Le Martinisme Dévoilé...

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8/18/2019 Le Martinisme Dévoilé... http://slidepdf.com/reader/full/le-martinisme-devoile 1/52 on SLU CO I </) cc O z Actualite de <U> &ogae Cruris; ROSE-CROIX ET MARTINISTES E MARTINISME es origines a nos jours ABBALE E? MARTINISME a voie du coeur RDRE ARTINISME RADITIONNEL ntretien vec le Souverain Grand Maitre m w BELGIQUE : 7,00 € / LUXEMBOURG : 7,00 € / DOM : 6,20 € / S UISS E: 11,00 CHF CANADA: 8,25 CAD / GRECE : 7,00 € / PORTUGAL CONT.: 7,00 €

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SOMMAIRE

■ Editorial: Qu'est-ce que le Martinisme ?

p. 3.

US Le processus d'individuation : selon Jung,ce processus est le fondement de la realisationdu Soi et correspond a une loi qui ceuvre dansI'univers, dans la nature et dans I'hommelui-meme. p. 37.

h

Hs s

■ Introduction : comme toute societeinitiatique, le Martinisme puise ses originesdans des elements mythiques et historiques.En creant I'Ordre Martiniste vers 1889, Papuset Augustin Chaboseau firent renaitre de sescendres une tradition ancienne. p. 4.

■ L'Ordre des Chevaliers Masons Elus-Cohende TUnivers : c'est dans ce mouvement majeurde rilluminisme que le Martinisme trouve sesorigines. Appele plus simplement « Ordre desElus-Cohen », ce rite ma^onnique plongeait sesracines dans le judeo-christianisme. p. 5.

■ L'Ordre Martiniste a la Belle-Epoque (1889

a 1 91 8) : a la fin du XIXe siecle, deux etudiantsen medecine, Gerard Encausse et AugustinChaboseau, decouvrent qu'ils sont depositairesd'une initiation remontant aux disciples deLouis-Claude de Saint-Martin. p. 11.

■ Le Martinisme moderne et ses obediences(1920 a 201 0) : comme la Rose-Croix et la

Franc-Magonnerie, le Martinisme reste unetradition tres vivante. Elle est representee de

nos jours par deux mouvements majeurs:I'Ordre Martiniste Traditionnel et I'OrdreMartiniste. p. 15.

■ Louis-Claude de Saint-Martin (sa vie, son

ceuvre): le Martinisme se rattache a la vie et aI'oeuvre de celui qui fut connu egalement sousle pseudonyme de « Philosophe Inconnu »,considere comme I'un des plus grands espritsde son epoque. p. 21.

■ Le Martinisme : un esoterisme, unetheosophie, une gnose : esoterique en raison

de son origine traditionnelle, theosophiquede par la quete de sagesse qui le sous-tend,gnostique au regard de ses liens avec leChristianisme primitif, le Martinisme est une

voie de connaissance complete, p. 26.

■ Kabbale et Martinisme : tout comme la

Kabbale, le Martinisme est une voie cardiaque,une voie de realisation spirituelle menant a laconnaissance de soi et du monde divin. p. 29.

t■ Entretien avec Christian Bernard, Souverain

Grand Maitre de I'O.M.T., p. 32

S Le Temple de Salomon : dans ses aspectshistorique et symbolique, il est une referencecommune aux Martinistes et aux Francs-Magons. p. 35

S De la Genese au prologue de I'Evangilede Jean : la premiere page de la Genesepresente la vision sacerdotale de la Creation,et la premiere page de I'Evangile de Jeanse rapporte au mystere de leschouah, GrandArchitecte de I'Univers. p. 40

■ L'Ancien et Mystique Ordre dela Rose-Croix : presentation par SergeToussaint, Grand Maitre de I'O.M.T. et de

I'A.M.O.R.C. pour la juridiction francophone,p. 44.

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ne sont pas reitdus.

Mise en pages; Marie-Laure Daudet  

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Depot lega l: junvier 2010 

Ont participr a la redaction de ce numero : Christian Rehisse, Un Martiniste anonynte, 

Guy Eyhembide, Huguette Lefort. Jean Massengo. Michel Annengaud. Seige Toussaint.

Une interview de Christian Bernard.

Iconogniphie 

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Photos de cotiverture  

Montage centn il: portmit de Saint Martin -dessin de Simonetta Saenger (document  

O.M.T.) :fond un temple martiniste (document O.M. T.) 

Vignettes: Sceau des Elus-Cohen (document O.M .T.); arcane du tableau  

nature! dessin de Marcel Dupre (document O.M.T.): I ’Illumination par le cam:  

illustiution ext mite d'Emblemata (1630). de Daniel Cnimer (document O.M.T.) 

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Introduction

DOSSIER _______________

o

Pantacle martiniste d e I'O.M.T.

En creant I’Ordre Martiniste vers 1889, Papus et Augustin Cha-

boseau faisaient renaitre de ses cendres une tradition reduite au

sommeil depuis les annees 1824. Cet Ordre est souvent associe

a l'occultisme de la Belle Epoque , e'est-a-dire a un esoterisme

qui « sent un peu le soufre ». Les enormes volumes de Papus,

consacres a la magie et aux sciences occultes. ont certes beau-

coup contribue a laisser cette image s'imposer. Mais le Marti

nisme est-il vraiment cela ? Et d'oii vient-il ?

Comme toute societe initiatique, le Martinisme puise ses origines

dans des elements mythiques et historiques. Pour ce qui est du

mythe, la Tradition martiniste se presente comme 1'heritiere de

connaissances remontant aux origines de l'humanite. Enoch. Tils

de Seth, lui-meme troisieme enfant d’Adam, les aurait recues

d’un ange. Cette « Tradition primordiale » se serait ensuite trans-

mise de generation en generation, d'initie en initie. et c'est ainsi

qu'au X VII Iemc siecle. Marlines de Pasqually s’en trouvait etre

l'heritier. Pour ce qui est de I'histoire, c'est dans le Siecle des

Lumieres que le Martinisme trouve ses origines. Cette epoque,

qui precede la Revolution franqaise, est celle oil triomphe le cultede la raison, de la connaissance intellectuelle.

A cette periode, deux courants de pensee opposes apparaissent en

France : le Scepticisme et 1'Illuminisme. Les progres enormes

realises par les sciences a cette epoque avaient conduit I'homme

a deduigner la religion. II voyait en elle une survivance des temps

ou l'humanite. encore dans l’enfance, attribuait a des dieux ima-

ginaires les phenomenes naturels et les maux dont elle souffrait.

Les courants les plus representatifs de cette attitude sont le Sen-

sualisme et 1'Encyclopedisme. Quelques penseurs se sont in-

quietes de ce basculement vers le rationalisme. Parmi eux, on

trouve les mystiques que I'on regroupe sous la banniere de I'II-

luminisme.

En effet, rilluminisme s'est pose a contre-courant de ce mouve-

mcnt qui relcguait au rang de superstition ce qui, jusqu'a pre

sent, donnait un sens a l'existence. Pour ces penseurs, c'est

au-dela de la religion qu'il faut chercher la verite des choses,

grace a une lecture en profondeur, esoterique, des textes reli-gieux. Ce que I'on appelle rillum inisme. c'est done I'esoterisme

du XVII Icmc siecle. La quote de ces philosophes est une recherche

mystique du sens de la vie. Ce qui la caracterise le mieux, c’est

qu'ellc vise essentiellement a apprehendcr le Div in par 1’expe-

rience interieure.

C'est dans 1'un des courants les plus importants de 1'Illuminisme,

Y Ordre des Chevaliers Masons Elus-Cohen de I'Uni vers, par-* 

lois appelc plus simplement Ordre des Elus-Cohen. que le Mar

tinisme trouve ses origines. II s'agit de l'un des rites

ma^onniques les plus etranges. II possedc en effet une doctrine

qui semble plonger ses ratines dans le judeo-christianisme. qui* 

caracterise 1'Eglise originelle et utilise des rituels qui s'appa-

rentent a une magie-angelique. une theurgie.

Cet Ordre a connu une existence assez breve, car apres la dispa-

rition de son fondateur survenue en 1774, soit une vingtaine

d'annees seulement apres la creation de I'Ordre, il entre en som

meil. II connait cependant une survivance, d'une part a travers les

Chevaliers Bienfaisants de la Cite Sainte, et d'autre part avec les

disciples de Louis-Claude de Saint-Martin, dont Papus et Au

gustin Chaboseau seront les descendants.

C'est sous cette forme qu'il existe encore de nos jours a travers

divers Ordres Martinistes, dont Tun des plus importants est VOr 

dre Martiniste Traditionnel.

Q ACTUALITE DE L 'HISTOIRE • HORS SERIE n°38

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LE M A R T I N I S M E

L'ord re des chevaliers

Masons Elus-Cohen 

de TUniversT u b   t r v k   P k i > * r m , K .s o k   m . i . t h i r u s .

Illustration de Dionysius, pour la traduction anglaise de s «Trois principes», de Jacob Boehm e

U n  s y s t e m e   d e  h a u t s-g r a d e s* 

L’Ordre des Chevaliers Masons Elus-

Cohen de I’Univers, plus couramment

appele ordre des Elus-Cohen, releve de

ce que Ton uppelle les « hauts-grades

magonniques ». Ces grades sont apparus

dans la Franc-Magonnerie au XV IIFmc

siecle, epoque ou ils proliferaient avec

une certaine anarchie. L’ordre des Elus-

Cohen a ete fonde vers 1754 par Marlines

de Pasqually (17107-1774). Malgre les

recherches de plusieurs historiens commeRene Leforestier (1858-1951). Gerard

Van Rijnberk (1875-1953). ou Robert

Amadou (1924-2006), les origines de ce

personnage restent encore mysterieuses.

Depuis. peu de decouvertes importantes

sont venues s’ajouter a leurs travaux, si

ce n’est celle de Facte d'inhumation de

Marlines par Jean Pinasseau en 1969, et

celles de Christian Marcenne en 1996 a

propos de sa carriere militaire.

U n  m y s t e r i e u x   f o n d a t e u r

Le pere de Marlines de Pasqually etait un

espagnol, ne a Alicante. Certains histo

riens pensent qu’ il descendait des Mar-ranes, mais aucun element ne permet de

Faff inner. On dit Marti nes de Pasqually

natif de Grenoble, dans la paroisse Notre-

Dame. Cependant, la date exacte de sa

naissance reste inconnue. car son acte de

bapteme demeure introuvable. Les re-

centes decouvertes de Christian Mar

cenne permetlent de situer sa naissance

vers 1710.

Le nom meme de Martines de Pasqually

reste imprecis, car il en varia 1’ortho-

graphe et la composition plusieurs fois.

Ainsi utilise-t-il tantot le nom de Joachim

Dom Martines de Pasqually, et tantot

celui de Jacques Delivon Joacin Latour

de La Case. Nous nous contenterons ici

d’employer celui qui lui est generalement

attribue : Martines de Pasqually. Que tut

sa jeunesse ? Nous Fignorons, et on ne

sait rien a propos de ses etudes et de la

formation qu’il requt. Ses lettres mon-

trent qu’il maitrisait mal Fecriture de la

langue fran^aise. Certains rituels Elus-

Cohen sont ecrits entierement en lalin -

ex. le De Circulo et quelques-uns com-

p>ortent des citations latines. II est done

possible qu ’il possedait une culture clas-

sique. D ’apres les documents deposes par

Martines chez Perrens fils, notaire a Bordeaux. il ressort qu’il a exerce la profes

sion de militaire pendant une dizaine

d’annees, avec le grade de lieutenant.

Ainsi, en 1737, il sert en Espagne. dans la

compagnie du regiment d’Edimbourg-

Dragons, commande par son oncle, Dom

Pasqually. Plus tard, en 1740, il est en

Corse, ou il participe a une intervention

franchise sous le commandement du mar

quis de Millebois. Enfin. en 1747, il esl

au service de I’Espagne et combat en Ita

lic.

E m m a n u e l  S w e d e n b o r g  

e t   M a r t i n e s   de   Pa s q ua l l yDans son livre Martinisme Willermo-

sisme -Martinisme et Franc-Magonnerie

(1899), Papus presente Martines de Pas

qually comme un disciple d’Emmanuel

Swedenborg. II fait d'ail leurs de ce der

nier le createur des Hauls Grades ma^on-

niques, et precise qu’apres avoir initie

Martines a Londres, Swedenborg Faurait

charge de repandre en France les grades

ma^onniques dont il etait le createur.

Papus va jusqu’a pretendre que le Marti

nisme esl un Swedenborg is me adaple. En

fait, il reprend ici des affirmations erro-

nees, formulees par Ragon dans son

Othodoxie Ma^onnique (1853). Ce der

nier avait lui-meme repris, sans les

controler, des informations donnees par

Marcello Reghellini dans La Magonnerie

consideree comme le resultal des reli-

FEVRIER - MARS 2010 5

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DOSSIER

gions egyptiennc, juive ct chretienne

(1833). Dans ce livre, cct auteur dresse

unc biographic assez fantaisiste du fon-

dateurdes Elus-Cohen. Faisant de lui un

disciple de Swedenborg, il prelend que

e'est ce theosophe suedois qui lui donna

Pidee de creer un rile en relation avee la

symbolique de I'Ancien et du Nouveau

Testament. D'apres lui. Marlines serait

d’origine allemande et mourut cente-naire ! On peut s'etonner que Ragon et

Papus aient manque a ce point d* esprit

critique, car une etude memc rapide des

idees de Pasqually et de Swedenborg

montre qu’elles n’ont rien en commun.

Reghellini pretendait egalement que

Martines de Pasqually tenait sa doctrine

des juifs talmudistes el des chretiens de

saint Jean « qui vivaient dans les lieux

d’Orient qu'il avail visites pendant sa jeu-

nesse ». II parle de ses voyages en Tur-

quic, en Arabic et en Palestine, sans

toutefois citer ses sources. Que ce soit

dans ses ecrits ou ses correspondances,

Martines n’a jamais fait etat de telsvoyages ; il semble done impossible d'ac-

corder le moindre credit aux affirmations

fantaisistes de Reghellini.

Selon les dires de Martines. son pere etait

Franc-Ma^on et avail dirige une loge a

Aix en 1723. II aurait ete en possession

d'une patente stuartiste, datee du 20 mai

1738. charge qui etait transmissible a son

fils. Dans ses lettres, Martines de Pas

qually parle a mots couverts des maitres

qui lui ont transmis ses connaissances,

mais e’est probablement de son pere qu'il

re^ut I’essentiel de sa formation mys

tique. Cependant. il dit parfois dans ses

textes : « la Sagesse m’ a enseigne »,

comme pour montrer que son savoir pro-

vient aussi de sa propre experience spiri-

tuelle. Quoiqu’il en soit. Martines adapta

ses connaissances a son epoque et au

cadre qu’il avait choisi pour les diffuser,

a savoir, la Franc-Mavonnerie. L'etude de

ses ecrits, de ses instructions et de ses ri-

tuels montre qu'il connaissait parfaite-

ment la Bible et particulierement

I’Ancien Testament, qu ’ il cite frequem-

ment en renrichissant a l aide d’elements

empruntes a la tradition talmudique.

La   K a b b a l e

Bien qu’il soit errone d’assimiler le Mar-

tinisme avec la tradition kabbalistique, la

doctrine de Martines de Pasqually pos-

sede une certaine affinite avec le fonds

general de la mystique juive. Cependant,

par ses rites, I’Ordre fonde par Martines

de Pasqually se rapproche davantage des

kabbalistes chretiens de la Renaissance.

II disait tenir ses connaissances d’un he

ritage esoterique dont sa famille etait en

possession depuis trois cents ans. Elle au

rait re^u cct heritage de 1’Inquisition.

Helas, nous ne savons rien a ce propos.

S'agit-il de documents renfermant des

connaissances et des pratiques dont Martines s’est fait le dispensateur, ou cct he

ritage lui venait-il d’une societe

initiatique a laquelle sa famille apparte-

nait ? Jean-Baptiste Willermoz disait que

Martines avait succede a son pere, lequel

vivait en Espagne. Cette remarque laisse

entendre qu’il exista probablement un

petit groupe de « pre-Cohen » sous la di

rection de son pere. Martines de Pas

qually ne pretendait pas etrc le createur

de I’Ordrc qu’il dirigeait, mais se pre-

sentait comme etant I’un de ses sept Sou-

verains. Quoiqu'il en soit, 1’Ordre

constitue par Martines est veritablementune creation. En elTet. lorsqu'on lit les di-

verses correspondances du maitre avec

ses disciples, on decouvre la genese d’un

Ordre, qui meme au moment de la mort

de son fondateur, n’etait pas encore tota-

lement operationnel.

L’etude du Traite sur la reintegration des

etres, texte dans lequel Martines a resume

1'ensemble de sa doctrine, revele la pre

sence d’elements empruntes a la littera-

ture talmudique, rabbinique et

kabbalistique. Bien des details montrent

aussi la presence de themes propres au

christianisme primitif. On aurait done tort

de faire de Martines un kabbaliste, car saphilosophic, tout comme sa theurgie. ne

sont pas specifiquement kabbalistes.

Martines de Pasqually se presente

comme catholique romain. Cependant.

ses enseignements sont plus proches du

christianisme primitif que des dogmes

enseignes par l’Eglise. En effet. comme

le disait Robert Amadou. Martines pense

comme un chretien d’avant le premier

Concile. Pour lui, le Christ est un pro-

phete qui s'est incarne a travers le temps

sous differents noms ; il a une conception

angelologique du Christ, position carac-

teristique du judeo-christianisme. Si les

divers mouvements judeo-chretiens qui

constituent la source du christianisme ont

etc marginalises apres les premiers

Conciles, il n'en reste pas moins vrai que

certains ont subsiste assez longtemps. II

est possible qu’une survivance judeo-

chretienne ait persiste en Espagne et que

Martines soit l’un de ses descendants.

Selon les ecrits de Martines, la science* 

des Elus-Cohen trouve son orisine dans

les instructions que Seth, le troisieme fils

d'Adam. aurait revues d’un ange. Cette

science enseigne la maniere de conduire

les rites propres a permettre a l’homme

de se reconcilier avec Dieu. Pour Marti

nes, les descendants de Seth et d'Enoch

auraient perverti cette connaissance, au

point qu'en definitive, elle serait devenue

inutilisable. II pretend que Noe fut ins-

truit sur cette science qui. de generation

en generation, se serait transmise

jusqu’aux Elus-Cohen.

M a r t i n e s   de   Pa s q ua l l y , F r a n c - M acon

Martines de Pasqually definit ainsi sa

mission : « Je ne suis qu’un faible instru

ment dont Dieu veut bien, indigne que je

suis, se servir, pour rappeler les hommes

mes semblables a leur premier etat dema$on, afin de leur faire voir veritable

ment qu’ils sont reellemcnt hommes-

Dieux, etant crees a I’image et a la

ressemblance de cet etre tout-puissant. »

l - J

6

Cachet de Ma rtinis de Pasqually 

d m * ' :

Dessin thiurgique des Elus-Cohen

Martines de Pasqually estimait que la

Franc-Ma<;onnerie de son epoque etait

« apocryphe », e’est-a-dire d’une au-

thenticite douteuse, et proposait de la res-

sourcer a partirde la doctrine dont il etait

le depositaire.

Les activites ma^onniques de Martines

debutent en 1754. dans le Sud de la

France, a Avignon, a Marseille et plusparticulierement a Montpellier, ou il au

rait fonde le chapitre des Souverains

Juges Ecossais. A la fin de 1’annee 1760.

 Jean -Bap tis te Wi lle rmoz 

6 ACTUALITE DE L'HISTOIRE • HORS SERIE n°38

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LE M A R T I N I S M E

Sceau des Elus-Cohen

il se presenta a la loge Saint Jean des Irois

loges reunies, situee a Test de Toulouse.

Martinos y exposa une sorte de « plan

parfait » de la Franc-Ma^onnerie et ses

projets pour etablir l'ancien et le nouveau

temple des « Chevaliers Levites. des Co-

henim-Leviym et des Elus Coens ». Les

freres de Toulouse se rnontrent scepticjues

et demandent a Marlines de Pasqually de

prouver la realite des connaissances qu'i l

pretend detenir. Pour satisfaire a leurs

exigences, il tente de demontrer l’effica-

cite de ses pratiques theurgiques. Apres

deux essais infructueux, notre theurge fut

remercie et invite a quitter les lieux. car

les responsables de la loge toulousaine nevoulurent pas pousser V experience plus

loin.

A Foix. Martines eut plus de chance, et

c'est dans la loge Josue. etablie dans le

regiment present dans cette ville. qu 'il va

recruter ses premiers disciples, comme le

lieutenant-colonel de Grainville et le ca-

pitaine des grenadiers Champoleon.

C'est la tju’il fonde un chapitre. le Tem

ple des Elus-Cohen. Cependant. c'est a

Bordeaux que commence reellement

l'histoire de cet Ordre. A cette epoque. en

avril 1762. le regiment de Foix est en gar-

nison au Chateau-Trompette de Bor

deaux. Martines s’installe lui-meme dans

cette ville, et c'est done tout naturelle-

ment que le travail commence a Foix

s’etend a Bordeaux. C'est la qu'i l etablit

son « Tribunal Souverain », e'est-a-dire

le centre principal des activites de TOr

dre des Chevaliers Masons Elus-Cohen

de I'Univers. Un jeune officier de ce re

giment, le sous-lieutenant de grenadiers,

Louis-Claude de Saint-Martin, va bientot

s'interesser a cet Ordre mysterieux.

Les voyages de Martines a Paris lui per-

mettent egalement de trouver d'autres

disciples, tels Bacon de la Chevalerie, le

comte de Lusignan. Bonnichon dit duGuers, Henri de Loos et Jean-Baptiste

Willermoz, qui se trouve alors dans la ca-

pitale pour ses affaires personnel les.

L’Ordre s'etend rapidement a Paris, Ver

sailles, Lyon, Grenoble, la Rochelle,

Strasbourg... L'abbe Fournie (1738-

1825), disciple de la premiere heure,

nous renseigne sur la maniere dont Mar

tines recrutait ses disciples. « Dieu m’ac-

corda la erace de rencontrer un homme

qui me dit familierement: « Vous devriez

venir nous voir, nous sommes de braves

gens. Vous ouvrirez un livre. vous regar-

derez au premier feuillet, au centre et a lafin ; lisant seulement quelques mots, et

vous saurez tout ce qu’il contient. Vous

voyez marcher toutes sortes de gens dans

la rue ; he bien ces gens la ne savent pas

pourquoi ils marchent, mais vous. vous le

saurez ». Cet homme, dont le debut avec

moi semble extraordinaire, se nommait

Don Martinets de Pasqually. » (P. Four

nie, Ce que nous avons ete, ce que nous

sommes et ce que nous deviendrons,

1801.)

U n  rite   j u d e o -chretien

L’Ordre fonde par Marlines de Pasqually

est une societe initiatique mystique. II est

structure autour d'un systeme theoso-

phique ties particulier, car la mystique de

Martines n'est pas une simple specula

tion ; elle conduit a une pratique. Cette

mise en oeuvre s'appuie sur une magie d i

vine. une theurgie, qui se propose de

conduire 1'homme, par purifications suc-

cessives, a entrer en communication avec

le monde des esprits. D'abord avec

l'ange personnel de I'initie, son « com-

pagnon fidele », puis avec les esprits des

mondes superieurs, pour finalement le

conduire a faire l'experience de ce qu’il

nomme mysterieusement « la Chose »,

l'lnnommable.

LA DOCTRINE DE LA REINTEGRATIONContrairement aux divers systemes de

hauls grades ma^onniques, qui manquent

souvent d'unite doctrinale, celui de Mar

tines se developpe autour d'une doctrine

precise, celle de la Reintegration. Elle est

exposee dans le Traite sur la reintegration

des etres dans leur premiere propriete,

vertu et puissance spirituelle divine, un

texte d'instruction qu'il reservait a ses

disciples les plus avances. Pres de cent

ans apres la mise en sommeil de 1'ordre

des Elus-Cohen, en 1899, cette instruc

tion secrete fut publiee sous la forme

d'un livre paru chez Paul Chacornac.

Plus recemment, en 1993, Diffusion Ro-

sicrucienne en a publie une version plus

l iable d'apres l'exemplaire manuscrit de

Louis-Claude de Saint-Martin. Le Traite

de Martines est un midrach judeo-chretien, en ce sens qu’il commente la Bible

et lui apporte des developpements esote-

riques.

On peut resumer ainsi le propos du

Traite : Avant les temps. Dieu emana de

Lui des etres libres. Certains d'entre eux

voulurent exercer eux-memes la puis

sance creatrice. Dieu les ecarta alors de

son Royaume, son « Immensite divine »,

en les enfermant dans le monde de la

Creation, celui de la matiere, qu'il crea a

cet effet pour leur servir de prison. C'est

alors que Dieu emana 1'homme, un etre

dote d'un corps de lumiere, auquel il

confia la garde des esprits rebel les et la

mission de les amencr a leur resipiscence.

Cependant. le gcolier se laissa seduire pai*

ses prisonniers et chuta a son tour.

L'homme perdit alors son corps de lu

miere pour se trouver enveloppe piu- un

corps de chair. II garda cependant la

meme mission, mais se trouvait des lors

contraint de reintegrer sa position glo-

rieuse avant de pouvoir 1'accomplir. Ne

disposant plus des memes pouvoirs, il fut

reduit a utiliser un culte exterieur, la

theurgie, pour obtenir l'aide des « agents

intermediates ». les anges restes fideles

a Dieu. C ’est ce culte particulier. neces-

sitant de longues preparations, que pre-

tendait perpetuer l'Ordre des

Elus-Cohen.

L es  GRADES COHEN

Martines de Pasqually confiait ses ensei-

gnements a ses disciples au fur et a me-

sure de leur avancement dans les grades

composant la hierarchic de l'Ordre. Cette

hierarchic debute par les trois grades

« bleus » : Apprenti, Compagnon et Mai-

tre, le plus souvent donnes en une seule

FEVRIER - MARS 2010

Dessin th£urgique des Elus-Cohen, d'apr&s un manuscrit de la B.N.F.

Page 8: Le Martinisme Dévoilé...

8/18/2019 Le Martinisme Dévoilé...

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DOSSIER

ceremonie. Suivcnt les degres de Maitre

Paifait Elu (ou Grand Elu sous la bande

noire), d'Apprenti Elu-Cohen (ou Fort

marque), de Compagnon Elu-Cohen (ou

Double fort marque), de Maitre Elu-

Cohen (ou Triple fort marque, ou encore

Maitre ecossais). Viennent ensuite ceux

de Grand Maitre Cohen (ou Grand archi-

tccte), de Grand Elu de Zorobabel, (ou

Chevalier d'Orient), et de Commandeurd'Orient (ou Apprenti Reaux-Croix).

Enfin, la hierarchic de I’Ordre est cou-

ronnee par un degre supreme, celui de

Reau-Croix (ou R+).* 

L'Ordre des Elus-Cohen est dirige par un

college de direction, le Tribunal Souve-

rain, compose de Reaux-Croix. Ses

membres portent le litre de Souverains

Juges et font suivre leur signature des let-

tres SJ. Au XVIIIe, le « I » et le « J »

ecrits en majuscules ont le meme gra-

phisme, et cette similitude a entraine

quelques historiens a confondre les S.J.

de Martines avec les S.I. du Baron Hund.

Le titre de S.I. n'a jamais fait partie de lahierarchic Cohen.

Chaque initiation met en scene et fait

vivre aux membres de I’Ordre les divers

episodes de la vie de I'homme. D'abord

en evoquant 1’emanation du pere de 1'hu-

manite, Adam, dans I'lmmensite divine,

puis sa naissance dans un corps de lu-

miere, un « corps glorieux », et sa chute

dans le monde de la matiere. Ces cere

monies illustrent les purifications que

I’homme doit suivre pour retrouver sa

gloire perdue et parvenir enfin a sa « re

integration ». a son retour dans le Divin.

L'ensemble de ces grades est cense ren-

dre le disciple sensible aux influences

spirituelles de son guide interieur, son

« bon compagnon », terme par lequel les

Elus-Cohen designent leur ange gardien.

Lorsqu'un initie reussissait a realiser

cette « jonction », c'est-a-dire a s'unir

spirituellement avec son « bon compa

gnon », il pouvait alors esperer soulever

le voile du monde celeste en utilisant la

theurgie. Seuls les membres ayant atteint

le grade de Reaux-Croix recevaient les

cles secretes permettant de fa ire de tel les

experiences.

La  T h e u r g i e

Les Reaux-Croix pratiquent la theurgie

(du grec theos, Dieu. et ergon, ouvrage).

Litteralement. la theurgie est done « 1’ou-

vrage de Dieu ». Au IIle siecle, Jam-

blique l'a introduite dans la philosophic,

comme auxiliaire a la sagesse purement

speculative dont se contentaient ses pre-

deccsscurs. II la considerait comme une

magic superieure, visant non pas a obte-

nir des bienfaits materiels, mais a reali

ser progressivement l’union mystique

avec la Divinite. La theurgie de Martines

a les memes objectifs : elle a pour but de

mettre I'homme en relation avec le Divin

en utilisant des intermediates devenusnecessaires depuis la chute de I'homme,

les « anges ». ou plutot. en termes marti-

nistes, aux esprits celestes et surcelestes.

Ces rites visent essentiellement a obtenir

les benedictions des esprits bons. I Is ont

aussi pour but d'execrer, de conjurer les

esprits mauvais, pour chasser leurs in

fluences mauvaises qui tendent sans

cesse a eloigner I'homme de sa mission.

Appeler les esprits bons, eloigner les

mauvais, necessitent de connaitre leurs

noms, leurs jours d'influence et les

heures propices pour les interpeller. Pour

ce faire, Martines confiait a ses emulesReaux-Croix, un repertoire contenant les

noms, les hieroglyphes secrets de 2400

esprits, et des recommandations sur les

periodes favorables aux operations theur-

giques. Le rituel preconise par Martines

est extremement complexe dans sa mise

en oeuvre ; il reclame un lieu speciale-

ment amenage. Sur le sol, on dessine le

tableau figuratif de l'operation. une etoile

a six branches et des cercles sur lesquels

l'adepte doit dessiner les hieroglyphes

des esprits qu'il desire evoquer. Sur ce

dessin, il place des bougies dont le nom-

bre peut aller jusqu 'a plusieurs dizaines.

