L’alimentation des migrants maliens : de la campagne à la ville

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UNIVERSITÉ DE TOULOUSE II - LE MIRAIL CENTRE D’ÉTUDES DU TOURISME, DE L’HÔTELLERIE ET DES INDUSTRIES DE L’ALIMENTATION MASTER ALIMENTATION Parcours « Sciences sociales appliquées à l’alimentation » MÉMOIRE DE PREMIÈRE ANNÉE L’alimentation des migrants maliens : de la campagne à la ville Présenté par : Julie LEPORT Année universitaire : 2009 – 2010 Sous la direction de : Laurence Tibère

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MASTER ALIMENTATION. Parcours « Sciences sociales appliquées à l’alimentation ». MÉMOIRE DE PREMIÈRE ANNÉE

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UNIVERSITÉ DE TOULOUSE II

- LE MIRAIL

CENTRE D’ÉTUDES DU TOURISME, DE

L’HÔTELLERIE ET DES INDUSTRIES DE

L’ALIMENTATION

MASTER ALIMENTATION Parcours « Sciences sociales appliquées à l’alimentation »

MÉMOIRE DE PREMIÈRE ANNÉE

L’alimentation

des migrants maliens :

de la campagne à la ville

Présenté par :

Julie LEPORT

Année universitaire : 2009 – 2010 Sous la direction de : Laurence Tibère

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UNIVERSITÉ DE TOULOUSE II

- LE MIRAIL

CENTRE D’ÉTUDES DU TOURISME, DE

L’HÔTELLERIE ET DES INDUSTRIES DE

L’ALIMENTATION

MASTER ALIMENTATION Parcours « Sciences sociales appliquées à l’alimentation »

MÉMOIRE DE PREMIÈRE ANNÉE

L’alimentation

des migrants maliens :

de la campagne à la ville

Présenté par :

Julie LEPORT

Année universitaire : 2009 – 2010 Sous la direction de : Laurence Tibère

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Remerciements

Je tiens à remercier, en premier lieu, Laurence Tibère pour le temps consacré à

l’encadrement de ce mémoire, pour son soutien et ses conseils précieux tout au long

de l’année.

Je remercie également Bernard Maire et l’ensemble de l’équipe du projet ALIMI pour

la confiance et le soutien qu’ils m’ont accordé dans la réalisation de ce travail.

Mes remerciements s’adressent également à Sébastien Rayssac pour ses réponses

toujours rapides aux questions de méthodologie.

Merci à mes proches pour leurs relectures et leur soutien.

5

Sommaire

REMERCIEMENTS 4

SOMMAIRE 5

INTRODUCTION GÉNÉRALE 6

MÉTHODOLOGIE 8

PARTIE I : LA SITUATION NUTRITIONNELLE AU MALI 10

1 LE PROJET ALIMI : LA CULTURE ALIMENTAIRE À L’ÉPREUV E DE LA MIGRATION.

CONSÉQUENCES POUR LES POLITIQUES ALIMENTAIRES 11

2 PRÉSENTATION DU MALI 14

3 LA NUTRITION AU MALI 22

PARTIE II : ALIMENTATION, NUTRITION ET MIGRATIONS 4 6

1 DE LA NUTRITION À L’ALIMENTATION COMME FAIT SOCIAL TOTAL 47

2 L’ESPACE SOCIAL ALIMENTAIRE POUR TRAITER DE L’ALIME NTATION DES MIGRANTS.

52

3 NOTION D’IDENTITÉ ET D’ADAPTATION EN SITUATION DE M IGRATION 54

4 VARIÉTÉ ET DIVERSITÉ EN SITUATION DE MIGRATION 58

PARTIE III : L’ALIMENTATION DES MIGRANTS MALIENS 61

1 LES MODÈLES ALIMENTAIRES MALIENS À TRAVERS L’ESPACE SOCIAL ALIMENTAIRE

62

2 INFLUENCE DE LA MODERNITÉ SUR LES MODÈLES ALIMENTAI RES MALIENS 71

3 LES DIFFÉRENCES URBAINS-RURAUX 73

CONCLUSION GÉNÉRALE 84

BIBLIOGRAPHIE 87

ANNEXES 91

ANNEXE A : QUESTIONNAIRE DE DIVERSITÉ DANS LE CADRE DU PROJET ALIMI 92

ANNEXE B : PROPOSITION DE QUESTIONNAIRE DANS LE CAD RE DE L’ÉTUDE ALIMI 94

TABLE DES SIGLES 112

LISTE DES FIGURES 113

TABLE DES MATIÈRES 114

6

Introduction Générale

« Nourrir le Monde du XXIème siècle » tel était le thème du Sommet Mondial de

l’Alimentation en 1996 à Rome. Depuis quelques années, de nombreux congrès,

sommets et conférences sont dédiés à la question de l’alimentation dans le monde.

Satisfaire les besoins alimentaires d’une population mondiale toujours plus

importante relève d’un défi planétaire qui suscite l’intérêt de nombreux protagonistes :

chercheurs, politiques, membres d’ONG (Organisation Non Gouvernementales)…

Parmi les grandes questions, celle de l’alimentation des pays en développement

semble plus que jamais d’actualité avec des situations de transition nutritionnelle

accélérée qui placent côté à côte des problèmes de dénutrition et des situations de

maladies chroniques liées à l’excès.

La nécessité de la gestion de l’alimentation dans les pays en développement fait

l’objet d’une prise de conscience de leur gouvernement. Ce problème complexe

mérite une attention particulière et pluridisciplinaire afin d’obtenir des résultats

prometteurs et durables.

C’est le cas du Mali qui fait partie des quatre pays les plus pauvres du monde et au

sein duquel l’alimentation revêt une importance cruciale face aux défis économiques,

sociaux et climatiques.

L’étude des modèles alimentaires maliens est donc une première étape

indispensable vers la prise en compte des conséquences économiques, politiques et

sociales de l’alimentation.

D’un autre point de vue, cette étude permet d’améliorer la connaissance des

habitudes alimentaires des migrants maliens présents en France et en

complémentarité avec d’autres travaux, de faciliter la gestion de la société

multiculturelle française d’aujourd’hui afin de permettre les échanges et l’adaptabilité

de chacun. La diversité des cultures fait la richesse de notre pays.

7

Le présent travail d’analyse des modèles alimentaires de la population malienne a

pour objectif d’appréhender les habitudes alimentaires au Mali afin de cerner le rôle

de la migration sur l’alimentation. Il s’inscrit, en outre, dans le cadre d’un projet plus

vaste d’étude des modèles alimentaires des migrants maliens en France.

Nous nous concentrerons donc sur l’alimentation des individus qui quittent leur village

d’origine pour s’installer plus ou moins définitivement à la capitale Bamako ; c’est-à-

dire les migrants maliens au Mali. L’intérêt réside dans la mise en évidence des

adaptations qu’effectuent ces individus en situation de migration dans un

environnement restant relativement proche de celui d’origine.

La question de départ à laquelle ce mémoire tente de répondre est la suivante : Est-il

pertinent d’envisager une différenciation sociale entre les modèles alimentaires

urbains et les modèles alimentaires ruraux ?

Deux hypothèses ont guidé notre recherche :

1. La plus grande variété de produits disponibles améliore-t-elle la situation

nutritionnelle des migrants maliens à leur arrivée en ville ?

2. Existe-t-il des modifications dans les habitudes alimentaires des migrants

maliens ?

Afin de mener à bien ce travail nous nous intéresserons dans une première partie à la

situation nutritionnelle au Mali et aux différences observées selon le lieu de

résidence. Puis dans un deuxième temps nous traiterons de la question théorique de

l’influence de la migration sur l’alimentation et la nutrition afin dans une troisième

partie de cerner plus spécifiquement l’alimentation des migrants maliens à travers

l’étude de leurs modèles alimentaires et la recherche d’aliments emblématiques du

milieu urbain et du milieu rural.

8

Méthodologie

1 Recherche bibliographique

Le travail présenté ici consiste en une revue de littérature. Après avoir défini un sujet

de recherche, la recherche documentaire permettra d’établir un cadre théorique à la

question de départ. Pour traiter de l’alimentation des migrants, nous nous placerons

au carrefour de plusieurs disciplines : la sociologie de l’alimentation, la nutrition et

l’économie en particulier.

Cette approche pluridisciplinaire nous permettra d’appréhender les modèles

alimentaires des migrants maliens dans leur globalité et d’identifier les phénomènes

d’adaptation ainsi que leurs conséquences nutritionnelles.

Selon les champs, nous traiterons de points particuliers vers lesquels nous

orienterons notre recherche bibliographique :

- La notion d’identité et d’adaptabilité dans le cadre de migrations

- Les données nutritionnelles concernant le Mali et en particulier les régions de

Kayes et de Bamako

- La variété et la diversité : quel lien en situation de migration ?

- Les modèles alimentaires maliens et leurs variations ou spécificités selon les

zones urbaines ou rurales

- La modernité alimentaire dans les villes maliennes

- L’alimentation de rue : pourquoi ? Comment ? En quelle quantité ? Ses

conséquences nutritionnelles ?

La collecte des données nutritionnelles nous amènera probablement à étudier

l’aspect économique de l’alimentation puisque les études en termes de budget

consacré à l’alimentation sont les plus nombreuses. Gardons à l’esprit qu’elles ne

reflètent pas nécessairement la réalité de la consommation. Elles permettront,

toutefois d’effectuer des comparaisons sur le long terme et d’appréhender la

consommation au niveau national.

9

Après l’étude de ces documents, l’objet du travail sera d’en dégager une

problématique.

2 Objectifs et suivi de la recherche

Cette recherche se place dans le cadre du projet ALIMI et précède un stage que nous

effectuerons au cours de l’été prochain.

L’écriture de ce mémoire nous permettra de nous faire une première idée du terrain

sur lequel nous évoluerons lors du stage. Son objectif est, avant tout, de faire

ressortir les différences au niveau des modèles alimentaires entre les ruraux et les

urbains ainsi que leurs conséquences nutritionnelles. Une fois ces différences mises

en évidence, il s’agira de formuler des questionnements concernant la nutrition à

intégrer dans un questionnaire global adressé aux populations de migrants maliens.

La place des questions de nutrition étant restreinte au sein de ce questionnaire, il

conviendra de s’assurer de la particulière pertinence des questions posées en

fonction des résultats obtenus lors du travail préliminaire.

10

Partie I : La situation nutritionnelle au Mali

11

L’étude des modèles alimentaires maliens ne peut se faire sans une certaine

connaissance du terrain et des conditions de vie des populations. C’est pourquoi

nous commencerons par proposer une brève présentation du projet ALIMI dans le

cadre duquel s’intègre ce travail de recherche ainsi que du Mali. Puis nous

présenterons un état des lieux de la connaissance de la situation nutritionnelle au

Mali à partir de documents consultés en France.

1 Le projet ALIMI : La culture alimentaire à l’épre uve de la

migration. Conséquences pour les politiques aliment aires

S’il est acquis que la gestion des migrants à l’intérieur du pays est une question

politique majeure au Mali, qu’en est-il de cette même question dans les pays

d’accueil et en particulier en France ? Le projet ALIMI s’inscrit dans le cadre de ce

questionnement afin de tenter d’y apporter une réponse.

1.1 Composantes institutionnelles

Le projet ALIMI est un projet de l’Agence Nationale de Recherche. Il regroupe quatre

partenaires en France :

- EHESS-CNRS (Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales – Centre

National de la recherche scientifique)/Centre Edgar Morin à Paris traitant de la

partie socio-ethno-anthropologique.

- CIRAD (Centre de Coopération internationale de recherche agronomique pour

le développement)/UMR Moisa à Montpellier travaillant sur l’approche socio-

économique.

- Université de Toulouse/Certop (Centre d’Etudes et de Recherche Travail,

Organisation, Pouvoir) à Toulouse abordant les thèmes sociologies et

géographiques.

- IRD (Institut de Recherche pour le développement)/UMR Nutripass à

Montpellier responsable du traitement nutritionnel des données.

12

Dans les pays concernés, le travail se fait en collaboration avec des partenaires

locaux :

- ONG Migration and Development à Taliouine au Maroc.

- ATTM (Association Taghbaloute de Tourisme en Montagne) à Tadla au Maroc.

- Faculté des Sciences Ben Msik, département de santé publique à Casablanca.

- Bureau d’études Miseli à Bamako.

1.2 Justification du thème d’étude

La France comptait en 2004 près de 5 millions de migrants soit 8% de la population

française. Ils représentent donc une composante socio-économique importante de la

société française. En dépit de cela, les migrants sont mal connus et les études les

concernant sont rares. Seules quelques informations statistiques sont disponibles.

Parmi les 5 millions de migrants en France, la majorité sont originaires du Maghreb

(30%), d’Afrique Sub-Saharienne (14%) et d’Asie (14%). Concernant la migration en

elle-même, on note que l’âge de la migration a tendance à diminuer, les migrants

arrivent de plus en plus jeunes en France mais aussi plus formés. On assiste à une

féminisation de la population migrante à hauteur d’environ 50% actuellement en

France. Aujourd’hui, les migrants quittent leur pays d’origine vers la France avec la

volonté de s’installer à long terme et de faire leur vie en France. Concernant la « vie

de migrants en France », la précarité et la fragilité sont très présentes malgré des

disparités importantes liées à l’origine géographique, au sexe, à l’âge d’arrivée, etc.

L’étude de ces migrants présente un grand intérêt scientifique afin de combler un

« vide littéraire » sur le sujet.

De plus, la connaissance de leurs modes de vie et en particulier de leurs habitudes

alimentaires apparaît essentielle pour préserver l’équilibre de la société, pour

maîtriser l’économie alimentaire du pays et enfin pour mieux gérer les politiques de

santé et d’action sociale. En effet, l’alimentation peut être vue comme un support

privilégié de dialogue, de communication et d’intégration. Par ailleurs, les habitudes

alimentaires des migrants influent sur les modes de consommation de la population

française en général. Leur étude permettrait de comprendre, en partie, l’évolution des

styles alimentaires dans notre société. La demande d’étude émane des acteurs de

l’industrie agro-alimentaire pour lesquels l’enjeu économique prime. Les résultats

13

d’une telle étude leur permettront d’adapter leur offre en fonction de la demande.

C’est dans ce contexte qu’est né le projet ALIMI.

1.3 Question de départ, objectif et hypothèses

La question générale posée aux différents partenaires du projet est la suivante :

« Comment la migration affecte-t-elle les styles et le bien-être alimentaires des

personnes d’origine malienne et marocaine en France ? ».

Plusieurs objectifs ont été fixés pour permettre de répondre à cette question :

- Étudier les reconfigurations sociales en situation de migration : lieu de vie,

réseau social, cellule familiale, etc.

- Analyser les changements dans l’espace social alimentaire, les processus

d’identification et de différenciation : Comment l’environnement et les

reconfigurations sociales influent-ils sur l’alimentation du migrant et sur son

sentiment d’identité ?

- Étudier les processus et agents d’acculturation.

Les hypothèses clés énoncées sont les suivantes :

- Les migrants participent à la culture alimentaire nationale : modèles

alimentaires dynamiques, reconstruits dans l’interaction sociale.

- La migration comme changement dans le statut socio-économique,

l’environnement socio-culturel et matériel et le mode de vie : nouvel espace

social alimentaire.

1.4 Méthodologie

Le choix des populations étudiées résulte de plusieurs facteurs :

- Les migrants en provenance du Maghreb et d’Afrique Sub-Saharienne

représentent une part importante des migrants en France

- Les migrations en provenance du Maroc sont, pour la plupart, des migrations

anciennes alors que les migrations en provenance du Mali sont plus récentes.

Ce choix est légitimé par la complémentarité de ces deux approches dans le

cadre du sujet traité.

- De manière très pragmatique, des relations pré existaient au projet avec des

partenaires dans ces deux pays.

14

Ce projet se déroule sur 3 ans, de 2008 à 2011 et se compose d’une première phase

d’étude qualitative constituée d’entretiens individuels, de récits de vie, de focus

group, d’observation en situation et d’interrogation de personnes ressources. Puis la

seconde phase sera quantitative avec la diffusion d’un questionnaire sur les modèles

alimentaires et le bien-être alimentaire.

Les premières conclusions de l’étude qualitative révèlent la mise en place, par les

migrants, d’un « bricolage » vivant et non pas de rejet ni de résistance face à la

culture et aux produits locaux. Un second point important semble être le fait que,

malgré des situations souvent précaires, une grande attention est portée à la qualité

de l’alimentation.

La comparaison des modèles alimentaires ruraux et urbains au sein d’un même pays

éclaire sur les changements dus à la migration dans un environnement socio-culturel

relativement fermé. L’objectif étant de mettre en évidence les modifications

spécifiquement induites par un environnement socio-culturel différent.

Avant de mettre en lumière les différences entre les modèles alimentaires urbains et

ruraux qui pourraient avoir des conséquences nutritionnelles, il est indispensable de

s’attacher à l’étude du Mali et de sa situation nutritionnelle.

2 Présentation du Mali

2.1 Géographie

Le Mali, pays de la région du Sahel, d’une superficie de 1 241 000 km2 dont près de

60% appartient à la zone subsaharienne, est situé en Afrique de l’Ouest. C’est le plus

vaste pays de la région après le Niger. Il est limité au Nord par l’Algérie, à l’Ouest par

le Sénégal et la Mauritanie, au Sud par la Côte d’Ivoire, le Burkina Faso et la Guinée

et à l’Est par le Niger. Le relief est peu accidenté, le pays est constitué de plaines et

de bas plateaux d’une altitude moyenne de 500 m. Le point culminant se trouve dans

la partie centrale du pays, à 1155 m d’altitude (Mont Hombori). Ce vaste pays est

traversé par deux fleuves : Le fleuve Sénégal et le fleuve Niger. Ces fleuves irriguent

15

principalement la partie sud du pays. Le Mali peut être séparé en 3 zones climatiques

principales :

- La zone soudanaise au sud, couvrant près de 25% du territoire, sur laquelle les

précipitations s’élèvent de 700 à 1500 mm/an.

- La zone sahélienne accusant des précipitations de 200 à 500 mm/an. Le delta

intérieur du Niger est une nappe d’inondation de 300 km de long sur 200 km de

large au cœur de cette zone qui joue un rôle de régulateur climatique sur

l’ensemble de la région.

- La zone Saharienne avec moins de 200 mm de pluie par an. Les pluies sont

particulièrement irrégulières dans cette région couvrant près de 60% du territoire

national.

Les frontières du pays ont été déterminées pendant la période coloniale et ne

tiennent compte ni des contraintes géographiques, ni des aires ethnoculturelles.

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Figure 1 : Carte du Mali

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2.2 Population

En 2009, la population malienne est estimée à 13,4 millions d’habitants dont plus de

48% de moins de 15 ans. L’âge moyen est de 15,8 ans avec une espérance de vie à

la naissance qui ne dépasse pas 52 ans. Le taux d’accroissement de la population

est de 2,6 en 2009 avec un taux de fécondité en 2006 de 6,6 enfants par femme. En

2008, 32% de la population vivait en milieu urbain contre 23% en 1990. 99% des

maliens sont sédentaires, les 1% restants étant nomades.

Bamako, capitale du Mali, est la plus grande ville en terme de population. Les autres

villes importantes sont Mopti, Ségou, Gao, Sikasso et Kayes. Du fait de l’urbanisation

croissante des dernières décennies, la population de Bamako est passée de 700 000

habitants en 1984 à plus de 1 800 000 en 2009. Certaines projections annonce 4 000

000 d’habitants à Bamako en 2025.

La langue officielle est le français mais de nombreux dialectes sont utilisés selon les

ethnies.

La densité moyenne est de 10 hab/km2 avec une répartition très inégale puisque 90%

de la population vit sur 25% du territoire.

De nombreuses ethnies cohabitent : Bambara (35%), Peuhl (12%), Touareg et

Maure, Senoufo, Sarakolé, Songhaï, Malinké, Bobo, Minianka, Toucouleur,

Somonono, Bozo, Dogon, etc.

2.3 Histoire et politique

La république du Mali est née le 22 septembre 1960 au terme de la période coloniale.

Avant cela, sur l’actuel territoire du Mali se sont succédés trois grands empires :

l’empire du Ghana du 3ème au 12ème siècle après JC, l’empire du Mali du 13ème au

15ème siècle puis l’empire de Songhaï pendant les 15ème et 16ème siècles.

Au 9ème siècle, les importants échanges commerciaux entre les pays musulmans et

l’empire du Ghana ont entraîné une large diffusion de l’islam à travers tout le pays.

Aujourd’hui, 90% de la population malienne est musulmane.

Du 16ème siècle au début du 19ème siècle, différents royaumes se sont succédés dans

cette région. À chaque conflit, les frontières ont été modifiées.

17

Durant la deuxième moitié du 19ème siècle, les français ont entrepris la colonisation de

la région depuis le Sénégal où ils étaient déjà installés. Ils ont ainsi opéré des

découpages territoriaux leur permettant de mettre en place leur système administratif.

À chaque découpage correspond un nouveau nom, ainsi le pays s’est appelé Soudan

Français dès 1890 puis successivement, de 1899 à 1920, Haut Sénégal,

Sénégambie-Niger et Haut Sénégal-Niger avant de redevenir Soudan Français de

1920 jusqu’à l’indépendance en 1960.

Au cours de cette période coloniale, les français créèrent l’Office du Niger dont

l’objectif était de « devenir le principal fournisseur de coton des industries textiles de

la France coloniale, le grenier à riz de l'Afrique de l'Ouest et un lieu d'innovations

techniques et sociales »1. La culture du coton a été un échec et a donc été

abandonnée dès les années 70. Aujourd’hui, le gouvernement favorise le

développement de la culture du riz dans un objectif d’autosuffisance du pays voire de

production de denrées à destination des autres pays de la sous région.

Sur le plan des échanges commerciaux, la balance du pays a été déficitaire pendant

presque toute la période coloniale. Le Mali a donc hérité d’une dette importante lors

de l’indépendance.

La décolonisation commença en 1956 avec la victoire aux élections du parti politique

Rassemblement Démocratique Africain (RDA) qui fit voter une loi donnant une large

autonomie au Soudan Français. Puis le Sénégal et le Soudan Français créèrent en

1959 la fédération du Mali qui après négociations avec la France obtint son

indépendance le 20 juin 1960. La République du Mali fut proclamée le 22 septembre

1960 après l’éclatement de la Fédération du Mali suite à des désaccords importants

entre maliens et sénégalais.

La première République fut marquée par la montée du socialisme dans tous les

secteurs avec notamment la mise en place de champs collectifs dans le monde

agricole, la création de la Société Malienne d’Importation et d’Exportation (SOMIEX)

détenant le monopole des exportations et des importations et de la Régie des

Transports du Mali (RTM) responsable de l’ensemble des transports de

1 Office du Niger, Histoire de l’Office du Niger, [en ligne], consulté le 10 mars 2010, disponible sur http://www.office-du-niger.org.ml

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marchandises du Mali. Au cours de cette période socialiste, le Mali noua de bonnes

relations avec les autres pays socialistes, créa des écoles et favorisa l’éducation de

sa population.

Suite à un coup d’Etat militaire, le 19 novembre 1968, la première république fut

renversée. La deuxième république lui succéda avec tout d’abord la prise de pouvoir

par le Comité Militaire de Libération Nationale (CMLN) de 1968 à 1978. Cette période

peut être assimilée à une dictature puisque les milices policières surveillaient

étroitement tous les opposants au pouvoir. Sur le plan économique, le pays reçu

l’aide de nombreux pays et en particulier de la France. Le mécontentement de la

population était grandissant et la situation du pays instable sur tous les plans.

C’est dans ce contexte que Moussa Traoré pris le pouvoir en 1978 et ce jusqu’en

1991. La situation ne changea guère et le pays ne survécut que grâce à l’aide

extérieure.

C’est seulement en 1991 que l’on assista à la chute du régime de Moussa Traoré

dans un contexte sanglant. À partir de cette période, une transition s’opéra vers une

démocratie multipartis sous la direction d’Amadou Toumani Touré. En 1992 Alpha

Oumar Konaré fût élu président de la République du Mali : c’est le début de la 3ème

république. Il restera à ce poste pour les deux mandats autorisés par la constitution

soit jusqu’en 2002. À cette date, Amadou Toumani Touré lui succède. Ce dernier est

réélu en 2007 et est le président actuel du Mali.

2.4 Économie

L’économie du Mali est principalement basée sur l’agriculture. Le Mali possède, en

zones sahélienne et soudanaise des potentialités vivrières élevées du fait du climat.

