Les consommateurs et les paradoxes de l’offre de produits … · Une enquête qualitative a été...
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Les consommateurs et les paradoxes de l’offre de produits alimentaires du-
rables. Une étude exploratoire en France et en Italie
Romina Moruzzi
Doctorante en Economie et Gestion(1)
Montpellier SupAgro, UMR 1110 MOISA
F-34000 Montpellier, France
Doctoral School on the Agro-Food System (Agrisystem)(2)
Università Cattolica del Sacro Cuore, Italia
2 Place Pierre Viala, 34060 Montpellier, France.
[email protected], Tél : +33 (0)4 99 61 25 86 – Fax: +33 (0)4 67 63 54 09
Lucie Sirieix
Professeur Montpellier SupAgro(3)
UMR 1110 MOISA
2 Place Pierre Viala, 34060 Montpellier, France.
[email protected] , Tél : +33 (0)4 99 61 27 19 – Fax: +33 (0)4 67 63 54 09
This study was supported by the Doctoral School on the Agro-Food System (Agrisystem) of
the Università Cattolica del Sacro Cuore (Italy)
Les consommateurs et les paradoxes de l’offre de produits alimentaires durables.
Une étude exploratoire en France et en Italie
Résumé:
Cette étude vise à explorer les paradoxes existants dans l’offre durable de produits alimentaires
et, les comportements adoptés par les consommateurs percevant ces paradoxes. Le modèle
théorique retenu est celui de Mick et Fournier (1998), initialement construit pour étudier les
paradoxes des technologies modernes et adapté au cadre de l’alimentation durable. Une
enquête qualitative a été menée auprès de 84 consommateurs en France et en Italie. Les
entretiens semi-directifs réalisés permettent une première exploration des paradoxes perçus et
des stratégies de coping adoptées.
Mots-clés : consommation durable, paradoxes, consommateur responsable, choix éthiques,
stratégies de coping
Consumers and the paradoxes in sustainable food products offer: an exploratory study
in France and Italy
Abstract:
This study aims to explore existing paradoxes in sustainable offer of food products and conse-
quently behaviours of ordinary consumers at the time of perceiving these paradoxes. The re-
lated theoretical model is that of Mick and Fournier (1998), built initially for studying the
paradoxes of modern technologies and adapted at the case of sustainable food consumption. A
qualitative survey has been conducted among 84 consumers in France and Italy. The semi-
structured interviews have shed light on perceived paradoxes and adopted coping strategies.
Key-words: sustainable consumption, paradoxes, responsible consumer, ethical choices, cop-
ing strategies
1
Les consommateurs et les paradoxes de l’offre de produits alimentaires durables.
Une étude exploratoire en France et en Italie
Introduction
L’alimentation durable (A.D.), parfois qualifiée de responsable, éthique, ou engagée fait l’objet
de recherches académiques portant sur les comportements de consommation (Jackson, 2005)
ou l’offre de produits répondant aux critères de durabilité (Marchand, Walker et Cooper,
2010). Au cours des quarante dernières années on a constaté une évolution profonde de la
notion de durabilité (Prothero & al., 2011) et des comportements qui en découlent, passant
d’une contestation militante et collective au tournant des années 60 – 70 à des formes plus
individuelles et privées d’attachement aux valeurs environnementales, sociales et économiques
(Schaefer et Crane, 2005). A l’heure actuelle l’intérêt des chercheurs se porte également sur les
pratiques quotidiennes des individus et leurs comportements ordinaires (Daniel et Sirieix,
2009). Par ailleurs, au fil du temps l’offre durable de produits alimentaires a évolué (Wagner,
1997; Marchand, Walker et Cooper, 2010). Aujourd’hui une palette très vaste et variée de
produits porteurs de « contenus » verts, sociaux et éthiques est proposée par divers acteurs
dans plusieurs canaux de vente: des magasins spécialisés aux grandes chaînes de distribution,
des marchés traditionnels aux fermes en agriculture biologique (Rémy, 2004; Dubuisson-
Quellier, 2006).
