La Mer Noire au moyen age - La Chancellerie des ...

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Au moment où l'Oceident se réunit encore, comme au temps des Croisades, pour repousset l'enneini nouveau qui menace l'iudépen- dance de l'Europe, au moment où los soldats de la Franco, de L'An- gleterre CL de la Sardaigne vont, loin de leurs foyers, sur une terre ouhuie, défendre une puissance opprimée et pianter le drapeau coni- mun de la justice CL de la llbert& il ne paralt pas indigne de l'histoire de se faire; elio aussi, l'auxiliaire dune si juste cause et d'éclairer, par la science du passé, Ì'avenir de ces contrées jusqu'ici dlaissées, CL qui semblent à cotte beure devoir étre le champ-clos où se déci- dera cette lutte redoutable. Sous l'influence de ceLLe. pensée, l'auteur de ce travail s'est mis à rechercher avee soin dans los annales de ces populatioris lointaines quelle a été leur pan de l'tuvre collective de la civilisation mo- derne. Dans une telle entreprise, il a été obligé de restreindre l'étendue de son oBuvre, et l'ilistoire de la mer Noi re au moqen tige lui a paru devoir répondre convenablement au but qu'il s'était pro- posé. Mais au milieu des 4vénements qui se pressent et. qui marchent, quand la Sardaigne, intelligente héritière de la puissance génoise, vient eri Crimée arborer aux yeux des Tartares une bannièrò bien connue, quand demain peut-tre l'audace heureuse de nos marins rrachera Caffa à la Russie, l'auteur a cru qu'il était bon de raconter J'histoire de cette ville infortunée, d'en faire voir la splendeur et la chute, CL d'appeler sur elio l'attention publique. Paris, septembre 1855. Docunient 11 Il Il Il Il 111 111111 lii 0000005578559

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Au moment où l'Oceident se réunit encore, comme au temps desCroisades, pour repousset l'enneini nouveau qui menace l'iudépen-dance de l'Europe, au moment où los soldats de la Franco, de L'An-gleterre CL de la Sardaigne vont, loin de leurs foyers, sur une terreouhuie, défendre une puissance opprimée et pianter le drapeau coni-mun de la justice CL de la llbert& il ne paralt pas indigne de l'histoirede se faire; elio aussi, l'auxiliaire dune si juste cause et d'éclairer,par la science du passé, Ì'avenir de ces contrées jusqu'ici dlaissées,CL qui semblent à cotte beure devoir étre le champ-clos où se déci-dera cette lutte redoutable.

Sous l'influence de ceLLe. pensée, l'auteur de ce travail s'est mis àrechercher avee soin dans los annales de ces populatioris lointainesquelle a été leur pan de l'tuvre collective de la civilisation mo-derne. Dans une telle entreprise, il a été obligé de restreindrel'étendue de son oBuvre, et l'ilistoire de la mer Noi re au moqen tigelui a paru devoir répondre convenablement au but qu'il s'était pro-posé.

Mais au milieu des 4vénements qui se pressent et. qui marchent,quand la Sardaigne, intelligente héritière de la puissance génoise,vient eri Crimée arborer aux yeux des Tartares une bannièrò bienconnue, quand demain peut-tre l'audace heureuse de nos marinsrrachera Caffa à la Russie, l'auteur a cru qu'il était bon de raconter

J'histoire de cette ville infortunée, d'en faire voir la splendeur et lachute, CL d'appeler sur elio l'attention publique.

Paris, septembre 1855.

Docunient

11 Il Il Il Il 111 111111lii0000005578559

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CAFFÀET

LES LoLoNIEs: GÉNOISES

DE LÀ CRIMÉÉ.

-0

flIwrontE.

1.

Sur la còte orientale de la Criinée, non loin du détroit d'Ieni-Kalé,au fond de Fune des sinuosités les plus capricieuses que décrit lamer Noire en haignant ces rivages, s'élève une ville, réfuge depopulations diverses et ennernies, Grecs, Arméniens, Tartares,Juifs, ltaliens; celle ville, célèbre dans l'antiquité sous le nom deThéodosie (1),et ali moyen àge, pendant la domination génoise,sous celui de Caffa (2), estaujourd'hui bien déchuè, m1gr4 tdus lesefforts tentés dans ccs derniers temps par le gouvernement russepoor rétablir son ancienne prospérité (3).-

(1) Voyez 1-Inet, Ilist. du commerce chezles anciene, in-I 2, p. 243.(2) Chardin (Voyage en Perse, L. I, p. 104, &iit. de 1744, in-42) pré-

tend que le non de Caffa est arabe et vient de Gaffer, mot qui signilieInfidèle. Caffa iflait dono la ville infidèle, la ville chrtienne.

(3) Yoyez Thunmann, lescription de la Crirade, p. 43, in-12, 4786,trad. de l'allemand; JIenilly, Voyagc en Crimée, in-8°, p 138 cr277,Gamba, VoyafJe dans la Jlussie rnéridiohale, etc. -

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--6-Construite sw le versant dune colline, dans la direclion da sud

au nord, elle forme un amphiil éàtre demi-circulaire doni los deuxextrémités s'avanceni sw la mer ci sont terminées par ces deuxchàteaux si souvent cités dans les voyages anciens (1), ci que l'in-souciance turque laissait tomber en ruines. La terre do -celle partiede la presqu'i]e est sèche et sablonneuse; l'enti y est rare cisalée (2). On y voit peu ou pomi de jardins. Los fruiis n'y muris-sent pas, et ceux que Von apporte des villages voisins soni mau-vais (3), à cause sans doute du voisinage de la mer et des lacs salésqui sont aux environs. Mais une températtire saine, presque cons-tamnient égale, un port fàcile ci assuré, une grande quantité d'ap-provisionnements d'un prix très-minime rendirent promptemcnttette ville l'entrepòt da commerce occidental dans le nord de lamer Noire et dans la mer d'Mo!, malgré los établissoments que lesVénitiens, los Pisans ci les Géuois y avaient déjà forrnés. Ce fai alorsque los Tartares, frappés d'admiraiion, l'appelèrent, à l'insiar deConstantiriople, Stambonil ci Crrn-Siambouli, la ville, la Constan-tinople de la Crimée.

Colonie fondée par Milet, Théodosie suivit la fortune des rois tiriEosphore Cimmérien doni elle se irouvait la tributaire. Elio fui l'undes greniers de la Gite ci do l'enipire romain, et les alimenta parses vastes magasifls de froment ci de grains de tonte espèce. Losinvasions successivcs des peuplades barbares la ruinòrent compléte-meni. Au iemps d'Adrien (4) , elio étaii déjà désertc ci abandonnée.•Seules, quelques farnilles do pécheurs lìabitflient encore au milieu de

es débris (5).

Il.

Les , Génois, ennemis acharnés de Venise, afin de satisfaire unoaveuglè rivalité, ranicnèrent Paléologue à Constantinople 01 conti i-

(1) Ch'nrdin, Voyage cité, i. 1, p. 101 Thunmann, Gamba, etc.(2) Reùiliy, Voyage cité, p. 46.

• (3) Chafdin, loco citato.(4) Iiuct, ouvrage cité, p. 243 Oderico, Lettere Ligustiche, p. 145,

in-S°, 4792.(5) Quelques auteurs modcraes pr&endcnl que Caffa ne fLIL pas con-

struile sur l'emplacernent de Thodosie , mais à uno certaine disLance decetto ville, à un mille environ. Vov. Oderico qui rÙuLe celLe opinion,ouv. cit.. loco citato.

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-7--

buèrentainsià la tiestructiondecet empire latin, barrière bien faibleéIewe coritre l'islarnisme par l'enthousiasme religicux de l'Europe;ils y substituèrent une nutre barrière plus faible encore qu'ils ne surentmtme pas défendre, et dont la chute devait amener la décadcnce deleur commerce ella ruine de leur pays. Pi'otecteurs puissants d'unpouvoir nouvean et chancelant, ils se firent concéder des droits CLdes priviléges exorbitants (i), et s'attribuèrent 'a eux seuls la librenavigation de la mer Noire. Maitres exclusifs de ces eaux (2), lesCénois cherchèrent un port sùr et facile 'a difendre, qui pùtleur ser-vir de lieu de ravitaillement, de protection et d'entrepòt pour leurnégoce. Tana, sur la mer d'Azoff, bien que le porL comniun desnavigateurs italicns, ne leur offrait pas toutes ces conditions. Lesvaisseaux de haut bord ne pouvaient naviguer dans cette mer basse ethoueuse; et los Mogols, qui venaieut de s'en emparer, avaient, parleurs cruautés, enlevé au commerce tonte apparence de sécurité. lisjetèrent donc les yeux stw Théodosie ou Caffa, alors ruinée, qui pré-seatait tous les avantages demandés.-

III.

La Crimée dtait 'a ceRe époque possédée par une horde de Tarta-res qui, après s'étro avancés jusqu'au Danube, y avaient pénétrésous le commandemeni. de Batou Sain Khan, petit-flls de GengisKhan, et s'y.étaicnt dtablis vers 226. Batou fonda sur les rives duVolga un empire qui prit Io noi» d'empire du Kaptchack, CL Saraidevint sa capitale (3).

Mangou-Tirnour, en montaul sur le tròne ;ers 1266, avait donné 'ason neveu Oran-Tirnour, iis de Nogai, -los villes de Krim et de Caffa.Les historicns Génois ne sont pas d'accord sur la manière dont cettedernière ville devint une possession de leur pays Les uns disbnt quece fut par conquéte, los autres par acquisition, d'autres enfin par

(4) Voy. Pachymòre, édit. in fo, t. 1, 1. 11, e. 32.(2) lls préterìdirent mòrne empécher les na'ires grecs de pdnétrer dans

la n'cr d'Azoff. Voy. Niccph. Gregoras, I. XVIII, e. 2, eL Fanucci, Storiadei tre popoli mariti,ni (teli' Italia, t. Iii, p. 275.

(3) Voy. de Guignes, lfist. des Thuis, in-4', I. I, p. 287 Formatconi,Storia della navigazione nel mare Nero, i. IL p. 31, 92.

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fM' rur doiaUoii a y 'ahée à la faiblesse tì'Onin-Timoùr(t). Le nonifnme dumarh, soldat nu négociateur, qui augrnenta ainsi la ptusance de sa patrie, est également incertain. 11 s'appelait, si Von en

éroil Giustiniano (2),Antonio dalL' Orto. StiivantFanucci (3), au con-iraire, ce serait un mnbre decette clèbrc famille desDoria, nornniéObertino. Une tradition populaire, d'accoril sur ce point avec unbistorien grec (4), raconte qu'un Génois, voulant fonderune colonie,òbtint do prince mrtare la pdrrnission de s'(tablir sur ce rivagedanstout l'espace qua pourrait contenir uno peau de breuf découpe 09lanières. Au grand étonnernent dii barbare, los laniòres furent sitninces et si mullipliées que cetteconcession s'éwndit Lì tout io ter-ritoire occup1 plus tard par la ville de Caffa (5).

