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La Recherche au CIGREF Cahier n° 3 23 Hanène JOMAA Chargée de programme CIGREF Doctorante, Laboratoire EGSH, ENST Paris. [email protected] Rouba TAHA Chargée de programme, CIGREF Doctorante, Laboratoire LAREQUOI, Université Versailles Saint-Quentin-en Yvelines. [email protected] CIGREF 21, avenue de Messine 75 008 Paris Résumé Le concept d'organisation virtuelle est souvent assimilé dans la littérature managériale à des entreprises en réseau, multipartenaires, s'appuyant sur les technologies de l'information et de la communication (TIC) pour coordonner leurs activités. Dans cet article, nous nous intéressons aux formes d'organisations virtuelles intra-entreprises qui peuvent se développer autour de certaines fonctions (achat, conception assistée par ordinateur, gestion de la relation client…), de certains projets ou de certains profils de métiers (commerciaux, agents techniques…) dans les entreprises traditionnelles. Sur la base d'une série d'entretiens ouverts et semi-directifs menés auprès de 9 grandes entreprises membres du CIGREF, nous nous sommes interrogées sur le processus d'émergence des formes d'organisations virtuelles, la place et le rôle des TIC dans ce processus et l'affiliation de ces nouvelles entités virtuelles à des innovations organisationnelles. Mots clés : Innovation organisationnelle, organisation virtuelle, technologies de l'information et de la communica- tion Les organisations virtuelles des grandes entreprises réelles : Avatars à éviter ou innovations à développer Rouba TAHA Hanène JOMAA

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Cahier n° 3 23

Hanène JOMAA

Chargée de programme CIGREF

Doctorante, Laboratoire EGSH, ENSTParis. [email protected]

Rouba TAHA

Chargée de programme, CIGREF

Doctorante, Laboratoire LAREQUOI,Université Versailles Saint-Quentin-enYvelines. [email protected]

CIGREF21, avenue de Messine75 008 Paris

Résumé

Le concept d'organisation virtuelle est souventassimilé dans la littérature managériale à desentreprises en réseau, multipartenaires, s'appuyant sur les technologies de l'information et de la communication (TIC) pour coordonnerleurs activités.

Dans cet article, nous nous intéressons aux formesd'organisations virtuelles intra-entreprises qui peuvent se développer autour de certaines fonctions (achat, conception assistée par ordinateur,gestion de la relation client…), de certains projetsou de certains profils de métiers (commerciaux,agents techniques…) dans les entreprises traditionnelles. Sur la base d'une série d'entretiensouverts et semi-directifs menés auprès de 9 grandes entreprises membres du CIGREF, nous nous sommes interrogées sur le processusd'émergence des formes d'organisations virtuelles,la place et le rôle des TIC dans ce processus et l'affiliation de ces nouvelles entités virtuelles à desinnovations organisationnelles.

Mots clés :Innovation organisationnelle, organisation virtuelle,technologies de l'information et de la communica-tion

Les organisations virtuellesdes grandes entreprisesréelles : Avatars à éviter ou innovations à développer

Rouba TAHA

Hanène JOMAA

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La notion d'organisation virtuelle aété avancée par W. H. Davidow et M. Malone (1992) pour décrirel'évolution des architectures tradi-tionnelles des entreprises notammentsous l'impulsion des nouvelles technologies de l'information et dela communication.

Depuis, beaucoup de travaux ontémergé autour de ce concept pourtenter d'examiner ses fondements,de mettre en avant ses avantageset de prévenir ses inconvénients.

Les exemples d'organisationsvirtuelles présentées et analyséesdans ces travaux se rapportent leplus souvent aux organisationsinterentreprises fonctionnant enréseau à l'aide des technologies de l'information et de la communi-cation.

Dans ce papier, nous nous intéressonsaux formes d'organisations virtuel-les intra-entreprises qui peuventémerger au sein des entreprisestraditionnelles autour de certainesfonctions, de certains projets ou decertains profils de métiers.

Nous nous interrogeons sur : com-ment ces formes d'organisationsvirtuelles émergent dans les entre -prises traditionnelles ? Quel est lerôle et la place des TIC dans ce processus ? Ces nouvelles formesd'organisations virtuelles peuventelles être assimilées à des innova-tions organisationnelles ?

Pour répondre à ces interrogations,nous nous sommes appuyées surles résultats d'une étude qualitative

menée auprès de neuf grandesentreprises membres du CIGREF,sur la base d’entretiens ouverts etsemi-directifs.

Les fonctions des personnes inter-rogées sont diverses : directeurs dessystèmes d'information, directeursstratégie, responsables rechercheset développement, maîtrise d'œuvre,maîtrise d'ouvrage, architecte/urba-niste, chef de centre de compétenceERP, managers métier, opérationnels.

L'étude s'est étalée sur la périodeallant de janvier 2004 à février 2006.Elle s'insère dans un programme derecherche plus large lancé par leCIGREF en 2004 pour étudier l'usagedes systèmes d'information commefacteur d'innovation et source decréation de valeur pour l'entreprise.

Pour répondre aux objectifs poursuivis dans ce présent papier,nous nous sommes focalisés dansl'analyse des entretiens sur lespoints suivants :

- typologie des formes d'organisa-tion virtuelle qui existent dans lesentreprises traditionnelles,- le processus d'émergence deces formes organisationnelles, - la place et rôle des TIC dans ceprocessus, - et les points de correspondanceentre ces nouvelles formes d'organisations virtuelles et lesinnovations organisationnelles.

Les caractéristiques de l'enquêtemenée peuvent être résuméesdans le tableau suivant :

Introduction

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Ainsi, nous nous proposons d'arti-culer ce papier autour de troisvolets : une définition de l'organisationvirtuelle que nous avons choisiecomme objet d'étude en la distin-guant des définitions existantes eten essayant d'en proposer unetypologie (section 1).

Une description du processus d'émergence des formes d'organi-sations virtuelles sera ensuite

présentée en mettant l'accent sur laplace et le rôle des TIC dans ce processus (section 2).

Enfin, une analyse de l'affiliation desconfigurations organisationnellesvirtuelles aux innovations organisa-tionnelles sera proposée et illustréepar une étude de cas d'une virtuali-sation du modèle de métier descommerciaux d'une Banque dedétail «Bankup» (section 3).

