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Le magazine d’information de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire
N°07octobre2010
Le magazine d’information de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire
INTERNATIONAL
FAITS ET PERSPECTIVES
Les experts françaisexportent leur savoir
D’où vient l’uranium de la nappephréatique du Tricastin ?
Comment sensibiliser
les jeunes à laradioprotection ?
DÉBAT
sur les effets sanitairessur les effets sanitairesdes faibles doses?
la rechercheOù en estDOSSIER Où en est
la recherchesur les effets sanitairesdes faibles doses?
Les experts françaisexportent leur savoir
D’où vient l’uranium de la nappephréatique du Tricastin ?
Comment sensibiliser
les jeunes à laradioprotection ?
2Repères N°07 I octobre 2010
SYNOPTIQUE
cModes de transport et colis, risques, sûreté, réglementation: lanouvelle édition du livret Le transport de matières radioactives estdisponible sur le site www.irsn.fr en téléchargement. Les événementsmarquants et les chiffres clés ont été mis à jour. Il présente notammentla démarche de défense en profondeur dont les trois composantes secomplètent pour garantir la sûreté des transports : la robustesse des emballages, la fiabilité des transports et l’intervention en casd’incident ou d’accident.
RENSEIGNEMENTS :www.irsn.fr, rubrique Librairie
Le transport des matièresradioactives
expliqué
cUn nouveau dossier, comprenant de nombreuses vidéos, fait sonapparition sur le site de l’IRSN. Le thème: même si l’accident nucléai-re est peu probable, les pouvoirs publics le considèrent comme possible et souhaitent que les populations soient informées. Pour s’y préparer, le site montre et explique en images ce qu’il faut faireen cas d’accident, les comportements à adopter ou encore l’exercicede crise dans une centrale et l’organisation nationale de crise.
RENSEIGNEMENTS :www.irsn.fr, rubrique Base de Connaissances>Installations nucléaires>La sûreté nucléaire
Préparation virtuelle à l’accident nucléaire
c L’exposition itinérante Nucléaire et société fait escale à l’École desMines de Saint-Étienne au sein de La Rotonde, du 22 novembre au17 décembre 2010. Après onze ans de tournées en France, ce rendez-vous poursuit son information auprès du grand public à travers septthématiques: la radioactivité, les réacteurs nucléaires, le cycle ducombustible et les déchets radioactifs, l’environnement, la santé, lagestion de crise et l’accident de Tchernobyl. Une visite pédagogiqueet interactive gratuite et ouverte aux groupes scolaires de tout âge.
RENSEIGNEMENTS :Jacques Ney, expo.irsn.org/expo ou www.irsn.fr, rubrique Tous les sites
Saint-Étienne,prochaine étape
de l’exposition«Nucléaire et société»
c Le bilan annuel 2009 de la surveillance des travailleurs exposés auxrayonnements ionisants vient de paraître sur le site irsn.fr. Sous uneforme un peu nouvelle, prenant en compte des suggestions émisespar les parties prenantes (société civile, partenaires sociaux, utilisateursdu rapport…), il présente les résultats réactualisés des données concer-nant l’exposition des travailleurs : les personnels de santé, ceux de l’in-dustrie nucléaire et non nucléaire et aussi ceux des personnels navi-gants, naturellement exposés en vol aux rayonnements cosmiques.
RENSEIGNEMENTS :www.irsn.fr, rubrique Avis et rapports>Rapports d’expertise>Radioprotection de l’Homme
La radioprotectiondes travailleurs
à la une
3 Repères N°07 I octobre 2010
TEMPS FORTSUn laboratoire mobile permet desuivre in situ le personnel exposé 04
FAITS & PERSPECTIVESÉtude sur le site du Tricastin :d’où vient l’uranium détecté dans la nappe phréatique ? 06
DÉBATComment sensibiliser les jeunes à la radioprotection ? 14
INTERNATIONALUrgences radiologiques : les experts français exportent leur savoir 16
OUVERTURE À LA SOCIÉTÉ“ La radioprotection doit s’intégrer à la société et non l’inverse ” 17
ENJEUX & STRATÉGIEUne commission pour veiller à la déontologie 18
GOUVERNANCEQuelles sont les étapes de la surveillance radiologique 19
L e système international deradioprotection, applicable enFrance, repose pour partie sur
le concept de “ relation linéairesans seuil ” entre la dose reçue etl’excès de risque d’apparition d’uncancer. Ce concept est trèsprotecteur puisqu’il conduit à fixerdes valeurs très basses de doses.Mais il est anxiogène puisqu’illaisse entendre qu’il n’y a pas dedose sans effet. La question des“ faibles doses” hante le débatsociétal, alors même que desdépenses considérables sontconsacrées à la radioprotection. Or cette relation linéaire sans seuil
n’est pas scientifiquementdémontrée à des niveauxd’exposition très faibles. Ellerésulte d’une hypothèse : celle del’extension aux faibles doses d’unelinéarité constatée à des niveauxplus élevés. Elle laisse de côté laquestion des effets autres que lecancer. Les pays européens ontdécidé de joindre leurs effortspour tenter de répondre auxquestions sur les effets des faiblesdoses. C’est l’ambition de la plate-forme de recherche européenneMelodi, organisé par l’IRSN et leCEA, qui coopérera avec leschercheurs des USA et du Japon.
Repères – Éditeur : Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire – 31, avenue de la Division-Leclerc, 92260 Fontenay-aux-Roses – Tél. : 01 58 35 88 88 – Site Internet : www.irsn.fr – Courriel : [email protected]– Directeur de la publication : Jacques Repussard – Directrice de la rédaction : Marie-Pierre Bigot – Rédactrice en chef : Catherine Roulleau – Assistante de rédaction : Isabelle Cussinet – Comité de lecture : Michel Brière, Jean-Luc Pasquier – Assistance éditoriale, rédaction, secrétariat de rédaction, direction artistique et réalisation : Emapress – Iconographie : SandieChanchah Do Vale – Infographies : Art Presse – Impression : Galaxy (72) – Imprimé sur Cyclus print – ISSN : 2103-3811 – octobre 2010.
Explorer leseffets des
faibles doses
DOSSIER 08
Sommaire
Éditorial
O Ù E N E S T L A R E C H E R C H E S U R L E SE F F E T S S A N I TA I R E S D E S FA I B L E S D O S E S
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04. Le projet de construction d’un nouveau réacteurEPR à Penly a fait débat durant quatre mois.
06. Pour étudier l’origine de la pollution du site duTricastin, 4000 analyses ont été réalisées sur deux ans.
16. Des exercices d’urgences radiologiques sont réalisés à des fins pédagogiques pour des pays étrangers demandeurs d’expertise.
TEMPS FORTS FAITS & PERSPECTIVES INTERNATIONAL
Pour vous abonner au magazine, connectez-vous sur irsn.fr rubrique Publications
Jacques Repussard, directeur général de l’IRSN.
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IRSN
Marc Didier/EDF Olivier Seignette/Mikaël Lafontan/IRSN Pierre Gleizes/REA
L a Commission nationale de débat public a sollicité la participation de l’IRSNaux réunions publiques organisées pour le projet “Penly” qui concerne laconstruction d’un second réacteur EPR en France. Quatre mois de débat qui
ont permis aux citoyens de s’informer et de s’exprimer sur la construction de ceréacteur de nouvelle génération sur le site de Penly, en Seine-Maritime. “Je mesuis rendue à deux de ces réunions, en mars et mai derniers, prête à répondre auxquestions qui seraient adressées à l’IRSN par les personnes présentes”, expliqueKarine Herviou, responsable de la coordination du projet EPR à l’Institut. Domi-nique Boust et Julien Pommier, deux autres experts, ont participé à la réunion du5 juillet dernier pour y décrire l’impact sur le milieu marin des deux réacteurs àeau pressurisée de 1300 MWe en fonctionnement. L’IRSN a également réponduaux questions posées sur le site Internet du débat public. ■
chargé de la radioprotection auservice de médecine nucléaire duCHU d’Angers, “il permet de trou-ver des contaminations très faibles,de l’ordre de quelques becquerelsseulement”. Les mesures sontfiables et instantanées: “Jusqu’ici,nous devions effectuer un recueild’urines pendant 24 heures deuxfois par an et les envoyer à l’IRSNpour analyse”, explique FrancisBouchet. Ce système avait seslimites : les faibles doses de radio-nucléides disparaissaient entre leprélèvement et l’analyse. “Avec celaboratoire, ajoute Francis Bouchet,
l’agent s’allonge sur un lit pendant unequinzaine de minutes, le temps que lesdétecteurs vérifient la présence ou nonde rayonnement gamma issu d’éven-tuels radiocontaminants.” Cet équipe-ment est destiné à la surveillance dupersonnel qui manipule les substancesradioactives utilisées en médecinenucléaire. Jusqu’ici réservé aux situa-tions de crise, le laboratoire mobiledevrait être envoyé vers d’autres éta-blissements pour des campagnes demesure et améliorer ainsi le suivi destravailleurs exposés. ■
Radioprotection des travailleurs
Un laboratoire mobile permet desuivre in situ le personnel exposé
Projet EPR Penly
Informer avant de construire
TEMPS FORTS
I Agendac 18 au 20 octobre 2010L’Institut organise avec le CEA le deuxième congrès Melodi sur lethème des faibles doses, à la Maisoninternationale, à Paris.
