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L'UNESCO ET SON PROGRAMME 3 q./. 16: 004 xv L'ANNÉE GÉOPHYSIQUE INTERNATIONALE par WERNER BUEDELER

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L'UNESCO ET SON PROGRAMME 3 q./. 16: 004 xv

L'ANNÉE GÉOPHYSIQUE INTERNATIONALE

par WERNER BUEDELER

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L’LJNESCO ET SON PROGRAMME

Collection de brochures d’information traitant chacune d’un aspect parti- culier du programme et des travaux de I’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture.

1. II.

III. IV. V.

VI. VII.

VIII.

ii!.

x:;. XIII. XIV. xv.

L’Unesco en 1950; ses buts, SES activités, 1950, 21 pages. Programme de base adopté par la Conférence générale de I’lJnesco lors de sa cinquième session, Florence, 1950, 30 pages. La question raciale, 1950, 11 pages. L’llnesco et le Conseil économique et social, 1950, 41 pages. L’assistance technique en vue du développement économique au service de l’homme, 1950, 39 pages. Vers de meilleurs manuels d’histoire, 1951, 31 pages. La classe de géographie au service de la compréhension internatio- nale, 1951, 38 pages. Le droit à l’éducation, 1952, 60 pages. L’accès aux livres, 1953, 25 pages. Arts et lettres, 1954, 28 pages. La coopération européenne dans La recherche nucléaire, 1954, 26 pages. Les sciences sociales, 1954, 69 pages. Pour mieux connaître les autres peuples, 1955, 21 pages. L’énergie nucléaire et ses utilisations pacifiques, 1955, 83 pages. L’année géophysique internationale, 1957, 66 pages.

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L'ANNÉE GÉOPHYSIQUE INTERNATIONALE 1

par WERNER BUEDELER

UNESCO

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Publié en 1957 par l’organisation des Nations Unies pour féducation, la science et la culture, 19, avenue Kléber, Paris-l@.

Imprimé par Fortin, Nevers.

0 Unesco 1957 MC. 57. II. 21. F

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PREFACE

Des hommes de science de plus de cinquante nations, représen- tant des spécialités très diverses, se préparent à participer à une même entreprise. Jamais encore en temps de paix un aussi grand nombre de savants n’avaient été mobilisés au service bune cause commune.

Le but de cet effort est de mieux connaître notre planète. Au cours de 1PAnnée géophysique internationale, l’atmosphère sera explorée jusqu’aux plus hautes altitudes au moyen de ballons- sondes, d’e fusées et de satellites artificiels qui, de l’avis de nombreux spécialistes, annoncent déjà la conquête de tespuce.

La présente brochure, publiée par rlinesco, expose le pro- gramme et les objectifs de PAnnée géophysique internationale. L’Unesco prépare, en outre, une exposition itinérante destinée à faire connaître au grand public cette entreprise et les méthodes qui seront employées pour la mener à bien.

Il y a soixante-quinze ans, la I’” Année polaire avait été consacrée principalement à l’étude de l’Arctique. Cinquante ans plus tard, le programme de la IIe Année polaire prévoyait, en outre, l’étude de l’Antarctique. Aujourd’hui commence, sous un titre rwuveau, cette troisième campagne de recherches qui ne sera pas limitée aux régions polaires, mais s’étendra à la terre entière : des spécialistes étudieront les continents et les océans, l’atmosphère et la mystérieuse activité solaire qui exerce une si grande influence sur notre vie quotidienne.

L’Unesco peut être légitimement fière d’avoir accordé une aide financière au Conseil international des unions scienti- fiques, pour la préparation de l’Année géophysique interna- tionale, et de subventionner le comité spécial chargé de planifier les travaux et de coordonner à l’échelon international des activités scientifiques des pays participants.

Les diverses nations qui participent à l’Année géophysique internationale contribueront à améliorer considérablement notre connaissance de la terre, tout en offrant un magnifique exemple de compréhension et de coopération internationales.

LUTHER H. EVANS Directeur général

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TABLE DES MATIERES

1. LA PLANÈTE TERRE . . . . . . . 7 L’homme et l’univers. Effets des radiations solairea. Les rayons cosmiques et les météorites. Complexité de la géophysique.

II. QU'EST-CE QUE LA GÉOPHYSIQUE ? . Le développement de la géophysique. La F An.

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née polaire. La II” Année polaire.

ID. L'ANNÉE GÉOPHYSIQUE INTERNATIONALE . . . 19 Origines de I)A.G.I. L’unesco et ~‘A.G.I. Le pro- gramme de ~'A.G.I.

IV. LES OBJECTIFS DE L'ANNÉE GÉOPHYSIQUE INTERNA- TIONALE . . . . . . . . . . 24 La tâche du Comité spécial de l’Année géophy sique internationale. Les zones de recherches. Les périodes spéciales. Essai préliminaire.

V. L'EXPLORATION DE L'ATMOSPHÈRE . . . . 28 Le rôle protecteur de l’atmosphère. Recherches sur la météorologie. Détection des radiations. Orages et nuages luminescents. Les rayons ultra- violets du soleil. Composition chimique de l’atmosphère. Les fusées et l’exploration de la haute atmosphère.

VI. Aux FRONTIÈRES DE L'UNIVERS . . . . . 36 L’exoephère. Les aurores polaires. Le rayonne- ment lumineux de la haute atmosphère. Les rayons cosmiques. L’ionosphère.

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VII. PRÉLUDE A L'ASTRONAUTIQUE . . , . Les satellites artificiels. Le projet B: Vanguard ~1

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Les orbites des satellites.

VIII. LES MYSTÈRES DU SOLEIL . . 52 La géophysique et l’observation il * * * u soleil. La coopération internationale en matière de re- cherches solaires. Recherches sur la physique solaire.

IX. L'EXPLORATION DE LA TERRE . . . . . 56 Mesures géographiques. Les énigmes de l’océan. Les glaciers. Le géomagnétisme.

X. UNE TERRE MYSTÉRIEUSE : L'ANTARCTIQUE . . 59 L’exploration de l’Antarctique.

XI. L’INTÉRÊT DU PROGRAMME DE RECHERCHES . . 62 Perspectives d’avenir.

Glossaire . . . . . . . . . . . 64

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CHAPITRE PREMIER

LA PLANETE TERRE

L’HOMME RT L’UNIVERS

L’homme, si petit et éphémère qu’il soit par rapport au cosmos, fait partie intégrante de l’univers. Depuis que la race humaine existe, elle éprouve à chaque seconde les effets de phénomènes d’origine extra-terrestre.

Le soleil déverse constamment sur la terre sa lumière et sa chaleur. Seule l’énergie solaire rend la terre habitable; toute vie y disparaîtrait si le soleil cessait d’émettre de la lumière et de la chaleur.

Sur la face extérieure de l’atmosphère terrestre, les rayons du soleil tombant à la verticale fournissent une quantité d’énergie égale à deux calories par minute et par centimètre carré. Ainsi, la moitié de la terre qui est éclairée par le soleil (puisqu’à tout moment une moitié du globe se trouve dans l’obscurité) reçoit 2 540 000 millions de millions de calories par minute (254 X 1018 cal./min.), soit près de 4 250 millions de millions de kilowatts-heures par jour (4,5 X loi5 kWh/jour) - ce qui représente, par an, l’équivalent de 50 000 fois la production mondiale d’énergie.

Il convient cependant de noter qu’une grande partie de cette énergie est absorbée par les molécules d’air avant d’atteindre le sol. En outre, la quantité d’énergie effectivement reque en un point quelconque dépend, dans une très large mesure, de la position géographique de ce point. Les rayons qui tombent verticalement sont bien plus puissants que ceux qui tombent en oblique, car, dans ce dernier cas, l’énergie se trouve répartie sur une superficie plus étendue. C’est ce qui se produit dans les régions polaires.

Les régions équatoriales absorbent pendant le jour plus de chaleur qu’elles n’en restituent pendant la nuit. L’excédent se disperse vers le nord et vers le sud, en direction des régions plus froides. Autrement dit, les masses d’air chaud équatorial s’élèvent dans l’atmosphère et se déplacent vers les latitudes moyennes. Pour remplacer cet air chaud dans les

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régions équatoriales, des masses d’air frais, provenant des latitudes moyennes, se dirigent vers l’équateur à faible alti- tude.

La répartition des terres émergées et des mers influe, aussi, considérablement sur la distribution de l’énergie solaire à la surface du globe. Le sol absorbe rapidement la chaleur du soleil pendant le jour et la restitue rapidement à l’atmosphère pendant la nuit; la mer est beaucoup plus lente, à la fois à se réchauffer et à se refroidir. Le fait que l’absorption et la res- titution de l’énergie s’effectuent ainsi à des rythmes différents donne naissance aux vents, qui ont des régimes déterminés.

Les précipitations constituent aussi un facteur important. Les vents qui soufflent du large sont saturés de vapeur d’eau et apportent de l’humidité aux terres sèches. D’autres mou- vements de l’air sont provoqués par la rotation du globe. Tous ces courants atmosphériques ont des régimes très compliqués et beaucoup de questions se posent encore à leur sujet, par exemple :

Quelle influence les énormes masses de neige qui recouvrent le continent antarctique exercent-elles sur les courants atmosphériques ?

Quels sont les effets des iceberga en dérive sur le climat ? Par quel mécanisme physique les zones de hautes pressions

qui se forment dans les régions polaires se déplacent-elles vers les latitudes moyennes, où elles modifient les conditions atmosphériques ?

EFFETS DES RADIATIONS SOLAIRES

Le soleil émet à certains moments des rayons ultraviolets, projetant dans l’espace d’énormes quantités de particules électrisées. Certaines de ces particules parcourent de très longues distances et viennent, au bout de quelques heures, frapper l’atmosphère terrestre, où elles provoquent des pertur- bations électriques et magnétiques.

Les aurores polaires sont un des effets les plus spectaculaires de ces émissions de rayons ultraviolets.

On a découvert, il y a quelques années à peine, que la couche inférieure de l’atmosphère (la troposphère) n’est pas la seule où l’air soit agité; même dans les couches bien plus élevées, on observe des vents violents et des mouvements ascendants et descendants d’énormes masses d’air. Il existe, par exemple, un puissant courant éolien (le « jet stream ») large de plusieurs kilomètres, qui fait .presque le tour de la terre à

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une altitude de 10 à 15 kilomètres et à une vitesse pouvant atteindre 800 kilomètres à l’heure. Les spécialistes de la physique solaire ont découvert récemment qu’à des émissions soudaines d’énergie solaire dans la partie ultraviolette du spectre, correspondent des mouvements latéraux du a jet- stream », qui sont à leur tour associés à certains phénomènes météorologiques.

Pour les géophysiciens, la terre est un énorme aimant, avec un pôle magnétique sud et un pôle magnétique nord - entiè- rement distincts des pôles géographiques.

Le pôle géomagnétique nord (pôle d’aimantation sud ou pôle négatif) se trouve par 78” 6 de latitude N. et par 70” de longitude 0. Le pôle géomagnétique sud lui est diamétrale- ment opposé.

En ce qui concerne les pôles magnétiques d’inclinaison, le pôle nord, le mieux exploré, est situé par 74” de latitude N. et 101” de longitude 0.; le pôle sud, de coordonnées plus incertaines, se trouverait par 6gc de latitude S. et 143” de longitude E. L’intensité du champ magnétique terrestre varie Iégèrement. Parfois, elle demeure stable pendant des heures, ou des jours; parfois, elle présente d’importantes fluctuations.

Ces fluctuations sont provoquées par l’activité du soleil. Des protons (particules à charge électrique positive) - et peut-être aussi des électrons (petites particules à charge néga- tive, qui sont l’un des éléments de l’atome) - sont projetés par les foyers d’activité solaire et certains d’entre eux atteignent l’atmosphère terrestre après avoir franchi en vingt- sept heures 150 millions de kilomètres.

Les rayons ultraviolets, eux, se déplacent à la vitesse de la lumière et sont observables sur la terre huit minutes seule- ment après avoir été émis par le soleil. Il est très difficile de détecter ces rayons, qui sont en grande partie absorbés par l’atmosphère, mais leur observation permet de prévoir plu- sieurs heures à l’avance l’intensité des variations du champ magnétique terrestre. Les émissions de rayons ultraviolets et les projections de particules atomiques sont, en effet, deux phénomènes étroitement liés et souvent simultanés. Toutefois, nous n’avons encore entièrement élucidé ni le mécanisme des projections de protons et d’électrons, ni le processus d’ionisa- tion des molécules d’air de la haute atmosphère - processus qui? en provoquant d’intenses courants électriques, accentue les fluctuations du magnétisme.

Les modifications de l’électrisation dans les couches ionisées de la haute atmosphère produisent encore d’autres effets. Les ondes radio-électriques, qui sont habituellement réfléchieti

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vers la terre par ces couches, parviennent, dans certaines conditions, à les traverser pour se perdre dans l’espace. Les récepteurs radiophoniques, qui ne peuvent capter ces ondes que lorsqu’elles ont été réfléchies par l’ionosphère, demeurent alors muets. Parfois, les ondes courtes, si importantes pour les liaisons radiophoniques intercontinentales, sont troublées par ce phénomène pendant des heures, alors que la réception des grandes ondes demeure satisfaisante. Il s’agit d’un pro- cessus extrêmement complexe. Chacune des cinq ou six couches ionisées dont nous connaissons l’existence ne réfléchit que les ondes radio-électriques d’une certaine fréquence. On n’a pas encore réussi à déterminer les échanges électrochimiques qui expliquent ces particularités.

LES RAYONS COSMIQUES ET LES MÉTÉORITES

Des millions d’autres particules viennent frapper l’atmosphère terrestre. Toutes exercent des influences, dont certaines sont connues et d’autres ne le sont pas. Les rayons cosmiques sont des atomes d’hydrogène, d’hélium et de certains éléments plus lourds, qui perdent tous leurs électrons en pénétrant dans l’atmosphère. Ils se déplacent à des vitesses extrêmement élevées, parfois voisines de celle de la lumière. Les atomes et les molécules de l’atmosphère empêchent les particules primaires des rayons cosmiques d’atteindre le sol, mais captent leur énergie. Sous l’effet de celle-ci, ils se décomposent en particules élémentaires qui - après de multiples échanges d’énergie cinétique avec d’autres protons, électrons et neutrons - atteignent la terre. A ce moment, leur énergie est encore très grande. Ces particules frappent le corps humain, comme de minuscules projectiles, et le traversent sans difficulté. Certaines sont douées d’une énergie telle qu’elles s’enfoncent de plusieurs kilomètres dans le sol; on en a détecté jusqu’au fond des mines les plus profondes. L’origine de ces rayons cosmiques reste une énigme.

Les météorites et les étoiles filantes sont un autre phéno- mène de la haute atmosphère. Ces débris cosmiques sont des corps métalliques ou rocheux, dont les dimensions varient de celles d’un grain de poussière à celles d’une maison. Les plus grosses météorites atteignent le sol, mais elles sont, en fait, extrêmement rares : de toute l’histoire de l’humanité, elles n’ont pas provoqué un seul accident mortel. Les petites sont, en revanche, très nombreuses. D’après des observations récentes, on peut évaluer à 750 000 trillions par jour le nombre

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des météorites qui pénètrent dans l’atmosphère. La plupart se volatilisent pendant leur chute, en raison de l’intense échauffement provoqué par le frottement des molécules d’air. Certaines sont très petites, invisibles à l’oeil nu; elles flottent dans l’air, descendant lentement jusqu’au sol.

Les radiations solaires, les rayons cosmiques et la poussière météorique sont des phénomènes cosmiques qui exercent une grande influence sur les conditions physiques à la surface de la terre. On ne peut comprendre les lois physiques qui régissent le globe - et tout ce qui vit à sa surface - sans tenir compte de l’activité solaire, des courants aériens de la haute atmosphère, des variations du champ magnétique terrestre et d’autres phénomènes qui se poursuivent parfois pendant des dizaines ou des centaines d’années (par exemple, le déplacement des pôles géographiques ou magnétiques et la dérive des continents).