A péino fondée , la colonie gnoise voulut vivre de la vie duneMtion. En 1289, la commune , d'accord avec son consul PaolinoDoria (6), résoiut de porter secoitrs à Tripoli de Syrie, alors assiég&par Kelaoun, sultan (YEgypte (7). Los botwgeois armèrent trois ga

-Ières venues de Gènes (8), donI Doria pril te commandement supé-

(1) Voy. Stella, no. 43W7, dans Muratori, t. XVI!, col. 1095; le mar-

quis Serra, Storia della antica Liguria et di Genova, in-12, 1. 11, p. 432;

Guigrìes, mw cit., 1. 111, P. 34 1 de.

(2) Annali, I. IV, fo 136.: (3) 0v'.'. cd., t. lii, p 37

(4) Nicepb. Gregoras, i. XIII, e. 42.(5) il faut reietcr éncore au nombre des fabies, suivant Oderico, P. 121-

423 le rciL donné par Uèrbersteifl da sitge de Caf, dnLrepris par Wia-diiuir 11, grandduc des Uusses, Ct qui inourut en 1125. Oderico, p. 415roque également en doute l'attaque de Caffa, com,nencSen 4250 p'arles Tartares contrcles Génois. Yoy. Genio RisveglialO, p. 5.

(6) 'e Iloc exposuìt eoram mereatoribus eL Burgensibus dieti bei, quistatiffi ordinavcrunt. » Caffaro. a. 1289, dans Muratori, 1. VI, col. 596.

('7) Al. Reinaud, Eat. Hist. ,4rabcs, p. 561.

(8) e Qu de 3 1, 11 a iIIuc mercatores portavdraflt, quas eonduxerunt

certo pretio.... Solyendo se suo proprio si commune Januie illnd pretiunirèeusùret.Untle collectis asperisVl iniltibus ci ba!isteriis in iis imposiiis. »

Cafli,ro ibid.

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o -rieur. Àrrivs en Chypre, 'a Famagouste, jf aj)prifent 1a rtilne1tleTripoli ci le triornphe de Kelaoun. Doria se réunht alors à l.'amiralgénois Benedetto Zaccaria, et s'empara d'un havire inusulman quivenait d'Alexandrie. La métròpole était alors en paix avec le sultàodEgypte. Elle blàma la conduite. de sa colonie, qui exposait soncommerce à des vexations. En effei-, le suiltari furieux Iii jeter en•prison tous les Génois élablis en Egypte, et conflsqua leurs biens. Aumois de décembre suivani, une galère armée aborda à Alexandrieavec un ambassadeur de la llpuhuique, Alb prio Spinola, qui obtintà la fois ci la liberté de ses cotnpatriotes ci un traité dalIiance.Getto difflcult6 aplanie, le gouvernerneni paya les frais d'un arrne-• meni qui avait été faiL dans l'intérL de la Gtwétienté (1).

Caffa cui aussi à subir les consdquences de 1'dternellc rivalité deGnes et de Venise. Quelques anudes plus .tard, en 1206, viiìgi-cinqgalères, Sons la conduite de Giovanni Superanzio OLI Soranzo (2),vinrent atiaqaer la ville ci s'en etiiparèrent. Elle fui cornpldteineni.saccagde. Los V6nitiens victorieùx hivernèrent dans ce port ; maisle froid fut si grand ceRe ann6e-là que la rnoitié des équipages pirii,ci Soranzo ne put à grand'peine rarnener que seize galères. Gatta fuidSoniais à l'abri de ees insultes de Vcnise.

Si l'on en croit une tradition, qui s'est trouvée confirmée par la ré-cente publication d'un ancien documeni administratif, la colonie deGénes fui ancora détruite en 1307 (3), pour ètre reconstruitedix ans

(4) Gomniune auteru solvitgaleis que dictum Panlinum poraverantquid-quid eoutribuerant ad armandum ut alii capereni bonum exemplurn sub-veniendi corninuni, quandoenmque oxpediret. » Caffaro, ibid.

(2) c Joannes Superantio.. ... cum suis galcis iniravit in mare Majus cimulta navigia Januensium cepii discurrendo usque ad Capham, IocumGenuensiuin quam cum sua gente viriliter debellavii ci tandem ipsarnbabuil navesque quaiuor cum duabushostiunigaleis cremando desiruxit.Posi lIa2c reverti volcns, superveTliecls impieLas temporum ci hvemis aspe-ritas, quod in Gaaria usque ad amenitatem novi Lemporis Irvemare con-venii. » A. Dandolo, nn. 1296, dans Muratori, L. XII, p; 406; voy. Serua,cui,. cit., i. l(,p. 203; et Daru. Hist. de Venise, t. I, p. 429.

(3) Oderico, p. 169, rdvoque en doute ce fait doni il n'avait pas trouvdde pittive positive. Il ne COnnaissaiL alors UI CC passage de Novairi,registro intitulé !mpòsicio Gazarùo, pulli6 rdcemment par M. Sauli. Onirouve dans ce registre, à la date du 46 mars 4316, un ordre da Conseildes Huit pour la r000nstruclion de Caffa « Ui locus de Caffa ciiius civelocius rehidifficetur, meliorciur ci fortificetur cujus bei liedifflcatiomelioracio vel foriificacio est honor eommunis ci securitas omnium 111cr»-cium et uti volenciurn in mae Majori ttactant., etc. »-

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- tò -plus tard par Nicolo de' Pagani, avee la permission WUsbeck (i),khan des Tartares. - -

Los historiens Iatins ne parient pas de ceLle catastrophe; maisNovairi (2), écrivain contemporain qui vivait alors en Egypte, rap-porl.e le fait suivant sous l'année 707 de l'I-Iégire (ce qui correspondàI'an 1307-1308 de notre ère): t Onapprit en Egypte queToucta (3)«irrité contro les Francs-Génois, établis en Crirnée, et contre lescc paiens des pays septentrionaux, par des rapports qui les taxaient,« entro autres choses, d'enlever des cnfants Tartares et de les vendre

-e dahs les pays musulmans, envoya des troupes contro la ville de- 4( Kifa, où ils résidaient. Les Francs effrayés rnontèrent sur leurs• vaisseaux et mirent en mer, de sorte que les.troupes n'en purent• pas pi'endre mi seul, mais Tenda s'empara de leurs biens dans la• ville de Sarai et ses environs. -

-. V.

Malgrd cò désaslre passager, la prosritiS de la colonie fuI loin de- décroitre ; car nous voyons, en 1318, le pape lean XXII établir LiCaffa ( Lt) un évque catholique, suffragant de l'arehevWié de Kam-balou ou Cambalick en Tartarie; son diocèse s'étendit depuis Saraisur le Volga jusqu'à Varna (5). Le premier évòque fut un franciscain

- nommé Fra Gerolarno (6), l'un des trois frères de cet ordre envoydsen Tartarie par le pape Glcment V, avee le Litre d'évèque, mais sansrésidence déterminée;TrOiS ans plus lard, Jean XXII écrivit encoreau consul pour exiger la réparation des injures faites li Fra Cero-]amo (7), le nouvel évéque. Quelles étaient ces !njures? On l'ignore.

(I) Usbeck-lChan, suivant de Guines, I. I, p. 287, fila de Toghtagou,inourut en 1361.

(2) Voy. D'Olisori, JIist. des Mongots, 1. IV, P . 757, in-80.

(3) Tonclouca, appelé vulgairement Toucta, élait IlIs de Mangou-Ti-mour; il rdgnait dcpuis 1291 sur los paVS au nord de là mer Caspicuneet de la mer N&re. Voy.D'Ohson, ouv. nt., t. IV. p. 317.

(4) Voy. Raynaidi, an. 4329, no 45, cI Oderico, p. 166. 1(5) Vov. la batte de ican XXII, date du IV des Calendos do inars

Pan IV de son pontiÉicat, dans Wading, t. Vi, p. 568.

(6) Oderico, p. 166 Raynaidi, p. 1318, n° 13, CL Wading, ibid.

(1) Raynaldi, ìtn. 1222; Odcrico.p. 467. -

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- il --

Peut_ètre les Géuois, esprits mercantiles, avaient-ils veulu. arréter,cfune faon un peu brutale sans doute, une propgande entreprisapar un zèle louable assurémeni, mais doni l'indiscrétion devaitsingulièrernent nuire aux intér&s des comptoirs italierìs, en lesrendant suspects aux Tartares. Par ces rapports commerciaux lesdeux peuples vivaicnt en assez bonne intelligenee, et cherchaientmme à se rendre de mutuels services; àinsi, en 1340, Petranus dall'Orto, ancien consul, vini à Avignon auprès de Benoti XII, cliarg€d'une inission par Usbeck, khan des Tartares (1).

Les pirates turcs infestaient les mers et causaient de grandsdoinrnages aux Grecs, aux Véniiiens et aux G6nois et suriout à leurscolonies. Le Tche]ebi, le chef de ces pirates (2), était mauro de Sibope,doni il avaii fait son repaire ci son lieti de refuge. Mec douze ga-Ières, il ravageait toutes les c0tes de la mer Noire. Simone daQuarto, amiral de Génes, vini à Pdra, vers ce ternps-là , escortantsepi galères, pleines de marcbandises, et fui informé de l'état deschoses. Simone fu volle pour Sinope où il rtiut les plus belles promesses de la pari du Tchelebi, qui protesta de son amitié pour lesQénois. La flotte se dirigea alors vers Caffa où l'amiral reQui de non-veaux détails suries attaques des Turcs. Il s'empresa de ddbarquerles marchandises, et il arma bus les navires disponibles, cinqgalères ci irois barques, barehw, battit les Turcs, leur reprit le.butin enlevé aux Chrétiens, et donna un bel exernple de désintéres-sement en rendant à Venise et à la Grèce tout ce qui leur avait étésoustrait par ces pirates (3). Simone, en agissant ainsi, vengeait sescompatiiotcs, les Gibelins de Péra, que la cruelle avidité du Jhalabiavait fait périr dix-sept ans auparavani (b).

VI.

C'est encore vers cette époque qu'une grande catastrophe vint

(i) Raynaldi, an. 1340; Oderico, p. 458.(2) « Jhalabi Teucrorum, eorurn scilieet dominus. » Stella, dans Mura-

tori, t. XVII, col. 1076. Ce nom, dans la Lingue turgue, signifie chef, sei-gneur, ci est un turo d'honneur.

(3) En 4340, suivani Stella. Serra, i. I p. 299, piace cci événementsotzst'ann& 1345.

(4) Serra, t. Il, P. 273. et Villani, I. IX, an. 4323; dans Muratori•,t. XIII. col. 542.

