous intéresser au détail des dispositions de chacun des trois projets, nous souhaitons mettre en regard certains des principes qui sous-tendent les textes, ainsi que certains points relatifs aux intercommunalités, et le matériau que nous avons recueilli lors des entretiens menés dans les collectivités.

L’esprit général du projet de texte est celui d’une organisation territoriale « à la carte », laissant au niveau local le soin de formaliser la répartition des compétences et les moyens pour y concourir, dans un cadre se voulant régional. Il faut distinguer ce qui relève de la gouvernance territoriale en général (qui concerne l’ensemble des niveaux de collectivités, dont les communautés) des éléments attachés à la gouvernance des communautés.

Sur la gouvernance territoriale en général, le contrepoids de la liberté d’organisation dans le cadre régional est l’obligation de formalisation à travers plusieurs outils : la désignation de chefs de file, l’élaboration de schémas et la mise en place des conférences territoriales de l’action publique (dont la mission première est l’élaboration du pacte de gouvernance territoriale, agrégation des différents schémas sectoriels d’exercice des compétences).

Les communautés ne seraient désignées chefs de file de façon systématique qu’en matière de politiques environnementales (qualité de l’air, mobilité durable), sauf à les positionner chefs de file sur d’autres champs dans le cadre des pactes de gouvernance territoriale.

La question de la représentation des communautés dans les conférences territoriales de l’action publique devient ainsi un enjeu majeur : pour l’heure, seules les communautés de plus de 30 000 habitants sont supposées siéger, ainsi qu’un représentant par département des autres communautés de la région concernée. En parallèle, la loi définit trois strates démographiques permettant aux maires de disposer d’un représentant par département. Cette double représentation du bloc local contient deux écueils :

• Le premier des risques est de brouiller la parole pour un territoire donné, en superposant les visions communales et intercommunales dans une enceinte de négociation où les rapports de force risquent d’être asymétriques (poids des régions et départements, légitimés par leur fonction de chef de file sur plusieurs schémas) ;

• Le second risque est de confiner de nombreuses communautés à l’invisibilité puisqu’elles ne seront représentées ni directement ni indirectement à travers les maires. Certes, la multiplicité des acteurs rend impossible la participation directe de chacun d’entre eux à une enceinte régionale, mais l’esprit de la réforme consistant notamment à conforter le couple Région/groupements à fiscalité propre dans certains domaines aurait sans doute nécessité d’accorder une place plus importante à toutes les communautés dans la gouvernance. Cela donnera le sentiment d’une reconnaissance du fait intercommunal à plusieurs vitesses : favorable aux métropoles, défavorable aux communautés de communes qui sont pourtant, dans les faits, une étape essentielle de la rationalisation administrative en marche dans les territoires ruraux.

Sur la gouvernance des intercommunalités en particulier, le projet de texte prévoit quelques dispositions spécifiques aux communautés, notamment la systématisation des conseils de développement dans toutes les aires urbaines et le renforcement de leur rôle (consultation obligatoire sur les politiques en matière de développement durable des territoires, fonction d’évaluation des politiques publiques, possibilité d’autosaisine sur toutes les politiques de l’EPCI). Ceci devrait permettre d’harmoniser des pratiques dont nous avons pu constater l’hétérogénéité dans le panel que nous avons étudié, où certaines collectivités n’avaient pas créé cette instance quand d’autres avaient mis en place des instances différentes pour associer la société civile aux politiques publiques comme évoqué ci-après.

Ce rapide tour d’horizon laisse augurer un renforcement du niveau communautaire. Deux composantes essentielles de la gouvernance pourraient cependant apparaître a priori comme des freins à l’intégration communautaire, ou tout au moins sont encore en friche : la relation aux citoyens, et la place de l’intercommunalité dans l’écosystème territorial.

Si la reconnaissance du fait intercommunal semble de façon générale en progrès, les communautés sont toujours en quête d’une plus grande légitimité démocratique et d’une relation renforcée au citoyen

Il s’agira probablement d’un point non abordé du nouvel acte de décentralisation, pourtant absolument nécessaire, et ce d’autant que la quête de légitimité est toujours de mise. L’action communautaire souffre encore d’un manque de lisibilité ; les retours d’enquêtes confirment ce sentiment. Plus de 20 ans après la loi ATR 14, la relation au citoyen questionne encore les élus locaux et les modes de faire évoqués peinent trop souvent à évoluer vers un processus abouti et assumé. Derrière ce phénomène, une plus grande légitimité démocratique est pourtant attendue.

14- Loi n° 92-125 du 6 février 1992 relative à l'administration territoriale de la République.

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Le nouveau mode de scrutin des élus communautaires paraît encore de portée limitée compte tenu du choix du fléchage. Des propositions émergeront certainement pour tendre vers un scrutin à l’échelle communautaire de tout ou partie des conseillers communautaires.

a) Toujours en quête de reconnaissance

Contrairement à certaines idées reçues, la reconnaissance du fait intercommunal serait en progrès. Une enquête Médiascopie-La Gazette-MNT 15 dessine une image, nuancée, qu'ont les administrés du bloc local. Si la commune reste l’échelon « favori », l’intercommunalité s’est désormais installée dans le paysage. Les Français ont aujourd’hui conscience des services à la population assurés par l’intercommunalité tels que l’eau ou l’assainissement et relevant pour beaucoup du front office. Alors que les surcoûts liés à la structure intercommunale sont souvent pointés dans plusieurs rapports ou études relatifs à la maîtrise de la dépense publique, l’efficacité des services intercommunaux semble peu contestée.

On remarque aussi que la notion de « métropole » reste la plus mal ressentie après celle d’« État ». Ce constat pose la question du phénomène de métropolisation et de la territorialisation de l’action locale à l’échelle urbaine, à un moment où le projet de loi de décentralisation prévoit de renforcer le pouvoir et les compétences de la métropole.

Toujours dans l’enquête Médiamétrie, les agents intercommunaux en prise directe avec la population (en front office) sont reconnus et appréciés. On pourrait en déduire que la nature et la qualité du service priment sur l’opérateur.

De manière générale, il ressort que l’image et l’identification des structures intercommunales se sont affirmées au cours des vingt dernières années. Aussi, les élus rencontrés sont conscients que « la démonstration passe par le service rendu ».

La capitalisation de l’image dégagée par la communauté relève aussi de l’exercice de communication, avec un volet pédagogique à développer16.

La communauté apparaît ainsi, au fil du temps et de la vulgarisation des outils et des actions, comme l’interlocuteur pertinent et révélateur d’une action locale fiable et rationnelle. Trois domaines de compétence expriment assez bien la situation constatée et le degré divers d’appropriation de l’action communautaire par la population :

• L’exemple des transports en commun comme projet structurant et porteur de cohésion sociale est largement plébiscité. Le déploiement des réseaux de transport en milieu urbain est largement reconnu comme résultant de l’action communautaire. Les agglomérations et les communautés urbaines rencontrées continuent de miser sur le prolongement des infrastructures existantes dans les années à venir.

• A contrario, la politique du logement reste trop diffuse et segmentée pour être reconnue partout comme moteur du projet intercommunal.

• Au même titre, la politique de la ville fait toujours l’objet de débats, qui s’expriment de façon différente d’un territoire à l’autre. Elle n’est pas aisément transférable, les élus communaux étant réticents à son intercommunalisation.

Les élus – peu l’avouent ouvertement – ressentent le besoin d’asseoir encore la légitimité de la communauté. Il convient pour cela de renouveler les modes de communication et d’échanges avec le citoyen. La relation au citoyen/usager/bénéficiaire est à revisiter pour donner à l’intercommunalité la place qu’elle mérite.

b) La co-construction citoyenne reste en pointillé

Les communautés visitées sont peu nombreuses à avoir mis l’accent sur une véritable coproduction citoyenne ou à associer étroitement la société civile à la construction de la décision. Cependant, les propos entendus, soucieux du ressenti citoyen, et quelques initiatives emblématiques montrent une avancée progressive en matière de concertation ; rares sont cependant les pratiques exemplaires qui se traduiraient par une forte résonance citoyenne dans la construction de la décision communautaire.

Affichage, marketing ou réelle participation ? Entre les trois, la frontière est souvent étroite au sein des pratiques rencontrées. Les espaces et les temps de co-construction officialisés et répandus apparaissent insuffisants.

15- Cette enquête s’est déroulée entre le 19 et le 27 septembre 2012. Intitulée « Opinion des Français sur l’échelon local : entre confiance et exigence », elle est publiée notamment sur le site internet de La Gazette des communes (http://www.lagazettedescommunes.com/138874/opinion-des-francais-sur-l’echelon-local-entre-confiance-et-exigence-2/#methode) : « Alors que se profile un nouvel acte de la décentralisation, l’enquête (…) dessine l’image, nuancée, qu’ont les administrés du bloc local. Si la commune reste l’échelon "favori”, l’intercommunalité s’est installée dans le paysage. Surtout, les Français ont aujourd’hui bien conscience des limites d’action de ces collectivités locales.»

16- Voir en complément l’étude AdCF : Représenter l’intercommunalité, enjeux et pratiques de la communication des communautés, 2013.

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Pourtant, les élus locaux sont aujourd’hui nombreux à tenir compte du souhait exprimé par le citoyen/usager d’être associé au processus de construction de la décision. C’est régulièrement le choix du mode de gestion du service public, au-delà de la politique tarifaire, qui préoccupe ce citoyen/usager.

La communauté urbaine de Bordeaux, par exemple, en a fait un des axes forts du mandat avec, notamment, l’organisation de conférences citoyennes. C’est d’ailleurs à travers son conseil de développement durable, instance de débat, de réflexion, de dialogue et de concertation sur les stratégies et projets territoriaux, et plus généralement sur les enjeux économiques, sociaux et environnementaux du développement de l’agglomération, que la participation citoyenne s’exprime et se renouvelle.

Ces instances rattachées aux communautés urbaines sont des relais pour innover, co-construire, et fondent leur manière d’agir sur la base d’une charte de participation. Des panels citoyens et issus de la société civile sont consultés sur divers sujets ou projets.

Certaines communautés d’agglomération ont choisi de reprendre ce modèle de conseil de développement, comme Laval Agglomération où la société civile est consultée sur l’action de la communauté. En milieu rural, les communautés de communes peuvent s’appuyer sur les pays et leurs conseils de développement qui regroupent ces mêmes acteurs de la société civile.

Parmi les structures auditées, la communauté de communes du Pays de Château-Gontier a, dès 2005, associé les élus et représentants de la société civile à l'élaboration de sa stratégie de développement du territoire 2005-2015, en mobilisant ainsi plus de 40 organismes issus des milieux économiques, sociaux, culturels et associatifs constituant le conseil de développement.

Autre pratique expérimentée, celle de Toulouse Métropole qui a adopté une approche par bassin de vie pour la construction de son plan local de l’habitat sous la forme de conférences citoyennes. Le choix de l’habitat apparaît judicieux tant ce domaine de compétence et l’enchevêtrement des dispositifs qui l’accompagnent sont perçus comme abscons par le citoyen.

À Valenciennes Métropole, la participation citoyenne n’est pas le mode de gouvernance privilégié, mais les citoyens sont associés à certains projets : par exemple dans le cadre des projets urbains, à travers la mise en œuvre de programmes de gestion urbaine de proximité.

Les Agendas 21 sont parmi les outils les plus utilisés en termes de participation par les communautés. Au Sicoval, la participation est une démarche récente, qui a véritablement franchi un cap avec la mise en place de l’Agenda 21, entraînant une refonte plus large de la gouvernance de la communauté, en interne et en externe : le champ de la participation comprend des temps de débat sur le développement durable, une mobilisation autour du plan climat, et l’Agenda 21 est issu d’une démarche de concertation très large. Aux dires des services, ce mode de fonctionnement s’est révélé dans un premier temps déstabilisant pour les élus, mais une « culture de la participation » est en construction.

Il convient néanmoins d’anticiper les déceptions et la frustration que peut entraîner ce type de démarche. L’exemple de la gestion de l’eau a fréquemment été cité par les élus au cours des entretiens. On bascule vite dans la confrontation idéologique ou l’instrumentalisation, à défaut d’une réflexion basée sur les critères de gestion. Reconnaissons néanmoins que la technicité nécessaire à la compréhension des enjeux relève parfois de l’exégèse. Les élus métropolitains audités ont parfois fait référence à la technostructure et à la nécessité de reprendre politiquement la main sur les dossiers.

L’articulation avec les travaux en commissions thématiques est peu lisible voire occultée. Les commissions restent avant tout des lieux de discussion et d’échanges entre élus. Trop peu souvent, la confrontation citoyenne est avancée comme un gage de démocratie locale performante.

Pourtant, la demande de transparence et de clarification est souvent rappelée par les interlocuteurs audités. Dans le cadre des discussions autour du projet de loi sur la décentralisation, il est prévu « la consultation des conseils de communauté sur les documents de prospective et de planification, sur l’élaboration et l’évaluation des politiques publiques visant au développement des territoires ».

La possibilité, pour cette instance, de s’autosaisir tout en étant assurée d’obtenir par la communauté les moyens nécessaires à son fonctionnement figurait dans la première version du texte. Quelle suite sera réservée à cet objectif ? La réponse apportée dans le texte définitif sera révélatrice du volontarisme politique en la matière.

L’intercommunalité ambitionne de devenir un acteur renforcé dans l’écosystème territorial

Le rôle de l’intercommunalité dans le renforcement de la solidarité territoriale n’est plus discuté au sein du bloc local. À la veille d’un renforcement de la décentralisation, la place de la communauté dans l’écosystème territorial est cependant toujours discutée. Aussi, il apparaît intéressant de mettre en perspective les sentiments des acteurs rencontrés avec les grandes orientations du projet de loi.

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a) Une affirmation grandissante et non dissimulée

Si toutes les communautés visitées se présentent comme des acteurs qui s’affranchissent de plus en plus de leurs communes membres pour tisser de nouveaux liens, les nouvelles formes de solidarité présentées semblent particulièrement conditionnées par le concept de « métropolisation ».

Ce phénomène dépasse le cadre institutionnel prévu par le premier texte de l’Acte 3, qui modifie le statut des métropoles. Pour certaines intercommunalités, il s’agit surtout de s’inscrire dans un processus structurant dépassant l’échelle de l’agglomération existante et le périmètre reconnu par la loi, et d’envisager de nouvelles formes de partenariat et de coopération urbaine.

FOCUS : Saint-Malo Agglomération

« Une intercommunalité et son réseau » Si le territoire de l’agglomération ne se prête pas à la création d’une métropole ou d’un pôle métropolitain, Saint-Malo Agglomération s’inscrit pour autant dans un système. Pour son président, il est indispensable de travailler en réseau avec Rennes Métropole (notamment avec la technopole Rennes Atalante), le département (contrat de territoire), la Région et les services déconcentrés de l’État. Grâce à ce réseau, Saint-Malo a développé son accessibilité depuis Rennes (2x2 voies) et Paris (TGV), conditions indispensables à son développement. Notamment dans les compétences fortes de la communauté (développement économique et enseignement supérieur), la conduite des projets doit ainsi « dépasser le périmètre géographique de l’agglomération ».

Au-delà du réseau, pour le président, le moteur le plus fort de l’intégration communautaire reste les « succès communs » : c’est-à-dire « des projets structurants avec un financement maîtrisé ». Une intercommunalité prospère sera d’autant plus attractive pour les communes ; leur investissement politique, financier et technique y sera plus important et elles seront plus promptes à participer aux projets communautaires. Une agglomération plus intégrée pèsera également davantage dans son environnement et pourra être chef de file de son réseau ou s’inscrire facilement dans les réseaux existants.

Versailles Grand Parc donne un premier exemple de l’émergence des intercommunalités comme interlocuteurs identifiés en lieu et place des communes. Ainsi, s’agissant de son positionnement dans le cadre du projet Paris-Saclay, c’est elle qui se situe en première ligne et attire l’attention sur la nécessité de ménager les communes. Le Sicoval, quant à lui, participe au syndicat mixte de révision du Scot de la grande agglomération toulousaine ainsi qu’au plan campus de Toulouse.

Le poids pris par les intercommunalités, couplé à leur légitimité à être reconnues par l’État comme interlocuteurs privilégiés, est susceptible de générer des concurrences nouvelles avec d’autres niveaux d’administration. Tel est le point de vue des élus toulousains qui estiment qu’une certaine forme de concurrence ou de rivalité oppose le département à la communauté urbaine de Toulouse Métropole. Toutefois, une telle rivalité existait auparavant entre la ville de Toulouse et le département ; elle s’est en quelque sorte déplacée depuis la ville centre vers la communauté avec le transfert de compétences enchevêtrées avec celles du département (voirie, transports, réseaux…).

Le phénomène de métropolisation et les nouvelles formes de coopération qu’il génère semblent relancer des concurrences. Le cas de Lyon paraît assez exemplaire de ce point de vue et révèle l’étendue du potentiel de l’intercommunalité.

En tout état de cause, l’intercommunalité tient une place clé dans ce nouveau processus de décentralisation ; reste à savoir si les moyens déployés et les accords trouvés seront à la hauteur des espérances locales.

b) Le fait urbain en voie d’être consacré

Les dynamiques urbaines s’imposent à la fois comme moteur de l’activité économique et comme interlocuteur privilégié dans la gouvernance locale et le pilotage des politiques publiques. Pour le législateur, l’urbain et l’urbanisation sont des enjeux prioritaires. Ce processus institutionnel s’inscrit dans une logique de concurrence internationale entre grandes villes.

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Dans son dernier ouvrage17, Pierre Veltz décrit le phénomène et affirme que les concentrations de compétences et de ressources dans les grands pôles urbains sont à l’origine des initiatives les plus fécondes. Il préconise la mise en réseau et la coopération à de grandes échelles pour favoriser l’insertion dans l’économie mondialisée ; il parle de coopétition pour penser l’aménagement du territoire et contourner les concurrences de proximité économiquement néfastes.

La métropolisation devrait donc trouver une nouvelle expression institutionnelle avec la modification du statut juridique de la métropole. Des dispositions spécifiques pour Paris, Lyon et Aix-Marseille s’ajouteraient à celles prévues pour les métropoles de droit commun.

Un possible appel à compétences auprès de l’État, de la Région ou du département donnerait à ces entités les pleins pouvoirs tant dans l’action que dans la gouvernance.

Si le phénomène n’est pas contesté par les élus rencontrés, l’inquiétude est de mise, et ce à double titre.

En premier lieu, l’attractivité grandissante des aires urbaines fait craindre aux élus ruraux un déséquilibre profond du maillage territorial. Le rapport à la métropole est interrogé. L’option du « pôle métropolitain » est avancée dans plusieurs configurations locales sans pour autant être définie et arrêtée à la date d’aujourd’hui. Peuvent être cités Saint-Malo Agglomération, Valenciennes Métropole, le Sicoval, et plus encore la CAPI qui a d’ores et déjà adhéré au pôle métropolitain du G4 avec le Grand Lyon, Saint-Étienne Métropole et ViennAgglo.