Ces produits peuvent être porteurs de paradoxes, dans la mesure où ils font coexister deux
conditions opposées dans un même contexte de référence (Quine, 1966). Que penser par
exemple des produits biologiques qui font le tour du monde avant d’arriver au consommateur,
des marques multinationales couplées à un label « Fair Trade » que les consommateurs
associent aux petits producteurs, ou encore des produits déclarés durables parce que locaux
mais qui ne sont pas forcément respectueux de l’environnement ?
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L’objectif de cette étude est d’explorer les paradoxes existants dans l’offre alimentaire durable
sous l’angle de la perception des consommateurs puis, dans un second temps, les
comportements adoptés par les consommateurs afin de dépasser ces paradoxes. Pour cela nous
avons adapté le modèle théorique de Mick et Fournier (1998) au cadre spécifique de l’A.D.
Une enquête qualitative a été menée auprès de 84 sujets à Montpellier, en France, et Piacenza,
en Italie.
1. Le cadre conceptuel: de la consommation durable aux paradoxes de l’offre durable
Après l’étude de la consommation durable et des comportements quotidiens des
consommateurs, nous présenterons les paradoxes pouvant affecter l’offre durable des produits
alimentaires pour proposer une adaptation du modèle de Mick et Fournier à l’A.D.
1.1. La consommation durable
La consommation alimentaire durable fait partie de l’univers plus large de la consommation
durable, qui trouve ses racines dans les trois piliers du développement durable, démarche mon-
diale visant à tenir compte de l’aspect environnemental, économique et social de toute action
afin de ne pas nuire aux générations futures. Plus précisément, elle se réfère à des modes de
consommation et d’utilisation de produits alimentaires plus responsables (UNEP, 2002). Le
consommateur responsable est le plus souvent défini comme un sujet conscient de l’impact de
ses propres choix sur le monde qui l’entoure et qui essaie d’agir de manière active sur le mar-
ché. « [..] Consommer de façon responsable, se définir comme un « consomm’acteur », c’est
assumer pleinement ce pouvoir que chacun de nous a de façonner le monde à l'image des
choix qu'il pose au quotidien1 ». Dans ses travaux pionniers, Roberts (1995, 1996) se réfère à
un individu qui perçoit ses actions de consommation comme ayant des conséquences sur
3
l’environnement et, de façon plus générale, sur la société. Plus récemment, Webb, Mohr et
Harris (2007) abordent le sujet dans une perspective holiste, en élargissant la consommation à
l’approvisionnement, à l’usage et au rejet de déchets. Le Consommateur Socialement Respon-
sable est décrit comme « une personne qui base son approvisionnement, son utilisation et son
élimination des produits sur un désir d’éliminer tout effet négatif et de maximiser l’impact
bénéfique à long terme sur la société » (Webb, Mohr et Harris, 2007). Au cours de ces qua-
rante dernières années la façon dont les consommateurs manifestent leurs sensibilités a changé:
aux mouvements de contestation militante écologique et du respect des droits des années 60 –
70 (Cohen, 2001; Mol, 2001; Chessel et Cochoy, 2004), succèdent des manifestations relevant
plus d’une sphère individuelle et privée (Jackson et Marks, 1999; Gregson et Crewe, 2003;
Barnett & al., 2005; Connolly et Prothero, 2008). Les individus, comme tels (Hansen et Schra-
der, 1997; Gabriel et Lang, 2006) ou en tant que membres d’une collectivité plus ou moins
élargie (Dubuisson-Quellier et Lamine, 2008; Dubuisson-Quellier, 2010), peuvent exprimer des
préoccupations de nature environnementale, sociale, économique (Schaefer et Crane, 2005) ou
leur sensibilité éthique (Dubuisson-Quellier, 2009b). Les recherches font ainsi état de l’intérêt
des Français à l’égard de l’offre durable: produits bio2, équitables3, réseaux locaux d’achat soli-
daire (AMAP, Associations de Consommateurs) (Dubuisson-Quellier, 2009a) ou, de façon
plus générale, des activités à caractère écologique4 et des produits éthiques hors alimentation5.