L’objet de la géophysique est de donner à l’homme une explication intégrale du milieu où il vit. Même si l’on consi- dère le seul « milieu » géographique - les lieux habités ou parcourus par les êtres humains - il faut admettre que l’on connaît encore très mal les déserts et les régions polaires; et pourtant, ce qui s’y passe ne peut manquer d’influencer un jour le reste du monde. Nous avons déjà l’exemple du « jet stream » - dont nous commençons à peine à comprendre les effets sur les conditions météorologiques dans la troposphère - et celui des phénomènes météorologiques de l’Antarctique, qui modifient très fréquemment les conditions atmosphériques sous les latitudes moyennes.

L’homme s’est aventuré dans les solitudes glacées de l’Arctique et de l’Antarctique; il a gravi les montagnes les plus hautes, traversé les déserts sans eau, le plateau du Tibet et les forêts humides de l’Afrique. Au risque de leur vie, des savants ont arpenté les continents, établi des cartes des tempé- ratures et des courants aériens, mesuré l’intensité des rayons cosmiques.

De ces expéditions, il est résulté une masse de données; mars, aujourd’hui plus que jamais, les savants estiment que les faits ainsi recueillis ne suffisent pas à autoriser des conclu- sions définitives. Les réponses que l’on fait à certaines ques- tions posent de nouveaux problèmes, qui exigent de nouvelles recherches. C’est le cycle saus fin de la science. L’explication intégrale dont nous rêvons est sans doute impossible, mais, grûce à ces recherches, nous nous en rapprochons un peu plus chaque jour.

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COMPLEXITÉ DE LA GÉOPHYSIQUE

Tout au long de l’histoire, la science n’a cessé de se différen- cier. Depuis longtemps, aucun individu n’est plus capable de connaître la totalité des faits scientifiques. On classe encore l’astronomie, la physique et la chimie parmi les sciences naturelles, mais déjà de nouvelles subdivisions apparaissent nécessaires : le physicien qui s’occupe de l’énergie nucléaire, par exemple, doit être distingué du physico-chimiste. En revanche, il existe des sciences qui résultent de la conjonction de plusieurs disciplines scientifiques. La géophysique est de ce nombre. Aujourd’hui, le géophysicien doit être à la fois astronome, physicien et météorologiste ; il doit aussi, si possible, posséder des notions de physique nucléaire et d’autres disciplines non moins utiles.

Nul homme ne peut prétendre être expert dans toutes ces disciplines, et les géophysiciens, comme les autres savants, se sont spécialisés. Les uns s’occupent principalement de la haute atmosphère, les autres, de la configuration de la terre, du magnétisme terrestre, etc. Chacun poursuit des recherches dans sa spécialité. De temps en temps, on compare les résul- tats et l’on en dégage certaines conclusions. Celles-ci servent à orienter les efforts vers la recherche de nouvelles données empiriques, qui serviront de base à de nouvelles théories.

Mais, parfois, les savants interrompent leurs travaux parti- culiers pour coopérer à une entreprise commune de portée internationale, voire mondiale - lorsqu’une telle entreprise constitue le seul moyen de résoudre toute une série de pro- blèmes.

Dans le domaine de la géophysique, nous allons assister à la troisième entreprise de ce genre, après la 1’” et la II” Année polaire internationale (1882-1883 et 1932-1933) ; le 1”’ juil- let 1957 s’ouvrira l’Année géophysique internationale, qui dépassera encore en importance les deux années polaires.

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CHAPITRE II

QU’EST-CE QUE LA GEOPHYSIQUE ?

LE DÉVELOPPEMENT DE LA GÉOPHYSIQUE

Le premier géophysicien - qui mériterait plutôt le nom de géographe - fut le savant grec Eratosthène (III~ siècle av. J.-C.). Eratosthène entreprit le premier de mesurer les dimensions de la terre, et il le fit avec une précision éton- nante, si l’on considère les instruments dont il disposait et la méthode qu’il a utilisée.

Eratosthène était l’un des rares savants qui, dès cette époque, étaient convaincus que la terre avait la forme d’une sphère. Pour calculer la circonférence du globe terrestre, il imagina de mesurer la hauteur angulaire du soleil au-dessue de l’horizon en deux points situés sur une ligne nord-sud et séparés par une distance connue.

Il avait entendu dire qu’à Syène, village situé au sud d’Alexandrie, le soleil passait au zénith à midi. Il savait d’autre part qu’à Alexandrie, où il dirigeait la Bibliothèque royale, le soleil projetait une ombre à midi et ne passait donc pas au zénith. Il mesura la longueur de cette ombre, en déduisit la distance angulaire du soleil par rapport au zénith, évalua la distance de Syène à Alexandrie. Sur ces bases, il détermina la circonférence de la terre, lui donnant une valeur assez proche de celle qui est admise actuellement (40 000 ki- lomètres environ). Les erreurs commises par Eratosthène (Syène n’est pas située exactement au sud d’Alexandrie et le soleil n’y passe pas exactement au zénith, c’est-à-dire à 90” au- dessus de l’horizon) semblent s’être compensées, si bien que le résultat final apparaît assez exact.

Ce fut la première expérience importante de géophysique. Il devait s’écouler mille huit cents ans avant la deuxième.

Vers 1600, le physicien anglais John Gilbert publia un traité de magnétisme et d’électricité, où il soutenait que la terre était un énorme aimant.

Soixante-seize ans plus tard, à Sainte-Hélène, Halley (le célèbre astronome qui a calculé l’orbite de la comète de ce

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nom et en a exactement prédit le retour) établit la première carte météorologique donnant un tableau détaillé des vents alizés. Halley ne s’en tint d’ailleurs pas là. De 1698 à 1700, il effectua dans l’Atlantique-Nord et l’Atlantique-Sud des explorations dont il rapporta une carte complète de la répar- tition des forces magnétiques dans cette région. Un an plus tard, il publiait la première carte magnétique du globe.

Au cours du siècle suivant, nombre d’autres étude8 contri- buèrent à améliorer notre connaissance de la physique du globe. Vers la fin du XIX~ siècle, la sismologie prit place parmi les sciences quantitatives et l’on commença à rechercher les causes des tremblements de terre.

C’est aussi du XIX~ siècle que date l’exploration scientifique de la couche d’air qui entoure notre planète et qui joue un rôle si important dans la détermination des phénomènes physiques. En 1804, les Français Gay-Lussac et Biot réalisèrent la première ascension scientifique en ballon, atteignant une altitude de 7 000 mètres. Ils constatèrent qu’à cette altitude la composition chimique de l’air reste la même qu’au niveau du sol, mais que la quantité de vapeur d’eau diminue. Un demi-siècle plus tard, on constata que la température diminue avec l’altitude et l’on observa, pour la première fois, le phé- nomène dit de l’inversion de température, c’est-à-dire la pré- sence d’une couche d’air tiède au-dessus de masses d’air plus froid.

Vers la fin du XIX~ siècle furent lâché8 les premiers ballons- sondes, dont certains atteignirent l’altitude de 22 000 mètres. On put constater ainsi qu’à une certaine altitude, la tempé- rature ne décroît plus mais se stabilise. On en déduisit qu’à cette altitude l’atmosphère se sépare en deux couches. La couche inférieure fut appelée troposphère. Dans cette couche, qui s’étend jusqu’à une altitude comprise entre 8 et 16 kilo- mètres, la température diminue régulièrement avec l’altitude. Au-dessus, s’étend la stratosphère, où la température reste constante aux alentours de -50” centigrades.

D’autres recherches devaient permettre de préciser et de compléter ces observations.

En 1902, l’Américain Kennelly et l’Anglais Heaviside décou- vrirent, chacun de son côté, l’existence, vers l’altitude de 100 kilomètres, d’une couche d’air électrisée qui réfléchit les onde8 radio-électrique8 : l’ionosphère. On admet que, dans cette couche d’épaisseur inconnue, l’air est composé en majeure partie d’atomes ionisés, c’est-à-dire privés d’un ou de plusieurs de leurs électrons.

Cependant, tout en explorant l’atmosphère, les géophyei-

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tiens ne négligeaient pas l’étude de la terre. Avec le progrès de la technique, les expéditions terrestres et maritimes se firent plus audacieuses. Déjà, de hardis explorateurs - comme James Cook (milieu du XVIII~ siècle) et le capitaine Weddel (début du XIX~ siècle) - s’étaient aventurés très loin vers le Sud. Entre 1839 et 1842, James Clark Ross découvrit le conti- nent antarctique. En 1872-1874, le Challenger fut le premier navire à franchir le cercle polaire antarctique, rapportant de cette expédition d’intéressantes observations scientifiques.

Jusqu’au début du XX~ siècle, toutefois, l’Antarctique allait céder la vedette au Grand Nord.

Le pôle Nord ne fut conquis qu’en 1909 (deux ans avant le pôle Sud) mais le pôle magnétique, par 74” de latitude nord, avait été atteint par James Clark Ross dès 1831. Seize ans plus tard, McClure découvrait le passage du Nord-Ouest et, en 1878, Nordenskjold celui du Nord-Est.

En même temps que ces expéditions enrichissaient nos connaissances géographiques, on faisait, au sujet des phéno- mènes cosmiques et météorologiques, des découvertes qui permettaient de mieux connaître la terre en tant que planète. Mais on manquait encore de données suffisantes pour confir- mer ces découvertes et permettre de nouvelles recherches.

LA Y ANNÉE POLAIRE

En août 1874, le capitaine Weyprecht et vingt-trois de ses compagnons de l’expédition polaire autrichienne rentrèrent dans leur pays. Ces brave8 avaient perdu leur navire, mais découvert la Terre François-Joseph - à 890 kilomètres seu- lement du pôle Nord - et recueilli d’utiles observations sur la dérive des grandes masses de glace et les conditions météo- rologiques dans l’Arctique. Cependant, il était apparu à Weyprecht que des expéditions isolées de ce genre ne pour- raient jamais avoir qu’un intérêt limité. Les nombreuses observations scientifiques recueillies par les explorateurs ne pouvaient être vérifiées en l’absence de mesures comparables portant sur des mois ou des années. Weyprecht aboutit à la conclusion que, pour la connaissance des régions arctiques, des stations d’observation seraient plus utiles que des expé- ditions.

En 1875, cet explorateur (d’origine allemande) fit devant le quarante-huitième congrès de l’Association des savants et

pb siciens allemands une conférence où il formula ses célebres « principes fondamentaux des recherches arctiques a.

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A cette occasion, il invita tous les pays à participer à une exploration internationale des régions arctiques et à unir leurs efforts pour établir des stations d’observation qui fonc- tionneraient au moins une année entière.

Au cours de congrès ultérieurs (Utrecht, 1877; Rome, 1879), Weyprecht précisa son programme d’exploration des régions arctiques et étendit même ce programme à l’Antarctique.

En 1879, l’Allemagne, l’Autriche, le Danemark, la France, la Norvège, les Pays-Bas, la Russie et la Suède participèrent à Hambourg à la première Conférence polaire internationale. Cette conférence fut suivie de deux autres, tenues à Berne (1880) et à Saint-Pétersbourg (1881). On y mit au point le programme détaillé d’une Année polaire internationale, qui devait durer du 1”’ août 1882 au lir septembre 1883. Trois pays - l’Allemagne, la Russie et les Etats-Unis d’Amérique - devaient faire fonctionner chacun deux stations dans l’Arctique pendant toute cette période. Le Danemark, la Fin- lande, la France, le Royaume-Uni avec le Canada, l’Autriche- Hongrie, les Pays-Bas, la Norvège et la Suède devaient équiper chacun une station. Ainsi, quatorze stations d’observation représentant douze pays devaient fonctionner à l’intérieur du cercle arctique - complétées par trente-quatre autres stations à l’extérieur de ce cercle.

Ces quarante-huit stations devaient procéder à des enregis- trements horaires des phénomènes météorologiques et magné- tiques et observer les aurores boréales.

Le programme prévoyait, en outre, chaque mois, deux journées météorologiques mondiales, pendant lesquelles les phénomènes météorologiques et magnétiques devaient être enregistrés régulièrement toutes les cinq minutes.

Certaines des données recueillies au cours de la 1” Année polaire furent publiées dans des revues scientifiques. Mais, bien que toutes les mesures et observations eussent été centra- lisées, elles ne furent pas utilisées à tous les points de vue. Ce travail ne fut guère effectué que dans le cadre de chaque discipline - sans que l’on tentât un effort de synthèse au profit de la géophysique.

LA IIe ANNÉE POLAIRE

Cinquante ans plus tard, en 1932-1933, eut lieu la II” Année polaire internationale. Dans l’intervalle, l’homme avait conquis les deux pôles, fait de nouvelles découvertes sur la composi- tion de l’atmosphère et les conditions atmosphériques, appris

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l’existence des rayons cosmiques, mis au point de nouveaux appareils pour les recherches spécialisées.

L e programme établi pour l’Arctique au cours de la 1’” Année polaire avait été repris pour l’Antarctique en 1902 et 1903, sur une échelle beaucoup plus limitée d’ailleurs. Quatre expéditions tentèrent de percer le mystère de ce conti- nent, et un programme commun d’observations fut proposé à toutes les stations météorologiques situées au sud du 30” paral- lèle, du 1”’ octobre 1901 au 31 mars 1903.

En 1927, J. Georgi, de l’Institut maritime de Hambourg, suggéra qu’une nouvelle année polaire ait lieu cinquante ans après la première : du mois d’août 1932 au mois d’août 1933. Cette proposition, soumise au président du Comité interna- tional de météorologie, fut communiquée par lui à la Commis- sion de météorologie polaire. Divers autres organismes inter- nationaux s’intéressèrent à ce projet et une commission polaire internationale fut constituée; elle tint sa première réunion à Leningrad, du 26 au 30 août 1930. Les pays ci-après y étaient représentés : Allemagne, Canada, Danemark, États-Unis d’Amérique, Finlande, France, Japon, Norvège, Royaume-Uni et U.R.S.S. Seize autres pays avaient déclaré s’intéresser au projet : Argentine, Australie, Autriche, Brésil, Bulgarie, Espagne, Estonie, Guatemala, Hongrie, Irlande, Italie, Pays- Bas, Pologne, Portugal, Suède et Suisse. A Leningrad, on mit au point le programme général de la IP Année polaire inter- nationale, ainsi que la répartition des stations d’observation.

La Commission polaire internationale tint une deuxième réunion à Innsbruck (Autriche), en septembre 1931, pour préciser les objectifs et le programme scientifique de la IIe Année polaire; quarante-six pays devaient participer à l’entreprise. Des recherches approfondies étaient prévues sur la météorologie, le magnétisme terrestre, les aurores polaires, les effets d’ionisation et les communications radio-électriques. Les données relatives à ces phénomènes devaient être enre- gistrées deux jours par mois (comme pendant la 1’” Année polaire). Ces jours étaient dits « de première grandeur ,. On ajouta deux autres jours dits « de deuxième grandeur ». Le 31 août 1932 - jour marqué dans l’Arctique par une éclipse de soleil - fut une journée spéciale de première classe.

En définitive, quarante-neuf nations participèrent à la II” Année polaire. Des observations synchronisées, destinées à préciser les caractéristiques géophysiques de la terre, furent effectuées sur toute la surface du globe. Déjà, on avait fait remarquer que le titre de x II” Année polaire » était mal choisi pour une entreprise dont la portée ne se limitait pas

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aux régions situées à l’intérieur des cercles polaires. Néan- moins, ce titre fut conservé pour marquer le cinquantenaire de la 1” Année polaire (1882-1883) et pour indiquer que les recherches devaient porter principalement sur les régions polaires.

Les efforts concertés des savants, au cours de cette IIe Année polaire, aboutirent à de nombreux résultats, mais l’utilisation des données recueillies ne fut pas, cette fois non plus’, poussée jusqu’à sa conclusion logique. L’une des raisons de cette déficience fut probablement l’importance même des progrès réalisés : les découvertes se succédaient trop rapidement pour qu’on eût le temps d’y adapter les théories, les méthodes de recherche et le matériel scientifique.

