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L’accompagnement des aînés en perte d’autonomie Regards critiques et pistes de réflexions sur les bonnes pratiques

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L’accompagnement des aînés en perte d’autonomie

Regards critiques et pistes de réflexions sur les

bonnes pratiques

L’accompagnement des aînés en perte d’autonomie : Regards critiques et pistes de réflexion sur les bonnes pratiques

Infor Homes Wallonie asbl – 2012

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Travail sur les bonnes pratiques dans l’accompagnement des aînés en perte d’autonomie – IHW – 2012 Claire Bachelet

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Table des Matières

1 INTRODUCTION ........................................................................................................................... 5

2 LA NOTION DE QUALITÉ DE VIE ........................................................................................... 7

2.1 INTRODUCTION AU CONCEPT ........................................................................................... 7 2.2 LA QUALITÉ DE VIE, DIFFÉRENTE SELON LE POINT DE VUE ? .............................................. 8 2.3 CONCLUSION .................................................................................................................. 9

3 DIFFÉRENTES FORMES D’HÉBERGEMENT ET D’ACCUEIL POUR PERSONNES

ÂGÉES DÉPENDANTES ................................................................................................................... 11

3.1 L’ACCOMPAGNEMENT AU DOMICILE ................................................................................11 3.2 SERVICES TRANS-MUROS ...............................................................................................13 3.3 L’HABITAT ALTERNATIF ..................................................................................................15 3.4 L’ENTRÉE EN INSTITUTION ..............................................................................................16 3.4.1 LES SERVICES INTRA-MUROS .................................................................................................... 17

4 CONCLUSION.............................................................................................................................. 18

5 A LA RENCONTRE DES PROFESSIONNELS DE TERRAIN EN WALLONIE .............. 21

5.1 PROFIL DES PARTICIPANTS .............................................................................................22 5.1.1 SÉMINAIRE DE MONS ................................................................................................................ 22 5.1.2 SÉMINAIRE DE TOURNAI ........................................................................................................... 22 5.1.3 SÉMINAIRE DE NAMUR .............................................................................................................. 22 5.2 CONTENU DES SÉMINAIRES ............................................................................................23 5.2.1 ACCOMPAGNEMENT DES FAMILLES/AIDANTS ........................................................................... 23 5.2.2 ACCUEIL ET ACCOMPAGNEMENT EN INSTITUTION .................................................................... 24 5.2.3 ACTIVITÉS ET ANIMATIONS ....................................................................................................... 25 5.2.4 REPÈRES .................................................................................................................................... 27 5.2.5 ACCOMPAGNEMENT EN FIN DE VIE ........................................................................................... 29 5.2.6 FORMATIONS ET ACCOMPAGNEMENT DU PERSONNEL SOIGNANT/PARAMÉDICAL .................... 30 5.2.7 CONSTATS D’ACTUALITÉ .......................................................................................................... 32 5.2.8 QUELQUES PRATIQUES RECENSÉES ........................................................................................... 33 5.3 DISCUSSION ..................................................................................................................34

6 PISTES DE RÉFLEXIONS ET REGARDS CRITIQUES ....................................................... 36

7 TROIS PROJETS INSTITUTIONNELS INNOVANTS, EN WALLONIE ET AILLEURS 42

7.1 PROJET DE « MAISON INTERGÉNÉRATIONNELLE » ...........................................................42 7.2 PROJET « MAISON DE VIES SOLIDAIRES POUR ADULTES ÂGÉS » .......................................45 7.3 PROJET CARPE DIEM AU CANADA ..................................................................................48 7.4 CONCLUSION .................................................................................................................50

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8 CONCLUSION GÉNÉRALE ...................................................................................................... 51

9 BIBLIOGRAPHIE ........................................................................................................................ 54

10 ANNEXE ...................................................................................................................................... 56

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1 Introduction

Avec l’augmentation de l’espérance de vie, nous assistons également à une

augmentation de la population âgée. Ce constat implique que nous vivrons à présent

plus longtemps en bonne santé et parallèlement, que cette même population âgée

verra de plus en plus de personnes développer une démence et/ou de la

désorientation.

Par conséquent et au vu d’une demande croissante relative à la recherche de

structures d’accueil pour les personnes désorientées, l’asbl Infor Homes Wallonie, en

2011, entama une recherche qui tentait de dégager les différentes tendances

concernant la prise en charge des personnes âgées désorientées. L’analyse des

données, récoltées à l’aide d’un questionnaire soumis oralement aux directions des

maisons de repos, mettait en évidence une série de constats pertinents ainsi que de

nouvelles pistes en termes d’accompagnement des résidents désorientés (de la

présence d’une aile sécurisée à la mise en place de repères particuliers ou encore

des modalités de recours à la contention). Même si cette recherche ne permettait pas

de balayer cette vision encore sombre des maisons de repos, elle permettait

néanmoins de souligner d’une part une certaine qualité dans l’accueil des personnes

désorientées et d’autre part, la mise en place progressive de « bonnes » pratiques

(du projet général aux « trucs et astuces » faits maison) destinées à améliorer leur

qualité de vie et à maximiser leur autonomie.

Si la recherche exploratoire réalisée en 2011 nous a donc permis de dresser pour la

Wallonie un état des lieux approximatif de l’accueil en institution des personnes

désorientées (accueil d’un point de vue davantage « pratique » de type « quelles

structures sécurisées, quels types de contention, quels repères concrets ?»…), le

travail ci-présent se veut aujourd’hui d’étendre la question de l’accompagnement à

l’ensemble de la population vieillissante (institutionnalisée ou pas, désorientée ou

pas). Plus précisément, nous proposons ici une réflexion quant à l’accompagnement

des aînés en perte d’autonomie et nous interrogeons quant aux pratiques dites

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« bonnes et innovantes » lorsque la dépendance s’installe. Nous insistons d’ailleurs

sur la nécessité d’appréhender l’accompagnement au travers d’une approche globale

de l’individu. En effet, en plus de tenir compte du ressenti subjectif mais aussi des

difficultés objectives (handicaps associés au vieillissement, degré d’évolution de la

désorientation lorsqu’il y a démence…) propres à la réalité de la personne en perte

d’autonomie, l’accompagnement devra s’étendre aux familles, aux aidants-proches

ainsi qu’au personnel soignant lorsque qu’il y a institutionnalisation et ce, dès les

premiers signes de perte d’autonomie jusqu’aux soins palliatifs (la mort comme partie

intégrante de la vie).

Nous rejoignons notamment Charlot et Guffens (2007) qui expliquent que « le défi

des prises en charge est de garantir aux personnes âgées en perte d’autonomie la

préservation d’une part d’autonomie, qui pourra se traduire dans des gestes simples

accomplis dans la vie quotidienne ou parfois dans des décisions plus importantes »

et d’ajouter que « la part d’autonomie variera en fonction de chaque personne et en

fonction de la progression de la maladie (si maladie il y a), c’est bien ce que traduit le

concept de ‘personne âgée en perte progressive d’autonomie’, il souligne la diversité

et l’évolutivité des situations, casse l’idée d’étiquette, soutient qu’il n’y a pas que des

pertes (dans le vieillissement) et dans les maladies dégénératives, mais aussi des

capacités préservées ».

Dans ce travail et en guise de rappel théorique, nous introduirons dans un premier

temps la notion souvent débattue de « qualité de vie » et tenterons après de mettre

en avant différentes formes d’hébergement et d’accueil pour personnes âgées

dépendantes.

Par la suite, nous présenterons différentes pistes de réflexion dégagées au cours de

3 séminaires réalisés dans les régions de Mons, Tournai et Namur avec la

participation de professionnels de terrain. Nous verrons comment ces pistes nous

amènent à considérer avec prudence les notions de « bonnes et innovantes

pratiques » trop souvent érigées comme « manuels du ‘comment faire’ » au

détriment d’une philosophie de l’accompagnement privilégiant le « comment être ».

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La notion de qualité de vie

1.1 Introduction au concept

La qualité de vie renvoie à un concept multidimensionnel que de nombreux auteurs

se sont employés à définir ces deux dernières décennies. Il ressort néanmoins des

différents travaux un consensus sur quatre propriétés de la qualité de vie : le

caractère multifactoriel, l’auto-évaluation, la variabilité temporelle et la subjectivité

(Salmon et al, 2009).

Parmi les nombreuses définitions suggérées, celle de l’OMS (1993)1 décrit la qualité

de vie comme « la perception qu’a un individu de sa place dans l’existence, dans le

contexte de la culture et du système de valeurs dans lesquelles il vit, en relation avec

ses objectifs, ses attentes, ses normes et ses inquiétudes. »

Dans la même lignée, en 2002, Ylieff considérera la qualité de vie comme la

synthèse de quatre domaines : l’état de santé physique et les habiletés

fonctionnelles ; l’état de santé psychologique et le bien-être ; le statut social et les

interactions sociales ; les conditions économiques. Comme l’indiquent Salmon et al

(2009), cette variabilité suggère déjà la possibilité d’un maintien individuel d’une

qualité de vie dans certains de ces domaines.

Si la qualité de vie échappe à toute définition restrictive, celles que nous venons de

présenter semblent toutes deux s’accorder sur l’importance du vécu subjectif de la

personne. C’est d’ailleurs en cela que la notion de qualité de vie apparaît si

complexe : elle est un critère d’appréciation censé revêtir un caractère objectif alors

même qu’elle est l’objet d’une interprétation subjective (Leplège, 1999 cité par

l’Anesm2, 2011). L’Anesm (2011) suggère donc de ne pas se limiter à la sensation ou

à la perception mais bien de prendre aussi en considération la réalité que la

perception recouvre. Par exemple, le sentiment de solitude peut être lié à une

1 WHOQOL GROUP, 1993

2 Agence Nationale de l’Evaluation de la qualité des établissements et Services Médico-sociaux

(France). L’anesm a inscrit en 2011 dans son programme de travail un programme « qualité de vie en Ehpad (Etablissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes).

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solitude réelle en raison de l’insuffisance des liens sociaux, mais aussi de la

perception négative qu’a la personne de ses relations avec des personnes pourtant

bien présentes.

Ainsi, la qualité de vie peut varier selon l’appréciation de chacun tout comme elle

pourra évoluer dans le temps (Etienne et Fontaine, 1997 cités par Salmon et al,

2009 ; Anesm, 2011).

Il semblerait notamment que la qualité de vie comprenne les mêmes domaines que

la personne soit désorientée ou pas, jeune ou âgée: un fonctionnement cognitif

satisfaisant, la capacité d’exécuter des activités de la vie quotidienne, de s’engager

dans une action sociale, une gestion du temps adéquate et enfin, un équilibre entre

émotions positives et absence d’émotions négatives (Lawton, 1994).

1.2 La qualité de vie, différente selon le point de vue ?

Dans l’évaluation de la qualité de vie, il est important d’attirer l’attention sur les

différences significatives entre l’impression de la personne concernée et celle de son

(ses) proche(s). Il a en effet été observé dans plusieurs études que le(s) proche(s)

évaluai(en)t la qualité de vie du patient comme étant à un niveau plus bas que le

patient lui-même (Novella et al, 2001 ; Karlawish et al, 2001, Shin et al, 2005 ; cités

par Salmon et al, 2009). Dans le cas des démences notamment, la sévérité de la

démence ne sera pas forcément synonyme d’une moins bonne qualité de vie.

Plusieurs études ont même démontré à l’inverse que les personnes en stade avancé

de démence avaient tendance à manifester une meilleure satisfaction de la vie (la

conscience de la maladie s’atténuant avec son évolution) en comparaison de

personnes à un stade précoce de la démence, rapportant davantage de symptômes

dépressifs et par là, une moins bonne qualité de vie. Et l’UCP3 (2010) d’ajouter que

« cette nuance entre « Vie » et « Envie de Vie » influe sur les perceptions de

l’entourage, la famille, les aidants… Influe également sur les pratiques

professionnelles du secteur de l’aide aux personnes âgées. En effet, le regard des

3 Union Catholique des Pensionnés, mouvement social des aînés asbl

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professionnels et les pratiques d’accompagnement (des aînés) s’en trouvent

marqués et peuvent se répercuter sur la personne âgée concernée […] »

Ces données concernant la qualité de vie introduisent pour les familles, les aidants-

proches ainsi que pour les professionnels un changement de perspective important

d’une part en validant que la personne est à même de pouvoir exprimer ses besoins

et ses opinions, de pouvoir faire des choix et de pouvoir participer à ceux qui la

concernent4 et d’autre part en soutenant qu’il est de la mission des aidants de lui

faciliter cette expression et cette participation.