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Cahier n° 3 25

Secteurs d'activité Services Industrie Energie Public Total

Nombre d'entreprisesinterrogées

3 2 2 2 9

Nombre de personnesinterrogées

14 4 6 9 33

Organisationsvirtuelles observées

Gestionde la

relationclient

Achat, chaîne

logistique,conceptionde produit

Chainelogistique,Gestion

documen-taire

Achat,fonctionsmétiers

-

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Qu'est ce qu'une organisationvirtuelle ?

La littérature managériale est richede définitions qui tentent de cernerle concept d'organisation virtuelle.Becheikh et Su (2000) recensent 5 principales conceptions de l'orga-nisation virtuelle :

- L'entreprise virtuelle commefirme technologique : Une telle conception présentel'entreprise comme une organisationutilisant les TIC d'une manièreintensive pour rendre virtuelle certaines activités de sa chaînede valeur (activités principales etde soutien) afin de renforcer leurcontribution à la création devaleur pour l'entreprise (Rayportet Sviokla, 1995).- L'entreprise virtuelle commefirme dispersée géographique-ment :D'autres auteurs définissent l'organisation virtuelle comme une«organisation géographiquementdistribuée dont les membres sontliés par un intérêt commun ou unbut à long terme et qui communi-quent et coordonnent leur travailpar les technologies de l'informa-tion». (Ahuja et Carley, 1998 :3).- L'entreprise virtuelle commefirme externalisée :Cette conception de l'entreprisevirtuelle mesure le degré de virtualité de l'entreprise principale-ment par le nombre de fonctionsexternalisées.

Les technologies de l'information etde la communication sont considéréescomme l'essence et le catalyseur

de cette conception des organisa-tions virtuelles (Becheikh et Su,2000).

- L'entreprise virtuelle comme unecyberentreprise :La cyberentreprise est une formeextrême de l'entreprise externalisée.Elle se distingue de cette dernièrepar l'usage exclusif des TIC pourcoordonner les étapes de la chaînede valeur (de la production à larelation client), désormais toutesexternalisées.Ce type d'entreprise «ne possèdepas généralement de produits quilui sont propres. En ce sens, unecyberentreprise se contente devendre des produits fabriqués etportant le nom d'autres entrepri-ses. C'est en fin de compte unservice de courtage qu'elle offre».(Becheikh et Su, 2000).- L'entreprise virtuelle comme unréseau temporaire :Byrne (1993 : 99) associe cetteconception de l'organisation virtuelleà «… un réseau temporaire decompagnies indépendantes -fournisseurs, clients et mêmeanciens rivaux - reliées par lestechnologies de l'information etréunies pour se partager des qualifications, des coûts et l'accèsà leur marchés respectifs. Elle n'aura ni siège social, ni organigramme. Elle n'aura aucunehiérarchie, aucune intégrationverticale». L'entreprise virtuelle commeréseau temporaire se distinguealors de la cyberentreprise parl'absence d'entreprise possédantassez de pouvoir pour prendre la

Les nouvelles formes d'organisationsvirtuelles

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mission de coordonner les activitésdes autres membres du réseau.

Malgré les différences entre lesconceptions d'organisations virtuellesqu'on peut trouver dans la littérature,nous remarquons que depuis ledébut des années 2000, un consen-sus semble émerger autour dedeux principaux fondements d'uneorganisation virtuelle (Meissonier,2001) :

- «La création d'un réseau d'orga-nisations indépendantes (systèmede partenariat, de sous-traitanceou de coopération) dans le butd'atteindre un objectif commun.- L'utilisation des technologies del'information comme, quasiment,unique vecteur de coordination dutravail».

De quelles organisations virtuelles parlons-nous ?

Par rapport à la littérature existanteautour des organisations virtuelles,nous avons choisi de focaliser notre analyse sur les organisationsvirtuelles qui émergent au seinmême des entreprises traditionnelles.

Il s'agit des configurations organisa-tionnelles qui utilisent d'une manièreintensive les TIC pour repenser unefonction de l'entreprise (achat, fraisgénéraux…), reprendre un processusmétier (gestion des stocks, gestionde la relation client…), proposer unprojet collaboratif ou simplementréinventer un métier (commerciaux,supports techniques…).

Au regard des propositions deconceptions de l'organisation virtuelleprécédentes et sur la base desentretiens menés auprès des 9grandes entreprises membres duCIGREF, nous retenons les critères

suivants comme principalescaractéristiques des organisations virtuelles :

- Usage intensif, voir exclusif destechnologies de l'information et dela communication.- Absence des frontières hiérar-chiques de la fonction ou de l'activitédécrite. Par exemple, une fonctionachat complètement disperséedans l'entreprise où tous lesmembres des autres fonctionspeuvent, selon les délégations quileur sont permises, passer descommandes d'achat.- Dispersion spatio-temporelledes acteurs impliqués dans l'orga-nisation virtuelle. Cette dispersionpeut aussi dépasser les frontièresde l'entreprise pour s'entendre àl'extérieur de l'entreprise (processusimpliquant des fournisseurs, activité impliquant les clientsfinaux…etc.).- Poursuite d'un objectif communou servir un intérêt unique, ceux préalablement définis parl'entreprise.

Typologie des nouvelles formes d'organisations virtuelles

Quatre principales formes d'organi-sations virtuelles peuvent être distinguées :

- Fonction virtuelle : Les frontières physiques et hiérarchiques de la fonction sontdésormais inexistantes. Tous lesacteurs de l'entreprise son t susceptibles d'être rattachés àcette fonction (exemples : la fonction achat, frais généraux…).- Processus virtuel :Certains processus de l'entreprisepeuvent être complètement virtualisés. Il s'agit des processus

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Cahier n° 3 27

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dématérialisés dont les acteursimpliqués sont dispersés dansl'espace et dans le temps (exem-ple : processus de gestion de larelation client entre plusieurs sitesd'une même entreprise. Lamutualisation entre ces sites surla base d'un dispositif technologiqueenrichi (CRM + CTI1) permet auxconseillers clientèles de gérer desdossiers clients quel que soit l'origine de l'ouverture du dossier,son historique, le site en ques-tion…etc.).- Projet virtuel :Il s'agit généralement de projets à horizon temporel court qui impliquent plusieurs acteurs del'entreprise pour atteindre unobjectif précis. Pour être virtuels,ces projets se basent notammentsur l'usage intensif, voir exclusifdes outils collaboratifs.