c 19 octobre 2010Une journée intitulée “Le médecindu travail et la radioprotection dansle milieu médical ou vétérinaire”, estorganisée à Paris conjointement parl’IRSN et l’Institut national de recher-che et de sécurité.
c 25 au 29 octobre 2010La deuxième conférence de l’AIEAconsacrée aux défis à relever par lesorganismes techniques de sûreté(TSO) en matière de sûreté et de sécu-rité nucléaires, se tiendra à Tokyo(Japon). Organisée par l’Agence, elleest accueillie par le gouvernementjaponais et sera présidée par JacquesRepussard, directeur général de l’IRSN.
c 8 et 9 novembre 2010Le thème de l’innovation dans la sûre-té et la sécurité nucléaires est à l’hon-neur du forum Eurosafe 2010. Il setiendra à Cologne (Allemagne).
I En chiffre…
122 000 c’est le nombre d’internautesqui ont visité le site du réseau national de mesures de la radioactivitéde l’environnementwww.mesure-radioactivite.frà la fin juin 2010, soit quatremois après sa création. Ce site informe sur laradioactivité del’environnement en Franceet facilite l’accès auxrésultats de mesures.
4Repères N°07 I octobre 2010
Début septembre 2010, le servicede médecine nucléaire du CHUd’Angers (Maine-et-Loire) a
accueilli le laboratoire mobile d’anthro-poradiamétrie de l’IRSN pour unedeuxième série d’examens. Installédans un véhicule, ce laboratoire effec-tue des mesures directes de la conta-mination interne corporelle par desradionucléides émettant des rayonne-ments X et gamma. Ce matériel avaitété expérimenté l’an dernier auprès de23 salariés du même service. Manipu-lateurs en électroradiologie médicale,infirmiers, techniciens de laboratoire,préparateurs en pharmacie et radio-pharmaciens étaient concernés.Selon Francis Bouchet, radiophysicien
15 minutes suffisent pour mesurer la contamination interne.
Pour en savoir plus :www.irsn.fr, rubrique Prestations et formations>Prestations>Dosimétrie et radioprotection
Pour en savoir plus : www.debatpublic-penly3.org
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5 Repères N°07 I octobre 2010
En juin et juillet derniers, les unitésde recherche de l’IRSN ont reçu lesexperts de l’Agence d’évaluation de
la recherche et de l’enseignement supé-rieur (Aeres). Elle est chargée, en Fran-ce, de formuler un avis et des recomman-dations sur la qualité du travail effectuéau sein des établissements scientifiques.Quatre unités de l’Institut – spécialiséesrespectivement dans la radioprotection,l’environnement, la neutronique et leconfinement, la sûreté des réacteurs –ont été visitées et leurs personnels audi-tionnés pendant deux jours. Les rapportsd’évaluation sont en cours de publica-tion. Aux mois de novembre et décem-bre 2010, l’Institut sera à nouveau éva-lué par l’Agence, en tant qu’établisse-
ment cette fois. Les experts s’intéresseront à son mode de gouvernance, à sapolitique de recherche comme fondement de son expertise ou à la cohérencede sa vision stratégique. �
Évaluation scientifique
Estimer la qualité de la recherche
TEMPS FORTS
Un rapport d’évaluation des unitésde recherche de l’IRSN est en cours.
Les ponts roulants font l’objet d’essais.
I Telex Comme chaque année, la commission des thèses de l’IRSN,constituée d’universitaires et de chercheurs de l’Institut, a auditionné les candidats doctorants les 24 juin et 2 septembre derniers. Pour 2010, 28 dossiers ont été retenus.
En avril dernier, l’IRSN et son homologue italien ENEA ont signéun accord de coopération sur la sûreté nucléaire et la radioprotection. La définitiondu programme est en cours ; il comprendra notamment la formation du personnel etl’information du public.
Pour en savoir plus : www.irsn.fr,rubrique Actualités et presse
Il n’y a pas d’impact radiologique mesurable en France dû aux incendies en Russie. C’est laconclusion de l’Institut à la suite d’une surveillanceaccrue de la radioactivité de l’air réalisée sur leterritoire français entre le 20 juillet et le 20 août2010. Cette vigilance était justifiée par le risque que ces feux de forêts surviennent dans les zonescontaminées par l’accident de Tchernobyl, libérantdans l’atmosphère le césium 137 encore présentdans la litière et le bois des arbres. Selon lesconditions météorologiques, cette contaminationaurait alors pu être dispersée vers d’autresterritoires. Dès la fin juillet, l’IRSN a mesuré leséchantillons venant de stations permanentes desurveillance pour déceler une éventuelle élévationdu césium 137, même de faible ampleur. Un suivi de l’évolution des masses d’air, en coopération avec Météo France, a été aussi réalisé.
Incendies en RussiePas d’augmentation deradioactivité en France
C omment les ponts roulants situésà l’intérieur des bâtiments d’uneinstallation nucléaire se compor-
tent-ils en cas de séisme? Dans quellemesure ne risquent-ils pas de tombersur la cuve d’un réacteur ou d’endom-mager d’autres équipements? Ces sys-tèmes de manutention pour matérielslourds, qui circulent sur des rails situésdans la partie supérieure des bâti-ments, ont fait l’objet d’une étude ori-ginale. L’Institut a réalisé des essais surun modèle réduit représentatif, soumisà 200 tests de vibration sur la plusgrosse table vibrante de France, auCEA de Saclay (Essonne). Les résul-tats de cette analyse apporteront en2011 un éclairage précis sur le com-
portement des ponts roulants en casde séisme et permettront de dégagerdes enseignements pour les analysesde sûreté des structures des installa-tions nucléaires. �
Risques sismiques
Les ponts roulants testés
Slovénie en février 2009, Roumanieen juin 2010, Bulgarie en octobre2010… L’Agence internationale de
l’énergie atomique (AIEA) sollicite l’Ins-titut pour aider les autorités des paysde l’Est à élargir leurs pratiques decontrôle à des domaines nouveaux. Cesoutien passe par des séminaires et desréunions techniques pour informer cespays et développer des outils pratiques.“En confrontant les points de vue et endécouvrant différents contextes, on yapprend beaucoup” explique Jean-Marie Rousseau, adjoint au chef du ser-vice d’étude des facteurs humains àl’IRSN, qui participe à ces actions. Lanotion de “culture de sûreté”, née à lasuite de l’accident de Tchernobyl,insiste sur “la place de l’homme et desorganisations au cœur de la sûreté del’exploitation des centrales nucléaires”.Elle s’intéresse aux comportementsindividuels, aux pratiques managérialeset aux dispositions organisationnellesqui contribuent au maintien d’un hautniveau de sûreté. �
Facteurs humainsDévelopper la culture de sûreté
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pilote de cette étude. Nous venions deprésenter les résultats de cette étude àla Cligeet*”. Si l’incident de Socatri estvite “classé”, reste à expliquer l’origi-ne du marquage de la nappe phréa-tique. L’IRSN retourne sur le terrainpour mener l’enquête, avec Areva et lesDdass** du Vaucluse et de la Drôme.“Plusieurs campagnes de prélèvementssont organisées pour compléter lesrésultats précédents”, indique VincentRebour, ingénieur de l’IRSN impliquédans l’étude. Au final, plus de 4000 ana-lyses issues de quatre campagnes deprélèvements étalées sur deux ans.“C’est la première fois que nous obte-nons une cartographie aussi détailléed’un site”, témoigne Vincent Rebour. Les études se concentrent sur deuxzones qui présentent des teneurs enuranium plus fortes, au sud (zone 1) etau sud-ouest (zone 2) du Tricastin. Pourexpliquer ces anomalies, trois hypo-thèses sont étudiées. “La première : uneorigine géologique naturelle. Des ligni-tes, formations riches en uranium, pour-
Noak/Le bar Floréal/IRSN
Étude sur le site du Tricastin
D’où vient l’uranium détectédans la nappe phréatique?