Avant d'operer, le disciple doit prendre

soin de se livrer aux jeunes et aux purifi

cations necessaires a I'accomplissement

du culte magique.

Ces rites magiques sont relativement

proches de ceux pratiques par les kabba-

listes chretiens et des procedures decrites

par Cornelius Agrippa. II faut souligner

qu'ils ont un caractere mystique et reli-

gieux. En effet, a la lecture de ces rituels,on est surpris par I'importance qu'y oc-

cupent les prosternations, les prieres.

souvent extraites des Psaumes. La theur

gie de Martines ne cherche pas a diriger

des forces sur quelqu'un ou a obtenir des

avantages. Ce n'est pas une « magie pra

tique » orientee vers les petits soucis du

quotidien ; c'est une sainte magie dont

l'objet est 1'union mystique. Tout, dans la

theurgie Cohen, conduit a cette rencontre

entre le visible et 1'invisible. Dans cette

pratique, 1'Invisible, la Chose, se mani-

feste physiquement, soit par un son, soit

par une voix lente que les Cohen nom-

ment « la conversation secrete entre

R .

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 X Table de hieroglyph es angeliques de s Elus Cohen

8 ACTUALITE DE L'HISTOIRE • HORS SERIE n°38

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LE M A R T I N I S M E

I ame et 1*intellect ». Le plus souvent, les

esprits expriment leur presence par un

hieroglyphe lumineux. Les Elus-Cohen

appelaient ces diverses manifestations

des « passes ».

Les instructions secretes, les rituels

Cohen et les correspondances entre Mar

tines et ses disciples montrent la diffi-

culte de tel les operations. A leur lecture,

on peut se demander combien purent ras-sembler les conditions preconisees par le

Souverain Grand Maitre des Elus-Cohen.

conditions qu'il serait impossible de reu-

nir a l’epoque actuelle. On peut aussi se

demander si ces travaux n’etaient pas

uniquement une preparation exterieure

destinee a conduire le disciple vers une

communion plus interieure avec le Divin.

En effet, pour Martines, le lieu privilegie

de la rencontre avec le Divin reste le ca^ur

de 1*homme, car c’est dans ce tabernacle

qu’il peut recevoir les plus grandes satis

factions, ainsi que les plus grandes fa

vours que le Createur lui envoie.

La  p r i e r e

II faut souligner que les disciples de Mar

tines de Pasqually se devaient d’etre des

catholiques pratiquants, et plusieurs pro-

testants se convertiront au catholicisme

pour se conformer a cette regie. D'ail-

leurs, lors de son initiation au degre ap-

prenti. le Cohen devait prendre plusieurs

engagements : le premier etait de garder

secrets les mysteres de l'Ordre. et le se

cond d’etre fidele a la sainte religion ca-

tholique apostolique et romaine. Avant de

pratiquer les rites theurgiques, les disci

ples devaient assister a une messe. Ils se

preparaient au moyen de la priere, no-

tamment en pratiquant la Priere des six

heures, un exercice auquel ils devaient se

livrer toutes les six heures (six heures du

matin, midi, dix-huit heures et minuit).

Ces prieres, en partie composees par

Martines, comprenaient des lectures des

Psaumes, des invocations « du saint nom

de Jesus », le Pater, I'Ave Maria, ainsi

que des suppliques adressees a I'ange

gardien. A chaque nouvelle Lune, voire

tous les jours suivants, ils devaient ega-

lement reciter les sept Psaumes de Peni

tences. L’Office du Saint Esprit devait

etre recite chaque jeudi. tout comme le

Misere, qui devait etre dit debout face a

1'Orient, et le De Profundis, face contre

terre. Plus le disciple avan^ait dans la hie

rarchic, plus les obligations, prieres,

jeunes, abstinences augmentaient.

La vie d'un Cohen n'avait rien a envier a

celle d’un moine. L'abbe Pierre Fournie

rapporteque les instructions journalieres

de Martines « etaient de nous porter sans

cesse vers Dieu. de croitre de vertus en

vertus, et de travailler pour le bien gene

ral ; elles ressemblaient exactement a

celles qui apparaissent dans 1'evangile

que Jesus-Christ donnait a ceux qui mar-

chaicnt a sa suite ». Duroy d'Hauteriveprecise le travail d'un Cohen en ces

termes : « La rejection continuelle de la

pensee mauvaise, la priere et les bonnes

oeuvres : voila les seul moyens d'avancer

Karl Gotth elf von Hund, createu r de la Stricte Observance Templitre

dans la decouverte de toutes les verites, et

ce qui est encore au-dessus, la pratique

de toutes les vertus ». L'cxisence de tel les

pratiques rebutera de nombreux disciplesvenus chercher le merveilleux et peu en-

clins a suivre des regies aussi contrai-

gnantes.

L 'e n t r e e   en   s o m m e i l

A son arrivee a Bordeaux, meme s’ il vit

modestement. Martines de Pasqually ne

semble pas manquer d'argent. Cepen

dant, sa situation se degrade rapidement,

et en 1769, il a 1200 livres de dettcs. Or.

a cette epoque, nombre de Bordelais

s'enrichissaient grace au negoce du sucre

avec les Antilles. Les beaux-freres de

Martines de Pasqually s’etaient d’ailleurs

installes la-bas, tout comme nombre d'of-ficiers du regiment de Foix. II semble que

le fondateur des Elus Cohen avait lui-

meme des interets a Saint-Domingue, et

c'est la raison pour laquelle il s'y rendit

en 1772. II esperait y recouvrir la succes

sion d'un parent decode la-bas et pensait

mottre ainsi un terme a ses difficultes fi-

nancieres.

Son sejour se prolongea. et en definitive,

le maitre ne centra jamais de voyage, car

il mourut a Saint-Domingue, le 24 sep-

tombre 1774. Quolquo temps avant sa

mort, il avait nomine Armand-Robert

Caignet de Lestere, 1'un de ses disciples

d'Haiti, pour diriger l'Ordre des Elus-

Cohen. Mais ce dernier mourut lui-meme

en decembre 1779. Son successcur,

Sebastien de Las Casas, rentra en France

en novembre 1780 et mit officiellement

en sommeil un Ordre qui, depuis la mort

de son fondateur, s’eteignait de lui-

meme. En fait. Martines de Pasquallyn’avait pas consigne par ecrit le rituel

d'initiation au degre supreme de l'Ordre,

celui des Reaux-Croix. Par consequent,

ses disciples etaient dans 1’ impossibility

d'assurer la perennite de l ’Ordre. Par ail-

leurs, beaucoup de ses membres s’etaient

eloignes de pratiques theurgiques trop

complexes pour adopter le mesmerisme

ou le somnambulisme, decouvert par le

marquis de Puyseguren 1784. Sans doute

jugeaient-ils ces moyens plus simples

pour entrer en contact avec 1’autre

monde.

L es  disciples* 

L'Ordre des Elus-Cohen ne comporta ja

mais beaucoup de membres. II compta

cependant quelques femmes, chose rare

pour un rite ma^onnique a l'epoque.

Louis-Claude de Saint-Martin (1743-

1803) fut initie dans cet Ordre en 1765.

Officier au regiment de Foix. il quitta

1'armee en 1771 pour devenir le secre

taire personnel de Martines de Pasqually.

Le chef des Elus-Cohen reconnaissait en

effet dans ce jeune homme brillant un

disciple prometteur. capable de 1'assister

dans ses projcts. Grace a son aide, Mar

tines de Pasqually reussit a ameliorer

1'organisation de l'Ordre. En 1772, Saint-

Martin fut initie au plus haut grade des

Elus-Cohen, celui de Reaux-Croix.

Jcan-Baptiste Willermoz (1730-1824),

FEVRIER - MARS 2010 9

   O

   M

   l

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DOSSIERL ’ H O M M E

D E D E S I n.

 D E S E R R E U R S E T

de la Verite»

0 U 

LES HO MM ES RAPPELL#* i

J U P R I N C I P E V S t V B R S E L  

DE LA SC IENCE ;OttTflpliaa  •«fiXtMC mx   Otinifn-i

 /■utctrtoMJwJ* Umn /U inW t & /»ri cmtl~

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At i<W f, Us Lsnfmi t (0  U  1  Am .

P a m   o r P« 1MO.

A E D I M B O U R a

-----------------------------------------  --

*7 75*

«Des erre urs et de la v6rit&», de Louis- Claude de Saint-Martin -177 5

negociant en soieries a Lyon, fut egale-

ment un membre eminent de I'Ordre. Ini-

tie dans la Franc-Ma^onnerie en 1750.

aloi*s qu'il n'avait que vingt ans, il occupa

rapidement une place importante dans la

Ma^onnerie lyonnaise. II entra chez les

Elus-Cohen et devint un disciple zele. Se-

duit par les enseignements de Martines

de Pasqually, il fut cependant degu par les

capacites d'organisateur de ce dernier. En

efifet, I’Ordre des Elus-Cohen restait en

core en pleine gestation, et son fondateur

n'en finissait pas d'ecrire les rituels et les

instructions destines au fonctionnement

des loges.

L es   C h e v a l i e r s   B i e n f a i s a n ts  

d e   la  C it e  S a i n t e

Apres la disparition de Martines de Pas

qually. les deux disciples que nous venons

d'evoquer tentent. chacun a leur manicre,

de poursuivre le travail de leur maltre. Le

premier, Jean-Baptiste Willermoz. integre

la doctrine de la Reintegration dans le rite

maQonnique de la Stricte Observance

56 

Templiere allemande du baron Carl Got-

thelf von Hund (1722-1776), Ordre avec

lequel il etait en relation depuis quelques

annees. En 1778, loi^s d'un Convent, cet

Ordre se reorganise en adoptant cette doc

trine et devient celui des Chevaliers Bien

faisants de la Cite Sainte. Jean-Baptiste

Willermoz redige pour les degres supe-

rieurs de cet Ordre, ceux de Profes et de

Grand Profes, des instructions qui presented, sans la nommer directement, la doc

trine de Martines. Cependant, Willermoz

ne transmet pas les enseignements theur-

giques de Martines aux Chevaliers Bien

faisants de la Cite Sainte. Lors du Convent

de Wilhemsbad, en 1782, la reforme ini-

tiee par Willermoz est adoptee : c’est la

naissance du Rite Ecossais Rectifie.

La floraison de ce rite sera entravee par la

Revolution franchise. Avant meme la dis

parition de Jean-Baptiste Willermoz, qui

meurt en 1824. il entrera en sommeil en

France. II survivra en Suisse, notamment

a Geneve, dans les milieux protestants

qui seront seduits par la symboliquechretienne attachee a ce rite. Ce n'est

qu'apres la Premiere Guerre mondiale,

mace a Edouard de Ribaucourt et a Ca-

mi lie Savoire, qu 'il renaitra en France.

La  v o i e   i n t e r i e u r e

La pensee de Martines de Pasqually trouva

egalement des developpements hors de la

Franc-Magonnerie, grace a Louis-Claude

de Saint-Martin. Quelques annees apres la

mort de Martines de Pasqually, ce dernier

abandonna la theurgie, la voie externe, au

profit d'une demarche plus interieure. En

effet, apres des annees de pratique, il ju-

geait la theurgie dangereuse, et peu sure

pour cheminer vers le Divin. Pour lui. le

creuset de 1'evolution spirituelle, c'est le

coeur de l’homme, et il n'est pas neces-

saire d'utiliser une quelconque magie ou

de faire appel aux anges. On appelle la

voie preconisee par Saint-Martin une

« voie cardiaque », par opposition a la voie

theurgique. C’est a la suite de sa decou-

verte des oeuvres de Jacob Boehme, que

Par I’Auteur <Jc« Eucurs & tic b V ir ii i.

Si i*» hiUttri # jMImmh f»W.« tnrhm, A u /mt  y><«« in 

"• ** r1** An r-if, , o

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a  r. y o n .

C2mx  J. lcx.nct Q U in , likuiM,

* 7 9 0 .

«L'Homme de d£sir», de Louis-Claude deSaint-Martin -179 0

Saint-Martin se convertit a la voie inte

rieure. Cependant, les enseignements de

Pasqually eurent sur lui une influence pro-

fonde, et Saint-Martin conserva toute sa

vie un grand respect pour celui qu'il ap-

pelait « son premier instructeur ». Les li-

vres qu'il ecrivit sous le nom de

Philosophe Inconnu. depuis Des Erreurs

et de Verite en 1775, Le Tableau Naturel

en 1782, LHomme de desir en 1790 ou Le

Nouvel Homme en 1792... jusqu'a son

dernier livre, Le Ministere de I'Homme-

Esprit, public en 1802. sont tous marques

de la doctrine de Martines de Pasqually.

La Tradition martiniste veut que Louis-

Claude de Saint-Martin ait transmis une

initiation a quelques disciples choisis, et

que celle-ci se soit perpetuee au corns du

XIXe siecle. A la fin du XIXe siecle,deux homines se presenterent comme

etant depositaires de cette initiation : Ge

rard Encausse el Augustin Chaboseau. En

1889, ces deux heritiers unirent leurs ef

forts pour fonder I'Ordre Martiniste des

tine a perpetuer cet heritage esoterique et

mystique.

Christian Rebisse 

Dessin pour le grade d'appre nti des Chevaliers Bienfaisan ts de la Cit6 Sainte

Mausotee du 3e grade des Chevaliers Bienfaisan ts de la Cit6 Sainte

H- -H

Symboles accompagnant la signature deM artin is de Pasqually 

O E P ON E N S A L IE N A ^ A S C E N 0 ) T U N U S

10 ACTUALITE DE L'HISTOIRE • HORS SERIE n°38

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LE M A R T I N I S M E

L'Ordre Martiniste a la Belle-Epoque (1889 a 1918)

Ala fin du XIX° siecle, deux etu-

diants en medecine, Gerard En-

causse (1865-1916) et Augustin

Chaboseau (1868-1946) frequentent les

services du docteur Luys a I'hopital de la

Charite. Au cours d'une discussion, ils

decouvrent qu*ils sont tous les deux de-

positaires d'une initiation remontant aux

disciples de Louis-Claude de Saint-Mar

tin. mais chacun d ’eux est relie au Philo

sophe Inconnu par une filiation

differente : celle de Papus vient d*Henri

Delaage, tandis que celle d'Augustin

Chaboseau passe par Amelie de Boisse-

Mortemart.

Pa p u s

Papus presente Henri Delaage (1825-

1882) comme ayant ete initie par le chi-

miste Jean-Antoine Chaptal (1756-1832),

son grand-pere. dont il fait un disciple de

Saint-Martin. On ignore si le celebre chi-

miste, qui fut membre du Conseil d'Etat

et ministre du Consulat et de 1'Empire,

fut reellement en relation avec Louis-

Claude de Saint-Martin. On sait cepen-

dant qu'il avail etc initie dans la

Franc-ma^onnerie vers 1789 a la loge La  

Parfaite Union   de Montpellier. Notons

qu'Henri Delaage n'a jamais pretendu

avoir ete initie par son grand-pere. Au

moment de la mort de ce dernier, il

n'avait d'ailleurs que sept ans. La tradi

tion veut qu'entre lui et Jean-Antoine

Chaptal. il ait existe un initiateur dont le

nom ne nous est pas parvenu. II est pro

bable que celui-ci ne soit autre que son

propre pere, Clement Marie-Joseph De

laage (1785-1861).

Comme le montre la correspondance

qu'il echangea en mars 1811 avec

Charles Geille, Clement Marie-Joseph

connaissait asscz bien la pensee de

Louis-Claude de Saint-Martin pour don-

ner a son interlocuteur des conseils de

lecture sur les ouvrages du PhilosopheInconnu. Charles Geille semble avoir etc

lui-meme ties au fait de pratiques theur-

giques voisines de celles qu'enseignait

Martines de Pasqually. A la lecture de

leurs lettres, Paul Vulliaud precisait :

« nous devons bien convenir, en elTet, que

la tradition martiniste se perpetue par ini

tiation livresque et individuelle » (His-  

toire et port mils de Rose-Croix , 1987).

H e n r i  D e l a a g e

Henri Delaage est Kune des figures les

plus curieuses de son epoque. Homme de

bien, il etait connu du tout Paris, et Eli-

phas Levi voyait en lui un thaumaturge.

Ardent defenseur du magnetisme, il

 Au te l d'une log e m artin ist e, se lon le ri tu elde Teder, en 1911

considcrait cette science nouvelle comme

un moyen de ramener les homines de son

siecle a la foi. Son premier livre, intitule

Initiation aux mysteres du magnetisme  (1847), sera consacre en grande partie a

ce theme. En 1852, alors qu' il est initie a

la Franc-Magonnerie depuis peu, il

evoque la symbolique des disciples d'Hi-

ram dans Doctrines des societes secretes. 

Le F.-. Leblanc de Marconnay lui re-

proche alors d'avoir « expose aux yeux

des profanes les mysteres des divers

grades maconniques ». Appele a la barre

du Grand Orient de France pour s'expli-

quer, il sera exclu des loges pour un an.

Cet episode lui servit-il de lecon ? Quoi

qu'il en soit, Papus precise que : « De

laage poussa le respect du secret jusqu’a

ne pas parler de 1'origine de son initiationdans ses livres, et c'est a ses intimes qu'il

se plaisait a parler a coeur ouvert du Mar

tinisme ». Dans une lettre du 19 janvier

1899 adressee a Papus, Camil le Flamma-

rion rapporte qu'il voyait frequemment

Henri Delaage et precise : « Je me sou-

viens qu'il m’a souvent parle de son

grand-pere, le ministre Chaptal, et de

Saint-Martin (le Philosophe Inconnu).

que son grand-pere connaissait particu-

lierement. II s’etait occupe aussi lui-

meme, avec Matter, de la doctrine du

Martinisme. sur laquelle ce dernier au

teur a publie un ouvrage a la librairie aca-

demique Didier. oil je Pai aussi

quelquefois rencontre. » (Matter, Saint-  

Martin, le Philosophe Inconnu.  1862.)

Papus rapporte que « quelques moisPapus - photo de Roger Viollet 

FEVRIER - MARS 2010 11

  o  u  r

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LE M A R T I N I S M E

Un A* . D1X rRAMCS

H r . * * p h tl < n Gf h ;y u t tn J r f x n J j n J e J * *    « M i L i * A *  

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N ’ 1 OCTOBRE 1888

( d e i m e i4#. rur d€ S t tmt**rg . *4  J

l»ABU

Aof i iu ruT ios :if. tut \(   ;*4r#4f»Ur«j. 41

Revue «L'lnitiation», n ° 1, de 1888

official, et des loges sont creees un peu

partout en France. Paris en compte bien-

lot quatre : Le Sphinx, dirigee par Pa pus,

ou se font les etudes generates ; Herma-  

nubis, dirigee par Sedir, ou Fon etudie la

mystique et la tradition orientales ; Vel-  

leda . dirigee par Victor-Emile Michelet,

qui se consacre a Fetude du symbolisme :

Sphinge, reservee aux adaptations artis-

tiques.

Le Martinisme se devcloppe aussi dans

de nombreux pays comme la Belgique,

FAllemagne, FAngleterre, I*Espagne,

Tltalie, I’Egypte, la Russie, laTunisie, lesEtats-Unis d'Amerique, V Argentine, le

Guatemala et la Colombie. Le nombre

des loges depasse la centaine en 1898.

La   Fa c ul te   des  S ciences   H e r m e t i q u e s

Papus veut renover Fesoterisme occiden

tal : « Puisqu'il existe des facultes ou Ton

peut apprcndre les sciences materialistcs,

pourquoi n'y en aurait-il pas une ou Ton

pourrait apprendre les sciences esote-

riques ! ». C'est a cet effet qu’il cree

V Ecole Superieure Libre des Sciences  

HermetiqueSy   un groupe donnant des

cours et des conferences sur Fesoterismeoccidental. Ce ccrcle exterieurde I’Ordre

Martiniste deviendra plus tard le Groupe A A

Independant d ’Etudes Esotenques , puis

I'Ecole Hermetique   et la Faculte des  

Sciences Hermetiques . Les cours y sont

nombreux. el les sujets etudies vont de la

kabbale a l'alchimie et au tarot. en pas

sant par Fhistoire de la philosophic her

metique, soit environ une douzaine de

cours par mois. Les professeurs les plus

assidus sont Papus. Sedir, Victor-Emile

Michelet, F.-Ch. Barlet, Augustin Chabo-

seau, Sisera... Line section particuliere

etudie les sciences orientales sous la di

rection d’Aueustin Chaboseau. Unew-

autre, presidee par Francois Jollivet-Cas-

telot, se consacre a l'alchimie : c’est la

Societe AIchimique de France.

L 'Ord re Kab ba l is t ique

de la R+CLe Groupe Independant d 'Etudes Esote-  

riques , cercle exterieurde I’Ordre Marti

niste, est complete par un cercle

interieur : I'Ordre Kabbalistique de la  

Rose+Croi.x. Le 5 juillet 1892 est conclu

un traite d'alliance entre cet Ordre et le

Martinisme. Rappelons que 1'Ordre Kab 

balistique de la Rose+Croi.x  a etc renove

en 1889 par Stanislas de Guaita et Jose-

phin Peladan. Pour Stanislas de Guaita,

« le Martinisme et la Rose-Croix consti

tuent deux forces complementaires. dans

toute la portee scientifique du terme ». II

devient alors strictement reserve aux

Martinistes titulaires du grade « S.I. » et

permet de parfaire leur formation. 11 se

divisait en trois degres d'etudes sanc-

tionnes par les diplomes de : Bachelier  

en kabbale , Licencie en kabbale, et Doc-  

teur en kabbale.

L 'E glise   g n o s t i q u eLes Martinistes n’hesitent pas a s'allier a

d'autres societes initiatiques. Ainsi. en

1908, Papus organise un grand Convent

spiritualiste international a Paris, mani

festation qui ne reunit pas moins d’une

trentaine d'organisations. Helas, dans ses

nombreuses alliances, Papus se laisse

parfois deborder par la fougue de ses col

laborate urs. Ainsi en fut-il avec 1'EgUse  

Gnostique. On pretend sou vent que cette

derniere. fondee par Jules Doisnel vers

1889 a la suite d'une experience spirite,

devint « l’Eglise officielle » des Marti

nistes. En fait, il n'en est rien. et 1'im

portance de cette alliance a etc grossiepar certains successeurs de Papus. Si

I'Ordre Martiniste se lia avec plusieurs

organisations comme Les Illumines, Les  

Babistes , ou Memphis Misraun,  il n'en

garda pas moins son independance.

En 1897, sans doute pour remplacer 1'Or

dre Kabbalistique de la Rose-Croix tombe

en sommeil a la suite du deces de Stanis

las de Guaita, Papus, Marc Haven et Sedir

fonderent la mysterieuse Fraternitas The 

sauri Lucis   (F.T.L .), qui ne connaitra

qu'une existence ephemere. A cette

epoque, il est courant d’appartenir a plu

sieurs organisations initiatiques en meme

temps. Beaucoup en abuserent, et certains

Martinistes furent contamines par cette

maladie qui guette les pseudo-inities : la

« cordonite », c’est-a-dire 1'amour des de

corations et des grades en tout genre. Pour

ceux qui frequentaient le rite deMemphis-  

Misra'fm , les quelques grades martinistes

faisaient pale figure a cote des quatre-

vingt dix-sept degres de ce rite. Certains

Martinistes, aveugles par les titres miro-

bolants des grades de Memphis-MisraTm

(43° : Chevalier supreme commandeur  

des astres   ; 68° : Grand architecte de la  

cite mysterieuse   etc.), ne prirent meme

plus le temps d'etudier leur propre tradition. Beaucoup se noyerent dans line sorte

de syncretisme initiatique, oubliant le but

et les fondements de I'initiation pour se

perdre dans les apparences.

L es   p r e m i e r e s  d i f f i c u l t y

Papus avait parfaitement reussi a donner

au Martinisme une structure internatio-

nale. Cependant. il n'etait guere parvenu

a le relier au systeme philosophique qui

en constituait la source, celui elabore par

Louis-Claude de Saint-Martin. selon la

doctrine de Martines de Pasqually. La

cause de cet echec reposait sans doute sur

1'heritage trop fragmentaire qui lui avait

ete legue et qu'il qualifiait lui-meme de

« pauvre depot, constitue par deux lettres

et quelques points ». A la lecture des ou-

vrages de Papus, en particulier celui inti

tule Louis-Claude de Saint-Martin, sa  

vie, sa voie theurgique, son a-uvre, ses  

disciples  (Chamuel, 1901), on sent qu'il

ne possede pas toutes les cles de la doc

trine martiniste. II la confond souvent

avec Foccultisme et la kabbale. En 1901,

le responsable de I'Ordre pour les Etats-

Unis, le docteur Edouard Blitz, envoie a

Papus un Memoire confidentiel  qui sou-

ligne avec raison les confusions de Papus.

Ce dernier n’apprecie guere, et les deux

homines se brouillent. L’enthousiasme

des premiers collaborateurs de I’Ordre

s’estompe. Des 1907, Victor-Emile Mi

chelet prend une demi-retraite, et Sedir,

Fun des meilleurs collaborateurs de

Papus, se retire en 1910. Beaucoup de

ceux qui s’ interessent au magnetisme re-

joignent YEcole de magnetisme   fondee

par Henri Durville, un ami de Papus. Phi

lippe de Lyon lui-meme prend la direc

tion de la filiale lyonnaise de cette ecole.

Quant a Augustin Chaboseau. apres avoir

assure la fonction de redacteur en chef de

la revue Le Voile d'Isis  et celle de secre

taire de redaction de Fsyche, il avait pris

Victor-Emile Michele t , Grand Maitre de I'O.M.T. de 1931 a 1938

FEVRIER - MARS 2010 13

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DOSSIER

LE VOILE DISIS

5

Revue «Le Voile d'lsis», de jan vier 1891

ses distances avec I’Ordre depuis plu

sieurs annees. Homme de terrain, le tra

vail speculatif dans les loges ne le

passionnait guere ; il preferait Taction a

I'etude speculative. Toute connaissance.

disait-il « est inutile, vaine et egoiste, qui

ne peut profiler immediatement au bien

des autres ». Aussi, a partir de 1893, il

avail cesse de participer aux reunions de

loges pour repandre des idees emancipa-

trices par la plume et la parole. II avait de-

mande a etre mis en conge du Supreme

Conseil de I’Ordre Martiniste pour se

lancer dans Taction. Papus. par respect,

lui avait toujours garde sa place, et son

poste ne fut jamais occupe par un autre

membre. Passionne par Teducation, Au

gustin Chaboseau donna beaucoup de

son temps a la Ligue pour TEnseigne-  

ment  de son ami Jean Mace. Ayant laisse

la medecine pour la litterature et le jour-

nalisme, il ecrivit nombre d'articles dans

des journaux comme La Famille, I'Au-  

rore, I'Action, Le Courrierdu Soir, le Fi 

garo, le Matin , le Farisien, La Petite  

Republique.

La collaboration d'Augustin Chaboseau

a La Petite Republique  eut une influence

importante sur sa vie. C ’est la qu' il fit laconnaissance de Benoit Malon, de Four-

niere et de tous les leaders du mouvement

socialiste de 1'epoque. En 191 1, il devint

le secretaire du depute Pierre Goujon.

- p •G .•

 A• *

< *

Symbole utilise par ies M artinistes (A la Gloire de leschouah, Grand Architecte de I'Univers)

Contrairement a Papus qui ne reussil ja

mais a se faire admettre dans la Franc-

Magonnerie frangaise, devant se

contenter d'adherer au Swedenborgian  

Rite of Primitive et Original Freeman -

sonry, de John Yarker. Augustin Chabo

seau eut une vie magonnique assez

remplie. Initie a la loge VAction Socia 

liste  du Grand Orient de France en mai

1907. il frequenta ensuite la loge du

Foyer Magonnique. A partir de 1919. il

delaissa cette loge pour frequenter 1'obe-

dience du Droit humain.

Depuis 1889, Papus avait rcussi a main-

tenir YInitiation, une revue mensuelle.

mais au milieu de Tannee 1912, des dif-

ficultes se font jour. Les revues de juillet

el aout ne sonl publiees qu'en septembre

dans un numero triple. Ce numero

marque la fin d’une revue qui aura mar

que I'histoire du Martinisme. Papus sem-

ble conscient des faiblesses de son

entreprise. D'ailleurs, sa rencontre avec

le guerisseur et mystique Philippe de

Lyon Tavait conduit a prendre ses dis

tances avec Toccultisme. Desormais, il

s'interessait davantage a la mystique. En

compagnie de Philippe de Lyon, il se ren-

dit plusieurs fois en Russie a partir de

1901, et les deux hommes entrerent dans

I'intimite de la famille duTsar. II est pos

sible que la resurgence en France des

Chevaliers Bienfaisants de la Cite Sainte  

(R.E.R),  rite magonnique-martiniste

fonde jadis par Jean-Baptiste Willermoz

puis reveille par Edouard de Ribaucourt

et Camille Savoire en 1910, ne soit pas

etrangere a la remise en question de TOrdre Martiniste.

La   m o r t  d e  Pa p u s

Avec la Premiere Guerre mondiale.

I'Ordre Martiniste tombe progressive-

ment en sommeil. Chacun s'engage pour

defendre sa patrie, et Papus, qui consi-

dere le devoir envers son pays comme

sacre, se porte volontaire pour le front. II

est medecin-chef, avec le grade de capi-

taine. Augustin Chaboseau, reforme pour

raison de sante. prend contact avec son

vieil ami Aristide Briand. qui est devenu

Ministre de la Justice. Ce dernier 1'en-

gage comme secretaire particulier, place

qu'il occupera jusqu’en 1917.

Comme medecin militaire, Papus

s'epuise a la tache. Devenu diabetique, il

contracte aussi la tuberculose et meurt le

25 octobre 1916. Avec la guerre, les

membres du Supreme Conseil de I'Ordre

Martinisle sont disperses, et on ne peut

pas proceder a 1'election d'un nouveau

Grand Maitre. Augustin Chaboseau indi-

quera d'ailleurs que contrairement a ce

qui est affirme parfois, Charles Detre, dit

Teder (1855-1918), ne fut pas elu a cette

fonction par le Supreme Conseil.

Quelques annees plus tard. un Martiniste

de la premiere heure. Jollivet Castelot.

dira : « Avec Papus. le Martinisme est

mort » (Essai de Synthese des Sciences  

Occultes , 1928). Plusieurs disciples ten-

teront pourtant de prendre la direction de

I'Ordre. et il se crea alors plusieurs

groupes revendiquant chacun Theritage

de Papus. Beaucoup de Martinistes pre-

fereront ne pas s’associer a de tels pro-

jets et choisiront de rester independants.