Ces tendances sont les mêmes en Italie6 7 (Lori et Volpi, 2007; Forno, 2009) avec par exemple
1 Définition de « consomm’acteur » donnée par la ONG Equiterre (http://equiterre.org/)
2 Enquête Ethicity 2011 réalisée auprès de 3500 Français sur la consommation responsable
3 Sondage TNS Sofres 2010 « Les Français et le commerce équitable » mené auprès d’un échantillon
national de 1000 personnes représentatif de la population âgée de 18 ans et plus
4 Enquête Credoc 2010 « Les Français avancent à grands pas sur la longue route écologique »
5 Rapport Graines de Changement 2010 « Les chiffres de la consommation responsable » un repérage
sur les diverses pratiques durables
6 Rapporto Inea 2008 « Comportamenti e Consumi socialmente responsabili nel Sistema Agroalimentare
» sur la consommation socialement responsable des Italiens dans le cadre alimentaire
4
les produits de Terra Libera8 (Sassatelli, 2008). Nous allons nous intéresser plus précisément à
cette offre alimentaire durable et à ses possibles paradoxes.
1.2. Les paradoxes de l’offre de produits alimentaires durables
L’offre de produits alimentaires durables a évolué parallèlement aux attentes des consomma-
teurs. Si à la fin des années 1990 ces produits représentaient encore une niche dans des maga-
sins très spécialisés et des circuits alternatifs, ils sont présents aujourd’hui dans tous les circuits
de distribution (Dubuisson-Quellier, 2006). Ainsi, les produits équitables labellisés Max Have-
laar sont disponibles en grandes surfaces, Leclerc lance un label « Approuvé conso respon-
sable »9 sur une sélection de ses produits... Par ailleurs, les circuits de distribution et les initia-
tives se diversifient: par exemple en France, les boutiques paysannes10 proposent une vente di-
recte aux consommateurs, en Italie il est possible d’ « adopter » par internet des parcelles de
rizière pour les cultiver selon les critères de durabilité11.
La progression des ventes des produits alimentaires durables attire tous les acteurs du marché,
qui peuvent être accusés de greenwashing (Tremblay, 2011). Sans évoquer ce terme, il peut
sembler surprenant qu’un hard-discounter comme Lidl, dont le positionnement repose
essentiellement sur les prix les plus bas, propose une ligne de produits biologiques et équitables
dont l’un des objectifs est d’assurer une rémunération juste des producteurs. On assiste ainsi à
7 Rapporto Ismea/Nielsen 2011 « Il mercato del biologico in Italia: le prospettive e le debolezze »
8 Terra Libera est le logo du projet « Terra » concernant les coopératives sociales du Sud de l’Italie
impliquées dans la valorisation des terrains et biens confisqués à la Mafia (http://www.liberaterra.it/)
9 Depuis le 2 novembre 2011 l’enseigne E.Leclerc propose cet affichage pour aider les clients à un choix
plus responsable (http://www.mouvement-leclerc.com/home/conso-responsable)
10 Boutiques paysannes: associations de producteurs locaux pour une vente directe en ville
(http://www.boutiquespaysannes-lr.fr/)
11 L’adoption à distance d’une rizière: les consommateurs italiens peuvent participer aux choix de
production et conditionnement du produit jusqu’à la livraison au domicile
(http://lortodimichelle.blogspot.com/2010/10/adotta-una-risaia.html )
5
la présence de véritables paradoxes, tant à l’égard des produits que de l’offre durable en
général.
Selon Quine (1966) « le paradoxe s’appuie sur l’idée centrale que peuvent coexister deux
conditions opposées dans la même situation ». D’autres auteurs insistent sur le caractère
antithétique de la réalité (Mick et Buhl, 1992), ou sur l’existence d’un paradoxe face au libre
choix (Schwartz, 2009). Dans notre étude, nous distinguons des paradoxes de différentes
natures: des paradoxes concernant le concept même de produit ou ce qui est autour du produit
d’une part, des paradoxes tenant aux acteurs de l’offre d’autre part.