Tricastin est le deuxième sitenucléaire le plus étendu de France.
Le 8 juillet 2008, le Tri-castin, site nucléaireentre Valence et Avi-gnon, fait la Une desjournaux. En cause :le déversement acci-dentel d’une solutioncontenant de l’ura-
nium, à Socatri, usine d’assainisse-ment et de récupération de l’uraniumet de traitement des effluents. Appuitechnique aux pouvoirs publics, l’IRSNdépêche le jour même une équipe d’in-tervention sur place. Des mesures sontréalisées pour évaluer la teneur enuranium des eaux de surface et denappe.Cours d’eau traversant le site, la Gaf-fière et le Lauzon sont surveillés de
Au sud du site nucléaire du Tricastin, la nappe phréatiquemontre, en certains points, une teneur élevée en uranium.L’incident, survenu dans l’usine Socatri en juillet 2008, ne peut en être à l’origine. L’IRSN mène l’enquête.
près. Les premiers prélèvements mon-trent des teneurs en uranium élevées,directement liées au rejet de Socatri,qui diminuent naturellement pourrejoindre le niveau habituel, soit 2 à 3microgrammes/litre, vers le 20 juillet.
Teneurs élevées dans lanappe… causes anciennesConcernant la nappe phréatique, enrevanche, le voyant rouge reste allumé,avec des teneurs ponctuelles constam-ment élevées au sud du site. Mais lesexperts de l’IRSN sont formels : larécente fuite est hors de cause. “Nousavions déjà identifié ces zones lorsd’une précédente étude menée de sep-tembre 2007 à juin 2008, raconte Jean-Christophe Gariel, expert à l’IRSN et
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Michel Gunther/Biosphoto
FAITS & PERSPECTIVES
Une équipe spécialisée de l’IRSNprélève des végétaux dans l’eau de surface de la Gaffière.
reviendra sur le sujet dans son pro-chain numéro. ■
Repères N°07 I octobre 2010
L’IRSN, Areva et les Ddass** n’ont pas travaillé seuls. Dans un souci de transparence, un groupe de suivi pluraliste a été mis en place en s’appuyant sur la Cligeet* ; soit près de 25 personnes d’originesdiverses (scientifiques, élus, associations de protection de la nature,représentants des autorités de sûreté…) se sont réunies à huit reprisesentre février 2009 et mai 2010. “Les résultats nous ont été présentés au fur et à mesure, et nous discutions des actions à mettre en œuvre ,témoigne Jean-Pierre Morichaud, administrateur de la Frapna (FédérationRhône-Alpes de protection de la nature) et membre du groupe de suivi.
Ce type d’initiative pluraliste est louable, mais elle ne doit pas noyer nos revendications, tient à préciserJean-Pierre Morichaud. De notre point de vue, le principal sujet d’inquiétude n’est pas le marquage en uranium de la nappe, mais les risques d’incidents graves liés au vieillissement des installations. Par ailleurs, la Cligeet*, à la demande de la Frapna, a demandé aux pouvoirs publics une étudeapprofondie sur les facteurs de risque de cancer du pancréas. En effet, une étude réalisée récemmentpar la Cligeet* a montré une incidence de ce cancer chez la femme.”
Pour Jean-PierreMorichaud (FrapnaDrôme), les débatspluralistes sontlouables.
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Un groupe de suivi pluraliste pour plus de transparence
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■ Site du Tricastin C’est le deuxième site nucléaire le plus étendu de France qui couvre650 hectares, sur trois communes (Bollène, Pier-relatte et Saint-Paul-Trois-Châteaux) et sur deuxdépartements (Drôme et Vaucluse). Il regroupe de nombreuses industries nucléaires d’Areva liéesà la transformation, l’enrichissement et la fabri-cation de combustible. Une centrale nucléaireEDF jouxte le site.
ZOOM
raient être en contact avec la nappedans la zone 2”, décrit l’ingénieur.Seconde hypothèse, vite écartée: uneorigine due à des activités humainesautres que celle du site du Tricastin.Reste enfin la troisième hypothèse, met-tant en cause les installations du cycledu combustible nucléaire du site duTricastin. C’est à grand renfort d’hydro-géologie – études des eaux souter-raines– que cette troisième hypothèseest étudiée. “D’anciennes mesures réa-lisées par l’exploitant dans la Gaffièremontrent des teneurs élevées en ura-nium de 1974 à 1984. Cette pollutionchronique ancienne pourrait expliquerle marquage actuel en uranium dans lazone1”, indique Jean-Christophe Gariel.
Une origine historique controverséeL’Institut et Areva ont réalisé des modé-lisations pour valider cette hypothèse,menant à des conclusions contradic-toires. Là où l’exploitant du site contes-te que ce transfert soit à l’origine dumarquage, l’IRSN estime que “le pas-sage d’uranium de la Gaffière vers lazone 1 est possible”, confie VincentRebour. Les mesures et conclusionsont été consignées dans un rapportaccessible sur www.irsn.fr, suivi d’uneréunion publique le 22 septembre pourprésenter les résultats aux riverains.140 personnes y participaient. Repères
(*) Commission locale d’information auprès desgrands équipements énergétiques du Tricastin.
(**) Direction départementale des affaires 0sanitaires et sociales.
Pour en savoir plus :www.irsn.fr, rubrique Actualités etpressewww.irsn.fr, rubrique Base deconnaissances > Environnement
Un technicien en radioécologie de l’IRSN trie de la mousse prélevée
aux abords du site du Tricastin.
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Cheminement de l’uranium du site vers la nappe phréatique
8Repères N°07 I octobre 2010
Des expositions chroniques à la loupe p.10
La recherche se struct à l’échelle européenne
Tout être vivant est exposé à la radioactiviténaturelle, et parfois artificielle. Les doses derayonnements sont très faibles, mais absorbéesrégulièrement durant des dizaines d’années.Évaluer les effets de cette exposition chroniquerelève d’un processus très complexe. C’est pourtantessentiel pour adapter au mieux les politiques de prévention et de protection des populationsexposées. D’où le lancement de nouveauxprogrammes de recherche, ces dernières années,notamment au sein de l’IRSN.
ImageSource/REANoak/Le bar Floréal/IRSN
sur les effets sanitairesdes faibles doses
la rechercheOù en est
la recherchesur les effets sanitairesdes faibles doses
9 Repères N°07 I octobre 2010
D’où vient ce chiffre de100 mSv (millisieverts)?Les études épidémiologiques menéespendant plus de soixante ans sur prèsde 90 000 survivants des bombarde-ments d’Hiroshima et Nagasaki ontmontré avec certitude que le risque decancers augmente chez les personnesayant reçu une dose de rayonnementsionisants supérieure à 100 mSv demanière significative. On a aussi éva-lué l’effet déterministe (brûlures…) quis’observe lors d’une irradiation mas-sive et de courte durée. En revanche,en deçà de 100 mSv, les études n’ontpas établi de façon induscutable l’exis-tence d’une relation entre dose derayonnements et risque de cancers oumaladies non cancéreuses notammenten raison des incertitudes qu’accom-pagnent ce type d’étude. C’est pour-quoi cette valeur de 100 mSv a étéchoisi pour définir schématiquementle domaine des “faibles doses”.
Les faibles doses présentent-elles des risques?L’absence d’effets décelables lors d’étu-des épidémiologiques menées jusqu’àprésent ne permet pas
Des travailleurs dans les minesd’uranium de Lodève(Hérault), en 1990.
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Mieux comprendre les faibles dosesExposition. Lorsque les doses de rayonnements sont inférieures à 100 millisieverts, on parle de faiblesdoses. Mise au point sur le sujet.
