INTRODUCTION : LES QUATRE IMPOTS SUR LES ......Le double critère de « domicile fiscal » et de «...

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1 PARTIE II. L’IMPÔT S PARTIE II. L’IMPÔT S PARTIE II. L’IMPÔT S PARTIE II. L’IMPÔT SUR LES REVENUS UR LES REVENUS UR LES REVENUS UR LES REVENUS (1/2) (1/2) (1/2) (1/2) INTRODUCTION : LES QUATRE IMPOTS SUR LES REVENUS CHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 1. L’ ARTICLE ARTICLE ARTICLE ARTICLE I ER ER ER ER DU DU DU DU CODE DES IMPÔTS SUR L ODE DES IMPÔTS SUR L ODE DES IMPÔTS SUR L ODE DES IMPÔTS SUR LES REVENUS ES REVENUS ES REVENUS ES REVENUS En vertu de l’article 1 er du Code des impôts sur les revenus : « Sont établis à titre d’impôt sur les revenus : un impôt sur le revenu global des habitants du Royaume, dénommé impôt des personnes physiques ; un impôt sur le revenu global des sociétés résidentes, dénommé impôt des sociétés ; un impôt sur les revenus des personnes morales belges autres que les sociétés, dénommé impôt des personnes morales ; un impôt sur les revenus des non-résidents, dénommé impôt des non-résidents (…) ». Il existe donc, sous la dénomination « impôt sur les revenus » quatre impôts différents : l’impôt des personnes physiques ; l’impôt des sociétés ; l’impôt des personnes morales ; l’impôt des non-résidents. Le système de l’impôt sur les revenus est organisé de telle manière que tout contribuable est soumis potentiellement à un de ces impôts et à un seul. Il n’est donc pas possible d’être simultanément soumis à deux des impôts précités. CHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 2. L ES ES ES ES CRITÈRES DE DISTINCT CRITÈRES DE DISTINCT CRITÈRES DE DISTINCT CRITÈRES DE DISTINCTION ION ION ION Si le contribuable est une personne physique, il est soumis soit à l’impôt des personnes physiques 1 , soit à l’impôt des non-résidents 2 . 1 Il s’agit alors d’un habitant du Royaume, notion définie au chapitre suivant. 2 Il est alors un non-résident, notion qui vise toute personne physique qui n’est pas un habitant du Royaume.

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PARTIE II. L’IMPÔT SPARTIE II. L’IMPÔT SPARTIE II. L’IMPÔT SPARTIE II. L’IMPÔT SUR LES REVENUSUR LES REVENUSUR LES REVENUSUR LES REVENUS (1/2)(1/2)(1/2)(1/2)

INTRODUCTION : LES QUATRE IMPOTS SUR LES REVENUS

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 1111.... LLLL’’’’ARTICLE ARTICLE ARTICLE ARTICLE IIIIERERERER DU DU DU DU CCCCODE DES IMPÔTS SUR LODE DES IMPÔTS SUR LODE DES IMPÔTS SUR LODE DES IMPÔTS SUR LES REVENUS ES REVENUS ES REVENUS ES REVENUS

En vertu de l’article 1er du Code des impôts sur les revenus :

« Sont établis à titre d’impôt sur les revenus :

1° un impôt sur le revenu global des habitants du Royaume, dénommé impôt des

personnes physiques ;

2° un impôt sur le revenu global des sociétés résidentes, dénommé impôt des sociétés ;

3° un impôt sur les revenus des personnes morales belges autres que les sociétés,

dénommé impôt des personnes morales ;

4° un impôt sur les revenus des non-résidents, dénommé impôt des non-résidents (…) ».

Il existe donc, sous la dénomination « impôt sur les revenus » quatre impôts différents :

– l’impôt des personnes physiques ;

– l’impôt des sociétés ;

– l’impôt des personnes morales ;

– l’impôt des non-résidents.

Le système de l’impôt sur les revenus est organisé de telle manière que tout contribuable

est soumis potentiellement à un de ces impôts et à un seul. Il n’est donc pas possible d’être

simultanément soumis à deux des impôts précités.

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 2222.... LLLLES ES ES ES CRITÈRES DE DISTINCTCRITÈRES DE DISTINCTCRITÈRES DE DISTINCTCRITÈRES DE DISTINCTION ION ION ION

Si le contribuable est une personne physique, il est soumis soit à l’impôt des personnes

physiques1, soit à l’impôt des non-résidents2.

1 Il s’agit alors d’un habitant du Royaume, notion définie au chapitre suivant. 2 Il est alors un non-résident, notion qui vise toute personne physique qui n’est pas un habitant du Royaume.

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Si le contribuable est une personne morale, il faut distinguer successivement :

a. Si cette personne morale a son siège social et son siège de direction effective à

l’étranger, elle est soumise à l’impôt des non-résidents ;

b. Si son siège social ou son siège de direction effective est situé en Belgique, elle est

soumise, suivant le cas, à l’impôt des sociétés ou à l’impôt des personnes morales.

Parmi les personnes morales dont le siège social ou le siège de direction effective se trouve

en Belgique, on distingue en outre :

a. D’une part, celles qui sont soumises à l’impôt des sociétés (c’est-à-dire toutes les

sociétés belges, ainsi que certaines associations),

b. Et d’autre part, les personnes morales soumises à l’impôt des personnes morales (il

s’agit des autres associations).

Parmi les associations (qui, rappelons-le, se différencient des sociétés par le fait qu’elles

n’ont pas un but lucratif), la loi prévoit des critères complexes permettant de distinguer

celles qui sont soumises à l’impôt des sociétés (comme de véritables sociétés), et celles qui

sont soumises à l’impôt des personnes morales. En résumant très fort ces conditions, on

peut dire qu’une association (association sans but lucratif, association internationale à but

scientifique, fondation privée, établissement d’utilité publique,...) est soumise à l’impôt des

personnes morales (en principe plus avantageux), sauf si, elle ne respecte pas le caractère

non lucratif que lui impose son statut légal, ou si, tout en poursuivant un but non lucratif,

elle recourt néanmoins, à titre accessoire, à des opérations lucratives, en suivant des

méthodes industrielles et commerciales3.

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 3333.... LLLLA MÉTHODE SUIVIE PARA MÉTHODE SUIVIE PARA MÉTHODE SUIVIE PARA MÉTHODE SUIVIE PAR LE LE LE LE CCCCODE DES IMPÔTS SUR LODE DES IMPÔTS SUR LODE DES IMPÔTS SUR LODE DES IMPÔTS SUR LES ES ES ES

REVENUS REVENUS REVENUS REVENUS

Le Code des impôts sur les revenus fixe d’une manière détaillée les règles relatives à l’impôt

des personnes physiques.

3 Voyez les articles 2, § 2, et 220 du C.I.R. 1992. Ces notions complexes font l’objet, dans la doctrine, de

sérieuses controverses, qui sortent du cadre de l’étude de l’impôt des personnes physiques. Voy. notamment

à ce sujet T. AFSCHRIFT et M. DAUBE, « La fiscalité des associations sans but lucratif, des associations

internationales sans but lucratif et des fondations », in La réforme du droit des A.S.B.L. et des fondations,

Bruxelles, Editions du Jeune Barreau de Bruxelles, 2003, pp. 199 et s.

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Pour l’impôt des sociétés, tout en prévoyant des dérogations importantes, le Code renvoie

à certaines règles régissant l’impôt des personnes physiques. En pratique, il s’agit

essentiellement d’un renvoi aux règles relatives aux bénéfices des exploitations

commerciales, industrielles ou agricoles.

Ainsi, l’article 183 du C.I.R. 1992 dispose que « sous réserve des dérogations prévues au

présent titre, les revenus soumis à l’impôt des sociétés ou exonérés dudit impôt sont, quant à

leur nature, les mêmes que ceux qui sont envisagés en matière d’impôt des personnes

physiques ; leur montant est déterminé d’après les règles applicables aux bénéfices ».

Les règles régissant l’imposition des personnes physiques sont par conséquent très

importantes, même pour l’imposition des sociétés.

Par ailleurs, ce sont les articles 49 et suivants du C.I.R. 1992 qui fixent, pour les personnes

physiques, les règles relatives à la déduction des frais professionnels. Plutôt que de répéter

les mêmes principes, l’article 183 du C.I.R. 1992 se borne à préciser qu’on appliquera pour

les sociétés les mêmes règles que pour les bénéfices des personnes physiques. Or, ces règles

comprennent les articles 49 et suivants du C.I.R. 1992, qui régissent donc aussi les sociétés.

Sous réserve des règles dérogatoires propres aux sociétés prévues aux articles 195 et

suivants du C.I.R, l’article 49 du C.I.R. 1992 s’applique donc également aux déductions de

frais professionnels opérées par les sociétés.

Les dispositions du Code des impôts sur les revenus relatives à l’impôt des non-résidents,

renvoient également, dans une très large mesure, aux règles relatives à l’impôt des

personnes physiques ou à l’impôt des sociétés (art. 230 du C.I.R. 1992), tout en édictant des

règles spécifiques, qui y dérogent sur certains points.

Les articles 1ers à 178 du C.I.R. 1992, relatifs à l’impôt des personnes physiques forment

donc un « tronc commun » applicable également aux autres impôts sur les revenus, sauf

dans la mesure où des dispositions spécifiques à ceux-ci y dérogent.

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TITRE I.TITRE I.TITRE I.TITRE I. LES PERSONNES SOUMISLES PERSONNES SOUMISLES PERSONNES SOUMISLES PERSONNES SOUMISES À L’IMPÔT DES PERES À L’IMPÔT DES PERES À L’IMPÔT DES PERES À L’IMPÔT DES PERSONNES PHYSIQUES SONNES PHYSIQUES SONNES PHYSIQUES SONNES PHYSIQUES

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 1111.... LLLLA NOTION DA NOTION DA NOTION DA NOTION D’’’’ «««« HABITANTS DU HABITANTS DU HABITANTS DU HABITANTS DU RRRROYAUMEOYAUMEOYAUMEOYAUME »»»» ---- RRRRÈGLEÈGLEÈGLEÈGLE GÉNÉRALE GÉNÉRALE GÉNÉRALE GÉNÉRALE

En vertu de l’article 2, §1er, 1 °, alinéa 1er du Code des impôts sur les revenus :

« Par habitants du Royaume, on entend :

a) les personnes physiques qui ont établi en Belgique leur domicile ou le siège de leur

fortune (…) ».

L’article 3 du Code dispose quant à lui que « sont assujettis à l'impôt des personnes

physiques les habitants du Royaume ».

La catégorie de contribuables des habitants du Royaume est de loin la plus importante.

Outre ces personnes, sont également considérés comme habitants du Royaume, au sens de

cette disposition, certains diplomates et fonctionnaires, même s’ils ne vivent pas en

Belgique4.

Section 1. Le double critère de « domicile fiscal » et de « siège de la fortune »

Le texte de l’article 2, §1er, 1°, alinéa 1er du C.I.R. 1992 implique qu’une personne est

soumise à l’impôt des personnes physiques :

– Soit si elle a en Belgique son domicile ;

– Soit si elle a en Belgique le siège de sa fortune.

Il n’est pas requis que les deux éléments existent simultanément en Belgique5.

Dès que l’un des deux critères est applicable, la personne est soumise à l’impôt des

personnes physiques en Belgique. Il importe peu, par ailleurs, que cette personne soit aussi

considérée comme domiciliée ou résidente, du point de vue fiscal, dans un autre pays, sous

réserve de l’application des Conventions préventives de la double imposition. Dans

l’immense majorité des cas, une personne qui a en Belgique son domicile fiscal y a aussi le

4 À ce sujet, voir ci-dessous. 5 Cass., 7 septembre 1965, Pas., 1966, I, p. 34 (arrêt DERKS).

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siège de sa fortune, mais même dans les cas exceptionnels où il n’en est pas ainsi, un seul

de ces deux éléments est suffisant.

Contrairement à certains pays étrangers comme les États-Unis, la nationalité ne joue en

droit fiscal belge aucun rôle pour déterminer si une personne physique est soumise ou non

à l’impôt des personnes physiques. Ainsi, un Belge qui réside à l’étranger n’est pas un

habitant du Royaume, tandis qu’un étranger résident en Belgique l’est.

Une personne peut avoir sa résidence en Belgique et le siège de sa fortune à l’étranger. Si

les deux pays adoptent les mêmes critères que la loi belge, l’intéressé sera résident des deux

pays sur le plan fiscal. Il peut en être de même lorsque les critères d’assujettissement à

l’impôt sont différents suivant les pays.

Lorsqu’une convention préventive de la double imposition a été conclue par la Belgique

avec un autre pays, la double imposition est en principe évitée grâce à cette convention,

qui détermine les critères permettant de considérer l’intéressé comme résident fiscal dans

un seul des deux pays.

Lorsqu’il n’existe pas de telle convention, il peut arriver qu’une même personne soit

considérée comme un résident, du point de vue fiscal, dans deux pays différents, voire,

dans certains cas, dans aucun des deux. Il en résulte donc parfois une double imposition

ou, au contraire, l’absence de toute imposition.

Section 2. La notion de domicile fiscal

a) Principes

D’après l’article 2, §1er, 1°, alinéa 2 du C.I.R. 1992, « l’établissement en Belgique du domicile

ou du siège de la fortune s’apprécie en fonction des éléments de fait (…) ».

Le domicile fiscal est l’endroit où l’intéressé a établi le centre essentiel de ses intérêts

vitaux, privés et professionnels. Cette notion a été traduite par la célèbre formule de

Hauchamps : « le domicile fiscal est là où une personne a sa femme, son chien, sa pipe et ses

pantoufles »6.

6 Cité par C. SCHREUDER, « L’habitant du Royaume », in Ann. Not., 1967, p. 24.

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Suivant une jurisprudence constante, il y a lieu d’entendre par « domicile fiscal » un

domicile spécial de fait qui peut être indépendant du domicile civil et de la nationalité, qui

s’établit, s’affirme et se consolide par un ensemble de faits et circonstances7.

Par domicile, la loi fiscale ne vise donc pas le domicile de droit civil mais une situation de

fait8, caractérisée nécessairement par une certaine permanence ou continuité9. Le domicile

suppose que le contribuable réside en un endroit déterminé pendant un certain temps.

Ainsi, le domicile se caractérise nécessairement par une certaine permanence ou

continuité10 11 12.

b) L’intention

En vertu des articles 102 et suivants du Code civil, le domicile civil est le lieu où une

personne a son principal établissement et se caractérise par le fait d’une habitation réelle

dans un lieu et par l’intention d’y fixer son principal établissement. Il a traditionnellement

été enseigné que l’intention de la personne présentait une certaine importance en droit

civil, alors que le droit fiscal n’avait quant à lui égard qu’à la réalité des faits.

L’importance de cette différence entre les notions de domicile civil et de domicile fiscal

tend actuellement à se réduire, et ce pour diverses raisons :

• L’administration fiscale elle-même semble accorder une certaine importance au

critère subjectif de l’intention du contribuable13.

• La réglementation relative à l’inscription des personnes au registre de la population

prévoit qu’une personne doit être inscrite dans la commune où elle a sa résidence

7 Cass., 6 octobre 1941, , Pas. 1941, l, 368 (arrêt Nogueira). 8 Voir notamment en ce sens : Civ. Mons, 17 février 2011, RG n° 09/3205/A, www.fiscalnet.be. 9 Civ. Liège, 15 février 2010, RG n° 00/1663/A, www.fiscalnet.be. 10 Cass., 15 novembre 1990, Pas., 1991, I, p. 280. 11 Cass., 3 juin 2002, F010017F, Pas., 2002, I, p. 1270. Voyez également Cass., 16 janvier 2004, Pas., 2004, p.

101. 12 Cass., 16 janvier 2004, Pas., 2004, pp. 101 à 103, n° 27. 13 Voyez à ce sujet la circulaire administrative du 5 mars 1992 no CI.RH.241/424.903 ayant trait au régime des

personnes qui travaillent dans des pays n’ayant pas conclu de convention de double imposition avec la

Belgique, dont le texte – notamment quant à la détermination de la résidence fiscale – peut, à notre sens, être

utilisé en dehors des situations strictement visées. Il dispose qu’« il devra résulter de circonstances de fait que

le contribuable qui part pour l’étranger afin d’y exercer une activité professionnelle, a l’intention de ne plus

conserver en Belgique son habitation réelle, effective et continue ou le siège de sa fortune ».

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principale14. On définit la résidence principale comme étant le lieu où vivent

habituellement les membres d’un ménage composé de plusieurs personnes, unies ou

non par des liens de parenté, ou comme étant le lieu où vit habituellement une

personne isolée. La détermination de cette résidence principale se fonde, selon la

réglementation, sur une situation de fait, c’est-à-dire sur la constatation d’un séjour

effectif dans une commune durant la plus grande partie de l’année. Différents

éléments peuvent être pris en compte dans cette appréciation en fait, et notamment

le lieu que rejoint une personne après ses occupations professionnelles, le lieu de

fréquentation scolaire des enfants, les consommations énergétiques, le lieu du travail,

le séjour habituel du conjoint ou des autres membres du ménage15.

• La réglementation existant en matière civile précise que la seule intention manifestée

par une personne de fixer sa résidence dans un lieu déterminé est insuffisante pour

justifier l’inscription de cette personne à titre de résidence principale16.

Il a été jugé que le contribuable qui est détaché temporairement par son employeur, établi

en Belgique, pour une courte durée (deux ans en l'espèce) et qui, lors de son départ, n'avait

pas l'intention de s'établir définitivement à l'étranger, doit être considéré comme résident

belge et ne peut prétendre être imposé comme non-résident pour les revenus de la période

imposable pendant laquelle il était à l'étranger17.

c) La nécessité d’un ensemble d’éléments

La preuve de l’existence d’un domicile en Belgique résulte d’un ensemble d’éléments18, tels

que la durée de la présence sur le territoire national, les modalités d’un éventuel contrat de

travail, le fait que le contribuable soit propriétaire d’un immeuble en Belgique ou titulaire

d’un contrat de bail d’habitation, qu’il ait des comptes en banque dans le pays, la présence

des membres de sa famille en Belgique, la consommation d’énergie, l’adresse mentionnée

sur les cartes de visite, le fait que le contribuable rentre régulièrement en Belgique,

pendant ses congés, s’il travaille à l’étranger, l’endroit où les tiers atteignent normalement

l’intéressé,... Aucun de ces éléments n’est cependant décisif en soi19 : c’est l’ensemble seul

qui est déterminant.

14 Loi du 19 juillet 1991, M.B., 3 septembre 1991 et A.R. du 06 juillet 1992, M.B., 15 août 1992. 15 A. PIERON, L’impôt des non-résidents, Collection fiscale de l’École de Commerce Solvay, Bruxelles, 2002,

pp. 17 et s. 16 A.R. du 16 juillet 1992, op. cit., article 16. 17 Civ. Bruxelles 30 avril 2008, F.J.F., 2009, liv. 7, p. 764 18 Voyez en ce sens : Liège 18 septembre 1991, F.J.F., 1992, p. 13. 19 Voir en ce sens : Liège 24 avril 1996, Cour. fisc., 1996 (reflet), p. 381 ; F.J.F. 1996, p. 355.

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Les personnes qui travaillent temporairement à l’étranger peuvent être considérées comme

des habitants du Royaume, si la durée de l’éloignement n’est pas suffisante20.

L’administration estime à cet égard, sans toutefois que cette opinion soit confortée par une

jurisprudence unanime, qu’un séjour d’une durée de 24 mois à un endroit fixe à l’étranger

constitue un délai minimum pour que l’on puisse considérer que le domicile est situé à

l’étranger21. Cette exigence ne paraît pas conforme au principe d’annualité de l’impôt.

Section 3 : Les présomptions de résidence

a) La présomption réfragable de domicile fiscal au lieu d’inscription dans le registre de la

population

L’article 2, §1er, 1°, alinéa 2 du C.I.R. 1992 prévoit que : « (…) Sauf preuve contraire, sont

présumées avoir établi en Belgique leur domicile ou le siège de leur fortune, les personnes

physiques qui sont inscrites au Registre national des personnes physiques. »

Il résulte de cette disposition qu’une personne physique inscrite au registre de la

population d’une commune belge sera présumée également être résidente (d’un point de

vue fiscal) en Belgique.

Il ne s’agit toutefois pas d’une présomption irréfragable. La preuve du contraire peut en

effet être apportée. En pratique, la personne inscrite comme résident belge au registre

national est réputée être un habitant du Royaume, sauf si elle démontre qu’elle ne réunit

pas les conditions requises à cet effet.

La Cour de cassation a rappelé cette présomption dans un arrêt du 31 mai 200222. Dans

celui-ci, la Cour a précisé que l’inscription au registre national des personnes physiques

impliquait la qualité d’habitant du Royaume, sauf si le contribuable en apportait la preuve

contraire.

La présomption prévue par l’article 2 du C.I.R. 1992 entraîne un renversement de la charge

de la preuve. En principe, il appartient à l’administration fiscale de démontrer qu’un

contribuable à la qualité d’habitant du Royaume. La conséquence de cette présomption est

que l’administration est dispensée d’apporter la preuve de l’existence en Belgique du

20 Voyez L. HINNEKENS, « Nouvelles tendances de la jurisprudence relative à la notion d’habitant du

Royaume », R.G.F., 1991, p. 209. 21 Voyez notamment à ce sujet : L. HINNEKENS, op. cit., p. 209 et Com. I.R., no 3/66. 22 Cass., 31 mai 2002, Pas., 2002, liv. 5-6, p. 1265.

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domicile fiscal d’une personne inscrite au registre national comme résident belge. Il

incombera, au contraire, au contribuable de démontrer qu’il n’a pas son domicile fiscal en

Belgique malgré le fait qu’il soit inscrit au registre national comme résident belge.

Une personne qui n’est pas inscrite au registre national n’est pas nécessairement un non-

résident, mais pour la soumettre à l’impôt comme habitant du Royaume, le fisc devra

prouver par d’autres moyens qu’elle a cette qualité.

b) La présomption irréfragable du domicile d’une personne mariée

au lieu du ménage

- Principe

Selon l’article 2, 1o, alinéa 3 du C.I.R. 1992, « Pour les personnes mariées 23qui ne se trouvent

pas dans un des cas visés à l’article 126, § 2, alinéa 1er, le domicile fiscal se situe à l’endroit

où est établi le ménage ».

Ainsi, lorsqu’un époux réside à l’étranger pour y travailler, alors que son conjoint et, le cas

échéant, le reste de sa famille, reste(nt) en Belgique, il conservera la qualité d’habitant du

Royaume, sauf si une séparation de fait est intervenue. Dans ce cas d’ailleurs, il n’est plus

possible de parler de « ménage ».

La même observation peut être faite à propos de personnes mariées qui choisissent, par

exemple pour des raisons professionnelles, de ne pas cohabiter. Dans ce cas, il n’y a aucune

raison de considérer, surtout en l’absence d’enfants communs, que le « ménage » se trouve

chez le conjoint résident belge plutôt que chez l’autre. En réalité, dans une telle hypothèse,

le fait du mariage n’implique plus celui du « ménage », et en l’absence de celui-ci, la

présomption légale est sans effet.

Pour l’application du Code des impôts sur les revenus, des dispositions légales particulières

relatives aux impôts sur les revenus et des arrêtés pris pour leur exécution, « les

cohabitants légaux sont assimilés aux personnes mariées et un cohabitant légal est assimilé

à un conjoint24 », afin d’éviter toute discrimination sur le plan fiscal.

23 C’est nous qui soulignons. 24 Art. 2, § 1er , 2° du C.I.R. 1992.

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- Objectif de la présomption

L’article 2, 1o, alinéa 3, du C.I.R. a été adopté pour faire échec à la jurisprudence suivant

laquelle les époux pouvaient avoir des domiciles fiscaux distincts25.

Traditionnellement, on considérait en effet qu’une personne avait son domicile fiscal à

l’endroit où se trouvait son foyer d’habitation familiale. Si un contribuable partait travailler

à l’étranger pour plusieurs années et que son conjoint et ses enfants restaient en Belgique,

on considérait que ce contribuable avait maintenu son domicile fiscal en Belgique.

La jurisprudence a cependant évolué. La mobilité sans cesse croissante au niveau

professionnel a effectivement remis en cause certaines des solutions traditionnelles

adoptées par la jurisprudence en matière de détermination du domicile fiscal.

Il a donc été admis que deux conjoints pouvaient avoir un domicile fiscal différent. La

jurisprudence a cessé de considérer les membres d’une cellule familiale comme un tout

auquel il fallait donner un traitement unique au point de vue du domicile fiscal et s’est

orientée vers une définition plus individuelle du domicile ne nécessitant plus

d’appréhender les membres d’une cellule familiale comme un tout, auquel il faut donner

une situation unique dans l’espace. Certaines décisions ont donc admis, dans le cas où le

contribuable avait formellement transféré son domicile civil à l’étranger et y séjournait

effectivement pendant de longues périodes, que ce contribuable avait cessé d’avoir son

domicile fiscal en Belgique, nonobstant le fait que sa femme et ses enfants avaient continué

à séjourner dans le pays.

L’administration considère toutefois que « le séjour à l’étranger pour raisons

professionnelles peut constituer en lui-même une présomption de l’homme suffisante quant

à la qualité de non-habitant du Royaume pour autant que les liens personnels avec la

Belgique soient rompus ou que la rupture des liens avec le foyer familial soit complète et

définitive.

Les liens personnels, familiaux et autres intérêts vitaux qu’un contribuable a maintenus

avec la Belgique, ont toutefois plus d’importance que le séjour physique à l’étranger,

d’autant plus si le séjour est de durée limitée. La détermination de la qualité d’habitant ou

de non-habitant du Royaume dépendra dans une large mesure du fait que le contribuable

25 Doc. Parl., Chambre, 1993-1994, no 1421/1, p. 7.

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laisse sa famille en Belgique ou l’emmène avec lui à l’étranger (ou qu’il n’a pas de famille)

»26.

Ainsi, pour l’administration, le critère familial est le plus déterminant de la qualité

d’habitant ou de non-habitant du Royaume. Cette position doit être nuancée en raison de

la jurisprudence suivant laquelle un contribuable qui travaille à l’étranger peut y avoir

établi son domicile fiscal et être considéré comme étant un non-habitant du Royaume,

bien que sa famille soit restée en Belgique et qu’il rentre dans ce pays pendant ses congés.

Selon cette jurisprudence, le critère familial n’est plus déterminant à lui seul même s’il

demeure très important.

Le problème ne se pose évidemment pas si le départ de l’un des conjoints à l’étranger a lieu

à la suite ou après une séparation de fait. Dans ce cas, en effet, la vie familiale est rompue et

chacun des conjoints doit être considéré fiscalement comme un isolé.27

Section 4. La notion de siège de la fortune

Le siège de la fortune est l’endroit d’où la fortune du contribuable est effectivement gérée

et non l’endroit où elle se trouve physiquement.

Ainsi, ce n’est pas parce que l’on possède un compte bancaire en Suisse que le siège de la

fortune se trouve en Suisse. Si le contribuable donne à la banque suisse des instructions

depuis la Belgique, le siège de la fortune se trouve en Belgique. De même, une personne qui

aurait conservé en Belgique l’administration de ses biens, serait considérée comme un

habitant du Royaume, même si elle était devenue résidente d’un autre pays28.

La détermination du siège de la fortune dépend également d’un ensemble concordant

d’éléments de fait, soumis à l’appréciation souveraine du juge du fond.

Section 5. Les personnes visées à l’article 4 du Code

Conformément aux articles 4 et 227 du C.I.R. 1992, les membres des missions

diplomatiques en poste en Belgique sont soumis à l’impôt des non-résidents, bien qu’en

principe, ils résident effectivement en Belgique pendant la durée de leur mission. Ces

26 Comm. I.R., 3/59 à 61. 27 Voyez infra. 28 Voyez Cass., 7 septembre 1965, Pas., 1966, I, 35.

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personnes ne sont donc pas assujetties à l’impôt des personnes physiques et ce bien

qu’elles « habitent » le Royaume.

À partir de l’exercice d’imposition 2018 (revenus 2017), les demandeurs d’asile – personne

physiques inscrites au registre d’attente – seront également considérés comme des non-

résidents (à l'exception des personnes qui avaient déjà établi leur siège de fortune en

Belgique avant leur inscription dans le registre d'attente et des conjoints de contribuables

assujettis à l'impôt des personnes physiques). 29 Jusqu’à présent, leur inscription sur le «

registre d’attente » rendait applicable la présomption relative à l’inscription sur les

registres de la population. Ils étaient donc considérés comme des résidents fiscaux belges.

L’objectif de ce changement législatif est d’éviter que les demandeurs d’asile puissent

bénéficier du crédit d’impôt pour enfant à charge dès leur arrivée sur le territoire, sans

percevoir de revenus professionnels

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 2222.... CCCCAS DAS DAS DAS D’’’’UN CHANGEMENT DE STAUN CHANGEMENT DE STAUN CHANGEMENT DE STAUN CHANGEMENT DE STATUT AU COURS DTUT AU COURS DTUT AU COURS DTUT AU COURS D’’’’UNE ANNÉE UNE ANNÉE UNE ANNÉE UNE ANNÉE

Il arrive naturellement que des personnes qui résident en Belgique au début de l’année

partent s’établir à l’étranger au cours de celle-ci, ou inversement.

Dans ce cas, les intéressés sont des habitants du Royaume pour la partie de l’année pendant

laquelle ils ont vécu en Belgique, et des non-résidents pour l’autre partie. La taxation au

titre de l’impôt des personnes physiques se limitera par conséquent aux revenus perçus

pendant la période pendant laquelle ils étaient des habitants du Royaume30.

Par ailleurs, lorsqu’une personne vient à décéder au cours d’un exercice, les revenus de

l’exercice en cours, ainsi que ceux qui lui sont encore dus au moment du décès, ou même

qui apparaissent en raison de celui-ci, sont imposables, à l’impôt des personnes physiques,

au nom de la succession du défunt.

Il en est même ainsi pour certains revenus perçus postérieurement au décès, qui peuvent

être imposés, au nom de la succession, même pour des exercices imposables postérieurs à

celui du décès. Tel est le cas de certains revenus professionnels perçus après le décès, en

vertu de conventions conclues avant celui-ci, comme des arriérés d’honoraires d’un

29 Art. 4, 4° du CIR 92 ; Voy. ég. Circulaire 2017/C/37 concernant le statut fiscal des demandeurs d’asile du

14.06.2017. 30 Voyez Bruxelles, 17 juin 1968, R.F., 1969, p. 106.

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membre d’une profession libérale ou des rentes stipulées payables au-delà du décès par

exemple.

Cette imposition n’a rien à voir avec les droits de succession. Elle porte en effet sur les

revenus du défunt.

Ainsi, si Monsieur X, commerçant, vient à décéder le 1er juillet 2010, il sera imposé à

l’impôt des personnes physiques, sur les éléments suivants :

– Les revenus des six premiers mois de 2010 ;

– Les sommes restant à facturer au 1er juillet 2010 ;

– Les plus-values de cessation d’activité : si l’on constate, lors du décès, que la valeur de

certains éléments affectés à l’activité professionnelle du défunt a augmenté depuis leur

acquisition, celle-ci fera l’objet d’une imposition, au titre de plus-value constatée lors

d’une cessation d’activité. Nous verrons que cette plus-value est taxable en principe au

taux réduit de 16,5 % en vertu de l’article 171, 4° du C.I.R. 1992 (sauf sous certaines

conditions, en cas de poursuite de l’activité par les héritiers (art 46, 1o, du C.I.R. 1992).

Par ailleurs, l’ensemble des éléments professionnels du patrimoine de Monsieur X, tout

comme ses éléments privés, seront soumis aux droits de succession. Les revenus restant à

percevoir (plus-values et créances) seront donc aussi soumis aux droits de succession, sous

déduction toutefois de l’impôt des personnes physiques dû par la succession, qui est

déductible, au même titre que les dettes de celle-ci.

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 3333.... IIIINCIDENCE DE LNCIDENCE DE LNCIDENCE DE LNCIDENCE DE L’’’’EXISTENCE DE CONVENTEXISTENCE DE CONVENTEXISTENCE DE CONVENTEXISTENCE DE CONVENTIONS PRÉVENTIVES DE IONS PRÉVENTIVES DE IONS PRÉVENTIVES DE IONS PRÉVENTIVES DE LA DOUBLE LA DOUBLE LA DOUBLE LA DOUBLE

IMPOSITION IMPOSITION IMPOSITION IMPOSITION

Il a été précisé ci-dessus qu’un contribuable marié, détaché ou établi à l’étranger mais dont

le conjoint et, le cas échéant, la famille sont établis en Belgique, devait être considéré

comme résident fiscal belge, à moins qu’ils soient séparés de fait.

Cette présomption, étendue aux cohabitants légaux, peut amener à des conflits de

compétence fiscale entre deux États souverains, dont la Belgique.

En effet, comme la notion de résidence fiscale peut être interprétée de manière divergente

d’un État à un autre, certains contribuables pourraient dès lors se retrouver résidents de

deux pays différents, subissant par-là, une double imposition.

C’est pourquoi la Belgique a conclu, avec un grand nombre d’Etats, une convention

préventive de la double imposition.

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L’article 4 de la convention-modèle préventive de la double imposition établie par l’OCDE

et reproduit dans la plupart des conventions conclues entre les Etats membres, dispose :

« 1. Au sens de la présente Convention, l’expression ‘résident d’un État contractant’ désigne

toute personne qui, en vertu de la législation de cet État, est assujettie à l’impôt dans cet

État, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre

critère de nature analogue et s’applique aussi à cet État ainsi qu’à toutes ses subdivisions

politiques ou à ses collectivités locales. (…) » (art. 4, §1er, convention-modèle OCDE).

Il s’agit ici aussi d’une question de fait.

Le même article, en son paragraphe 2, précise les règles de détermination du domicile

fiscal en cas de conflit en prévoyant quatre critères alternatifs qui sont retenus l’un à défaut

de l’autre : - L’Etat où la personne dispose d’un foyer d’habitation - L’Etat où est situé le centre de ses intérêts vitaux - L’Etat où elle séjourne de façon habituelle - L’Etat dont elle possède la nationalité

La résidence fiscale d’une personne physique est appréciée par rapport à un faisceau

d’indices qui relie cette personne à un Etat de manière étroite. Le domicile légal ne

constitue, dans ce cadre, qu’un critère permettant de déterminer l’Etat dans lequel le

contribuable sera soumis à l’imposition suivant le type de revenu qu’il perçoit.

Dès lors, s’il n’est pas requis qu’un résident fiscal réside de manière permanente dans l’Etat

dans lequel il souhaite être imposé, il faut à tout le moins qu’il y soit présent physiquement

pendant une période importante de l’année, généralement estimée à 183 jours.

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TITRE II.TITRE II.TITRE II.TITRE II. APERCU GÉNÉRAL DE LAPERCU GÉNÉRAL DE LAPERCU GÉNÉRAL DE LAPERCU GÉNÉRAL DE LA DÉA DÉA DÉA DÉTERMINATION DE LA BATERMINATION DE LA BATERMINATION DE LA BATERMINATION DE LA BASE SE SE SE IMPOSABLE ET DE L’IMIMPOSABLE ET DE L’IMIMPOSABLE ET DE L’IMIMPOSABLE ET DE L’IMPÔT PÔT PÔT PÔT

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 1.1.1.1. LLLLA NOTION DE REVENUA NOTION DE REVENUA NOTION DE REVENUA NOTION DE REVENU

L’impôt sur les revenus est un impôt direct parce qu’il frappe une situation durable31,

essentiellement les revenus périodiques produits par la fortune (par exemple, les loyers,

dividendes, intérêts,) ou obtenus par le travail (salaires, honoraires, ...). Il se distingue des

impôts indirects, comme les droits d’enregistrement et de succession par exemple, qui

visent des opérations ou des faits occasionnels (comme par exemple l’achat d’une maison,

une donation, un legs, ...).

Pour l’administration, l’impôt est direct lorsqu’il est perçu par rôle. Le rôle est la liste

nominative de tous les contribuables de la circonscription sur laquelle le directeur régional

des contributions porte le nom du contribuable et le montant de l’impôt dû par lui. Le rôle

signé par le directeur constitue un titre légal de perception qui oblige le contribuable à

payer l’impôt, sans quoi il pourra y être contraint32.

Au sens administratif, l’impôt direct concerne tous les impôts sur les revenus, mais aussi

les taxes de circulation, les taxes relatives aux appareils publics de divertissement, etc.…, ce

qui n’est pas toujours conforme au critère jurisprudentiel de la distinction entre impôts

directs et indirects.

L’impôt des personnes physiques frappe certaines catégories de revenus. Que faut-il

entendre par « revenus » ?

Un revenu est le produit périodique du travail ou d’un bien et sur lequel l’État perçoit

annuellement un impôt33. Aussi, il peut être considéré que l’impôt sur le revenu atteint le

contribuable sur la richesse que lui procurent chaque année ses biens ou son travail.

Traditionnellement, il existe une distinction entre l’impôt réel et l’impôt personnel34.

31 Cass., 24 avril 1958, Pas., I, p. 942. 32 Cass., 17 juin 1929, Pas., I, p. 246. 33 P. COPPENS et A. BAILLEUX, Impôts sur les revenus des personnes physiques et des sociétés, Bruxelles, Larcier,

1975, p. 11. 34 M. DASSESSE et P. Minne, Droit fiscal, 4e éd., Bruxelles, Bruylant, 1996, p. 32.

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L’impôt réel frappe la matière imposable sans tenir compte de la situation personnelle dans

laquelle se trouve le contribuable. Tel fut par exemple le cas de l’ancien impôt sur les

portes et fenêtres (abrogé après la première guerre mondiale).

La technique de l’impôt réel considère le revenu en lui-même comme une valeur détachée

du bénéficiaire. Cette technique ne tient donc pas compte d’autres revenus dans le chef du

bénéficiaire ni de charges qui pèsent sur ce dernier. L’impôt sera donc dit « réel », comme

tel est le cas actuellement de la taxe de circulation par exemple.

L’impôt personnel tient quant à lui compte de la situation dans laquelle se trouve le

contribuable et, surtout, de ses capacités contributives. Ceci traduit l’idée que deux

personnes qui disposent des mêmes revenus n’ont pas nécessairement les mêmes facultés

contributives si elles ne se trouvent pas dans la même situation ; par exemple, parce que

l’une a des enfants à charge et l’autre pas.

Cette technique dite de l’impôt personnel tient compte du facteur personnel du

bénéficiaire du revenu et ne considère donc plus ledit revenu comme une valeur relative.

La taxation variera dès lors en fonction de la place du revenu au sein des autres revenus du

bénéficiaire et en fonction de la présence des charges qui caractérisent la situation d’un

contribuable.

Il existe, par ailleurs, de nombreux cas d’impôts réels personnalisés, c’est-à-dire d’impôts

réels pour lesquels il est tenu compte de la situation personnelle du contribuable. Par

exemple, le contribuable qui a des enfants à charge peut obtenir des réductions de

précompte immobilier dans certaines conditions (voyez infra). La loi accorde aussi des

réductions ou exemptions de précompte immobilier en fonction de la qualité du locataire

(handicapé, nombre d’enfants à charge, affectation de l’immeuble à une œuvre de

bienfaisance et absence de but de lucre dans le chef du propriétaire).

La notion de « revenus » est en droit fiscal, beaucoup plus large qu’en droit privé.

Alors que le Code civil ne s’intéresse qu’aux revenus des biens, compris comme étant tout

ce qu’un bien produit sans altération de sa substance35, le droit fiscal vise bien d’autres

catégories de « revenus », dont essentiellement les revenus de l’activité, professionnelle ou

non. Il en est ainsi tant des activités indépendantes (bénéfices et profits) que des activités

salariées (rémunérations), et même des revenus « de remplacement » qui se substituent à

ceux normalement produits par une activité (rentes et pensions). Cela recouvre également

35 Articles 547 et s. du Code civil.

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des revenus d’activités occasionnelles, exercées en dehors d’une activité professionnelle qui

sont alors taxables en tant que revenus divers36.

De plus, les accroissements des patrimoines, qui ne sont pas, au regard du droit civil, des

revenus, mais des produits de certains biens, sont parfois imposables. En droit fiscal, en

effet, les plus-values peuvent être taxées, soit lorsqu’elles portent sur des biens

professionnels, soit même, dans certains cas, lorsqu’il s’agit de biens privés37.

Pour déterminer si un montant est un « revenu », il faut dès lors, en matière fiscale, se

référer exclusivement aux notions telles qu’elles sont définies par le Code des impôts sur

les revenus, sans avoir égard aux dispositions du droit civil.

Il existe également une distinction traditionnelle entre les revenus de la fortune et les

revenus du travail.

Les revenus de la fortune peuvent être définis comme étant des revenus à caractère

permanent en raison de leur source durable, non liée à la personne du bénéficiaire.

On peut y ranger deux catégories de revenus : les revenus immobiliers et les revenus

mobiliers.

Les revenus du travail sont plus précaires et ce pour différentes raisons : d’une part, ils sont

liés à la personne du travailleur et dépendent donc de la capacité de ce dernier ; d’autre

part, ils sont liés à l’état du marché du travail ou de la vie économique. Ceci n’empêche pas

le système fiscal belge de favoriser nettement les revenus du capital par rapport à ceux du

travail.

Les bénéfices des entreprises ont cette double provenance : le travail de l’exploitant et le

capital qui y a été investi.

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 2222.... LLLLES CATÉGORIES DE REVES CATÉGORIES DE REVES CATÉGORIES DE REVES CATÉGORIES DE REVENENENENUS IMPOSABLES US IMPOSABLES US IMPOSABLES US IMPOSABLES

Il n’existe pas de principe général permettant l’imposition de l’ensemble des revenus. Au

contraire, la franchise générale des personnes et des choses a pour effet que tout revenu

non visé par une loi n’est pas soumis à l’impôt.

36 Article 90, 1o, du C.I.R. 1992. 37 Voir infra.

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En raison du principe de la légalité de l’impôt, il est nécessaire qu’un texte légal spécifique

prévoie l’application de l’impôt pour chaque catégorie de revenus (article 170, § 1er, de la

Constitution).

L’article 6 du Code des impôts sur les revenus prévoit la taxation de quatre catégories de

revenus :

– Les revenus des biens immobiliers ;

– Les revenus des capitaux et biens mobiliers ;

– Les revenus professionnels ;

– Les revenus divers.

Chacune de ces catégories fait l’objet d’une définition précise dans le Code. Elles seront

examinées dans les chapitres suivants.