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12 -frapper le commerce maritime de l'Italie dans la mer d'Asoff (1):Tana (aujourd'hui Azof), à I'embouchure du Don, était devenul'entrepòt commun du trafic de Venise et de Génes avee les naiionsde la haute Asic. Là, se rencontraient les divers rcprésentants de tousles pays. Un jour, un marchand génois cui une altercaUon avee unTartaro qui, dans un moment de colère, le frappa de son bàton. LeGénois furieux le renversa d'un coup d'épée A cotte nouvelle, lesTartares, voulant vonger la mort de leur compatriote, s'eniparèrefltde Tana, massacrèrent tnus los négociants cbrétiens qu'ils purentsaisir, ci pillèrent toutes los marchandises précieuses que renfer-maient los magasins. La perle de Venise, dit-on, monta, dans cedésastre, à plus de trois ceni mille sequins d'épiceries etd'aromates;celle de Gnes .à ,plus de trois cent cinquante mille. Ce qui, si l'onen croit Giovanni Villani (2), causa eri Italie un renchérissement con-sidérable sur ces denrées. -

Là ne se bornèrent pas los hostilits des Tartares. lis voulurenten-coro chasser tous ces Chrétiens maudits de la Crimée. Leur khan (3)leur envoya dono à Gaffa une sommation de se retirer de ces pays.La colonie fa à col ordre insolent une fière réponse, eL se disposa àrepousser les aUaques de son ennemi, qui ne tarda pas à venirmettre le sige devant les murs de la ville (4). Los Tartares cern-rnencèrent leurs opérations par donner l'assaut. Manquant d'échel-les, les assiégeants s'efforQaient d'escalader les murailles 'a l'aidedes épaules de leur compagnons. Los Génois, tranquilles et à l'abriderrière un rempart de pierre, firent .jouer des machines formi-labJQs et.répandirent . la mori chez les assaillants frappés d'irnpuis-sance. Le sidge se changea alors en un blocus, qui devait causer pe\kde doinmage 'a une population maltresse de la mer, trouvant parce moyen toute espèce de facilités pour renouveler 'a ternps sesvivres, ses approvisionnements de guerre, et au besoin sa garnisonfatiguS. Bien plus, les galères gnoises so mirent 'a insulter les còteset taùsèreò t ainsi de grands donirnages 'a leurs adversafres. Celle.situation dura deux annécs entières. A la fin, los asskgds firent dans

(4) Grcgoras, I. XIII, c. 42; Cantacuzène, I. IN, e. 26; Stella, an. 4343;dans Mur., t. XVII, col. 1080; Oderico, p. 410-114.

(2) G. Villani, ciW par Faiiucci OUV. Cit., LIII. p. 276.(3) Dgianibeck, fils d'(Jsbeck, khan di' Kaptcback depuis 1341. Il niou-

,rut en 057. Voy. de &uignes, I. I•,p. 287.(4) Serra I. Il, p. 295.

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une nuitune sortie heurèuse ils brMòtent los mathhies (a) de leursennemis, leur iuèrent cinq mille hoinrnes ci mireni le resto en fuite.Le khan vaincu, vòyant le commerce de son pays arrté, son trésorà sec, ses douanes sans produits, offrit son amitié à Caffa. Il lui fuirépondu que seule, dans cotte occasion,la Grande Comrnuue(Gènes),dont il avait attaqué la colonie, pouvait accepter la paix, puisquec'éuìit sous sa bannière ci par ses armes que l'on avait combattu. LeTartare fui done oblig d'envoyer en Italie une ambassade solen-nelle sur doux galères de son vainqueur. La paix fui conclue ciCaffa dut étre indemnisée des frais de la guerre ci des dommages cau-sS à son commerce.

La Chrtienté se proccupa vivement de la situation do celle villeperdue au milieu des infidèles. Le pape Cldrnent VI, un Fran9ais, ve-nait de faire prchcr uno nouvelle croisade (2) contro los Turcs à.laquelle prirent part la Franco, Chypre, Venie, les chevaliers deSaint-Jean, alors à filiodes, et méme quelques galères de Génes.CeLle expédilion mal dirigée n'eut pour résultat que la conquétestérile de Smyrne ci ne sul pasarr&ter los progrèsde l'islarnisme.Le pape avait nomtné ilumberi Il, dauphin du Viennois, chefsupitnede cette arme chrétienne. Il lui écrivit une lettre pour l'engager àallcr secourir la ville de Caffa, qui était assiégée, ainsi que nous ve-nons de le voir. En inme temps, Clémeni VI pressait par d'autreslettres les Génois de porier secours à une cilé fondée par eux, qu'ilconsidéraii comme un poste avancé des pays catholiques. Il alla plus.loin. Afin de les indemniser des lourdes ddpenses que leur causailcelle guerre lointaine, il leur perinit de faire le commerce avec le-sulian d'Egypte, ci de lui porter tous ces objets que les autres papes,ses prédécesseurs, avaient sdvèrement interdits par leurs builes cipar leurs brefs (3). .

VII.

Caffa fui, dit-ron, le lieu d'où se répandit en Europe par mm flotte

- (1) « Bcflìcis machinis XII, quas Trabucos vuIgLIs nominaI, , Stella;an. 1345; dans Muratori, t. XVII, col. 4080.-

(2) Voy . Raynaidi, an. 13.15, flø 5; Villani, I. XII, e. 38, col. 917;Oderico, p 115-477; Stella, I. c.

(3) Voy. Àssises de Jérusaleuz, i. T i p45, le con cito de Latran de jqgcanon 2$, et Sanuto,

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- 1!4ic Oénes, celle fameuso peste de 1348 (i), appelée Jiièvrc Iwire, quiravagea l'univers toni entier ci ori les populations.

Parties de Caffa en tonte hàte pour fuir le flau, huit galères gé-noises traversèrent rapidement la mer Noire et l'archipel, et vinrentdébarquer en Sicile ieurs équipages épuisés. Elies déposèreni, areele fléau, à Pise ci à Gnes lours riches cargaisons. De là, la fièvreparcourut l'Euròpe entière, iaissant partout de longues traces de sonpassage ci parvint jusqu'en Islande. La morialiié fui plus grande ccTurquie ci ce Tartarie quo dans les pays occidentaux. A Tana et àTrébizonde ci dans les contrées voisines, il resta ù peirle, dii un con-femporain, un babitani sur cinq personnes. Celle effroyable caiamitéfrappa dune terreur immense le vieux monde quelle dépeupla,causa, comnìe tòujours dans les rnoincnis ierribles, le massacre desiuifs, ci donna naissance à la secie redoutable des Flagellants.

VIII.

La peste n'arréia en rien la prospérité de la colonie, car, au milieulnème de ces angoisses, elle donnait lieu par ses préientions orgueil-leuses à une guerre nouvelle avec Vernse son dternelle rivale. Le khandes Tartares venait de chasser de nouveau de Tana les rnarcbandsgénois ci de s'emprer de leurs magasins. Cccx, qui purent dchapperà celLe aggression inattendue, se retftèreni 'a Caffa (2). La Communerésolut de tirer une prompte vengoance de son ennemi; elle armabus les navires disponiblcs, ravagea la mer d'Azoff, bioqua ies bou-ches du Don, eL forQa ies Tartares 'a accepter ces condiiions qu'au-cnn Chrétien, hors les Génois, ne pourraii venir 'a Tana; dès lors,le commerce de linde, qui se faisait dans ce pori pour le compie desmarclìands de l'Occideni, se trouvait ainsi iransportd 'a Caffa. Génes,

(1) Surcetie pestè à bubons, nomméepestis inguinèrii, voy:icpomelatin de Simon de Covino, publid par M. Litird, Biblioth. de l'Ernie deseI,artes, {re série, t. 11, p. 201 et suiv. Voy . aussi i'introduction un Dca-m&on de Boccaee, ci Villani, I. XII, e. 73, dans Muratori, i. XIII, col.960-965.

(2). M. Villani, I. 1, dans 31cr., t. XIV, col. 83 ; Gregoras, I. XVIII,c.2; Cantaeuzène, I. III, o. '26; Serra, i. Il, p. 320. Cotte aggression cuIlieti en 1349.

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- 15

pour falce observer celLe lei par Pise et par Venise, défendit à buinavire de naviguer dans la mer d'Azof, ci en rnéme temps, elio af-.franchit le port de Caffa de tout droit de douane. Pise accepta cesconditions. Venise demanda quelques priviléges encore, mais ellen'observa pas la convention et engagea SOS marins à traverser le dé-troit. Ceux-ei ohéirent à leur gouvernement. Deux galères génoiscsles saisircit au passage eL les conduisirent à Caffa. Venise se plaignitde celLe violence, et sa rivale, dsireuse avant toul de créer dahs sacolonie un vaste entrepòt pour le cominercedu monde, lui offrit pIa-sieurs cornpensaiions. Un traité allait m€Ine étre signé •quand onapprit li Génes que les Vénitiens venaient de s'allier au khan 51esTartares. La guerre fut alors déclarS. Elle fut sangiante. Venise, àla fin vaincue, malgré sa double alliance avee Constantinople et lesCatalans, fuI obligde,aprèsl a défaite de Sapienza (en 1354), de de-mander la paix. Elle conseutit à s'abstenir pendant trois ans d'cn-voyer ses vaisseaux à Tana et dans la mer d'Azof, et elle s'obligeapendant ce temps à falco de Caffa son porI marchand (1).

lx.

Dès lors la prospéritd du cominerce de Génes ne connut plus debornes, et l'audace de ses enfant.s ne sui pas s'arréter. Soldaia, au-jourd'hui Soudack, peli Le ville maritime au midi de Caffa,tomba versce temps là au pouvoir des coions sous le consumI do légiste Barto-lomeo Jacopo ou de Jacob (2).

Si l'cn en croit Stella (3), l'un des chroniqueurs de ce pays, ce fut

(1) Serra, I. II, p. 339-3'JG; M. Villani, I. V, dans Murat., I. XIV,coi. 48.

(2) En 1365. Voy. Stella, dans Muratori, t. XVII, coi. 1098. Odericocito une iliscriplion qui faR mention, en 3285, d'un consul génois àSoldala.

(3) MCCCLVII. Non scripta inveni, neo auribus percepi gesta aliquaniemoranda. .Yerum ah éducatis Caffm cI senibus fidis habui, eirciteriioc tempus Gotifreduni de Zoaho, affw tunc consulein ipsius loci rnajo-rein pariem muro cingi fecisse ubi erat tenacis terrai lignorunique ordinecircumdatus; ac ipsius loci suburbia muis claudi fecere trcs venerati

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10encore vers celLe époque que Goffredo Zoagli, consul de Caffa, lìtlever depuissantes foriirications eL substitua de fortes assises depierres aux murailies de terre, qui avaient toujours protégé la villecontro toutes les àgressions des Tartares. Los faubourgs jusqu'alorsouverts fureni égalenìent ferrnés. Oderico rejette ce fait cii disantque Goffredo était revétu de la dignité de constil cii 1352 et non en1357; cI queGrégoras pane, hien avant cotte année 1352, de Gattacomme d'une ville bien foriifiée. Il nous sembie ccpèndani facile deconcilier ces deux ncits,qui paraissent d'abord contradictoires. Stella,Sons l'année 1357, dit simpleinent que des vieillards, anciens liabi-tants de la; colonie, lui oni rapporté ce tali. Il est clone fori proba-bie quelaville, déjà munie de fortiflcations, vit sculenient, à celle4poque, ses magistrats réuair ti elle les faubourgs récemment con-struits, sans doute par sulle de l'affluence de nouveaux résidents; ci•ies ancienns murailles, conservécs lors de ce changernerfl, furentsimplernent réparées ci remises en ben état de défense.