DOSSIER
■ On distingue divers modes d’exposition à des faibles doses de radioactivité:
■ ● irradiation externe chronique. Par exemple :les rayons cosmiques frappant la Terre ;
■ ● irradiation externe ponctuelle. Par exemple :un examen radiologique ;
■ ● contamination interne chronique. Par exemple :l’inhalation de radon contenu dans l’air ;
■ ● contamination interne ponctuelle. Par exemple:l’ingestion d’eau contaminée.
ÉCLAIRAGE
Quand est-on exposé à de faibles doses?Il existe de nombreuses sources d’ex-position à la radioactivité. Naturelle,provenant par exemple du granite quicontient d’infimes traces d’uranium,lequel, en se désintégrant, produit duradon, un gaz radioactif qui émane dela roche et se retrouve naturellementprésent dans notre atmosphère. D’au-tres sources sont artificielles. Ainsi destravailleurs du nucléaire ou encore desprofessionnels de santé sont-ils expo-sés. Tout comme une personne se prê-tant à des examens d’imagerie médi-cale, comme une radiographie ou unscanner.
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En couverture: Une manipulatrice à l'hôpital européen Georges-Pompidou (Paris) prépare un patient à passer une scintigraphie, technique d'exploration médicale par l'administration au préalable d'un produit radioactif. Crédit photo : Noak/Le bar Floréal/IRSN
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10Repères N°07 I octobre 2010
d’exclure l’existence de risquespour les êtres vivants. De plus amplesrecherches sont indispensables. Pouridentifier ces risques biologiques et/oupathologiques (1), il faut mener desrecherches complexes et nécessaire-ment longues associant travaux épi-démiologiques, cliniques et expéri-mentaux. Seules la diversité et la com-plémentarité des approches permet-tront d’en savoir plus.
À quelles difficultés sont confrontés les chercheurs quitravaillent sur les faibles doses?L’exposition à la radioactivité naturellevient s’ajouter aux éventuelles exposi-tions professionnelles, médicales ouaccidentelles. Il est donc difficiled’identifier l’impact respectif des uneset des autres. Par ailleurs, de nom-breuses pathologies, et notamment descancers, surviennent tout au long dela vie pour des raisons génétiques ou
environnementales sans rapport avecune irradiation.
Pourquoi y a-t-il de plus en plus de recherches dans ce domaine?L’extrapolation des effets des fortesdoses à ceux des faibles doses nereflète absolument pas la réalité. Étu-dier les effets liés à de faibles exposi-tions chroniques est donc primordial.C’est pourquoi la Commission euro-péenne finance désormais cesrecherches et de plus en plus d’équipeslancent des programmes.
Quelles vont être les conséquencesd’une meilleure connaissance des effets de ces faibles doses?Actuellement, la Commission interna-tionale de protection radiologique(CIPR) recommande que la populationgénérale ne soit pas exposée à plus de1 mSv par an ajouté à l’expositionnaturelle. Pour les travailleurs, le seuilmaximal recommandé est de 20 mSvpar an. Ces seuils ont été fixés pourgérer les risques de manière optimaleà un coût acceptable. Tester la perti-nence du système de radioprotectionactuel par des travaux scientifiquesaxés sur des résultats constatés per-mettra de juger du besoin éventueld’ajuster les normes. Il est en effetessentiel que les mesures de protec-tion reposent avant tout sur desconnaissances scientifiques acquisesdans le cadre d’études expérimentales,cliniques ou épidémiologiques. �
Des exposit Recherche. Pour cerner les effets àles experts de l’IRSN investiguent
C onduire des travaux scientifiquessur les effets d’une expositionchronique à de faibles doses n’est
pas aisé. Les effets sont peu visibles etl’impact sanitaire éventuel ne peut êtreobservé que sur le long terme. Parailleurs, les études sont lourdes à mettreen place, soit parce qu’elles demandentde suivre de vastes cohortes(1) sur plu-sieurs dizaines d’années, soit parce quela recherche expérimentale est coûteuseet délicate à réaliser. Pour autant, cestravaux sont indispensables pourconnaître et prévenir les risques surl’homme.
ÉTUDIER DES POPULATIONS EXPOSÉES
Personne n’imagine aujourd’hui sepasser de l’imagerie médicale. Àchaque radiographie ou scanner, lecorps est soumis à un rayonnementionisant. Cette exposition présente-t-elle un risque ? Pour le savoir, uneétude portant sur 30 000 enfants demoins de 5 ans lors de leur premierexamen irradiant a été lancée en jan-vier 2009 en collaboration avec 18 hôpi-taux français. “En connaissant les exa-mens subis par chaque enfant, on cal-cule les doses reçues. Puis, avec leregistre national des cancers et des leu-cémies pédiatriques, on pourra identi-fier les enfants développant des can-cers ”, explique Marie-Odile Bernier,chercheure à l’IRSN, en charge del’étude. “ Il est très important de tra-vailler sur le suivi des enfants exposéscar ils sont plus sensibles que les adultesaux rayonnements. Mais, les résultatsne seront pas disponibles avant plu-
DOSSIER FAIBLES DOSES
1 sievert = 1000 millisievertsLe sievert (Sv), en hommage au suédoisRolf Sievert et à ses recherches sur les effets biologiques des radiations,est l’unité qui sert à quantifier le risquelié à une exposition à des rayonnementsionisants. Alors que le becquerel (Bq)mesure l’activité de la matière nucléaireet que le gray (Gy) mesure la dosephysiquement absorbée par la matière,le sievert permet, quant à lui, d’évaluerl’impact du rayonnement sur la matièrevivante. Ainsi peut-on comparer l’effet d’une même dose délivrée par des rayonnements de nature différente à des organismes, des organes ou des tissus qui n’ont pas la mêmesensibilité aux radiations.
(1) On distingue les effets biologiques, qui sontdes modifications passagères ou permanentes du fonctionnement de l’organisme sans que cela soit néfaste pour lui, des effets pathologiquesqui peuvent être plus ou moins graves.
30000 enfants soumis à des examensirradiants font l’objet d’une étude.
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30000 enfants soumis à des examensirradiants font l’objet d’une étude.
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ions chroniques à la loupelong terme des irradiations et des contaminations chroniques à des faibles doses, les domaines de l’épidémiologie, mais aussi de la recherche expérimentale et clinique.
sieurs années !”, ajoute le Dr HervéBrisse, radiopédiatre dans le service deradiodiagnostic de l’Institut Curie àParis et secrétaire scientifique de laSociété d’imagerie pédiatrique et pré-natale qui participe à cette étude.
Les enfants sont aussi l’objet d’uneétude sur l’exposition environnemen-tale : “La question des leucémies chezles enfants vivant à proximité des cen-trales nucléaires remonte aux années1980”, précise Dominique Laurier, chefdu laboratoire d’épidémiolo-gie de l’Institut. En 2008,l’IRSN a analysé près de 200études scientifiques sur cesujet. Conclusion: pas d’aug-mentation du risque de leu-cémies chez les 0-14 ansvivant à proximité d’une cen-trale. “Sauf qu’aucune de cesétudes ne fournit d’informa-tion sur les expositions de cesenfants ni sur leur histoiremédicale” souligne-t-il. Encollaboration avec l’Institutnational de la santé et de la recherchemédicale (Inserm), l’équipe de Domi-nique Laurier va s’intéresser à desenfants vivant à proximité de sitesnucléaires. “Nous allons évaluer leurexposition à la radioactivité naturelle etcroiser cela avec les registres nationauxde leucémies infantiles.” Pour PierreBarbey, biologiste et membre de l’As-sociation pour le contrôle de la radio-activité de l’Ouest (ACRO), “cette étudepermettra d’apporter des réponses maisaussi de montrer qu’il subsiste encorebeaucoup d’incertitudes”.
Le lien entre cancer du poumon et radonest très étudié en matière d’expositionenvironnementale. Ce gaz radioactifnaturellement présent dans l’atmo-sphère peut se trouver en quantitéimportante dans certaines habitations.Pour quantifier ce risque, l’IRSN a étu-dié “600 personnes atteintes de cancerdu poumon et 1200 ‘témoins’ [personnesdu même âge, non atteintes de cette
maladie, Ndlr] qui vivent tous en Bre-tagne et en région Centre, où l’exposi-tion au radon est plus importante quedans le reste de la France”, expliqueMargot Tirmarche, directrice d’évalua-tion et d’animation scientifique à l’IRSNet membre de comités scientifiquesinternationaux tels la Commission inter-nationale de protection radiologique(CIPR). Conclusion : il existe bien un lienentre le radon dans les maisons et lecancer du poumon. “Désormais, il nousfaut convaincre le grand public qu’une
bonne ventilation et parfoisdes interventions de profes-sionnels de l’habitat sontnécessaires”, précise-t-elle.