Une vingtaine d’années plus tard, la rapidité du progrès scientifique rendait indispensable une nouvelle entreprise concertée de ce genre. Grâce aux nouvelles techniques et au nouveau matériel de recherche, les efforts conjugués de nombreux savants avaient produit une masse de connaissances, mais celles-ci posaient à leur tour de nouveaux problèmes et de nouvelles questions. Aujourd’hui, l’homme veut connaître encore mieux les courants atmosphériques, comprendre les phénomènes compliqués qui se déroulent dans l’ionosphère, prévoir les perturbations géomagnétiques et les pannes des radiocommunications; il ne sait pas encore quelle influence les immenses glaciers de l’Arctique et de l’Antarctique exercent sur le climat du globe, comment et dans quelle direction se déplacent les glaciers, quelle est l’origine des rayons cosmiques et quelles relations existent entre ces divers phénomènes. C’est pourquoi, depuis plusieurs mois déjà, les géophysiciens préparent le plus vaste programme internatio- nal de recherches qui ait jamais été organisé. Cet effort doit fournir une multitude de connaissances nouvelles et éliminer nombre d’incertitudes qui subsistent en matière de géophy sique. En outre, il ne peut manquer d’avoir de nombreuses conséquences pratiques, à une époque où le pôle Sud, dont la conquête a coûté à l’homme tant de souffrances, est assez facilement accessible en quelques heures d’avion. Cette nou- velle entreprise, c’est l’Année géophysique internationale.

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CHAPITRE III

L’ANNEE GEOPHYSIQUE INTERNATIONALE

ORIGINES DE L’A&I.

La plupart des entreprises scientifiques sont exécutées aujour- d’hui par des équipes nombreuses de spécialistes, mais l’initia- tive en revient, le plus souvent, à quelques hommes assez perspicaces et compétents pour évaluer les chances globales de succès.

C’est aussi le cas de l’Année géophysique internationale. Conçue d’abord comme une modeste répétition des années polaires, elle se présente maintenant comme l’entreprise scientifique la plus importante de tous les temps. Comme Weyprecht a été le père spirituel de la 1’” Année polaire, le géophysicien américain L.V. Berkner est le promoteur de l’Année géophysique internationale. Dans une conversation avec des collègues, à Silver Springs (Maryland, E.-U.A.), il avait émis l’idée que le progrès des techniques d’observation depuis la IP Année polaire - notamment en ce qui concerne les recherches sur l’ionosphère - justifiait pleinement l’organisation d’une nouvelle entreprise de ce genre vingt-cinq ans et non cinquante ans après la précédente. Cette suggestion fut soumise à la Commission mixte de l’ionosphère (M.C.I.), qui tenait précisément une réunion au cours de l’été de 1950. La commission mit au point un projet qu’elle présenta au Conseil international des unions scientifiques (I.c.s.u.) , en recommandant la création d’un comité spécial chargé de préparer une « troisième année polaire ». Il était proposé que cette troisième année polaire eût lieu en 1957-1958, c’est-à-dire pendant la prochaine période d’activité solaire maximum.

Cette recommandation fut appuyée sans réserve, en sep- tembre 1950, par l’Union radio-scientifique internationale (U.R.S.I.) et par l’Union aStrOnOmiqUe internatiOn& (U.A.I.) et, en août 1951, par l’Union géodésique et géophysique internationale (U.G.G.I.) .

Au cours de sa session d’octobre 1951, le conseil exécutif du Conseil international des unions scientifiques décida de

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constituer un comité spécial, placé directement sous l’autorité de ~‘I.c.s.u. A sa réunion suivante (mai 1952), il désigna, pour faire partie de ce comité, les représentants des trois unions déjà mentionnées (U.R.S.I., U.A.I., u.G.G.I.) ainsi que ceux de l’Union géographique internationale (U.G.I.) . En même temps, il invitait les Etats membres de ~‘I.c.s.u. à constituer des comités nationaux chargés d’organiser la coopération inter- nationale pendant la IIIe Année polaire et de formuler toutes suggestions utiles à cet effet. L’Union des républiques sovié- tiques socialistes fut aussi invitée à participer à l’entreprise par l’entremise de son Académie des sciences.

En octobre 1952, l’assemblée générale de ~‘I.c.s.u., réunie à Amsterdam, décida de donner à l’entreprise le nom d’Année géophysique internationale. Certaines organisations affiliées à 1’I.C.S.U. - notamment l’U.R.S.1. et la M.C.I. (Commission mixte de l’ionosphère) - avaient, en effet, proposé de ne pas limiter les recherches scientifiques aux régions polaires, mais d’effectuer aussi de nombreuses mesures dans la zone équa- toriale et sous les latitudes moyennes de l’hémisphère sud. A Amsterdam fut officiellement constitué le Comité spécial de l’Année géophysique internationale (c.s.A.G.I.), qui tint le même mois une réunion préliminaire à Bruxelles.

A cette réunion, on passa des préparatifs aux actes. Le C.S.A.G.I. recommanda de nouveau la création de comités natio- naux, chargés d’organiser la participation des différents pays à l’Année géophysique internationale et de soumettre leurs programmes à un comité international de coordination. Divers organismes scientifiques furent également invités à constituer des comités spéciaux, et un cinquième membre, représentant l’Organisation météorologique mondiale (o.M.M.) , fut adjoint au C.S.A.G.I.

A Bruxelles également, le C.S.A.G.I. décida que l’Année géophysique internationale durerait du 1” juillet 1957 au 31 décembre 1958 - soit, en fait, dix-huit mois - et fixa sa première réunion plénière à juin ou juillet 1953.

L’UNESCO ET L’A.G.1.

C’est aussi la réunion de Bruxelles qui marque le début de la coopération sans réserve de l’unesco à cette entreprise.

Dès l’origine, 1’Unesco s’était intéressée au projet d’une troisième année polaire. L’Organisation - dont l’un des objectifs est de favoriser la coopération scientifique interna- tionale - accordait déjà un soutien moral et matériel à la

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plupart des organismes scientifiques internationaux qui s’inté- ressaient à cette entreprise. Il était donc naturel qu’elle la considérât avec faveur.

L’Unesco avait déjà fourni une contribution financière en vue de la réunion tenue par le C.S.A.G.I. à Bruxelles, le 13 oc- tobre 1952. A cette réunion, le secrétaire du C.S.A.G.I., le colonel E. Herbays, fut chargé de solliciter l’aide financière de I’Orga- nisation en vue de la création et de l’entretien d’un secrétariat permanent de l’Année géophysique internationale. L’Unesco répondit à cet appel en allouant au C.S.A.G.I. 1400 dollars pour l’organisation de sa première réunion plénière à Bruxelles et 1000 dollars pour la préparation de l’Année géophysique. Par la suite, elle accorda 2 000 dollars pour la deuxième réunion du C.S.A.G.I. (Rome, octobre 1954). Au cours de sa huitième session (1954), la Conférence générale de 1’Unesco vota une subvention de 5 000 dollars au C.S.A.G.I. pour la création d’un secrétariat permanent. Une subvention complé- mentaire de 15 000 dollars fut votée par le Conseil exécutif de l’unesco lors de sa quarante et unième session. En 1956, l’Organisation a versé au comité de ~‘A.G.I. une somme de 15 000 dollars pour l’entretien de sou secrétariat permanent et elle porte son aide financière à 50 000 dollars en 1957-1958.

Mais cette coopération n’est pas seulement d’ordre financier. L’Unesco a organisé une exposition itinérante de géophysique, qui doit circuler dans la plupart des pays du monde en 1957 et en 1958 et dont une section est consacrée aux activités prévues à l’occasion de l’Année géophysique internationale. Ainsi, l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture se préoccupe de faire connaître au grand public de tous les pays les efforts entrepris pour mieux expli- quer les phénomènes physiques qui se déroulent sur notre planète et autour d’elle.

LE PROGRAMME DE L’A.G.1.

Le bureau de I’I.c.s.u. ayant porté à onze le nombre des membres du C.S.A.G.I. (à dater de mars 1953)) celui-ci, au cours de sa première réunion plénière (Bruxelles, 30 juin - 3 juil- let 1953), élut son président (le professeur Sydney Chapman, Royaume-Uni), son vice-président (le professeur L.V. Berkner, Etats-Unis d’Amérique) et son secrétaire (M. M. Nicolet, Belgique, remplaçant le colonel E. Herbays, secrétaire provi- soire jusqu’au 1”’ novembre 1953).

A cette réunion assistaient, en plus des onze membres du

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C.S.A.G.I., les observateurs officiels de neuf pays, ainsi que M. W.J.G. Beynon (de la M.C.I.) , spécialement invité. Les parti- cipants examinèrent vingt et un rapports de comités natio- naux et une série de propositions émanant de divers orga- nismes scientifiques. Ils se répartirent ensuite en onze groupes de travail, correspondant chacun à un aspect du programme de l’Année géophysique internationale : Jours mondiaux, Météorologie, Géomagnétisme, Aurores et lueurs du ciel noc- turne, Ionosphère, Activité solaire, Rayons cosmiques, Longi- tudes et latitudes, Glaciologie, Océanographie, Publications.

Au cours des mois suivants; les comités nationaux modi- fièrent et élargirent leurs plans, conformément aux recomman- dations du c.s.A.G.I., afin d’intégrer au programme général de I’A.G.I. les projets de recherche nationaux. Le C.S.A.G.I. reçut, en outre, des organismes scientifiques affiliés à ~‘I.c.s.u., de nombreuses suggestions et recommandations, qui furent discu- tées au cours de sa deuxième réunion plénière (Rome, 30 sep- tembre - 4 octobre 1954).

A cette date, trente-six pays avaient déjà constitué un comité national et soumis des programmes d’activités pour ~A.G.I. Par l’intermédiaire de l’ambassade de 1’U.R.S.S. à Rome, l’Académie des sciences de ce pays avait fait savoir qu’elle coopérerait pleinement à ~‘A.G.I. et qu’un comité national avait été constitué en Union soviétique. L’U.R.S.S. fut représentée à la réunion de Rome, qui rassembla au total plus de cent participants. Le programme scientifique de l’Année géophy- sique internationale fut discuté et des suggestions spéciales formulées à l’intention des groupes de travail.

Un douzième groupe fut constitué, pour les fusées et satel- lites, et un correspondant fut désigné pour chaque groupe. Les participants étudièrent aussi la répartition géographique des stations d’observation, ainsi que la délimitation des zones spéciales, eu vue d’assurer de façon satisfaisante le rassemble- ment des données géophysiques dans le monde entier. Ils délimitèrent six zones géographiques et géomagnétiques et proposèrent de faire fonctionner plus de cinq cents stations d’observation.

La troisième réunion du C.S.A.G.I. (Bruxelles, 8-14 septembre 1955) fut consacrée à la mise au point définitive du pro- gramme de ~‘A.G.I. Les participants, au nombre de 172, repré- sentant 30 pays, examinèrent les rapports de 33 comités nationaux.

Ils mirent au point les programmes détaillés des « Jours mondiaux spéciaux » et des groupes de travail et prirent connaissance de plusieurs rapports concernant divers projets

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d’activités. La sismologie et la gravimétrie furent ajoutées au programme, qui se présente en définitive comme suit : Jours mondiaux (rapporteur : M. Shapley), Météorologie (M. van Mieghem), Géomagnétisme (M. Laursen), Aurores et lueurs du ciel nocturne (professeur Chapman), Ionosphère (M. Bey- non), Activité solaire (sir Harold Spencer Jones), Rayons cosmiques (professeur Simpson) , Longitudes et latitudes (professeur Danjon), Glaciologie et climatologie (M. Wordie) : Océanographie (M. Laclavère), Fusées et satellites (M. Berk- ner), Sismologie (M. Beloussov) , Gravimétrie (le R.P. Lejay) .

Le secrétaire général, M. Nicolet, put annoncer qu’à la date de cette réunion, quarante pays avaient décidé de participer à ~'A.G.I. et que le comité national de lU.R.S.S. avait commu- niqué son programme d’activités pour cette Année. Les parti- cipants étudièrent également une suggestion émanant du Comité de la zone aride de l’unesco et attirant leur attention sur la nécessité d’organiser un vaste réseau de stations de météorologie dans les régions arides.

Depuis la troisième réunion du c.s.A.G.I., les préparatifs se sont poursuivis et les premières expéditions sont parties pour l’Antarctique. Au moment de la rédaction de la présente brochure, cinquante-deux pays avaient annoncé leur partici- pation : République fédérale d’Allemagne, République démo- cratique allemande, Argentine, Australie, Autriche, Belgique, Bolivie, Brésil, Bulgarie, Canada, Chili, République populaire de Chine, Colombie, Danemark, Egypte, Equateur, Espagne, Etats-Unis d’Amérique, Ethiopie, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Inde, Indonésie, Iran, Irlande, Islande, Israël, Italie, Japon, Maroc, Mexique, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pakistan, Pays-Bas, Pérou, Philippines, Pologne, Portugal, Roumanie, Royaume-Uni, Suède, Suisse, Tchécoslovaquie, Tunisie, Union Sud-Africaine, Union des républiques soviétiques socialistes, Uruguay, Venezuela et Yougoslavie.

Grâce aux efforts conjugués des savants de tous ces pays, le programme soigneusement mis au point par le C.S.A.G.I. per- mettra de recueillir d’abondants renseignements sur la géophy- sique du globe et sur les phénomènes terrestres et atmosphé- riques qui n’ont été étudiés jusqu’ici que de façon fragmen- taire.

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CHAPITRE IV

LES OBJECTIFS DE L’ANNEE GEOPHYSIQUE INTERNATIONALE

LA TACHE DU C.S.A.C.I.

Avant que ne commence l’Année géophysique internationale, de multiples dispositions doivent être prises dans les domaines les plus divers de l’activité humaine. Il faut résoudre certains problèmes scientifiques, organiser la collaboration entre les nations participantes, adapter les programmes de recherche aux nécessités et aux possibilités techniques, vérifier et éta- lonner des appareils de mesure utilisés en des points très éloignés les uns des autres et dans des conditions météorolo- giques très différentes.

Il faut aussi tenir compte des particularités géographiques qui peuvent influencer les différents phénomènes à observer, prendre certaines précautions pour assurer I’évaluation correcte des enregistrements et des observations, mettre en place un dispositif spécial pour les communications. C’est la tâche du C.S.A.G.I. de résoudre toutes ces difficultés.

Le nombre exact des stations qui fonctionneront pendant l’année géophysique ne sera probablement connu qu’après le début de ~‘A.G.I. Plus de mille stations, dont beaucoup fonc- tionnent déjà, sont prévues pour l’enregistrement de toutes sortes de phénomènes : observatoires solaires, stations météo- rologiques, stations d’étude des rayons cosmiques, postes de lancement de ballons-sondes et de fusées.

En outre, les observations enregistrées par plus de deux mille stations météorologiques permanentes dans le monde entier devront être prises en considération au moment de l’évaluation des résultats de ~‘A.G.I. Des observations complé- mentaires seront encore demandées aux navires météorolo- giques et à des stations spéciales de haute mer.

Le C.S.A.G.1. a soigneusement étudié la répartition géogra- phique des stations d’observation, en tenant compte des exigences des douze disciplines scientifiques qu’intéresse le programme de ~‘A.G.I.

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LES ZONES DE RECHERCHES

A cet effet, le C.S.A.G.I. a délimid un certain nombre de zones, compte tenu des conditions scientifiques existantes. Les princi- pales sont l’Arctique et l’Antarctique - où l’on peut observer des phénomènes mal connus, tels que les aurores boréales et australes, et effectuer des enregistrements intéressants, qui doivent permettre de mieux comprendre les lois régissant l’incidence des particules électrisées d’origine solaire et des rayons cosmiques. Mais il est souhaitable aussi de disposer de nombreuses stations d’observation dans la zone équatoriale, jusqu’à présent défavorisée à cet égard. Les stations seront particulièrement nombreuses le long de certains méridiens : les méridiens 70”.80” ouest (du pôle Nord au pôle Sud en passant par le Canada, la côte est des Etats-Unis et la côte ouest de l’Amérique latine) ; 10” est (Scandinavie, Europe centrale, Afrique, océan Atlantique) et 140” est (Alaska, océan Pacifique).