Les choses changeront en 1931. lorsque

les survivants du Supreme Conseil de

I’Ordre se joindront a Augustin Chaboseau pour reveiller le Martinisme origi-

nel sous le nom d 'Ordre Martiniste  

Traditionnel.

Christian Rebisse 

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14 ACTUALITE DE L'HISTOIRE • HORS SERIE n°38

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LE M A R T I N I S M E

Le Martinisme moderne et ses obediences (1920 a 2010)

La Premiere Guerre mondiale avait

considerablement reduit les activi-

tes de 1*Ordre Martiniste, et la

mort de Papus, survenue deux ans avant

le retour a la paix, avait entraine la confu

sion parmi les Martinistes. D'une ma-

niere plus ou moins reguliere, certains

d’entre eux tenterent de faire revivre

TOrdre, sans toutefois parvenir a lui re-

donner son unite. C ’est de cette situation

confuse que sont nees les diverses obe

diences martinistes que nous connaissons

aujourd’hui. Leur genese etant complexe,

nous nous contenterons d’evoquer les

plus importantes.

J ea n   B r i c a ud

En 1919. deux Martinistes revendiquent

la succession de Papus : d ’une part Jean

Bricaud (1881-1934) a Lyon, et d’autre

part. Victor Blanchard (1878-1953) a

Paris. Le premier ne se presente pas

comme le continuateur direct de Papus,

mais de Charles Detre (1855-1918). dit

Teder. II rapporte que ce dernier avait

succede a Papus et precise qu’avant de

passer a l’Orient eternel. le 25 septembre

1918 a Clermont-Ferrand, Teder 1’aurait

designe comme son successeur. Preci-

sons qu’aucun temoin n’etant present acette occasion, ces affirmations sont fra-

giles. II est vrai que Teder avait occupe

 Jean Br ica ud s e ve ut su cces seur de Ted er 

des responsabilites importantes a

l’epoque de Papus. mais il n’existe aucun

element permettant de demontrer que

Papus 1’ait designe comme son succes

seur. Du reste. les survivants du Conseil

supreme de l’Ordre, comme Augustin

Chaboseau et Victor-Emile Michelet, ont

toujours conteste cette designation.

Jean Bricaud. personnage original, fut

une figure centrale du Martinisme lyon-

nais. II appartenait a YEglise Gnostique ,

l’une de ces Eglises marginales Heuris-

sant alors en France. Afin de ne pas sor-

tir de notre sujet, nous n'evoqucrons pas

les peripeties de ce mouvement fonde parJules Doisnel en 1889, a la suite d ’une

experience spirite chez Lady Caithness.

Nous dirons simplement que l’Eglise

Gnostique dans laquelle Jean Bricaud

etait eveque sous le nom de Tau Jo

hannes, puis sous celui de Mgr Jean II.

ne suffisait pas a cet homme dynamique

et ambitieux. Apres la mort de Teder. il

se rendit a Paris et presenta aux Marti

nistes de la capitale un document attes

tant de sa nomination a la tete de l'Ordre.

Ces derniers furent sceptiques devant un

document que Bricaud avait probable-

ment compose lui-meme. Cette situation

ne le decouragea pas pour autant. De retour a Lyon, il reussit a rassembler sous

son autorite un petit groupc de Marti

nistes.

L es   M a r t i n i s te s   lyonnais

II semble que Jean Bricaud tenta de re-

pondre aux critiques formulees par

Edouard Blitz, a propos de la filiation

entre le Martinisme instaure par Papus el

celui du XVII I1' siecle. en proposant d’as-

socier plus directement ces deux mouve-

ments. II reecrivit totalement les rituels

martinistes en leur ajoutant des elements

puises dans les catechismes de l’Ordre

des Elus-Cohen. que Papus avait publics

en appendice de son livre : Martines de  

Pasqually  (Chamuel, 1895). Desormais,

1‘ initie au premier grade etait designe

« Associe de l’Ordre Martiniste et Ap-

prenti Cohen, Maitre Secret de la Su

preme Maqonnerie initiatique et

Illuminee ».

Au premier abord, les textes composes

par Bricaud sont seduisants ; on y sent la

demarche d'un homme qui tente de trou

ver des points de passage entre l’Ordre

fonde par Papus et celui instaure par

Martines de Pasqually. Cependant, en y

regardant de plus pres, on constate que cechoix est pernicieux, car il donne nais-

sance a un « Martinisme hybride » qui

non seulement melange le Martinisme

avec les Elus-Cohen. mais esalement

I

Victor Blanch ardG rand M aitre de l'Ordre Martiniste et Synarchique

avec I'Eglise Gnostique el la Franc-Ma-

connerie de Memphis-MisraVm. On peut

se demander comment Jean Bricaud pou

vait pretendre perpetuer l’Ordre fonde

par Papus el Augustin Chaboseau,

Schema d'un temple martiniste, selon le ritu el de Teder, en 1913

FEVRIER - MARS 2010 15

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DOSSIER

fOI 4.1. C h u i u t  — PAR5

Le* Survkances Initio liquet  

I

Le Martinismecontemporaln

ct ses ventablcs engines

LeMartinisme contemporain, de Robert  Am belain -1946

ROBERT AMBELAIN

DU MARTINISMEKT l»KS

ORDHES MAHTIMSTES

U S )

Tom  m  q*l) teal <

a

L C •

4.AHA.W tmmymimm |

D t k v r K *»

f t l M h t l

*o

Le Martinisme, de Jules Boucher -1949

1o

puisqu'il Pavait totalement denature !

Le mouvement de Jean Bricaud resta

d'abord essentiellement lyonnais, mais il

connut par la suite une certaine extension

grace a la revue les Annates initiatiques. 

Jean Bricaud chercha alors des appuis au-

pres de quelques Ordres ayant jadis par-

ticipe au Congres Spirit ualiste de 1908. II

se liera a des personnalites parfois dou-

teuses comme Theodor Reuss (O.T.O .) ouMcBlain Thomson (American Masonic  

Federation in America). Apres la mort de

son fondateur, en 1934, le Martinisme

lyonnais passera sous la direction de

Constant Chevillon. Nous reviendrons

sur sa succession un peu plus loin.

L e T e m p l e   d ' E ssenie

Avec la Premiere Guerre mondiale, de

nombreux Martinistes qui avaient cree

des loges dans des pays etrangers etaient

rentres en France. C’etait notamment le

cas d’Eugene Dupre (1944) et de Deme

trius Platon Semelas (1883-1924), qui

avaient fonde le Temple d'Essenie   auCaire. en 1911. Cette loge martiniste

avait obtenu une certaine independance,

et Papus lui avait accorde le droit de creer

des loges sous sa responsabilite. A Paris,

Semelas etait entre en contact direct avec

Papus, et une relation de confiance s'etait

etablie entre les deux hommes. Etant

donne que VOrdre Kabhalistique de la  

Rose-Croix , qui constituait autrefois le

cercle interieur de I'Ordre Martiniste.

etait entre en sommeil. ils envisagerent

de le remplacer par celui de la Rose-  

Croix d'Orient, dont Semelas etait le re-

presentant. Papus avait egalement charge

Semelas d'etablir un accord entre I’Ordre

Martiniste et le Rite Ec ossa is Rectifie. En

septembre 1916, il servit d’emissaire

entre Papus et Edouard de Ribaucourl

(1865-1936), dans un projet ayant pour

but de creer une loge susceptible d’ac-

cueillir les membres des deux Ordres. La

mort de Papus. dans les jours qui suivi-

rent ces contacts, empecha Paboutisse-

ment de ce projet.

L es  A m is   de

C l a u d e   d e  S a i n t - M artin

Apres la guerre, D. P. Semelas continua

ses activites martinistes en compagnie de

son adjoint Eugene Dupre. 11 fonda le

Groupe Independant d'Eludes Martinistes  

et s'associa bientot avec Victor Blanchard

(1877-1953). Ce dernier, chef de service

des archives a la Chambre des deputes,

etait alors I'unes des personnalites les plus

importantes du Martinisme parisien. A

1'epoque de Papus, il dirigeait la loge Mel-  

chissedec. qui avait etc elevee en septem

bre 1911 au statut de Grande Loge de

POrdre Martiniste. Aux cotes de Papus,

Victor Blanchard avail joue un role fonda-

mental dans Porganisation du Congres  

Spirit uuliste  de 1908. Apres la Premiere

Guerre mondiale. une partie des Martinistes parisiens reconnaissaient en lui le

nouveau Grand Maitre de I’Ordre.

Enjanvier 1919. un traite d’alliance entre

le Groupe Independant d'Etudes Marti 

nistes  de Semelas et celui de Victor Blan

chard fut scelle. L'instabilite de Victor

Blanchard conduisit assez rapidemcnt D.

P. Semelas et Eugene Dupre a s'orienter

vers d'autres projets. En mai 1920. ils

fonderent Passociation Les Amis de  

Claude de Saint-Martin, egalement de-

nommee Ordre Martiniste,  en s’adjoi-

gnant des anciens amis de Papus :* 

Augustin Chaboseau. Victor-Emile M i

chelet. Lucien Chamuel et Octave Be-

liard. Cette association donna naissance

au groupe Athanor , dirige par Victor* 

Emile Michelet. Quelques annees plus

tard. en 1931, il fut a Porigine de P emer

gence de I'Ordre Martiniste Traditionnel.

Lettre de V ictor Blanchard a Harvey  Spence r Lewis, dat£e du 30 juille t 1937 Platon Demetrius S6m6las

T E M P L E

A R C A N LDr It confusion at  I Mohhc *v*c D ieu

 Ar cane du Tab leau N atu re l -  

dessin de M arcel Dupre

u  Ofrtmi

ORME MAKnmvrl*   SflCAftQItQK 

o o n t w

M M U 

16 ACTUALITE DE L'HISTOIRE • HORS SERIE n°38

Page 17: Le Martinisme Dévoilé...

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LE M A R T I N I S M E

L 'O r d r e   M a r t i n i s te

ET SYNARCHIQUEEn prenant son independance, Victor

Blanchard donna unc note particuliere a

son groupe en le baptisant, a partir de no-

vembre 1920 : V Union Gene rale des  

Martinistes et des Synarehistes, ou Ordre  

Martiniste Synarchique   (O.M.S .). S' il

ajoute au nom de l’Ordre le qualificatif

de « synarchique ». c’est par deference a

Saint-Yves d’Alveydre, qui fut le maitre

intellectuel de Papus. Tout comme Jean

Bricaud Victor Blanchard revendiquait la

succession de Papus. L’un et 1’autre se li-

vrerent a une « guerre » de communiques

en se presentunt chacun comme etant le

seul legitime. Ainsi, dans le numero de

fevrier du Voile d'Isis   (1921), Victor

Blanchard passe une annonce dans la-

quelle il rappelle que « YOrdre Marti 

niste ancien et prim itif,  denomme

lesalement Ordre Martiniste et Synar -

chiqite , a repris officiellement ses travaux

le 3 janvier 1921, et que sa premieretenue a ete consacree a 1'inauguration so-

lennelle et rituelique du Supreme college

de synthese initiatique d*Occident ». II

precise que lors de cette reunion, il a

donne lecture des chartes delivrees par

Papus et Teder a lui-meme, et qu'en

consequence les Martinistes doivent se

rallier a lui avant le lcr mai. Passe ce

delai, il estime que toute autre formation

martiniste sera declaree illegitime. Beau

coup de Martinistes, etonnes par cette si

tuation. prefererent rester independants.

Ainsi en fut-il de membres aussi illustres

qu'Augustin Chaboseau et de plusieurs

survivants du Supreme Conseil de 1891.comme Victor-Emile Michelet.

Sous la direction de Victor Blanchard.

l'Ordre Martiniste et Synarchique aura

d'abord une activite ties reduite. Ce n'est

qu'a la suite de la creation de la Federa 

tion Universelle des Ordres et des Socie-  

tes Initiatiques  (EU.D.O.S.I.),  en 1934,

que 1'Ordre prendra de 1'extension. Mais

peu de temps apres sa creation, soit des

la fin des annees 1920. Victor Blanchard

delaissa ses responsabilites pour prendre

part aux activitcs des Folaires , un Ordre

fonde par Zam Bhotiva (Cesare Acco-

mani). Ce dernier, grace a la methode de

« 1'oracle de force astrale », pretendait

etre en relation avec un centre esoterique

rosicrucien de 1'Himalaya. Rene Guenon

s’interessa pendant un temps aux Po-

laires : c’est lui qui relut et corrigea le

manuscrit de YAsia mysteriosa,  mani-

feste public par Zam Bhotiva en 1930.

L 'O r d r e   M a r t i n i s te  T r a d i t i o n n e l

En 1931. alors que le Martinisme reste

divise, les membres du groupe Athanor  

se decident a sortir de 1'ombre. L'un

d'eux, Jean Chaboseau, suggere a son

pere. Augustin, de reprendre la situation

en main en retablissant l’Ordre Marti

niste sur ses bases initiates. N'oublions

pas qu'Augustin Chaboseau avait etc

avec Papus le cofondateur de l’Ordre

conferences au Palais de la Mutualite.

Pendant cette periode, I'O.M.T. est

proche de la revue Atlantis,  et Victor-

Emile Michel et Octave Beliard president

le Banquet Flatonicien   donne par la

revue en 1931 et 1932.

*o

Pantacle martiniste d e I'O.M.T.

Martiniste. II reunit autour de lui les der-

niers survivants du Supreme Conseil de

1891 : Victor-Emile Michelet et Lucien

Chamuel. Rappelons egalement que Vic-

tor-Emile Michelet avait etc un membre

important de l’Universite Hermetique et

le dirigeant de la loge Velleda. Quant a

Lucien Chamuel, il avait etc 1'organisa-teur materiel de l'Ordre, et c'est dans

l'arriere-boutique de sa librairie que

s’etaient tenues ses premieres activitcs.

Reunis autour d'Augustin Chaboseau.

ces derniers decident, le 24 jui llet 1931,

de reveiller le Martinisme sous son as

pect authentique et traditionnel. Pour le

distinsuer des nombreuses organisations

pseudo-martinistes existant alors. ils

ajoutcnt au nom de l'Ordre le qualificatif

de « Traditionnel ». Par cet ajout. et

comme I'indiqua Robert Ambelain, les

survivants du Supreme Conseil de 1891

revendiquent « la perennite de l'Ordre

fonde par eux avec Papus » {Le Marti 

nisme,  1946). L'Ordre Martiniste Tradi

tionnel (O.M.T.) n'est done pas un nouvel

Ordre, mais la remise en activite de celui

fonde par Papus et Chaboseau.

V i c to r -E m i l e   M ichelet

On procede a l'election du Grand Maitre.

Comme le veut la Tradition, c’est le

membre le plus ancien. Augustin Chabo

seau. qui est choisi pour assurer cette

fonction. Celui-ci ne fera guere usage de

ce titre, car des avril 1932, il prefere

transmettre cette charge a Victor-Emile

Michelet (1861-1938). Ecrivain remar-

quable. passionne d'esoterisme et de l i

terature, ce dernier est I'auteur de

poemes. de contes, de pieces de theatre

et de textes sur l'esoterisme. Ami avec les

plus grands ecrivains de son epoque, il

exerce d'importantes responsabilites

dans le monde des lettres. II est President

de la Societe de Foesie  (1910) et de la So 

ciete Beaudelaire   (1921), puis membre

du Conseil de la Maison de la Foesie  

(1931), et enfin batonnier de YAcademie  

des Foetes  (1932).

Sous sa direction, l'Ordre reste relative-

ment discret. II tient ses reunions au siege

du Grand Prieurc des Gaules du docteur

Camille Savoire. II se manifeste quelque-

fois a travers le groupe Tan,  qui public

alors un bulletin d'etudes psychologiques

et metapsychiques. et qui organise des

P hil ippe   E n c a us s e

Philippe Encausse (1906-1984), le pro-

pre fils de Papus, rejoint bientot VOrdre  Martiniste Traditionnel  et devient mem

bre de son Supreme Conseil. II s’en re

tire en fevrier 1932, pretextant qu'il

n'admet pas la presence de Francs-Ma-

gons dans l'Ordre. II fonde Les Amis de  

Papus, une association charitable, et ecrit

un livre a la memoire de son pere : Papus, 

sa vie , son oeuvre  (ed. Pythagore, 1932).

Chose surprenante. le passe martiniste de

Papus est a peine evoque dans cet ou-

vrage. Jean Reyor s’en etonnera : « II

semble qu'on ait systematiquement laisse

de cote tout ce qui eut pu etre vraiment

interessant dans la Ciirriere si active de cet

etonnant Papus... Pas un mot sur la

constitution et sur la vie de cet Ordre

Martiniste dont Papus etait Panima-

teur...». (Le Voile d'Is is, decembre 1932.)

M art in i sm e e t F.U.D.O.S.I.Pendant ce temps, loin de la vie pari-

sienne, Jean Bricaud etend ses activitcs

tout en propageant le rite de Memphis-

Misraim en Europe. Cependant. son au

torite ne fait pas l'unanimite. notamment

en Belgique. Ces problemes sont a l'ori-

gine d'une scission de la part des Marti

nistes belses. Profitant de la mort de Jean

Bricaud au debut de 1934, ils annoncentdans la revue Adonhiram, organe officiel

Victor-Emile Michelet, Grand Ma itre de I'O.M.T. de 1931 d 1938

FEVRIER-MARS 2010 17

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Symb ole de la F.U.D.O.S.I. (Federation Uni- verselle des Ordres et Soci6t6s Initiatiques)

de Y Ordre Oriental du Rite Anden et Pri 

mitif de Meniphis-Mismim  beige, la crea

tion de deux loges martinistes

independantes : Uriel  a Bruxelles et 77-

 phereth  a Strasbourg (revue Adonhirum, 

printemps 1934). Pour sortir de leur iso-

lement, les occultistes beiges tentent de

s’allier avec d’autres mouvements initia

tiques. Ils se tournent alors vers Victor

Blanchard qui dirige a la fois les activi

tes de TOrdre Martiniste et celle de

Memphis-Misrai'm. Cette demarche, ini-

tiee par les spiritualistes beiges, est a

Forigine de la creation de la Federation  

Universelle Des Ordres et Societes In i 

tiatiques   (F.U.D.O.S.I). Cette organisa

tion. qui veut federer les mouvements

initiatiques, tient son premier Convent aBruxelles, en aout 1934. Cette situation

offre a Victor Blanchard une opportunity

unique pour reconstituer 1*unite du Mar

tinisme. Pourtant, beaucoup de Marti

nistes sont absents, notamment ceux de

I’Ordre Martiniste Traditionnel, qui n’a

pas souhaite participer a cette manifesta

tion. Profitant de cette absence, Victor

Blanchard se fait reconnaitre comme

Souverain Grand Maitre par les Marti

nistes presents. Georges Lagreze (1883-

1946), qui a lui aussi deiaisse le groupe

de Jean Bricaud — dont Constant Che-

villon (1880-1944) est devenu le diri-

geant — . devient son Substitut. C ’est lors

de 1’une des premieres reunions de la

F.U.D.O.S.I. que Victor Blanchard auto

rise Harvey Spencer Lewis (1883-1939),

Imperator de YAncien et Mystique Ordre  

de la Rose-Croix , a creer des loses de7  c

TOrdre Martiniste Synarchique aux

Etats-Unis.

Helas, Victor Blanchard ne se montre pas

a la hauteur de sa mission, et les activites

de I'Ordre Martiniste Synarchique se li-

mitent le plus souvent a la transmission

des initiations aux divers desres. L’Ordre

n’a pas d’existence reelle, car Victor

Blanchard n’a pas cree de loge martinistea Paris. II se consacre davantage a la Fra-  

ternite des Polaires  qu’il dirige depuis

1933. C'est dans le temple de cette orga

nisation. situe a son domicile, au 26 de la

rue Junot, a Paris, qu’il confere ses ini

tiations. Beaucoup de Martinistes ne

comprennent pas cette attitude, et

Georges Lagreze, le Substitut de Victor

Blanchard, menace de faire secession. Fi-

nalcment, en 1939. il prend la tete d’ une

delegation qui va rencontrer le Grand

Maitre de I’Ordre Martiniste Tradition

nel.

Depuis la mort de Victor-Emile Michelet, decede le 12 janvier 1938, c’est Au

gustin Chaboseau qui dirige I’O.M.T. Ce

dernier accepte de prendre en main les

destinees du Martinisme au sein de la

F.U.D.O.S.I. Des le mois de juillet 1939,

il donne de nouvelles chartes aux loges

qui passent sous sa direction. L’O.M.T.

sort alors de la confidentialite pour pren

dre une dimension internationale. II se

developpe notamment aux Etats-Unis,

grace a Ralph Maxwell Lewis (1904-

1987), nouvel Imperator de l ’A.M.O.R.C.

Celui-ci re^oit d’Augustin Chaboseau

une charte de Grand Maitre Regional / C

pour les Etats-Unis d’Amerique. et devient membre du Supreme Conseil Inter

national de I’Ordre.

La guerre de 1939-1945La Seconde Guerre mondiale va com-

promettre le developpement du Marti

nisme. Elle aura en effet de lourdes

consequences, car nombre de ses mem-

bres vont perdre la vie sur les champs de

bataille ou dans les camps de concentra

tion. En France, des le 14 aout 1940, le

Journal Officiel  public un decret du gou-

vernement de Vichy interdisant toutes les

societes secretes. La piupart de leurs res-

ponsables sont alors arretes, et I’Ordre

Martiniste Traditionnel entre officielle-

ment en sommeil. Pendant cette periode,

Ausustin Chaboseau et Victor Blanchard

subisscnt perquisitions et interrogatoires.

Georges Lagreze est lui-meme oblige de

se cacheren Normandie, puis a Angers. II

reussit cependant a resteren relation avec

Ralph M. Lewis par I’intermediaire de

Jeanne Guesdon (1884-1955), Grand Se

cretaire de la juridiction francophone de

I’A.M .O.R.C. Cette derniere assure esa-

lement les fonctions de Grand Secretaire

de I’O.M.T. en remplacement de Jean

Chaboseau, qui est mobilise.

La  resurgence  des Elus-Cohen

Malgre cette situation, deux loges. Atha-  

nor  et Broceliande,  restent secrete me nt

actives et conferent quelques initiations.

C ’est ainsi qu’en 1942. Robert Ambclain

(1907-1997) est re^u dans YO.M.T. 

D’abord au premier degre, par Georges

Lagreze assiste d‘Henry Meslin et de

Jean Chaboseau, puis aux grades suivants

par Henry Meslin. Georges Lagreze

prend par la suite quelques libertes. Avec

1'aide de Robert Ambelain, il tente en

septembre 1942 de restaurer I’Ordre des

Elus-Cohen. Or, aucun d’eux n ’a etc initio dans cet Ordre, etant donne qu’il est

en sommeil depuis la fin du xvnr siecle.

Jean Chaboseau denonce cette imposture

et reproche a Georges Lagreze d’avoir

*o

Constant Chevillon

confere a Robert Ambelain des hauts

grades (du 4Cau 33c et les 55c, 66L\90° et

95c de Memphis-Misrai'm), alors que ce

dernier s’etait montre incapable de prou-

ver qu’il etait titulaire du grade de Mai

tre. Jean Chaboseau jugeait la chose

d’autant plus grave que Robert Ambelain

profita de l’occasion pour transformer

des « profanes en Maitres Ecossais d’un

coup de maillet ». II explique en detail

cette aventure dans une lettre adressee a

Jean-Henri Probst-Biraben, le 21 janvier

1947. II portera l’affaire devant les auto-

rites ma^onniques : Camille Savoire et

Dumesnil de Grammont. Ces problemes

seront a I’origine d’un conflit entre Jean

Chaboseau et Robert Ambelain.

L'apres-guerre

A la fin de la guerre, en juin 1945. Au

gustin Chaboseau organise une reunion

dans le but d’ceuvrer a la reprise des ac

tivites de Y Ordre Martiniste Traditionnel. 

Une partie des membres s’ interroge sur

l interet de reprendre des activites sous

une forme obedientielle et rituelle. Apres

quelques hesitations, Augustin Chabo

seau decide de reveiller I’Ordre. Ceux qui

ne souhaitaient pas s*y associer se grou-

pent autour d’Octave Beliard, Robert

Amadou, Paul Laugenie et Edouard

Gesta, pour fonder Les Amis de Saint-  Martin, une association ayant pour voca

tion d’etudier les oeuvres du Philosophe

inconnu. Le Martinisme reprend done ses

activites en France et a I’etranger. Helas,

quelques mois plus tard, le 2 janvier

1946, la mort d ’ Augustin Chaboseau en-

traine des complications. Le Supreme

Conseil procede a I’election de son suc-

cesseur. et c’est son fils. Jean Chaboseau.

qui est designe pour occuper la fonction

de Grand Maitre. Jules Boucher. Grand

Secretaire de I’Ordre, conteste cette elec

tion, estimant que ce dernier est trop

jeune et ne possede pas un temperament

apte a remplir cette tache. N ’obtenant pas

sain de cause, il decide de se retirer.7

Octave Beliard, qui a pourtant beaucoup

d’affection pour Jean Chaboseau. pense

18 ACTUALITE DE L'HISTOIRE • HORS SERIE n°38

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LE M A R T I N I S M E

egalement quo son temperament d'artiste

n'est guere adupte a cette fonction. L’ave-

nir montrera qu'il avait raison, car mal-

gre sa bonne volonte, Jean accumule les

echecs. En Belgique, Jean Mallinger, l’un

des membres les plus en vue de la

F.U.D.O.S.I., le soupgonne de vouloir de

stabiliser la Federation en etablissant des

relations privilegiees avec les dirigeants

de la Societe Theosophique. Finalement,les Martinistes beiges refusent de recon-

naitre le nouveau Grand Maitre. Apres

avoir hesite a faire appel a Victor Blan

chard, ils font une nouvelle fois secession

en creant une obedience independante :

Y Ordre Martiniste UniverseI   (O.M.U.)

dont Rene Rosart prend la direction. Aux* 

Etats-Unis, Ralph M. Lewis, Imperator

de l’A.M.O.R.C., ne les approuve pas.

Comme Jeanne Guesdon. il reste fidele a

ses engagements envers Jean Chaboseau.

En definitive l’Ordre Martiniste Univer-

sel restera quasi inactif, et apres la mort

de Rene Rosart en 1948, son successeur.

le docteur Edouard Bertholet (1883-

1965). le laissera s'eteindre. (Precisons

que contrairement a ce qu’affirmait

Louis Bentin, ce dernier ne succeda pas a

Victor Blanchard a la tele de l’Ordre

Martiniste Synarchique.)

U n e  p e r i o d e  de  c o n f us i o n

Jean Chaboseau senl que l'Ordre lui

echappe, et la publication d ’un article

d’Octave Beliard, dans lequel ce dernier

exprime ses doutes sur la regularite de la

filiation regue par les fondateurs de 1*Or

dre Martiniste, contribue encore plus a le

destabiliser (Colliers de I'Homme-Esprit. decembre 1946). Jean Chaboseau est

d’autant plus aflecte qu'il suit que Robert

Ambelain prepare un ouvrage ou il uti

lise cct argument pour pretendre que seul

l ’Ordre des Elus-Cohen. renove en 1942,

propose une voie authentique (Le Marti 

nisme contemporain et ses veritables ori-  

gines , mars 1948). Devant tant de

critiques et d'impostures, et se sentant at-

taque de toutes parts, il prefere mettre

1’Ordre en sommeil en septembre 1947.

Cependant. cette position est contestee

par nombre de Martinistes qui ne com-

prennent pas que cette question n'ait pas

etc soumise au Supreme Conseil, seule

autorite habilitee a prendre une telle de

cision. Victor Blanchard lui-meme incite

les Martinistes a ne pas accepter la mise

en sommeil dcmandee par Jean Chabo

seau. et c ’est pour cette raison que

I'O.M.T. restera actif aux Etats-Unis.

L 'O r d r e   M a r t i n i s te   R ectif ie

Jules Boucher (1902-1955) reste egalc-

ment convaincu de la legitimite de I'Or

dre fonde par Papus et Chaboseau.

Cependant, il estime necessaire de reve-

nir a un Martinisme plus sobre, ne com-

portant qu'un seul grade, comme ce fut

Symbole de l'Ordre Ma rtiniste Rectify 

le cas pendant la periode qui preceda la

creation de l’Ordre. C ’est pour cette rai

son qu’il cree en 1948 YOrdre Martiniste  

Rectifie . un mouvement qu’il veut cen-

trer essentiellement autour de la pensee

de Louis-Claude de Saint-Martin. II s’en

expliquera dans un article intitule Du  

Martinisme et des Ordres martinistes (Le  

Symbolisme , sept. 1950). Mais a la fin de

l’ annee 1951. il est victime d’ une crise

cardiaque qui le prive de l’energie neces

saire a la realisation de son projet. II de-

cedera d’ailleurs quelques annees plus

tard. en 1955.

L 'O r d r e   M a r t i n i s te  

d e   P h i l i p p e   E n c a u s s e

Deux ans apres le retrait de Jean Chabo

seau. Philippe Encausse publie Sciences  

occultes, on 25 annees d 'occult isme  

(1949). Bien qu’ il reproduise dans cet ou

vrage la lettre de demission de Jean Cha

boseau, il ne semble pas partager

totalement son avis el invite les disciples

de Papus et d* Augustin Chaboseau a re-

faire une « chaine d'union  ». Robert Am

belain repond a cet appel et propose de

relancer le Martinisme en France. Ce sera

chose faite en 1952. Cette opportunity

permettra a Robert Ambelain de benefi-

cier de l’appui du fils de Papus, pourdonner plus d’envergure a son Ordre des

Elus-Cohen. qui ne rencontre guere de

succes. Philippe Encausse devient le

Grand-MaTtre d'un Ordre Martiniste qui

servira de vivier a Robert Ambela in pour

donner de 1‘extension a son propre mou

vement, qui devient rapidement son cer

cle interieur.

Loin du microcosme parisien, le Marti

nisme lyonnais poursuivait son chemin.