Les travailleurs ne sont pasen reste. “Lors d’opérationsde maintenance dans les cen-trales nucléaires, il peut yavoir exposition à de faiblesdoses, explique CamilleMetz, chercheure sur leseffets des irradiations exter-nes à l’Institut. Elle est mesu-
rée grâce au dosimètre individuel portépar les travailleurs.” Les chercheursdisposent des relevés annuels des sala-riés du CEA depuis 1946, de ceuxd’EDF depuis 1961 et ceux d’Arevadepuis 1976, soit plus de 70 000 per-sonnes ! Ces données sont croiséesavec celles issues des certificats de
décès émis en France depuis 1968.“On constate que la dose moyennecumulée d’exposition durant toute lacarrière professionnelle de ces per-sonnes est de 20 mSv, ce qui est trèsfaible. Au CEA et chez Areva, 50% destravailleurs ont une dose indétectable.Pour déceler les risques liés à desdoses aussi faibles, nous devons croi-ser cela avec d’autres cohortes (1). Ainsi,sur une quinzaine de pays, soit400 000 travailleurs, on a pu montrerune association entre exposition pro-fessionnelle et risque de décès par can-cers. En poursuivant ces études, noussaurons si les recommandationsactuelles doivent ou non évoluer”,résume Camille Metz. Plus la durée dusuivi sera longue et plus les résultatsde ces études seront pertinents.
Une quinzaine de personnes mènent des études sur leseffets sanitaires chez l’homme d’une exposition chro-nique aux faibles doses à l’IRSN. Ils suivent des popula-tions très diverses afin d’étudier tous types d’exposition:environnementale, professionnelle ou médicale. Ces spé-cialistes travaillent au sein du Lepid, le laboratoire d’épi-démiologie. Créé au début des années 1990, il est situéà Fontenay-aux-Roses. Actuellement, le Lepid s’intéresseà la relation entre la dose reçue et le risque d’apparitiond’effets, à la variation d’un individu à l’autre du risqueet aux pathologies non cancéreuses.
DOSSIER
Pierre Barbey,membre de lasociété civile,s’intéresse aux effets de la radioactiviténaturelle sur les enfants.
Dominique Laurierdirige l’équipe duLepid, à Fontenay-aux-Roses.
Un laboratoire dédié aux effets sanitairesdes expositions faibles aux radiations
Plus de 300000 travailleurs en France sont susceptibles d’être exposés.
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(1) Cohorte : ensemble d’individus suivis chronologiquement, à partir d’un temps initial donné, dans le cadre d’une étude épidémiologique. Une cohorte forme un groupe homogène choisi pour l’étude d’une pathologie. (Larousse médical).
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DÉTERMINER LES EFFETSSUR UN ORGANISME VIVANT
Pour comprendre les mécanismes liésà une contamination chronique, leschercheurs du programme Envirhom(lire encadré) étudient notamment desrongeurs, dont l’eau de boissoncontient de l’uranium. “Neuf mois decontamination quotidienne chez un ratéquivalent à vingt ans chez un hommepar rapport à sa durée de vie, préciseIsabelle Dublineau, chef du laboratoirede radiotoxicologie expérimentale àl’IRSN. Grâce aux études expérimen-tales, nous maîtrisons tous les para-mètres de vie et de contamination del’animal. Cela nous permet d’être trèsprécis par rapport à la quantité ingérée,et de ne pas interférer avec les effetsd’autres polluants. Nous nous intéres-sons à la localisation de l’uranium dansl’organisme et aux réponses physiolo-giques. Quelles modifications sontobservées, par exemple, au niveau dusystème cardio-vasculaire, du tubedigestif, de l’immunité ou des fonctionsdu cerveau ? Comment les effets obser-vés varient en fonction des doses, de ladurée d’exposition ou du type d’ura-nium – appauvri, naturel ou enrichi?”Alors que l’os et le rein sont les prin-cipaux organes cibles lors d’une expo-sition aiguë, les résultats d’Envirhomont montré que le système nerveux
central, le foie et les organes reproduc-teurs (femelles) peuvent être égalementaffectés. “Nous constatons une modi-fication des métabolismes majeurs (2),ainsi que des fonctions cognitives[c’est-à-dire le système nerveux cen-tral, Ndlr] et reproductives (3), expliqueIsabelle Dublineau. Une contaminationchronique à faible niveau par de l’ura-nium peut donc avoir des effets noncancéreux sur divers organes. Cettecontamination, aux quantités ingérées,induit des effets biologiques de typeadaptatif (4), qui ne conduisent pas à despathologies.”
“Pour la première fois, nous avonsmontré qu’une contamination chro-nique par de l’uranium enrichi perturbele cycle veille-sommeil des rats. Elleaugmente leur niveau d’anxiété et detroubles de la mémoire. Avec unecontamination équivalente par de l’ura-nium appauvri, l’état général n’est pasaltéré, explique Philippe Lestaevel, spé-cialiste du système nerveux central àl’IRSN. Nous avons aussi constaté desmodifications du système cardiovascu-laire lors d’une contamination par lecésium 137, mais cela ne signifie pasforcément qu’il y ait pathologie.”
SUIVRE LES POPULATIONSDES TERRITOIRES CONTAMINÉS
L’accident nucléaire de Tchernobyl,survenu le 26 avril 1986, demeure à cejour la plus grande catastrophe de l’in-dustrie nucléaire civile. L’expositiondes populations a eu des conséquencessanitaires comme une augmentationde l’incidence des cancers de la thy-roïde chez les enfants âgés de moinsde 15 ans au moment de l’accident etvivant sur les territoires contaminés deRussie, Biélorussie et Ukraine. Certai-nes études menées en Biélorussie sug-gèrent que les enfants vivant sur lesterritoires contaminés, et plus particu-lièrement par du césium 137, présen-teraient des pathologies inhabituelles,non cancéreuses telles que cataractes,anémies ou encore troubles du rythmecardiaque.
En avril 2005, l’IRSN a décidé de lancerun programme de recherche appeléÉpice (Évaluation des pathologiesinduites par une contamination par lecésium). Il suit les enfants vivant surles territoires russes contaminés afind’évaluer leur contamination par ducésium 137. De plus, il est destiné à
recenser les pathologies non can-céreuses, en particulier arythmiescardiaques et cataractes. Il seraainsi possible de confirmer ouinfirmer l’existence d’un lien decause à effet. Plusieurs phasespréparatoires ont déjà eu lieu,permettant de valider la faisabi-lité d’une vaste étude épidémio-logique. L’étude portant sur lesarythmies cardiaques a été lan-cée en mai 2009. Elle concerne18000 enfants, dont la moitié vitsur des terrains non contaminés.Les premiers résultats sont atten-dus pour 2013. �
DOSSIER FAIBLES DOSES
Le programme d’études expérimentales Envirhom a été lancéen 2001 par l’IRSN pour permettre une meilleure évaluationdes risques liés à l’exposition chronique de radionucléides àla fois sur l’environnement et sur la santé de l’homme. Entre20 et 25 personnes par an travaillent sur l’axe santé. “ Il s’agitde mimer, chez des animaux, ce qui peut se passer dans unepopulation soumise à une contamination chronique, explique Isabelle Dublineau, chefdu programme Envirhom. Nous menons des études descriptives afin d’acquérir de nou-velles connaissances et des études plus ciblées sur les mécanismes d’action de l’uranium.”
Un programme étudie les mécanismes d’action de l’uranium
Une contamination quotidienne de rats de laboratoire par de faibles doses d’uranium appauvri, n’altère pas l’état de santé général de l’animal.
Recherche d’arythmie cardiaque chez un enfant vivant en Biélorussie.
Isabelle Dublineau estchargée de coordonner le
programme Envirhom.