L’alternance des saisons sèches et humides présente un contexte favorable au

développement du monde agricole et à la production vivrière. Cependant, cette

économie agricole répond à un fragile équilibre que la moindre sécheresse ou

invasion de criquets déstabilise de façon préoccupante entraînant des périodes de

famine.

Le secteur agricole emploie 80% de la population active du pays.

19

La situation économique du Mali est donc soumise aux variations climatiques mais

également à l’état du commerce international et aux fluctuations des taux

d’échanges. Le Mali n’ayant pas d’accès direct à la mer, ses exportations hors

continent dépendent des ports de pays voisins.

Le fleuve Niger et le fleuve Sénégal jouent un rôle essentiel dans les transports de

marchandises mais ceci de façon irrégulière en fonction des saisons. En effet, le

fleuve Niger n’est navigable que six mois par an entre juillet et janvier. Il occupe une

place primordiale dans le pays tant au niveau économique qu’au niveau du

développement et de la répartition des terres.

De façon plus générale, le Mali dépend fortement de l’aide internationale.

L’indicateur de développement humain (IDH)2 du Mali est de 0,371 (il était de 0,245

en 1975) ce qui le place au 178ème rang sur 182 pays.

L’indicateur de pauvreté humain (IPH) du Mali est de 56,4%, ce qui le place en

107ème position sur 108 pays en voie de développement juste avant le Tchad. À la

naissance, un enfant avait, en 2005, un risque sur 3 de mourir avant l’âge de 40 ans.

75% des personnes de 15 ans et plus sont analphabètes.

La population malienne est passée de 5,4 millions à 11,6 millions entre 1975 et 2005

avec un taux d’accroissement de 2,5. Les prévisions en termes de population

annoncent 15,7 millions d’habitants en 2015 d’après un taux d’accroissement de 3

entre 2005 et 2015. Le taux d’urbanisation augmente considérablement. En effet, il

est passé de 16% en 1975 à 33% aujourd’hui et les prévisions pour 2015 sont de

36% de la population totale vivant en ville.

2 L’IDH prend en compte différentes dimensions : la longueur de la vie et l’état de santé (espérance de vie), les

connaissances (taux d’alphabétisation et taux d’enrôlement) et le niveau de vie (PIB par personne).

L’indice de pauvreté humaine pour les pays en développement s’attache aux mêmes dimensions mais sous un

autre angle. Il considère la probabilité à la naissance de ne pas survivre jusqu’à 40 ans, le taux d’alphabétisation,

le pourcentage de la population sans accès à une source d’eau assainie et le pourcentage d’enfants en sous

poids pour leur âge.

20

En 2004, 29% de la population malienne était sous-alimentée. En 2005, 23% des

nouveaux-nés présentent une insuffisance pondérale, 33% des enfants de moins de

5 ans présentent une insuffisance pondérale pour leur âge et 43% des enfants de

moins de 5 ans présentent une insuffisance de taille pour leur âge.

En 2005, le taux de mortalité infantile chez les enfants de moins de 5 ans est de 218

pour 1000 contre 400 pour 1000 en 1970. Le PIB (Produit Intérieur Brut) annuel est

de 392 USD par habitants en 2005 soit 1033 PPA3 (parité de pouvoir d’achat) USD

par habitant en 2005. Les importations représentent 37% du PIB et les exportations

26% en 2005. Le Mali a reçu en 2005 une aide publique au développement

correspondant à 51,1 USD par habitant soit 13% du PIB.

2.5 Migrations

Les flux migratoires représentent une réalité importante au Mali. Deux types de

migrations sont observés : les migrations internes majoritairement des zones rurales

vers les zones urbaines et les migrations externes du Mali vers d’autres pays.

Les migrations internes font parties du mode d’utilisation de l’espace. En effet, le

climat et son alternance de saisons sèches et de saisons humides favorisent les

mouvements saisonniers de populations. Mais plus récemment, ce sont des

migrations d’une autre nature qui font leur apparition : de nombreux habitants des

zones rurales se déplacent vers les villes. D’après Yves MARTIN-PREVEL4,

épidémiologiste et chercheur en nutrition publique à l’Institut de Recherche pour le

Développement, ces migrations s’expliquent, selon les cas, de façon différente : des

jeunes ayant un niveau d’éducation supérieur et venant chercher les avantages de la

ville d’une part et d’autre part des personnes très défavorisées qui rejoignent la ville

en dernier recours pour diminuer le nombre de bouches à nourrir et augmenter les

sources de revenu dans une attitude collective. Cette dernière explication est d’autant

3 PPA (parité de pouvoir d’achat) Un taux de change qui prend en compte les différences de prix entre les pays et

permet une comparaison internationale des produits et revenus réels. Au taux de PPA en USD (utilisé dans ce

rapport), 1 USD PPA correspond au même pouvoir d’achat dans l’économie nationale que 1 USD aux États-Unis.

4 MARTIN-PREVEL Yves (2010), Sociologie du développement, Enseignement suivi dans le cadre du Master 1 Alimentation, CETIA, Université de Toulouse 2, Toulouse.

21

plus représentée que les conditions climatiques sont mauvaises. La désertification,

en particulier au Nord du pays, favorise ce type de migrations. Les régions d’origines

sont principalement Gao, Tombouctou, Kidal et Kayes. Bamako et Ségou

apparaissent comme les grands carrefours des migrations internes. Le

rapprochement familial est en passe de devenir la principale motivation des

migrations tant internes qu’internationales au Mali.

Les migrations internationales représentent une part importante des migrations

maliennes et se font, pour 90% d’entre elles vers des pays d’Afrique et en particulier

d’Afrique de l’Ouest. Concernant les 10% restant, ils se dirigent pour la majorité vers

l’Europe et la France en particulier. Ces déplacements peuvent être envisagés pour

une courte période, le temps de se procurer suffisamment d’argent pour aider la

famille en rentrant au pays ou pour une plus longue période, une installation

potentiellement définitive dans le pays d’accueil. Dans ce dernier cas, des envois

d’objets, de nourriture et d’argent seront faits vers le pays d’origine. La région de

Kayes est la plus touchée par l’émigration vers l’international. Selon le REMUAO

(Réseau Migrations et Urbanisation en Afrique de l’Ouest), l’émigration touche 40%

de la population de la zone de Kayes et en particulier les hommes de 20 à 30 ans et

les femmes de 15 à 25 ans. Concernant le nord du pays, tout comme pour les

migrations internes, la désertification est un motif important de migration vers

l’international. Les migrants sont principalement des hommes actifs dont l’objectif

premier est de trouver des sources de revenus et non pas de combler un manque de

travail. De ce fait, les villages se trouvent en partie dépourvus de leur main d’œuvre.

Cela entraîne de grands changements d’organisation : les femmes doivent assurer le

travail effectué auparavant par les hommes alors même qu’elles n’y sont pas

préparées.

Les migrations internes et externes représentent donc une préoccupation majeure

dans la gestion du pays en particulier en ce qui concerne la nutrition.

22

3 La nutrition au Mali

Le Mali, par sa situation géographique et son histoire, a subi de nombreuses crises

alimentaires. Ces crises ont été provoquées par différents facteurs. On distingue des

facteurs liés à l’environnement comme la sécheresse, les invasions de criquets, les

inondations, le vent, l’ensablement et le tarissement des sources d’eau ; des facteurs

liés aux ressources financières : la perte d’emploi et la hausse des prix ; des facteurs

de santé avec la survenance d’épidémie et la fréquence des maladies et enfin des

facteurs politiques entraînant des déplacements forcés de population et un climat

d’insécurité.

Sur le plan alimentaire, la sécheresse a été l’une des principales explications des

crises au Mali et en particulier dans la partie Nord du pays. En 1973-74, la situation

fut particulièrement catastrophique. Puis les années suivantes, l’amélioration n’a pas

été suffisante pour rattraper le déficit vivrier accumulé. Ce déficit s’est encore

aggravé lors d’une nouvelle sécheresse en 1983-84. Puis en 1990-91, 1995-96,

1997-98 et en 2000-2001 la faible pluviométrie et/ou les invasions de criquets

frappèrent une fois de plus le pays. La crise politique en Côte d’Ivoire de 2002-2003

associée à un déficit pluviométrique sur le territoire a affecté l’économie du Mali, les

habitants, en particulier les citadins, en ont subi les conséquences, notamment sur le

plan alimentaire. En 2004-2005, une mauvaise campagne agricole et une invasion de

criquets ont de nouveau placé le Mali dans une situation critique. On note qu’en

2005-2006 et 2008-2009, les conditions climatiques ont été favorables et ont permis

aux ménages de reconstituer leurs stocks. Cependant, l’annonce d’une mauvaise

récolte couplée à des prix toujours élevés laissent présager une année 2009-2010

difficile en particulier pour les ménages les plus vulnérables.

3.1 La situation nutritionnelle au Mali

3.1.1 La sécurité alimentaire

Les populations maliennes se trouvent régulièrement confrontées à l’insécurité

alimentaire. Ce concept renvoie à la situation de non sécurité alimentaire. La sécurité

alimentaire a été définie lors du Sommet de la FAO (Food and Agriculture

23

Organization) à Rome en 1996 ainsi « lorsque tout le monde, à tout moment, a un

accès physique et économique suffisant à une nourriture saine et nutritive, afin de

satisfaire ses besoins quotidiens et ses préférences alimentaires pour une vie active

en bonne santé ». Cette définition aborde 3 piliers de la sécurité alimentaire :

• La disponibilité alimentaire correspondant aux produits disponibles sur le

marché.

• L’accessibilité alimentaire c’est-à-dire la capacité d’un individu ou d’un ménage

à accéder à la nourriture que ce soit par acte d’achat ou par auto-production.

• L’utilisation alimentaire renvoyant à la capacité du corps à absorber les

aliments et à les utiliser de manière optimale en fonction de l’état physique et

psychologique de l’individu.

Face à des situations d’insécurité alimentaire, les ménages utilisent différentes

stratégies et en particulier des stratégies dites alimentaires. Ainsi la diminution des

quantités servies par repas apparaît comme la première mesure prise dans les

foyers. La substitution d’un aliment par un autre moins onéreux et la diminution du

nombre de repas sont également observées.

Les résultats des Enquêtes de Base sur la Sécurité Alimentaire et la Nutrition

(EBSAN) I et II5, révèlent que l’insécurité alimentaire sévère touche 11% des

ménages en période de soudure et 8% des ménages en période post-récolte. Cette

différence s’explique par la nature même de la période de soudure. Ce terme désigne

la période précédant la récolte et au cours de laquelle les céréales viennent à

manquer. Selon la FAO6, l’insécurité alimentaire a diminué au Mali. Les risques ne

sont plus liés à la disponibilité céréalière mais à la pauvreté profonde.

Aujourd’hui, il existe un indicateur de l’état nutritionnel des populations largement

utilisé qui est le nombre de personnes sous-alimentées. Cet indicateur de la FAO est

obtenu en considérant le nombre total de calories disponibles dans un pays, par

exemple, c’est-à-dire les aliments disponibles convertis en calories rapporté au

5 République du Mali – Etude de Base de la sécurité alimentaire et de la nutrition Juillet 2007 et mars 2008, 6 Profil nutritionnel des pays – République du Mali – 2010, FAO.

24

besoin calorique minimum total de la population considérée. On obtient ainsi une

estimation du nombre de personnes susceptibles d’être sous-alimentées. Cet

indicateur ne perçoit que l’aspect calorique de l’alimentation, or on sait aujourd’hui

qu’au-delà d’une quantité suffisante de calories, l’organisme humain a besoin d’une

alimentation de qualité, lui apportant les nutriments et micronutriments nécessaires à

son maintien en bonne santé. Malgré cela, cet indicateur permet néanmoins, d’une

part une comparaison des différents pays et d’autre part une prise en compte de

l’évolution au cours du temps.

Ainsi, concernant le Mali, la proportion de personnes sous-alimentées était de 14%

en 1990-92 puis elle a diminué progressivement pour atteindre 10% en 2004-06.

D’après l’Enquête Budget – Consommation (EBC) de 1988-89 présentée par la

Direction Nationale de la statistique et de l’informatique du Mali, 16,6% des adultes

présentent un indice de masse corporelle inférieur à 18,5 et sont donc en situation de

maigreur. Ce chiffre est significativement plus élevé chez les femmes (19,1%) que

chez les hommes (14,5%).

3.1.2 La sécurité nutritionnelle

La sécurité nutritionnelle diffère de la sécurité alimentaire en cela qu’elle prend en

compte de nouvelles dimensions, au-delà de la seule alimentation. Yves MARTIN-

PREVEL, épidémiologiste à l’Institut de Recherche pour le Développement, propose

la définition suivante : « La sécurité nutritionnelle implique non seulement la

consommation de calories et de nutriments en quantités suffisantes mais également

le savoir et les aptitudes nécessaires à l’adoption d’un régime alimentaire équilibré et

de bonne qualité, notamment en ce qui concerne les besoins spéciaux des jeunes

enfants et des femmes en âges de procréer, et encore l’accès aux services de santé

et un environnement salubre, garantissant l’utilisation biologique effective des

aliments consommés. ».

Le schéma ci-dessous, issu des travaux de l’UNICEF (Fond des Nations Unies pour

l’Enfance) illustre cette vision.

25

QuickTime™ et undécompresseur

sont requis pour visionner cette image.

Figure 2 : Cadre conceptuel de la malnutrition - UN ICEF

La prise en considération de ces dimensions d’apparence extra-alimentaire, permet la

mise en place d’actions de développement coordonnées et efficaces selon les causes

identifiées.

L’utilisation de ce modèle permet une approche globale de la situation nutritionnelle

d’un pays sans se limiter à une approche strictement alimentaire qui serait biaisée

par l’omission des aspects annexes. L’observation d’une situation de mal nutrition est

un premier pas vers sa prise en charge. Cependant, traiter la malnutrition sans en

connaître les causes ne permet pas de résoudre les problèmes sur le long terme.

L’acceptation au niveau international de ce cadre conceptuel de la malnutrition

constitue une grande avancée.

26

3.1.3 La transition nutritionnelle

La transition nutritionnelle se caractérise par le passage d’une situation à forte

prévalence des dénutritions à une situation de quasi disparition des famines

accompagnée d’une augmentation des maladies non transmissibles liées à

l’alimentation que sont principalement le surpoids, le diabète et les maladies

cardiovasculaires. Les changements d’habitudes alimentaires sont responsables de

ce double effet de diminution des dénutritions et d’augmentation des pathologies

chroniques.

Cette transition s’est faite très progressivement dans les pays industrialisés. Les pays

en développement l’effectuent de façon accélérée actuellement. En effet, récemment,

un changement des habitudes alimentaires et une diminution de l’activité physique

ont été constatés particulièrement dans les milieux urbains. On assiste à une

augmentation de la consommation de lipides, de sel et de sucres simples ainsi qu’à

une diminution de la consommation de fibres. Suite à cela, le surpoids, l’obésité et

toutes les pathologies associées à un excès alimentaire sont apparues. La rapidité de

ces transformations provoque aujourd’hui la co-existence des dénutritions toujours

très présentes et de ces nouvelles pathologies. Cette co-existence s’observe au sein

du pays mais également au sein d’un même groupe d’individus voire chez un même

individu. En effet, une personne obèse par excès calorique peut tout à fait se trouver

en situation de carence en micronutriments. Cette double charge représente un défi

dans la gestion du pays.

Le contexte particulier des pays en développement explique la tournure que prend

cette transition nutritionnelle. En effet, on assiste à des modifications culturelles et

techniques causées par l’urbanisation rapide et l’industrialisation. L’accès à une offre

alimentaire abondante est facilité. La communication commerciale, publicité et

marketing, touche rapidement les populations urbaines du fait de la concentration des

habitations en ville et du développement de la grande distribution. Le mode de vie

tend à devenir sédentaire au sein des villes. Et enfin, l’hypothèse d’une

« programmation fœtale » est avancée par certains scientifiques : les carences

nutritionnelles au cours de la vie fœtale et de la petite enfance entraîneraient une

27

adaptation physiologique du corps lui permettant de vivre dans des conditions de

manque mais ayant pour contre partie une plus grande propension à développer des

pathologies liées aux excès alimentaires en cas de changement d’habitudes de vie.

Le vieillissement de la population laisse également plus de place aux maladies liées

aux excès par une plus longue exposition aux facteurs de risques.

Ces modifications de l’environnement et des modes de vie s’effectuent dans un

contexte où le surpoids et l’embonpoint restent valorisés et sont signes de richesse,

de statut social voire de bonne santé. Une femme maigre en particulier renvoie une

image négative de son mari dont on dira qu’il ne sait pas l’entretenir.

16,2

12,6

13,5

14,6

11,4

10,1

16,8

13,1

15,3

0

11,2

12,4

0

18,519,2

0

7,6

8,7

1,2

3,7

5,2

0

8,2

11,2

0

1,62

0

5

10

15

20

25

1995-96 2001 2006 1995-96 2001 2006 1995-96 2001 2006

Total Urbain Rural

<18,49 : maigreur

25 à 29,99 : surpoids

>ou= 30 : obésité

Figure 3 : Evolution de la corpulence des femmes en tre 1995 et 2006 au Mali

Selon le graphique ci-dessus, établi à partir des données des Enquêtes

Démographiques et de Santé du Mali (EDSM) II – III et IV, le phénomène de

transition nutritionnelle au Mali est clairement observable.

Notons que ces trois enquêtes ne concernent que les femmes et que

l’échantillonnage a différé d’une enquête à l’autre : en 2006, l’étude concernait les

femmes en âge de procréer, en 2001, les femmes ayant eu une naissance vivante au

cours des 5 dernières années et en 1995-96, les femmes ayant eu une naissance au

28

cours des trois années précédant l’enquête. De plus, l’enquête de 2006 a été

conduite en partie pendant la période de soudure contrairement aux deux autres qui

ont eu lieu en dehors de cette période.

La mesure utilisée ici est l’indice de masse corporelle (IMC). Il est calculé à partir du

poids en kg et de la taille en m : poids/(taille x taille). Cet indice permet d’avoir une

photographie de la situation à un moment donné, mais il est très sensible aux

variations de poids et donc varie beaucoup d’une période de l’année à l’autre. Cela

peut expliquer les chiffres importants de maigreur en 2006 puisque l’enquête a été

partiellement menée pendant la période de soudure. Le surpoids et l’obésité

dépendent très peu des périodes de l’année.

Globalement, la maigreur semble reculer contrairement au surpoids et à l’obésité

dont la prévalence augmente nettement. La situation est caractéristique de la

transition nutritionnelle puisque les taux de surpoids et d’obésité sont bien plus élevés

en ville que dans les zones rurales.

Les résultats de l’année 2006 reflètent la moindre dépendance des femmes vivant en

milieu urbain face à la période de soudure. En effet, contrairement aux zones rurales,

la prévalence de la maigreur est en baisse dans les zones urbaines.

Un élément également à noter est le caractère récent du recensement des personnes

en surpoids dans les enquêtes : en 1995-96, toute l’attention était portée aux

situations de maigreur.

Bernard MAIRE et Francis DELPEUCH résument la situation ainsi : « Le défi est de

fournir au plus grand nombre la possibilité d’un régime diversifié et suffisamment

abondant, tout en limitant la pénibilité des tâches et tout en sachant prévenir la

montée de l’obésité et des maladies chroniques. »7

7 MAIRE Bernard, DELPEUCH Francis, « La transition nutritionnelle, l’alimentation et les villes dans les pays en développement », Cahiers d’études et de recherches francophones/Agricultures, Volume 13, Numéro 1, Janvier Février 2004, pp. 23-30.

29

3.2 Nutrition maternelle et infantile

Dans les pays en développement en situation de transition nutritionnelle, cohabitent

tous les types de malnutritions.

3.2.1 Les malnutritions : définitions

La malnutrition correspond à l’inadaptation des apports aux besoins d’une population.

Le mot malnutrition décrit n’importe quel désordre nutritionnel de carence ou d’excès.

3.2.1.1 Les malnutritions par excès

On distingue deux malnutritions par excès : le surpoids et l’obésité. Selon l’OMS, un

individu est en surpoids lorsque son Indice de masse corporelle (IMC) est compris

entre 25 et 29,99 et il est obèse lorsque son IMC est supérieur ou égal à 30.

La plupart du temps, le surpoids et l’obésité sont liés à un excès de masse grasse

causé par un excès d’apport calorique. La forte augmentation de la prévalence de

ces pathologies dans les pays en développement témoigne de la transition

nutritionnelle.

3.2.1.2 Les malnutritions par carence

Malnutritions par carence, dénutrition, sous-nutrition sont des synonymes.

La dénutrition est caractérisée par un déséquilibre de la balance apports/besoins. Ce

déséquilibre peut concerner la quantité de calories mais aussi la quantité de

protéines ou la quantité de micronutriments. Nous nous intéresserons ici aux

dénutritions des mères et de leurs enfants.

Plusieurs types de dénutritions se distinguent les unes des autres :

• Chez les femmes, la dénutrition est détectable par une faible corpulence et/ou

une petite taille. Cette situation entraîne, lors des grossesses, une

augmentation du risque de décès de la mère lors de l’accouchement et un

risque très fort de petit poids de naissance de l’enfant représentant en soi, une

forme de dénutrition puisqu’il est rare et difficile pour ces enfants de rattraper

le retard accusé à la naissance.

• Chez les enfants, le recours aux indices de Waterloo permet de différencier la

maigreur du retard de croissance. Ces définitions reposent sur une approche

30

normative, Après avoir mesuré certains paramètres, la comparaison à la

médiane d’une population de référence permet de déterminer la gravité de la

situation : la dénutrition est dite modérée si les résultats montrent un écart de -

2 écarts types par rapport à la médiane et sévère si l’écart est de -3 écarts

types.

Indices de Waterloo P/T > -2ET P/T < ou = -2ET

T/âge > -2ET Dénutrition absente

Maigreur

T/âge < ou = -2ET Retard de croissance

Maigreur et Retard de croissance

La maigreur ou émaciation, appréhendée par le rapport poids/rapport à la

taille, donne une idée de la situation à un moment donné. Elle peut être due à

une sous-nutrition récente ou aigue. Ainsi de grandes différences peuvent être

observées selon la saison, le contexte climatique, la situation économique.

Cette forme de dénutrition est particulièrement visible. Sa cause première est

un déficit d’apports caloriques, mais d’après l’EBSAN II, d’autres facteurs

peuvent être mis en cause comme, par exemple, la contraction par l’enfant de

maladies et en particulier de diarrhées, qui augmente le risque de maigreur, ou

à l’inverse l’accès à l’eau potable qui limite ce risque.

Le retard de croissance est défini par la mesure de la taille par rapport à l’âge.

Il reflète une dénutrition chronique caractérisée par un déficit d’apports en

protéines et/ou micronutriments. Le problème est lié à un déficit de qualité de

l’alimentation et non pas à un déficit de quantité. Il est peu visible, en

particulier lorsqu’on ne connaît pas l’âge de l’enfant. D’après l’EBSAN II, en

dehors des causes alimentaires directes, le risque de retard de croissance est

diminué chez les enfants ayant une couverture vaccinale satisfaisante et/ou

ayant accès à l’eau potable.

31

On observe un cycle intergénérationnel de la dénutrition : les mères dénutries

enfantent d’enfants de faible poids de naissance qui deviendront, pour les filles, des

jeunes femmes de petite taille et de faible corpulence qui, à leur tour, donneront

naissance à des enfants dénutris.

L’insuffisance pondérale mesurée par le rapport du poids par rapport à l’âge est

également utilisée. Elle présente l’avantage d’être plus facilement mesurable, mais

ne donne que peu d’indications sur l’état de santé des enfants et sur les actions à

mener. Après un premier dépistage grâce à cette mesure, il est donc indispensable

de mesurer les deux autres rapports.

Les différentes dénutritions sont d’origine multifactorielle. L’alimentation joue un rôle

important dans leur apparition, mais elle n’est pas la seule cause. En effet, l’état de

santé plus général, les infections respiratoires, les diarrhées par exemple, influent sur

la capacité du corps à utiliser les ressources qui lui sont apportées. Le niveau

d’éducation des mères et l’attention portée aux enfants semblent prendre une place

importante parmi les causes des dénutritions. Enfin, l’accès aux ressources de toutes

sortes (financières, alimentaires, de santé, d’éducation) apparaît être un facteur

primordial de l’apparition des dénutritions.

Toutes malnutritions confondues, les plus malnutris sont les plus pauvres quelle que

soit la disponibilité alimentaire.