Cette relation avec le « grand voisin » peut être vécue comme contrainte au regard des projections démographiques qui semblent défavorables aux communautés « périphériques », mais les élus locaux souhaitent poser les conditions de cette nouvelle collaboration. C’est la raison pour laquelle ces relations pourraient se formaliser par de simples conventionnements comme cela existe déjà dans certains cas (exemple des transports entre le Sicoval et Toulouse Métropole). L’émergence de cette prégnance urbaine pourrait aussi avoir pour effet de renforcer la solidarité infra-communautaire, nécessaire pour continuer à exister selon nos interlocuteurs.

Vu du côté de la métropole, ce leadership officialisé est pleinement assumé ; mais le défi se mesure à l’aune de la complexité et des attentes qui accompagnent cette transformation. La relation à la périphérie est un enjeu majeur. La politique de la métropole est marquée par une logique de territoires. Le droit d’initiative des territoires est préservé.

Le pôle métropolitain est souvent envisagé (cf. Toulouse Métropole) comme la possibilité de créer un système souple permettant de constituer un réseau impliquant les intercommunalités qui gravitent autour de celle où siège la ville centre leader, comme Toulouse qui emporterait dans son sillage métropolitain les intercommunalités constituées autour d’Albi, Montauban, Castres et Auch. À l’heure actuelle, Toulouse Métropole est membre, au côté de ces intercommunalités, de l’Association pour le dialogue métropolitain dont l’esprit est proche de celui du pôle métropolitain.

C’est dans cet esprit que la communauté d’agglomération de Reims Métropole et les neuf autres structures avec lesquelles elle s’était associée au sein du G10 ont mis en place un pôle métropolitain, dans un objectif de recherche d’équilibre et de complémentarité avec le bassin parisien.

Les mouvements qui se dessinent donnent à voir des phénomènes d’entraînement allant au-delà des intercommunalités concernées mais ignorant les territoires éloignés des locomotives régionales (territoires ruraux ou éloignés des pôles métropolitains en réflexion : Château-Gontier, Laval, Sarlat).

Cette ambition se traduit également par une territorialisation de l’action communautaire à Bordeaux comme à Toulouse Métropole. La CUB a ainsi créé une société publique locale, la Fabrique métropolitaine, pour conduire son action en matière d’habitat à l’échelle des quartiers, un moyen pour rapprocher la technostructure des problématiques de terrain.

Ce projet de redéploiement des services ne peut être envisagé sans un projet d’administration réussi. Dans les deux cas, ces évolutions administratives sont récentes et la période actuelle est plutôt à l’expérimentation et à l’assimilation. Il faut aussi retenir que les maires y voient un moyen d’appropriation et de contrôle des outils intercommunaux. Une contractualisation avec les communes encadre les objectifs et les moyens déployés, comme à la CUB avec les contrats de co-développement.

Au travers de ces illustrations, se dessine clairement l’émergence d’un double mouvement infra- communautaire et extra-communautaire qui risque d’orienter les rapports de force pour les années à venir.

b) L’enjeu de la gouvernance territoriale

L’enjeu majeur de la place des communautés dans les futures conférences territoriales de l’action publique est abordé sans détour. L’élaboration d’un pacte de gouvernance territoriale, réintitulé « convention territoriale d’exercice concerté d’une compétence » par l’Assemblée nationale, est prévue dans le projet de loi de décentralisation et de réforme de l’action publique. La création de cet espace de concertation entre les différents échelons territoriaux laisse entrevoir un dialogue renouvelé entre collectivités. Alors

17- Thomas Paris et Pierre Veltz, L'économie de la connaissance et ses territoires, Hermann, 2010

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que ce même projet prévoit de redonner la clause générale de compétence au département et à la région, l’EPCI à fiscalité propre devra continuer à s’affirmer et trouver sa place dans les schémas régionaux ou départementaux sectoriels, prescriptifs ou non.

Les élus rencontrés anticipent déjà cette configuration et estiment devoir être mieux entendus que par le passé.

La conjonction des volontés politiques avec un couple Région/communauté renforcé est de plus en plus déterminante.

La plupart des dirigeants locaux rencontrés ont exprimé l’idée selon laquelle leurs communautés sont devenues des interlocuteurs privilégiés de l’État (comme Valenciennes Métropole pour ce qui concerne le Feder et le Fonds de cohésion sociale, et Versailles Grand Parc s’agissant des contrats de projets).

Les intercommunalités sont ainsi impliquées dans de nombreuses démarches de contractualisation tant avec l’État qu’avec les autres niveaux d’administration. Ainsi les communautés d’Ille-et-Vilaine ou de Dordogne ont fait état des relations privilégiées entretenues avec leurs départements respectifs, qui ont conclu avec elles des contrats de territoire pour organiser la répartition de leurs interventions financières.

Plusieurs présidents considèrent depuis des années la structure intercommunale comme l’interlocuteur référent des cofinanceurs publics : l’Europe, la région ou le département.

La communauté de communes de la région de Saverne a pour sa part conventionné avec la région Alsace. D’autres comme le Sicoval ou Montfort Communauté ont contractualisé avec le département. En matière de fonds européens, la communauté d’agglomération Périgourdine se définit comme le territoire idoine pour porter les projets reconnus comme structurants par Bruxelles. À travers ces propos, les présidents de communauté font du territoire intercommunal l’échelon pertinent, celui qui permet une réflexion au niveau du bassin de vie ou d’emploi. En milieu rural, comme au sein de la communauté de communes de Sarlat - Périgord Noir, c’est la place accordée au pays et la concertation au travers de celui-ci qui doivent être prises en compte.

La représentativité des petites structures préoccupe aussi les élus ruraux qui redoutent que celles-ci ne soient les grandes oubliées de la redéfinition du paysage local. Pour beaucoup, la relation avec le département et le soutien apporté par ce dernier sont souvent décisifs.

À Château-Gontier, par exemple, tous sont convaincus que pour ne pas disparaître, il faut se regrouper, se diriger vers « une super-commune ».

Ainsi les intercommunalités organisent couramment des coopérations de voisinage, à l’instar des deux communautés littorales que sont Saint-Malo Agglomération et la communauté de communes Côte d’Émeraude, qui organisent entre elles des coopérations en matière de transport, d’habitat et de haut débit. Elles tiennent compte des habitudes de vie des habitants de leurs communes les plus excentrées qui relèvent souvent de bassins de vie ou d’emploi allant au-delà des limites de l’intercommunalité. La construction de solidarités locales passe ainsi parfois, comme à la communauté urbaine de Bordeaux, par le maintien d’outils de types Sivom et Sivu avec des groupements ou communes limitrophes pour faire face à des besoins locaux, ou par le portage de repas aux habitants de Villeneuve-Tolosane à la communauté urbaine de Toulouse Métropole.

On constate donc la présence d’une gouvernance territoriale à géométrie variable avec des relations entre échelons plus ou moins abouties et contractualisées. La taille du groupement et proportionnellement sa puissance financière en font ou pas un acteur incontournable pour les autres collectivités. Une règle de proportionnalité largement constatée, qui devrait perdurer.

Mais c’est la représentation au sein de la commission départementale de coopération intercommunale, dont le pouvoir est renforcé depuis la loi RCT de 2010, ou dans le cadre de la future conférence territoriale de l’action publique qui préoccupe les élus. Ces derniers veulent désormais peser dans le redécoupage territorial au même titre que le département.

Finalement, la relation à l’État, si elle n’est pas complètement distendue, est devenue incertaine et compliquée. Dans un nouveau schéma de gouvernance, l’État continue à se poser comme arbitre et prescripteur sans pour autant avoir toujours les moyens de le faire. L’ingénierie communautaire marque en creux l’affaiblissement d’un savoir-faire étatique. Désormais, l’intercommunalité est parfois plus encline à construire un partenariat durable et stable avec la région ou le département qu’avec l’État, notamment quand ceux-ci ont mis en place des dispositifs ad hoc (par exemple en Ille-et-Vilaine, la politique de soutien aux territoires, formalisée dans des « contrats de territoire », a été un moteur reconnu de l’intercommunalité18).

18- Cf. Bernard Perrin, « Contrats de territoire et dotations globales de développement intercommunal en Ille-et-Vilaine » in La coopération intercommunale, Berger-Levrault, 2005, p. 412.

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À retenir :

• Le dépassement des logiques communales est un objectif fort de gouvernance, partagé par les acteurs rencontrés. Néanmoins, le réflexe communal demeure vivace. Ainsi, la prédominance des maires est toujours vérifiable quoiqu’elle décroisse à proportion de la maturité intercommunale ;

• Cependant, le leadership des maires au sein des instances intercommunales est de plus en plus assis sur leur capacité à porter les projets communautaires plutôt que sur le surcroît de légitimité démocratique que leur concèderait le poids démographique de la population qu’ils représentent ;

• La gouvernance communautaire demeure guidée par la culture du consensus qui participe à la montée en puissance d’élus intercommunaux, à l’apaisement des relations ville centre/communes périphériques et à la faible politisation des instances communautaires ;

• Toutefois, la décision communautaire au consensus cache, derrière l’apparente simplicité de la prise de décision, un important travail amont de réflexion, de négociation, de concertation et de régulation très mobilisateur des acteurs de l’intercommunalité (élus et agents) ;

• En effet, les rapports de force pèsent sur la gouvernance communautaire. Or ces rapports de force sont en cours d’évolution à la faveur des récentes réformes législatives qui impactent les périmètres terri-toriaux en revisitant les SDCI et en modifiant la répartition des sièges et le nombre de vice-présidents. En outre, la nouvelle réforme des modes de scrutin, qui trouvera son expression lors des prochaines élections, ainsi que le nouvel acte de décentralisation en cours d’élaboration laissent présager le renou-vellement des équilibres ;

• La réforme qui se profile laisse entrevoir une tendance lourde à la concentration du pouvoir. Elle semble asseoir une reconnaissance du fait intercommunal à plusieurs vitesses sans garantir toutefois une visibi-lité et une lisibilité suffisantes pour construire la nécessaire relation communauté-usager/citoyen ;

• La place des communautés dans l’écosystème territorial est encore discutée. Celles-ci s’inscrivent néan-moins dans des processus structurants et développent des formes nouvelles de solidarité infra, supra voire extra-communautaire ;

• Le phénomène de métropolisation est propice à l’affermissement du fait intercommunal mais induit de nouvelles concurrences territoriales ;

• On constate une gouvernance à géométrie variable avec des relations entre échelons plus ou moins abouties, des relations à l’État plus ou moins distendues. Ces relations sont toujours fortement condi-tionnées à la taille de la communauté et à sa puissance financière.

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Partie II

Rationalisation des compétences :

une relation de confiance

à renouveler ?

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II - Rationalisation des compétences : une relation de confiance à renouveler ?

Les responsables politiques et administratifs rencontrés ont unanimement exposé que la construction intercommunale résultait du constat des limites de l’action communale et de la volonté politique d’apporter une réponse à des besoins locaux qui, sans elle, ne pourraient être satisfaits. Ainsi l’intercommunalité participe à corriger des effets de seuils de population et l’imparfaite répartition des moyens pour améliorer localement les services publics.

Dès l’origine des communautés, les questions de la répartition des compétences et de l’organisation de leur exercice ont animé la réflexion au sein du bloc communal. Aussi, la notion d’intérêt communautaire a pu cristalliser le débat ; néanmoins, cette question apparaît de moins en moins cruciale car, à la faveur de la montée en puissance de l’intercommunalité, les acteurs locaux ont éprouvé des solutions pragmatiques pour déterminer qui fait quoi et comment.

2.1 - L’intérêt communautaire a moins servi à tracer ex ante la carte rationnelle d’un partage des compétences, qu’à enregistrer pragmatiquement les besoins avérés d’action communautaireL’évolution de perception de la notion d’intérêt communautaire accompagne la reconnaissance de la légitimité à agir des intercommunalités.

En 2005, l’intérêt communautaire était perçu comme un objet technique, « rationnel » de partage des compétences, et le débat sur sa définition semblait encore prégnant

Comme le soulignait la précédente étude de 2005, la loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale manifestait la volonté de faire de l’intérêt communautaire l’élément fondateur de la répartition des compétences, sur la base des principes de spécialité et d’exclusivité.

Deux modes de définition rationnels de cet intérêt communautaire par les communautés pouvaient alors être observés : définition par l’établissement de listes des compétences ou par l’adoption de critères quantitatifs ou qualitatifs.

Pour autant, l’étude relevait déjà la grande diversité des situations sur le terrain tant en termes de nombre de compétences transférées que de champs couverts par ces transferts.

Elle notait aussi, aux côtés des critères objectifs de définition de l’intérêt communautaire précités, le poids de critères plus circonstanciels comme l’illustre, par exemple, le cas de Valenciennes Métropole et son rôle pionnier dévolu en matière de renouvellement urbain, sous la houlette de son président à l’époque ministre de la Cohésion sociale.

Elle soulignait enfin que l’intérêt communautaire n’était pas en lui-même garant de l’absence de chevauchements ou d’opacités de fonctionnement.

Aujourd’hui, l’approche en matière de définition de l’intérêt communautaire se veut avant tout pragmatique

À cet égard, l’intérêt communautaire n’est résolument plus appréhendé comme un « contenant » permettant de définir un projet de territoire, mais comme la justification des actions mises en œuvre par la communauté, et la liste des compétences précédemment évoquée ressemble de plus en plus à un inventaire à la Prévert s’allongeant au fil des projets.

C’est notamment le cas à Saint-Malo Agglomération ou à la communauté de communes de la région de Saverne, bien qu’un effort de rationalisation des compétences vienne d’y être entrepris. De son côté, la communauté de communes du Pays de Château-Gontier ne s’est pas dotée d’une définition précise de l’intérêt communautaire.

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Enfin, la communauté d’agglomération Laval Agglomération a souhaité conserver la définition la plus souple possible lui permettant de s’adapter facilement aux nouveaux besoins exprimés.

L’intérêt communautaire se révèle donc aujourd’hui un concept de faible portée politique, mais possédant pour autant la vertu de permettre, de manière souple, l’adaptation in itinere du projet communautaire. On peut citer à titre d’illustration le cas de Valenciennes Métropole où l’intérêt communautaire, d’abord très vague, a été défini plus précisément au fur et à mesure que les besoins de rationalisation se sont fait sentir.

Par cette souplesse qu’elles ont su préserver, les intercommunalités apparaissent comme un creuset d'expérimentation du partage des compétences. Leurs expériences en la matière fournissent aujourd’hui autant d’exemples qui ne manqueront pas d’intéresser les collectivités locales qui viendraient à ouvrir le dialogue sur la rationalisation de l’exercice de leurs compétences sur un même territoire.

La communauté est perçue à la fois comme l’échelon de la stratégie mais aussi comme le financeur de services trop lourds à porter par les seules communes

En premier lieu, la communauté est souvent perçue comme l’échelon porteur de la stratégie du territoire. Ainsi Valenciennes Métropole où la communauté est avant tout une « technostructure » de projet et d’ingénierie composée quasi exclusivement de cadres A. C’est aussi dans le cadre intercommunal que s’élabore une vision partagée et structurante du territoire dans sa globalité : c’est suite à un séminaire en 2010 que de grandes orientations stratégiques pour le Valenciennois ont été définies, qui donnent le cap à un programme pluriannuel pour l’agglomération sur ses domaines de compétences et en complémentarité avec les communes.

En second lieu, la communauté est fréquemment reconnue légitime à assumer les services structurants de type réseaux dont l’intérêt communautaire peut facilement être établi : c’est le cas notamment à la communauté de communes de la région de Saverne s’agissant des transports.

Ces positionnements des administrations communautaires ne sont d’ailleurs pas toujours bien vécus par les communes qui se plaignent de faire les frais de cette distinction entre « diseux » et « faiseux », ou entre les « stratèges » et les « petites mains ». Certaines communes vivent difficilement cette hiérarchisation des rôles dans laquelle elles perçoivent une forme de tutelle technique.

Cependant, le principe qui s’affirme aujourd’hui avant tout est bien moins celui d’une quelconque tentation hégémonique de l’administration communautaire que celui de la subsidiarité, fruit du constat réaliste et partagé que la seule capacité financière des communes ne peut plus aujourd’hui couvrir les besoins en équipements structurants du territoire.

On peut citer à cet égard le cas de Château-Gontier et du réseau de garderies accompagné par la communauté, celui de Montfort Communauté avec la petite enfance, ou encore celui de Nîmes et de la construction par l’agglomération d’une salle de musiques actuelles unique sur le territoire, apportant tout au long de l’année une offre culturelle continue jusqu’alors inédite. C’est également souvent le cas avec la compétence voirie en milieu rural (exemple de la communauté de communes de Sarlat - Périgord Noir).

De ces choix stratégiques découlent des modes organisationnels et managériaux aujourd’hui confirmés par la pratique, mais qui demeurent néanmoins questionnés quant à leur pertinence à l’échelle du bloc local et à sa réorganisation à venir.

2.2 - Les modalités organisationnelles et managériales au niveau communautaire se sont formalisées depuis 2005Les pistes de facilitation des collaborations qui émergeaient en 2005 telles que les mutualisations, la territorialisation de l’exercice des compétences ou encore la répartition des savoir-faire entre les différents niveaux, se sont aujourd’hui concrètement mises en place.

Ce faisant, ces modalités organisationnelles et managériales sont multiples, au point qu’il n’est pas possible d’affirmer que la construction d’une communauté intégrée se fasse selon un processus linéaire transposable à d’autres territoires. Si on ne peut observer de modèle type d’administration communautaire intégrée, on constate cependant que les structures administratives ont été adaptées aux exigences de chaque communauté pour tenir compte de leurs équilibres politiques et mettre en œuvre les différentes compétences transférées, et sont d’ailleurs encore en évolution. Mais ces évolutions se font toujours en cohérence avec l’axe de développement qui correspond à chaque intercommunalité, comme le montrent les exemples à suivre. En somme, les pratiques organisationnelles et managériales sont l’illustration de l’adaptabilité des collectivités communales lorsqu’elles doivent trouver des solutions locales sur mesure.

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Un trait commun subsiste néanmoins : les intercommunalités sont, partout, un lieu de partage des expériences et des savoir-faire, non seulement par les élus (comme cela a déjà été dit), mais aussi par les administrations. On retrouve ainsi, par effet de transfert, le même bénéfice du rapprochement entre communes au niveau des élus et entre fonctionnaires.