La liste des catégories reprise dans le C.I.R a donc un caractère limitatif. Un revenu qui ne

figure dans aucune de ces catégories ne sera, en conséquence, pas taxé. Ainsi, même la

catégorie des revenus divers comporte une liste limitative (art. 90 du C.I.R. 1992) de

revenus imposables. Cela signifie que si un revenu ne tombe dans aucune des trois

premières catégories précitées, il ne doit pas être automatiquement considéré comme

étant un revenu divers. Cela ne sera le cas que lorsque ce revenu est visé expressément par

l’article 90 du C.I.R. 1992. Si tel n’est pas le cas, le revenu ne sera pas imposable du tout.

L’administration n’a toutefois pas toujours égard à ce principe. Par exemple, lorsqu’elle a

recours à une taxation par signes ou indices d’aisance, il arrive que l’administration, qui se

fonde alors sur des dépenses du contribuable et ne connaît pas leur origine, tente de les

imposer comme « revenus d’origine indéterminée », en les taxant au taux marginal. Cette

attitude est discutable car l’article 6 du C.I.R 1992 ne prévoit pas de catégorie de revenus

dits « d’origine indéterminée 38 ».

38 Pour des auteurs et des décisions de jurisprudence qui s’opposent à cette pratique, voyez S. SEGIER, « Une

condamnation catégorique des « revenus d’origine indéterminée » », Act. fisc., 2010, n° 35 ; J. VAN DYCK,

« Pas d’impôt sur des revenus d’origine indéterminée », Fiscologue, 2006, n° 1025, p. 13.

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Par un arrêt du 1er octobre 200439, la Cour de cassation a précisé qu’en vertu de l’article 341

du C.I.R, les dépenses qualifiées de signes et indices sont réputées provenir de revenus

imposables. Dans cet arrêt, la Cour a également rappelé que l’administration devait

toutefois prouver que les revenus du contribuable provenaient d’une catégorie bien

déterminée de revenus, sans qu’il s’agisse nécessairement de revenus professionnels. Il

semble toutefois qu’elle ait quelque peu modifié sa position quant au fait que les revenus

constituent des revenus professionnels. En effet, dans un arrêt rendu le 16 octobre 2009, la

Cour de cassation paraissait avoir avalisé le raisonnement selon lequel les revenus retenus

sur base des signes et indices sont présumés provenir de revenus professionnels40, dans le

cas de personnes exerçant une activité professionnelle.

Dans un arrêt plus récent du 21 novembre 2014, la Cour de cassation a validé la

qualification des revenus non déclarés en des revenus d’origine indéterminée alors

imposables selon le régime ordinaire d’imposition au taux progressif par tranche41.

Elle confirme ainsi la position de la Cour d’appel de Bruxelles qui considère que lorsque

l’origine des fonds n’est pas démontrée, il convient de considérer que ces revenus sont des

revenus nets imposables au sens de l’article 6 du C.I.R. 1992 dont l’origine reste

indéterminée et pour lesquels le régime de taxation ordinaire (imposition globale) est

d’application, à défaut pour le contribuable de démontrer que lesdits revenus devraient

être taxés distinctement à un taux plus favorable42.

Cette position est très critiquable car elle ignore le texte légal43. En effet, si l’article 341 du

Code permet de taxer ces revenus et que, par hypothèse, leur origine est effectivement

indéterminée, rien ne nous paraît justifier qu’ils soient nécessairement taxés au taux

marginal, par globalisation. La présomption de l’article 341 permet de dire que, sauf preuve

contraire, ils font partie d’une des catégories de revenus imposables, mais non de présumer

qu’ils devraient être globalisés. À défaut de preuve contraire, il faudrait à notre avis

présumer qu’ils ne sont taxables qu’au taux séparé le plus bas, soit 10 %.

39 Cass., 1er octobre 2004, J.D.F., 2006, liv. 1-2, p. 5, concl. D. THIJS et note M. BALTUS ; R.G.C.F., 2005, liv. 4, p.

257 et note J.-P. BOURS et T.F.R., 2005, liv. 279, p. 365, note W. HUBER. 40 Cass., 16 octobre 2009, Pas., 2009, II, p. 2312. 41 Cass., 21 novembre 2014, R.G n° F130099N, www.fiscalnet.be 42 Bruxelles, 24 février 2010, R.G. n°2006/AR/3067, www.fiscalnet.be, Bruxelles, 15 juin 2011, R.G n°

2008AR2516, www.fiscalnet.be, Bruxelles, 19 février 2015, RG n° 2011/AR/2997, www.fiscalnet.be 43 Dans le même sens, voyez E. BOIGELOT, « Les revenus retenus sur base des signes et indices sont présumés

provenir de revenus professionnels : la Cour du côté de l’administration fiscale », www.fiscalnet.be).

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CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 3333.... LLLLE PRINCIPE DE LA GLOE PRINCIPE DE LA GLOE PRINCIPE DE LA GLOE PRINCIPE DE LA GLOBALISATION DES REVENBALISATION DES REVENBALISATION DES REVENBALISATION DES REVENUS US US US

Section 1 : Principe

Avant 1962, chaque type de revenus faisait l’objet de plusieurs impositions distinctes. On

appelait ces impositions les impôts cédulaires, parce que les impôts étaient répartis entre

des catégories dites cédules.

Il existait trois impôts cédulaires :

a. La contribution foncière pour les revenus immobiliers ;

b. La taxe mobilière pour les revenus de capitaux ;

c. La taxe professionnelle pour les revenus du travail.

À côté du système cédulaire, un impôt personnel frappait, à titre complémentaire, le total

des revenus déjà imposés à titre cédulaire. Il s’agissait de l’impôt complémentaire

personnel ou impôt de superposition.

Le système cédulaire faisait varier les modes de perception selon la nature des revenus (par

exemple, retenue à la source pour les rémunérations).

Le principe de la globalisation des revenus introduit par la réforme fiscale de 1962 a mis

fin, dans son principe, au système de l’impôt cédulaire.

Depuis 1962, la loi impose en principe des revenus globalisés. Cela signifie, en théorie,

qu’un seul impôt frappe l’ensemble des revenus.

L’article 6 du C.I.R. dispose en effet que : « Le revenu imposable est constitué de l’ensemble

des revenus nets, diminués des dépenses déductibles. »

Actuellement, il existe en principe un impôt sur l’ensemble des revenus du contribuable.

Dans un système d’impôt progressif, le législateur a considéré qu’il était plus équitable de

taxer l’ensemble des revenus, après avoir cumulé les revenus des différentes catégories.

L’impôt est établi, en principe, sur la somme des revenus nets des quatre catégories citées

ci-dessus. L’ensemble des revenus nets est égal à la somme des revenus nets des quatre

catégories de revenus précitées. Du total ainsi obtenu, le contribuable peut déduire

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certaines charges (rentes alimentaires payées par lui, libéralités en espèces consenties à

certaines associations...).

Pour l’application du Code des impôts sur les revenus, les personnes mariées et

cohabitants légaux qui sont assimilés font l’objet d’une imposition commune, c'est-à-dire

qu’une seule imposition est établie au nom des deux conjoints ou des deux cohabitants

légaux. Cependant, le revenu imposable de chaque conjoint est fixé séparément. Chaque

conjoint ou cohabitant légal est donc considéré comme un contribuable distinct pour le

calcul du revenu imposable et pour le calcul de l’impôt.

Section 2 : Taux d’imposition progressifs et calcul de l’impôt

Une fois les revenus globalisés, l’impôt correspondant est déterminé sur base d’un barème

fixé par le Code des impôts sur les revenus44. Celui-ci fixe des taux d’imposition progressifs

par tranches.

Les montants repris à l’article 130 du C.I.R. 1992 doivent toutefois être indexés chaque

année en vertu de l’article 178 du C.I.R. 1992 en raison de l’indexation annuelle de l’indice

des prix à la consommation.

Le fameux 'tax shift' mis en œuvre par le Gouvernement actuel vise à déplacer la charge

fiscale pesant sur le travail vers la consommation et le patrimoine. Cet objectif est

notamment poursuivi par l'adaptation des tranches de revenus retenues pour l'impôt des

personnes physiques.

Les taux d'imposition progressifs seront donc adaptés au cours des prochaines années (à

partir de l'exercice d'imposition 2017 pour les revenus de 2016). La réforme ne vise pas à

supprimer les taux existants qui sont maintenus mais à répartir les tranches différemment

de manière à ralentir la progression de l’impôt. La tranche soumise au taux le plus bas sera

ainsi élargie.

Pour les revenus de 2017, la répartition est la suivante :

25 p.c. pour la tranche de revenus de 0,01 EUR à 11.070 EUR (montant indexé) ;

30 p.c. pour la tranche de 11.070 EUR (montant indexé) à 12.720 EUR (montant indexé) ;

40 p.c. pour la tranche de 12.720 EUR (montant indexé) à 21.190 EUR (montant indexé) ;

44 Les montants ci-dessous sont indexés annuellement depuis 1989 ; cette indexation est toutefois

partiellement neutralisée depuis 1993.

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45 p.c. pour la tranche de 21.190 EUR (montant indexé) à 38.830 EUR (montant indexé) ;

50 p.c. pour la tranche supérieure à 38.830 EUR (montant indexé).

Au cours des prochaines années, la répartition des tranches fera encore l'objet de quelques

modifications. Soulignons la suppression de la tranche de 30 %. Les revenus taxés jusqu'à

présent à 30 % seront inclus dans la première tranche imposable au taux le plus faible de 25

%. En d'autres termes : l'élargissement de la première tranche sera tel que la tranche de 30

% y sera intégralement reprise. Il ne restera donc plus que quatre tranches.

Des modifications complémentaires devraient intervenir également quant aux tranches

supérieures.

Ces modifications supplémentaires devraient intervenir pour les EI 2019 et 2020

Un montant exonéré d’impôt est fixé pour chaque contribuable. Pour l’exercice

d’imposition 2018, revenus de 2017, il est, en principe, de 7.270 €45. Ce montant peut, par

ailleurs, être majoré, notamment lorsque le contribuable a une ou plusieurs personnes à

charge. Il n’empêche que, d’une manière générale, le montant exonéré est trop réduit parce

qu’il n’est pas susceptible de couvrir les besoins, même les plus vitaux, des contribuables.

Le système progressif par tranches avec fixation d’un minimum exonéré est présenté

comme répondant à un souci d’équité46.

Lors d’une imposition commune des époux ou des cohabitants légaux, le tarif d’imposition

est appliqué sur le revenu imposable de chaque contribuable.

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 4.4.4.4. EEEEXCEPTIONS À LA GLOBAXCEPTIONS À LA GLOBAXCEPTIONS À LA GLOBAXCEPTIONS À LA GLOBALISATION LISATION LISATION LISATION

Pour certaines catégories de revenus, le législateur a dérogé au principe de la

globalisation. Certains revenus sont ainsi soumis à des taux fixes et échappent à la

progressivité de l’impôt. Il s’agit des revenus imposables distinctement.

45 Article 131 du C.I.R. 1992. 46 Sur la justification de ce système, voyez ci-dessus.

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Les catégories visées sont à ce point importantes que l’on peut se demander si l’exception

(le système de la taxation séparée) ne remplace pas peu à peu la règle (le principe de la

globalisation), de sorte que le système fiscal s’est à nouveau rapproché de celui de l’impôt

cédulaire.

Les revenus taxés à taux fixes sont essentiellement les suivants :

– La plupart des revenus mobiliers, qui sont, en principe et donc sauf exception, taxés

séparément au taux de 30 % (depuis le 1er janvier 2017) ;

– La plupart des revenus divers qui sont taxés, suivant le cas, à 33 %, 25 %, 16,5 % ou

15 % (art. 171 du C.I.R. 1992). Cette règle vaut sauf si l’application de ce taux distinct

se révèle moins favorable pour le contribuable que la taxation au taux progressif par

tranches de l’impôt des personnes physiques ;

– Certains revenus professionnels qui sont perçus en une fois, alors que,

économiquement, ils ont été produits ou auraient pu être perçus sur plusieurs années ;

ils sont dès lors taxés, soit à 16,5 %, soit à un taux moyen (et non marginal) défini par

la loi.

Par exemple, si un commerçant vend son fonds de commerce lors de la cessation de ses

activités, il pourra, le cas échéant, bénéficier d’une plus-value exceptionnelle (équivalant à

la différence entre le prix de vente et le prix d’achat du fonds de commerce). Il ne serait pas

logique d’imposer celle-ci en une seule fois, à un taux élevé résultant du barème progressif,

alors que cette plus-value résulte en réalité des efforts consentis par le commerçant

pendant plusieurs années. Un taux forfaitaire a par conséquent été fixé par le législateur

pour la taxation d’une telle plus-value (dans ce cas-ci : 16,5 % pour la partie de la plus-value

réalisée sur des actifs corporels).

Ces revenus sont taxables séparément. Cela signifie que l’on n’en tient donc pas compte

pour déterminer le « revenu imposable globalement », sauf si exceptionnellement, une

globalisation se révèle plus favorable.

En revanche, l’impôt afférent aux revenus taxables séparément est ajouté à celui dû sur le

revenu imposable globalement. La somme des deux donne l’impôt d’État.

CCCCHAPITREHAPITREHAPITREHAPITRE 5555.... IIIIMPOSABILITÉMPOSABILITÉMPOSABILITÉMPOSABILITÉ DU REVENU DU REVENU DU REVENU DU REVENU MONDIALMONDIALMONDIALMONDIAL

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24

L’article 5 du C.I.R. 1992 dispose que : « Les habitants du Royaume sont soumis à l’impôt

des personnes physiques à raison de tous leurs revenus imposables visés au présent code,

alors même que certains de ces revenus auraient été produits ou recueillis à l’étranger ».

Le système fiscal belge se différencie ainsi de certains systèmes étrangers qui excluent de la

base imposable certains revenus étrangers, à tout le moins aussi longtemps qu’ils ne sont

pas rapatriés dans le pays où vit le contribuable.

Le principe d’imposabilité du revenu mondial applicable en Belgique connaît cependant

deux tempéraments :

1. La Belgique a conclu des conventions préventives de double imposition avec de

nombreux États étrangers. Ces conventions exonèrent de l’impôt belge certains

revenus recueillis par des contribuables belges à l’étranger (méthode d’exonération)

ou permettent l’imputation d’impôts étrangers sur l’impôt belge (méthode

d’imputation) ;

2. Le Code des impôts sur les revenus contient lui-même certaines dispositions qui, en

cas d’absence de convention préventive de double imposition, réduisent l’impôt belge

proportionnellement afférent aux revenus d’origine étrangère47. Ces tempéraments

seront examinés infra.

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 6666.... LLLLES ADDITIONNELS COMMES ADDITIONNELS COMMES ADDITIONNELS COMMES ADDITIONNELS COMMUNAUX UNAUX UNAUX UNAUX

Pour déterminer le montant total de l’impôt dû sur les revenus de l’année, il faut encore

ajouter à l’impôt d’État les additionnels communaux.

Il s’agit d’une taxe communale votée annuellement par le conseil communal de chaque

commune belge. Les additionnels communaux sont un pourcentage de l’impôt des

personnes physiques. Ils s’ajoutent à l’impôt et non aux revenus.

La taxe additionnelle est calculée sur l’I.P.P. avant l’imputation des crédits d’impôts, des

versements anticipés, des précomptes, des quotités forfaitaires d’impôt étranger et de

l’application des majorations pour absence ou insuffisance de versements anticipés (article

466 du C.I.R. 1992).

47 M. DASSESSE et P. MINNE, op. cit., 5e éd., p. 405.

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Il n’existe ni minimum ni maximum et le taux varie d’une commune à l’autre. Il va de 0 %

(Knokke-Heist, Coxyde) à 10 %, suivant les communes.

Les additionnels communaux frappent tous les revenus imposés à l’impôt des personnes

physiques, qu’ils soient taxés globalement ou séparément, puisqu’ils sont calculés sur le

total de l’impôt, c’est-à-dire le total des impôts sur les revenus globalisés et de l’impôt sur

les revenus taxés séparément.

Les additionnels ne sont en revanche pas perçus sur les précomptes mobiliers et

professionnels.

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 7777.... L’L’L’L’IMPÔT EST PERÇU PAR IMPÔT EST PERÇU PAR IMPÔT EST PERÇU PAR IMPÔT EST PERÇU PAR VOIE DE PRÉCOMPTES VOIE DE PRÉCOMPTES VOIE DE PRÉCOMPTES VOIE DE PRÉCOMPTES

L’impôt est en principe établi au cours de l’exercice d’imposition qui correspond à l’année

suivant celle au cours de laquelle les revenus ont été obtenus. Par exemple, les revenus

perçus au cours de l’année 2017 (période imposable 2017) seront, en principe, taxés en

2018 (exercice d’imposition 2018). Ils peuvent même l’être encore plus tard, jusqu’à

l’expiration des délais d’imposition.

En pratique, l’État ne peut pas se permettre d’attendre aussi longtemps le paiement des

impôts, alors qu’il doit faire face aux dépenses publiques. La plus grande partie des impôts

est dès lors perçue par l’État au cours de l’exercice imposable, sous forme d’avances,

dénommées, suivant le cas, précomptes ou versements anticipés.

Section 1 : Les précomptes

Un précompte est une avance sur l’impôt, payée anticipativement et obligatoirement par le

contribuable.

Il existe ainsi :

– Un précompte immobilier, perçu obligatoirement à charge des propriétaires

d’immeubles. Le précompte immobilier est payé au cours de l’année pendant laquelle

le revenu est perçu, par les propriétaires d’immeubles et certaines personnes qui y

sont assimilées. Il est enrôlé.

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– Un précompte mobilier, perçu obligatoirement à charge des débiteurs de revenus

mobiliers. Les précomptes mobilier et professionnel sont retenus par leurs débiteurs

sur les revenus qu’ils paient. Il s’agit de retenues à la source. Ils doivent être payés

spontanément, sans enrôlement. Celui-ci n’a lieu qu’à défaut de paiement.

– Un précompte professionnel, perçu obligatoirement à charge des employeurs, sur les

rémunérations payées aux dirigeants d’entreprises ou aux membres du personnel.

Ainsi, un employeur doit retenir le précompte professionnel sur les rémunérations

des membres de son personnel et en payer le montant directement à l’État. Le

barème du précompte professionnel est fixé de telle manière que si le travailleur n’a

pas d’autres revenus que son salaire, le total du précompte professionnel perçu au

cours de l’année correspond plus ou moins à l’impôt dû en fin d’année.

Si les précomptes sont en principe des avances sur l’impôt, imputables sur celui-ci et

restituables en cas d’excédent éventuel, des exceptions importantes en font souvent des

impôts définitifs. Le caractère d’ « avance » des précomptes a en effet acquis

progressivement un caractère théorique dans de nombreux cas.

Il en est ainsi pour le précompte immobilier, qui n’est en général plus imputable sur

l’impôt, de sorte que les revenus immobiliers subissent une double imposition : le

précompte immobilier et l’impôt des personnes physiques.

Section 2 : Les versements anticipés

Les titulaires de bénéfices et de profits ne doivent pas payer de précompte professionnel

sur leurs propres revenus à défaut d’employeur pouvant effectuer une retenue à la source.

Ils effectuent en revanche des versements anticipés, au cours de l’exercice imposable.

Ceux-ci ne sont pas obligatoires, mais d’importantes majorations frappent ceux qui ne les

effectuent pas.

Ces majorations ne sont pas des sanctions, comme le sont les accroissements d’impôt. Il

s’agit seulement d’une augmentation de l’impôt due au fait qu’il n’a pas été payé par

avance. Le fait de ne pas payer des versements anticipés n’est en effet pas une faute, qui

serait susceptible d’une sanction, et rien ne permet à l’administration fiscale d’exiger le

paiement des versements anticipés, comme elle peut le faire pour les précomptes. Le

contribuable soumis aux versements anticipés a par conséquent le choix de les payer ou

non. À défaut de versements anticipés, le montant de l’impôt sera majoré. La principale

difficulté que pose ce choix est le fait que les revenus d’indépendants ont en général un

caractère variable, de sorte qu’il n’est pas possible, au moment où les versements anticipés

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doivent être effectués, de connaître le montant exact qu’il faudra payer pour éviter la

majoration.

Les majorations s’appliquent aux bénéfices, aux profits et aux rémunérations des dirigeants

d’entreprise (art. 157 du C.I.R. 1992).

Elles sont calculées par rapport à un taux de référence, qui est celui pratiqué au 1er janvier

de l’année qui précède l’exercice d’imposition par la Banque Nationale de Belgique pour les

avances en compte courant (art. 161 du C.I.R. 1992).

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TITRE TITRE TITRE TITRE III. LES REVENUS IMMIII. LES REVENUS IMMIII. LES REVENUS IMMIII. LES REVENUS IMMOBILIERSOBILIERSOBILIERSOBILIERS

CCCCHAPITREHAPITREHAPITREHAPITRE 1.1.1.1. DDDDÉFINITIONSÉFINITIONSÉFINITIONSÉFINITIONS

Les articles 7 à 16 du C.I.R. 1992 traitent des revenus immobiliers.

Le Code des impôts sur le revenu ne contient pas de définition, ni des biens immobiliers ni

des revenus immobiliers. Cette situation peut donc entraîner des problèmes de

qualification.

Section 1. Les biens immobiliers

La notion de biens immobiliers, au sens du Code des impôts sur les revenus, est proche de

celle qui prévaut en droit civil, sans être tout à fait identique. Les immeubles visés sont

tous les immeubles par nature, et certains immeubles par destination, au sens du droit

civil :

a) Les immeubles par nature comprennent les propriétés bâties (maisons d’habitation,

appartements, bureaux, usines, ...), et les propriétés non bâties (terrains, champs,

prairies, bois...) ;

b) Les immeubles par destination ne sont visés par l’impôt sur le revenu que sous la

qualification de « matériel et l’outillage », qui figure à l’article 471, § 3, du C.I.R. 1992.

Il s’agit généralement d’appareils ou de machines placées par le propriétaire pour le

service ou l’exploitation du fonds (une cuve, une chaudière, un pressoir, un

tracteur).48

Section 2. La notion de « revenu » immobilier

Comme tous les revenus, les revenus immobiliers sont le produit ou le fruit périodique

d’un travail ou d’un bien. Selon l’article 11 C.I.R. 92, les revenus immobiliers sont taxables

dans le chef du propriétaire, possesseur, emphytéote, superficiaire ou usufruitier du bien.

48 D.E. PHILIPPE, « Précompte immobilier : concession domaniale et immobilisation par destination de

machines », T.F.R., 2010, liv. 378, pp. 292-297.

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Pour comprendre la notion de revenu immobilier en droit fiscal, deux situations doivent

être envisagées :

A. Lorsqu’un bien immobilier est donné en location, le revenu ne semble pas difficile à

identifier : il s’agit du loyer.

Nous verrons cependant que le loyer n’est pas toujours le revenu immobilier taxable,

lequel correspond, selon certaines conditions :

1) Soit au revenu civil (le loyer et les avantages locatifs) ;

2) Soit à un revenu forfaitaire, le revenu cadastral, éventuellement majoré.

B. Lorsqu’un bien est occupé ou exploité par son propriétaire lui-même, celui-ci n’en

tire de ce fait pas de loyers et donc pas de revenus. Néanmoins du point de vue fiscal,

on considère que le bien immobilier (immeuble d’habitation ou de bureaux, bois,

prairies) génère un revenu fictif pour le propriétaire du bien. Il s’agit du revenu

cadastral. Ce revenu fictif retiré par le propriétaire du bien est évalué par rapport à la

valeur locative du bien, c’est-à-dire au prix que l’occupant aurait normalement dû

payer pour pouvoir user du bien s’il avait dû le prendre en location.

En matière de revenus immobiliers, le Code des impôts sur les revenus ne s’intéresse

qu’aux « revenus » proprement dits, à l’exception des « produits », telles les plus-values

réalisées sur les immeubles (soit la différence entre le montant payé lors de la vente de

l’immeuble et son prix d'achat). Une plus-value immobilière n’est en conséquence jamais

un revenu immobilier. Elle peut être imposable, soit au titre de revenu professionnel, parce

que le bien est affecté à une activité professionnelle (art. 24, 2o, du C.I.R. 1992), soit au titre

de revenu divers (dans les cas limitativement énumérés par l’article 90 du C.I.R. 1992),

mais jamais au titre de revenu immobilier. Si cette plus-value immobilière n’est visée par

aucune disposition légale, elle ne sera pas taxable du tout. Il s’agit là d’une application de la

« franchise générale des personnes et des choses », dont l’article 170 de la Constitution est

une application. Lorsqu’il n’existe pas de texte légal imposant quelque chose, l’impôt n’est

en effet pas dû.

CCCCHAHAHAHAPITRE PITRE PITRE PITRE 2.2.2.2. LLLLA DOUBLE IMPOSITION A DOUBLE IMPOSITION A DOUBLE IMPOSITION A DOUBLE IMPOSITION DES REVENUS IMMOBDES REVENUS IMMOBDES REVENUS IMMOBDES REVENUS IMMOBILIERS ILIERS ILIERS ILIERS

On parle de double imposition des revenus immobiliers parce que ceux-ci font l’objet :

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- D’une part, d’une taxation au titre de précompte, le précompte immobilier ;

- D’autre part, d’une taxation à l’impôt des personnes physiques.

En principe, « les impôts sont perçus par voie de précomptes » (art. 1er, § 2, du C.I.R. 1992),

de sorte que, sauf les dérogations prévues par la loi, les précomptes ne devraient être que

des avances sur l’impôt, imputables et éventuellement restituables en cas d’excédent.

Il n’en est en réalité ainsi que d’une manière très partielle et sous de strictes conditions, en

matière de précompte immobilier. Au contraire, la règle qui prévaut concernant les

revenus immobiliers est celle selon laquelle le précompte immobilier précède et s’ajoute à

l’impôt des personnes physiques.

Ainsi, l’imposition des revenus immobiliers se passe en deux temps :

1) Par la perception du précompte immobilier

Cette taxation a lieu au cours de l’exercice imposable, c'est-à-dire l’année même de la

perception des revenus.

Le précompte immobilier est toujours calculé à partir du revenu cadastral (qui est le

revenu forfaitaire et pas le revenu réel du bien). Ce précompte est perçu au profit des

Régions, et majoré de très importants centimes additionnels au profit des

communes ;

2) Par la perception de l’impôt des personnes physiques

Cette taxation a lieu au cours de l’exercice d’imposition, c'est-à-dire l’année qui suit

celle de la perception des revenus.

L’impôt est calculé, selon le cas, soit sur le revenu cadastral, soit sur le revenu réel net

du bien.

Si le précompte immobilier était une véritable avance sur l’impôt, il serait entièrement

imputable sur l’impôt des personnes physiques. Cette faculté, qui a existé partiellement

dans le passé, a été supprimée par une loi de 200449.

49 Loi-programme du 27 décembre 1994, qui a supprimé l’article 16 à partir de l'exercice d'imposition 2006.

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Il y aura donc toujours une double imposition économique pour le tout, une fois au

précompte immobilier et une seconde fois à l’impôt des personnes physiques.

Comme toute double taxation, celle-ci est sans doute choquante. Elle peut néanmoins

trouver partiellement une explication dans les considérations suivantes :

1) La taxation au précompte immobilier est toujours calculée sur la base du revenu

cadastral, revenu forfaitaire en général très largement inférieur au revenu réel.

2) Les revenus des immeubles utilisés à des fins privées ne sont, même à l’impôt global,

taxés que sur la base du même revenu cadastral forfaitaire.

3) Le précompte immobilier n’est pas perçu au profit des mêmes pouvoirs que l’impôt

global, puisqu’il profite essentiellement aux communes et, très partiellement, aux

Régions, et non à l’État fédéral.

4) Il faut garder à l’esprit que lorsque l’immeuble est utilisé par son propriétaire à des

fins professionnelles, le précompte immobilier est déductible de la base imposable

(mais non de l’impôt) à titre de frais professionnels (art. 52, 1o, du C.I.R. 1992).

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 3.3.3.3. LLLLE REVENU CADASTRAL E REVENU CADASTRAL E REVENU CADASTRAL E REVENU CADASTRAL

Section 1. Définition

Le revenu cadastral est un revenu fictif ; c'est la valeur que ce bien devrait avoir sur le

marché s’il était mis en location.

En effet, un immeuble habité par son propriétaire ne génère aucun revenu au bénéfice de

son propriétaire ; tout au plus lui évite-t-il, si cet immeuble est exploité ou habité, une

dépense. Dans cette hypothèse, un simple fait (celui d’être propriétaire d’un immeuble)

donne lieu à l’établissement d’un revenu immobilier taxable50.

L’article 471, § 1er, du C.I.R. 1992 dispose qu’ « il est établi un revenu cadastral pour tous les

biens immobiliers bâtis ou non bâtis, ainsi que pour le matériel et l’outillage présentant le

caractère d’immeuble par nature ou d’immeuble par destination ».

50 S. SEGIER et M. BENTLEY, « Le droit fiscal se fonde sur des réalités : une fiction ? », R.G.F., 2009, liv. 5, pp.

11-19.

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Il y a donc pour toutes les parcelles cadastrales, bâties ou non bâties, se trouvant en

Belgique, un « revenu cadastral », fixé par l’administration du cadastre. Ce cadastre est

tenu à jour, compte tenu des ventes d’immeubles, des partages, ou des transformations

importantes des immeubles. Il en est de même pour le matériel et l’outillage présentant le

caractère d’immeuble par nature ou par destination.

Le revenu cadastral est adapté annuellement à l’évolution de l’indice des prix à la

consommation (le « RC indexé »).

Le revenu cadastral indexé sert de base de calcul pour :

- La perception du précompte immobilier ;

- La détermination du revenu imposable à l’impôt des personnes physiques :

a) Quand l’immeuble est occupé ou exploité par son propriétaire ;

b) À certaines conditions, quand l’immeuble est loué.

Section 2. Fixation et modification du revenu cadastral

Le revenu cadastral est défini comme « le revenu moyen normal net d’une année » (art.

471, § 2, du C.I.R. 1992) mais dans la plupart des cas, il ne correspond pas exactement au

revenu réel de l’immeuble et est, en pratique, presque toujours nettement inférieur à ce

revenu. La raison est liée à une absence de révision, pourtant prévue par la loi.

En effet, l’article 487 CIR 92 prévoit que le revenu cadastral est fixé périodiquement, en

principe tous les dix ans. Cette méthode de révision des revenus est appelée une

péréquation générale des revenus cadastraux. Il s’agit de tenir compte périodiquement

d’éventuelles modifications intervenues sur le marché immobilier ainsi que des

conséquences de l’inflation. Cependant, la dernière fixation du revenu cadastral remonte à

1980, et a pris pour référence le revenu normal des immeubles au 1er janvier 1975. La

péréquation suivante devait, en toute logique, avoir lieu en 1990, mais elle n’a toujours pas

eu lieu, ce qui explique que la valeur des revenus cadastraux soit nettement inférieure à

celle des loyers réels actuels.

Une loi du 22 décembre 1990 a décidé de reporter sine die cette péréquation mais, depuis

1992, les revenus cadastraux sont indexés51.

51 La Région Wallonne envisage depuis 2001, de procéder à une péréquation ; ce souhait est demeuré sans

effet à ce jour.

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Pour les immeubles construits ou rénovés après la dernière péréquation, le revenu

cadastral est déterminé par l’administration du cadastre sur la base de la déclaration

obligatoire par le contribuable. Cette détermination du revenu cadastral s’effectue soit sur

la base de la valeur locative nette au 1er janvier 1975 soit, si cela n’est pas possible, par

comparaison avec des parcelles similaires (art. 477 § 1er et § 2 CIR 92).

L’évaluation établie par l’administration peut toutefois être contestée par voie de

réclamation et dans ce cas, un arbitrage fixera le revenu cadastral en dernière instance52.

Section 3. L’intérêt de la base imposable forfaitaire

Ce système forfaitaire possède certains avantages :

a) Pour la perception du précompte immobilier : on évite toute déclaration du

contribuable, ce qui permet au fisc de percevoir rapidement le précompte53, avant

même que le revenu ne soit complètement perçu par le propriétaire du bien.

L’exercice fiscal et l’année d’imposition coïncident donc en ce qui concerne le revenu

cadastral ;

b) Pour l’impôt des personnes physiques : ces explications sont moins convaincantes car

ces revenus doivent de toute manière être déclarés, de sorte qu’un système forfaitaire

ne trouve une explication que pour les revenus où des litiges trop nombreux

surviendraient s’il fallait établir le montant réel (comme pour certains frais

professionnels, par exemple). Or les revenus immobiliers sont assez aisés à prouver,

notamment parce que leur débiteur (le locataire) est facilement identifiable.

Toutefois d’autres explications peuvent également être trouvées à la taxation des revenus

immobiliers sur base du revenu cadastral :

– Ce système permet à l’autorité de dégager un revenu taxable lorsque le bien est

occupé par son propriétaire lui-même. En l’absence de loyer, la valeur d’utilisation du

domicile par son propriétaire peut ainsi être imposée comme un revenu54 ;

– Il est parfois difficile de fixer le revenu net taxable. Les difficultés résulteraient des

calculs servant à fixer ce revenu net et de l’importance du contrôle qu’il serait

52 A. TIBERGHIEN (s. dir.), Manuel de droit fiscal 2012-2013, Waterloo, Kluwer, 2012, p. 69, n°1031.70 53 P. COPPENS et A. BAILLEUX, op. cit., p. 48. 54 Voyez à ce propos : J. MALHERBE et J. AUTENNE, Péréquation cadastrale et réforme de la fiscalité

immobilière, Larcier, Bruxelles, 1980, pp. 40 et s.

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nécessaire de mettre en place afin de lutter contre les ententes entre bailleur et

locataire visant à dissimuler une partie des loyers ; surtout, si les loyers réels étaient

taxables, les frais réels seraient déductibles, d'où sans doute un important

contentieux ;

– L’impôt obtenu grâce à ce système est caractérisé par une certaine stabilité,

indépendante de la conjoncture économique.

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 4.4.4.4. LLLL’’’’IMPOSITION DES REVENIMPOSITION DES REVENIMPOSITION DES REVENIMPOSITION DES REVENUS IMMOBILIERS US IMMOBILIERS US IMMOBILIERS US IMMOBILIERS AUAUAUAU PRÉCOMPTEPRÉCOMPTEPRÉCOMPTEPRÉCOMPTE IMMOBILIER IMMOBILIER IMMOBILIER IMMOBILIER

Section 1. Définition

Le précompte immobilier est un impôt annuel sur les immeubles (art. 255 CIR92). Cet

impôt est un impôt régional depuis le 1er janvier 1989, en application de la loi spéciale du

16 janvier 1989 relative au financement des Communautés et des Régions.

Cet impôt régional est, en outre, majoré des centimes additionnels (révisés annuellement)

prélevés par les communes.

Section 2. Qui est redevable du précompte immobilier ?

a. Le titulaire d’un droit réel

En vertu de l’article 251 du C.I.R. 1992, le précompte immobilier est dû, en principe, par la

personne qui est titulaire d’un droit réel sur le bien immobilier, à savoir, le propriétaire, le

possesseur, l’emphytéote, le superficiaire ou l’usufruitier. Par exemple, lorsque le

propriétaire a consenti un droit d'usufruit sur l’immeuble, le titulaire de ce droit est

redevable du précompte. Cette règle est logique puisque c’est également l’usufruitier qui

perçoit les revenus du bien.

Seules ces personnes peuvent être redevables du précompte immobilier. Cela signifie

notamment qu’un locataire ne peut être le débiteur du précompte. Si la convention de bail

prévoit que le précompte est mis à charge du locataire, cette convention vaut entre parties

(sauf pour les baux de résidence principale), mais n’est pas opposable à l’administration

fiscale.

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Selon la jurisprudence, « en ce qui concerne la détermination du propriétaire, il convient de

s’attacher au titulaire du droit, en vertu de la matrice cadastrale, et non des titres civils »55.

C'est donc la personne qui est indiquée au cadastre comme propriétaire ou usufruitier qui

doit payer l'impôt.

b. Appréciation au 1er janvier de l’exercice d’imposition

Bien que la loi ne le précise pas, le débiteur du précompte immobilier est celui qui remplit

les conditions de débition de cet impôt au 1er janvier de l’exercice d’imposition. Pour le

précompte immobilier qui est, en théorie, une avance sur l’impôt, ces conditions

s’apprécient suivant la situation de l’immeuble au 1er janvier de l’année, parce qu’il est

calculé sur le revenu cadastral tel qu’il existe à cette date56.

Le débiteur du précompte immobilier est donc celui qui, au 1er janvier de l’exercice

d’imposition, est le propriétaire (ou le titulaire d’un droit réel) du bien immobilier. Si au

cours de l’année, un nouveau propriétaire acquiert le bien immobilier, une répartition du

précompte immobilier entre les différents propriétaires au cours d’un même exercice peut

être convenue mais elle ne sera pas opposable à l’administration57.

Selon l’article 395 du C.I.R. 1992 jusqu’à la mutation d’une propriété dans les documents

cadastraux, l’ancien propriétaire est tenu seul responsable du paiement du précompte

immobilier, sauf recours contre les nouveaux propriétaires (à moins de prouver le

changement de titularité du bien et de communiquer l’identité et l’adresse complète de ce

nouveau propriétaire).

En conséquence, lorsque le bien immobilier a changé de propriétaire avant ou après le 1er

janvier de l’exercice d’imposition, mais que cette mutation n’a pas encore été mentionnée

dans les registres cadastraux au moment où le précompte est enrôlé, il appartient à l’ancien

propriétaire de payer le précompte immobilier.

L’ancien propriétaire pourra ensuite exercer un recours contre le nouveau propriétaire :

- soit pour l’année entière si la vente avait eu lieu avant le 1er janvier de l’exercice

d’imposition ;

55 Bruxelles, 10 mars 1971, B.C., 495, p. 559 ; Anvers, 1er décembre 2009, Fiscologue, 2010, liv. 1189, p. 13 ;

Civ. Gand, 2 mars 2011, Fiscologue, 2011, liv. 1255, p. 10. 56 Cass., 9 novembre 1954, Pas., 1955, I, p. 207 ; Cass., 25 janvier 1955, Pas., 1955, I, p. 550. 57 Com. I.R., 251/12.

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- soit pour la quotité de l’année pour laquelle il n’était plus propriétaire si la vente avait

eu lieu après le 1er janvier de l’exercice d’imposition.

Pour rappel, une éventuelle clause contenue dans l’acte notarié et stipulant que l’acheteur

s’obligera à rembourser prorata temporis le précompte immobilier à payer par le vendeur

est valable entre parties mais n’est pas opposable à l’administration fiscale.

Section 3. Base et mode de calcul du précompte immobilier

L’article 255 du C.I.R. 1992 prévoit que le précompte immobilier est calculé sur base du

revenu cadastral.

Cette règle est applicable quelle que soit l’affectation des biens et sans qu’il faille distinguer

suivant que l’immeuble est occupé par le propriétaire ou par un locataire.

Le précompte immobilier n’est pas dû proportionnellement, mais il l’est pour le tout, pour

autant qu’au 1er janvier de l’exercice d’imposition, l’immeuble ait déjà un revenu cadastral.

En revanche, à l’impôt des personnes physiques, le revenu d’un immeuble neuf est

imposable à partir du mois qui suit sa première occupation et il est repris prorata temporis

dans le revenu global imposable du propriétaire.

Ainsi, si un contribuable occupe pour la première fois le 15 septembre 2015 un nouvel

immeuble qu’il a fait construire, le revenu cadastral de cet immeuble existe à partir du 1er

octobre 2015. Dès lors, le précompte immobilier n’est pas du pour l’année 2015

puisqu’aucun revenu cadastral n’existait au 1er janvier de l’année 2015. Par contre, pour

l’impôt des personnes physiques, le revenu cadastral doit être repris à concurrence de 3/12e

(trois mois) dans sa déclaration fiscale pour l’exercice d’imposition 2016, revenus de 2015.

Pour donner un autre exemple illustratif, si l’immeuble a déjà un revenu cadastral le 1er

janvier 2015, le contribuable devra payer le précompte immobilier pour 2015. Si ce même

contribuable occupe son immeuble pour la première fois le 1er février 2015, le revenu

cadastral existe à partir du 1er mars 2015. Toutefois, aucun précompte immobilier ne doit

être payé dans ce dernier cas pour l’année 2015, parce qu’au 1er janvier de cette année,

l’immeuble n’avait pas encore de revenu cadastral. Par contre, ce revenu cadastral devra

être repris pour 10/12e dans sa déclaration pour l’exercice d’imposition 2016, revenus de

2015.

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37

La fixation du précompte immobilier étant réalisée par référence au revenu cadastral, un

immeuble situé à l’étranger ne donne jamais lieu à la débition du précompte immobilier

belge et ce en raison du fait qu’un tel immeuble n’a évidemment pas de revenu cadastral au

sens de la loi fiscale belge.

Section 4. Taux du précompte

a) Taux de base et régionalisation du précompte

En principe, le précompte immobilier est perçu au taux de 1,25 % du revenu cadastral (art.

255, alinéa 1er du C.I.R. 1992).

La régionalisation a toutefois entraîné d’importantes disparités en matière de précompte

immobilier, chaque région étant libre de fixer et modifier le taux lui revenant.

En effet, l’article 3 de la loi spéciale du 16 janvier 1989 relative au financement des

Communautés et des Régions dispose que le précompte immobilier est un impôt régional

pour lequel le législateur régional peut modifier à sa guise le taux d’imposition et les

exonérations. Depuis le 1er janvier 1989, les régions sont donc autorisées à modifier le taux

et les exonérations du précompte immobilier (article 4, § 2 de la loi spéciale du 16 janvier

1989 précitée)58.

En pratique, les trois Régions ont fixé comme suit le taux de base du précompte

immobilier.

En Région Flamande, le précompte immobilier est, en principe, de 2,5 % du revenu

cadastral établi au 1er janvier de l’exercice d’imposition.

Pour la Région wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale, le taux de base s’élève, en

principe, à 1,25 % du revenu cadastral.

Enfin, il faut souligner que ces taux de 1,25 et 2,5 % concernent uniquement le précompte

immobilier perçu pour le compte des Régions. Il faut ensuite y ajouter les additionnels

établis par la commune, beaucoup plus élevés que le précompte immobilier lui-même.