3.2.1.3 Les conséquences des dénutritions

Les dénutritions entraînent une augmentation du risque de mortalité et de contraction

de maladies infectieuses de type diarrhéiques ou respiratoires par exemple. En outre,

la dénutrition provoque un déficit intellectuel et une grande fatigue qui, chez les

adultes, peuvent entraîner une baisse de la productivité et une augmentation de

l’absentéisme et donc une baisse des revenus.

Chez les enfants, l’apparition de maladies infectieuses dans un contexte de manque

de soins de santé, diminue la capacité du corps de ces enfants à utiliser les aliments

ingérés et augmente donc l’état de dénutrition. Il en résulte une baisse de l’efficacité

du système immunitaire.

32

La dénutrition de la population représente un réel handicap pour le pays du fait de la

baisse d’efficacité des travailleurs par fatigue physique ou par déficit intellectuel. La

dénutrition influe directement sur le Produit Intérieur Brut d’un pays.

De plus, rappelons que ce phénomène se perpétue d’une génération à l’autre si

aucune mesure efficace n’est prise.

L’état nutritionnel d’une population est donc bien à la fois une cause et une

conséquence du développement d’un pays. Le coût social et économique pour le

pays est colossal. Ce constat participe à l’essor des politiques visant à réduire la

malnutrition dans les pays les plus touchés. Le taux de malnutrition est aujourd’hui

considéré comme un bon indicateur du niveau de développement d’un pays et

permet de prédire un certain nombre de problèmes de santé à venir à l’échelle du

pays.

3.2.2 La situation au Mali

D’après l’enquête Budget – Consommation de 1988-89 présentée par la Direction

Nationale de la statistique et de l’informatique du Mali, près de 24% des enfants de 0

à 10 ans souffraient de retard de croissance. Ce taux est plus élevé en milieu rural

qu’en milieu urbain. Ces données peuvent être analysées dans leur ensemble mais

présentent l’inconvénient de ne pas permettre de comparaison dans le temps. En

effet, les erreurs de mesure liées à la difficulté de mesurer un enfant fausseraient les

résultats.

En revanche, les différentes Enquêtes Démographique et de Santé au Mali de 1987,

1995-96 et 2001 permettent une approche en termes d’évolution des données.

33

24

11

3130

23

40

34

13

34

0

5

10

15

20

25

30

35

40

45

Retard de croissance Maigreur Insuffisance pondérale

1987

1996

2001

Figure 4 : Evolution des niveaux de dénutrition che z les enfants de moins de 3 ans entre 1987

et 2001

On observe une augmentation continue du nombre d’enfants atteints de retard de

croissance. Les modes de calcul utilisés en 2006, différents des modes de calculs

utilisés dans les enquêtes précédentes ne permettent pas d’effectuer une

comparaison. Les données de l’enquête de 2001 ont été retraitées afin de permettre

cette comparaison au moins entre les deux enquêtes EDSM III et IV. Ainsi, les

résultats de l’EDSM IV de 2006 montrent une diminution du taux de retard de

croissance qui passe de 38% en 2001 à 34% en 2006.

Les données concernant la maigreur reflètent une dénutrition récente ou aigue, ainsi

la comparaison dans le temps revient à comparer deux photographies sans pour

autant pouvoir en déduire quoi que ce soit quant à l’évolution. En 1996, les conditions

climatiques difficiles entraînant une mauvaise récolte pourraient expliquer la forte

prévalence de maigreur chez les enfants de moins de trois ans. Notons, que les

données de 2006 affichent également une forte prévalence de maigreur chez ces

enfants pouvant être relié à la situation critique de 2005.

34

Les EBSAN I et II ont été effectuées respectivement en juillet 2007, période de

soudure, et mars 2008, période post récolte. Les différences de résultats observées

peuvent, en partie, être expliquées par le contexte de récupération des données.

Maigreur Retard de croissance

Insuffisance pondérale

EBSAN I 9,7 25,3 26,3

EBSAN II 6,1 25,7 23,3

Figure 5 : taux de prévalence des dénutritions selo n la période de l'année au Mali

On constate, une fois de plus, que l’amélioration de la disponibilité des aliments en

période post-récolte entraîne une diminution significative du taux de maigreur, ou

dénutrition aigue, et du taux d’insuffisance pondérale. En revanche, le taux de retard

de croissance, ou dénutrition chronique reste stable. Il reflète une situation

d’insécurité alimentaire permanente. Ainsi, concernant l’étude de la dénutrition et son

évolution, la maigreur permet de déceler une situation d’urgence, en cas de crise par

exemple, et le retard de croissance permet de suivre l’évolution dans le temps de la

situation alimentaire et nutritionnelle des populations.

Concernant les mères, l’âge moyen de la première grossesse est de 17 ans. Ce

constat renvoie aux problèmes liés à la petite taille et à la faible corpulence. En effet,

les filles-mères n’ont, pour certaines, pas terminé leur croissance. Cet état augmente

les risques de mortalité de la mère lors de l’accouchement car la taille du bassin

maternel est trop étroite par rapport à la circonférence de la tête du bébé. Une fois de

plus, les enfants dont la mère est dénutrie ont de forts risques d’accuser un retard de

croissance, un déficit intellectuel et une moindre résistance aux maladies.

3.2.3 Prise en charge globale des enfants et dénutrition

Les indices développés précédemment indiquent la prévalence de la dénutrition sur

une base chiffrée. Cependant, d’autres facteurs permettent d’appréhender la

dénutrition. L’observation des pratiques alimentaires des jeunes enfants, l’accès aux

soins de santé ainsi que la disponibilité de la mère à s’occuper de son enfant sont

autant de points cruciaux en termes de dénutrition.

35

3.2.3.1 Les pratiques alimentaires des jeunes enfants

Selon l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé), les pratiques alimentaires

optimales pour limiter le risque de dénutrition et assurer un bon développement de

l’enfant sont les suivantes : débuter l’allaitement dès la première heure après la

naissance, répondre à la demande du nourrisson en terme d’allaitement, nourrir

l’enfant exclusivement au sein jusqu’à l’âge de 6 mois, proposer une alimentation de

complément appropriée et saine à partir de 6 mois, augmenter l’allaitement en cas de

pathologies du nourrisson et poursuivre l’allaitement au delà de la deuxième année

de vie.

Ces recommandations ne sont pas toujours appliquées. Au Mali, selon l’EDSM IV, en

2006, la quasi totalité des enfants sont ou ont été allaités. Cependant, seuls 45%

d’entre eux ont été mis au sein dans l’heure suivant la naissance. Or, le colostrum

produit par la mère immédiatement après l’accouchement est extrêmement riche en

nutriments et apporte des anti-viraux et des anti-bactériens à l’enfant. Parmi les

enfants allaités, 31% ont reçu un aliment autre que le lait maternel avant la première

tétée.

Notons, cependant, que la situation semble s’améliorer de ce point de vue puisque,

selon EDSM II, en 1995-96, seuls 9,5% des enfants avaient été allaités au cours de

la première heure de vie.

Concernant l’alimentation des enfants de 0 à 6 mois, la pratique de l’allaitement seul

augmente très nettement depuis plus de 20 ans : cette pratique concernait 10% des

enfants de moins de quatre mois en 1995-96 et concerne 45% des enfants de moins

de quatre mois en 2006. La grande majorité des autres enfants de moins de quatre

mois reçoivent de l’eau en plus de l’allaitement maternel.

À partir de l’âge de 6 mois, l’allaitement exclusif ne suffit plus à couvrir les besoins du

nourrisson, il est donc nécessaire d’introduire de nouveaux aliments. Pourtant, au

Mali, seuls 30% des enfants de 6 à 9 mois reçoivent ce régime alimentaire en 1995-

96 comme en 2006. La grande majorité des autres enfants de 6 à 9 mois

consomment le lait maternel et éventuellement de l’eau (14% consomment

36

uniquement du lait maternel et 47% consomment de l’eau en plus du lait maternel en

2006).

La promotion de l’allaitement maternel pourrait constituer un levier dans la prévention

de la dénutrition infantile. Cependant, pour cela, les mères doivent pouvoir avoir

accès aux soins de santé et à l’éducation.

3.2.3.2 L’accès aux soins de santé

L’accès aux soins de santé joue un rôle primordial dans l’état nutritionnel des enfants.

Or, cet accès est largement déterminé par la présence ou l’absence d’un centre de

santé fonctionnel dans le village. D’après l’EBSAN I, 52% des villages possèdent un

centre de santé opérationnel. En admettant les propos du Programme de

Développement Sanitaire et Social (PRODESS) du Mali : “Les personnes vivant dans

les ménages situés à moins d’une demi-heure d’un établissement de santé ont un

accès satisfaisant aux soins de santé”, 59% de la population accèdent de façon

satisfaisante aux centres de santé. Ce taux varie énormément d’une région à l’autre

avec près de 100% à Bamako, 71% dans la région de Kayes, qui sont les régions les

mieux équipées et seulement 29% dans la région de Kidal. D’après le CFSVA

(Analyse de la sécurité alimentaire et de la vulnérabilité), le Mali compte en moyenne

1 médecin pour 22 500 habitants ce qui le place parmi les pays les pires du monde.

Au-delà de l’accès aux centres de santé, le type de toilettes disponible dénote de la

situation d’hygiène des ménages. Seuls 3% des maliens, d’après l’ESBAN I, ont

accès à des toilettes modernes avec chasse d’eau. La grande majorité (75%) utilisent

des toilettes traditionnelles et 22% se soulagent directement dans la nature.

L’accès à l’eau potable diminue les risques de maladies et de dénutritions. 75% des

maliens boivent de l’eau provenant du robinet, de forage ou de puits améliorés. Cette

eau est considérée comme potable avec une qualité satisfaisante.

Concernant les enfants, une bonne couverture vaccinale semble liée à un moindre

risque de dénutrition, notamment de dénutrition chronique. D’après l’OMS, un enfant

a une bonne couverture vaccinale lorsqu’il a reçu, avant l’âge de 1 an, le BCG, le

vaccin contre la rougeole, le vaccin contre la polio (3 doses), le DTCoq (3 doses)

ainsi que le vaccin contre la fièvre jaune. D’après le EDSM IV, 42% des enfants de 12

37

à 24 mois répondent à ces critères. Ces données étant basées sur le carnet de

vaccination et sur les déclarations des mères lorsque le carnet n’était pas disponible.

Ce chiffre est en nette progression depuis l’EDSM III puisqu’en 2001 seuls 19% des

enfants de 12 à 24 mois avaient une bonne couverture vaccinale. Cette amélioration

s’est faite en particulier dans les zones rurales où le taux d’enfants ayant une bonne

couverture vaccinale est passé de 22% à 46%. Ce taux reste cependant inférieur au

taux observé en milieu urbain (plus de 50%).

La contraction de maladies influe sur la dénutrition aigue, en particulier les infections

respiratoires aigues (IRA) et les diarrhées. D’après l’EDSM IV, 5,6% des enfants de

moins de 5 ans ont souffert de toux dans les deux semaines précédant le passage de

l’enquêteur. Notons que ce chiffre est particulièrement élevé à Bamako (8,2%).

Concernant les diarrhées, 13% des enfants de moins de 5 ans ont présenté un

épisode diarrhéique au cours des deux semaines précédant le passage de

l’enquêteur avec une différence notable entre le milieu urbain (9%) et le milieu rural

(15%).

La santé des mères joue un rôle important pour la santé de l’enfant. Les carences en

micronutriments constituent des paramètres significatifs de l’état de santé de la mère.

Afin d’apprécier les carences en vitamine A et en fer dans l’EBSAN I, l’évaluation

clinique de la cécité crépusculaire, symptôme caractéristique d’une carence en

vitamine A et la pâleur reflétant l’anémie ferriprive ont été évaluées. Les résultats

montrent que 5,5% des femmes en âge de procréer souffrent de cécité crépusculaire

et 20,4% de ces femmes présentent une pâleur telle que l’on en déduit une carence

en fer.

La carence en vitamine A de la mère peut avoir de graves conséquences : les risques

de mortalité maternelle à l’accouchement et de fausse couche sont augmentés, la

concentration en vitamine A du lait maternel sera faible et l’enfant souffrira donc à

son tour de carence en vitamine A qui peut entraîner une cécité et un retard de

croissance et qui augmente le risque d’infection puisque la vitamine A joue un rôle

important dans le système immunitaire.

38

Quant à la carence en fer, elle augmente le risque de décès maternel à

l’accouchement et entraîne un retard de croissance de l’enfant ainsi qu’un déficit

cognitif. Tout comme la vitamine A, le fer est indispensable au bon développement du

système immunitaire, une carence favorise donc les infections.

La vaccination anti-tétanique des mères constitue également une mesure primordiale

dans la prise en charge des femmes enceintes. Le tétanos est une cause importante

de décès néonatal. D’après l’EDSM IV, 56% des femmes ayant eu un enfant dans les

5 ans précédant l’enquête, étaient protégées contre le tétanos lors de leur dernière

grossesse. On remarque que ces chiffres sont plus élevés à Bamako (74%) et chez

les femmes ayant un niveau d’instruction élevé (83%).

La fréquence des consultations pré et post natale est un indicateur de l’accès aux

soins. Des relations ont été établies entre ces consultations et l’état nutritionnel des

enfants.

Selon l’EBSAN I de 2007, au niveau national, 59% des femmes enceintes ont fait au

moins une consultation prénatale. Ce chiffre tombe à 36,4% selon l’ESBAN II en

2008. Cette grande différence s’explique en partie par l’époque de relevé des

données : en effet, pendant la récolte, les femmes n’ont pas le temps d’aller consulter

et de plus, la saison des pluies rend plus difficile les déplacements vers les centres

de santé. Ces chiffres diffèrent légèrement selon les EDSM III et IV qui annoncent

57% en 2001 et 70 % en 2006 avec d’importantes différences selon le lieu de

résidence : 64% en milieu rural et 87% en milieu urbain.

Quels que soient les chiffres, l’important réside dans l’ordre de grandeur et dans

l’évolution. Ainsi, la proportion de femmes enceintes n’ayant fait aucune consultation

prénatale reste préoccupante malgré une amélioration ces dernières années.

Le contenu des consultations prénatales est aussi important que leur fréquence.

Selon les femmes interrogées au cours de l’EDSM IV, seules 29% des femmes ayant

reçu des soins prénatals ont été informés des signes de complications liés à la

grossesse. En revanche, le poids, la taille et la tension artérielle sont mesurés de

façon quasi systématique lors de ces consultations. 61% des femmes ont reçu une

complémentation en fer et 62% un anti-paludéen. Les prélèvements d’urine et de

39

sang sont fréquemment effectués à Bamako (respectivement 81% et 79%) alors

qu’ils sont plus rares dans la région de Kayes par exemple (34% et 26%

respectivement).

Au mali, la proportion de décès maternels et de décès du nouveau-né reste

importante et ces décès surviennent pour la majorité dans les 48 heures suivant

l’accouchement. Cela pointe l’importance des soins post-natals.

Selon l’EDSM IV, seules 45% des femmes accouchent dans un établissement de

santé avec de grandes disparités entre les zones rurales (33%) et les zones urbaines

(78%). Parmi les femmes ayant accouché en dehors d’un établissement de santé,

70% n’ont reçu aucun soin post-natal.

3.2.3.3 Les pratiques de soins ou caring

Le caring est une notion apparue dans les années 1990 afin de nommer les causes

sous-jacentes de la malnutrition qui n’étaient ni directement liées à la santé physique

ni à l’alimentation. Le caring est un anglicisme dont l’origine vient du mot « care »

signifiant soin dans le sens de « prendre soin » contrairement au mot « treatment »

que nous traduisons aussi par le mot « soin » en français mais, cette fois, dans le

sens « soin médical ». Ainsi, le caring regroupe les soins psycho-affectifs, les

facteurs socio-culturels et le niveau d’éducation. La relation mère-enfant se pose en

arrière fond de cette notion. La qualité de cette relation dépend de la disponibilité de

la mère, de son accès à l’information, aux connaissances, de son état psychosocial et

nutritionnel, de son accès à la santé. Yves MARTIN-PREVEL note que « même dans

un contexte défavorable de pauvreté ou de crise économique, de bonnes pratiques

de caring peuvent permettre une meilleure croissance et un meilleur

développement »8.

En effet, d’après l’ESBAN I, les déterminants de la dénutrition infantile sont, non

seulement, l’état de santé et le régime alimentaire de l’enfant, mais également l’état

de santé et d’instruction de sa mère, le niveau de revenu de sa famille, l’accès à l’eau

potable, l’âge de la mère.

8 MARTIN-PREVEL Yves et collaborateurs, « Nutrition, urbanisation et pauvreté en Afrique Subsaharienne », Médecine Tropicale, 2000, 60-2, pp.179-192.

40

Le niveau d’instruction de la mère est un critère important dans la gestion de la santé

en général et plus particulièrement de la santé nutritionnelle de son enfant. Selon

l’EBSAN I, 75% des mères n’ont aucune instruction. Bamako et Kayes se

démarquent avec des taux plus faibles d’analphabétisme (respectivement 38 et 58%).

Ce niveau d’instruction des mères influe notamment sur la bonne couverture

vaccinale de l’enfant. En effet, selon l’EDSM IV de 2006, les enfants dont les mères

n’ont aucune instruction sont 46% à être correctement vaccinés contre 70% des

enfants dont les mères ont atteint le secondaire ou plus.

Dans une situation où les maladies infectieuses représentent un problème majeur de

santé des enfants, l’hygiène des mères apparaît être un point à surveiller. Le lavage

des mains reflète l’importance donnée à l’hygiène. Selon l’EBSAN I, la grande

majorité des mères se lavent les mains lors des opérations clés liées à l’hygiène :

préparation des repas, avant de manger, après avoir mangé, avant de faire manger

l’enfant, après être allé aux toilettes et après avoir aidé l’enfant à aller aux toilettes.

Mais seule une faible proportion de ces femmes utilise du savon ou un autre

détergent, les autres utilisant de l’eau seule.

Les pratiques de soins dépendant de façon importante de la relation mère - enfant, il

semble nécessaire de s’intéresser au statut de la femme dans la société afin

d’appréhender ses marges de manœuvre concernant l’éducation de ses enfants.

Le travail des femmes, aura par exemple un rôle important concernant le temps

qu’elles pourront consacrer à leurs enfants.

D’autre part, les femmes ont besoin d’avoir accès au budget du ménage pour

accéder à la nourriture et éventuellement pouvoir emmener leurs enfants dans un

centre médical si nécessaire sans pour autant devoir attendre l’autorisation du

gestionnaire du budget.

41

3.3 Les différences urbain - rural : focus sur la r égion de Kayes et la ville de

Bamako

L’importance de l’urbanisation au Mali a bouleversé le paysage démographique et

économique du pays. Cependant comme le montre le graphique ci-dessous, la

différence de pauvreté entre la ville et la campagne pré-existe à ce phénomène.

De plus, la proportion de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté en ville

est à relativisé puisque l’on observe de grosses différences au sein même des villes.

0

10

20

30

40

50

60

70

80

90

1988 1994 2001 2005

Urbain

Rural

Total

Figure 6 : Incidence de la pauvreté monétaire au Ma li entre 1988 et 2005

La forte urbanisation observée au Mali ces dernières années a entraîné d’importantes

disparités entre la ville et la campagne sur le plan nutritionnel.

D’après Yves MARTIN-PREVEL9, la sécurité alimentaire en terme qualitatif s’exprime

par la qualité nutritionnelle et la diversité des aliments, leur qualité sanitaire et leur

9 MARTIN-PREVEL Yves et collaborateurs, « Nutrition, urbanisation et pauvreté en Afrique Subsaharienne », Médecine Tropicale, 2000, 60-2, pp.179-192.

42

acceptabilité culturelle. C’est ici que les différences entre les milieux ruraux et urbains

ressortent. En milieu urbain, l’accès aux aliments est plus grand ce qui favorise une

alimentation plus diversifiée : moins de céréales, plus de produits animaux, de sucres

simples et de graisses.

Cependant la quantité de calories consommées apparaît, selon l’enquête Budget -

Consommation de 1988-89, légèrement plus importante en milieu rural (2300 kcal)

qu’en milieu urbain (2200). Sa répartition est, en revanche, bien différente entre la

ville et la campagne comme le montre le tableau ci-dessous issu de l’EBC 88-89.

Répartition de l’apport énergétique par nutriments selon le milieu de résidence

Globalement l’alimentation est hyperglucidique et pauvre en lipides. Ces

caractéristiques sont accentuées en milieu rural. L’énergie glucidique provient

essentiellement de l’aliment de base c’est-à-dire des céréales. L’alimentation rurale

est donc plus énergétique mais moins diversifiée.

Concernant la région de Kayes et la ville de Bamako, cette tendance se confirme

avec un apport calorique moyen de 2400 à Kayes et de 2100 à Bamako.

L’apport protéique est satisfaisant en quantité, cependant il provient majoritairement

des céréales et des légumineuses et peu de la viande, du poisson ou du lait. Or, les

protéines d’origine végétale sont moins bien utilisées par l’organisme.

Outre la consommation alimentaire, des différences notoires apparaissent sur l’état

de santé des populations entre le milieu urbain et le milieu rural.

En termes de vaccination des enfants, on constate que seuls 29% des enfants de 12

à 24 mois ont une couverture vaccinale complète dans la région de Kayes contre

En % de l’énergie totale Urbain Rural

Glucides 78,4 84,3

Lipides 7 3,8

Protéines 14,6 11,9

Figure 7 : Répartition de l'apport énergétique par nutriments selon le milieu de résidence

43

59% à Bamako. De manière plus globale, les taux de vaccination sont plus faibles en

milieu rural qu’en milieu urbain.

Selon l’EDSM IV, la prévalence de la diarrhée est de 21% dans la région de Kayes et

de 8% à Bamako.

Concernant la notion de caring, Yves MARTIN-PREVEL10 note qu’en milieu urbain,

de nombreux facteurs pèsent sur la capacité des femmes à s’occuper de leurs

enfants. En effet, en ville, les femmes sont très souvent amenées à travailler pour

assurer un revenu suffisant à leur famille. Le temps qu’elles passent au travail voire

dans les transports représente du temps qu’elles ne passent pas à s’occuper de leurs

enfants. En revanche, il leur permet de gagner de l’argent qu’elles géreront, la plupart

du temps, elles-mêmes. Or, il semble acquis maintenant que lorsque le budget est

géré par les femmes, il est principalement utilisé pour l’alimentation de toute la

famille.

Concernant le travail des femmes, des différences d’activités professionnelles sont à

noter : à Kayes, 78% des femmes ayant un emploi travaillent dans le secteur de

l’agriculture, de la pêche ou de l’élevage alors qu’à Bamako 58% travaillent dans le

secteur de la vente et des services. Le problème de la garde des enfants se pose de

manière plus pesante en milieu urbain qu’en milieu rural où les femmes travaillent

souvent avec leurs enfants sur le dos.

Enfin, une des composantes majeure du caring est l’accès à l’éducation des femmes.

Cet accès semble facilité en ville par rapport à la campagne. Selon l’EDSM IV, 88%

des femmes n’ont reçu aucune instruction en milieu rural alors qu’elles ne sont que

59% en milieu urbain. La région de Kayes est caractéristique du milieu rural avec un

taux de femmes non instruites de 86%. Quant à la ville de Bamako, elle accuse le

taux le plus faible de femmes non instruites. Notons également que seules 3,3% des

femmes de Kayes ont atteint le secondaire alors qu’elles sont 31% à Bamako.

Ces différences observées entre le milieu urbain et le milieu rural sont à relativiser.

En effet, depuis quelques années, on constate de grandes disparités au sein des

10 MARTIN-PREVEL Yves (2010), Sociologie du développement, Enseignement suivi dans le cadre du Master 1 Alimentation, CETIA, Université de Toulouse 2, Toulouse.

44

villes avec des personnes en situation d’extrême pauvreté côtoyant des personnes

aux revenus importants et ce dans une même ville voire un même quartier. Il faudrait

désormais parler « des » villes. Faute de données, nous n’approfondirons pas cette

analyse ici.

Conclusion

La situation nutritionnelle du Mali apparaît donc préoccupante et en particulier

concernant les femmes et les enfants. De plus, un mauvais état nutritionnel de la

population affecte le développement socio-économique du pays. Il est donc

primordial d’améliorer l’état nutritionnel afin de développer le capital humain du pays.