LES PÉRIODES SPÉCIALES

Pour l’étude complète de tous les phénomènes qui doivent être observés au cours de l’Année géophysique internationale, il faut aussi tenir compte du facteur temps.

L’Année géophysique internationale commencera le 1” juil- let 1957 à 00 heure, temps universel (T.U.), et se terminera à 24 heures T.U. le 31 décembre 1958.

Pendant tout ce temps, les stations recueilleront des obser- vations géophysiques et enregistreront de façon continue toutes les données intéressantes. Certains jours dits < Jours mondiaux réguliers », seront effectuées des observations plus complètes.

Pendant l’Année géophysique internationale, il y aura au total soixante-huit Jours mondiaux réguliers - soit trois ou quatre en moyenne par mois. Le C.S.A.G.I. en a fixé provisoi- rement les dates lors de sa réunion de Rome, en fonction de certains phénomènes astronomiques. Il était prévu, à l’origine, deux jours par mois, vers l’époque de la nouvelle lune, et un troisieme vers l’époque du premier quartier - les dates exactes étant fixées de façon à coïncider avec les maximums de l’activité météorique. Ce calendrier provisoire a subi depuis de profondes modifications : plusieurs jours ont été ajoutés (par exemple pour tenir compte des éclipses de soleil) ; d’autres ont été supprimés.

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Le C.S.A.G.I. prévoyait, en outre, des « Jours mondiaux spéciaux », qui seraient annoncés lorsque se produiraient des pluies d’étoiles filantes, des orages magnétiques, des phéno- mènes ionosphériques particuliers ou des aurores polaires, ou encore à l’occasion du lancement de fusées. Depuis, ce plan a été remplacé par un autre, prévoyant des « Alertes » et des 8: Périodes internationales spéciales ».

Dans les cas énumérés ci-dessus, toutes les stations d’obser- vation participant à l’Année géophysique internationale seront alertées, « de façon à prévenir tous ceux qui souhaitent effectuer des observations à l’occasion d’une Période interna- tionale spéciale ». Quatre ou six jours plus tard, une telle période pourra être annoncée.

Les Alertes et les Périodes internationales spéciales seront annoncées par le C.R.P.L. (Central Radio Propagation Labora- tory) situé en Virginie (Etats-Unis d’Amérique). Ce service travaillera en liaison étroite avec des services analogues, français et japonais. Il déterminera aussi la fin des Périodes internationales spéciales.

Pour être satisfaisant, ce dispositif doit pouvoir fonctionner rapidement et selon un horaire fixe. Il est stipulé, par exemple, que le C.R.P.L. décidera avant 05 heures T.U., la veille du jour où doit commencer une Période internationale spéciale, si celle-ci aura lieu ou non. Dans l’affirmative, cette période commencera à 00 heure T.U. La décision doit être prise en fonction des observations disponibles et des recommandations de la station qui a demandé que l’alerte soit donnée (toute station d’observation peut demander une alerte). L’annonce d’une Période internationale spéciale doit parvenir à toutes les stations participant à ~'A.G.I. au moins douze heures à l’avance. Dans des circonstances très spéciales (éruption solaire importante et soudaine ou perturbations exceptionnelles), une Période internationale spéciale pourra être décidée sans Alerte préalable. On ne pense pas que le fait puisse se pro- duire plus de deux ou trois fois au cours de l’Année géophy sique internationale.

Sur la recommandation de l’Organisation météorologique mondiale (o.M.M.), il a été décidé d’instituer six « Intervalles météorologiques mondiaux », dont quatre coïncideront avec un solstice ou un équinoxe. Des observations météorologiques spéciales seront effectuées à ces occasions.

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ESSAI PRÉLIMINAIRE

Pour vérifier le fonctionnement des communications et des stations d’observation, il a été décidé qu’un essai préliminaire aurait lieu du 20 au 30 juin 1957. Cette période sera marquée par un Intervalle météorologique mondial, par trois Jours mondiaux réguliers consécutifs, enfin par des Périodes inter- nationales spéciales, si les conditions géophysiques le jus- tifient.

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CHAPITRE V

L’EXPLORATION DE L’ATMOSPHERE

LE ROLE PROTECTEUR DE L’ATMOSPHÈRE

La température terrestre ne dépend pas seulement de l’inten- sité du rayonnement solaire, mais aussi des conditions atmosphériques. La lune se trouve à peu près à la même distance du soleil que la terre et est donc soumise à un rayonnement d’une intensité équivalente. Or les écarts de température entre le jour et la nuit y sont infiniment plus grands et peuvent aller de +lOO” à -120”. La principale raison en, est l’absence d’atmosphère; toutefois, ces différences seraient moins grandes si la lune tournait sur elle-même aussi vite que la terre.

Zones d’absorption des ondes électromagné. tiques dans le spectre de l’atmosphère (échelle logarithmique des longueurs d’onde).

lumière visible

I 1 I I

0.1 0.001 1.001000 10000 1000 100 10

: I I I

mktres centimétrer angrtroems

LqNGUEURS D’ONDE

L’atmosphère terrestre fait aussi fonction d’écran contre certaines radiations et certains débris cosmiques. Une grande partie des rayons ultraviolets émis par le soleil sont absorbés par les couches supérieures de l’atmosphère et n’atteignent

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jamais le sol. On peut le regretter du point de vue de la science, mais l’humanité ne peut que s’en féliciter : chacun connaît les effets néfastes d’une exposition prolongée aux rayons ultraviolets, par exemple en haute montagne.

En traversant l’atmosphère, les particules primaires lourdes qui forment les rayons cosmiques se transforment en particules secondaires. Les poussières météoriques et les météores sont freinés dans leur chute et souvent détruits par le frottement atmosphérique. On peut admettre que la surface de la lune, qu’aucune atmosphère ne protège, est recouverte d’une épaisse couche de ces poussières.

Tous ces faits justifient une étude très attentive des phéno- mènes atmosphériques et il est naturel qu’une telle étude figure au premier rang des activités prévues pour l’Année géophysique internationale. A cela s’ajoute une autre consi- dération. Dans toutes les branches de la géophysique, de nou- veaux appareils de mesure et de nouvelles méthodes de recherche ont été mis au point au cours des dernières dizaines d’années. Mais c’est dans l’exploration de l’atmosphère que l’on a réalisé les progrès les plus remarquables.

Après les ballons-sondes, la radio et le radar, on dispose maintenant, avec les fusées, d’un nouveau moyen d’explorer scientifiquement l’atmosphère à des altitudes qui paraissaient jusqu’ici inaccessibles.

RECHERCHES SUR LA MÉTÉOROLOGIE

L e programme météorologique de ~‘A.G.I. prévoit de très nombreux enregistrements de tous les phénomènes météoro- logiques a classiques », sur toute la surface du globe et non pas seulement dans les régions polaires. La température sera mesurée deux fois par jour à différentes altitudes jusqu’à 20 000 mètres et, si possible, jusqu’à 30 000; la vitesse du vent le sera à différentes hauteurs, quatre fois par jour. A cet effet, on observera les formations nuageuses et la dérive des ballons-sondes, on utilisera les enregistrements effectués par ces derniers et les renseignements fournis par les radars.

Certains ballons seront munis de réflecteurs spéciaux, répon- dant à des signaux radio-électriques émis au sol. En mesurant le temps que met un signal pour revenir au sol, on peut calculer l’altitude du ballon. En répétant le signal à certains intervalles, on peut enregistrer la vitesse du ballon et divers phénomènes intéressants.

Les précipitations et la température de l’air, du sol et de

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l’eau seront enregistrées par des postes d’observation, qui seront répartis sur toute la surface du globe et dont un grand nombre seront situés dans de petites îles, au milieu de l’océan. On obtiendra ainsi un tableau précis de l’équilibre thermique de la terre, ce qui permettra, en tenant compte des autres données recueillies, de mieux prédire l’évolution du temps. Les phénomènes météorologiques feront l’objet d’observations suivies dans les régions présentant des caractères topogra- phiques particulièrement intéressants (montagnes à relief accentué, déserts, etc.). La répartition des terres et des mers, des montagnes et des plaines influe, en effet, considérablement sur les conditions météorologiques, l’état de l’atmosphère étant supposé constant. De même, les changements de temps soudains et imprévisibles que l’on constate en Europe sont dus, en grande partie, à la topographie si capricieuse de ce continent.

DÉTECTION DES RADIATIONS

De nombreuses stations mesureront le rayonnement solaire, à l’aide d’appareils spéciaux, et observeront le rayonnement terrestre reflété par la lune.

Chacun sait que la partie brillante du disque lunaire reflète directement la lumière du soleil, mais la partie sombre de ce disque présente aussi une certaine luminosité (la « lumière cendrée ») : c’est le reflet du rayonnement de la partie de la terre éclairée par le soleil.

L’iutensité du rayonnement terrestre (ou albedo) est très variable : les nuages renvoient environ 80 p/o de la lumière qu’ils reçoivent du soleil, tandis que le sol et les eaux n’en renvoient que 4 y0 environ. On peut donc calculer, d’après l’intensité de la lumière cendrée, la nébulosité globale de la partie de la terre qui, au moment de l’observation, est éclairée par le soleil et tournée vers la lune.

ORACES ET NUAGES LUMINESCENTS

Comme il est naturel, les orages seront spécialement étudiés, au moyen d’observations directes, d’enregistrements radio- électriques et de radars. Les météorologistes et les astronomes examineront attentivement les nuages luminescents (nuage8 nacrés) que l’on observe parfois la nuit, à des altitudes où l’on ne peut effectuer de mesures directes que par fusées ou ballons-sondes.

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LES RAYONS ULTRAVIOLETS DU SOLEIL

C’est entre 50 et 17 kilomètres d’altitude que les rayons ultra- violets du soleil sont arrêtés par les molécules d’oxygène de l’air.

Variations de la limite d’absorp

1500 2000 2500 3000

Longueurs d’onde en angstrœms

Normalement, ces molécules sont formées de deux atomes d’oxygène. Certaines d’entre elles, lorsqu’elles absorbent les rayons ultraviolets du soleil, se décomposent en leurs atomes constitutifs ; mais ceux-ci ne demeurent pas isolés : ils s’unissent à des molécules d’oxygène intactes pour former l’ozone, gaz dont les molécules comprennent trois atomes d’oxygène. Bien que la teneur en ozone de l’atmosphère soit tres faible, ce gaz joue un rôle important : on sait, en effet, combien les rayons ultraviolets sont dangereux. L’ozone mérite donc une étude scientifique attentive.

Les processus chimiques et physiques suivant lesquels les atomes d’oxygène se séparent et se regroupent sont encore mal connus. En étudiant au moyen de ballons-sondes la teneur de l’atmosphère en ozone, on doit pouvoir mieux comprendre les processus électro-chimiques suivant lesquels l’oxygène mono- atomique se transforme en oxygène tri-atomique, et vice-versa.

COMPOSITION CHIMIQUE DE L’ATMOSPHÈRE

On étudiera spécialement la teneur en oxygène et en gaz carbonique de l’atmosphère dans l’Antarctique. Ces deux corps jouent, en effet, un rôle important dans la vie des plantes, qui absorbent le gaz carbonique de l’air et produisent de l’oxygène plus qu’elles n’en consomment en respirant. La

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plus légère modification de la teneur en gaz carbonique de l’atmosphère aurait d’importants effets sur la température moyenne de notre planète. Or c’est l’activité des plantes qui détermine la teneur de l’atmosphère en gaz carbonique et, à un moindre degré, en oxygène. Comme il n’existe aucune vie végétale dans l’Antarctique, on peut penser que ces deux gaz y sont représentés dans des proportions qui ne sont pas les mêmes qu’ailleurs. Il reste à savoir quels effets cette différence exerce sur les courants atmosphériques.

LES FUSÉES ET L’EXPLORATION DE LA HAUTE ATMOSPHÈRE

On sait depuis un certain temps déjà que la haute atmosphère exerce une influence capitale sur le climat. Mais on ignore encore la hauteur exacte de l’atmosphère et on connait mal ses caractéristiques. Nous vivons au fond d’un océan d’air et nous ne pouvons que lancer de temps en temps des fusées pour tenter d’en atteindre la surface.

Plus de cent fusées ont été lancées au cours des dernières années. Certaines ont atteint une altitude de 250 kilomètres; les plus perfectionnées, une altitude de 402 kilomètres.

Ces fusées transportaient des instruments scientifiques. Ainsi, des observations ont pu être effectuées soit par télé- mesure (les enregistrements étant transmis au sol par radio), soit par les instruments eux-mêmes, récupérés grâce à des parachutes. Une grande partie des renseignements dont nous disposons sur la stratosphère, l’ionosphère et l’exosphère (partie de l’atmosphère située au-delà de l’ionosphère) ont été obtenus par cette méthode. Mais, si nous avons certaines indications concernant les pressions, les températures, les vents, les conditions électriques et la composition chimique de l’air à très haute altitude, nous sommes encore loin de connaître la nature exacte de la haute atmosphère et son rôle par rapport aux autres couches d’air. Nombre de phénomènes qui se produisent à plus de 30 kilomètres d’altitude sont encore mal expliqués et certains paraissent même contredire les théories actuellement admises.

Le programme de lancement de fusées établi pour ~‘A.G.I. doit nous fournir des renseignements complémentaires qui nous permettront de confirmer ou d’infirmer ces théories.

La technique des fusées est extrêmement complexe. Les fusées elles-mêmes et les instruments de mesure qu’elles transportent sont des appareils très délicats. Leur construction exige d’énormes dépenses, et un programme de lancement de

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Mise en place d’instruments de mesure dans la tête d’une fusée.

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Lancepnt d’une fusée Viking dans le désert du Nouveau-Mexique (Etats- Unis d’Amérique).

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fusées constitue, même à l’heure actuelle, l’une des entreprises scientifiques les plus coûteuses que l’on puisse imaginer. Depuis dix ans, une expérience considérable a été acquise dans ce domaine aux Etats-Unis d’Amérique, où l’on a lancé un grand nombre de ces engins, équipés d’appareils de mesure et de télémesure, ainsi que de cameras. Sur certaines fusées on a même embarqué des animaux, afin de pouvoir étudier les effets physiologiques d’un séjour dans la haute atmosphère.

Toutes ces expériences seront reprises avec beaucoup plus d’ampleur et de façon coordonnée au cours de l’Année géophy- sique internationale. Les plus grosses fusées - comme I’derobee américaine ou la Véronique française - seront lancées du sol. Les plus petites seront transportées par ballon à plusieurs kilomètres d’altitude, poursuivant ensuite leur course par leurs propres moyens.

Ces ballons-fusées (ou 6: rockoons ») ont donné récemment d’excellents résultats. Une fusée d’une quinzaine de kilo- grammes peut être transportée par ballon jusqu’à 27 kilo- mètres de hauteur et monter ensuite à 100 kilomètres. Les < rockoons > permettent de déterminer avec une grande pré- cision la teneur en ozone, la pression et la densité de l’air, ainsi que d’étudier le processus d’ionisation et d’autres phéno- mènes. Tous les instruments de mesure nécessaires existent déjà et seront utilisés au cours de l’Année géophysique inter- nationale.

Le comité national américain de ~‘A.G.I. a annoncé que les A;r;tsyris d’Amérique lanceraient trente-six fusées du type

L’Amobee est une fusée à combustible liquide. Pour sa propulsion, on utilise l’aniline et l’acide azotique. Longue de 6,25 mètres, elle peut transporter à 70 kilomètres d’altitude 12,5 kilogrammes d’appareils scientifiques.