C'est eniore vers ce temps (ci! 1374), qtf un G6nois,. Luca Ta-rigo (1), poussé par le dèsir de voir et probablement aussi de fairefortune, essaya de reconna;tre )es còtes de la mer Caspienne. 11 partiide Caffa avec quelques autres cempagnons sur une fuste ([una soi-Lile), traversa la mer d'Azof, remonta le Don jusqu'au pomi où ceIlcuve se rapproche le plus do Volga, ci transporta ti bras sa barquequ'il s'empressa de remettre ti fiot. Prelìtarit du courant, il entra dansla mer Caspienne et se mii à cii explorer les còtcs, non toutefoissansìes piller. Dans celle opération, Tarigo rencontra une tribu de Kalz.moucks qui le battireul et le forcòreni ti se sauver, après lui avoirl'mt perire quclque peu da butin quil ovali récoltd. Malgré cellenu3saventure, le hardi navigacur revint saio ci sauf ti Tana, puis tiCaffa, où lè récit de ses exploits fui déposd dans les archives del'Etal. -

diiectique Janucnses facofius Spmnula de Lueulo; Petrus Caìanus ciBenedictus de Grimaldis, ques iliuc niisil Leonatdus de Monta]do, cumJanuensis csset dux, ut in consulatu succederet unus alii; Quzindo autem:vcnerilGaffa sub regimine Januensium, hactenus sentire non valui, seda cisderu collegi senibus Tanuensihus, dominatum in illa minime foro ve-tustum, quamquam, UL dicitur, non diu est ex ruo ]ialdus de Auria, Caffainon habitatm domicilia primitus fieri fecit, ci primus ibidem babi laviL. "Stella, ari. 4357; daus Muratori, t. XVII, col. 1095. Voy. aussi Gregoras,I. XIII, e. 12; ci Giustiniano, I. IV, r 17

(I) Serra i t. IV, l7O.

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- 17 -Pendant que la sntflrooIe s'épuisait dans une quatrième guerre'

contro Venise, espérant ravir 'a sa rivale l'empire de In Méditerranée,un fait étrange se passait dans la mer Noire. Un bourgeois de Caffa,Megollo Lercari, ne pouvaifl ohtenirraison d'un soufflet pie lui avaitdonnd, 'a la suite d'une partie d'dchecs, un favori de l'empereur deTrébizonde, Jean Cornnène, venait 'a Gènes chercher vengeance (vers1380). Là, sa famille, jalouse de venger son lionneur, lui fourhissajtdeux galères, et le gouvernernent des munitioris et des équipages.Ses coursesfurent heureuses, les vaisseaux do faib]e empereur furentvaincus eL les prisonniers grecs soumis li une étrange muilation. Ala fin, Megollo, rassasié, envova à Jean Comnène, par un de SNcapiifs 'a qui il pardonna, un baril rempli d'oreilles ci de ne, salés;sanglant irophée de sa colère. L'enipéreur, effrayé, livra son faVorique sauva le rnépris du Gdnois, ci signa un trahé déshonorant, maisIbri avalttageux au pays de son ennemi (1).--

X.

Los colonies Italiennes avaicui encore d'autres luties 'a soutenir.Mamai, khan du Kapichak , leur allié, les avail entraiuées dansune guerre contro la Bussie; le mauvais succès de cette entreprise!'engagea 2 1 leur deinander un consid6rable qui lui fui refusé.Pour se venger, il (li ravager le Lerritoire de Caffa par son vassal, Teseigneur o" bey de Sokat, qui dtait voisin. Dix-huit villages furentdétruits par ce Tartane; mais !es Génois s'emparèrent de la Gothiepartie célèbre de la presqu'i!e. Dans ces conjonctures, Mania fuitoni 'a coup déiròné par, un descendani de Gengis Khan, Tockia-misch, qu'il avait dépouil!é CL exilé. Mamai, fugitif 'a son tour, cruitrouver un esile asuré chez ses ennemis de la veille; mais ceux-ci,peu accoutumés. au partn , - le firent périr. lis espéròrent minefaire en cela une chose agréable au nouveau khan. Fu effei, un trai4fui igné, ci le négociateur Tartare fui ce mrne bey de Solcai, nommé

(1) Voy. Giustiniano, Annali, I. IV; FoglieLta, I. VIII; Serra, i. Il,676, etc. M. Sanuto, Storia di Venezia, tlans Muratori, t. XXII, etc.

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- i•S -

Jhancassius ou Jhareas, naguère l'agent de Mamai, et maintenantcelui de son adversaire plus heureux. Le dernier jour de Schaban,fan de l'Hdgire 782 (le 28 novembre 1380), entro Galla et la mon-tagne de Jachim, devant los Trois-Puits, Giannone del Bosco, consulde Galla, assisté des syndics Bernabo Ricci et de Teramo Pichenotti,acceptèrent la convention suivanle (i), dont voici les clauses princi-pales

Tous los Francs, qui séjourneront à Caffa et dans los autres viliesrelevant de la Grande Commuue de Génes, seront fidèles et loyauxeuvers l'empereur des Tartares, amis de ses arui is et ennemis de sesennemis. Los magistrats rendront bonne justice à ses sujots qui vien-dront à Galla. -

Los officiers de l'empereur pourront s'établir à Gaffa, et loshommes de l'empereur allant el vènant, ces o[ficiers pourront leurrendre justice. Lours affaires sereni donc décidées par le Titan (loTitano).

Un douanier (Conierlia) $ourra séjourner dans la ville pour lecompte de l'ompereur et percòvoir les droits dus à l'empire, suivantles coulumes anciennes.

L'empereur reconnait, ainsi quele bey de SolcaL, que los dix-huitvillages dépendant de Soldaia (Soudack), et qui ont éié enlcvdspar tiamai, appartiennent à Génes. Il abandonne en ontre le pays deGothie (2) depuis Simbaro (Balacrava) jusqu'à Soldala.

Tous les marchands qui vont et viennent seront en sùreté sur losterres de l'empereur et ne pourront - étrc sournis à de nouvcauxdoits de dotiane; los colons pourront ensomencer dans le territoirede l'empire et faire paitre lours bestiaux sur ces mémes terres.

Los esclaves, qui viendraient à fuir de Solcat h Caffa, ou bien deGalla à Solcai, seront réciproquement rendus, et Von ne prendrapie trente-cinq asprcs pour droit de trouvaille.

Qùelques années plus tard, en 1387 (3), après de nouvelies hosti-litds, Giannone del Bosco et Gentile Grimaldi, ambassadeurs de Genes,

(1)Serra, t. Il, p. 417 Ce traité, traduit en gdnois ce 1383,-a &i puhli6aveè une traduetion franaise pur M. Silvestre de Sacy, Notiees et cxtr. des,nanusc.,• i XI, p 52. Yoy. aussi Mém. de lInstitut, classe de Littdratureoncienne, 1. III, p. 443 et suiv.

(2) Yo y . Oderico, lett. XIV. p. 137.(3) Serra. t. III, p. 178. La Lraduclioh latine de cc nouvcau traiL, a dt6

kalernent inìprim6c par M. Silvestre de Scv, Noticcs ci Extr, L. XI,

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- 19 -avec un bourgeois de Galla, Ftanois de Gibeleth leur interprèto;signaient dans la plaine près de Soleat, sous la Lente d'Oglan, unoautre convention avec Cotolbogha, bey de Soleat, le nouvel envoyéde Tocktamisch. lls ratifièrent los traités précédents, et •surtout celuicontracté en 1365 par Bartolomeo de Jacob, alors consul à Galla, etCotolbogha, envoyé de l'empereur, qui s'engageait à faire une bonneet suffisante monnaie eL do méme aloi que par le passé.• Dansletraitdde 1387,les deux parties renoncent àsedemandersa-tisfaetion réciproque des crimes ou délits còmnis contre lune d'ellespar los sujets de l'autre contractant; mais si los esclaves, los bietismi les niarchandises volés se trouvent dans un lieti que l'ori puissedésigner, la revendication devra s'opérer. De nìèrne poar la pour-suite d'un ddbiteur. Cotolbogha promet encore de faire bonne etloyale monnaie.

ffiffi

Timour-Lenk approclìait. Ce redontable conquérant, après avoirsoumis 5 sa puissance l'Mie entière, vint sur les còntins de l'Europe,renversa Tocktamisch et ravagéa la flussie. Sarai, la capitale diikhanat du Kaptchak, Astrakan, Tana disparurent. Krim, la fameuseville construite par Batou et qui avait donné son noia 5 la pres-qu'.ile, devint un monceau de ruines. Au milieu de ces ddsastres lescolonies génoises fureni, respectées, sans doute griice à la puissnteintercession d'Acsala, le ministre favori de I'imonr. C'était un enfant(le CalTa, d'origine italienne, qui, ati milieu des Tartares, était restéfldèle 5 la religion de ses pèrès (1).

Cependant, vers 1398, Goffredo Zoagli, consul de Gatta, fut obligéde repousser une double attaque par terre eL par mer, qui dtail ten-tée par une horde tartare restée dans les environs de la Grimée (2).

Malgré les traités que Fon confirmait de temps en temps, les Tar-

p. 62. Yoy. aussi 31dm. dò Littér. ano., 1. 111, p. 116-117 CL Oderico,l•

(i) Serra, t. nr, lì. 175, qui cito à l'appui de son opinion De Excid.Grfteor., XI, 550. Oderico met en doute le récit fail par flizarro, I. IX,

p. 200, de la prise de Gatta par les gn6raux de Timour-Lenck(2) Serra, i. III, p. 179.

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trés étahlis à Soleat r.avageaient presque contjnuollement le terri-toire de la colonie. Il parait que ces vioionces se renouvelaient plusfréquentes vers l'année 4427; et, Si l'on en croit un hisiorien byzan-tin (1), la ville mdme fut eovàhie et saccagde par cesféroces ennemisqui fureut 'a la fin repoussés. Los colons adiessèrent de vives reprd-sentations zia khan, Iladgi Cherai, descendant de Toctamisch (2),qui avaut profité des troubles da Kaptchak, 'a la sulle do la mori deson pareni, pour s'établir en Crimée, s'y rette indépendant et fon-der uno dyhastie détròrnie sculement en 1784, 'a la sulle de la con-quète russe. Le khan, enorgucilli de ses succès, rcpoussa les pré-tcntions de Caffa, qui s'empressa d'avertir la rnétropffle do la situa-lion diflièile où elle se trouvait. Carlo Lomellino partait alors pourréduire la ville de Cembalo (Baiaclava). Cette première excursion futbeureuse; mais i'arméc génoise s'avana ensuite sur Solcai pour laréduirc, ci elle fut obiigée, après un sanglant combat, de se retirer(en 1434) (3). Ce fui 'a la sulle de colte défaute quO Caffa, pour se dé-livrer des incursions continuelle do ses voisins, se soumit 'a leurpayer un tribui, qui sans dome, ne tarda pas 'a &re racheté parqucique autre expédition dirigée d'uno manièrc plus habile ci plus?opportune

XII.