Face à ce constat, le gouvernement malien a fait de la sécurité alimentaire durable un

objectif premier de sa politique. Ainsi, un volet « sécurité alimentaire durable et

souveraineté alimentaire » a été inséré dans la Loi d’Orientation Agricole votée en

2006. Déjà en 2002, la stratégie nationale de sécurité alimentaire, visant à satisfaire

les besoins alimentaires des populations, est apparue et s’est traduite par le

Programme National de Sécurité Alimentaire (PNSA). Ce dernier qui intègre des

objectifs directement liés à l’alimentation comme l’augmentation et la diversification

de la production agricole ainsi que le développement de la transformation des

produits locaux vise aussi et surtout à l’amélioration des revenus des populations ce

qui renvoie aux questions d’accessibilité. Ce programme insiste sur la nécessité

d’une interaction entre le secteur agricole et les autres secteurs tels que la santé,

l’éducation, les transports, etc. Parallèlement, le Commissariat à la Sécurité

Alimentaire (CSA) a été créé en mai 2004. Il est chargé de définir, piloter et

coordonner l’ensemble des actions ayant trait à la sécurité alimentaire. Il coordonne,

par exemple, le Système d’Alerte Précoce (SAP). Ce SAP, mis en place depuis 1986,

assure un suivi nutritionnel de la population à travers quelques sites sentinelles. Il a

pour objectif de prévoir les crises alimentaires et d’améliorer leur gestion en

identifiant lesdites situations de crises. Dans le même temps, le Programme de

Restructuration des Marchés Céréaliers (PRMC) a été créé et joue un rôle

complémentaire vis à vis du SAP puisqu’il distribue des denrées alimentaires

gratuitement dans les zones identifiées en crise par le SAP.

45

Le gouvernement a également créé différentes divisions en charge de nutrition et/ou

d’alimentation au sein de ses ministères : la Division du Suivi de la Situation

Alimentaire et Nutritionnelle de la Cellule de Planification et de Statistiques et la

Division Nutrition de la Direction Nationale de la Santé.

La volonté d’agir sur la nutrition et la sécurité alimentaire est affichée et bien

présente, mais la multiplication des institutions en charge de ces sujets favorise le

flou et limite l’efficacité par manque de coordination notamment. Notons que

l’insécurité alimentaire rurale liée aux facteurs climatiques a diminué. En revanche,

une insécurité alimentaire de nature nouvelle l’a remplacée liée à la pauvreté urbaine

et péri-urbaine. Cette dernière nécessite une prise en charge différente que l’on voit

apparaître dans le PNSA mais il faudra probablement quelques années avant de

pouvoir en constater les éventuels effets.

46

Partie II :

Alimentation, nutrition et migrations

47

Concernant l’alimentation des migrants et l’évaluation de leur bien être alimentaire, la

dimension socio-anthropo-ethnologique est indispensable. Mais la question de la

nutrition apparaît également primordiale dans le traitement des données et la

compréhension du problème posé.

La question de la pluridisciplinarité pour traiter l’alimentation est une question

récurrente et qui ne fait pas consensus ni dans les sciences humaines ni dans la

nutrition. D’où vient ce clivage des disciplines ? Et comment les réconcilier ?

Après avoir tenté de répondre à ces questions, nous présenterons les outils et

concepts nécessaires à l’étude des modèles alimentaires des migrants maliens.

L’espace social alimentaire permet une approche pluridisciplinaire de l’alimentation.

Le contexte particulier de la migration nécessite la prise en compte spécifique du

caractère identitaire de l’alimentation ainsi que de la notion d’adaptabilité face à un

changement d’environnement. Enfin, il semble pertinent d’évaluer la qualité de

l’alimentation en considérant la variété et la diversité du régime alimentaire considéré.

1 De la nutrition à l’alimentation comme fait socia l total

L’articulation de la nutrition et des sciences humaines représente un défi majeur dans

l’étude de l’alimentation des pays en développement.

1.1 De la nutrition …

La nutrition est, au sens commun, « la transformation et l’utilisation des aliments dans

l’organisme » et au sens physiologique, « l’ensemble des processus d’assimilation et

de désassimilation qui ont lieu dans un organisme vivant, lui permettant de se

maintenir en bon état et lui fournissant l’énergie nécessaire. »11

Longtemps, elle a été considérée comme la seule façon de traiter de l’alimentation

humaine. Les médecins avaient le monopole de son étude.

Au 19ème siècle, l’alimentation apparaît au sein de la discipline économique dans les

travaux d’Engel qui étudie la consommation des ménages et propose une loi

concernant le lien étroit entre le niveau économique d’un foyer et la part de dépenses

11 Dictionnaire le nouveau petit robert,dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, nouvelle édition du Petit Robert de Paul Robert, texte remanié et amplifié sous la direction de Josette Rey-Debove et Alain Rey, 1999, éd. dictionnaire le Robert 1993.

48

destinée à l’alimentation. À ce moment, l’alimentation est un moyen d’aborder un

thème économique et non pas un sujet d’étude à part entière.

1.2 … Au fait social total

En 1895, E. Durkheim porte la naissance de la sociologie en tant que champ

scientifique autonome en prônant l’autonomie du social. Il définit le fait social comme

suit :

« Un ordre de faits qui présentent des caractères très spéciaux : ils consistent en des

manières d’agir, de penser et de sentir, extérieures à l’individu, et qui sont douées

d’un pouvoir de coercition en vertu duquel ils s’imposent à lui. Par suite, ils ne

sauraient se confondre avec des phénomènes organiques, puisqu’ils consistent en

représentations et en actions ; ni avec les phénomènes psychiques, lesquels n’ont

d’existence que dans la conscience individuelle et par elle. »12

Par cette définition, Durkheim exclut l’alimentation en tant que fait social car cette

dernière comprend une composante biologique importante. Dans le même temps, il

inclut l’étude des manières de table comme fait social. Dès lors, l’ambiguïté et la

difficulté de l’étude de l’alimentation sont explicitées. En effet, l’ « autonomie du

social » dont parle Durkheim ne s’applique pas à l’alimentation.

L’alimentation est posée comme lieu d’indexation, d’ « exemplification » d’autres

disciplines et non comme objet d’étude à part entière.

La nutrition, discipline scientifique, biologique, attachée à la médecine reste donc une

discipline bien distincte de la sociologie et des sciences humaines en général.

M. Mauss, neveu de Durkheim et père de l’ethnologie française, s’inscrit dans le

courant fonctionnaliste : les phénomènes sociaux peuvent être décrits à travers les

fonctions qu’ils assurent et chaque fait social a une fonction, rien n’est laissé au

hasard. Il propose un premier pas vers l’interdisciplinarité : « Les techniques du

corps, le psychologique articulent le social et le biologique »13. Il faudra, cependant,

attendre E. Morin, sociologue et philosophe français du 20ème siècle, pour appliquer

cette pluridisciplinarité à l’étude de l’alimentation. « Comment ne voit-on pas que ce 12 DURKHEIM Emile, Les règles de la méthode sociologique, (1895) PUF, Paris, Quadrige, 1983, p. 5-6. 13 MAUSS Marcel, « Les techniques du corps », Anthropologie et sociologie, PUF, Paris, 1925.

49

qui est le plus biologique - le sexe, la mort - est en même temps ce qui est le plus

imbibé de symboles, de culture ! Nos activités biologiques les plus élémentaires, le

manger, le boire, le déféquer, sont étroitement liées à des normes, des interdits, des

valeurs, des symboles, des mythes, des rites, c’est-à-dire, à ce qu’il y a de plus

spécifiquement culturel »14. Ainsi est ébauchée la sociologie de l’alimentation posant

l’alimentation comme un fait bio-psycho-socio-culturel.

1.3 Le paradigme interdisciplinaire

Les enjeux d’articulation des disciplines dans l’étude de l’alimentation restent très

actuels. Le clivage des disciplines universitaires représente un obstacle au

développement d’un paradigme interdisciplinaire. Il convient de consolider et de

faciliter les relations inter-disciplinaires notamment entre les sciences humaines et les

sciences de la nutrition.

Le premier point à éclaircir afin de permettre un travail coopératif semble être la

question du vocabulaire. La communication n’est possible que si les termes employés

renvoient à une même définition aux yeux de chacun des acteurs impliqués.

Or, on constate que pour un même terme, les définitions diffèrent selon les

disciplines. Ainsi le mot « Alimentation » renvoie, pour les nutritionnistes, à la manière

de satisfaire les besoins physiologiques en termes de quantité et de qualité

d’aliments voire de répartition des apports. Cette notion d’alimentation est bien plus

large aux yeux des sociologues. En effet, elle recouvre la façon de se procurer les

aliments, la façon de les préparer, le choix de ces derniers, les règles constituées

autour de la prise alimentaire, les représentations que cachent la consommation des

aliments, la commensalité, etc. En bref, tout ce qui a trait, de près ou de loin, à l’acte

alimentaire mis à part le calcul nutritionnel. L’alimentation, telle que nous

l’emploierons dans la suite de ce mémoire, intègre ces différentes approches et

recouvre 4 dimensions : hédonique, nutritionnelle, commensale et symbolique.

14 MORIN Edgar, Le paradigme du goût : la nature humaine, Le seuil, Paris, 1973.

50

1.4 Les modèles alimentaires : une notion à définir

Dans une approche pluridisciplinaire de l’alimentation, la notion de modèles

alimentaires semble ressortir en particulier de la part des acteurs provenant des

sciences humaines. Là encore, la définition de ce terme est indispensable.

Les modèles alimentaires sont définis par Jean-Pierre Poulain15 comme un ensemble

de règles socialement définies et relevant de l’allant de soi qui fixent le choix des

aliments, les interactions entre acteurs de la filière, les modes de préparations

culinaires, les formes de consommation et les rythmes alimentaires. On peut les

considérer comme l’articulation du culturel et du naturel : la mise en scène des

valeurs d’une culture et le résultat des contraintes matérielles du milieu. Ils

permettent aux mangeurs d’articuler les différentes dimensions de l’alimentation

évoquées ci-dessus : hédonique, nutritionnelle, commensale et symbolique et

facilitent ainsi la prise de décision. Les ambivalences de l’alimentation sont

nombreuses et bien connues des sociologues de l’alimentation. Claude Fischler,

sociologue français, directeur de recherche au CNRS (Centre National de la

Recherche Scientifique) et directeur du centre Edgar Morin, les explicite dans

différents concepts16 :

- Le paradoxe de l’omnivore : l’Homme en tant qu’omnivore doit innover et

expérimenter pour satisfaire ses besoins en fonction des fluctuations des

ressources. Cela implique une prise de risque car les aliments inconnus sont

potentiellement dangereux. L’omnivore doit donc trouver un équilibre entre le

désir d’innovation (néophilie) et la peur de la nouveauté (néophobie).

- Le principe d’incorporation : Lors de la consommation d’un aliment, le mangeur

incorpore non seulement des nutriments, mais il incorpore également des

symboles. Enfin, la consommation d’un aliment, incorpore l’individu au sein

d’un groupe.

- La pensée magique : Cette notion est illustrée par la phrase « Je deviens ce

que je mange ». En effet, les nutriments ingérés, une fois absorbés et

15 POULAIN Jean-Pierre, Manger aujourd’hui, Attitude, normes et pratiques, Editions Privat, Paris, 2002, pp.23-38 16 FISCHLER Claude, Gastronomie et gastro-anomie. Sagesse du corps et crise bio-culturelle de l’alimentation moderne, revue Communications, Année 1979, Volume 31, Numéro 1, page 189 – 210

51

assimilés, deviennent partie intégrante du corps du mangeur. Mais ce dernier

acquiert également les caractéristiques symboliques de l’aliment.

Les modèles alimentaires permettent de gérer ces ambivalences en réduisant

l’espace de décision du mangeur par l’établissement de règles à respecter sans

même y penser et diminuent ainsi l’anxiété, caractère constant de l’alimentation

humaine.

Les modèles alimentaires structurent les formes de sociabilité et peuvent donc être

considérés comme faisant parti de la définition d’une société. Ils permettent aux

membres de cette société de se construire une identité à travers des processus

d’identification et de différenciations internes ou externes à cette société. Leur

construction s’effectue au gré des expériences, essais et erreurs réalisées par un

groupe humain. À ce titre, les modèles alimentaires sont des objets mouvants, en

perpétuelle évolution selon le contexte.

Les modèles alimentaires relèvent de deux dimensions :

- Ils constituent un ensemble de connaissances techniques transmis de

génération en génération permettant aux individus d’opérer des choix parmi

les aliments disponibles dans leurs milieux, de les conserver, de les préparer

pour en faire des plats et enfin de les consommer.

- Ils intègrent un ensemble de symboles grâce auxquels les mangeurs se

construisent une identité personnelle et collective.

La mise en évidence des modèles alimentaires se heurte au fait que la majorité des

valeurs qui les constituent relèvent de « l’allant de soi » et ne sont donc pas

explicitées de prime abord par les mangeurs. C’est lors de la transgression de ces

règles que la prise de conscience a lieu.

Ces modèles varient dans le temps et dans l'espace, d’une société à l’autre, d’où

l’importance de cette approche concernant l’alimentation des migrants qui évoluent

de leur société d’origine vers une société d’accueil : Que deviennent leurs modèles

alimentaires ?

Une fois le vocabulaire défini, l’articulation des différents angles d’approches et points

de vue permettra d’obtenir une réflexion riche voire complète d’un même fait, telle

52

que l’alimentation. Dans l’étude de l’alimentation des migrants, la prise en compte de

la complémentarité de l’anthropologie, de l’histoire, de la nutrition, de la sociologie, de

la géographie et de l’économie apparaît indispensable.

2 L’espace social alimentaire pour traiter de l’ali mentation des

migrants.

L’espace social alimentaire est un outil proposé par Jean-Pierre Poulain pour

permettre l’étude des modèles alimentaires. Dans l’étude de l’alimentation des

migrants maliens, son usage semble pertinent afin de cerner les différentes

dimensions de leur alimentation liées à la migration.

C’est G. Condominas qui développa le concept d’ « espace social » en 198017, il le

présentait comme « le lieu d’articulation du naturel et du culturel ». Jean-Pierre

Poulain retiendra ce terme pour développer son espace social alimentaire car, selon

lui, il présente trois principaux intérêts :

- La notion d’espace renvoie, d’un point de vue étymologique, non seulement à

l’espace physique mais également à l’espace temporel ce qui permet

d’aborder l’alimentation de façon dynamique et non pas figée.

- Il permet d’articuler et non plus d’opposer le déterminisme culturel et le

déterminisme biologique.

- Enfin, il permet d’appréhender les relations entre l’homme et la nature.

L’espace social alimentaire est composé de six dimensions et son auteur précise lui-

même que d’autres dimensions pourront être ajoutées si le besoin s’en fait ressentir :

• L’espace du mangeable représente l’ensemble des produits que

l’individu ou le groupe d’individu définit comme aliments c’est-à-dire qu’il

considère comme mangeables. Cette inclusion dans l’espace du

mangeable relève d’aspects biologiques et nutritionnels car les produits

choisis comme aliments doivent satisfaire un besoin physiologique ;

Mais cet espace du mangeable contient aussi et surtout des aspects

culturels puisque l’aliment doit répondre à un besoin identitaire, 17 CONDOMINAS George, L’espace social à propos de l’Asie du Sud-Est, Flammarion, Paris, 1980

53

symbolique. C’est ce deuxième aspect qui explique qu’un aliment

pourtant riche nutritionnellement et non nocif ne soit pas retenu comme

aliment. L’exemple des insectes dans nos sociétés occidentales est

parlant : ils sont extrêmement riches en protéines, vitamines et

minéraux et sont pourtant non consommés par la majorité des

mangeurs occidentaux.

• Le système alimentaire est défini comme l’ensemble des étapes

menant l’aliment de son milieu d’origine à l’assiette du mangeur. Selon

le contexte, ce chemin sera plus ou moins long, les acteurs seront plus

ou moins nombreux, l’aliment sera plus ou moins transformé. Quoi qu’il

en soit, à chaque étape, les dimensions économiques, technologiques

et sociales seront prises en compte dans le système alimentaire.

• L’espace du culinaire représente l’ensemble des actions techniques et

symboliques effectuées par les individus pour participer à la

construction de l’identité culturelle du produit et le rendre

consommable : organisation de la cuisine, technique culinaire, etc.

• L’espace des habitudes de consommation regroupe les règles et

codes relatifs à la prise alimentaire : la position dans laquelle les

individus consomment leurs aliments, la structure des prises, les

manières de table.

• La temporalité alimentaire fait référence aux différentes alimentations

consommées au cours de la vie (alimentation enfantine, alimentation

d‘adulte, alimentation de fin de vie, etc.) mais aussi aux variations

alimentaires saisonnières et enfin au rythme journalier : horaires des

repas, répartition des différents temps forts de la journée (travail, repos,

alimentation, loisir, etc.), horaires des repas.

• L’espace de différenciation sociale renvoie au concept de Bourdieu.

L’alimentation d’un individu est largement déterminée par la classe

sociale à laquelle il appartient et ce même individu utilise l’alimentation

pour affirmer son appartenance sociale en privilégiant tel ou tel aliment

à connotation sociale forte.

54

Le bien être alimentaire des migrants pourra être analysé à partir des six dimensions

de l’espace social. En effet, l’espace social alimentaire permet une vision globale de

l’alimentation avec non seulement ses dimensions qualitatives et quantitatives mais

aussi ses dimensions sociales et culturelles. Il permet d’aborder un phénomène aussi

complexe que l’alimentation des migrants dans son ensemble.

3 Notion d’identité et d’adaptation en situation de migration

En situation de migration, la question de l’identité apparaît primordiale. En effet,

l’ensemble des repères géographiques, affectifs, professionnels s’en trouve

bouleversé.

La notion d’identité est une notion complexe. Nous retiendrons, ici, la définition

proposée par Laurence Tibère18 : L’identité correspond à l’ensemble des processus

par lesquels l’individu ou le groupe d’individus s’appuie sur les ressources

personnelles, sociales et culturelles dont il dispose pour instaurer de l’unité et de la

cohérence en son sein et pour exprimer ce qu’il est ou qu’il « pense » ou « veut »

être. Ces processus s’inscrivent dans la relation à l’autre et procèdent par

mouvements d’identification – distanciation.

Au regard de cette définition, l’importance que peut avoir la migration sur l’identité se

dessine. L’identité est en perpétuelle redéfinition, c’est une notion dynamique

(re)modelée par l’interaction. Face à un changement d’environnement, « les

ressources personnelles, sociales et culturelles dont il dispose » sont modifiées.

L’individu doit, donc, s’adapter à ce nouveau contexte.

Le projet ALIMI a pour ambition de « mesurer » le bien-être alimentaire vécu des

migrants. Pour cela, la notion d’identité est une voie d’entrée possible. Les hésitations

identitaires créées par ce mouvement géographique mettent les migrants en situation

instables vis-à-vis d’eux-mêmes et du groupe. Des questions aussi simples que : « de

18 TIBERE Laurence (2010), Sociologie de l’alimentation, Enseignement suivi dans le cadre du Master 1 Alimentation, CETIA, Université de Toulouse 2, Toulouse.

55

quel endroit je parle quand j’utilise l’expression « chez moi » ? » attestent du

processus complexe que représente la reconstruction d’une identité dans un espace

nouveau.

Les migrants procèdent donc, plus ou moins consciemment, à des adaptations qui

leur permettront de se reconnaître et de pouvoir ainsi s’identifier en tant qu’individu et

au sein d’un groupe.

Dans cette situation, Frazier distingue deux processus d’adaptation : l’assimilation de

la culture d’accueil et l’acculturation.

L’acculturation peut être définie comme un échange de caractéristiques culturelles

entre deux cultures et non pas comme l’abandon d’une culture au profit de l’autre.

Deux modèles d’acculturation peuvent être mis en évidence :

- Le pendulisme : L’individu se réfère, selon les situations, à une culture puis à

l’autre.

- Le métissage : l’émergence d’une culture par un processus de mélange des

cultures de départ. La limite de cette notion réside dans l’hypothèse faite que

les deux cultures de départ soient pures, clairement définies. Pour pallier cela,

l’utilisation du terme intégration sera préféré.

Suite à l’étude de ces deux modèles, la question d’une troisième alternative se pose :

l’innovation. Les individus se trouveraient dans la situation de créer une nouvelle

culture qui leur serait propre en modulant les acquis des deux cultures d’origine. De

ce point de vue, on pourrait parler d’une culture spécifique aux migrants. Notons que

cette notion qui reste à définir demeure à l’état de questionnement.

L’alimentation joue un rôle important d’identité au sein d’une société, d’appartenance

interne et de différenciation par rapport à l’extérieur. Ainsi, l’alimentation peut être vue

comme une façon d’aborder les questions identitaires des migrants.

Du point de vue des biologistes, l’adaptation renvoie aux mutations génétiques qui

s’effectuent au fils de l’évolution de l’Homme sur plusieurs générations afin de

s’adapter au milieu dans lequel ce dernier évolue.

56

L’adaptation peut également être phénotypique, c’est-à-dire toucher l’expression des

gènes. Dans ce cas, elle peut être physiologique lors de l’adaptation à la température

par exemple ou sensorielle et n’est pas nécessairement irréversible.

Enfin, le phénomène d’adaptation d’un point de vue anthropologique considère les

modifications de comportements effectuées selon une pression sociale ou un

apprentissage.

D’un point de vue global, l’Homme n’a pas rendu son lieu de vie plus agréable

puisqu’il a favorisé la pollution, la dégradation de l’environnement. On assiste donc à

une mal-adaptation de l’Homme à son milieu. Selon la première définition de

l’adaptation citée précédemment, la question du temps d’adaptation se pose. En

effet, les changements des sociétés modernes ont été très rapides à l’échelle de

l’humanité. L’hypothèse selon laquelle les mutations génétiques permettant

l’adaptation à ce nouveau mode de vie n’auraient pas eu le temps de se réaliser est

avancée.

D’un point de vue alimentaire, l’homme n’a pas su s’adapter à la situation de pléthore

auquel il fait face tant dans les pays développés que dans les villes des pays en

développement renvoyant ces derniers au problème de la transition nutritionnelle

évoquée précédemment suite à l’urbanisation galopante.

En termes d’adaptation, Igor De Garine pose la question de l’adaptation biologique

face à l’adaptation culturelle. Il affirme que l’adaptation à l’environnement culturel

n’est pas nécessairement liée aux besoins biologiques19.

Il définit les besoins alimentaires des hommes comme pouvant être satisfaits par une

multitude de « régimes alimentaires ». L’Homme choisit de consommer une partie

des aliments que lui propose son environnement : ces aliments doivent répondre à un

besoin nutritionnel et à un besoin culturel lié à la société dans laquelle il évolue.

De nombreux hommes de sciences et en particulier les nutritionnistes postulent

l’existence d’une autorégulation par la faim en fonction des besoins physiologiques,

une écoute de son corps qui conduirait à une consommation parfaitement adaptée

19De Garine Igor, Culture et Nutrition, Communications, Année 1979, Volume 31, Numéro 1, pp. 70-92

57

aux besoins biologiques. Cette hypothèse est vivement remise en cause dès lors que

l’on tente une approche objective des choix alimentaires. Le choix d’une tubercule

comme aliment de base dans des régions d’Afrique de l’Ouest alors même que les

céréales sont plus riches en protéines végétales ne trouve pas d’explication

physiologique. C’est ailleurs que les raisons de ce choix apparaissent : la rentabilité

de la culture et la facilité de stockage permettent une meilleure adaptation aux modes

de vie choisis. La biologie semble, ici, dépassée par la culture.

Selon Igor De Garine, l’adaptation consiste à s’affranchir des contraintes naturelles

pour répondre aux contraintes culturelles. Ce dernier note également que les choix

alimentaires d’une société influencent le milieu dans lequel elle vit autant que

l’environnement influence les pratiques alimentaires dans un processus de

réciprocité.

En terme de migrations, cette approche pose la question de l’influence culturelle, et

en particulier sur l’alimentation, des migrants dans la société d’accueil.

Comment les migrants ruraux arrivant en ville ressentent-ils cette question identitaire,

en particulier face à la modernité alimentaire observée dans les principales villes

d’Afrique de l’Ouest ?

Igor De Garine note que face à l’influence d’un groupe ethnique fort (politiquement,

économiquement, etc.), les peuples traditionnels tendent à adopter leurs modes de

vie quitte à renoncer à des valeurs qu’ils défendaient pourtant du plus profond de

leurs êtres depuis des générations. Ces adaptations peuvent avoir des conséquences

dramatiques sur un peuple voire causer sa disparition biologique et culturelle.