Dans la première catégorie figurent par exemple les produits biologiques/équitables qui
viennent de très loin et ont un impact carbone élevé, ou les produits biologiques avec
suremballages (ex. des produits biologiques en emballage individuel, ou en barquette de carton
enveloppée d’un film de plastique).
Les paradoxes peuvent également concerner les acteurs de l’offre. Certains consommateurs
peuvent percevoir comme paradoxale l’association de grandes marques avec des labels
durables tels que le label « Bio », « Fair Trade », ou encore de pêche durable « MSC » (Marine
Stewardship Council); l’évocation plus ou moins directe d’une origine locale de la marchandise
par une marque mondiale comme le fait Danone sur l’emballage du fromage frais
Jockey précisant les noms et adresses des éleveurs, peut également être perçue comme un
paradoxe.
Le paradoxe peut générer une dissonance, un état d’inconfort psychologique que le sujet essaie
d’éliminer ou de minimiser (Festinger, 1957). La théorie de la dissonance cognitive de
Festinger est un cadre intéressant pour aborder les comportements adoptés par l’individu. Elle
a récemment été mobilisée pour expliquer la flexibilité des comportements éthiques (Szmigin,
Carrigan et McEachern, 2009) ou pour expliquer l’importance déclarée des motivations
personnelles pour l’achat de produits biologiques (Thogersen, 2011). Cette approche est
6
également intéressante pour comprendre les comportements adoptés par les consommateurs
partagés entre leurs pratiques et leur critique de la consommation (Séré de Lanauze et Siadou-
Martin, 2011). Dans cette situation de dissonance, l’individu peut adopter des réponses
psychologiques et comportementales ou stratégies de coping, pour dépasser cette situation
d’inconfort. Lazarus et Folkman (1984) définissent les stratégies de coping comme étant
« l’ensemble des efforts cognitifs et comportementaux destinés à maitriser, réduire ou tolérer
les exigences internes ou externes qui menacent où dépassent les ressources d’un individu ».
Ces stratégies peuvent être orientées vers les émotions, il s’agit des stratégies d’évitement de la
situation contraignante, ou vers la résolution du problème, avec la recherche d’informations et
la confrontation (Cohen et Lazarus, 1979; Folkman et Lazarus, 1986).
1.3. L’adaptation du modèle de Mick et Fournier
Pour cette étude nous avons adapté le modèle de Mick et Fournier (1998) qui a été construit
pour étudier les paradoxes des technologies modernes. Ces auteurs ont identifié dans les
nouvelles technologies des situations paradoxales: une messagerie téléphonique peut par
exemple apporter un sentiment de liberté mais, en même temps, une nouvelle forme
d’esclavage puisqu’il faut l’écouter chaque fois qu’on rentre au domicile (Mick et Fournier,
1998).
Notre objectif étant d’explorer les paradoxes existant dans l’A.D., nous avons adapté ce
modèle en conservant sa structure linéaire: en entrée figure la liste des paradoxes clés de
l’A.D., en sortie la liste des stratégies de coping, tandis que le corps fait ressortir l’émergence
de conflit ou d’ambivalence qui débouche respectivement sur un état d’anxiété ou de stress
(figure 1). Le stress est considéré comme une « transaction particulière entre la personne et
l’environnement dans laquelle la situation est évaluée par la personne comme excédant ses
ressources et menaçant son bien-être » (Lazarus et Folkman, 1984). Ce modèle montre que
7
l’anxiété et le stress peuvent influencer les stratégies de coping mais réciproquement la mise en
œuvre des comportements dans une situation contraignante implique une augmentation de la
perception de stress et/ou d’anxiété. Le modèle permet aussi de tenir compte d’autres facteurs,
comme la situation donnée, les produits concernés, l’influence des facteurs personnels et de
l’environnement. Nous avons également tenu compte du contexte alimentaire.