En 1934. Constant Chevillon (1880-

1944) avait succede a Jean Bricaud pour

une courte duree, car il fut assassine le 22

mars 1944 par la Milice. A la suite de cetevenement, le groupe avait connu plu

sieurs successeurs. D'abord Henry-

Charles Dupont (1877-1960), qui

demissionna fin 1945 et qui fut remplace

piu- Pierre Debeauvais (1885-1974). Mais

quelque temps plus tard, Henry-Charles

Dupont voulut reprendre son titre. et les

membres de l’Ordre finirent par se ran

ger de son cote. Dans les annees qui sui-

virent la guerre, le Martinisme lyonnais

n’eut plus 1'activite qu'il avait connue au

trefois. Du reste, son Grand Maitre vivait

alors a Coutances, en Normandie.

L 'U nion   d es   O r d r e s   M a r t i n i s te s

En octobrc 1958, Robert Ambelain et

Philippe Encausse prennent contact avec

Henry-Charles Dupont pour l’ inviter a se

joindre a eux en adherant a Y Union des  

Ordres Martinistes,  un groupe qu'ils

viennent de fonder pour rassembler les

divers courants martinistes. Henry-

Charles Dupont accepte cette proposition

qui rassemble Y  Ordre Martiniste  de Phi

lippe Encausse et I 'Ordre Martiniste des  

Elus-Cohen   de Robert Ambelain. Pour

marquer sa difference et mettre en evi-

dence la note Elus-Cohen que Bricaud

avait donnee a son groupe. il prend alors

*o

Certificat d'initiation de Christian Bernard ,d la fonction de Souverain Grand Maitre de

I'O.M.T. Ju le s B ou cher 

1 0  L   * <J   o CD 0

S  0 L-V   .<?0 il l T h i

Certificate of Jtt e Initiator 

11 C > i u f (Jrsi 'iJ np irnrta/VTsi t*j•/ tmnr ulMMtaH

i 1*9 Niim*#* 1 S »v

tM fnftfer Xi'Jp* M tH w It (Unu v A m m u   twi Iamfyt  a*  j  iwvmt ** 

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FEVRIER-MARS 2010 19

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8/18/2019 Le Martinisme Dévoilé...

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DOSSIER

Ic nom d'Ordre Martiniste-Martineziste. 

Henry-Charles Dupont est alors age de

81 ans. Aussi, les responsables de

rUnion lui conseillent-ils de confier sa

succession a Philippe Encausse. Ce sera

chose faite le 13 aout 1960. soil deux

mois avant sa mort. LOrdre de Lyon se

trouvera alors absorbe par celui dirige par

Philippe Encausse.

Quant a I'Ordre Martiniste Traditionnel. ilpoursuivait ses activites aux Etats-Unis

sous la direction de Ralph M. Lewis. En

juin 1959, Ivan Mosca. Souverain Grand

Delegue general de V Ordre Martiniste des  

Elus-Cohen , fut mandate pour 1'inviter a

se placer sous V autorite de 1‘Union des

Ordres Martinistes. Ralph M. Lewis pre

fera rester a l'ecart. En effet, par la cor-

respondance qu’il avait echangee avec

Jean-Chaboseau. il connaissait parfaite-

ment les graves accusations pesant sur Ro

bert Ambelain. On comprendra qu'il

prefera ne pas s’allier avec ce groupe. De

toute maniere, I'Union des Ordres Marti

nistes n'aura bientot plus de raison d’exis-

ter. car les groupes de Philippe Encausse

et de Robert Ambelain se fonderent en un

seul Ordre. le premier conslituant le cer-

cle exterieur et le second le cercle inte-

rieur. Ce mariage se termina neanmoins

par un divorce. En 1967, Robert Ambe

lain, qui avait d'autres projets, demis-

sionna au profit d’lvan Mosca

(1915-2005), qui redonna a YOrdre des  

Elus-Cohen   son independance. Cepen-

dant. inquiet de la legitimite de la resur

gence de I’Ordre pendant la guerre

1919-1945. Ivan Mosca prefera le mettre

en sommeil des l'annee suivante (22 avril1968).

L 'O r d r e   M a r t i n i s te   In i t i a t i q ue

A 1'epoque oil les etudiants parisiens se

revoltent, en juin 1968, soit un an apres

sa demission, Robert Ambelain jette un

« pave dans la mare » en lancant la crea

tion d'un nouveau mouvement : YOrdre  

Martiniste Initiatique.  II expedie alors a

toutes les obediences martinistes un do

cument de sept pages intitule : Ordre  

Martiniste Initiatique  - Origine, Principe  

et Modalite de la  “rectification  ”de 1968. 

Ce lexte denonce comme sans valeur

toutes les organisations martinistes.

celles auxquelles il a apparlenu et les au-

tres, car il estime qu’elles ne possedent

pas de filiation initiatique reelle. Robert

Ambelain precise neanmoins qu’il a de-

couvert que Louis-Claude de Saint-Mar

tin avait fonde un « Ordre secret » entre

1778 et 1782, le Regime Rectifie, que le

prince Galitzine aurait developpe en Rus-

sie. Le Regime Rectifie  de Saint-Martin

aurait survecu a travers quelques initiesqui auraient confere cette filiation a Ro

bert Ambelain. Celui-ci se proposait done

de « regulariser » tous les Martinistes

issus de I’Ordre fonde jadis par Papus et

Chaboseau.

En fait, la filiation russe revendiquee par

Robert Ambelain releve du romantisme,

pour ne pas dire de la pure fiction. Ro

bert Amadou lui-meme la considere

comme inexistante, car Saint-Martin n'a

jamais fonde un tel mouvement. D'ail

leurs, aucun document ne permet de don-

ner un poids quelconque aux affirmations

de Robert Ambelain. Ce dernier finira

par se retirer de cet Ordre. pour se lancer

dans d'autres aventures... Destabilise.

I'Ordre Martiniste de Philippe Encausse

n'en continua pas moins d'exister. De

puis 1979, c'est Emil io Loren/.o qui en

assure la direction. Ce groupe publie la

revue YInitiation.

L 'O r d r e   M a r t i n i s te  

T r a d i t i o n n e l

Pendant ce temps. I’Ordre Martiniste Tra

ditionnel continuait ses activites aux Etats-

Unis. car Ralph M. Lewis avait conserve

son titre de Grand Maitre Regional. Apres

etre reste relativement confidentiel. cetOrdre se developpa dans plusieurs pays,

grace au parrainage de YAncien et Mys 

tique Ordre de la Rose-Croix  (surce mou

vement, voir le hors serie n° 36 de

Actualite de I'Histoire , sept.-oct. 2009).

Sous la supervision de Ralph M. Lewis,

devenu le Souverain Grand Maitre de

I’O.M.T.. il se reimplanta en France au

debut des annees 1960. 11y connut rapi-

dement une grande activite en ouvrant des

heptades   (nom designant les loges de

I’O.M.T.) dans de nombreuses villes. Pa-

rallelement, il s’etendit dans le monde en-

tier pour devenir I’un des mouvements

martinistes les plus importants. En France,

A 1 L -U !> m C T GO A v L C U O

s L A 0<ki IT N . V M>:

4*nMl

IU-J —Ca

N w 4* r«>

ORDRE MARTINISTE TRADITIONNEL

*Ccrnfu«it 'Initiation

lWatcut>o<,»»iirf.5au»0*0JP 3K*rtAyd

luHtihnc rtjDl^ frrtcri cl u*Jit*>niwllnr>fm ili^Urr

irocr conftxt. ca rota pot/tim il $ 6U   tnvctii cl

*ckm U  p)j% Alkie  rtxuianit irutittiQiK. I mi:uturn Ju  

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-MWrc OfUiII irnriu   r«Kn k*   o ffki cn ct Iw ircxnhrc* Of H9W Otdt*

trafnMc * nxoctr cct ir.iut  ci»n:mc ua mrm^rt Jr l*Oi4r?

Mutin xur Tn<imew>:l Cet rotd? dcm ccpcmijnl prowvet

irutiiitKin ct ton rirp c par Ici habttucb tic rrwon atv

aiK c cl/u it;ficy wn atfiiut. u awtivc p«t k% dovirrcnun suiu*.

& S 3 B / f f l C T E lMOKATVH DC I TM lit nK 

PUI 1*IVIATC.t*

U K t i ) H . i i i i t i s \ u i s u u t 4 i n * 9ik sut-vfmjj  \  cram; uitm i

 jz l  J L SSECertificat d'initiation de Serge Toussaint, 

Grand Maitre de la juridiction francophonede I'O.M.T 

il possede une publication annuelle, la

revue Pantacle, ties appreciee des Marti

nistes et des Francs-Ma^ons. Actuelle-

ment. c'est Christian Bernard qui est le

Souverain Grand Maitre de I'Ordre Mar

tiniste Traditionnel, et c'est Serge Tous

saint qui en est le Grand Maitre pour la

juridiction francophone.

Pour conclure ce panorama des obe

diences modernes du Martinisme, on

peut dire que malgre les differends qui

opposerent autrefois les tenants du Mar

tinisme. cette Tradition, cousine de la

Franc-Magonnerie et de la Rose-Croix.

reste aujourd'hui ties vivante. Deux sie-

cles apres la mort de Louis-Claude de

Saint-Martin et un siecle apres sa renovation par Papus et Augustin Chaboseau.

elle est representee par deux mouvements

majeurs : I'Ordre Martiniste Traditionnel.

et I'Ordre Martiniste. Elle a egalement

donne naissance a un nombre important

de rameaux dont il serait fastidieux de

faire l’inventaire. Si la plupart d'entre-

eux n’ont eu qu’une existence ephemere,

ou ne constituent le plus souvent que des

groupes marginaux, ils temoignent nean

moins de l'interet que le Martinisme ren

contre aupres de ceux qui s’ interessent a

la Tradition occidentale et a I’esoterisme.

Christian Rehiss e 

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20 ACTUALITE DE L'HISTOIRE • HORS SERIE n°38

Page 21: Le Martinisme Dévoilé...

8/18/2019 Le Martinisme Dévoilé...

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LE M A R T I N I S M E

Louis-Claude de Saint-Martin, sa vie, son oeuvre

Le Martinisme, tel que le suivent de nos jours les Martinistes, se rattache a la vie et a I'ceuvre de Louis-Claude de Saint-Martin (1743-1903), connu egalement sous le pseudonyme de « Philosophe Inconnu ». Nous ne pouvons done faire Timpasse sur une biographie de 

ce personnage hors du commun, considere comme I'un des plus grands esprits franca isdu  X I /III*™ siecle.

« II y a trois vilies en France dont l'une

est mon paradis, et c'est Strasbourg... ».

C ’est en ces termes que Louis-Claude de

Saint-Martin parlera plus tard dans son «

Portrait » de cette ville de France oil il

vecut trois ans. On etait alors en pleine

periode revolutionnaire, et ce furent

pourtant trois annees d'un itineraire inte-

rieur oil une alchimie subtile s’opera en

lui. C'est la aussi qu'il tourna une page

de sa vie en decouvrant en leur langue

originelle les ecrits du mystique allemand

Jacob Boehme.

L e  P h i l o s o p h e   In c o n n u

Celui qu'on appela le « Philosophe In-  

connu »  est age de 45 ans quand il arrive

a Strasbourg, ce 6 juin 1788. A la veille

de la Revolution, cette vieille cite d'A l

sace est consideree comme la ville fran-

<^aise la plus tolerante et la plus

accucillante, oil se donnent rendez-vousles theosophes et les mystiques de tous

les pays d'Europe pour s’entretenir libre-

ment. Ce XVIII0 siecle est celui des Lu-

mieres. oil la montee de V  esprit

scientifique, de I'intelligence philoso-

phique et du liberalisme religieux, illus-

tres par la renommee de Voltaire. Diderot

ou Rousseau, contraste avec une grande

credulite confinant au merveilleux et

bien sou vent au charlatan isme. Avant que

l'epoque de laTerreur ne vienne tout in-

terdire, on voit apparaitre dans la ville,

des mages, des dev ins. des thaumaturges

et des occultistes de toute sorte. Stras

bourg est aussi une grande capitale ma-^•onnique puisque, comme Lyon et

Bordeaux, elle est le siege d'un des trois

Directoires ecossais.

Quelques annees auparavant, Cagliostro a

sejourne a Strasbourg et opcre des gueri-

sons miraculeuses en excitant son art.

Cette ville est la capitale du Mesmerisme ;

depuis la plus haute societe jusqu'au petit

peuple. on y pratique le magnetisme

prcsquc a chaque coin de rue. Le grand

elan romantique du « Sturm und Drang »  

a effleure cette cite de son souffle en la

personne de Goethe, qui, quelque vingt

ans aupaiavant, a sejourne a 1’Auberge de

I’Esprit avant de s’installer rue du vieux

Marche aux Poissons. II y avait pris un

vif interet pour l'alchimie et y avait goute

aux disciplines hermetiques sous les

voutes basses, ornees de salamandres, de

la pharmacie du Cerf. Est-ce aussi,

comme Goethe, la fleche de la cathe-

drale, cet « ange de gres rose ». qui attiraSaint-Martin, telle une aiguille aimantee

fixant la direction de son etoile ? C'est

en tout cas sous le signe de la Divine Pro

vidence qu'il place son voyage en Alsace,

comme il le dit dans son « Portrait »   :

« Dieu nous livre quelquefois dans notre  

demarche terrestre a nos simples mouve 

ments vagues et indetermines, dans les-  quels nous devons eprouver ou des  

contra rietes ou des privations, el cela  

a/in que nous axons I 'occasion d e.xercer  

notre patience et notre courage qui pour- 

Saint-Martin - dessin de Simonetta Saenger (O.M.T.)

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LE M A R T I N I S M E

Q u e l q u e s   p e n s e e s   d e   s a i n t- m a r t i n

« L'homme est un etre charge de continuer Dieu la ou Dieu ne Se fait plus connaitre Lui-meme ». (Le Ministere de I'Homme-Esprit).« C'est pou r que I'homme porte sa tete dans les Cieux, qu'il ne trouve pas ici-bas de quoi reposer sa tete ». («Mon Livre Vert», n° 40).« La science est pour le tempore l; I'amour est pour le divin. On peut se passe r de la 

science, mais non de I'amour, et c'es t par I'amour que tout finira, parce que c'est par  I'amour que tout a commence et que tout existe ». («Mon Livre Vert», n° 415).« Les grandes choses ne s'enseignent que dans le silence. Nous ne pouvons nous lire que dans Dieu Lui-meme et nous comprendre que dans Sa propre splendeur... ». (« Ecce Homo »).« C'est un grand travail que de chercher a nous connaitre tels que nous som me s; mais ilfau t ensuite travailler a nous connaitre tels que nous devrions etre. Ces deux  sciences sont liees e t doivent continuellement nous occuper. Une troisieme science vient apres ces deux, et est sans doute la plus difficile de toutes. C'est qu'apres avoir  appris a connaitre ce que nous devrions etre, ilfa ut travailler sans relache a le de- venir  ». («Mon Livre Vert», n° 993).« Crains les choses foc ile s: il est plus aise de converser que d'ecrire, plus aise d'ecrire que de prier, plus aise de prier que d'agir  ». («Mon Livre Vert», n° 9).« Le secret de notre avancement consiste dans la priere, le secre t de la priere dans 

la preparation, le secre t de la preparation dans une conduite pure, le secre t d'une 

conduite pure dans la crainte de Dieu, le secret de la crainte de Dieu dans Son  amour. Ainsi, I'amour est le principe et le foye r de tous les secre ts ». («Mon LivreVert», n° 178).

« Je ne pu is trop le repete r: Il fa ut craind re Dieu avec mesure, mais ilf aut I'aimer  sans mesure ». («Mon Livre Vert», n° 431).

« Primitivement, la tete devait etre reglee par le coe ur; elle ne devait servir qu'a I'agrandir. Aujourd'hui, la tete de I'homme regne sur son cceur, tandis que c'est au coeur que le sceptre devait appartenir. C'est-a-dire que I'amour est superieur a la science, attendu que la science ne doit etre que le flambeau de I'amour, et que le flambeau est inferieur a celui qu'il eclaire ». («Mon Livre Vert», n° 58).« La seule initiation que je preche et que je cherche de toute I'ardeur de mon ame, est celle par ou nous pouvons entre r dans le coeur de Dieu, e tfa ire entre r le cceur  de Dieu en nous, pour y faire un manage indissoluble qui nous rend I'ami, le frere et I'epouse de no tre divin Reparateur. II n'y a d'autre mystere pour arrive r a cette sainte initiation, que de nous enfoncer de plus en plus jusque dans les profondeurs 

de notre etre, et de ne pas lacher prise, que nous ne soyons parvenus a en sortir, la vivifiante racine ; par ce qu'alors tous les fruits que nous devons porter, selon notre espece, s e produiront noturellement en nous et hors de nous ». (Correspondante au

baron de Kirchberger).« Purifie-toi, demande, regois, agis : toute I'oeuvre est dans ces quatre temps  ».(«Mon Livre Rouge»).

 Louis-Claude de Saint-Martin

qui se disait agent de la Puissance invisi

ble. Le Philosophe Inconnu revicnt de

cette rencontre profondement de 'u et plcin

de disillusions. Mais laissons-le parler: «

Une voie purlieu Here s 'esl ouverte a Lyon  

en 1785. J 'y jus appele pour partager la  

recolte. Au milieu des nombreuses ri-  

chesses qu 'elle offrait, elle renfermail  

aussi de la fausse monnaie, et I’on a fin i  

 par s'en degouter. On y avait abuse du  Nombre et de la Doctrine a moi connue  

anterieurement sur les animau.x. On y  

avait surtout abuse du gout de Willermoz  

 pour la Maqonnerie, et on I ’avait mis par-  

tout. Je vins a cette initiation avec le desir  

le plus pur et fame la mieux disposee. 

Mais comme je ne trouvais dans aucun  

genre d'aliment ce qu'il me fa llait, je me  

trouvais a la fin plus arriere qu'au com 

mencement ».

U n  HOMME DE DESIR

Suite a cette rencontre particuliercment

decevante, Saint-Martin douta de la

theurgie et fut convaincu qu'elle n’avait

pas sa place dans V ceuvre de la Reinte

gration. Et c'est cet homme de^u qui ar

rive en 1788 a Strasbourg, accompagne

de «• L'Homme de Desir   », livre qu'il

commenqa a Londres et qu' il finira dans

la cite alsacienne : « Dieu est un eternel  

Desir et une eternelle Volonte d'etre ma-  

nifeste, pour que son existence se pro 

 page et s'etende a tout ce qui est  

susceptible de la recevoir et de la sentir. 

L'homme doit done aussi vivre de ce  

Desir et de cette Volonte, et il est charge  

d'entretenir en lui ces affections sublimes;  

car dans Dieu, le Desir vient rarement   jusqu 'a ce terme complet, sans lequel  

rien ne s ’op ere. Et c'est par ce pouvoir  

donne a I'homme d'amener son Desir  

 jusqu 'au caractere de Volonte qu 'il  

devrait etre reellement une image de  

Dieu ».

Les premieres impressions de Louis-

Claude de Saint-Martin sur Strasbourg ne

•**o

semblent pas avoir etc ties favorables. La

ville, ou deux langues et deux cultures se

cotoient (fran^aise et allemande). ne lui

inspire pas grand interet, pas plus que ne

le seduit, derriere les belles facades deshotels particuliers, la societe qu'il fre-

quente. II laissera dans son * Portrait »  la

note suivante : « J'a i vu des homines qui  

n'etaient mat avec personne, mais dont  

on ne pouvait pas dire non plus qu 'ils y  

etaient bien ; car ils n 'avaient point assez  

de mesures developpees pour etre saisis  

de ce qui est vrai et vif ni pour etre cho-  

ques de ce qui est mil et faux. C'est a  

Strasbourg oil j'a i fait cette observation, 

et ici je dois me rappeler au mains les  

noms de plusieurs personnes qui m 'yont  

interesse ». Et Saint-Martin d'enumerer

de nombreuses families et personnages

de Strasbourg, comme s'il voulait s’en

graver le souvenir. Mais cette note, ties

curieusement. se termine d’une tout autre

maniere puisqu'on peut y lire : « Je cor- 

rige I effet de ma premiere appreciation. 

Je dois dire que cette ville de Strasbourg  

est une de celles a qui mon cceur tient le  

 plus sur Terre ».

Qu'arriva-t-il done a Saint-Martin durantces trois annees ? Quels charmes se de-

voilerent a son ame pour que Strasbourg

vienne occuper en son cceur la premiere

des places ? La lettre qu'ecrit un siecle

plus tard Matter, un de ses biographes, au

directeur de la « Revue d'Alsace  », nous

donne quelques eclaircissements : « Un  

des homines les plus disting lies de la fin  

du siecle dernier et qui se qua lifiait de  

“Philosophe Inconnu " dans ses premiers  

ecrits  /.../, Monsieur de Saint-Martin, est  

alle passer a Strasbourg, vers 1790, les  

annees les plus decisives de sa vie. Ap-  

 pliquant ses belles facidtes et ses nobles  

tendances a I'etude des sciences mys 

tiques, mais peu satisfait des pratiques et  

des pretentions de quelques associations  

secretes auxquelles il etait affilie, /.../ il 

 Jacob Boeh me, Portrait de von Gottlob Glymann ohne

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DOSSIER

se mil tout a coup a etudier I 'allemaml  

 pour aborder la lecture du plus gmnd des  

 philosophes mystiques du XVIT siecle. 

Jacques Boehme. /... / Deuxpersonnes de  

Strasbourg, Madame de Boecklin et Mon 

sieur Salvnann , furent les initiateurs de  

Monsieur de Saint-Martin a I 'etude du  

mystic isme, disons mieux, de la theoSo 

 phie de Boehme ».

S on   s e c o n d   M a i tr e

Frederic Rodolphe Salzmann est ne en

1749 en Alsace, a Sainte-Marie-aux-

Mines. ou son pere etait pasteur. On l’a

parfois confondu avec son cousin Johann

Daniel Salzmann, qui fut Fami de

Goethe. Avec les freres de Turckheim.

autre grand nom alsacien. il organisera a

Strasbourg une Loge des Chevaliers

Bienfaisants de la Cite Sainte. Parallele-

ment, il dirigera la Librairie Academique,

situee a l'ansle de la rue de la Chaine et

de la rue des Serruriers, et fondera une

gazette lilteraire bilingue (en frangais et

en allemand). La tourmente revolution-

naire le chassera de Strasbourg, mais

apres la fin de la Terreur, il y reprendra

ses activitcs litteraires. II restera toute sa

vie I'ami devoue de Jean-Baptiste

Willermoz et de Juna Stilling. Dans son

ouvrage intitule « Regards sur les mys-  

teres des voies de Dieu relatives a Vhu-  

manite ». il developpe une cosmogonicties proche du Martinisme. Maitrisant

parfaitement la langue allemande,

comme tous les natifs des bords du Rhin,

il correspond regulierement avec les mys

tiques de 1’AlIemagne et de la Suisse al

lemande. Ses lectures et ses etudes font

totalement familiarise avec les textes de

Law, Swedenborg et Boehme, qu’il fera

connaitre a Saint-Martin.

Les sympathies entre Saint-Martin et

Salzmann sont grandes en un premier

temps, mais des divergences sur des

questions essentielles. soil de theorie soil

de pratique, les eloignent, et leur amitie

s'etiolc. Au moment de leur separation,

c'est a Madame Salzmann, femme de

grand caractere et pleine d’admiration

pour la seduisante humilite du Philo-

sophe Inconnu, qu'il legucra son amitie.

La gente feminine a toujours joue un

grand role dans sa vie. II aimait la com-

pagnie des femmes animees par de hautes

aspirations mystiques ou religieuses,mais il se defiait beaucoup de celles qui

avaient trop d'inclinalions pour les “ora

cles somnambules”, comme on disait a

1‘epoque. C'est d ’ailleurs pour Tune

d’entre elles, Madame de Bourbon, qu'il

commen^a a Strasbourg son ouvrage

« Ecce Homo ». 1'engageant a se tourner

vers un mysticisme epure des pratiques

theurgiques. Mais la place qu’occupe

Charlotte de Boecklin est tout a fait a

part : « J 'a i par le monde une amie  

comme il n  ’y en a point. Je ne connais  

qu  ’elle avec qui mon dme puisse s 'epan-  

cher tout a son aise et s ’entretenir sur les  

grands objets qui m ’occupent, parce que   je ne connais qu elle qui se soit placee a  

la mesure ou je desire que I 'on soit pour  

in'etre utile... ». Comme il le confia lui-

meme, 1’affection profonde qui le lia a

cette femme fut purement platonique :

« II  v a deux etres dans le monde en pre 

sence desquels Dieu m 'a aime. Aussi, 

quoique I'un de ces deux etres fut une  

femme (ma B.), j'a i pu les aimer tous  

deux aussi purement que j'aim e Dieu, et  

 par consequent les aimer en presence de  

Dieu ; et il n y a que de cette maniere-la  

dont Von doive s'aimer, si Von veut que  

les amities soient durables ». C ’est a elle

qu'il rapporte le plus fecond evenement de

sa vie : laconnaissance du philosophe al

lemand Jacob Boehme, son « second  

Maitre ».

Presque deux siecles separaient Saint-

Martin et Boehme, mais celui-ci fut par

dela le temps le deuxieme instructeur du

Philosophe Inconnu. Ce dernier dira

d’ailleurs : « C'est a Martines de Pas 

qually que je dois mon entree dans les ve-  

rites superieures ; c 'est a Jacob Boehme  

que je dois les pas les plus importants  

que j ’ai fairs dans ces verites ». Saint-

Martin apprend l’allemand et, jusqu’a la

fin de sa vie, se fera une tache quoti-

dienne de traduire les ecrits de « son che- 

rissime B. ». Jacob Boehme, ne pres de

Goerlitz, en Silesie, fut I'un des plus

grands representants du courant mystique

et theosophique qui parcourt I'Alle-

magne du XVICau XV IIc siecle. Chretien

erudit dans 1'etude de la Bible, il presenta

une gnose originale, complexe et souvent

obscure, qui se manifesta a lui sous

forme d'une revelation. Sa doctrine est

construite autour de la notion medievale

de la Deite, \'« Ungrund   », la Source

mcme de I’ etre divin ; c’est I'Absolu des

absolus qui est en dega et au-dela de la

Creation, et dans lequel Dieu personnifien'ex isle pas. La Deite precede done la

Trinite divine. En elle reside depuis tou

jours un desir eternel et infini d'autore-

velation : la Volonte. Dans son processus

L 'h o m m e   d e   d £s ir , s e l o n   Lo u i s -C l a u d e   d e   S a i n t - M a r t i n

Dans sa condition actuelle, l'homme es t en etat d'exil. Rien ici-bas ne parvient ale satisfaire pleinement. Certes, le monde materiel lui apporte des satisfactions, des

plaisirs et des joies. Mais au plus pr ofond de lui-meme, il sait que le bonheurauquel il aspire n'est pas de ce monde et se situe ailleurs. Plus ou moins consciem-ment, il ressent egalement la nostalgie de I'etat glorieux qui etait le sien a I'origine,d'ou une certaine melancolie. Au regard du Martinisme, quiconque aspire a com-prendre cette melancolie et a retrouver sa purete primitive est un « Homme deDesir ». Son desir, c'est le desir de Dieu. Sairt-Martin disait a ce su j& : « II n'ya rien 

d'aussi courant que I'envie et d'aussi rare que le desir  ».Devenir un Homme de Desir, c'est vouloir reconstruire son Temple interieu r etreintegrer sa divine condition. Le Martiniste s'appuie sur deux piliers pour y par-

venir: I'initiation et I'enseignement. La premiere marque le debut de son chemi-nement sur la «v oie cardiaque», car c'est le momen t ou il r egoit le g erme deLumiere qui constitue le fondement de sa regeneration interieure. C'est aussi I'ins-tant privilegie ou il rencontre son Initiateur et ou il est admis dans la filiation martiniste, faisant de lui un maillon d'une chame initiatique remontant a Louis-Claudede Saint-Martin. Precisons que cette initiation doit etre conferee dans un Templemartiniste pour etre dument reconnue et faire du recipiendaire un veritable Initie.Si elle est un preliminaire indispensable, I'initiation martiniste n'est que la representation terrestre d'une initiation transcendantale, celle que Saint-Martin appellel'«initiation centrale» et qu'il definit ainsi: « Cette initiation, est celle par laquelle 

nous pouvons entrer dans le cceur de Dieu, et faire e ntrer le coeur de Dieu en nous,  pour y fair e un mar iage indissoluble... II n'y a d'autre mystere p our arriver a cette sainte initiation, que de nous enfoncer de plus en plus jusque dans les profondeurs de notre etre, et de ne pas lacher prise, que nous ne soyons parvenus a en sortir, la vivifiante rac ine; par ce qu'alors tous les fruits que nous devons porter, selon notre espece, se pr oduiront naturellement en nous et hors de nous ».Selon le Philosophe Inconnu, le travail de I'Homme de Desir provoque une transformation interieure, un «engrossement spirituel» qui porte la promesse d'une renaissance interieure. Grace a ce travail, le « Vieil Homme » cede progressivementla place a un « Nouv el Homme ». Ce Nouve l Homme, une f ois ne, passe ensuitepar tous les stades de revolution, jusqu'a atteindre sa complete maturite. Devenu« Homme-Esprit », il pourra accomplir son « Ministere » et devenir I'intermediaireactif entre la nature et Dieu. Alors, « la communication sera retablie entre le haut  et le bas, et la Terre pourra trouver le sabbat  ».D'un poin t de vue martinis te, ce n' est qu' apres s' etre r egenere que I'Hommeparticipera a la reintegration du Tout dans I'Un et redeviendra le Temple de Dieu : «Hommes de paix, hommes de d isir, telle est la splendeur du Temple dans lequel vous aurez droit un jou r de prendre place. Un tel privilege doit d'autant moins vous eton- ner qu'ici bas vous pouvez commencer a I'elever, que vous pouvez meme I'orner a 

tous les instants de votre existence... Souvenez-vous que, selon I'enseignement des sages, les choses qui sont en haut sont semblables a celles qui sont en ba s; et conce-vez que vous pouvez concourir vous-meme a cette ressemblance, en faisan t en sorte que les choses qui sont en bas soient comme celles qui sont en haut  ».

24 ACTUALITE DE L'HISTOIRE • HORS SERIE n°38

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LE M A R T I N I S M E

dc manifestation, cette Volonte se reflete

a travcrs laTrinite et son image parfaite :

la Sophia, la Sagesse.