Parée initialement de vertus qui apparaissent aujourd’hui excessives, la mutualisation se révèle un instrument de rationalisation de l’organisation plus délicat d’usage qu’il n’y paraissait. De plus, elle reste souvent l’apanage des services de la communauté et de la ville centre. Dès lors, la territorialisation, parce qu’elle raisonne « à l’inverse » – en partant des besoins de l’ensemble du territoire –, apparaît comme un élément d’équilibre particulièrement pertinent.

La poursuite des logiques de mutualisation et de territorialisation rend les administrations communautaires d’aujourd’hui très différentes de celles de 2005

Dans la logique du rapport Lambert – pour qui la mutualisation était à l’administration ce que la dame est aux échecs (« sans être formellement obligé de s’en servir, on ne peut valablement espérer atteindre ses objectifs sans elle ») –, la mutualisation a fait l’objet de nombreuses incitations jusqu’à celles contenues dans la loi RCT que sont les « rapports sur l’état de la mutualisation ».

Mutualisation et territorialisation apparaissent aujourd’hui comme les maîtres mots de l'intégration communautaire, bien que recouvrant des réalités dissemblables et répondant à des objectifs divers.

Le premier constat en matière de mutualisation est d’abord celui d’un changement sémantique : lorsque les acteurs de l’intercommunalité parlent de mutualisation, ils parlent dorénavant plus spécifiquement de la mutualisation des services, le plus souvent entre la ville centre et l’intercommunalité. Il semble donc que la logique de mutualisation – au sens de mise en commun des moyens en vue de l’exercice des compétences  – ait été pleinement intégrée à la réflexion sur le partage de ces compétences entre les communes et la communauté.

Lorsqu’on parle de mutualisation, on évoquerait donc à présent un degré supplémentaire d’intégration communautaire, celui qui consiste en des mises en commun (ou bien souvent des mises à disposition) de services agissant tour à tour pour la communauté ou pour la ville centre (aucun exemple de mutualisation de ce type n’a encore été constaté avec une ville autre que la ville centre)19.

Les communautés du panel étudié ont recouru à des degrés de mutualisation très divers, mais toujours et avant tout entre les services de la ville centre et de la communauté.

Dans tous les cas, cette mutualisation correspond à un mouvement de mise en cohérence des projets et des orientations entre la collectivité principale et l’intercommunalité. Elle renforce l’assimilation ville centre/communauté, la première devenant peu à peu un objet communautaire tandis que, en conséquence, son emprise sur la conduite des affaires de la communauté s’affermit. Il est d’ailleurs intéressant de constater que les deux communautés du panel qui ont atteint le degré le plus avancé de mutualisation (Reims Métropole et Toulouse Métropole) ont amorcé ce changement à la suite de l’alternance politique de la ville centre, comme pour affirmer la plus grande cohérence de vue et de direction des deux entités.

C’est une même volonté de cohérence qui a conduit à la mutualisation du directeur général des services entre la ville de Saverne et la communauté de communes, afin que ces administrations fonctionnent en meilleure articulation. Cette mutualisation était d’autant plus importante que le maire de Saverne n’est pas le président de la communauté de communes.

La proximité entre la ville centre et l’agglomération est également très importante à Versailles Grand Parc où toutes les fonctions support (ressources humaines, finances, moyens généraux…) sont mutualisées, et ce depuis les services de la ville de Versailles. La précision est d’importance, puisque la constitution des services ressources de l’agglomération a été faite à partir de ceux de la ville centre : contrairement à d’autres communautés, les deux administrations n’ont pas cohabité un temps avant de fusionner. L’exemple témoigne du lien logique entre la proximité ville centre/communauté et le degré de mutualisation.

Cette mutualisation doit donc impérativement répondre à des conditions de taille critique de la ville centre au sein de l’EPCI, afin de garantir la pérennité de ces fusions de services qui ne saurait survivre à un dédoublement des exécutifs.

À défaut, on assiste à un mouvement de balancier entre mutualisation et séparation des services, à l’instar de Brest (qui ne figurait pas dans le panel interrogé), où la question du rapport à la ville centre des services de la communauté est l’objet d’arbitrages qui passent nécessairement par des gages donnés aux communes périphériques et donc par une mutualisation contenue.

19- Voir en complément l’étude AdCF-INET, La mutualisation des services : un enjeu d’intégration intercommunale, mai 2011 – disponible en ligne : www.adcf.org.

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On peut relever, à cet égard, l’importance pour la mutualisation – et au-delà du choix d’organisation formulé par les élus – de la figure du dirigeant territorial. Investi de la confiance de l’exécutif, il peut souhaiter diriger seul deux administrations qu’il maintient distinctes, ce qui le place en position d’interface unique et incontournable, ou qu’il fusionne (comme ce fut le cas à Nîmes Métropole) en constituant une équipe stratégique unique.

À la communauté de communes de Sarlat - Périgord Noir, le directeur général des services, la directrice des ressources humaines et le directeur des finances de la ville centre ont un emploi du temps partagé avec la communauté. Il s’agit davantage d’une mise à disposition de compétences que d’une mutualisation de services, le maire de la ville centre et le président de la communauté ne faisant qu’un. Dans cette configuration, le leadership politique et la maîtrise des dossiers transparaissent à la lecture de l’organisation managériale. Les autres élus y voient pour leur part une économie d’échelle avérée et un réel appui technique.

Quel que soit le choix fait, celui-ci n’est jamais la simple traduction d’une commande politique mais le reflet d’un mode de management et d’une légitimité qui peut évoluer dans le temps et reste tributaire de la confiance de l’exécutif. Après avoir connu une direction générale mutualisée autour d’un DGS unique, Nîmes Métropole a souhaité dédoubler cette fonction.

Ainsi, la question de la mutualisation qui se posait en 2005 pour certaines agglomérations semble aujourd’hui s’être restreinte pour concerner plus spécifiquement les communautés en situation de présenter une unité de vue entre leur ville centre et l’échelon communautaire.

Par ailleurs, la mutualisation a pu, dans certains cas, s’avérer problématique. Ainsi, son coût social a parfois été élevé (comme l’illustrent les tensions toujours perceptibles laissées par la mutualisation à Reims, qui exigent encore aujourd’hui une attention toute particulière de la part de la direction générale). En outre, ses bénéfices financiers ne sembleraient pas immédiats et automatiques. Il semble pour l’heure difficile d’identifier ces bénéfices à long terme, qui souvent consistent davantage en une hausse de la qualité du service qu’en une baisse effective des coûts. Si cette hausse de la qualité se situe incontestablement au niveau stratégique, où la logique de concentration et d’acquisition d’expertise a été bénéfique, elle est plus volontiers discutée au niveau de la mise en œuvre des compétences transférées à la communauté (mais, si l’on se réfère à la distinction opérée précédemment, on se situe ici davantage dans une logique de transfert de compétences que de mutualisation).

Enfin, la mutualisation est susceptible, dans une certaine mesure, de raviver le spectre de la domination de la ville centre. Des stratégies sont donc élaborées pour éviter cet écueil : ainsi à Versailles Grand Parc, le management insiste pour que les services mutualisés se présentent toujours comme tels lorsqu’ils traitent de questions communautaires en lien avec les communes, afin d’éviter de donner l’impression que la ville centre est pleinement le support de l’intercommunalité.

Dans ce contexte, la territorialisation peut apparaître comme un complément pertinent à la mutualisation : à Toulouse Métropole, la territorialisation de certaines compétences a été faite selon un découpage qui morcelle la ville centre en associant, dans un même secteur, des quartiers de celle-ci avec des communes périphériques.

À ce titre, il est intéressant de constater que la territorialisation des compétences est utilisée de la même manière à la communauté urbaine de Bordeaux, pour rapprocher et faciliter la collaboration entre les services communautaires et ceux des communes membres en l’absence de toute mutualisation. Il s’agit aussi, en l’occurrence, d’une réponse politique rapprochant certains services communautaires de proximité de la décision de l’élu municipal.

Ce besoin de dissocier la ville centre et la communauté n’est apparu à Toulouse Métropole que consécutivement à la mutualisation, et – les mêmes causes produisant les mêmes effets – la territorialisation répond à ce besoin en subdivisant la ville centre pour l’action des services communautaires.

Pour autant, on constate l’absence de modèle type d’administration communautaire

En 2005, les complémentarités entre les niveaux communal et intercommunal en matière de compétences semblaient complexifier les interventions, et la question de la définition de l’intérêt communautaire apparaissait décisive. Aujourd’hui, il semble que la lisibilité des compétences se soit accrue, signe de la maturation des collaborations, et les personnes rencontrées dans le cadre de cette étude ne sont que peu nombreuses à déplorer des doublons ou des zones vides dans la répartition des missions entre les deux niveaux.

Pour autant, et cela a déjà commencé à transparaître sur la question de la mutualisation des services, il n’y a pas de modèle type d’administration communautaire, mais plusieurs modes de fonctionnement (des plateformes de services, de l’assistance aux communes, jusqu’à divers degrés de mutualisation des services). On constate d’ailleurs que, contrairement à l’idée selon laquelle l’intégration intercommunale

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serait un gradient à une seule dimension, du moins collaboratif vers le plus intégré, les communautés ont développé les modes d’organisation qui correspondent le mieux à leur histoire et aux équilibres politiques du territoire.

Ainsi, Laval Agglomération fait état d’un niveau très réduit de mutualisation de ses services avec la ville centre, mais les deux administrations opèrent néanmoins des collaborations poussées par le biais de conventions de prestations de services : la ville facture certaines prestations à l’agglomération comme l’entretien du stade par exemple, et vice-versa.

À la communauté de communes du Pays de Château-Gontier, la mutualisation des services avec la ville centre est plus développée puisque non seulement la direction générale, la communication, le cabinet et les services support classiques (finances, ressources humaines et systèmes d’information) sont mutualisés, mais certains services en charge de politiques publiques sont aussi mutualisés dans des proportions plus ou moins importantes (développement, action culturelle, animation et loisirs, patrimoine et cadre de vie ainsi que solidarités sont les secteurs concernés). Les dirigeants de cette communauté affichent le souhait de développer la coopération avec les services d’autres communes membres et ne s’interdisent pas d’imaginer, à terme, la mutualisation des services des autres communes membres avec celui de la communauté, ce qui n’empêche pas cette dernière d’appuyer d’ores et déjà les initiatives locales de coopération à une échelle infra-communautaire et de favoriser le travail en réseau informel entre les services municipaux des diverses communes membres et les services partagés de la ville centre et de l’intercommunalité.

FOCUS : communauté de communes du Pays de Château-Gontier

« Favoriser les coopérations et solidarités locales »

Ainsi, l’intercommunalité favorise l’émergence de « pôles relais » : il s’agit de communes qui, compte tenu de leur démographie, de leur rayonnement et de leur accessibilité, sont identifiées comme des territoires pertinents pour l’implantation de services de proximité. Dans ce cadre, la communauté apporte son appui technique et financier aux initiatives prises par plusieurs communes, dont celle identifiée comme pôle relais, car les services structurés sur le territoire de cette dernière ont voca-tion à bénéficier aux habitants des communes voisines également mobilisées.

À une autre échelle, le Grand Lyon (qui ne se situe pas dans notre panel) porte actuellement un projet ambitieux de plateforme de services aux communes, confirmant le rôle d’expertise souvent reconnu aux intercommunalités et sur lequel on reviendra.

Dès lors, force est de constater que les deux outils juridiques que sont la clause de compétence générale et la liberté contractuelle des communes ont permis de pallier la rigidité statutaire des communautés et de définir, selon les territoires, des modes de collaboration et de mutualisation innovants. À ce titre, le fonctionnement intercommunal a de fait perdu en lisibilité générale puisqu’il n’est pas possible d’appliquer une seule grille de lecture pour le décrypter.

Les expériences menées ces quatorze dernières années prouvent que les modèles de collaboration n’attendent pas la taille et le statut de l’EPCI : de la communauté urbaine de Bordeaux et son rapport complexe à la ville centre aux méthodes de collaboration renforcées de la communauté de communes du Pays de Château-Gontier, les modes d’organisation se forgent au regard des nécessités et des contextes.

Mais l’intercommunalité est devenue un lieu de partage d’expériences et de savoir-faire

Certains traits restent toutefois communs à toutes les intercommunalités, et le sujet de l’expertise communautaire en fait partie. Celle-ci semble avoir remplacé la crainte de « technocratie » communautaire qui a pu exister au commencement des collaborations intercommunales, et ce d’autant plus que l’État s’est brutalement désinvesti de son rôle en matière d’ingénierie publique, laissant les petites communes avec la communauté pour premier recours. Ce dernier constat est particulièrement vrai pour les communautés de communes en milieu rural, où l’on a vu que les collaborations et mises à disposition étaient souvent renforcées pour pallier ce déficit d’ingénierie. L’exemple des pôles relais de services dans la communauté de communes du Pays de Château-Gontier en est une illustration. Mais l’appui technique de la communauté se retrouve également dans les structures de taille plus importante et en contexte de tissu urbain plus dense. Comme nous le développerons plus loin, il semble que les communautés aient développé deux types d’expertise : la conduite de grands projets pour la communauté d’une part, l’appui technique sur la mise en œuvre concrète de compétences d’autre part.

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Qu’elle soit « en amont » ou en « en aval », cette expertise a pu se développer grâce aux spécificités de l’administration communautaire : celle-ci comprend plus de cadres, un personnel ayant moins d’ancienneté que celui des communes, et le politique y est souvent moins impliqué (il n’y a pas toujours de cabinet au niveau de la communauté). Il convient d’expliciter le lien possible de ce dernier élément avec le propos de l’expertise : le fonctionnement consensuel qui est au cœur de la collaboration intercommunale favorise nécessairement le rôle de l’expert, auquel on concède le savoir tout en faisant confiance à sa neutralité. Si les communes sont plus confiantes dans une mise en œuvre directe par leurs services des politiques publiques, elles sont pour autant immédiatement preneuses d’un appui stratégique et technique. Ainsi, l’histoire des constructions communautaires depuis 2005 a nécessairement favorisé cette dimension d’expertise (bien qu’elle n’ait pas pour autant laissé de côté le transfert de la mise en œuvre directe de certaines compétences).

À Versailles Grand Parc, l’intercommunalité a ainsi été considérée avant tout comme un lieu de mutualisation et le véhicule d’une plus grande harmonisation des services publics rendus à la population sur les différentes communes. C’est donc naturellement que les services support de l’agglomération ont été mutualisés depuis la ville centre, et rendent par suite des prestations aux communes de l’intercommunalité. Le risque inhérent à cette fourniture de services est d’en venir à considérer la communauté uniquement comme une boîte à outils, ou un prestataire, où la commune espère obtenir un retour équivalent à sa mise de fonds – « en retirer pour son argent » – en laissant de côté la dimension de projet commun. Mais ce risque est, à Versailles Grand Parc, contrebalancé par un véritable désir des élus d’orienter la collaboration communautaire vers de grands projets dans le cadre du Grand Paris.

À Valenciennes Métropole, c’est à l’inverse l’expertise projet qui a été retenue, avec une agglomération qui s’est construite autour du pilotage des grandes ambitions communautaires. Sa structure administrative reflète cette orientation. Le risque serait ici, comme évoqué précédemment, de donner l’impression que l’expertise confisque le sens. Mais cette expertise est le plus souvent jugée cruciale, particulièrement lorsque l’intercommunalité compte en son sein des petites communes.

Dans tous les cas étudiés, la question du partage des expériences et des savoir-faire se retrouve particulièrement au niveau des élus, dont les collaborations au sein des instances délibérantes et des commissions sont sources d’une expertise renouvelée sur certains sujets, mais également d’une autre vision du territoire. Il s’opère ici une distinction entre ce qui relève du projet politique communautaire et ce qui tient de la logique souvent qualifiée un peu rapidement de « club d’élus ». S’il semble bien que les exécutifs des communes voient souvent dans l’intercommunalité un lieu de partage avec leurs pairs, force est de constater que ces derniers ne sont pas n’importe quels pairs, puisqu’il s’agit des responsables de collectivités avec lesquelles ils partagent un territoire. Ainsi, même dans les cas où les projets communs sont peu nombreux, l’expertise trouvée au niveau communautaire ne relève pas de la seule formation technique sur un sujet : il s’agit d’un approfondissement et d’une maturation de la vision du territoire partagés par les élus. C’est cet ancrage territorial qui opère la distinction entre le seul club d’élus et le partage d’expériences et de savoir-faire dans le cadre de l’intercommunalité.

Cependant, la logique de la conduite de grands projets et la nécessité d’avancer peut parfois mettre en suspens la dimension du partage d’expériences et d’enrichissement mutuel des élus pour mieux les orienter vers l’action commune.

Par exemple, l’expertise partagée par les élus de Toulouse Métropole est nécessairement amoindrie par l’investissement qui est le leur dans la mise en œuvre et le relais des projets communautaires, au risque parfois de donner l’impression à certains élus que leur seul choix consiste à suivre ou à rester à l’écart.

Pour autant, on constate à l’inverse un net regret des élus lorsque trop de temps commun est consacré au partage et à l’expertise sans que soit mené de projet commun d’envergure, comme à Versailles Grand Parc. Peu à peu, l’harmonisation devrait s’opérer également à ce niveau entre les différentes intercommunalités, qui définiront leur équilibre entre partage des expertises et passage à l’action commune.

2.3 - L’exercice des compétences comme baromètre de la relation de confiance et de l’intégration communautaireL’intercommunalité, quelle qu’en soit la forme, est avant toute chose une relation nouée entre des communes pour exercer des compétences ensemble. Il en ressort que le choix des compétences exercées, les conditions de leur exercice et, partant, le niveau d’intégration communautaire sont l’exact reflet de la relation de confiance entre communes membres entre elles et entre communes membres et intercommunalité.

Les collectivités rencontrées révèlent des situations disparates qui laissent entrevoir comment est abordée la nécessité de coordonner les compétences. Elles donnent également à penser que plusieurs modèles d’intercommunalité se dessinent.

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Coordination des compétences, enjeu du service public : du doublon à la création de services nouveaux ou de meilleure qualité

Comme tous les établissements publics, les communautés sont régies par le principe de spécialité. Elles ne peuvent donc intervenir que dans le champ des compétences qui leur ont été transférées ou déléguées, conformément aux règles posées par le Code général des collectivités territoriales (principe de spécialité fonctionnelle) et à l’intérieur de leur périmètre (principe de spécialité territoriale). Elles ne peuvent donc intervenir, ni opérationnellement, ni financièrement, dans le champ de compétences que les communes ont conservées.

Par ailleurs, en vertu du principe d’exclusivité qui leur est applicable, les communautés sont en principe les seules à pouvoir agir dans les domaines se rattachant aux compétences qui leur ont été transférées. Il ressort de la jurisprudence du Conseil d’État20 que la création de la communauté emporte dessaisissement immédiat et total des communes pour les compétences transférées. Ce n’est que dans les cas où le transfert de compétences est subordonné à la définition d’un intérêt communautaire, et si celui-ci n’intervient pas au moment de la création de la communauté, que le dessaisissement de compétences est différé.