58 Le législateur fédéral reste néanmoins compétent pour toute modification apportée au revenu cadastral

soit en pratique la base d’imposition du précompte immobilier (art. 4 §2 de la loi spéciale du 16 janvier 1989).

Cette disposition n’a pas manqué de donner lieu à des conflits de compétence pour lesquels la Cour

constitutionnelle (anciennement Cour d’arbitrage) a été sollicitée.

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La région flamande perçoit le précompte immobilier elle-même. Pour les régions wallonne

et bruxelloise, c'est l'Etat fédéral qui procède au recouvrement, et rétrocède aux régions et

aux communes ce qui leur revient.

b) Les prélèvements additionnels

Outre les taux de base pour compte des régions, le précompte immobilier fait l’objet de

prélèvements additionnels effectués par l’État – ou par la Région flamande en ce qui

concerne son propre territoire – pour le compte des communes (article 464/1 du C.I.R.

1992). Le taux de ces « centimes additionnels » est voté chaque année par les autorités

locales elles-mêmes.

En pratique, prélever 100 centimes additionnels revient à effectuer un prélèvement local

supplémentaire égal à 100 % du prélèvement effectué par l’État pour compte des Régions.

Par exemple, lorsqu’une commune wallonne prélève 1.200 additionnels, cela signifie que

l’État prélève, pour compte des pouvoirs locaux, des additionnels au précompte immobilier

s’élevant à 12 x 1,25 % du revenu cadastral, soit 15 % du revenu cadastral, et que la charge

réelle du précompte immobilier s’élève donc à 16,25 % du revenu cadastral, soit la somme

de 15 % et de 1,25 %59.

L’application des additionnels communaux aboutit, dans la plupart des cas, à la débition

d’un précompte immobilier équivalant à 30 %, ou plus, du revenu cadastral.

Ainsi, par exemple, si une commune wallonne a établi 2.500 centimes additionnels au

précompte immobilier, le propriétaire d’un immeuble dont le revenu cadastral serait fixé à

2.478,34 €, paierait :

– précompte dû à l’État :

2.478,34 € x 1,25 = 30,996 €

– additionnels :

30,996 € x 2.500 = 774,67 €

100

– Total : 806,67 €

59 M. DASSESSE et P. MINNE, op. cit., 5e éd., p. 444.

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Le taux réel, centimes additionnels compris, du précompte immobilier, est ainsi fixé dans

cet exemple à 32,5 %, soit :

- 1,25 % : pour compte des régions (ou prélevé directement par les régions) ;

- 25 x 1,25% = 31,25 % : additionnels pour compte des pouvoirs locaux.

Ce taux est naturellement variable suivant les communes.

En pratique, il faut donc constater que, tout en étant perçu par l’État (ou par la région

flamande en ce qui concerne son territoire), le précompte immobilier est essentiellement

une recette des communes. L’État (ou la région flamande) perçoit le précompte immobilier

et restitue à chaque commune ce qui lui revient, sous déduction d’un pourcentage pour les

frais de perception. Le reste, soit le précompte de 1,25 % revient aux Régions.

En outre, il découle de la compétence régionale existant en matière de modification du

taux des exonérations du précompte immobilier que les Régions sont également

compétentes afin de procéder elles-mêmes au recouvrement du précompte immobilier60 61.

Section 5. Les réductions et les exonérations du précompte immobilier

a)a)a)a) Cas de réduction du précompte immobilierCas de réduction du précompte immobilierCas de réduction du précompte immobilierCas de réduction du précompte immobilier

La loi prévoit certaines réductions du précompte immobilier, à la condition que le

contribuable en fasse expressément la demande (art. 257 du C.I.R. 1992).

Ces réductions sont les suivantes :

1. Réduction pour habitation modeste

Le précompte immobilier est réduit d’un quart si l’immeuble est entièrement occupé par le

contribuable, pour autant que le revenu cadastral de l’ensemble des propriétés foncières

appartenant à ce contribuable n’excède pas 745 € (article 257, 1o, du C.I.R. 1992). Du fait de

60 Voyez l’article 4, § 4 de la loi spéciale du 16 janvier 1989 relative au financement des Communautés et des

Régions, tel que modifié par la loi du 16 juillet 1993, qui dispose que « à moins que la Région n’en dispose

autrement pour les impôts dont le produit est entièrement attribué, les services fédéraux assurent

gratuitement, dans le respect des règles de procédure qu’il fixe, le service [c’est-à-dire le recouvrement] des

impôts [dont le précompte immobilier]... pour le compte de et en concertation avec la Région ». 61 M. DASSESSE et P. MINNE, op. cit., 5e éd., pp. 438 et 439.

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la régionalisation, la Région flamande et la Région wallonne ont chacune aménagé les

conditions de cette réduction par décret62.

2. Réduction pour invalidité ou handicap

Une réduction de 10 % du précompte immobilier est accordée si l’immeuble est occupé

(que ce soit à titre de propriétaire ou de locataire) par un handicapé. Cette réduction est de

20 % si l’immeuble est occupé par un grand invalide (article 257, 2o, du C.I.R. 1992 en ce

qui concerne les Régions Wallonne et de Bruxelles-Capitale et article 257, § 1er, 3o, et § 2,

2o, en ce qui concerne la Région Flamande).

3. Réduction pour enfant ou pour handicapé à charge

Si l’immeuble est occupé par le chef d’une famille comportant au moins deux enfants en

vie ou une personne handicapée, une réduction égale à 10 % est accordée pour chaque

enfant à charge (article 257, 3o, du C.I.R. 1992 en ce qui concerne les Régions Wallonne et

de Bruxelles-Capitale). La Cour de cassation a jugé, à ce propos, dans un arrêt du 12 mars

2010, que cette réduction pouvait également s’appliquer lorsque des parents non mariés

vivent sous le même toi avec leurs enfants communs (ménage de fait)63.

La réduction est en principe portée à 20 % pour chaque personne handicapée à charge

(enfant ou autre) et pour le conjoint handicapé64.

Précisions quant aux trois premiers cas de réduction du précompte immobilier

a. Le précompte immobilier est enrôlé sur la base du revenu cadastral de l’immeuble,

sans tenir compte des circonstances pouvant justifier une éventuelle réduction de ce

précompte. Les circonstances dont il est question ne viennent à la connaissance de

l’administration qu’ultérieurement lors de l’enrôlement de l’impôt sur les revenus et

peuvent éventuellement changer d’une année à l’autre.

62 Décr. Parl. fl. du 30 juin 2000 (M.B., 17 août 2000), en vigueur le 1er janvier 2000 et modifié par l'art. 34 du

Décr. Parl. fl. du 6 juillet 2001 (M.B., 10 octobre 2001 (première éd.)), en vigueur le 1er janvier 2002 et Décr.

Parl. w. du 10 décembre 2009 (M.B., 23 décembre 2009 (première éd.)), applicable à partir de l'exercice

d'imposition 2010 et modifié par l'art. 8 du Décr. Parl. w. du 10 mai 2012 (M.B., 29 mai 2012), en vigueur le

1er janvier 2012; 63 Cass., 12 mars 2010, Act. fisc., 2010, n° 43, note B. MARISCAL. 64 Com. I.R., 257/57.

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Le propriétaire de l’immeuble devra dès lors utiliser la voie de la demande de

dégrèvement d’office ou de la réclamation à l’encontre du précompte immobilier

enrôlé à son nom afin de bénéficier d’une éventuelle réduction de précompte en

vertu d’une de ces causes.

b. Suite à la procédure de dégrèvement d’office ou de réclamation, ces réductions sont

accordées au propriétaire, qui est le seul redevable du précompte, mais celui-ci doit

restituer le montant de cet avantage au locataire, si c’est en raison de la situation de

ce locataire que le propriétaire a obtenu la réduction (par exemple : le locataire a 2

enfants à charge).

La loi prévoit effectivement que les réductions sont déductibles du loyer, nonobstant

toute convention contraire (article 259 du C.I.R. 1992).

L’article 259 du C.I.R. 1992 pose cependant diverses difficultés d’application

provenant du fait que si le bénéfice de la réduction du précompte est accordé en

raison de la qualité de l’occupant de l’immeuble, le débiteur du précompte

immobilier vis-à-vis de l’administration est toujours le propriétaire puisque le

précompte est enrôlé au nom de ce dernier.

En cas de location, le propriétaire de l’immeuble n’a aucun intérêt personnel à

introduire une demande de dégrèvement d’office ou une réclamation à l’encontre du

précompte enrôlé puisque la réduction d’un tel précompte sera, en vertu de l’article

259 du C.I.R. 1992 précité, intégralement déductible du loyer.

Le locataire est, quant à lui, dans une situation assez inconfortable. Il ne peut en effet

pas réclamer au nom et pour compte du propriétaire défaillant la réduction du

précompte immobilier parce qu’il n’est pas le destinataire de l’avertissement-extrait

de rôle au précompte immobilier adressé directement au propriétaire.

La loi a tenté de remédier quelque peu à cette situation en permettant au

contribuable (le propriétaire) d’obtenir le dégrèvement d’office des réductions de

précompte immobilier qu’il aurait omis de demander durant les cinq années

antérieures. Le délai de cinq ans se comptant à dater du 1er janvier de l’exercice

d’imposition auquel appartient l’impôt sur lequel les réductions doivent être

accordées (article 376, § 3, 2o, du C.I.R. 1992)65.

65 Voyez également : M. DASSESSE et P. MINNE, op. cit., 5e éd., pp. 458 et 459.

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En outre, le propriétaire qui, sciemment, omet de demander la réduction de

précompte qui revient au locataire, engage sa responsabilité civile envers celui-ci.

4. Réduction pour improductivité

La règle contenue à l’article 256 du C.I.R. 1992 prévoit que pour le calcul du précompte

immobilier, il n’est pas tenu compte des réductions du revenu cadastral pour

improductivité, visées à l’article 15.

Toutefois, l’article 257 CIR92 précise qu’à condition de le demander à l’administration, le

précompte immobilier peut être réduit proportionnellement à la réduction pour

improductivité du revenu cadastral. En principe, la demande de réduction du précompte

immobilier doit être adressée au directeur régional des contributions compétent, par

l’introduction d’une réclamation, mais l’administration accepte que la demande soit

adressée au receveur avant l’enrôlement du précompte immobilier66 67.

b)b)b)b) Cas d’immunité du précompte immobilierCas d’immunité du précompte immobilierCas d’immunité du précompte immobilierCas d’immunité du précompte immobilier

Pour rappel, le précompte immobilier est un impôt calculé sur la base du revenu cadastral.

L’article 253 du C.I.R. 1992 envisage les divers cas dans lesquels le revenu cadastral des

biens qu’il énumère est exonéré du précompte immobilier.

Ainsi et notamment pour les biens immobiliers suivants, le précompte immobilier n’est

pas dû :

1) Les biens immobiliers ou les parties de biens immobiliers qu’un contribuable ou un

occupant a affectés, sans but de lucre, à l’exercice d’un culte public, à l’enseignement,

à l’installation d’hôpitaux, d’hospices, de cliniques, de dispensaires, de homes de

vacances pour enfants ou personnes pensionnées, ou d’autres œuvres analogues de

bienfaisance (art. 12, § 1er du C.I.R. 1992 – voyez infra) ;

2) Les immeubles affectés par un État étranger à l’installation de ses missions

diplomatiques ou consulaires, ou d’institutions culturelles qui ne se livrent pas à des

opérations lucratives68 ;

66 Com. I.R., 257/66. 67 Les conditions d’application de la réduction pour improductivité seront abordées en détails infra. 68 B. MARISCAL, « Exonération pour les immeubles ayant le caractère de domaine national et pour les

priorités étrangères : jurisprudence récente », Act. fisc., 2008, n° 36.

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3) Les biens immobiliers :

a) Qui ont le caractère de « domaines nationaux » ;

b) Sont improductifs par eux-mêmes ; et

c) Sont affectés à un service public ou d’intérêt général.

L’article 253, 3o, du C.I.R. 1992 prévoit donc une exonération en faveur des «

domaines nationaux », subordonnée à la réunion des trois conditions précitées. La

notion de « domaine national » comprend toutes les propriétés de l’État, des

provinces, des communes, des établissements publics69. Il ne suffit cependant pas

qu’un bien réunisse cette condition pour être exonéré du précompte immobilier. Il

faut en outre qu’il soit « improductif par lui-même », ce qui est le cas lorsqu’il est

affecté à un service d’utilité générale, rentrant dans la mission légale de l’établissement

public auquel il appartient70. L’affectation à un service public ou d’utilité générale

implique que le bien soit utilisé dans le cadre de la mission de l’établissement public

qui en est propriétaire71.

Il s’agira par exemple des prisons, des bâtiments abritant les Cours et tribunaux, etc.

Généralement, par ailleurs, les bâtiments visés sont la propriété de pouvoirs publics

non soumis à l’impôt sur le revenu.

4) En outre, les Régions sont compétentes pour octroyer des exonérations du précompte

immobilier dans le cadre des lois d’expansion économique (pour divers

investissements en matériel et outillage ou pour des biens immobiliers dont le revenu

cadastral serait majoré à la suite de travaux de rénovation ou encore pour des biens

immobiliers situés dans des sites protégés).

Section 6. Imputation du précompte immobilier

Par définition, le précompte est en principe une avance sur l’impôt prélevée par

anticipation et dont l’excédent éventuel devrait en théorie être remboursé au contribuable.

69 Com. I.R., 253/82. 70 Com. I.R., 253/88. 71 Pour des exemples à ce sujet, voyez B. MARISCAL, « Exonération pour les immeubles ayant le caractère de

domaine national et pour les priorités étrangères : jurisprudence récente », op. cit., n° 36.

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Or, de façon exceptionnelle, et contrairement aux autres précomptes (mobilier,

professionnel), le précompte immobilier relatif à l’immeuble d’habitation n’est plus

imputable sur l’impôt des personnes physiques, même partiellement.

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 5.5.5.5. L’L’L’L’IMPOSITION DES REVENIMPOSITION DES REVENIMPOSITION DES REVENIMPOSITION DES REVENUS IMMOBILIERS À LUS IMMOBILIERS À LUS IMMOBILIERS À LUS IMMOBILIERS À L’’’’IMPÔT DES PERSONNES IMPÔT DES PERSONNES IMPÔT DES PERSONNES IMPÔT DES PERSONNES

PHYSIQUES PHYSIQUES PHYSIQUES PHYSIQUES

En vertu de l’article 7 du C.I.R.92, le revenu immobilier imposable (revenu cadastral ou

revenu réel) à prendre en considération diffère suivant :

– que le bien immobilier est ou non donné en location ;

– que le bien immobilier est sis en Belgique ou à l’étranger ;

– que le bien immobilier est bâti ou non bâti ;

– qu’il s’agit d’une habitation prise en considération pour la déduction pour habitation

unique ou d’un autre bien immobilier (par exemple, une seconde résidence) ;

– la qualité du locataire (personne physique, société commerciale ou ASBL, ...) ;

– l’affectation du bien immobilier (à des fins privées ou professionnelles).

Par ailleurs, les revenus des biens immobiliers sont exceptionnellement qualifiés de

revenus professionnels lorsque la location a lieu dans le cadre de l’exercice de l’activité

professionnelle du bénéficiaire de ces revenus.

Il n’en est ainsi que si le propriétaire dispose d'une organisation de nature professionnelle

pour gérer et entretenir les biens, assurer les réparations et collecter les loyers. Cette

situation, assez rare, peut se présenter, par exemple, si le propriétaire possède de très

nombreux biens (ex : un immeuble-tour ou les utilise pour une exploitation quasi-

hôtelière.

Cela découle de l’article 37 du C.I.R., selon lequel « sans préjudice de l’application des

précomptes, les revenus des biens immobiliers (…) sont considérés comme des revenus

professionnels, lorsque ces avoirs sont affectés à l’activité professionnelle du bénéficiaire

desdits revenus ». Ces revenus sont donc imposables au titre de revenus professionnels et

non de revenus de biens immobiliers. Le régime d’imposition des revenus professionnels

sera examiné ultérieurement.

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Section 1. Débiteur de l’impôt

Les règles sont similaires à celles applicables au débiteur du précompte immobilier. Le

débiteur de l’impôt, en ce qui concerne les revenus immobiliers est, suivant le cas, « le

propriétaire, le possesseur, l’emphytéote, le superficiaire, ou l’usufruitier du bien » (article

11 du C.I.R. 1992).

Cela signifie que le propriétaire est débiteur de l’impôt sauf s’il a constitué un droit

d’usufruit, d’emphytéose ou de superficie sur le bien.

o Lorsqu’un droit d’usufruit a été constitué sur l’ensemble du bien, l’usufruitier est

redevable de l’impôt. Cette situation est logique puisque c’est précisément

l’usufruitier qui, en droit civil, a le droit de percevoir les revenus du bien.

o En cas de constitution d’un droit d’emphytéose, l’emphytéote est redevable de

l’impôt sur les revenus retirés de son droit mais le propriétaire est imposable sur les

sommes qu’il retire de la constitution de ce droit, soit lors de la constitution de

l’emphytéose, soit au cours du contrat72.

À l’expiration du droit d’emphytéose, le propriétaire n’est pas imposable sur

l’enrichissement qui résulte de la reconstitution de sa pleine propriété.

Il en est d’ailleurs de même pour le nu-propriétaire en cas d’extinction de l’usufruit.

o En cas de constitution d’un droit de superficie, les mêmes règles sont applicables.

Le propriétaire est imposé sur les sommes qu’il retire à ce titre, c’est-à-dire sur les

redevances payées par le superficiaire, tandis que celui-ci paie l’impôt sur les

revenus qu’il retire de son droit de superficie, correspondant à la propriété des

constructions édifiées sur le terrain du tréfoncier.

72 Com. I.R., 10/3.

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En cas de changement de propriétaire en cours d’exercice, ou en cas de constitution d’un

droit d’usufruit, d’emphytéose ou de superficie pendant cet exercice, il incombe à chacun

des propriétaires, ou autres débiteurs de l’impôt, de déclarer le revenu

proportionnellement en fonction de la période au cours de laquelle il a eu la propriété, ou

un autre droit sur l’immeuble le rendant débiteur de l’impôt, pendant l’année73.

Rappelons qu’en matière de précompte immobilier, la règle est différente, le propriétaire

au 1er janvier de l’année est le seul débiteur du précompte vis-à-vis de l’administration

fiscale.

Section 2. Réduction et immunité des revenus de biens immobiliers

Le revenu immobilier imposable est constitué :

- soit par le revenu cadastral indexé et majoré ;

- soit par le loyer réel net.

Dans certains cas, ce revenu immobilier imposable (revenu cadastral ou loyer réel net)

bénéficie d’une réduction ou d’une exonération d’impôt.

§ 1. Cas de réduction ou d’immunité des revenus de biens immobiliers affectant le

précompte immobilier

1. Réduction pour cause d’improductivité

L’article 15 du C.I.R. 1992 prévoit, moyennant le respect de certaines conditions, une

réduction du revenu cadastral pour les immeubles bâtis étant temporairement inoccupés

ou improductif de revenus. Le revenu cadastral est réduit dans une mesure proportionnelle

à la durée et à l’importance de l’improductivité, de l’absence de jouissance de revenus ou

de la perte de ceux-ci (par exemple lorsque le propriétaire cherche un locataire mais ne le

trouve pas, ou parce que le bien a fait l'objet de gros dégâts). Cette réduction du revenu

cadastral peut engendrer une réduction du précompte immobilier pour autant que le

contribuable en fasse la demande à l’administration (article 257 CIR 92).

a. Conditions requises pour bénéficier de la réduction du revenu cadastral :

Ces conditions sont variables suivant les Régions, seules compétentes pour les fixer. Sous

réserve de quelques nuances, les conditions suivantes sont néanmoins communes.

73 Com. I.R., 9/3.

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Les cinq conditions suivantes doivent, dans le cas d’une inoccupation ou improductivité de

l’immeuble, être simultanément réunies :

– L’immeuble doit être un immeuble bâti. Le législateur a en effet délibérément écarté

les parcelles non bâties, telles des terres, jardins, parcs, bois, terrains, etc.

– L’immeuble ne peut être meublé. Le commentaire administratif74 donne quelques

précisions à propos de la notion d’immeubles non meublés. Ainsi, il y aura affectation

de l’immeuble, et partant, refus du bénéfice de réduction de revenu cadastral, lorsque

l’immeuble sert de dépôt de vieux meubles, non utilisés. La notion d’immeubles non

occupés ne peut être confondue avec celle d’immeubles inhabités75. Il suffit donc

qu’une pièce soit occupée ou meublée pour que la condition d’inoccupation ne soit

pas respectée. L’administration reconnaît cependant le caractère non meublé d’un

immeuble lorsque ne se trouvent à l’intérieur que quelques objets sans valeur.

– L’immeuble doit être inoccupé et improductif. Si le propriétaire décide d’occuper

l’immeuble lui-même, ou de le mettre à la disposition d’un de ses proches, voire même

d’un tiers, par exemple d’une ASBL, l’immeuble ne peut être considéré comme

inoccupé. Le propriétaire n’a, de ce fait, pas droit à la réduction du revenu cadastral76.

Le fait qu’un immeuble soit inhabité ne suffit pas pour obtenir la réduction du revenu

cadastral. Ainsi, par exemple, le simple fait de ranger ou de stocker du mobilier dans

un immeuble correspond à une occupation et empêche le bénéfice de la réduction77.

– L’inoccupation ou l’improductivité doit avoir été effective pendant au moins 90 jours.

L’immeuble ne peut rapporter aucun loyer, ni aucune jouissance personnelle au

propriétaire78 et ce, pendant au moins 90 jours. Il n’est pas requis que ces 90 jours

soient consécutifs. Il suffit que 90 jours d’inoccupation puissent être constatés au

cours d’une même période imposable79. La réduction du revenu cadastral ne sera

accordée qu’au prorata de la période d’inoccupation. Il faudra donc additionner toutes

74 Com. I.R., n° 257/79 à 257/81 75 Anvers, 22 mars 1984, B.C., 1986, p. 2654. 76 Voyez au sujet d’un kot mis à la disposition du fils du propriétaire : Civ. Namur, 30 novembre 2005, R.G. n°

247/2005, www.fiscalnet.be. 77 Cass., 11 février 2010, AR F.090059.N, T.F.R., 2010, n° 387, p. 774. 78 Gand, 11 décembre 2012, T.F.R., 2013, liv. 442, p. 452. 79 Bruxelles, 22 novembre 2000, R.G. n° 1993/FR/129, www.fiscalnet.be.

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les périodes d’inoccupation et d’improductivité au cours de l’année afin de déterminer

si la limite des 90 jours est atteinte80.

La Région wallonne a édicté des conditions plus strictes en la matière. Depuis l’exercice

d’imposition 2009, l'improductivité doit être d'une durée minimale de 180 jours81 . En

outre, le bénéfice de la réduction du précompte immobilier est limité à une période totale

de douze mois sauf si le redevable prouve que l'improductivité résulte d'une calamité, d'un

cas de force majeure, d'une procédure ou d'une enquête administrative ou judiciaire

empêchant la jouissance libre de l'immeuble 9.

Ces règles propres à la Région wallonne ont été avalisées par la Cour constitutionnelle,

dans un arrêt du 13 juin 201382.

– L’inoccupation ou l’improductivité de l’immeuble ne peut être volontaire. Ceci signifie

assez logiquement que le propriétaire qui a décidé de laisser son immeuble inoccupé

ou improductif ne pourra bénéficier de la réduction du revenu cadastral. A cet égard,

la loi attribue au propriétaire la charge de prouver le caractère involontaire de

l’improductivité83. L’administration admet généralement à titre de preuve l’existence

de travaux de voirie, l’existence d’une procédure d’expropriation, une impossibilité

matérielle d’occuper l’immeuble, etc.84. En revanche, si le propriétaire a laissé son

immeuble improductif parce qu’il y procède à des travaux de transformation, ou

simplement parce qu’il a été négligent ou ne cherche pas de locataire, l’inoccupation

sera considérée comme volontaire et l’octroi de la réduction ne sera pas accordé85. Il

sera donc prudent pour le propriétaire de se réserver une preuve du fait qu’il a tenté

de mettre l’immeuble en location86. Cette preuve pourrait, par exemple, lui être

fournie par des attestations d’agences ou encore des annonces dans les journaux ou

sur internet87, même s’il s’agit d’annonces « à vendre ou à louer ». L’administration

80 Com. I.R., 257/118. 81 Article 2 du décret du 10 décembre 2009 d'équité fiscale et d'efficacité environnementale pour le parc

automobile et les maisons passives 82 C.C., 13 juin 2013, n° 90/2013, www.const-cour.be. Voyez à ce sujet C. BUYSSE, « Règle « wallonne » des 12

mois et espaces commerciaux : pas de discrimination », Fiscologue, 2013, n° 1345, p. 17. Pour un arrêt de la

Cour de cassation rendu en la matière, voyez Cass., 13 novembre 2014, F.13.0130.F/1, www.juridat.be. 83 Voyez à cet égard : Cass., 13 novembre 2014, J.L.M.B., 2015/2, p. 72 84 Voyez à cet égard : Cour. fisc., « aperçu des dispositions fiscales de l’année 1995 », 1996, p. 7. 85 Civ. Mons 15 septembre 2010, F.J.F., 2010, liv. 6, p. 654. 86 Gand, 13 septembre 2011, Fisc. Act., liv. 41, p. 13 et Gand, 22 novembre 2011, Fiscologue, liv. 1310, p. 12. 87 Voez en ce sens Cass., 15 mars 2013, F.12.0067.N, Juridat.

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exige in concreto que le propriétaire ait fait connaître publiquement que l’immeuble

était à louer88.

b. Exclusion

La réduction du revenu cadastral visé à l’article 15 du C.I.R. 1992 ne concerne que les

propriétés situées en Belgique étant entendu que seules celles-ci ont un revenu cadastral au

sens de la loi belge89.

2. Immeubles affectés au culte, à l’enseignement ou à des œuvres de bienfaisance

a. Principe

L’article 12, § 1er du C.I.R. 1992 prévoit que « sont exonérés les revenus de biens

immobiliers ou des parties de biens immobiliers sis dans un Etat membre de l'Espace

économique européen qu'un contribuable ou un occupant a affectés sans but de lucre à

l'exercice public d'un culte, ou de l'assistance morale laïque à l'enseignement, à l'installation

d'hôpitaux, de cliniques, de dispensaires, de maisons de repos, de homes de vacances pour

enfants ou personnes pensionnées, ou d'autres œuvres analogues de bienfaisance »90.

L’immunisation peut être obtenue pour des biens situés en Belgique mais également pour

tout bien immobilier situé dans un Etat membre de l’Espace économique européen.

En vertu de l’article 12 du C.I.R.1992, l’immunisation du revenu cadastral d’immeubles ou

de parties d’immeubles n’a lieu qu’à la condition, d’une part, que le contribuable ou un

occupant ne poursuive aucun but de lucre, et, d’autre part, que ces immeubles ou parties

d’immeubles soient affectés à l’une des destinations indiquées dans cette disposition

légale91.

88 B. MARISCAL, « Improductivité d’un immeuble en Région wallonne : quand peut-on invoquer la force

majeure ? », Immobilier, 17 - 31 mai 2013, n° 10. 89 La valeur locative des propriétés sises à l’étranger doit être mentionnée dans la déclaration à l’impôt des

personnes physiques. A défaut de convention préventive de la double imposition, cette valeur locative est

taxable en Belgique, mais l’impôt est réduit de moitié (article 156 CIR 92). En présence d’une convention, il y

a exonération de ces revenus en Belgique, sous réserve de progressivité. 90 Nous verrons infra que le revenu cadastral est également, dans cette hypothèse, immunisé du précompte

immobilier dans les trois Régions. 91 Mons, 22 mars 2002, RG 1988/FI/1277, www.fiscalnet.be.

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b. Conditions d’immunisation

L’immunisation du revenu cadastral requiert la réunion de deux conditions cumulatives92 :

b.1. L’absence de but de lucre

La première condition d’immunisation du revenu cadastral, et partant, du précompte

immobilier, réside dans l’absence de but de lucre dans le chef du contribuable ou de

l’occupant du bien immobilier ou de la partie de biens immobiliers concernés.

L’absence de but de lucre est une question de fait. Il ne suffit donc pas de constater que le

bien appartient à une société, poursuivant par essence un but de lucre pour refuser

l’immunisation du revenu cadastral93. De la même façon, le simple fait que l’immeuble est

détenu par une ASBL ne permet pas ipso facto l’octroi de l’exonération. L’exonération ne

peut dès lors être de facto refusée à des sociétés et être automatiquement accordée à des

ASBL au seul motif qu’elles sont censées, respectivement, poursuivre ou non un but de

lucre. L’absence de but de lucre n’est donc pas liée à la qualité du contribuable mais

dépend de l’affectation de l’immeuble94.

Ainsi, par exemple, l’octroi au propriétaire d’une indemnité destinée à couvrir les frais

d’entretien de l’immeuble ou d’une indemnité d’amortissement annuel ne fait pas perdre le

bénéfice de l’immunisation, à la condition que l’indemnité soit inférieure au loyer normal95.

Par contre, lorsque le propriétaire tire un avantage du bien, il a l’obligation de l’affecter au

maintien et au développement du but auquel l’immeuble est destiné, sans quoi on

considérera qu’il poursuit un but lucratif96.

92 Cass., 10 mai 1990, Bull. Contr. 1991, n°703, p. 636 ; Mons, 22 mars 2002, RG 1988/FI/1277,

www.fiscalnet.be 93 Mons, 12 novembre 2008, RG 2007/RG/483, www.fiscalnet.be ; Anvers, 25 mai 2005, RG 00/5834/A,

www.fiscalnet.be. 94 Anvers, 22 février 2000, RG. 1996/FR/336, www.fiscalnet.be ; Com. I.R. n° 253/12 à 14. 95 Mons, 21 mai 1980, J.D.F., 1981, p. 223. 96 Cass., 6 mars 1987, Pas., 1987, I, p. 812.

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Enfin, récemment, la Cour de cassation a rappelé que l’absence de but de lucre doit

toujours s’apprécier dans le chef de celui qui affecte ou destine l’immeuble à la fin

spécifique visée. A ce propos, elle a jugé que l’absence de but de lucre ne doit pas exister

cumulativement dans le chef du contribuable et dans celui de l’occupant. Il suffit qu’il y ait

absence de but de lucre soit dans le chef du contribuable, soit dans le chef de l’occupant97.

b.2. L’affectation de l’immeuble à une activité de bienfaisance et le fait que l’affectation doit

être nécessaire à l’exercice d’une telle activité98

La deuxième condition d’immunisation du revenu cadastral, et partant, du précompte

immobilier, réside dans l’affectation de l’immeuble à une œuvre philanthropique visée à

l’article 12 du C.I.R. 1992. À nouveau, la condition d’affectation doit s’apprécier dans le

chef de l’immeuble et non pas du contribuable99.

La loi exige en outre que l’affectation soit nécessaire.

La condition d’affectation imposée par l’article 12, § 1er du C.I.R. 1992 implique, en effet,

une relation de nécessité entre la destination du bien immeuble et le culte, ce qui veut dire

que ce dernier ne pourrait pas être exercé en l’absence de cette destination100. L’affectation

à l’activité de bienfaisance n’est cependant pas réelle lorsqu’il s’agit d’un immeuble qui

abrite le service administratif d’une œuvre de bienfaisance101.

b.3. « Œuvres philanthropiques » visée à l’article 12 du C.I.R 1992

L’immunisation du revenu cadastral n’est pas accordée d’office à n’importe quelle œuvre

sociale ou philanthropique. L’énumération figurant à l’article 12, § 1er est limitative102.

L’immeuble doit donc servir au culte, à l’enseignement, être une clinique, un home de

vacances pour enfants, pour pensionnés, être utilisé pour une œuvre de bienfaisance, etc.

97 Cass., 19 octobre 2012, Fiscologue, n° 1320, p. 7, note J. VAN DYCK. 98 Bruxelles, 16 septembre 2009, R.G. n° 2008/AR/357, www.fiscalnet.be. 99 Civ. Namur, 1er décembre 2004, F.J.F., 2005, liv. 4, p. 388. 100 Voir notamment : Mons, 22 mars 2002, F.J.F., 2002, liv. 7, p. 597 ; Anvers, 18 décembre 2001, F.J.F., 2001,

liv. 3, p. 217 ; Anvers, 11 décembre 2002, RG 00/4347/A, www.fiscalnet.be ; Civ. Bruxelles, 4 décembre 2003,

RG 03/425/A, www.fiscalnet.be. 101 Cass., 10 janvier 1968, Pas., 1968, I, p. 596. 102 Com. I.R., 253/53.

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Par exemple, des immeubles mis à la disposition de théâtres ou de troupes de scouts,

comme des salles de fêtes ou de réunions par exemple, ne sont pas considérés comme

destinés à des œuvres analogues de bienfaisance103. En revanche, un immeuble affecté à

l’enseignement de la philosophie et de la morale laïques répond aux conditions requises,

puisqu’il s’agit d’enseignement104.

3. Immunité des immeubles appartenant à un Etat étranger

L’article 231, § 1er, 1o du C.I.R. 1992 prévoit que « sont exonérés sous condition de

réciprocité : les revenus des biens immobiliers qu’un État étranger a affectés à l’installation

de ses missions diplomatiques ou consulaires ou d’institutions culturelles ne se livrant pas à

des opérations à caractère lucratif ».

§ 2. Cas de réductions ou d’immunités de revenus de biens immobiliers n’affectant pas le

précompte immobilier

1. Immunité des biens loués dans le cadre d’un bail à ferme

Le revenu cadastral de biens immobiliers (bâtis et non bâtis) situés dans un Etat membre

de l’Espace économique européen, loués dans le cadre d’un bail de carrière ou d’un bail

similaire dans un autre Etat membre de l’Espace économique européen, est exonéré

d’impôt (art. 12, § 2 du C.I.R. 1992).

Le bail de carrière est un bail dont la durée s’étend jusqu’au 65ème anniversaire du

preneur, avec une durée minimale de 27 ans. Cette même exonération s’applique aux baux

à ferme qui sont établis par acte authentique et qui prévoient une première période

d’utilisation de minimum 18 ans (article 12, § 2 du C.I.R. 1992).

2. Immunité du revenu cadastral de l’habitation propre

Sans préjudice de la perception du précompte immobilier, le revenu cadastral est

également exonéré lorsqu’il s’agit de l’habitation que le contribuable occupe et dont il est le

propriétaire, le possesseur, l’emphytéote, le superficiaire ou l’usufruitier (art. 12, § 3 du

C.I.R. 1992).

103 Bruxelles, 25 février 1954 ; Com. I.R., 253/55. 104 Cass., 13 septembre 1966, Pas., 1967, I, 56.

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Ce régime d’exonération du revenu cadastral a été étendu à la valeur locative ou au

montant du loyer et des avantages locatifs d’une habitation « propre » (celle que le

contribuable occupe lui-même) située dans un Etat membre de l’espace économique

européen105.

L’habitation propre est le bien immobilier (ou une partie de ce bien) occupé par le

propriétaire à titre d’habitation. L’article 12, § 3 CIR 92 précise toutefois que lorsque le

contribuable occupe plus d’une habitation, l’exonération est octroyée pour une seule

habitation au choix.

3. Immeuble affecté à l’exercice d’une activité professionnelle

Lorsque le propriétaire d’un immeuble décide de l’affecter à son activité professionnelle, il

n’aura aucun loyer à payer et ne pourra donc déduire aucun loyer de ses revenus

professionnels. En conséquence, les revenus professionnels de ce propriétaire seront en

principe supérieurs à ceux qu’un contribuable réalise lorsqu’il prend un bien immobilier en

location afin d’y exercer son activité professionnelle.

La loi considère pour cette raison que le revenu du bien immobilier – c’est-à-dire sa valeur

locative – se retrouve dans les revenus professionnels du propriétaire puisque ceux-ci sont

plus importants que dans le cas où un immeuble doit être pris en location en vue d’y

exercer l’activité professionnelle dont il est question. Lorsque l’immeuble est la propriété

d’une société, il y aura en principe toujours application de cette règle puisque les biens

appartenant à cette société sont affectés à la réalisation de son objet social.

La règle dont il est question est contenue dans l’article 37, alinéa 1er, du C.I.R. 1992 qui

dispose que :

« Sans préjudice de l’application des précomptes, les revenus des biens immobiliers et de

capitaux et biens mobiliers, sont considérés comme des revenus professionnels, lorsque ces

avoirs sont affectés à l’exercice de l’activité professionnelle du bénéficiaire desdits revenus

[...] ».

Prenons l’exemple suivant :

Monsieur X est propriétaire d’un bien immobilier affecté entièrement à l’exercice de son

activité professionnelle et dont le revenu cadastral s’élève à 4.000 €.

105 Loi du 25 avril 2007, M.B., 10 mai 2007.

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Si le bénéfice réalisé par Monsieur X dans le cadre de l’exercice de son activité est pour

l’année 2014 de 50.000 €, ce dernier devra déclarer, dans sa déclaration à l’impôt des

personnes physiques pour l’exercice d’imposition 2015, un bénéfice de 50.000 € au titre de

revenus professionnels, censés incorporer le revenu cadastral de l’immeuble affecté à

l’exercice de sa profession.

Le revenu cadastral n’est donc pas imposable dans le chef du propriétaire qui utilise son

immeuble à des fins professionnelles. Celui-ci n’est taxé sur aucun revenu de cet immeuble

au titre de revenu immobilier. En effet, l’immeuble n’est qu’un des éléments servant à

produire les bénéfices de l’exploitation du contribuable106 et le revenu qu’il permet

d’obtenir est déjà imposé sous forme de revenus professionnels. Il ne se justifie donc pas de

l’imposer une deuxième fois au titre de revenu immobilier.

Si l’immeuble est partiellement affecté à une activité professionnelle, il faudra établir un

prorata et seule une partie du revenu cadastral, correspondant à la proportion

d’occupation privée, sera imposable.

Section 3. Les frais déductibles

§ 1. Intérêts déductibles des revenus immobiliers

L’article 14, al. 1er, 1° du C.I.R. 1992 prévoit que le contribuable peut déduire de ses revenus

immobiliers (et non de ses revenus globalisés, comme c’est le cas de la déduction de

l’article 104, 9° du C.I.R 1992), les intérêts de dettes contractées spécifiquement en vue

d’acquérir ou de conserver ses biens immobiliers, à la condition que les intérêts soient

payés ou supportés pendant la période imposable. Pour être déductibles, les intérêts

doivent être relatifs à un contrat de prêt conclu spécifiquement pour acquérir ou conserver

des revenus immobiliers, tels ceux souscrits pour l’acquisition d’une habitation, sa

rénovation, des grosses réparations ou améliorations.

a. Conditions de déduction

- Lien de causalité

106 Com. I.R., 37/6.

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Le terme « spécifiquement » signifie que l’emprunt doit présenter un lien de causalité

direct avec l’acquisition ou la conservation d’un immeuble. Cette condition a pour but

d’éviter que les intérêts d’emprunts qui ont servi indirectement à conserver des immeubles

soient déductibles.

Les intérêts payés relatifs à des dettes qui ont servi à d’autres fins, comme par exemple le

paiement des impôts, l’acquisition d’actions ou d’une voiture, le financement d’un voyage

ou d’une fête de mariage, etc… ne sont pas déductibles sur la base de l’article 14 du C.I.R.

1992, même si, à défaut de cet emprunt, le contribuable aurait été contraint d’hypothéquer,

de mettre en gage ou même d’aliéner un bien immobilier lui appartenant107. Ainsi, le

contribuable qui souscrit un emprunt pour acquérir une voiture ne pourrait soutenir que

l’emprunt a servi à conserver son immeuble, sous prétexte que s’il n’avait pas contracté

d’emprunt pour cette autre dépense, il aurait dû vendre l’immeuble108.

Le lien devant exister entre la dette et la conservation des biens immobiliers doit être

interprété de manière stricte. Les dettes doivent être contractées en vue d’augmenter ou de

maintenir au même niveau la valeur des biens immobiliers, au moyen de travaux de

transformation, d’amélioration, d’adaptation, de modernisation ou encore d’entretien109.

Il appartient donc au contribuable de fournir la preuve de la destination réelle de

l’emprunt110.

- Intérêts privés

Seuls entrent en ligne de compte pour la déduction les intérêts dus qualifiés de « privés »,

c’est-à-dire relatifs à des dettes afférentes à des biens immobiliers ou parties de biens

immobiliers qui ne sont pas affectés à l’exercice de l’activité professionnelle du propriétaire

et qui sont compris dans la base imposable à l’impôt des personnes physiques.

107 R. ROSOUX, Pratiques de l’impôt des personnes physiques, vol. I, Bruxelles, Ed. E.C.P., 1999, p. 751. 108 P. COPPENS et A. BAILLEUX, op. cit., p. 53. 109 Voyez notamment : Civ. Hasselt, 3 décembre 2008, R.G. n°05/267/A ; Anvers, 29 avril 2003, R.G.

n°1993/FR/120 ; Anvers, 3 février 2004, R.G. n°1996/FR/196 ; Civ. Anvers, 15 janvier 2003, R.G.

n°01/7748/A ; Civ. Bruxelles, 27 novembre 2008, R.G. n°2007/8808/A, www.fiscalnet.be. 110 Voyez notamment : Civ. Bruxelles, 28 janvier 2005, R.G. n°2001/3044/A, Civ. Gand, 10 novembre 2005,

R.G. n°05/374/A, www.fiscalnet.be.

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Les intérêts de dettes afférentes à des biens immobiliers ou parties de biens immobiliers

affectés par le propriétaire à l’exercice de son activité professionnelle, ne peuvent être

déduits des revenus des biens immobiliers, puisque les revenus des biens ou parties des

biens immobiliers dont il s’agit ne sont pas comme tels des revenus immobiliers. Ces

intérêts peuvent toutefois être déduits à titre de frais professionnels, pour autant que

toutes les conditions prévues en la matière soient remplies (article 49 du C.I.R. 1992).

Lorsque l’emprunt est contracté pour la construction d’un bien immobilier affecté pour

partie à des fins privées, et pour l’autre partie à des fins professionnelles, il y a lieu de

considérer que l’emprunt et les intérêts se rapportent proportionnellement à la partie

privée et à la partie professionnelle, sauf lorsque le contribuable apporte la preuve que

l’emprunt a été affecté dans une autre proportion.

En la matière, une simple déclaration d’intention de l’intéressé lui-même ou d’une tierce

personne n’est pas suffisante en soi. Cette déclaration d’intention devra être appuyée par

des éléments probants démontrant l’affectation réelle (acte d’achat, factures des travaux,

…).