1.3 Conclusion

Comme nous venons de l’aborder brièvement, il n’existe donc pas de définition

consensuelle de la qualité de vie comme il n’y a pas de consensus sur ce qu’est le

bien-être ou la santé5. Toutefois, Corten (1996), dans un essai critique a pu mettre

en évidence un modèle original permettant de comprendre les diverses dimensions

de la qualité de vie, modèle qui peut se résumer à cet aphorisme: la Vie est de

qualité quand elle fait sens ! Et, il faut entendre par “sens” tous les sens du mot

sens, à savoir: les sens en tant que lieu de plaisir où interviennent les affects et les

besoins, bien sûr, mais aussi la sensorialité (écouter, voir, goûter) et la motricité

(marcher, danser, se relaxer), le sens en tant que signifiant où interviennent les

valeurs, les importances, mais aussi la spiritualité, et enfin le sens en tant direction

reliant le passé (avec son histoire et sa personnalité) au futur (avec ses aspirations et

expectations).

Nous avons aussi vu dans cette introduction à la qualité de vie que celle-ci renvoie à

un processus global au sein duquel interagiront différentes variables et c’est en cela

qu’il nous apparaît primordial dans ce travail d’envisager la qualité de vie à la lumière

des différents moyens et structures qu’il sera possible de mettre en place autour de

4 Arrêté du Gouvernement Wallon du 15 octobre 2009, annexe 3, Ch. 1 (normes concernant la liberté

des résidents, le respect de leurs convictions et leur participation) 5 A l’exception de la définition de la constitution de l’OMS (84) : « La santé est un état de complet

bien-être physique, psychologique et social ».

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l’individu en perte d’autonomie. Comme l’avance l’UCP (2010) au sein du travail

« Envie de Vie », produire de la qualité de vie est un processus permanent et

volontariste. Un véritable défi à relever au quotidien, en maison de retraite comme

partout ailleurs.

Dans cette optique, nous proposerons dans le chapitre suivant un rappel global des

différentes formes d’hébergement et d’accueil pour personnes âgées. L’objectif sera

ainsi de présenter au lecteur un rappel concis des structures créées pour venir en

aide lorsque la dépendance s’installe.

La suite du travail quant à elle, en présentant des regards croisés de professionnels

du terrain en Wallonie, nous permettra d’élever la question de l’accompagnement à

une réflexion plus concrète (quelles limites à la mise en place des bonnes pratiques,

quelles difficultés rencontrées sur le terrain, quelles possibilités « novatrices » pour

un accompagnement éthique ?)

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2 Différentes formes d’hébergement et d’accueil pour personnes âgées dépendantes

Considérant le nombre grandissant de personnes n’ayant plus les ressources

nécessaires pour assumer tous les actes de la vie quotidienne, nous répertorions et

décrivons ici une série d’organisations assurant une mission auprès des personnes

en perte d’autonomie qui nécessitent de l’aide dans le cadre d’un maintien au

domicile. Organisations qui permettront notamment à l’aidant proche d’être soulagé

de certaines tâches qu’il ne sait plus assumer seul au jour le jour.

2.1 L’accompagnement au domicile6

Les services d’accompagnement au domicile se mettent progressivement en place

dans le cadre des centres de coordination des soins et de l’aide à domicile. Van

Audenhove, Ylieff et al. expliquent toutefois dans un travail de 2009 que le

développement de ces services rencontre des difficultés liées à la constitution des

équipes et au coût relativement élevé pour les bénéficiaires.

Différents services

Les centres de coordination des soins et de l’aide à domicile : Selon la situation

(aménagement du lieu de vie pour un maintien à domicile ou encore retour de

l’hôpital vers le domicile) les centres de coordination des soins et de l’aide à

domicile proposent une analyse de la situation/des besoins, une organisation des

différentes aides nécessaires, une mise en place d’un plan d’intervention

personnalisé, une coordination assurée entre les différents professionnels. Ils

évaluent donc l’aide adaptée au besoin et organisent avec l’aidant

l’accompagnement pratique.

6 Pour toute information supplémentaire relative au maintien à domicile et pour une sensibilisation qui

plus est interactive, nous invitons le lecteur à consulter le site de la plateforme « bien vivre chez soi » créé par la Wallonie : « http://bienvivrechezsoi.be/ »

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Les services d’aide aux familles : proposent des aides familiales et/ou ménagères

ainsi que des gardes à domicile et non des soins (même s’ils peuvent travailler en

collaboration avec des infirmier(e)s)

L’aménagement du domicile : l’ergothérapeute pourra suggérer des solutions

d’adaptation du lieu de vie en fonction des besoins et des difficultés. De plus,

notons qu’il est prévu pour janvier 2013 que les personnes âgées (ou en situation

de handicap) ayant de faibles revenus pourraient se voir octroyer des prêts sans

intérêts pour des montants entre 300 et 10.000 euros en vue d’aménager le

domicile et d’y vivre ainsi de manière plus autonome et sécurisante.

L’aide familiale : soutien dans tous les gestes de la vie quotidienne et dans

l’information des aidants proches pour les guider dans l’aide qu’ils apportent

Les soins infirmiers (avec spécialisations diverses)

La biotélévigilance : en cas de malaise, d’accident, cela permet de joindre une

centrale de secours 24h/24

Une équipe de brico-dépanneurs : pour la réalisation de tâches de réparation ou

d’entretien que la personne n’est plus en mesure d’effectuer seule

La garde à domicile : des personnes peuvent tenir compagnie et accompagner

dans son quotidien, de jour comme de nuit (selon le service) toute personne en

perte d’autonomie.

Services divers pour l’amélioration de la qualité de vie : prêt/vente de matériel

médical, transport de personnes malades, soins palliatifs, logopédie, pédicure,

coiffure, distribution de repas…

Les prestataires indépendants

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2.2 Services trans-muros

Certaines alternatives de court terme permettront à l’aidant proche d’être soulagé le

temps d’une journée ou plus. Les propositions présentées ci-dessous garantiront un

accompagnement de qualité aux personnes concernées, offriront un moment de

répit7 à l’aidant proche qui se verra à nouveau disponible pour réaliser les activités

qu’il avait dû délaisser (prendre soin de soi pour bien prendre soin des autres). Elles

éviteront la rupture brutale du passage du domicile à l’institution en garantissant à la

personne en perte d’autonomie un retour chez elle ou chez un proche.

Les centres d’accueil de jour ou de soirée/nuit : Ils sont situés au sein d’une

maison de repos ou d’une maison de repos et de soins ou encore en liaison avec

elles et permettent de soulager l’aidant en accueillant la personne en perte

d’autonomie (âgée d’au moins 60 ans sauf dérogation) en constituant un cadre

sécurisant la nuit et en proposant le jour (de 8h à 18h) des activités, des soins

voire une prise en charge thérapeutique et sociale.

Maisons d’accueil communautaire : Se caractérisent par la réponse aux besoins

sociaux des personnes âgées. Elles se distinguent nettement d’un centre d’accueil

de jour dont la finalité première est la prise en charge médicale et thérapeutique.

De plus, un centre d’accueil de jour est automatiquement relié à une maison de

repos puisque celui-ci est géré par le même pouvoir organisateur, le centre

d’accueil communautaire est quant à lui indépendant.

Les centres de soins de jour : Leur objectif est de prendre en charge les

personnes en souffrance psychique et/ou physique nécessitant un

accompagnement et des soins pendant la journée afin de retarder un placement

en maison de repos, d'éviter ou d'abréger les hospitalisations et de faciliter la

récupération de l'autonomie après une maladie chronique. Ces fonctions d'accueil

7 Ce n’est pas un hasard d’ailleurs si ces services ont également été qualifiés de services de « répit »

aux aidants familiaux.

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personnalisé, d'orientation médicale et de réadaptation physique, psychique et

sociale impliquent une offre d'aides et de services variés et coordonnés.

Le court séjour : Les lits de court séjour se situent au sein d’une maison de repos

(ou maison de repos et de soins). Les personnes âgées nécessitant une

convalescence ou dont les proches ne peuvent s’occuper pour une période limitée

sont accueillies pour une durée de maximum 3 mois (ou 90 jours cumulés par

année civile que ce soit ou non dans le même établissement).

Les centres de convalescence et de revalidation : Permettent d’assurer la

transition entre l’hôpital et le domicile. Ils comprennent les soins de kinésithérapie

et de physiothérapie.

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2.3 L’habitat alternatif

Lorsque l’état de santé le permet encore, quitter son domicile pour une habitation

plus adaptée peut représenter une alternative intéressante (mais encore trop

méconnue du grand public) à l’institution.

La vie communautaire (genre Abbeyfield8)

Plusieurs personnes âgées se groupent dans une maison à dimensions

humaines dont elles assumeront la gestion ensemble et où elles contribueront à

créer une ambiance familiale. Cette formule allie ainsi vie privée et vie en groupe

tout en restant soutenue par l’association dont elle est membre.

L’habitat kangourou

La personne âgée est la propriétaire ou le bailleur des lieux et accepte de partager

l’habitation avec un jeune ménage ou une famille. La personne âgée s’installe par

facilité au rez-de-chaussée, la famille dispose du reste des lieux. Chaque partie

doit signer un contrat où figureront les modalités de la réciprocité des services et

le loyer modique payé par la famille. Il n’y a pas encore d’expérience de ce type

en Wallonie même si un groupe de travail prépare pour cette année un cadre pour

des mesures complémentaires

Les résidences services

Ce sont des logements particuliers destinés aux personnes âgées de 60 ans au

moins et leur permettant de mener une vie indépendante tout en offrant

obligatoirement des services auxquels elles peuvent faire appel librement. Les

résidences services doivent avoir un accord de collaboration avec une maison de

repos ainsi qu’avec un ou plusieurs centres de coordination de soins et de l’aide à

domicile qui couvrent le territoire.

8 Pour toute information supplémentaire, nous vous invitons à consulter en ligne le site de l’habitat

groupé participatif Abbeyfield : http://www.abbeyfield.be/fr/

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L’accueil familial

Cette formule permet à la personne âgée d’habiter chez une personne ou une

famille qui mettrait à disposition une chambre individuelle, des sanitaires adaptés

et des espaces communs. Ce type d’habitat fait actuellement l’objet d’une

disposition décrétale dont la mise en œuvre serait pour janvier 2013.

L’attention et la prudence restent néanmoins de mise concernant l’habitat kangourou

et la vie communautaire car elles ne font pas, à l’heure actuelle, l’objet de

dispositions légales ou décrétales. Aucun contrôle ni protection ne sont donc

exercés.

2.4 L’entrée en institution

« La maison de retraite est un univers inconnu peu familier, un nouveau lieu de vie avec des

règles et des modalités spécifiques. L’hébergement collectif signifie la cohabitation obligée et

permanente avec d’autres personnes, résidents et professionnels. C’est l’établissement de

nouvelles relations sociales et l’acquisition d’une autre identité et d’un nouveau statut, celui

de résident » (Ylieff, 2002)

L’entrée en institution peut s’avérer être une épreuve pénible autant pour la personne

concernée que pour les familles. En effet, l’individu concerné fera face à des

adaptations quelques fois ardues à un nouvel environnement impliquant une prise en

charge très différente de celle au domicile.