Dès lors, et à l’instar par exemple de Reims/Reims Métropole, nous ne devrions pas rencontrer de doublons puisque les interventions des communes et des intercommunalités ont vocation à être complémentaires. Néanmoins, les acteurs locaux ont pu rapporter qu’un certain nombre de doublons subsistait, notamment des cas de superpositions de compétences qui, sur le terrain, donnent lieu à un partage de gestion, encadré par voie de conventions. Ces situations sont favorisées par l’absence de définition de l’intérêt communautaire ou son insuffisante clarté – quelquefois à dessein – ou encore lorsque les compétences sont en voie d’être transférées (période transitoire), voire quand leur transfert est récent (Toulouse Métropole en matière de voirie).

Les communautés visitées offrent une première approche de leur complémentarité avec les communes. Ainsi, certaines communautés ont un niveau de structuration du territoire qui permet la réalisation de projets trop exigeants pour le niveau communal, tant en coût qu’en technicité. Par exemple, les projets de renouvellements urbains sur le territoire valenciennois ont permis de mobiliser des moyens techniques dont toutes les communes ne disposaient pas. Valérie Létard, présidente de Valenciennes Métropole, explique d’ailleurs à ce propos que « l’agglomération est le stratège qui a les capacités financières ».

En tout cas, la complémentarité des interventions sur le territoire concerné appelle une forme de coordination adaptée aux objectifs poursuivis.

Plusieurs illustrations ont retenu notre attention, mettant l’accent sur de bonnes pratiques mais aussi sur des superpositions inopérantes.

a) La voirie et son entretien

Au Sicoval (comme à la communauté de communes de Sarlat - Périgord Noir) : la voirie relève de la compétence communautaire depuis plusieurs années, après une période de « doublon » délibérément organisée comme telle ; néanmoins, l’exercice de cette compétence appelle une approche en bonne intelligence avec les communes, qui conservent leur mot à dire (choix des priorités, programmation des travaux, concertation…) sur les interventions de l’intercommunalité sur leur territoire.

À la CAPI : l’entretien courant et/ou d’urgence de la voirie communautaire est géré à nouveau par les communes. Cette compétence particulière a donné lieu à une remunicipalisation suite à la constitution de la CAPI, qui a fédéré deux structures intercommunales au niveau d’intégration disparate. La CAPI est ainsi née de la reprise du SAN (structure très intégrée qui portait presque tous les investissements de ses communes) et du Sivom du Pays berjallien (structure plus souple, à la carte). Il a été estimé que le niveau de réactivité souhaité ne pouvait être assumé que par les communes, la communauté conservant néanmoins les gros travaux structurants.

À la communauté urbaine de Toulouse Métropole : la territorialisation au travers de pôles qui ont en charge, notamment, les questions touchant à la voirie facilite la coordination des interventions en la matière, car elle repose sur les échanges avec les maires auxquels la communauté urbaine accorde une écoute attentive en ce domaine.

b) Les permis de construire

Au Sicoval : la communauté assure l’instruction et l’ingénierie, les communes ont la charge de la relation à l’usager et de la délivrance des permis.

20- CE 27 février 1970 Commune de Saint-Vallier ; CE 13 octobre 1978 n° 02907 Commune de Vénissieux ; CE 1er avril 1994 n° 146946 Commune de Réau ; CE 14 janvier 1998 n° 161661 Communauté urbaine de Strasbourg ; CAA Bordeaux 24 juin 2003 n° 99BX00156 Société SVE Onyx.

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À la CAPI : la communauté assure l’instruction des demandes (sauf pour Bourgoin-Jallieu qui dispose encore de son propre service instructeur) mais, ici aussi, la délivrance est restée à la commune.

À la CUB : l’instruction des permis de construire relève pour partie des services communautaires, à l’exception des villes de Bordeaux, Pessac et Mérignac qui ont souhaité garder leur service. Cette double instruction questionne l’approche et la cohérence de l’urbanisme opérationnel à l’échelle de la métropole.

c) L’action sociale et la politique de la ville

Au Sicoval ou à la communauté de communes de Sarlat - Périgord Noir : la communauté assure l’ingénierie, un centre intercommunal d’action sociale assure la mutualisation des fonctions support.

À la communauté d’agglomération de Valenciennes : les interventions conjointes dans le domaine de la cohésion sociale/politique de la ville sont exemplaires de la nécessité de faire en permanence le lien entre la gestion urbaine – du ressort des communes – et le renouvellement urbain – du ressort de l’agglomération. Le programme de requalification des quartiers dégradés est piloté par l’agglomération, mais les maires conservent la relation aux habitants et sont donc conduits à répondre des choix d’agglomération à leur égard. Par ailleurs, sur le volet social, un projet territorial a été élaboré entre l’agglomération, les communes et les partenaires locaux (services de l’État, département, région, CAF), formalisant une gouvernance multiniveau sur les politiques sociales et la politique de la ville, la communauté étant alors positionnée en chef de file sur certaines thématiques (habitat et cadre de vie par exemple), au même titre que les autres acteurs.

Autre illustration de double intervention, les dirigeants versaillais pointent le fait que tant la communauté d’agglomération que les communes membres financent par voie de subvention les bailleurs sociaux, ce qui pourrait traduire une forme de doublon.

d) Les ordures ménagères

À Versailles Grand Parc : la communauté est en contact permanent avec les communes car les services techniques communaux compétents sur la propreté doivent coordonner leurs interventions avec le service communautaire d’enlèvement des ordures ménagères.

e) La culture

Le secteur culturel est souvent cité comme propice à une porosité entre l’action communale et communautaire, car c’est un domaine politique auquel les communes restent très attachées ; il leur est souvent difficile de renoncer à la détermination de la politique culturelle. Néanmoins, ce secteur mobilise des équipements coûteux, nécessite des moyens importants qui incombent souvent aux villes centres désireuses d’en mutualiser au moins l’entretien. Les systèmes conventionnels mis en place à Laval ou à la CAPI semblent satisfaire les élus rencontrés.

Ainsi, la nécessaire coordination des actions conjointes ou connexes soulève la question de la lisibilité des actions conduites pour la population. La relation de proximité conservée au niveau communal place les communes et donc les maires en première ligne de la relation aux citoyens sur des opérations pourtant pilotées par l’intercommunalité. Cet état de fait place communes et intercommunalité en situation de solidarité. Toutefois, l’exemple des permis de construire est à ce titre très révélateur. Il montre la réticence des communes à aller au bout de la logique intercommunale et à accepter de nouveaux transferts de compétences synonymes de perte de pouvoir. On y voit toute l’ambiguïté de la relation communes-intercommunalité : au croisement d’enjeux de pouvoirs (les communes ne souhaitant pas totalement s’en départir), d’enjeux financiers (les communes souhaitant minimiser leurs charges) et d’enjeux de service public.

En effet, il suffit de compulser les statuts des intercommunalités pour constater qu’elles ne se cantonnent pas toutes à un rôle d’appui aux communes, mais sont pour la plupart investies par ces dernières de l’exercice de services dispensés à la population (transports, assainissement, collecte des déchets sont de ce point de vue assez signifiants). Il est bien question, dans les communautés visitées, de mise à niveau des services publics grâce à l’intercommunalité.

De nombreux exemples de compétences que les communes seules ne parviennent pas à mettre en œuvre – et qui se trouvent donc confiées à la communauté – nous ont été signalés :

a) L’accueil des gens du voyage

Les acteurs interrogés ont été nombreux à exposer comment, grâce à l’intercommunalité, ce champ de compétence complexe à mettre en œuvre pour les communes a pu se trouver investi par l’intercommunalité (communauté d’agglomération Périgourdine et communauté d’agglomération de Valenciennes Métropole notamment). À l’inverse, sur le territoire de Montfort Communauté, ce champ de compétence n’a trouvé preneur ni au niveau communal, ni au niveau intercommunal.

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b) La petite enfance

En transférant les services à la personne (petite enfance/accueil extrascolaire/aide au maintien à domicile) au niveau intercommunal, le Sicoval entend offrir un niveau de service que les petites communes n’auraient pas pu atteindre, et adapté aux besoins des bassins de vie identifiés. Le Sicoval adopte une manière fort pragmatique d’étalonner le service : le directeur général des services interrogé parle même de « mutualisation hétérogène », c’est-à-dire d’une organisation des services différenciée, adaptable en fonction de l’évolution des besoins des usagers (prenant en compte non seulement le territoire de vie mais aussi les flux de déplacements professionnels) en même temps qu’elle intègre les capacités des populations (financière, mais aussi en termes de mobilité). Il ne s’agit pas de mettre en place le même service petite enfance partout, mais de le développer là où il y en a besoin de manière adaptée. L’un des maires interrogés nous expliquait d’ailleurs que, faute de moyens, les communes seules n’y pourvoyaient pas.

L’expérience de Montfort Communauté, où la prise de compétence petite enfance a été un temps fort de l’histoire de la communauté, donne pleine satisfaction aux habitants alors que les communes seules ne parvenaient pas à répondre au besoin dans ce domaine. Au même titre, le transfert de cette compétence a été opéré à la communauté d’agglomération Périgourdine.

Autre expérience dans ce domaine, celle du Pays de Château-Gontier où, sans l’appui de la communauté, les communes rurales ne parvenaient pas à mettre en œuvre ce type de service. Néanmoins, la communauté se contente d’apporter son appui aux projets portés par les communes les mieux à même de les mener ; celles-ci sont appelées « communes relais » et ne bénéficient du soutien financier de la communauté que lorsque le projet est suffisamment avancé.

Dans tous les cas, on observe une recherche d’équilibre des pouvoirs en présence et des moyens mis en œuvre pour satisfaire les besoins de la population sur le territoire. La montée en gamme des services dispensés sur le territoire des intercommunalités, à la faveur de la progression du fait intercommunal, conduit à un effet inflationniste auquel doivent faire face les intercommunalités.

Ainsi, les territoires visités donnent à voir qu’avec l’intercommunalité, les populations gagnent en quantité et qualité de service rendu.

Quels modèles de communautés : communautés d’accompagnement, de projet ou de services ?

L’exercice des compétences par la communauté est l’occasion d’éprouver la relation de confiance entre communes et celle des communes à l’égard de la communauté. L’exemple de Saint-Malo Agglomération en témoigne : la communauté s’est ainsi d’abord concentrée sur l’exercice de ses compétences obligatoires pour établir sa réelle plus-value par rapport aux communes. Cette communauté, d’abord très axée sur le projet (développement économique, aménagement, habitat, politique de la ville), est en passe de développer des services dits de proximité. Cette évolution est aussi ressentie à la communauté d’agglomération Périgourdine.

Certaines intercommunalités entendent se concentrer sur les grands projets, les investissements lourds et de long terme, la construction d’équipements, mais sans assumer leurs charges de fonctionnement. Tel est le cas de Valenciennes Métropole, qui n’entend pas investir le champ des services de proximité qu’elle laisse aux communes, privilégiant son rôle d’appui et de stratège. Les arbitrages conduisant au partage des compétences sont le fruit de compromis locaux dans lesquels les communes conservent une maîtrise plus ou moins grande des attributs du pouvoir du bloc communal.

Les communautés visitées semblent pouvoir être présentées selon trois grands axes qui répondent à des logiques distinctes : communautés d’accompagnement, de projet ou de services.

Sur les éléments distinctifs des divers modèles :

Communauté d’accompagnement Communauté de projet Communauté de services

1. Les communes considèrent la communauté comme une source de financement complémentaire pour les projets communaux

2. Transferts de compétences limités

3. Forte technicité de la communauté

4. Logique de dotations

5. Faible solidarité

6. La communauté conduit des projets structurants

7. Les investissements sont primordiaux et décidés dans le consensus

8. Les effectifs communautaires sont réduits

9. Très forte technicité

10. La communauté est orientée vers les services à la population, le cadre de vie

11. Les effectifs sont développés

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Le schéma ci-dessous vient représenter le positionnement des communautés de notre panel :

Accompagnement

Projets Services

VGP

SM

Per

SCV

CG

VM

CubL

Sav MCAPI

TM

RM Sar

NM

Lecture : les communautés sont positionnées en fonction de trois pôles qui correspondent à la typologie proposée. Chaque pôle se situe au bout d’un axe qui lui correspond, et reflète une plus ou moins grande prévalence de cette typologie par rapport aux deux autres pour caractériser la communauté. Plus une communauté est proche du pôle, plus elle se rapproche de cet idéal type plutôt que des deux autres. L’axe n’évalue pas le nombre ou la quantité des projets, services rendus ou redistributions effectuées de façon objective : il doit être lu en confrontation avec les deux autres. Les communautés ne sont donc pas rangées par type mais correspondent plus ou moins à chacun des idéaux types.

Exemple : Toulouse Métropole correspond moins à une communauté d’accompagnement (axe rouge) qu’à une communauté de services et de projet (axes bleu et vert).

Légende :

Sar : communauté de communes Sarlat - Périgord Noir

M : communauté de communes Montfort Communauté

CG : communauté de communes du Pays de Château-Gontier

Sav : communauté de communes de la région de Saverne

Per : communauté d’agglomération Périgourdine

SCV : communauté d’agglomération du Sicoval (Sud-Est toulousain)

SM : communauté d’agglomération Saint-Malo Agglomération

L : communauté d’agglomération Laval Agglomération

CAPI : communauté d’agglomération Porte de l’Isère

VM : communauté d’agglomération de Valenciennes Métropole

RM : communauté d’agglomération de Reims Métropole

NM : communauté d’agglomération de Nîmes Métropole

VGP : communauté d’agglomération Versailles Grand Parc

TM : communauté urbaine de Toulouse Métropole

CUB : communauté urbaine de Bordeaux

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FOCUS : Valenciennes Métropole

« Communauté de projet et projet de communauté » « Notre agglo est, en elle-même, un projet plutôt qu’un ensemble de compétences à gérer », nous disait la présidente de Valenciennes Métropole, Valérie Létard.

Cette identité de communauté de projet a été érigée en philosophie, partagée par toutes les parties prenantes : du côté des élus, majorité et opposition ont une vision convergente quels que soient les mandats exercés en sus du mandat communautaire (les maires ont bien intégré la plus-value de l’agglomération pour le développement global du territoire, et c’est au niveau de la communauté que l’on « parle investissements », au niveau des communes que l’on « parle services ». Du côté de l’administration, il n’y a ni doublon, ni substitution, mais bien complémentarité, avec d’un côté une ingénierie forte (qui ne se réduit pas à l’urbanisme et l’aménagement mais concerne aussi la coordi-nation des politiques publiques : les agents de la communauté pilotent directement certains volets du plan territorial de cohésion sociale mais, surtout, ont joué un rôle majeur de coordination glo-bale de ce programme qui mobilise aussi les communes, les services de l’État, la CAF, et regroupent une multiplicité de dispositifs, notamment ceux de la politique de la ville).

Lorsque des tensions sur les finances locales mettent les communes en difficulté, la communauté a résisté à la prise en charge de compétence qui aurait signifié un changement de nature (investir sur la construction d’un équipement dont les usagers peuvent être issus de toute l’agglomération plutôt que de financer du fonctionnement d’équipement). C’est aussi ce qui explique les choix faits en matière de solidarité financière : une DSC et un fonds de concours orientés vers l’investissement, tout en laissant la main aux communes pour décider du fléchage de ces crédits.

Cette vision de l’organisation communautaire recoupe celle qui sous-tend le projet politique pour le territoire : le social et la proximité sont du ressort des communes, le développement relève de la communauté, mais les deux sont liés, car c’est le développement qui génère de la cohésion sociale (« accueillir des entreprises pour pouvoir ensuite redistribuer des richesses », selon les mots de la présidente).

Bon nombre des communautés visitées sont passées d’un modèle à l’autre, voire en combinent des éléments distinctifs.

Certaines d’entre elles sont progressivement passées, au gré de leur maturité communautaire constatée, d’une logique où prévalait le « guichet » (l’accompagnement) à une approche favorisant le projet. Les services proposés à la population sont généralement plus récents mais ils font désormais partie intégrante de l’expression communautaire.

À la faveur des compétences exercées et développées, les intercommunalités voient leurs effectifs augmenter, comme le Sicoval, passé de 474 agents en 2011 à plus de 800 en 2012, ce qui n’est pas sans conséquences sur les finances de l’intercommunalité21.

2.4 - Projets de loi de décentralisation et exercices des compétencesEn matière organisationnelle, les projets de texte ne remettent pas a priori en question le mouvement de mutualisation de services amorcé depuis quelques années et consacré par la loi RCT.

Sont cependant prévues la révision des modalités de mutualisation et la clarification du fonctionnement des services communs (transfert des agents communaux, précision des missions confiées aux services communs), dans une logique de rationalisation et d’économies de dépenses de fonctionnement. La souplesse qui prévalait en matière de mutualisation se verrait limitée.

21- Pour des précisions, voir la note technique de l’AdCF, L’évolution des effectifs intercommunaux, juillet 2012 ; et l’étude AdCF-CNFPT, Ressources humaines. Repères et tendances statistiques, juin 2013, disponible sur www.adcf.org.

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Concernant le panel de notre étude, l’effet de ces dispositions ne semblerait pas a priori trop lourd, puisque les mutualisations assez peu importantes que nous avons constatées (à l’exception de Toulouse Métropole) étaient, dans la plupart des cas, concentrées sur des services supports. Cela nécessiterait donc, à l’avenir, de passer du fonctionnement sur un mode mutualisé à celui sur le mode du service commun, avec transfert des agents vers la communauté. Si cette modalité est juridiquement plus conforme au principe d’exclusivité, elle n’est pas toujours, au plan pratique, adaptée aux configurations locales : par exemple, dans le cas d’une forte concentration de l’expertise et du volume d’agents sur une compétence dans une seule commune, le transfert vers un service commun peut s’avérer complexe. Enfin, la question de l’harmonisation des conditions de travail et des avantages sociaux accordés ne doit pas être occultée, car elle représente un possible point d’achoppement au moment des négociations accompagnant un processus de mutualisation.

En matière de répartition des compétences, les projets de texte prévoient des dispositions générales (création de nouvelles compétences obligatoires et optionnelles pour chaque type de communauté, suppression de l’intérêt communautaire pour certaines compétences), mais aussi des dispositions spécifiques par « bloc » de compétences.