En revanche, les intérêts d’emprunts contractés pour payer les droits de succession relatifs

à un immeuble successoral sont déductibles111.

b. Emprunts de remplacement et de refinancement

Logiquement, les emprunts contractés pour rembourser un premier emprunt relatif à

l’acquisition ou à la conservation de biens immobiliers ne présentent pas de lien de

causalité direct avec l’acquisition ou la conservation d’un immeuble. L’administration

admet toutefois la déduction des intérêts d’emprunts de remplacement et d’emprunts de

refinancement.

L’emprunt de remplacement est l’emprunt définitif que le contribuable s’est finalement vu

octroyer après avoir contracté un emprunt à court terme. Les deux emprunts sont alors

considérés comme formant une seule opération112.

111 Cass. 5 janvier 1978, J.D.F., 1978, p. 156. 112 Q.P. 14 avril 1989, BC, no 689, p. 2473.

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L’emprunt de refinancement, est un emprunt conclu pour remplacer un emprunt antérieur

qui a été contracté spécifiquement en vue d’acquérir ou de conserver des biens

immobiliers. Cet emprunt donne donc lieu à la déduction ordinaire d’intérêts, comme

l’emprunt initial, sans condition supplémentaire. Toutefois, seule la partie de l’emprunt de

refinancement qui n’excède pas le solde restant dû de l’emprunt initial est prise en

considération. Il faut donc multiplier les intérêts de l’emprunt de refinancement par une

fraction dont le numérateur est le solde restant dû de l’emprunt initial et le dénominateur,

le montant du nouvel emprunt.

§ 2. Frais déductibles des revenus globalisés : l’ancien régime de déduction des intérêts

d’emprunt Avec la sixième réforme de l’Etat et l’attribution de nouvelles compétences aux Régions, le

paysage fiscal liés aux investissements immobiliers s’est considérablement compliqué.

Depuis le 1er janvier 2015, les régions sont exclusivement compétentes pour les réductions

d’impôt et les crédits d’impôt relatifs aux dépenses faites en vue d’acquérir ou de conserver

l’habitation propre (art. 5/5, § 4, al. 1er, 1°, sous le titre III/1 « Taxe additionnelle régionale

sur l’impôt des personnes physiques » de la loi spéciale du 16.01.1989 concernant le

financement des Communautés et des Régions).

En revanche, l’Etat fédéral reste compétent pour les avantages fiscaux liés aux habitations

autres que propres du contribuable.

Ce changement de compétence s’accompagne de nombreux régimes transitoires. En outre,

les autorités des différentes Régions n’ont pas encore réglementé tous les aspects liés à

leurs nouvelles compétences. Il en résulte un certain flou et de nombreuses incertitudes

sur le régime futur.

L’Etat fédéral avait dans un premier temps mis en œuvre la « déduction pour habitation

propre et unique » qui était contenue à l’ancien article 104,9° du CIR92.

L’ancienne « déduction pour habitation propre et unique » fédérale s’est vue, avec la 6ème

réforme de l’Etat, transformée en réduction d’impôt appelée le « bonus logement ».

Le bonus logement était un avantage fiscal lié à l’emprunt hypothécaire. Il s’agissait d’une

réduction d’impôt accordée, moyennant le respect de certaines conditions, aux personnes

ayant souscrit un emprunt hypothécaire pour acheter ou faire construire leur habitation

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unique et propre. Les Régions ayant fait application de leurs nouvelles compétences, le

régime désormais applicable varie fortement d’une Région à l’autre.

Section 4 : Les nouveaux avantages fiscaux régionaux

Comme annoncé, les trois Régions ont fait application de leur nouvelle compétence et ont

légiféré en la matière. Ainsi, en Région flamande, les anciens avantages fiscaux - bonus

logement, épargne à long terme et intérêts classiques - sont définitivement supprimés pour

les nouveaux prêts et sont dorénavant intégrés dans une seule et même réduction d’impôts,

dénommée le bonus logement intégré. En Région de Bruxelles-Capitale, le bonus logement

a été supprimé depuis le 1er janvier 2017 (au profit d’un abattement plus conséquent des

droits d’enregistrement dus lors d’une acquisition immobilière). La Wallonie a quant à elle

supprimé le régime du « bonus logement » à partir du 1er janvier 2016 et l’a remplacé par

un nouveau dispositif dénommé, « chèque habitat ».

§1er : conditions pour bénéficier du bonus logement

Le bonus logement est une réduction d'impôt accordée aux personnes ayant souscrit un

emprunt hypothécaire pour acheter ou faire construire leur habitation. Plusieurs

conditions doivent être remplies pour bénéficier du bonus logement (145/38 CIR92) :

- Les intérêts et les sommes qui entrent en compte pour la réduction doivent être

affectés à l'amortissement ou à la reconstitution d'un emprunt hypothécaire

spécifiquement contracté en vue d'acquérir ou de conserver une habitation unique

et propre ;

- L’emprunt hypothécaire a été contractés par le contribuable auprès d'un

établissement ayant son siège dans l'Espace économique européen pour acquérir ou

conserver, dans un Etat membre de l'Espace économique européen, son habitation

propre ;

- L’emprunt hypothécaire a été contracté à partir du 1er janvier 2005 et a une durée

d'au moins 10 ans ;

Ne peuvent donc pas en bénéficier

- Les locataires ;

- Les propriétaires qui ont acheté leur habitation sans contracter de prêt ;

- Les propriétaires qui ont terminé de rembourser leur emprunt ;

- Les propriétaires pour leur résidence secondaire.

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Le montant de la réduction diffère selon que l’emprunt hypothécaire a été conclu avant le

31 décembre 2014 ou après cette date (145/37 CIR92).

§2 : L’ancienne mouture du bonus logement

Les personnes ayant conclu un prêt hypothécaire avant le 1er janvier 2015 bénéficient

d’une déduction fiscale, calculée sur le remboursement de l’emprunt et étant

proportionnelle à leurs revenus. Ainsi, plus l’emprunteur a des revenus élevés, plus son

taux d’imposition est important et au plus le bonus-logement sera important lui aussi.

Concrètement, l’emprunteur additionne les mensualités remboursées au cours de l’année

d’imposition, la somme ne pouvant dépasser le plafond de base et majoration(s) s’il y a lieu,

il y applique son taux d’imposition maximal pour obtenir le montant qu’il est autorisé à

réduire du montant d’impôts total à payer.

Lorsque les contrats d'emprunt relatifs à l'emprunt hypothécaire ont été conclus le 31

décembre 2014 au plus tard, le montant pris en compte pour la réduction d'impôt ne peut

pas être supérieur à 2.280 euros (montant indexé) par contribuable et par période

imposable.

Le montant limite, visé à l'alinéa premier, est majoré de 760 euros (montant indexé)

pendant les dix premières périodes imposables à partir de la période imposable dans

laquelle le contrat d'emprunt, visé à l'alinéa premier, est conclu.

Cette majoration est encore majorée de 80 euros (montant indexé) lorsque le contribuable

a trois enfants ou plus de trois enfants à charge au 1er janvier de l'année après l'année dans

laquelle le contrat d'emprunt est conclu les enfants considérés comme handicapés sont

comptés pour deux).

La réduction d'impôt relative aux dépenses prises en compte est calculée au taux

d'imposition le plus élevé appliqué au contribuable avec un minimum de 30 %.

§3 : La nouvelle mouture du bonus logement

Pour les contrats de prêt hypothécaire conclus après en 2015, la réduction d’impôts est

calculée non plus par rapport aux revenus de l’emprunteur mais sur la base d’un taux fixe,

identique pour tous, correspondant à une moyenne nationale.

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Le montant maximum pris en compte ainsi que le taux du bonus logement varient d’une

Région à l’autre.

Ainsi en Région flamande, le montant maximal pris en compte pour la réduction d'impôt

est réduit à 1.520 euros par contribuable et par période imposable.

Pour les contrats conclus à partir du 1er janvier 2016, l'avantage fiscal régional sur l'épargne

à long terme est supprimé et remplacé par un montant de base de 1.520 euros que le

contribuable peut déduire de son crédit logement. Sur ce montant, sera appliqué un taux

de 40 %. Le montant de base vaut pour une habitation propre mais contrairement à avant,

il ne doit plus forcément s'agir de l’habitation unique du contribuable.

En Région de Bruxelles-Capitale et en Région wallonne, ce montant est de 2.280-€ pour les

contrats conclus avant le 1er janvier 2017.

Des majorations identiques à celles prévues pour les contrats conclus avant le 31 décembre

2014 demeurent applicables.

Les taux applicables sont également modifiés puisque le bonus logement est désormais fixé

au taux forfaitaire de 40% en Région wallonne et flamande et à 45% en Région de Bruxelles-

Capitale et ce, peu importe les revenus de chacun.

Le nouveau système du bonus-logement ne permet plus une économie fiscale aussi

intéressante que sous l’ancien régime pour les ménages qui ont un taux d’imposition

supérieur au taux moyen de référence pour le calcul du bonus-logement. Inversement,

pour les faibles revenus, l’avantage est plus conséquent.

Jean, célibataire et sans enfant, a conclu le 1er janvier 2015 un contrat d’emprunt hypothécaire

d’une durée de 20 ans pour l’acquisition d’un premier immeuble situé à Knokke. Il affecte cet

immeuble uniquement à son habitation.

Au cours de l’année 2015, il a remboursé 7.500-€ pour reconstituer son emprunt et 1000-€ à titre

d’intérêts.

Le montant pris en compte pour le calcul de la réduction d’impôt ne pourra toutefois pas excéder

le montant maximum de 1520-€ à majorer de 760-€, soit 2.280-€.

Le bonus logement accordé équivaudra à 40% de 2.280-€, soit 912-€. Cette somme viendra en

réduction de l’impôt dû par Jean pour l’exercice d’imposition 2016.

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§4 : Le « chèque habitat wallon »

L’ancien bonus logement continuera à s’appliquer pour les contrats d’emprunt conclus

avant le 1er janvier 2016 à deux nuances près : les plafonds ne sont plus indexés et sont

fixés, pour tous les contrats existants, à ceux du 1er janvier 2015. Depuis le 1er novembre

2015, le bonus logement est limité à la « durée de l’emprunt » entendue comme la durée

du dernier contrat de prêts hypothécaire ou de la dernière convention. Il n'est donc plus

possible de prolonger la durée du bénéfice du bonus logement en allongeant la durée de

remboursement de l'emprunt.

Le système du chèque habitat, applicable aux emprunts conclus à partir du 1er janvier 2016,

est nettement moins intéressant.

Pour bénéficier du chèque habitat, il faut satisfaire à trois conditions :

1. Contracter un emprunt hypothécaire de 10 ans au moins ;

2. Pour acheter ou construire son unique habitation qu’on va occuper

personnellement (il existe des exceptions comparables au bonus habitation actuel).

Il n'y a donc plus d'avantage fiscal pour une rénovation ou si vous êtes

(co)propriétaire d'une autre habitation, à moins qu'il ne s'agisse d'une copropriété

suite à un héritage ;

3. Avoir un revenu net annuel imposable de moins de 81000€.

Le chèque habitat est individualisé, donc calculé chaque année sur base des revenus de

chacun et du nombre d'enfants à charge. Les revenus pris en compte sont les revenus

professionnels après déduction des frais professionnels, et après ajout des autres revenus

éventuels (pension alimentaire versée pour vous par votre ex-conjoint ou droits d’auteur

perçus d’un éditeur, par exemple).

• Si les revenus du contribuable sont inférieurs à 21 000€, le montant de base est égal

à 1520€ par personne.

• S'ils sont supérieurs à 81000€, il est égal à... 0€.

• Entre 21000 et 80999€, le montant de base de 1520€ décroît progressivement : il

diminue de 1€ par tranche de 78€ de revenus. La formule est la suivante : Montant

variable = 1520 – [(revenu net imposable - 21.000) x 1,275%].

Le calcul est effectué en même temps que celui des impôts, d’après la déclaration fiscale du

contribuable.

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Au montant de base s'ajoute un forfait de 125€ par enfant à charge. Cet avantage est

réparti entre les parents.

Enfin, le chèque habitat est limité dans le temps puisqu’on ne peut le percevoir que 20 fois.

Cependant, après 10 fois, il est réduit de moitié.

Section 4. Modes de détermination de la taxation des revenus immobiliers à

l’impôt des personnes physiques

Le régime d’imposition applicable aux revenus immobiliers dépend de quatre facteurs :

- La situation du bien (en Belgique ou à l’étranger) - La personne juridique du locataire (personne physique ou moral) - L’usage qui est fait du bien par le locataire (privé ou professionnel) - La nature du bien (bâti ou non bâti)

§ 1. Immeubles situés en Belgique

1) Montant imposable dans l’hypothèse d’un immeuble occupé par le contribuable lui-

même à titre privé (habitation principale ou secondaire)

a) Base imposable

Le contribuable qui occupe lui-même son immeuble ne perçoit aucun revenu de ce chef.

En revanche, le fait d’être propriétaire de l’immeuble lui permet d’éviter la charge que

constituerait un loyer s’il était locataire.

Le revenu imposé est le revenu cadastral (art. 7, § 1er, 1o du C.I.R. 1992).

En ce qui concerne les biens immobiliers sis en Belgique et non donnés en location, il

convient d’opérer une distinction entre :

– d’une part, les biens qui sont bâtis, pour lesquels l’imposition est calculée sur le revenu

cadastral indexé majoré de 40 % (article 7, § 1er, 1°, a, 2ème tiret, du C.I.R. 1992) (sauf

l'habitation propre du contribuable) ;

– et d’autre part, les biens immobiliers non bâtis, le matériel et l’outillage présentant le

caractère d’immeuble par nature ou par destination ou de l’habitation propre du

contribuable, pour lesquels l’imposition porte uniquement sur le revenu cadastral

indexé (article 7, § 1er, 1°, a, 1er tiret, du C.I.R. 1992).

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b) Exonération :

Pour rappel, le revenu cadastral de l’habitation « propre » est exonéré d’impôt et, à ce titre

ne doit plus faire l’objet d’une mention dans la déclaration. Cette exonération ne vaut que

pour un seul bien, au choix du contribuable (art. 12, § 3 du C.I.R.).

Il était traditionnellement enseigné que la déclaration du revenu cadastral devait

cependant être effectuée si le propriétaire souhaitait bénéficier du régime de déduction des

intérêts relatifs à un emprunt contracté :

o Avant le 1er janvier 2005113, où

o Après le 1er janvier 2005 si le contribuable a un autre emprunt contracté avant le 1er

janvier 2005 pour lequel il n’applique pas la déduction pour habitation propre et

unique.

Comme la déduction pour habitation unique est devenue une réduction d’impôt à partir de

l’exercice d’imposition 2015, ces précisions auront moins d’impact pratique dans le futur.

2) Montant imposable dans l’hypothèse d’un immeuble donné en location à un locataire

qui l’affecte exclusivement à des fins privées

a) Location à une personne physique qui l’affecte exclusivement à des fins privées

Lorsque le bien immobilier est donné en location à un locataire personne physique qui ne

l’affecte pas (pas même partiellement), à l’exercice de son activité professionnelle,

l’imposition sera également calculée sur base du revenu cadastral et ce, quel que soit le

montant du loyer effectivement perçu par le propriétaire (article 7, § 1er, 2o, a, du C.I.R.

1992).

Si le bien immobilier est bâti, le revenu imposable dans le chef du contribuable sera le

revenu cadastral indexé majoré de 40 % (article 7, §1er, 2°, a, 2ème tiret du C.I.R. 1992).

113 Même en cas d’emprunt de refinancement contracté après le 1er janvier 2005 sauf si à cette occasion le

propriétaire a opté pour la déduction propre et unique.

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S’il s’agit par contre d’un bien immobilier non bâti ou du matériel et de l’outillage

présentant le caractère d’immeuble par nature ou par destination, l’imposition sera

uniquement calculée sur le revenu cadastral simplement indexé (article 7, §1er, 2°, a, 1er tiret

du C.I.R. 1992).

b) Location à une personne morale qui l’affecte exclusivement à des fins privées

Le même régime est applicable si le bien est donné en location à une personne morale

autre qu’une société en vue de le mettre à disposition d’une ou plusieurs personnes

physiques qui l’affecte(nt) exclusivement à l’habitation (art. 7, § 1er, 2o b bis, du C.I.R. 1992).

Sera donc imposé sur base du revenu cadastral indexé, majoré de 40 % (et non le montant

total du loyer et des avantages locatifs), le propriétaire qui respecte les conditions

suivantes :

- la location doit se rapporter à un immeuble bâti ;

- le bâtiment doit être loué à une personne morale autre qu’une société (par exemple

des associations sans but lucratif, des communes, des CPAS, …) ;

- celle-ci le met à disposition de personnes qui l'utilisent uniquement comme

habitation.

c) Affectation professionnelle à l’insu du bailleur

Il arrive que lors de la signature d’un contrat de bail, celui-ci prévoie que l’immeuble ne

peut être affecté qu’à un usage privé, à l’exclusion de l’usage professionnel.

Le locataire, ne respectant pas ses engagements contractuels, et affectant une partie de

l’immeuble loué à son usage professionnel, déduit parfois au titre de charges

professionnelles tout ou partie du loyer payé. Or cette situation peut avoir des fâcheuses

conséquences dans le chef du propriétaire.

En effet, nous verrons infra que lorsqu’un immeuble est loué et que son locataire l’affecte à

son activité professionnelle, la taxation dans le chef du propriétaire se fera non pas sur la

base du revenu cadastral indexé majoré de 40% mais sur le montant total du loyer et des

avantages locatifs. Ceux-ci sont pratiquement toujours nettement supérieurs au montant

du revenu cadastral.

Une abondante jurisprudence s’est développée sur cette question.

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Il en ressort qu’en principe, le propriétaire de bonne foi ne pourra pas se prévaloir d’un

contrat de bail enregistré qui prévoit l’interdiction pour le locataire d’affecter l’immeuble à

son activité professionnelle et sera redevable d’un impôt sur les loyers réels (et non plus sur

le revenu cadastral) si son locataire enfreint cette interdiction.

Néanmoins, la Cour constitutionnelle a eu l’occasion de préciser que dans l’hypothèse où

l’administration permet la déduction dans le chef du locataire des loyers payés au titre de

frais professionnels, il y aurait discrimination à taxer rétroactivement le propriétaire sur le

loyer effectivement perçu. Selon elle en effet, dans une telle situation, l’impôt sur les

revenus locatifs réels porte une atteinte disproportionnée au principe selon lequel tout

contribuable doit pouvoir déterminer, avec un degré minimal de prévisibilité, le régime

fiscal qui lui sera appliqué114.

3) Montant imposable dans l’hypothèse d’un immeuble donné en location à un locataire

l’affectant à une activité professionnelle

a. Principe

En réalité, la loi prévoit une taxation du loyer réel dans tous les cas où l’immeuble est loué

(article 7, § 1er, 2°, c du C.I.R. 1992) à des fins autres que l'habitation.

Il est fait exception à cette règle si les biens immobiliers sont donnés en location

conformément à la législation sur le bail à ferme et affectés par le locataire à des fins

agricoles ou horticoles. En effet, l’article 7, § 1er, 2o, b du C.I.R. 1992 prévoit la taxation du

propriétaire sur base du revenu cadastral indexé mais non majoré. Cette dernière

exception, relative pourtant à des biens faisant l’objet d’une affectation professionnelle, n’a

d’autre justification qu’une traditionnelle faveur du législateur fiscal pour les milieux

agricoles.

b. Base imposable

Le principe est que le loyer réel sert de base à la taxation chaque fois qu’ « il est

comptabilisé quelque part », notamment s’il constitue des frais professionnels pour le

locataire.

C’est donc le loyer réel qui est imposé dans le chef du propriétaire lorsque le bien est

affecté à une activité professionnelle par le locataire.

114 C.C.,. 27 mai 2008, n°86/2008, F.J.F., liv. 5, p. 506.

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Toutefois, si le loyer réel est inférieur :

- au revenu cadastral pour les immeubles non bâtis et le matériel et l’outillage ;

- au revenu cadastral majoré de 40% pour les immeubles bâtis,

C’est le revenu cadastral (majoré de 40% selon les cas) qui sera imposé (art. 7, § 1er, 2o, c du

C.I.R. 1992). Cette situation est très rare.

L’administration admet – mais cela semble ressortir d’une simple tolérance – que, lorsque

des loyers sont payés anticipativement, ceux-ci peuvent être répartis sur toute la période

qui les concerne, si le contribuable marque irrévocablement son accord par écrit en ce

sens115.

Lorsque les loyers dus par le locataire sont impayés par celui-ci, les loyers ne sont pas

imposables, à moins qu’ils n’aient été « attribués » d’une autre manière, par exemple, par

une inscription en compte. Ainsi, à défaut de perception des loyers, le propriétaire est taxé

sur le revenu cadastral indexé majoré de 40 %.

c. Charges déductibles

Le montant imposable n’est pas le montant brut (loyer réel), mais un montant net (loyer

réel diminué des charges).

Toutefois, pour éviter des discussions et des problèmes de preuve relatifs à l’importance

des frais supportés par le propriétaire, ceux-ci sont obligatoirement fixés d’une manière

forfaitaire, en ce sens que le forfait s’impose, tant à l’administration qu’au contribuable,

sans possibilité aucune, pour l’une ou pour l’autre partie, de démontrer que les frais réels

seraient inférieurs ou supérieurs à ce forfait. Le forfait de charges est fixé par l’article 13 du

C.I.R. 1992. Il est de 40 % pour les biens immobiliers bâtis et de 10 % pour les biens

immobiliers non bâtis.

115 Com. I.R., 13/5.

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Il est cependant rapidement apparu que, dans certains cas, ce système incitait à une

surévaluation des loyers, notamment lorsqu’il existait des liens économiques entre le

propriétaire et le locataire. Ainsi, par exemple, lorsqu’un propriétaire donnait son

immeuble en location à sa propre société, il pouvait avoir intérêt à majorer sensiblement le

loyer, dans le but de permettre à la société de déduire, en totalité, le loyer, alors que, de son

côté, il n’est imposable qu’à concurrence de 60 % de celui-ci.

La loi a donc remédié à cette situation et l’article 13 CIR 92 prévoit que le forfait de 40 %

pour charges ne peut excéder les 2/3 du revenu cadastral revalorisé en fonction d’un

coefficient déterminé par le Roi et indexé annuellement.

d. Requalification des loyers excessifs

En outre, l’article 32, alinéa 2, 3o du C.I.R. 1992 introduit une fiction légale applicable aux

seuls cas particuliers des « dirigeants d’entreprise de la première catégorie116 ». Cette

disposition prévoit que lorsqu’un « dirigeant d’entreprise de la première catégorie » qui a

donné en location un immeuble dont il est propriétaire à la société au sein de laquelle il

occupe de telles fonctions, une partie des loyers perçus peut être requalifiée en revenus

professionnels si le loyer excède 5/3 du revenu cadastral revalorisé en fonction d’un

coefficient déterminé par le Roi et indexé annuellement.

Cette disposition a donc pour but d’éviter qu’un propriétaire donne son immeuble en

location à sa propre société pour un loyer excessif (certes taxable, mais sous déduction du

forfait de 40 %, plafonné), permettant également à la société de déduire les loyers117.

Ces différentes mesures ont été prises après que, dans plusieurs litiges, l’administration

fiscale n’ait pu obtenir gain de cause en soutenant que le loyer représenterait en réalité,

pour la partie jugée anormale par elle, une rémunération déguisée, parce que la convention

serait simulée, en raison du caractère excessif du loyer.

116 Voyez infra au sujet de cette notion. 117 P. MALHERBE, « Intérêts d'avances et loyers perçus par des administrateurs ou associés depuis la loi du 28

juillet 1992 », J.D.F., 1993, pp. 5-16.

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En particulier, dans son arrêt du 29 janvier 1988, la Cour de cassation a décidé que « si les

impôts sur les revenus doivent être établis sur la base d’éléments réels [...], il n’existe

toutefois aucun principe général du droit suivant lequel il y aurait lieu de tenir compte

d’une réalité économique de l’entreprise, qui serait différente de la réalité de ce qui a été

convenu sans simulation entre parties et dont elles ont accepté tous les effets118 ». En d’autres

termes, le seul fait de surestimer un loyer n’implique pas de simulation si les parties en

acceptent toutes les conséquences (par exemple, en payant les droits d’enregistrement qui

en résultent), et ce même si le loyer ne correspond pas à la valeur économique de l’usage

du bien en question.

118 Cass., 29 janvier 1988, Pas., 1988, I, p. 633.

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Location et sous-location

Les loyers ne sont imposables, comme revenus immobiliers, que dans le chef des

propriétaires, possesseurs, emphytéotes, superficiaires ou usufruitiers du bien. Il n’y a donc

pas d’imposition dans le chef des locataires principaux qui donnent l’immeuble en sous-

location.

Certains ont alors recouru à la combinaison suivante : un propriétaire A donne en location

à un locataire B, qui lui-même sous-loue à un sous-locataire C, qui quant à lui affecte le

bien à l’exercice de son activité professionnelle. En supposant que B soit une personne

physique, le fait pour lui de sous-louer n’entraine pas l’application de la règle de taxation

applicable lorsque le bien est affecté par le locataire à une activité professionnelle (ce qui

impliquerait pour A une taxation sur les loyers réels perçus, voir 3ème hypothèse), à moins

que le locataire principal fasse de la sous-location son activité professionnelle, ce qui est

rare.

Dès lors, dans le chef du propriétaire A, seul le revenu cadastral est imposable et non le

loyer. Quant au locataire B, n’étant pas propriétaire, usufruitier ou emphytéote, il ne peut

être taxé sur le loyer qu’il perçoit du sous-locataire C, à titre de revenus immobiliers. Tout

au plus, y a-t-il taxation dans son chef, de la différence entre le loyer perçu de C et celui

payé à A, à titre de revenus divers (article 90, 5o du C.I.R. 1992) au taux distinct de 15 %

(article 171, 2°bis, a), du C.I.R. 1992).

Une telle opération se révèle donc fiscalement avantageuse tant pour le propriétaire A que

pour le locataire principal B.

Pour contrer ce procédé, l’administration soutient parfois qu’il y a simulation. Cette

position nous paraît toutefois inexacte puisque les obligations résultant du contrat de

location sont respectées dans le chef des parties concernées. En effet, dans la mesure où les

parties acceptent toutes les conséquences juridiques de leurs actes, il ne peut y avoir de

simulation. La simulation suppose par exemple que le sous-locataire C ne paie pas

directement le loyer au propriétaire A, et que le locataire principal B supporte toutes les

conséquences résultantes, par exemple, du défaut de paiement par son locataire C, ou

d’une résiliation du bail par celui-ci.

Pour vérifier que les parties n’acceptent pas toutes les conséquences de leurs actes, la

jurisprudence a égard à un faisceau d’éléments précis et concordants. Ainsi, il y a selon

certains arrêts des indices de simulation lorsque :

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- La correspondance est envoyée directement par le propriétaire au sous-locataire119 ;

- Le sous-locataire paye directement le loyer au propriétaire120 ;

- La sous-location est conclue simultanément à la location121 ;

- Il est stipulé que le locataire ne paierait le propriétaire que dans la mesure où il aurait

lui-même touché ledit loyer du sous-locataire122 ;

- La garantie locative n’est pas effectivement versée par le locataire123 ;

- Les loyers sont identiques124 ;

- Lorsque l’interposition d’un tiers ne se justifie pas125 ;

- Aucune affectation du bien n’a été prévue dans le contrat entre le propriétaire et le

locataire126 ;

- Le bien immeuble n’est pas occupé par le locataire principal en tant que résidence

principale127.

Ces critères sont toutefois en réalité étrangers à la notion de simulation en droit civil et

sont dès lors contestables.

À défaut d’une telle simulation, l’administration est à notre avis sans pouvoir pour

contester une telle opération. L’ancienne version de l’article 344, § 1er du C.I.R. 1992 ne lui

permettait pas d’en contester les conséquences fiscales, à défaut de requalification possible

de deux baux en un seul, sans méconnaissance des obligations du locataire principal.

Toutefois et compte tenu de la nouvelle version de l’article 344 du CIR 92, introduisant en

son § 1er la notion d’abus fiscal, il est probable que l’administration y recourra pour

critiquer ce type d’opérations. A notre connaissance aucune décision en ce sens n’a pour

l’heure été rendue.

119 Anvers, 11 janvier 1999, op.cit. ; F. LEDAIN, « sous-location et simulation », www.fiscalnet.be. 120 Ibidem. 121 Mons, 31 mars 2004, op.cit. 122 Ibidem. 123 F. LEDAIN, op.cit. 124 Anvers, 11 janvier 1999, op.cit. 125 Liège, 27 juin 2001, www.fiscalnet.be. 126 Ibidem. 127 Anvers, 25 avril 2000, R.G. n°1996/FR/279, www.fiscalnet.be.

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e. Mise à disposition de l’immeuble par une société à son employé

Lorsque l’immeuble est donné en location par un propriétaire A à une société B, et que

celle-ci le met à la disposition d’un des membres de son personnel C, pour un usage

d’habitation, il s’agit d’une affectation à une activité professionnelle, même si aucune

activité professionnelle n’est exercée dans le bien loué parce que toute activité d’une

société est censée être exercée à titre professionnel.

Dans ce cas, le bailleur A est imposable sur le loyer réel que la société B peut déduire au

titre de frais professionnels. Il est donc fiscalement plus avantageux pour le bailleur A de

conclure le contrat de bail avec le membre du personnel C directement.

Dans ce cas en effet, le propriétaire sera imposable sur le revenu cadastral indexé majoré

de 40 %. Par contre, l’opération sera moins avantageuse pour le membre du personnel-

locataire auquel son employeur rembourse le montant du loyer, car au lieu d’être

imposable au titre d’avantage en nature évalué forfaitairement, il sera taxé sur base du

montant total du loyer qui lui est remboursé par son employeur au titre de rémunération

en vertu de l’article 32 du C.I.R 1992 (voyez infra).

4) Montant imposable dans l’hypothèse d’un immeuble donné en location à un locataire

l’affectant partiellement à l’habitation et partiellement à une activité professionnelle

a. Base imposable

Si l’immeuble est affecté par le locataire pour partie à des fins privées et pour partie à des

fins professionnelles (ou à tout objet autre que l’habitation), le revenu imposable est en

principe déterminé de la même manière que si l’immeuble était entièrement affecté à des

fins professionnelles (art. 8 du C.I.R. 1992), c’est-à-dire sur la base du montant total du

loyer (moins la déduction de charges forfaitaires), sauf si le contrat de bail :

a) Prévoit expressément une ventilation entre le loyer dû pour la partie privée et celui

dû pour la partie professionnelle ;

b) Et qu’il est enregistré.

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Dans ce cas, le revenu imposable est fixé pour chaque partie suivant les règles qui lui sont

propres128 et le bailleur sera imposable :

1) Sur la quotité du revenu cadastral correspondant à la quotité de l’immeuble affectée à

l’habitation ;

2) Sur sa quotité du loyer correspondant à celle de l’immeuble affectée à l’activité

professionnelle.

Si cette ventilation n’existe pas ou que les conditions ci-dessus ne sont pas respectées, la

location sera donc considérée pour le tout comme faite à des fins professionnelles dans le

chef du locataire. Le propriétaire devra dès lors déclarer le revenu immobilier brut

consistant dans la somme des loyers mensuels, et ce en dépit du fait que le locataire ne

pourra déduire qu’une partie desdits loyers au titre de charges professionnelles.

Le propriétaire sera imposé, conformément à la règle générale fixée à l’article 7, § 1er, 2°, c),

sur la base du loyer net pour le tout et non sur celle du revenu cadastral129.

L’administration doit prouver qu’un bien est affecté à des fins professionnelles si elle veut

appliquer le régime fiscal qui en résulte. Les déclarations fiscales du locataire (qui déduit le

loyer comme frais professionnels) ne peuvent pas constituer à elles seules la preuve de

l’affectation partielle de l’immeuble à des fins professionnelles par le locataire130. En

conséquence, il est conseillé, si la location ne peut être affectée à l’exercice de la profession

du locataire, de l’indiquer formellement dans le contrat de bail131.

5) Montant imposable dans l’hypothèse d’une location meublée

La location d’un bien immobilier meublé donnera lieu en principe à la distinction

suivante :

1. La partie du loyer destinée à rémunérer la location de l’immeuble ;

2. La partie du loyer destinée à rémunérer la location des biens meubles se trouvant

dans le bien immobilier.

128 Article 8 du C.I.R. 1992 ; voyez également Com. I.R., 7/12 et 13. 129 Gand, 10 février 2000, T.G.T.-T.W.V.R., 2000, p. 270. 130 Liège, 31 octobre 1990, F.J.F., no 91/59. 131 M. DASSESSE et P. MINNE, op. cit., 5e éd., p. 425.

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Lorsque le contrat de bail ne prévoit pas de fractionnement entre la partie location

mobilière et la partie location immobilière ou lorsque ce contrat ne fait pas l’objet de la

formalité de l’enregistrement, l’administration a le droit de ventiler le montant total du

loyer en deux parties :

• 60 % du loyer total est censé représenter le loyer afférent au bien immobilier ;

• 40 % du loyer total est censé représenter le montant net de la location mobilière qu’il

conviendra de déclarer au titre de revenus mobiliers en raison de l’article 4, 1o, b, de

l’A.R/C.I.R. 1992 ;

Lorsque le contrat de bail (i) prévoit un fractionnement entre la partie du loyer afférente à

la location du bien immobilier et celle relative à la location de biens meubles et (ii) a été

soumis à la formalité de l’enregistrement, l’administration est tenue de respecter la

proportion fixée dans le contrat.

6) Les sommes obtenues à l’occasion de la constitution ou de la cession d’un droit

d’emphytéose ou de superficie ou de droits immobiliers similaires

L’article 7, § 1er, 3o du C.I.R. 1992 traite comme revenus immobiliers les sommes obtenues,

soit lors de la constitution, soit lors de la cession, d’un droit d’emphytéose ou de superficie

ou de droits immobiliers similaires portant sur un immeuble sis en Belgique ou à

l’étranger132. Le Code vise les redevances, périodiques ou non, payées à l’occasion de la

constitution ou de la cession de tels droits. Ces termes couvrent non seulement les canons

(loyers) payés périodiquement par l’emphytéote au propriétaire, mais aussi, dans le cas où

il est stipulé un canon unique. L’ensemble de ce canon unique est ainsi taxable en une fois.

Le Code exclut expressément l’étalement de cette somme sur toute la durée du contrat

d’emphytéose (art. 10, § 1er, al. 2 du C.I.R. 1992), de sorte que cette taxation se révèle

particulièrement exorbitante.

En cas de stipulation d’un canon unique, ce qui est bien souvent avantageux en matière de

droits d’enregistrement en tant qu’alternative à la vente de l’immeuble133, le propriétaire se

voit taxé, à l’impôt sur les revenus, en une fois sur un canon qui représente presque la

totalité de la valeur de l’immeuble (article 10, § 1, al. 3 du C.I.R. 1992).

132 Com. I.R., 10/2. 133 Depuis le 1er juillet 2013, selon l’article 12 de la loi programme du 28 juin 2013 (M.B. 01.7.2013), le droit

d’enregistrement pour les contrats constitutifs de droit d’emphytéose ou de superficie et leurs cessions

s’élève à 2 % (au lieu de 0,2 % précédemment), alors que le droit de vente s’élève respectivement à 10 % en

région flamande et de 12,5 % en Région wallonne et de Bruxelles-Capitale.

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Cette taxation constitue même davantage qu’une taxation de la plus-value, parce que c’est

en réalité la totalité du canon, et non la différence entre le canon et la valeur de la

propriété, qui est ainsi imposable.

Il en est de même en cas de cession d’un droit d’emphytéose pour lequel un canon a déjà

été payé par le cédant. Aucun texte ne permet de déduire le canon payé de celui perçu,

parce qu’il ne s’agit pas de l’imposition d’une plus-value sur le droit d’emphytéose, mais

bien de la taxation d’un revenu immobilier perçu en une seule fois.

Ces considérations rendent économiquement ruineuse la constitution, pour un canon

unique, d’un droit d’emphytéose ou de superficie par une personne physique au profit

d’une autre personne physique.

L’administration assimile à l’emphytéose ou à la superficie, la constitution d’un droit

d’usufruit qui, lorsqu’elle a lieu à titre onéreux, présenterait les mêmes inconvénients si

l’usufruit était payé pour un prix unique. Il nous paraît toutefois douteux qu’on puisse

considérer l’usufruit comme similaire à l’emphytéose ou à la superficie, alors que

l’assimilation prévue par l’article 7, § 1er, 3o, du C.I.R. 1992 requiert qu’il s’agisse de « droits

immobiliers similaires134 ».

Il n’est fait exception à la règle de la taxation des redevances et canons d’emphytéose ou de

superficie que lorsque ces revenus sont qualifiés de revenus mobiliers par la loi. L’article

19, § 1er, 2o, du C.I.R. 1992 qualifie en effet d’intérêts, les redevances résultant de

conventions d’octroi de droits d’usage sur des biens immobiliers bâtis, lorsqu’ils sont visés

par l’article 10, § 2, et « à l’exclusion de la quotité de ces redevances qui est destinée à la

reconstitution intégrale du capital investi dans la construction ou, dans le cas d’un

bâtiment existant, de la valeur vénale de celui-ci ».

Or, l’article 10, § 2, du C.I.R. 1992 précise que les revenus immobiliers ne comprennent pas

« les sommes obtenues pour la concession d’un droit d’usage sur des biens immobiliers bâtis

en vertu d’une convention non résiliable d’emphytéose, de superficie ou de droits

immobiliers similaires », pour autant que les deux conditions suivantes soient réunies :

« 1o les redevances échelonnées prévues au contrat permettent de couvrir, outre les

intérêts et les charges de l’opération, la reconstitution intégrale du capital investi

par le propriétaire dans la construction ou, dans le cas d’un bâtiment existant, la

valeur vénale de celui-ci ;

134 A ce sujet, voyez Com. I.R. 7/21.

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2o la propriété de la construction (doit être) au terme du contrat, transférée de plein

droit à l’utilisateur ou le contrat (doit) comporter une option d’achat pour

l’utilisateur. »

Si ces deux conditions sont respectées, et qu’en conséquence le droit de superficie ou

d’emphytéose est accordé dans le cadre d’une opération comparable à un leasing

immobilier, il n’y a pas de taxation des redevances ou canons à titre de revenus

immobiliers, mais seulement imposition au titre d’intérêts, pour la quotité qui excède la

partie affectée à la reconstitution du capital, au sens de l’article 19, § 1er, 2o du C.I.R. 1992.

La seconde condition a comme inconvénient, lorsque le prix d’exercice de l’option est

dérisoire, ou en tous cas à ce point réduit que l’option sera à l’évidence exercée, que

l’administration de l’enregistrement y voit (peut-être à tort) une vente déguisée de

l’immeuble.

Nous examinerons le régime fiscal du leasing immobilier dans la partie relative aux

intérêts.

§ 2. Immeubles situés à l’étranger

a) Principe

En ce qui concerne les immeubles situés à l’étranger qui appartiennent à des habitants du

Royaume, l’administration fiscale ne peut évidemment pas taxer le revenu cadastral,

puisque le cadastre ne concerne que les immeubles belges, en raison du principe de la

territorialité du droit fiscal.

Par ailleurs, l’article 6 du Modèle OCDE de Convention préventive de double

imposition135, repris dans la grande majorité des conventions préventives de double

imposition conclues par la Belgique, attribue le pouvoir d’imposition des revenus

immobiliers à l’Etat dans lequel l’immeuble est situé. La Belgique n’a donc pas le pouvoir

d’imposer les revenus des immeubles étrangers.

135 « Les revenus qu’un résident d'un État contractant tire de biens immobiliers (y compris les revenus des

exploitations agricoles ou forestières) situés dans l'autre État contractant, sont imposables dans cet autre

État ».

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Il n’en reste pas moins que le contribuable résident belge propriétaire d’un immeuble à

l’étranger est légalement tenu d’indiquer dans sa déclaration la valeur locative de ses

propriétés immobilières étrangères.

En effet, ce revenu est certes totalement exonéré d’impôts en Belgique, mais la Belgique

applique le mécanisme de la « réserve de progressivité », qui implique que les revenus taxés

à l'étranger ne sont pas réimposés en Belgique, mais sont pris en considération pour le

calcul du taux de l'impôt sur les autres revenus belges (article 155 du C.I.R. 1992). En

d’autres termes, la législation fiscale réintègre ce « loyer » dans les revenus avec pour seul

objectif de déterminer le taux d’impôt marginal, et non pour l’imposer en Belgique. Ce

mécanisme a pour conséquence d’augmenter légèrement la pression fiscale sur les revenus

d’origine belge.

À défaut de convention préventive de la double imposition, l’impôt applicable aux revenus

d’immeubles situés à l’étranger sera réduit de moitié, pour tenir compte de l’existence,

supposée, d’un impôt étranger (art. 156, alinéa 1er, 1o du C.I.R. 1992), même si cette

taxation n’existe pas.

Certaines conventions préventives de la double imposition conclues entre la Belgique et un

État étranger prévoient, en outre, la communication d’office par l’administration étrangère

à l’administration belge de l’acte d’acquisition d’un immeuble passé par un Belge à

l’étranger. Tel est notamment le cas de la convention préventive signée par la Belgique et la

France.

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b) Base imposable

1. Immeuble donné en location :

Dans ce cas, le montant à prendre en considération est le loyer effectivement perçu

(art. 7, § 1er, d du C.I.R. 1992).

La formule de déclaration invite ainsi le contribuable à déclarer le montant brut des loyers effectivement perçus sur une année, après déduction des impôts étrangers afférents à ce revenu. L’administration applique, ensuite une réduction de 40% censé représenter les frais d’entretien et de réparation liés à l’immeuble (10% pour un immeuble non bâti).

Cette base d'imposition est discriminatoire, puisque lorsque le bien est situé en

Belgique, ce n'est pas le loyer réel, mais seulement le revenu cadastral qui est taxable.

2. Immeuble non donné en location :

Le montant à déclarer sera alors constitué par la valeur locative de l’immeuble, c’est-

à-dire le loyer brut moyen annuel qui aurait pu être recueilli en cas de location

(article 7, § 1er, 1o, b du C.I.R. 1992)136.

Pour déterminer cette valeur locative, il est tenu compte du marché local, « des

usages du pays et la situation du bien »137.