L’adaptation pourra être encore plus difficile si elle apparaît dans un contexte de

crise, d’urgence (transit par urgences des hôpitaux, court séjour etc.). D’où l’intérêt

de préparer son avancée en âge ainsi qu’une éventuelle entrée en institution. Assez

tôt donc, il faut encourager la famille à commencer à rechercher une structure

d’accueil/de soins définitive et ne pas attendre pour le faire que le maintien à

domicile soit devenu impossible. Pour ce faire, les familles peuvent être aidées par

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des professionnels du terrain (Infor Homes Wallonie asbl, cpas, mutuelles, assistants

sociaux…)

Si l’entrée du proche en institution peut représenter pour les familles un certain

soulagement (ne plus se tracasser en permanence, se reposer), ce dernier

s’accompagne souvent d’un ressenti d’échec de la prise en charge à domicile, d’un

sentiment de culpabilité, de déchirement face à la séparation et l’impossibilité de

continuer à s’occuper de son parent. A cela s’ajoute la difficulté de trouver une

institution adaptée à sa situation, au budget etc. (Feteanu et al., 2005).

Il ne faut en effet pas nier que les personnes échappant à l’entrée en institution sont

pour la plupart celles qui ont « une vaste famille, une vaste demeure et dont les

moyens financiers leur permettront d’avoir un personnel abondant » (Polydor, 2009).

Le choix de la maison de repos se fera dès lors sur base de certains critères

(Polydor, 2009), le premier étant le prix, venant ensuite la proximité (quelle facilité

d’accès pour que le lien ne se rompe pas entre famille/aidant et résident ?), et enfin

le critère de qualité de l’établissement. Pour ce dernier point, Infor Homes Wallonie

conseille vivement aux personnes recherchant un établissement de pouvoir en visiter

plusieurs et une fois sur place, de se fier au ressenti personnel, sans pour autant se

laisser rebuter par le nombre de personnes en état de dépendance : « C’est une

réalité déplaisante qu’il faut se préparer à affronter. Passez du temps, posez-vous,

observez, écoutez. Bientôt vous sentirez que dans telle maison, plus toute jeune, le

personnel est d’une extrême gentillesse, que dans telle autre les animations sont

joyeuses et stimulantes, qu’ailleurs, une ambiance paisible règne. Laissez-vous

porter par ce que vous disent vos sens et votre cœur, si vous visitez pour un parent,

tentez de raisonner à sa place et non selon vos seuls critères. Sans négliger les

aspects négatifs, appliquez vous à voir le positif. Habituez-vous à l’idée avant d’y

habituer votre parent malade. » (Polydor, 2009)

2.4.1 Les services intra-muros

Le secteur intra-mural comporte des services permanents (maisons de repos,

maisons de repos et de soins, maisons de soins psychiatriques) ou temporaires

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(hôpitaux généraux, gériatriques, psychiatriques, spécialisés) en fonction de la durée

de séjour des personnes qui y sont accueillies (Van Audenhove, Ylieff et al, 2009)

La maison de repos (MR)

C’est un établissement destiné à héberger des personnes âgées de 60 ans au

moins9 qui y ont leur résidence habituelle et y bénéficient en fonction de leur

dépendance de services collectifs familiaux, ménagers, d’aide à la vie journalière

et de soins médicaux ou paramédicaux.

La maison de repos et de soins (MRS)

La maison de repos et de soins se destine aux personnes âgées dont l’autonomie

est réduite, nécessitant des soins ou atteintes d’une maladie de longue durée

nécessitant une surveillance journalière associée à un traitement médical adapté.

Les personnes accueillies sont fortement tributaires de l’aide de tiers pour pouvoir

accomplir les actes essentiels de la vie quotidienne. Comparées aux « MR », les

« MRS » disposent de ressources en matériel et personnel infirmier et paramédical

plus importantes en vue d’assurer un traitement approprié aux résidents les plus

dépendants.

3 Conclusion Il faut admettre que si des avancées non négligeables ont vu le jour ces dernières

années en matière d’accueil de la personne âgée en perte d’autonomie, il n’existe

malheureusement pas de « solution miracle » aux problèmes rencontrés, chaque cas

restant unique (il existe en effet autant de « dépendances » qu’il existe d’individus).

Chaque moyen ou structure présenté constitue donc une réponse plus où moins

complète face à la demande et il est important de garder à l’esprit que chaque

formule comportera donc ses avantages mais aussi ses inconvénients. Notons

9 Sauf s’il y a dérogation dans le cas de personnes plus jeunes

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également que les divers lieux d’hébergement pour personnes en perte d’autonomie

se veulent être des nouveaux « chez soi », pourtant, dans le cas des maisons de

repos, la vie en collectivité, avec les rythmes et l’organisation qui en découlent,

rappelle au quotidien cette rupture survenue entre la vie passée et la vie actuelle et

remet forcément en question la possibilité d’être « chez soi » (avec toutes les

références à l’intimité et à la liberté que cela implique) dans un lieu où s’entremêlent

et cohabitent au quotidien les vies des résidents et des professionnels. Cette réalité,

Rimbert (2005) s’y est intéressé en proposant une analyse du « temps rationalisé »

et du « temps domestique » en maison de retraite. Selon lui le rapport au temps en

maison de repos serait un indice efficace de l’intensité de la rupture que constitue la

transition du domicile à l’institution. Il ajoute qu’en effet, « intégrer une institution est

source de changement : départ du lieu d’habitation, voire déplacement géographique

radical, coupure du milieu d’interconnaissance ; arrivée dans un lieu inconnu avec

des individus qui y travaillent, d’autres qui partagent la condition du nouvel arrivant

mais dont la présence ne se justifie pas par les raisons classiques de la cohabitation

(familiales, amicales…). En outre, c’est souvent à la suite d’un évènement déjà

bouleversant que le placement a lieu, comme le décès du conjoint (Caradec, 2004,

cité par Rimbert, 2005), ou une hospitalisation.

Parce que l’organisation du temps des résidents fait partie intégrante des missions

d’une maison de retraite, les relations entre le temps des retraité(e)s et celui des

salarié(e)s sont à la fois une contrainte et une tâche à maîtriser en tant que telle. Le

travail du personnel gériatrique consiste alors à contrôler le rythme des personnes

âgées sans les brusquer. Et le « travail » des résidents revient à préserver la

singularité de leur rythme de vie, dans une sorte de concurrence objective avec les

agents de l’institution. On a là une sorte de « drame social du travail » (Hugues,

1996, cité par Rimbert, 2005), puisqu’il n’y a pas de tension entre la perception

routinière du professionnel et l’angoisse du « client profane », mais entre deux

« routines » qui n’ont pas la même vitesse.

Quelles propositions sont donc faites tant dans l’accompagnement au domicile que

dans une organisation collective hyper structurée pour maximiser la qualité de vie et

préserver tant que possible la singularité des rythmes des individus ? C’est la

L’accompagnement des aînés en perte d’autonomie : Regards critiques et pistes de réflexion sur les bonnes pratiques

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question que nous poserons et à laquelle nous espérons amener un début de

réponse via les 3 séminaires réalisés par Infor Homes Wallonie et présentés ci-

après.

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21

4 A la rencontre des professionnels de terrain en Wallonie Dans le cadre de ce travail, Infor Homes Wallonie a organisé successivement 3

séminaires10 en Wallonie et plus précisément à Mons, Tournai et Namur. Ces

derniers s’adressaient aux professionnels de terrain quels qu’ils soient (du secteur de

l’aide à domicile au personnel de maison de repos…) et se voulaient de récolter un

maximum de « bonnes et innovantes pratiques » destinées à favoriser un

accompagnement de qualité de la personne en perte d’autonomie et ayant cours en

Wallonie.

Aussi, nous n’avons pas soumis aux participants de questionnaire standardisé en

vue de récolter les pratiques en cours dans leur secteur professionnel, nous leur

avons délibérément laissé une quasi11 totale liberté d’échanges et d’expression afin

d’orienter voire biaiser le moins possible le contenu de leurs interventions. Notre

souhait lors de ces séminaires était de favoriser les échanges spontanés (les thèmes

récurrents débattus dans chacune des régions reflétant à notre sens une certaine

priorité accordée par chaque groupe au regard de leurs réalités de terrain

respectives). La spontanéité de ces échanges ajoute toutefois une difficulté dans

l’organisation des informations recueillies, c’est pourquoi nous décidons ci-après de

caractériser en préambule chaque séminaire par une phrase traduisant le plus

fidèlement possible la tendance principale de réflexion qui aura pu s’en dégager.

11

Liberté restreinte cependant par nos interventions en vue de gérer les temps de paroles

L’accompagnement des aînés en perte d’autonomie : Regards critiques et pistes de réflexion sur les bonnes pratiques

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22

4.1 Profil des participants

4.1.1 Séminaire de Mons

« Pour une meilleure formation des professionnels dans les aides à domicile comme

en institution »

Le séminaire de Mons rassemblait 7 participantes. Parmi celles-ci 3 ergothérapeutes

(2 en MR/MRS, 1 de la CSD12), 2 coordinatrices de centres de coordination des

soins et de l’aide à domicile (ASD13 et CSD), 1 logopède en MR/MRS et enfin 1

secrétaire.

4.1.2 Séminaire de Tournai

« Pour davantage de ressources en matière de personnel et une plus grande

implication des familles »

Le séminaire de Tournai rassemblait 11 participantes. Parmi celles-ci 6 aides-

soignantes en MR/MRS, 1 coordinatrice CMDPA14, 1 assistante-sociale (MR/MRS),

et enfin 2 animatrices (1 en MR/MRS, l’autre pour l’UCP)

4.1.3 Séminaire de Namur

« Pour un questionnement sur les valeurs et les moyens de les concrétiser »

Le séminaire de Namur rassemblait 11 participants. Parmi ceux-ci 3 directeurs de

MR/MRS, 1 aide soignante, 1 co-fondatrice d’une asbl spécialisée dans le

vieillissement, 2 coordinatrices CSD, 2 membres du service d’accompagnement à la

vie quotidienne (CPAS), 1 membre du service social de la mutualité chrétienne et

enfin un chargé de projets FNAMS15

12

CSD (Centrale de Services à Domicile de la mutualité solidaris) 13

ASD (Aides et Soins à Domicile de la mutualité chrétienne) 14

CMDPA (Coordination pour le Maintien à Domicile dans le Pays de Ath) 15

FNAMS (Fédération Nationale des Associations Médico Sociales)

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23

4.2 Contenu des séminaires

Les informations regroupées lors des 3 séminaires pouvaient être réparties en 8

catégories :

1. L’accompagnement des familles/aidants

2. Accueil et accompagnement en institution

3. Activités et animations

4. Repères

5. Accompagnement en fin de vie

6. Formation et accompagnement du personnel soignant/paramédical

7. Constats d’actualité

8. Quelques pratiques recensées

Pour chaque catégorie nous énumérerons les données récoltées telles qu’elles ont

été formulées sous forme de points. La suite de ce chapitre sera alors suivie d’une

discussion de ces données. Nous tenterons d’en dégager des pistes de réflexion et

de mener un questionnement critique quant à la notion de « bonne pratique » en tant

que telle.

4.2.1 Accompagnement des familles/aidants

Le fait de garder une certaine autonomie ainsi qu’un pouvoir de décision lorsque la

dépendance s’installe est quelques fois difficile à faire admettre à la famille. Il est

donc important d’accompagner les familles et de les familiariser à la problématique

des démences ou même du vieillissement quand il y a dépendance dans ces

situations éprouvantes.

Dans notre société actuelle, phénomène de la « génération sandwich » qui

s’occupe à la fois des petits enfants et des parents. De ce fait, les familles sont de

moins en moins disponibles pour s’occuper à temps plein d’un parent dépendant.

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Constat que le passage du domicile vers la maison de repos est un sujet

particulièrement pénible à aborder en famille. Il s’agit d’une décision difficile à

prendre qui nécessite beaucoup de dialogues là où souvent le silence s’installe

par culpabilité. Pourtant lorsque le sujet est abordé à l’avance avec la personne

âgée, le contexte est alors ressenti comme plus respectueux et l’entrée en

institution s’avère plus facile et rapide.