Dans le cas de l’arrivée en ville d’un individu venant de la campagne, le « groupe

ethnique fort » mentionné par I. De Garine peut être représenté par la population

urbaine. Cependant, il semble que, dans ce cas, les adaptations ne causent pas la

disparition de l’individu. À terme, les changements opérés par les migrants pourraient

entraîner, tout au plus, la disparition de certaines coutumes et la mise en place de

nouveaux modèles alimentaires. En ce sens, le terme de disparition pourrait

s’appliquer aux modèles alimentaires.

58

La confrontation avec ce que l’on appellera la modernité alimentaire en milieu urbain

peut être difficile.

La modernité alimentaire est, dans nos sociétés occidentales, définie par un

affaiblissement des normes sociales encadrant la prise alimentaire et ainsi une

augmentation de la réflexivité des mangeurs. Certains auteurs insistent sur la

situation de forte anxiété dans laquelle se trouve le mangeur alors que d’autres

avancent la thèse de la construction de nouvelles normes par les mangeurs. Pour

reprendre une formule de Claude Fischler : la gastro-anomie aboutirait-elle à de

nouvelles gastronomies ?20. L’affaiblissement de l’appareil normatif est imputé à

plusieurs phénomènes caractéristiques de la modernité : la médicalisation, la

judiciarisation et la politisation de l’alimentation. Tous découlent en outre de la

mondialisation.

Dans le contexte des villes d’Afrique de l’Ouest, la mondialisation caractérise

également la modernité alimentaire mais probablement de manière différente. Ainsi,

le trait principal que l’on peut retenir est l’accès à de nombreux produits industrialisés

et donc l’augmentation considérable de l’espace du mangeable. Dans un contexte où

l’insécurité alimentaire, au sens de l’incertitude d’avoir accès à suffisamment

d’alimentation d’un jour à l’autre, est encore présente, la gestion des « nouveaux »

aliments par les migrants en ville semble un point crucial de l’étude de leurs modèles

alimentaires.

4 Variété et diversité en situation de migration

La disponibilité de nombreux aliments en ville implique une augmentation de la

variété alimentaire pour les migrants venant du milieu rural. Cette variété entraîne

t’elle une augmentation de la diversité alimentaire ?

La variété alimentaire se définit comme le nombre de produits différents consommés

par un individu pendant une période donnée : chaque produit ayant la même

importance dans l’analyse des résultats et ce, quelle que soit la quantité consommée.

20 FISCHLER Claude, Gastronomie et Gastro-anomie, 1979, Communication, Volume 31, N°1, pp. 189-210

59

La diversité alimentaire, quant à elle, se définit comme le nombre de groupes

d’aliments représentés dans la consommation d’un individu pendant une période

donnée parmi une classification établie, qui peut, cependant, différer d’une étude à

l’autre. La classification suivante, utilisée par Hatloy Anne. et al. en 199921, en est un

exemple : féculents, légumes, huile et sucre, fruits, noix, viande, lait, poisson, feuilles,

œufs. Le questionnaire de diversité proposé par la FAO contient 16 groupes :

Céréales, légumes et tubercules riches en vitamine A, tubercules blancs et racines,

légumes verts foncés à feuilles, autres légumes, fruits riches en vitamine A, autres

fruits, abats, viandes, œufs, poissons, légumineuses-noix et graines, lait et produits

laitiers, huiles et graisses, sucrerie, épices-condiments et boissons.

La mesure de ces deux indicateurs sera effectuée grâce à un rappel des aliments

consommés le jour ou la semaine précédant l’enquête. Ces aliments seront ensuite

classés selon l’indice à calculer. Cette mesure, relativement simple, a permis à divers

auteurs d’établir des corrélations entre la diversité alimentaire et l’état nutritionnel des

femmes à Bamako22, entre la variété alimentaire et la pratique d’un régime

alimentaire équilibré23. Le score de diversité alimentaire a également été proposé

comme indicateur de l’accès des ménages à l’alimentation24.

L’utilisation du questionnaire de diversité est un outil pratique et rapide pour évaluer

les changements qualitatifs du régime alimentaire d’un individu ou d’un ménage.

La notion de diversité semble directement liée à la variété dans l’ensemble de ces

études. Cependant, dans un contexte de migration du milieu rural vers le milieu

urbain, cette relation n’apparaît plus évidente. La plus grande variété est favorisée

par l’accès au marché. Qu’en est-il de la diversité ? Cette question mériterait une

étude de terrain approfondie et reste, à priori, sans réponse aujourd’hui.

21 HATLOY Anne et al., « Food variety, socioeconomic status and nutritionel status in rural ans urban areas in Koutiala (Mali) », Public Health Nutrition, 3, 1999, pp. 57-65. 22 KENEDY Gina et al., « Dietary diversity as a measure of the micronutrient adequacy of women’s diets : Results from Bamako, Mali site », Food and Nutrition Technical Assistance, Washington DC., 1999. 23 TORHEIM LE. Et al., « Validation of food variety as an indicator of diet quality assessed with a food frequency questionnaire for Western Mali », European Journal of Clinical Nutrition, 2003, pp. 1283-1291. 24 SWINDALE Anne, BILINSKY Paula, Score de diversité alimentaire des ménages (SDAM) pour la mesure de l’accès alimentaire des ménages : Guide d’indicateur, Washington D.C., Projet d’Assistance technique en matière d’Alimentation et de Nutrition,l’Académie pour le Développement de l’Education, 2006.

60

Conclusion

La nécessité d’un traitement pluridisciplinaire de l’alimentation pour évaluer les

variations de styles et de bien-être alimentaires en situation de migration apparaît

évidente.

L’utilisation de l’espace social alimentaire permet une étude fine et précise des

modèles alimentaires maliens. Les six dimensions de cet espace couvrent des

aspects divers de l’alimentation en dépassant la seule prise en compte des aliments

consommés, et amène une complémentarité à l’approche nutritionnelle.

Dans le contexte de notre travail, les notions d’identité et d’adaptabilité appellent une

attention particulière. L’alimentation représente une façon d’affirmer son identité, et

au-delà, elle façonne cette identité. Ainsi, les modifications d’environnement induites

par la migration entraînent parfois la perte de certains repères identitaires et

nécessitent d’opérer une adaptation plus ou moins rapide au nouveau lieu de vie afin

de se reconstruire une identité propre.

Pour appréhender les principales modifications alimentaires opérées par les migrants

dans cette phase d’adaptation à leur nouvel environnement, l’utilisation des notions

de variété et de diversité alimentaires permet une approche en terme de choix des

aliments. Cette approche ne prétend pas à l’exhaustive, mais présente l’avantage

d’être facilement exploitable et de présenter des résultats significatifs quant aux

conséquences nutritionnelles de la migration.

L’approche globale de l’alimentation des migrants maliens se fera grâce à l’utilisation

de ces différents concepts.

61

PARTIE III : L’alimentation des migrants maliens

62

Sur le plan mondial, la thèse de l’uniformisation des modèles alimentaires est souvent

avancée. Sur le plan nutritionnel, les tendances de consommation, d’apports

nutritionnels et de rations semblent en effet coïncider : la consommation de glucides

tend à diminuer partout sur la planète, parallèlement, celle de lipides augmente.

Cependant, la situation est tout autre sur le plan culturel. La mondialisation entraîne

des modifications des différents modèles alimentaires et non pas une disparition des

particularités.

L’alimentation des migrants maliens est mal connue. Les différentes questions que

l’on peut se poser sont les suivantes : Assiste-t-on à une assimilation de la culture

urbaine ? A un métissage ou à l’intégration des deux cultures ? Ou encore à

l’apparition d’une culture spécifique aux migrants ? La possibilité d’un rejet total ou

d’une adoption complète de la culture urbaine est également à envisager.

Afin d’appréhender les éventuelles modifications alimentaires liées à la migration,

l’étude des modèles alimentaires maliens dans leur ensemble puis des modèles

ruraux et des modèles urbains s’impose.

1 Les modèles alimentaires maliens à travers l’espa ce social

alimentaire

1.1 L’alimentation malienne …

Le Mali, l’un des quatre pays les plus pauvres du monde, fait partie des pays où la

faim et la peur de manquer marquent le quotidien de ses populations. Dans ce

contexte, le « bien manger », pour les populations maliennes, correspond à manger

beaucoup.

Gérard Dumestre25 tente de comprendre comment évoluent les modèles alimentaires

au Mali. Quelles sont les influences réciproques entre villes et campagnes ? Pour

cela, il met en avant trois axes qui définissent, selon lui, ces modèles.

25 DUMESTRE Gérard, « De l’alimentation au Mali », Cahiers d’études africaines, 1996, n°144, pp. 689-702

63

• Le premier axe oppose le nécessaire au superflu

L’alimentation de base est composée d’une céréale accompagnée d’une sauce, plus

ou moins garnie en légumes, viande, poisson. Cette nourriture est monotone et sa

consommation est codifiée, ritualisée, familiale. Elle constitue le plat commun que l’on

retrouve dans chaque famille que ce soit en ville ou à la campagne et qui est

automatiquement partagé avec les gens de passage, comme un droit. Il répond à la

faim « normale » et à pour vocation de satisfaire les besoins vitaux. Le goût n’est, ici,

pas la priorité.

À cela s’oppose l’alimentation dite superflue, les négelafen (littéralement « choses du

désir ») correspondant à tout ce qui éveille le désir tant salé que sucré. Leur

consommation, souvent individuelle ou entre amis, n’est pas encadrée par des

règles. Elle se fait à toute heure, en tout lieu. Le plaisir est le seul but recherché. La

qualité prime sur la quantité. Cette liberté individuelle entraîne toutefois une

dimension fluctuante, la consommation de négelafen dépend de l’argent disponible,

elle est donc très variable selon les ressources, par opposition à la stabilité du repas

commun.

Gérard Dumestre avance que le nécessaire et le superflu s’opposent et se

complètent : « d’un côté, la règle, la quantité, la frugalité, la gratuité ; de l’autre,

l’exception, la qualité, la variété, la cherté. Ici la nécessité, là le plaisir. »

Le repas de fête constitue le lien par excellence entre le nécessaire et le superflu : Ce

sont bien les femmes qui préparent le repas, mais elles sont nombreuses. Les

céréales sont présentes, mais on y trouve également de la viande grillée, du gras, du

sucre. C’est un repas pris en famille, mais les amis sont également présents. « Le

repas de fête allie la quantité à la qualité, la contrainte à la liberté, la famille aux

amis : il réconcilie pour un jour le nécessaire et le superflu ».

64

• Le deuxième axe oppose le « croyant » au « païen »

Au Mali, 90% de la population est de confession musulmane, ainsi le terme

« croyant » renvoie à cette religion.

Le « croyant » est associé à la restriction, à la pureté par opposition au « païen » qui

renvoie à une consommation libre, excessive, associée au plaisir.

Le consommateur « croyant » n’accorde pas d’importance à ce qu’il mange, ses

choix sont restreints à des aliments « autorisés », les aliments fermentés, macérés et

faisandés lui sont, par exemple, interdits, tout comme l’alcool. Le consommateur

« païen », lui, recherche de la volupté dans l’acte alimentaire.

L’opposition « croyant » « païen » se retrouve dans bien d’autres domaines de la vie

quotidienne. Les vêtements « croyants » sont sobres, simples, uniformes, les

comportements sont sans excès, mesurés, réfléchis. Du côté païen, les vêtements

sont colorés, ont des formes variées et les comportements sont plus libres.

• Le troisième axe oppose le moderne au traditionnel

Gérard Dumestre évoque différentes causes de l’évolution des modèles alimentaires :

- Des améliorations pratiques considérables qu’apporte la ville : eau courante,

cuisine au gaz, électricité

- Des changements d’habitudes de vie : horaires de travail, scolarisation des

enfants, transports urbains

- Une offre de produits plus large

- L’influence des modèles alimentaires occidentaux et orientaux.

Les nouveaux produits ne sont pas accessibles à tous mais les exemples du cube

Maggi et du riz, aujourd’hui complètement intégrés dans l’alimentation quotidienne

des citadins quels que soient leurs revenus démontrent que ces produits se font une

place et modifient progressivement le paysage alimentaire. De même le lait en

poudre semble avoir désormais remplacé le lait frais en ville.

La modernité a donc une forte influence sur l’alimentation des citadins mais aussi, par

répercussion, sur l’alimentation des habitants des zones rurales.

65

Au sein de chacune de ces oppositions, l’une des composantes se développe au

détriment de l’autre : le superflu, le païen et le moderne prennent de l’importance

alors que le nécessaire, le croyant et le traditionnel en perdent. L’affaiblissement des

normes et la montée de l’individualisme, liés à la monétarisation de l’économie et à la

forte urbanisation, semblent associés à ces tendances.

Par ailleurs, le terme d’opposition utilisé pour définir les trois axes nécessite d’être

modéré. En effet, plus qu’opposés, les deux pôles des différents axes apparaissent

imbriqués et complémentaires.

La description de l’alimentation malienne selon ces trois axes reste très actuelle 15

ans après le travail mené par Gérard Dumestre. Cependant, la question dune

nouvelle opposition apparaît : les aliments locaux face aux aliments importés.

Auparavant, les aliments importés entraient automatiquement dans la catégorie

« moderne » et les aliments locaux dans la catégorie « traditionnel ». L’opposition

moderne – traditionnel couvre, non seulement les différents aliments mais également

la façon de les préparer. Aujourd’hui, certains aliments importés sont intégrés dans

des préparations traditionnelles : dans ce cas, l’aliment est-il considéré moderne ou

traditionnel ? La prise en compte du caractère importé ou local des aliments permet

une appréhension plus précise de l’alimentation malienne actuelle.

1.2 … À travers l’espace social alimentaire

Afin d’appréhender l’alimentation au Mali dans sa globalité, nous utiliserons le

concept d’espace social alimentaire de Jean-Pierre Poulain et ses 6 dimensions.

- L’ordre du mangeable

Traditionnellement, un repas malien est constitué d’une base céréalière

accompagnée d’une sauce. La base céréalière peut être le mil, le sorgho ou le riz et

plus rarement le fonio, le maïs, les tubercules ou les légumineuses. Le couscous est

réservé à des occasions spéciales. La sauce, quant à elle, sera composée de

différents aliments selon le résultat souhaité et selon la base céréalière qu’elle

accompagne. Les ingrédients les plus courants des sauces sont le gombo frais ou

sec, la tomate, l’oignon frais ou sec, la pâte ou l’huile d’arachide, le beurre de karité,

66

l’huile de palme, le bouillon cube, le soumbala, les feuilles d’oignons, les feuilles de

baobab, les feuilles d’oseille. Selon les revenus des ménages, la viande et le poisson

fumé, sec ou frais seront plus ou moins présents. La seule boisson consommée au

cours du repas est l’eau.

L’espace du mangeable ne se limite pas à cela puisque l’alimentation malienne est

également représentée par les négelafen. Les boissons sucrées, le thé, les fruits et

les brochettes de viandes représentent les principaux aliments consommés en

dehors des repas, de manière individuelle.

Concernant le petit-déjeuner en particulier, la consommation de bouillie de céréales

reste très présente bien que le petit-déjeuner « à l’occidentale » de type café au lait et

pain appelé « café complet » pris en dehors du domicile se développe notamment en

ville.

Notons que les choix alimentaires maliens sont souvent orientés par des interdits

qu’ils soient religieux ou symboliques. L’œuf donné à l’enfant qui ne parle pas encore

risquerait de le rendre muet. Ce même œuf consommé par un jeune enfant le rendrait

voleur ou aveugle et ralentirait la cicatrisation d’un récent circoncis. Sa consommation

fait l’objet d’un interdit chez les jeunes femmes excisées car elles risqueraient de

voler des œufs à leur belle-famille après leur mariage, enfin la femme enceinte

proscrira l’œuf de son alimentation au risque d’accoucher d’un enfant au crâne aussi

fragile qu’une coquille d’œuf. Les exemples d’interdits alimentaires ne manquent pas,

en particulier pendant la grossesse : la femme ne consommera, par exemple, pas de

rat car l’enfant serait voleur, ni de citron car il aurait une peau écaillée. L’allaitement

est aussi prétexte à divers interdits alimentaires, la femme ne consommera pas de

citron ni de tamarin car ils feraient tourner son lait.

Des aliments spécifiques revêtent des rôles symboliques comme les noix de colas

utilisées pour signifier son respect au chef de village ou à un aîné ou bien pour

demander la main d’une fille à son père ou encore pour présenter ses condoléances

en cas de décès.

67

- Le système alimentaire

Selon les aliments considérés, le système alimentaire sera plus ou moins simple. La

part de l’autoproduction au Mali reste importante malgré l’urbanisation. Le système

alimentaire se compose de la récolte puis du stockage et enfin de la préparation

avant consommation. Les consommateurs connaissent bien les aliments qu’ils

consomment et ont une prise directe sur l’ensemble du système.

Certains produits sont achetés, au marché par exemple et le contrôle du

consommateur diminue et se limite à un contrôle lors de l’acquisition du produit puis

lors de sa préparation. Dans ce contexte, la relation avec le vendeur joue un rôle

important.

Enfin, les produits industriels échappent à tout contrôle de la part du consommateur.

Le produit vient parfois de très loin et les conditions de sa production restent, la

plupart du temps, inconnues du consommateur. L’anxiété du mangeur se trouve alors

exacerbée par la méconnaissance du système alimentaire.

En dehors de la consommation à domicile, l’alimentation extérieure suit un tout autre

système alimentaire. L’aliment est vendu prêt à consommer, l’ensemble du système

alimentaire échappe au consommateur.

- L’espace du culinaire

La cuisine est un acte exclusivement féminin. Un homme faisant la cuisine est

considéré comme une situation anormale et s’accompagne d’un jugement négatif.

Notons également que dans les familles polygames, la femme qui prépare le repas

sera celle qui partage le lit du chef de famille. Chaque femme possède ses propres

ustensiles de cuisine qui marquent son statut au sein du foyer.

Concernant la répartition des rôles, les femmes détiennent le pouvoir de reproduction

et endossent donc la responsabilité de la semence et de la récolte, elles cultivent les

condiments dédiés à la préparation de la sauce dans leur parcelle de jardin. Les

hommes, eux, veillent sur le bon déroulement de ces opérations et labourent et

irriguent les champs afin d’assurer une bonne récolte. Ils chassent et pêchent afin

d’assurer un apport protéique à leur famille. Les femmes veillent sur l’intérieur du

foyer alors que les hommes assurent le lien avec l’extérieur.

68

La préparation des repas se fait, la plupart du temps à l’extérieur de l’habitation.

Chaque femme mariée possède un foyer constitué de trois pierres au centre duquel

on place du bois ou du charbon et qui permet de cuire les différents aliments dans

des marmites. Le symbolisme de ce foyer à trois pierres est fort puisque ces pierres

renvoient aux trois organes sexuels que sont le clitoris et les deux petites lèvres

coupés lors de l’excision de la femme. Ainsi, à travers l’excision, la femme gagne son

droit à avoir un foyer dans les deux sens du terme : un foyer matériel que nous

venons d’évoquer et une famille c’est-à-dire devenir épouse et mère. Elle prend alors

la responsabilité de production et de reproduction au sein de la famille.

- L’espace des habitudes alimentaires

Les repas sont soumis à de nombreux rituels que chacun se doit de respecter. Les

hommes et les femmes ne mangent pas ensemble. Les enfants prendront le repas

selon les cas, à part, avec les femmes ou avec les hommes.

Le déroulement du repas des hommes répond à certaines règles. Après l’arrivée des

plats, chacun se lave les mains puis le chef de famille répartit les aliments de manière

équitable devant chaque convive. C’est seulement lorsque le chef de famille

commence à manger en prononçant la formule invitant à commencer que chacun

peut, de la main droite, entamer le repas en se contentant de la part qui lui est

réservée.

Pour terminer le repas, les convives boivent au récipient commun, se lavent les

mains en remerciant le chef de famille puis s’en vont. Les femmes viennent

rechercher les plats lorsque tout le monde a terminé.

D’autres règles d’usage s’ajoutent à ces rituels :

o Ne pas parler pendant le repas

o Ne pas prendre une nouvelle poignée avant d’avoir terminé la

précédente

o Garder les yeux rivés sur le plat, ne pas regarder les autres convives

o Le plus jeune tiendra le plat de la main gauche pour éviter que ce

dernier ne bouge

o Ne montrer aucun signe extérieur de satisfaction ou d’insatisfaction, le

plaisir n’étant pas la préoccupation du repas.

69

Concernant les habitudes alimentaires, la période de grossesse et d’allaitement

renvoie à plusieurs impératifs et interdits liés à l’alimentation. En effet, pendant la

grossesse, le sperme nourrit le fœtus et les rapports sexuels sont donc nécessaires.

Au contraire, le sperme empoisonne le lait au point de risquer la mort de l’enfant

allaité, les rapports sexuels sont donc proscrits pendant toute la durée de

l’allaitement.

- La temporalité

De manière générale, les maliens consomment trois repas par jour : un repas le

matin, un repas le midi et un repas le soir. Ces trois repas sont consommés à

domicile et en famille la plupart du temps.

En dehors de ces trois repas, la consommation hors foyer représente une part

importante de l’alimentation au Mali. La prise la plus courante se fait à 10h puis

parfois dans l’après-midi et enfin dans la soirée.

L’alternance des saisons influe beaucoup sur l’alimentation, en particulier dans les

zones rurales. En effet, en période de post récolte, les greniers sont pleins et

permettent ainsi aux populations de manger à leur faim. Puis au fur et à mesure que

passe l’année, les greniers se vident. La période de soudure est caractérisée par un

manque alimentaire survenant au moment des travaux des champs ce qui explique

l’augmentation de la dénutrition dite maigreur pendant cette période. La période de

soudure dure plus ou moins longtemps selon la quantité de céréales récoltée à la

saison précédente.

En termes de temporalité, la religion musulmane qui concerne la grande majorité des

maliens implique une période de jeun annuel : le ramadan.

Enfin, la temporalité s’exprime également à travers les différentes périodes de la vie.

Au Mali, dès le sevrage, les enfants consomment les mêmes aliments que les

adultes. Les aliments consommés en dehors des repas diffèrent cependant selon

l’âge. En effet, les enfants ont le privilège de consommer des fruits, les jeunes

hommes adultes consomment davantage des brochettes de viande et du thé. Quant

aux personnes âgées, la sagesse qu’ils véhiculent leur confèrent le respect de tous et

certains avantages en particulier alimentaires : des aliments ou plats leurs seront

70

réservés, ils sont en droit de réclamer de la bouillie ou de la tisane par exemple à tout

moment et ils conservent la fonction de répartition au sein de la famille.

- La différenciation sociale

La structure des repas reste stable quels que soient l’environnement social et le

niveau socio-économique. D’après Ag Bendech et al.26, le choix de la base du repas

diffère selon le niveau de revenu du ménage. Le riz est, par exemple, consommé plus

fréquemment dans les familles riches contrairement au mil et au sorgho qui sont

pratiquement absents de ces foyers. Le mil et le sorgho sont consommés sous forme

de tô27 dans les familles pauvres lors du repas du soir. La composition de la sauce

varie également selon le niveau de revenu : pour le déjeuner, la sauce est composée

de 12 à 16 aliments différents dans les familles les plus aisées et de seulement 8 à

10 dans les familles les plus pauvres. La viande et le poisson en particulier sont

fréquemment absents des sauces dans les foyers pauvres.

La fréquence de préparation des plats au cours de la journée évolue avec le revenu

du ménage. Les familles les plus riches préparent deux fois plus de plats par jour que

les familles à revenu intermédiaire et pauvres. Ainsi, dans les familles pauvres, le

même plat est servi au déjeuner et au dîner alors qu’il diffère le plus souvent dans les

familles riches.

La prise individuelle du petit-déjeuner, notamment du petit-déjeuner « à

l’occidentale », ainsi que l’utilisation de table haute et de couverts lors des repas ne

s’observent que dans les familles riches.

Les grandes étapes de la vie apparaissent comme une occasion de signifier sa

position sociale à travers la qualité et l’abondance du repas de fête servi.

Il semble que la différenciation se fasse davantage entre les ménages riches et les

ménages pauvres qu’entre la ville et la campagne. Le niveau de revenu semble donc

plus discriminant que le lieu de résidence.

26 AG BENDECH Mohamed et al., « Variabilité des pratiques alimentaires à domicile des familles vivant à Bamako (Mali) selon le niveau socio-économique », Cahiers Santé, 1996 ; 6, pp. 285-297. 27 Le tô est une pâte épaisse fabriquée à base de farine de mil ou de sorgho et d’eau. Du tamarin ou du citron sont parfois ajoutés. Il est servi accompagné d’une sauce.