La prospérité extdrieure des diverses colonies de Péra et de lanier Noire, loin d'avoir été atteinte par les dissensions intestines deleur malbeureuse métropole, était devenue plus. grande que jamais,lorsque la prise de Constant.inople par les Turcs iii bui 'a coup fré-mir l'Europe de berreu', ci arréta le développement du conimerce cide la marine de l'lialie, que vini 'a son tour détruire cotnpléLenlelitla découverte du cap de Bònne-Espérance. Génes fui plus vivementfrappe par céttoterrible catastroplie, qui devait, 'a uno époque tròs-

.rapproche, amener l'anéantissement complot de.ses ébablissementsdo la m'or Noire. La république, effrayée et abattue, ruiuée d'ailleurspar sulle de ses désordres intérieurs, crut faire uno opération habilc

(4) Chalcond., I. VI, p 430-151, ddit. fol.; Oderico, p 485-187.(2) De Guignes, t. I, p. 293. Ce khan mourut en 4472. fl est appeMS par

.Chalcondile Atii-Kareen, ci par Cromer Etiigeres. Yoy. Oderico, 'ecocitato. .-

,(3) Giustiniano I. Y, f. 492, Chalcondile, I. e., ci Oderco, P . 1S7.

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- -en cédant (I) 'a son grand &ablissernentftnancier, la Banque de Saìnt-Georges, la propriété entière de ses colonies. Le doge Campo Fre-goso se fit le complice de col acte de faiblesse, et, dans le conseil deI'Etat, deux cent soixante-trois voix approuvèrent ce triste aveu del'impuissance de leur pays. Une seule voix protesta. La propriété en-tière et perpdtuelle de ces possessions lointaines passa donc à laBanque. Elle eut avec le goovernemeni civil, politique et militairele droit ahsolu de haute justice, le gladii potestas et toute juridictiortsur terre et sur mer. Elle pouvait, par ses rnagistrats propres, Suivrepartout ses sujets et exercer sur eu> sa souveraineté, aussi bien 'a

Galla qu'à G.nes méme. Elio eut encore le droit de choisir et denommer ses officiers, echi de los punir, aver mi sans le consente-ment do aoge; et dans cene exorbitante concession, la républiqueréclama seulement pour ses citoyens la faculté de refuser des fone-tions qui venaient changer Iene état.

Ce ne fui pas en ceLle année, ainsi que le prétend Bosio (2), maisbien en 1456, que Mabomet Il, maitre de Sinope, cI préludant déjà àsa conqute future, fona Galla 'a lui payer un tribui de cinquante fau-cons ci de cinq mille cinqceuts &us d'or, chaque année, 'a Constan-tinople. 'a la lune de mai, afin (le la punir de son alliance avec lekhan de Crimée, lors de la guerre contro Trébizonde, guerre qu'ilavait soutenuc queique temps auparavant (3).

La papauté. sintéressait vivement au serI de col établissernent. Ni-colas V () , connaissant l'élat précairc de cette ville, qui avait 'a lutteràla fois contro les Turcs cI contro lesTartares, derivit aux protecteursde St-Georges pour los engager 'a faire uno défense énergique. Deuxnavires équipés 'a grands frais, chargds d'liommes et de munitions,partirent dans ce bui. lls furent arrètés par los Turcs 'a Péra ci loséquipages jetés en prison. Des letires envoyées par voie de terrefirent connaitre 'a Génes ce fàcheux événement. Deux autres galères,plus heureuses, arrivèrent 'a leur destination. Mais, an retour, l'uned'elhs fuI couiS bas par le canon des forts pie les Tures avaient éle-

(I) L'arte de cession est imprim6 dans le E. XI des Notices fl ExLr.,p. 19. Vov. aussi le rapporL de NT. Silvestre de Sac y , Mdr». de Littér.Arie., t 111, p. 123; Oderico, p. 188; Serra, Liii, p. 204.

(2) flosio, IlisI. de Malie, L Il, p. 243.(3) Benedetto Dei, dans Pagnini, Della Decima. 1. il, p. 21F- 249.

() Vov Raynaidi, aun. 4455, n 6; Oderieo. p 489.

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-\f5 des detix còtds da Bospbore. Calixte III () continua Vivre deNico]as V, son prdddcesseur; il écrivit de nouvcau 'ala Banq;e pourI'eucourager dans ses efTorts, CL il accorda de grandes indulgences.Cénes toni cntiùre s'associa h cotte entreprise. On envoyait chaquoannée des hommes, desnavires, des arrnos, des grains 'a CalTa et auxanires vilies de la Crirnée. Le doge ci le consoli dcrivirent métne 'ace sujet 'a Henri VI, rei d'Angieterre, et 'a Aifonse IV, Poi de Pot-Legai. Mabomet Il leur-fernia la mer. Il failut prendre la voie de torte,plus dispendicuse ci plus difficile. Pie Il accorda des immunités'a tous ceux qui fourniraient des subsides. Mais l'Europe ne réponditpas au zèle infatigable du pontife ci de la Banque de Saint-Georges.

Casiniir, roi de Polugne, lui pérrnit, cii 1463, do Ievér un corØsde cinq cenLs Butencs. Ges iroupes, aussi barbars que I'ennrnictu'eI]es aI]aient conibattre, parvenues en Lithuanic, dans un lietiappeid Brcstaw, v mireni le feu ci luòreni, clit-on, un bornuie de cepays. Elies furent entièrerrient ddtruites par les hbitanis , soffltvéscontro IeuFs désrdres et conire ]eurs violences. Un corps d'Italibnssuivit; mais, mieux discrpliné, il arriva en Crimée saio ci sauf, aròsavoir parcouru le méme chernin (2).

CaTa ne se lassait pas de réclamer du secour. Elio 13nvoya en Europe, en 1468, Altione Doria, alors consui, avec Giuliano Fieschi etBartolomeo de Sai) Ambrogio. Le pape Paul liles écouta avee bien-veillance ct leur accorda des sauf-concjuiis (3)

XIII.

Mais la dernière beure a]lait sonnor. La magistrature coloniale,devenue Ì'auxiliaire dune association tinancière, avait perdo de sontntique intégtité ci se laissail facilement gagner par ]a tichesse cinon plus par la justice. Sa corruption amena la ruine du commercegénois dans ces mers. En 1472, l'Office de Saint-Georges cboisit

(1) Raynaldi, ann. 1455, n o fl. lkiynaldi, ano. 165, no' 5 ci O; ano.U61,nt 28, CLC.

(2) -Serra, i.. iii, p. 230. Cromer, I. XXV, p. 379.(8) Ray naidi, non. 1468; Oderico, p. 493.

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ponr consnls Anionio tabella (1) et Oberio Squarciafichi (2); Fnt-teseo Fiesclii leftrfut adjoinb. La nouvelle admiiìistration éLaii 'a peineentre CII fonciionslorsque Hadgi GheraI, doni nous avons parld plushaut, le vainqucurde Carlo Lornellino, vint à mourir (3). Il laissaii septIlIs qui se disputèrent sa stiucession. Mengheli Sei-ai, le sixièine desenfants du khan, qui avail été, élevé 'a Caffa par le gouvenmnientdela colonie, eL dont il avait ét6 d'abord le prisonnier, fui le candidatappuyé per Squarciafichi. Lts Tartares avaient souvent 1'habitude,dans ces instants décisifs, de prendre les Génois conirne los arhitresde leurs affaires. Dans cotte occasicin, le consul fil donc réussir lechoix quil avait forrné dans l'intention d'avoir un vassal et non pasun alli&, et il devint le geòlier des princes -expulsés du 1ròrie tartare.L'oceasion de meitre 'a I'dpreuve la reconnaissance de ce nouveausonverain se prseaia bientòt W.

Le prdfei tartaro, clii nom de Mamac, elief de l'Uffizio delta Cam-pagna, niagistrai chargé de protdger ls intéròls de ses nationanxdan la ville, vint 'a mourir. Suivant la coutume, l'élection de sonsuccessetir appartenaii au khan les adrninistrateurs gnois n'avaienidans celLe circonstance, qite le droit de confirmation. Un nutre 'Tar-taro, nornmé Eminec (5), fut alors pr&enté par le prince torninosuccesseur de Mamac. La votive de ce dernier, rnère prévoyante,prornii trois mille sequins d'or aux gouvernours poor leur faireagrderSeitac, son lìls. Le khan rejeta ce préiendant et voulut faireconfiriner Eminec. Los deux parties, ne voulani ou ne pouvant paen appeler 'a la force , firent uno transaetion. li fui conventi qu'unauire préfet serali 1résenté et accepI (6). Ce fui Carai-Merza qpe lekhan lui-meme amena ii Caffa. Les syndics, désireux de gagner leurstrois mille sequins, osèrent viokr leurs promesses ci forcèreni Meng-heli Serai 'a accepter Seitac, s'il ne vonlait pas voir tous ses anciens

(I .) Catiùlla, suivani Ferrcaaleoui, i. li, p. 97; Anioniotio dehia Gabella,soivant Oderieo, P 160.

(2) Squarcialico, suivant Formaleoni, ibid.(3) Cc khan meurut eri 1472, elusi que nous i'avons dii plus Jinut, p.. i8

noie 2.(4) Voy. Serra, t. III, p. 23..(5) Emrtachbi , suivani Josnla Barbaro (Ramusio, t. Il, f. 96-97), qui

déclare tenir tous ces d6tails d'un tnioin oculaire, un G dnois, Antonio deGuasco, réfugit3 en Géorgie.