Par ailleurs, cette valeur locative devra être diminuée :

- De la déduction pour frais d’entretien évaluée forfaitairement à 40 % en ce qui

concerne les immeubles bâtis et à 10 % en ce qui concerne les immeubles non bâtis.

- De l’impôt étranger effectivement supporté.

136 Sur la détermination de la valeur locative, voyez notamment : Bruxelles, 29 novembre 2002, J.D.F., 2003,

231 ; Bruxelles, 16 juin 2005, R.G. n°98/FR/368 ; Civ. Hasselt, 5 décembre 2007, (inédit) ; Anvers, 22 février

2000, R.G. n°1997/FR/253. 137 Com. I.R., 13/8.

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La Commission européenne a toutefois remis en cause le système belge d’évaluation des

revenus des immeubles estimant qu’il faisait naître une discrimination entre les

contribuables propriétaires d’un immeuble en Belgique et les contribuables propriétaires

d’un immeuble à l’étranger.

Prenons l’exemple d’un contribuable propriétaire d’une villa dans le sud de la France qui

pourrait se louer 2.000 euros par mois sur base du marché local. Celle-ci n’est cependant

pas donnée en location mais uniquement occupée ponctuellement pour des vacances en

famille. Le revenu à déclarer est de 12 x 2.000 euros, sous déduction des frais d'entretien et

de réparation. Ce montant, considéré à 60% (soit 14.400-€), sera ajouté aux revenus

imposables du contribuable pour déterminer le taux applicable aux revenus soumis à

l’impôt en Belgique. Les autres revenus belges seront alors taxés sur une tranche qui ne

commencera pas à zéro mais à 14.400 euros.

Ceci est susceptible d’augmenter sensiblement le taux marginal à l’IPP.

Si cette même habitation était située en Belgique et avait un RC de 2.500 euros : la base

imposable n'aurait été majorée que de 5.722 euros, que l'immeuble ait été mis en location

ou non.

La discrimination est évidente.

Ceci rend en outre fort peu intéressant, au regard du droit fiscal belge, de posséder un

immeuble à l'étranger.

La Cour d'appel d'Anvers a alors posé à la CJUE la question de savoir s'il n'y avait pas là

une violation du principe de libre circulation des capitaux, consacré par l'article 63 TFUE,

dans la mesure où ce régime pourrait décourager les résidents belges d’investir dans

d'autres Etats membres.

Par son arrêt du 11 septembre 2014, la CJUE a répondu par l'affirmative à cette question,

en faisant valoir que l'article 63 TFUE "doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à une

réglementation d'un Etat membre, telle que celle en cause au principal, dans la mesure où

elle est susceptible d'aboutir, lors de l'application d'une clause de progressivité contenue

dans une convention préventive de double imposition, à un taux d'imposition sur le revenu

plus élevé du seul fait que la méthode de détermination des revenus des biens immobiliers

conduit à ce que ceux provenant de biens immobiliers non donnés en location situés dans un

autre Etat membre soient évalués à un montant supérieur à ceux provenant de tels biens

situés dans le premier Etat membre" (CJUE, 11 septembre 2014, n° C-489/13).

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La Cour de Justice de l’Union européenne, dans son arrêt du 11 septembre 2014, a donc

décidé que cette disposition légale belge violait le principe de la libre circulation des

capitaux (article 63 TFUE) dans la mesure où la prise en considération de la valeur locative

réelle pour déterminer les revenus immobiliers de biens à l’étranger conduit à une

imposition supérieure par rapport aux revenus de biens situés en Belgique évalués sur base

du revenu cadastral.

La position de la Cour de justice est parfaitement légitime et le législateur belge devra dès

lors utiliser les mêmes critères de détermination des revenus immobiliers pour les biens

situés en Belgique et ceux qui se trouvent à l’étranger.

Pour l’heure, la Belgique n’a pas estimé devoir adapter sa législation pour répondre à la critique européenne.

Cependant, cet arrêt peut d’ores et déjà être efficacement invoqué par les contribuables

ayant des immeubles à l’étranger en vue de contester la prise en compte par

l’administration fiscale de la valeur locative réelle de ces biens. Il revient alors au juge de

fond d’examiner dans chaque cas d’espèce, si l’application du système entraîne un surplus

d’impôt pour le contribuable.

Dans une nouvelle circulaire administrative du 29 juin 2016,138 l’administration stipule que

« pour améliorer la sécurité juridique, l’administration accepte que la valeur locative d’un

bien immobilier non donné en location situé à l’étranger puisse être déterminée à l’aide

d’une valeur fixée ou expressément approuvée par une autorité étrangère. »139

A l’avenir, la Belgique devra, toutefois, vraisemblablement réagir à cette condamnation et

adapter sa législation aux enseignements de cet arrêt.

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 6666.... LLLLES AVANTAGES DU SYSTES AVANTAGES DU SYSTES AVANTAGES DU SYSTES AVANTAGES DU SYSTÈME DE TAXATION DES ÈME DE TAXATION DES ÈME DE TAXATION DES ÈME DE TAXATION DES REVENUS IMMOBILIERS REVENUS IMMOBILIERS REVENUS IMMOBILIERS REVENUS IMMOBILIERS À À À À

LLLL’’’’IMPÔT DES PERSONNES IMPÔT DES PERSONNES IMPÔT DES PERSONNES IMPÔT DES PERSONNES PHYSIQUES PHYSIQUES PHYSIQUES PHYSIQUES

Les immeubles détenus par des personnes physiques bénéficient d’un régime fiscal plus

avantageux que celui des sociétés – qui sont taxées sur le revenu réel -, surtout lorsque

l’immeuble est affecté au patrimoine privé de la personne physique (voyez infra).

Ce régime d’imposition plus favorable présente les trois avantages suivants :

138 Circulaire AGFisc N° 22/2016 (n° Ci.704.681) dd. 29.06.2016 139 Pour les biens situés au Luxembourg, il est possible de prendre en compte la valeur unitaire du bien

déterminé par le Service des contributions du Grand-Duché du Luxembourg.

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– l’imposition sur une base forfaitaire, soit le revenu cadastral, lorsque l’immeuble est

occupé par son propriétaire ou donné en location à une personne physique qui

l’affecte à des fins privées. L’avantage résulte du fait que le revenu cadastral représente

la valeur normale nette du bien évalué en 1975 ;

– l’évaluation forfaitaire des frais d’entretien de l’immeuble. L’article 13 du C.I.R. 1992

prévoit que lorsque la base imposable se compose des loyers réels (c'est-à-dire que

l’immeuble est loué à une personne qui l’affecte à son activité professionnelle), les frais

d’entretien peuvent être évalués et déduits de la base imposable à concurrence de 40 %

de ce loyer s’il s’agit d’un immeuble bâti, et à 10 %, pour un immeuble non bâti, sans

que le contribuable doive démontrer la réalité des frais d’entretien (voir 3ème

hypothèse). Une société quant à elle ne peut déduire que les frais d’entretien qu’elle a

effectivement supportés pendant l’exercice d’imposition (article 49 du C.I.R. 1992) ;

– la plus-value réalisée par une personne physique sur un immeuble affecté à son

patrimoine privé n’est pas imposable, sauf au titre de revenus divers, dans les cas

(limités) énumérés à l’article 90 du C.I.R. 1992 (voir infra). En revanche, la plus-value

réalisée par une société est imposable.

En conséquence, une personne physique qui détient des immeubles à titre privé, n’a, en

général, pas intérêt, en matière d’impôt des personnes physiques, à les apporter à une

société de patrimoine pour réduire sa charge fiscale. L’apport d’immeubles détenus à titre

privé à une société peut cependant s’avérer avantageux dans un but de planification

successorale, pour éviter la débition des droits de succession, ou en cas d’emprunt, pour

permettre la déduction des intérêts sur l’ensemble des revenus de la société.

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TITRE IVTITRE IVTITRE IVTITRE IV. LES REVENUS MOBILI. LES REVENUS MOBILI. LES REVENUS MOBILI. LES REVENUS MOBILIERSERSERSERS

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 1111.... GGGGÉNÉRALITÉSÉNÉRALITÉSÉNÉRALITÉSÉNÉRALITÉS

Section 1. Définition

Les revenus des capitaux et biens mobiliers comprennent « tous les produits d’avoirs

mobiliers engagés à quelque titre que ce soit » (art. 17 C.I.R. 1992).

Le revenu mobilier est ainsi considéré comme le produit qui résulte d’une convention

portant sur l’engagement d’un bien meuble. Il faut donc une convention qui procure au

débiteur le droit d’utiliser un bien meuble, d’en avoir la jouissance, contre le paiement d’un

« prix », qui est le revenu mobilier du créancier.

Cette conception du revenu mobilier justifie notamment que ne sont pas considérés

comme un revenu mobilier imposable les intérêts judiciaires ou moratoires qui ont un

caractère indemnitaire. Ils ne résultent pas du placement d’un capital entre les mains d’un

tiers dans le but d’en recueillir un revenu.

Section 2. Les quatre catégories de revenus mobiliers

a) Caractère limitatif

L’article 17 du Code énumère, de manière limitative, quatre catégories de revenus

mobiliers imposables. Il s’agit des revenus mobiliers suivants :

- Les dividendes ;

- Les intérêts ;

- Les revenus de la location, de l’usage et de la concession de biens mobiliers, y

compris les revenus qui résultent de la cession ou de la concession de droits d’auteur

et de droits voisins (qui sont des biens mobiliers incorporels) ;

- Les revenus compris dans certaines rentes viagères ou temporaires.

Aucune disposition légale ne prévoit d’ailleurs que « tous » les revenus mobiliers, au sens

du Code civil, seraient imposés. Seuls sont donc taxables ceux qui font partie de l’une des

quatre catégories figurant ci-dessus.

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b) Exclusion des plus-values

Les plus-values sur avoirs mobiliers ne figurent pas dans la liste de l’article 17 du Code.

Elles ne font donc pas l’objet en Belgique d’une imposition générale au titre de revenus

mobiliers, contrairement à la situation qui prévaut dans d’autres pays. Il s’agit à ce jour

d’une des caractéristiques du système fiscal belge.

Une personne physique qui vend des actions, des obligations ou des devises à un prix

excédant leur prix d’achat n’est donc soumise à aucun impôt sur un revenu mobilier.

Cette plus-value peut cependant, dans certains cas, être taxable :

- Comme un revenu professionnel, si elle est réalisée sur un bien affecté à une activité

professionnelle ;

- Comme un revenu divers, si elle résulte d’un acte excédant la « gestion normale d’un

patrimoine privé ».

Section 3. Système du précompte mobilier libératoire

Les revenus mobiliers peuvent être soumis, dans le chef des personnes physiques, à deux

types de prélèvements : l’impôt des personnes physiques et le précompte mobilier.

Le précompte mobilier est une retenue à la source, prélevée par le débiteur du revenu,

imputable par le bénéficiaire sur l’impôt des personnes physique et restituable si elle

excède cet impôt.

Ce principe a toutefois été altéré au fil des ans. Aujourd’hui, le précompte mobilier est

généralement libératoire, en ce sens que les revenus mobiliers qui y ont été soumis ne

doivent plus être mentionnés dans la déclaration à l’impôt des personnes physiques.

L’article 313, alinéa 1er du C.I.R. 1992 stipule en effet que, sauf exceptions, « les

contribuables assujettis à l’impôt des personnes physiques ne sont pas tenus de mentionner

dans leur déclaration annuelle audit impôt, les revenus des capitaux et biens mobiliers ni

les revenus divers visés à l’article 90, 6° et 11°, pour lesquels un précompte mobilier a été

réellement retenu (…) ».

Ce texte énonce le principe du précompte mobilier libératoire. En vertu de celui-ci, les

revenus qui ont subi le précompte mobilier ne doivent pas être déclarés par leur

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bénéficiaire (sauf les revenus de droits d’auteurs, qui ne sont toutefois pas soumis à une

nouvelle taxation).

Le contribuable a donc la faculté de ne pas déclarer les revenus mobiliers déjà

précomptés140. En réalité, les seuls contribuables qui ont intérêt à mentionner dans leur

déclaration de tels revenus mobiliers sont ceux (rares) dont les revenus n’atteignent pas le

montant exempté d’impôt (art. 134, § 1 C.I.R. 1992). Ces derniers obtiendront

effectivement, par le biais de la globalisation de leurs revenus, un remboursement du

précompte mobilier.

Les revenus mobiliers sur lesquels le précompte n’a pas été prélevé doivent en revanche

être obligatoirement déclarés pour être soumis à une imposition distincte, à un taux

équivalent à celui du précompte mobilier (art. 171, 2°bis, 3° et 3°ter à 3°sexies du C.I.R.

1992), sauf si (exceptionnellement) la globalisation des revenus s’avère plus avantageuse

pour le contribuable.

Il en résulte que l’imposition des revenus mobiliers a normalement lieu à un taux fixe de

30 %141 (sauf quelques exceptions où un taux plus réduit est applicable).

Section 4. Obligation de déclaration des revenus qui n’ont pas subi le précompte

Les revenus mobiliers sur lesquels le précompte mobilier n’a pas été acquitté, y compris

certains revenus légalement exonérés de précompte mobilier, doivent être mentionnés par

leur bénéficiaire dans leur déclaration fiscale. Ils font dans ce cas l’objet d’une imposition à

un taux distinct (30 % en principe), équivalent au précompte non appliqué ou non

applicable, sauf si leur globalisation s’avère plus intéressante pour le contribuable.

Les revenus exonérés de précompte qui doivent être déclarés sont ceux pour lesquels la loi

a exonéré le débiteur de précompte (art. 313 du C.I.R. 1992). En général, il s’agit de cas où

la loi a voulu éviter de mettre cette charge sur les particuliers (par exemple : les personnes

140 Pour être tout à fait précis, la loi du 28 décembre 2011 avait profondément modifié l’article 313 du C.I.R.

1992, dès lors qu’elle prévoyait que les dividendes et les intérêts devaient, à partir du 1er janvier 2012, être

obligatoirement déclarés à l’impôt des personnes physiques, sauf en ce qui concerne les dividendes et les

intérêts auxquels une cotisation supplémentaire de 4 % avait été appliquée. Ces modifications ont toutefois

été annulées par la loi-programme du 27 décembre 2012. 141 Le taux général du précompte mobilier a augmenté de manière significative ces dernières années : au 1er

janvier 2017, celui-ci est passé de 27 à 30%. Avant le 1er 2012, il n’était encore que de 15%.

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qui paient des rentes viagères ou celles qui paient des intérêts d’emprunts hypothécaires

sur un bien en Belgique), sans pour autant exonérer d’impôt leur bénéficiaire.

Section 5. Les revenus mobiliers encaissés directement à l’étranger

Il convient d’ajouter que les revenus mobiliers étrangers encaissés directement à l’étranger

ne doivent pas être soumis au précompte mobilier belge mais doivent être déclarés afin de

se voir appliquer une imposition distincte appropriée, à un taux en principe équivalent à

celui qui aurait été appliqué à des revenus de même nature encaissés en Belgique.

Il est en effet licite, pour un résident belge, de percevoir des revenus à l’étranger (sur un

compte bancaire à Hong Kong par exemple), mais comme le précompte belge n’y est en

principe pas perçu, il est logique que ce revenu doive être déclaré en Belgique.

Ces revenus font tous l’objet d’une taxation distincte, en principe à 30 %. Par exception, les

intérêts de dépôts d’épargne et certains dividendes bénéficient actuellement du taux réduit

de 15 % pour la partie qui excède les intérêts exonérés (art. 171, 3°quinquies du C.I.R.

1992).

La taxe communale additionnelle s’applique par ailleurs, sauf pour les intérêts et

dividendes qui n’ont pas de caractère professionnel (art. 466 du C.I.R. 1992).

La Cour de Justice de l’Union Européenne, dans un arrêt dit « Dijkman » du 1er juillet 2010,

a également décidé qu’exiger une taxe communale additionnelle, en plus de l’impôt

distinct, sur les revenus mobiliers directement encaissés dans un autre État membre de

l’Union européenne, constitue une restriction à la libre circulation des capitaux, puisque

cette taxe incite le contribuable à placer ses capitaux en Belgique où il ne subit que le

précompte mobilier libératoire142.

Par conséquent, si les revenus mobiliers directement encaissés dans un autre État membre

de l’Union se voient appliquer une imposition distincte à un taux équivalent à celui qui

aurait été appliqué à des revenus de même nature encaissés en Belgique, ils ne peuvent se

voir appliquer, en sus, une taxe communale additionnelle.

Section 6. Affectation des avoirs mobiliers à l’exercice de l’activité professionnelle

142 C.J.U.E., 1er juillet 2010 (Dijkman), C-233/09, F.J.F., n° 2010/245.

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Les revenus des avoirs mobiliers affectés à l’exercice de l’activité professionnelle de leur

bénéficiaire sont, au même titre que les revenus des biens immobiliers affectés à une telle

activité, considérés comme des revenus professionnels pour l’application de l’impôt des

personnes physiques (art. 37 du C.I.R. 1992).

Dans cette situation, la dispense de déclaration (visée à l’art. 313 du C.I.R. 1992), qui

concerne les seuls revenus mobiliers, n’est pas applicable. Ces revenus conservent leur

nature de revenus mobiliers pour l’application du précompte mobilier mais ils sont ensuite

taxés comme des revenus professionnels.

Le précompte, qui est en principe imputable sur l’impôt dû par de tels contribuables, doit

alors être ajouté au revenu net pour reconstituer le revenu brut (art. 37, al. 3 du C.I.R.

1992). Ceci s’explique par le fait que le revenu imposable est, en Belgique, le revenu avant

impôt.

L’affectation de capitaux ou biens mobiliers à l’activité professionnelle est cependant

exceptionnelle dans le chef des personnes physiques. Il en va à tout le moins ainsi

concernant les avoirs producteurs d’intérêts et de dividendes. En cherchant très loin, on

pourrait citer le cas d’un prêteur professionnel, disposant d’une véritable organisation pour

prêter à de nombreux emprunteurs.

Pour que le revenu mobilier acquière un caractère professionnel, il faut en effet que le

revenu, et non le capital qui a permis la réalisation de ce revenu, résulte d’une activité

professionnelle.

Il ne suffit donc pas que des intérêts soient obtenus sur un compte bancaire professionnel

pour qu’ils acquièrent un caractère professionnel, si les capitaux qui les ont produits

proviennent d’un versement sans lien avec la profession ou sont le cumul de bénéfices

antérieurs.

Par exception, les droits d’auteur et droits voisins, lesquels ont a priori la nature de revenus

mobiliers (art. 17, § 1, 5° du C.I.R. 1992), mais qui sont aussi souvent des revenus

professionnels, ne sont requalifiés en revenus professionnels que dans la mesure où les

droits dépassent 57.080 € pour l’exercice d’imposition 2015 (art. 37, al. 2 du C.I.R. 1992).

Section 7. Revenu imposable net

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Comme pour les autres revenus, c’est le montant net des revenus mobiliers qui est

imposable dans le chef des personnes physiques.

En principe, le revenu mobilier net s’entend du montant encaissé ou recueilli, avant

déduction des frais d’encaissement, frais de garde et autres frais analogues, mais majoré,

s’il échet, du précompte mobilier et du « prélèvement pour l’État de résidence » perçu, à la

place du précompte mobilier, en vertu de la directive européenne sur la fiscalité des

revenus de l’épargne143 (art. 22 du C.I.R. 1992).

Ainsi, si un revenu de 100 € est attribué par une banque à un client, la banque retient 30 €

de précompte mobilier (qu’elle verse à l’État) et paie 70 € à son client (puisque le taux du

précompte est de 30 %).

Le montant net imposable se comprend donc précompte mobilier inclus : il s’agit du

montant que l’on appelle généralement le « montant brut », c’est-à-dire avant déduction

du précompte.

Ce n’est que dans les cas exceptionnels où une globalisation des revenus intervient (revenu

imposable inférieur à la quotité exemptée d’impôt ou requalification en revenus

professionnels) que les frais d’encaissement, de garde et autres frais analogues peuvent être

déduits.

En principe, les intérêts de dettes contractées en vue d’acquérir ou de conserver des

revenus mobiliers ne sont pas déductibles, et ce, même si les revenus mobiliers sont

globalisés. Celui qui emprunte, d’une part, et perçoit des revenus mobiliers, d’autre part, se

voit dès lors imposé sur ces revenus sans pouvoir en déduire les charges de l’emprunt qui

lui ont permis de les acquérir.

Concernant les revenus de la location de meubles ou de l’obtention de droits intellectuels,

la déduction des frais autres que des intérêts de dettes reste cependant admise.

À cet effet, le Roi a fixé des forfaits de frais déductibles en l’absence d’éléments probants.

Ainsi, concernant les droits d’auteur par exemple, les frais forfaitaires déductibles sont en

principe évalués à 15 % du revenu (art. 3 de l’AR/C.I.R. 1992). Ce taux est toutefois porté à

50 % de la première tranche de 10.000 € et à 25 % de la tranche comprise entre 10.000 € et

20.000 € (art. 4, 1°, ARCIR) de ces revenus.

143 Voir infra à ce propos.

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CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 2222.... LLLLE PRÉCOMPTE MOBILIERE PRÉCOMPTE MOBILIERE PRÉCOMPTE MOBILIERE PRÉCOMPTE MOBILIER

Section 1. Taux

Le taux normal du précompte mobilier, ou de l’impôt des personnes physiques qui le

remplace (art. 171 du C.I.R. 1992) était, jusqu’il y a peu, pour les revenus imposables

attribués ou mis en paiement à partir du 1er janvier 2013 fixé à 25%.

Dans le cadre du financement du Tax Shift, le Gouvernement actuel a décidé deux mesures

sur le précompte mobilier.

La première mesure concernait l’augmentation du précompte mobilier de 25 à 27 p.c.

Cette augmentation de précompte mobilier est applicable depuis le 1er janvier 2016 (art.

269, § 1er, 1° du C.I.R. 1992).

Ce taux est passé à 30% au 1er janvier 2017 ((modification de l’art. 171, 3°, et de l’art. 269, §

1er, 1°, du CIR 1992 ; art. 93-95 de la Loi-programme du 25 décembre 2016, MB 29

décembre 2016)

La seconde mesure concernait une généralisation du taux de précompte mobilier à 30 p.c.

Un taux réduit de 15% reste cependant applicable :

— aux intérêts des livrets d’épargne pour les intérêts qui dépassent la première tranche

qui, elle, reste exonérée (art. 21, 5° du C.I.R. 1992) ;

— aux intérêts des bons d’État souscrits fin 2011. Cela vise les bons d’Etat dits « Leterme »,

émis à cette époque où la situation précaire du budget fédéral a obligé l’État à proposer des

conditions exceptionnelles pour récolter des fonds.

- La première tranche de 57.080 € de droits d’auteur et de droits voisins ;

Le taux du précompte mobilier de 30 %, normalement applicable aux dividendes, peut

également être réduit à 15 % ou à 20 % s’ils sont distribués à des associés ou actionnaires

nominatifs en raison de leurs parts résultant de certains apports de capital en numéraire

effectués dans une petite société à partir du 1er juillet 2013 (art. 269, § 2 du C.I.R. 1992).

Cette mesure vise à favoriser la capitalisation des PME.

Enfin, jusqu’au 1er octobre 2014, le taux du précompte mobilier était de 10 % pour le boni

de liquidation, c’est-à-dire, en cas de liquidation d’une société, l’excédent qu’un actionnaire

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reçoit par rapport au montant investi à l’origine. Depuis cette date toutefois, le boni de

liquidation est, en principe, lui aussi taxé à 30 %.

Cette mesure du Gouvernement précédant a été particulièrement critiquée.

Le Gouvernement actuel a donc tenté d’y trouver un correctif et a mis en œuvre un régime

spécifique permettant sous certaines conditions de distribuer les réserves constituées dans

le passé à un taux de 10% à condition que ces réserves distribuées soient immédiatement

intégrées dans le capital et y soient maintenues un certain temps.

Le régime est le suivant : les sociétés qui constituent une réserve de liquidation pourront la

distribuer lors de la liquidation, sans qu’un précompte mobilier ne doive encore être

retenu. Par ailleurs, les montants distribués antérieurement à titre de dividendes seront

soumis à un taux d’imposition inférieur à celui applicable à la distribution d’une réserve

« ordinaire ».

Section 2. Redevable du précompte

a) Sauf exceptions, le précompte mobilier est dû par le débiteur du revenu mobilier, qu’il

s’agisse d’une personne physique, d’une société ou association ou de pouvoirs publics (art.

261 à 263 du C.I.R. 1992).

Ainsi, par exemple, une banque retient le précompte mobilier sur les intérêts des dépôts à

terme de ses clients ; une société belge retient le précompte mobilier sur les dividendes

qu’elle paie à ses actionnaires ; l’Etat lui-même retient le précompte mobilier sur les

intérêts des emprunts qu’il émet. Une fois retenu, le précompte mobilier est alors versé au

Trésor.

Le précompte mobilier est également dû par l’intermédiaire établi en Belgique

(généralement une banque) qui intervient dans le paiement de revenus mobiliers, sauf si le

précompte a été retenu par un précédent intermédiaire. Cette hypothèse concerne surtout

les revenus mobiliers de source étrangère.

b) Lorsque le débiteur du revenu mobilier est établi à l’étranger, l’État belge ne peut le

contraindre à payer le précompte. Dans ce cas, c’est le premier intermédiaire établi en

Belgique qui doit le payer. Par exemple, si un épargnant belge perçoit un dividende

d’action action française, par l’intermédiaire de sa banque belge, c’est celle-ci qui doit

verser le précompte qu’elle retient sur le dividende payé.

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c) Dans de rares hypothèses, le précompte mobilier est dû par le bénéficiaire du revenu lui-

même (art. 262 du C.I.R. 1992), mais ces hypothèses concernent essentiellement des

bénéficiaires assujettis à l’impôt des personnes morales.

Pour rappel, de nombreux cas d’exonération de précompte mobilier sont prévus par le Code des

impôts sur les revenus, son arrêté royal d’exécution ou des dispositions particulières (voy.

les art. 264 à 266 du C.I.R. 1992 et les art. 106 à 119 de l’AR/C.I.R. 1992).

Section 3. Moment d’exigibilité du précompte mobilier

L’exigibilité du précompte mobilier est causée par « l’attribution ou la mise en paiement

des revenus, en espèce ou en nature » (art. 267 du C.I.R. 1992). C’est donc à ce moment que

le débiteur du précompte en est redevable à l’État.

L’idée générale est que le précompte mobilier est dû dès que le contribuable dispose

effectivement des revenus, peu importe la date d’encaissement effective de ceux-ci.

L’inscription du revenu à un compte ouvert au profit du bénéficiaire est ainsi considérée

comme une attribution et le précompte est dû dès lors que le montant crédité est

disponible. Il en va ainsi même si le bénéficiaire accepte, pour quelque motif que ce soit, de

ne pas prendre possession effective des fonds.

En revanche, si le compte est indisponible en raison de circonstances indépendantes de la

volonté de son bénéficiaire, le revenu n’est pas considéré, d’un point de vue fiscal, comme

attribué. Le précompte mobilier n’est pas exigible dans ce cas.

La simple décision d’attribuer un revenu n’implique pas non plus l’attribution ou la mise

en paiement de ce revenu ni a fortiori l’exigibilité du précompte mobilier. Cette hypothèse

vise, par exemple, le vote par l’assemblée générale d’une société d’attribuer un dividende à

ses actionnaires.

Section 4. Déclaration et paiement du précompte mobilier

Le précompte mobilier fait l’objet d’une déclaration par le débiteur du revenu et est

payable dans les 15 jours de l’attribution ou de la mise en paiement du revenu imposable

(art. 412 du C.I.R. 1992 et art. 85 de l’AR/C.I.R. 1992).

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Section 5. Précompte supporté à la décharge du bénéficiaire

Le redevable du précompte mobilier doit retenir celui-ci nonobstant toute convention

contraire. Ainsi, si le débiteur du revenu convient avec son bénéficiaire de supporter le

précompte mobilier à sa décharge, deux conséquences en résultent.

D’abord, le précompte mobilier supporté par le débiteur est ajouté au montant du revenu

pour le calcul du précompte mobilier lui-même (art. 268 du C.I.R. 1992). Il faut donc

reconstituer un revenu brut fictif correspondant au revenu net par application de la

formule suivante :

Revenu brut = (revenu net x 100) / (100 – taux du précompte mobilier)

Exemple

Un dividende net de 600 € est attribué. Le taux du précompte mobilier est de 30 %.

Revenu brut : (600 x 100) / (100 – 30) = 857.14 €.

Par ailleurs, le débiteur qui a payé le revenu à titre professionnel ne peut pas déduire à titre

de frais professionnels le supplément de revenu mobilier payé qui correspond au

précompte mobilier qu’il a supporté à la décharge de son bénéficiaire (art. 53, 2° du C.I.R.

1992).

S’il s’agit de dividendes et qu’ils sont versés par une société, cette sanction est toutefois

sans importance puisqu’en matière d’impôt des sociétés, les dividendes distribués ne

constituent pas des charges déductibles mais des bénéfices imposables.

En cas de paiement d’intérêts, la charge de la dette se voit, en revanche, alourdie pour le

débiteur professionnel. Dans cette hypothèse, il est donc préférable de fixer un taux

d’intérêt tenant compte du taux du précompte mobilier et de prévoir qu’en cas

d’augmentation de ce dernier, le taux d’intérêt est augmenté de façon à ce que l’intérêt net

reste inchangé.

Section 6. Imputation et remboursement

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Dans le cas, assez rare, où les revenus mobiliers sont globalisés, le précompte mobilier est

imputable sur l’impôt (art. 171 du C.I.R. 1992). L’excédent éventuel est remboursé par

l’Etat.

L’hypothèse de la globalisation des revenus mobiliers est exceptionnelle. Elle n’est en effet

avantageuse que pour les contribuables dont les revenus ne dépassent pas le montant

exempté d’impôt (art. 134, § 1er du C.I.R. 1992). C’est évidemment le cas pour un

contribuable qui, globalement, s’est retrouvé en perte pour un exercice déterminé.

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 3333.... LLLLES DIVIDENDESES DIVIDENDESES DIVIDENDESES DIVIDENDES

Section 1. Généralités

Un dividende est une somme attribuée aux actionnaires dans le cadre de l’affectation du

résultat d’une société par une décision de l’assemblée générale de celle-ci. La loi interdit à

une société de distribuer des dividendes si elle n’a pas réalisé de bénéfices. Une société ne

peut donc distribuer au maximum que les bénéfices de l’exercice ou les réserves

antérieurement constituées.

La taxation des dividendes dans le chef des personnes physiques entraîne une double

imposition économique. Les bénéfices distribués font en effet l’objet d’une première

taxation dans le chef de la société puisque, à la différence des intérêts, ils ne sont pas

déductibles de la base imposable de la société à titre de frais professionnels (ceci explique

que les sociétés aient généralement intérêt à s’endetter pour se financer plutôt qu’à

augmenter leur capital). La seconde taxation, dans le chef des bénéficiaires personnes

physiques, s’ajoute à la première, supportée par la société.

Les revenus mobiliers qui sont fiscalement considérés comme des dividendes

comprennent tous les avantages attribués aux actionnaires, en espèces ou autrement (par

l’attribution de titres par exemple), y compris lors de la liquidation de la société. La loi y

ajoute les intérêts des avances consenties à une société par ses actionnaires, lorsque

certaines limites sont dépassées et dans la mesure de ce dépassement.

Section 2. Dividendes « proprement dits »

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En droit fiscal, les dividendes comprennent « tous les avantages attribués par une société

aux actions, parts et parts bénéficiaires, quelle que soit leur dénomination, obtenus à

quelque titre et sous quelque forme que ce soit » (art. 18, al. 1er, 1° du C.I.R. 1992).

La notion fiscale de « dividendes » a dès lors une portée très large. Elle ne fait en effet

aucune distinction entre société belge ou étrangère, ou entre société de capitaux ou société

de personnes. Elle vise non seulement la distribution de sommes en espèces mais

également l’attribution d’un dividende en nature.

Il importe peu également que le dividende soit attribué de manière licite ou non. Si un

dividende est attribué en violation du droit des sociétés ou d’une disposition statutaire (s’il

n’existe pas de bénéfices par exemple), il peut néanmoins être taxé s’il représente un

enrichissement pour l’actionnaire qui en bénéficie. Il s’agit d’une simple application du

principe suivant lequel le droit fiscal se fonde sur des réalités : il ne tient pas compte du

caractère licite ou non du revenu imposable.

De la même manière, il importe peu que les dividendes soient attribués à des porteurs

d’actions, parts sociales, parts bénéficiaires, parts de fondateur ou n’importe quel autre

type d’actions ou parts, pour autant qu’il s’agisse bien de titres assimilables à des actions ou

parts (y compris les actions privilégiées ou de préférence, actions sans droit de vote,

actions non représentatives du capital social ou encore actions de jouissance).

Enfin, l’origine des revenus attribués par la société comme la qualification que la société

distributrice donne aux revenus distribués sont également sans importance. Ils peuvent

être appelés « dividendes ordinaires », « super dividendes », « dividendes intercalaires »,

« dividendes complémentaires », voire même erronément « intérêts ». Ils sont taxables dès

qu’ils ont les caractéristiques prévues par la loi fiscale pour être des dividendes.

On peut en conclure que le critère principal auquel il convient d’être attentif afin de définir

si un revenu est du point de vue fiscal un dividende réside dans le fait de savoir si cette

attribution trouve sa cause dans la qualité d’actionnaire ou d’associé de son bénéficiaire.

Cela concerne donc les sommes payées à un actionnaire parce qu’il est actionnaire, par

opposition, par exemple, aux rémunérations payées à un actionnaire pour un travail

effectué par celui-ci pour la société, ou aux intérêts de prêts consentis à un actionnaire qui

a prêté de l’argent à la société (sauf dans les cas où la loi assimile ces intérêts à des

dividendes).

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Section 3. Attribution gratuite d’actions au titre de dividendes

Plutôt que d’attribuer une somme d’argent à ses actionnaires, une société peut également

décider de leur attribuer des actions au titre de dividendes. Il peut s’agir par exemple des

actions d’une filiale de la société, c’est-à-dire d’une autre société qu’elle contrôle.

L’attribution d’actions au titre de dividendes est assimilée fiscalement à une distribution de

dividendes. Le traitement fiscal d’une attribution d’actions au titre de dividendes est donc

le même que celui applicable à une attribution d’espèces.

Lorsqu’il s’agit de l’attribution d’actions au titre de dividendes, la seule particularité

consiste dans le fait qu’il faut évaluer le montant des dividendes ainsi distribués.

Cette attribution de dividendes fait l’objet d’une évaluation conforme à la règle qui définit

de manière générale la consistance du revenu imposable en cas de mise en paiement de

revenus mobiliers sous la forme de biens en nature (art. 20bis et 267 du C.I.R. 1992).

Dans cette hypothèse, on considère que le montant du revenu imposable est égal à la

valeur vénale des biens à la date de leur attribution ou de leur mise en paiement, même si

le transfert effectif des biens n’a lieu qu’ultérieurement.

Dans notre exemple, le montant imposable correspond donc à la valeur vénale des actions

à la date de leur attribution ou de leur mise en paiement. La valeur vénale des actions est le

montant qui pourrait être obtenu de la vente des actions dans des conditions normales de

marché.

Cette règle d’évaluation fait l’objet d’une précision. En cas d’attribution ou de mise en

paiement de revenus sous la forme de titres, il convient en effet de faire une distinction

selon que les actions sont cotées ou non à la bourse ou sur un marché analogue.

Si tel est le cas, le Code des impôts sur les revenus prévoit qu’en tous les cas, la valeur à

prendre en considération « ne peut être inférieure à celle qui serait fixée par le dernier prix

courant publié par le gouvernement belge ou sur un marché étranger analogue avant la

date de l’attribution ou de la mise en paiement » (art. 20bis, al. 2 du C.I.R. 1992).

Si tel n’est pas le cas, on revient à la règle générale, à savoir qu’il appartient au contribuable

d’en évaluer la valeur vénale sous le contrôle de l’administration.

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Le précompte mobilier est retenu par la société sur la valeur ainsi déterminée, multipliée

par 100/75èmes pour reconstituer le montant brut correspondant à la valeur nette reçue.

Pour information, le montant brut s’obtient effectivement en faisant application de la

formule suivante (pour un taux de précompte de 27 %) :

Montant brut = (100 / 100 – 27) x Montant net

Par exemple, si le montant net est de 50, en vertu de cette formule, le montant brut sera de

68,49.

Le montant net s’obtient quant à lui en faisant application de la formule suivante (toujours

pour un taux de précompte de 27 %) :

Montant net = (100 – 27 / 100) x Montant brut

Par exemple, cela signifie que si le montant brut est de 50, le montant net sera de 36,5.

Section 4. Attribution d’actions en cas d’incorporation de réserves

Le capital d’une société est constitué par les apports de ses associés lors de sa constitution

ainsi que lors d’augmentations de capital ultérieures. Ces augmentations de capital

peuvent être réalisées soit par de nouveaux apports (en espèces ou en nature), soit par

l’incorporation d’autres éléments qui font déjà partie de l’actif de la société, comme des

réserves ou des bénéfices reportés d’exercices antérieurs.

Les réserves sont des montants inscrits au passif du bilan d’une société et qui

correspondent aux bénéfices d’exercices antérieurs qui n’ont pas été distribués à ses

actionnaires et qui sont conservés dans l’entreprise. Elles font partie des fonds propres de

la société.

Si une société augmente son capital en y incorporant des réserves ou des bénéfices

reportés d’exercices antérieurs et qu’elle attribue à ses actionnaires des actions

représentatives de cette augmentation de capital, il ne s’agit pas, en droit fiscal, de

l’attribution d’un revenu au titre de dividendes.

Dans ce cas, la valeur représentée par la somme des titres anciens et des titres nouveaux

correspond en effet à celle des seuls titres anciens avant l’augmentation de capital. La

société a simplement procédé à une augmentation de capital par la consolidation

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d’éléments qui existaient déjà dans son patrimoine social144, lequel n’a pas augmenté : ni la

société ni les actionnaires ne se sont donc enrichis.

Si les actionnaires disposent, suite à cette opération, de plus d’actions que ce dont ils

disposaient auparavant, la valeur de leurs actions a diminué à due concurrence. Ils ne se

sont pas enrichis puisqu’ils n’ont reçu aucune valeur nouvelle ni a fortiori aucun revenu

mobilier imposable.

Section 5. Remboursements de capital

A. Principe et exception

Pour rappel, le capital social d’une société est en premier lieu constitué par les apports

effectivement réalisés par ses associés. Le capital libéré, qui émane de ces apports, peut

faire l’objet d’un remboursement en immunisation d’impôt.

Ce remboursement peut provenir de la décision de la société de réduire son capital (mais

également de la liquidation de la société, correspondant au partage de ses avoirs, ou de

l’acquisition par une société de ses propres actions).

En droit fiscal, le capital libéré est plus précisément défini comme la partie du capital social

qui est réellement libérée et qui n’a fait l’objet ni d’une réduction ni d’un remboursement.

Les bénéfices qui sont incorporés au capital ne sont pas considérés comme du capital

libéré (voy. les art. 2, 6° et 184, al. 1er du C.I.R. 1992).

En principe, le remboursement total ou partiel du capital social d’une société est pourtant

considéré, au regard du droit fiscal, comme une distribution de dividendes imposable. Il est

cependant fait exception à cette règle pour le remboursement du capital libéré, opéré en

exécution d’une décision régulière de réduction du capital social prise conformément au

Code des sociétés (art. 18, al. 1er, 2° du C.I.R. 1992).

En ce cas, il ne s’agit en effet que du remboursement d’un apport préalable à la société. A

concurrence de la partie des fonds qui correspond au capital libéré de la société, il n’y a pas

d’enrichissement dans le chef de ses associés ou actionnaires. Il s’agit, en d’autres termes,

non de l’attribution d’un revenu dans leur chef, mais du remboursement de leur mise dans

la société.

144 Cass., 6 décembre 1926, Pas., 1927, I, p. 100.

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B. Conditions pour échapper à la taxation

Pour que la réduction de capital soit exonérée d’impôt, il faut respecter deux conditions :

a) Une décision régulière de réduction du capital social

L’assemblée générale doit avoir valablement décidé, conformément au Code des sociétés et

à ses statuts, de réduire le capital social par remboursement aux actionnaires.

b) Un prélèvement sur du capital libéré

Du point de vue comptable, le montant remboursé doit avoir été prélevé du compte

« capital social », figurant au passif du bilan, et à concurrence du capital réellement libéré.

Est en revanche imposable un remboursement régulier mais prélevé sur le bénéfice de

l’exercice ou sur des réserves incorporées au capital et non sur du capital libéré. Ce

paiement ne diffère effectivement en rien de l’attribution d’un dividende.

Lors d’une réduction de capital, il convient donc toujours de vérifier si celle-ci se fait au

moyen du capital libéré ou au moyen du capital assimilé à des réserves sur le plan fiscal (le

capital ayant été augmenté préalablement par incorporation de réserves).

Lorsque le capital comprend à la fois du capital libéré et des bénéfices ou des réserves qui

ont été incorporés au capital, l’administration considère qu’il appartient à l’assemblée

générale de mentionner dans l’acte si l’imputation doit se faire par préférence sur le capital

réellement libéré ou sur les réserves intégrées au capital. À défaut de précision dans l’acte,

l’administration procède à une imposition au prorata des réserves intégrées au capital par

rapport à l’ensemble de ce capital.

Cette exigence administrative n’est à notre avis justifiée que s’il n’est pas possible de

présumer, par d’autres moyens qu’une indication expresse dans l’acte, quelle a été

l’intention des parties. Un acte de société doit en effet s’interpréter en fonction de

l’intention des parties, qui ne doit pas nécessairement être expresse et écrite.

Le Projet de Loi du 11 décembre 2017145 [qui devrait être adopté à ce jour] vise à modifier

l’article 18 du CIR 92 et cette liberté du contribuable du choix de l’imputation en ce qu’il

145 Chambre, Doc. Parl. 2839/54, www.lachambre.be

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établit une règle de prorata, à savoir que les réductions de capital effectuées à partir de

2018 seront soumises au précompte mobilier proportionnellement à la partie des bénéfices

ou des réserves taxées encore présentes par rapport au capital libéré augmenté des réserves

taxées. La quotité de la réduction imputée sur le capital libéré demeure non imposable.