71

2 Influence de la modernité sur les modèles aliment aires maliens

La modernité renvoie à la société contemporaine et au temps présent. L’étude de la

modernité tente de répondre à la question : pourquoi aujourd’hui n’est plus comme

hier ?

Pierre Bourdieu indique que « chaque acte renvoie tout à la fois au modèle ancien,

qui participait d’un système partiellement ou totalement détruit, à la situation nouvelle,

et enfin, au modèle à venir qui s’annonce avec les bizarreries ou les contradictions de

la conduite présente. »28

Le passage entre la tradition et la modernité est donc un processus lent et progressif

et non pas le fait d’une rupture brutale.

Cette définition générale de la modernité s’applique à l’alimentation. On parle alors de

modernité alimentaire.

L’affaiblissement de l’appareil normatif qui encadre l’alimentation, et l’augmentation

de la réflexivité des mangeurs face à leur alimentation caractérisent la modernité

alimentaire selon les sociologues de l’alimentation. Partant de ce constat, les

interprétations varient et se complètent. Pour Claude Fischler, l’augmentation du

choix de produits disponibles sur le marché couplée aux recommandations

diététiques plus ou moins divergentes augmentent l’anxiété des mangeurs

« l’alimentation ne structure plus le temps, c’est le temps qui structure

l’alimentation ». Jean-Pierre Corbeau avance que l’anomie liée à la modernité

favorise d’une part le métissage et d’autre part une attitude conservatrice des

mangeurs qui deviennent des « mangeurs pluriels » en jonglant entre ces différentes

attitudes. Enfin, Jean-Pierre Poulain prolonge ces deux approches en soulignant que

la modernité entraîne effectivement une situation d’anomie, mais qu’elle participe,

dans un processus dynamique, à la recomposition de nouvelles normes.

28 Bourdieu Pierre et al., Travail et travailleurs en Algérie, 1963 cité par Fournier Tristan

72

Pour les pays en développement et plus particulièrement le Mali, la modernité

alimentaire est largement liée à la mondialisation, à l’ouverture mondiale des

marchés alimentaires. Ce phénomène est ressenti en premier lieu dans les grandes

villes comme Bamako.

Dans les pays nouvellement industrialisés, la modernité alimentaire est facilement

désignée comme principale responsable de tous les maux d’apparition récente. La

libéralisation des marchés et l’industrialisation mettent en péril la diversité des

cultures alimentaires, la globalisation et l’occidentalisation favorisent la transition

nutritionnelle caractérisée notamment par la montée de l’obésité et le développement

des supermarchés entraîne une augmentation de la consommation de produits

industrialisés au détriment des produits locaux.

Gérard Dumestre29 évoque, parmi les conséquences de la modernité, la réduction

des saveurs. Les plats, plus fades, sont moins chargés en épices. Les goûts sucrés

et salés autrefois présents dans un même plat sont aujourd’hui distingués à l’image

des modèles occidentaux.

La distanciation entre l’Homme et la nourriture est aussi un aspect marquant de la

modernité. En effet, l’apparition de divers ustensiles comme la cuillère utilisée à la

place de la main augmente la distance entre l’Homme et sa nourriture.

Le développement de l’usage d’assiettes individualise l’alimentation puisqu’on ne

mange plus dans le plat commun.

La mise en scène du repas évolue également : l’utilisation de tables basses voire de

tables hautes apparaît de plus en plus courante dans les familles citadines alors que

les repas se prennent traditionnellement au niveau du sol.

La corrélation semble importante entre le mobilier utilisé et le degré d’urbanisation

des familles : dans les zones rurales, les repas sont pris sur une natte ; dans les

familles modestes citadines la table basse est couramment utilisée ; enfin dans les

familles bourgeoises citadines, les repas sont pris sur une table haute.

29 DUMESTRE Gérard, « De l’alimentation au Mali », Cahiers d’études africaines, 1996, n°144, pp. 689-702

73

La modernité alimentaire entraîne donc une évolution des modèles alimentaires.

L’érosion des normes encadrant l’alimentation est bien présente, cependant elle

permet l’apparition de nouvelles structures normatives. Les difficultés auxquelles

doivent faire face les mangeurs en situation d’érosion des systèmes normatifs

traduisent le caractère primordial de l’alimentation dans la construction identitaire. En

l’absence de repères alimentaires, les mangeurs doutent de leur propre identité. Face

à des produits inconnus ou mal-connus, et selon le concept de pensée magique de

Claude Fischler : « Je deviens ce que je mange », ils ne savent plus qui ils sont.

L’Afrique Sub-saharienne a fait l’objet d’une volonté d’industrialisation, de

modernisation de la société par l’importation d’aliments et de techniques venant des

pays industrialisés. Ces tentatives ont, dans leur quasi-totalité, échouées. Par la

suite, une autre stratégie a été adoptée : mettre en valeur le potentiel local grâce à

des procédés modernes. Là encore, les retombées sont décevantes. « Pourtant on

assistait à une tentative de construire une modernité alimentaire sur la base des

traditions et non plus de modèles exogènes ». D’après Nicolas Bricas, l’explication de

ces échecs se trouve dans le fait d’opposer les produits importés aux produits locaux.

La modernité alimentaire ne se résume pas à cette opposition, elle est un

phénomène bien plus complexe par lequel les individus s’approprient de nouveaux

aliments en les préparant de façon traditionnelle ou bien utilisent de nouvelles

techniques pour traiter des aliments traditionnels.

3 Les différences urbains-ruraux

3.1 Les particularités urbaines

L’urbanisation est caractérisée par le développement des rapports marchands et de

la monétarisation, le développement du salariat et du temps de transport avec pour

conséquence la diminution du temps accordé à la préparation et l’augmentation de

l’alimentation à l’extérieur.

Les modèles alimentaires urbains sont proches des modèles alimentaires ruraux. La

tradition reste très présente. Cependant, dans le contexte particulier de la vie urbaine,

74

l’intégration des nouveaux produits, proposés en alimentation de rue notamment, est

favorisée.

L’alimentation de rue apparaît comme une des principales particularités de

l’alimentation urbaine.

3.1.1 L’alimentation de rue

L’alimentation de rue est un phénomène complexe dont plusieurs définitions ont été

proposées. Nous retiendrons, ici, la définition de la FAO.

Selon la FAO en 1990, le secteur informel de l’alimentation est défini par « le secteur

produisant des aliments et des boissons prêts à être consommés, préparés et/ou

vendus par des vendeurs et des marchands ambulants, spécialement dans les rues

et dans les autres lieux publics similaires ».

Cette définition correspond à ce que l’on appelle aujourd’hui plus communément

l’alimentation de rue.

À Bamako, comme dans de nombreuses villes d’Afrique, cette alimentation de rue est

de plus en plus présente. Cette pratique n’est pas récente, mais subit une forte

augmentation au sein des villes. En effet, l’urbanisation rapide, l’insécurité alimentaire

des ménages, les contraintes liées à l’environnement urbain que sont l’augmentation

du temps de transport et le développement du travail des femmes, l’attrait pour les

goûts nouveaux et le pouvoir d’achat parfois faible des ménages représentent les

principales explications du développement de l’alimentation de rue dans les capitales

africaines.

L’alimentation de rue comprend les plats complets que les travailleurs consomment

sur place en guise de déjeuner (le riz-sauce est le plus couramment rencontré) mais

également des produits de type négelafen consommés, la plupart du temps, entre les

repas et souvent plus gras et plus sucrés.

À Bamako, en 1994, 65% des individus dans un quartier pauvre et 76% dans un

quartier riche consommaient au moins un aliment dans la rue chaque jour. 98% des

enfants fréquentant l’école recevait de l’argent de poche de leurs parents destinée à

acheter des aliments dans la rue. Le rôle de cette alimentation de rue diffère selon le

75

niveau de revenus des ménages. En effet, dans les familles les plus pauvres, elle

aura pour vocation de combler le déficit d’apport du plat familial alors que dans les

familles les plus riches, la recherche du plaisir apparaît comme argument principal.

Notons cependant, que quel que soit le niveau de revenu, l’affirmation des goûts et

de la liberté individuelle ainsi que le désir de socialisation sont des arguments

avancés par les individus eux-mêmes. L’alimentation à domicile doit avant tout

répondre à une « utilité nutritionnelle » et favoriser la satiété alors que l’alimentation

de rue peut répondre à un plaisir individuel et permet également de marquer son

statut social dans le cas des populations les plus aisées.

Ce mode d’alimentation présente de nombreux avantages tant du côté des

consommateurs que du côté des vendeurs. En effet, elle permet une diversification

du régime alimentaire à faible coût chez les individus de familles pauvres en

proposant des aliments non présents au domicile comme les fruits ou la viande. Dans

des situations de grande précarité et dans les conditions de vie difficiles liées au

milieu urbain, certains ménages ne possèdent pas l’espace ni le matériel nécessaire

à la préparation des repas, le recours à l’alimentation de rue apparaît alors comme

une bonne alternative. En outre, l’utilisation de l’alimentation de rue par les membres

d’un ménage, peut permettre de réduire les pressions pesant sur la qualité des repas

et donc sur la cuisinière. L’alimentation de rue représente une source de revenus

parfois importante pour le ménage des vendeurs. A Bamako, le chiffre d’affaire

journalier global pour l’alimentation de rue située autour des écoles est de 737

millions de FCFA soit 1,12 million d’euros. Dans ce secteur, selon la FAO, en 1996,

80% des vendeurs de rue à Bamako étaient en fait des vendeuses. Cette activité

permet donc l’insertion économique des femmes dans la mesure où elle est

facilement conciliable avec le rôle de mère de famille. Le capital de départ nécessaire

pour démarrer une activité de vente d’alimentation de rue est faible ce qui permet à

des ménages pauvres d’accéder à une source de revenus fiable. Sur un plan plus

large qu’est celui du dynamisme économique de la ville, l’alimentation de rue

représente un débouché important pour les produits de l’agriculture locale et

dynamise donc le marché.

76

Parallèlement à ces avantages, l’alimentation de rue présente certains inconvénients

voire des risques pour la santé des consommateurs. La demande en aliments de rue

provient en grande partie des populations pauvres ainsi le prix à la vente doit rester

raisonnable pour répondre aux attentes des clients. Pour atteindre cet objectif malgré

la fluctuation des prix d’achats des matières premières, les vendeurs ont recours à

différentes stratégies comme la substitution de certains ingrédients par d’autres

moins coûteux ou la dilution des boissons par de l’eau dont la qualité n’est pas

assurée. L’aspect informel de ce marché d’alimentation de rue implique l’absence de

réglementation et de contrôle. Les vendeurs, n’ayant, pour la majorité, pas suivi de

formation spécifique, ignorent les règles élémentaires d’hygiène. Les risques

d’intoxication alimentaire sont donc réels. Ce caractère informel mais plus ou moins

toléré favorise également la concurrence parfois brutale des vendeurs entre eux.

Comme nous l’avons évoqué ci-dessus, la vente d’alimentation de rue représente

une source de revenus complémentaire pour les ménages les plus pauvres. Dans

cette situation, les vendeurs ne possèdent, pour la plupart, pas le matériel nécessaire

et adéquat à la préparation et à la conservation dans de bonnes conditions des

aliments proposés. Les risques sanitaires augmentent encore de ce fait. D’après

Pascale Gerbouin-Rerolle et al.30, dans certaines villes d’Afrique, le papier des sacs

de ciment est recyclé en emballage pour les aliments de rue. Les conditions de

préparations des aliments de rue correspondent donc aux conditions dans lesquelles

les ménages les plus démunis préparent leurs propres plats ajoutées au fait que les

aliments sont servis à un public plus large et que leur conservation s’étale sur un

temps plus long. La multiplication de ces petits commerces sur la voie publique

entraîne un encombrement des voies de circulation et une difficulté de gestion des

déchets et des eaux usées qui aggrave l’organisation déjà précaire des villes

d’Afrique.

30 GERBOUIN-REROLLE Pascal et al., « Alimentation de rue : situation et perspectives d’action », Cahiers santé, 1993, 3, pp.367-374.

77

L’alimentation de rue n’est pas un phénomène récent, mais actuellement, les

gouvernements africains prennent conscience du caractère durable du phénomène et

de son rôle sur l’économie et la consommation urbaine et tentent de réfléchir aux

moyens de favoriser cette activité tout en effectuant des contrôles sanitaires

notamment.

L’alimentation de rue est une caractéristique du milieu urbain. Cependant, la

consommation hors repas est également présente en milieu rural par la

consommation individuelle de petits animaux capturés, de fruits cueillis ou encore de

thé. Les produits de type fruits ou brochettes de viande proposées en alimentation de

rue en ville répondent à une habitude de consommation traditionnelle. L’alimentation

hors domicile en milieu urbain est donc fortement influencée par la modernité, mais

émerge du modèle rural traditionnel.

3.1.2 L’agriculture urbaine et péri-urbaine

Les populations urbaines dépendent majoritairement du marché alimentaire.

Cependant, certains individus ont développé une agriculture dite urbaine consistant à

cultiver une petite parcelle de terre et/ou à élever quelques bêtes afin de subvenir à

une partie de leurs besoins. Des parcelles plus grandes, en périphérie de la ville,

accueillent également des cultures gérées par des habitants de cette ville.

Cette forme d’approvisionnement permet à des ménages pauvres d’avoir accès à des

ressources permanentes ou occasionnelles selon les cas. Notons, également, que

ces pratiques favorisent la diversité alimentaire.

Les risques que présentent cette agriculture sont bien réels : la pollution liée aux

cultures et aux animaux et les problèmes d’hygiène et donc de sécurité sanitaire des

aliments nécessitent une gestion et une surveillance particulière.

78

3.2 Les particularités rurales

De grandes différences apparaissent entre l’alimentation urbaine et l’alimentation

rurale du fait de l’organisation même de la vie selon le lieu d’habitation. L’alternance

des saisons influe de manière bien plus importante en milieu rural puisque l’accès

aux aliments ne dépend que peu du marché mais dépend beaucoup des récoltes et

des disponibilités alimentaires. L’autoconsommation caractérise l’organisation et les

modes d’approvisionnement en zone rurale. La dépendance au marché et donc aux

revenus est plus faible en milieu rural.

En milieu rural, les relations de proximité autour de l’alimentation s’expriment de

plusieurs façons : la proximité d’approvisionnement par l’autoconsommation et les

échanges locaux, la proximité de préparation puisque l’ensemble des opérations de

transformation sont effectuées au sein du foyer dans la plupart des cas et enfin la

proximité de consommation avec la concordance des lieux de travail, d’habitat et de

consommation. En ville, cette proximité est remise en cause par l’accès aux aliments

par le marché, l’utilisation de produits transformés et la dissociation du lieu de travail

et du lieu d’habitation. Elle reste cependant importante par la persistance de

l’approvisionnement à travers les réseaux familiaux notamment.

Ainsi, la gestion de l’alimentation et son appréhension diffère en ville et à la

campagne. L’alimentation des ménages urbains dépend fortement de leurs revenus

et des fluctuations du marché alors que l’alimentation des ménages ruraux dépend en

premier lieu des conditions climatiques et de l’abondance de la récolte.

Considérant ces aspects, il semble évident que les modèles alimentaires ruraux et

urbains présenteront des différences notoires. Le graphique ci dessous témoigne des

différences observées en terme d’aliments d’après l’Enquête Budget-Consommation

de 1989. Pour des raisons de lisibilité du graphique, les céréales ne sont pas

représentées ici. Leur consommation coïncide entre le milieu urbain et le milieu rural.

79

0

5

10

15

20

25Tubercules/Fˇculents

Lˇgumes tubercules

Lˇgumes

Feuilles vertes

Fruits

Lˇgumineuses

Viandes

Poissons

Volailles

Lait et produits laitiers

Sucres et produits sucrˇs

Huiles et corps gras

Pain et p‰tisserie

Sel

Condiments

Boissons non alcoolisˇes

Boissons alcoolisˇes

Thˇ, cafˇ, chicorˇe

RuralUrbain

Figure 8 : Postes de dépenses des ménages selon les groupes d'aliments au Mali - EBC 1989

On observe quelques différences significatives : les légumes, les tubercules, les

matières grasses, le sucre et la viande sont plus consommés en milieu urbain alors

que les fruits, les légumineuses, les produits laitiers et les condiments le sont

davantage en milieu rural.

Peut-on pour autant parler de deux modèles alimentaires différents ? La continuité

des pratiques du fait des relations permanentes entre le monde urbain et le monde

rural semble bien réelle. Certains évoquent un mimétisme alimentaire des

populations rurales par rapport aux populations urbaines. L’influence de la ville sur

les modèles alimentaires ruraux existe, cependant elle est synchrone d’une influence

de la campagne sur la ville. La notion de mimétisme apparaît dès lors restrictive et la

réalité semble davantage correspondre à une influence réciproque.

80

3.3 Les migrants : un modèle alimentaire qui leur e st propre ?

« La ville est bien autre chose qu’une excroissance rurale ; elle apparaît comme un

espace de continuité et de mémoire des systèmes antérieurs et un lieu où naissent et

se cristallisent des aspirations nouvelles. L’ensemble est modulé par un paysage

urbain intégrant des contraintes économiques, des contraintes d’habitat et de

nouvelles formes d’organisation sociale et psychologique liées à l’image de « soi » en

ville. »31

L’urbanisation relativement récente des pays en développement a de nombreuses

conséquences. Parmi celles-ci, on observe la marchandisation de l’alimentation,

l’augmentation de l’offre alimentaire en terme de produits du fait du développement

de l’industrie agro-alimentaire et le brassage des populations venues de tout le pays

voire des pays voisins.

Lorsqu’ils sont confrontés au milieu urbain, les individus opèrent des changements

alimentaires, mais les rythmes de ces changements sont différents selon les

individus. Les modifications liées à l’urbanisation s’effectuent de manière plus

progressive au sein des unités familiales où la tradition reste très présente. En

revanche, les hommes seuls, les migrants temporaires représentent un public très

réceptif aux innovations et notamment aux aliments de rue.

Au-delà des produits choisis, les modes d’approvisionnement et les façons de les

préparer sont autant de terrains d’expression de l’évolution alimentaire :

- L’évolution dans le choix des produits : intégration de nouveaux produits ou de

nouveaux plats au sein de l’alimentation

- L’évolution des procédés : les produits traditionnels pourront être traités grâce

à des innovations techniques. Les produits frais seront, par exemple,

conservés au réfrigérateur.

31 O’DEYE Michèle, BRICAS Nicolas, « A propos de l’évolution des styles alimentaires à Dakar », Etude Altersial,

Ministère des Relations extérieures, service coopération et développement, 1985.

81

- L’évolution dans l’organisation sociale : la circulation, la transformation et la

consommation des produits subissent parfois de profondes modifications :

division du travail, alimentation de rue, relations ville-campagne

- L’évolution de la matière première : Les matières premières diffèrent alors que

les plats obtenus restent les mêmes. Le lait en poudre remplace, par exemple,

le lait frais dans la préparation de lait caillé.

- L’évolution par extension de débouchés : l’ensemble de la population urbaine

a accès à une gamme de produits très large dont certains étaient auparavant

réservés à une faible part de la population.

La recherche de produits emblématiques de l’alimentation urbaine est nécessaire,

mais ne suffit pas : la manière dont ces produits sont préparés, l’organisation sociale

associée à leur consommation jouent également un rôle important dans l’évolution

des pratiques liées à l’urbanisation.

En termes de produits, la mondialisation apporte une offre toujours plus grande. Les

populations s’approprient certains d’entre eux, parfois tels qu’ils sont proposés à la

vente, parfois en les transformant à leur manière. Quelques aliments sont devenus

incontournables dans les villes maliennes. Parmi eux on compte le thé, consommé

entre les repas souvent en groupe, entre hommes, servi avec une grande quantité de

sucre, autre produit importé. L’apparition récente du thé « Lipton », désignant ici tous

les thés en sachet, marque la modernité urbaine. La mayonnaise, les sardines à

l’huile et les conserves de légumes sont couramment consommées en ville. Enfin, la

consommation de pain et plus largement de produits à base de blé, est intégrée aux

habitudes alimentaires des urbains maliens.

Au-delà du choix des aliments, les migrants ruraux arrivant en ville sont confrontés à

de nouvelles situations sociales alimentaires et à de nouvelles formes culinaires.

Ainsi, les règles traditionnelles strictes de commensalité tendent à s’assouplir en ville.

Dans certains cas, des femmes prennent leur repas avec des hommes. Les hommes

migrants arrivant seuls en ville se regroupent parfois au sein de groupes et

82

consomment donc leur repas ensemble de façon régulière alors qu’ils n’ont pas de

lien de parenté.

L’accès à l’électricité modifie la gestion de l’acte culinaire et la conservation des

aliments grâce aux techniques de cuissons et aux réfrigérateurs. L’eau potable

accessible par le réseau public en ville améliore la qualité de l’alimentation dans les

foyers reliés à ce réseau.

Conclusion

L’étude des modèles alimentaires maliens représente une tâche importante qui

nécessite des distinctions plus précises que celle consistant à traiter séparément les

modèles urbains et les modèles ruraux. En effet, la variété des modèles observables

au sein du pays est grande. Selon les zones géographiques et selon les modes de

vie et les ethnies, les différences apparaissent significatives. Les Peulh, peuple

d’éleveurs, consomment par exemple une quantité plus importante de lait et de

viande que le reste de la population. Les modèles alimentaires soudanais diffèrent

des modèles alimentaires sahéliens en raison des conditions climatiques différentes

auxquelles les populations sont confrontées. Plus encore que la distinction entre le

milieu rural et le milieu urbain, il semble que le niveau de revenu des ménages et le

quartier de résidence au sein de la ville soient plus discriminants en ce qui concerne

les habitudes alimentaires.

Dans le cadre du travail présenté ici le facteur discriminant retenu est bien le type de

milieu : urbain ou rural. L’objectif n’étant pas d’obtenir une description précise des

modèles alimentaires mais de mettre en avant les modifications significatives

d’habitudes et de choix alimentaires liées à la migration voire caractéristiques de

cette migration. En ce sens, l’observation des modèles ruraux et des modèles urbains

prend tout son sens.

Au terme de cette étude, des éléments apparaissent tout à fait stables quel que soit

le milieu de vie : la structure du repas composé d’une base céréalière accompagnée

d’une sauce se retrouve dans la totalité des familles. Certaines spécificités peuvent

être relevées parmi les habitudes urbaines, se différenciant des modèles ruraux :

l’alimentation de rue en est un exemple parlant. Certains aliments semblent

83

caractéristiques de la ville comme la mayonnaise, le cube Maggi®, le pain, le lait en

poudre ou concentré, les sardines en boîte ou les légumes en conserve, bien que

leur consommation gagne les zones rurales progressivement.

Les migrants semblent jouer un rôle central à la fois dans la conservation des

traditions en milieu urbain et dans la diffusion de nouvelles habitudes alimentaires

provenant de la ville en milieu rural lors de leurs passages plus ou moins longs et

plus ou moins fréquents dans leurs villages d’origine.

84

Conclusion Générale

La migration est un phénomène complexe et ses conséquences sur les individus et

sur les sociétés de départ et d’accueil ne le sont pas moins. Si l’on veut prétendre à

une étude exploitable des données obtenues dans le cadre d’une étude de la

migration, il est nécessaire d’aborder cette question sous divers angles.

À ce titre, l’alimentation apparaît comme un outil pertinent et à privilégier du fait des

nombreuses possibilités d’analyse qu’elle offre sur l’étude des migrations.

L’approche nutritionnelle, qui permet une approche technique et médicale, aspire

également à une approche plus globale en terme de bien être et de santé physique et

psychologique des individus. La situation nutritionnelle des populations maliennes est

l’une des pires du monde notamment par l’importance de la malnutrition.

L’approche culturelle et sociologique de l’alimentation, par l’utilisation de l’espace

social alimentaire, met en exergue les différents rôles de cette dernière dans la

société et les étroites relations entre culture et alimentation. La compréhension

globale d’une situation nutritionnelle préoccupante ne peut se faire sans prendre en

compte l’ensemble des aspects culturels de l’alimentation.

Ainsi, si on la considère comme faisant partie intégrante du projet ALIMI, l’étude des

modèles alimentaires urbains et ruraux au Mali est pertinente car elle permet

d’identifier les modifications alimentaires liées à la migration.

Grâce à ce travail de recherche, une problématique se dégage et appelle un travail

de terrain : La migration entraîne-t-elle une augmentation de la diversité alimentaire ?