Pour soulager les aidants, un centre d’accueil de jour peut s’avérer une solution

très rassurante. Il est toutefois nécessaire que ce centre soit bien tenu avec du

personnel attitré

Importance de sensibiliser les familles sur le besoin des personnes âgées lors de

leur retour à domicile. Les familles doivent s’impliquer dans cette étape.

Importance d’expliquer aux familles certains comportements de leur proche (par

exemple expliquer pourquoi on laisse un résident atteint d’une démence manger

avec ses doigts).

Importance d’impliquer les familles Les familles doivent prendre leurs rôles,

s’investir et être là pour le parent..

Présentation du projet HESTIA16 : Améliorer la qualité de vie sociale des

personnes isolées à domicile tout en permettant aux aidants proches de s’offrir

des moments de répit ; offrir un service complémentaire à celui des professionnels

du secteur de l’aide et du soutien à domicile.

Initiative intéressante : les groupes de parole et d’entraide d’aidants proches

organisés par Espace Seniors, association partenaire de La Mutualité Solidaris

4.2.2 Accueil et accompagnement en institution

Aménager les chambres avec quelques objets un peu avant l’entrée de la

personne (après déménagement) afin de rassurer la personne.

16

Une initiative proposée par la Croix Rouge de Belgique

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Il est important de rechercher les raisons de certains comportements semblant

inappropriés chez les personnes en perte d’autonomie voire désorientées. En effet,

si un résident apparaît violent lorsqu’une infirmière entre dans la chambre le matin,

peut-être est-ce parce que l’infirmière est entrée brusquement en allumant la

lampe plutôt qu’en entrant calmement pour ouvrir doucement les tentures. Chaque

action (bonne ou mauvaise) du personnel entraînera une réaction (plus ou moins

forte) du résident.

Une aide-soignante constate que la mise en place de la tablette diminue

l’autonomie de la personne. En effet, quelques semaines après la mise en place

de cette mesure, la personne âgée ne marche plus.

Le contexte social et architectural influence les comportements. Il y a tout Intérêt à

privilégier de petites structures ainsi qu’un aménagement réfléchi de l’espace. Par

exemple, prévoir des espaces de déambulation sécurisés et agréables pour les

personnes présentant des comportements d’errance. Cela leur permettra d’errer

calmement sans chercher à tout prix une porte de sortie.

4.2.3 Activités et animations

Dans certaines institutions par exemple, le personnel organisera des activités lors

desquelles les résidents auront la possibilité de faire des achats (encourager la

gestion, l’autonomie et le pouvoir de décision). De même, le personnel permettra

aux résidents de choisir leur tenue chaque jour. Il s’agit là de petits gestes, de

petites initiatives qui pourtant peuvent avoir un impact très important sur l’estime

de soi des résidents.

Le Snoezelen : un concept fort à la mode. Pour certains il s’agira d’un espace

adapté au public avec de vieux objets autrefois connus et des textures diverses

pour stimuler la mémoire affective et les sens. Une fois que le résident quittera le

local Snoezelen, il se retrouvera à nouveau dans un environnement hospitalier.

Pour d’autres il s’agira en plus de cet espace, d’une réelle philosophie de vie qui

devra être mise en pratique au jour le jour.

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Les ateliers de réminiscence (également à la mode) sont peu pratiqués (étude

d’IHW en 2011 par De Coster) car ils demandent de mobiliser beaucoup de

personnel pour pratiquer avec de petits groupes (activités plus individuelles).

Aussi, si cette pratique peut apporter un apaisement pour certaines personnes, il

s’agit toutefois d’un « plus » et non d’une condition indispensable au bien-être des

résidents.

De manière générale, le personnel des établissements semble constater une

faible participation aux activités proposées. Certains résidents préfèrent par

exemple passer du temps à tricoter plutôt que de participer aux activités proposées

par l’établissement. Trop souvent en effet, le terme « animation » ferait référence à

des techniques qui parfois peuvent être complètement dénuées de sens pour les

résidents. L’échange permet donc de mettre en évidence l’importance de

s’intéresser au vécu de la personne, à son parcours de vie, ses intérêts réels dès

l’entrée dans la maison de repos (cela apparaît maladroit d’inciter une personne à

participer à une activité de jardinage si celle-ci n’a aucun intérêt pour les plantes et

est passionnée de mathématiques).

Quelques idées d’animations suggérées

Proposition de découvrir une région via un film (monde, pays) et organisation

ensuite d’un repas sur le thème de cette région.

Initiation à internet et utilisation de la Wii17. Réalisation d’un calendrier personnalisé (le calendrier est sur un support en bois à

décorer selon ses goûts). Cette activité en plus d’occuper et stimuler les résidents,

leur offrira un repère temporel supplémentaire.

Présentation du Clown de Tournai qui sillonne les maisons de repos et fait appel

aux sens primaires et sentiments enfouis chez les personnes avec qui il vit

l’échange.

17

La Wii est un jeu vidéo interactif utilisé de plus en plus en kinésithérapie ou en ergothérapie.

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27

4.2.4 Repères

Les repères en institutions : Qu’ils soient spatiaux ou temporels, il est avant tout

important qu’ils soient personnalisés et aient du sens pour le résident :

- Aménager les chambres avec autant d’objets et de petits mobiliers possibles

du domicile et ce, de préférence un peu avant l’installation de la personne

dans la maison de repos afin de la rassurer.

- Un résident désorienté retrouvera plus facilement sa chambre si la porte est

décorée d’un objet déjà présent autrefois sur la porte de la maison de la

personne. De même, il est préférable de mettre sur les portes des photos des

résidents autrefois plutôt que des photos actuelles ou certaines personnes

désorientées risquent de ne pas se reconnaître. En continuité, il faudra aider

le résident à réinvestir son corps (accorder de l’importance à l’esthétisme

(accord des vêtements voire maquillage pour les dames qui avaient l’habitude

de sortir maquillées)…

- Réaliser lors d’une activité un « calendrier » que le résident décorera selon

ses propres goûts et envies.

- Dans une maison de repos sur Tournai, 3 membres du personnel sont «

référents » / « parrains » pour chaque résident. Cela permet à chaque résident

d’avoir une personne de contact dans le personnel (et ainsi une relation

privilégiée et personnalisée) qui peut intervenir en tant qu’intermédiaire (avec

le reste du personnel ou les familles).

Une façon moins personnalisée d’offrir un repère temporel aux résidents mais qui

peut néanmoins s’avérer très utile est, dans le cadre de l’affichage accessible à tous

et obligatoire des menus de la semaine, de barrer les jours passés au fur et à

mesure.

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Une maison de repos de la Province de Namur propose des repères temporels

(horloge, calendrier, menu) en format A4. La déco est également basée sur l’actualité

et sur les saisons.

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4.2.5 Accompagnement en fin de vie

En cas de décès, possibilité pour les familles mais également pour le personnel de

rencontrer un(e) psychologue.

Le personnel n’est pas assez nombreux pour appliquer telle quelle la philosophie

des soins palliatifs. Faudrait-il également engager des gens mieux formés ?

Souci de ne pas forcer les personnes à boire, à se laver et de privilégier à la

place des soins de confort lorsque l’issue est irrémédiable pour accompagner en

douceur la personne en fin de vie.

Utilisation d’une échelle d’observation comportementale des douleurs (type

Doloplus). En effet la prise en charge palliative peut présenter quelques

particularités liées au déficit cognitif. Par exemple, la douleur physique posera la

question complexe de son évaluation chez les personnes démentes dont la

sensibilité à la douleur est normale, même si elles ne l’expriment pas toujours de

façon habituelle. Plusieurs études ont d’ailleurs mis en évidence que, à pathologies

égales, les personnes atteintes de troubles cognitifs recevaient moins

d’antalgiques que celles qui n’en présentent pas. Il faut donc toujours interroger

directement le malade sur l’existence éventuelle d’une douleur. Toutefois, à un

stade avancé, les échelles d’autoévaluation de la douleur ne seront plus

utilisables. Dans ce cas alors, les échelles d’observation comportementale

pourront constituer une bonne alternative

Il serait utile de rédiger un document dès l’entrée en maison de repos pour savoir

ce que l’on souhaite en fin de vie. (Une déclaration anticipée d’euthanasie est-elle

abordée avec la personne concernée et la famille?, quels tabous peuvent encore

persister quant à l’euthanasie, l’aborder renvoie certes à l’idée de la mort mais

l’éviter n’est-ce pas nier le droit qu’a chaque individu de vivre et mourir selon ses

volontés? Le débat semble rester aujourd’hui encore délicat) ;

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30

4.2.6 Formations et accompagnement du personnel soignant/paramédical

Dans l’institution

un écueil non négligeable est la dissociation entre le personnel soignant

(infirmiers…) qui pose des actes médicaux relevant du « savoir-faire », et le

personnel paramédical (animateur, ergothérapeute18…) qui privilégie la relation

humaine et un accompagnement en termes de « savoir-être ». L’institution serait

encore trop souvent synonyme de lieu où l’on attribue des soins. Or, la formation

du personnel doit également s’adapter aux aspects relationnels. En effet, la qualité

de l’accompagnement par le personnel soignant ne serait pas forcément en lien

avec l’ancienneté dans l’institution/la profession. Il y aurait même d’après les

participantes un phénomène de groupe qui influencerait le comportement du

personnel (lorsque les mêmes plaintes, mêmes situations, mêmes réponses aux

problèmes se répètent jour après jour, il est difficile de modifier ses attitudes par la

suite même s’il existe des réunions pluridisciplinaires internes à l’établissement.

L’intérêt d’un séminaire comme celui-ci serait donc de permettre aux

professionnels d’un même établissement de confronter leurs pratiques avec celles

d’un autre et de porter un regard plus critique par après sur la manière d’exercer le

métier. Il existerait donc « un monde de différence » entre les univers médical et

paramédical en MR/MRS.

Manque de moyens pour mettre en place l’idéal. Le personnel suit beaucoup de

formations mais il ne sait les mettre en œuvre (faute de temps). Manque de

moyens pour mettre en place l’idéal.

Vigilance de la part des professionnels lorsqu'ils posent un diagnostic car lorsque

celui-ci est posé, l'étiquette reste à vie.

Au domicile

18

Métier encore trop peu connu d’après les participants au séminaire de Mons

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31

A domicile, le manque de formation des professionnels représenterait également

un obstacle à un accompagnement de qualité. Par exemple, lorsqu’une personne

âgée refuse de voir l’aide-familial qui vient préparer le repas, il arrive souvent que

cette dernière manque de « subterfuges » qui permettraient de pallier aux refus ou

aux autres problèmes rencontrés. Une comparaison est également faite entre le

rôle de l’aide-familial au domicile et l’ergothérapeute en institution : ces deux

professions privilégieront le relationnel.

Si certaines formations sont proposées aux professionnels (comme la formation

sTimul19 , nombreux étaient les participants aux séminaires à déplorer un manque

d’effectif (en termes de personnel) et par là un manque de temps pour participer aux

formations mais également, lorsque le personnel a la possibilité d’y participer, le

manque de temps pour appliquer sur le terrain et au quotidien les « bonnes

pratiques » apprises.

19 La formation « sTimul19 » propose aux soignants de prendre la place des soignés pendant 2 jours (nuits comprises). Ils sont alors pris en charge par des étudiants qui joueront le rôle des soignants. Quelques jours avant le début de la formation, chaque membre du personnel choisi un « handicap » qu’il va devoir s’approprier tout au long de son séjour, comme par exemple la désorientation (telle qu’elle pourrait se manifester dans la maladie d’Alzheimer). L’objectif de cette formation est ainsi de favoriser la réflexion éthique par le biais de la stimulation. Cela permet aux membres du personnel de prendre conscience du mal-être de la personne désorientée et de répondre en connaissance de cause à ses besoins. (Formation qui s’est donnée entre autres dans une maison de repos de la région de Tournai) (Infor Homes Wallonie, 2011)

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4.2.7 Constats d’actualité

Un nouveau phénomène s’observant de plus en plus régulièrement serait le retour

de la maison de repos vers le domicile. En cause prioritairement les frais

engendrés par une institutionnalisation qui sont lourds à assumer pour les

personnes à petits revenus.