(6) Nous croyons clevoir suivre idi le ricit de Fornialeoni, L. li, p. 97-99, qui est entièreinent seniblable A colui de Giustiniano, I. VI

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-tivaux sortir dé la pPiso: aé Soldaia ci venir luidisputer sa coir-ionne. Squai'ciùfichi, le consul nouveau qui venail de rernplacer An-tonio Gabella , fui l'agent principal de cci infàme stratagème Emi-

ec, voyant ses espdrances détruites par la corruption des magisiraiset parla faiblesse de son souverain, résolut (le se venger. Il courutdonc 'a Cunstantinople, el vini offrir à Mahomet li l'occasiorr cherchée

e faire disparàitre Li jhmàis le drapeau Chr6tien de la met Noire. Lesultan méditaii alors la conqutc de l'Europe. il abandonna facilenènt ce projét gieantesque ckins l'esp&-ance de satisfaire des rari-cunes ancienncs, d'étendre en Tartarie sa puissaflce, ci de chasser cesrnarchands insolònts , qui osaieni traverser le Bosphore sans saluerié Croissant fl qui fomentaient la discorde patmi les seclateurs dollslamisrné

Il ordonna, et Ahmet-Giedick-Paclìà, son grand-visir, partii pourla Crirnée sur une flotte de trois tents vaisseaux (1), 'a la tète dunearrnéc de vingt mille hommes, janissaires ci Albauais 1)6Jh, Eminec,devanvant leur attaque, tenait la campagne, 'a la téte dune troupe deTarlares révolttis , ci forait le khan ò se réfugier chcz ses alliés.

Rien n'était préparé pour la défensc. L'ennemi put effectiier fa-cilement le débarquernenl de toutes ses forces el venir librernentmettre le sidge devant Caffa, protégée par une double enceinte. Enquatre jours, la première muraille fui crnportde par l'assai]Ianl, ellaseconde battue eri brèche pat toute l'artillerie Turque. Les magis-trats vinrent demander au pacha une capitulation bonorable. Achrnet]es repoussa en leur disant de se défendre. Ces offres, renouveldesplusieurs fois, furent toujor.irs rejetdes. Cotte latte dura deux mois etdix jours. Elle se termina par la trahison de Squarciafichi, qui unmatin ouvrit au visir une porte qu'il défendait,;

La ville prise ainsi ne fui pas livréQ an pillage (2). Cependant lepacha abandonna 'a ses soldats, sur les marchandises des dI.rangers,une somme de vingt-cinq mille ducats, ella moilié des richosses deshabitants. Il frappa chacun d'eux d'une capitation qui varia,, selonla fortune, l'fige el le sexe, de quinze à ceni asperL Soixante-dix•mille malheurenx, lta]iens, Grecs, Arméniens, Valaques, Circassiens,Mingreliens, etc., furent rdduuts en esclavage. Quinze cents enfants

(I) Ceni vaisseanx si l'ori Cn croit Serra, i. 111, p. 232.— Voy. aussi Be-nedetto Dei, Della Decima, t. ti, p. 2?9; de Guiries, L. III. p. 379.

(2) Vov Serra, ibid..

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tiwent incorpor6s dàns la milice des .jariissaires. Le butin fuimense, si Von en eroi un historien tute (1). -

On raconLe qu"a la . nouvelle de la chute de ceLle ville, l'évéque.nornmé Simon, qui avait quitté son dioeòse pour aller à Kiew ré-elarner le secours du prince palalin, son ancien ami, ci qui avaitréussi à intéresser les Polonais à la fortune de Caffa, mourut de dQu-teur ci d'effroi (2).

Le sori des prisonniers fui 4iffre11t. Squarciafichi requi le juflechàtiment de ses crimes de la main de celui-là méme qui en avaitrecucilli le bnéfiee (3). lI pdrit suspendu à un eroe par le menton..Gabell fut condamné ù ramer sur les galères turques. MeiigheliSerai, qui s'dtait trouvé dans la nécessiid de suivre, le sori de ses.allids, ci qui avait dié condnii également h Constantinople , (ittplus heureux. Traité avee lionneur par le sultan, il put, après unecaptivité de deux ans, retourner dans ses Etats (li), à la condition

cependant (le payer un tribut CL de reconnaitre la suprématie ci lasuzeraineid de la Turqnie. 01) di que, dsircux de- faire appréeierson zèle et sa fidélil.é, il lii pdrir un grand notubre de G6nois, quiavaient réussi à se dérober aux reclierches des vainqueurs, et qui, àla nouvelle de son retour dans la presqu'ile, dtaient aceourns à Krinapur ftlter cet heureux événement.. Un seul Chréiien- fui épargué•;e'était un ami d'enfance du khan. Les ttes de! cos vietimes furenienvoyées à Constantinople, et ornòrent pendant de ]ongues annéesles portes du sdrai] (5).

Mais Mengheli eut le chagrin de voir encore Caffa au pouvoir deì'dtranger. Maboniet 11, peu confiant dans la soumission complètedes Iartares, y éiablit une forte garnison, conimande par un sand-.gack ori un beghjlcr-heghjilick,

Avec celle ville tomhèrent bientòt les autres établissemenLs génois.

(I) Ilist. ottomane, par Saad Eddin Mohammed Ilassan (Coggia Effendi),tr do ture par Galland. Mss. de la BiblioLh. irnp... f. oriental, traductions,

(2) Serra, I. ltl p233. — M. Sestrencewi(z. ilist. de la Chersonèse Tau-riquc, I. 11. Nous regreltons (le no pouvoir ciLer col Ouvrage pie d'aprè3.le marquis Serra. IL nous a dtd impossible de ,io's le procurerà Paris,

(3) Giustiniano, I. VI. Serra, Formaleoni, etc.(4) Si l'cn en eroi te r&it de Josafa Barbaro, I. e., Mengheli fuI oblg

de resaissir ses Etais surErninee, qn'il fit prir dans uno embuscade. Voy.rio Guignes, I. e.

(rfl Serra, i. lii. p. 23-.

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SoidaTh se sournit sans résislance. Le chàLeau de Mankup ou Main-gui, éievé sui' uno montagne, ci presque incxpugnal)le, fui le dernierrefuge d'une population ai; désespoir. La résistance énergique deses habitants forva les TLIrCS à rdduire le sige en bÌocus. L'imprL-4ence du gouvernear; qui se laissa arréier claris tiri eri chassant,par un parti de fourrageurs oiLornans, désorganisa la défense ciamena in prise de cette fokeresse. La garnison fui niassacrée ou ré-(bile eri quolques-rtns cep)dant échappèrent ci aÌlèrentse réfu.gier dans les lfloniagnes da Derbend, où, selon la tradition,ils s'étahiireni ci furent les anctres de la pupulation qui, aujourd'huiencore, porte le noru de Gdnoise.

La plus grande partie des Gl3réticns fui trausporide 2 1 Goristanhi-nopie ci servit à repeupier un quartier tout entier. Queiques familiesgénoises plris pauvres, restèrent Gaffa. Kiles existaieni encore eri1574, lors de l'ambassade de Broniovius chez ics Tartarcs (1).

xlv'

La i'dpublique de Génes o'accepia pas sans proteste' la ruine dela plus belle de. ses colonies. Mais elle ne Iii que des cfforis im-puissants pour ressaisir itue donjinaiion perdue. A la mori de Ma-bomei li, eri les protectet»s de Saint-Georgcs s'cmpressèreqtde se rétinir ci de déiibérer, aver lcs autres offlcie-rs, sar les inoyensde recouvrcrles possessions de la Crirnée et les autresdtahiissementsde la mer Noire. L'dquipement dune flotte fui résolrr (2). El puis legouvernement s'rrèta comme dpriisé par cotte grande résoluiion, ciles luttes intdrieures qui décbiraient cc malheureux pays recommen-cèrent plus puissantes que janiais.

Désorrnais l'irisioire de Caffa ne nous présentc plus aucun intért.Devenue possession turque, cette ville ne se releva pas de sa servi-tude. Dpcuplée en grande partie et à demi ruinée, elle vii sé-ioigner le conimerce <le l'Occident à qui la mer Noire venait d'ètreinterdite. Mie, qui avait étd l'cntrepòi de lunivers, l'intermédiaire

• (i) Broniovius, Descriptio Tartarite, p. 9; de Guigncs, I. e.; Odericop. 490; GiusLiuiano, etc.-

(2) NoticC des tiraahsc. L. XI, p. 83 ; Mém de Littér. anc., L. Hi,

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des deux mondes, la route de la Russie aux Indes, et des ludes à.l'Europe septeutrionale, le point central (le la Cri'me, la clef de lamer d'Azof et peu-&re de la mer Caspienne, devint la rsidenceaccidentelle d'un pacha. Triste retour de la fortune! colle ville, quidietait des bis aux descendants des Mogols, subit leur joug pendantleurs guerres contro les Turcs. En 1635, elle fut prise par le khanqui, vaincu, la rendit ensuite à sas malires, les Ottemans.

Après les Tartarcs, les fiusses. Temhée en leur pouvoir eri 1271,Caffa devintpar le trailé de 17741a propriété du khan Cliahin Guerai;il vint y étabtir sa résidence jusqu'à la cession de ses Etats à Cathe-i'ine Il (I), cession habilement préparée par la diplematie moscovite.La Russie était dès lors malti-esse de la mer Noire et arrivait à Cons-tantinople.

14 Eiirope laissa faire.L'iinpét'atrice venUtI parcourir ses possessions nouvelies. On sait

quel voyage lui fu faire le prince Pelemkin. Ravie par tant de sur-prises et par tant de eboses merveilleuses, clic désira venir jusqu'àCaffa, dont cile sav?iI l'liisteire pris à l'impreviste, lo prince ne putrien pr6parer ori faire dispara,itre. Le cortége impérial s'avana versla ville par los montagnes qui la dominent, alìn de mieux saisir l'en-senible de ce speotacle nouveau. Mais à la vue de ccs mu.railleslé.-.zarddes, de cesmaisons détruilos, de ces bus abattus, de ce portensablé, de tous ces décombres enfin répandus à el là, cI de cesquelqites hahitants errants , an milicu de cos*débris (2) cI (le ce si-lence, Gatherine ne put retenir ses larmes, cI pleura sans dente surcette nalionalité éteinte cI sur cotte grandeur déchue (3). En aper-ccvant cufin la r6alité dans tonte son borreur, elle eut peut-étre lerenords de ce qu'elle avait fail peut-élrc aussi prévoyail-ellel'avenir? -

(I) En 1784. Vov. Aiìtoine de Saint-Joseplì ,Essai sur le consmercc dela mer iVoire p. 45. -

(2) « Terapia Ghristianeruin Romana demolita, mdes dirntm, muri et• In rres, in q nibus G enuonsin in plurirna insignia 01 i uscriplion es la1in• visufltitr, enllapsajacent. » tel est le tahleau que Brouievius fint deCaffaen 1574. Los vovageurs modernes sani bus d'accord sui' cc point. Odericoa recuàilli à la fin de son ouvrage plusieurs de ces inscriptions (lui inié-ressent los families Géneises.

(3) Sdgur, Ménìoircs et Anccdots, iri-12 1 I. Il p. 226.

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SDMINLSTftkFIQN, LOIS. COMMflGE

XV.

Los colonies de la Crimée et de la mer Noire étaient soumises Tifa baule directiori d'un conseil établi à Génes, et qui portait lonom d'Uffizio di Gaz,n'ia (1). Col Office ernhrassait 6galernet dansses atti'ibutions toittes ]cs affaires niaritirnes; c 'est pourquoi il con-tinua à exister nieme après la porte des établissetnents dii Levata,il se composnit de lxiii personnes tirées au sort tous les six mais.Trente-deux citovens, dont les noms étaient renouvel6s tous les ans,concouraient 'a celle dlectiott. Ces huit conseillers tenaient ]eursséances au palais de Saint-Geoi'ges, ci leurs déciions dtaient sansappel.