Humble, Jacob Boehme ne cessa

d'avouer sa propre incapacile : «• Parma  

 prop re force, je suis un homme aussi  

aveugle qu 'un autre et ne puis rien. mais  

 par I'esprit de Dieu, mon esprit innepe-  

netre tout, mais pas toujours avec assez  

de perseverance ».  I I se sent comme unenfant adopte par la divine Sophia, qui

l’introduit dans le « Grand Mystere   »,

celui de la naissance de Dieu dans

I*homme et de 1'homme en Dieu. Selon

lui, le monde visible symbolise le monde

interieur, et la Sagesse siege dans le cceur

de 1*homme. C'est la qu'elle se tient. at

tendant avec patience d'etre decouverte,

entendue et aimee. Si 1'homme penetre

dans les secrets de son cceur, les Mysteres

divins lui sont reveles. Cette theoso-

phie de Boehme prefigure la « voie car-  

diaque   » du Martinisme el va modifier

profondement la philosophic de Saint-

Martin, qui s'oriente deliberement vers lavoie interne, renoncant a son passe par un

acte symbolique : il demissionne de la

Franc-Maconnerie, tout en restant fidele

a son initiation d'Elu-Cohen. Cette evo

lution interieure le protegea sans doute

aussi des evenements exterieurs, car la

Revolution fran^aise. en chassant les me

diums et en condamnant la Ma^onnerie.

obligea a la plus grande prudence,

nolammenl dans les ecrits.

S a   d o c t r i n e

Le « Nouvel Homme   », ouvrage que

Saint-Martin ecrivit lors de son sejour en

Alsace, n'est pas encore petri de la pen

see de Boehme, et c'est sans doute pour

celaque le Philosophe Inconnu se sentait

insatisfait ct mecontcnt a Strasbourg.

Plus qu'une theorie sur la Regeneration,

il voulut ecrire une exhortation a la Re

generation, comme il le dira plus lard

dans sa correspondancc avec le baron

Kirchberger. S'il est vrai qu'il redigea

cc livre a 1'instigation du Chevalier de

Silverhiclm, neveu de Swedenborg, il

n'est cependant pas vrai. comme on au

rait pu le faire croirc, qu'il ne fit que rc-

prendre les doctrines du visionnaire

suedois. Quoi qu'il cn soit, arretons-nous

sur ces pensees merveiIleuses, inspirees

et originales : «Dieu n'apas dedesirplus  

vifet plus ardent que la Regeneration de 

I 'liomme, car par son essence n’etant que  

 pur Amour, il tend les bras a la creature  

decline... De cette sublime verite que  I'homme est une pen see du Dieu des  

etres, il resulte une vaste lumiere sur  

notre loi et notre destination ; d savoir  

que la cause finale de notre existence ne  

 pent etre concentree dans nous, mais  

qu 'elle doit etre relative a la source qui  

nous engendre comme pensee, qui nous  

detache d'elle pour operer au-dehors ce  

que son unite insubdivise ne lui permet  

 pas d'operer elle-meme  /.../. C'est pour  

cela que cette pensee du Dieu des etres, 

doit nous etre la voie ou doit passer la  

Divinite toute entiere, comme nous nous  

introduisons journeliement tout entier  

dans nos pensees, pour leur faire attein-  dre le but et la fin dont elles sont I'ex 

 pression, et pour que ce qui est vide de  

nous devienne plein de nous. Car tel est  

le va'u secret et general de I 'homme ; et  

 par consequent, tel est celui de la Divi 

nite dont I'homme est image ».

Selon Saint-Martin, la destinee du Nouvel

Homme est inseparable de celle du Christ.

Par I'imilation interieure de l'alchimie

christique, il doit epanouir graduellement

des vertus dont il ignorait jusque-la 1'exis-

tence. Poursuivant fidelement cette imita

tion du Christ, 1‘homme doit mourir d'une

triple mort et triplement ressusciter : « Le  

Vieil Homme est mort sous le joug d 'une  

triple mort, que I 'on designe sous le norn  

de la mort du corps, la mort de I ame et la  

mort de I'esprit  /.../. Il faut done que le  

Nouvel Homme ait pour niche de se pro 

curer une triple resurrection, e ’est-a-dire  

qu il armche sa pensee. sa parole et son  

action aux tenebreuses regions oil elles  

sont en esclavage, qu 'il retienne sa pen 

see. sa parole et son action sur le bord du  

 precipice dans lequel I'ennemi cherche 

 journeliement d les entminer, et qu 'ilpre-  

vienne pour I  ’avenir la mort de sa pensee, 

de sa pamle et de son action sur le bord du  

 precipice, dans toutes les circonstances ou  

I'ennemi pourra les menacer ». Devenu

frere du Christ, le Nouvel Homme retrou-

vera, apres avoir fait resonner en lui les

trompettes du Jugement dernier, les rap

ports qu'il avait avec Dieu a 1'Age d'or. La

Jerusalem Celeste sera alors rebatie. et leprocessus de la Reintegration sera termine

: «■Ne te donne done point de reldche que  

cette ville sainte ne soit rebatie en toi, telle  

qu 'elle aurait toujours du y subsister si le  

crime ne I'avail renversee , etsouviens-toi  

tons les jours de ta vie que le sanctuaire  

invisible ou notre Dieu se plait d'etre ho-  

nore. que le culte, les illuminations, I'en-  

cens dont la nature et les temples  

exterieurs nous offrent des images ins-  

tructives et salutaires, qu 'enfin toutes les  

merveilles de la Jerusalem Celeste peu-  

vent se retrouver encore aujourd'hui dans  

le ca’iir du Nouvel Homme, puisqu\elles y  

ont existe des I'origine ».

Sa m o r t

C'est pendant 1'ete 1791 que Louis-

Claude de Saint-Martin fut brutalement

arrache de son paradis, Strasbourg : son

pere venait d'avoir une seconde attaque

de paralysie et le rappelait pres de lui. La

Divine Providence avail conduit

I'Homme de Desir qu'il etait jusqu'a

Strasbourg, et elle cn eloignait mainle-

nant le Nouvel Homme qu'il etait de

venu. Mais si sa ville natale ne lui

pcrmettait pas de parler ou d'entendre

parler des verites qu'il aimait, il n'y

trouva pas non plus les fanatiques de la

Terreur qu'il aurait rencontres a Stras

bourg, ce qui lui fit dire : « Toutes les cir 

constances de ma vie ont ete comme des  

echelons que Dieu pla^ait autourde moi. 

 pour me faire monter jusqu 'a Lui ». Est-

cc en ayant cela a l'esprit qu'il quitta ce

monde un jour de 1803. pour rejoindre le

Dieu qu'il venerait tant ?

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DOSSIER

Le  M artinisme

Un esoterisme, 

une theosophie, une gnoseL

'esoterisme a un caractere univer

se!. Que ce soit dans le chama-

nisme, qui. selon de recentes

interpretations, remonterait aux temps

prehistoriques, ou dans les grandes reli

gions orientales comme occidentals, on

y retrouve la presence d'un savoir, d’ une

connaissance, d’une sagesse qui sont re

serves a des inities et qui leur permettent

de faire I’experience, apres un long ap-

prentissage, de 1’union avec une realite

supra-humaine. Ce cceur. ce noyau esote

rique. interieur, nourrit et vivifie l’exte-

rieur. 1’aspect exoterique des religions.

Si I'esoterisme est aussi universel, c'est

parce qu'il correspond a la structure pro-

f’onde du monde et de l'homme, a savoir

qu'il y a depuis la sortie de 1'unite origi-

nelle un interieur et un extericur des

choses, mais egalement un chemin me-

nant de I'un a Fautre. Parce qu 'il est eter

nel, I'esoterisme n'en a pas moins irrigue

d’une maniere souterraine le monde

occidental a travers quatre courants

qui. bien que relies, ont garde leur speci-

ficite : 1'hermetisme. la kabbale, 1'alchi-

mie et la theosophie.La theosophie, dans son sens moderne,

est I'un des courants de I'esoterisme oc

cidental. Sa caracteristique reside dans le

fait qu' il est d'essence chretienne. La f i

gure du Christ y est omnipresente, mais

atteint une ampleur qu'il n'a pas dans la

religion exterieure. La theosophie s'est

developpee aux XVle et XVIIe siecles

avec les Rose-Croix, Paracelse, Jacob

Boehme, et s’est perennisee ensuite a tra

vels les oeuvres de Martines de Pasqually

et de Louis-Claude de Saint-Martin.

Quant a la gnose. elle insiste sur la voie

ascendante qui mene vers la Connais

sance, bien qu'elle designe parfois aussi

cclle-ci, con^ue comme une sagesse qui

libere et guerit. Ainsi, toutes les voies

esoteriques authentiques sont des gnoses,

dans la mesure ou elles impliquent une

pratique initiatique qui permet d'acceder

a l'absolu. A la vue de ces definitions, il

nous a semble interessant d'etudier en

quoi le Martinisme est un esoterisme. une

theosophie et une gnose.

U n  esoterisme

L'esoterisme, nous 1'avons dit, est le

coeur. le noyau, de toutes les religions,

car. comme 1'enseigne le Martinisme,elles prennent leur source dans une seule

Religion. Ce cceur, cet interieur commun

a toutes. permet d ’acceder a une realite

supra-humaine par une experience inte-

rieure. L’esoterisme per^oit 1’unite der-

riere la diversite et developpe quatre

themes que I’on retrouve sur tous les

continents, meme s'ils sont traites diffe-

remment :

• Le premier est la presence d'un principe

vital unique, present en toute chose et en

devenir, en evolution vers une perfection

latente. Le plus sou vent, on l 'a appele

« Ame du monde » et symbolise par la

spirale, la roue ou le germe en gestation.

• Le deuxieme theme est 1'exclusion de

l'homme de 1'unite originelle, que relate

le mythe de la chute symbolique present

dans toutes les cosmogonies. L'histoire de

l'homme, mais aussi du cosmos, repre

sente dans cette vision la longue marche

du retour vers 1’unite perdue.

• Le troisieme est la loi de polarite. Le

mouvement de 1'uni vers nait avec la dua-

lite, I'Un etant statique. L uni vers est

rythmique et dialectique. en ce sens que

des forces antagonistes et complemen-

taires s’unissent pour donner naissance ades manifestations superieures, le deve

nir cosmique etant oriente par 1'Esprit.

Ainsi, la matiere genere la vie, la vie ge-

nere la conscience, vie et conscience

etant presentes de maniere latente dans

leur matrice materielle.

• Le quatrieme theme est la loi d'analogie

et de correspondance entre le micro-

cosme et le macrocosme, d'ou decoule

un principe de connaissance essentiel: on

ne peut connaitre que ce que I'on porte

deja en soi. Or, nous retrouvons tous ces

themes dans le Martinisme.

L'esoterisme se caracterise egalement par

trois manifestations : le secret, la trans

mission d une tradition dite primordiale,

et 1'initiation. Le secret peut etre aborde

de plusieurs manieres. Tout d'abord. il

s'avere necessaire pour assurer la protec

tion des enseisnements et des rituels. Son

but est d'en preserver l'integrite et 1'ef-

ficacite, afin de reserver leur acces a

ceux qui le demandent, mais aussi a ceux

qui le meritent. Mais le secret, c'est aussi

celui des textes, qui exigent interpreta

tions symboliques et meditations. Ainsi.

tout esoterisme veritable se refere a un

mythe originel que I'initie doit decrypterpour donner un sens a sa vie. Pour I'ini

tie martiniste, ce mythe s’appelle la Ge

nese, dont il doit penetrer le sens

hieratique a la lumiere de I'Evangile de

L'lllumination par le coeur, illustration extraite d'« Em blemata » (1630), de Daniel Cramer 

26 ACTUALITE DE L'HISTOIRE • HORS SERIE n°38

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LE M A R T I N I S M E

Jean, de la Kabhalc et des ecrits de Jacob

Boehme, Martines de Pasqually et Louis-

Claude de Saint-Martin. Le secret, c’est

enfin l’interieur cache des choses que

l'homme. dans sa quete de 1’unite, doit

chercher et decouvrir par lui-meme.

Deuxieme manifestation de 1’esote-

risme : la transmission de la Tradition pri-

mordiale. Cette Tradition immemoriale,

unique, transcendante et transmise d'age

en age, de maitre a disciple, le Marti

nisme I’appelle «la Lumiere eternelle de

la Sagesse divine». C ’est une connais-

sance non-rationnelle, intuitive, presente

en tout etre, mais qui doit etre eveillee

par la filiation spirituelle et I’initiation.

C ’est un legs spirituel que les Ordres ini-

tiatiques authentiques ont en depot et

qu ’ils ont la charge de transmettre. C ’est

pourquoi ces Ordres mandates, bien

qu’ancres dans leur temps, sont en fail

hors du temps et relies au principe origi-

nel qui leur donne force, vie et perennite.

Derniere manifestation de tout esote-risme : I’initiation. C ’est en effet I’initia

tion qui assure la transmission de la Tra

dition. En ce sens, elle est a la fois un

commencement pour celui qui entre sur

le sentier, et un retour a I’origine, au Prin

cipe. par I’influence spirituelle qui passe

de l’initiateur a rinitie et fait de ce der

nier un disciple de la Lumiere. L’initia

tion est done une experience impliquant

un contact direct, physique entre eux.

mais aussi un contact subtil provoquant

eveil et illumination. Ce processus sym-

bolique exige plusieurs choses : la pre

sence effective du candidat. l’examen de

sa dignite, la transmission de symboles et

le don d’ une force spirituelle lors de 1'ini

tiation. 11 appartient ensuite a 1‘initie de

faire germer la semencequ’ il a regue. Le

but est la realisation spirituelle et la rein

tegration d’une harmonie perdue qu’il

faut retrouver.

Ces analyses des themes et manifesta

tions de l’esoterisme ne laissent done pla

ner aucun doute : le Martinisme, tant par

les lignes de forces de son enseignementque par la rectitude traditionnelle de ses

initiations et de ses rituels, est I’un des

fleurons de l’esoterisme occidental et de

l’esoterisme tout court.

U n e  t h e o s o p h i e

Un chercheur a ecr it: «La theosophie est  

la doctrine chretienne des XV I cet XVII1’  

siecles, representee par Paracelse, Wie-  

gel, Fhtdd... et qui se caracterise par la  

reflexion analogique et I 'illumination in-  terieure, I 'experience spirituelle et les  

notions d 'emanation, de chute originelle, 

d 'androgynat, de Sophia, de reintegra 

tion, d ’arithmosophie, et surtout de dou 

ble force...». Nous retrouvons dans cette

definition des themes de la theosophie,

qui est une forme eminente de 1’esote-

risme occidental.

La theosophie est la connaissance des

mysteres divins incarnee par Sophia, la

Sagesse divine. Hochmah  dans la kab-

bale. C ’est elle qui se transmet et devient

accessible a la comprehension humaine a

travers ce qu’on appelle la Tradition. Elle

est presente en toute chose, et bien sur en

l’homme, comme un tresor cache. «Dieu  

se cache pour que I homme le cher che»  

dit un vieil adage. Et l’ homme peut acce-

der a cette sagesse, car il possede en lui

des profondeurs qui sont en resonance,

en harmonie, avec les profondeurs des

Mysteres divins. Mais pour cela, il lui

faut operer la conversion du regard, des-

cendre dans la nuit, et frapper a la porte

du sanctuaire qui s’ouvre lorsque 1’on est

pret a affronter la Lumiere de la Sagesse.

Or, les enseignements et les rituels mar

tinistes n’ont d’uutrc but que de preparera cette entree dans le sanctuaire ou s’ope-

rent les noces chymiques.

L’autre figure centrale de la theosophie

est celle de Ieschouah. le Christ cos-

mique. L’univers n’est pas laisse a la de

rive. II est habite et souleve par le Feu

christique. Teilhard de Chardin, ce mys

tique moderne, en a fait le moteur de

revolution. Rayonnant en Tiphereth , Ie

schouah est le mediateur qui permet au

monde d’en-bas de s’harmoniser avec le

monde d ’en-haut pour rejoindre V unite

de Kether, et au-dela, le Dieu inconnais-

sable. Le Martinisme est bien une theosophie par sa filiation remontant par

Louis-Claude de Saint-Martin, ainsi que

par la place centrale qu’ il accorde a la So

phia. la Sagesse divine, et a la puissance

transfigurante du Christ cosmique.

af o

U n e  g n o s e

La gnose est une connaissance qui libere.

Mais c’est aussi la voie qui mene a la

Connaissance. Elle exige l’acquisition

d'un savoir qui demande a la fois re

flexion intellectuelle, experimentation, et

descente en soi. C ’est alors qu ’ il devient

sasesse. La snose est aussi le chemin as-w s*-

cendant, 1’itineraire peril leu x entre des

forces contradictoires. De l’errance de

I’Homme du torrent a la maitrise du Nou-

vel Homme, elle est une dialeclique, mais Apollon ius ■, I'un d es p lus g rands rep re se nt an ts de la sag es se an tique

FEVRIER-MARS 2010 27

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DOSSIER

une dialectiquc nee de 1'union de deux

forces antagonistes et complementaires,

symbolisees par les deux piliers. a tous

les niveaux de la creation, de Patome a

1'homme, cette dialectiquc fait naitre, par

le choc et l'union de deux energies oppo-

sees, des manifestations qui n’existaient

pas jusqu’alors, ou qui n'existaient qu'a

Petal latent. L'union est cicatrice, mais

elle preserve la singularite et la differencedes forces initiales. Sa forme la plus ela-

boree est P amour humain.

Aux niveaux mental et emotionnel, c'est

1'interaction du moi et du monde qui pro-

voque nos prises de conscience. Au ni

veau spirituel, c'est le dialogue difficile

mais fructueux de notre etre conscient et

de notre ame inconsciente qui nous fait

avancer sur le chemin. Le Martinisme

prepare a ce genre de confrontation et

permet d'en retirer tous les fruits. Chaque

degre est une gnose sur des plans diffe-

rents. Linconscicnt est la racine de notre

etre, le centre spirituel vers lequel il nous

faut converger pour puiser aux sources de

la Creation. Par lui, nous sommes en har

monic avec les rythmes cosmiques et

notre nature divine. Mais il existe aussi

en nous une region plus obscure, nee de

nos desirs refoules et de nos peurs se

cretes, bien etudice par les psychana-

lystes, en particulier par Jung, qui

I'appelait « Pombre ». C'est pourquoi la

voie initiatique reclame de 1’initie prepa

ration. patience, perseverance et ferveur.

Quoi qu'il cn soit. le Martinisme est bien

une gnose par la structure de son ensei-

gnement, le cheminemcnt au sein de

chaque degre. et Part de combiner l'ora-

toire et le laboratoire.

 par Guy Eylierabide

Oratoire et Laboratoire, planche extraite de «L'Amphitheatrum» (1603), 

de Henrich Kunrath

•i

I

Tetragramme, de Serouya

Hermes Trism^giste (Pavement de la cath^drale de Sienne)

Planche extraite de «L'Amphitheatrum» (1603), de Henrich Kunrath

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28 ACTUALITE DE L'HISTOIRE • HORS SERIE n°38

   O   M   T

   O   M   t

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LE M A R T I N I S M E

Kabbale et Martinisme

L

e mot « Kabbale » vient du terme

hebreu qabalalt , qui signifie « ce

qui est re^u » (forme a partir de la

racine qihel, recevoir). C'est une traditionqui s'est perpetuee au cours des ages.

C'est a la fois une voie de connaissance

fondee sur retude des textes bibliques

(en hebreu), et une voie de realisation

spirituelle basee sur un travail de perfec-

tionnement individuel. Par extension, il

s'agit d'une sagesse voilee qui s’est

transmise de bouche a oreille el d'initie a

initie. ce qui fait penser a la citation de

Francis Bacon : « La gloire de Dieu est  

de cacher une chose ; la gloire de  

I 'homme est de la decouvrir ». Pour pou-

voir etudier la Kabbale, il faut develop-

per deux qualites : 1'humilite et rumourdu prochain. En cela, c'est une voie

cardiaque assez proche du Martinisme. A

ce propos. Moshe de Kobryn n'a-t-il pas

dit : « II faut vivre dans la joie ; il faut  

vivre dans I'amour. D'ailleurs, c'est une  

seule et me me chose. » 

L es  n i v e a u x  d e   la   K a b b a l e

La Kabbale ne doit pas etre etudiee

comme une methode speculative, une

methode theurgique ou une methode di-

vinatoire. Ceci conduit a I'erreur et a la

confusion. La Kabbale est surtout une

voie pratique permettant d'aboutir a la

conduite juste (en respectant les 613

mitsvoth   ou commandements de la loi

juive, avec kauanah  ou intention mys

tique. Cette conduite juste peut se resu-

mer en ceci: « Ne J'ais pas a autrui ce que  

tu n'aimerais pas qu 'il te fasse. c'est la  

toute la Torah, le reste n 'en est que le  commentaire »   (Hi 1lei, Talmud. Traite  

Chabhat  30b). Rappelons que la Torah

correspond au Pentateuque. l'ensemble

des cinq premiers livres de la Bible (Ge

nese. Exode, Levitique. Nombres. Deu-

teronome).

Dans la Kabbale. on distingue quatre niveaux de lecture de la Torah : peshat  (lit-

teral. pour rechercher des informations

dans le texte biblique d'origine), rentez  

(affiliation des lettres, symbolisme des

lettres et des nombres). derash   (allego-

rique. on va scruter et utiliser des sys-

temes de combinaison comme la

guematrie. la temourah, la notarika), sod  

(niveau secret, accessible par la medita

tion). La premiere lettre de l'ensemble de

ces mots forme le mot PaRDeS, qui si

gnifie « Paradis ».

L'etude des textes bibliques et kabbalis-

tiques permet d'aborder les niveaux su-

perficiels {peshat   et remez ), fortementassocies a I'intellect. Les textes les plus

connus sont:

- la Torah  elle-me me (la Loi), qui cor

respond aux cinq premiers livres de la

Bible (le Pentateuque),

- le Talmud  (l'ame de la Loi), compose

de commentaires sur la Torah.

- le Zohar  (l'ame de l'ame de la Loi),

comprenant une interpretation biblique

esoterique, ainsi que divers traites de

magie, d’angelologie, de chiromancie,

des ecrits sur la reincarnation et sur les

mysteres du Nom divin.

- le Sefer Yetsirah  qui constitue une ex

plication esoterique de la Creation.

- le Maasseh Bereshit. vision de la Crea

tion. comportant des experiences mys

tiques,

- le Maasseh Merkavah, vision de la fin

des temps, avec sa litterature des palais

(hierarchie celeste),

- et d'autres livres comme le Sefer Ha  

Bahir, le Sefer Ha Razim, le Shiour  

Qomah...

Neanmoins. la Kabbale ne doit pas etre

uniquement speculative et intellectuelle.

D ’ailleurs, meme a propos de sujets

Slaves comme la creation du monde. lesc T

rabbins ne perdent pas le sens de 1’hu

mour, comme en temoigne la citation sui-

vante tiree du Midrash Rabba   sur la

Genese : « Pourquoi I'homme fut-il cree  

le dernier jour ? Four que, si I 'orgueil le  

 pretid, on puisse dire : dans la Creation, 

le moustique t 'a precede ».

Pour atteindre un aspect plus emotionnel

et decouvrir cette voie cardiaque, il est

important de travailler les deux autres ni

veaux de lecture de la Bible {derash  et

sod), non par la lecture d'ouvrages sur la

Kabbale ou le suivi de seminaires, mais

par la pratique effective et personnelle. et

la decouverte par soi-meme de codes en-

fouis dans le corpus biblique.Le symbolisme des lettres hebraiques ou

de la grammaire peut nous y aider. Dans

la Torah, certains noms bibliques appa-

raissent parfois avec un He, parfois sans.

win wur/’iruit'

PORTAE LVCIH j c e f t p o n a T c t ra g r a m a ro n i u ft i in r ri b H t p t a r a ,

 _________________ _____ 2------------------------------------ ’ -£■

Les Portes d e la Lum itre (« Portae Lucia », J.B .A. Gikitilla, 1516)

FEVRIER - MARS 2010 29

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DOSSIER

Nous trouvons par exemple Adam ou Ha

Adam, Abram ou AbraHam. Or la lettre

He symbolise I'alliance avec Dieu. Elle

est legerement ouverte en haut a gauche,

cote cceur, et correspond a un “H'’ aspire.

Elle est associee a un passage d'air et a

la fenetre, done a l'ouvcrture vers le haut,

au chemin de la remontee vers Dieu, et

par consequent a l'alliance avec Dieu.

Ainsi. Ha Adam correspond a Adam, au

premier homme, qui etait encore dans

l'alliance divine, dans le jardin d'Eden.

Lorsqu’il est chasse du Paradis, il devient

Adam (sans le He), celui qui n'est plus

dans I'alliance avec Dieu. Dans le mcme

ordre d'idce, Abram devient Abraham

apres avoir scelle son alliance avec Dieu

(apparition du He). De meme, dans cer

tains passages de la Genese, on trouve

des enonces oil le feminin est attendu.

alors que le masculin est rencontre, el

vice versa. Y a-t-il eu une grossiere er-

reur de grammaire ? Ceci apparait essen-

tiellenient lorsque Adam et Eve sont dans

le jardin d'Eden. Par exemple, dans le*

chapitre 3, verset 20. Adam appelle Eve

et parle de «lui» au lieu d'elle. En fait, a

cette epoque du recit biblique, Adam et

Eve sont androgynes (a la fois male et fe-

melle), d'ou cette indifference entre les

modes masculin et feminin.

La  s c i e n c e  k a b b a l i s t i q u e

Les Kabbalistes, selon leurs tendances,

abordent la symbolique des lettres de di-

verses manieres. Certaines methodes ont

ete mises au point pour evoquer des ana

logies entre mots ou passages de la Torah.

On irouve ainsi toute une batterie de co-

dages comme la guematrie, la temourah.

la notarika (ou notarikon).

- La temourah est la science des permu

tations des lettres, I'art sacre des ana-

grammes. Les combinaisons obtenues a

partir d’un mot localisent son origine et

sa quintessence. Par exemple, Molse en

hebreu se dit Moshe. En permutant les

lettres, nous obtenons Hashem, qui si-

gnifie le Nom (sous-entendu Dieu).

Ainsi, Moise est celui qui regoit la Torah,et Dieu celui qui la donne. II s'agit pour

le Kabbaliste de trouver le lien existant

entre les mots, et d'arriver au cceur de

I'energie animee par 1’ensemble des let

tres, devoilant ainsi l'essence du mot

d'origine.

- La notarika. quant a elle, est la science

des abreviations. Elle consiste a obtenir

de nouveaux mots a partir des premieres

ou dernieres lettres de phrases ou sim-

plement de mots. C'est la technique des

acrostiches. On peut, en partant des let

tres initiales ou finales des mots d'une

phrase, former un nouveau mot. Par

exemple. les lettres finales des trois premiers mots de la Genese «Bereshit Bara  

Elohim   (Au commencement Dieu

crea...)» donnent TAM (parfait). Ainsi.

la Creation de Dieu est parfaite (Tam).

- La suematrie est la science des nom-

bres. C'est un procede qui applique une

valeur numerique a chaque lettre. C'est

une technique ties largement employee

chez les Kabbalistes. Elle etudie les

transpositions etablies, de telle sorte

qu'un mot peut se transformer en nom

bre et un nombre en mot. Lorsque deux

mots ont la meme valeur. on dit alors

qu'ils sont relies I'un a l'autre, car pour

les Kabbalistes, tout a ete cree au moyen

de permutations de lettres du Verbe divin.

On chcrche alors les mots ayant la meme

somnie, afin de trouver des correspon-

dances secretes entre ces mots. Par exem

ple, la Kabbale dit que « Dieu est amour  

et unite ».  En voici la raison : le mot

AHAVAH (amour) est compose des let

tres Aleph. He, Beth et He. ce qui donne

un code de 1+ 5 + 2 + 5 = 13. Or. Dieu

est unite (E'H AD ), mot compose des let

tres Aleph Heth et Dalet, ce qui nous

donne I + 8 + 4 = 13. Ces deux mots

ayant le meme code numerique, il existe

une correspondance entre eux. Pour la

Kabbale. amour et unite sont done equi

valents et se completent. De plus, le nom

de Dieu YH WH a pour valeur numerique

10 + 5 + 6 + 5 (Yod, He, Vav, He), cgale

a 26, soit 13 + 13. En d'autres termes,

amour plus unite correspondent a Dieu.

L 'un i o n   m y s t i q u e

Mais le niveau de comprehension le plus

profond (soil)  ne peut etre aborde que par

la meditation. Abraham Aboulafia, Kab

baliste du passe, preconisait la technique

de contemplation des lettres, qu'il quali-

fiait de technique d'union mystique. En

effet. pour les Kabbalistes, la lettre est unlien entre l'homme et Dieu. Elle devient

alors un support de meditation pour \dde-  

vequth , I'adhesion a la Conscience di

vine, et complete parfaitement les

W 3

C O V R O N N E

L'Adam Kadmon

30 ACTUALITE DE L'HISTOIRE • HORS SERIE n°38

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LE M A R T I N I S M E

techniques de combinaisons evoquecs

precedemment, techniques plus associees

a des aspects intellectuels et emotionnels.

On quitte alors le mental pour aborder un

niveau plus spirituel.

L ' i m p o r t a n c e   du   coeur

Le coeur a une grande importance dans

la Kabbale. Un certain nombre d'indices

nous permettent d'en prendre conscience. Ainsi. la premiere lettre de la

Torah est un Beth (le premier mot de la

Genese est Bereshit). Cette lettre corres

pond a la preposition en. dans (interieur).

On peut done penser que le debut de la

Torah se situe en Dieu, faisant ainsi pen

ser a l'etat dorieux de V homme a son

origine. Dc meme, la derniere lettre de la

Torah est Lamed (le dernier mot est Is 

rael). Cette lettre correspond elle aussi a

une preposition : pour, vers (direction).

On cn conclut que la finalite de la Torah

est d’aller vers Dieu. Celle-ci est done

une voie menant de Beth a Lamed, cc qui

forme le mot BaL   (abondance, fertilite).(Une autre signification de BaL  est « in-

terdit », « rigueur de la Loi »).