Dans le quotidien des professionnels, il est très rare voire inexistant d’avoir des

échanges pluridisciplinaires avec des professionnels d’autres institutions. Les

participantes du secteur du domicile comme des institutions sont donc ravies de

l’initiative d’IHW d’organiser de tels séminaires.

De plus en plus l’on peut entendre qu’il est important de préparer son avancée

dans l’âge. Le public semble pourtant conscient de cette nécessité mais ce n’est

pas pour autant que les gens l’appliquent à eux-mêmes ou à leurs proches. Pour

un participant, il ne serait tout simplement pas possible de faire prendre

conscience aux autres de la nécessité de préparer son entrée dans l’âge et ce,

parce que nous ne sommes pas (ou ne nous sentons pas) vieux nous-mêmes.

La concurrence dans le secteur des maisons de repos pourrait-elle redynamiser le

milieu et améliorer la qualité des services et de l’accompagnement ? En effet, dans

un contexte où la demande est inexorablement plus importante que l’offre, la

motivation et l’énergie à produire de la qualité en institution restent-elles encore

des priorités pour certaines directions ?

Critique de certaines pratiques telles que l’l’Humanitude®20 ou encore la

Validation®21 comme techniques dictant « comment faire ».

Remise en question de la notion de « pratique innovante ». En effet, dans le cadre

d’un placement en institution, la question ne serait-elle pas plutôt « comment être

20

Pour plus d’informations sur l’Humanitude®, consulter le lien suivant : http://www.igm-formation.net/ 21

Pour plus d’informations sur la Validation®, consulter le lien suivant : http://users.swing.be/apvapa/presse/seniorplanet01.pdf

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innovant avant que la personne ne rentre en maison de repos? » De plus, selon le

directeur d’une maison de repos proposant un projet peu classique,

l’« ’innovation » doit amener à préserver la dignité.

Les cantous plus que des « bonnes pratiques » en soi, ils constituent un accueil

tendant à être le plus adapté possible aux personnes désorientées. Ce sont donc

des lieux sécurisés qui, s’ils présentent certains avantages (atmosphère familiale,

petites structures, encadrement spécialisé…) peuvent à la fois entraîner certains

effets « pervers » comme le fait de devoir intégrer une unité MRS (avec la perte

brutale des repères qui s’en suivra) lorsque l’on n’est plus capable de participer

aux actes de la vie quotidienne, le fait de vivre en quelques sortes en « autarcie »

de par l’aspect sécuritaire (portes extérieures verrouillées…) mais également le fait

d’accueillir exclusivement des personnes âgées désorientées entraînant un effet

« Ghetto » avec la difficulté pour les familles qui observent les autres résidents de

l’unité, d’admettre la similitude de l’état de santé de leur parent (craignant alors

une dégradation plus rapide de l’état de santé de ce dernier).

Nécessité impérative de se questionner en permanence sur ses propres valeurs

dans un contexte de production de qualité lorsque l’on travaille avec et pour

d’autres êtres humains. Définir ses valeurs et la manière dont nous voulons les

concrétiser au quotidien constitue la première « bonne démarche » pour rendre les

pratiques « bonnes ». Encourager les gens à raisonner sur les moyens

d’accompagnement de la personne en perte d’autonomie et remettre régulièrement

les actes posés en question.

4.2.8 Quelques pratiques recensées

« Trucs et astuces » Discuter par le biais de messages inscrits sur de petits tableaux ou ardoises

lorsque les personnes présentent des problèmes d’ouïe empêchant un mode de

communication classique.

L’accompagnement des aînés en perte d’autonomie : Regards critiques et pistes de réflexion sur les bonnes pratiques

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34

Proposer une feuille "trucs et astuces" à compléter au fil du temps par le

personnel. Cette feuille comprendrait diverses constatations autant avec les

personnes désorientées qu’avec le reste des résidents, elle proposerait certaines

réponses simples mais efficaces à des situations parfois complexes à gérer et

faciliterait ainsi le travail au quotidien.

« Prêt-à-porter »

Le bracelet émetteur et la télé vigilance. En cas de chute, un signale est transmis

au personnel.

Le robot compagnon22. Une nouveauté dans le secteur (qui peut être critiquée

avec virulence). Ce robot parle, répond aux questions qui lui sont posées, affiche

des mimiques humaines et pourrait, selon ses créateurs, pallier à la solitude d’un

bon nombre de personnes âgées.

Projets de vie Etablissement de la région namuroise se voulant être une « Maison de vies » et non

une maison de repos. Le personnel porte des vêtements de couleurs (ils peuvent

choisir entre différentes couleurs de polo) qui n’ont pas de rapport avec leur fonction.

Les organisations se développent autour des résidents. Le personnel vient s'occuper

du résident lorsqu'il se réveille. La maison les accompagne dans leurs choix et dans

leurs prises de risques. Les résidents désorientés et non désorientés vivent

ensemble. Les résidents prennent et vivent leurs risques (chutes, égarement dans

les bois, etc.).

4.3 Discussion

L’objectif initial des séminaires s’inscrivait dans un souci de recenser les bonnes et

innovantes pratiques ayant cours en Wallonie (et plus particulièrement dans les

régions de Mons, Tournai et Namur) un peu à la manière d’un guide des pratiques

22

Pour plus d’informations concernant le robot compagnon, consulter les liens suivant : http://www.gerontechnologie.net/les-robots-de-compagnie-pour-personnes-agees http://www.clubic.com/robotique/actualite-497204-emox-robot-compagnie-futur.html

L’accompagnement des aînés en perte d’autonomie : Regards critiques et pistes de réflexion sur les bonnes pratiques

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pertinentes face à de nombreuses et variées situations problématiques. La poursuite

du travail nous a cependant amenés, au fil des séminaires, à rejeter quelconque

projet se voulant de dresser un inventaire des « bonnes pratiques » proposant une

solution à tout problème (quel que soit le contexte, quelle que soit la personne).

Nous allons nous en expliquer.

Il faut admettre que les 3 séminaires réalisés successivement à Mons, Tournai et

Namur, plus que de mettre en évidence les bonnes et innovantes pratiques ont

davantage permis de s’interroger quant aux difficultés et limites dans la mise en

place de ces pratiques (qu’il s’agisse d’une remise en question des horaires de

travail, du manque de personnel ou encore de limites dans la formation du

personnel…)

Les informations récoltées23 ont en effet tantôt mis en avant une série de petits trucs

et astuces que l’on pourrait qualifier de « faits maisons » (trompe l’œil aux portes, fils

en travers des entrées de chambres pour éviter les fugues etc…), tantôt présenté

des solutions que nous qualifierons ici de « prêtes à porter » (bracelets

électroniques, contention… Mais ce travail nous aura également offert l’opportunité

d’élever notre réflexion aux principes de valeurs ainsi qu’au respect des

individualités. Nous avons eu l’occasion de rencontrer de nombreux professionnels

du secteur qui invitaient tout un chacun à se questionner et à questionner les

pratiques établies en vue d’une production intelligente de qualité. Ils encouragent en

tant que responsables d’établissements, formateurs, personnel médical où encore

paramédical à réfléchir sur les valeurs ainsi qu’à la façon dont il est possible de les

concrétiser au quotidien.

Aspects pratiques

Peu de participants présents pour chaque séminaire (une dizaine dans chaque

région). Cela reflète donc de manière peu fiable la réalité de terrain sur l’ensemble

du territoire Wallon. L’issue de ces 3 séminaires nous amène donc plus à

23

Non seulement lors des séminaires mais aussi en 2011 au cours de la première étude d’Arnaud De Coster portant sur l’accueil des personnes désorientées.

L’accompagnement des aînés en perte d’autonomie : Regards critiques et pistes de réflexion sur les bonnes pratiques

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considérer les informations rapportées en termes de pistes de réflexion qu’en

terme d’ « état des lieux ».

Nous remettons en question le caractère peut-être trop équivoque de la

formulation des objectifs des séminaires auprès des participants. Constat fut établi

lors des rencontres que les professionnels présents étaient dans l’attente que nous

leur présentions les bonnes pratiques innovantes qui pourraient solutionner tant de

problèmes auxquels ils se confrontent chaque jour. Pour notre part, le but était

bien différent : susciter les échanges et la réflexion, amener les participants à nous

relayer les bonnes/mauvaises pratiques dont ils sont témoins dans leur métier.

5 Pistes de réflexions et regards critiques Comme nous l’avons présenté en tête de chaque séminaire, 3 pistes de réflexion

peuvent être dégagées sans grande surprise de ces rencontres :

Une première souligne le manque de personnel effectif que ce soit dans les services

à domicile ou en institution et par là, les difficultés dans la concrétisation des bonnes

pratiques suggérées lors de formations. Les variables influençant ce constat

(davantage d’ordres politique et éducationnel) constituent à elles seules un sujet

d’étude, nous décidons de ne pas les aborder ici.

Une seconde piste renvoie quant à elle au manque de préparation des aidants

proches ainsi qu’au manque de formation du personnel. Un article publié en 2011

dans le magazine « Psychologie » met en évidence que 70% des personnes

atteintes de démence vivent à leur domicile (ou celui d’un proche) grâce à la

présence quotidienne d’un aidant proche. C’est pourquoi, le Dr Bier (neurologue à

l’hôpital Erasme), explique lors d’une interview dans ce même article « qu’il est

primordial de leur offrir (aidants proches) non seulement un soutien, mais aussi une

réelle formation pour leur permettre à la fois de comprendre la maladie, les

comportements parfois déroutants qu’elle peut occasionner mais aussi d’apprendre

des stratégies pour y faire face et des techniques pour contrôler leur propre stress

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sans s’épuiser ou tomber dans le désespoir ». Le Dr Bier a ainsi établi avec son

équipe un programme de « psycho-éducation » où sont autant abordés les troubles

cognitifs que comportementaux. Ce programme proposera entre autres des jeux de

rôles qui permettront à l’accompagnant de se mettre en situation pour anticiper un

problème ou encore se mettre à la place du malade (un malade persuadé qu’il voit

un proche vivant alors que celui-ci est décédé pourrait susciter de l’agacement chez

l’aidant. Or « comprendre toute la détresse qu’une telle idée peut apporter à la

personne (désorientée) permettra d’aborder la situation avec compréhension et

empathie »). De telles approches exerceront incontestablement (plus que les

médicaments) un effet positif sur la qualité de vie de la personne souffrant de

démence et sur celle de son entourage.

En parallèle, il apparaît indispensable de former le personnel des aides à domicile

comme des maisons de repos à un accompagnement adéquat des résidents

dépendants et plus précisément désorientés. Valentine Charlot et Caroline Guffens

(2011), co-fondatrices de l’asbl Le Bien Vieillir donnent de nombreuses formations à

l’attention des professionnels : « Par exemple, une explication même très simple sur

le fonctionnement de la mémoire permet aux soignants (et familles) de comprendre

pourquoi le malade pose tout le temps la même question. Or comprendre fait qu’on

ne s’exaspère plus – ou moins vite –, qu’on ne perd plus du temps à raisonner mille

fois la personne et qu’on arrive à lui répondre de manière à calmer son incessant

questionnement. C’est valorisant et cela contribue à lutter contre l’épuisement du

personnel». Cette approche s’applique d’ailleurs à l’ensemble du personnel et non

pas seulement aux soignants et paramédicaux : « La femme d’ouvrage qui range la

chambre d’un malade à sa façon ne se rend pas toujours compte de l’anxiété que

cela peut provoquer chez la personne désorientée » de même que « le travail avec

les kinés permet de les sensibiliser à l’importance d’encourager la marche ou

simplement la posture ‘debout’. Il faut alors lutter contre les craintes des familles qui

disent ‘s’il marche il va tomber’ à quoi nous répondons ‘s’il ne marche plus, il va

perdre toutes ses forces et péricliter plus vite’. C’est toute une mentalité à faire

évoluer ». Charlot (2011) ajoute que dans les maisons de repos, les comportements

posant « problème » sont surtout ceux identifiés comme agressifs. Toutefois il est

prouvé que du personnel correctement formé à l’accompagnement travaillera dans

L’accompagnement des aînés en perte d’autonomie : Regards critiques et pistes de réflexion sur les bonnes pratiques

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un plus grand respect de la personne et obtiendra moins de comportements

problématiques : « Une agitation, un comportement agressif sont souvent le résultat

d’une anxiété inexprimable par la personne. Tenter d’en comprendre la raison même

si cela prend du temps, est toujours plus profitable que d’avoir recours à la

contention ».