À ce stade, nous ne procéderons pas à l’analyse du détail de chaque compétence prévue, tant le texte qui en introduit le principe (a priori le dernier des trois textes qui sera examiné) est susceptible de modifications dans son cheminement parlementaire, mais nous proposons un focus sur certaines compétences sur lesquelles nos interlocuteurs se sont exprimés :

• Urbanisme et foncier

L’avant-projet de loi prévoyait le transfert aux communautés de la compétence urbanisme, plus particulièrement des plans locaux d’urbanisme, appelés à devenir intercommunaux quel que soit le type de communauté. Cette disposition a finalement été intégrée dans le projet de loi relatif à l’accès au logement et à un urbanisme rénové, présenté le 26 juin 2013 en Conseil des ministres. Cela va dans le sens des souhaits exprimés par plusieurs de nos interlocuteurs, afin de disposer réellement des leviers structurants pour aménager le territoire (par exemple à Valenciennes Métropole et à la CAPI, où le projet communautaire du prochain mandat consistera concrètement à « faire la ville » dans cet espace de 100 000 habitants où, nulle part, on a le sentiment d’être « en ville »). Cependant, les réticences sont grandes du côté des communes de transférer ces compétences clés en matière de développement. Il semblerait que l’urbanisme soit l’un des derniers « bastions » communaux, le transfert de cette compétence étant souvent la marque d’une intégration communautaire poussée.

• Transports

Le texte prévoit que les communautés ou syndicats mixtes deviennent, dans le cadre du schéma régional de l’intermodalité, des « autorités organisatrices de la mobilité urbaine » (en sus du service régulier de transport public urbain de personnes, montée en charge des modes de transports doux et de l’autopartage) ; cela apparaîtrait comme une reconnaissance des politiques de transport initiées par les intercommunalités depuis une dizaine d’années.

• Sur les pouvoirs de police

Le renforcement de certains pouvoirs de police spéciale des présidents de communauté est envisagé : verrou symbolique déjà entamé par la loi RCT de décembre 2010, cette prérogative « régalienne » des maires basculerait partiellement vers l’exécutif communautaire. Nos interlocuteurs ne sont pas exprimés sur ce sujet précis, mais les débats à venir devraient révéler des positions tranchées.

Il n’y a pas, globalement, de véritable renforcement des compétences du niveau communautaire, mais plutôt un ensemble de dispositions visant à renforcer l’intégration existante (glissement entre compétences obligatoires/optionnelles/facultatives).

En considérant l’ensemble des mesures, qu’il s’agisse du mode d’élection ou du nouveau « paquet législatif », il est davantage question d’une transformation que d’une véritable révolution ; certaines mesures donnent l’impression d’une complexité croissante (démultiplication des statuts types des communautés avec la métropole, introduction de nouveaux types de coopération avec les pôles ruraux d’équilibre), d’une gouvernance alourdie (avec des échelons de décision démultipliés et superposés pour le bloc local) et d’un statu quo sur les compétences (la clause de compétence générale est réintroduite) malgré la création de la conférence territoriale de l’action publique (CTAP).

La lecture des entretiens réalisés permet aisément de voir combien la relation financière va peser dans la poursuite de l’affermissement du fait intercommunal. En la matière, la contrainte est souvent dissimulée derrière la solidarité. L’agrégation des compétences et des actions au sein du bloc local souffre d’un déficit en termes d’évaluation du coût du service public. Aujourd’hui, nul ne conteste la réponse apportée par les services communautaires présentés ci-dessus, mais la notion d’efficience est par trop souvent absente de l’analyse de leur fonctionnement.

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À retenir :

• L'intérêt communautaire est un concept de faible portée juridique mais permet, de façon très pragma-tique, de lister les compétences exercées au fil des transferts ;

• La communauté est complètement légitime dans trois fonctions : concevoir la stratégie territoriale, porter les projets structurants et partager les savoir-faire ;

• Mutualisation et territorialisation se poursuivent, même si elles tendent à raviver les craintes d'hégémo-nie de la ville centre et sont régulièrement réinterrogées (question du coût) ;

• Les communautés peuvent exercer leurs compétences selon une logique de guichet (forte technicité, transferts de compétences limités), de projet (prépondérance des investissements structurants) ou de service (effort porté à l'amélioration du cadre de vie) ;

• L’impact des projets de loi de décentralisation sur l'exercice des compétences est peu significatif (à noter néanmoins les pouvoirs plus importants conférés aux communautés en matière d'urbanisme et de pouvoir de police).

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Partie III

Relations financières : la solidarité

mise à l’épreuve

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III - Relations financières : la solidarité mise à l’épreuveC’est en raison d’éléments tant exogènes (variation de fiscalité, modalités de calcul des dotations changeantes…) qu’endogènes (solidarité fiscale plus ou moins affirmée entre communes et communautés, harmonisation imparfaite des logiques de taux…) que le caractère peu stable des budgets communautaires est évoqué en 2005.

Aujourd’hui, après l’intervention de changements majeurs – la réforme de la taxe professionnelle, l’approfondissement de la péréquation verticale et le développement de la péréquation horizontale –, le constat général reste assez similaire : une bonne santé financière globale, des dynamiques diverses et des perspectives d’évolution des finances des intercommunalités marquées par de fortes incertitudes.

3.1 - Si la structure financière des communautés s’est affermie, leur conférant une relative bonne santé financière, cette dernière pourrait être à l’avenir menacée

Les évolutions des données financières depuis 2005

Depuis 2005, les relations financières entre communes et intercommunalité sont un sujet central, mais elles ont évolué. Dès 1999, la dotation globale de fonctionnement (DGF) bonifiée a généré des effets d’aubaines. De fait, entre 1993 et 2006, la DGF intercommunale moyenne par habitant a été multipliée par quatre. On assiste à présent à une stabilisation22. En 2013, les montants de dotation étaient les suivants :

DGF des communautés de communes à fiscalité additionnelle : 20,05 €/hab.

DGF des communautés de communes à FPU simple : 24,28 €/hab.

DGF des communautés de communes à FPU et à DGF bonifiée : 34,06 €/hab.

DGF des syndicats d'agglomération nouvelle : 48,42 €/hab.

DGF des communautés d'agglomération : 45,40 €/hab.

DGF des communautés urbaines et métropoles : 60,00 €/hab.

À l’instar de Versailles Grand Parc, devenue communauté d’agglomération (après avoir été communauté de communes), des communautés bénéficiant d’une bonification de DGF ont vu dans l’intercommunalité une occasion de bénéficier de ressources supplémentaires et de mutualiser des projets d’investissement communs. Le constat est celui d’un système financier fragile ; cet état de fait a été encore renforcé par la réforme de la taxe professionnelle qui, avec la nouvelle contribution économique territoriale (CET), a donné lieu à une évolution du panier de ressources fiscales locales. Ce dernier est à présent alimenté plus fortement par les bases ménages (au plan national, 65 % des ressources fiscales des ensembles intercommunaux – communes et communautés – proviennent désormais des impôts ménages23). Dans un contexte de resserrement des budgets locaux, communes et communautés voient leur avenir fiscal désormais étroitement lié par un impôt reposant sur les ménages, alors que l’impôt économique était jusque-là le moteur premier de l’intercommunalité.

Bien que moins contraintes que les départements, les communautés s’accordent sur le fait que leurs équilibres financiers seront un sujet de préoccupation croissant, même si la situation financière des communautés rencontrées demeure saine, avec de bonnes capacités de désendettement et d’autofinancement notamment. Le poids financier pris par les intercommunalités est fortement tourné vers l’investissement, qui supplée souvent l’action des communes. Ainsi, à Saint-Malo, le choix a été fait de maintenir le niveau d’investissement malgré la réduction de la capacité d’autofinancement de la communauté, sans pour autant augmenter la dette ; ce choix a impliqué une réduction des dépenses de fonctionnement.

22- Source : Sénat, rapport d’information n° 48 (2006-2007) de Philippe Dallier, fait au nom de l'Observatoire de la décentralisation, déposé le 30 octobre 2006.

23- Source : F. Navarre et M.-P. Rousseau, Nouvelle géographie fiscale et financière des ensembles intercommunaux, AdCF/Caisse des dépôts/université Paris-Est, janvier 2013.

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D’autre part, en 2005, il ressortait de l’analyse des travaux des commissions locales d’évaluation des charges transférées (CLECT) que celles-ci étaient avant tout le lieu d’expression des préoccupations financières des différentes communes plutôt que celui de la construction d’une logique financière communautaire. Actuellement, le gain financier des transferts de compétences aux intercommunalités reste encore à démontrer ; de même qu’en 2005, les pactes financiers conclus avec les communes ne sont, lorsqu’ils existent, ni figés ni clairement formalisés. Les élus se sont entendus sur des grands principes, mais soit la technicité des sujets conduit à figer les équilibres établis que l’on cherche à conserver, soit elle rend difficile l’appropriation des propositions de la présidence par les élus.

L’une des faiblesses déjà pointées en 2005 persiste toujours : l’absence d’analyses financières agrégées des communes et communautés, qui se traduit par une méconnaissance de l’état financier du territoire communautaire. Les élus communautaires peinent à défendre, au sein des deux assemblées communale et communautaire, les principes de cohérence fiscale. Du fait de cette absence d’agrégation, les difficultés financières de certaines communes défavorisées n’ont pas pu être mises au jour. La situation la plus préoccupante semble être celle des communes défavorisées se trouvant au sein d’une communauté « riche », leur situation réelle se trouvant masquée par celle de la communauté à laquelle elles appartiennent.

Quel effet ressenti sur les relations communes/communauté ?

De fait, dans de nombreuses intercommunalités, les mécanismes de solidarité entre communes semblent avoir été gelés entre 2005 et aujourd’hui, et ce plus particulièrement depuis que la crise s’est étendue aux finances publiques. Ainsi, Laval Agglomération comme la communauté de communes du Pays de Château-Gontier ont maintenu au même niveau leurs dotations de solidarité communautaire (DSC). À Toulouse Métropole, l’augmentation de la DSC vient compenser la croissance des bases fiscales transférées à la communauté urbaine, que les communes ont perdu dans un contexte de stagnation de l’attribution de compensation (AC). L’optimisme qui pouvait exister en 2005 quant à la capacité de l’intercommunalité de résorber les inégalités entre communes, en aidant les communes les moins favorisées sans grever les ressources des autres, s’est atténué. Tout se passe comme si la crise avait entraîné un certain repli, avec un projet communautaire qui reste affirmé mais des communes qui privilégient la prudence en anticipant la possible aggravation de leur situation financière.

Les communes sont vigilantes à ce que la DSC se maintienne, mais les dernières années n’ont pas été marquées par une redynamisation des mécanismes de solidarité. Dans certains territoires, la communauté peut être désignée par quelques élus communaux comme responsable de la croissance de la dépense publique locale.

Par ailleurs, les évolutions du contexte des finances publiques ont entraîné la nécessité de renégocier régulièrement les éléments du pacte financier. De par sa sensibilité politique et sa technicité, ce dialogue rendu indispensable implique une certaine ingénierie : ainsi, la volonté d’accompagner pédagogiquement la répartition financière a conduit Toulouse Métropole à solliciter un consultant pour apporter des éclairages avant les arbitrages, pilotés par la direction des finances avec la direction générale. La situation est bien celle d’un pacte renouvelé avec les évolutions du contexte, même s’il s’agit in fine de tenter de maintenir les accords antérieurs malgré le retournement de la conjoncture.

Cependant, si l’avantage financier de l’intercommunalité se révèle moins évident qu’en 2005, aucune nostalgie de « l’indépendance communale » ne semble pour autant se manifester. Les questions financières sont apparues comme une problématique importante à régler, mais elles ne sont pas toujours perçues comme l’élément central de la coopération intercommunale. Les gains d’efficience ou de dotations trouvés dans l’intercommunalité accompagnent aussi la collaboration et la volonté de partager des projets.

Dans le panel, l’exemple type en la matière nous est fourni par Versailles Grand Parc, passée du statut de communauté de communes à celui de communauté d’agglomération pour recevoir une DGF bonifiée… qui sera finalement entièrement absorbée par la péréquation. Pour autant, les élus apprécient d’avoir renforcé leur coopération pour travailler en commun et ne voudraient plus, aujourd’hui, se passer de l’agglomération.

Au final, alors que tout portait à croire que les équilibres financiers continueraient d’évoluer entre 2005 et 2013, les relations entre communes et communauté autour de cette question se caractérisent plutôt par une volonté de maintenir la stabilité. La question financière est le plus souvent vue comme une difficulté à régler pour poursuivre l’avancement des projets. En matière financière, la préservation des acquis a prévalu sur une redistribution des richesses synonyme de solidarité financière.

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3.2 - Aujourd’hui, les relations financières sont en apparence sous le signe de la solidarité, mais aussi en attente de pactes fiscaux et financiers qui pourraient les formaliserSi les situations financières des communautés enquêtées sont saines, elles sont néanmoins diverses, tant en termes de richesse qu’en termes d’options politiques pour organiser la solidarité financière avec les communes membres.

Des outils divers à l’épreuve des récentes réformes

Les relations financières entre communes et communauté sont vécues par de nombreux dirigeants de communauté comme une source de recettes supplémentaires pour les communes. Nombreux sont les interlocuteurs rencontrés qui exposent que les communes, notamment rurales, sont confrontées à une pression financière de plus en plus forte, tandis que les intercommunalités disposent encore de marges de manœuvre, à l’instar de Valenciennes Métropole ou Saint-Malo Agglomération. La solidarité est donc plus que jamais un enjeu majeur de la relation communes-communauté. Si les outils et pratiques organisant la solidarité financière et fiscale restent très divers et complexes, la solidarité se structure petit à petit.

a) Les outils de solidarité répertoriés

Les dirigeants des communautés visitées ont été interrogés sur les mécanismes financiers de solidarité existant dans leur organisation.

Toulouse Métropole • Dotation de solidarité communautaire (DSC)

Communauté urbaine de Bordeaux• DSC

• Contrats de co-développement

Saint-Malo Agglomération• DSC

• Dotations et fonds de concours aux communes (rares)

Valenciennes Métropole

• DSC

• Fonds dédié aux investissements communaux et aux communes rurales, réparti pour un tiers en fonction du potentiel financier, pour un tiers en fonction du revenu par habitant des communes, et pour un tiers à raison du poids des dépenses réelles de fonctionnement par rapport au montant total des dépenses réelles de fonctionnement des communes membres

Sicoval • DSC

Communauté d’agglomération Périgourdine

• DSC

• Fonds de concours

Communauté d’agglomération Porte de l’Isère

• DSC (mais symbolique)

• Le transfert de compétences (intégration) est présenté comme le facteur de solidarité

Communauté d’agglomération Versailles Grand Parc

• DSC

• L’agglomération équilibre les contributions au fonds de solidarité Île-de-France et l’impact du FPIC sur les finances communales

• Nombreux fonds de concours dont un exceptionnel en 2013 portant surtout investissement à hauteur de 20 euros par habitants et un fonds incitatif des mobilités douces

Communauté d’agglomération de Reims Métropole

• DSC

• Fonds de concours

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Communauté d’agglomération de Nîmes Métropole

• DSC

• Fonds de concours

Communauté d’agglomération de Laval Agglomération

• DSC

• Fonds de concours

Communauté de communes de Sarlat - Périgord Noir • DSC

Montfort Communauté• DSC

• Fonds de concours (en fonction de la taille et de la richesse des communes)

Communauté de communes de la région de Saverne • Fonds de concours

Communauté de communes du Pays de Château-Gontier

• DSC

• Fonds de concours

• À noter le fonds communautaire d’aménagement du territoire rural qui comprend deux volets : le premier tend au développement du territoire (maintien du commerce et de l’artisanat en milieu rural et réponse aux besoins de santé) ; le second favorise et accompagne les solidarités entre communes sur le territoire

b) Fonds de concours : un outil « à manier avec des pincettes »

La pratique des fonds de concours n’est pas universellement répandue et n’est pas la même partout. Elle est même parfois mise en question, comme à Montfort Communauté, à la faveur de la difficulté que certaines communes rencontrent pour mener à bien les projets prévus.

À l’inverse, la communauté de communes de la région de Saverne en a fait son instrument principal de solidarité. Cet instrument a néanmoins une limite, celle de la nécessité d’un projet à financer ; ce système ne profite donc qu’à ceux qui investissent.

La pratique lavalloise des fonds de concours a pour objectif de compenser le gel de la DSC et la volonté affichée d’orienter les financements communautaires vers des infrastructures et non des services. Le fonds de concours mis en place a été conçu pour avoir un effet péréquateur et est calqué sur la mécanique du FPIC.

À Château-Gontier, le fonds communautaire d’aménagement du territoire rural (FACTR) incite à une solidarité infra-communautaire : il permet l’accompagnement de projets portés par des communes « pôles relais » (cf. supra). L’objectif poursuivi est de soutenir les communes de la communauté ayant des charges de centralité. Ce fonds est ainsi réparti en deux volets : l’un au profit du développement du territoire communautaire concernant les enjeux du territoire dans le domaine de l’artisanat, de la santé et du commerce ; l’autre au profit des solidarités intercommunales sur le territoire de l’intercommunalité, qui favorise notamment les acquisitions mutualisées de matériel.

À Valenciennes Métropole, le fonds de concours est fléché sur des investissements, en cohérence avec le projet communautaire ; initialement orienté vers le soutien aux communes rurales, son périmètre s’est élargi. Il est, indirectement, un moyen de fluidifier la gouvernance communautaire : pour entraîner les élus ruraux dans la dynamique de l’agglomération, il a servi de contrepartie directe à la mise en commun des moyens. C’est une logique gagnant-gagnant : l’agglomération est visible à travers les réalisations financées (aménagement, voirie, travaux d’accessibilité…), les élus locaux ont la main sur la programmation des crédits (l’enveloppe leur est déléguée).

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FOCUS : Versailles Grand Parc

« Un fonds de concours à double sens » Pour assurer l’équité dans la mise en œuvre de ses politiques publiques sur le territoire de ses communes membres, Versailles Grand Parc a développé des mécanismes innovants d’utilisa-tion des fonds de concours. L’exemple le plus emblématique est celui de la vidéoprotection, décla-rée d’intérêt communautaire. Afin d’éviter que les communes ne fassent de surenchère dans leurs demandes d’équipement en vidéoprotection (les demandes sont portées par chaque commune en tant que garante de la connaissance de son territoire), celles qui dépassent un montant fixé à 20 euros par habitant s’engagent à verser un fonds de concours à l’agglomération pour financer la différence.

Plus précisément : le réseau principal et le rapatriement des données sont pris en charge à 100 % par la communauté d’agglomération, indépendamment de l’éloignement de la commune du centre (Versailles). Mais l’infrastructure finale de la caméra et son raccordement sont considérés comme une dépense communale, que l’agglomération subventionne à hauteur de 20 euros par habitant maximum. Une « corde de rappel » efficace : les communes les plus riches, plus demandeuses de vidéoprotection, en viennent à verser le fonds de concours à l’agglomération tandis que les autres restent dans la dotation originelle.