Il n’agit donc pas d’une taxation du capital libéré mais « d’appliquer une taxation

proportionnelle de ces réserves par rapport au total formé par celles-ci et le capital libéré et

les sommes y assimilées ».146

Section 6. Assimilation des parts bénéficiaires à du capital

Les parts bénéficiaires, également dénommées « parts de fondateur », sont des titres émis

en contrepartie d’un apport en espèces ou en nature qui ne représente aucune part dans le

capital. Si elles ne confèrent en principe pas de droit de vote à l’assemblée générale de la

société, elles octroient à leurs détenteurs une participation aux bénéfices et dans le boni de

liquidation.

Les détenteurs de parts bénéficiaires sont des actionnaires et non des créanciers de la

société, tant du point de vue fiscal que juridique. Afin d’harmoniser le traitement fiscal du

financement des entreprises, le législateur assimile effectivement les sommes reçues en

contrepartie de l’émission de parts bénéficiaires à du capital libéré.

Les sommes reçues lors d’un remboursement de parts bénéficiaires constituent, en

principe, un revenu mobilier imposable dans le chef de leurs bénéficiaires, en vertu de

l’article 18, alinéa 1er, 2°bis du C.I.R. 1992.

Toutefois, cette même disposition prévoit qu’il est fait exception à cette règle pour les

sommes reçues lors du remboursement de parts bénéficiaires assimilées à du capital libéré

(en vertu de l’art. 184 du C.I.R. 1992), opéré en exécution d’une décision régulière de

l’assemblée générale prise conformément aux dispositions du Code des sociétés applicables

aux modifications des statuts.

146 Exposé des motifs p.13, Chambre, Doc. Parl. 2839/54, www.lachambre.be

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Section 7. Dividende ou rémunération d’associé ?

Dans une société, l’intégralité de ce que reçoit l’associé non actif constitue en principe un

dividende. En revanche, ce que reçoit l’associé dirigeant d’entreprise peut, en tout ou en

partie, avoir la nature d’un revenu professionnel, puisque l’intéressé se livre, par définition,

« à un travail permanent en vue de faire fructifier le capital147 ».

Généralement, la ventilation entre revenu mobilier et revenu professionnel se fait sur la

base des dispositions statutaires ou conventionnelles prévues à cet effet. Toutefois, en

l’absence de clé de répartition prévue, on considère que la totalité des sommes allouées à

l’associé actif constitue une rémunération de dirigeant d’entreprise. C’est une application

de ce que l’on appelle généralement « le principe d’attraction » (voy. infra à ce sujet).

Il n’en est toutefois ainsi que s’il exerce une des fonctions suivantes : soit un mandat

d’administrateur, de gérant, de liquidateur ou une fonction analogue, soit une fonction

dirigeante de gestion journalière d’ordre commercial, technique ou financier, en dehors

d’un contrat de travail (art. 32 du C.I.R. 1992).

Si l’associé actif n’exerce aucune des fonctions visées ci-dessus mais preste dans les liens

d’un contrat de travail, sa rémunération est considérée comme une rémunération de

travailleurs imposable en tant que telle (voy. infra).

Section 8. Assimilation de certains intérêts d’avances

A. Généralités

La loi fiscale assimile à des dividendes certains intérêts de sommes mises à disposition de la

société, sous la forme d’avances, notamment par ses associés, administrateurs ou gérants,

leur conjoint ou leurs enfants (art. 18, alinéa 1er, 4°, et alinéa 2 du C.I.R. 1992).

Cette assimilation a pour objet d’éviter que ne soit trop facilement contournée la règle

d’imposition des dividendes dans le chef de la société. Les dividendes font en effet partie

des bénéfices imposables de la société, au contraire des intérêts qui constituent en

principe, pour celle-ci, des charges déductibles.

147 Cass., 28 janvier 1969, Journ. prat. dr. fisc., 1969, p. 113.

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Jusqu’il y a peu, s’ajoutait aussi un avantage du côté du précompte, qui était plus élevé pour

les dividendes (25 % en général) que pour les intérêts (15 % le plus souvent). La loi du 27

décembre 2012148 a toutefois rendu taxables les intérêts au taux de 25 % (aujourd’hui 30%),

soit au même taux que les dividendes. Ceci n’empêchera pas une société de préférer, du

point de vue fiscal, de payer des intérêts, déductibles de sa base imposable, plutôt que des

dividendes, toujours non-déductibles.

B. Champ d’application

Cette requalification d’intérêts en dividendes s’applique aux avances consenties par « une

personne physique à une société dont elle possède des actions ou parts ou par une personne

à une société dans laquelle elle exerce un mandat ou des fonctions visés à l’article 32, alinéa

1er, 1°, ainsi que tout prêt d’argent consenti le cas échéant par leur conjoint ou leurs enfants

à cette société lorsque ces personnes ou leur conjoint ont la jouissance légale des revenus de

ceux-ci » (art. 18, 4°, al. 2 du C.I.R. 1992).

Les personnes qui exercent un mandat ou des fonctions « visés à l’article 32, alinéa 1er, 1° »

sont les personnes qui exercent un mandat d’administrateur, de gérant, de liquidateur ou

des fonctions analogues au sein de la société. Il s’agit généralement de ce que l’on appelle la

première catégorie de dirigeants d’entreprise.

A contrario, est exclue la seconde catégorie de dirigeants d’entreprise, soit les personnes,

visées à l’article 32, 1er alinéa, 2° du Code des impôts sur les revenus, qui exercent

uniquement au sein de la société une fonction dirigeante ou une activité dirigeante de

gestion journalière, d’ordre commercial, technique, financier ou technique, en dehors d’un

contrat de travail.

L’assimilation des intérêts d’avances à des dividendes n’est encore applicable que si

l’actionnaire ou le mandataire, son conjoint ou ses enfants ont une créance sur la société

elle-même. Tel n’est pas le cas lorsque le titulaire de la créance est un tiers (une banque par

exemple), même si la créance est garantie par une personne qui possède l’une des qualités

visées ci-dessus.

L’avance doit enfin avoir été consentie à une société résidente ou étrangère, mais non à

une association sans but lucratif (ASBL) ne se livrant pas à une exploitation ou à des

opérations de caractère lucratif.

148 M.B., 30 décembre 2012.

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C. Portée de la requalification

La requalification des intérêts en dividendes joue lorsque les intérêts des avances dépassent

l’une des limites suivantes (art. 18, 4°, al. 1er du C.I.R. 1992), et dans la mesure de ce

dépassement :

- Le taux d’intérêt excède un taux d’intérêt normal compte tenu des conditions de

marché et des risques particuliers à l’opération.

L’excédent par rapport à ce que représente un taux d’intérêt normal est donc taxé

comme un dividende (voy. art. 55 du C.I.R. 1992)149.

Ainsi, si l’administrateur d’une société anonyme (S.A.) prête à sa société un montant

de 20.000 €, remboursable un an plus tard avec un taux d’intérêt (annuel) de 10 %, le

montant à rembourser par la société s’élève à 20.000 € en capital et à 2.000 € en

intérêts (20.000 € x 10 %).

Si le taux d’intérêt normal pour une telle opération est par exemple de 6 %, le

montant des intérêts requalifiés en dividendes est de 800 €, correspondant à 2.000 €

diminué de 1.200 € (20.000 € x 6 %).

- Le montant total des avances productives d’intérêts excède la somme des réserves

taxées de la société au début de la période imposable et du capital libéré de la société

à la fin de cette période.

Pour vérifier si ce seuil est dépassé, il convient de prêter attention aux comptes

annuels de la société.

Seule la partie des intérêts qui dépasse l’une ou l’autre de ces limites est donc requalifiée en

dividendes. En-deçà de ces deux limites, les intérêts d’avances restent soumis au régime

fiscal des revenus issus de capitaux prêtés, qui est caractérisé par la déductibilité des

intérêts dans le chef de la société emprunteuse et par le prélèvement d’un précompte

mobilier dont le taux est (actuellement) de 30 %.

149 Voyez à ce propos Civ. Anvers, 2 avril 2004, R.G. 01/503/A, www.fiscalnet.be.

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D. Notion d’ « avances »

Est considéré comme une « avance » « tout prêt d’argent, représenté ou non par des titres »

(art. 18, al. 2 du C.I.R. 1992), consenti par une personne physique à une société dont elle

possède des actions ou parts ou par une personne à une société dans laquelle elle exerce un

mandat d’administrateur, de gérant, de liquidateur ou des fonctions analogues, ainsi que

tout prêt d’argent consenti à cette société par leur conjoint ou leurs enfants lorsque ces

personnes ou leur conjoint ont la jouissance légale des revenus de ceux-ci.

Il est toutefois fait exception à cette règle pour les obligations et autres titres analogues

émis par appel public à l’épargne. Pour ceux-ci, il n’y a donc pas d’assimilations en

dividendes.

E. Distinction entre un prêt d’argent et un apport en société

Il peut être utile, pour l’application de cette disposition, de rappeler la différence entre un

prêt d’argent et un apport en société.

L’apport en société suppose nécessairement que la chose apportée soit soumise aux risques

de l’entreprise. Si l’apport est rémunéré par l’attribution de droits sociaux qui donnent

droit à l’attribution des bénéfices de la société, il implique également le risque d’une

participation dans les pertes éventuelles de la société.

Par contre, le prêt représente une créance qui confère à son titulaire le droit au

remboursement, à l’échéance et dans les conditions convenues avec la société

emprunteuse, quels que soient les résultats de cette dernière.

Contrairement à l’apport en société, le prêt n’est donc pas une mise en commun soumise

aux risques de l’entreprise. Par ailleurs, la circonstance que le prêteur puisse ne pas obtenir

le remboursement de sa créance en cas de liquidation déficitaire de la société ne le place

pas pour autant dans une situation similaire à celui dans laquelle se trouve l’actionnaire qui

a effectué un apport à la société.

L’actionnaire supporte en effet un risque plus important que celui de l’insolvabilité de la

société, puisque son apport ne lui sera remboursé qu’à la condition que la société ait

désintéressé tous ses créanciers, et qu’il subsiste encore des actifs pour rembourser les

sommes qu’il a apportées à la société à concurrence du capital libéré.

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F. Notion de « prêt d’argent » en jurisprudence

a) Mise en situation

La notion de « prêt d’argent » a fait l’objet de controverses importantes, tant en doctrine

qu’en jurisprudence150.

La question de savoir si, aux fins de l’assimilation des intérêts en dividendes, cette notion

se limite au prêt au sens du Code civil ou si elle couvre aussi un solde de prix portant

intérêt, porté en compte courant au sein de la société, (par exemple : lorsqu’un actionnaire

vend à la société un bien qui lui appartenait, et que le prix, au lieu de lui être payé, est

crédité à son compte courant) est effectivement demeurée discutée jusqu’à ce

qu’interviennent plusieurs arrêts de la Cour de cassation.

Ce que l’on qualifie de « compte courant » est un compte ouvert au nom d’un ou de

plusieurs associés et qui traduisent, dans des termes comptables, l’état de leurs dettes et de

leurs créances à l’égard de la société.

Le compte courant débiteur constate une dette de l’associé envers la société. Le compte

courant créditeur constate une dette de la société envers l’associé. Cette dette peut résulter

de sommes dues à l’associé à titre, par exemple, de rémunérations ou, en l’espèce, d’un

solde de prix dû à l’associé pour la cession à la société d’un bien lui appartenant.

Un exemple permet de mieux illustrer ce propos. Monsieur A est associé au sein de la

société B. Monsieur A et la société B s’accordent pour que Monsieur A vende à la société

B, qui lui achète, un bien immeuble pour un prix de 1.000.000 € (hors taxes).

La société B paie à Monsieur A une première tranche de 200.000 €. Le solde de prix de

800.000 € est porté en compte courant au sein de la société B. Monsieur A est donc

titulaire d’un solde courant créditeur auprès de la société B qui représente la créance qu’il

détient à son égard.

Si le solde de prix porte intérêt, Monsieur A n’en réclame pas le paiement à la société. Ce

solde de prix non réclamé et portant intérêt constitue-t-il un prêt d’argent de Monsieur A

à la société B ?

150 Voyez notamment à ce sujet Ph. MALHERBE, « Intérêts d’avances et loyers perçus par des administrateurs

ou associés depuis la loi du 28 juillet 1992 », J.D.F., 1993, p. 9 ; J.-P. MAGREMANNE, « Requalification des

intérêts en dividendes et des revenus immobiliers en rémunérations de dirigeants d’entreprise », R.G.F., 1997,

p. 35.

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b) État de la jurisprudence

Les deux arrêts les plus importants prononcés par la Cour de cassation en la matière sont

les suivants.

Dans un premier arrêt du 16 novembre 2006151, elle a décidé que « (les) termes ‘prêt

d’argent’, au sens de cette disposition, peuvent revêtir la forme d’une inscription au compte

courant de l’actionnaire ou de la personne qui exerce un mandat ou des fonctions visées à

l’article 32, alinéa 1, 1°, de ce Code ».

Dans un deuxième arrêt du 4 septembre 2009152, la Cour de cassation a considéré qu’une

créance d’un dirigeant sur sa société, portée en compte courant, peut constituer un prêt

d’argent, dont les intérêts sont alors susceptibles d’être requalifiés en dividendes. La Cour

précise cependant qu’une telle créance n’est pas nécessairement un prêt.

La Cour décide effectivement dans cet arrêt qu’ « à défaut de définition particulière dans la

loi fiscale, il y a lieu d’entendre par prêt d’argent, conformément au droit commun, le

contrat par lequel le prêteur remet de l’argent à l’emprunteur en vue de lui permettre de

s’en servir et à charge pour ce dernier de le lui restituer au terme convenu. Un prêt d’argent

(...), peut être constaté par une inscription au compte courant de l’actionnaire ou de la

personne qui exerce un mandat ou des fonctions qui sont visés à l’article 32, alinéa 1, 1°,

mais une telle inscription n’implique pas nécessairement l’existence d’un contrat de prêt au

sens de cette disposition ».

La Cour de cassation a, depuis lors, à plusieurs reprises, confirmé sa position (Cass. 20 mai

2010, F 09.0093.N ; Cass. 15 octobre 2010, F.098.0080.N ; Cass. 2 décembre 2010, F.

09.0094.F).

Il en résulte que pour déterminer si un solde de prix de vente portant intérêt porté en

compte courant au sein d’une société peut être assimilé à un prêt d’argent, il faut vérifier si

les parties ont eu l’intention de conclure un « contrat par lequel le prêteur remet de l’argent

à l’emprunteur en vue de lui permettre de s’en servir et à charge pour ce dernier de le lui

151 Cass., 16 novembre 2006, T.F.R., 2007, n° 315, p. 105. 152 Cass., 4 septembre 2009, F.J.F., n° 2010, p. 16.

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restituer au terme convenu ». Dans l’affirmative, les intérêts pourront être assimilés aux

dividendes. C’est l’administration fiscale qui doit en faire la preuve153.

Section 9. Boni de liquidation et boni d’acquisition

A. Boni et réserve de liquidation

a) Boni de liquidation

Lorsqu’une société procède à sa liquidation (pour cause de dissolution ou de faillite par

exemple), elle procède à la répartition de ses avoirs. Lors d’une telle opération, la différence

entre les sommes réparties ou payées aux actionnaires et les sommes que ceux-ci ont

effectivement apportées à la société est considérée comme un dividende pour la

détermination de la base imposable de la société à l’impôt des sociétés (art. 209, al. 1er du

C.I.R. 1992).

Ce dividende est dénommé « boni de liquidation ». Il désigne l’excédent que se partagent

les associés par rapport à ce qu’ils ont investi, après que les actifs de la société aient été

réalisés, que les créanciers et le personnel aient été payés et que les apports effectués à la

société aient été repris. Il correspond en fait soit à des bénéfices antérieurement réservés,

soit à des bénéfices réalisés dans le cadre de la liquidation de la société.

À l’impôt des personnes physiques également, le boni de liquidation est assimilé à un

dividende (art. 18, al. 1er, 2°ter du C.I.R. 1992). Que ce soit en cas de liquidation totale ou

en cas de liquidation partielle, le boni de liquidation est donc traité comme un dividende et

est soumis au prélèvement du précompte mobilier.

Quant aux opérations de partage partiel de l’avoir social (voy. l’art. 187 du C.I.R. 1992), il

s’agit par exemple des diverses hypothèses dans lesquelles un associé est exclu de la

société, démissionne ou décède. Les sommes attribuées à ces occasions à l’associé intéressé

ou à ses ayants droit sont assimilées à un dividende distribué, lorsque ces sommes

excèdent la quote-part du capital libéré représentée par les parts de l’associé concerné.

153 La Cour a rappelé ces enseignements dans des arrêts rendus les 20 mai, 15 octobre et 2 décembre 2010.

Voyez à ce sujet Cass., 20 mai 2010, Fiscologue, 2010, n° 1211, p. 8, note C. BUYSSE ; Cass., 2 décembre 2010,

Fiscologue, 2011, n° 1234, p. 5, note C. BUYSSE.

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Le taux du précompte était initialement de 10 % (et non de 25 %, soit le taux normal pour

les dividendes). Ce taux privilégié pour les bonis de liquidation a cependant été supprimé

avec effet au 1er octobre 2014. Il résulte que, depuis ce moment, le boni de liquidation est

lui aussi taxé à (actuellement) 30 %.

Très récemment, la Cour constitutionnelle a jugé que le fait que le boni de liquidation soit

assimilé, en ce qui concerne le taux de taxation, au dividende ne viole pas les articles 10, 11

et 172 de la Constitution154.

b) La réserve de liquidation

A titre de correctif à la mesure hautement impopulaire consistant au relèvement du taux

du précompte mobilier sur le boni de liquidation, la loi-programme du 19 décembre

2014155 a mis en place un régime permettant, moyennant le respect de certaines

conditions, de constituer une « réserve de liquidation ».

La réserve de liquidation a pour but de mettre en place, à côté du régime du boni de

liquidation, une mesure incitant à mettre en réserve des sommes taxées immédiatement à

taux réduit (10%), destinées à être plus tard distribuées en exemption d’impôt, lors de la

liquidation.

La constitution d’une réserve de liquidation est subordonnée au respect de quatre

conditions.

1111èreèreèreère conditionconditionconditioncondition : être une : être une : être une : être une petite sociétépetite sociétépetite sociétépetite société

Seules les sociétés considérées comme petites sociétés au sens de l’article 15 du Code des

sociétés peuvent constituer une réserve de liquidation (art. 184quater, alinéa 1er CIR92).

2222èmeèmeèmeème conditionconditionconditioncondition : comptabilisation sur un ou plusieurs com: comptabilisation sur un ou plusieurs com: comptabilisation sur un ou plusieurs com: comptabilisation sur un ou plusieurs comptes intangiblesptes intangiblesptes intangiblesptes intangibles

La réserve de liquidation doit être comptabilisée dans un ou plusieurs comptes distincts du

passif et ne peut servir de base pour les rémunérations ou attributions quelconques (art.

184 quater, 2ème et 3ème alinéa CIR92).

Si la condition d’intangibilité de la réserve de liquidation n’est plus respectée parce que

cette réserve est distribuée sous la forme de dividendes, le montant distribué sera encore

154 C.C., 6 novembre 2014, n° 162/2014, www.const-cour.be. 155 M.B., 29 décembre 2014.

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soumis à un précompte mobilier de 20% ou de 5%, selon que le montant concerné aura été

conservé dans cette réserve de liquidation pendant une période de plus ou moins de 5 ans à

compter du dernier jour de la période imposable concernée (nouvel art. 269, §1er,8° du

CIR92).

Si la condition d’intangibilité n’est pas respectée d’une autre manière (ex : imputation des

pertes comptables), la partie de la réserve de liquidation affectée de cette manière ne

pourra plus être distribuée moyennant un précompte mobilier réduit.

3333èmeèmeèmeème conditionconditionconditioncondition : affectation de tout ou partie du bénéfice net après impôt: affectation de tout ou partie du bénéfice net après impôt: affectation de tout ou partie du bénéfice net après impôt: affectation de tout ou partie du bénéfice net après impôt

La réserve de liquidation s’alimente par l’affectation de tout ou partie des bénéfices à

affecter de l’exercice d’imposition relatif à la période imposable. Il s’agit donc du bénéfice

comptable après impôt (art.184quater, 2ème et 3ème al. CIR92).

4444èmeèmeèmeème cccconditiononditiononditionondition : application d’une cotisation distincte de 10%: application d’une cotisation distincte de 10%: application d’une cotisation distincte de 10%: application d’une cotisation distincte de 10%

Sur le montant transféré à la réserve de liquidation, la société est tenue de payer une

cotisation distincte de 10% (art.219quaterCIR92) :

Celle-ci est enrôlée en même temps que l’impôt des sociétés et doit donc être payée en

même temps.

La cotisation doit être payée quel que soit l’évolution ultérieure des réserves de la société.

Ceci présente un certain risque. En effet, il est possible qu’une société paie la cotisation

distincte sur une réserve qui n’existera plus au moment de la liquidation de la société, par

exemple, parce que dans les années suivant la constitution de la réserve de liquidation, la

société aura subi des pertes plus importantes que les réserves et qu’aucun boni de

liquidation ne pourra être distribué. Dans ce cas, la cotisation versée ne peut être

récupérée.

La constitution d’une réserve de liquidation est donc à déconseiller aux sociétés qui

s’attendent à subir d’importantes pertes.

Les articles 184 quater et 219quater du C.I.R. 1992 sont applicables à partir de l’exercice

d’imposition 2015.

Les buts de la mesure sont :

- de permettre à l’Etat d’encaisser un précompte immédiat, certes limité à 10 % ;

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107

- de limiter le prélèvement fiscal à ces 10 %, puisque lors de la liquidation il y aura

exonération.

Le succès de ce système dépendra de la confiance que les sociétés feront ou non à l’Etat.

Certains craignent que, plus tard, un futur gouvernement, oublieux des engagements

actuels de l’Etat, instaure une nouvelle taxe sur les distributions de ces réserves lors de la

liquidation, ce qui aboutirait à une double taxation.

c) Boni d’acquisition

Un régime similaire à celui du boni de liquidation est applicable au « boni d’acquisition ».

Le boni d’acquisition correspond en fait à une partie du prix qu’une société paie pour

acheter ses propres actions ou parts (art. 18, al. 1er, 2°ter du C.I.R. 1992).

Lorsqu’elle procède à une telle opération, la société qui acquiert ses propres actions paie en

effet généralement un prix supérieur à la quote-part du capital libéré que représentent les

actions acquises.

On nomme ainsi « boni d’acquisition » la différence entre le prix d'acquisition ou la valeur

réelle des actions rachetées par la société et la quote-part du capital représenté par ces

actions.

Le boni d’acquisition est assimilé à un dividende distribué lorsque l’opération aboutit à un

appauvrissement de la société distributrice et qu’elle n’est pas réalisée conformément aux

dispositions du Code des sociétés (art. 186 du C.I.R. 1992).

Lorsque la société acquiert ses propres actions dans le respect du droit des sociétés, il n’est

question de dividende distribué qu’au moment où se produit le risque d’une déperdition de

sa base imposable, c’est-à-dire :

- Au moment où des réductions de valeurs sont actées sur les actions ou parts

acquises ;

- Au moment de l’aliénation des actions ou parts acquises ;

- Au moment où les actions ou parts acquises sont détruites et deviennent nulles ;

- Au plus tard au moment de la dissolution de la société.

Le boni d’acquisition subit le précompte mobilier au taux (depuis le 1er janvier 2017) de 30

%, à l’instar du boni de liquidation (depuis le 1er octobre 2014) et de la plupart des revenus

mobiliers considérés fiscalement comme des dividendes.

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d) Exception commune au boni de liquidation et au boni d’acquisition

Une exception est prévue pour le boni de liquidation et pour le boni d’acquisition lorsqu’ils

sont payés ou attribués par une société d’investissement belge ou étrangère (SICAV) qui

bénéficie d’un régime d’imposition exorbitant du droit commun. Cette exception se justifie

par le fait que la fonction économique d’une telle société diffère de celle d’une société

ordinaire.

Dans cette hypothèse, le boni de liquidation et le boni d’acquisition ne sont pas considérés

comme des revenus mobiliers imposables (art. 21, 2° du C.I.R. 1992) et ne subissent donc

pas le prélèvement du précompte mobilier.

Sont toutefois exclues du champ d’application de cette exception les SICAV dites

« obligataires » ou « à revenu garanti » (voy. infra).

Section 10. Exonérations diverses

Le Code des impôts sur les revenus prévoit enfin l’immunisation de dividendes de natures

diverses (art. 21 du C.I.R. 1992). Il s’agit, par exemple, des revenus de certaines actions de

la société nationale des chemins de fer belges (SNCB).

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 4444.... LLLLES IES IES IES INTÉRÊTSNTÉRÊTSNTÉRÊTSNTÉRÊTS

Section 1. Généralités

On peut rappeler, à titre préalable, la différence essentielle existant entre les dividendes

(visés à l’article 18 du C.I.R. 1992) et les intérêts (visés aux articles 19, 19bis et 19ter du

C.I.R. 1992).

Les intérêts constituent la rémunération d’un prêt, dont le remboursement est garanti

inconditionnellement au prêteur par l’emprunteur. En aucun cas, l’emprunteur ne peut

décider unilatéralement de ne pas rembourser le prêt.

Le prêteur, qui dispose d’un droit de créance (matérialisé ou non dans un titre), a donc le

droit, qu’il peut éventuellement exercer par le biais d’une action en justice, de se faire

rembourser le montant prêté.

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De son côté, le titulaire d’une action ne possède aucune créance sur la société. Il n’a aucun

droit à exiger le remboursement du montant qu’il a apporté à la société. En cas de

liquidation éventuelle, la société commence d’ailleurs par rembourser ses créanciers, et ce

n’est que lorsqu’un solde subsiste qu’il revient aux actionnaires.

Le titulaire d’une action n’a finalement droit à l’attribution d’un revenu que si, d’une part,

la société réalise un bénéfice et si, d’autre part, l’assemblée générale décide qu’il y a lieu de

distribuer un dividende, dont elle fixe par ailleurs librement le montant.

Section 2. Produits de prêts

Les intérêts comprennent, en premier lieu, « les intérêts, primes et tous autres produits de

prêts (...), de dépôts d’argent et de toute autre créance » (art. 19, § 1er, 1° du C.I.R. 1992).

Pour être qualifié d’ « intérêt », il importe peu que le revenu soit fixe ou variable ou que la

créance soit représentée ou non par un titre.

Trois grandes catégories de revenus mobiliers peuvent être distinguées parmi les intérêts.

Il s’agit (i) des revenus de dépôts d’argent, (ii) des revenus d’emprunts et de créances non

représentées par des titres et (iii) des intérêts et tous autres produits de titres.

Chacune de ces trois catégories fait l’objet ci-dessous d’une explication succincte, parfois

plus amplement commentée par la suite.

A. Revenus de dépôt d’argent

Les revenus de dépôts d’argent s’entendent de manière très large. Il s’agit, selon

l’administration fiscale, des revenus de dépôts de sommes d’argent remboursables,

effectués en euros ou en devises étrangères, en Belgique ou à l’étranger, avec revenus fixes

ou variables, effectués dans des établissements de crédit ou chez toute autre personne

physique ou morale, et enfin, étant soit reçu par les dépositaires en compte à vue, à terme

ou à préavis, ou encore sur un carnet ou livret de dépôts ou sous toute autre forme

analogue 156.

156 Com. I.R., 19/21.1.

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B. Revenus d’emprunts et de créances non représentées par des titres

Les revenus d’emprunts et de créances non représentées par des titres sont très variés. Des

exemples de tels revenus sont repris de manière non exhaustive ci-dessous.

a) Il s’agit essentiellement des intérêts prévus par une convention prévoyant, outre le

remboursement d’une somme prêtée ou visée à disposition du débiteur, une rémunération

du capital, soit un intérêt payable pour l’exécution normale du contrat.

Il s’agit par exemple des intérêts privés, y compris ceux qui rémunèrent un prêt consenti

par des parents à leurs enfants157, ainsi que la partie du montant remboursé dépassant le

capital nominal dans le cadre d’un « prêt indexé ».

Ce dernier type de prêt est un contrat qui comporte une clause d’indexation du capital mis

à la disposition par le prêteur. Ainsi, tout ce qui est payé par le débiteur en plus du

montant prêté, que ce soit au cours du contrat de prêt ou à son échéance, est considéré

fiscalement comme un intérêt et imposable à ce titre.

Ceci ne recouvre en principe pas les intérêts de retard, qui ne sont dus que si le contrat

n’est pas exécuté correctement (en général parce que la somme prêtée ou due pour un

autre motif, n’est pas remboursée à temps).

Il arrive toutefois exceptionnellement qu’un intérêt de retard soit taxable comme revenu

mobilier.

À suivre la jurisprudence de la Cour de cassation, pour qu’un intérêt de retard soit

considéré comme un revenu mobilier, il faut que soit présente, dans le chef du créancier,

une volonté délibérée d’engager le capital et de lui faire produire un revenu. L’objectif du

créancier doit donc être de percevoir un revenu plutôt que d’obtenir le remboursement du

capital158.

Sur base de ce critère, les intérêts judiciaires ne sont pas des revenus mobiliers imposables

dans le chef des personnes physiques. Ils constituent en effet simplement des dommages et

intérêts réparant le préjudice résultant d’un retard de paiement159.

157 Cass., 26 octobre 1937, Pas., 1937, I, pp. 316 à 318. 158 Voyez Cass., 7 novembre 1967, B.C., 1968, n° 457, pp. 1706 à 1711. 159 Cass., 3 novembre 1930, Pas., 1930, I, p. 350 ; Cass., 12 mars 1963, Pas., 1963, I, p. 765.

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Les intérêts judiciaires sont fixés par la loi. Ils s’appliquent lorsque les parties à un acte

n’ont pas convenu d’un autre taux. Si tel est le cas, on appelle les intérêts dus des « intérêts

conventionnels ».

Mais de manière similaire, les intérêts conventionnels ne sont pas considérés comme étant

constitutifs d’un revenu mobilier imposable lorsqu’ils compensent un préjudice, à l’inverse

de ceux qui rémunèrent un financement.

b) Il peut s’agir aussi des intérêts attribués par une société en raison des avances qui lui ont

été consenties (dans les limites exposées ci-dessus), ainsi que de la commission qui rétribue

un prêt d’actions (une personne remet des actions à une autre qui s’engage à les restituer,

celles-ci ou d’autres identiques, à une date future fixée).

Le prêt d’actions peut effectivement donner lieu à une commission visant à le rémunérer.

L’objet de cette commission réside dans la compensation du risque lié à l’indisponibilité

des titres prêtés et dans la prise en compte du risque éventuel que l’emprunteur ne restitue

pas les titres à l’échéance du prêt.

C. Intérêts et tous autres produits de titres à revenus fixes ou non

Les intérêts et tous autres produits de titres, à revenus fixes ou variables, sont enfin les

intérêts de « tous les titres négociables représentatifs d’emprunt ou de créance portant

intérêt ou émis avec un escompte, et ce quelles que soient leur forme (titres au porteur, à

ordre ou nominatifs ou titres dématérialisés qui sont exclusivement inscrits en compte), leur

durée (à court terme, à moyen terme ou à long terme) et leur qualification (obligation,

certificat de trésorerie, bon de caisse, zéro bond, etc.)160 ».

Deux sous-catégories de titres peuvent être distinguées.

a) Il s’agit, en premier lieu, des titres qui attribuent à leur bénéficiaire un revenu fixe ou

variable.

Contrairement au titre à revenu variable, le titre à revenu fixe comporte un revenu, une

échéance et une valeur connus à l’avance. Il peut s’agir d’obligations par exemple (une

obligation est un titre de créance qui représente un emprunt).

160 Com. I.R., n° 19/2.

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Sont taxables à ce titre non seulement les intérêts stipulés comme tels mais également tous

les autres avantages attribués par une société à son prêteur. Cette première sous-catégorie

concerne en fait l’ensemble des titres dont les revenus ne sont pas capitalisés.

b) Il s’agit, en second lieu, des titres émis à un « taux zéro » avec capitalisation des intérêts.

Il s’agit de titres qui ne donnent pas lieu à un paiement périodique d’intérêts ; ceux-ci sont

capitalisés jusqu’à l’échéance du titre. Dans cette hypothèse, l’emprunteur, en

rémunération du prêt, rembourse au prêteur un montant plus élevé que celui qu’il a perçu.

C’est le cas des bons de capitalisations ou encore des titres appelés « zero bonds ».

Le bon de capitalisation est un titre dont les intérêts, au lieu d’être payés périodiquement,

sont capitalisés et payés globalement à la dernière échéance, lors du remboursement du

bon.

Le « zero bond » est un titre de créance qui ne porte pas d’intérêt périodique mais qui est

remboursable à une valeur supérieure à sa valeur nominale, la différence représentant

l’équivalent de l’intérêt.

Or, « toute somme payée ou attribuée en sus du prix d’émission » constitue un revenu

mobilier imposable à titre d’intérêt (art. 19, § 2 du C.I.R. 1992).

Section 3. Primes d’émission ou de remboursement

Les revenus imposables comprennent donc non seulement les intérêts mais plus

généralement « toute somme payée ou attribuée en sus du prix d’émission que l’attribution

ait lieu ou non à l’échéance conventionnellement fixée 161».

Il s’agit notamment de la prime d’émission, qui correspond à la différence entre la valeur

nominale du titre et son prix d’émission, c’est-à-dire le prix auquel il a été émis. Il s’agit

également de la prime de remboursement, qui correspond à la différence entre la valeur de

remboursement du titre et son prix d’émission. Ces primes sont considérées fiscalement

comme des compléments d’intérêts.

Le même régime fiscal s’applique au produit des bons de capitalisation et des « zero

bonds ». Ces derniers ne sont imposables au titre d’intérêts qu’au moment du

161 Com. I.R., 261/292.

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remboursement du titre et, le cas échéant, dans le chef de chacun de ses détenteurs

successifs, en proportion de sa période de détention.

Section 4. Proratisation et titres à revenus fixes

A. Règle de proratisation du revenu

Le produit d’un titre à revenu fixe, qu’il s’agisse d’un intérêt ou de la différence entre le

montant remboursé et le montant payé, est imposable, si le titre a changé de mains, dans le

chef de chaque détenteur successif en proportion de sa période de détention (art. 19, § 2,

al. 2 du C.I.R. 1992). C’est ce que l’on appelle communément la taxation prorata temporis

des revenus de titres à revenus fixes.

Cette règle aligne, pour ce qui concerne les revenus de titres à revenus fixes, l’imposition

du revenu sur l’imputation du précompte, également proportionnelle à la durée de

détention (article 280 du C.I.R. 1992).

Cette dernière s’applique cependant plus largement à tous les revenus mobiliers (autres

que les dividendes), alors que la règle de proratisation du revenu, du moins dans la mesure

où elle est formulée expressément, ne s’applique qu’aux revenus de titres à revenus fixes.

B. Application pratique

Si l’on considère qu’au moment de la cession de titres à revenus fixes entre deux

échéances, il y a attribution ou mise en paiement d’un revenu (au sens de l’art. 267 du

C.I.R. 1992), il n’y a pas lieu pour autant, à cet instant, à la débition du précompte mobilier.

Mais dans la mesure où le prorata d’intérêts qui est bonifié au vendeur demeure imposable

dans son chef, se pose la question, pour les contribuables particuliers (voy. l’art. 362bis du

C.I.R. 1992), de savoir quand est effectivement imposable ce prorata d’intérêts.

Selon le ministre des Finances, la question ne se pose pas pour les intérêts de titres à

revenus fixes d’origine belge ayant été bonifiés nets de précompte au vendeur. Ceux-ci ne

doivent pas être déclarés puisque, pour ce qui les concerne, le précompte mobilier a déjà

été retenu.

La question demeure toutefois posée pour les intérêts de titres à revenus fixes d’origine

étrangère n’ayant pas été encaissés à l’intervention d’un intermédiaire belge. Puisqu’ils

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n’ont pas été précomptés, ils doivent être déclarés par leur bénéficiaire pour être soumis à

l’imposition distincte au même taux que celui du précompte mobilier162.

En ce qui concerne le moment où cette déclaration doit avoir lieu, certains considèrent

qu’elle doit intervenir au moment où les revenus sont censés avoir été attribués, c’est-à-

dire lors de la cession du titre, à l’occasion de laquelle un prorata d’intérêts est bonifié par

l’acheteur au vendeur163.

Pour d’autres, il ne peut y avoir de revenu taxable pour personne tant que le débiteur n’a

pas payé d’intérêts, c’est-à-dire avant l’échéance.

En pratique, l’acheteur et le vendeur veillent généralement à ce que le montant du

précompte mobilier sur la partie des revenus correspondant à la période de détention du

vendeur soit déduit anticipativement du prix de cession du titre, puisque l’acheteur

supporte au final la totalité du précompte et ne peut l’imputer qu’en proportion de la

période durant laquelle il en a eu la pleine propriété.

Section 5. Produits divers de dépôts d’argent (swaps et primes d’options)

La loi fiscale assimile également à un intérêt le produit résultant d’une opération qui

consiste dans la remise d’une somme d’argent moyennant l’engagement de la contrepartie

à l’opération de remettre une somme d’argent d’un montant supérieur à celui convenu au

départ (art. 19, § 3 du C.I.R. 1992). Les revenus correspondent alors à la différence entre

ces deux sommes, quelles qu’en soient les modalités de calcul et de détermination.

Par exemple, si A remet à B une somme de 20.000 € et qu’il est convenu que B doive

remettre à A, dans deux ans, une somme supérieure, 25.000 € par exemple. Dans ce cas, à

l’échéance, 5.000 € (25.000 – 20.000) seront traités fiscalement comme un intérêt.

Les conditions suivantes sont cumulativement requises pour qu’une opération soit

imposable à ce titre :

- L’opération consiste en la remise d’une somme d’argent par une partie à une autre (la

contrepartie) ;

162 voyez Q. n° 497 du 22 septembre 1993, B.C., 1994, n° 738, pp. 1089 et 1090. 163 R. KAISER, La fiscalité belge des titres à revenus fixes – Régime classique versus clearing fiscal X/N, Bruylant,

1999, pp. 130 et 131, n° 221.

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- La remise de cette somme d’argent doit se faire moyennant un engagement de la

contrepartie à l’opération (l’engagement doit provenir de la contrepartie elle-même,

et non d’un tiers) ;

- L’engagement de la contrepartie consiste en la remise d’une somme d’argent d’un

montant supérieur au montant initialement remis ;

- Les parties ont convenu que l’opération se dénoue à un moment déterminé ;

- L’opération ne comporte aucun risque (l’existence de la plus-value, son montant et le

moment de sa réalisation sont fixés à l’avance).

Dans les faits, cette disposition a pour objet de combattre les mécanismes mis en place

dans le but de transformer des revenus mobiliers imposables en plus-values non

imposables164.

Ainsi, la technique du « swap », lorsqu’elle est utilisée à des fins fiscales, consiste à

acquérir, à concurrence des sommes dont l’épargnant dispose, de l’or ou des devises, et de

convenir à terme le rachat de cet or ou de ces devises pour un prix supérieur au prix initial,

avec une différence correspondant en fait à l’intérêt sur les sommes ayant servi à

l’acquisition de l’or. Cette différence de prix est taxable à titre d’intérêt lorsque le prix de

revente de l’or est garanti.

Il s’agit en fait d’un « faux swap » puisque le « vrai swap » est une opération de couverture

des risques dont le résultat n’est pas connu à l’avance. À ce titre, il n’est pas constitutif d’un

revenu mobilier imposable.

De manière générale, la situation visée est donc celle dans laquelle il existe un placement

sans risque en raison de l’engagement d’une partie de rétrocéder à une autre un intérêt

convenu à l’avance.

Section 6. Intérêts de dépôts d’épargne et autres exonérations

La première tranche de 625 € indexés (actuellement 9.40 €)165 d’intérêts de dépôts

d’épargne (carnets de dépôts, livrets d’épargne) effectués auprès des banques et

d’institutions assimilées en Belgique, ne sont pas considérés comme des revenus mobiliers

164 Voyez G. KLEYNEN et B. COLMANT, « Les aspects fiscaux des instruments financiers dérivés », J.D.F., 1995,

p. 65. 165 Modifiée par la loi programme du 25 décembre 2017, M.B. 29 décembre 2017

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et sont donc exonérés d’impôts, sous réserve du respect de conditions déterminées (art. 21,

5° du C.I.R. 1992).

Ces revenus mobiliers dépassant cette tranche sont taxés distinctement au taux de 15 %.

Auparavant, l’exonération étant limitée à 1.880 € par exercice imposable, le contribuable

doit déclarer, au titre de revenus n’ayant pas été soumis au précompte mobilier, les revenus

résultant de tels dépôts d’épargne qui dépassent le montant exonéré d’impôt et qui n’ont

pas été soumis au précompte, afin qu’ils soient taxés distinctement au taux de 15 %.

Dans la pratique, certains contribuables ouvrent cependant plusieurs carnets dans des

banques différentes et omettent, volontairement ou involontairement, de déclarer les

excédents d’intérêts qu’ils perçoivent, profitant ainsi indûment de l’exonération accordée.

Depuis l’exercice d’imposition 2013, cette exonération s’applique tant aux intérêts payés

par les banques belges que par les banques établies dans un autre Etat membre de l’EEE

(article 170 de la loi du 25 avril 2014 portant des dispositions diverses, M.B.07.05.2014).

La Belgique a ainsi mis sa législation en conformité avec les enseignements de la Cour

européenne de justice qui avait condamné le système belge d’imposition des revenus

d’épargne au motif que « en instaurant et en maintenant un régime établissant une

imposition discriminatoire des intérêts payés par les banques non-résidentes, résultant de

l’application d’une exonération fiscale réservée uniquement aux intérêts payés par les

banques résidentes », le législateur belge avait enfreint la libre circulation des capitaux au

sein de l’Union européenne (C.J.U.E., 6 juin 2013, aff. C-383/10,

http://www.curia.europa.eu). Faisant suite à l’arrêt de la Cour européenne de justice et

pour les mêmes motifs que ceux adoptés par celle-ci, la Cour constitutionnelle, dans un

arrêt du 23 janvier 2014, avait également déclaré contraire à la Constitution le régime belge

en ce qu’il réservait un taux d’imposition favorable uniquement aux intérêts payés par les

banques résidentes, et non par les banques non-résidentes. 166.