Le plus ancien de leurs réglements que l'on connaisse reinonte àl'annde 1313 (2). C'est un exirait eri cinquante-neur articles des di-vers décrets, uses et actes publics, qui intéressaieit ,les coloniesde la Crimée (Gazarie), de la Romanie et des autres pays. Le cern-merce maritinie y est régié avee lo plus grand soin. Quani à Caffa,l'adininistration supérieure de la ville ci des auires possessions deCrini6e est con(ìée 'a un consu] ori podestai, magisirat unnuel ¶ maisélu par l'Office une annéc 'a l'avance. Quelquefois plusieurs de cesofficiers, qui devaicnt se sucedder dans leurs fonctions (3), dtaientchoisis en méme temps cI partaient ensenible. Le consul ne pouvaitquitter ses fonctions tani qite san successeur n'éiaii pomi arrivd.L'éloignement obligeait 'a 6lire plusieurs de ces magistrais qui, des-tinés 'a se succdder, partaient eri niénie tenips, albi que le gouverne-meni de la colonie ne fùt jarnais sans direclion. Cependani, en das(I'absence ou de moiL du consul, le conseil et la Commune pouvaienr

(1) Oderico, p. 151, Le,registre des ddlib&ations de ccc Office a diéimpritn6 sons le notti de !niposicio Gazaria dans les Moti ,rrn enta HistoriatPatria-, teges )Ifunicipalcs et par c,traits dans te tonte IV des Lois mari-times de M. Paidessus.

(2) Serra, i. LV, p. 229. Ce rùglement fui compIduS par un scoond r-tligé eri 1403 par Pier-Sorcari. Giuliano Castello ci Antonio di Gavi. Cc se-cond règlernent fai modifré par le doge Tonimaseo rregoso.

(3) Ainsi il t cui trois consuls élus en 1383, ci deux en 1611. Vev.Oderico, p. 169, qui cile Stella.

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4lire le nieiileur dentre eux (1) à la conditinu toutefois qu'it fùt cE-toyen génois, pour gouverner jusqu'à l'an-ivée do nouveau fonc-lionnaire. Il s'appelait consul de Gazarie, dti notti portait laCr'iiuée au inoyen àge.

Le consul. après son installation coiwoquait la Conirnune pourl'élection (In consoli des Viiigt-Quatre; ceux-ci clioisissaient à leartour parmi eux un nouvcau conseil des Six (2.

Le consul jugealt sommairement eL de piano les affaires portéesson tribunal. fi se faisait assister d'un dcrivain ou chancelier. 11 de-s'alt toujours convoquer le conseil des \'ingt-Quatre paur délibérersui' les affaires publiques.- Il devail faire publier chaque rnois par lo crieur ci ò san detrompe (3) que tout habitant, citoyen Cii étranger, qui aurait à seplaindrede l'un des officiers de la Gazarie, n'cOi qu'à se prdsenter hson tribunal afin d'obienir pronipte ci bonne justice.

Trois fois par' an, le consul, le conseil ci l'Office des Six, IJ/fieiodì Provish,ne, appellaient vingt des rncilleurs citoyens pour élire,pour chacun des districts ou des chàteaux relevant de leur juridic-tion, un hornme probe, intelligent, sindico, qui était chargd d'exa-miner l'Sai des fortifications et la conduite des rnagistrats (A).

Le conseil on l'office des Six donnait son avis lors dii changenieiit(los censeurs. Deux rnernbres de ce conseil devaient étre présents àl'invontaire dans tonte suc.cession transrnise ah intestaI (5).

Il y a encore plusieurs règlemeuts sur los citcrnes à Caffa surl'espace àlaisserentre la ville etles forti[ications défense était faiL,de ddtourner l'aquedue de l'éveque arrnénien.

Ontre le syndic clìnrgé de la surveillance des fortilìcations ci dumaintien des règleinenis, il y eri un antro (6), dlii ci envoypar Génes, poni' exarniner la conduite des consuls ci des autres ma-gistrats de la Crirnée.

Aux niassiers (7) étaii conflé le nianiement des deniers publics,due l'on divisait eu Massa Vecchia ci Massa IVvora.

(I) Odeiico, p. 152.(2) Serra, t. IV, p. í7-78 ci i . 230.(3) Cotte prescription faisali pai-tie da règlenient do 1403. Serra, I. IV,

p. 231.(4) Serra, L e.; O_dàrico,p. 160.(5) Règlernent de 1313.(6) Odorico, p. 160.7) Orjerico, p. 162.

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Il ce est question dans les registres de Saint-Georges.Sous les inassiers venaicnl. les ,nacs:rali, qui avaient l'inspection

Ces vivres cI les taxaient.Los forces militaires de la colonie éiaient comrnandées par un clì5-

telain ci par des capitaines. Le capitaine de la Porte, il eapi)UP1Odella l'o, tu, commaudail en 11j84 los Oi'qu.H, troupe étrangère auscrvice de Gènes. Il s' avail encore il cnpiltiìio delle m,lra et ilcapitano del Borgo que Von pourrait traduire par le capibine du gù-nie ci le cominandant de piace.

11 y avail en rnflre un ante conseil nommé l'Uffizio della Cam-pagna (I), magistrature €itrangère cliargée de i'en'dre la Justice auxTartares, cI de veiller sur leurs iutérèts (bus la ville meme. La no-mination (le l'orfìcier tartare clidrgé de ces fonctions appar(eÙflit nekhan. Le conseil (le Caffa avail seulernent le droit (te confirmerl'élection. On a vu plus bani quelle influence cuI celle organisaUonsur la ruine de la colonie. Quatre habitants, peut-l.re tariares • as-sistaient ce magisirat. Ce tribunal fui en grande vén6raiion cbez leshabitanLs de la Crimde qui, bien que n'dlant pas ses jusiiciables, lechoisircnt coniine Iene arbitre danjeurs conlestations , bnl il étaitiniègrc. Et encore aujourd'bui les Tartares ci les Circassiens se sou-vienneni des Génois cI de leur jusiice (2).

Nous avons p'rlé cldjà de la crcaiion d'un évcIié à Caffa. Il y encuI encore deux d'ilabÌis à Soldala ci ì, Cembalo (BalacIa'a). LeqArméniens obéissaient 'a un évéqne qui, au xvni' siècle, avait établisa résidence 'a Caffa dans le moiiastùre de Sourp Azvaazine (la SainteVierge). Son diocèse s'étendaiL jusqu'à Kafardée. Los Grccs y recOil-naissaieni également l'autorilé d'un ,nétrnpoitaiIL (lui Se (fllzìiifiatt

(fl Giustiniano, I. V, f. 226; Oderico, p. 153-1.54; Serra, t. IV p, '7677; j'r0jj5 a extr. des ,nanuse. LXI, : 52; Iraitd de 4380 Cetribunal,sur lequl nous navo,,s pas de renseignerncnts 1'òsiIif., nous sciuble avoftété iustitué par le klla[( alin (le rendre Ì;i juslice 'uN Tartarns, qui sernientélablisàCaflh, Ci peul-Cire aussi alin de jlIgcr les COnICstRtiOnS calce lesdtoyens de la colonie ci les naiurels da pavs. Ni Oderico ni Serra noutfaiL attention au IraiW de 1380. Le Titan, lo Titano, dout il est questiondans ce traité., dtaiL sans audun doute le norn du prfet Tartare chcf del'Uffizio della Campagna.

(2) Nous l'e pouvous passer Sons sileuce le heau Irait du consul GerQlaino Giustiniani Moneglico, qui refusa les prsel'ts d'un Enarciland dont ilavail sauvé la fortune, en lui disani que l'Etai le paail pour rendre la justicc ci non pour rcc.evoir des présents. - Vny. Giustiniano, I. W. 136.

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d'archevéque de Goiliie ci de Qiffa. Au xviire siècle, les caitoIiqucnavalent plus qu'uiie église placée sons l'invocatjoii de Saint-Picrre,ci toinhaiit en mine; le mite gree possédait encore dome églises..Los Arrnéniens, plus nonilircux ci sans doute plus riches, pouvaientcucore se ri3unir dans trente-deux ternples . (i).

xv'.

Los statuts de l'Office de la Gazarie (2) contenaient éggalornent unenseinble de ròglements sur la marine ci le cornmerce. L'annemenides galùres soumis 'a la volonté de l'Office, leur dirnension ci leurcapacité, les vivres, la prohibition de les vendre 'a des étrangers.l'obligalion de naviguer de conserve pour la Bomanie, la Syrie,Clivpre ci la Fiandre, enfin l'ob4issance absolue aux ordres de l'Of-fico de la Gaznrie; la défense d'hiverner 'a la Tana ci de clnrger desmarchandises dans ses rivières iii dan.s celle qui est entro Caffa ciSoldala; d'ariner en com'se ci de faire clans l'année plus de deuxvoyages aux iners di, Levani; tout était prés'u. Los maielots dcvaieiitrecevoir trento once.s de biscuii par jour ils.étaient forc6s d'obéirau patron dii navire, d'exdcui.er ses ordres ci de ne jamais l'aban-donner; le patron pouvait ciichaìner tous les insolents ci les récal-ciirants.

Los navires ne devaient pas prendre les esclaves in servir de re-fuge aux fugitifs. Aucune société ne ponvait étre faite ni avec lesSarrazins ei avcc les 'l'nrcs.

Caffa était dans la nièr Noire le pomi còiitral du coninìerce mari-time de l'Occident.. San pori vaste ci ben sitti, 'a labri do bus losvents, ù iexcept.iou toutelbis de ccliii dir nord-ouest, pòIis'ait conLenirdes vaisseaux dii plus fori tonnage; qui, l'Itiver, étaient lirés à terretrès4facilemeiit.. La rade Sii assise sui' un forni ti'ès-linioneutcomme Loirics lescòtes de la prcsquile. Ceni iiavires y élaient runistrès-ais(ment. An xviire.siècle, ci meme encoPo a i, coinmencenientde ce siècle, on y vuvail par un plus de quatre ccnLs bàiiments mar-r.bands (S).

(i) Thunrnann, Deser. de la Grimde, p. 41; Odericd, p. 168; de Gui-gnes, ero.

(2) llègleiuont de 2313 à 1403. Serra, i. IV, p. 220-230.(3) Cliaiclin I. e.; Peissonnel, Commette de la mer Noire, t I. p. 15;

Gamba, dc

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Au xvt siècle, tes foires éLaieni célòb:-es c i trù-fréqùenLées (i).Mi temps de Peissonnel, il y avail ericore marchi to[is les jours. Levendredi cependant le rnarchd &ait plus imporiani.

XVII.