Ce mécanisme se veut garantir l’équité et apporte un degré supplémentaire de solidarité, puisque les communes les plus riches acceptent de payer plus pour une dépense que les autres communes ne seraient pas prêtes à assurer sur leur territoire.

c) Ces divers outils sont impactés par les récentes réformes

La recomposition du panier fiscal suscite chez les élus de nombreuses interrogations. À Valenciennes Métropole, la croissance des recettes suite à la réforme de la taxe professionnelle est très faible, privant la communauté d’une part importante de son autonomie fiscale. La réforme de la taxe professionnelle a conduit à la révision des clés de répartition pour tenir compte de l’évolution du panier de recettes de la communauté. Les nouvelles recettes sont moins dynamiques. La partie taxe d’habitation est plus assurée mais la partie CVAE est volatile. Dès lors, au mois de novembre, la communauté ignore toujours ce qu’elle touchera pour l’année écoulée. Cette situation conduit à réviser les pactes financiers.

Le déséquilibre entre les recettes provenant des ménages et celles provenant des entreprises, la perte de dynamisme des recettes ainsi reconfigurées, suscitent de nombreuses interrogations des intercommunalités tournées vers le développement économique.

À ce propos, le cas de Versailles Grand Parc est assez intéressant car les effets combinés du FNGIR et de la réforme fiscale dissuaderaient de mener une politique de développement économique au profit d’une politique qui consiste à attirer les ménages. Même si les propos des acteurs locaux rencontrés n’ont que rarement traduit une telle orientation, l’accueil des ménages pourrait très rapidement devenir une priorité pour de nombreuses communautés, au détriment d’une politique économique en direction des PME. L’évolution de la typologie des entreprises sera aussi intéressante à analyser dans les années à venir avec un tropisme prononcé pour les services.

De manière générale, cette incertitude a été régulièrement rappelée par les interlocuteurs. La gouvernance de la communauté ne peut aujourd’hui ignorer l’enjeu de la péréquation, y compris dans les territoires considérés comme riches.

Dans certains cas, des outils spécifiques et innovants ont pu être expérimentés, comme les contrats de développement à la CUB.

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FOCUS : communauté urbaine de Bordeaux

« Les contrats de co-développement redessinent la solidarité territoriale au sein de la métropole bordelaise »

Engagée en 2009, « la petite révolution cubienne » s’est organisée autour de deux axes : la terri-torialisation des politiques communautaires au travers des contrats de co-développement et une organisation territorialisée avec la création des directions territoriales.

Les contrats de co-développement ont été plébiscités par les maires de la CUB. Ceux de première génération ont vu le jour en 2009 et s’inscrivent dans une programmation de trois années repré-sentant environ 600 actions. Ils relèvent d’une volonté de portage politique de l’action communau-taire. Le président Vincent Feltesse a ainsi répondu à une attente politique forte tout en légitimant l’action communautaire au plus près du citoyen. Dans ces contrats, dont la seconde génération vient d’être lancée, la négociation précède la contractualisation. Une fois le cadrage général établi – sur la base d’un diagnostic préalable –, les 27 communes ont pu faire entendre leurs souhaits ; mais cette logique ascendante a dû démontrer sa compatibilité communautaire. Les contrats couvrent un large champ des politiques publiques de la CUB. La mobilisation et la responsabilisation des acteurs communaux et la transparence affichée sont assurément un gage de bonne gouvernance mais sont aussi un moyen de s’éloigner de la logique de guichet qui prévalait jusque-là.

Le suivi des opérations a été confié au comité « conduite du changement ». Le taux de réalisation des actions est difficilement mesurable et le montant des dépenses mandatées dans le cadre des contrats est évalué à 170 millions d’euros pour les années 2009 et 2010. À la sortie de la première génération de contrats, le consensus pour attribuer un satisfecit à la démarche domine. Si certains points méritent d’être revus, les critiques visant des thématiques absentes ou négligées dans les contrats, l’absence de chiffrage précis ou encore les délais d’élaboration trop courts sont modérées au regard du levier d’action que ces contrats représentent.

La souplesse est de mise avec la possibilité de bénéficier du mécanisme de substitution ou de passer des avenants garantissant son adaptabilité. Mais là aussi, il faut mettre en exergue le renouvelle-ment des pratiques notamment administratives. Le rapprochement des services communautaires et communaux sur la base d’appui et de coopération technique est à souligner, les contrats faisant l’objet d’un suivi par une mission spécifique. L’expertise technique communautaire a été valorisée par ce biais.

d) Des pactes financiers et fiscaux incertains et très rarement formalisés

Les pactes financiers et fiscaux sont très fréquemment en discussion et en voie d’être (ré)inventés pour tirer les conséquences des récentes redistributions financières et fiscales.

Laval Agglomération, Montfort Communauté et la communauté des communes du Pays de Château-Gontier sont les trois communautés visitées à nous avoir fait part de l’existence d’un pacte financier et fiscal formalisé. Néanmoins, lors des entretiens, il nous a été clairement exposé que ces derniers étaient remis en cause et en cours de révision. Ainsi à Château-Gontier, le pacte initial reposait sur quatre piliers : la DSC, le FACTR (fonds communautaire d’aménagement du territoire rural), le FPIC et les contrats régionaux. La nouvelle donne fiscale et budgétaire conduit à devoir réviser ce pacte d’ores et déjà réformé par le gel de la DSC.

Ailleurs, il est officieux ou inexistant. À la communauté urbaine de Bordeaux et à la communauté d’agglomération Porte de l’Isère, le pacte n’est pas d’actualité car le contexte politique le rend impossible. À Saint-Malo Agglomération et au Sicoval, les présidents se donnent comme objectif de l’élaborer pour le prochain mandat.

Non formalisé et implicite, le pacte financier de Toulouse Métropole est quant à lui représentatif d’une tendance à vouloir faire bénéficier a minima chaque commune à hauteur de ce qu’elle a contribué, soit en termes de services, soit en termes de financement : une logique très « communale ».

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La difficulté consiste à trouver un bon équilibre des interventions financières de la communauté sur le territoire. L’enjeu actuel de solidarité porte sur la péréquation horizontale et la répartition de sa dynamique. À Château-Gontier, parmi les pistes de réflexion, la variation de l’attribution de compensation est évoquée comme levier envisageable : son évolution serait conditionnée à la possible augmentation du FPIC, avec un effet plafond dont bénéficierait la communauté dans le cas où le FPIC perçu augmenterait.

La question fiscale est bien entendu primordiale. Les élus communautaires affichent partout un souhait de modération fiscale comme évoqué supra, souvent à l’encontre des maires. Partout, la question de la fiscalité est le sujet le plus complexe à traiter. Un enjeu de taille est l’harmonisation des taux, d’autant que le poids de la fiscalité communale et intercommunale repose désormais majoritairement sur les mêmes contribuables locaux, les ménages.

La DSC, toujours en « trompe-l’œil » de la solidarité

La réforme de la taxe professionnelle a conduit au gel de la DSC dans un certain nombre d’intercommunalités. Cette évolution combinée à l’impact du coefficient d’intégration fiscale, qui conditionne une partie des dotations versées au niveau des compétences transférées et donc du niveau de dépenses réalisées, contraint la communauté à spécialiser ses dépenses au risque de les voir s’envoler.

Des mécanismes incitatifs mènent à davantage de coopération intercommunale. À titre d’exemple, le département d’Ille-et-Vilaine, comme nombre de départements et régions, ne soutient que les seules communautés (contrats de territoire).

Ces éléments conduiront sans doute les débats sur la revalorisation de la participation des communes, l’efficience des investissements communautaires et la plus grande intégration communautaire.

Communauté Critères Gel Commentaires

Toulouse Métropole Répartition en deux enveloppes :

• une dotation dite « tronc commun » (6/7e), basée sur le potentiel fiscal (75 %) et le revenu par habitant (25 %), et pondération de ces critères par l’effort fiscal ;

• une dotation dite « particulière » (1/7e), qui vise à attribuer une part à chaque commune ayant moins de ressources par habitant que la moyenne des communes comparables.

Non DSC efficace qui vise à limiter les augmentations d’impositions communales

Communauté urbaine de Bordeaux

Non renseigné Non évoqué Remise à plat possible en 2014

Communauté d’agglomération Saint-Malo Agglomération

• Population

• Croissance des bases – Taxe professionnelle

• Écart au potentiel fiscal moyen des quatre taxes

Oui

Valenciennes Métropole • Potentiel financier

• Population

• Part « ingénierie Cucs »

Non Doublement entre 2011 et 2012.

Une enveloppe est destinée aux communes de moins de 5 000 habitants

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Communauté Critères Gel Commentaires

Communauté d’agglomération du Sicoval

• Population

• Nombre d’enfants scolarisés

• Nombre de logements sociaux

• Effort fiscal

En 2010 Gel dans l’attente de la mise en place d’un pacte financier et fiscal

Communauté d’agglomération Périgourdine

• Charges

• Ressources

Non évoqué Remise à plat des dotations de solidarité en 2014

Communauté d’agglomération Porte de l’Isère

DSC symbolique

Communauté d’agglomération Versailles Grand Parc

• Évolution des bases de l’imposition économique (70 %)

• Population (20 %)

• Part de logements sociaux (10 %)

La DSC redistribue 60 % de l’évolution de l’impôt économique de chaque commune à chacune d’entre elles

Communauté d’agglomération de Reims Métropole

Communauté d’agglomération de Nîmes Métropole

• Population

• Revenu par habitant

• Logement social

Pas de gel ni de norme de progression fixe

Communauté d’agglomération Laval Agglomération

• Population

• Richesse

Oui DSC gelée suite à la réforme de la fiscalité

Communauté de communes Sarlat - Périgord Noir

Non renseigné Non évoqué Envisage à terme la disparition de la DSC

Montfort Communauté • Population

• Potentiel fiscal avec une dotation plancher (par habitant)

Communauté de communes de la région de Saverne

Absence de DSC

Communauté de communes du Pays de Château-Gontier

DSC gelée suite à la réforme de la fiscalité et compensée

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FOCUS : communauté urbaine de Toulouse Métropole

« Introduire un mécanisme de péréquation horizontale entre communes par la dotation de solidarité communautaire (DSC) »

En 2012, la communauté urbaine de Toulouse Métropole a adopté, au sein de la DSC, une part appelée dotation « particulière » qui représente un septième d’une DSC alors relativement modé-rée, soit un montant d’un million d’euros. L’objectif de cette part de DSC est la redistribution aux communes ayant un niveau de ressources par habitant plus faible que la moyenne des communes comparables.

Afin de tenir compte également de l’effort fiscal des communes (puisque c’est le niveau de res-sources par habitant pour la commune qui est pris en compte), l’écart entre les ressources de la commune et la moyenne des ressources des communes comparables n’est pris en compte qu’à concurrence des écarts entre la fiscalité ménages acquittée par les contribuables communaux par rapport à leurs revenus, et la moyenne pour les contribuables des communes de taille approchante. La prise en compte de la pression fiscale joue au moment de déterminer le montant de part parti-culière à verser à une commune ayant moins de ressources par habitant que les communes compa-rables ; les communes ayant moins de ressources mais exerçant une pression fiscale plus faible que la moyenne se verront ainsi moins dotées.

La notion de « communes comparables » repose sur un découpage démographique des villes de l’intercommunalité en trois catégories comprenant 15, 8 et 14 communes. Les « ressources » sont calculées à partir :- du produit de la fiscalité économique contribuant au calcul de l’attribution de compensation (AC),- du montant perçu des DSC capitalisées dans l’AC ainsi que du « tronc commun » de la DSC,- de la dotation globale de fonctionnement,- du potentiel fiscal des trois autres taxes principales (habitation, foncier bâti et foncier non bâti).

La DSC peut ainsi être utilisée comme mécanisme péréquateur de ressources entre les communes d’une intercommunalité. L’idée d’un cadre légal trop contraint pour mettre en place de véritables mécanismes de solidarité financière dans les intercommunalités ne paraît donc pas fondée, et cette pratique illustre un nouvel exemple d’innovation locale qui met un outil financier national sur les rails de son intitulé : une dotation de solidarité.

Il convient bien sûr d’en retenir le principe plus que le montant, qui reste relativement modéré.

3.3 - Des perspectives fiscales et financières sous contraintesDans le contexte actuel, les perspectives fiscales et financières ne permettent pas une prospective fiable tant les arbitrages demeurent sensibles, notamment pour déterminer là où pèseront les baisses de dotations de l’État. L’une des voies semble se situer autour de la péréquation, horizontale plutôt que verticale, mécanisme dans lequel les communautés peuvent être appelées à jouer un rôle important.

Un système de péréquation inachevé

L’un des indicateurs de la montée en charge de la péréquation horizontale est le changement des critères sur lesquels celle-ci est assise avec le FPIC : entre 2012 et 2013 s’est opéré un glissement progressif du potentiel financier – c'est-à-dire un critère sur les ressources – au revenu par habitant – soit un critère de charges (considérant que la précarité sur le territoire engendrait un niveau de dépenses plus élevé).

Il demeure cependant un chantier à conduire autour de la convergence des différents mécanismes de péréquation (verticaux et horizontaux) qui ne sont pas assis sur les mêmes critères de ressources et de charges.

Enfin, la fonction redistributrice des communautés pourrait faire l’objet d’une réflexion à part entière, au croisement des projets de décentralisation et d’une réforme plus globale de la fiscalité locale.

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L’utilisation rendue possible, depuis 2010, d’un outil comme la DGF, perçue et redistribuée par la communauté, viendrait concrétiser plus encore le rôle péréquateur de l’intercommunalité ; mais ce choix politique, lourd de conséquence, est à ce jour freiné par la nécessité de recueillir l’unanimité parmi les maires et au sein de conseil de communauté. Un vote de cette disposition à la majorité qualifiée pourrait permettre de surmonter le risque de blocage d’un maire, d’une commune ou d’une minorité de la représentation communautaire.

La baisse inexorable des dotations et la répartition de l’effort

En 30 ans, la part du budget de l’État dédiée aux collectivités locales est passée de 12 % à 17 %. Dans le même temps, entre 1980 et 2010, la dette de l’État a augmenté de 60 %, soit cinq fois ses recettes annuelles, contre une année de ressources pour les collectivités. Le budget total de l’État et des collectivités reste globalement constant mais la part du premier diminue tandis que celle des secondes augmente. Le déficit de l’État a doublé entre 2004 et 2011, notamment sous l’effet de la crise et de la réforme de la taxe professionnelle, mais aussi parce que la dette a financé la DGF.

Côté dotations, les perspectives sont connues depuis longtemps : leur stagnation voire leur diminution semblent inexorables, même si les collectivités territoriales, tout échelon confondu, tentent par tous les leviers d’en minimiser la baisse. Leur réduction n’est d’ailleurs pas plus un sujet primordial que ne l’est la limitation de l’autonomie fiscale et financière. Philippe Laurent, maire de Sceaux et président de la commission des finances de l’Association des maires de France, faisait ce constat en 2010 : « La France est le seul pays développé où les libertés locales sont réduites par les deux bouts : du côté des recettes, l’autonomie fiscale est chaque année davantage restreinte ; du côté des dépenses, l’inflation normative et l’encadrement juridique limitent sans cesse l’autonomie de gestion. »24

L’État n’a aujourd’hui plus les moyens d’assumer la prise en charge des dégrèvements et exonérations qui compensent un système fiscal inadapté et inachevé.

Face à cette situation, deux questions se posent : quelle répartition de l’effort financier entre chaque niveau de collectivités locales, et quelle contrepartie peut accorder l’État en échange de ces baisses de dotations ?

Sur la répartition de l’effort, il est nécessaire de procéder à une harmonisation des critères d’analyse des ressources et des charges (cf. supra) pour avoir une vision claire des territoires, mais aussi de tenir compte des dépenses contraintes (exemple des départements), tout en veillant à préserver les capacités d’investissement des collectivités, tout particulièrement des intercommunalités.

Concernant les contreparties accordées par l’État, le travail de toilettage des normes pourrait connaître une avancée significative si les préconisations du rapport Lambert et Boulard25 étaient mises en œuvre, réduisant ainsi une part des dépenses contraintes de tous les niveaux de collectivité.

Pour revenir à notre étude, nous avons constaté que les principales données recueillies, et surtout les propos entendus, montrent combien il est difficile d’envisager une solidarité infra-communautaire sans l’existence d’une harmonisation fiscale et financière au service du projet communautaire.

Les discussions actuelles entre les collectivités des différentes strates sur la répartition des baisses de dotations programmées en 2014 et 2015 confirment le dilemme ambiant.

La réforme non aboutie des bases fiscales continue de troubler le débat autour de l’équité fiscale, de même que nous avons ressenti du scepticisme et une faible volonté politique sur le sujet de la péréquation, au-delà d’un affichage sur les dispositifs existants et d’une position de principe sur les vertus de l’équité territoriale.

Nos interlocuteurs, constatant les limites du levier fiscal, sont désormais à la veille de choix budgétaires cornéliens, prioritairement préoccupés par le maintien de l’équilibre financier au sein du bloc communal.

24- Interview parue dans le n° 87 de Pouvoirs locaux, 2010, p.39.25- Rapport remis le 26 mars 2013 - http://www.gouvernement.fr/presse/remise-du-rapport-de-messieurs-alain-lambert-et-jean-claude-

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À retenir :

• Si, au départ, la constitution des communautés a bénéficié d’incitations financières via la bonification des dotations générales de fonctionnement, le système fiscal et financier n’a jamais été stabilisé ;

• Le dernier épisode de transformation majeure du système, à savoir le remplacement de la taxe professionnelle par la contribution économique territoriale, a encore accru la fragilité de cet écosys-tème : dynamique de progression des recettes ralentie, impact sur les relations communes/communau-té en termes de services rendus à la population du fait du poids pris désormais par la fiscalité ménages dans les ressources ;

• Aujourd’hui encore moins qu’en 2005, les communautés peuvent être susceptibles de gommer les inégalités entre leurs communes membres, du fait d’une contrainte financière accrue ;

• Plusieurs outils sont utilisés pour organiser la solidarité financière entre communes et communauté (dotation de solidarité communautaire, fonds de concours, révision des charges transférées…), parfois formalisés dans des pactes financiers et fiscaux ou liés à des contrats de développement. Ces outils apparaissent aujourd’hui insuffisants ou inefficients ;

• Des chantiers nouveaux sont à ouvrir ou approfondir : au plan fiscal (harmonisation des taux des communes et communauté), péréquation (convergence des critères de péréquation verticale et horizontale), renforcement du rôle péréquateur de la DGF perçue par la communauté et redistribuée aux communes membres.

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CONCLUSION

Des communautés garantes de l’égalité et de la solidarité territoriales ?

Les communes restent le socle du vivre ensemble. À leur tête, le maire, « élu préféré des Français » selon de nombreux sondages, n’en demeure pas moins un acteur dépendant du niveau supra-communal pour l’exercice de compétences dans de nombreux domaines. La quasi-totalité des élus rencontrés, sans renoncer, pour nombre d’entre eux, à leur ruban républicain, reconnaissent l’instance intercommunale comme un véritable levier pour agir, pour promouvoir une cohérence territoriale, économique et sociale.