En plus des Aerobees, une centaine de « rockoons » seront lancés de différents points du globe - principalement de l’Arctique et de l’Antarctique.

La France lancera 12 fusées du type Véronique. La Véro- nique, qui utilise également un combustible liquide, fonc- tionne à l’alcool et à l’acide azotique. Elle a atteint, au cours d’essais récents, l’altitude de 130 kilomètres. Longue de 7,30 mètres, elle peut emporter une charge de 50 kilogrammes. Les bases de lancement des fusées franyaises sont situées dans le Sahara. Le Royaume-Uni lancera un certain nombre de fusées de différents types. Enfin, le Japon doit utiliser un type de fusée récemment mis au point, qui utilise des combus- tibles solides.

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On peut espérer que d’autres pays encore participeront à cette entreprise. Les fusées figurent parmi les instruments les plus modernes dont on dispose pour les recherches sur la haute atmosphère. Elles ont permis d’obtenir des résultats qui auraient été impensables il y a seulement vingt ou trente ans Grâce à elles, nous serons en mesure d’atteindre et de dépasser les frontières de l’espace, non seulement en esprit - en interprétant les données qu’elles enregistrent sur le monde étrange qui s’étend au-dessus de nous - mais aussi pratiquement, lorsque nous entrerons dans l’ère des explora- tions interplanétaires.

Ce n’est pas par hasard que le C.S.A.G.I. accorde une impor- tance spéciale au programme de recherches sur la haute atmosphère. Les régions qui sont uniquement parcourues aujourd’hui par des fusées sans pilote verront avant longtemps les premières tentatives de l’homme pour atteindre l’espace interplanétaire et s’élancer vers d’autres mondes. Ainsi, les recherches sur la haute atmosphère qui vont se poursuivre au cours de l’Année géophysique internationale préfigurent logi- quement la plus grande aventure que l’homme soit appelé à vivre : l’exploration de l’espace interplanétaire.

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CHAPITRE VI

AUX FRONTIERES DE L’UNIVERS

L’EXOSPHÈRE

Les fusées n’intéressent pas que les météorologistes. Les radio- électriciens, les physiciens, les spécialistes des rayons cos- miques, ceux de la physique solaire, entre autres, veulent aussi pouvoir utiliser ces engins afin d’étudier des phénomènes tels que les, aurores polaires, les météorites, les perturbations du magnétisme terrestre et, naturellement, les rayons cos- miques.

11 existe peu de moyens de se documenter sur les phéno- mènes qui se produisent dans l’exosphère. On a déjà procédé au sol à des observations nombreuses et détaillées; en outre, depuis quelques dizaines d’années, on effectue des sondages en enregistrant les échos d’ondes radio-électriques émises sur différentes fréquences. Actuellement, on attend beaucoup des explorations par fusées.

On distingue quatre régions dans l’atmosphère : a) la tro- posphère, qui représente approximativement 79 % de la masse et 0,25 y0 du volume de l’atmosphère ; b) la stratosphère, 20 % de la masse et 2 70 du volume; c) l’ionosphère, qui sera décrite en détail dans les pages suivantes; d) l’exosphère, qui, avec l’ionosphère, ne représente que 1 70 environ de la masse, mais plus de 97 % du volume de l’atmosphère.

Le présent chapitre est consacré à I’exosphère et aux phénomènes qui s’y déroulent.

LES AURORES POLAIRES

Les aurores (boréales ou australes) sont très fréquentes dans les régions polaires. Elles d eviennent plus rares à mesure qu’on s’éloigne des pôles. Dans les régions arctique et antarc- tique (au-delà du 608 parallèle), elles sont visibles presque chaque nuit - sauf par temps couvert et pendant l’été (période des nuits blanches). Elles sont formées de rayons

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rougeâtres, verdâtres, parfois bleuâtres, mobiles ou immobiles, et affectent diverses formes (draperies, rayons, etc.). On en observe sous les latitudes moyennes et, exceptionnellement (une ou deux fois tous les dix ans), dans la zone équatoriale, au mo- ment des grands orages solaires. Le 26 janvier 1938, on a observé en Europe une aurore boréale si brillante que les habitants de la banlieue de Londres crurent que la ville était en feu.

Les aurores polaires se produisent à des altitudes comprises entre 60 et 1 100 kilomètres, surtout entre 90 et 400 kilomètres. Elles sont provoquées par des particules atomiques émises par les foyers d’activité solaire et leur fréquence est fonction de l’intensité de cette activité. On ne sait pas encore exacte- ment par quel processus physique les particules atomiques (qui sont probablement surtout des noyaux d’atomes d’hydro- gène), rendent les molécules d’air luminescentes en pénétrant dans l’atmosphère. Les recherches envisagées doivent per- mettre de résoudre un grand nombre des problèmes que posent encore les aurores polaires ainsi que la plupart des autres phénomènes de la haute atmosphère.

Le programme de l’Année géophysique internationale pré- voit la création de neuf observatoires - dont certains fonc- tionnent déjà - et de vingt-cinq à trente stations, pour l’étude des aurores polaires. On étudiera surtout les aurores australes, au sujet desquelles on n’a fait jusqu’à présent que peu d’obser- vations. On s’efforcera de déterminer exactement la morpho- logie de ce phénomène : fréquence, différentes formes, inten- sité, couleurs et composition spectrale, luminosité, altitude et coordonnées géographiques.

,4 cet effet, on utilisera les instruments les plus modernes, notamment des appareils de prise de vues automatiques, per- mettant de photographier tout le ciel avec des temps d’expo- sition très courts. Le ciel sera ainsi photographié toutes les cinq minutes, de d ff i érents points répartis sur toute la surface du globe - ce qui devrait permettre d’enregistrer la phase initiale, encore très mal connue, d’une aurore polaire. Grâce aux observations qui seront ainsi effectuées en différents points, on espère pouvoir établir une carte « iso-aurorale », c’est-à-dire une carte montrant la répartition géographique - ou plutôt géomagnétique - des aurores polaires. Cette entreprise présente une grande importance. En effet, les parti- cules électrisées, émises par le soleil, qui provoquent les aurores polaires, sont déviées de leur trajectoire normale par le champ magnétique terrestre et ne peuvent pénétrer dans l’atmosphère que suivant les lignes de force de ce champ, c’est-à-dire dans les régions polaires.

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C’est pourquoi les aurores sont surtout visibles au voisinage des pôles: Pour qu’un flux de particules atomiques émises par le soleil atteigne l’atmosphère à une latitude géomagnétique pIus basse et y excite les molécules d’air au point de les rendre luminescentes, il faut que ce flux soit très intense et ces particules animées d’une très grande énergie.

Trajectoires des particules électrisées, émises par le soleil, qui provoquent les aurores polaires.

Mais on ne se contentera pas de photographier les aurores polaires et d’observer leur apparence. Des analyses spectrosco- piques et calorimétriques fourniront des renseignements complémentaires sur ce phénomène et permettront, notam- ment, d’identifier les particules et d’en mesurer la vitesse. Ces données seront très utiles pour l’analyse quantitative du champ magnétique terrestre (voir plus loin).

Les radio-observatoires émettront constamment des signaux radio-électriques, sur des longueurs d’ondes comprises entre 3 et 10 mètres, et enregistreront les échos qui se produiront en réponse à ces signaux, aux altitudes où se forment les aurores polaires. 11 sera ainsi possible de déceler ces dernières - même par temps nuageux, par clair de lune, ou en plein jour - et d’en déterminer l’altitude. Il sera intéressant de faire effectuer simultanément ces calculs par plusieurs stations situées sur un même méridien géomagnétique, afin de déter- miner s’il existe un rapport entre la latitude géomagnétique et l’altitude des aurores polaires. L’analyse spectroscopique des aurores polaires fournira aussi des renseignements sur la composition chimique de l’exosphère et sur les réactions physiques et chimiques qui s’y produisent constamment.

De nombreux amateurs observeront aussi les aurores polaires au cours de ~‘A.G.I. On s’efforcera, en outre, de vérifier s’il est exact que des phénomènes sonores accompagnent l’apparition de ces aurores. Le professeur suédois Carl Stkmer, l’une des plus hautes autorités dans ce domaine, n’exclut pas cette

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possibilité, qui est fortement mise en doute par d’autres savants. En conséquence, pl usieurs observatoires auroraux seront équipés d’appareils d’enregistrement sonore extrême- ment sensibles. Enfin, on mesurera le potentiel électrique de l’air au voisinage du sol, car les phénomènes électriques pro- voqués dans la haute atmosphère par les corpuscules solaires sont peut-être encore observables dans les couches inférieures de l’atmosphère, grâce à la présence de particules chargées d’électricité - par exemple, les particules secondaires des rayons cosmiques.

LE RAYONNEMENT LUMINEUX DE LA HAUTE ATMOSPHÈRE

Un phénomène voisin - le rayonnement lumineux de la haute atmosphère - fera également l’objet de nombreuses observations pendant l’Année géophysique internationale. Normalement, ce rayonnement est trop faible pour être visible à l’œil nu ou pour pouvoir être photographié avec un temps d’exposition réduit. En conséquence, de nombreuses stations seront équipées de cellules photo-électriques extrêmement sensibles à la lumière et produisant un courant électrique d’un voltage proportionnel à la quantité de lumière reçue. 0 n pourra mesurer ainsi le rayonnement nocturne. Quant au rayonnement diurne ou crépusculaire, il sera observé au moyen de fusées, qui atteindront des altitudes où la lumière solaire est moins dispersée et ou, par conséquent, le ciel est toujours sombre, même en plein jour. D’ailleurs, le rayonne- ment diurne et crépusculaire est plus intense, donc plus faci- lement observable au moyen de fusées.

L’intensité du rayonnement varie - nous ne savons pour- quoi - suivant les saisons et suivant la position géographique. Seules, des observations coordonnées, effectuées en de nom- breux points différents, permettront de préciser les causes de ces variations. A cet effet, le ciel sera observé à l’aide de cellules photo-électriques, toutes les demi-heures, par plusieurs stations qui seront situées les unes sur le même méridien - depuis Thulé (Groenland) jusqu’au Mexique, en passant par le Canada et les Etats-Unis d’Amérique - les autres en Alaska, à Hawaii et au Congo belge. Ces observations, complé- tées par les études spéciales qui seront effectuées par d’autres stations, permettront de procéder à une analyse complète du phénomène.

Les fusées joueront également un rôle important dans ces recherches, en enregistrant le rayonnement diurne et crépus-

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culaire et en en effectuant l’analyse spectroscopique, notam- ment en ce qui concerne les raies vertes et rouges du spectre du sodium. L’emploi de photomètres enregistreurs - qui pourront être réglés, au besoin, de façon à mesurer l’intensité du rayonnement dans certaines portions seulement du spectre - fournira de nouvelles indications sur les processus phy- siques qui sont à l’origine de ce phénomène,

LES RAYONS COSMIQUES

Les rayons cosmiques constituent l’un des phénomènes les plus intéressants de la haute atmosphère. L’Année géophy sique internationale fournira aux savants la première occasion d’etudier simultanément ces rayons en des points très éloignés les uns des autres, selon un programme coordonné et à l’aide d’instruments rigoureusement étalonnés.

Les phénomènes relatifs aux rayons cosmiques seront enre- gistrés de façon continue par plus de soixante stations, dont certaines fonctionnent déjà. On utilisera à cet effet deux séries d’appareils : des « télescopes de compteurs », pour enregistrer les particules à forte énergie, et des « chambres d’ionisation », pour identifier les particules à faible énergie. Ces enregistre- ments seront effectués à la fois à basse altitude et en haute montagne.

L’observation des particules secondaires des rayons cos- miques et de leurs variations en fonction des orages magné- tiques, de la position géographique, du temps sidéral, etc., fournira sans doute certaines indications quant à l’origine de ces rayons. En France, des chercheurs placés sous la direction des professeurs Pierre Auger et J. Daudin ont obtenu des résultats très importants en analysant des enregistrements de rayons cosmiques effectués au cours des dernières années. Ils ont constaté, notamment, que l’intensité de ces rayons varie en fonction du temps sidéral et qu’elle augmente dès que le centre de la galaxie vient occuper une certaine position par rapport à l’horizon. Ces observations demandent encore à être confirmées, mais elles fournissent déjà une première indica- tion au sujet de l’origine des rayons cosmiques.

L’IONOSPHÈRE

L’ionosphère ne forme pas, en réalité, une « couche B unique, mais une série de couches situées à différentes altitudes. C’est

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dans cette vaste région de l’atmosphère que les atomes, sous l’effet de l’excitation électrique, perdent un ou plusieurs électrons et acquièrent ainsi une charge positive. L’ionisation peut être simple (lorsque l’atome perd un seul électron, comme dans le cas de l’hydrogène) ou double, triple, etc., selon la nature chimique de l’atome et les conditions électriques du milieu ambiant. Les atomes de l’étain peuvent perdre jusqu’à 50 électrons. Pour produire une ionisation aussi intense, ik faut évidemment des quantités d’énergie extrêmement élevées, qui résultent, précisément, de la présence des particules pri- maires des rayons cosmiques. Dans des conditions différentes, les atomes neutres reçoivent des électrons supplémentaires, devenant ainsi négativement ionisés.

Lorsqu’on émet verticalement des ondes radio-électriques suivant certaines fréquences, ces ondes sont réfléchies par les couches ionisées de l’atmosphère et renvoyées au sol en un temps qui est de l’ordre d’un millième de seconde. La durée exacte du trajet aller et retour permet de calculer l’altitude de la couche réfléchissante, puisque les ondes radio-élec- triques, comme toutes les vibrations électromagnétiques, se déplacent à la vitesse de 300 000 kilomètres par seconde. Comme il est, d’autre part, possible de calculer la densité en électrons à diverses altitudes, on peut se faire une idée assez précise des échanges électro-physiques complexes qui se pro- duisent aux frontières de l’espace.

Ces recherches ont permis de distinguer au moins quatre - et peut-être cinq - couches différentes où les atomes subissent une ionisation intense.

La couche inférieure, ou couche D, se trouve à une altitude moyenne de 45 kilomètres; la deuxième (couche E) commence à 70 kilomètres; les couches Fl et F2, à 140 et 290 kilomètres d’altitude respectivement. On admet enfin qu’une cinquième couche, la couche G, se situe entre 400 et 700 kilomètres, mais son existence demande encore à être vérifiée.

L’intensité de l’ionisation et, par suite, la capacité des couches ionosphériques à réfléchir les ondes radio-électriques varient considérablement. Ce pouvoir réfléchissant est sélectif; autrement dit, chaque couche renvoie vers le sol les ondes de certaines fréquences seulement. Les variations de l’ionisation sont en rapport étroit avec les radiations solaires. On a même démontré récemment que l’ionisation est un effet de ces radia- tions. Il n’est donc pas étonnant que des variations suffisam- ment fortes de l’activité solaire produisent une déformation des couches ionisées et qu’en analysant les phénomènes ionosphériqnes enregistrés, pendant des périodes suffisamment

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longues, on retrouve le cycle de l’activité solaire, qui est de onze ans environ.

Les sans-filistes et les auditeurs’ d’émissions sur ondes courtes connaissent bien le phénomène d’évanouissement du son (fading) pendant les années d’intense activité solaire. Ce phénomène est un effet direct des déformations de l’iono- sphère. Notre connaissance des phénomènes ionosphériques s’est considérablement accrue, grâce à l’emploi des fusées, mais nous ne savons pas encore exactement par quel processus l’ionisation s’intensifie à une certaine hauteur et diminue en même temps à d’autres altitudes. On explique mal aussi les tem- pératures extrêmement élevées (plusieurs centaines de degrés centigrades) que des expériences faites au moyen d’ondes radio-électriques ont permis de relever dans l’ionosphère.

Mais l’analyse spectroscopique des aurores polaires fait apparaître des températures encore plus élevées, si bien que, pour le moment, notre connaissance des conditions de tempé- rature dans la haute atmosphère est assez imprécise. 11 est probable que les nombreuses observations des phénomènes de la haute atmosphère qui seront faites, directement ou à l’aide de fusées, permettront d’éclaircir la question.