- Travail virtuel :

Grâce notamment aux technolo-gies sans fil, plusieurs métiers del'entreprise ont évolué (exemple :commerciaux, agents techniques,supports de maintenances…).Par exemple, les commerciaux dit«debout» qu'on trouve dans lesecteur de l'assurance : il s'agitdes commerciaux salariés de l'en-treprise dotés de tout un dispositiftechnologique qui leur permetd'accéder à distance aux informa-tions nécessaires à la commercia-lisation de leurs produits (catalo-gue, tarifications, combinaisonsde produits, clauses contractuel-les…), de conclure des contrats etde les enregistrer directementdans les bases de données de lacompagnie.

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Formes d'organisations virtuelles

ExemplesTechnologies généralement mises enplace pour la supporter

Fonctions virtuelles Achat, communication, …

Outils collaboratifs, progiciels de gestionsintégrés, gestion électronique des données…

Processus virtuels Gestion de la relationclient, …

Gestion électronique des données…

Projets virtuels Conception de produit, Outils collaboratifs…

Travail virtuel

Commerciaux, support techniques,agents de maintenance…

Technologies sans fil,outils collaboratifs…

Tableau 1

Typologie desformes

d'organisations virtuelles

1 CRM : Customer Relationship ManagementCCI : Couplage Téléphonie Informatique

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Dans cette section, nous nous proposons de décrire, sur la basedes entretiens effectués, la manièredont les organisations virtuellesémergent dans les entreprises traditionnelles en se focalisant surla place et le rôle des TIC dans ceprocessus.

Comprendre le processus d'émergence des organisationsvirtuelles :

L'émergence d'une forme d'organi-sation virtuelle dans une entrepriseest avant tout l'avènement d'unchangement organisationnel sup-portée d'une manière intensive parles technologies de l'information etde la communication.

Nous remarquons que l'apparitiond'une telle forme organisationnellequel que soit son type (fonction,processus, projet pour travail virtuel) obéit généralement auxprincipales étapes suivantes :

- Une réflexion stratégique : Tout changement organisationnel,qu'il soit virtuel ou pas, n'a desens que s'il sert un objectif alignéà la stratégie de l'entreprise. - Une déclinaison organisationnelle :Une fois décidé, l'objectif straté-gique est ensuite décliné sur leplan organisationnel.- Une opérationnalisation techno-logique :Enfin, pour rendre le changementorganisationnel opérationnel, ilfaut déployer le dispositif techno-logique adéquat.

L'exemple de la gestion de la relation client d'une compagnied'assurance explicite bien ce processus d'émergence des organi-sations virtuelles : la fidélisation desclients pour constituer ou maintenirun avantage concurrentiel (réflexionstratégique) s'est traduite par letransfert de l'activité de la gestiondes sinistres des agents commerciauxvers des centres d'appels (change-ment organisationnel). Pour répondreà l'objectif stratégique de départ, lacompagnie a décidé de mutualiserses centres d'appels en les dotantd'un dispositif CRM évolué (opéra-tionnalisation technologique.

Ces étapes ne sont pas forcémentséquentielles. Elles peuvent êtrerécursives et résultent très souventd'allers-retours d'ajustement pourprendre en compte les réactionsdes acteurs impliqués dans le projet(temps d'appropriation, accompa-gnement du changement…) ainsique les caractéristiques de l'envi-ronnement interne et externe.

Par ailleurs, nous remarquons à travers les entretiens que ce processus n'est pas perçu de lamême manière par tous les acteursimpliqués dans ce changement. Ladifférence de perception portenotamment sur la place et le rôle dela technologie dans le processusd'émergence des organisations virtuelles et, d'une manière plusgénérale dans tout changementorganisationnel supporté par lesTIC.

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Processus d'émergence des organisations virtuelles

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Place et rôle de la technologiedans l'émergence des organisations virtuelles1

A l'examen des entretiens, nousremarquons que selon le rapport del'acteur à la technologie, la portée etle rôle des outils de gestion sontperçus de manière différente.

Deux populations peuvent être distinguées : les «opérationnels»utilisateurs des outils pour exécuterleur activité (ci-après, utilisateurs)et les managers utilisateurs desoutils pour la piloter (ci-après,managers).

Pour les managers, les outils degestion sont d'abord un moyen pouropérationnaliser un changementstratégique et organisationnel préalablement décidé (par exemplestandardisation des pratiques entermes d'achats, à travers un progicielde gestion intégré, pour améliorerle pouvoir de négociation avec les fournisseurs, intégration d'unCRM pour améliorer la qualité de larelation client…). L'intérêt qu'accor-dent les managers aux outils degestions se rapporte donc plus à l'esprit de la technologie (pourquelle finalité ? pourquoi ?) qu'à sestraits matériels (qu'est ce qu'ellepermet de faire ? quoi ?).

Pour les utilisateurs, les outils de gestion sont là pour apporter un changement à leur façon de travailler. Ils sont alors très sensiblesaux changements que l'outil apporteà leur métier. La finalité de l'outilleur est rarement communiquée et les formations qui leur sontdispensées sont généralement

focalisées sur les aspects techniqueset matériels de l'outil.

Si la différence entre la vision desmanagers et celles des utilisateursest perceptible dans les premièresréponses des interviewés, chaqueacteur est plus ou moins conscientde la vision de l'autre. Sauf que les actions mises en œuvre pourréduire cette différence ne sont pastoujours efficaces : une communica-tion sur les objectifs du changementconcentrée sur la phase du lance-ment du projet, des objectifs parfoisoubliés sous la pression de la com-plexité technologique de certainsprojets, des formations souventcentrées sur les traits matériels etde l'utilisation de l'outil, difficulté àfaire adhérer les acteurs concernésau projet…etc.

Cette différence de perception entreutilisateurs et managers sur la portéede la technologie fait apparaître ausein des équipes, des premièrestensions.