Quels sont les aliments emblématiques du modèle alimentaire urbain ? du modèle

alimentaire rural ? Existe-t-il un modèle alimentaire propre aux migrants ?

85

Concernant l’approche opérationnelle de réponse à cette problématique, un

questionnaire est en cours d’élaboration dans le cadre du projet ALIMI. Une partie de

ce questionnaire est consacrée à un questionnaire de diversité sur l’alimentation de la

semaine précédant l’enquête. Cette proposition se justifie par le fait qu’une

amélioration de la diversité alimentaire est directement corrélée à une amélioration de

la qualité du régime alimentaire. Ce questionnaire permet l’obtention de données

relativement fiables concernant la nutrition sans pour autant procéder à un « rappel

des 24 heures » quantifié32 qui nécessiterait un temps d’enquête bien trop long.

Une fois la décision prise d’utiliser le questionnaire de diversité, la mise en évidence

des aliments emblématiques de l’alimentation urbaine et de l’alimentation rurale

permettra d’intégrer ces derniers au questionnaire afin d’obtenir des informations

concernant le rôle de la migration par rapport aux modèles alimentaires. Une

proposition de questionnaire de diversité adapté au cas du Mali est présentée en

annexe A. Il est conçu pour être passé en face à face avec les personnes enquêtées

par des enquêteurs formés et en langue locale, en l’occurrence le Bambara à

Bamako. Les différentes fréquences ne leur seront pas proposées d’office, c’est à

l’enquêteur de convertir les réponses en fréquence par jour ou par semaine. Ce

questionnaire de diversité s’inscrit au sein d’un questionnaire plus large traitant de

l’alimentation et du bien être alimentaire des enquêtés. Une ébauche du

questionnaire complet, qui est en cours d’élaboration, est présentée en annexe B afin

de percevoir la globalité dans laquelle s’inscrit le questionnaire de diversité. La

version finale devrait permettre une passation en une heure maximum.

La finalisation du questionnaire devrait amener une première phase de test au cours

des premières semaines du stage que nous effectuerons à Bamako puis la passation

des premiers questionnaires pendant la suite du stage.

En parallèle, l’approfondissement des recherches concernant la situation

nutritionnelle au Mali se poursuivra sur place au cours du stage à venir en accédant

aux ressources nationales.

32 Consiste à obtenir d’un individu des données concernant l’ensemble de ses prises alimentaires de la veille ainsi que toutes les informations liées à ces prises : heure, quantité, qualité, lieu, …

86

Par l’appréhension des modifications alimentaires liées à la migration des maliens au

Mali, cette étude peut permettre d’améliorer la prise en compte des besoins

nutritionnels et alimentaires des migrants maliens en France. En effet, la situation de

migrants des maliens en France doit être envisagée au regard notamment de leur

origine rurale ou urbaine.

87

Bibliographie

Classement thématique des sources consultées et mobilisées

Le Mali

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88

• LEFEVRE Pierre, de SUREMAIN Charles-Edouard, « Les contributions de la socio-anthropologie à la nutrition publique : pourquoi, comment et à quelles conditions ? », Cahiers Santé, 2002, 12, pp. 77-85.

• MAIRE Bernard, DELPEUCH Francis, « La transition nutritionnelle, l’alimentation et les villes dans les pays en développement », Cahiers d’études et de recherches francophones/Agricultures, Volume 13, Numéro 1, Janvier Février 2004, pp. 23-30.

• MARTIN-PREVEL Yves et collaborateurs, « Nutrition, urbanisation et pauvreté en Afrique Subsaharienne », Médecine Tropicale, 2000, 60-2, pp.179-192.

Variété – Diversité

• HATLOY Anne et al., « Food variety, socioeconomic status and nutritionel status in rural ans urban areas in Koutiala (Mali) », Public Health Nutrition, 3, 1999, pp. 57-65.

• KENEDY Gina et al., « Dietary diversity as a measure of the micronutrient adequacy of women’s diets : Results from Bamako, Mali site », Food and Nutrition Technical Assistance, Washington DC., 1999.

• FAO Nutrition and Consumer protection Division, Guidelines for measuringhousehold and individual dietary diversity, Version 3, Rome, 2007.

• SWINDALE Anne, BILINSKY Paula, Score de diversité alimentaire des ménages (SDAM) pour la mesure de l’accès alimentaire des ménages : Guide d’indicateur, Washington D.C., Projet d’Assistance technique en matière d’Alimentation et de Nutrition,l’Académie pour le Développement de l’Education, 2006.

• TORHEIM LE. Et al., « Validation of food variety as an indicator of diet quality assessed with a food frequency questionnaire for Western Mali », European Journal of Clinical Nutrition, 2003, pp. 1283-1291.

Socio anthropologie

• LALLEMENT Michel, Histoire des idées sociologiques des origines à Weber, 3ème édition, Circa, Paris, Armand Collin, 2006.

• POULAIN Jean-Pierre., Sociologies de l’alimentation, Paris, PUF, 2002. • POULAIN Jean-Pierre, Manger aujourd’hui, Attitude, normes et pratiques,

Paris, Editions Privat, 2002, pp.23-38. • FISCHLER Claude, « Gastronomie et gastro-anomie ». Sagesse du corps et

crise bio-culturelle de l’alimentation moderne, revue Communications, Année 1979, Volume 31, Numéro 1, page 189 – 210

Alimentation des migrants

• CALVO Emmanuel, « Toujours africains, déjà français », Politique Africaine, Ed. Karthala, Paris, 1997, vol. 67, pp. 48-55.

• MAIRE Bernard, MEJEAN Caroline, Que savons-nous de l’alimentation des populations migrantes ?, UR106, IRD, Montpellier, 2009.

89

Alimentation de rue

• AG BENDECH Mohamed et al., « Proposition d’une méthode d’estimation de l’apport nutritionnel des plats vendus dans la rue », Médecine Tropicale, 1996, 56 ; pp. 361-366.

• AG BENDECH Mohamed et al., « Assessment of diatary intakeat home and outside the home in Bamako (Mali) », Ecology and food and nutrition, 1998, vol. 37, pp. 135-162.

• AG BENDECH Mohamed et al, « Complémentarité des alimentations à et hors domicile à Bamako (Mali) : aspects nutritionnels et économiques. Quelle rationalité dans les choix des consommateurs ? », Revue épidémiologique et santé publique, 1999, pp. 151-164.

• CANET Colette, N’DIAYE Cheikh, « L’alimentation de rue en Afrique », FNA/ANA, 17/18, 1996.

• DIALLO Amadou S., « Contribution à l’étude de la valeur nutritive des repas de rue dans la ville de Conakry », Voies alimentaires d’amélioration des situations nutritionnelles, 2ème atelier international, Ouagadougou, 23-28 novembre 2003, pp. 219-228.

• GERBOUIN-REROLLE Pascale et al., « Alimentation de rue : situation et perspectives d’action », Cahiers santé, 1993, 3, pp.367-374.

Alimentation Afrique de l’Ouest

• AG AYOYA Mohamed et al., « Determinants of anemia among pregnants women in Mali », Food and nutrition Bulletin, vol.27, n°1, 2006.

• AG BENDECH Mohamed et al., « Approche de la consommation alimentaire en milieu urbain. Le cas de l’Afrique de l’Ouest », Cahiers Santé, 1996 ; 6. pp. 173-179.

• AG BENDECH Mohamed et al., « Variabilité des pratiques alimentaires à domicile des familles vivant à Bamako (Mali) selon le niveau socio-économique », Cahiers Santé, 1996 ; 6, pp. 285-297.

• BILINSKY Paula, SWINDALE Anne, Mois d’approvisionnement alimentaire adéquat (MAHFP) pour la mesure de l’accès alimentaire des ménages : Guide d’indicateurs., Washington D.C., Projet d’Assistance technique en matière d’Alimentation et de Nutrition, l’Académie pour le Développement de l’Education, 2007.

• BRICAS Nicolas, « L’évolution des styles alimentaires », 1992, In BOSC P. M., DOLLE V., GARIN P. et YUNG J. M. (Eds.) Le développement agricole au Sahel ; Tome I : Milieux et défis. Montpellier, France, CIRAD , Coll. Documents systèmes agraires n°17, pp. 179-210

• BRICAS Nicolas, « Les caractéristiques et l’évolution de la consommation alimentaire dans les villes africaines », Alimentation, techniques et innovations dans les régions tropicales, in Muchnik J. (Ed.). Paris, France, L'Harmattan, pp. 127-160

90

• BRICAS Nicolas, « La pluralité des références identitaires des styles alimentaires urbains en Afrique », GDR Economie & Sociologie « les Marchés Agroalimentaires » - Montpellier – 23 & 24 Mars 2006

• BRICAS Nicolas et al., Nourrir les villes en Afrique sub-saharienne, Collection Villes et Entreprises, Paris, Editions L’Harmattan, 1986.

• BRICAS Nicolas, SECK Pape Abdoulaye, « L’alimentation des villes de Sud : les raisons de craindre et d’espérer », Cahiers Agricultures, 2004 ; 13, pp. 10-14.

• DUMESTRE Gérard, « De l’alimentation au Mali », Cahiers d’études africaines, 1996, n°144, pp. 689-702.

• KOPPERT Georgius et al., « Consommation alimentaire dans trois populations forestières de la région côtière du Cameroun : Yassa, Mvae et Bakola »,in HLADIK C.M. et al., L’alimentation en forêt tropicale : interactions bioculturelles et perspectives de développement, Paris, Editions UNESCO, 1996, pp. 447-496.

• MAINBOURG Evelyne, Manger et boire à Bamako (Mali), Thèse de doctorat en sociologie, Tours, Université François Rabelais, 1986.

• O’DEYE Michèle, BRICAS Nicolas, « A propos de l’évolution des styles alimentaires à Dakar »

• Programme Alimentaire Mondial et UNICEF, Mali : Analyse de la sécurité alimentaire et de la vulnérabilité, 2005.

Autour du sujet

• de GARINE Igor, « Adaptation biologique et bien-être psycho-culturel », Bulletins et Mémoires de la Société d’anthropologie de Paris, 1990, Volume 2, Numéro 2, pp. 151-173.

• JANIN Pierre, « Leçons d’une crise alimentaire annoncée au Mali », IRD-00335691, 30 octobre 2008.

• Dictionnaire le nouveau petit robert, dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, nouvelle édition du Petit Robert de Paul Robert, texte remanié et amplifié sous la direction de Josette Rey-Debove et Alain Rey, éd. dictionnaire le Robert 1993, 1999.

91

ANNEXES

92

Annexe A :

Questionnaire de diversité dans le cadre du projet ALIMI

Combien de fois avez-vous consommé les différents aliments suivants au cours des 7

derniers jours (hors repas de fête) ?

Groupes d'aliments

Aliments Fois/jour Fois/semaine 0 fois

Fruits Agrumes (oranges, pamplemousse, citron…)

Autres fruits (banane, pomme, papaye, melon, ananas, etc.)

Légumes frais (y compris les

légumes consommés

dans la sauce)

Légumes verts (choux, feuilles, salade…)

Légumes colorés (tomate, carotte, citrouille, betterave…)

Autres légumes (navet, aubergine, courge et courgette…)

Haricots gombo

Tubercules Manioc, pomme de terre, patate douce, igname, plantain

Légumineuses Niébé, néré

Céréales Pâtes (vermicelles, spaghetti, macaroni…)

Pain

Riz

Mil, sorgo

Viandes Bœuf/mouton/chèvre

Volaille (poulet, canard..)

Œufs Œufs

Poissons Poisson frais

Poissons en conserves (sardines)

Poissons ou mollusques séchés/fumés

Lait et produits laitiers

Lait frais

Lait en poudre (Nido)

Lait concentré liquide

Lait caillé

Yaourt

Mayonnaise (Calvé)

Fromage fondu de type « Vache qui rit »

93

Produits sucrés et/ou riches en

graisses

Bonbons, chocolat

Pâte à tartiner

Glaces, sorbets

Beignets sucrés ou salés

Biscuits sucrés ou salés

Matières grasses

Beurre, margarine

Beurre de karité

Huile de palme

Huile d'arachide

Oléagineux Arachides (grillés, bouillies, en pâte)

Condiments Cube Maggi ou bouillon

Piment

Soumbala

Sel

Boissons Café/Café au lait

Thé

Boissins alcoolisées

Boissons sucrées gazeuses (sodas)

Jus de fruits

Autres boissons

94

Annexe B :

Proposition de questionnaire dans le cadre de l’étude

ALIMI

Numéro de l’interviewé : Numéro de l’enquêteur : Date interview (Jour/Mois/Année) : Hier, nous étions : (à compléter par l’enquêteur) □ Lundi □ Mardi □ Mercredi □ Jeudi □ Vendredi □ Samedi □ Dimanche Pour vous, hier était : □ un [lundi] comme les autres [lundi]

□ un jour particulier :………………………………… Durée de l’interview ? (heure, min, secondes début/fin) Texte de présentation : je travaille pour le Centre Edgar Morin/EHESS et nous réalisons une étude sur l’alimentation. Nous souhaiterions vous poser quelques questions sur le sujet, auriez-vous 1 heure à me consacrer ? Je tiens à vous préciser qu'il ne s'agit absolument pas d'un test ou d'un examen. Au contraire, ce qui nous intéresse, ce sont vos opinions, vos idées, vos convictions, vos soucis, vos attentes par rapport à l'alimentation. Il n'y a donc pas de bonnes ou de mauvaises réponses. De plus, c’est un entretien anonyme, donc sentez-vous tout à fait libre de dire ce qui vous vient à l'esprit. INFORMATIONS PRELIMINAIRES Sexe : H/F Age : année de naissance Composition du ménage : Avec combien de personnes habitez-vous actuellement (en dehors de vous) ?

- combien y a t-il d’enfants de moins de 12 ans qui habitent avec vous ? - combien y a t-il de jeunes hommes de 12 à 18 ans qui habitent avec vous ? - combien y a t-il de jeunes femmes de 12 à 18 ans qui habitent avec vous ? - combien y a-t-il de femmes adultes de plus de 18 ans qui habitent avec vous ? - combien y a-t-il d’hommes adultes plus de 18 ans qui habitent avec vous ?

95

Statut matrimonial : Vivez-vous (plusieurs réponses possibles) : - sans conjoint : précisez (célibataire/divorcé/veuf/conjoint ailleurs) - avec votre/vos conjoint(s) ici (précisez le nombre de femmes : voir avec la

CNIL) - autre - NR

Logement : Dans quel type de logement habitez-vous ? Type de logement Appartement, studio Maison individuelle, pavillon Foyer HLM ou autre logement social Hôtel meublé Squat Autre : précisez PRATIQUES ALIMENTAIRES Avant de parler de votre alimentation quotidienne, nous allons commencer par une question sur votre vie. Globalement, sur une échelle de 1 à 7, en considérant que 1 signifie « totalement insatisfait » et 7 « totalement satisfait », pourriez-vous noter votre niveau de satisfaction par rapport à votre vie en général (ces derniers jours) ? Dans le reste de l’enquête, le terme d’« alimentation » sera utilisé pour parler de tout ce qui se rapporte à l’alimentation au sens large, c'est-à-dire pas seulement à la consommation mais aussi à l’approvisionnement, la préparation, la dégustation seul ou à plusieurs, etc… De la même façon que vous avez répondu à la question précédente en notant votre satisfaction globale de la vie sur une échelle de 1 à 7, nous allons maintenant vous demander de noter, sur la même échelle, votre satisfaction par rapport à votre alimentation dans votre vie en général (ces derniers jours) ? APPROVISIONNEMENT Qui fait les courses pour votre foyer (QCM) ?

- vous-même - votre conjoint/mari/femme - vos enfants - appartenance à une caisse de solidarité alimentaire - l’employé de maison - autre

96

Est-ce que vous ou la personne qui fait les courses vous vous rendez : Jamais Parfois Souvent Tous les

jours au marché au supermarché/hypermarché dans un discount alimentaire (ED, Lidl, Franprix…)

à la ferme, abattoir à l’épicerie de quartier aux magasins exotiques (asiatiques, africains...)

au libre-service (Mali) Autre, précisez Utilisez-vous une liste pour faire vos courses ? Seriez-vous prêt à acheter ici ? O/N De l’huile d’argan du Souss Du safran du Souss De l’eau de rose Si oui, où souhaiteriez-vous pourvoir acheter ce/ces produit(s) ? Si oui, à quel prix seriez-vous prêt(s) à payer :

- un litre d’huile d’argan du Souss - 1 gramme de safran du Souss

Si vous faites vos courses : Quand vous faites vos courses, vous tenez compte : Classer 3 premiers Critères (O/N) Classement Des effets sur la santé Du goût Des effets sur la silhouette/ligne

Des effets sur le poids Des effets sur la peau De l’origine du produit Du caractère naturel De la saisonnalité Du prix De la fraicheur De la date de péremption De la quantité De la marque De l’information sur l’emballage

Autre, précisez

97

Qu’est-ce que vous recevez de votre pays/région d’origine ? (que vous demandez qu’on vous envoie/rapporte, que vous rapportez-vous lors de vos déplacements, que l’on vous envoie sans que vous le demandiez) / (ne pas énoncer)

- condiments, épices - feuilles - poisson séché - viande séchée - produits laitiers - huile d’argan ou d’olive - fruits secs - autre, précisez

Achetez-vous hallal ? Viande Autres produits

(précisez) toujours chaque fois que j’en ai la possibilité

à certaines occasions jamais Au cours de la dernière année, avez-vous pratiqué le jeûne pour des raisons religieuses (comme le Ramadan) ? O/N CUISINE Combien de fois par jour fait-on la cuisine là où vous vivez ? Combien de temps passe t-on chez vous en moyenne à la cuisine un jour de semaine ? Combien de temps passe t-on chez vous en moyenne à la cuisine un jour de week-end ? Savez-vous cuisinez français/le manger français ? noter de 0, je ne sais pas du tout, à 10, je sais parfaitement Savez-vous cuisinez le manger africain ? noter de 0, je ne sais pas du tout, à 10, je sais parfaitement

98

Journée de la veille Nous allons maintenant nous intéresser à votre journée d’hier, et plus particulièrement à tout ce que vous avez fait et expérimenté en relation avec l’alimentation et les repas (planification des repas, courses, préparation, dégustation) ainsi qu’à votre satisfaction et vos émotions à chaque moment. Pour commencer, nous allons donc vous demander de vous remémorer votre journée d’hier depuis le moment où vous vous êtes levés et jusqu’au moment où vous vous êtes couchés. Pensez à votre journée comme une suite continue d’épisodes ou de scènes de films. Appelons ces épisodes des « séquences » de votre journée. On peut considérer que la séquence est finie quand vous changez de lieu, si vous finissez une activité ou si les personnes avec qui vous interagissez changent. Nous voudrions donc que vous identifiiez les « séquences » de votre journée d’hier au cours desquelles vous avez fait une ou plusieurs activités en rapport avec l’alimentation au sens large.

Horaires/Durées Séquence (dénomination par l’enquêté)

Si on reprenait l’échelle utilisée au début pour la satisfaction (de 1 à 7), quelle note mettriez-vous pour l'alimentation ou tout ce qui a touché à l'alimentation dans votre journée d’hier plus particulièrement ?

99

Nous allons maintenant revenir au découpage de votre journée d’hier et nous allons détailler, séquence par séquence, les activités liées à l’alimentation. Pour chaque séquence alimentaire, nous allons vous demander de nous indiquer la durée de l’épisode, de décrire précisément les activités dans lesquelles vous étiez impliqués (possibilité d’activités simultanées) ainsi que les personnes avec qui vous interagissiez… Nous vous demanderons ensuite de noter, pour chaque séquence, votre niveau de bien être/plaisir/bonheur/satisfaction alimentaire sur la même échelle que celle utilisée jusqu’ici (échelle de 1 à 7) et de nous expliquer ce qui vous amène à mettre cette note. Puis, nous nous intéresserons aux moyens, selon vous, de gagner un point sur cette même échelle pour chacune des séquences. Numéro de la séquence : Description des activités : Lieu : Durée (si non relevée au moment du découpage de la journée) : Personnes avec qui vous interagissiez : □ Seul □ Avec des amis □ Avec des parents □ Autre : Nombre total de personnes : Niveau de satisfaction de la séquence (1 à 7) : Justification de la note : Moyens de gagner un point : Question : Après avoir réfléchi et découpé votre journée d’hier, pourriez vous nous dire quel a été votre niveau de satisfaction par rapport à votre alimentation en général pour la journée d’hier (toujours sur l’échelle de 1 à 7)? Question : Maintenant que vous avez bien votre journée d’hier en tête, pourriez-vous nous dire quelle a été la séquence alimentaire la plus importante pour vous dans cette journée (par rapport au découpage précédent) ?

100

CONSOMMATION ET LA COMMENSALITÉ

Nous allons à présent détailler tous les repas que vous avez pris la veille.

Prenez-vous… Heure de prise Durée de la prise

Lieu (où le prenez-vous ?) Lieu Avec qui le prenez-vous ? Avec qui

Oui Non Code Heure min Chez

vous Lieu de travail

Restaurant Restauration rapide

Code En

famille

Seul Amis, Voisins

Code

Petit-déjeuner � 1 � 2 /__/ /__//__/,/__//__/ � 1 � 2 � 3 � 4 /__/ � 1 � 2 � 3 /__/

Collation matin � 1 � 2 /__/ /__//__/,/__//__/ � 1 � 2 � 3 � 4 /__/ � 1 � 2 � 3 /__/

Déjeuner � 1 � 2 /__/ /__//__/,/__//__/ � 1 � 2 � 3 � 4 /__/ � 1 � 2 � 3 /__/

Collation après-midi

� 1 � 2 /__/ /__//__/,/__//__/ � 1 � 2 � 3 � 4 /__/ � 1 � 2 � 3 /__/

Dîner � 1 � 2 /__/ /__//__/,/__//__/ � 1 � 2 � 3 � 4 /__/ � 1 � 2 � 3 /__/

Collation soir � 1 � 2 /__/ /__//__/,/__//__/ � 1 � 2 � 3 � 4 /__/ � 1 � 2 � 3 /__/

Vous-même

Votre conjoint

Les deux

Les enfants L’employé Code

Dans une assiette

individuelle autre Code Assis Code

Petit-déjeuner �1 �2 �3 �4 �5 � 6 � 2 � 3 /__/ � 7 /__/Collation matin �1 �2 �3 �4 �5 � 6 � 1 � 3 /__/

� 7/__/

Déjeuner �1 �2 �3 �4 �5 � 6 � 1 � 3 /__/� 7 /__/

Collation après-midi �1 �2 �3 �4 �5 � 6 � 1 � 3 /__/

� 7/__/

Dîner �1 �2 �3 �4 �5 � 6 � 1 � 3 /__/ � 7 /__/Collation soir �1 �2 �3 �4 �5 � 6 � 1 � 3 /__/

� 7 /__/�3 �4 �5 � 6/__/ � 2 �1 �2

�3 �4 �5 � 6/__/ � 2 �1 �2

�3 �4 �5 � 6/__/ � 2 �1 �2

�3 �4 �5 � 6/__/ � 2 �1 �2

�3 �4 �5 � 6/__/ � 2 �1 �2

autre

/__/ � 1 �1 �2 �3 �4 �5 � 6

Accroupi Au solSur une table

basse

Sur une table à manger

hauteautre

Dans le plat

commun Debout

Qui prépare le repas ? Dans quoi mangez-vous? Comment mangez-vous?

Suivez-vous un régime ? O/N

Vos enfants fréquentent-ils la cantine scolaire ? O/N

Nous allons maintenant vous demander combien de foi s vous avez consommé les différents aliments suivants au cours des 7 derniers jours, ho rs fêtes : Groupes d'aliments

Aliments Fois/jour Fois/semaine 0 fois

Fruits Agrumes (oranges, pamplemousse, citron…)

Autres fruits (banane, pomme, papaye, melon, ananas, etc.)

Légumes frais (y compris les

légumes consommés

dans la sauce)

Légumes verts (choux, feuilles, salade…)

Légumes colorés (tomate, carotte, citrouille, betterave…)

Autres légumes (navet, aubergine, courge et courgette…)

Haricots gombo

Tubercules Manioc, pomme de terre, patate douce, igname, plantain

Légumineuses Niébé, néré

Céréales Pâtes (vermicelles, spaghetti, macaroni…)

Pain

Riz

Mil, sorgo

Viandes Bœuf/mouton/chèvre

Volaille (poulet, canard..)