Figure 1. Le modèle conceptuel adapté à l’AD à partir du modèle de Mick et Fournier
(1998)
La liste des paradoxes clés de l’A.D. a été construite à partir de la liste de Mick et Fournier
puis enrichie. Cette liste comprend des paradoxes ciblés sur les produits et d’autres tenant à
l’offre durable (O.D.) en général, en classant les contradictions des plus concrètes aux plus
abstraites. Elle a fait l’objet d’une vérification dans le cadre de l’A.D., les items ont été croisés
avec les types de produits envisagés auparavant et, avec l’offre alimentaire durable, puis nous
avons intégré d’autres paradoxes plus spécifiques pour aboutir, enfin, à une liste de 10
paradoxes (annexe 1). Les huit paradoxes issus du modèle de Mick et Fournier sont:
8
contrôle/chaos; liberté/dépendance; nouveau/dépassé; compétence/incompétence;
efficience/manque d’efficience; satisfaction/nouveaux besoins; intégration/isolement,
engagement /désengagement. Les deux paradoxes que nous avons ajoutés sont les suivants:
bonne conscience/mauvaise conscience (lié au paradoxe compétence/incompétence, ce
paradoxe vient du fait que l’O.D. peut donner la conviction de faire le bon choix sur l’une des
dimensions du DD, mais en même temps conduire à la perception que ce n’est pas le bon choix
sur l’une ou les autres dimensions du DD); conciliation/résistance (Mick et Fournier englobent
dans le paradoxe engagement/désengagement les notions de rupture et passivité. Nous
distinguons ici deux paradoxes, en associant à désengagement la passivité, le fait de renoncer,
et à résistance la rupture). La liste définitive des stratégies de coping sera construite après
l’analyse des données (Glaser et Strauss, 1967).
Dans un premier temps, nous avons également construit une liste provisoire de stratégies de
coping en distinguant deux moments: avant l’adoption du choix durable et lors de l’adoption
du choix durable.
Plus précisément, avant l’adoption d’un comportement durable les stratégies possibles tournées
vers l’évitement du problème sont: ignorer (l’offre durable ou les paradoxes des produits);
refuser (rejet de l’offre durable ou des paradoxes des produits en minimisant la perception
dissonante, en sous-estimant l’information contraire à sa propre vue, en décrédibilisant la
source d’information, en recherchant des informations supplémentaires); reporter (le
contournement, le retard du choix, l’inertie).
Par ailleurs, les stratégies vers la confrontation et la résolution du problème s’orientent vers:
l’essai (le choix occasionnel); les heuristiques (la confrontation par représentativité, catégorie
de base, produits conventionnels de qualité, marque connue, marque bien réputée, contexte,
disponibilité); l’extension du choix (la recherche d’informations, le bouche à oreille);
l’extension d’une garantie grâce aux certifications internationales (ex. label Bio, Fair Trade
9
Max Havelaar), à l’achat auprès par exemple d’AMAP (Association pour le Maintien d'une
Agriculture Paysanne), ou à travers le GAS (groupe d’achat solidaire).
Lors de l’adoption d’un comportement durable les stratégies centrées sur l’évitement du pro-
blème sont: la négligence (le fait de nier l’offre durable); l’abandon (l’individu décline le choix
durable); la prise de distance (la résistance: renonciation, simplicité volontaire ou l’adoption de
comportements durables seulement en certaines occasions ou pour certains sujets).
Les stratégies orientées vers la confrontation et la résolution du problème sont: l’adaptation (à
l’offre existante, aux paradoxes); le partage (l’attachement aux valeurs de ce type d’offre); la
maîtrise (le contrôle du choix); la substitution (la recherche de produits substitutifs); les pra-
tiques mixtes (l’intermittence de pratiques durables et non durables, le basculement entre les
pratiques durables, le repli sur d’autres formes).
Par ailleurs, des facteurs externes, tels que des éléments conjoncturels (la crise économique, la
hausse des prix) et des facteurs sociaux (l’influence des proches, c’est-à-dire de la famille et au
sens large des amis, des collègues) peuvent affecter les comportements quotidiens.
Après avoir listé les stratégies de coping apparaissant dans les entretiens, nous étudierons les
liens entre les différents paradoxes et les stratégies de coping.
2. Méthodologie
Nous avons identifié dans l’offre durable des types de produits susceptibles de générer ces
paradoxes: les produits bio/équitables (transport, empreinte carbone), les produits bio
suremballés et/ou hors saison, les produits locaux de grandes marques ou de chaînes de
distribution, ainsi que l’offre d’une filière équitable nord-nord qui propose des produits
biologiques, équitables et locaux.