«(…) ce sont des projets com-plexes. Et donc, ils étaient trèscoûteux et comme c'étaient destechnologies nouvelles, on est unpeu tombé dans le piège que j'aidécrit tout à l'heure, c'est-à-direqu'on a mis beaucoup d'énergiepour faire sortir la solution et parfois, on a perdu en cours deroute les objectifs qu'on s'étaitfixés au départ d'optimisation desprocessus».

Ce manque de visibilité sur lesobjectifs du changement peutconduire au contournement de l'outil ou à la sous exploitation decelui-ci (par exemple, des conseillers

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1 Adapté de Jomaa, H. et Fernandez, V. (2006) " ERP et performance des grandes entreprises : repositionne-ment de la relation à la lumière du paradigme de Giddens ", XIème colloque de l'AIM.

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clientèle qui utilisent un CRM pourgérer la relation client et non pouraméliorer la qualité de service oupour fidéliser la clientèle, ne pas utiliser le système d'informationachat pour choisir le fournisseuravec qui on a signé un contrat spécial ou un contrat de préférence,mais «juste» pour passer une com-mande de manière harmonisée…).

«… Or, plus le projet adresse desenjeux de transformation, au senspas simplement de changementde procédures, plus le projetadresse des problématiques detransformation métier, et plus lesuccès du projet, c'est-à-dire sonretour sur investissement, est lié àla manière dont l'ensemble desacteurs et pas simplement utilisa-teurs du SI se sont appropriés leprojet et pas simplement l'outil !…

Les solutions même si elles sontbonnes, si elles sont mises sur latable comme ça, si personne necomprend quels sont les enjeuxen matière de transformation desmétiers,… quelles sont les difficul-tés, vers quoi on va, avec quelrythme en matière de transforma-tion, c'est quoi les freins, c'estquoi les leviers, c'est quoi le

moteur pour le changement, c'estquoi le positionnement du projeten matière de communication surquoi je le vends, qu'est ce que çava apporter aux différents acteurs,est ce qu'il y a effectivement une stratégie un peu " win-win " àl'intérieur du projet… c'est un petitpeu tout ça. Si tout ça n'est pascompris et approprié, en général,vous n'avez pas les résultats desinvestissements que vous avezréalisés ».

Par ailleurs, les acteurs impliqués(managers et utilisateurs) ont tendance à voir dans l'outil la causede ces changements (dont ils neperçoivent pas tous l'intérêt à causede la différence de perception de laportée de l'outil, plus particulière-ment, de son esprit) et non l'occasiond'apporter des changements voulusà l'entreprise.

Cette subtilité dans la perceptiondes acteurs du rôle des technolo-gies de l'information entre cause du changement et occasion ouopportunité d'apporter un change-ment voulu à l'entreprise, fait naîtrechez les acteurs des réticences etune certaine appréhension vis-à-visde l'outil.

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Cahier n° 3 31

Tableau 2

Portée et rôledes TIC dansles fonctions

virtuelles

Managers Utilisateurs

Rôle des TIC Les TIC comme opportu-nité pour mettre enœuvre un changementorganisationnel voulu.

Les TIC comme caused'un changement dansleur processus de travail.

Portée des TIC Vision orientée vers l'objectif de la technologie,son esprit, ce qu'elle per-met d'atteindre commerésultats (pourquoi ?).

Vision plus focalisée sur les traits matériels de la technologie, sonutilisation, ce qu'elle permet de faire (comment ?).

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Quand les organisations virtuellesdeviennent des innovations organisationnelles ?

Ainsi, on remarque que les différen-ces dans l'appréhension de la portée et du rôle des TIC dans l'émergence des organisations virtuelles est une première sourcede conflit et de perte d'efficacité ausein des entreprises. Pour l'éviter,la communication sur l'esprit del'outil c'est-à-dire l'objectif straté-gique recherché par le changementorganisationnel (et non seulementsur ses caractéristiques tech-niques) et sur l'apport de l'outil entant qu'opportunité de changementest un facteur critique de réussitede l'organisation virtuelle enquestion.

La notion d'esprit de la technologiea été proposée par DeSanctis etPoole (1995) qui insistent sur la distinction entre la dimension technique de la technologie(traits matériels, caractéris -t i ques techniques…) et sadimension stratégique, qu'ilsappellent «esprit associé».Dans un groupware par exemple,un trait matériel peut prendrel'aspect d'une procédure devote. L'esprit relatif à ce traitpeut être associé à un espritdémocratique (Jomaa, H. etFernandez, V., 2006).

Avant d'examiner si des organisa-tions virtuelles peuvent être desinnovations organisationnelles, il fautd'abord définir la notion d'inno-vation organisationnelle.

Qu'est ce que l'innovationorganisationnelle ?

Innovation par rapport à quoi ?

Pour examiner l'émergence d'uneinnovation, certains auteurs prennentcomme référence le marché(concurrents) et d'autres, le grouped'entreprises issues d'un mêmesecteur. Pour eux, une entreprisen'est innovante que si elle introduitune innovation dans son marché.

Notre référence dans le cadre denos travaux est l'entreprise. Uneentreprise est considérée commeinnovante - d'un point de vue organisationnel - si, à travers un

changement organisationnel, ellecontribue à améliorer la performancede son entreprise. Ce changementsera examiné par rapport àl'historique de l'entreprise et à sonexistant et pas forcément par rapport à ses concurrents.

Ainsi, une entreprise ayant introduitun changement organisationnelpour copier un concurrent peut êtreconsidérée comme une entrepriseinnovante si ce changement connaîtun succès.

Ce positionnement est nécessairepour pouvoir analyser le processusd'émergence des nouvelles formesorganisationnelles au sein desentreprises traditionnelles - en l'occurrence les organisations virtuelles - et pour examiner lespoints de correspondance de cesformes avec les innovations organi-sationnelles.

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Innovation technique ou innovation organisationnelle ?

L'innovation «est technique lorsquela nouveauté affecte les caractéris-tiques physiques et matérielles desbiens et services, produits ou pro-cédés ; elle est organisationnellelorsqu'elle affecte les modes decoordination (et de motivation) deséléments d'une structure sociale quien assurent le fonctionnement2».Les deux sont souvent liées, l'acquisition d'un nouvel outil peutamener à revoir les façons de travailler ou encore penser l'organi-sation différemment peut amener àfaire des choix sur les ressourcesdont dispose l'entreprise. La«technique» et «l'organisation»interagissent pour co-évoluer.