Pour avoir un tableau détaillé des modifications séculaires, journalières et horaires de l’ionisation à différentes altitudes, il serait nécessaire d’observer la totalité de l’atmosphère de façon continue. Les quelques stations qui existent actuelle- ment ne suffisent pas à cette tâche. L’Année géophysique internationale fournira la première occasion d’étudier de façon coordonnée les changements de structure de l’ionosphère et les perturbations locales qui s’y produisent fréquemment.

Plus d’une centaine de stations - situées dans certaines zones, le long de certains méridiens et au voisinage des pôles géomagnétiques - observeront l’ionosphère de façon constante. Elles émettront vers l’ionosphère des signaux radio- électriques sur différentes longueurs d’onde, étudieront la dispersion des ondes dans l’ionosphère, enregistreront la pro- pagation des ondes de différentes fréquences dans la tropo- sphère et analyseront les dérives ionosphériques.

Enfin, on étudiera les émissions radio-électriques des étoiles, des aurores polaires et du soleil - ce qui fournira aussi des indications sur la structure de l’ionosphère.

Comme la plupart des corps lumineux, en effet, les étoiles, le soleil et les nébuleuses émettent non seulement des ondes lumineuses visibles, mais aussi des ondes radio-électriques de différentes fréquences. C e 11 es qui pénètrent dans l’ionosphère et atteignent le sol ont été très attentivement étudiées, au

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cours des dernières années. Il s’est constitué ainsi une disci- pline nouvelle et passionnante : la radio-astronomie, qui nous a déjà révélé nombre de faits intéressants relatifs à la consti- tution de l’univers. L’écoute continue des bruits électromagné- tiques émis par certaines étoiles, par le soleil ou par les aurores polaires permet aussi d’améliorer notre connaissance des phénomènes géophysiques, car les modifications que subissent les ondes radio-électriques en pénétrant dans l’iono- sphère nous fournissent des indications au sujet de celle-ci.

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CHAPITRE VII

PRELUDE A L’ASTRONAUTIQUE

LES SATELLITES ARTIFICIELS

L’Année géophysique internationale ne sera pas seulement la première entreprise scientifique moderne de caractère vrai- ment international; elle marquera aussi le premier effort de l’homme pour conquérir les espaces interplanétaires. Son programme comprend, en effet, le lancement, jusqu’aux limites de l’atmosphère, de plusieurs engins qui ne retombe- ront pas sur la terre.

Le 29 juillet 1956, M. James C. Hagerty, secrétaire de presse du président Eisenhower, annonçait, lors d’une conférence de presse, que les Etats-Unis allaient lancer dans l’espace, au cours de l’Année géophysique internationale, six à douze petits satellites artificiels. Des membres de la National Aca- demy of Sciences et de la National Science Foundation expli- quèrent en même temps aux journalistes les aspects scienti- fiques et techniques de cet ambitieux projet.

Deux jours plus tard, les professeurs soviétiques Sedov et Ogorodnikov déclaraient à une autre conférence de presse, à Copenhague, que 1’U.R.S.S. lancerait une petite plate-forme dans l’espace, au cours de l’Année géophysique internationale. M. Hagerty avait indiqué que le projet américain exigeait la coopération des savants de nombreux pays et aurait donc un caractère vraiment international ; de leur côté, les savants soviétiques précisèrent que les données enregistrées grâce à leur satellite seraient « librement accessibles à tous les intéressés ».

Les deux conférences de presse faisaient suite à une initia- tive du C.S.A.G.I. (Comité spécial de l’Année géophysique inter- nationale). Lors de la réunion tenue par cet organisme à Rome, en septembre 1954, il avait, en effet, été suggéré aux Etats participants de lancer, si possible, de petits satellites portant des appareils scientifiques, afin d’enregistrer certains phénomènes de la haute atmosphère et de l’espace extérieur.

Ces engins devaient être conçus comme des satellites au sens strict - c’est-à-dire qu’une fois placés sur leur orbite,

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ils devaient tourner autour de la terre sans l’aide d’aucun dispositif de propulsion, soumis uniquement aux lois phy siques qui régissent les mouvements du soleil, de la lune et des étoiles. En somme, il s’agissait de lancer dans l’espace de petites lunes de fabrication humaine.

En recommandant l’examen de cette proposition, les membres du C.S.A.G.I. savaient bien que les progrès incessants, réalisés depuis quelques dizaines d’années en matière de lancement de fusées, rendaient un tel projet réalisable.

Des travaux préliminaires, effectués indépendamment aux Etats-Unis d’Amérique et en U.R.S.S., convainquirent les spécialistes des deux pays que ce projet ne soulevait pas de difficultés techniques insurmontables. Le plan américain, dit < projet Vanguard », fut rendu public à la suite de la confé- rence de presse de la Maison Blanche. Un crédit de 10 millions de dollars - porté par la suite à 20 millions - fut voté pour sa mise à exécution, avec l’entière approbation du président des Etats-Unis d’Amérique.

LE PROJET a VANGUARD >

Les Américains lanceront donc un certain nombre de satellites -- mesurant une cinquantaine de centimètres de diamètre et pesant une dizaine de kilogrammes - qui tourneront autour de la terre sur des orbites elliptiques, entre 250 et 500 kilo- mètres d’altitude et à la vitesse de 28 000 kilomètres à l’heure. Ces satellites seront équipés d’appareils scientifiques, permet- tant de mesurer divers phénomènes atmosphériques et cos- miques, et de petits émetteurs de radio, qui diffuseront les données ainsi recueillies.

Nous pourrons ainsi obtenir des renseignements sur les conditions atmosphériques, sur la composition de l’atmosphère, sur les radiations ultraviolettes solaires et interstellaires, sur les rayons cosmiques, sur les particules météoriques, etc.

Nombre de ces données n’ont jamais été recueillies jusqu’ici, Les fusées elles-mêmes ne nous fournissent - au sujet des températures, des pressions, des phénomènes électriques, des rayons cosmiques et des rayons ultraviolets du soleil - que des indications fragmentaires, puisqu’elles ne séjournent dans la haute atmosphère qu’une minute ou deux. Les connaissances que nous devons aux fusées lancées jusqu’à présent ne repré- sentent pas, au total, plus d’une heure d’observation.

Les satellites, eux, doivent tourner sur leur orbite pendant des jours ou des mois, voire des années. Ils permettront ainsï

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de vérifier et de préciser les indications fournies par les fusées en ce qui concerne les processus complexes qui se déroulent aux frontières de l’espace.

Le lancement d’un satellite artificiel n’est pas une opération facile. Il exige la coopération des meilleurs mathématiciens, astronomes, balisticiens, chimistes et spécialistes des fusées.

Les satellites seront lancés à l’aide de puissantes fusées. Les orbites seront calculées par des calculatrices électroniques, en tenant compte des perturbations qui peuvent résulter de l’attraction d’autres corps célestes, du frottement de l’air pen- dant l’ascension et d’un fonctionnement imparfait des fusées.

Aucune fusée simple actuellement en usage n’est assez puissante pour lancer un satellite sur son orbite. Pour faire tourner autour de la terre, à une altitude de 350 kilomètres, un engin dépourvu de tout moyen de propulsion, il faut d’abord le projeter à cette altitude, puis lui donner une impulsion latérale qui accélère sa vitesse jusqu’à 28 000 kilo- mètres à l’heure (vitesse de révolution). C’est à cette vitesse seulement que la force centrifuge est suffisante pour contre- balancer l’attraction de la terre. On peut dire que le satellite doit constamment tomber en décrivant autour de la terre une circonférence, ou une ellipse. Sous l’effet de la gravité, il doit parcourir une certaine distance en un certain temps, mais parallèlement à la surface du sol. Il s’agit de réaliser un équilibre constant entre un mouvement de chute verticale et un mouvement de translation latérale.

Pour lancer les satellites du projet Vanguard sur leur orbite, on prévoit des fusées à trois éléments. Le lancement aura lieu au centre d’essais de l’armée de l’air américaine (Patrick Air Force Base), à Cocoa (Floride).

Une fusée à trois éléments est constituée par trois fusées distinctes, montées de façon que la pointe de la première supporte la queue de la deuxième - et ainsi de suite. Le moteur du premier élément sert à lancer l’ensemble. Dès que son combustible est épuisé, il se détache et un dispositif automatique met en marche le moteur du deuxième élément. Dès que le combustible de celui-ci est épuisé, il se détache à son tour et le troisième moteur démarre.

Evidemment, les fusées-gigognes peuvent comprendre plus de trois éléments. On peut même concevoir une fusée compre- nant un nombre d’éléments suffisant pour aller dans la lune. (Une fusée simple serait inutilisable pour la seule raison que nous ne connaissons aucun combustible qui soit suffisamment puissant pour propulser un tel engin au-delà des limites de l’attraction terrestre.)

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Pour lancer les satellites du projet Vanguard sur une orbite située à 350 kilomètres environ d’altitude, il faudra une fraction seulement de l’énergie qui serait nécessaire pour lancer une fusée dans la lune, mais bien plus que n’en peut fournir une fusée simple.

Le premier élément de la fusée aura brûlé tout son combus- tible et retombera dans l’océan Atlantique cent quarante secondes après le décollage. L’ensemble aura alors atteint l’altitude de 60 kilomètres environ et la vitesse de 5 500 kilo- mètres à l’heure.

Le deuxième élément aura brûlé son combustible à l’alti- tude de 210 kilomètres environ. A ce moment, la fusée aura atteint une vitesse de 15 000 kilomètres à l’heure et pourra poursuivre son ascension jusque vers 350 kilomètres d’altitude, grâce à la force d’inertie.

(Document u.s.I.s.)

Lancement d’un satellite artificiel par fusée-gigogne. 1. La première fusée propulse l’ensemble jusqu’à une altitude de 60 kilo-

mètres environ. 2. Au moment du déchargement de cette fusée, la trajectoire s’infléchit.

La deuxième fusée monte jusqu’à l’altitude de 350. kilomètres environ. 3. A cette hauteur, la troisième fusée donne l’impulsion latérale nécessaire

pour lancer le satellite sur son orbite, à une vitesse qui doit atteindre 28 000 kilomètres à l’heure.

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La fusée triple se sera élevée à la verticale pendant quelques secondes, mais sa trajectoire aura commencé à s’infléchir vers l’altitude de 1 500 mètres. Après épuisement du deuxième élément, la fusée poursuivra sa course sans être propulsée par un moteur. C’est seulement à une altitude voisine de 350 kilo- mètres - correspondant à celle de l’orbite prévue - que le deuxième élément se détachera. Le dernier élément entrera alors en action pour donner au satellite la vitesse de révolu- tion requise (28 000 kilomètres à l’heure). La quantité de combustible qu’emportera cette troisième fusée sera calculée très exactement de façon à fournir au satellite l’impulsion latérale nécessaire pour qu’il décrive l’orbite qui lui est assi- gnée. Lorsque ce combustible sera épuisé, l’engin aura exacte- ment la vitesse requise. A ce moment, le satellite sphérique se détachera de la coque de la troisième fusée, qui, ayant atteint la même vitesse de révolution, le suivra dans sa course.

1 ,es deux premiers éléments des fusées américaines utilise- ront un combustible liquide ; le troisième un combustible solide, fait d’un mélange de poudres.

La fusée aura une longueur totale d’une vingtaine de mètres. L e premier élément sera analogue à la fusée américaine Viking, utilisée pour les recherches à haute altitude, et sera propulsée comme elle par un mélange d’alcool et d’oxygène liquide. Le deuxième élément sera une fusée Aerobee, utili- sant comme carburant de l’hydrazine et comme oxydant de l’acide azotique. Aucune indication n’a été donnée au sujet du troisième élément.

LES ORBITES DES SATELLITES

Les Etats-Unis d’Amérique envisagent de lancer dix à douze satellites au cours de l’Année géophysique internationale. L’U.R.S.S. a annoncé qu’elle en lancerait un seul - probable- ment de dimensions plus importantes que le modèle améri- cain. Les soviétiques utiliseront aussi des fusées à trois élé- ments, mais de conception différente. L’Académie des sciences de l’U.R.S.S., qui dirige l’exécution de ce projet, n’a encore fourni aucune indication sur l’équipement et l’orbite du satellite.

On n’a pas non pins de renseignements détaillés sur les orbites des satellites américains. On sait seulement que le premier satellite du projet Vanguard doit faire le tour de la terre dans un temps de quatre-vingt-dix à cent minutes, en décrivant une orbite circulaire - plutôt elliptique - dont

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Taches solaires.

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III tificiel de

le périgée (le point le plus proche de la terre) sera à 350 kilo- mètres au moins et l’apogée (le point le plus éloigné de la terre) à 2 2$0 kilomètres au plus. Cette orhite fera un angle de 40” environ avec le plan de l’équateur. Ainsi, le satellite sera visible successivement dans les régions ou pavs ci-après : Etats-Unis d’Amérique, Amérique centrale et Am&+e latine, Afrique, Europe méridionale, Balkans, Moyen-Orient, mer Noire, sud de l’Union soviétique, Pakistan, Chine, Japon, Inde et autres pays d’Asie situés sous les latitudes boréales moyennes: Indonésie, Australie, Nouvelle-Zélande.

Ce satellite apparaîtra comme une très petite étoile et, connaissant sa trajectoire, il sera possible de suivre sa course dans le ciel. La durée de sa révolution étant inférieure à celle de la rotation de la terre, il se lèvera à l’ouest et se couchera à l’est. Il traversera le ciel en cinq minutes environ.

Tous les satellites artificiels seront constamment observés par les stations de ~‘A.G.I. situées sur leur trajectoire. Des cameras spéciales enregistreront leur course. Leurs positions apparentes par rapport aux étoiles fixes seront mesurées avec la plus grande précision et comparées avec les positions prévues. On obtiendra ainsi d’importantes données sur la répartition des masses à l’intérieur de la terre, l’aplatissement de celle-ci et l’action de freinage exercée par les couches supérieures de l’atmosphère.

On admet que l’atmosphère a une épaisseur de 500 à 1000 kilomètres. Les variations de vitesse des satellites et les modifications de leur trajectoire fourniront des renseignements sur la densité de l’air à différentes altitudes.

La plus grande partie de l’air est concentrée dans les couches inférieures de l’atmosphère et l’air se raréfie à mesure qu’on s’élève ; mais il en subsiste jusqu’à très haute altitude.

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L’observation des météorites, des aurores polaires et du rayonnement de la haute atmosphère - ainsi que les mesures effectuées à l’aide de fusées - ne nous fournissent sur la densité de l’atmosphère à très haute altitude que des rensei- gnements incomplets. L’observation des satellites permettra de determiner exactement cette densité. Le frottement exercé par l’air raréfié sur les satellites ralentira progressivement leur course, si bien que l’attraction terrestre tïnira par l’em- porter sur la force centrifuge. Les satellites descendront peu à peu vers la terre, pénétrant dans les couches plus basses, donc plus denses, de l’atmosphère, où le frottement de l’air freinera de plus en plus leur mouvement. En fin de compte, ils seront consumés, voire volatilisés par la chaleur que provo- quera ce frottement. Ainsi, sans jamais retomber sur la terre, ils sont voués à disparaître dans un délai limité.

On ne peut calculer ce délai, puisqu’on ignore le facteur essentiel dont il dépend : la densité de l’air à l’altitude de l’orbite. Pour un satellite se déplacant à 350 kilomètres d’altitude, il doit être compris entre trois mois et trois ans.

Les satellites fourniront aussi de très utiles données en vue d’autres recherches prévues dans le cadre de l’Année géophy sique internationale. C’est ainsi que, grâce à l’observation ininterrompue de la raie Lyman-alpha du spectre solaire, on pourra prévoir les périodes d’intensification de l’activité solaire. Ce sera l’un des éléments dont on tiendra compte pour déclencher les Alertes et fixer les dates des Périodes interna- tionales spéciales. La même méthode permettra de mieux comprendre les phénomènes physiques qui se produisent à l’intérieur du soleil, ainsi que leurs rapports avec divers autres phénomènes cosmiques et terrestres. La détection de cette même raie spectrale dans les rayons provenant de l’espace céleste fournira des indications sur la quantité et la répartition de l’hydrogène dans l’espace interstellaire.

