Le fils prodigue : diaporama autour du tableau de … · Regardons les tableaux d’autres peintres...
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Le fils prodigue : diaporama autour du tableau de Rembrandt
Quand Rembrandt peint ce tableau, il a un peu plus de 60 ans, il est incompris, pauvre mais
de plus en plus libre depuis que le succès l’abandonne ; les êtres qui lui sont chers meurent
et ce sera le dernier tableau achevé avant sa mort.
Il a eu du succès et de l’argent, il a mené grand train après son premier mariage avec Saskia
qui lui donnera 4 enfants, un seul : Titus arrivera à l’âge adulte. Saskia mourra à 30 ans de
tuberculose, Rembrandt vivra alors avec la servante qui s’occupe de Titus mais il la fera
interner en psychiatrie. Il se mettra en ménage avec une servante plus jeune qui lui donnera
une fille Cornelia ,Rembrandt recevra un blâme de l’Eglise pour mauvaise conduite et le
succès le quitte ,il est obligé de vendre sa maison, Titus et la servante deviennent ses tuteurs
et vivent des revenus d’une galerie de peinture mais la servante meurt, suivie par Titus qui
laisse une veuve enceinte ; Voyez l’autoportrait de Rembrandt ,il date de cette période :
Autoportrait de Rembrandt 1669National Gallery ( Londres)
C’est un vieil homme ridé, bouffi, mal rasé, son gros nez, son regard perdu dans le vague, ses
cheveux blancs indisciplinés, sa moustache en bataille …
Titus, ce fils dont il avait peint tant de fois le portrait, mais aussi dont il avait utilisé le visage
par exemple pour représenter l’ange qui conseille st Matthieu :
Son fils TitusPortraits, modèle
regardez
l’expression d’amour de l’ange ,sans doute Rembrandt reconnaissait dans ce tableau l’amour
que lui portait son fils qui le protégeait et était devenu son tuteur .. Ce fils venait de mourir,
sa petite fille allait naître .
La parabole du fils prodigue l’avait déjà inspiré par le passé :
La parabole l’avait déjà inspiré
c’est le fils dans la
taverne dilapidant l’argent avec les femmes (la femme sur les genoux du fils c’est Saskia..)
qui l’avait intéressé. Il avait toutefois ébauché en 1636 le dessin de la rencontre du père et
du fils.
Mais il lui fallait plus de maturité, plus d’expérience, plus de souffrance : connaître l’amour
du Père, l’amour ... pour arriver à produire une œuvre aussi immense en taille
2m62x2m05 qu’en puissance évocatrice.
Regardez :
Une lumière chaude, pleine de paix, d’amour semble provenir des 2 personnages centraux
(clair obscur de Rembrandt) , diffuser autour d’eux et en particulier englober l’homme
vertical .La couleur dominante est le rouge, couleur du feu
Détails
.
Le père en majesté a la forme de mandorle de tympan roman, une stature de porche royal
pour accueillir et protéger l’enfant revenu (vouté comme un arc roman,ovale géniteur qui
rayonne au tympan) .On note qu’il descend vers le fils .
Son visage d’aveugle est ridé, il s’est usé les yeux à scruter l’horizon le jour pour guetter le
retour du fils, il a peut être tellement pleuré la nuit ...
Ses mains sont étonnantes : une main d’homme puissante, protectrice, paternelle et l’autre
longue, douce, caressante, maternelle.
Le fils : sa nuque de condamné, les cheveux tondus comme les bagnards (il a perdu une des
marques de son individualité), il porte comme vêtement un sous vêtement : une chemise
déchirée ; il est agenouillé, la tête posée sur les entrailles du père comme le nouveau né que
l’on dépose la joue contre la mère.
Détails 2
Ses pieds : un pied nu (talon raboté), à l’autre pied une sandale déchirée …comme il a du
marcher et souffrir (pieds nus des anges en adoration)
Mais quel est l’objet surprenant à sa ceinture ? Une épée .Une surprise de Rembrandt :
Aucune allusion dans la Bible .Sur le dessin, il avait jeté au sol le bâton de marche du pèlerin,
compréhensible mais une épée ! Que veut- il nous dire ? D’où peut- elle venir , il a du
l’emporter quand il a tout emporté en quittant la maison .Cette épée , il l’avait alors, quand
il était parmi les cochons ,quand il n’avait rien à manger et rêvait de manger les gousses
destinées aux cochons, quand il a pensé qu’il ne valait pas mieux que les cochons qu’il
gardait ; là, il a réalisé qu’il touchait le fond . Que pouvait- il faire de cette épée ? Mettre fin
à ses jours par désespoir, la vendre pour manger .Non, elle était un souvenir du père, elle
était le signe qu’il était un être humain, qu’il avait été un fils, qu’il avait été aimé . Alors il a
choisi de vivre plutôt que de mourir. (Judas a trahi Jésus, Pierre a renié Jésus ; ils étaient
enfants perdus : Judas s’est pendu, Pierre est revenu, il y a toujours un choix) .