Le risque dans la définition de l'innovation organisationnelle est dene définir que le changement, dansce cas la nouveauté resterait austade d'invention.

Invention versus innovation

Les travaux classiques, en particulierceux de J. Schumpeter (1911) dissocient la notion d'invention decelle d'innovation. L'invention étantentendue comme «la réalisationd'une nouvelle ressource pour l'en-treprise». L'innovation correspond à la mise sur le marché d'un bienintégrant cette nouvelle ressource.

Pour qu'il y ait innovation, il faut quele changement qui a permis de proposer à l'entreprise une nouvelleressource (invention) rencontre unsuccès dans l'organisation (innova-tion), c'est-à-dire qu'il soit acceptépar les acteurs de l'organisation

avant de se traduire en avantageconcurrentiel pour celle-ci (facteurde différenciation, profits, etc.).

Qu'est ce que l'innovation ?

Le concept d'innovation a des défi-nitions diversifiées qui divergentselon les écoles de pensée.L'innovation est souvent associée àl'invention ou la créativité, c'est-à-dire au processus d'innovation. Elleest aussi considérée comme lerésultat de ce processus, donccomme un produit.

J. Schumpeter est l'un des premiersà donner une définition complète del'innovation. Il la définit commetoute nouveauté introduite dans l'organisation et impactant la pro-duction : un nouveau produit, unnouveau procédé de production,une nouvelle organisation de l'in-dustrie, l'acquisition d'une nouvelleressource, un nouveau marché. J.Schumpeter parle de nouvellescombinaisons entre ces cinq types.Il considère «l'entrepreneur» commefigure emblématique de l'innova-tion, à l'origine de la création decombinaisons nouvelles et de profits.

La compréhension des apports dela littérature et les éléments du terrain nous permettent de proposernotre définition de l'innovation organisationnelle : Un changementorganisationnel pro-actif ou adaptatifissu d'un choix stratégique et quiprocure un avantage concurrentielou permet de maintenir celui-ci.

C'est une volonté de la stratégied'impulser un changement dansl'organisation pour se constituer un

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Cahier n° 3 33

2 Durand Th., " Innovation ", in R. Le Duff (éd.), Encyclopédie de la gestion et du management, Dalloz, Paris,1999, p.495-497.

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avantage concurrentiel, pour lemaintenir ou pour ne pas se fairedépasser par la concurrence.

L'innovation apparaît donc commeune invention ayant trouvé un succès au sein de l'entreprise. Eneffet, pour passer de l'invention àl'innovation, il faut que le change-ment impulsé dans le cadre de l'invention contribue à la performancede l'entreprise. Cette contributionest tributaire de plusieurs conditionsque nous présenterons dans l'iden-tification des organisations virtuellesen tant qu'innovations organisation-nelles.

Quels sont les différents processus d'innovation ?

Nous commencerons par présenterles trois conceptions du processusd'innovation pour comprendre celuiqui conduit à faire émerger de nouvelles organisations, en l'occur-rence l'organisation virtuelle.

- Une conception linéaire du processus : modèle séquentiel dupassage de l'invention à l'innova-tion, où il n'y aurait aucune interaction entre les activités deR&D, production et marketing.C'est le modèle classique dumode de production de masse dela II° révolution industrielle. Danscette conception, il existe unedichotomie entre l'organisation etla technique.- Un nouveau paradigme techno-économique, celui de la III° révolution industrielle, met enavant une approche interactive du processus d'innovation3. Lesdifférentes étapes suivies par leprojet d'innovation sont dites

«enchaînées» les unes aux autres par des mécanismes derétroaction.

Cette deuxième conception restetout de même proche du modèleséquentiel, avec des étapes biendéfinies qui se succèdent, même sià la différence de la premièreconception, le projet d'innovation vasuivre des va-et-vient entre les différentes étapes.

- Une conception systémique prenant en compte les diverseslogiques des acteurs de l'organisationqui sont un facteur important deréussite du processus d'innovationet donc de l'innovation. Les étapes suivies par le projet d'inno-vation ne sont plus séquentielles. La caractéristique fondamentalequi distingue ce processus d'inno-vation des deux premiers est l'importance donnée à l'apprentissageet à la récursivité des interactionsentre les acteurs et la technologie.Cette dernière n'est plus appré-hendée seulement à travers sestraits matériels (technique), maisaussi à travers sa capacité à créerdes connaissances nouvellespour l'entreprise (technologie).

L'identification de l'organisation virtuelle en tant qu'innovation organisationnelle

Sur la base des entretiens menés,nous remarquons que dans le processus de création d'une organi-sation virtuelle quel que soit sontype (fonction, processus, projet ou travail virtuel), le changementorganisationnel apporté présente àl'entreprise une nouvelle ressourceque les acteurs peuvent exploiter.

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3 Voir Cahier introductif, Cahier de recherche du CIGREF, 2004.

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A ce stade, l'organisation virtuellepeut ainsi être considérée commeune invention initiée par un choixstratégique (pro-actif ou adaptatif),décliné en un changement organi-sationnel et opérationnalisé par undispositif technologique.

Pour devenir une innovation, cetteinvention (l'organisation virtuelle)doit justifier de sa contribution à laperformance de l'entreprise.

Du stade d'invention à celui de l'innovation organisationnelle, nousremarquons que l'organisation virtuelle obéit à une conception systémique du processus d'innovationprésentée plus haut.

En effet, dans les organisations virtuelles observées, le processusd'émergence de ces formes d'orga-nisations n'est pas aussi linéaireque notre première description a pule présenter (choix stratégique - changement organisationnel -opérationnalisation technologique =organisation virtuelle). Plusieursajustements ont lieu pour tenir comptedes aléas de l'environnement interne(pression des partenaires sociauximpliquant des ajustements dans leprojet de changement organisationnelpar exemple), de l'environnementexterne (pression concurrentielleinduisant un changement de capstratégique), des différences dansl'appropriation du dispositif techno-logique déployé par les acteurs (unoutil repoussé par les utilisateursdirectement impliqués peut conduireà repenser le modèle organisationnel

pour proposer des outils mieuxadaptés à leur besoins4)…etc.