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Olivier Seignette/Mikaël Lafontan/IRSN Thomas Gogny Noak/Le bar Floréal/IRSN
(2) Les métabolismes du cholestérol, des xénobiotiques (substances étrangères à l’organisme telles que les médicaments), des hormones stéroïdiennes, du fer,de la vitamine D. Par exemple, l’uranium perturbe le métabolisme de la vitamine D ce qui peut conduire à un risque d’augmentation de la fragilité osseuse.
(3) Des études ont observé une baisse de qualité des cellules reproductrices femelles (ovocytes) sans modification de l’intensité de l’ovulation. (4) Le terme d’effets biologiques de type adaptatif est utilisé lorsque des perturbations sont constatées sans entraîner de pathologie ou de menace pour
la santé; l’organisme s’adapte à l’entrée de ce radionucléide.
13 Repères N°07 I octobre 2010
DOSSIER
Repères: Pourquoi l’IRSN travaille-il sur les faibles doses?La réflexion a été lancée en 2000 à la suite des interroga-tions croissantes de la population. Nous sommes trèsattentifs aux questions posées par la société, or nous nedisposions alors pas de résultats expérimentaux nous per-mettant d’argumenter nos réponses. D’où le lancementdu programme Envirhom en 2001.
Ces recherches vont-elles permettre de mieux protéger certaines populations à risques comme les travailleurs dunucléaire?Dans un premier temps, cela va surtout servir à s’assurerque nous évaluons bien toute la variété de risques, et pasuniquement les cancers comme c’est le cas aujourd’hui.Ensuite cela permettra d’adapter les mesures de sur-veillance et de dépistage dans les populations à risque.
Parviendra-t-on à dé-finir un seuil en deçàduquel il n’y auraitaucun effet?C’est tout l’enjeude ces études,mais je doute quel’on y parviennede façon globale.Aujourd’hui lepostulat est de direque dès qu’on dépasse zéro, il y a un risque, c’est la loidu linéaire sans seuil. L’objectif de ces études est de revi-siter cette doctrine et, peut-être, à terme, de définir desseuils de risques qui pourraient très certainement varierselon les pathologies et les populations.
Pharmacien radiobiologiste, délégué aux partenariatsinternationaux et aux activités transverses à la direction de la radioprotection de l’homme de l’IRSN.
High level expert group on european low dose risk research
La recherche se structure à l’échelle européenne
� Groupe d’experts créé en 2008.� Membres : 6 personnes issues d’instances
ou autorités nationales impliquées dans cedomaine en Allemagne, Finlande, France,Italie et Royaume-Uni, une personne de laCommission européenne et huit expertsscientifiques.
� Rôle : identifier les questions scientifiquesclés non résolues ainsi que les pistes derecherche les plus prometteuses à explo-rer. Élaborer un agenda stratégique surtrente ans pour la recherche sur les faiblesdoses. Développer une structure opération-nelle durable.
HLEG
Multidisciplinary european low dose initiative
� Structure de gouvernance créée en 2009.� Membres : 10 organismes nationaux dont
CEA (Commissariat à l’énergie atomique)et IRSN en France, BfS en Allemagne, ISSen Italie et STUK en Finlande.
� Rôle : assurer le financement à long termede la recherche et harmoniser les métho-dologies, interface entre toutes les partiesprenantes.
MELODI Low dose research towardsmultidisciplinary integration
� Réseau d’excellence 2009-2015, outilopérationnel de Melodi.
� Membres : 12 organismes de rechercheet universités européens.
� Rôle : contribuer à pérenniser l’intégra-tion des recherches en Europe.
DOREMI
Wolfgang Weiss, président de Melodi“La complexité et la nature multidisciplinaire des recherches menées sur lesfaibles doses sont telles qu’elles ne peuvent être abordées qu’à l’échelle euro-péenne, d’où l’existence de Melodi. Pour adapter au mieux les mesures deprotection des populations et des travailleurs, nous devons assurer une inté-gration durable et solide des programmes de recherche nationaux et euro-
péens. Nous voulons aussi promouvoir la plus large communication quant aux résul-tats et aux connaissances qui découleront de ces recherches. ”
Pour atteindre une efficacité suffisante, et pour pérenniser lesprogrammes de recherche et leur financement, les scientifiques de l’Union européenne travaillent désormais en réseau.
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3 questions à… Jean-René Jourdain
Pour atteindre une efficacité suffisante, et pour pérenniser lesprogrammes de recherche et leur financement, les scientifiques de l’Union européenne travaillent désormais en réseau.
Pour en savoir plus : www.irsn.fr, rubrique La recherche
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Repères : Comment la radioprotection et la radioactivité sont-elles abordéesaujourd’hui dans le programme scolaire?Dominique Aupépin : Le sujet de la radio-activité est à peine effleuré au lycée…Dans la matière que j’enseigne [sciencesde la vie et de la terre, SVT, Ndlr], on parlede la radioactivité aux terminales scienti-fiques quand on leur explique commentdater les roches, et c’est tout !Béatrice Casanova : En cours de physique,nous organisons un seul TP [travaux pra-tiques, Ndlr] sur la radioactivité, qui pro-pose aux élèves de mesurer le radon dansl’environnement.Roselyne Améon : L’IRSN avait été contactéà l’époque de l’élaboration de ce TP. Nousavions essayé d’imaginer un moyen simplequi permettrait de faire comprendre auxélèves ce qu’est la radioactivité.B. C. : Et ce TP fonctionne bien. Enrevanche, il nécessite d’investir dans dumatériel – l’appareil de mesure coûte plusde 2 000 € – et je doute que tous les lycéesle possèdent… En outre, la radioactivitén’est pas abordée sous l’angle de la radio-protection !R. A. : C’est vraiment dommage, car chacun doit apprendre à se protéger contreles rayonnements ionisants.
Dans ce contexte, que pensez-vous des ateliers de la radioprotection auxquelsvous avez participé cette année ?D. A. : Les ateliers ont énormément plu.Les lycéens ont beaucoup appris sur la
radioprotection en tant que telle, mais ontaussi affûté leur esprit critique, ils ontnotamment pu toucher du doigt la notiond’incertitude des mesures… Que dupositif, si ce n’est que seuls 14 élèves denotre lycée en ont profité.R. A. : Les ateliers reposent sur le volon-tariat des élèves, ce qui restreint les effec-tifs, mais est aussi une garantie de leurmotivation. Les ateliers s’ajoutent à leuremploi du temps, on ne peut donc pas lescontraindre !D. A. : C’est sûr, mais je trouve cela dom-mage de ne pas toucher tous les élèves.J’ai noté, avec la même pointe de regret,que les lycées impliqués dans ces ateliersne représentaient pas toutes les catégo-ries d’élèves.R. A. : On touche là une des limites de cettedémarche : la difficulté de l’élargir au plusgrand nombre.
Comment peut-on sensibiliser le plus grand nombre à la radioprotection ? B. C. : La réforme des lycées prévoit l’ins-tauration d’enseignements d’explorationen seconde, soit une heure trente parsemaine pour découvrir des domainesd’activité qui mêlent plusieurs disciplinesenseignées au lycée. Ce pourrait être uneporte d’entrée intéressante pour parler deradioprotection aux élèves.R. A. : Nous réfléchissons à d’autres sup-ports. Un livret sur le radon, d’approchetrès pédagogique, est par exemple encours d’élaboration. Nous retravaillons lesite Internet de l’Institut, pour en faire unlieu de réponses aux questions que seposent les élèves et les enseignants. Noussommes aussi disponibles pour répondreaux demandes d’information sur la radio-protection.D. A. : Le lycée a plusieurs fois sollicitél’IRSN, et nous avons toujours trouvé uneoreille attentive à nos questions. Maisencore faut-il savoir que l’établissement
Quand les ldécouvrent
Environ 200 lycéens ont participé en 2009-2010 aux ateliers de laDeux enseignantes d’un lycée francilien et une experte de l’Institut
Repères N°07 I octobre 2010
� Roselyne AméonPhysicienne de formation, elle est l’une des expertesradon de l’IRSN depuis dix ans. En plus de sestravaux d’ingénierie et de recherche, elle enseigne
ce sujet en formation continue et en formation initiale dans les universités
de Paris-XII et de Grenoble.
À RETENIR■ Les points forts des ateliers
de la radioprotection :apprentissage pratique;rencontres avec des experts;échanges avec d’autres lycées de différents pays.