La densité de la poussière météorique sur la trajectoire des satellites sera évaluée à l’aide de microphones ultra-sensibles, capables d’enregistrer les bruits provoqués par le frottement et le choc de ces minuscules particules contre la coque des satellites. Les météorites douées d’une énergie suffisante pour percer cette coque métallique seront détectées au moyen de manomètres : l’intérieur des satellites sera rempli d’un gaz rare, qui, * lorsqu’une météorite aura percé la paroi, s’échap- pera en provoquant une baisse de pression.

L’enregistrement des rayons cosmiques à l’aide de télescopes de compteurs fournira, d’autre part, des indications sur la direction d’où proviennent ces rayons.

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Mais les satellites qui seront lancés au cours de l’Année géophysique internationale nous ouvrent encore bien d’autres perspectives. Ils seront suivis un jour par des satellites de dimensions plus importantes, capables d’emporter à des alti- tudes encore plus élevées des instruments plus complexes et plus précis. Plus tard encore, les satellites pourront emporter des équipes de savants et deviendront ainsi de véritables stations d’observation de l’espace. Un tel programme dépasse assurément de beaucoup le cadre de l’Année géophysique internationale, mais il apparaît déjà comme l’une de ses conséquences logiques.

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CHAPITRE VIII

LES MYSTERES DU SOLEIL

LA GÉOPHYSIQUE ET L’OBSERVATION DU SOLEIL

Il existe, nous l’avons vu, des rapports étroits entre de nom- breux phénomènes géophysiques - si bien que l’on ne sait pas toujours si telle ou telle recherche particulière exige l’intervention de l’ingénieur radio-électricien, du spécialiste de la physique solaire ou du géophysicien proprement dit.

Il est évident que ces phénomènes, qui relèvent à la fois de deux ou de trois branches de la géophysique, doivent être étudiés d’un point de vue scientifique général. Pour le succès de l’Année géophysique internationale, il est indispensable que les multiples enregistrements, mesures et observations qui seront effectués soient analysés de façon coordonnée. Il faudra même, dans cette analyse, tenir compte de faits qui ne relèvent pas, à strictement parler, de la géophysique. Les phénomènes solaires, notamment, sont à l’origine de certaines perturbations de la haute atmosphère. Aussi le programme de l’Année géophysique internationale prévoit-il l’étude de ces phéno- mènes.

LA COOPÉRATION INTERNATIONALE EN MATIÈRE DE RECHERCHES SOLAIRES

Dans le domaine des recherches solaires, la coopération internationale est de règle depuis la seconde guerre mondiale. Les observatoires solaires du monde entier enregistrent de façon ininterrompue les nombreux phénomènes intéressants qui se produisent à la surface du soleil. Ils publient des rapports hebdomadaires et mensuels sur leurs travaux et communiquent les résultats qu’ils ont obtenus à l’Observatoire solaire de Zurich (Suisse), lequel en assure l’évaluation et la diffusion, sur le plan international. Les observatoires de haute altitude, comme ceux de Boulder dans l’Etat du Colorado (Etats-Unis d’Amérique), de Fribourg (République fédérale

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d’Allemagne) et du pic du Midi (France), sont en contact constant les uns avec les autres par radio. Dès que l’un d’eux constate un fait intéressant - par exemple une éruption à la surface du soleil - il alerte tous les autres afin que le phénomène soit enregistré dans toutes ses phases. Nous dispo- sons ainsi de renseignements assez complets sur la plupart des phénomènes solaires observés depuis dix ans.

RECHERCHES SUR LA PHYSIQUE SOLAIRE

A l’occasion de l’Année géophysique internationale, les temps d’observation seront prolongés et une coopération encore plus étroite sera établie entre les observatoires solaires.

L’Année géophysique internationale coïncide à peu près avec un maximum de l’activité solaire. Un tel maximum est notamment marqué par la multiplication des taches solaires. Le précédent maximum, en 1946, a été caractérisé par une activité d’une intensité exceptionnelle, qui ne sera sans doute pas égalée en 1957-1958, mais un grand nombre de phéno- mènes solaires pourront néanmoins être observés. On étudiera, à l’aide d’instruments spéciaux, les éruptions, les protubé- rances, le champ magnétique des taches solaires, le champ magnétique solaire en général, etc.

Actuellement, les phénomènes solaires ne sont pas toujours enregistrés dans leur totalité, parce que les observatoires sont trop éloignés les uns des autres. Pour assurer un enregistre- ment ininterrompu, il faudra prolonger les temps d’observa- tion des observatoires de l’Europe occidentale, qui seront relayés successivement par ceux des Etats-Unis d’Amérique, puis par ceux du Japon, de l’Australie et de la Nouvelle- Zélande, enfin, par ceux de l’Inde. Il faudra aussi créer de nouvelles stations d’observation, particulièrement en Austra- lie. Il ne suffit pas, en effet, de disposer d’un observatoire dans chaque région géographique, car très souvent les nuages empêchent toute observation en un point donné. Il faut que le soleil soit à tout moment visible de plusieurs observatoires.

Les éruptions qui se produisent très fréquemment au voisi- nage des groupes de taches solaires sont souvent accompagnées d’émissions de rayons ultraviolets d’une très grande énergie, qui provoquent l’évanouissement total (« fade-out >) des ondes radio-électriques. Ce phénomène s’accompagne aussi de pro- jections de particules atomiques. L’observation du spectre solaire fournit d’intéressantes indications sur l’activité solaire. Plusieurs observatoires solaires enregistrent sans interruption

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la raie « alpha » de l’hydrogène, dont l’intensité permet de détecter les éruptions solaires: Au cours de l’Année géophy- sique internationale, des appareils automatiques photogra- phieront ces éruptions à des intervalles de quelques minutes. En comparant ces photographies et les effets de fading radio- électrique, on obtiendra des précisions intéressantes sur les rapports entre les phénomènes solaires et les phénomènes géophysiques.

L’observatoire du mont Wilson (Etats-Unis d’Amérique) étudie depuis plusieurs années la polarité magnétique des taches solaires. L’analyse spectroscopique permet de détermi- ner l’intensité du champ magnétique au voisinage de ces taches. Cette intensité se manifeste notamment par un dédou- blement de certaines raies du spectre (effet Zeeman). Une méthode spéciale, mise au point par le physicien Babcock, de l’observatoire du mont Wilson, est utilisée pour les recherches sur les champs magnétiques au voisinage des taches solaires et pour l’étude du champ magnétique solaire en général. On espère que cette méthode sera adoptée par d’autres observatoires solaires avant le début de l’Année géophysique internationale, afin que ces phénomènes puissent être observés de façon suivie. Le C.S.A.G.I. recommande que deux ou trois observations de ce genre soient effectuées chaque jour. Déjà, les observatoires de Hambourg (République fédé- rale d’Allemagne) et de Cambridge (Royaume-Uni) effectuent des enregistrements du champ magnétique solaire. Certains faits semblent indiquer que l’intensité de ce champ est variable. Il y aurait donc lieu d’effectuer le plus grand nombre possible d’enregistrements de cette intensité.

Mais les spécialistes de la physique solaire n’enregistreront pas seulement les phénomènes solaires visibles ou observables par des méthodes optiques. Ils utiliseront aussi des récepteurs de radio pour capter les bruits radio-électriques émis par le soleil, dans les bandes centimétrique et métrique. Le C.S.A.G.I. recommande que les stations qui procéderont à ces enregis- trements se répartissent les fréquences à observer, de façon à capter tous les signaux solaires. Ces observations aideront à établir un tableau complet de l’activité solaire pendant l’Année géophysique internationale. Jamais les phénomènes solaires n’auront été étudiés de façon aussi détaillée et complète. En comparant les données ainsi obtenues avec les résultats des études géomagnétiques, on pourra déterminer de façon plus précise les effets de l’activité solaire sur la terre et comprendre plus exactement les phénomènes physiques qui se produisent à la surface et à l’intérieur du soleil.

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Ces enregistrements de l’activité solaire sont, en outre, indispensables pour le fonctionnement du dispositif d’hlerte. Ils fournissent, en effet, le seul moyen de prévoir les pertur- bations géomagnétiques et radio-électriques, ainsi que le@ aurores polaires - et, par conséquent, de fixer les dates des Périodes internationales spéciales. Aussi, l’observation ininter- rompue du soleil par des observatoires répartis sur toute la surface du globe constitue-t-elle l’un des principaux éléments du programme de l’Année géophysique internationale.

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CHAPITRE IX

L’EXPLORATION DE LA TERRE

L’objet de l’Année géophysique internationale est l’étude de la structure physique de la terre et de l’atmosphère. Nous avons d’abord parlé de l’atmosphère, en soulignant l’impor- tance capitale qu’elle présente pour la vie et en décrivant certaines techniques entièrement nouvelles qui seront utilisées pour son exploration.

Mais de nombreuses recherches seront également effectuées à la surface de la terre - et dans ses profondeurs.

MESURES GÉOGRAPHIQUES

La cartographie est devenue beaucoup plus compliquée depuis que les difficultés qu’elle présente ne sont plus d’ordre phy sique, mais mathématique.

Avant d’établir une carte, il faut procéder à de nombreuses observations et définir avec précision des points de repère. Chaque point du globe est géographiquement défini par sa longitude et sa latitude. Pour déterminer ces deux caracté- ristiques, on dispose d’appareils de mesure spéciaux; on peut aussi utiliser les photographies aériennes et se guider sur les observations astronomiques. Néanmoins, nos cartes sont encore loin d’être parfaites.

Deux campagnes mondiales pour la détermination astrono- mique de la longitude et de la latitude de certains points ont déjà eu lieu (la plus récente en 1933). Une nouvelle campagne de ce genre aura lieu au cours de l’Année géophysique inter- nationale. A l’aide d’instruments spécialement mis au point, trente-neuf observatoires détermineront la hauteur exacte au-dessus de l’horizon de certaines étoiles, au moment précis - à un centième de seconde près - de leur passage au méridien.

Grâce à des milliers de relèvements de ce genre, il sera possible de déterminer la position géographique exacte des observatoires, et aussi d’améliorer nos méthodes de mesure

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du temps, de reconnaître les irrégularités que présente la rotation de la terre et de corriger les indications figurant sur les tables sidérales et les almanachs nautiques, au sujet de la position des étoiles.

Plus de vingt observatoires, situés en différents points du monde, enregistreront la position de la lune par rapport aux étoiles à différents moments. On pourra ainsi déterminer les distances entre les continents avec une approximation moyenne de 30 à 35 mètres (actuellement, ces distances ne sont connues qu’à 100 ou 130 mètres près). L’enregistrement des’ positions des satellites artificiels doit permettre des mesures encore plus précises.

ms ÉNIGMES DE L'O&~N

Les océans recouvrent les deux tiers de la surface du globe. Depuis longtemps, on étudie, à l’aide de divers procédés, la faune océanique, les courants - tels que le Gulf Stream - les sédiments et la constitution des fonds marins. On a mesuré la profondeur des mers. Mais il faut bien admettre que nos connaissances dans ce domaine restent fragmentaires et que les océans sont encore en grande partie inexplorés. Un vaste programme de recherches océanographiques est prévu pour l’Année géophysique internationale. On observera notamment la circulation des eaux dans les océans de l’hémisphère austral. La configuration des fonds océaniques, les sédiments et la circulation des eaux seront spécialement étudiés le long de deux méridiens. On envisage de créer quarante nouvelles stations océanographiques, équipées des appareils les plus modernes, afin de mesurer les températures de l’eau et de l’air, l’énergie dégagée par les mers, la salinité de l’eau de mer et les mouvements des vagues. Du plancton sera recueilli en de nombreux points et analysé dans les laboratoires.

Des navires laboratoires effectueront des recherches siemo- logiques et détermineront le profil des fonds océaniques par la méthode des sondages acoustiques. Des stations d’observa- tion seront également installées sur de nombreuses îles. Ces recherches seront entreprises surtout dans l’Antarctique. En ce qui concerne l’Arctique, il convient principalement d’étu- dier le déplacement de la limite des eaux tempérées et des eaux polaires, ainsi que la hausse générale de la température dans cette région. Toutes les stations océanographiques mesu- reront régulièrement la température de l’eau de mer, à la surface et jusqu’à une profondeur de 200 mètres. Plusieurs

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organisations internationales ont offert de participer à ce programme de recherches océanographiques.

LES GLACIERS

II existe aussi d’énormes masses de glace ailleurs que dans l’Arctique et dans l’Antarctique. Il est très intéressant de connaître l’étendue et l’épaisseur de la couche de glace et de neige qui recouvre certaines parties de la terre et qui exerce une influence déterminante sur les conditions météorologiques et climatiques. A l’occasion de l’Année géophysique interna- tionale, on étudiera spécialement l’influence des glaciers et des champs de neige sur les conditions météorologiques. Le mouvement des glaciers sera mesuré par rapport à des points de repère; leur épaisseur sera déterminée par des méthodes sismographiques (observation des tremblements de terre natu- rels ou artificiels).

LE GÉOMAGNÉTISME

Le géomagnétisme est étudié depuis de nombreuses années, et les deux années polaires ont permis de recueillir d’importants renseignements sur les propriétés magnétiques de la terre. Cependant, ces renseignements sont moins précis que ceux dont on dispose sur les aurores polaires, l’ionosphère et le soleil.

Plus d’une centaine de stations géomagnétiques fonctionne- ront en différents points du globe pendant l’Année géophy sique internationale. Elles enregistreront les variations quoti- diennes et les fluctuations plus lentes de l’intensité du champ magnétique terrestre, ainsi que les orages géomagnétiques qui accompagnent les émissions particulièrement intenses de par- ticules solaires.

Les phénomènes géomagnétiques n’ont jamais encore été étudiés simultanément en un si grand nombre de points différents. Les effets géomagnétiques seront également mesurés au moyen de fusées. Toutes ces observations nous permettront de mieux connaître les propriétés magnétiques de la terre.

Les recherches qui seront effectuées à la surface du sol et en profondeur pendant l’Année géophysique internationale seront certes moins spectaculaires que les ambitieuses tenta- tives d’exploration de l’atmosphère; elles auront néanmoins une valeur scientifique incontestable.

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Les rbactions nucléaires qui se produisent 1 l’intérieur du soleil libèrent d’énormes quantités d’énergie. Les protubérances solaires qui eu résultent sont des éruptions de matière, s’&levant jusqu’à plusieurs centaines de milliers de kilomètres au-dessus de la surface du soleil.

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Protubérances solaires photographiées pendant une érlipse totale de soleil.

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Le grand observatoire solaire Climax (Etats-Unis d’Amérique). La cou- pole pivotante, de 15 mètres de diamètre, permet d’orienter vers un point quelconque du ciel la plate-forme équatoriale de 8 mètres de diamètre qu’elle abrite.

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Ce radio-télescope géant est utilisé pour étudier les ondes émises par le soleil, qu’un dispositif lui permet de suivre automatiquement.

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Star.1

Diverses phases de l’éclipse de soleil du 30 juin 1954.

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Les régions antarctiques sont le siège de phénomènes atmosphériques très particuliers, tels ces nuages lenticulaires.

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Brise-glace utilisé pour le transport des equipes de chercheurs et de leur équipement dans l’Antarctique.

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CHAPITRE X

UNE TERRE MYSTERIEUSE : L’ANTARCTIQUE

A 1’ origine, l’entreprise désignée aujourd’hui sous le nom d’Année géophysique internationale devait avoir pour objet de compléter nos connaissances en ce qui concerne les caracté- ristiques physiques des régions polaires. Mais, au cours de la préparation de cette troisième année polaire, le programme en fut élargi de façon à comprendre l’étude des caractéris- tiques physiques de la terre en général - ce qui explique le nom actuel de l’entreprise. Les recherches sur l’Arctique et l’Antarctique occupent cependant une place essentielle dans le programme de ~‘A.G.I.