Le passage d'une organisation vir-tuelle du stade d'invention à celuid'innovation organisationnelle estdonc tributaire de l'évolution de cesajustements. Si ces ajustementspermettent à l'entreprise de maintenirou de créer un avantage concurrentiel,alors cette forme d'organisation virtuelle est une innovation organi-sationnelle, sinon, il s'agira d'unavatar à éviter.

Or, nous remarquons à travers lesentretiens que la contribution d'uneorganisation virtuelle (processus,fonction, travail ou projet) à la performance de l'entreprise estfonction de plusieurs variables dontl'outil qui la supporte. Ce constat,unanimement partagé, pose deuxprincipaux problèmes : d'une part,l'identification des autres variablescritiques qui conditionnent la perfor-mance de l'entreprise (ou de lafonction en question), et d'autrepart, la manière dont ces variabless'ajustent entre elles à travers l'activité des acteurs (Jomaa, H. etFernandez, V., 2006).

Si notre étude nous a permis denous apporter quelques élémentsde réponses sur la première ques-tion5 , nous n'avons pas pu tirer deconclusions définitives sur lamanière dont ces variables s'ajus-tent entre elles pour caractérisercette performance (condition sinequa non pour que l'organisation virtuelle devienne innovation orga-nisationnelle).

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Cahier n° 3 35

4 Comme cela a été précisé dans la distinction entre innovation technique et innovation organisationnelle, nousremarquons effectivement que les deux sont souvent liées, l'acquisition d'un nouvel outil peut amener à revoir les façons de travailler ou encore penser l'organisation différemment peut amener à faire des choix sur les ressources dont dispose l'entreprise.5 Identification des variables critiques qui conditionne la contribution d'une organisation virtuelle à la performancede l'entreprise.

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Dans certaines entreprises, le suivide la performance d'une organisa-tion virtuelle est considéré commeun moyen efficace pour améliorer la performance de cette entité ets'assurer de sa contribution à laperformance de toute l'entreprise.Les indicateurs de suivi de la performance revêtent dans ce casune double dimension : cognitive etnormative. En effet, le pilotagemensuel de la performance, parexemple sur la base d'un tableau debord d'indicateurs, permet aux

acteurs de prendre conscience deleur situation actuelle (à travers laperformance réalisée) et de cellevers laquelle ils veulent aller (à travers les objectifs cible de perfor-mance). Le suivi de la performanceprésente donc pour les acteurs à lafois une ressource (une motivation,un objectif à atteindre…) et unecontrainte à leur action (cadrage deleurs actions, obligation d'atteintedes objectifs…). Elle est ainsi utilisée comme une action d'accom-pagnement du changement.

L'apport du suivi de la performanceà l'évolution de l'organisation virtuelle vers une innovation organi-sationnelle est reconnu par lesacteurs de ces équipes et mêmeréclamé (un utilisateur qui n'a pasreçu le dernier tableau de bord suiteà un retard de fabrication, dit « manquer de repères chiffrés »).

Les autres sources qui condition-nent le processus d'évolution d'uneorganisation virtuelle vers une innovation organisationnelle, lesplus évoquées dans les entretienssont relatives à : l'outil (surtout en termes de fiabilité, que «ça marche») de la compétence desacteurs qui l'utilisent (compétencemétier), de la structure organisa-tionnelle de la fonction (composition

des équipes, structure du manage-ment…) et de l'efficacité du processusde travail pris de bout en bout (à nepas confondre avec le processus detravail que la technologie décritet/ou prescrit).

A ce stade de l'étude, nous nousréservons de généraliser sur lessources critiques qui conditionnentla contribution de l'organisation virtuelle à la performance de l'entre-prise (et donc l'identification d'uneorganisation virtuelle à une innova-tion organisationnelle). Sur leur processus d'imbrication et d'ajuste-ment, nous ne pouvons que constaterque l'articulation de ces sources sefait avec et à travers l'action desacteurs. L'implication directe decette constatation, est la prise de

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«… La notion de pilotage de la performance, est incluse dans ce qu'onappelle la conduite du changement. Ce ne sont pas deux sujets séparés. C'est pas le même sujet non plus. C'est inclus dedans, c'estune partie, le pilotage de la performance c'est une partie de la conduitedu changement dans (les) projets de transformation d'une manièregénérale… Le pilotage de la performance est un levie r d'accompagnement du changement ça permet à l'ensemble desacteurs d'avoir une vision partagée de voilà ce qu'il faut atteindre etvoilà où en est on. Et ces indicateurs là sont extrêmement importantsparce qu'ils sont tous des démembrements du bilan économique ».(Dirigeant responsable de l'accompagnement du changement).

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conscience que la phase d'usageordinaire est tout aussi importante(voire plus importante) que la phaseinitiale d'intégration du dispositiftechnologique. Même si l'entreprise asuivi dans cette phase initiale d'intégration de la technologie pouropérationnaliser un changement

organisationnel voulu, des schémasparticipatifs pour prendre en compteet impliquer les utilisateurs dans le changement qu'apportera l'outil à leurs pratiques, la phase de généralisation de l'usage est l'épreuve la plus délicate à passer.

Sur la base de 6 entretiens menésauprès d'une grande banque, quenous appellerons «Bankup», nousproposons une illustration du processus d'émergence d'un casd'organisation virtuelle tel que nousl'avons décrit, de la réflexion stratégiqueà l'opérationnalisation technologiqueen passant par les changementsorganisationnels et les ajustementsopérés entre les différentes phases.Nous choisissons pour cela le quatrième type d'organisation virtuelle, à savoir le travail virtuel.

Nous examinerons pour cela latransformation du modèle demétier des vendeurs de«Bankup». La virtualisation dumétier de vendeur s'est effec-tuée en grande partie dans lecadre d'un projet virtuel«Bankup project» autour d'uneplate forme technologique.Nous nous focaliserons dans cequi suit principalement sur leprocessus de changement dutravail des commerciaux.