■ Les défis : beaucoup travail pour les enseignants et les élèves.
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DÉBAT COMMENT SENSIBILISER LES JEUNES À LA RADIOPR
Les enseignantes et l’experteIRSN se sont concertées pour
élaborer les exercices pratiques.
Les enseignantes et l’experteIRSN se sont concertées pour
élaborer les exercices pratiques.
ycéens la radioactivité
radioprotection co-organisés par l’IRSN et deux autres partenaires. débattent sur l’importance de cette démarche dans l’enseignement.
� Dominique Aupépin (à droite)Elle enseigne les sciences de la vie et
de la terre (SVT) au lycée Louis-de-Broglie,à Marly-le-Roi (Yvelines), depuis trente ans.
� Béatrice Casanova (à gauche)Enseignante en physique-chimie au lycée Louis-de-Broglie, à Marly-le-Roi
(Yvelines), elle a depuis toujours étésensibilisée à la radioactivité par son père chercheur.
Pour en savoir plus:www.lesateliersdelara-
dioprotection.com
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Repères N°07 I octobre 2010
Une dimension internationaleQuatorze lycées de France,mais aussi d’Italie, de Belgique,d’Allemagne, de Biélorussie et d’Ukraine participaient à cettetroisième édition des ateliers de la radioprotection, aveccomme point d’orgue trois joursde rencontres sur Paris. Les élèvesont apprécié cette dimensioninternationale, qui leur a permisd’appréhender le sujet dans toute sa complexité.«Grâce aux échanges, les élèvesfrançais se sont rendu compte à quel point la radioactivitéfaisait partie du quotidien de leurs homologues de l’Esttouchés par l’accident deTchernobyl», souligne RoselyneAméon, experte de l’IRSN.
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existe ! J’avoue pour ma part que je ne leconnaissais pas avant la mise en place desateliers, et que j’ignorais presque tout dela radioprotection.R. A. : Nous devons être plus visibles, c’estun point sur lequel nous travaillons.
Les lycéens, une fois sensibilisés, se sentent-ils concernés par ces sujets? D. A. : À l’issue des ateliers, on ne peut pasdire que les lycéens se soient montrés
beaucoup plus préoccupés qu’avant.Notre situation en Île-de-France,située loin des centrales nucléaires etoù l’exposition au radon n’est pas trèsélevée, les a vite rassurés. B. C. : Mais ils se sont rendu compteque c’était différent dans d’autresrégions. Les échanges avec leslycéens biélorusses et ukrainiens leuront aussi ouvert les yeux sur l’impactque peut avoir la radioactivité au quo-tidien.R. A. : Les risques liés aux rayon-nements nous concernent tous, qu’onpasse une radio, ou qu’on prennel’avion…D. A. : Cette approche liée à la vie quo-tidienne aurait peut-être été plus per-cutante pour les interpeller davan-tage.R. A. : L’idée pourrait aussi être desensibiliser les enfants plus jeunes.On sait qu’ils sont un formidablevecteur d’information. Cela permet-trait sans doute de réduire l’exposi-tion de la population par des gestessimples, et de dédramatiser le sujet,qui n’est aujourd’hui abordé que lorsdes incidents. ■
En travaux pratiques, les élèves mesurent le radon dans l’environnement.
OTECTION ? DÉBAT
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ou spécialisés en hématologie, chi-rurgie plastique, dermatologie ouencore gastroentérologie ont puapprendre à répondre à différents casd’urgence. Par exemple : quelles sontles notions médicales, dosimétriques,physiques, biologiques à connaître,quelle est la procédure à suivre pourprendre en charge les victimes irra-diées ou contaminées, comment réagirface aux actes de malveillance à risqueradiologique…? L’enseignement desexperts de radioprotection de l’IRSNs’appuie plus particulièrement surleurs expériences de la radiopatholo-gie et du traitement des personnesirradiées accidentellement. L’approche
pédagogique associe des conférencesclassiques, des jeux de rôles reprodui-sant par exemple des actes de mal-veillance, et des retours d’expériencepour les pays ayant été confrontés àdes accidents d’irradiation (la Tunisieet l’Équateur, par exemple).
Une expertise délicate à menerLorsqu’un pays déclare une urgenceradiologique, l’un des rôles de l’AIEAest de le mettre en relation avec lesstructures les plus performantes pourl’accueil et la prise en charge des vic-times. Ainsi, depuis plus de quinze ans,une relation entre l’IRSN et l’AIEA s’estconstruite pour la gestion médicale desaccidents d’irradiation. Il s’agit d’uneexpertise délicate que peu d’organismespeuvent mener. Dans ce domaine, l’Ins-titut, avec le Pr Patrick Gourmelon, estle leader au niveau mondial. Ce hautniveau de compétence a pu être atteintgrâce à une collaboration entre l’Insti-tut et l’hôpital d’instruction des arméesPercy de Clamart (Hauts-de-Seine).Cette association et les récents succèsthérapeutiques expliquent l’efficacitédes actions et cette reconnaissanceinternationale. ■
Urgences radiologiques
Les experts français exportent leur savoirÀ la demande de l’AIEA, l’IRSN intervient dans plusieurspays, pour la formation de personnel médical apte à réagiren cas d’urgence radiologique.
16Repères N°07 I octobre 2010
E n 2010, l’Autriche, l’Équateur, laTunisie et la Serbie ont bénéficiédes compétences des experts de
l’IRSN qui y ont formé du personnelmédical à la gestion des accidents d’ir-radiation ou de contamination. Cesformations, coordonnées par l’Agenceinternationale de l’énergie atomique(AIEA), font appel aux professionnelsinternationaux reconnus dans ledomaine.
Un enseignement très spécialiséPendant les cinq jours de leur forma-tion, une quarantaine de personnelsmédicaux et de médecins urgentistes
INTERNATIONAL
Ce que pense l’AIEAdes actions de l’IRSN“À la suite de l’établissement d’uneconvention entre les deux organismes,l’IRSN peut prodiguer une assistanceinternationale effective et rapide.Ces collaborations sont essentielles pourfaciliter l’efficacité des secours en casd’urgence nucléaire ou radiologique.Une confiance réciproque entre ces deuxstructures a pu s’établir dans le cadre des procédures d’urgence. Cet appuiinternational permet à l’IRSN d’améliorer et de consolider ses compétences et son expertise lors d’interventions d’urgencedélicates. Durant les cinq dernières années,cinq actions ont réuni les deux partenairessur cette problématique. L’expertise solideet efficace de l’IRSN, dans le cadre des interventions d’assistance internationale,est un modèle que de nombreux paysmembres devraient suivre.”
Élena Buglova du départementde la sécuritéet de la sûreté nucléaire de l’AIEA.DR
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Médecins et infirmières s’entraînent lors d’un exercice européen de protection civile, radiologique et toxique. Cette connaissance servira à la formation
des personnels de pays intéressés par la gestion des accidents d’irradiation.
17 Repères N°07 I octobre 2010
Repères : Comment faire pour prendre encompte des points de vuesouvent très différents,parfois novices, dans undomaine fondé avant toutsur des connaissancesscientifiques?Ted Lazo : En radiopro-tection, les décisions sontcertes fondées sur desdonnées scientifiques,mais pas seulement! Der-rière chaque décision, ily a le jugement, forcé-ment subjectif, d’une per-
sonne ou d’un groupe. Le niveau derisque d’une exposition est un conceptscientifique ; l’acceptabilité d’un telrisque est un concept sociétal. Lascience permet de connaître les risquesassociés à une exposition mais le choixde la protection de tout le monde oupas avec les coûts que cela impliquerelève d’un choix sociétal. Les risquesd’exposition sont discutées en fonctiondes connaissances scientifiquesactuelles, mais aussi de ce qu’attend lasociété civile.