L’article 21 du Code prévoit encore d’autres types d’exonérations, par exemple en faveur

des revenus des fonds publics belges et des emprunts de l’ex-Congo belge qui ont été émis

en exemption d’impôts (art. 21, 3° du C.I.R. 1992).

La Loi programme du 25 décembre 2017 a introduit une nouvelle exonération pour la

première tranche de 420 euros (montant indexé sur base du coefficient d’indexation pour

166 C.C., 23 janvier 2014, n° 7/2014, Juridat.

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l’EI 2018 : 627 euros) de dividendes sur actions ou parts, qu’il s’agisse de revenus de source

belge ou étrangère. (Art. 21, al. 1er, 14° du CIR 92).

Cette exonération porte donc sur les dividendes visés à l’article 18, alinéa 1er, 1°, à

l’exception des dividendes distribués par des constructions juridiques, des dividendes

d’organisme pour placement collectif et de dividendes perçus par l’intermédiaire de fonds

communs de placement ou de constructions juridiques.

Selon le Gouvernement, cette mesure a pour but d’encourager les épargnants à investir

directement dans des entreprises

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Section 7. Intérêts de créances hypothécaires, intérêts attribués à des investisseurs

professionnels et exonérations de précompte mobilier

Certaines catégories d’intérêts font l’objet d’une renonciation à la perception du

précompte mobilier mais doivent être déclarés par leur bénéficiaire (art. 313 du C.I.R.

1992).

C’est le cas des intérêts de créances hypothécaires, dont le bénéficiaire est connu par

l’inscription hypothécaire, à l’exclusion des obligations hypothécaires (voy. les art. 107, § 2,

7° et 113, § 2, 3° de l’AR/C.I.R. 1992).

Une créance dite « hypothécaire » est une créance qui s’accompagne d’une hypothèque,

c’est-à-dire d’une garantie, que détient le créancier sur un actif immobilier du débiteur,

garantissant ainsi le créancier de la défaillance éventuelle du débiteur. Si le débiteur ne

rembourse pas le montant de sa dette, le créancier devient propriétaire du bien et peut le

vendre pour voir rembourser sa créance.

Les revenus de créances et prêts non obligataires attribués à des investisseurs

professionnels sont également exonérés de précompte mobilier (voy. l’art. 107, § 2, 9°, c) de

l’AR/C.I.R. 1992). Pour ces investisseurs, qui se caractérisent, par opposition aux

épargnants privés, par l’affectation des capitaux productifs des revenus à l’exercice de leur

activité professionnelle, le revenu est un revenu professionnel qui n’est donc pas à déclarer

à titre de revenu mobilier (art. 105, 4° de l’AR/C.I.R. 1992).

Section 8. Revenus du leasing immobilier et de droits assimilés

A. Notions

Le droit de superficie a pour effet de conférer à son titulaire (le superficiaire), moyennant

le paiement de redevances à titre de loyer, un droit de bâtir sur un fonds ou, plus

généralement, sur un bien immeuble appartenant à autrui (le tréfoncier), pendant une

durée déterminée n’excédant pas 50 ans. La propriété du fonds ou du bâtiment sur lequel

le bien est construit est réservée à son propriétaire (le tréfoncier).

À l’expiration du droit de superficie, le propriétaire du fonds (le tréfoncier) doit en

principe payer le superficiaire pour les constructions qu’il a érigées et que le tréfoncier

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récupère. Les parties peuvent toutefois prévoir que le tréfoncier n’indemnise pas le

superficiaire pour les travaux ainsi réalisés.

De son côté, l’emphytéose est un droit qui porte sur un fonds pour une durée comprise

entre 27 et 99 ans. La durée maximale du droit d’emphytéose est donc plus longue que

celle du droit de superficie.

Si le titulaire d’un droit d’emphytéose (l’emphytéote) peut également ériger des

constructions sur le fonds d’autrui (le tréfoncier), en contrepartie du paiement d’un loyer

dénommé « canon », le principe prévoit que le tréfoncier ne doit pas indemniser

l’emphytéote à la fin du droit d’emphytéose pour les constructions qu’il a érigées.

B. Modalités d’imposition

Les canons emphytéotiques et les redevances d’un droit de superficie (ou de contrats

immobiliers similaires) sont en principe considérés comme des revenus immobiliers et

imposables comme tels à titre de revenus immobiliers.

Le droit fiscal considère toutefois, à l’instar du droit comptable, comme des revenus

mobiliers, et non plus comme des revenus immobiliers, les produits découlant de

conventions de location-financement (le leasing) ou organisant des droits similaires (art.

19, § 1er, 2° du C.I.R. 1992 et art. 107, § 1er, 7° de l’AR/C.I.R. 1992).

Ce régime (qui limite la taxation à 30 % du revenu) est pratiquement toujours beaucoup

plus avantageux que l’imposition à titre de revenus immobiliers.

Dans ce cadre, le contrat de location-financement doit être distingué du contrat de

location simple.

Le contrat de location simple est un accord par lequel le bailleur cède au preneur, pour une

période déterminée, le droit d’utilisation d’un bien en échange d’un paiement ou d’une

série de paiement.

Le contrat de location-financement est un contrat de location ayant pour effet de

transférer au preneur la quasi-totalité des risques et des avantages inhérents à la propriété

d’un bien. Le transfert de propriété peut intervenir ou non au terme du contrat.

Le contrat de location-financement présente généralement les caractéristiques suivantes :

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- A achète un bien selon les instructions précises de B.

- A conclut avec B un contrat de location du bien, pendant une durée correspondant

généralement à l’estimation de la durée de vie économique du bien, le contrat n’étant

pas résiliable durant cette période (en d’autres mots : il ne peut y être mis fin).

- B peut généralement acquérir le bien en fin de bail moyennant un prix fixé d’avance,

en vertu d’une option d’achat convenue dans le contrat conclu entre A et B.

Si elles satisfont à certaines conditions, les conventions d’emphytéose et de superficie sont

fiscalement considérées comme des contrats de location-financement.

Ce n’est que dans le respect de ces conditions que les revenus de conventions

d’emphytéose et de superficie échappent à la qualification de revenus immobiliers pour

être considérés comme des revenus mobiliers imposables comme tels (art. 10, § 2 du C.I.R.

1992).

C. Conditions requises pour la qualification de « revenus mobiliers »

Les revenus doivent en premier lieu correspondre à des sommes obtenues pour la

concession d’un droit d’usage sur un bien immobilier bâti en vertu d’une convention non

résiliable d’emphytéose ou de superficie (ou de droits immobiliers similaires167).

Les redevances échelonnées prévues au contrat doivent couvrir, d’une part, les intérêts et

les charges de l’opération et, d’autre part, s’il s’agit d’un bâtiment nouveau, la

reconstitution intégrale du capital investi par le propriétaire dans la construction ou, s’il

s’agit d’un bâtiment existant, la valeur vénale de ce bâtiment.

Au terme du contrat, l’utilisateur doit, par ailleurs, se voir transférer de plein droit la

propriété de la construction ou à tout le moins disposer d’une option d’achat en ce sens.

Sous réserve du respect de ces conditions, le revenu mobilier est constitué par la partie des

redevances qui dépasse celle qui sert à la reconstitution du capital employé à la

construction ou de la valeur vénale du bâtiment existant (art. 19, § 1er, 2° du C.I.R. 1992).

Le revenu mobilier ainsi calculé n’est pas soumis au précompte mobilier et doit être

déclaré par son bénéficiaire (art. 313, 5° du C.I.R. 1992).

167 Dans un arrêt récent du 24 avril 2015, la Cour de cassation a précisé que par la notion de « droits

immobiliers similaires », sont visés les droits d'usage à long terme des immeubles bâtis, qu'ils aient

un caractère de droit personnel ou de droit réel. (R.G. n° F.12.0087.N)

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121

Ce régime fiscal traduit en fait l’idée générale selon laquelle un contrat de location-

financement représente une opération de financement par laquelle le donneur de leasing

finance la construction ou l’acquisition d’un immeuble.

Suivant ce point de vue, la redevance versée se compose de deux parties : une première

partie correspond à la reconstitution du capital investi et une seconde partie correspond à

des intérêts.

D. Différence entre droit fiscal et droit comptable

Le transfert de la propriété ou l’existence d’une option d’achat est une condition de la

location-financement immobilière qui n’existe qu’en droit fiscal, et non en droit

comptable. En droit comptable, le critère déterminant d’une opération de location-

financement immobilière est la reconstitution du capital investi par les redevances payées

en cours de contrat (condition dite du « full pay out »).

C’est ainsi que certaines opérations d’usage à long terme d’un immeuble peuvent être

traitée d’un point de vue comptable comme une location-financement et d’un point de vue

fiscal comme une location simple, à défaut d’option d’achat ou de transfert de la propriété

à l’issue du contrat.

Section 9. Revenus compris dans certains bons d’assurance

A. Notion

Parallèlement aux produits d’épargne classiques, il existe d’autres formes de produits

d’investissement. Ces solutions se présentent notamment sous la forme de contrats

d’assurance-vie ou de bons d’assurance.

Le bon d’assurance est un produit de placement proposé dans le cadre de l’ouverture d’une

assurance-vie individuelle. Le bon d’assurance a généralement pour caractéristique que les

intérêts produits sont automatiquement réinvestis chaque mois au même taux. Les intérêts

sont donc capitalisés jusqu’au terme du contrat, moment auquel ils sont perçus par leur

bénéficiaire.

L’assurance-vie est un contrat par lequel l’assureur, contre le paiement d’une ou de

plusieurs primes par le preneur du contrat, s’engager à payer une certaine somme au(x)

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122

bénéficiaire(s) du contrat, à savoir ce dernier ou à d’autres personnes désignées par lui, à

une date déterminée par le contrat ou au décès de l’assuré.

B. Modalité d’imposition

Sous le respect de certaines conditions, les revenus produits par le bon d’assurance (et les

produits y assimilés) sont imposables comme des intérêts (art. 19, § 1, 3°, a) du C.I.R.).

Sont plus précisément considérés comme des intérêts les revenus versés en cas de vie de

l’assuré et qui sont afférents à un contrat d’assurance-vie que le contribuable a conclu

individuellement, qui prévoit un rendement garanti et dont aucune des primes n’a donné

lieu à un avantage fiscal (soit à titre de « déduction pour habitation unique », soit à titre de

« réduction d’impôt pour épargne à long terme »).

Si le bon d’assurance réunit ces conditions, la base imposable au titre de revenus mobiliers

est constituée de la différence entre, d’une part, les sommes payées ou attribuées, à

l’exclusion des participations bénéficiaires exonérées (conformément à l’art. 40 du C.I.R.

1992), et, d’autre part, le total des primes versées.

La participation bénéficiaire est la part des bénéfices que l’assureur distribue à ses assurés.

Cette participation bénéficiaire s’ajoute au rendement du produit d’assurance et n’est pas

en principe considérée comme un intérêt imposable.

Le montant imposable en application de cette formule ne peut cependant être inférieur à

une certaine limite. Cette limite est le montant qui correspond à la capitalisation des

intérêts au taux de 4,75 % l’an, calculés sur le montant total des primes, même si le taux

offert par l’assureur est plus faible (art. 19, § 4 du C.I.R. 1992).

C. Exonération

Par exception, les revenus d’un bon d’assurance peuvent être exonérés s’ils respectent

certaines conditions (art. 21, 9° du C.I.R. 1992). Il faut alors que le bon d’assurance soit

souscrit par une personne physique et que :

- Soit le contribuable qui a souscrit le contrat d’assurance-vie s’est assuré

exclusivement sur sa tête, les avantages du contrat sont stipulés en sa faveur en cas de

vie et le contrat prévoit le paiement au décès d’un capital équivalent à 130 % au

moins du total des primes versées ;

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123

- Soit le contrat est conclu pour une durée supérieure à huit ans et les capitaux ou

valeurs de rachat sont effectivement payées plus de huit années après la conclusion

du contrat168.

La Cour de cassation169 a précisé, dans un arrêt du 19 janvier 2012, la manière dont le délai

devait être calculé. Ni l’article 21,9° du CIR, ni aucune autre disposition du C.I.R. 1992 ne

précisent le point de départ et le point d’arrivée du délai de huit ans. Selon la Cour de

cassation, la notion d’année doit dès lors s’interpréter en fonction du sens que lui donne

l’usage linguistique courant, à savoir une période de douze mois. Une période de huit ans

commence dès lors le premier jour de cette période à partir de la date convenue, par

exemple, le 1er juillet 2000 à 0h.00 et finit huit ans plus tard, à savoir le 30 juin 2008 à

24h.00.

La doctrine majoritaire considère que le texte légal impose uniquement que le contrat soit

conclu pour une durée supérieure à huit ans, sans exiger l’obligation pour chaque prime

d’être investie dans le contrat pendant la même durée170.

Par conséquent, l’exonération paraît être acquise également pour les

revenus découlant de primes additionnelles versées au cours des huit

dernières années lorsque la liquidation du capital ou le rachat s’opère au

moins huit ans et un jour après la conclusion du contrat.D. La question

des rachats partiels

Selon le ministre des Finances, l’exception d’exonération ne s’applique pas en cas de rachat

partiel effectué au cours des huit premières années du contrat.

Un rachat d’assurance permet à l’assuré de demander à l’assureur de reprendre une partie

(dans le cadre d’un rachat partiel) ou la totalité de la valeur du contrat d’assurance

(correspondant aux primes versées et au produit de ces primes jusqu’alors). Cette

hypothèse se rencontre lorsqu’un particulier a besoin de liquidités pour des raisons

privées.

168 Sur le mode de calcul de cette période, voyez K. JANSSENS, « Cassatie hakt knoop door over lopptijd acht

jaar », Fisc. act., 2012, n° 8, pp. 6-7. 169 Cass., 19 janv. 2012 , R.G. n° F.11.0032.N, www.fiscalnet.be, www.fiscalnet.be, www.fiscalnet.be, www.fiscalnet.be 170 Voyez. notamment : J.-P. BOURS et C. DEVOET, « Impôts sur les revenus. Le régime fiscal des plans de

pension complémentaires pour indépendants », Rép. not., t. XV, l. IV/5, Larcier, 2007, p. 60, n° 46 ; P.

GLINEUR, « Assurances en droit fiscal – Qualification, disqualification et requalification », Bull. Ass., 2005,

dossier II, n° 48 et 49).

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124

Selon le ministre des Finances, la taxation doit donc être appliquée sur les intérêts que ces

rachats comprennent. Des doutes demeurent toutefois quant à la détermination de la base

imposable de pareils rachats.

Si l’on fait une lecture littérale du Code des impôts sur les revenus, l’assiette minimum

imposable correspondrait à la capitalisation des intérêts, au taux de 4,75 % l’an, calculés sur

le montant total des primes versées (art. 19, § 4, in fine du C.I.R. 1992). On ne tiendrait

donc pas compte du montant du rachat. Appliquée à la lettre, ce régime est donc

particulièrement défavorable au contribuable.

La circonstance que de tels rachats partiels aient été réalisés n’a par contre aucune

incidence sur le solde liquidé ou racheté plus de huit ans après la souscription du contrat,

qui continue ainsi à bénéficier de l’exonération dans le respect des conditions visées ci-

dessus (art. 21, 9° du C.I.R. 1992)171.

Section 10. Produits de contrats d’assurance liés à un fonds d’investissement

A. Notion

Certains contrats d’assurance-vie sont associés à des fonds d’investissement (produits dits

de la « branche 23 »). Dans le cadre de tels contrats, les primes versées par l’assuré sont

investies dans un ou plusieurs fonds d’investissement.

L’assureur est chargé de payer aux bénéficiaires du contrat d’assurance les parts du ou des

fonds, soit au décès de l’assuré, soit, en cas de vie, à une date déterminée au préalable. La

valeur de ces parts peut être fixée à l’avance par l’assureur, garantissant ainsi à l’assuré un

rendement fixe.

B. Modalités d’imposition

Sont également assimilés à des intérêts les revenus versés en cas de vie et qui sont afférents

à des contrats d’assurance-vie que le contribuable a conclus individuellement, qu’il

s’agit de contrats liés à un ou plusieurs fonds d’investissement et que leur souscription

comporte des engagements déterminés quant à leur durée et à leur montant ou à leur taux

de rendement (art. 19, § 1, 3°, b) du C.I.R. 1992).

171 Quest. Orale de M. Gustin, CRIV 52, Chambre, Com. 620, p. 11.

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En d’autres mots, si la souscription comporte des engagements déterminés quant à leur

durée et leur montant ou à leur taux de rendement, les produits de contrats d’assurance-

vie liés à des fonds d’investissement sont traités comme des intérêts imposables, lorsqu’ils

sont versés en cas de vie de l’assuré (et non à son décès).

Les revenus correspondent alors à la différence entre, d’une part, les sommes payées ou

attribuées, à l’exclusion des participations bénéficiaires exonérées (conformément à l’art.

40 du C.I.R. 1992), et, d’autre part, le total des primes versées (art. 19, § 4, al. 1 du C.I.R.

1992).

C. Exception

Par exception, les produits de tels contrats ne sont pas considérés comme des revenus

mobiliers et, échappent au prélèvement du précompte mobilier s’ils sont souscrits par une

personne physique et que :

- Soit le contribuable qui a souscrit le contrat d’assurance-vie s’est assuré

exclusivement sur sa tête, les avantages du contrat sont stipulés en sa faveur en cas de

vie et le contrat prévoit le paiement au décès d’un capital équivalent à 130 % au

moins du total des primes versées ;

- Soit le contrat est conclu pour une durée supérieure à huit ans et les capitaux ou

valeurs de rachat sont effectivement payées plus de huit années après la conclusion

du contrat (art. 21, 9° du C.I.R. 1992)172.

Section 11. Revenus provenant de certaines SICAV de capitalisation

A. Notion

Comme un Fonds Commun de Placement (FCP), la SICAV permet à plusieurs personnes

(parfois un très grand nombre) d’investir ensemble dans des valeurs mobilières. A la

différence du FCP, la SICAV est dotée de la personnalité juridique.

Pour permettre aux actionnaires d’entrer et de sortir aisément de la structure, la SICAV a

un capital variable. Les actionnaires ne doivent pas, pour se défaire de leurs parts, les

172 En outre, une taxe de 2 % est applicable aux primes des contrats d’assurance-vie, mais il ne s’agit pas d’un

impôt sur le revenu.

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126

vendre à des tiers ; ils peuvent les rendre à la SICAV contre paiement de la valeur de leur

quote-part dans l’investissement commun.

Il existe des SICAV de distribution, qui distribuent des dividendes, qui sont taxables.

D’autres SICAV ne distribuent pas de dividendes mais capitalisent leurs bénéfices. Ce sont

des SICAVS de capitalisation.

A. Régime d’imposition

Les revenus (dividendes, intérêts, plus-values) recueillis par les SICAV dites « de

capitalisation » ne sont pas distribués, ce qui présente l’avantage pour l’investisseur d’éviter

de percevoir un revenu périodique taxable, comme c’est le cas pour les SICAV dites « de

distribution ».

Dans une SICAV de capitalisation, ce n’est que lorsque l’investisseur revend les titres de la

SICAV de capitalisation qu’il possède qu’il réalise éventuellement une plus-value.

Si l’investisseur revend ses parts à un tiers, la plus-value éventuellement réalisée n’est pas

imposable, pour autant que l’opération relève de la gestion normale du patrimoine privé de

l’investisseur (ce qui est pratiquement toujours le cas).

La SICAV peut également procéder au rachat de ses propres parts auprès de l’investisseur

ou au partage total ou partiel de son avoir social. Dans une telle situation, la plus-value

éventuellement réalisée par l’investisseur est en principe exemptée (art. 21, 2° du C.I.R.

1992).

Cette règle, qui déroge à l’imposition de principe des revenus obtenus à l’occasion de

rachats d’actions propres (art. 18, al. 1, 2°ter du C.I.R. 1992), connaît néanmoins deux

exceptions importantes. Ces exceptions concernent ce que l’on appelle les SICAV à

rendement garanti et les SICAV de capitalisation investissant en créances.

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127

B. SICAV à rendement garanti

La première exception concerne les revenus distribués par des SICAV dites « à rendement

garanti », revenus qui sont donc considérés par le droit fiscal comme des intérêts

imposables comme tels173.

Pour que cette exception trouve application, il est requis que la SICAV se soit engagée,

auprès de l’investisseur qui lui cède ses titres, au niveau du montant de remboursement de

ces titres ou au niveau de leur taux de rendement, et que l’engagement de la SICAV porte

sur une période inférieure ou égale à huit ans (art. 19, § 1er, 4° du C.I.R. 1992). Dans ce cas,

le bénéfice réalisé à la sortie est un revenu mobilier taxable.

C. SICAV de capitalisation investissant en créances

Si la SICAV investit plus de 25 % de ses avoirs en créances (obligations, bons de caisse ou

autres créances), la plus-value réalisée lors du rachat des parts par la SICAV est un revenu

mobilier taxable au taux de 25 %.

Dans les autres cas, (par exemple les SICAV qui investissent au moins 75 % en actions), la

plus-value est exonérée (comme le serait une plus-value sur actions).

Section 12. La composante en intérêts reçue en cas de rachat de parts ou de partage

de l’avoir social de certains organismes de placement collectif (OPC)

La notion d’« intérêt » est donc élargie à la partie correspondant à la composante en

intérêts des sommes reçues en cas de rachat de parts propres mais également en cas de

partage total ou partiel de l’avoir social de certains OPC investissant en valeurs mobilières

(art. 19bis du C.I.R. 1992).

Les organismes visés sont actuellement ceux qui investissent plus de 25 % de leur

patrimoine, directement ou indirectement, en créances et dont les statuts ou le règlement

ne prévoient pas la distribution de leurs revenus nets (formule de capitalisation).

Ce pourcentage de 25 % est fixé en fonction de la politique en matière d’investissement

telle qu’elle est définie dans le règlement ou dans les statuts de l’OPC et, à défaut, en

173 S. DOUENIAS, « Bons d’assurance, SICAV à rendement fixe et précompte mobilier – Commentaire de la loi

fiscale du 20 mars 1996 », R.G.F., 1996, p. 269.

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128

fonction de la composition réelle de son portefeuille d’investissement. À défaut

d’information sur le pourcentage du patrimoine de l’organisme investissant dans des

créances, ce pourcentage est censé être égal à 100 %.

Cette disposition institue ce que l’on appelle plus communément la « taxe belge sur

l’épargne ». Son régime d’imposition ainsi que les modalités de détermination du montant

imposable sont pour le moins complexes pour le contribuable et dépassent le cadre du

présent cours.

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129

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 5555.... LLLLES LOYERS ET LESES LOYERS ET LESES LOYERS ET LESES LOYERS ET LES REDEVANCESREDEVANCESREDEVANCESREDEVANCES

Section 1. Nature du revenu

Sont encore considérés comme des revenus mobiliers les revenus perçus en contrepartie

de la location, de l’usage ou de la concession de biens mobiliers corporels ou incorporels.

Ils sont généralement dénommés « loyers » lorsqu’ils visent des biens corporels et

« redevances » lorsqu’ils visent des biens incorporels.

Les loyers peuvent être de nature diverse. Il peut s’agir tant du produit de la location de

biens meubles meublant une habitation que du produit de la mise à disposition d’un

emplacement, ou du simple droit de tenir un débit de boisson ou un point de restauration,

lors d’un festival ou une exposition174.

Quant aux redevances versées pour la concession d’un droit mobilier, elles visent

notamment les revenus provenant de la concession d’une licence, d’un brevet, d’une

marque de fabrique ou d’un procédé de fabrication.

Pour rappel, les revenus des biens mobiliers qui sont obtenus dans le cadre de l’exercice

d’une activité professionnelle acquièrent la nature de revenus professionnels, sauf en ce qui

concerne les revenus visés par l’article 17, § 1er, 5° du C.I.R. 1992, à savoir les revenus

relatifs aux droits d’auteur et droits voisins, qui sont considérés comme des revenus

mobiliers s’ils ne dépassent pas 57.080 € (article 37 du C.I.R. 1992).

Section 2. Détermination du revenu net

Le montant imposable correspond au revenu net des loyers et des redevances (art. 22, § 1,

CIR). Ce revenu net est égal au revenu brut diminué des frais exposés en vue d’acquérir ou

de conserver ces revenus (art. 22, § 3 du C.I.R. 1992).

À défaut d’éléments probants pour déterminer le montant de ces frais, les frais déductibles

font l’objet d’une évaluation forfaitaire. Dans ce cas, la détermination du montant net des

loyers et des redevances obéit à des règles particulières (art. 3 à 5 de l’AR/C.I.R. 1992).

174 Voyez Anvers, 13 mars 2012, F.J.F., 2013, liv. 1, p. 73.

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Le pourcentage forfaitaire de charges déductibles du montant brut des revenus est

généralement fixé à 15 % de ce montant. Pour certaines opérations, le forfait est toutefois

plus élevé. Le taux est par exemple de 50 % pour la location de biens meubles garnissant un

immeuble ou un appartement meublé et de 85 % pour la concession du droit de

distribution ou de projection de films.

La location d’immeubles meublés pour un loyer global peut poser le problème de la

ventilation entre, d’une part, la partie du loyer qui se rapporte à l’immeuble (imposée

comme un revenu immobilier) et, d’autre part, la partie du loyer qui se rapporte aux

meubles qui le garnissent (imposée comme un revenu mobilier).

En l’absence de contrat de bail enregistré auprès du bureau de l’enregistrement local et qui

précise la ventilation du loyer, 40 % du loyer global est censé représenter le revenu brut tiré

de la location des biens meubles (art. 4, 1° de l’AR/C.I.R. 1992). Comme les charges sont

dans ce cas, et à défaut d’éléments probants, égales à la moitié du revenu brut, le revenu

mobilier net est égal à 20 % du loyer global.

Exemple

Un immeuble est loué meublé pour un loyer annuel de 20.000 €. Le contrat de bail n’a pas

été enregistré et ne précise pas la méthode de ventilation du loyer.

Le revenu brut mensuel tiré de la location des meubles est de : 20.000 € x 40 % = 8.000 €.

Le revenu net mensuel tiré de la location des meubles est de : 8.000 € x 50 % = 4.000 €.

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 6666.... LLLLES ES ES ES RENTES VIAGÈRES OU TRENTES VIAGÈRES OU TRENTES VIAGÈRES OU TRENTES VIAGÈRES OU TEMPORAIRESEMPORAIRESEMPORAIRESEMPORAIRES

Section 1. Notions

La rente peut être définie comme le revenu périodique d’un bien ou d’un capital dont le

montant est déterminé à l’avance. Si elle est fixée pour une durée déterminée, on l’appelle

« rente temporaire », alors que si elle est fixée pour le reste de la vie humaine, on l’appelle

« rente viagère ».

L’exemple suivant permet de mieux aborder ce mécanisme.

Dans une vente d’immeuble moyennant le paiement d’une rente viagère, un vendeur cède

son immeuble à un acheteur qui l’accepte et qui s’engage, en contrepartie, à payer un prix.

Au lieu de payer le prix d’achat du bien en une fois, comme il y a lieu généralement dans

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une vente ordinaire, l’acquéreur paie le prix en plusieurs tranches, jusqu’au jour du décès

du vendeur par exemple. Il s’agit alors d’une rente viagère constituée sur la tête du

vendeur.

Section 2. Assimilation partielle à des revenus mobiliers

Le Code des impôts sur les revenus considère que constitue un revenu mobilier imposable

une partie du produit des rentes viagères ou temporaires. Cette assimilation s’explique

surtout par la composante financière qui correspond à l’étalement du paiement du prix.

Pour être qualifiées pour partie de revenus mobiliers, les rentes ne doivent toutefois pas

être des pensions au sens du droit fiscal et elles doivent avoir été constituées à titre

onéreux, après le 1er janvier 1962, à charge de personnes morales ou d’entreprises

quelconques (art. 17, 4°, CIR).

Ne sont dès lors pas considérés comme des revenus mobiliers les rentes constituées à titre

gratuit, les rentes constituées avant le 1er janvier 1962, les rentes à charge d’un particulier

personne physique ainsi que les rentes ayant le caractère d’une pension au sens du droit

fiscal.

Ainsi, dans l’exemple ci-dessus, si l’acheteur de l’immeuble, qui est le débiteur de la rente

(qui en a donc la charge), est une personne physique n’exploitant pas une entreprise, le

montant de la rente ne peut être considéré comme un revenu mobilier imposable à l’impôt

des personnes physiques dans le chef du vendeur.

Pour rappel, la convention conclue à titre onéreux s’oppose à la convention conclue à titre

gratuit. Alors que cette dernière est consentie dans une intention libérale (une donation

par exemple), la convention à titre onéreux est un contrat dans lequel la valeur de la

prestation que doit exécuter une partie est représentée par la valeur de la prestation que

l’autre doit fournir en contrepartie.

Section 3. Modalités d’imposition

Selon le cas, le montant imposable à titre de revenu mobilier est limité à 3 % de la valeur du

capital ou de la valeur retenue pour la perception du droit d’enregistrement. Cette dernière

hypothèse vise la situation où une rente est versée en contrepartie du transfert de la

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propriété, de la nue-propriété ou de l’usufruit d’un bien immobilier (art. 20 CIR ; art. 45 à

50 C. Enr.).

Ainsi, pour la vente d’un immeuble par exemple, la valeur retenue pour la perception du

droit d’enregistrement correspond en principe au montant du prix et des charges stipulés

dans l’acte de vente, sauf si la valeur vénale de l’immeuble est supérieure. La valeur vénale

est la valeur de l’immeuble qui pourrait être obtenue dans des conditions normales de

vente.

Exemple

Monsieur A vend à la société B un immeuble. Pour s’acquitter du paiement du prix de

vente, Monsieur A et la société B conviennent que la société B verse à Monsieur A une

rente viagère jusqu’à son décès.

Si le prix de vente de l’immeuble est fixé dans l’acte de vente à 1.000.000 €, la valeur vénale

de l’immeuble est chiffrée à 1.100.000 €.

Le montant imposable à titre de revenu mobilier dans le chef de Monsieur A est donc

de 33.000 € (1.100.000 € x 3 %), et non de 30.000 € (1.000.000 € x 3 %).

Ces modalités d’imposition sont en pratique avantageuses, dans la mesure où le taux sur la

base duquel la rente est calculée et qui correspond à l’étalement de paiement du prix est

habituellement supérieur à 3 %.

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133

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 7777.... LLLLES DES DES DES DROITS DROITS DROITS DROITS D’’’’AUTEURAUTEURAUTEURAUTEUR

Section 1. Généralités

En principe, l’auteur d’une œuvre, littéraire ou artistique par exemple, a seul le droit de la

reproduire, de quelque manière et sous quelque forme que ce soit. Il peut néanmoins en

autoriser la reproduction, l’adaptation ou la traduction. Il peut également la communiquer

au public, la louer ou la prêter.

L’auteur d’une œuvre peut également décider de concéder ces droits pour une certaine

période, à autrui. Le Code des impôts sur les revenus prévoit que les revenus de cette

concession sont alors considérés comme des revenus mobiliers imposables (art. 17, § 1er,

5° du C.I.R. 1992).

Ces revenus conservent leur qualité de revenus mobiliers, et ce, même s’ils sont affectés à

l’exercice de l’activité professionnelle de leur bénéficiaire, sauf dans l’éventualité et dans la

mesure où ils excèdent 37.500 € indexés (ce qui donne 58.720 € pour l’exercice

d’imposition 2017) (art. 37, al. 2 du C.I.R. 1992). Il s’agit d’une particularité propre au

traitement fiscal des droits d’auteur.

À défaut d’apporter la preuve du montant des frais réels, un forfait de frais déductibles des

droits d’auteur est en outre prévu (art. 4 de l’AR/C.I.R. 1992). Il est égal à 50 % de la

première tranche de 10.000 € indexés et à 25 % de la seconde tranche de 10.000 € indexés.

Au-delà, le forfait général de 15 % ne semble pas applicable175.

Bien que les débiteurs de droits d’auteur soient redevables du précompte mobilier (art.

261, 4° du C.I.R. 1992), qu’ils retiennent et versent au Trésor, les droits d’auteur doivent

être déclarés par leur bénéficiaire à l’impôt des personnes physiques. Cette obligation de

déclaration a notamment pour objet de leur appliquer un taux distinct de 15 %, à majorer

de la taxe communale additionnelle (art. 171, 2°bis, 313, 4°, et 466 du C.I.R. 1992).

Dans la plupart des hypothèses, les droits d’auteur sensu lato bénéficient en conclusion

d’une taxation distincte à un taux de 15 %, à majorer de la taxe communale additionnelle,

après déduction des frais. Il n’en va autrement que si et dans la mesure où ils dépassent

58.720€ et ont un caractère professionnel.

175 M.B., 9 décembre 2008.

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134

Section 2. Détermination du caractère professionnel des droits

En ce qui concerne la détermination du caractère professionnel des droits lorsqu’ils

dépassent le seuil de 37.500,00 € indexés (actuellement 58.720€), l’administration, suivie

par les Cours et tribunaux176, estime que les droits qu’une personne (un fonctionnaire, un

magistrat ou un professeur d’université par exemple) recueille, en dehors de son activité

professionnelle ordinaire et en dehors d’un contrat de travail (en raison d’une

collaboration régulière à des publications ou à des journées d’études par exemple), doivent

être traités comme des revenus professionnels lorsque ces activités sont étroitement liées à

son activité principale ou se situent dans le prolongement de celle-ci.

Ce point de vue est contestable, parce que la seule existence d’un lien « intellectuel » avec

l’activité principale ne suffit pas à rendre le revenu professionnel. Il faudrait encore, à notre

avis, que l’activité générant des droits intellectuels soit juridiquement liée à l’activité

principale.

Section 3. Retenue du précompte mobilier

En ce qui concerne le précompte mobilier, il est retenu, par chaque débiteur, sur la base

des montants qu’il attribue au titre de droits d’auteur et en tenant compte de l’échelle

dégressive de frais déductibles de ces montants. Le taux du précompte est de 15 % sur la

première tranche de 37.500 € indexés (actuellement 58.720€) et de 25 % au-delà.

Il en résulte qu’un contribuable qui recueille des droits d’auteur de plusieurs sources,

conservant leur caractère mobilier, pourrait avoir fait l’objet d’une retenue globale de

précompte inférieure à l’impôt des personnes physiques réellement dû. A contrario, celui

qui s’est vu appliquer un précompte de 25 ou n30 % pourrait espérer un remboursement

de précompte, puisque le taux distinct sur les droits d’auteur n’est que de 15 %, quelle que

soit la hauteur des revenus imposables.

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 8888.... LLLLA QUOTITÉ FORFAITAIRA QUOTITÉ FORFAITAIRA QUOTITÉ FORFAITAIRA QUOTITÉ FORFAITAIRE DE DE DE D’’’’IMPÔT ÉTRANGERIMPÔT ÉTRANGERIMPÔT ÉTRANGERIMPÔT ÉTRANGER

Section 1. Notion

176 Not : Bruxelles, 20 avril 2005, R.G. n° 99-fr-140, www.fiscalnet.be; Civ., Bruxelles, 2 nov. 2006 R.G. n°

2002-8485-A, www.fiscalnet.be, Mons, 26 juin 1998, R.G.n°1942/1992, www.fiscalnet.be, …

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135

En principe, chaque État dispose de son propre pouvoir d’imposition. Ainsi, si une banque

établie dans un État A verse des intérêts à un résident établi dans un État B, il est fort

probable que tant l’État A que l’État B imposent ces intérêts. Si aucune règle de droit

interne ou de droit international ne trouvait application, il en résulterait une double

imposition desdits intérêts.

C’est pour atténuer cette double imposition que le Code des impôts sur les revenus permet

une déduction forfaitaire sur l’impôt des personnes physiques qui frappe en Belgique les

revenus mobiliers qui ont été soumis à l’étranger à un impôt analogue à l’impôt des

personnes physiques (art. 285 du C.I.R. 1992). C’est ce que l’on appelle communément la

« quotité forfaitaire d’impôt étranger » (QFIE).

Pour en bénéficier, il est cependant requis que les capitaux et biens mobiliers productifs

des revenus soient affectés à l’exercice de l’activité professionnelle de leur bénéficiaire, ce

qui est assez rare dans le chef des personnes physiques.

Cette QFIE ne s’applique pas aux dividendes, sauf s’ils sont alloués ou attribués par des

sociétés d’investissements et dans la mesure où il est établi qu’ils proviennent de revenus

qui satisfont eux-mêmes à certaines exigences déterminées (art. 285 et 289 du C.I.R. 1992).

Section 2. Taux

La QFIE doit être incorporée dans la base imposable avant d’être imputée (art. 286 et 287

du C.I.R. 1992). Pour en calculer le montant, il faut faire une distinction entre les intérêts

et les loyers et redevances.

Pour ces derniers, c’est-à-dire pour les produits de la location ou de la concession de biens

mobiliers, le montant de la QFIE est égal à 15/85èmes du revenu net avant précompte.

Pour les intérêts, l’impôt étranger imputable est l’impôt réellement retenu à l’étranger,

avec un maximum de 15 %. La QFIE est ainsi déterminée suivant une fraction dont le

numérateur est égal à l’impôt étranger effectivement retenu exprimé en pourcent du

revenu auquel il se rapporte, sans pouvoir excéder 15 %, et dont le dénominateur est égal à

cent diminué du chiffre du numérateur.

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136

Exemple

Un intérêt brut de 100 € subit une retenue à la source de 10 %.

La fraction est de : 10 / (100 – 10) = 10 / 90.

Son application au revenu net donne une QFIE de : 90 x (10 / 90) = 10.

Il aurait été plus simple de convenir que les intérêts soient inclus dans le revenu imposable

pour leur montant brut, avant déduction de la retenue à la source étrangère, et que celle-ci

soit imputable, dans un certain plafond.

Pour les intérêts, la QFIE n’est toutefois imputable qu’après la déduction de la quote-part

des charges financières de l’entreprise qui grèvent le revenu étranger donnant droit à

l’imputation. À cette fin, la quotité obtenue par l’application de la première fraction est

multipliée par une seconde fraction qui rend le mécanisme encore plus complexe.

Si l’on ne rentre pas dans les détails, on précise simplement que le numérateur de cette

seconde fraction est la différence entre, d’une part, le total des revenus diminués des plus-

values et, d’autre part, les charges financières, définies comme le montant total des revenus

mobiliers payés (à l’exclusion des dividendes). Le dénominateur est le revenu total diminué

des plus-values.

Section 3. Non-application ou non-imputation de la QFIE

La QFIE s’impute sur l’impôt des personnes physiques qui est proportionnellement

afférent aux revenus professionnels (à l’exclusion donc de l’impôt afférent aux revenus

mobiliers et immobiliers). Elle n’est pas remboursable au contribuable (art. 290 et 291 du

C.I.R. 1992).

Dans certaines hypothèses, l’imputation de la QFIE est par ailleurs exclue, conformément à

l’article 285 du CIR 92. Il en va notamment ainsi lorsque le bénéficiaire des revenus est un

particulier, soit un contribuable qui n’affecte pas les capitaux et biens mobiliers productifs

des revenus à l’exercice de son activité professionnelle.

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Il en résulte dans le chef d’une personne physique qui perçoit des dividendes, distribués

par une société établie en France par exemple, une double imposition juridique en ce que

la Convention préventive de double imposition franco-belge [et quasiment toutes les

autres conventions préventives] les dividendes subissent une retenue à la source de 15%, en

France, et une taxation de 30% en Belgique via le précompte mobilier libératoire.

Bien que les Conventions préventives de double impositions conclues par la Belgique

prévoient que cette double imposition est évitée par l’octroi d’un crédit d’impôt (« QFIE »),

la Belgique estimait être en droit de ne pas accorder l’imputation de la QFIE dès lors que

les conditions légales de l’article 285 du CIR 92 n’étaient pas remplies.

Cette double imposition juridique est née lorsque la Belgique a, de manière unilatérale,

modifié l’article 285 du CIR 92 et, par conséquent, la possibilité d’imputer la QFIE.

En effet, ce n’est que depuis 1988 que la possibilité d'imputer la QFIE pour les personnes

physiques est notamment réservée à celles ayant affecté les biens productifs de revenus

mobiliers à leur activité professionnelle.

La doctrine soutenait que la Belgique devait maintenir ce mécanisme d’imputation de la

QFIE prévue par ladite Convention en vertu de la primauté du droit international sur le

droit national.

Dans un arrêt du 16 juin 2017, de la Cour de cassation177 a confirmé la position de la

doctrine en considérant qu’en vertu du principe général de droit en matière de primauté

du droit international sur le droit national, la convention préventive de la double

imposition belgo-française a la priorité sur les dispositions du droit national. Il en découle

que comme la convention préventive de la double imposition belgo-française oblige la

Belgique à accorder un montant minimum imputable de quotité forfaitaire d'impôt

étranger, il ne peut être donné suite aux règles du droit interne belges qui soumettent cette

réduction à des conditions supplémentaires.

A l’heure actuelle, les personnes physiques percevant un dividende d’une société française

sont en droit donc de réclamer pour ces dividendes un crédit d’impôt conformément au

texte conventionnel, sans aucune autre condition supplémentaire issue de l’article 285 du

CIR 92.

177 Cour de cassation - Arrêt du 16 juin 2017 - Rôle n° F.15.0102.N

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138

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 9999.... LLLLA COOPÉRATION EUROPÉA COOPÉRATION EUROPÉA COOPÉRATION EUROPÉA COOPÉRATION EUROPÉENNE EN MATIÈRE DE FENNE EN MATIÈRE DE FENNE EN MATIÈRE DE FENNE EN MATIÈRE DE FISCAISCAISCAISCALITÉ DE LLITÉ DE LLITÉ DE LLITÉ DE L’’’’ÉPARGNEÉPARGNEÉPARGNEÉPARGNE

Section 1. Directive sur la fiscalité des revenus de l’épargne

A. Objectif

L’objectif poursuivi lors de l’adoption de la directive du 3 juin 2003 sur la fiscalité des

revenus de l’épargne – aujourd’hui abrogée - était d’harmoniser la taxation des intérêts au

niveau européen, de manière à supprimer la concurrence fiscale entre États et à empêcher

les mouvements de capitaux effectués dans le seul but d’exploiter les failles juridiques

existantes.

Un contribuable belge pouvait par exemple percevoir des intérêts aux Pays-Bas sans les

déclarer en Belgique. Cette perception n’était pas imposable aux Pays-Bas (en vertu de leur

droit interne) et, si elle était imposable en Belgique, l’administration éprouvait beaucoup

de difficulté à en avoir connaissance.