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Cahier n° 3 37

Etude de cas : l'entreprise « Bankup »

Interrogé sur la performance de ses équipes, un manager d'une unitédotée d'un CRM précise : «… Ça montre bien qu'il y a une problématiquequelque part. Elle n'est pas avec une inconnue unique la probléma-tique. Ca serait trop simple, c'est justement une équation avec sept ouhuit inconnus… C'est bien le problème! I Mais, il y a des inconnus quicommencent à être connus. Les outils s'en est un…. la compétence(des équipes)… (On fonctionne) aujourd'hui avec des gens qui appren-nent le métier, donc forcément n'ont pas la même rentabilité ni la mêmeproductivité que des gens qui sont autonomes et expérimentés. Doncça, ça fait partie de l'explication. Des équipes qui ont des tailles tropimportantes… parce que derrière, il faut trouver la structure… hors vousêtes dans des équipes en construction… Alors tout ça, oui, finit parémerger, mais se met en place petit à petit dans le temps. Ce n'est pasaussi simple que ça en a l'air. Quand vous mettez tous ces ingrédientslà bout à bout, vous avez une bonne partie de l'explication. C'est qu'onest en devenir. On va progresser, on va s'améliorer, mais, c'est clairqu'on a aussi besoin d'un peu de temps, au moment où je vous parle ».

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Dans le cas de l'entreprise«Bankup», le changement portantsur le métier des commerciaux, aété décidé par l'entreprise, auniveau de la stratégie, pour améliorerla relation client, le travail des utilisateurs (commerciaux et autres)et augmenter l'achat de services.La volonté de la stratégie a été que

le changement basé sur le déploie-ment d'outils technologiques, soitbien instruit par les métiers qui ontété redéfinis dans ce cadre.L'objectif poursuivi par l'entrepriseétait clairement d'améliorer sa performance en terme de nombred'offre de services et la créationd'un avantage concurrentiel.

Il y a, dans ce cas, une volonté de ne pas totalement «détruire»l'existant avec toute la connota-tion négative que ce verbe peutcomporter, mais de l'améliorer à travers des innovations

incrémentales sur la durée. Il y a ici l'idée de destructioncréatrice de J. Schumpeteravec la réflexion sur l'existantqui peut disparaître avec lesnouveaux changements.

Cette décision de changementvient d'une réflexion préalable,

profonde sur les métiers del'entreprise.

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«[…] c'est là l'originalité du choix qui a été fait, c'est un choix à la foisempreint d'audace et de pragmatisme. D'audace pour des raisons surlesquelles on va revenir, parce que la banque a vraiment pris le projetcomme étant stratégique qui méritait des moyens, une organisation etune application du management. Mais du pragmatisme parce que lemodèle était de se dire qu'on ne va pas chercher à optimiser la banque… d'un côté et à renforcer la banque à distance de l'autre, on va plutôtessayer de faire une vraie banque multicanal qui combine deuxsystèmes, le client restant bien sûr au centre de la relation.

[…] On a un objectif, on ne veut pas être les derniers de la classe, il fautque la banque de détail réagisse, si on ne veut pas être mangé, il fautêtre meilleur que les autres […]».

« Il y avait d'autres phénomènes qui amenaient à dire il faut bouger, il va y avoir des départs du réseau c'est le moment de renouveler l'ensemble de l'encadrement de l'opérationnel du réseau, de rechangerle métier de chacun, le métier de chaque personne du réseau a été revu ».

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L'objectif était de faire évoluerles métiers pour les recentrersur la relation client. Il s'agis-sait de changer le modèle endéplaçant la vision métier du

produit au client. Pour cela, lerecours à l'expérience accumulée(compétences) et à la capitali-sation des connaissances s'avère nécessaires.

Ce changement du modèle du métier de vendeur s'est

accompagné d'un changementde culture.

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Cahier n° 3 39

« […] c'est là qu'on est parti dans une étape quasiment uniquementbancaire, ça veut dire que toute l'année […] a été une réflexion sur lemodèle bancaire, sur les possibilités, le recensement des organisationsdans le réseau, sur les évolutions, les schémas d'organisation duréseau, est apparu cette notion de création de pôle service client c'est-à-dire de back office centralisé, de cumul de compétences, d'iden-tification des compétences, etc. toute cette réflexion a eu lieu toute l'année […] et bien sûr au fur et à mesure que le modèle arrivait, au furet à mesure que les choses se précisaient, s'est posé le problème del'informatique et à partir de ce moment le problème informatique estrentré en route avec le problème GRC . Donc il y a eu dans cettephase-là, une analyse de l'existant et une réflexion stratégique aussi :comment on allait passer d'un système « batch » gestion produit et système temps réel gestion client ».

« C'est la direction de la branche, c'est-à-dire que quand la branche aété créée, s'est posé le problème de recentrer la vente sur la relationclient c'est-à-dire les banques vendaient des produits et ils se sontaperçus qu'il fallait gérer des clients ce qui n'est pas tout à fait de mêmenature. Donc tout notre système d'information, tous nos processus bancaires étaient organisés " front back " pour vendre nos produits. Onconnaissait la vente du produit, on ne connaissait rien de la vraie vente en possibilité d'aide à la vente au départ. Je pense que tout ceproblème, recentrer le modèle sur la question de la relation client multicanal avec des rôles de plus en plus fort où on optimise tous lesphénomènes de productivité qui sont retrouvés après 20 ans d'expé-rience dans le modèle et dégager énormément de temps pour l'activitécommerciale. Et, re-cibler les vendeurs dans leur métier de vendeur etleur donner les outils pour vendre et pas simplement enregistrer lavente.On n'a pas mis en avant uniquement la dimension productivité, ily a aussi la dimension commerciale, la dimension satisfaction client […] ».

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A l'origine du changement organisa-tionnel, une réflexion stratégique aété initiée. Elle s'est déclinée en

un plan d'action à plusieurs dimensions, dont notamment ladimension organisationnelle.

La restructuration des agencesau niveau des animations degroupe (commercial) s'estappuyée sur l'acquisition et

l'intégration de nouveaux outilsafin de permettre aux utilisa-teurs de revoir leur façon detravailler.

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« Alors, avec un phénomène énorme de culture qui est passé et qu'onn'a pas vu passer, c'est le partage du client au niveau du réseau.Aujourd'hui, si vous voulez, un client appartenait, dans la cultureBankup, à un portefeuille, le multicanal, le centre d'appel, ont fait que leclient devienne Bankup avant d'être chargé clientèle. "Cela prend dutemps, et c'est clair que les périodes qu'on a actuellement, des foisposent quelques questions à nos utilisateurs parce que des fois des problèmes de performance, des fois des problèmes de modificationculturelle ».