Repères : Pouvez-vous nous parler de cas concrets d’implication desparties prenantes dans le domaine de la radioprotection ?Ted Lazo : Cette démarche est asseznouvelle. Nous avons beaucoup dechoses à apprendre notamment pourl’environnement et la gestion desdéchets non-radioactifs où l’implica-tion des parties prenantes existe
Implication
“La radioprotection doit s’intégrer à la société, et non l’inverse”
Repères : Longtemps, la radioprotection estrestée le domaine desexperts. Depuis plusieursannées, l’Agence del’énergie nucléaire (AEN)s’intéresse à l’ouverture à la société et prônel’implication des partiesprenantes dans les prisesde décision. Pourquoi?Ted Lazo: Le constat dedépart est simple, et nonspécifique à la radiopro-tection : les gens accep-tent et appliquent plusfacilement les décisions quand ils ontparticipé à leur élaboration. Ce fut lecas à Tchernobyl : une dizaine d’an-nées après l’accident, une équipe fran-çaise d’experts en radioprotection aaidé la population à trouver des solu-tions adaptées à ses préoccupations.Cette nouvelle forme de gouvernanceest essentielle aussi pour d’autressituations que la gestion des consé-quences d’un accident nucléairegrave : installation d’un nouveau sitenucléaire, gestion des déchets, dépol-lution d’un site contaminé... Le mes-sage de l’AEN est clair : la radiopro-tection doit s’intégrer à la société, etnon l’inverse. La preuve : lors de la fer-meture définitive de Rocky Flats, unlaboratoire de production d’armesnucléaires aux États-Unis. En touteconnaissance de cause, la populationa accepté de transformer le site enrefuge pour la vie sauvage ouvert aupublic.
Ted Lazo, adjoint au chefde division pour la radio-protection de l’AEN.
OUVERTURE À LA SOCIÉTÉ
La société civile veut être associée aux prises de décision. Il en est de même dans le domaine de la radioprotection.Rencontre avec Ted Lazo, adjoint au chef de division pour la radioprotection de l’Agence de l’énergie nucléaire (AEN).
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Des ateliers de réflexion et de dialogueDepuis 2008, l’Agence de l’énergienucléaire (AEN) organise des ateliersinternationaux intitulés “Science et valeurs“ (Science and values) pourcomprendre que les décisions enradioprotection sont fondées sur les connaissances scientifiques et les considérations sociétales.■ Le premier atelier, à Helsinki (Finlande) en janvier 2008, sur l’évolution de laréglementation suite aux questionsscientifiques.■ Le deuxième atelier, à Vaux-de-Cernay(France) en novembre 2009, sur les stratégies de protection pour les personnes les plus exposées.■ Le troisième atelier, prévu à Tokyo(Japon) en 2011, développera la thématique du premier atelier afin de mieux faire comprendre les enjeuxdans les décisions de radioprotection.
■ Agence pour l’énergie nucléaire (AEN)● agence spécialisée intergouvernementalede l’Organisation de coopération et de développe-ment économiques (OCDE) ;● 28 pays membres dont la France, situés en Euro-pe, en Amérique du Nord et en Asie ;● sa mission: aider ses pays membres à mainte-nir et approfondir les bases scientifiques, techno-logiques et juridiques indispensables à une utilisa-tion du nucléaire à des fins pacifiques ; fournir desévaluations qui serviront à définir leur politiquenucléaire.
OUTIL
depuis plus longtemps. Un exempleconcret, pour l’élaboration des recom-mandations de la CIPR de 2007: l’AENet les principaux intervenants de 17 pays ont dialogué et échangé pen-dant 7 ans avec la Commission inter-nationale de radioprotection (CIPR).Cela a permis de mettre à jour la légis-lation et de faire évoluer la réglemen-tation dans de nombreux pays. ■
18Repères N°07 I octobre 2010
ENJEUX & STRATÉGIE
Plus généralement la commission serachargée de donner son avis au conseild’administration sur des choix d’orga-nisation et de méthodes pour anticiperd’éventuels problèmes de déonto-logie… ou, mieux, les résoudre.
Création et suivi de chartesSe réunissant au moins une fois par an,la commission contribue aussi à l’éla-boration et au suivi des chartes dedéontologie applicables aux différentesactivités de l’établissement. Cette tâcheétait à l’ordre du jour de sa dernièreréunion en septembre, tout comme lamise en place des règles de fonction-nement de la commission. ■
Nouvelle instance
Une commissionpour veiller à la déontologieÉlaborer des chartes de déontologie, veiller à les faire appliquer dans toutes les activités de l’Institut.Telle est la tâche de cette nouvelle commission.
Jean-Pierre Dupuy, président de la commission, ingénieur général duCorps des Mines, philosophe, professeurà l’École polytechnique et à l’universitéStanford (Californie), auteur de Pour un catastrophisme éclairé (Seuil, 2002) et de Retour de Tchernobyl, journal d’unhomme en colère (Seuil, 2006), membrede l’Académie des technologies.
Jean-Claude Ameisen,biologiste, immunologiste,professeur de médecine à l’université Paris-Diderot
et à l’hôpital Bichat,membre du Comité consultatif
national d’éthique, président du comitéd’éthique de l’Inserm.
Anne Berriat, magistrateau Conseil d’État,a participé au pilotage
de la stratégie nationalede développement durable
(2003) et à la rédaction d’un rapport sur la structuration des polices del’environnement.
Éric Vindimian, ingénieurgénéral du génie rural,des eaux et des forêts,
directeur régional auCemagref (institut de
recherche en sciences et technologiespour l’environnement), spécialiste desimpacts toxiques sur l’environnement et la santé, et de l’expertise dans lespolitiques publiques environnementales.
Les membres de la commission
Trois questions à Jean-Pierre Dupuy, président de la commision
Pourquoi avez-vous accepté de présider la commission de déontologie de l’IRSN?J’ai beaucoup travaillé comme philosophe sur la question des catastrophes technologiques,naturelles ou morales, en tant que membre de l’Académie des technologies, entre autres. J’ai accepté cette tâche pour des raisons professionnelles, maisj’y ai également vu une occasioninespérée de mettre à l’épreuve les réflexions que j’ai menées sur l’évaluation des conséquencesde l’accident de Tchernobyl.
Où cela vous a-t-il mené?La question déontologique del’évaluation se pose avec une acuitéinouïe, puisque les chiffres ont,selon des évaluateurs, varié dansune proportion de 1 à 100. J’ai faitmienne la conclusion du numérospécial que la revue Nature aconsacré au sujet en 2006 : “Si uneétude complète et indépendante des conséquences du pire accidentnucléaire que le monde a connun’est pas réalisée, et ses résultatspubliés de façon accessible à tous,les estimations les plus absurdementdivergentes continueront à être
faites, et la méfiance du public à l’encontre de l’industrie nucléairene pourra que croître.”
Comment faut-il s’y prendrepour atténuer cette méfiance?J’ai pu montrer que l’évaluationd’un risque de ce type estindissociablement scientifique et normative. L’idée qu’il pourrait y avoir une estimation purementfactuelle, doublée de considéra-tions éthiques indépendantes, estpour moi à abandonner. Aussi, la décision de l’IRSN de se doterd’une commission de déontologieme paraît excellente. Mes collèguespartagent avec moi le souci de ne pas séparer le scientifique de l’éthique et réciproquement.
C omment éviter les conflits d’in-térêt quand l’Institut établit uneexpertise pour un client dans le
cadre d’un dossier qu’il devra traiterpour le compte des pouvoirs publics?C’est pour répondre à ce type d’inter-rogation que la commission de déon-tologie de l’IRSN a été créée à la fin2009. Sa première réunion de travails’est tenue à la fin mars 2010. Compo-sée de quatre personnalités extérieuresà l’Institut (lire encadré) nommées pourquatre ans, elle est placée sous l’auto-rité du conseil d’administration. Celui-ci ou le directeur général peut la saisirpour toute question de déontologie surlaquelle il souhaite obtenir un éclairage.
“Ne pas séparer le scientifique de l’éthique”
Pierre Chiquelin
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Les pouvoirs publics ont confié à l’IRSN une mission permanente de surveillanceradiologique des populations, des travailleurs exposés aux rayonnements ionisants et de l’environnement. La finalité est de connaître leur exposition, d’assurer leur suivi à long terme, d’évaluer d’éventuels risques afin d’optimiser la radioprotection. Pour cette mission, l’Institut a mis en place un même processus. Il se résume en trois étapes : recueillir des données, les archiver, puis les mettre à la disposition de nombreux bénéficiaires : des autorités, des professionnels ou du grand public.
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Repères N°07 I octobre 2010
L’homme et l’environnement
Quelles sont les étapes de la surveillance radiologique?
GOUVERNANCE
Enhancing Nuclear Safety*
Renseignez-vous dès maintenantTél. : 04 90 26 11 14E-mail : [email protected]
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IRSN
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