Pour ce faire, les intercommunalités devront trouver leur raison d’être dans une expression politique volontariste et pérenne, même si elle n’est plus exprimée que par une majorité. De ce point de vue, le fonctionnement « au consensus » vit peut-être ses derniers instants.

Pour de nombreux élus intercommunaux, conjuguer attractivité, solidarité et coopération doit être l’ambition commune des intercommunalités. Cela passe par un renforcement de celles-ci. Pierre Veltz, dans son ouvrage précité L'économie de la connaissance et ses territoires, déclare : « Sans concentration, pas de survie. » Cette réalité est acceptée même par les plus sceptiques des « intercommunalistes ».

La santé financière relativement préservée des communautés et leur autonomie fiscale en font la structure idoine pour garantir, avec équité, une péréquation et une solidarité à l’échelle d’un territoire pertinent. Bien entendu, les fusions qui permettent un élargissement du périmètre d’action des communautés vont également « redistribuer les cartes », même s’il sera de plus en plus difficile d’occulter une réalité socio-économique préoccupante et détériorée.

Plus que jamais, les élus doivent penser le développement local à l’aune d’enjeux nationaux. La configuration locale souvent jusque-là maîtrisée ne suffit plus. Le territoire est en effet exposé aux effets de la conjoncture nationale voire internationale. Il reviendra ainsi aux communautés de faire face à ces « externalités négatives ».

Le révélateur sera peut-être leur capacité à structurer, au niveau local, une réponse en termes de développement économique et d’emploi. Les présidents d’agglomération et de communauté urbaine l’affichent comme une priorité. Dans ce domaine, le rôle de chef de file confirmé à l’entité régionale suscite des inquiétudes et fait craindre une intervention communautaire restreinte et insuffisante au regard de l’enjeu.

L’articulation des politiques économiques (régionales et intercommunales) est probablement, parmi les défis qui attendent les collectivités locales, le plus important ; et les élus en ont pleinement conscience.

À défaut de promouvoir une égalité territoriale au niveau national (tant la puissance financière et les modes coopératifs divergent d’un territoire à l’autre), l’intercommunalité pourrait être un réducteur d’inégalités à l’échelle d’un département, voire d’une région. Les succès et le dynamisme d’une communauté peuvent en effet rejaillir sur un territoire plus vaste. Quoi qu’il en soit, leurs initiatives sont de plus en plus perçues comme une promotion de l’autonomie territoriale.

Au niveau infra-communautaire, si la coopération n’est pas toujours synonyme de solidarité entre les communes membres, l’objectif de solidarité précédemment évoqué doit passer par la mobilisation des moyens de l’intercommunalité au service du territoire, dans une logique de péréquation garantissant l’adhésion de tous autour d’un pacte financier et fiscal. Ces pactes sont aujourd’hui encore peu nombreux, en cours d’élaboration.

Sans aucun doute, après 2014, égalité et solidarité seront les antiennes des intercommunalités qui auront compris l’intérêt de garantir une véritable cohésion territoriale.

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Annexes

Portraits de territoire

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Communauté de communes Sarlat - Périgord Noir (CCSPN)

CHIFFRES CLÉS CARACTÉRISTIQUES

Population : 17 576 habitants

Poids démographique de la ville centre : 57 %

Nb de communes : 13

Nb d’élus : 28 (1 pour 678 habitants)

Le président de la communauté est-il également maire de la ville la plus peuplée ? oui

Budget : 12,7 M€

Nb d’agents : 43 (1 pour 442 habitants)

Née le 1er janvier 2011, la communauté de communes Sarlat - Périgord Noir est issue de la fusion de deux communautés de communes, celle du Périgord Noir et celle du Sarladais.

La ville de Sarlat, qui pèse pour plus de la moitié de la population de la communauté, reste le moteur intercommunal.

À RETENIR

GOUVERNANCE L’attractivité de Sarlat et le leadership assuré par son maire, Jean-Jacques de Peretti, ne semblent pas nuire à l’ambition collective guidant désormais le nouveau projet communautaire.

ORGANISATION ET COMPÉTENCES

Une mutualisation des directions ressources entre la ville et la communauté permet à cette dernière de bénéficier d’une administration structurée pour accompagner les maires des communes rurales qui forment, pour l’essentiel, la communauté.

Pour son développement, la communauté mise sur son atout premier, le tourisme, mais a également su structurer son projet autour d’un volet solidarité avec le transfert de l’action sociale et d’un service partagé de voirie.

SOLIDARITÉ FINANCIÈRE La problématique de la solidarité financière se pose principalement à travers celle des relations ville centre/communes rurales, et les réponses sont multiples : transferts de compétences, mutualisation, DSC…

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Communauté de communes Montfort CommunautéUne communauté orientée vers la qualité du service rendu et le cadre de vie

CHIFFRES CLÉS CARACTÉRISTIQUES

Population : 24 540 habitants

Poids démographique de la ville centre : 27 %

Nb de communes : 8

Nb d’élus : 33 (1 pour 729 habitants)

Le président de la communauté est-il également maire de la ville la plus peuplée ? non

Budget : 14 462 K€ en fonctionnement et

8 399 K€ en investissement (BP 2012)

Nb d’agents : 30 (1 pour 802 habitants)

La communauté ne possède pas de ville centre qui pourrait se dégager naturellement et être hégémonique ; le territoire est équilibré. Il s’agit d’un micro-bassin d’emploi de l’aire urbaine rennaise.

La communauté s’est fortement structurée ces cinq dernières années.

Les décisions y sont prises au consensus.

À RETENIR

GOUVERNANCE L’organisation institutionnelle est classique : un conseil communautaire (33 membres et autant de suppléants) et un bureau communautaire (président, 7 vice-présidents, 2 secrétaires) qui a délégation pour les affaires courantes. Les délibérations se préparent avec les services au sein des commissions et sont validées en conseil communautaire, la plupart du temps à l’unanimité.

Une « assemblée des conseils municipaux » peut être organisée ponctuellement (par exemple pour présenter les attendus de la réforme territoriale, pour les 20 ans de la communauté, etc.).

La relation communauté/ville centre est aujourd’hui bien vécue par les communes « périphériques » (même s’il est difficile de parler de ville centre et de communes périphériques dans ce territoire assez équilibré). Cette relation n’a jamais été exclusive, les communes ont toujours eu une place égale dans le processus de décision (concertation préalable aux décisions, pratique de l’unanimité, agenda commun des réunions avec les communes, etc.).

Les débats sont peu politisés (pas d’opposition au conseil communautaire).

ORGANISATION ET COMPÉTENCES

Approche pragmatique de l’exercice des compétences ; mutualisation informelle, coopération ponctuelle avec les services communaux en fonction des projets.

L’effort se porte sur le cadre de vie et les services (les investissements en faveur de la petite enfance par exemple).

Les politiques sont travaillées au sein des commissions thématiques qui se réunissent très régulièrement (finances et affaires générales ; développement économique et emploi ; tourisme et promotion culturelle ; aménagement du territoire et environnement ; logement, services aux habitants et petite enfance ; sport ; communication, relations publiques, concertation). Chaque commission est animée par un binôme primordial : un élu et un administratif qui se rencontrent très régulièrement et rendent compte au président et au DGS.

Transfert envisagé de la compétence action sociale.

SOLIDARITÉ FINANCIÈRE Un pacte financier a été adopté pour préciser le calcul de la DSC et définir les cas d’utilisation des fonds de concours.

Plus qu’à la répartition des crédits, le président est sensible à l’implantation équilibrée des équipements communautaires structurants sur le territoire (piscine, crèche, etc.).

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Communauté de communes du Pays de Château-Gontier (CCPCG)Une communauté de projets au service d’une population rurale

CHIFFRES CLÉS CARACTÉRISTIQUES

Population : 30 761 habitants

Poids démographique de la ville centre : 39 %

Nb de communes : 24

Nb d’élus : 53 (1 pour 550 habitants)

Le président de la communauté est-il également maire de la ville la plus peuplée ? oui

Budget : 15 M€

Nb d’agents : 395 (1 pour 74 habitants)

Issue d’un district fondé en 1973 puis fusionnée au syndicat mixte de la Mayenne Angevine, la communauté existe dans sa forme actuelle depuis 13 ans.

Elle couvre un territoire rural cohérent et stable non impacté par le SDCI.

Elle est entraînée par le leadership de sa ville centre et des élus qui s’y succèdent.

Depuis 2005, la communauté met en œuvre son projet commun de développement à 10 ans via sa charte de territoire qui fixe cinq axes de développement dans une logique de développement durable.

À RETENIR

GOUVERNANCE La communauté fonctionne au consensus. Un bureau restreint prépare les décisions du conseil travaillées en commissions thématiques.

Des gages de gouvernance ont été donnés aux élus des communes rurales, comme l’accès aux travaux des commissions ou encore la présidence du conseil de surveillance de la convention de moyens conclue avec la ville centre.

La communauté développe la concertation avec la population via ses comités consultatifs permanents et son groupe de travail « développement économique » qui constituent le conseil de développement.

ORGANISATION ET COMPÉTENCES

Il s’agit d’une communauté très intégrée et mutualisée. Le siège, le DGS et les services ressources sont partagés avec la ville centre.

Ses nombreuses compétences outrepassent le développement économique et l’aménagement de l’espace pour offrir des services à la population que les communes rurales ne pourraient assumer seules.

Elle favorise les partenariats entre communes voisines et se projette vers des fonctions d’ingénierie technique. Ses perspectives d’évolution semblent tournées vers l’approfondissement de la coopération voire de la mutualisation avec les services de toutes les communes.

SOLIDARITÉ FINANCIÈRE La communauté combine solidarité et péréquation, son fonds communautaire d’aménagement du territoire rural (FACTR) lui permet d’aider des communes « pôles relais », sièges de services de proximité, en vue de tisser un réseau d’activités économiques en milieu rural.

La communauté pâtit de la perte de dynamisme de ses recettes fiscales, elle est bénéficiaire du FPIC. Un nouveau pacte fiscal et financier est en construction dont l’enjeu porte sur la péréquation horizontale et la répartition de sa dynamique.

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Communauté d’agglomération Périgourdine (CAP)CHIFFRES CLÉS CARACTÉRISTIQUES

Population : 76 281 habitants

Poids démographique de la ville centre : 40 %

Nb de communes : 16

Nb d’élus : 60 (1 pour 1 164 habitants)

Le président de la communauté est-il également maire de la ville la plus peuplée ? non

Budget : 54 M€

Nb d’agents : 312 (1 pour 224 habitants)

Fruit d’une longue expérience de coopération syndicale sous la forme d’un syndicat mixte puis d’un district, la communauté d’agglomération a été créée en 1999 dans le cadre de la loi dite « Chevènement ».

À RETENIR

GOUVERNANCE L’équilibre communauté/ville centre est demeuré, jusqu’à présent, la clé de la bonne gouvernance dans un modèle de communauté qualifié d’unipolaire. L’élargissement du périmètre à 33 communes, suite à la fusion avec la communauté de communes Isle Manoire en Périgord en 2014, risque d’imposer de nouveaux rapports infra-communautaires. Le potentiel financier et fiscal de l’agglomération va s’en trouver renforcé. Le mode de gouvernance et l’organisation des services devront être revus en connaissance de cause.

ORGANISATION ET COMPÉTENCES

Dans un premier temps, la CAP a axé son action dans les domaines de l’assainissement, de la voirie, du transport urbain et de la collecte des ordures ménagères. Depuis 2008, le développement durable et la prise de compétence petite enfance ont constitué deux objectifs majeurs de la politique communautaire.

SOLIDARITÉ FINANCIÈRE 1,65 M€ versés au titre de la DSC, 8,5 M€ au titre de l’AC et 270 000 € au titre de dotations et fonds de concours aux communes (BP 2012).

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Communauté d’agglomération du Sicoval (Sud-Est toulousain)La recherche d’une gouvernance élargie

CHIFFRES CLÉS CARACTÉRISTIQUES

Population : 70 186 habitants

Poids démographique de la ville centre : 17 %

Nb de communes : 36

Nb d’élus : 127 dont 25 vice-présidents (1 élu pour 552 habitants)

Le président de la communauté est-il également maire de la ville la plus peuplée ? non

Budget : 87,8 M€ (2011)

Nb d’agents : 474 en 2011 mais près de 800 en 2012 (1 agent pour 88 habitants)

Communauté ancienne (création sous la forme d’un syndicat en 1975, puis transformation en communauté de communes, devenue communauté d’agglomération de 36 communes en 2001), le Sicoval est aussi une communauté multipolaire, à la fois urbaine et rurale : sans ville centre et avec seulement deux communes de plus de 10 000 habitants. Elle se situe dans l’aire urbaine de Toulouse.

À RETENIR

GOUVERNANCE Avec un nombre important d’élus communautaires, qui comprend presque tous les maires, le Sicoval s’est surtout attaché à avoir la représentativité la plus large possible de ses membres (au moins deux délégués par commune).

Le système de décision participe de ce mouvement, avec un nombre important de commissions, parfois mêmes ouvertes à la société civile, et des mécanismes de décision très formalisés qui en garantissent la transparence et l’appropriation par tous les élus.

L’expérimentation d’instances de décision à l’échelle de bassins de vie vise à approfondir encore l’assise territoriale de la communauté.

Une dynamique toutefois rendue complexe avec le changement des règles de désignation des élus, qui oblige à la diminution de leur nombre.

ORGANISATION ET COMPÉTENCES

Communauté très intégrée, le Sicoval intervient de façon exclusive ou en complément des communes sur ses compétences facultatives.

Depuis le transfert des compétences voirie et services à la personne en 2011 et 2012, s’organise un glissement d’une communauté de projet et de développement à une communauté mixte, de projet et de services.

Concernant les services à la personne, le transfert a aussi été motivé par l’augmentation de la part prise par la fiscalité ménage dans les ressources de la communauté.

Un schéma de mutualisation des services est à l’étude, dont la mise en œuvre devrait intervenir au prochain mandat.

SOLIDARITÉ FINANCIÈRE La solidarité financière est au cœur du pacte initial de la communauté, mais ses modalités (DSC de 4 M€) sont en cours de révision, pour s’orienter vers un véritable pacte financier et fiscal, objet de discussions préparatoires pour le prochain mandat.

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Communauté d’agglomération Saint-Malo Agglomération (SMA)Une agglomération technique orientée vers le développement économique

CHIFFRES CLÉS CARACTÉRISTIQUES

Population : 83 361 habitants

Poids démographique de la ville centre : 58 %

Nb de communes : 18

Nb d’élus : 80 (1 pour 1 037), dont 18 vice-présidents

Le président de la communauté est-il également maire de la ville centre ? non

Budget : 55 M€ (BP 2012)

Nb d’agents : 156 (1 pour 532 habitants)

Créée en 2001 et présidée par Henri-Jean Lebeau, cette communauté est un territoire en fort développement (démographique et économique).

L’équilibre territorial est à préserver entre les communes littorales et rétro-littorales (ces dernières connaissent les plus fortes croissances).

Le périmètre cohérent n’a pas été remis en cause par le SDCI (l’intégration de Dinard, commune isolée, et la fusion avec la communauté de communes de la Côte d’Émeraude ont été un temps envisagées mais sont aujourd’hui écartées).

À RETENIR

GOUVERNANCE Conseil communautaire : 80 délégués, réunion mensuelle (validation de la politique générale, décision de lancement des projets, vœux sur les sujets d’intérêt communautaire, vote du budget). Toutes les décisions sont prises à la majorité absolue. Dans les faits, quasiment toutes les décisions sont prises à l’unanimité.

Bureau communautaire (président + 18 vice-présidents) : il prépare les délibérations vues en conseil communautaire ; il se réunit une fois par mois.

Commissions et instances de travail (15) : elles préparent, avec les services, toutes les décisions ; elles se réunissent très régulièrement. Des instances de conduite de projet et de concertation, informelles, existent aussi.

Rôle primordial du binôme président/DGS (pas de directeur de cabinet).

ORGANISATION ET COMPÉTENCES

Organisation centrée sur les compétences obligatoires et les grands projets.

Exercice pragmatique des compétences (au besoin, mutualisation informelle avec les communes).

Efforts particuliers en matière de développement économique, innovation, enseignement supérieur et recherche (politique très structurée et volontariste ; la communauté travaille en réseau – notamment avec Rennes – sur ces sujets).

SOLIDARITÉ FINANCIÈRE Pas de pacte financier formalisé mais projet en discussion.

Montant de la DSC : 1 678 520 € pour 2012.

Taux de reversement de fiscalité vers les communes supérieur à la moyenne des communautés.

Dépenses réelles d’équipement brut / recettes réelles de fonctionnement : 13 %.

Projets d’investissement : parc technopolitain, maison de la technopole, usine de traitement des ordures ménagères.

Dépenses réelles de fonctionnement / population : 472 euros.

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Communauté d’agglomération Laval AgglomérationUne communauté au service du développement de son territoire

CHIFFRES CLÉS CARACTÉRISTIQUES

Population : 94 031 habitants

Poids démographique de la ville centre : 54 %

Nb de communes : 20

Nb d’élus : 91 (1 pour 1 033 habitants)

Le président de la communauté est-il également maire de la ville centre ? oui

Budget : 72,4 M€

Nb d’agents : 178 (1 pour 528 habitants)

Riche d’une histoire intercommunale de 40 ans, d’abord district puis communauté de communes ayant fédéré autour de sa ville centre, la communauté, créée en 2005, a aussi absorbé deux Sivu, l’un de transport et l’autre de collecte sélective.

La communauté connaît des dissensions entre communes « communautaristes » et communes plus autocentrées, et doit composer avec des rivalités locales entre Laval et les villes de la première couronne qui sont les communes riches de l’agglomération.

Depuis les municipales de 2008, l’intercommunalité et l’idée d’un projet communautaire prend plus de place dans le débat politique local. Le projet de territoire est en cours de constitution.

À RETENIR

GOUVERNANCE Laval Agglomération ménage l’équilibre entre ses communes : les règles de répartition des sièges contrebalancent le poids de la ville centre. De même, tous les maires sont vice-présidents et donc membres du bureau.

Laval Agglomération fonctionne au consensus.

ORGANISATION ET COMPÉTENCES

La mutualisation des services est embryonnaire. Les élus redoutent l’hégémonie de la ville centre et les agents sont dans une compétition relative.

La communauté œuvre à l’affermissement de ses nombreuses compétences et s’oriente vers l’encouragement de coopérations intercommunales sans nouveaux transferts. Des réflexions sont en cours pour développer cette logique de coopération entre les communes membres et la coordination de leurs actions. Le président porte l’objectif d’améliorer les services à la population.