« Je trouve que c'est un projet qui est assez exemplaire au plan stratégique parce qu'il a en même temps décliné toutes les dimensionsd'un projet opérationnel bancaire c'est-à-dire qu'on revient dans le projet où il y eu une dimension système d'information qu'on représenteun peu, encore que cette dimension système d'information a été attrapée par la voie des processus, des façons de faire malgré tout etpas uniquement sur la belle architecture. Et en plus, on a intégré cettedimension organisation qui est également une refonte des structuresd'animations des groupes puisqu'on a essayé de faire des groupes detaille plus importante, en mettant dans les agences des structures d'animation de groupe par segments de marché ».

« Et, ça a permis d'enclencher une dynamique qui fait que la mise enplace des nouvelles structures, des nouveaux outils etc., peut être l'occasion de réenclencher une dynamique commerciale qu'on aurait dumal à réenclencher autrement. Alors, … parce qu'il faut s'approprier lesoutils mais aussi parce que c'est l'occasion de se remettre en causeque de travailler autrement ».

Pour mettre en œuvre le changement du modèle dumétier de la vente avec la rela-tion client au centre, en d'autres

termes pour supporter la nou-velle organisation, une équipede projet temporaire a étécréée.

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Cahier n° 3 41

Afin que le changement devienneune innovation, nous avions posécomme condition la contribution dece changement à la performancede l'entreprise. Celle-ci passenotamment par l'adoption par lesutilisateurs de ces changements, en

l'occurrence, la mise en place denouveaux outils qui changent leurfaçon de travailler. Donc, il s'agit dese poser la question de l'appropria-tion des outils par les utilisateurs etcela est passé par leur implicationdans le projet.

Par ailleurs, pour maintenir l'avantage concurrentiel créé, ilfallait laisser le champ libre à lacréativité et à l'esprit d'initiativetout en impliquant les utilisateurs

dans la réussite du projet. Il s'agiten effet, des conditions néces-saires à l'émergence et aumaintien des innovations orga-nisationnelles.

« On a créé une entité programme, des gens sont venus en disant voilàon fait partie du programme Bankup project et on a fait le programmeBankup project. " " Donc, l'ensemble de l'équipe, on la met en dehorsdes structures opérationnelles mais une structure temporaire qui a arrêtéla structure programme qu'on est en train de démonteractuellement.Pilotage marketing. Il y avait aussi le projet Alpha. C'est lanouvelle organisation centre d'appel et changement.Centre d'appeltéléphonique qu'on a créé. C'est un changement, derrière ça il y avaittoute la mise en place des pôles service client, le regroupement des …Donc ça c'est plutôt, en générique c'est le changement mais ce n'estpas que la formation, c'est la mise en place de nouvelles structures ».

« Donc il faut laisser ce qu'il faut de créativité, d'initiative, j'allais diretrivialement de " bordel ". Mais il ne fallait surtout pas commencer àstructurer parce que là vous cassez la dynamique.Mais en plus de ça,dans l'esprit, tout le monde était responsable c'est-à-dire que chaquepersonne, chaque individu avait la brique du mur et était responsablede sa brique. Et si sa brique ne marchait pas, le projet était planté.Il yavait des acteurs dans le projet et chacun avait sa brique.Donc c'estplus une question de confiance, si les gens sont en phase entre eux,s'ils sont solidaires, à part un ou deux, globalement est-ce que tous lesbons ont envie d'y aller, vous y allez.Et donc c'est très important, il yavait vraiment cet esprit de projet et de voir réussir quelque chose ».

« Donc tout a été conçu pour faire que ce réseau soit porté par les opérationnels du terrain et le sentiment en tout cas que c'était pour eux,à travers eux et qu'une partie des gens qui était dans le projet venait dechez eux.Et en plus il y a eu des implications forte au démarrage des utilisateurs, on a démarré ça par des ateliers, on a fait parler les genssur ce qu'ils voulaient, etc. ».

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L'examen du processus d'émergencedes organisations virtuelles au seindes grandes entreprises tradition-nelles nous a permis d'identifier unedémarche systémique qui reposecertes sur trois principales phases(choix stratégique (proactif ouadaptatif), changement organi -sationnel et opérationnalisationtechnologique), mais qui réfute toutordre séquentiel entre elles. Eneffet, nous remarquons à travers lesentretiens que des ajustementssont systématiquement effectuésavant, pendant et après la naissanced'une organisation virtuelle quelquesoit son type (projet, fonction, travail ou processus virtuel). Cesajustements sont souvent produitspour tenir compte des aléas envi-ronnementaux, des propriétés del'entreprise ou encore des modalitésd'appropriation des acteurs de ceschangements.

A travers les changements organi-sationnels et technologiques qu'el-les apportent, les organisations vir-tuelles sont facilement identifiablesà des inventions. Pour devenir desinnovations organisationnelles, ilfaut en outre qu'elles justifient deleur contribution à la performance

de l'entreprise (constitution oumaintien d'un avantage compétitif).

Même si les résultats de notreétude ne nous ont pas permis à cestade de généraliser sur la contribu-tion de toute organisation virtuelle àla performance de l'entreprise etdonc à leur affiliation systématiqueà des innovations organisationnelles,nous avons néanmoins pu identifierles conditions qui permettent cepassage et les ressources critiquesqu'il faut suivre de près pour cela. Il s'agit en effet de : la fiabilité del'outil mis en place, la compétencedes acteurs impliqués, la structureorganisationnelle de l'entité, l'efficacitédu processus de travail pris de bouten bout et le suivi de la performancede l'équipe du projet virtuel, de l'équipe impliquée autour du pro-cessus virtuel, de la fonction virtuelleou encore du travail virtuel.

Le schéma suivant permet de résumer la démarche systémiquequi conduit à l'émergence d'uneorganisation virtuelle et les condi-tions de son identification à uneinnovation organisationnelle.

Conclusion

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Cahier n° 3 43

Figure 1:

De l'organisation

virtuelle à l'innovationorganisation-

nelle

Choix stratégique

Changementorganisationnel

Opérationnalisationtechnologique

Organisationvirtuelle

Innovation organisationnelle

à développer

Avatar à éviter

Si contribution à la performance

Alors

Sinon

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