II est troublant de constater que le sens in

verse (Lamed Beth, au lieu de Beth

Lamed), suggerant le retour, lc flux op

pose, forme le mot « cceur » {LeB  en he-

breu). Le coeur est done, dans la Torah, la

voie a suivre pour retourner a Dieu. En

effet, le debut du mot « c<x\\\ILeB » (la let

tre Lamed) est situe a la fin de la Torah,

alors que la fin de ce mot (la lettre Beth)

est placee au debut de la Torah. Ainsi,

rhomme peut retourner a V Unite divine

en suivant les injonctions de son coeur.

II est surprenant egalement de constater

que la guematrie du mot «cceur» donne

32 (30 pour Lamed + 2 pour Beth), soit

les 32 sentiers de la sagesse. Ceci evoque

La voie christique (D'apr ts une planche extraite de I'ouvrage « Symboles secrets 

des Rosicruciens des XVIe et XVIIe siecles »)

egalement le chapitre 32 de la Genese,

contenant le combat de Jacob avec Dieu.

Dans cette scene, Jacob traverse le fleuve

Yaboc ; en fait, il traverse son propre

nom. En effet, la temoura de « Yaboc »

donne Yacob (Jacob). Apres avoir com-

baltu avec l ange, il devient « Israel ». La

Notarika sur la fin des mots « Yacob » et

« Israel » nous donne la encore BaL  (et

LeB  dans I’autre sens). Le verset 27 duchapitre 32, « in as lutte avec Dieu et tti  

as ete vailiqueur  », peut alors etre inter-

prete par : «• in as combattu la rigueur du  

BaL. le commandement de Dieu, et tu as  

vaincu par  LeB, le cceur ». Ce passage

montre ainsi un face-a-face : un nom face

a un autre nom, un homme face a Dieu, lc

debut de la Torah face a la fin.

Enfin, precisons que le coeur est au cen

tre meme de la Kabbale. En effet, le mot

c/abalah   s’ecrit QBLH (Qof. Beth.

Lamed, He), et contient en son centre les

lettres Lamed et Beth, qui formcnt le mot

LeB   (coeur), integre au centre, mais a

l’envers. On comprend alors mieux la citation suivante, extraite du Traite Brakhot  

17a : «•II importe pen que ce que I on fait  

soit grand ou petit, pourvu que I'on di 

rige son cceur vers le de l ».

m t ^ no

Tetragramme, Nom sacr4 de Dieu dans la tradition jud£o-chr£tienne

K a b b a l e   et   M a r t i n i s m e

Tout comme la Kabbale, le Martinisme

est une voie cardiaque, une voie de reali

sation spirituelle menant a la connais-

sance de soi et du monde divin. On

retrouve dans 1’enseignement kabbalis

tique plusieurs notions martinistes,

comme la reintegration de 1'humanite (le

tikkoun  ou la restauration de Y ordre ori-

ginel), la reincarnation (le gilgoul  ou la

transmigration des ames), V union divine

(la kawanah   ou le retournement vers

Dieu), la quete d'illumination (la deve-  

quth  ou la contemplation), etc.

La Tradition martiniste rapporte que tous

les etres humains represented les cellules

d'un meme corps, celui de 1'humanite,

chacun ayant neanmoins son autonomic et

son individuality propres. Cette evidence

est la cle de la fraternite, car elle implique

que l'individu ne peut s'elever sans eleva

tion parallele de la collectivite. Un chemin

etroit et ardu, mais pur el lumineux. peut

conduire vers cet ideal: c'est le chemin du

juste milieu, qui dessille les yeux et I'es-

prit. et conduit a la serenite et au respect de

I’autre. Pour y parvenir. il faut equilibrer

les oppositions de la vie. symbolisees parles piliers de 1'initiation, afin de mieux ap-

prehender l'unite omnipresente, en haul

comme en bas, dans le macrocosme

comme dans le microcosme.

II y a de nombreuses definitions pour le

mot « unite ». L'une d'elles est « harmo-

nie ». C'est celle a laquelle doit tendre

tout Martiniste. II est possible de trouver

de nombreux symboles de l'unite dans la

nature, oil tout animal, vegetal et mineral

depend des autres et ne peut vivre qu'en

harmonic avec les autres, formant ainsi

un ecosysteme. Que I'un des maillons de

cette chaine naturelle soit brise, et c'est

tout le systeme qui en patit. De l'unite

nait la multiplicity, elle-meme destince a

reintegrer l'unite. Ainsi, dans la Kabbale,

l'arbrc des 10 sephiroth, ou arbrc sephi-

rotique, comporte a son sommet une se-

phira unique, appelec Kether ou

Couronne. C'est de Kether que naissent

les sephiroth Hokmah ct Binah, puis

toutes les autres le long des trois piliers

(Rigueur, Misericorde et Equilibre), pour

arriver finalement au niveau le plus bas.

oil I'on retrouve la encore une sephira

unique : Malkuth. Ccs deux sephiroth.

Kether tout en haut. et Malkuth tout enbas, sont toutes deux placees sur le pilier

central, la voie du milieu ou pilier de

l'equilibre. qui harmonise les oppositions

de la vie. Or. la lettre hebraique associee

a l'equilibre et a l'harmonie, mais aussi

au souffle ct a la vie, est la lettre Aleph.

Elle correspond justement au chiffre 1. a

l'unite.

Dans le meme ordre d'idee, la Kabbale

demande a 1'homme de pratiquer 613

commandements, lesquels correspondent

a diverses lois et conduites a suivre pour

devenir un tsaddik , un juste. Or, si Ton

fait 1'addition theosophique de 613, nous

arrivons a 6 + 1 + 3 = 10, ce qui nousconduit au chiffre 1. De meme, si on as-

socie chacune des 22 lettres hebraiques a

un nombre par la guematrie, et si I'on fait

la somme des valeurs numeriques des

304 845 lettres composant la Torah, on

arrive au resultat extraordinaire de 1 ! As-

surement. tout nous ramene a l'unite...

C'est par sa conduite juste et son service

desinteresse que I'homme pourra arriver

a la plenitude de 1'Unite. afin d'atteindre

son but ultime : reintegrer la Divinite.

Pour cela. il doit s’efforcer de devenir un

mail Ion de la chaine qui contribuera peut-

etre a ramener un jour 1'humanite vers

son etat glorieux d'origine. Tel etait le butdes Kabbalistes ; tel est le but des Marti

nistes.

Huguette Ijifort 

••

3

La voie du coeur 

f e v r i e r - m a r s   2 0 1 0 31

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LE M A R T I N I S M E

explique qu'il compte parrni ses mem

bres des personnes ayant des opinions di-

vergentes, voire opposees, dans ce

domaine.

Vous etes egalement le Responsable 

mondial de I'Ancien et Mystique  

Ordre de la Rose-Croix.Pourquoi cette double fonction ? 

Parce que c'est l'A.M.O.R.C. qui par-

raine I'O.M.T. depuis le debut du X XC

siecle, et que 90 %  des Martinistes sont

Rosicruciens. Tous les Grands Maitres de

l'A.M.O.R.C. sont d'ailleurs eux aussi

Grands Maitres de I'O.M.T. En assumant

la responsabilite conjointe de ces deux

Ordres freres, cela permet de mener leurs

activites respectives en parfaite harmo

nic.

T* I ’T t O X * L A % •! S ?  

Cir t i f xc t t f r a Init iator  

H w i>1 * tfMfftPi frnvsrf. ~+4 h   i w v h

tr — MUi .MimiWUMtWW ■»

KOir w » w v , { f i 2 £« *

SHnJMiMB t ? . l ,W «

y-Ul.THl.TlIJl. 1■£*’•?/& + -•   iljj-OtW£xtai '' I

4

Certificat d'initiotion de Christian Bernard ,en font que Sou\/erain Grand M aitre de

I'O.M.T.

Et com bien de Rosicruciens sont-ils Martinistes ? Environ 20 %. Cela s'explique par le fait

que tous les Rosicruciens ne s’interessent

pas necessairement a l'esoterisme judeo-

chretien.

Quelle difference y a-t-il entre le Martinisme e t le Rosicrucianisme ?  

Comme je l'ai rappele. l'enseignementmartiniste a une connotation judeo-chre-

tienne, ce qui ne veut pas dire pour au-

tant qu'il ait un caractere religieux.

L'enseignement rosicrucien, de son cote,

est plus large et plus universel, en ce sens

qu'il se rattache a la Tradition primor-

diale et transcende toutes les religions

existantes et ayant existe. Pour prendre

une image, I'Ordre de la Rose-Croix est

un arbre dont I'Ordre Martiniste Tradi

tionnel est une branche.

Et y a-t-il un lien entre le Martinism e et la Franc-Magonnerie ? 

Je ne suis pas Franc-Ma^on. mais d*apres

ce que je sais, certains rituels magon-

niques sont ties proches des rituels mar

tinistes. Cela s'explique notamment par

le fait que Martines de Pasqually, initia-

teur de Louis-Claude de Saint-Martin.

appartenait a la Franc-Magonnerie.

En dehors des reunions tenues dans les Heptades e t les Ateliers, les Martiniste s ont-ils la possibility  de se rencontrer ? Oui. L'O.M.T. organise regulierement des

Convents qui se tiennent sur un plan re

gional. national ou international, permet-

tant ainsi a des Martinistes venus de

divers horizons de se rencontrer et de tra

vailler ensemble. Vu sous cet angle, il

s'agit d'une Fraternite authentique.

En une phrase, comment defmiriez- vous I'ideal martiniste ? C'est un ideal de Chevalerie spirituelle.

fonde sur la volonte de cultiver en soi la

sagesse, en vue de rendre le monde meil-

leur.

En tant que Souverain Grand M aitre 

de I'O.M.T., quel regard portez-vous sur le monde actuel ? 

Le meme que celui que je porte en tant

que Responsable de l'A.M.O.R.C. Pour

etre plus precis, je pense que l'humanite

s'est atheisee ct qu'elle risque de perdreson ame dans sa course effrenee au ma-

terialisme. II faudrait qu'elle renoue avec

une spiritualite authentique, e'est-a-dire

non religieuse. fondee sur le ternaire eso

terique Homme-Nature-Dieu, tel que les

Martinistes, les Rose-Croix et autres

Mystiques Le conqoivent.

Quelle est done leur conception de  Dieu ? 

Ils voient en Lui PIntelligence, la

Conscience, PEnergie. la Force - peu im-

porte le terme - qui est a 1'origine de la

Creation et qui Se manifeste a travers elle

selon des lois impersonnelles, immuableset parfaites. En fait, c'est dans I'etude et

le respect de ces lois que reside le bon-

heur auquel tous les hommes aspirent.

Mais encore faut-il qu'ils en aient

conscience et qu'ils agissent en conse

quence...

CC   [ Christian BERNARDO Souverain Grand Maitre

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   l

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DOSSIER__________________

L'enseignement martiniste

Une Heptade ma rtiniste de nos jours

L’enseignement martiniste est trans-

mis a la lois par ecrit. sous forme

de manuscrits, et oralement, lors

des reunions tenues dans les Heptades et

les Ateliers de I’O.M.T.

Precisons que c ’est la forme orale qui est

la plus con forme a la Tradition marti

niste, car elle s’ inscrit dans un processusinitiatique remontant a Louis-Claude de

.Saint-Martin. Parmi les sujets traites, ci-

tons, entre autres :

Le Grand Architecte de 1’Uni vers

L’Adam Kadmon

La Chute de I’Homme

Les origines de la Creation

Le Temple universel

Le Temple de Salomon

La Sophia

La science des nombres

Les arcanes de la Kabbale

L’Ancien Testament

Le Nouveau Testament

Les Evangiles apocryphes

Le Livre de la Nature

Le Livre de I’Homme

La mission du Christ

Les cycles de l’humanite

Le monde invisible

Les anges

La symbolique celesteL’alchimie des reves

La priere

La reintegration des etres, etc.

Dans leurs travaux, les Martinistes n’em-

ploient ni theurgie ni magie, car ils se

conforment a I’ideal du Philosophe In

connu : « Conduire I ’esprit de l'homme  

 par une voie nature lie aux choses surna-  

turelles qui lui appartiennent de droit, 

mais dont il a perdu totalement Tidee, 

soit par sa degradation, soit par I 'ins 

truction fausse de ses instituteurs ».

34 ACTUALITE DE L'HISTOIRE • HORS SERIE n°38

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LE M A R T I N I S M E

Le Temple de SalomonLe Temple de Salomon, dans ses aspects historique et symbolique, est une reference 

commune aux Martinistes et aux Francs-Magons. son etude fait partie de I'enseignement  de I'Ordre Martiniste Traditionnel. Pour I'illustrer, void un extrait de ce qui est dit a son sujet  

dans I'un des manuscrits qui lui sont consacres.

Comme le rapporte la Bible au pre

mier « Livre des Rois »  (chap. 5 a

9) ct au second « Livre des Cbro 

il iques »  (chap. 3 et 4), le Temple de Je

rusalem fut construit par le roi Salomon

vers 960 avant I'ere chretienne. D'apres

la tradition juive. il fut edifie sur le mont

Moriah, a I'endroit meme ou Abraham

etait sur le point d’offrir son fils Isaac en

holocauste. Ce Temple etait considere par

les Hebreux comme la dcmeure de Dieu

sur Terre. II ahritait Y  Arche d'Alliance,dans laquelle reposaient les Tables de la

Loi que Moi'se avait revues de rEternel,

sur le mont Sinai.

Pendant l'Exode, c’est-a-dire pendant le

peri pie qui raena le peuple hebreu

jusqu'en Israel, la Terre Promise. 1’Arche

sacree reposait dans le Tabernacle. Celui-

ci consistait alors en un temple demonta-

ble erige a 1'aide de tentes faites de

peaux, que Ton depla<;ait au rythme des

peregrinations. Lorsque David s’cm para

de Jerusalem, il y fit amencr I’Arche

d'Alliance et projeta de construire un

Temple permanent, digne de Dieu. Mais

rEternel rejeta ce projet, carce roi avaitfait couler trop de sang. Ce fut done son

fils, Salomon, qui avec 1'aide d’Hiram,

roi de Tyr. eut le privilege de mener a

bien cette construction.

D escription

Conlbrmement aux prescriptions donnees

par Dieu Lui-meme, le Temple de Salo

mon fut bati en pierres non taillecs, et

aucun outil de metal ne fut employe pour

sa construction. II s’apparentait a un bati-

ment rectansulaire de soixante coudees de

long et vingt de large, e'est-a-dire d'envi-

ron trente metres sur dix. Sa hauteur etait

de trente coudees, soit environ quinze me

tres. 11comportait trois parties distinctes.

D'abord le « Oidani »  ou « Vestibule  », en-

suite le « Hekal »  ou « Saint », et enfin le

«•Debir »  ou «•Saint des Saints ». Cet edi

fice etait de loin le plus imposant de toute

la ville de Jerusalem.

Chaque partie du Temple de Salomon

etait agencee d'une fa^on particuliere. Le

Vestibule comportait un vaste bassin de

bronze, la « Mer d'Airain  », destine aux

purifications corporelles. II etait aussi

dote d'un « Alltel des Holocaustes », sur

lequel on sacrifiait des animaux. On ac-

cedait a la partie suivante du Temple, leSaint, par un double portail en bois de cy

pres et d’olivier, decore de cherubins et

de palmes. De chaque cote de ce portail

se dressaient deux colonnes de bronze.

La reconstruction du second Temple. Extra it de «Suburbia elus sicut temp ore christi floruit» ,de Christian van Adrichom (1533-1585)

Celle de droite etait appelee « Yakhin »  et

celle de gauche « Boaz ».

Dans le Saint lui-meme se trouvait

Y« Autel des Ha rfit ms   », encadre d'un

cote par la <•<■Table des douze pains de  

 proposition   », et de Fautre par un «

Chandelier a sept branches ». Selon le «•

Livre des Rois  », le Saint etait separe du

Saint des Saints par des vantaux de bois.

Cependant, le « Livre des Chroniques »  

indique que les deux pieces etaient deli-

mitees par une tenture pourpre, brodee de

cherubins.

Derriere les vantaux ou la tenture qui

donnait acces au Saint des Saints se trou

vait Y« Arche d'Alliance ».  Elle avait

I'apparence d'un coffre dont le couvercle

etait orne de deux cherubins aux ailes de-

ployees. Elle etait sacree pour les He

breux, car ils consideraient que Yahve y

demeurait reellement. Seul le Grand Pre-

tre pouvait entrer dans cette partie du

Temple. II y penetrait une fois l'an. pour

prononcer le Nom divin et y venerer

TEternel. Mais avant de le faire, il devait

prendre soin de s'y preparer par des pu

rifications corporelles et spirituelles. En

cas d'impurete, il risquait en effet la

mort.

Le Temple de Jerusalem etait un edifice

magnifique construit avec les materiaux

les plus nobles, tel le bois de cedre et decypres. II etait recouvert d'or fin en de

nombreux endroits. Pendant le regne de

Salomon, il etait le cccur du culte israe-

lite, mais cette predominance fut remise

en cause peu de temps apres sa mort. En

effet. son fils Roboam. qui lui succeda en

931 avant 1'ere chretienne, avait un ca-

ractere impulsif, et son arrogance en-

t rain a la separation des douze tribus

d'Israel. Durant cette periode de division,

d'autres lieux de culte. comme Bethel ou

Dan. concurrencerent le Temple de Jeru

salem. On y raviva le culte du Veau d'or

et les anciens rites y etaient meles a celui

de Yahve.

Le royaume d'Israel resta longtemps di

vise. Cinq annees a peine apres le debut

du regne de Roboam. le pharaon Che-

chanq profita de la situation p<^)ur s'em-

parer de Jerusalem et pilier le Temple.

Mais le coup fatal fut porte par les Baby-

loniens. En 605 avant Jesus-Christ, Na-

buchodonosor, roi de Babylone, lan<;a

une expedition contre Jerusalem. En 601,

le Temple fut saccage, les colonnes bri-

sees et une partie du mobilier emportee a

Babylone. ou de nombreux Juifs lurent

deportes quelques annees plus lard. Puis

en 586, Nabuchodonosor detruisit totale-

ment le Temple. On rapporte cependant

que peu de temps avant ce drame, le pro-

phete Jeremie cacha I'Arche d'Alliance

dans une caverne dont il seel la I'entrec.

Alors qu'il etait parmi les exiles a Baby

lone, le prophete Ezechiel, qui avait pre-

dit la destruction du Temple, en revela lacause : Dieu avait voulu punirson peuple

devenu idolatre et infidele. Mais le pro

phete avait annonce aussi qu'un nouveau

Temple serait construit un jour a Jerusa-

FEVRIER - MARS 2010 35

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DOSSIER

lera ct qu'il aurait la forme d'un carre

(Ezechiel, ch. 40-48). Effectivement, la

Bible rapporte que Cyrus, roi de Perse, se

rendit maitre de Babylone en 539 avant

notre ere. Souverain ambitieux mais to

lerant, il rendit aux Juifs leur liberte et

leurs biens spolies par les Babyloniens.

Ainsi, apres avoir ete exile pendant

soixante-dix ans, le peuple d'Israel revint

a Jerusalem et, sous I'impulsion de Zo-robabel, entreprit de batir un nouveau

Temple. Mais les conditions avaient

change ; la paix et 1'allegresse ne re-

gnaient plus dans la Ville sainte comme

jadis a l'epoque de Salomon. Ce

deuxieme Temple fut done construit dans

I'agitation. Confrontes a de multiples

dangers, les ouvriers etaient plus occupes

a se defendre qu'a construire.

C o n s tr uc t i o n

Alois que les materiaux du premier Tem

ple avaient ete tires des contrees les plus

riches et assembles sans aucun outil en

metal, il n'en fut pas de meme pour le second Temple. Les ouvriers furent obliges

de creuser le sol pour extraire les debris

de 1'ancien edifice, et le batiment qu'ils

parvinrent peniblement a eriger etait tres

imparfait. Sa construction s'acheva la

sixieme annee du regne de Darius, vers

515 avant Jesus- Christ. Bati sur le meme

plan que le precedent, il etait de dimen

sions plus modestes, et le Saint des Saints

etait vide, car 1'Arche d'AUiance avait

disparu. Beaucoup plus tard, lorsque la

Judee passa sous la domination romaine,

Herode decida de lui rendre son prestige

d'antan. Flavius Josephe rapporte que dix

mille hommes furent employes a cette

fin. Le Temple de Jerusalem retrouva

alors une partie de sa splendeur. Cepen

dant, le peuple hebreu n'avait plus la

meme ferveur qu'autrefois. A ce sujet.chacun sait que Jesus chassa les mar-

chands hors du Temple en leur disant :

« 11est ecrit : "Ma maison chit etre une  

maison de priere". Mais vous, vous en 

faites un repaire de brigands »  (Mt 21,

12-13). Bien des annees apres la mort du

Christ, les Juifs de Palestine se revolte-

rent contre Rome. En I'an 70, Titus mit

un terme a cette rebellion. II fit detruire

Jerusalem et le Temple fut incendie. De-

puis cette epoque, seul le soubassement

de la muraille occidentale subsiste ; c'est

le fameux « Mur des Lamentations ». 

Apres avoir evoque les grandes etapesayant marque la vie du Temple de Jeru

salem, voyons maintcnant comment la

Tradition martiniste les interprete. Jean-

Baptiste Willermoz insiste sur le fait que

ces etapes ne doivent rien au hasard, car

el les sont en correspondance avec la

Creation et avec l'homme lui-meme.

Ainsi, la construction du premier Temple

represente I'emanation du premier

Homme. Pour s'en convaincre, il suffit de

noter qu'il fut edifie sans outil de metal,

a 1'instar du corps primitif d'Adam. qui

fut cree sans operation materielle. Par ail-

Ieurs. comme vous l'avez appris dans le

degre Associe, la Creation, appelee aussi« Temple Universel  », comporte trois par

ties : Le Monde terrestre, 1’Immensite ce

leste et lTmmensite surceleste. Or,

chacune d'elles correspond a une partie

du Temple de Salomon : le Monde ter-

5O

restre au Vestibule ; 1'Immensite celeste

au Saint, et 1'Immensite surceleste au

Saint des Saints.

Tout comme le Vestibule est 1'endroit oil

I'on offre des sacrifices, le Monde ter

restre est le lieu oil I'on doit se purifier

pour s'elever vers des plans de

conscience superieurs. Par ailleurs, tout

comme le Saint comporte un chandelier a

sept branches, 1'Immensite celeste est

marquee par le septenaire et correspond

aux sept planetes traditionnelles. Ajou-

tons qu'elle est le monde de la Reconci

liation auquel accedent ceux qui selivrent a un veritable travail spirituel. ce

travail etant symbolise par l'Autel des

Parfums. Quant a la troisieme partie du

Temple, le Saint des Saints, elle corres

pond a 1'Immensite surceleste, laquelle

est la partie mediatrice entre 1'Immensite

divine et le reste de la Creation univer-

selle. C'est pourquoi on y trouve I'Arche

d'AUiance.

Sy m b o l i s m e

Les trois parties du Temple de Salomon

sont egalement en relation avec les trois

parties de l’homme, a savoir, nous le rap-pelons, I’abdomen, la poitrine et la tete.

L*abdomen correspond au Vestibule du

Temple de I'Homme, le lieu des sacri

fices et des purifications qui lui sont ne-

cessaires pour parvenir a maitriser sa

nature corporelle. La poitrine est associee

au Saint du Temple de I’Homme, la oil se

trouve l'Autel sur lequel il doit offrir quo-

tidiennement des parfums a la Divinite,

c‘est-a-dire des prieres. C'est grace a ce

travail spirituel qu'il peut allumer pro-

gressivement les sept luminaires du

Chandelier, qui symbolisent les sept ni-

veaux spirituels conduisant a la chambre

superieure de son Sanctuaire interieur.Enfin, la tete correspond au Saint des

Saints, car c'est par la pensee que

l'homme peut. apres avoir sanctifie son

cceur, communier avec la Lumiere divine.

II faut noter egalement que le nombre 6

marque la construction du Temple de Sa

lomon. En effet. il fut bati en six annees,

et c'est au cours de la septieme que

1'Arche d’AUiance fut placee dans le

Saint des Saints, a la Gloire de Yahve. Or.

comme cela est indique dans la Genese.

le processus de la Creation s'echelonna

sur six Jours, au terme desquels elle fut

sanctifiee. Selon la Bible, l'homme lui-

meme fut cree le sixieme Jour. Par ail

leurs, Martines de Pasqually considere

que le Temple de Salomon symbolise

l'homme avant la Chute, lorsqu'il posse-

dait un corps glorieux et vivait en pre

sence de Dieu. Par sa desobeissance, il

perdit ce corps glorieux, ce premier Tem

ple dans lequel residait 1'Esprit divin. la

veritable Arche d'AUiance en lui. C'est

alors qu'il fut revetu d'un corps de ma-

tiere, d'un second Temple qu'il doit

maintenir en etat par ses propres efforts,

avec toutes les epreuves et tous les sacri

fices qui en resultent.

Pour les raisons qui vous ont ete expli-

quees dans ce manuscrit, le Temple de

Salomon est un symbole fondamental

dans la tradition judeo-chretienne. Pour

Louis-Claude de Saint-Martin, il symbo

lise en effet le cheminement de l'homme

depuis ses origines et represente sur Terre

le Temple universel, a propos duquel il

dit dans son livre le « Tableau NatureI »  :

« C'etait lui peindre sa destinee sous des  

couleurs vives, que de lui representer  

I' Uni vers comme un grand temple, dont  

les as tres sont les flambeaux, dont la  

Terre est I ’autel, dont tous les etres cor-  

 porels sont les holocaustes et dont  

l'homme est le sacrificateur. IJar la, il   pouvait recouvrer des idees profondes  

sur la grandeur de son premier etat qui  

ne I'appelait d rien moins qu'a etre le  

 pretre de TEternel, dans TUnivers ».

Le Temple de Jerusalem , reconstruction d’apres de s documents d'archives

36 ACTUALITE DE L'HISTOIRE • HORS SERIE n°38

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DOSSIER

moire illimitee ou tout est grave de ma

niere indelebile. C'est un depot de toute

1'experience humaine ancestrale, accu-

mulee depuis des millions d'annees.

Enfin, c'est aussi notre centre spirituel,

le centre de la veritable intelligence, du

pouvoir et de la sagesse. II est par-dessus

tout notre meilleur serviteur. Mais com

ment 1'inconscient est-il structure pour

avoir autant d'attributs ?

L'inconscient est constitue de « couches »  

ties vastes qui s’ interpenetrent les unes

les autres. L'une. denommee « incons-  

cient personnel », renferme notre histoire

individuelle. nos experiences vecues, nos

complexes pathologiques et nos refoule

ments. L’autre appelee « inconscient col 

lect if» , contient les experiences

emotionnelles de toute l'humanite, ainsi

que les pulsions instinctives et animales

remontant a des millions d'annees. On la

designe sous le nom d'« inconscient col- 

lectif »% parce qu'il a des contenus et des

modes de comportement qui sont lesmemes partout, et chez tous les individus.

C'est le reservoir des grands mythes. des

contes, des rites, etc. C'est de la que jail-

lissent les symboles universels portant le

nom generique d'« archetypes ».  De

toutes ces couches, seul l'inconscient

personnel est susceptible de reveler des

maladies, notammcnt des nevroses.

L es  a r c h e t y p e s

Comme on vient de le souligner, les ar

chetypes, en tant que contenus de 1'inconscient collectif, sont des depots ou

une accumulation de tout ce que I'huma-

nile a vecu, en remontant jusqu'a ses plus

obscurs commencements. II ne s'agit ni

d'un depot mort, ni d'un champ de

mines, mais d'un systeme de reactions et

de disponibilites qui determinent la vie

individuelle par des voies invisibles. Ce

sont done des types ties anciens ou.

mieux encore, originels, e'est-a-dire des

images universelles presentes depuis tou

jours.

Jung a identifie de nombreux archetypes

situes dans un champ independant du

temps et de l'espace. Parmi ceux-ci, il adesigne l'archetype qui influence le rap

port de notre moi avec le monde exte-

rieur. sous le nom de « Persona », 

e'est-a-dire le « masque »  que nous lais-

sons apparaTtre de nous-memes. Pour lui

« la Persona est ce que quelqu 'un n 'est  

 pas en realite. mais ce que lui-meme et  

les autres pensent de lui ».  Elle n'est

qu'une realite secondaire liee au fait que

nous avons un nom. un titre, une charge

ou une fonction dans la vie. C'est tout

simplement notre ego. II parlera aussi de

l'archetype de V«Ombre ». Selon Jung.

« L'Ombre est la partie psychique de  

nous-memes qui n'est pas dans la lu -

miere du conscient, parce qu 'elle est tom-  

bee dans l'inconscient ». En psychologic

des profondeurs, 1'Ombre correspond a

1’aspect sombre et negatif de notre per-

sonnalite, e'est-a-dire a nos propres de-

fauts. Notre Ombre est aussi parfois ce

que nous n'aimons pas chez autrui, ce qui

chez lui genere de 1'hostilite et qui n'est

en realite que le reflet, la projection, de

ce que nous sommes nous-memes.

Jung a egalement cree les concepts

d'« Animus »  et d'« Anima »  pour desi

gner ce qui influence le rapport du moi

avec le monde interieur. L'Animus est la

personnification de la nature masculine

de l'inconscient de la femme, tandis que

1'Anima personnifie la nature feminine

de l'inconscient de l'homme. L'Anima

correspond a des qualites tel les que 1'in

tuition. Ia sensibilite, la receptivite, etc.,

alors que 1'Animus correspond a des qua

lites comme 1'autorite, la fermete, la ri-

gueur, la force. Enfin, selon Jung, tous

les archetypes ont en leur centre un ar

chetype de l'ordre et de la totalite de

l'homme, le Soi, e'est-a-dire le Moi

divin. le Maitre interieur, le Guide spiri-

tuel. Jung a ecrit a ce sujet : « Le Soi est  

non settlement le centre, mais aussi le pe-  rimetre qui inclut conscient et incons 

cient ; il est le centre de cette totalite  

comme le moi est le centre de la  

conscience Le Soi est aussi le but de 

la vie. car il esl I'expression la plus com 

 plete de ces combinaisons du destin que  

I'on appelle un individu ».