SOLIDARITÉ FINANCIÈRE L’agglomération est l’une des perdantes de la réforme fiscale, à hauteur de 3 millions d’euros de perte par an. Elle est bénéficiaire non contributrice au FPIC.

L’intercommunalité est en train d’achever la modification de son pacte fiscal et financier afin d’aider les communes à financer des équipements plutôt que des services. Elle est soudée autour du fonds de concours aux communes qui permet d’assurer la solidarité et la péréquation sur le territoire communautaire.

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Communauté d’agglomération Porte de l’Isère (CAPI)

CHIFFRES CLÉS CARACTÉRISTIQUES

Population : 101 131 habitants

Poids démographique de la ville centre : 26 %

Nb de communes : 22

Nb d’élus : 111 (1 pour 901 habitants)

Le président de la communauté est maire de Bourgoin-Jallieu

Budget : 138 M€

Nb d’agents : 815 (1 pour 123 habitants)

La CAPI est née de la fusion d’un SAN très intégré et du Sivom du Pays berjallien, structure souple, à la carte. Cette double origine conduit à la coexistence de deux cultures différentes.

La CAPI est une structure multipolaire, elle ne possède pas de ville centre mais plusieurs pôles autour de trois villes d’importance équivalente : Bourgoin-Jallieu (26 000 hab.), Villefontaine (18 000 hab.) et L’Isle-d’Abeau (15 500 hab.).

La CAPI fait partie du pôle métropolitain qui associe le Grand Lyon, Saint-Étienne Métropole et la communauté d’agglomération du Pays Viennois.

À RETENIR

GOUVERNANCE Avec le débat s’ouvrant sur les lois de décentralisation, et en raison des échéances électorales à venir, la CAPI se trouve dans une situation d’attente concernant son devenir : la désignation des futurs élus communautaires selon le nouveau mode de scrutin ne semble pas entraîner un bouleversement du rapport des citoyens à l’institution intercommunale. Les élus ne prévoient pas que les thèmes intercommunaux seront obligatoirement plus présents lors de la prochaine campagne électorale, mais sont conscients des enjeux.

ORGANISATION ET COMPÉTENCES

Au début de l’histoire de la communauté, la définition de l’intérêt communautaire a consisté à faire « redescendre » des équipements ou des compétences aux communes (particulièrement celles de l’ancien SAN), mais aussi à transférer de nouvelles compétences. Il y a donc eu un double mouvement de transfert.

À l’avenir, la CAPI souhaite orienter son action sur l’aménagement urbain afin de résoudre les problèmes issus de son urbanisation singulière : création d’une ville nouvelle et urbanisme de zones poussé à son paroxysme rendent nécessaire une reconstruction de la ville. Ici, on n’est nulle part « en ville ».

SOLIDARITÉ FINANCIÈRE En juin 2013, la communauté a adopté à l’unanimité un pacte financier et fiscal qui :

1. redistribue le FPIC selon des critères propres en faveur de l’agglomération et des critères de solidarité ;

2. partage la fiscalité foncière des zones d’activités communautaires.

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Communauté d’agglomération de Valenciennes Métropole (CAVM)Une communauté de projet typique

CHIFFRES CLÉS CARACTÉRISTIQUES

Population : 194 408

Poids démographique de la ville centre : 22 %

Nb de communes : 35

Nb d’élus : 96 élus, dont 26 vice-présidents (1 élu pour 2 000 habitants)

Le président de la communauté est-il également maire de la ville centre ? non

Budget : 188 M€ (2012)

Nb d’agents : 149 (1 agent pour 1 288 habitants)

Créée dès ses débuts, en 2001, autour d’un projet de territoire incarné par la personnalité politique de Jean-Louis Borloo, Valenciennes Métropole repose sur les deux piliers que sont le développement économique et la cohésion sociale.

Elle se définit comme une communauté de projet, positionnée en plus-value par rapport à l’intervention du niveau communal et jamais en substitution.

À RETENIR

GOUVERNANCE La représentativité de toutes les tendances politiques du territoire est au fondement du pacte de gouvernance de la communauté, la répartition des postes clés en est le reflet.

Le consensus est le mode de décision prédominant, mais il est issu de la construction d’une vision partagée du territoire.

ORGANISATION ET COMPÉTENCES

La communauté exerce peu de compétences facultatives ou optionnelles ; seules les compétences en cohérence avec le projet politique (renouvellement urbain par exemple) ont été prises.

La communauté résiste lorsque les communes souhaitent des transferts qui seraient contraires à l’esprit du projet politique initial, notamment en coordonnant les actions sur le territoire plutôt qu’en intervenant sur tous les champs (cohésion sociale), ou en révisant les relations financières communes/communauté.

SOLIDARITÉ FINANCIÈRE En 2012, la DSC a été doublée en raison de besoins accrus des communes, et un fonds dédié aux investissements communaux complète la solidarité financière, en laissant aux communes la décision des investissements réalisés mais sans prise en charge des dépenses de fonctionnement par la communauté.

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Communauté d’agglomération de Reims MétropoleUne communauté en expansion

CHIFFRES CLÉS CARACTÉRISTIQUES

Population : 225 000 habitants

Poids démographique de la ville centre : 84 %

Nb de communes : 16

Nb d’élus : 43 (1 élu pour 5 233 habitants) dont 22 vice-présidents

Le président de la communauté est-il également maire de la ville centre ? oui

Budget : 350 M€

Nb d’agents : 1 000 dont 600 mutualisés (1 agent pour 225 habitants)

Reims Métropole peut être définie comme une métropole d'équilibre au rôle charnière entre Nord, Est et bassin parisien.

La communauté compte une ville centre, Reims, principale aire urbaine de la région sans être pour autant préfecture régionale.

À RETENIR

GOUVERNANCE Une tradition du consensus à l'épreuve d'un changement d'échelle portant de 6 à 16 le nombre de communes membres.

ORGANISATION ET COMPÉTENCES

Des services mutualisés en profondeur, une direction générale unique.

SOLIDARITÉ FINANCIÈRE Une solidarité financière, traduite dans un pacte financier et fiscal communautaire, prenant en compte la place de chaque commune sur la base de critères socio-économiques, de centralité et de solidarité.

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Communauté d’agglomération de Nîmes Métropole (CANIM)Fédérer le territoire et porter les projets d'avenir

CHIFFRES CLÉS CARACTÉRISTIQUES

Population : 240 000 habitants

Poids démographique de la ville centre : 60 %

Nb de communes : 27

Nb d’élus : 101 (1 pour 2 376 habitants) dont 30 vice-présidents

Le président de la communauté est-il également maire de la ville centre ? oui

Budget : 303 M€

Nb d’agents : 250, mutualisation comprise (1 pour 960 habitants)

Cette métropole a été bâtie pour porter les grands projets d'avenir d'un territoire qu'elle fédère et structure, notamment grâce à la compétence transports.

À RETENIR

GOUVERNANCE Une gouvernance au consensus, avec un rôle clé des commissions comme lieu de débat.

ORGANISATION ET COMPÉTENCES

Des services mutualisés et une culture affirmée du fonctionnement en mode projet.

SOLIDARITÉ FINANCIÈRE Une solidarité financière affirmée, traduite dans la dotation de solidarité communautaire mais aussi dans des fonds de concours dans les domaines de la culture, du sport et du commerce, ainsi que dans des mutualisations de services au bénéfice des communes membres sur certains domaines à forte expertise technique, comme la numérisation.

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Communauté d’agglomération Versailles Grand Parc (CAVGP)Une collaboration harmonieuse au service des ambitions municipales

CHIFFRES CLÉS CARACTÉRISTIQUES

Population : 250 000 habitants

Poids démographique de la ville centre : 43 %

Nb de communes : 15

Nb d’élus : 64 (1 pour 3 906 habitants)

Le président de la communauté est-il également maire de la ville centre ? oui

Budget : 107 M€

Nb d’agents : 260 (1 pour 961 habitants)

La communauté de communes a été créée en 2002 autour de neuf communes de la plaine de Versailles. Forte de onze communes en 2007, elle devient une communauté d’agglomération au 1er janvier 2010. Elle intègre quatre communes supplémentaires l’année suivante et sera rejointe par une quinzième en 2014.

Constituée dans une double logique de collaboration et de dotation financière, Versailles Grand Parc se caractérise par une forte culture du consensus et la recherche d’une coopération au service de la fonction de maire, qui reste prédominante.

À RETENIR

GOUVERNANCE En 2008, Versailles Grand Parc a connu une alternance au sein de la majorité par le changement de maire de Versailles, également président de la communauté. Seules deux communes seront dépourvues de vice-présidence en 2014, mais le bureau des maires est l’instance décisionnelle réelle de la communauté.

Les élus caractérisent cette instance par le plaisir qu’ils ont à y travailler ensemble, dans une logique de collaboration non contraignante et de préservation des prérogatives municipales.

ORGANISATION ET COMPÉTENCES

La ville de Versailles et Versailles Grand Parc ont un seul et même directeur général des services qui est mutualisé. De même, l’ensemble des fonctions support sont mutualisées depuis la ville centre.

Du fait de cette mutualisation et du recours important aux formes de délégation de service public, les effectifs de la communauté sont réduits et concernent principalement l’enseignement musical, compétence transférée à l’agglomération en sus des compétences obligatoires et exercée en régie.

La compétence transports est également transférée.

SOLIDARITÉ FINANCIÈRE Afin d’encourager au développement économique dans un contexte de villes très résidentielles et malgré le transfert de la fiscalité économique à la communauté, la dotation de solidarité communautaire tient principalement compte (70 % de la dotation) de l’évolution du produit de l’imposition économique par commune, dont elle redistribue 60 % à la commune concernée.

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Communauté urbaine de Toulouse Métropole (CUTM)Une géante sortie du berceau

CHIFFRES CLÉS CARACTÉRISTIQUES

Population : 716 638 habitants

Poids démographique de la ville centre : 62 %

Nb de communes : 37

Nb d’élus : 123 (1 pour 5 693 habitants)

Le président de la communauté est-il également maire de la ville centre ? oui

Budget : 1,101 Md€

Nb d’agents : 2 989 (1 pour 240 habitants)

Le district du Grand Toulouse a été formé en 1992 à partir de quinze communes. Six communes ont rejoint le district transformé en communauté d’agglomération en 2000, puis cinq autres en 2003. À l’occasion de l’alternance politique à Toulouse, la coopération a été approfondie par la création de la communauté urbaine en 2008, rejointe par douze communes supplémentaires en 2011.

Cinquième communauté urbaine française en termes de population, elle a pris le nom de Toulouse Métropole en 2012.

Toulouse Métropole se caractérise par le poids très important de sa ville centre et par la fragmentation administrative de son aire urbaine, qui compte de nombreuses communes de petites tailles et cinq autres communautés en sus de Toulouse Métropole, dont la communauté d’agglomération du Sicoval (Sud-Est toulousain) qui fait partie du panel de cette étude. Ce territoire en forte expansion démographique fait face à des enjeux très importants, notamment en termes de transports et d’infrastructures.

À RETENIR

GOUVERNANCE Toulouse Métropole compte 30 vice-présidents sur 37 communes ; tous ne sont pas maires. Le premier vice-président porte le titre de président délégué et à la charge, comme le président, de l’ensemble des sujets. Maire d’une ville de taille moyenne, il est le représentant des villes périphériques au sein d’une communauté où l’équilibre ville centre/villes périphériques est central.

ORGANISATION ET COMPÉTENCES

Du fait de la taille de la ville centre, l’alternance de 2008 a permis le passage à la communauté urbaine et le transfert de compétences afférent ; l’intégration communautaire a été fortement approfondie en l’espace de seulement cinq ans par la mutualisation d’une partie des administrations de la ville centre et de la communauté et par la territorialisation de l’exercice de certaines compétences. Toulouse Métropole cherche aujourd’hui à absorber ce changement rapide et se concentre sur l’exercice de ses compétences obligatoires et sur de grands projets structurants.

SOLIDARITÉ FINANCIÈRE La solidarité financière s’est récemment approfondie, consécutivement au transfert d’une part supplémentaire de fiscalité à la communauté, qui lui permet d’adopter une dotation de solidarité communautaire considérablement augmentée en 2013. Cette dotation intègre une dotation « particulière » calculée sur les ressources disponibles par habitant de chaque commune comparées à la moyenne de la communauté.

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Communauté urbaine de Bordeaux (CUB)CHIFFRES CLÉS CARACTÉRISTIQUES

Population : 727 466 habitants

Poids démographique de la ville centre : 33 %

Nb de communes : 27

Nb d’élus : 120 (1 pour 6 014 habitants)

Le président de la communauté est-il également maire de la ville centre ? non

Budget : 1,6 Md€

Nb d’agents : 2 780 (1 pour 260 habitants)

Créée en 1968 dans le cadre de la loi du 31 décembre 1966, la CUB s’est développée essentiellement autour de ses compétences historiques et au travers d’interventions sectorielles dans les domaines de l’eau et l’assainissement, de la voirie, des transports, de l’aménagement foncier, des ordures ménagères, du développement économique et plus récemment du logement.

À RETENIR

GOUVERNANCE La gouvernance, sous le mode de la cogestion avec des instances de pré-validation stratégiques et techniques, pourrait être remise en question dans la perspective des prochaines élections municipales et l’opposition naissante entre le président de la CUB et le maire de la ville centre.

ORGANISATION ET COMPÉTENCES

Un projet d’administration mené en 2010 s’est accompagné de la création de quatre directions territoriales opérationnelles dans les domaines économiques, de l’urbanisme, du foncier, des transports ou encore des aménagements des espaces publics. Le projet communautaire est désormais tourné vers le renforcement des projets structurants.

SOLIDARITÉ FINANCIÈRE 34 M€ versés au titre de la DSC, 14 M€ au titre de l’AC et 9,5 M€ au titre de subventions d’équipement aux communes (BP 2012).

L’existence de contrats de co-développement avec chaque commune a introduit une part de solidarité financière en mode projet.

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Liste des entretiens menés

Communauté NOM Prénom Fonctions Date de l’entretien

Communauté de communes du Pays de Château-Gontier

Philippe Henry Président, maire de Château-Gontier 26/10/2012

Serge Guillaumé Maire d’Ampoigné 26/10/2012

Éric Magnon Directeur général des services 26/10/2012

Communauté de communes Montfort Communauté

Joseph Le Lez Président, maire de Breteil 18/01/2013

Laurent Veillon Directeur général des services 24/01/2013

Communauté de communes Sarlat - Périgord Noir

Jean-Jacques de Peretti Président, maire de Sarlat 12/11/2012

Patrice Martin Directeur général des services de Sarlat et de la communauté de communes

12/11/2012

Communauté de communes de la région de Saverne

Émile Blessig Maire de Saverne 04/12/2012

Pierre Kaetzel Président, maire de Monswiller 04/12/2012

Murielle Philippe Délégué communautaire de Lupstein 04/12/2012

Fabrice Helmstetter Directeur général des services de Saverne et de la communauté de communes

05/12/2012

Communauté d’agglomération Laval Agglomération

Marcel Thomas Directeur général des services 26/09/2012

Anne Pellat Directrice de cabinet du maire-président 29/10/2012

Christian Lefort Maire d’Argentré, vice-président en charge de la commission prospective

29/10/2012

Olivier Girma Chargé de mission développement durable 17/10/2012

Communauté d’agglomération de Nîmes Métropole

Jean-Paul Fournier Sénateur-maire, président de Nîmes Métropole

14/02/2013

Communauté d’agglomération Périgourdine

Claude Bérit-Débat Président de la CAP, sénateur 22/10/2012

Michel Moyrand Maire de Périgueux 04/10/2012

Christian Decosse Directeur général des services 22/10/2012

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Communauté NOM Prénom Fonctions Date de l’entretien

Communauté d’agglomération Porte de l’Isère

Jean Papadopulo Vice-président, maire de Four 05/11/2012

Michel Rival Vice-président, maire de Nivolas-Vermelle 05/11/2012

Alain Cottalorda Président, maire de Bourgoin-Jallieu 12/11/2012

Frédéric Pin Directeur général des services 12/11/2012

Communauté d’agglomération de Reims Métropole

Olivier Nys Directeur général des services de la ville et de la communauté d’agglomération

24/10/2012

Gérard Imbeaux Directeur général adjoint en charge de la gouvernance de la métropole

24/10/2012

Communauté d’agglomération Saint-Malo Agglomération

Henri-Jean Lebeau Président de la communauté d’agglomération

16/10/2012

Yves Javey Directeur général des services 16/10/2012

Communauté d’agglomération du Sicoval (Sud-Est toulousain)

François-Régis Valette Président, maire d’Auzeville-Tolosane 28/11/2012

Jacques Oberti Vice-président chargé de la cohésion sociale, maire d’Ayguesvives

28/11/2012

Philippe Lemaire Directeur général des services 28/11/2012

Cécile Rodriguez Chargée de mission Agenda 21 28/11/2012

Geoffrey Carrere Chargé de mission bassins de vie 28/11/2012

Communauté d’agglomération de Valenciennes Métropole

Valérie Létard Présidente, sénatrice 21/11/2012

Jean-Claude Dulieu Vice-président chargé de l’habitat 21/11/2012

Maurice Hennebert Vice-président délégué aux investissements communaux, maire d’Estreux

21/11/2012

Jean-Luc Humbert Directeur général des services 20/11/2012

Communauté d’agglomération Versailles Grand Parc

Jean-François Peumery Premier vice-président chargé de l’habitat et de la politique de la ville, maire de Rocquencourt

03/01/2013

Dominique Conort Vice-présidente chargée de l’environnement et de l’eau, maire de Fontenay-le-Fleury

07/01/2013

Manuel Pluvinage Directeur général adjoint des services 19/11/2012

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Communauté NOM Prénom Fonctions Date de l’entretien

Communauté urbaine de Bordeaux

Françoise Cartron Vice-présidente de la CUB, sénatrice 19/10/2012

Michel Vayssié Directeur général des services 30/10/2012

Bruno Fareniaux Directeur de cabinet 30/10/2012

Communauté urbaine de Toulouse Métropole

Claude Raynal 2e vice-président, maire de Tournefeuille 26/11/2012

Dominique Coquart 10e vice-président, maire de Villeneuve-Tolosane

26/11/2012

Philippe Mahé Directeur général des services 19/10/2012

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Notes

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Pilotage technique de l’étude :

Floriane Boulay (AdCF)

Rédaction :

Emilie Becouze, Paul Bouriat, Juliette Kupecek, François Mesure, Simon Moulines, Mireille Pillais, Pierre Stecker, élèves administrateurs territoriaux de la promotion Paul Éluard

Coordination éditoriale :

Christophe Bernard, secrétaire général (AdCF)

Date de publication :

Décembre 2013

Conception/réalisation :

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AdCF Assemblée des Communautés de France

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Tél. : 01 55 04 89 00 - Fax : 01 55 04 89 01 www.adcf.org - [email protected]