Regardons le dessin ébauché par Rembrandt puis le tableau du retour du fils prodigue par
Murillo
Regardons le dessin ébauché par Rembrandt et le tableau de Murillo
comparons- les au tableau de Rembrandt : quelle différence majeure ?
le mouvement dans les deux premiers, l’immobilité totale dans le troisième : comme si le
temps s’était arrêté sur le geste du père qui accueille et « couve » son fils et sur le fils qui
repose entre les bras contre la poitrine du père. C’est un moment de profonde intimité
entre le père et le fils, ils rayonnent d’une paix qui parait éternelle.
Le groupe père-fils est extérieurement sans mouvement mais intérieurement, tout bouge :
ils sentent leurs cœurs battre très fort. Le père pense « il est rentré à la maison » et le fils
« je suis rentré à la maison »
4 Observateurs :
2 femmes que l’on discerne dans l’obscurité, des regards curieux, hagards ?
on devine des colliers à leur cou.
2 hommes qui sont-ils ? Mystère de Rembrandt, des interprétations
diverses ;
l’homme assis au regard fixe, qui ne semble regarder personne (étranger à la scène qui se
déroule devant lui ? un indifférent ? ( ces indifférents qui irritaient Jésus ) ,le regard de
Rembrandt sur l’autoportrait ?) ; Drôle de position : un bras croisé devant lui, l’autre bras
tenant sa jambe croisée , signe de repli sur lui-même ? Il est dans l’ombre.
L’autre debout, le regard critique ? Il est baigné par la lumière du père et du fils : le frère
aîné ? Celui qui n’avait jamais transgressé les ordres du père et qui se plaignait au père de
n’avoir même pas reçu un chevreau pour se réjouir avec ses amis, mais l’avait- il demandé ?
« Mon enfant tu es toujours avec moi et tout ce que j’ai est à toi ; mais il fallait bien festoyer
et se réjouir, parce que ton frère qui était mort est revenu à la vie , parce qu’il était perdu ,il
est retrouvé » lui répond le père ;
Regardez comme il se tient droit, raide alors que le père se voute, n’hésite pas à descendre
vers le fils .Il ne s’abandonne pas dans les bras de Dieu, il est sur une marche mais il
participe à la lumière, il n’est pas abandonné de Dieu : il fait penser aux pharisiens qui
étaient contents d’eux parce qu’ils respectaient la Loi, les règles et excluaient ceux qu’ils
jugeaient impurs ... Rembrandt lui aussi avait été rejeté : mauvaise conduite ! Mais il avait
l’amour du fils (regard de l’ange)…
Regardons les tableaux d’autres peintres inspirés par la parabole :
D’autres peintres inspirés par la parabole: Dürer, Murillo, Simon de Vos
Dürer au XV°s qui voit le fils au plus bas : juif qui se retrouve gardien de cochons ...( noter
qu’il est à genou dans la fange au milieu des cochons dont il regarde l’auge)
Simon de Vos en 1640 voit comme Rembrandt plus jeune, le fils dépensant l’argent à la
taverne jeu et femmes ..
Murillo (1670) peint le père recevant le fils : le veau , les sandales, l’anneau et le beau
vêtement et un air de fête.
Revenons quelques minutes sur le tableau :
Imaginons Rembrandt qui vient de perdre des êtres chers, qui sait que c’est son dernier
tableau, dans quel personnage se représente t-il ?
Comme il a confiance dans l’amour de Dieu qui lui tend les bras , qu’importe le regard de la
société qui l’a rejeté et qu’il ne déteste pas , elle est dans la lumière de Dieu .
Qu’évoque ce tableau en moi ? Qu’est ce que je ressens ? De quel personnage je me sens
le plus proche? Ne suis-je pas quelquefois comme cet homme indifférent ou cet homme
droit et raide qui juge, rejette ? Qu’en est- il de mon intimité avec Dieu ?...