A cette etape de notre expose, nous pou

vons faire deux observations impor-

tantes. La premiere concerne la structure

de notre conscience humaine qui, au lieu

de former un ensemble coherent, uni et

harmonieux, est au contraire composee

d'entites Ires distinctes. Jung parle d'une« scission de I ’ame qui engendre le mal  

en nous, I ’angoisse, le gardien du seuil  

qui nous empeche de retablir   /’harmonic  

entre ses differentes parties ». Le but du

processus d'individuation est precise-

ment de parvenir a 1'union harmonieuse

entre les differentes composantes de la

psyche et d'etre a 1'unisson avec soi-

meme. « Cette re-unification,  nous dit

Jung, consecutive aux differentiations an-  

terieures necessaires, procede par  

conjonction d'opposes, oil I'unite est af-  

firmee en meme temps que maintenue la  

difference des elements ».

L a m e   h u m a i n e

La deuxieme observation concerne la na

ture spirituelle double de l'homme. En

effet, celui-ci possede une Ame divine

parfaite, le Maitre interieur. qui a sa

source dans la Divinite elle-meme, et une

ame individuelle imparfaite. qui traduit

le degre d'expression que nous donnons

dans notre vie courante aux qualites de

1'Ame divine. Mais ces deux energies ne

sont pas vraiment distinctes : elles s'in-

terpenetrent sur le plan vibratoire, et sont

indissociables. L'ame individuelle, le dis-A

ciple, evolue done au contact de l'Ame

divine, le Maitre. celle-ci infusant de plus

en plus de sa Sagesse a la premiere par

suite de 1'assimilation, par 1' individu, des

legons de la vie et de la transmutation de

ses defauts en leurs qualites opposees.

C'est pourquoi les anciens alchimistes,

explorateurs de la nature profonde de

l'homme, parlant en symboles ou en nie-

taphores, disaient que « Les excrements  

ou le fum ier sont la matiere premiere a  

 partir de laquelle on pent fabriquer le  

metal incorruptible ou or ». Le metal in

corruptible est l'ensemble des vertus spi-

rituelles de l'ame. C'est pourquoi ils

disaient aussi : « Ce qu'il y a de plus  

eleve en ce monde est a rechercher dans  

ce qu 'il  v a de plus bas ». Ainsi, lorsque

s’est produite la conquete de 1'Ombre et

la prise de conscience de 1'Animus ou de

1'Anima, le Soi surgit. d'une certaine ma

niere, dans le reve, sous forme symbo-

lique. C'est ce qui constitue I'un des

aspects fondamentaux du processus d'in

dividuation preconise par Jung, et que

nous allons aborder maintenant de ma

niere synthetique.

Tout le processus d'individuation peut se

resumer en une loi qui est a I'oeuvre dans

l’univers, dans la nature et dans l'homme

lui-meme. Les anciens alchimistesavaient coutume de le caracteriser en

trois mots : <•<mourir pour renaitre ». En

effet, le destin auquel est convie tout etre

humain qui se soumet au processus d'in-

C. G. Jung - par K arst d'Ottawa (CameraPress Londres)

38 ACTUALITE DE L'HISTOIRE • HORS SERIE n°38

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8/18/2019 Le Martinisme Dévoilé...

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LE M A R T I N I S M E

dividuation est celui de I'oiseau my-

thique : le Phenix. Selon la legende,

quand ce dernier sent ses forces le trahir,

il se prepare un bucher, se pose dessus, y

met le feu et se consume. Au milieu de

ses cendres, on voit apparaitre, au bout

d'un certain temps, un ver qui est le

serme du Phenix renouvele. Le Phenix

s'embrase done au feu de I'immortalite

pour se regenerer. Le paradoxe residedans le fait que ce qui le fait mourir est

aussi ce qui le fait revivre, a I'image de la

crucifixion de Jesus sur la Croix, pour les

Chretiens. De meme, nous devons, non

pas tuer le « vieux mi  », notre ego, mais

le transmuter, et faire germer a sa place

les vertus spirituelles de l'Ame parfaite

en nous.

T rois   e ta p e s

Selon Jung, le processus d'individuation

comprend trois etapes essentielles : 1'ana

lyse, la confrontation avec 1'Ombre, et la

confrontation avec 1' Anima ou V  Animus.

Uanalyse est ce qu'il appelle « la grande   psychothempie  » menant a la realisation

du Soi. Elle est « I'action de delier, de  

dissoudre la conscience en ses differents  

elements constitutes ». C'est aussi le pre

mier grand arcane de la psychologic des

profondeurs, que Jung nomme « la dis 

solution de la conscience »  ou la reduc

tion du sujet en la Materia Prima. II

compare cette etape a la premiere grande

operation alchimique appelee « Putre 

faction »  ou « Nig redo  ». Jung est venu a

l'alchimie alors qu'il etait deja bien

avance dans son experience interieure.

Cela lui a permis de rapprocher, sans les

confondre, les deux langages : celui de

l'alchimie et celui de la psychologic mo-

derne.

La deuxieme etape. celle de la confron

tation avec 1'Ombre, la partie cachee de

notre inconscient, est le trait distinctif de

la psychologic des profondeurs. Ce stade

de I'oeuvre correspond d'abord a la prise

en consideration de nos defauts, puis a

leur transmutation en leurs vertus oppo-

sees. C'est done 1'etape de la Purifica

tion, dont les grands psychologues

connaissaient 1'importance et qu'ils nom-

maient la « voie purgative  ». Dans la ter-

minologie de Jacob Boehme. inspiree de

la Kabbale. c'est «l a colere de Dieu op-  

 posee a Son oeuvre ». Cette phase s?ac-

compagne de conflits provoques par la

mise en presence des opposes, que Jung

appelle la « collision des devoirs ».  En

effet, I'individu parvenu a cette etape fait

face a des litiges qu'il doit trancher seul,

sans reference, et s'expose aux critiques

de ceux qui I'observent sans soupgonner

son drame interieur. « La collision des  

devoirs , dit Jung, est la pierre de touche  

de I'individuation ». C'est par ce moyen

que s'opere le passage a un degre supe-

rieur de conscience, la naissance du Soi.

La confrontation avec 1'Anima, troisiemeetape du processus d'individuation, a

pour equivalent chez la femme le dia

logue avec 1'Animus. Pour Jung, la ren

contre avec l'archetype de 1'Anima est

une phase capitale de revolution spiri

tuelle. « Si,  dit-il, I'explication avec  

I'Ombre est I'a'uvre de I'apprenti et du  

compagnon, I'explication avec I'Anima  

est !'<i'uvre du Maitre ». En effet. la rela

tion avec I'Anima est une veritable

epreuve du feu et du courage pour les

forces spirituelles et morales de

l'homme ; car affronter 1'inconscient.

c'est en quelque sorte « prendre la liter  et exposer sa barque aux tern petes ». 

Dans la vision de 1'Hermetisme. cela cor

respond aux « Noces chymiques »  ; polit

ies alchimistes, c'est 1'union du Soufre et

du Mercure, derniere etape du Grand

CEuvre.

Le processus d'individuation, tel que de-

crit par Jung a partir de son experience

personnel le, est done un processus mys

tique, puisqu'il debouche sur l'expe-

rience de fusion intime avec le Divin en

nous. Comme telle. 1'individuation est

necessairement un processus spirituel

long et eprouvant, car le centre de l'Ame

humaine est un « mystere indicible ».  Ace propos, nous pouvons nous souvenir

de 1'episode allegorique de la Bible,

lorsque, sur le mont Sinai, Moise de-

manda a I'Eternel de lui manifester Sa

gloire. Dieu lui repondit : « Nul ne pent  

me voir et vivre ». Moise ne fut admis a

contempler que la trace de Dieu. Son re

flet ou Son image, depuis le creux d'un

rocher. C'est la raison pour laquelle Jung

declare ne vouloir se borner qu'a decrire

et a interpreter les images ou symboles

par lesquels le Soi apparait dans la

conscience, et principalement dans les

reves. C'est ce qu'il appelle la « voie lut-  

mide »,  par opposition a la voie dite

« seche »  ou « obscure », sans images, de

certains anciens alchimistes qui se met-

taient directement aux prises avec les ex

plosions provoquees par le feu intense

dans le fourneau appele « athonor »,  ici

le corps humain.

L es  r e v e s

Dans la pratique, le processus d'indivi

duation s'appuie sur 1'interpretation des

symboles reveles par les reves. II com

prend essentiellement deux volets : I'un

theorique et I'autre pratique. Le volet

theorique est constitue par la lecture et le

commentaire des livres anciens, 1'inter

pretation de leurs maximes et de leurs

images archetypiques. C'est pourquoi

Jung a souvent insiste pour que les psy

chologues « aient une culture mytholo-  

gique et religieuse etendue »   ; nous

pouvons ajouter hermetique, car cette

culture est la base de la comprehension

du sens de certains reves. En effet, pour

Jung, un reve est une production natu-

rclle, au meme litre qu'un arbre ou une

flcur. Comme il se compose de symboles,

il offre un vaste champ a 1'interpretation.

Le symbole n'esl pas, pour Jung, une

simple allegoric ; il donne une image deI'inconscient a un moment determine.

Le volet pratique consiste a mediter sur

les symboles et les images fournis par les

songes et a les interpreter. L'ecole de

Jung preconise pour cela deux modes

d'interpretation des images oniriques :

I'amplification et I*imagination active.

Dans ce qui est appele « amplification », 

1'image rencontree dans un reve a en elle-

meme une place et une signification dans

l'ensemble de l'univers humain. Prenons

un exemple generalement cite a ce

propos : si je reve que je suis coupe enmorceaux et que je me limite a la

contemplalion de cette image, je risque

fort de ne retenir que son aspect sinistre

et tragique, etant alors situe sur le plan de

I'objet. Mais cette image peut symboli-

ser egalement un archetype. En effet, si

je me souviens du mythe d'Osiris, je sai-

sirai que cette mort peut etre une etape de

la transformation qui doit conduire a ma

resurrection, e'est-a-dire a ma renais

sance spirituelle ; ce faisant. je me situe

alors sur le plan du sujet. La plupart du

temps. les deux plans ne sont pas disso-

cies. II convient meme de les examinersuccessivement, car 1'exterieur est le re

flet de 1'interieur.

L 'i n d i v i d ua t i o n

En quoi consiste la methode de 1’imagi

nation active ? Elle a pour but de choisir,

a I'etat de veille. un fragment de reve ou

un phantasme, et a fixer librement son at

tention sur lui. Le sujet observe ainsi, en

temoin vigilant, le libre jeu des images

qui peuvent defiler sur l'ecran de sa

conscience, tout en exer^ant, s'il le faut,

des choix selon son inclination interieure.

II s'agit la d'une entreprise de longue ha-leine. Mais cela fait progressivement en

trer I'individu en contact avec des zones

de plus en plus profondes de son ume, et

avec les energies qui en emanent.

Cette etude sommaire du processus d'in

dividuation, loin de nous avoir emmenes

dans un univers inconnu. nous interpelle

sur deux points : le role dynamique de

1'inconscient dans notre vie. et 1'impor

tance que nous devons accorder a nos

reves. Mais comment tirer un enseigne-

ment de nos reves, sans recourir neces

sairement a toutes les techniques du

processus d*individuation qui ne nous

sont pas familieres ? Ce que nous devons

faire, c'est d'abord nous convaincre de

1'importance et du role des reves dans

notre vie ; puis chercher a nous en sou

venir aulant que possible et les noter dans

un cahier specialement destine a ce but ;

enfin, prendre, dans une ou plusieurs se

quences du reve, les images et les idees

qu'elles renferment, travailler sur elles,

chercher a comprendre la symbolique

qu'elles convoient, et ecrire ce qui nous

vient a I 'esprit par association d' idees.

Une fois le sens du reve compris, il faut

faire l'effort necessaire pour agir au quo-

tidien dans le sens du message qu'il ve-

hicule.

Jean Massengo 

FEVRIER-MARS 2010 39

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DOSSIER

De la Genese au Prologue de Jean

L'article ci-dessous est extrait de la revue Pantacle, publication annuelle de I'Ordre Martiniste Traditionnel. Cette revue, consacree a I'esoterisme et a la spiritualite 

occidentale, est destinee avant tout aux Martinistes, mais elle est accessible a toute personne interessee par les sujets traites.

La Genese presente deux recits de la

Creation qui different tant par leur

portee doctrinale que par leur style

litteraire. Le premier recit, celui des sept

jours de la Creation, appartient a la tradi

tion sacerdotale ; il a la forme d'un textc

destine a la proclamation liturgique. La

composition ordonnee est ponctuee de re

frains. C'est une veritable prose rythmec.

Des pieties de Jerusalem en auraient

commence la redaction avant l’exil a Ba

bylone, et la mise cn forme definitive da-

terait du retour d'exil.

Le second recit. oil « I'homme devint une  

dme vivante »,  adopte une expression

plus humaine, plus narrative, voire poe-

tique. II appartient a la tradition yahviste,

denomination en relation avec I’emploi

du tetragramme dans 1‘expression IHVH

(yhawe) Elohim. C'est 1'apparition de

cette expression qui permet de situer la

transition entre les deux recits, au milieu

du verset 4 du chapitre 2. Le recit sacerdotal situe rhomme dans I’univers ; le

recit yahvistae presente un decor deser-

tique transforme par Dieu en un jardin

luxuriant. Dans le recit sacerdotal,

I'homme n’apparait qu'au terme de la

creation de 1'univers, alors que le recit

yahviste presente I'homme dans sa rela

tion avec les animaux. la femme et Dieu.

G e n e s e , p r e m i er  r e c i t  

d e   la  C reation   (G en   1 - 2 , 4 a )

Nous n'aborderons que le premier recit,

le texte sacerdotal, qui est le plus riche du

point de vue symbolique. Ce recit de la

Creation est le premier de la Torah - ou

Pentateuque terme definissant les cinq

premiers livres de la Bible.

Ce texte etait certainement utilise pour la

liturgie et l'instruction, d'oii sa structure

qui facilite la memorisation. Le mouve-

ment est oriente vers la sacralisation du

septieme jour. ce qui nous permet de pen-

ser que ce texte etait destine a la celebra

tion d’une fete en l'honneurdu Createur.

A Babylone, une telle fete etait celcbrce

a l’equinoxe de printemps, en l'honneur

du dieu Marduk. Le poeme de la Crea

tion y etait lu le quatrieme jour.

Avant d'examiner le premier mot de la

Bible tysarb, arretons-nous sur sa pre

miere lettre : la lettre b (beith). C ’est la

seconde de 1'alphabet, associee au nom

bre « deux ». Symboliquement. elle nous

I

Saint-Jean sur I'ile de Patmos, p ar Berto d i Giovanni

indique l’entree dans la dualite. ce que

nous allons verifier. Beith est d'ailleurs

une lettre double, pouvant se prononcer

« V »  si elle n'est pas accentuce, ou « B »  

si elle comporte un accent appele da-

guesh. C'est ici le eas. Autrement dit, si

la lettre represente la dualite, ce point

d’accentuation place en son sein symbo

lise l'unite divine. La premiere lettre de la

Genese nous indique cicja que l'unite di

vine va se manifester dans 1’univers spa-

tio-temporel par la loi de dualite.

Si le premier mot tysarb commence par

la lettre b (beith). il se termine par la let

tre t (thaw), derniere lettre de 1'alphabet

hebreu. Symboliquement, « de h (beith)  

a t (thaw ) »  equivaut a notre expression

« de A a Z   ». En effet. s'agissant du

monde cree. la lettre a (aleph), represcn-

tant Dieu, ne peut y etre incluse.

40 ACTUALITE DE L'HISTOIRE • H O R S S E R I E n°38

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LE M A R T I N I S M E

Cc premier mot est t radii it de differentes

fagons : « Au commencement, en tete... ». 

Le mot hebreu signifie bien « commen 

cement, debut »  ou encore « principe ».

Ce que confirme la version grecque de la

Septante qui traduit par en arch, signi-

fiant « au commencement, a Vorigine, au  

 point de depart ».

La traduction rigoureuse, que Ton trouve

dans la version bilineue des editionsColbo, est : « Au commencement, Dieu  

avait cree le del et la terre ». Cette tra-

Gravure de Ra phael Sadeler; repr^sentant Dieu au centre de la Creation

duction respecte scrupuleusement le sens

de 1* accompli.

En hebreu, il y a deux formes verbales

majeures: 1'accompli et l'inaccompli.

Cette phrase traduit un paradoxe : com

ment le ciel et la terre etaient-ils deja

crees. au commencement ? Nous allons

tenter de repondre a ce questionnement.

Certes, la terre etait creee, mais la terre

etait encore a l'etat chaotique. C'est le fa-

meux tohu (et) bohu (whbw wht), qui as-

socie les deux mots triliteres : wht et whb.

wht associe la lcttre t (thaw) aux lettres h

(he) et w (waw), qui sont deux lettres ap-

partenant au tetragramme divin.

whb associe la lettre b (beith) aux lettres

h (he) et w (waw). qui sont deux lettres

appartenant au tetragramme divin.

Nous retrouvons encore la deuxieme et la

derniere lettre de 1'alphabet hebreu. qui

sont ici sacralisees par la presence des

lettres du tetrasramme divin. Ce tohu-

bohu incluait done la totalite du monde

en devenir. Ces deux lettres forment le

mot tb (fille). La Creation n'est-elle pas

1' engendree, la fille ?

Un peu de guematrie va encore nous

eclairer : wht vaut 6, whb vaut 4, leur to

talite vaut 10. qui symbolise la totalite. se

reduisant a 1. le Tout.

« Les teneb res etaient a la surface de 

I 'abime, et le souffle de Dieu plcmait stif 

les faces des eau.x ». Les deux premiers

versets presentent l’etat primordial en

core inorganise de la materia prima:

chaos, tenebres, eaux primordiales... Le

souffle de Dieu represente l'Esprit qui al-

lait mettre en ccuvre 1'action cicatrice par

la puissance du Verbe : « Dieu d it : Que  

la lumiere so it! ». Cette introduction du

premier chapitre de la Genese nous pre

sente les deux aspects du Divin dans le

monde manifeste : le passif et I'act if.

Nous comprenons mieux qu'au com

mencement. le ciel et la terre avaient deja

etc crees en substance, mais sans forme ;

crees certes, mais a l'etat chaotique. Tout

etait pret pour que commence l ’action or-

ganisatrice du Verbe, ou parole divine.

Les six jours des huit actions ci catrices

La Creation se deroule en six jours, le

septieme jour voit la consecration de

I'oeuvre achevee. En realite. nous obser-

vons huit actions cicatrices

. Creation de la lumiere et separation du

jour et de la nuit.

. Creation des cieux qui separent les eaux

d’en bas et les eaux d'en haut.

. Separation du sec et de 1'humide. de la

terre et de la mer,

. Creation des vegetaux,

. Creation des luminaires : soleil, lunc et

ctoiles,

. Peuplement des eaux et des cieux (pois-

sons et oiseaux),

. Peuplement de la terre,

. Creation de l'homme et attribution de la

nourriture.

Plus que des creations, les trois premieres

actions sont des separations le jour, de la

nuit - les eaux d'en haut, des eaux d'cn

bas - le sec, de 1’humide. Trois actions

qui manifestent 1’entree dans la dualite.

C'est cette entree dans la dualite qui per

met la manifestation de 1'univers spatio-temporel, par la mise en action de la loi

du triangle.

Le redacteur de la Genese tenait absolu-

ment a organiser la Creation suivant un

« Creation du ciel et de la terre, des arb res et herbes, des astres e t de tous les animaux », grav ure d e Je an Cousin, ex trai te de « F igures de la Bible »

L 'Im m e n s i t £ d i v i n e

« Avant le temps, Dieu emano des etres spiritue ls, pou r Sa propre gloire, dons son Immensite divine. Ces etres avaient a exercer un culte que la Divinite leur avait fixe par  des lois, des preceptes e t des commandements eternels. Ils etaient done libres et  distincts du Createur, et I'on ne peut leur refuser le libre arbitre avec lequel ils avaient  ete emanes, sans detruire en eux la faculte, la propriete et la vertu spirituelle et  

 personnelle qui leur etaient necessaires pour operer avec precision dans les bornes ou ils devaient exercer leur puissance. C'etait positivement dans ces bornes ou ces 

 premiers e tres spiritue ls devaient rendre le culte pour lequel ils avaient ete emanes. Ces premiers etres ne pouvaient nier ni ignorer les conventions que le Createur avait  

faites avec eux, en leur donnant des lois, des preceptes et des commandements,  puisque c'etait sur ces conventions seules qu'etait fondee leur emanation ».Martines de Pasqually,

«Traite sur la reintegration des etres» (Diffusion Rosicrucienne)

FEVRIER - MARS 2010 41

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8/18/2019 Le Martinisme Dévoilé...

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DOSSIER

schema hebdomadaire. C'est ties habile-

merit qu'il repartit les huit actions cica

trices en six jours. Nous devons observer

une correspondance entre les trois pre

miers jours et les trois derniers jours. Au

premier jou r correspond le quatrieme. au

second jour correspond le cinquieme et

au troisieme jour correspond le sixieme.

C'est ce que nous allons detailler main-

tenant.Le premier jour. Dieu cree la lumiere.

Une lumiere bien mysterieuse, puisqu'il

ne peut s'agir de la lumiere visible. En

effet, le soleil, la lune et les etoiles ne

sont pas encore crees. Cette lumiere ne

peut done etre que 1'energie primordiale

a 1’origine de toute manifestation. La se

paration lumiere/tenebres peut s'inter

preter comme 1'introduction de la bipo-

larite. Ce jour n'est pas appele premier

jour, mais «jour un »  ; ce qui est ties ju-

dicieux. Les nombres ordinaux ne peu-

vent s'utiliser qu’a partir de deux. Pour

qu'il y ait un premier, il faut au moins

deux participants. L'expression «  jour  

un »   precise que ce premier acte est

unique, qu'il est la manifestation du Un,

mais du Un qui inclut leTout.Trois jours plus tard cette lumiere origi-

nelle va se densifier avec 1'apparition du

soleil. de la lune et des etoiles. La dualite

est encore soulignee par 1'astre du jour et

l'astre de la nuit. Cenergie primordiale

du premier jour se manifeste par la lu

miere visible, trois jours plus tard.

Le deuxieme jour voit la separation des

Le  LIVRE DE L 'HOMME ET LE L IVRE DE LA NATURE

Dans leurs travaux, les Martinistes n'emploient ni theurgie ni magie, c ar ils se

conforment a l'id£al du Philosophe Inc onnu : « Conduire I'esprit de I'homme pa r  une voie naturelle oux choses surnoturelles qui lui oppartiennent de droit, mais dont il a perdu totalement I'idee, soit par sa degradation, soit par I'instruction fausse de ses instituteurs  ». Pour cela, il est inutile d'accumuler un savoir intellec-tuel, car «ce n'est pas la tete qu'il faut se casser, mais le coeur». Dans son travail, leMartiniste utilise deux livres : le «Livre de la Nature» et le «Livre de rHomme». Lanature est « la vraie come d'abondance pour notre eta t actuel... Elle est en effet le 

 point de rall iement de toutes les vertus creees ... Ainsi, toutes ces ver tus divines, ordonnees par le grand principe pour cooperer a la rehabilitation des hommes, exis

tent toujours autour de nous ». Cela signifie que Dieu a seme dans la na ture lessymboles de Sa sagesse, afin que nous puissions la d£c ouvrir par nous-memes.Aussi constitue-t-elle pour I'lnitie un immense reservoir de connaissances.Le « Livre de I'Homme » es t egalement essentiel pour le Martinis te. Selon Saint-Martin, rhomme est le «seul livre ecrit de la main de Dieu» ; c'est en lui que setrouvent ecr ites toutes les lois de I'univers, car «toutes les verites importantes etfondamentales (existent) dans tous les hommes avant d'exister dans aucun livre».La Connaissance n'est done accessible que par I'introspection, e'est-a-dire par le re-

tournement vers le centre de I'etre, le cceur, a propos duquel le Philosophe Inconnunous d it : « il est I'organe et le lieu ou se rendent toutes nosfaculte s e t ou elles manife sted leur action ; et comme ces faculte s tiennent a tous les regnes qui nous constituent, soit le corporel, le spirituel et le d i v i n , l e coeur est le rendez-vous et  I'expression continuelle de I'ame et de l'esprit». Ce retournement de I'etre vers son centre, cette contemplation interieure, correspond a la priere veritable, car elle «im- bibe notre ame de ce charme sacre, de ce magisme divin qui est la vie secrete de tous les etres ».

h 2r 

*

N  / 

7T\V

>

V

Dieu et Adam, par M ichel Ange

Schema de la Creation, de Jacob Boehme

eaux d'en haut et des eaux d'en bas, par

la creation des cieux. En hebreu. les eaux

et les cieux n'existent qu’a la forme

duelle. une forme grammaticale qui s'ap-

plique a tout ce qui est double - en he

breu moderne, les lunettes qui ont deux

verres et les bicyclettes qui ont deuxroues. Trois jours plus tard le cinquieme

jour, le ciel et les eaux sont peuples par

les oiseaux et les poissons.

Le troisieme jour marque le regroupe-

ment des eaux qui permet l’emergence

des terres. Mais c'est aussi le jour de

1'apparition des vegetaux. Trois jours

plus tard le sixieme jour, nous observons

aussi deux etapes : le peuplement de la

terre avec les animaux et la creation

d' Adam. Que les terres emergees le troi

sieme jou r se peuplent le sixieme jour,

c'est conforme aux correspondances deja

observees. Mais quelle correspondance

peut-il y avoir entre 1'apparition des vegetaux le troisieme jour et ce qui se pro-

duit trois jours plus tard ? Le sixieme

jour. Dieu precise qu'il a donne les vege

taux comme nourriture pour Adam et

pour les animaux terrestres.

Im p o r t a n c e d u  s y m b o u s m e

DU NOMBRE TROISCe premier chapitre est structure sur la

symbolique du nombre trois. Nous ve-

nons de voir la correspondance entre les

trois premiers jours et les trois jours sui-

vants. Le second jour manifeste une hie

rarchic a trois niveaux : les eaux d'en bas.

les cieux et les eaux d'en haut. Le troi

sieme jour, les especes vegetales creees

sont au nombre de trois herbes. grami-

nees et arbres. Le quatrieme jour, trois

sortes de luminaires apparaissent : le so

leil, la lune et les etoiles. Dans un premier

temps, il est precise qu'ils ont trois fonc-

tions : separer le jour de la nuit. scrvir de

signes pour fixer les fetes et illuminer la

terre. Dans un deuxieme temps, il nous

est dit qu'ils sont la pour trois raisons il

luminer la terre, presider au jour et a la

nuit, et separer la lumiere des tenebres.

Le cinquieme jour. Dieu donne trois or

dres aux poissons et aux oiseaux: fructi-fiez, multipliez et emplissez. Le sixieme

jour, trois formes de vie animale appa

raissent sur terre : le betail, les reptiles et

les betes sauvages. L'ordre est donne a

42 ACTUALITE DE L'HISTOIRE • HORS SERIE n°38

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8/18/2019 Le Martinisme Dévoilé...

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LE M A R T I N I S M E

Adam de fructifier, multiplier et emplir.

Le pouvoir lui est donne sur les poissons

(eau), sur les oiseaux (air) et sur les ani-

maux terrestres (terre).

Le but de ce texte n'est pas de presenter

une conception scientifique de la cosmo

gonic, mais d'etablir une hierarchic dans

la Creation. La Genese s'acheve par la

creation de l'Adam. La Septante traduit

par anthropos, qui n'a pas d’equivalent

en fran^ais : nous pourrions rendre son

sens par «■humanite »   ou « espece hu-  

maine ».  En traduisant par « homme », 

nous introduisons un concept sexue qui

n'existe ni dans le texte hebreu ni dans sa

version grecque. Ainsi. la precision «

homme et femme il les crea »   coule de

source. Adam est place au sommet de la

hierarchic : tous les etres vivants lui sont

soumis (Gen 1.26), et les vegetaux lui

sont donnes comme nourriture.

La creation de l'homme « I'image et a hi  

ressemblance de Dieu »  donna lieu a de

nombreuses interpretations. Dans soncommentaire de la Genese. Basile de

Cesaree explique ties bien cette dualile :

« Nous possedons I 'image par la Crea 

tion, mais nous acquerons la ressem 

blance par la volonte ».  En termes

martinistes, nous pourrions traduire :

1’ image est 1’effet de la Providence, la

ressemblance est le resultat de la volonte.

Ce texte accorde aussi une certaine pre

ference aux oiseaux et aux poissons. car

comme Adam, trois choses leur sont re-

servees : ils sont crees. ils sont benis. et

ils reqoivent l'injonction : fructifiez, mul-

tipliez et emplissez.

Les actions que ce texte attribue a Dieusont : dire, voir, nommer, faire, creer,

benir et separer. La seule perception ob

jective attribute a Dieu est ici la vision.

Mais parlant de Dieu, ne s'agit-il pas de

la vision interieure ou connaissance ?

ao

L'Evangile selon Jean confirme cette in

terpretation, lorsqu'il precise « que nul  

n 'a vu le Pere, si ce n est celui qui vient  

de Dieu. Lui (Jesus), il a vu le Pere »  

(Jean 6,46).

Le septieme. jour, la Creation est ache-

vee. Dieu benit et consacre ce jour. Cette

formule traduit bien la forme sacerdotale

de cc texte, destine a la liturgie.

La   p a r o l e   c r e a tr i c e

Dans la Torah, Dieu seul a le pouvoir de

creer. C'est par la parole que Dieu cree :

a neuf reprises, nous trouvons I"expres

sion «Dieu dit». Soit les huit actes crea-

teurs et l'attribution de la nourriture.

C ’est precisement ce theme de la parole

creatrice que nous retrouvons au premier

verset de la premiere page de 1'Evangile

selon Jean.

« Au commencement etait le Logos, et le  

Logos etait tourne vers Dieu, et le Logos  

etait Dieu ». Le mot grec logos corres

pond a l'hebreu dabar, qui signifie aussi

bien la parole que la chose. Le Logos se-rait la parole en acte, la parole creatrice

du premier chapitre de la Genese. 11est

le principe act if donnant forme au prin-

cipe passif, la materia prima. Les stoi-

ciens consideraient le Loaos commew

1'esprit du monde. Pour Phi Ion d'Alexan-

drie. le Logos est le lien de 1'uni vers, un

lien indestructible ; creature de Dieu. il

serait l'intermediaire entre Dieu et les

hommes.

Le quatorzieme verset du Prologue nous

precise que le Logos s'est fait chair. Au-

trement dit. en l'homme Jesus s'incarne

le Logos, la parole creatrice. Le prologue

du quatrieme Evangile presente done le-

schouah comme etant createur de toute

chose, e'est-a-dire le Grand Architecte de

I'Univers. Paul de Tarse avait deja re-

connu en Christ le createur de l'univers.