10
Au niveau méthodologique l’étude s’appuie sur une enquête qualitative menée entre mai et la
fin de juillet 2011 auprès d’individus dans deux contextes urbains: la ville de Montpellier, en
France, et la ville de Piacenza, en Italie. Le choix de la comparaison avec l’Italie se justifie par
le fait qu’il s’agit d’un pays plutôt proche d’un point de vue des traditions alimentaires, mais
où l’offre et la consommation de produits durables sont inférieures à ce qu’elles sont en
France. Ainsi en 2009, le marché des produits biologiques est de 3 milliards d’euros en France
et seulement 1,5 milliard d’euros en Italie pour des niveaux de population sensiblement
identiques (Kilcher & al., 2011).
Au total 84 entretiens semi-directifs en face-à-face ont été menés. L’échantillon a été composé
de façon à varier les caractéristiques sociodémographiques (l’âge, le genre, l’éducation, la
profession, le nombre et l’âge des enfants au foyer, le lieu de résidence). Quand le couple était
disponible, les deux membres ont été interrogés (8 couples français et 10 couples italiens).
Dans un second temps, 17 entretiens complémentaires ont été réalisés auprès de
consommateurs engagés, par exemple des personnes qui font leurs achats auprès des AMAP,
des Associations de Consommateurs, dans des magasins spécialisés. Tous les entretiens ont été
menés directement au domicile des participants en prenant de 45 min jusqu’à 1h et demie ou
plus. Nous avons utilisé un guide d’entretien divisé en six parts: une brève introduction sur
l’alimentation d’aujourd’hui; une partie sur le concept de durabilité et de consommation
alimentaire durable (« si je vous parle de consommation alimentaire durable, pour vous c’est
quoi?, [..] pour vous, c’est facile, ou, au contraire, difficile de choisir entre durable et non
durable?, pourquoi ?, de quelle manière ? »); une sur la perception de paradoxes liés à l’offre
de produits alimentaires durables (« pour vous, dans l’offre alimentaire durable y a-t-il des
paradoxes?, quels paradoxes ?, pourquoi ?, si je vous montre quelques types de produits [..]
selon vous y a-t-il des paradoxes dans ces types de produits ?»); puis sur les réponses
comportementales adoptées lors de la perception de paradoxes (« [..] pouvez-vous me
11
raconter une occasion récente de vos courses ?, [..] quand vous ne trouvez pas le produit
durable que vous cherchez, qu’est-ce que vous faites ?, ça vous arrive parfois ? ») et dans un
dernier temps sur l’influence de facteurs environnementaux (ex. des changements sur la
dernière année) et sur le rôle des proches (« [..] avez-vous changé vos habitudes durables au
cours de la dernière année ?, [..] en pensant à vos proches qu’est-ce qu’ils pensent de
l’alimentation durable ? »); enfin en conclusion nous demandions aux personnes interrogées
de se projeter dans le futur : « [..] pour vous quel est le futur de l’offre durable?, [..] imaginez
un scenario avec ces produits dans le futur, racontez-moi le rêve ? »).
Les entretiens ont été enregistrés et intégralement retranscrits pour être analysés. Enfin, pour
compléter l’enquête nous avons interviewé huit experts de circuits alternatifs (local,
biologique, équitable) et complété notre étude par des visites sur plusieurs lieux de vente
(grande surface, marché, magasin spécialisé, livraison des AMAP).