La troisième piste (et celle que nous développerons essentiellement en conclusion

de ce travail) attire l’attention sur les bonnes pratiques en tant que réponses relevant

davantage du « savoir-être » et de la présence à l’autre (Charlot et Guffens, 2007) et

ce au-delà des pratiques relevant spécifiquement de l’ordre médical ou relevant

d’actes infirmiers.

Enfin, plus que de dégager des pistes de réflexion, ces séminaires nous ont

notamment amenés à considérer avec prudence certaines « pratiques » dites « à la

mode ». Nous pensons par exemple ici à la pratique du Snoezelen abordée lors des

séminaires mais également aux stimulations cognitives qui ont suscité un réel

engouement tant auprès du grand public que d’une grande partie des professionnels.

Il est vrai que le Snoezelen est devenu une intervention communément appliquée

pour faciliter la gestion de comportements inadaptés et pour promouvoir un état

d’esprit positif chez des personnes âgées souffrant de démence. Cette pratique

consiste en effet à stimuler les sens primaires (vue, ouïe, toucher, goût et odorat) en

utilisant des effets de lumière, des textures particulières, de la musicothérapie ou

encore de l’aromathérapie. Ce raisonnement repose sur la proposition que créer un

environnement sensoriel pour des personnes démentes engage une faible demande

sur leurs habiletés intellectuelles mais se concentre essentiellement sur leurs

habiletés sensori-motrices résiduelles. Ce nouveau marché n’est cependant pas

encore très sérieusement balisé et il n’existe pas de données scientifiques prouvant

l’efficacité des nouvelles approches24 telles que le Snoezelen mais également de

l’Humanitude® et de la Validation® (Rondia, 2011). En effet, déjà en 2002 une revue

24

L’humanitude et la Validation sont d’ailleurs des marques déposées. Pour plus d’informations sur ces pratiques que nous n’aborderons pas ici, consultez :

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de littérature réalisée par Chung et Lai montrait que l’application clinique du

Snoezelen variait souvent dans la forme, la nature, les principes ainsi que les

procédures. Plus récemment, la précédente recherche exploratoire réalisée par IHW

en 2011 mettait en évidence des utilisations variées du Snoezelen : certains

établissements en Wallonie possédaient une pièce exclusivement réservée à cette

pratique, d’autres proposaient du « Snoezelen itinérant » via un « chariot

snoezelen » qu’il était possible de déplacer de chambre en chambre). De telles

variations ne rendent donc pas seulement difficile l’examination de la valeur

thérapeutique du Snoezelen, mais empêchent également le développement clinique

du Snoezelen dans l’accompagnement des personnes désorientées. (Chung & Lai,

2002).

Si ces données nous amènent à poser un regard prudent mais aussi critique sur les

« nouvelles pratiques à la mode », cela ne signifie pas que ces traitements soient

inefficaces, ils peuvent au contraire avoir leur intérêt car lorsqu’ils sont utilisés dans

le cadre des valeurs définies par Guffens et Charlot (2007) (à savoir autonomie,

liberté, sécurité, individualisation, continuité, considération, tolérance et empathie),

ces traitements peuvent alors « entraîner dans leur sillage un renversement du

regard porté par les ‘bien portants’, professionnels, proches, voisins, etc. sur ceux qui

souffrent de démence. Ils favorisent un regard doux qui s’intéresse ‘à ce qui va

autant qu’à ce qui ne fonctionne plus comme avant ou à ce qui a disparu. Ils

favorisent l’entrée dans le monde de l’autre plutôt que la pose de lunettes

réductrices, ils forcent au respect de l’humain et rendent l’accompagnement plus

serein. » Toutefois, il demeure important de considérer que ces techniques à la mode

nécessitent encore de nombreuses études scientifiques avant de pouvoir en tirer des

conclusions (Chung & Lai, 2002 ; Guffens & Charlot, 2007 ; KCE25, 2011 ;), qu’il faut

souligner le manque de formation à leur égard (certaines font l’objet de programmes

de formation reconnus26, d’autres sont parfois appliquées par des personnes non

formées qui, pleines de bonne volonté, pensent agir dans l’intérêt du malade sans se

rendre compte des effets néfastes qu’un manque de connaissances peut entraîner

25

KCE : Centre Fédéral d’Expertise des Soins de Santé. Rapport 160B consultable en ligne : https://kce.fgov.be/sites/default/files/page_documents/kce_160b_demence.pdf 26

Maîtrise en psychologie, logopédie, kinésithérapie, baccalauréat en ergothérapie…)

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ou sans évaluer les conséquences – d’où l’importance d’accentuer les efforts de

formation – ) (Guffens & Charlot, 2007) et également qu’il faut éviter de considérer

ces pratiques comme convenant à tous et apportant des solutions universelles : « Le

plus important reste d’observer le malade, de s’interroger sur le sens de son

comportement. On doit toujours se poser la question du pourquoi. Il n’y a pas

toujours de réponse mais cela permet au moins d’envisager l’autre comme une

personne à part entière. » (Charlot, 2011)27

Le deuxième aspect (encore une fois fort à la mode) que nous souhaitons aborder ici

est celui des « stimulations cognitives28 » le plus souvent pratiquées via les

« ateliers-mémoire » et autres exercices de « musculation » pour neurones

défaillants. Ces interventions sont celles qui parmi les approches non

médicamenteuses, ont donné lieu aux évaluations les plus nombreuses et ont ainsi

montré une « perte de faveur » progressive entre autres en raison d’une application

clinique jugée comme trop rigide (Spector et al., 2007 cités par Dorenlot, 2006). En

effet, bon nombre d’interventions standardisées visant l’amélioration de certaines

fonctions cognitives (mémoire, attention…) par la répétition d’exercices dépouillés de

contexte, ne tiennent pas compte de l’hétérogénéité des déficits cognitifs d’une

personne à l’autre, de l’individualité de ses besoins ou encore de ses centres

d’intérêts. Le risque étant que l’individu, réduit à un état de « récepteur passif » dans

un contexte imposé de « confrontation à la réalité », intègre l’intervention comme une

mise en échec répétée (Woodrow, 1998 cité par Dorenlot, 2006 ). De plus, Clare

(2004, cité par Dorenlot, 2006) souligne que les effets positifs obtenus lors d’une

séance de stimulation cognitive ne sont pas forcément transférables dans le

quotidien et n’impliquent donc pas nécessairement une amélioration significative du

point de vue clinique. Adam (2011)29 soutient ce point de vue et explique que l’on

assiste aujourd’hui à une véritable récupération commerciale du concept de

« stimulation cognitive ». L’on entend en effet souvent qu’il faut exercer sa mémoire

(et autres fonctions) pour les tenir préservées le plus longtemps possible et pour

27

Entretien paru dans l’article de Rondia, K. du magazine « Equilibre », septembre 28

Les stimulations cognitives visent une stabilisation, voire une amélioration de certaines fonctions cognitives, en particulier de la mémoire et de l’orientation spatio-temporelle, par un entraînement et des sollicitations répétées, ainsi que l’acquisition de nouvelles stratégies cognitives (Dorenlot, 2006). 29

Entretien paru dans l’article de Rondia, K. du magazine « Equilibre », septembre

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diminuer le risque de manifester les symptômes d’une démence voire de les diminuer

lorsqu’ils sont déjà présents. Les malades sont alors soumis à des séances de jeux

de mémorisation, de résolutions de problèmes : « on leur propose des grilles de

sudoku, sans parler de tous ces logiciels qui promettent de gagner des points aux

tests de mémoire. Cela se base sur une vision simpliste de notre cerveau. On peut

transformer les malades en champions de sudoku, ils continueront à perdre le

chemin pour retourner dans leur chambre ! » Adam (entretien paru dans l’article de

Rondia, K. du magazine « Equilibre », septembre 2011) reconnaît que parfois ces

entraînements permettront de récupérer l’un ou l’autre point au MMS30 mais que cela

ne se traduira malheureusement par aucune amélioration de la qualité de vie. Et de

rejoindre Woodrow (1998, cité par Dorenlot, 2006) en ajoutant qu’ « en exhortant

sans cesse ces personnes à faire des exercices répétitifs et dénués d’intérêt, on les

confronte à leur déclin cognitif, on les focalise sur leurs symptômes déficitaires […]

lutter contre la maladie (et de manière plus générale, contre les déficits cognitifs),

c’est bien plus vaste (et complexe) qu’améliorer un score de mémoire ! »

Ces constats invitent donc à questionner, non pas le bien fondé des techniques de

stimulations cognitives, mais bien la manière dont elles sont appliquées. En effet,

appliquées de manière adaptée à chaque patient celles-ci peuvent alors présenter un

intérêt non négligeable. Il est ainsi suggéré que les éléments visant au soutien de

certaines fonctions cognitives soient proposés en faisant appel aux émotions qu’ils

suscitent chez chaque individu. Plus précisément, il est important de sélectionner des

tâches choisies par la personne (et non des tâches imposées par du personnel

pourtant plein de bonne volonté et ce, en fonction de leurs propres centres d’intérêts

– qu’il s’agisse de tricot ou d’une visite d’un musée – et en travaillant avec eux non

pas à récupérer leur mémoire mais plutôt à consolider leurs capacités préservées et

leurs automatismes qui restent conservés étonnamment longtemps malgré la

progression d’une maladie cérébrale dégénérative. Si nous abordons ici la question

des stimulations cognitives dans le cadre des démences, nous tenons toutefois à

préciser que le fait de proposer des activités (destinées à stimuler les neurones) à

des personnes âgées en perte d’autonomie, qu’elles soient maintenues au domicile

30

MMS : Mini Mental State Evaluation, un test de référence en matière d’évaluation globale des fonctions cognitives.

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ou pas, désorientées ou pas, doit s’inscrire dans une recherche du plaisir via ce qui

donne du sens à l’autre, et non dans une seule optique d’entraînement cérébral au

cours d’activités dénuées d’intérêt pour le participant (nous pensons à nouveau à

l’exemple de l’activité de jardinage proposée à quelqu’un qui n’a jamais apprécié le

travail de la terre). Ce qui compte n’est au final pas de gagner des points aux tests

cognitifs, mais de consolider des activités qui améliorent vraiment la qualité de vie.

6 Trois projets institutionnels innovants, en Wallonie et ailleurs

Nous présentons ici 3 projets institutionnels « sortant des sentiers battus » et

constituant une alternative à la conception traditionnelle de l’accompagnement et des

services. Les 2 premiers projets sont rendus anonymes31 délibérément car ils se

tiennent en Wallonie et nous nous voulons ici de soutenir une philosophie

d’accompagnement et non de promouvoir un « nom » quelconque. Le troisième

projet n’est quant à lui pas rendu anonyme car est développé au-delà de nos

frontières, au Canada.

6.1 Projet de « maison intergénérationnelle »

Autrefois, avant de devenir une maison de repos, cet établissement était une

institution accueillant 90 enfants de 0 à 14 ans. Suite à une décision politique en

1990, l'institution s’est vue supprimer la tranche d'âge des 7-14ans. Il ne restait plus

que 25 enfants, ce qui n'était plus viable pour cette organisation. De nouveaux

projets ont alors été proposés et c'est celui de faire une maison de repos

intergénérationnelle, c’est à dire en "cohabitation" avec le restant des enfants qui a

été retenu. Ce home s'est modernisé au fil du temps et s'est agrandi pour compter à

l'heure actuelle une septantaine de lits pour les personnes âgées et entre 20 et 30

enfants de 0 à 7 ans.