Suivaiit-Pegoloiti (2), les droits de douane s'éleva[ent au x,v'siècle-à Lrois pour ceni perus au profit de la colonie sur tonte espèce (lemarchandise de quelque pays qu'elle vint. Les .citoyens de Genespayaicnt un derni pour ceni en sus, ce qui forinait un des revenus,de la métropole.

Les poids ci les inesures éiaieni au inoven Age si diffdrents d'Etaià Etai, de province à province, et mme de ville à ville, quil esttrès-diflìcile, lorsque Von renconire mie indication seinblable. d'endétermincr la valeur rdelle. Nous savons àicore pur Pegolotti qu'àCaffa, doux muids de bIé valaient un cinquièrne de plus qu'à Pdra;le muid de Caffa faisaii à Venise quati'e stare ci un tiers. En Chypreon se servait de la niéme mesure de capacité (3). A Porto Pisano,sur la mer d'Azof, l'on suis'ait égalemeni le métne systèmc de poidseL de mesures. -

Osi se servait à Goffa de ces dif:fdrents poids (4)1° Le cantare qui était celui de Génes;2° La fibra grosse 7 libre valaient le cantino de Génes3° Le ruotolo doni i/IO 217 faisaient une libra grosse;4° La fibra soffi/e qui était celle de Gènes5° Le saggio, qui était le meme qiie le petit SO9O (le Pero. 72

saggi, poids de Goffa, valuieni une livre, libra, de Gènes (5).60 Le sommo dtait l'équivalent de 8 onces 112, once e mezzo.Les nionnaies (6) comme les mesures et les poids, étaient dgale-

meni bien diverses. Le florin de Génes valail, en 1422, à Caffa 30 se-

(1) Voy. le voage de Contarini, dans Bergeron, I. Il.(2) Dita Mercatura, e. v., p. 7.(3) llzzano, Delia Mercatura, e. 751 p. 490.() Pegol5tti, ouv. Cit., p. 6.() PegoloiLi, p. 226.(6) Uzano, ouv, cit., e. 50, p. 160; e. 27, p. M.

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-tjuins. Le sowrno, qui étak aussi un poids daigent, reprdsenLjt

èti-iron 6 florjns de Génes, plus ou inoins, selon le Litro.

La lettre de chauge, au xvt siècle, tirée de Gènes sur Caffa, étàit àtrente jours de voe eL l'avis exigeait un tenips aussi long (1).-

La colonie génoise était l'entre.p6t centr-al d'un comn1ere im-mense. Toutes los inarjnes de l'Italie, los Grecs, ]es ProvenQaux&.y donnaient rendez-vous. Venise y abordait avee les go/ioni, vais-seaux de haut bord, doni les flancs contenajent à la fois des mar-chandises et des soldats pour se défendre contro les attaques des pi-rates turcs.

XVIII

L'Occidentvei,ajt surce march dernander aux Tartares des grainspour nourrir des pays moins fertiles le lin, le chanvre, los soies dela Perse, le bei,rre, la lame, la cire, le miei, le br, le cuivre le se],les cuirs, cdlèbres déjò dans l'antiquité. Los Génois achetaient encorel'or et I'argent, dpouil]es-de l'Mie, los lapis de Perse, le caviar, ceproduit infect des .eufs de I'esturgeòn los épices, ]e poivre et le gb-gembre. La cire était achetde SUFLOIIL par Ics Vénitiens qui la pi'épa-raiont admirablemenL Los fourrures &ajent alissi très-ostjmées.Venise, nialgré I ps défonses de Rome , apportait des armes à cespopulations agricoles et belliqiieuses, et emp]oyait comme Inoyend'échange de petits miroirs et des perlos (le veri-e, monnaie cou-rante dans l'Orieni, des étoffes comnnlnes et que]ques pièces d'or,qui sorvaient d'urnements aux femrnes de cos pays (2).

Los draps franais, produits de Toulouse, (lo Narbonne, do Mont-pellier et des autres villos du Midi, dtaient fort recherchds. Les \'é-flìtiens \'ol)aient los achoter aux foires de Beancairo de Saint-Gilles,de Montpellier et mérne (le Pràvins (3).

Il y avait etmore un nutre trafic (4) qua los efforts de la papauté

(I) Uizano, e. 8, p. 101.(2) Yoy . Formaleonj, on, cit., i. Il, P . 142, 141 3,

-

de.; Oderico, p. 155;Peissonnel, miv. cit. passim.; AuLoine de SaicÌL-Joeph, uno. cit.; le Re-cucii de Bergeron, Ics voyages de -1{euillv, de Gamba, etc., ole.(3) l'ego]oui, e. 9, p. 40.(4) Serra, i, IV, 1) . 72; Los ortlonnancos do l 'Uffizio di Ga:arja roIii-baiani c g genre de comnlorce. Vov. Sanuto, I. I, pari. liii, e. li; Bouar,

I. ti, p. 27; Fornialooni. i. Il, p. 415, ole.

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'.ont jamais pii ai'réter le commenie des esdaves. Les Circassicnsalimentaient surLoui ce niarché. Pauvres ci incapables de trouerdans le travail le seni rnoyen donné à lhomrne pour vivre, ces p0-pulaiions inhumaines venaieni vendre Ieurs enfants. Les Vdnitiensles .achetaient et les t.ransporlaient h Ale,andrie. C'éiait le moyenq1Ien)pIoyaient les sultans pour recruter sans cesse leur troupe dos!.larneloucks. Le fpet était le seni bénélìce recuc-illi dans cci infàmetrafic, qui néanmoins devait &re avantageux, puisque tout le monde.stnmlait. Ilertrandon de la Broquière, en t1131, rencontra à Da-mas un maicliand de Caffa, un citoyen de Gènes, Gentile Impe -niale (i.), qui venail dans ce pays aclieter des esclaves pour le compiedii sultan d'Egypte. Los vilies maritirnes d'ltalie privées par leuréloignernent des avanlages qu'offrait la traite des ngres, se iivrè-reni longlemps encore apròs la perle de ieurs colouies du Levant àla traite dos blaPc. Àu xvir siècle, Von voVait encore li Gnes desesclaes tures, curieux speciacle clans une république d.mocra-tique (2. cotte spécialitd du cominerce (le Caffa continua juSqllCdanss eroiers temps. Suivant Peissonnel l'un de nos consulsdatis larner Noirenu xviir siècle, un v vdnait de Constantinople ci(los autres vilIes do lOrient achoter ces nialheureux que los mar-ebands do la Crirnée allaient dbercher cii Circassie, cii Géorgie, chezles Kalrnoucks et clìez les Ahazcs (3). Le khan s'était réservé le droitde los .choisir le prernier. Le prix venali, selon la valeur de ceLleniarchandise, dcpuis ciriq jwsqu'ò six nulle piasli'cs.

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A Caffa s'arrtaientles vnisseaux de hauLbord qui, h raison de leurdimension, ne pouvaient entrer dans la mér d'Azof, nier peu pro-fonde. là, veoaient de petits navires () plats,d'une consiruction per-ticulière, qui Lransportaient los rnarchandises de l'Europe de cepori à Tana, à l'embouchure do Don, poun de là los répandre dans

(1) Mdrnoircs de l'institui, Sniences inorales, L. Y, p. 510.(2)Doubdan, Voyage ù la Terre-Sainte, e. 59.(3)Peissonnel, i. I, p. 179; de Guinos i. III, p. 39.(4) Forrnaleoii, i. Il, p. 53.

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toute la lìaùte AsÌe jusqu'aux Indes, CL qui rapportaleol de Tana àCaffa les produits de ces contrées éloignéà. C'était encore le che-miti qui conduisaii à la Chine. Marco Paolo Iesuidt, et Peolotti (1);qui en trace l'itinéraire el en indique les étapes, prdtend qu'un mar-ctiand, aceompagnd d'un esclave et d'un interprète, pouvait, en huit àntùf mois et sans danger, traverser, depuis Tana jusqu'à Pékin, ceLLeVaste étendue de pays, fleuves, foréts, déserts, peuples .divers etsouvent ennewis; cette route lui semble rnme préférable à cellequi partait de Trébizonde et qui I raversait le centro de l'Asic. Cesvoyages imnlenses, entrepris ainsi par de simjles marchands char-gS dobjets précieux, seniblent un fait inoui, et aujourd'l-iui mémeseraient inexdcu[ab]es 11 faut ajouter que ces voyagèurs, Vénitiensou Génojs, dtaient les amis des Mogols et invoquaieflt souvent Jeurnom con-me mi puissant sauf-conduit.

Ces hordes barbares, qui accueillaient si facilement les enfants del'Europe accourtis chez eux à travers mille dangers, se lirent sanss'eh douter les intermédiaires (le la vieille civilisatior i asiatique. ìlsmontrèrent à ces aventuriers, leurs nouveaux arnis, diffdrenteg ma-cliines bien imparfaites eL leurs produitsplus in.parfairs encore. C'estainsi que les planches à imprimer en usage en Chine au xe siècle;los cartes à jouer, Première application de la gravure sur bois, con-nue dans ces pays dès l'annde 1120; la ìlonnaie de papier, premieressai du billet de banque; la polarité de l'aimant, et enfìn la poudreà canoa furent apportées en Europe. Car, aiosi que l'a fait remarquer'un savant illustre (2), toutes ces choses, qui apparaisseot tout à coupau xr siècle daus l'Occident n'ont pas une origine certaine; ellesnOnt pas été inventées par un bomme de génie, et ne sont pas lesdécouvèrtes de la science ; elles sont le produit capricieux du ha-sani, et les lìomnies qui s'en servent, sont des ouvriers et des gensignorants. Admirable effort de l'humanitd, qui toujours pro- esse,niéme dans sol

i somrneil, et ne dédaignc pasde se servir des instru-Inents les plus vils et les plus étranges! Ces invasions tartares, quiportent la terreitr jusque dans l'Europe, qui semblent ne laisseraprès elles que des ruines et des déserts, sontpourtant les dlus char-gés par la Providence de Inettre en contaet les deux civilisations ari-

(I) Pegdloti, e. 2, p. 2.(2) Abel Rdmusat Jldrnoircs de l'Académie da Inscrip. a Relica-Lettres, 5). séric, 5. VII, p. 412c1 suiv.

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Liques, l'une, qui, stationrlaite, ne veut plus apprendre dans son iso-lement orgueiliewc, lautre, qui se transfornie depuis des siècles,cherclle !a voie nouvelle qui lui donnera l'empire de I'univers.

Leur mission finie • les Tartares firent piace aux Lircs ottornans,ennemis redoiftables que l'Europe combattit et quelle protége au-jourdbui. Los Turcs [ermèrent la rner Noire au comnlerce de l'Oc-cident. Alors des marines nouvelies se formèrent: Vasco de Gamadécouvritlec.ap de Bonne-ESpérance etia route des Indes; ChristopheColomb retrouva l'Àrnérique, et le monde connu sagrandit d'unmonde nouveau.

A.

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