Dans I’epitre aux Colossiens, il dit :

« Tout est cree par lu i et pour lui »  (Col

1,16) et dans la premiere epitre aux Co-

rinthiens, il precise : « II n 'y a pour nous  

qu un seul Dieu, le Pere, de qui tout vient  

et vers qui nous allons, et un seul Sei 

gneur, Jesus Christ, par qui tout e.xiste et  

 par qui nous sommes »  (1 Cor 8,6).

Pour conclure sur la conjonction entre les

deux pages ouvertes, nous preciserons

que 1'Evangile de Jean et la Genese com-

mencent par la meme expression : « Au  

commencement ».  Une etude suema-

trique demontre que la valeur numerique

du premier verset de la Genese et du pre

mier verset du prologue de Jean traduit

en hebreu donnent le meme resultat :

2701, qui peut se reduire a 10 et done a 1.

Sa decomposition en produits de facteurs

se limite a une seule solution : 37 x 73

qui presente une tres belle symetrie a par

tir des nombres symboliques de la Ge

nese : trois et sept. Mais 37 et 73 sont

aussi les deux valeurs guematriques du

mot sagesse en hebreu : hmkx (8 + 20 +40 + 5 =73 et + 11 + 13 + 5 = 37).

Selon la cosmogonie sacerdotale. apres

avoir termine son ccuvre, Dieu semble se

rctrancher dans le repos sabbatique.La tentation d'Eve, par Wiliam Blake

« L'Ancien des jou rs », par William Blake

L'Evangile de Jean corrige cette vision enprecisant que Dieu est constamment a

1'oeuvre. Nous trouvons cette information

dans le recit de la guerison du paraly-

tique. lorsque les Juifs reprochent a Jesus

d'avoir accompli la guerison le jour du

sabbat. « Mais Jesus leur repondit: Mon  

Pere, jusqu ‘a present, est a I ’ouvre et moi  

aussi je suis a Touvre ».  (Jean 5,17.) II

est remarquable que cette precision soit

apportee a propels du sabbat. qui corres

pond a la sacralisation du septieme jour

de la Creation.

L ' e T U D E E T L A P R l f i R E

«L'etude sans la priere, a dit autre

fois un sag e, es t un v eritableatheisme, et la prier e sans V etude

une vaine presomption. C'est-a-direque celui qui croit pouvoir acquerirune vraie lumiere par I'etude et parla seule f orce de son applic ation,pense et agit c omme un a thee, etque celui qui presume que pour ob-

tenir la connaissance de la verite, illui suf fit de la demander dans sesprieres, sans faire aucun effort pour

la decouvrir et sans m editer sur sesvoies, n'est qu'un homme pr£somp-tueux, lache ou indifferent pour elle.

Le pr emier n' acquerra qu' unescience vaine et dangereuse ; Tautrerestera dans l'ignorance».

Jean-Baptiste Willermoz«Mes Pens^es et celles des autres»

La premiere page de la Genese et la pre

miere page de 1'Evangile selon Jean se

completent. L'une nous presente la vision

sacerdotale de la Creation, 1’autre nous

introduit au mystere de Ieschouah. GrandArchitecte de I’Univers, incarnation du

Logos et divin Reconciliateur.

Michel Armengaud 

FEVRIER-MARS 2010 43

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8/18/2019 Le Martinisme Dévoilé...

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L'Ancien et Mystique Ordre de la Rose-Croix

Depuis sa fondation, I'Ordre Martiniste Traditionnel est parraine par  I'Ancien et Mystique Ordre de la Rose-Croix. C'est ce qui explique pourquoi de nombreux  Martinistes sont egalement Rosicruciens. II nous semble done opportun de nous arreter  

sur l'A.M.O.R.C., qui constitue actuellement le mouvement rosicrucien le plus actif  dans le monde. A cet effet, nous avons demande a Serge Toussaint, Grand Maitre de 

la juridiction francophone, de nous le presenter. (II est aussi le Grand Maitre de la juridictionfrancophone de I'O.M.T.).

DOSSIER _______________

Dans la plupart des livres de refe

rence, I’Ancien et Mystique

Ordre de la Rose-Croix est defini

comme un mouvement philosophique,

initiatique et traditionnel. ouvert aux

hommes comme aux femmes, sans dis

tinction de race, de classe sociale et de re

ligion. Depuis toujours, il a pour devise

« La plus large tolerance dans la plus  

stride independance ». Pour comprendre

ce qu'il est, je pense que le mieux est

d'expliquer precisement en quoi il est

philosophique, initiatique et traditionnel.

N on   r e l i g i e ux

Mais avant de le faire, il me semble utile

de preciser que l'A.M.O.R.C. n'est pas

une religion, ce qui explique qu’il compte

parmi ses membres des personnes de

toutes confessions religieuses, parmi les-

quelles des Juifs, des Chretiens, des

Bouddhistes, des Musulmans, des Ani-

mistes, ou autres. En cela. il ne se rat-

tache pas a un Prophete ou un Messie tels

que Moise. Jesus, Bouddha ou Mahomet,

pour ne citcr que les plus connus. De

Une loge rosicruciennne

meme. son enseignement ne repose pas

sur un Livre sacre comparable a la Bible,

au Tripitaka ou au Coran. J’ajouterai

qu'il est depourvu de tout dogme, que ce

soit d'ailleurs sur le plan doctrinal ou

moral. Certes, son symbole est une Rose-

Croix, ce qui peut laisser supposer qu'il

est lie au Christianisme. II n'en est rien.

Pour les Rosicruciens, la croix represente

le corps physique de I’homme. Quant a

la rose, placee au centre, elle symbolise

son ame. Cela revicnt a dire que la Rose-

Croix, dans son ensemble, represente la

44 ACTUALITE DE L'HISTOIRE • HORS SERIE n°38

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LE M A R T I N I S M E

dualite de tout etre humain, cc qui fait

d'elle un symbole, non pas religieux,

mais traditionnel et universel. Cela etant,

l'A.M.O-R.C. est respectueux de toutes

les religions, au point que ses membres

restent entierement libres de continuer a

pratiquer celle de leur choix.

A propos de religion, je souhaiterais lever

une equivoque. On a tendance a penser

que toute personne qui croit en Dieu appartient necessairement a une religion.

Pourtant. on peut ties bien avoir la foi

sans suivre un credo religieux. Quant a

Dieu Lui-meme, on peut en avoir une

conception differente de celle qui est pro-

nee par les religions. C'est ainsi que les

Rosicruciens ne Le voient pas comme un

Surhomme siegeant quelque part dans le

ciel et decidant Seul de notre destinee.

Pour eux, Dieu S ’apparente plutot a TIn

telligence absolue qui est a Forigine de

toute la Creation et dont F Essence im-

pregne et anime tout ce qui existe. En tant

que tel. il est impossible de Le compren-

dre ou de Le connaitre. En revanche, onpeut etudier les lois par lesquellcs II Se

manifeste dans Funivers. dans la nature

et dans F homme lui-meme. Vous noterez

que cette conception de Dieu n’est ni

dogmatique ni partisane. et qu elle est

plus scientifique que religieuse. Le mys-

ticisme et la science ne sont d'ailleurs

nullement incompatibles. On peut meme

dire qu'il s'agit de deux voies comple-

mentaires de Connaissance, les mys

tiques s'interessant plutot au pourquoi

des choses et les scientifiques au com

ment

firent connaitre en Allemagne, en Angle-

terre et en France par trois Manifestes de-

venus celebres dans le monde de

Fesoterisme : la «  Fatna Fraternitatis », 

la « Confessio Fraternitatis »   et les «■

 Noces cliymiques de Chr istian Rosen-  

kreutz », publies respectivement en 1614.

1615 et 1616. De nos jours, on sail que

ces Manifestes, qui melent des recits a la

fois historiques et allegoriques, ont ete

rediges par un College de Rosicruciens

eminents : le fameux « Cercle de Tubin

 gen ».  Quelques annees plus tard, en

1623, une affiche placardee dans les rues

de Paris fit connaitre davantage FOrdre

de la Rose-Croix. Dans les siecles qui

suivirent. cet Ordre perdura sous des

formes et des appellations diverses. pour

finalement resurgiren 1909 sous le nom

dV Ancien et Mystique Ordre de la Rose- 

Croix ». Precisons que FA.M.O.R.C. pu-

blia en mars 2001 un quatrieme

Manifeste. la «  Posit io Fra tern itat is 

 Rosae-C rucis »,  que des historienscomme Roland Edighoffer et Antoine

Faivre situent dans la lignee des Mani

festes du X VIF siecle.

Mais s' il est un fait que les origines his

toriques de la Fraternite rosicrucienne se

situent au XV II0siecle, son heritage tra

ditionnel est beaucoup plus ancien.

puisqu'il remonte a I'Egypte antique. De

nos jours, nous savons qu’il existait dans

ce pays des ecoles regroupant des cher-

cheurs qui s’ interessaient aux mysteres

de Fexistence, d’ou leur nom d'« ecoles 

de mysteres ». Ces chercheurs, ces mys

tiques. elaborerent graduellement une

connaissance secrete, une gnose. qui se

repandit bien au-dela des frontieres egyp-

tiennes. C’est ainsi que des philosophes

grecs comme Heraclite. Thales, Pytha-

gore et bien d’autres, apres avoir etudie

de nombreuses annees en Egypte. fonde-

rent leur propre ecole de mysteres en

Grece. A leur tour, des penseurs de la

Rome antique etudierent les mysteres

grecs, eux-memes inspires des mysteres

egyptiens, et creerent egalement des cen

tres d'etudes dans leur pays. Par la suite,

cet heritage esoterique fut recueilli parA

les Alchimistes du Moyen-Age. puis par

les Rose-Croix de la Renaissance. Nous

voyons done que parallelement aux reli-

A p o u t i q u e

Outre qu'i l n'est pas une religion, il faut

savoir egalement que FA.M.O.R.C. est

totalement apolitique. Pour etre plus pre

cis, toute discussion politique est inter-

dite au sein de I'Ordre. Naturellement.

tout membre est entierement libre de ses

opinions et de ses actions dans ce do-

maine, mais il ne doit pas en faire etat

lors des activites rosicruciennes. Et c’est

precisement parce que I'Ordre est apoli

tique qu’ il reunit des personnes ayant des

opinions politiques differentes. parfois

meme opposees, sans que cela ne pose le

moindre probleme sur les plans relation-

nel et fraternel. Parailleurs, il encourage

ses membres a s'interesser au devenir de

la societe el a Fevolution du monde en

general. C'esl ainsi que nombre d'entre

eux s'impliquent a titre personnel dans

des associations diverses et s'investissent

dans des actions sociales, caritatives, etc.

En cela, ils ont a cceur d'assumer au

mieux leur role de citoyens.

Venons-en maintenant plus precisement

a ce qu'est FA.M.O.R.C., a savoir.

comme je l'ai indique en preambule, un

mouvement philosophique, initiatique et

traditionnel.

T r a d i t i o n n e l

Sur le plan purement historique, I'Ordre

de la Rose-Croix remonte au XV II0 sie

cle, epoque a laquelle les Rosicruciens se

Ce ma nifeste fu t sign6 d Bruxelles, en 1934, par les plus hauts resp onsable s de la F.U.D.O.S.I.II etablit officiellemen t que I'A.M.O.R.C. est pleineme nt habilite d perp£ tuer dans le monde

!'heritage de iau then tique Tradition Rose-Croix.

%'V I

FEVRIER - MARS 2010 45

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DOSSIER

gions clablics, une connaissance esote-

rique s’est transmise a travels les ages,

d’ecole dc mysteres cn ecole de mysteres.

Et dc nos jours, 1’A.M.O.R.C. cst Tun dcs

heritiers dc ccltc connaissancc seculaire,

d’oii son aspect traditionnel.

Sur Ic plan etymologique, rappelons quc

lc mot « tradition »  vicnt du latin « tm-  

dere  », qui vcut dire « trammettre  ». Ap

plique a l’A.M.O.R.C., ce mot serapporte a 1*heritage culturcl et spirituel

qu'il transmet a travers son enseigne-

ment. Or. comme nous venons de le voir,

cet enseignement cst ties ancien.

puisqu'il prend sa source dans FEgypte

antique, non sans avoir evolue au cours

dcs ages. Vu sous cet angle, le qualifica-

tif « traditionnel »  vehicule l'idee d'an-

ciennete et d'authenticite. II integre

egalement la notion de filiation. C ’est ce

qui explique pourquoi il existe de nos

jours peu dc mouvements veritablement

traditionnels. Quoi qu'il cn soit,

l’A.M.O-R.C. se rattache traditionnelle-

ment aux Rose-Croix du passe et seconsacre a perpetuer l'heritage qu'eux-

memes avaient re^u de FAntiquite, et ce

dans Fesprit humaniste et spiritualiste qui

leurest propre. Au XVIICsiecle, Michacl

Maier, Fun d'eux. disait d'ailleurs : « Nos  

origines sont egyptiennes, brahmaniques, 

issues des Mysteres d'E len sis et de Sa-  

rnothmce, des Mages de Ferses, des Fy-  

thagoriciens et des Arabes » 

Initiatique

Voyons maintenant en quoi 1'A.M.O.R.C.

est un mouvement initiatique. II Test par

le fait qu'il perpetue un enseignement

graduel. ponctue par dcs initiations. Dans

les siecles passes, cet enseignement etait

dispense oralement, dans des lieux tenus

secrets, afin d'eviter les persecutions re-

ligieuses ou politiques. C ’est pourquoi

l'Ordre de la Rose-Croix etait considere

jadis comme une societe secrete. Depuis

le debut du XX Csiecle, l'A.M .O.R .C.

s'apparente plutot a une organisation dis

crete et transmet son enseignement par

ccrit. Celui-ci se presente desormais sous

la forme de monographics adressees aux

membrcs d'une manierc confidcntielle.

Ces monographies, qui consistent en des

fascicules de quelques pages, s'echclon-

ncnt sur douze degres majeurs. De mois

en mois, d’annce en annce. dc degre cn

degre. chaque membre de l'Ordre est

done initio a ce que les Rose-Croix en-

seignent depuis des siecles sur les mys-

teres de V  existence. Ce processus

initiatique est particuliercment efficace,

car il permet aux connaissances acquises

de transcender I *intellect et de devcnir

une partie integrante de la conscience de

I’ame, cc qui est le but de toute quete ve-

ritablement mystique.

Quel est done le contenu de Tenseigne

ment rosicrueien ? Sans entrcr dans les

details, je dirai qu'il traite des grandsthemes auxquels les mystiques se sont

toujours interesses : la nature du Divin.

les lois de la Creation, I'origine et la fi

nal ite de l'univers. les concepts de temps

■Art-**A.MOXC |>W14

Symbole cr£4 par l'A.M.O.R.C . en 1998 d partir d'un dessin realise pa r Frangois M&rindier, d l‘occasion des Salons de la Rose-Croix tenus d Paris en 1893

et d'espace. la matiere en tant qu'energie

et substance, le but ontologiquc de la vie.

Fame humaine ct ses attributs, les phases

de la conscience et les facultes qui leur

sont propres, les phenomcnes psy-

chiqucs, Falchimic dcs reves, lcs mys

teres de la mort, de Fapres-vie ct de la

reincarnation, la science des nombres. les

symboles traditionnels, etc. Parallcle-

ment a ces themes d'etude, les monogra

phies integrent egalement des

experiences consacrees a Fapprentissage

dc techniques fondamcntalcs sur le plan

mystique, je pense notamment a la visua

lisation, la meditation, la regeneration.

Fevcil psychique. Fharmonisation as-

trale, la communion spirituel le et autres.

Rappelons que Fenseignement rosicru-

cicn n'a aucun caractcre dogmatique. Au-

trement dit, les explications donnces sur

tel ou tel sujet constituent davantage une

source dc reflexion qu'une verite a la-

quellc il faut absolumcnt croirc. Une telle

demarche cultive un esprit tolerant tout

en posant les bases d'une personnaiite in-

dcpendante dans le choix dc ses convic

tions philosophiques.

S'il est un fait que I'enseignement rosi-

crucicn se presente sous une forme ecrite

depuis le debut du XXCsiecle. il existe

dcs Loges chargees dc perpetuer F aspect

oral de la Tradition rosicrucienne. Ce

sont des lieux ou lcs mcmbres pcuvcnt se

reunir rcguliercment pour participer a des

46 ACTUALITE DE L'HISTOIRE • HORS SERIE n°38

   O   M   1

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DOSSIERLE MARTINISME

rA.M.O.R.C. n'est pas unc voie de

croyance, inais une voie de connaissance.

travaux collectifs et partager des mo

ments de fraternite. C ’est egalcment dans

ces Loges que sont transmises les initia

tions rosicruciennes. Etant donne qu*i 1

existe douze degres dans renseignement

de rA.M.O.R.C., tout membre qui le

souhaite peut done recevoir douze initia

tions dans le cadre de ses etudes. Si je

precise « qui le souhaite   ». c'est parce

qu'elles ne sont pas obligatoires, maisconscillees. Par ailleurst on n'est pas

oblige de se rendre dans une Loge pour

en beneficier. Partant du principe que

c'est en nous-memes que reside le plus

grand des Initiateurs, il est possible de les

effectuer chez soi, a l’aide d'une mono

graphic prevue dans ce but. Sans devoiler

le contenu de ces initiations, on peut dire

qu'elles consistent en des ceremonies

symboliques ayant trois buts majeurs :

admettre ritucllement le candidal dans un

nouveau degre, lui confier de nouvelles

cles esoteriques. lui permettre de com-

munier avec la partie la plus divine de

son etre. Precisons qu'elles n'ont aucuncaractere magique, theurgique ou oc-

culte, car la magie. la theurgie et l'occul-

tisme ne font pas partie des pratiques

enseignees dans I'Ordre, et sont meme

deconseillees.

P h i l o s o p h i q ue

II nous reste a voiren quoi l'A.M .O.R .C.

est un mouvement philosophique. Tout

d'abord. il faut rappelerque le mot « ph i 

losophic  » signifie litteralement « amour  

de la sagesse ».  Cela suppose que les

Rose-Croix sont des « amoureiux de la  

sagesse ».  Mais qu'est-ce que la sa-

gesse ? Bien qu'il n'en existe aucune de

finition dogmatique, je dirai simplement

qu'elle correspond a I’etat de conscience

de toute personne qui exprime dans son

comportement les vertus que Ton prete a

l'ame humaine, dans ce qu'elle a de plus

divin. Dans 1'absolu, est done sage celui

qui a eveille en lui la patience, la tole

rance, 1‘humilite, la generosite. le cou

rage. la bienveillance, la non-violence et

autres qualites que 1'on attribue a 1'intel

ligence du cceur. Autant dire qu'il y a peu

de Sages parmi les homines... Etant

convaincus que le but de tout etre humain

est de se parfaire, les Rosicruciens s'ef-

forcent done de devenir meilleurs, non

seulement pour leur bien-etre personnel,

mais egalcment pour celui des autres.

Comment ? En pratiquant I'alchimie spi-

rituellc, laquelle consiste a transmuter

chacun de nos defauts en sa qualite op-

posee. Comme vous l'aurez compris,

cette forme d'alchimie est la contrepartie

spirituelle de I'alchimie materielle que

pratiquaient les Alchimistes du Moyen-

Age, et dont le but etait de transformer

les metaux vils en metaux precieux, no-

tamment en argent et en or.

Mais si la definition premiere du mot

«- philosophic »   est « amour de la  sagesse  », elle est parfois definie comme

etant la « science de la vie  ». La encore,

cette definition s'applique parfaitement

au Rosicrucianisme, en ce sens que

Autrement dit, il n'est pas demande a ses

membres de croire aveuglement a ren

seignement qui leur est transmis. mais de

toujours le soumettre au crible de la rai

son et de 1’experimentation. En cela, la

philosophie rosicrucienne n'est pas spe

culative. mais operative, et le laboratoire

des Rosicruciens n’est autre que lemonde. C'est en effet au contact des au

tres qu'i ls appliquent la connaissance ac-

quise afin, precisement, d'en faire une

science de la vie utile au bien commun,

ce qui lui donne un caractere profonde-

ment humaniste. A ce propos, voici ce

que declara Francis Bacon, celebre Rose-

Croix du XVIItf siecle, pere de la metluxle

experimentale : « La plus grande erreur  

de toutes consiste a se meprendre sur le  

but veritable de la connaissance. car cer 

tains ne sont pousses vers elle que par  

une curiosite naturelle et un temperament  

avide de savoir ; d'autres pour entrete-  

nir dans leur mental la variete et un cer 

tain plaisir ; d'autres par ostentation et  

 pour etre bien consideres ; d'autres en 

core dans un but d'emulation et pour la  

victoire ; beaticouppour I'appat du gain  

ou pour gagner leur vie, et peu seulement  

 pour se servir du don divin de la raison 

dans I'interet de /'humanite ».

Nous venons de voir en quoi les Rosi

cruciens cultivent I'amour de la sagesse

et la science de la vie. Mais si 1'on com

bine ces deux definitions du mot « ph ilo 

sophie », on en obtient une troisieme, a

savoir « amour de la vie ». Trop souvent,

on croit que le mysticisme exige que 1'on

se prive des plaisirs legitimes de l'exis-

tence. Rien n’est plus faux. L'ideal est aucontraire de mener une vie equilibree, ce

qui suppose de repondre a la fois aux be-

soins du corps et aux aspirations de

l’ame. C'est precisement pour cette rai

son qu’un athee ou un materialiste ne

peut etre heureux a long terme, pas plus

qu'une personne qui se consacre cxclusi-

vcment a la spiritualite. Partant de ce

principe, l'A.M.O.R.C. laisse ses mem

bres entierement Iibres de vivre comme

ils l'entendent. ne les soumettant a au

cune obligation ni aucune interdiction. A

titre d'exemples, il ne leur demande ni

d'etre vegetariens. ni dejeuner, ni de pra-

tiquer 1’ascese, ni de s'abstenir de telle

ou telle chose. Mais aimer la vie. c'est

aussi la respecter sous toutes ses formes

et la preserver dans sa diversite. C'est

pourquoi les Rosicruciens accordent une

grande importance a I'ecologie. la nature

etant pour eux le plus beau des sanc-

Sigle de l'A.M.O .R.C. d epuis 1909, avec le nom de I'Ordre 4crit en latin(Antiqu us My sticusque Ordo Rosa e Crucis)

47 ACTUALITY DE L'HISTOIRE • HORS S£RIE n°38 FEVRIER - MARS 2010 47

     O     M     T

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LE MARTINISMEJ*   =S.

I

Dans ce symbole qui n'a aucune conno tation religieuse, la croix repr£se nte le corps 

 ph ys ique de I'ho mm e, et la r ose son Qme en  voie devolu tion. Quant aux douze lobes, Us 

symbolisent les douze degr£s majeurs del'A.M.O.R.C.

Cola ne vcut naturel lenient pas dire qu ’il

dctient la Verite el que quiconque suit son

enseignement est assure de tout connaitre

sur tout et de mener une existence de-

pourvue de tout probleme. Mais au moins

a-t-il le merite, independamment de 1’en

seignement qu'il perpetue. d’etre un vec-

teur de tolerance, d’harmonie et de paix.

C'est ce qui a fait dire : « Lame de la  

Rose-Croix fa il partie de celle, humaniste  

et spirituelle, de I ’Occident ; elle en est 

I ’un de ses joyaux etincelant de beaute. 

d 'amour et de purete ».

R o s i c r uc i e n   et   R o s e-C roix

II faut maintenant preciser un dernier

point. Comme vous l’avez certainement

remarque. je me suis refere tantot aux

Rose-Croix. tantot aux Rosicruciens. En

rcalite, ces deux termes ne sont pas syno-

nymes dans la Tradition rosicrucienne. Si

Ton veut etre precis, le mot « Rosicrucien  

»  designe un membre de l'A.M.O.R.C.. el

d'une maniere generate un etudiant du Ro-

sicrucianisme. Quant au mot « Rose-Cmix  

», il s'applique en principe a tout Rosicru

cien qui a atteint la sagesse, au sens que

nous avons defini precedemment. Dans

l’absolu, un Rose-Croix est done un etre,

sinon parfait. du moins proche de l’etat de

perfection, tel qu’on peut 1’exprimer sur le

plan humain. Tout comme il y a ties peu

de Sages parmi les hommes, vous com-

prendrez qu’il y ait tres peu de Rose-Croix

veritables...

Pour clore cette presentation de

l'A .M.O.R.C., j ’aimerais tout simple-

ment citer 1’extrait d ’un texte de Come-

nius, celebre Rosicrucien du XV IIC

siecle, considere de nos jours comme le

Pere spirituel de l’U.N.E.S.C.O. Cette ci

tation resume parfaitement ce qu’a tou-

jours etc 1’ideal Rose-Croix :

« Nous voulons que tons les etres hit -

mains, ensemble ou pris isolenient, 

 jeunes ou vieux, riches ou pauvres, no bles ou roturiers, hommes ou femmes, 

 puissentpleinement slnstruire et devenir  

des etres acheves. Nous voulons qu'ils  

soient ins fruits parfaitement et formes, 

non settlement sur tel ou tel point, mais  

egalement sur tout ce qui permet a  

I 'homme de realiser integralement son  

essence, d 'apprendre a connaitre la Ve 

rite, a ne pas etre trompe par des faux-  

semblants , a aimer le bien et a ne pas etre  

seduit par le mal, a faire ce qu 'on doit  

faire et a se garder de ce qu 'il fau t eviter, 

a parler sagement de tout avec tout le  

monde ; enfin, a toujours trailer les  

choses, les hommes et Dieu avec pru  

dence et non a la Iegere, et a ne jamais  

s'ecarter de son but: le bonheur  ».

Serge Toussaint  

Grand Maitre de l'A.M .O.R.C. et de 

ro.M.T.

BibliographieEt u d e s   :

ACTUALITY DE L’HISTOIRE,

numero special: Fratic-Magonnerie et  

Martinisme , mai 2002.

DACHEZ. Roger : L'invention de la  

Franc-Maconnerie, Vega. 2008.

FAIVRE. Antoine : L'Esoterisme  

au X V IIrnr siecle, Seghers. 1973.

JACQUES-LEFEVRE. Nicole :

Louis-Claude de Saint-Manin, un il-  

luministe au Siecle des Lumieres ,

Dervy, 2003.

JOLY. Alice : Un mystique lyonnais et  

les secrets de la Franc-Ma^onnerie, 

Jean-Baptiste Willermoz, Teletes,

2009.

LE PAPE, Gil les : Les ecritures ma-  

giques  -Aux sources du registre des  

2400 noms, d'anges et d ’archanges de  

Marlines de Fasqually , Arche Edidit,

2006.

MATTER. Jacques : Saint-Martin, 

le Fhilosophe inconnu.  Diffusion

Rosicrucienne. 1992.

RACZYNSKI, Richard : Dictionnaire  

du Martinisme . Dualpho, 2009.

VIATTE Auguste : Les Sources  

occultes du Romantisme, Illuminisme, 

Theosophie ( 1770-1820), Slatkine,

2009.

T extes

V1ARTINES DE PASQUALLY. Traite  

de la reintegration des etres , Diffu

sion Rosicrucienne. 1995.

SAINT-MARTIN. Louis-Claude de,

L'Homme de desir , Editions du Ro-

cher. 1979.

Le Nouvel-Homme, Diffusion

Rosicrucienne. 1992.

Le Ministere de I'Homme-Esprit. 

Diffusion Rosicrucienne. 1992.

Le Tableau naturel.

Diffusion Rosicrucienne. 2001.

Le Temple du cceur , Diffusion

Rosicrucienne, 2001.

Les Voies de la sagesse , Diffusion

Rosicrucienne, 2000.

Lett re d un am i ou Considerations  

 politiques, philosophiques, et religieuses sur la Revolution  

rangaise , Jerome Million, 2005.

Maximes et pensees , Andre Silvaire,

1963. 2003.

Les Nombres. Cariscript. 1983.

WILLERMOZ. Jean-Baptiste :

Traite des deux natures , Diffusion

Rosicrucienne, 1999.

CUVELIER-ROY. Xavier: Sursum  

Corda Trois entretiens sur les sciences  

secretes , Diffusion Rosicrucienne.

2003.

FEVRIER - MARS 2010 49

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par Wartinesde

Traite sur la

reintegration des etresdans leur premiere propriete,

vertu et puissance spirituelle divine

Le "Trait6 sur la reintegration» 

est I’un des livres essentiels

de I’esoterisme occidental. C’estaussi le texte fondamental du

Martinisme, une tradition qui

s'interesse au mysticisme judeo-

chretien. II traite des origines de

la Creation et du role des etres

qui I’habitent: anges et hommes.

D’une maniere generate, ce livre

montre la voie que I’homme en

exil dans le monde materiel doit

suivre pour reintegrer I’lmmensite

divine.

Realisee par Robert Amadou

d’apres le manuscrit personnel

de Louis-Claude de Saint-Martin

(1743-1803), cette publication est

la premiere edition authentiquedu celebre Traite de Martines de

Pasqually (17277-1774). II com-

porie un guide de lecture (table

analytique), ainsi que des index

qui en facilitent la lecture et

I’etude. En outre, cette edition est

actuellement la seule a integrer

le “ Tableau Universe!**. cl6 indis

pensable a sa comprehension.

Traite sur lareintegration des etres

dun* leur pmnii n proprklt*.

virtu el puisMince spirihidlt* divin?

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5 D

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Les voies de la sagesse

CEuvres posthumes

«Les voies de la sagesse» 

regroupe quatre textes de

Louis-Claude de Saint-Martin.

Contrairement aux autres livres

du «Philosophe lnconnu», ces

textes n’etaient pas destines

au grand public, mais a ses

freres martinistes des Loges

£lus-Cohens.

Ce livre aborde directement la

philosophie et la cosmogonie

martinistes. II est fondamental

pour comprendre la doctrine

de la Reintegration, laquelle

concerne I’exil de I’homme et

son retour vers le Divin.

Saint-Martin evoque egale

ment dans ce livre le role des

etres qui peuplent les diffe-

rentes spheres de la Creation :

mondes terrestre, celeste et

Les voies de la sagesse

(Euvres posthumes

Louis-Claude de Saint-Martin

COLLECTION MARTINLSTK 

\ k  £ : diffusion  VaoscRocnwNi