31

Pour de plus amples informations concernant ces projets, contacter Infor Homes Wallonie au 070 246 131

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Le projet de vie général est ici de mettre autour de la personne âgée différents

éléments favorables qui tentent de lui donner l’envie de continuer à vivre quel que

soit son état de santé physique ou mental. C'est aussi profiter de l'opportunité de la

présence des enfants pour recréer un lieu vivant où chacun peut apporter et recevoir.

La présence des enfants fait donc partie intégrante du projet de la maison et cette

co-habitation inter âges est autant de bénéfices tant pour les personnes âgées que

pour les enfants eux-mêmes. Le contact des enfants est en effet un stimulant

supplémentaire pour raviver « l’envie de vie » des résidents, tandis que les

personnes âgées symboliseront les grands-parents avec un rôle de transmission des

savoirs voire parfois même d’éducation. L’apport de la rencontre intergénérationnelle,

s’il demande une certaine stimulation des aînés, est donc globalement positif et l’est

d’autant plus que le séjour de l’enfant est de longue durée. Ces rencontres offrant

l’opportunité de recréer un lieu vivant.

Concrètement, l’infrastructure a été conçue pour ressembler le moins possible à une

clinique ou à une maison de repos, tant du point de vue de son usage individuel que

collectif. Tous les logements sont donc individuels, studios ou appartements (à

l’exception de 4 appartements pour des couples) avec l’espace suffisant pour que les

habitants puissent apporter leurs objets/meubles préférés.

Les couloirs de chacune des ailes portent un nom de rue… C’est le quartier et il y en

a 6 au total qui comprennent chacun un lieu de vie commun avec une petite cuisine

équipée qui permettra par exemple au résident qui le souhaite de préparer un gâteau

pour la visite dominicale des enfants du centre. Au coeur des quartiers se trouve la

« Grand-place » où est servi le café l’après-midi et où les gens se retrouvent.

L’établissement possède également une bibliothèque commune aux personnes

âgées et aux enfants.

L’accompagnement des pensionnaires reposera sur une connaissance de leurs

centres d’intérêts, ce qui facilitera l’entrée en communication et permettra

d’encourager et d’organiser des rencontres en fonction de leurs savoir-faire (comme

L’accompagnement des aînés en perte d’autonomie : Regards critiques et pistes de réflexion sur les bonnes pratiques

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ce monsieur passionné de timbres qui apprenait du coup aux enfants à les décoller

et à les conserver).

De même, concernant les activités, la philosophie de ce projet privilégiera les

moments de vie (une vieille dame s’installe sur la « Grand-place » derrière son

chevalet, se met à peindre, suscite l’intérêt des résidents et la curiosité des enfants),

aux animations trop structurées. La maison ne comporte d’ailleurs pas d'animateur,

la direction tentant d’éviter le terme « animation » faisant trop souvent référence à

des techniques qui parfois peuvent être complètement dénuées de sens pour les

résidents. Chaque membre du personnel s’investira plutôt pour un temps donné dans

le projet de vie en fonction de ses centres d’intérêt.

Le personnel bénévole est une des autres composantes du projet de vie de cette

institution. Ils sont ainsi nombreux à venir partager leurs savoir-faire avec les

résidents (une dame donne par exemple 3 heures de son temps toutes les 2

semaines pour venir faire la lecture aux malvoyants). Au-delà du temps qu’ils

consacrent aux habitants, les volontaires sont importants car ils représentent une

identité extérieure à l’institution et constituent des moteurs permettant d’éviter de

fonctionner uniquement en « vase clos ». Toutefois ils ne doivent pas empiéter sur le

travail des professionnels et doivent adhérer au principe de la maison : les résidents

sont des adultes capables et responsables.

Un conseil des résidents est prévu 1 fois tous les trois mois (et il est fait). La réalité

montre pourtant qu’il a lieu de façon moins formelle tous les jours après midi lors de

la tasse de café partagée sur la Grand-place où tout le monde se retrouve, résidents,

personnel et direction. C'est lors de cette rencontre quasi quotidienne que

s'effectuent les échanges les plus riches. Toutes les revendications sont abordées à

ce moment là. Selon, la direction, et non sans humour, c'est bien plus intéressant

qu'un conseil des résidents « qui va ne parler que de savoir pourquoi la soupe est

verte tous les jours ».

L’établissement refuse tout accueil dans l’urgence car leur démarche, qui prend du

temps, repose sur un état d’esprit de vraie collaboration avec la famille. Il faut

L’accompagnement des aînés en perte d’autonomie : Regards critiques et pistes de réflexion sur les bonnes pratiques

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permettre aux nouveaux résidents de vivre aussi bien que possible leur fin de vie et

donc leur donner du temps pour accepter l’entrée en maison de repos mais aussi

donner du temps à la famille pour qu’elle comprenne la collaboration nécessaire à

établir, à savoir une continuité dans l’accompagnement du parent jusqu’à la fin de sa

vie.

La qualité de l’hébergement, la préparation de l’accueil du résident et de sa famille,

l’implication de l’équipe professionnelle et des volontaires, la présence des enfants

sont toutes les composantes de ce projet de vie et il n’y en a pas une plus importante

que l’autre. Entre autres, ce projet intergénérationnel questionne et travaille sur

certaines failles de notre société qui met les enfants à la crèche, les jeunes à

l’écoles, les adultes au travail et les aînés en maison de repos. Il est urgent à présent

de revaloriser la personne âgée en tant que capital de savoirs, de savoir-faire et de

savoir-être qui dans une société solidaire peuvent être mis au service de l’ensemble

des classes d’âges.

6.2 Projet « maison de vies solidaires pour adultes âgés »

Cette institution se niche au cœur d’un immense parc boisé de 5 hectares doté

d’une infrastructure unique, héritée de son activité antérieure de tourisme social

(piscine intérieure, terrains de tennis, plaine de jeux, parcours de mini golf, pétanque,

…). Son autre particularité est qu’elle s’inscrit dans la logique du concept de « milieu

de vie de substitut » impliquant que la maison de repos est imaginée comme un lieu

de vie (où certains reçoivent aussi, si nécessaire, des soins) et non comme un lieu

uniquement de soins ou comme un « petit hôpital décentralisé ».

Le projet de vie général s’appuie en effet sur certaines valeurs telles que le respect

de l'autonomie, de la citoyenneté et des libertés (personnelles, de mouvements, de

prise de risque). L’autonomie renvoie ici à l’idée que l’adulte âgé habitant en maison

de repos sait mieux que quiconque ce qui est bon ou mauvais pour lui, il décide dès

lors lui-même de ce qu’il va vivre, boire, manger, faire ou ne pas faire…

L’accompagnement des aînés en perte d’autonomie : Regards critiques et pistes de réflexion sur les bonnes pratiques

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Les habitants de cette maison sont avant tout des adultes, âgés voire très âgés, qui

ne sont jamais ramenés à un statut de malade ou de personne âgée dépendante

mais qui sont simplement accompagnés en tant qu’Hommes.

Le leitmotiv de l’établissement est donc de s’adapter au maximum aux besoins et

désirs spécifiques de ses habitants et cela repose sur 6 principes :

1. Prendre en considération les habitudes de vie antérieures

2. Maintenir leurs capacités, le plus et le mieux possible, en collaboration avec

eux.

3. Offrir un réel espace de liberté

4. Respecter leur droit d’exprimer leurs volontés sur les sujets qui les

concernent.

5. Favoriser une vie sociale, culturelle et spirituelle agréable.

6. Privilégier les partages d’expériences, de compétences et d’intérêts.

En cohérence avec le respect de ces principes, la direction est attentive à développer

une organisation souple et adaptable inscrite dans une dynamique qu’elle qualifie de

« questionnante et apprenante ». Le personnel est de ce fait en perpétuelle

recherche de sens : ne pas prendre de décision ou ne pas poser des actes sans en

avoir cherché le sens.

Concrètement, le personnel porte des polos dont la couleur peut varier chaque jour

et ne renvoie donc pas à une fonction particulière. Seul un badge au logo de

l’établissement avec le nom, le prénom et la fonction permettra aux habitants

d’identifier leur interlocuteur. Le personnel est présenté à chaque nouveau résident

(fonction et nom), et ce dernier décidera s’il préfère tutoyer ou vouvoyer le personnel.

A l’inverse, les personnes âgées sont vouvoyées (sauf demande de leur part explicite

d’être tutoyées).

Les résidents possèdent la clé de leur chambre qu’ils peuvent personnaliser. Le

personnel, s’il veut rencontrer la personne demandera la permission de se rendre

dans sa chambre...

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Une autre forme de respect consiste à tenter au maximum de préserver les rythmes

individuels des résidents. Ceux-ci peuvent ainsi déjeuner quand ils le souhaitent, en

chambre ou au restaurant.

Egalement, le personnel tiendra compte des régimes mais ne les imposera jamais si

la personne décide de ne pas les suivre. De même, les actes tels que le coucher, le

lever, ou le fait d’être changé la nuit ne se feront qu’à la demande du résident. Quelle

que soit la situation, l’adulte âgé restera libre de ses choix.

Au niveau des activités, il s’agira davantage de créer des moments de vie partagés

que de proposer des activités rigoureusement organisées. Des sorties sont

suggérées (par exemple la visite d’un musée) et des rencontres intergénérationnelles

sont organisées avec la jeunesse locale (les jeunes viennent expliquer l'informatique

aux aînés, une école des devoirs est mis sur pieds…). Aussi, une mini boutique est

ouverte dans l'entrée de la maison avec des produits de première nécessité (savon,

shampoing,...). L’objectif de ce petit magasin est de donner le choix aux habitants, de

les responsabiliser et de leur rendre une plus grande autonomie rappelant celle qu’ils

avaient autrefois en vivant au domicile.

Concernant l’accompagnement en fin de vie, plusieurs membres du personnel ont

suivi des formations en soins palliatifs même s’il est essentiellement fait appel à une

plateforme palliative. Les décès sont ensuite annoncés dans la maison et un temps

de silence est respecté. La mort s’associe de cette manière moins à un tabou qu’à

une dernière étape naturelle de nos propres vies.

L’établissement tient notamment beaucoup à ce que les résidents désorientés

restent libres de toute entrave et partagent la vie de la maison avec les autres

résidents non désorientés (les résidents désorientés ou pas habitent les lieux

librement et ne sont jamais contenus ni maintenus dans un fauteuil, un service ou

une aile sécurisée). Les portes sont ouvertes sur l’extérieur et la déambulation est

encouragée dans le sens où elle atténue l’anxiété et préserve une certaine forme

physique. Tout être humain doit être libre de vivre ses risques. La vie en soi est

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risquée et selon la direction, il n’y aurait de pire risque que de ne pas en prendre.

Autoriser la prise de risques aux habitants, c’est leur reconnaître le droit d’encore

être vivant.

6.3 Projet Carpe Diem au Canada

L’asbl « Habitat et participation », dans un rapport de 2002, présentait déjà le projet

de la maison Carpe Diem. Ce projet qui signifie « saisir le jour » suggère une façon

nouvelle d’héberger et d’accompagner les personnes atteintes de la maladie

d’Alzheimer. Le concept « carpe diem » repose ainsi sur la conviction que l’évolution

d’une personne dépend en grande partie de la façon dont on la regarde, l’envisage

ou la perçoit. Toutes les actions posées par les intervenants sont guidées par une

croyance profonde en la force de la vie, en la richesse de tout être humain et en son

droit de vivre jusqu’au bout son histoire. Une histoire qui ne s’inscrit ni sous le signe

de l’aggravation inéluctable des déficits, ni dans la solitude et l’exclusion mais qui

s’enrichit de découvertes et d’expériences nouvelles et continue à se tisser dans

l’amour familial, la reconnaissance mutuelle, les rencontres et l’amitié.

La philosophie de cette maison repose sur 4 grands principes :

1. La personne désorientée doit avoir la possibilité d’établir des relations stables

et de confiance avec les gens qui l’entourent. Elle doit se sentir acceptée et

utile afin de vivre un sentiment de satisfaction à travers des interactions

sociales.