Les savants attendent beaucoup d’une exploration de l’Antarctique. Mais la reconnaissance de ce sixième continent ne présente pas seulement un intérêt scientifique; elle peut ouvrir également des perspectives d’ordre économique et politique.

L’EXPLORATION DE L’ANTARCTIQUE

Au cours de l’Année géophysique internationale, de nombreux pays enverront des expéditions sur le vaste continent antarc- tique : ce sera le cas de l’Argentine, de l’Australie, de la Belgique, du Chili, des Etats-Unis d’Amérique, de la France, du Japon, de la Nouvelle-Zélande, de la Norvège, du Royaume- Uni, de l’Union des républiques soviétiques socialistes et de l’Union Sud-Africaine. Au pôle Sud même, deux bases perma- nentes seront installées - l’une par les Etats-Unis d’Amérique, l’autre par 1’U.R.S.S.

Grâce aux techniques modernes, les expéditions dans l’Arctique et dans l’Antarctique ne sont plus les périlleuses aventures qu’elles étaient autrefois. Les derniers voyages de l’amiral Byrd ont été des entreprises parfaitement organisées du point de vue technique, où l’on a utilisé, pour vaincre les obstacles naturels, non pas l’énergie humaine, qui est souvent impuissante face à la nature, mais la machine.

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De même, le programme de I’A.G.I. prévoit l’emploi massif de puissantes machines modernes - brise-glaces, avions et chasse-neige électriques - pour découvrir les secrets de l’Antarctique.

Ce vaste continent s’étend sur 13,2 millions de kilomètres carrés, soit la superficie de l’Europe ajoutée à celle de l’Austra- lie; son altitude moyenne est de 2 000 mètres et l’on y trouve des sommets de 6 000 mètres.

Il est déjà prévu que vingt et une stations seront installées dans l’Antarctique pour ~‘A.G.I.; et le C.S.A.G.I. a recommandé la création de huit stations supplémentaires.

Onze des vingt et une stations prévues seront situées sur le continent et les dix autres dans les îles avoisinantes. Plusieurs de ces stations fonctionnent déjà. Des expéditions prépara- toires se dirigent vers le Sud, équipées de tout le matériel nécessaire pour vivre au milieu des glaces et des tempêtes de neige, dans un pays où les mètres valent des kilomètres et les minutes des heures.

Au cours de l’Année géophysique internationale, plus de 6 000 hommes au total exploreront ce continent qui n’est actuellement guère mieux connu que la surface visible de la lune.

Une expédition préparatoire américaine a déjà fait le tour de l’Antarctique à bord du navire Atka, recueillant d’utiles renseignements. Dautre part, une équipe britannique et néo- zélandaise a entrepris la traversée du continent.

En 1956, les Etats-Unis d’Amérique ont consacré 5 millions de dollars à l’aménagement et à l’entretien de leurs stations dans l’Antarctique. Des sommes plus importantes encore aeront dépensées aux mêmes fins pendant YAnnée géophysique internationale. M. Harry Wexler, directeur scientifique du programme antarctique américain, estime que les recherches beaucoup plus limitées qui ont été effectuées dans l’Antarc- tique pendant la II” Année polaire ont fourni sur la propaga- tion des ondes radio-électriques dans l’ionosphère antarctique des renseignements d’une valeur de 10 milliards de dollars dans le seul domaine des télécommunications. Sans aucun doute, l’Année géophysique internationale fournira des rensei- gnements plus précieux encore.

Le C.S.A.G.I. a établi le programme détaillé des recherches qui devront être effectuées dans l’Antarctique, par les obser- vatoires primaires et par les autres stations. Les observatoires primaires effectueront des recherches sur la météorologie, le magnétisme terrestre, les aurores australes et le rayonnement de l’atmosphère supérieure, la physique de l’ionosphère, la

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glaciologie, les rayons cosmiques, l’océanographie, la sismo- logie et la gravité. Les autres stations étudieront la météoro- logie, les aurores australes et le rayonnement de l’atmosphère supérieure, le géomagnétisme et la physique de l’ionosphère.

Ainsi l’Antarctique fournira, au cours de l’Année géophy- sique internationale, une masse de données scientifiques qui amélioreront notre connaissance de certains phénomènes et permettront d’en expliquer d’autres que nous n’avons pas encore eu l’occasion d’étudier.

L’un de ces derniers est l’aurore australe. A la différence des aurores boréales, les aurores australes n’ont jamais fait l’objet d’observations complètes et l’on connaît mal les condi- tions de leur apparition, leur fréquence et leurs autres carac- téristiques. La détermination des propriétés physiques de l’ionosphère pendant l’hiver antarctique pose aussi un pro- blème intéressant, que l’Année géophysique internationale doit permettre de résoudre.

Les savants veulent, enfin, évaluer le volume de la calotte de neige et de glace qui recouvre l’Antarctique. En procédant à des mesures minutieuses en de nombreux points, on doit pouvoir obtenir une évaluation approximative de ce volume et en tirer des conclusions en ce qui concerne l’influence exercée par ces masses de glace et de neige sur les conditions météorologiques et climatiques.

Lorsque prendra fin l’Année géophysique internationale? nombre d’autres phénomènes intéressants de l’Antarctique auront été révélés, et le mystère dont s’enveloppe ce continent depuis l’origine des temps sera enfin dissipé.

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CHAPITRE XI

L’INTERET DU PROGRAMME DE RECHERCHES

Les nombreuses données géophysiques dont nous disposons et que nous avons essayé de présenter dans cet opuscule peuvent se comparer aux minuscules éléments d’une immense mosaïque. Nos lecteurs savent maintenant que beaucoup de ces éléments manquent encore pour que la mosaïque soit complète.

L’objet de 1’Année géophysique internationale est de compléter la mosaïque. Nous n’y parviendrons certainement pas tout à fait, mais cette grande entreprise scientifique n’en marquera pas moins pour la géophysique un progrès sans précédent.

L’exposé que nous avons présenté est nécessairement sché- matique. Nous avons simplement voulu décrire le programme de l’Année géophysique internationale et montrer les résultats que l’on espère obtenir. Tout ne se passera peut-être pas conformément aux prévisions, mais le progrès de la géophy sique se fera certainement dans la direction générale que nous avons indiquée.

Soucieux de rester sur le terrain scientifique, nous n’avons pas évoqué les conséquences économiques possibles des décou- vertes que doit permettre de réaliser ~‘A.G.I. L’Antarctique, en particulier, recèle des gisements d’uranium et d’autres métaux, qui ne peuvent manquer d’avoir un jour une énorme impor- tance pratique. Mais ces questions dépassent le cadre de notre exposé.

PERSPECTIVES D’AVENIR

Aussitôt terminée l’Année géophysique internationale, il s’agira de trier, d’analyser et de publier les centaines de milliers d’observations enregistrées au cours de l’entreprise. C’est là une tâche colossale, dont dépend, en fin de compte, le succès de ~‘A.G.I. Mais, si un grand nombre des problèmes géophysiques qui se posent aujourd’hui sont ainsi résolus, on

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peut s’attendre à ce que de nouvelles questions se présentent, appelant de nouvelles recherches.

Les hommes de science ne voudront pas laisser ces questions sans réponse. Peut-être mettront-ils alors au point une entre- prise plus ambitieuse encore que cette première année géo- physique internationale et peut-être obtiendront-ils des résul- tats dont nous ne pouvons actuellement nous faire aucune idée et fourniront-ils à l’humanité une explication complète de tous les phénomènes qui intéressent notre planète. C’est là la grande promesse de l’Année géophysique internationale.

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GLOSSAIRE

Absorption (d’une radiation). Tous les corps, dans une proportion plus ou moins grande, absorbent l’énergie des radiations et la transforment en chaleur. Les corps solides absorbent plus ou moins d’énergie lumineuse selon leur couleur : le noir en absorbe davantage que le blanc. Les gaz absorbent des radiations de certaines fréquences. On peut citer, à titre d’exemple, l’absorption des rayons ultraviolets du soleil par les atomes d’ozone de la haute atmosphère.

Albedo. Pouvoir de réfléchir la lumière. L’albedo se définit par le rapport entre la quantité de lumière reçue et la quantité de lumière réfléchie. Un corps qui réfléchirait la totalité de la lumière qu’il reçoit aurait une albedo de 100 %. L’albedo de l’aluminium poli est de 80 % (ou 0,8) ; celle d’une roche de couleur sombre (et, notamment, de la lune) est de 7 % (ou 0,07). L’albedo d’une planète nous renseigne sur la structure de sa surface et la composition de son atmosphère.

Angstratm. Unité de longueur utilisée en physique. Un angstrœm (abrévia- tion : A> vaut 10-S centimètres, soit un centième de millionième de centi- mètre.

Aplatissement. Du fait de leur rotation, les planètes ne sont pas rigoureu- sement sphériques, mais légèrement aplaties aux pôles. Si l’on désigne par a le rayon à l’équateur et par c le rayon aux pôles, I’aplatissement

d’une planète est donné par la formule ?Pour la terre, l’aplatissement

est évalué à 1/298. Atmosphère. Couche d’air entourant la terre. L’atmosphère est constituée

par plusieurs éléments et composés gazeux (78 % d’azote, 20,9 % d’oxy gène et 1,l % d’autres gaz, dont l’argon et le gaz carbonique). La plus grande partie de l’air (98 %) est concentrée dans les couches inférieures de l’atmosphère, à moins de 20 kilomètres d’altitude, mais on estime qu’il y a de l’air jusqu’à 1000 kilomètres.

Aurore polaire. Phénomène lumineux céleste. Observable fréquemment à l’intérieur des cercles polaires, boréal et austral: plus rarement sous des latitudes moyennes. Les aurores boréales et australes sont provoquées par les phénomènes complexes qui se produisent dans la haute atmosphère lorsque les particules élémentaires projetées par le soleil se trouvent au contact de la couche d’air.

Calorie. Unité de chaleur. La calorie est la quantité de chaleur nécessaire pour élever de 1 degré centigrade la température d’un gramme d’eau. La grande calorie, ou kilocalorie (kC), vaut 1000 calories; 860 kilocalories équivalent à 1 kilowatt-heure.

Electron. Particule élémentaire chargée d’électricité négative. Les électrons tournent autour du noyau atomique suivant diverses orbites. Le noyau atomique est chargé d’électricité positive. Cette charge positive est équi- librée par les charges négatives d’un nombre approprié d’électrons. Les

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électrons sont des B grains d’électricité 3. La masse d’un électron est 1842 fois inférieure à celle d’un proton.

Eruption solaire. Les éruptions solaires se manifestent par des taches bril- lantes qui apparaissent près du bord du disque solaire et persistent pendant une vingtaine de minutes en moyenne. Elles s’accompagnent d’émissions de rayons ultraviolets ; elles influencent le champ magnétique terrestre, la propagation des ondes radio-électriques, etc.

Ionisation. (1) L’ionisation d’un atome ou d’une molécule est essentiellement 1 e processus par lequel un electron est arraché à un atome ou à une molécule électriquement neutre, laissant un ion positif. (2) On appelle également ainsi le processus secondaire qui aboutit à la production d’un ion positif et d’un ion négatif. L’électron arraché à l’atome (ou à la molécule) ionisé au cours du processus primaire se combine avec un atome ou une molécule neutre pour former un ion à charge négative. L’ionisation ne se produit que lorsque se réalise l’une des conditions suivantes : très haute température, collision avec des électrons ou d’autres ions en mouve- ment, radiations de grande énergie.

Ionosphère. Ensemble des couches de la haute atmosphère où les molécules et les atomes d’air sont ionisés sous l’effet de radiations solaires intenses. On distingue dans l’ionosphère les couches suivantes : couche D, jusqu’à ï0 kilomètres d’altitude; couche E, de 70 à 112 kilomètres; couche Fl, à une altilude moyenne de 220 kilomètres; couche F2, à partir de 290 kilo- mètres; couche G, entre 400 et 700 kilomètres. L’existence de cette der- nière couche n’a pas encore été vérifiée.

Neutron. Particule élémentaire de matière. Un des éléments constitutifs du noyau atomique. Seul, le noyau de l’atome ordinaire d’hydrogène ne contient pas de neutrons. Les noyaux atomiques des autres éléments contiennent un nombre déterminé de protons et de neutrons. Les neutrons ont approximativement les mêmes dimensions et la même masse que les protons, mais ils n’ont pas de charge électrique.

Proton. Particule élémentaire de matière, chargée d’électricité positive, qui forme le noyau de l’atome d’hydrogène. Les protons constituent avec les neutrons les noyaux atomiques des éléments. La masse du proton est de 1,67 X 10-24 gramme.

Protubérance. Projection de gaz (principalement d’hydrogène, d’hélium et de calcium) à la surface du soleil. Les plus grandes protubérances solaires observées jusqu’ici atteignaient une altitude de près d’un million de kilomètres au-dessus de la surface du soleil. Les protubérances ne sont visibles à l’œil nu que pendant les éclipses totales de soleil.

Raie Lyon-alpha. Raie située dans la bande de l’ultraviolet du spectre des atomes d’hydrogène excités. La raie Lyman-alpha (longueur d’onde : 1216 angstrcems) présente un intérêt particulier pour les spécialistes de la physique solaire, parce qu’il existe une corrélation entre les variations d’intensité de cette raie et les éruptions solaires.

Rayons ultraviolets. Ondes électromagnétiques trop courtes pour être visibles à l’œil nu. Les radiations visibles ont des longueurs d’onde comprises entre 4000 à 7 000 angstrœms : l’ultraviolet occupe la bande comprise entre 3OOA et 4000 A. La plus grande partie des rayons ultraviolets (jusqu’à 2 900 A) péuétrant dans l’atmosphère terrestre sont absorbés par l’ozone entre 45 et 30 kilomètres d’altitude et n’atteignent pas la surface de la terre.

Sismologie. Science des tremblements de terre. La sismologie moderne se propose non seulement d’expliquer les causes des tremblements de terre, mais aussi d’étudier l’intérieur du globe en observant les tremblements de terre naturels et artificiels.

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Spectre (de la lumière), Ensemble de rayons colorés résultant de la décom- position de la lumière par le prisme ou par un réseau de diffraction (plaque de verre striée). Un spectre contient de nombreuses raies, qui sont caractéristiques des différents éléments et composés chimiques. On peut ainsi reconnaître, par l’analyse spectrale, la composition chimique et les caractéristiques physiques des corps qui émettent des radiations lumineuses. L’appareil utilisé pour Yanalyse spectrale est appelé spec- troscope ou spectrographe, suivant qu’il permet d’observer ou de photo- graphier les spectres.

Spectroscope. Appareil utilisé pour l’analyse des radiations électromagné- tiques. Voir : spectre.

Taches solaires. Taches sombres qui se forment temporairement à la surface du soleil. Leur apparition s’accompagne de phénomènes divers : accroisse- ment de l’intensité magnétique, évanouissement total (a: fade-out S) des ondes radio-électriques, aurores polaires. Les taches ont une température inférieure à celle de la photosphère environnante. Certaines d’entre elles atteignent en une quinzaine de jours une superficie égale à celle de l’Europe et disparaissent complètement en un ou deux mois.

Télescope de compteurs. Un compteur de radiations est un appareil qui permet de détecter les particules élémentaires et les radiations ionisantes, telles que les rayons cosmiques. Il enregistre toutes les particules qui le traversent. Plusieurs compteurs peuvent être disposés en ligne, de façon à détecter les radiations provenant d’une certaine direction. C’est ce qu’on appelle un <télescope de compteurs B.

Watt. Unité de puissance, utilisée principalement en électricité. Un watt vaut 10: ergs/seconde. Un watt (w) = 1 volt (V) X 1 ampère (A). Un kilowatt (kW) = 1000 watts.

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