3. Premiers résultats
Le travail d’analyse est en cours. Les retranscriptions des discours ont fait l’objet d’une pre-
mière analyse qualitative visant à dégager les premiers éléments sur la perception des para-
doxes et les stratégies comportementales adoptées par les participants à l’enquête. Les para-
doxes évoqués le plus fréquemment concernent le transport de loin pour les produits biolo-
giques et/ou équitables. Ce paradoxe a été souligné notamment lorsqu’on trouve une offre
presque équivalente au niveau local, ou national (« si c’est fait dans l’hémisphère sud pour
l’hémisphère nord, c’est un paradoxe. On pollue également pour les transporter. C’est ça le
paradoxe pour moi, ce n’est pas durable. [..] un produit n’est pas durable, s’il voyage beau-
coup », Marc, français, 46 ans, chercheur, 3 enfants). Les répondants évoquent également les
paradoxes des produits bio hors saison (« le paradoxe, ce sont les aubergines (bio) je n’en
prends pas parce que ce n’est pas encore la saison », Martine, française, 62 ans, retraitée),
12
ainsi que de l’excès d’emballage qui enveloppe les produits (« on dit qu'il ne faut pas utiliser
tout ce qui est plastique et ensuite ils mettent bio [..] ils nous les emballent dans les sachets
qui sont polluants, c'est là que je trouve qu'il y a un paradoxe », Stéphanie, française, 37 ans,
femme au foyer, 3 enfants). Par ailleurs, les répondants ont perçu comme paradoxale l’offre de
produits bio, équitables ou locaux par de grandes marques ou enseignes de distribution
(« quand je vois Carrefour, ces grosses marques sur des produits bio je trouve que c’est assez
paradoxal », Nathalie, française, 42 ans, secrétaire en direction, 1 enfant). Enfin, certains su-
jets ont proposé comme paradoxe le prix trop élevé pour les produits durables et le prix trop
faible payé aux producteurs locaux. Les paradoxes apparaissant ici sont ceux de la compé-
tence/incompétence et de la bonne/mauvaise conscience.
Au niveau comportemental, avant l’adoption d’un choix durable on distingue des stratégies de
coping portant sur l’essai comme étant une première étape qui peut aboutir soit à des pratiques
durables soit à un choix non répété (« Nous n’avons pas l’habitude de prendre ni des produits
bio ni des produits du commerce équitable. Des fois on le prend parce qu’on ne fait pas at-
tention », Nathalie, française, 29 ans, réceptionniste). Il faut noter que l’adoption de compor-
tements responsables est un parcours long (« Ca m’intéresse, je sais qu’on peut faire des
choses mais je suis juste dans une démarche lente », Catherine, française, 42 ans, femme au
foyer, 3 enfants). D’autres stratégies sont par exemple l’extension du choix à travers le bouche
à oreille : « je connais « Libera Terra », une amie de ma sœur est allée visiter l’association.
J’achète divers produits pour faire des cadeaux à Noel » (Alessandra, italienne, 32 ans, ensei-
gnante en congé maternité). D’autre part, les participants qui ne sont pas touchés par ce type
de choix essaient de sous-estimer la valeur de l’offre durable (« Je pense que nous sommes sur
des effets de mode. Maintenant il faut être durable, bio, aller chez Picard .. Picard Bio. [..] le
futur durable, on passera et on trouvera un autre label qui s’appellera plus que durable »,
Irene, française, 46 ans, enseignante, 3 enfants) ou de le remettre à plus tard « j’attends un bé-
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bé, je me dis que ce n’est pas plus mal si on revient aux choses essentielles, des choses sans
OGM. [..] On se dit aujourd’hui qu’il faut s’y mettre mais on remet toujours à demain » (Ra-
ja, française, 25 ans, vendeuse en congé maternité).
Certains participants adoptent des choix durables en privilégiant l’achat de produits locaux, ou
artisanaux. Il s’agit d’une forme de contrôle direct sur leur choix, par exemple à travers une
connaissance des producteurs ou des vendeurs. En revanche les paradoxes engage-
ment/désengagement et conciliation/résistance amènent à des formes d’abandon ou de résis-
tance à l’offre durable (« pendant un certain temps je faisais moi le détergent pour le sol
(avec le vinaigre), puis j’ai fait une comparaison avec le détergent industriel et j’ai vu que je
ne polluais pas en entrée mais en sortie, je n’étais pas trop écologique. Maintenant je suis
revenue au détergent industriel, le détergent écolo est trop cher. [..] Dans le secteur du pois-
son je ne donne plus de poisson à mes enfants. Je n’ai pas trouvé une alternative valable au
fait que 95% du produit péché sont des déchets. Je ne peux pas penser à dévaster ainsi
l’environnement », Cristina, italienne, 36 ans, femme au foyer, 2 enfants). Certains adoptent
des choix durables seulement en certaines occasions (« [..] ça me fait gagner un peu de
temps. Ça donne un peu de la diversité à l’alimentation quotidienne pour changer un peu, se
renouveler. Ne pas manger toujours les mêmes produits, ça me dépanne! [..] quand je tra-
vaille il peut m’arriver d’acheter chez Picard des produits un peu manufacturés », Christine,
française, 45 ans, enseignante, 3 enfants).