2. Toute intervention doit viser le maintien de l’autonomie et de l’estime de soi

dans un contexte s’apparentant à un milieu plus familial qu’institutionnel. Aider

la personne à développer son potentiel et diminuer l’anxiété en la valorisant et

en l’accompagnant dans ses activités quotidiennes.

3. Respecter les liens de la personne avec son entourage et favoriser

l’implication de la famille dans le quotidien de la maison.

L’accompagnement des aînés en perte d’autonomie : Regards critiques et pistes de réflexion sur les bonnes pratiques

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4. Respecter le rythme, la dignité et la réalité de la personne. Etre en mesure de

mettre de côté ses propres références et ses propres besoins personnels pour

mieux comprendre et satisfaire ceux de la personne.

Le projet Carpe Diem est né de l’implication des familles, de volontaires et de gens

d’affaires de la région. Il s’agit donc d’un exemple de mobilisation de la communauté

pour la communauté. La maison Carpe Diem est ainsi devenue la pierre angulaire

des services d’accompagnement à domicile, de soutien aux familles, de centres de

jour, de formations et stages…

Concrètement, cette résidence est un ancien presbytère d’architecture traditionnelle.

Elle se situe dans un environnement social en continuité avec les habitudes de vie

des résidents (proximité immédiate d’une épicerie, d’une église, d’une école –

donnant l’opportunité de contacts avec les enfants –). Le quartier étant calme, il

présente peu de risques si les résidents souhaitent s’y promener. Pour les personnes

plus désorientées, une vaste cour sécuritaire existe et permet des moments de

détente. L’établissement tente au possible de s’adapter aux déficits perceptifs et

cognitifs des résidents afin qu’ils trouvent facilement des repères.

L’organisation de la vie s’articule autour du respect du rythme de chacun (les

habitudes de vie de chacun sont respectées), de son droit à l’intimité et de la

cohésion nécessaire à une vie en collectivité.

L’environnement, en procurant des sources de stimulation est considéré comme une

source d’intervention en soi. De plus, de nombreuses tâches quotidiennes (ménage,

repassage, jardinage…) sont effectuées par les résidents désorientés eux-mêmes et

avec l’aide des intervenants (ces tâches ne sont jamais imposées). Cela, avec le fait

de laisser aux résidents le choix de leurs vêtements et la possibilité de se vêtir et de

manger eux-mêmes, permet le maintien d’une forte estime de soi. Les activités

sociales et culturelles occupent également une place importante.

Notamment, ce projet à le souci constant de ne pas spécialiser les rôles du

personnel (en institutionnalisant et en compartimentant les interventions), les valeurs

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organisationnelles étant très peu orientées vers la productivité et la rapidité mais bien

vers le développement des relations entre les individus.

Une règle essentielle aussi concerne l’importance du langage et le poids de certains

mots parfois lourds de sens. Les termes « démence », « déments », les expressions

telles que « comportements agressifs et perturbateurs », « troubles du

comportement » ou « troubles déambulatoires » sont proscrits du vocabulaire : à

Carpe Diem il n’y a que des gens qui expriment un besoin, adressent un message

qu’il nous appartient de décoder et de comprendre.

Enfin, l’approche pharmacologique est un aspect rigoureusement suivi et exploré.

L’objectif d’un traitement est de viser le bien-être ou le soulagement de la souffrance

et non un moyen de contrôle des comportements ou de comblement des lacunes

organisationnelles en tentant de remplacer les interventions humaines.

6.4 Conclusion

Les projets présentés sont d’autant plus complexes qu’ils demandent à la fois une

organisation rigoureuse et une grande souplesse. Ils constituent un cadre de

référence qui doit s’adapter en permanence aux personnes à qui ils sont destinés.

Leur survie repose essentiellement sur la qualité et l’importance des ressources

humaines. En effet, le respect de l’approche et de la philosophie dépend entièrement

de la compétence, de la sensibilité et de l’engagement du personnel à concrétiser les

valeurs du projet au quotidien. C’est pour cette raison qu’un rigoureux processus de

sélection a été développé pour recruter le personnel. Les critères de cette sélection

reposent ainsi principalement sur la capacité de l’individu à développer une relation

de confiance avec autrui, sur ses aptitudes à travailler en équipe et sur ses

compétences organisationnelles. Même si tous les intervenant(e)s possèdent une

formation professionnelle (et les compétences spécifiques professionnelles sont bien

sûr essentielles), celle-ci n’est donc pas le premier critère de sélection. Les équipes

doivent en effet être à la fois très flexibles et très organisées. Elles doivent être aptes

à identifier les besoins des personnes en perte d’autonomie, désorientées ou pas), et

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leur donner la priorité sur l’accomplissement des tâche pour favoriser leur estime de

soi.

7 Conclusion générale

Au vu des chapitres précédents, nous comprenons que les « bonnes pratiques »

recouvrent un concept flou, complexe à définir et à observer. Cette notion balaye il

est vrai, autant les trucs et astuces dont usent au quotidien les aidants et le

personnel soignant/paramédical, que les projets vie de plus grande ampleur que

certains établissements tentent de mettre en place en vue d’une optimisation de la

qualité de vie et ce, dès les premiers signes de dépendance jusqu’à

l’accompagnement en fin de vie.

Le projet de répertorier les bonnes pratiques représente dès lors un objectif très

ambitieux qui demande une connaissance approfondie du secteur de

l’accompagnement des personnes âgées en perte d’autonomie. Rappelons d’ailleurs

que les bonnes pratiques nécessitent d’envisager la réalité de la personne

concernée dans toute sa globalité à savoir la personne elle-même, le/les aidant(s)

proche(s), les professionnels au domicile et en institution, l’environnement dans

lequel évolue la personne (aspects architecturaux/esthétiques)…

Ce travail, en investiguant mais en critiquant donc également à certains égards le

concept fort à la mode de « bonnes et innovantes pratiques », a permis de dresser

une revue (non exhaustive) de la notion de qualité de vie ainsi que des différents

lieux d’hébergement existant pour accompagner les personnes âgées en perte

d’autonomie. Dans un second temps et via les 3 séminaires organisés, ce même

travail a pu donner la parole de manière exclusive aux professionnels du secteur.

Ces rencontres mettaient en avant une réelle motivation des professionnels à tendre

vers un accompagnement de qualité, soulignaient certaines limites et difficultés

rencontrées dans la mise en place des « bonnes pratiques » mais aussi, nous

amenaient à porter un regard critique vers les pratiques présentées comme solution

miracle et universelle aux problèmes au détriment d’une réflexion au cas par cas en

fonction des individus, des moyens réels (en termes financiers et de personnel), bref,

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au détriment d’un questionnement sur l’autonomie, la liberté, la sécurité, la continuité,

la considération, l’empathie et la tolérance (Charlot et Guffens, 2007) ainsi que sur la

manière dont ces valeurs seront concrétisées au quotidien. S’investir de manière

proactive dans un effort de réflexion sur les valeurs et leur concrétisation reflètera

dès lors un réel engagement vers la production de qualité (avec le souci de respecter

les besoins des personnes) et non une application relativement simple de solutions

pré-faites à des situations problématiques aussi diverses qu’il existe d’histoires de

vies.

Dans la continuité des thèmes abordés ici, une prochaine recherche exploratoire

nous permettra à notre tour de nous interroger quant aux besoins des personnes en

perte d’autonomie : qu’est-ce qu’une bonne pratique lorsque l’on questionne leur

point de vue, leur ressenti ? Et par là de constater que nous avons appréhendé ici la

question des bonnes pratiques (à savoir des réponses adaptées à des besoins

variés) avant même d’avoir identifié les besoins des personnes en perte d’autonomie.

Nous le citions d’ailleurs dans le chapitre abordant la notion de qualité de vie que

« les données concernant la qualité de vie introduisent pour les familles, les aidants-

proches ainsi que pour les professionnels un changement de perspective important

[…] en validant que la personne est à même de pouvoir exprimer ses besoins […] ».

Pour clôturer cette conclusion, nous ajouterons que la production de qualité ainsi que

la satisfaction des besoins des personnes en perte d’autonomie passent

nécessairement par une démarche proactive de la part des professionnels et des

familles. Comme toute forme de production, celle de qualité demande, en plus d’un

investissement affectif, un effort autant physique (par le temps donné, la présence

physique…) qu’intellectuel (la remise en question de soi-même, la réflexion

permanente quant aux actes posés…), mais aussi un engagement perpétuel en

faveur d’une concrétisation des valeurs et un souci du respect de l’autre dans son

statut de maturité et d’expérience quel que soit son état de santé ou de conscience.

Nous espérons par ce travail repousser un peu plus l’ère du robot compagnon et

maintenir la chaleur des contacts (comme ils nous furent prodigués dès la naissance)

jusque dans l’accompagnement vers la mort. L’objectif général des bonnes pratiques

L’accompagnement des aînés en perte d’autonomie : Regards critiques et pistes de réflexion sur les bonnes pratiques

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et de leur diversité restant de privilégier la qualité de vie plutôt que son allongement

à tout prix.

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8 Bibliographie

Alzheimer : Les approches non médicamenteuses. Comprendre pour mieux soigner.

Equilibre. Psychologie (44 – 46)

Charlot, V. & Guffens, C. (2007). Où vivre entouré? L’accueil des personnes âgées

atteintes de démence dans les lieux de vie résidentiels collectifs. Fondation Roi

Baudouin ; Les éditions Namuroises.

« Chez soi autrement. Lieux de vie pour personnes âgées en Région Wallonne » Espace Seniors.

Chung, J.C.C., & Lai C.K.Y. (2002). Snoezelen for dementia (review). Cochrane

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« Envie de vie ! Produire de la qualité de vie en maison de repos ça ne s’improvise

pas… ». UCP, mouvement social des aînés.

Infor Homes Wallonie (2011). L’accueil des personnes désorientées en maison de

repos. Recherche exploratoir pour la Wallonie.

Dorenlot, P. (2006). Démences et interventions non médicamenteuses : revue

critique, bilan et perspectives. Psychologie et neuropsychiatrie du vieillissement, 4(2),

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Démence : quelles interventions non pharmacologiques ?. KCE. Centre Fédéral

d’Expertise des Soins de la Santé. Rapport 160B

Feteanu, D.; Lopez-Tourres, F.; Trivalle, C. (2005). La personne démente en

institution. Psychologie et neuropsychiatrie du vieillissement, 3(1), 26-34.

Initiatives seniors. Les éditions de l’Avenir, 2012

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Polydor, J.P. (2009). Alzheimer mode d’emploi. Le livre des aidants. L’esprit du

temps

Rondia, K., Comprendre pour mieux soigner, Equilibre, 44-46, septembre 2011

Rapport final : Nouvelles activités et projets d’hébergement pour travailleurs âgés.

Habitat et Participation (2002)

Van Audenhouve, C., Spruytte, N., Detroyer, E., De Coster, I., Declercq, A., Ylieff,

M., Squelard, G., & Misotten, P. (2009). Les soins aux personnes atteintes de la

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develop a quality of life assessment instrument (Whoqol). Quality Life Research,

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Ylieff, M; Di Notte, D. (2002). Qualité de vie. In Fontaine O., Ylieff, M., Buntinx F., De

Lepeleire J. (Eds). Qualidem : rapport final 1999-2002

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9 Annexe

Questions posées par les professionnels quant au fonctionnement de l’asbl Infor Homes Wallonie

Nombre de volontaires à IHW ?

Une liste des lits disponibles en MR/MRS peut-elle être obtenue par IHW ?

IHW peut-elle accompagner d’autres services (type Espace Seniors, UCP) dans

leurs projets ?

IHW dispose-t-elle d’une évaluation du service ?

Serait-il possible de diffuser les informations de la base de données sur le site

internet ?

Y-a-t-il à IHW un accompagnement psychologique poussé des personnes

demandeuses ou l’asbl relaie-t-elle avers d’autres services ?

Comment IHW entreprend-t-elle les missions de médiatisation/sensibilisation ?

Comment IHW renseigne le grand public ?