Œufs Œufs

Poissons Poisson frais

Poissons en conserves (sardines)

Poissons ou mollusques séchés/fumés

Lait et produits laitiers

Lait frais

Lait en poudre (Nido)

Lait concentré liquide

Lait caillé

Yaourt

Mayonnaise (Calvé)

Fromage fondu de type « Vache qui rit »

Produits sucrés et/ou riches en

graisses

Bonbons, chocolat

Pâte à tartiner

Glaces, sorbets

Beignets sucrés ou salés

Biscuits sucrés ou salés

Matières grasses

Beurre, margarine

Beurre de karité

Huile de palme

Huile d'arachide

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Oléagineux Arachides (grillés, bouillies, en pâte)

Condiments Cube Maggi ou bouillon

Piment

Soumbala

Sel

Boissons Café/Café au lait

Thé

Boissins alcoolisées

Boissons sucrées gazeuses (sodas)

Jus de fruits

Autres boissons

Sécurité alimentaire (questionnaire FANTA) A chacune des questions suivantes, nous allons vous demander de répondre par oui ou par non. En cas de réponse positive, nous vous reposerons la même question en vous demandant de préciser si la situation s’est produite rarement (1 ou 2 fois), parfois (3 à 10 fois) ou souvent (+ de 10 fois) au cours du mois dernier. OUI -> à quelle fréquence ? Lors du dernier mois… NON

Jamais Rarement Parfois Souvent

1. … étiez-vous préoccupé que votre ménage n’avait pas assez de nourriture ?

2. … est-ce que vous-même ou un membre de votre ménage n’a pas pu manger les types de nourriture que vous préférez à cause d’un manque de ressources ?

3. …est-ce que vous-même ou un membre de votre ménage a mangé une variété limitée d’aliments parce que les ressources étaient insuffisantes ?

4. …est-ce que vous-même ou un membre de votre ménage a mangé une nourriture que vous ne souhaitiez pas manger à cause du manque de ressources pour obtenir d’autres types de nourriture ?

5. … est-ce que vous-même ou un membre de votre ménage a mangé un repas plus petit que vous n’auriez souhaité parce qu’il n’y avait pas assez à manger ?

6. … est-ce que vous-même ou un membre de votre ménage a mangé moins de repas par jour parce qu’il n’y avait pas assez de nourriture ?

7. … est-il arrivé que le ménage soit complètement sans nourriture parce qu’il n’y avait pas de ressources pour en acheter ?

8. … est-ce que vous-même ou un membre de votre ménage est allé au lit en ayant faim parce qu’il n’y avait pas assez de nourriture ?

9. …est-ce que vous-même ou un membre de votre ménage a passé toute une journée et toute une nuit sans manger parce qu’il n’y avait pas assez de nourriture ?

103

REPRESENTATIONS Ce que bien manger veut dire (produits, conduites, ordre des choses) (post-codée) « Bien manger », pour vous, c'est quoi ? (relance « Bien manger pour vous, c'est quoi encore ? ») Pour être sûr de bien manger, où iriez-vous : (post-codée)

• dans l'espace : près de chez vous ou très loin • et dans le temps : passé, présent ou futur.

Pourquoi ? Et où n'iriez-vous surtout pas pour bien manger ? Pourquoi ? Manger africain » pour vous, c’est quoi ? en 3 mots « Manger français » pour vous, c’est quoi ? en 3 mots « Si vous deviez définir en une ou deux phrases le type de cuisine que vous mangez ici, que diriez-vous ? (Relance : "Quel autre type de cuisine mange-t-on encore, chez vous ?") Je vais vous citer une liste d'affirmations. Pour chacune d'elles, vous me direz si vous êtes : tout à fait d'accord, plutôt d'accord, plutôt pas d'accord ou pas du tout d'accord. Note Il est important de bien se remplir le ventre Il ne faut pas manger varié Il faut manger équilibré Il faut manger au moins 3 fois par jour Je ne fais pas attention à ce que je mange Il faut manger ce qu’on aime Il n’y a pas d’heure pour manger Je suis le seul responsable de mon alimentation, c'est à moi de faire les bons choix

Il ne faut pas écouter les conseils des médecins sur l’alimentation Il n’y a pas de différences entre les aliments et les médicaments. Niveau de satisfaction avec certains aspects liés à l’alimentation et la santé Quelle note de 0 (pas du tout d’accord) à 10 (0 à 5 ?) (tout à fait d’accord) donneriez-vous à : Note Je suis satisfait de ma santé Je suis satisfait de ce que je mange au quotidien Je suis satisfait de la qualité des produits alimentaires que je mange tous les jours

Je suis satisfait de mon poids actuel Je me trouve trop gros(se) Je me trouve trop maigre

104

Pour vous, est-ce que XXX joue un rôle important sur la santé ? Noter de 0 (pas du tout important) à 10 (très important). Note L’alimentation Le sport et l'exercice Les régimes Le goût Le jeûne La joie de vivre Le stress, les soucis Bien dormir Manger ensemble Le travail versus le loisir ? Selon vous, est-ce que XXXXX est bon ou pas pour la santé ? notez de 0 (pas du tout) à 10 (tout à fait) Voir quali 0 à10 (sain) 0 à 10 (plaisir ?) Les produits laitiers Les fruits Les légumes Le poisson La viande (dont le poulet) Les céréales (riz, maïs, mil, blé, pain, etc)

Le vin Le lait bio Les pommes de terre, les patates douces

Les boissons gazeuses (sodas) Le cube Maggi Les épices, le piment L’huile Les œufs Les bonbons, biscuits, gâteaux, etc.

Les fritures (beignets, frites, alocos, etc.)

« Naturel », pour vous, qu’est-ce que ça veut dire ? en 3 mots

105

Information Vous sentez-vous personnellement informé sur les questions d’alimentation et de santé ? (de 0, pas du tout, à 10 parfaitement) De qui obtenez-vous des conseils sur l’alimentation ? (ne pas énoncer) citer 3 sources d’information.

- la télévision - la radio - les Imams, marabouts - votre famille - vos amis - vos collègues - vos enfants - votre conjoint - votre voisinage - des agents de la santé, des PMI - des revues, magazines - des livres de recettes - etc.

Parmi ces trois sources d’information, quelle est celle en laquelle vous avez le plus confiance ? Individualisme v ersus Commensalisme Tolérance aux particularités individuelles. Imaginez qu’il y a de la famille ou des amis qui viennent manger chez vous. L’un d’eux vous dit avant de venir :

1 qu'il ne mange pas de sel 2 qu'il est diabétique 3 qu'il n'aime pas les légumes

En tenez-vous compte au moment de préparer ? O/N

Etendue du choix. Vous avez envie de manger une glace ou un gâteau. Vous avez le choix entre deux marchands. Le premier offre un choix de 50 variétés différentes. Le second propose une sélection de 10 variétés. A prix égal, lequel choisiriez-vous ?

1 Celui qui propose 50 variétés différentes 2 Celui qui propose une sélection de 10 variétés.

Portraits de mangeurs ou de mangeuses Je vais maintenant vous décrire le portrait de plusieurs mangeurs. Pouvez-vous me dire si vous vous sentez tout à fait, plutôt, plutôt pas ou pas du tout proche de chacun de ces mangeurs.

106

A adapter ? Tout à fait

proche

Plutôt proche

Plutôt pas

proche

Pas du tout

proche Le mangeur A fait attention à ce qu’il mange et il fait du sport. Il fait attention à son poids et à sa santé.

Le mangeur B préfère parfois manger seul que de manger à plusieurs personnes.

Le mangeur C ne supporte pas de manger seul, il mange toujours avec d’autres personnes. Il aime la convivialité.

Le mangeur D aime se faire plaisir en mangeant ; Manger est un des grands plaisirs de l'existence.

Le mangeur E il fait très attention à la qualité des produits qu'il achète et mange. Il mange surtout des produits bio ou naturels.

Avenir et perceptions des changements Parlons maintenant des différences entre ici et votre pays/région d’origine (ou celui de vos parents). Pouvez-vous nous dire pour chaque mot suivant, si vous considérez que c’est mieux, moins bien ou pareil par rapport au pays ? ou ce que vous avez le sentiment d’avoir gagné ou perdu ou si rien n’a changé ? MOT Gagné/Mieux Perdu/moins

bien Pareil/Rien n'a

changé NR / NSP

Variété Goût Connaissance Temps Traditions Qualité Plaisir Hygiène Pouvoir d’achat Choix Fraicheur Confiance Santé Poids Activité physique

Maladies Fatigue Moral

107

Autre, précisez PROFIL DEMOGRAPHIQUE, SOCIAL, ECONOMIQUE ET SANITAI RE (suite) Education & niveau de vie Quel est votre niveau scolaire ? (ne pas suggérer) et celui de votre conjoint ? (mettre une croix) Niveau d’éducation Personne interrogée Conjoint Jamais été scolarisé Alphabétisé A été à l’école coranique Nombre d’années de scolarisation

NSP/NR Autre, précisez Si vous avez été scolarisé, quel est le diplôme le plus élevé que vous ayez obtenu ? et votre conjoint ? Quelle est votre activité actuelle ? et celle de votre conjoint ? Activité Personne interrogée Conjoint Travail A la recherche d’un travail Femme/homme au foyer Retraité ou pensionné En formation, études Autre : précisez Si vous travaillez, précisez quelle est votre activité ? (domaine d’activité, statut) (occupation & pénibilité du travail) De quel type de contrat s’agit-il ? Type de contrat Personne interrogée Conjoint CDD CDI Interim à votre compte activité non déclarée Autre, précisez Avez-vous déjà travaillé dans le domaine de la restauration ? O/N Précisez si en France ou au pays ? Au cours du dernier mois, combien de jours avez-vous travaillé en moyenne ? Au cours du dernier mois, combien d’heures avez-vous travaillé en moyenne par semaine ? Quelle est ou était la profession de votre mère ? Quelle est ou était la profession de votre père ?

108

Au cours de la dernière année, avez-vous bénéficié d’aide alimentaire : jamais/parfois/souvent De quel organisme ? De la soupe populaire Des restos du cœur De la banque alimentaire D’une épicerie solidaire D’une association Autre, précisez Au cours du dernier mois, pouvez-vous m'indiquer quels ont été vos revenus ? (ne pas énoncer) Au cours du dernier mois, pouvez-vous m'indiquer quels ont été les revenus de votre foyer (toutes sources confondues) ? (ne pas énoncer) Tranches de revenus Revenus de la pers

interrogée Revenus du foyer

0 à <250 euros 250 à <500 euros 500 à <750 euros 750 à <1000 euros 1000 à <1500 euros 1500 à <2000 euros > 2000 euros Au cours du dernier mois, combien d’argent avez-vous envoyé à la famille au pays ? Etes-vous : Statut d’occupation Propriétaire Locataire Co-locataire Hébergement à titre gratuit

Hébergement payant Autre : précisez Avez-vous investi dans un bien immobilier (maison, appartement, terrains, etc) ? O/N (accès à la propriété) Où ? Lieu France Pays/région d’origine Autre pays : précisez

109

Gestion du budget et dépenses alimentaires A quel degré les membres du foyer contribuent-ils aux dépenses alimentaires ? (ne pas énoncer) Degré de contribution des membres du foyer

Celui/ceux qui travaille(nt) Seulement le mari Seulement la femme Surtout le mari Surtout la femme Les deux parents Les enfants Autre, précisez Qui gère le budget alimentaire du foyer ? (ne pas énoncer) Gestion du budget alimentaire la personne interrogée son conjoint les deux parents les enfants Autre, précisez Payez-vous un « toucher » ? O/N A qui ? Toucher à la famille à une caisse de solidarité alimentaire

autre, précisez Combien avez-vous dépensé pour l’alimentation de votre foyer hier ? Combien avez-vous dépensé pour l’alimentation de votre foyer la semaine dernière ? Combien avez-vous dépensé pour l’alimentation de votre foyer le mois dernier ? Combien de personnes vivent sur ce budget alimentaire ? Perception de son niveau de vie actuel(le) : mauvais, plutôt mauvais, plutôt bon, très bon

110

Origines de la personne et de son conjoint Combien d’années avez-vous vécu en France au total ? (nombre d’années de résidence) De quelle(s) culture(s) vous sentez-vous le plus proche ? (question ouverte à post-coder)

- soninkée/bambara/peule, malienne, berbère, marocaine, arabe - une culture française - une culture européenne - une culture de « migrants » - une culture du monde - une culture de quartier, etc. - autre

D’où vous sentez-vous originaire (région/cercle/ville-village) ? D’où est originaire votre conjoint (région/cercle/ville-village) ? Pour les jeunes nés en France : D’où est originaire votre père ? votre mère ? (région/cercle/ville-village) Avez-vous la nationalité française ? Si non, quelle est votre situation juridique ?

- sans papiers - régularisé - naturalisé - réfugié politique - autre

Langues Quelle(s) langue(s) parlez-vous avec les personnes avec qui vous habitez ? (choix multiple) O/N Français Bambara Soninké Pular Berbère Arabe Autre, à précisez Si le français n’est pas votre langue maternelle, pouvez-vous évaluer votre niveau d’aisance ou de difficulté avec la langue française par une note sur 4 (pas du tout, plutôt pas, plutôt, très à l’aise)

- pour lire - pour parler - pour écrire

111

Parcours migratoire Combien de temps avez-vous vécu dans une grande ville avant de venir en France ? Avez-vous vécu dans d’autres pays que la France ? O/N Si oui, lesquels ? Si oui, combien de temps ? Vous rendez-vous dans votre pays/village d’origine :

- plus de 2 fois par an - 1 à 2 fois par an - 1 fois tous les 2 ans - Moins souvent - Jamais

Relations sociales Appartenez-vous à une association (hors caisse de solidarité –alimentaire- en France) : Oui/Non Si oui, de quel type d’association êtes-vous membre ?

- une association de femmes - une caisse villageoise - une association de quartier - une association africaine - une association soninkée - autre, précisez

Au cours de la dernière année, combien de fois avez-vous participé à des fêtes ou cérémonies (mariages, décès, naissance, journées associatives…) ? Religion : Pouvez-vous m'indiquer quelle est votre religion ou celle de votre famille ? 1 Musulmane 2 Catholique 3 Protestante

4 Juive 5 Une autre religion 6 Non-croyant / Athé 7 NR

Indicateurs de santé jamais occasionnellement régulièrement tous les jours

Faites-vous la prière ?

Faites-vous de l’exercice physique ?

Consommez-vous de l’alcool ?

Fumez-vous ?

Taille (cm) |__||__||__|, |__| Poids (kg) |__||__||__|, |__| Tour de taille (cm) |__||__||__|, |__|

112

Table des sigles

ATTM : Association Taghbaloute de Tourisme en Montagne

CERTOP : Centre d’Etudes et de Recherche Travail, Organisation, Pouvoir

CFSVA : Analyse de la sécurité alimentaire et de la vulnérabilité

CIRAD : Centre de Coopération internationale de recherche agronomique pour le

développement

CMLN : Comité Militaire de Libération Nationale

CNRS : Centre National de la Recherche Scientifique

CSA : Commissariat à la Sécurité Alimentaire

EBC : Enquête Budget – Consommation

EBSAN : Enquêtes de Base sur la Sécurité Alimentaire et la Nutrition

EDSM : Enquêtes Démographiques et de Santé du Mali

EHESS-CNRS : Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales – Centre National

de la recherche scientifique

FAO : Food and Agriculture Organization

IDH : Indicateur de Développement Humain

IMC : Indice de Masse Corporelle

IPH : Indicateur de pauvreté humain

IRA : Infections Respiratoires Aigues

IRD : Institut de Recherche pour le développement

OMS : Organisation Mondiale de la Santé

ONG : Organisation Non Gouvernementale

PIB : Produit Intérieur Brut

PNSA : Programme National de Sécurité Alimentaire

PPA : Parité de Pouvoir d’Achat

PRMC : Programme de Restructuration des Marchés Céréaliers

PRODESS : Programme de Développement Sanitaire et Social RDA :

Rassemblement Démocratique Africain

REMUAO : Réseau migration et urbanisation en Afrique de l’Ouest

RTM : Régie des Transports du Mali

SAP : Système d’Alerte Précoce

SOMIEX : Société Malienne d’Importation et d’Exportation

UNICEF : Fond des Nations Unies pour l’Enfance

113

Liste des figures

Figure 1 : Carte du Mali ............................................................................................ 15

Figure 2 : Cadre conceptuel de la malnutrition - UNICEF ......................................... 25

Figure 3 : Evolution de la corpulence des femmes entre 1995 et 2006 au Mali ....... 27

Figure 4 : Evolution des niveaux de dénutrition chez les enfants de moins de 3 ans

entre 1987 et 2001 ................................................................................................... 33

Figure 5 : Taux de prévalence des dénutritions selon la période de l'année au Mali 34

Figure 6 : Incidence de la pauvreté monétaire au Mali entre 1988 et 2005 .............. 41

Figure 7 : Répartition de l'apport énergétique par nutriments selon le milieu de

résidence .................................................................................................................. 42

Figure 8 : Postes de dépenses des ménages selon les groupes d'aliments au Mali -

EBC 1996 ................................................................................................................. 79

114

Table des matières

REMERCIEMENTS ............................................................................................................................................ 4

SOMMAIRE .......................................................................................................................................................... 5

INTRODUCTION GÉNÉRALE ......................................................................................................................... 6

MÉTHODOLOGIE .............................................................................................................................................. 8

1 RECHERCHE BIBLIOGRAPHIQUE ........................................................................................................ 8

2 OBJECTIFS ET SUIVI DE LA RECHERCHE .......................................................................................... 9

PARTIE I : LA SITUATION NUTRITIONNELLE AU MALI .... ................................................................. 10

1 LE PROJET ALIMI : LA CULTURE ALIMENTAIRE À L’ÉPREUV E DE LA MIGRATION.

CONSÉQUENCES POUR LES POLITIQUES ALIMENTAIRES ..... .......................................................... 11

1.1 COMPOSANTES INSTITUTIONNELLES ........................................................................................................ 11

1.2 JUSTIFICATION DU THÈME D’ÉTUDE ......................................................................................................... 12

1.3 QUESTION DE DÉPART, OBJECTIF ET HYPOTHÈSES ................................................................................... 13

1.4 MÉTHODOLOGIE ...................................................................................................................................... 13

2 PRÉSENTATION DU MALI ...................................................................................................................... 14

2.1 GÉOGRAPHIE ........................................................................................................................................... 14

2.2 POPULATION............................................................................................................................................ 16

2.3 HISTOIRE ET POLITIQUE ........................................................................................................................... 16

2.4 ÉCONOMIE ............................................................................................................................................... 18

2.5 M IGRATIONS ........................................................................................................................................... 20

3 LA NUTRITION AU MALI ........................................................................................................................ 22

3.1 LA SITUATION NUTRITIONNELLE AU MALI .............................................................................................. 22

3.1.1 La sécurité alimentaire ................................................................................................................... 22

3.1.2 La sécurité nutritionnelle ................................................................................................................ 24

3.1.3 La transition nutritionnelle ............................................................................................................. 26

3.2 NUTRITION MATERNELLE ET INFANTILE .................................................................................................. 29

3.2.1 Les malnutritions : définitions ........................................................................................................ 29 3.2.1.1 Les malnutritions par excès ...................................................................................................................... 29 3.2.1.2 Les malnutritions par carence ................................................................................................................... 29 3.2.1.3 Les conséquences des dénutritions ........................................................................................................... 31

3.2.2 La situation au Mali ........................................................................................................................ 32

3.2.3 Prise en charge globale des enfants et dénutrition ......................................................................... 34 3.2.3.1 Les pratiques alimentaires des jeunes enfants .......................................................................................... 35 3.2.3.2 L’accès aux soins de santé ........................................................................................................................ 36

115

3.2.3.3 Les pratiques de soins ou caring ............................................................................................................... 39 3.3 LES DIFFÉRENCES URBAIN - RURAL : FOCUS SUR LA RÉGION DE KAYES ET LA VILLE DE BAMAKO .......... 41

PARTIE II : ALIMENTATION, NUTRITION ET MIGRATIONS . ............................................................ 46

1 DE LA NUTRITION À L’ALIMENTATION COMME FAIT SOCIAL TOTAL ................................ 47

1.1 DE LA NUTRITION … ............................................................................................................................... 47

1.2 … AU FAIT SOCIAL TOTAL ....................................................................................................................... 48

1.3 LE PARADIGME INTERDISCIPLINAIRE ....................................................................................................... 49

1.4 LES MODÈLES ALIMENTAIRES : UNE NOTION À DÉFINIR ........................................................................... 50

2 L’ESPACE SOCIAL ALIMENTAIRE POUR TRAITER DE L’ALIME NTATION DES MIGRANTS.

52

3 NOTION D’IDENTITÉ ET D’ADAPTATION EN SITUATION DE M IGRATION ........................... 54

4 VARIÉTÉ ET DIVERSITÉ EN SITUATION DE MIGRATION .... ....................................................... 58

PARTIE III : L’ALIMENTATION DES MIGRANTS MALIENS .. ............................................................. 61

1 LES MODÈLES ALIMENTAIRES MALIENS À TRAVERS L’ESPACE SOCIAL ALIMENTAIRE

62

1.1 L’ ALIMENTATION MALIENNE … .............................................................................................................. 62

1.2 … À TRAVERS L’ESPACE SOCIAL ALIMENTAIRE ...................................................................................... 65

2 INFLUENCE DE LA MODERNITÉ SUR LES MODÈLES ALIMENTAI RES MALIENS ............... 71

3 LES DIFFÉRENCES URBAINS-RURAUX .............................................................................................. 73

3.1 LES PARTICULARITÉS URBAINES .............................................................................................................. 73

3.1.1 L’alimentation de rue...................................................................................................................... 74

3.1.2 L’agriculture urbaine et péri-urbaine............................................................................................. 77

3.2 LES PARTICULARITÉS RURALES ............................................................................................................... 78

3.3 LES MIGRANTS : UN MODÈLE ALIMENTAIRE QUI LEUR EST PROPRE ? ....................................................... 80

CONCLUSION GÉNÉRALE ............................................................................................................................ 84

BIBLIOGRAPHIE .............................................................................................................................................. 87

ANNEXES ........................................................................................................................................................... 91

ANNEXE A : ....................................................................................................................................................... 92

QUESTIONNAIRE DE DIVERSITÉ DANS LE CADRE DU PROJET ALIMI ......................................... 92

ANNEXE B : ........................................................................................................................................................ 94

PROPOSITION DE QUESTIONNAIRE DANS LE CADRE DE L’ÉTU DE ALIMI .................................. 94

TABLE DES SIGLES ....................................................................................................................................... 112

LISTE DES FIGURES ..................................................................................................................................... 113

TABLE DES MATIÈRES ................................................................................................................................ 114

116

Titre : L’alimentation des migrants maliens : de la campagn e à la ville

L’urbanisation au Mali s’explique en partie par les migrations internes des

populations rurales vers les villes. En centrant l'étude de ce phénomène sur les

questions alimentaires et en combinant les aspects sociologiques, culturels et

nutritionnels cette étude tente de mettre en lumière les conséquences de la migration

sur l'alimentation. L’alimentation urbaine influencée par la modernité reste

néanmoins empreinte de tradition. Les modèles alimentaires ruraux, quant à eux,

résultent d’une forte tradition confrontée aux innovations apportées par les villes.

Mais qu’en est-il alors des modèles alimentaires des migrants venus de leur village à

Bamako ? L’étude de leurs modèles alimentaires sert de prisme à l’analyse des

changements de leur environnement de vie. La mise en évidence des aliments

emblématiques de l’alimentation urbaine constitue un point de départ dans l’étude de

ces variations alimentaires et nutritionnelles en situation de migration.

Mots clés : Mali, Alimentation, Nutrition, Modèles alimentaires, migration, migrant,

ville, campagne.

Title: Malian migrants alimentation: from the countryside to the city

Mali's urbanisation is partly explained by intern migrations from the countryside to the

city. By focusing the study of this phenomenon on the dietary questions and by

combining sociological, cultural and nutritional aspects, this study intends to highlight

the consequences of migration on alimentation. Urban alimentation is influenced by

modernity but stays nevertheless marked with tradition. Rural dietary habits are the

result of the confrontation of strong tradition and innovations coming from the cities.

But what can we say about the dietary habits of the migrants coming from the

countryside to Bamako? Studying their dietary habits allows analysing the changes

that occur in their lifestyle. Highlighting staples and key aliments of urban

alimentation is a starting point in the study of these changes in the alimentation and

the diet of people in migration.

Key words: Mali, Alimentation, Nutrition, Dietary habits, Migration, Migrant, City,

Countryside