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Télé Bolloré, le pëand dézingage V INCENT BOLLORÉ a trouvé un truc pour éviter la ruine du groupe Canal Plus. Il a inventé 1' animateur qui tire sur ses collègues pour doper l'audience de sa petite émission. Maïtena Biraben, qui a fait perdre au« Grand Journal» des centaines de milliers de télé- spectateurs depuis septembre, a fait la grève de la présentation, le 22 avril- officiellement elle souffrante»-, pour pro- tester contre son équipe, qui, selon elle, n'a pas bien bossé pour la mort du chanteur Prince. Sympa. En fait, c'est Hanouna qui a lancé la mode du dézingage à plein tube dans le groupe Canal. Le garçon triomphe depuis deux ans dans « Touche pas à mon poste», l'émission la plus po- tache de la télé et la plus regar- dée de D8, filiale de Canal. Pour le buzz, il est champion. Après avoir glissé des nouilles dans la culo«.e d!.u chroniqueur, il a une pemlqpe-blonde ur-la tête d'un autre et l'a envoyé, dé- guisé en livreur de pizzas, faire sans prévenir un bisou à JoeyS- tarr dans sa loge à quelques mi- nutes du direct de « Nouvelle Star», le télé-crochet maison. Réaction garantie du rappeur éruptif, qui fùe une (petite) châ- taigne et un coup de pied au cul au chroniqueur. Celui-ci sort de la loge sur ses deux pattes en rassurant les téléspectateurs : Ça va très bien, c'est rien, ce n'est pas grave, je suis ar- rivé un peu vite, y a pas de souci.» Et puis voilà qu'une petite goutte de sang pointe sur son arcade sourcilière, et Ha- noùMit'pdurtant grand fou de la claque, d'enchaîner aussitôt: saignez, c'est grave, quand même. » Et de menacer de ne pas rendre 1' antenne si 1' infâme J oeyStarr n'est pas licencié dans l'heure : N'importe quel pa- tron peut m'appeler, on ne rendra pas l'antenne tant que JoeyStaFl" ne se sera cusé ou ne sera sorti (sic) de "Nouvelle Star" »,une émis- sion qu 'Hanouna présentait il y a deux ans mais qu'il qualifie désormais de catastrophe ». C'est ça, la télé Bolloré de la reconquête. Le concept nou- veau : dégoiser sur l'émission d'à côté, provoquer les col- lègues, les piétiner, leur cracher dessus, les faire virer, qu'ils crè- vent, tout ça pour créer une saine émulation et faire croître 1' audience dans un groupe le patron veut de la publicité, du rendement et des dividendes. C'est «Touche à mon pote » après « Touche pas à mon poste». Un vrai modèle de so- ciété destiné à éduquer la jeu- nesse que le financier Bolloré devrait vendre aux DRH de toutes les bonnes entreprises sous forme de téléréalité : faites virer vos collègues, dézinguez leurs produits, ayez leur peau, vive la concurrence ! Le pire, c'est que, dans ce sale- boulet , Hanouna-sollkl' l'appui des réseaux sociaux, qui se déchaînent pour suivre ses campagnes de délation. Pas moins de 550 000 tweets dans 1' affaire Starr, 62 000 pour Hol- lande à la télé, rappellent « Les Echos ». Heureusement que Bolloré a allongé 250 mil- lions d'euros pour que Hanouna reste cinq ans sur ses chaînes. On est rassurés, en cinq ans, il a le temps de faire virer tout le monde. J.-M. Th.

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Le canard

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Télé Bolloré, le pëand dézingage V INCENT BOLLORÉ a

trouvé un truc pour éviter la ruine du groupe Canal Plus. Il a inventé 1' animateur qui tire sur ses collègues pour doper l'audience de sa petite émission. Maïtena Biraben, qui a fait perdre au« Grand Journal» des centaines de milliers de télé­spectateurs depuis septembre, a fait la grève de la présentation, le 22 avril- officiellement elle est~ souffrante»-, pour pro­tester contre son équipe, qui, selon elle, n'a pas bien bossé pour la mort du chanteur Prince. Sympa.

En fait, c'est Hanouna qui a lancé la mode du dézingage à plein tube dans le groupe Canal. Le garçon triomphe depuis deux ans dans « Touche pas à mon poste», l'émission la plus po­tache de la télé et la plus regar­dée de D8, filiale de Canal. Pour le buzz, il est champion. Après avoir glissé des nouilles dans la culo«.e d!.u chroniqueur, il a mi~ une pemlqpe-blonde ur-la

tête d'un autre et l'a envoyé, dé­guisé en livreur de pizzas, faire sans prévenir un bisou à JoeyS­tarr dans sa loge à quelques mi­nutes du direct de « Nouvelle Star», le télé-crochet maison.

Réaction garantie du rappeur éruptif, qui fùe une (petite) châ­taigne et un coup de pied au cul au chroniqueur. Celui-ci sort de la loge sur ses deux pattes en rassurant les téléspectateurs : ~ Ça va très bien, c'est rien, ce n'est pas grave, je suis ar­rivé un peu vite, y a pas de souci.» Et puis voilà qu'une petite goutte de sang pointe sur son arcade sourcilière, et Ha­noùMit'pdurtant grand fou de la claque, d'enchaîner aussitôt: ~Vous saignez, c'est grave, quand même. »

Et de menacer de ne pas rendre 1' antenne si 1' infâme J oeyStarr n'est pas licencié dans l'heure : ~ N'importe quel pa­tron peut m'appeler, on ne rendra pas l'antenne tant que JoeyStaFl" ne se sera pas~x-

cusé ou ne sera sorti (sic) de "Nouvelle Star" »,une émis­sion qu 'Hanouna présentait il y a deux ans mais qu'il qualifie désormais de ~ catastrophe ».

C'est ça, la télé Bolloré de la reconquête. Le concept nou­veau : dégoiser sur l'émission d'à côté, provoquer les col­lègues, les piétiner, leur cracher dessus, les faire virer, qu'ils crè­vent, tout ça pour créer une saine émulation et faire croître 1' audience dans un groupe où le patron veut de la publicité, du rendement et des dividendes. C'est «Touche à mon pote » après « Touche pas à mon poste». Un vrai modèle de so­ciété destiné à éduquer la jeu­nesse que le financier Bolloré devrait vendre aux DRH de toutes les bonnes entreprises sous forme de téléréalité : faites virer vos collègues, dézinguez leurs produits, ayez leur peau, vive la concurrence !

Le pire, c'est que, dans ce sale- boulet , Hanouna-sollkl' l'appui des réseaux sociaux, qui se déchaînent pour suivre ses campagnes de délation. Pas moins de 550 000 tweets dans 1' affaire Starr, 62 000 pour Hol­lande à la télé, rappellent « Les Echos ». Heureusement que Bolloré a allongé 250 mil­lions d'euros pour que Hanouna reste cinq ans sur ses chaînes. On est rassurés, en cinq ans, il a le temps de faire virer tout le monde.

J.-M. Th.