Les premières lectures des entretiens font donc apparaître des paradoxes et des stratégies de
coping mais une étude approfondie des entretiens est nécessaire pour faire le lien entre ces pa-
radoxes et stratégies.
4. Conclusion
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L’objectif de cette étude est d’explorer les paradoxes existants dans l’offre alimentaire durable
sous l’angle de la perception des consommateurs puis, dans un second temps, les comporte-
ments adoptés par les consommateurs afin de dépasser ces paradoxes.
Seule une première lecture des entretiens a été conduite. A partir de ces premières indications
nous allons analyser les discours des participants pour vérifier si les discours font ressortir les
paradoxes tels que nous les avons définis à partir du cadre de Mick et Fournier. Dans un
second temps, nous analyserons les stratégies mises en œuvre pour dépasser les paradoxes de
l’offre durable pour dans un dernier temps identifier les freins potentiels au développement de
l’Alimentation Durable et les recommandations managériales envisageables.
Bibliographie
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19
Annexe 1: Le tableau des paradoxes de l’A.D.
LA LISTE DE PARADOXES
CLES
DESCRIPTION
1. contrôle/chaos l’O.D. peut rendre plus facile la maitrise du choix, par contre l’O.D. peut conduire au désordre (ex. plusieurs
offres entre lesquelles le consommateur ne sait pas quelle est la plus durable)
2. liberté/dépendance l’O.D. peut rendre plus facile le choix (par la variété de l’offre), à l’inverse l’O.D. peut conduire à des
contraintes (une offre imposée par le marché)
3. nouveau/dépassé l’O.D. vient à la rencontre des exigences du consommateur (nouveaux produits plus durables), par contre
une offre qui est déjà obsolète (ex. les suremballages, les produits n’affichant pas l’impact CO2)
4. compétence /incompétence l’O.D. peut donner le sentiment d’efficacité à l’égard de ses propres choix, à l’inverse l’O.D. peut conduire à
un sentiment d’incompétence (consommer ces produits ne permet pas d’agir pour la durabilité)
5. efficience/manque d’efficience l’O.D. peut donner un sentiment d’efficience (de bonnes pratiques quotidiennes), par contre l’O.D. peut
impliquer des efforts (ex. plus de temps, d’argent, d’informations)
6. satisfaction/nouveaux besoins l’O.D. peut conduire à la satisfaction de ses critères de durabilité, par contre l’O.D. peut conduire à de
20
nouveaux besoins (ex. supporter les producteurs locaux)
7. intégration/isolement l’O.D. peut rendre plus facile l’agrégation sociale autour des thèmes communs, par contre l’O.D. peut
conduire à une prise de distance de la société
8. engagement /désengagement l’O.D. peut rendre plus facile la mise en acte des convictions personnelles, à l’inverse l’O.D. peut conduire à
une sorte d’abandon (aucune confiance de pouvoir changer le système, une passivité de l’individu)
9. bonne conscience/mauvaise
conscience
l’O.D. peut donner la conviction de faire le bon choix sur l’une des dimensions du DD, mais en même temps
conduire à la perception que ce n’est pas le bon choix sur l’une ou les autres dimensions du DD
10. conciliation/résistance l’O.D. peut rendre plus facile la participation au système de consommation, à l’inverse l’O.D. peut amener à
une forme de résistance active à l’égard du marché (ex. la simplicité volontaire)
Tableau 1. La liste de paradoxes clés de l’A.D. (adaptation de Mick et Fournier, 1998)