B. Régime

Pour lutter contre de telles formes de fraude fiscale, les États membres ont décidé

d’instaurer un échange automatique d’informations qui puisse permettre à chaque État

d’imposer ses résidents sur tous les intérêts perçus dans les autres pays participant à

l’échange d’informations.

Le champ d’application de la directive sur la fiscalité de l’épargne était, par conséquent,

limité aux paiements transfrontaliers d’intérêts, à savoir les paiements effectués dans un

pays participant au bénéfice d’une personne résidant dans un autre pays participant.

La mise en œuvre de l’échange automatique d’informations avait néanmoins été différée

pour trois pays désirant préserver temporairement leur secret bancaire. Il s’agissait du

Luxembourg, de l’Autriche et de la Belgique. Ceux-ci, comme certains des pays tiers à

l’Union, ont offert le choix aux épargnants non-résidents entre l’échange d’informations ou

une retenue à la source, dénommée « prélèvement pour l’État de résidence », leur

permettant de préserver leur anonymat.

Dans ce dernier cas, le paiement d’intérêts à des non-résidents était soumis à une retenue

de 15 % durant les trois premières années, de 20 % les trois années suivantes et de 35 % à

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139

partir du 1er juillet 2011. Son produit était majoritairement (à 75 % précisément) reversé,

sur une base anonyme, à l’État de résidence du bénéficiaire du paiement.

Exemple de la manière dont les choses se déroulaient en pratique :

Monsieur A, résident fiscal belge, est titulaire d’un compte d’épargne qu’il a ouvert auprès

d’une banque établie au Luxembourg. Ce compte a produit des intérêts d’un montant de

1.000 € en 2013.

Monsieur A fait le choix du prélèvement pour l’État de résidence car il part du principe

que le Trésor belge n’a pas à connaître l’état de son patrimoine, lequel ne regarde que lui.

La banque luxembourgeoise retient donc 350 € (1.000 € x 35 %) à titre de prélèvement

pour l’État de résidence. Elle verse cette somme à l’administration luxembourgeoise qui la

reverse partiellement au Trésor belge.

La somme versée à la Belgique correspond à 262,50 € (350 € x 75 %), tandis que la somme

retenue par le Luxembourg équivaut à 87,50 € (350 € - 262,50 €).

Ce système dérogatoire n’est plus appliqué par la Belgique, depuis le 1er janvier 2010. Cela

signifie que l’option du prélèvement pour l’État de résidence est aujourd’hui exclue (art.

338bis du C.I.R. 1992). Récemment, l’Autriche et le Luxembourg ont, eux aussi, accepté de

renoncer au système dérogatoire.

Tous les pays de l’Union Européenne, y compris l’Autriche et le Luxembourg acceptent

dorénavant de communiquer aux autres Etats de l’Union le montant des intérêts perçus

par leurs résidents. Les banques sont tenues de communiquer chaque année au fisc le

montant des intérêts perçus par des résidents d’autres pays de l’Union Européenne.

C. Évolution

La fin de ce régime dérogatoire et l’entrée en vigueur du régime définitif, à savoir l’échange

d’informations automatique entre tous les États membres de l’Union, a été subordonnée à

la conclusion d’accords prévoyant l’échange d’informations sur demande entre l’Union et

la Suisse, le Liechtenstein, Saint-Marin, Monaco, Andorre et les Etats-Unis d’Amérique.

Dans l’intervalle, les volontés (ou les priorités politiques) ont néanmoins évolué dans de

nombreux États, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’Union.

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En 2011, la directive dite de « coopération administrative » a été votée. Elle prévoit entre

pays de l’Union un échange automatique d’informations en ce qui concerne les revenus

professionnels, les jetons de présence, les produits d’assurance sur la vie, non couverts par

d’autres actes juridiques de l’Union européenne, les pensions et la propriété et les revenus

de biens immobiliers, le Conseil européen a par ailleurs approuvé, le 24 mars 2014, le texte

d’une version modifiée, avec entrée en vigueur progressive de la directive sur la fiscalité de

l’épargne. Il était prévu que les Etats membres prennent les mesures d’exécution

nécessaires, pour le 1er janvier 2016 au plus tard.

Deux directives récemment adoptées par les autorités européennes avaient pour objet

d’élargir considérablement la coopération entre les Etats membres.

Il s’agit, d’une part, de la directive 2014/48/UE du 24 mars 2014 qui a élargi le champ

d’application de la directive 2003/48/CE en matière de fiscalité des revenus de l’épargne

sous la forme de paiement d’intérêts ; et d’autre part, de la directive 2014/107/UE qui a

modifié la directive 2011/16/UE du 15 février 2011 relative à la coopération administrative

dans le domaine fiscal.

La directive 2014/48/UE a étendu le champ d’application de la directive 2003/48/UE sur la

fiscalité des revenus de l’épargne. L’objectif principal de cette directive – qui n’aura remis

en cause ni l’objectif de la directive « épargne » ni le principe de l’échange automatique

d’informations est de combler certaines lacunes de la directive « épargne », d’une part, en

permettant l’échange d’informations lorsque s’interposent entre l’agent payeur et le

bénéficiaire effectif d’intérêts des structures transparentes faiblement imposées et, d’autre

part, en incluant dans le champ d’application matériel de la directive certains produits

similaires aux créances productrices d’intérêts et notamment certains produits

d’assurance-vie178.

La directive 2014/107/UE dispose, quant à elle, que les Etats-membres doivent imposer à

leurs institutions financières, à partir du 1er janvier 2016, des règles en matière de

déclaration et de diligence raisonnable. Ces règles doivent satisfaire à la norme de

déclaration mise au point par l’OCDE pour l’échange automatique d’informations sur les

comptes financiers à des fins fiscales (Common Reporting Standard ou CRS).

178 La directive vise les « contrats d’assurance-vie comportant une garantie de revenu ou dont la performance est liée à

plus de 40% à des revenus provenant de créances ou à des revenus équivalents » (Directive 2014/48/UE du 24 mars 2014,

Considérants, (7)).

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L’échange d’informations dans le cadre de la norme de déclaration CRS n’est prévu que

pour 2017, car ce n’est qu’à partir de cette année que l’échange des informations sur les

revenus et soldes afférents à 2016 aura lieu. Les institutions financières sont toutefois déjà

obligées d’enregistrer les informations qu’elles sont tenues de transmettre depuis le

1er janvier 2016.

Le champ d’application de la directive 2014/107/UE est plus large que celui de la Directive

épargne.  La première directive visait principalement les revenus non financiers : revenus

professionnels, jetons de présence, produits d’assurance-vie non couverts par d’autres

directives, pensions, propriétés et revenus de biens immobiliers (art. 8 de la directive

2011/16/UE). Avec l’entrée en application de la directe 2014/107/UE, les revenus et avoirs

financiers des résidents d’autres Etats membres sont également concernés.

Les obligations de déclaration porteront ainsi sur les comptes financiers détenus par des

personnes physiques en ce compris « tout contrat d’assurance avec valeur de rachat »

(Annexe I, section VIII, C), de la directive 2014/107/UE).

La Directive épargne était, en d’autres termes, devenue superflue, et c’est pourquoi le

Conseil de l’Union européenne a décidé d’abroger cette directive à compter du 1er janvier

2016.

Toutes les institutions financières des pays tenus de suivre obligatoirement la norme de

déclaration CRS devront donc obligatoirement communiquer au cours de l’année 2017, à

leur administration fiscale, toutes les informations détaillées sur les comptes de leurs

clients étrangers. Cette administration fiscale transmettra ensuite ces informations à

l’administration fiscale du pays où leur client étranger à son domicile fiscal.

Sur le plan international, 47 pays ont conclu un accord pour mettre en place un système

automatique d’échange de renseignements basé sur une norme unique.

La matière de l’échange de renseignements, notamment sur une base automatique, est

donc en plein essor.

Les informations à échanger ne se limiteront plus au montant des intérêts perçus ; elles

porteront aussi sur les dividendes, les plus-values et le solde des comptes une fois par an.

Section 2. Notion d’ « intérêts »

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Les intérêts visés par la version originale de la directive sur la fiscalité de l’épargne étaient

relativement similaires à ceux visés par le droit fiscal belge. Il s’agissait, de manière

générale, des revenus qui se rapportent à des créances de toutes natures. Ils incluaient

notamment les intérêts courus ou capitalisés obtenus lors de la cession, du remboursement

ou du rachat de créances.

Les paiements d’intérêts n’étaient cependant visés par la directive que si leur bénéficiaire

effectif était une personne physique.

La « nouvelle » directive sur la fiscalité de l’épargne a un champ d’application plus large.

Elle oblige les Etats membres de l’UE à échanger également automatiquement, en 2017, des

renseignements sur les intérêts, dividendes et revenus analogues, sur le solde des comptes

financiers et sur les produits de vente d’actifs financiers179.

La définition du « bénéficiaire effectif » a également été adaptée afin que l’interposition

d’une construction juridique ne soit plus suffisante pour éviter l’échange d’informations.

Il est également prévu que, dans certaines conditions, le nouveau texte puisse considérer

comme « agents payeurs » les intermédiaires financiers établis dans l’Union européenne et

qui interviennent de quelque façon que ce soit dans le paiement d’intérêts au profit d’une

entité établie en dehors de l’UE.

179 Pour une analyse détaillée de la nouvelle directive, voyez G. VERACHTERT, « La modification et

l’élargissement de la directive épargne sont approuvés », Fiscologue, 2014, n° 1381, p. 4.

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Section 3. Transposition en droit belge

La transposition, en droit interne, de la première mouture de la directive sur la fiscalité de

l’épargne a été assurée par une loi du 17 mai 2004180.

Cette loi instaurait notamment le prélèvement pour l’État de résidence, lorsque le

bénéficiaire effectif des intérêts résidait dans un autre État membre, à opérer par l’agent

payeur établi en Belgique sur les intérêts.

Elle organisait aussi la possibilité, ouverte par la directive, de ne pas appliquer ce

prélèvement à un paiement effectué en Belgique au profit d’un résident d’un autre État

membre lorsque celui-ci produisait un certificat de l’autorité compétente de son État. Ce

certificat établissait, en quelque sorte, la connaissance qu’a l’autorité compétente de l’autre

État membre des paiements d’intérêts à intervenir en Belgique. Dans la mesure où cet État

membre pouvait imposer lui-même ce paiement, un prélèvement effectué par les autorités

belges n’avait plus de raison d’être.

L’hypothèse inverse, à savoir la délivrance d’un certificat par les autorités belges afin

d’éviter un prélèvement à la source lors d’un paiement d’intérêts perçu par un résident

belge dans un autre État membre, était également organisée par la loi.

Le droit du contribuable d’imputer sur l’impôt des personnes physiques le prélèvement à la

source ayant frappé à l’étranger un paiement d’intérêts y était aussi reconnu.

La transposition de la directive n°2014/107/UE a été assurée par la loi du 16 décembre

2015 réglant la communication des renseignements relatifs aux comptes financiers, par les

institutions financières belges et le SPF Finances, dans le cadre d'un échange automatique

de renseignements au niveau international et à des fins fiscales (1) (M.B., 31 déc. 2015).

180 M.B., 27 mai 2004.

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144

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 10101010.... LLLLES REVENUS MOBILIERSES REVENUS MOBILIERSES REVENUS MOBILIERSES REVENUS MOBILIERS ET LES CONVENTIONS ET LES CONVENTIONS ET LES CONVENTIONS ET LES CONVENTIONS PRÉVENTIVES DEPRÉVENTIVES DEPRÉVENTIVES DEPRÉVENTIVES DE LA DOUBLE LA DOUBLE LA DOUBLE LA DOUBLE

IMPOSITIONIMPOSITIONIMPOSITIONIMPOSITION

Section 1. Généralités

Le nombre et l’importance des conventions préventives de la double imposition conclues

par la Belgique permettent de résoudre la plupart des questions fiscales transfrontalières.

Comme leur nom l’indique, ces conventions ont pour objet principal d’éviter la double

imposition des revenus qui trouvent leur source ailleurs que dans l’État de résidence de

leur bénéficiaire. Elles règlent ainsi la répartition du pouvoir d’imposition entre deux États.

Ces conventions définissent globalement les revenus mobiliers de manière similaire à la

définition qui leur est donnée en droit fiscal belge. Pour éviter la double imposition de ces

revenus, elles prévoient généralement l’application du système suivant, qui correspond à

celui contenu dans la convention-modèle établie par l’Organisation de Coopération et de

Développement Economique (OCDE).

S’il est toujours requis de se référer, dans un cas précis, aux termes de la convention

applicable, la convention-modèle de l’OCDE sert généralement de canevas à

l’administration fiscale belge lorsqu’elle négocie avec un autre État les dispositions d’une

convention préventive de la double imposition.

Section 2. Dividendes

La notion de « dividendes » est définie comme comprenant notamment les revenus

d’actions ainsi que les revenus d’autres parts sociales soumis au même régime fiscal que les

revenus d’actions par la législation de l’État où réside la société distributrice des revenus

(art. 10, § 3 du Modèle OCDE).

Ils sont en principe imposables en Belgique lorsqu’ils sont payés à un résident fiscal belge

par une société qui est un résident d’un État étranger (art. 10 du Modèle OCDE). Les

résidents belges sont donc normalement taxés en Belgique sur les dividendes d’origine

étrangère qu’ils perçoivent.

Si ces dividendes sont également imposables dans l’État étranger où se trouve la société

distributrice, cet État ne peut généralement prélever à la source qu’un montant d’impôt

limité par la convention applicable, le plus souvent à 15 %.

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Toutefois, afin d’éviter la double imposition des revenus qui en résulte, la convention

contient généralement un système d’imputation permettant au contribuable d’imputer sur

l’impôt belge l’impôt étranger prélevé à la source (art. 23 du Modèle OCDE).

Suivant la plupart des conventions, un résident belge bénéficiaire d’un dividende payé par

une société étrangère doit dès lors payer à l’étranger une retenue à la source, retenue qu’il

peut imputer sur l’impôt belge puisqu’il est également imposable en Belgique sur ce

revenu.

Exemple

Monsieur A est un résident fiscal belge. Il détient des actions d’une société basée en France

et perçoit, à titre de dividende, un revenu de 1.000 €.

Ce revenu est imposable en Belgique au taux de 25 %. Il fait toutefois également l’objet

d’un prélèvement à la source, en France, de 15 %, conformément à la convention

préventive de la double imposition conclue entre la Belgique et la France.

Le montant de l’impôt dû en Belgique est normalement de 250 € (1.000 € x 25 %), mais il

peut imputer sur cet impôt le montant de la retenue à la source prélevée en France, soit

150 € (1.000 € x 15 %). Il ne doit donc au Trésor belge que 100 € (250 € - 150 €).

La double imposition est ainsi évitée, Monsieur A n’ayant finalement pas payé plus d’impôt

que ce qu’il aurait dû payer si le dividende lui avait été versé par une société belge.

Section 3. Intérêts

Les intérêts sont définis de manière générale comme les revenus des créances de toute

nature. Comme en droit interne, les pénalisations pour paiement tardif ne sont par contre

pas considérées comme des intérêts (art. 11, § 3 du Modèle OCDE).

Comme les dividendes, les intérêts sont en principe imposables en Belgique lorsqu’ils

proviennent d’un État étranger et qu’ils sont payés à un résident fiscal belge (art. 11, § 1er

du Modèle OCDE).

Toujours comme les dividendes, l’État de la source des intérêts, c’est-à-dire le pays où est

établi le débiteur des intérêts, peut normalement percevoir une retenue à la source,

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146

laquelle ne peut en général excéder 10 % du montant brut des intérêts, et cette retenue à la

source est imputable, en Belgique, sur l’impôt qui y est dû.

En d’autres termes, en vertu de la plupart des conventions, les intérêts étrangers perçus par

des résidents belges peuvent être imposés à l’étranger et ensuite être imposés en Belgique

suivant leur régime normal d’imposition, moyennant l’imputation de l’impôt étranger sur

l’impôt dû en Belgique.181

Section 4. Redevances

Enfin, les redevances sont définies comme étant les rémunérations pour l’usage d’un droit

d’auteur, d’un brevet, d’une marque de fabrique ou de commerce, d’un dessin ou d’un

modèle, d’une formule ou d’un procédé secret et pour des informations ayant trait à une

expérience acquise dans le domaine industriel, commercial ou scientifique (art. 12, § 2 du

Modèle OCDE).

À l’inverse des dividendes et des intérêts, les redevances provenant d’un État étranger

versées à un résident fiscal belge ne sont en principe imposables qu’en Belgique (art. 12, §

1er du Modèle OCDE).

Pour les redevances, le pouvoir de perception de l’impôt est en effet généralement attribué

exclusivement au pays de résidence du contribuable, sans que l’État de la source du revenu

n’ait la possibilité de percevoir une quelconque retenue.

Toutes les conventions internationales conclues par la Belgique ne sont cependant pas

conformes, sur ce point, à la dernière version de la convention-modèle. Il convient donc

toujours de se référer et d’examiner les termes précis de la convention applicable.

Beaucoup d’entre elles prévoient encore un régime analogue à celui applicable aux

dividendes et intérêts, avec la possibilité pour l’État de la source de prélever un impôt et

pour le contribuable d’imputer ce même impôt sur l’impôt dû en Belgique.

181 Cf. supra Chapitre 8 – section 3

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147

TITRE TITRE TITRE TITRE VVVV. . . . LES REVENUS PROFESSILES REVENUS PROFESSILES REVENUS PROFESSILES REVENUS PROFESSIONNELSONNELSONNELSONNELS

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 1.1.1.1. NNNNOTIONS INTRODUCTIVESOTIONS INTRODUCTIVESOTIONS INTRODUCTIVESOTIONS INTRODUCTIVES

Section 1. Définition

Les revenus professionnels constituent la troisième catégorie de revenus imposables à

l'impôt des personnes physiques. Il s’agit de tous les enrichissements qui proviennent,

directement ou indirectement, de l'exercice d'une activité professionnelle (art. 23 du C.I.R.

1992).

Pour être professionnelle, une activité doit, à tout le moins, présenter un caractère régulier.

On la définit généralement comme un ensemble d'opérations suffisamment fréquentes et

liées entre elles pour constituer une occupation continue et habituelle dans le chef du

contribuable182.

Les revenus qui résultent d’une activité purement occasionnelle du contribuable ne

peuvent dès lors être considérés comme des revenus de nature professionnelle. Ces

revenus sont le cas échéant considérés comme des revenus divers (voir infra). Sinon, ils ne

sont pas taxables.

À titre d’exemples, les juridictions fiscales ont considéré qu’un contribuable percevait des

revenus professionnels dans les situations suivantes :

- Un contribuable donne en location 26 chambres d'étudiant meublées et en assure

l'entretien deux fois par semaine183.

- Un philatéliste a constitué un véritable stock de timbres destinés essentiellement à

la vente avec profit plutôt qu'à des échanges avec des collectionneurs amateurs,

dans le cadre d'une activité caractérisée par d'importantes ventes, l'utilisation

d'intermédiaires et un contrôle étroit de ses activités (comptabilité, organisation

d'un système de recouvrement)184.

182 Voyez Cass., 2 septembre 1969, Pas., 1970, I, p. 3 ; Cass., 7 décembre 2000, Pas., 2000, n° 676, p. 1876 ;

Cass., 14 décembre 2007, F.J.F., n° 2008/100. 183 Anvers, 26 mars 1991, F.J.F., n° 91/145. 184 Liège, 8 décembre 1993, F.J.F., n° 94/235.

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Section 2. Imposition des revenus illicites

Aux yeux du législateur fiscal, pour être imposables au titre de revenus professionnels, il

est indifférent que les revenus du contribuable proviennent d'une activité licite ou illicite,

pour autant qu’elle soit professionnelle (voy. : Cass., 18 mars 1976, J.D.F., 1976, p. 262 ;

Cass., 21 mai 1982, F.J.F., n° 82/152).

Il s’agit d’une application du principe suivant lequel le droit fiscal se fonde sur des réalités.

Les revenus entrent en effet dans le patrimoine du contribuable et sont imposables de ce

simple fait, même s’ils sont illicites.

Il n’y aurait d’ailleurs aucune raison valable de traiter plus favorablement les revenus d’une

activité professionnelle illicite, en les faisant échapper à l’impôt, alors que les revenus tirés

par un contribuable honnête d’une activité professionnelle licite sont, quant à eux,

imposables.

L’utilisation ultérieure des revenus n'a pas non plus d’incidence sur le principe de leur

imposition. Ainsi, il est sans pertinence que le contribuable dilapide au jeu les sommes

qu'il a détournées ou qu'il doive les restituer un jour à la victime de ce détournement. Elles

restent, malgré tout, imposables.

Pour illustrer ces propos, l’on peut citer les exemples suivants, qui ont été rencontrés en

jurisprudence :

- Les revenus d’un magistrat tirés de la corruption constituent des profits

imposables, s’ils proviennent d'un ensemble d'opérations suffisamment fréquentes

et liées entre elles pour constituer une occupation continue et habituelle. La

confiscation du revenu illégal par un juge répressif n'a aucune incidence sur la

nature des sommes confisquées au regard des impôts sur les revenus185.

- Les revenus qui découlent de vols perpétrés sur une période de plusieurs mois

constituent des revenus imposables découlant d'une activité ordinaire et continue à

caractère professionnel186.

- L'associé actif qui détourne des fonds est imposable sur les montants détournés187.

185 Bruxelles, 14 septembre 2009, R.G.C.F., 2010, p. 429. 186 Anvers, 16 juin 2009, F.J.F., n° 2010/99. 187 Bruxelles, 20 mai 1980, J.D.F., 1980, p. 268.

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De la même manière, un employé de banque détournant des fonds appartenant aux

clients de la banque est imposable sur ces sommes188.

- Les loyers encaissés par des contribuables en leur qualité de propriétaires de six

immeubles à usage de salons de prostitution, ce qui leur a valu une condamnation

pénale pour proxénétisme hôtelier, constituent également des revenus

professionnels imposables189.

Il semble toutefois que l’arrêt rendu par la Cour de cassation, le 23 novembre 2012, a une

nouvelle approche de la question de la taxation des revenus illicites.

En l’espèce, une employée de banque avait détourné des fonds de son employeur, semble-t-

il à cause de problèmes de liquidités que son époux rencontrait dans des sociétés qu’il

détenait. Les deux époux furent condamnés sur le plan pénal à une peine

d’emprisonnement et à une amende avec confiscation. La Cour d’appel de Gand avait jugé

que les fonds détournés devaient être considérées comme des rémunérations et, partant,

qu’ils devaient être taxés à l’impôt des personnes physiques dans le chef de l’employée de

banque. La Cour de cassation a toutefois cassé cet arrêt. La doctrine y voit une

consécration de la thèse selon laquelle la loi fiscale ne taxe pas des sommes qui font l’objet

d’une obligation de restitution190.

La justification de cette position réside à notre avis dans le fait que, si ces sommes sont

sujettes à restitution, il s’agit certes de recettes, mais non de revenus parce que le

patrimoine du bénéficiaire n’a pas augmenté de ce chef. Par conséquent, les revenus

illicites restent taxables, mais seulement s’il s’agit réellement de « revenus ».

La position de la Cour de cassation sur cette question n’est toutefois pas très claire puisque

dans un arrêt du 22 novembre 2013191 relatif à la même problématique, la Cour de

cassation a confirmé un arrêt de la Cour d’appel de Bruxelles qui avait admis la déduction

en frais professionnels des remboursements des sommes qu'un curateur de faillites avait

détournées dans l'exercice de ses fonctions et qui avaient été imposées dans son chef au

titre de revenus professionnels.

188 Bruxelles, 13 septembre 2007, F.J.F., 2008/101. 189 Liège, 26 mai 2000, F.J.F., n° 2000/191. 190 Pour plus de détails à ce sujet, voyez S. SEGIER, « Quelques réflexions sur les sommes perçues par un

professionnel dans le cadre de l’exercice d’une activité illicite : s’agit-il toujours de revenus taxables ? »,

C.&F.P., 2014, n° 10, pp. 15 et s. 191 Cass., 22 novembre 2013, R.G. n° F.10.0036, www.fiscalnet.be.

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150

Bien que les faits soient dans les deux causes similaires un traitement fiscal différent a été

appliqué et pourtant validé dans les deux cas par la Cour de cassation : dans le premier cas,

les sommes détournées et par la suite restituées n’ont pas été imposées à titre de revenus

professionnels. Dans le second cas, les sommes détournées ont été imposées et les

restitutions considérées comme des frais professionnels.

La position de la Cour de cassation étant, suite à ces deux décisions, quelque peu ambigüe,

il était attendu qu’elle se prononce à nouveau sur cette question.

C’est chose faite. Le 28 avril 2016, la Cour a rendu un arrêt clarifiant sa position (R.G. n°

F.15.0078, www.fisclanet.be).

Cet arrêt a été rendu dans l’affaire qui avait donné lieu au premier arrêt du 23 novembre

2012 (la cause avait été renvoyée devant la Cour d’appel de Gand dont la décision a

également fait l’objet d’un pourvoi).

Par cet arrêt, la Cour de cassation conforte la position qu'elle avait adoptée dans son

précédent arrêt du 23 novembre 2012. Selon elle, la notion de « rémunération » au sens

des articles 30, 1°, et 31, alinéa deux, du C.I.R. 1992 n'englobe pas les fonds qu'un

travailleur s'approprie de manière irrégulière au détriment de son employeur, même si cela

s'est produit dans le cadre de l'exercice de l'emploi pour lequel il a été engagé. L’arrêt

précise toutefois que cela n’exclut pas une éventuelle imposabilité de ces fonds sur une

autre base.

On peut en conclure que si la qualification de rémunération est exclue, cela n’entraîne pas

une non-imposition du revenu perçu. En effet, d’autres qualifications sont envisageables,

telles que des revenus divers, des profits ou des bénéfices, ….

Section 3. Imposition des revenus « indirects »

Le législateur fiscal impose au titre de revenus professionnels tous les revenus qui sont

produits par une activité professionnelle. Il ne fait aucune distinction entre les revenus qui

proviennent directement de cette activité et les revenus qui proviennent indirectement de

cette activité.

Ainsi, sont notamment considérées comme des revenus indirects d’une activité

professionnelle imposables au titre de revenus professionnels, les indemnités octroyées en

réparation d'une perte de revenus professionnels (par la suite d'un accident par exemple) et

les pensions allouées aux veuves des travailleurs décédés.

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Section 4. Imposition des revenus de biens immobiliers et mobiliers à caractère

professionnel

Pour rappel, lorsque des biens immobiliers ou des avoirs mobiliers sont affectés à l'exercice

d'une activité professionnelle, les revenus qu’ils produisent sont traités comme des revenus

professionnels dans le chef de leur bénéficiaire, et non comme des revenus immobiliers ou

mobiliers (art. 37 du C.I.R. 1992).

Il n’est pas requis, pour ce faire, que les avoirs immobiliers ou mobiliers proviennent eux-

mêmes d'une activité professionnelle. Le législateur fiscal exige par contre qu'ils soient

affectés à l'exercice d'une telle activité.

Pour rappel, les revenus perçus au titre de droits d'auteur échappent, par exception, à

l'assimilation au titre de revenus professionnels, sauf si et dans la mesure où ils dépassent

37.500 € indexés (voir supra).

Section 5. Catégories de revenus professionnels

Les revenus professionnels sont répartis en cinq catégories (art. 23 du C.I.R. 1992). Ces

catégories, qui font l’objet d’un examen détaillé ci-dessous, sont les suivantes :

- Les bénéfices : il s’agit des revenus qui résultent d’une exploitation industrielle,

commerciale ou agricole.

- Les rémunérations : il s’agit des revenus des travailleurs salariés et des

fonctionnaires, ainsi que ceux des dirigeants d'entreprises et des conjoints aidants.

- Les profits : il s’agit des revenus des titulaires de professions libérales, charges,

offices et de toutes autres occupations lucratives.

- Les bénéfices ou les profits d'une activité professionnelle antérieure.

- Les pensions, rentes et allocations en tenant lieu.

Certains revenus professionnels, qui entrent dans l’une ou l’autre de ces catégories, sont

toutefois exonérés d’impôt, en tout ou en partie, pour des raisons sociales, culturelles ou

économiques (art. 38 à 40 et 67 à 77 du C.I.R. 1992). Ces exonérations sont également

examinées ci-dessous.

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Section 6. Détermination du revenu net

De manière générale, l'impôt des personnes physiques ne frappe que les revenus nets.

Cette règle s’applique également aux revenus professionnels.

Ainsi, du montant brut des revenus professionnels, on déduit, dans le respect des

conditions prévues par le Code des impôts sur les revenus, (i) les frais professionnels qui

grèvent ces revenus, en ce compris les amortissements (art. 49 à 66bis du C.I.R. 1992), et

(ii) les pertes qui résultent d'autres activités professionnelles ou les pertes professionnelles

d'années antérieures (art. 78 à 80 du C.I.R. 1992).

Les amortissements sont des charges qui correspondent à la dépréciation réelle d’un bien

investi dans l’activité professionnelle survenue pendant une période imposable, en raison

de son usure ou de sa désuétude.

Les différents éléments déductibles des revenus professionnels bruts du contribuable sont

eux aussi examinés ci-dessous, dans des chapitres distincts.

Section 7. Régime des sociétés civiles ou associations sans personnalité juridique

Les revenus d'une activité exercée par une société civile ou une association sans

personnalité juridique sont considérés, par transparence, comme des revenus attribués aux

membres de celle-ci (art. 29 du C.I.R. 1992).

Par « association sans personnalité juridique », on entend notamment, en droit fiscal, les

sociétés commerciales irrégulièrement constituées et les associations de copropriétaires.

Ce régime s’applique même si ces entités disposent de la personnalité juridique en droit

privé.

Elles sont considérées comme fiscalement transparentes parce qu’elles ne sont pas elles-

mêmes soumises à l’impôt sur les revenus, à l’inverse de ses associés ou membres.

Ces revenus constituent, dans le chef des associés ou membres de l’entité, soit des

bénéfices (art. 23, § 1er, 1° du C.I.R. 1992), soit des profits (art. 23, § 1er, 2° du C.I.R. 1992),

selon la nature de l’activité exercée par l’entité (art. 29 du C.I.R. 1992).

Ces revenus sont constitués des prélèvements des associés ou membres et de leurs parts

dans les bénéfices ou des profits de l’entité, que ceux-ci leur aient déjà été distribués ou

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153

non.

La part des bénéfices ou des profits non-distribués qui est considérée comme étant

attribuée à chaque associé ou membre est déterminée conformément aux stipulations du

contrat ou de la convention d'association ou de société ou, à défaut, par « part virile » (art.

364 du C.I.R. 1992).

Par « part virile », on entend la part qui résulte de la division des bénéfices ou des profits

par le nombre d’associés ou membres. Ainsi, si une association sans personnalité juridique

comprenant 5 membres fait un bénéfice de 100, la part virile de chacun de ses membres

dans ce bénéfice est de 20.

L'ensemble des bénéfices ou des profits est considéré comme attribué aux associés ou

membres de l’entité à la date de clôture de ses comptes annuels ou, à défaut de

comptabilité, au 31 décembre de chaque année (art. 364 du C.I.R. 1992).

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Section 8 : la taxe de transparence

La loi-programme du 10 août 2015 a introduit dans le Code des impôts sur les revenus une

taxe dite taxe de transparence ou taxe caïman (nouvel article 5/1 §1er du CIR 1992).

L’objet principal de cette loi est la taxation, dans le chef des personnes physiques résidentes

belges, des revenus des « constructions juridiques » étrangères dont elles sont fondateurs

ou bénéficiaires (au sens défini par cette loi). La notion de fondateur reçoit, dans le cadre

de cette loi, une acception particulièrement large.

La loi détermine trois catégories de constructions juridiques : les trusts et assimilés, les

structures dotées de la personnalité juridique qui bénéficient d’un régime fiscal

notablement plus avantageux ainsi que tout contrat qui prévoirait en échange de paiement

de primes ou d’apport, le paiement de revenus perçus par l’une des constructions

juridiques précitées. [Contrat d’assurance-vie branches 21 et 23 par exemple]192 Elle a pour

objet de s’attaquer aux constructions juridiques impliquant des structures souvent situées

dans des Paradis fiscaux.

A certaines conditions, les revenus de ces structures sont donc imposés directement dans

le chef des personnes physiques, identifiées les fondateurs de ces structures juridiques,

comme si ces structures – qui constituent, en principe, des entités fiscales distinctes –

n’existaient pas.

Les conditions d’application du régime sont particulièrement complexes et souffrent de

nombreuses exceptions. Leur étude complète dépasse le cadre du présent cours.

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 2222.... LLLLES BÉNÉFICESES BÉNÉFICESES BÉNÉFICESES BÉNÉFICES

Section 1. Notion d’ « entreprises »

Sont en premier lieu imposables au titre de revenus professionnels « les bénéfices des

entreprises industrielles, commerciales ou agricoles quelconques » (art. 24 duC.I.R. 1992). Il

192 Modifié par la Loi Programme du 25 décembre 2012, M.B. 29.12.2017

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155

faut inclure dans cette catégorie les bénéfices qui sont réalisés par une exploitation

artisanale.

La catégorie des bénéfices d’exploitation comprend, en d’autres mots, les revenus

professionnels des commerçants, des industriels, des agriculteurs et des artisans, dont les

activités sont considérées par le législateur fiscal comme des « entreprises ».

Dans le chef de ces contribuables, coexistent un patrimoine privé et un patrimoine

professionnel. La notion d' « entreprise » suppose effectivement l'affectation d'avoirs à la

réalisation de bénéfices.

L'existence d'un avoir investi à des fins professionnelles ne semble toutefois pas un critère

suffisant pour caractériser la notion d’ « entreprise ». En effet, le titulaire d'une profession

libérale investit également des avoirs dans l'exercice de sa profession (c’est par exemple le

cas de l'appareillage du dentiste). Il n’est pas pour autant qualifié d’ « entreprise » par la loi

fiscale.

Pour décrire ce qu’est une entreprise industrielle, commerciale, agricole ou artisanale, il

faut se rapprocher du sens usuel de ces termes. Ce qui est déterminant, c'est la nature de

l'activité, du point de vue économique, c'est-à-dire le fait qu'elle relève d'un de ces grands

domaines de l'économie : l’industrie, le commerce, l’agriculture ou l’artisanat.

La Cour de cassation a ainsi défini le terme « exploitation », devenu par la suite

« entreprise » dans les textes légaux, comme l'entité économique indépendante affectée

« soit à la production ou à la vente de biens, soit à la prestation de services, et qui peut

comprendre un ou plusieurs établissements »193.

L’entreprise consiste donc, dans le chef des personnes physiques, dans la mise à fruit d’un

capital dans le cadre d’une activité professionnelle exercée dans un but de lucre dans le

domaine industriel, commercial, agricole ou artisanal.

Section 2. Catégories de bénéfices

La loi énumère les quatre catégories de revenus qui forment la base imposable au titre de

bénéfices (art. 24 CIR). Ces catégories sont les suivantes :

- Les bénéfices qui proviennent de toutes les opérations « ordinaires » traitées par

193 Cass., 14 juin 1991, Pas., 1991, I, n° 535, p. 905.

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l’entreprise ou à son intermédiaire ;

- Les bénéfices qui proviennent de plus-values réalisées ou exprimées ;

- Les bénéfices qui proviennent de certaines plus-values latentes ;

- Les bénéfices qui proviennent des réserves occultes de l’entreprise.

Chacune de ces catégories de revenus est expliquée ci-dessous.

Section 3. 1ère catégorie de bénéfices : les bénéfices qui proviennent de toutes les

opérations « ordinaires » traitées par l’entreprise ou à son intermédiaire (art. 24,

al. 1, 1° du C.I.R. 1992)

Les bénéfices imposables sont non seulement constitués du produit direct du travail

industriel, commercial, agricole ou artisanal, mais également du produit de toutes les

autres opérations réalisées par le contribuable dans le cadre de l'exercice de sa profession.

Il s’agit en premier lieu du résultat des opérations qui résultent de l’exercice de l’activité

professionnelle du contribuable (le produit des ventes d’un commerçant par exemple). Si

ce résultat fait partie de son bénéfice imposable, la notion de « bénéfice » est toutefois plus

large.

En effet, le bénéfice imposable comprend également tout revenu qui provient d’opérations

qui présentent un lien suffisamment étroit avec l’exploitation industrielle, commerciale,

agricole ou artisanale du contribuable, sans que ce revenu ne doive nécessairement être, à

proprement parlé, produit par un travail industriel, commercial, agricole ou artisanal.

Ainsi, les subsides et subventions accordés au contribuable par les pouvoirs publics

contribuent également à la formation du bénéfice de son entreprise. Ils constituent en

principe un élément du bénéfice imposable à prendre en considération durant la période

imposable au cours de laquelle ils sont accordés.

La base imposable des entreprises se définit non à partir des recettes mais des produits, y

compris ceux qui n'ont donné lieu qu'à la constatation d'une créance dans le chef du

contribuable.

D'un point de vue comptable comme fiscal, les créances sont effectivement considérées

comme accroissant dès leur naissance le patrimoine de l'entreprise, pour autant qu’elles

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157

présentent un caractère certain et liquide.

Une créance fait donc partie du bénéfice imposable de l’entreprise si son existence est

certaine et que son montant est connu, même si le montant de cette créance est payé

ultérieurement par son débiteur, voire même qu’il n’est jamais payé.

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Un exemple permet de mieux illustrer ce propos.

Un commerçant émet le 15 décembre 2013 une facture destinée à l’un de ses clients. Le

montant facturé représente une créance du commerçant sur son client qui fait partie de

son actif.

Le montant de cette créance fait partie du bénéfice imposable du commerçant pour l’année

2013, même si au 31 décembre de cette année, le montant facturé n’a pas encore été payé

par son client.

Section 4. 2ème catégorie de bénéfices : les bénéfices qui proviennent de plus-values

réalisées ou exprimées (art. 24, al. 1, 2° du C.I.R. 1992)

a) Les plus-values réalisées

L’entrepreneur est également imposé sur les plus-values qu’il réalise sur les biens affectés à

l’exercice de son activité professionnelle. Inversement, les plus-values réalisées sur ses

biens privés ne sont pas imposées au titre de revenus professionnels.

Si une plus-value est réalisée sur un bien qui n’est affecté que partiellement à l’exercice de

son activité professionnelle, la plus-value n’est imposable au titre de revenu professionnel

qu’au prorata du pourcentage d’affectation professionnelle du bien.

Une plus-value est dite « réalisée » lorsqu’elle est acquise à l’occasion de l’aliénation d’un

bien. Ainsi, lorsqu’un contribuable vend ou apporte en société un bien affecté à l’exercice

de son activité professionnelle, la plus-value qu’il réalise éventuellement à cette occasion

est réalisée parce que le bien qui en fait l’objet n’appartient plus au contribuable.

Une plus-value est donc réalisée si un acte quelconque a pour effet qu’un ou plusieurs

avoirs disparaissent du patrimoine du contribuable et sont remplacés par une contre-

valeur qui lui ou leur est supérieure, suite à une vente, un apport en société, un échange,

une expropriation, une réquisition en propriété ou une destruction qui donne lieu à une

indemnité.

La réalisation de cet élément ou de ces éléments peut en effet entraîner un accroissement

de valeur dans les comptes de l’entreprise : si un actif est cédé pour une valeur supérieure à

sa valeur comptable, cette différence fait partie des bénéfices du contribuable.

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159

La plus-value réalisée, dont le montant est en principe soumis à l'impôt, est plus

précisément « égale à la différence positive entre d'une part l'indemnité perçue ou la valeur

de réalisation du bien diminuée des frais de réalisation et d'autre part sa valeur

d'acquisition ou d'investissement diminuée des réductions de valeur et amortissements

admis antérieurement » (art. 43 du C.I.R. 1992).

La valeur de réalisation du bien est le prix net perçu à cette occasion, déduction faite des

frais (courtages, commissions, impôts, etc.) inhérents à l’opération. Quant à la valeur

d’acquisition ou d’investissement du bien, elle correspond, suivant le cas :

- Au prix d’acquisition : il comprend, outre le prix d’achat, les frais accessoires, tels

que les impôts non récupérables et les frais de transport.

Le prix d’acquisition d’un élément d’actif obtenu par voie d’échange correspond à la

valeur de marché du ou des éléments d’actifs cédés en échange. Si cette valeur n’est

pas aisément déterminable, le prix d’acquisition est la valeur de marché de l’élément

d’actif obtenu par voie d’échange (art. 36 de l’AR/SOC).

- Au coût de revient : il s’obtient en ajoutant au prix d’acquisition des matières

premières, des matières consommables et des fournitures, les coûts de fabrication

du bien (art. 37 de l’AR/SOC).

- À la valeur d’apport : elle correspond à la valeur conventionnelle des biens apportés

(art. 39 de l’AR/SOC).

b) Les plus-values exprimées

D’un point de vue comptable, un actif est en principe évalué à sa valeur d’acquisition (art.

35 de l’AR/SOC). Ainsi, une plus-value est dite « exprimée » lorsque, tout en conservant le

bien dans son patrimoine, le contribuable réévalue ce bien pour une valeur supérieure à sa

valeur d’acquisition.

Une plus-value est dès lors exprimée lorsque, sans être aliéné, le bien auquel elle se

rapporte a fait l’objet d’une réévaluation dans la comptabilité de l’entreprise afin de

constater une augmentation de valeur de cet élément d’actif, par rapport à sa valeur

comptable jusqu’alors, tout en restant inclus dans l’avoir social du contribuable.

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Un exemple permet de mieux appréhender la notion de « plus-value exprimée ».

Une entreprise acquiert en 1970 un immeuble affecté à l’exercice de son activité

professionnelle, pour une valeur de 250.000 €. L’immeuble est comptabilisé pour cette

valeur dans les comptes de l’entreprise.

En 2000, cet immeuble vaut 350.000 € et l’entreprise le réévalue dans ses comptes pour sa

valeur réelle, soit 350.000 €. Il y a par conséquent une plus-value exprimée, mais non

réalisée, de 100.000 €, puisque le bien ne quitte pas le patrimoine de l’entreprise.

D’un point de vue comptable, une entreprise peut mais n’est pas obligée d’exprimer une

plus-value sur un élément d’actif, c’est-à-dire de le réévaluer dans sa comptabilité lorsque

sa valeur effective est supérieure à sa valeur comptable (art. 34 de l’AR/SOC).

Par exception, lorsqu’une entreprise a comptabilisé dans le passé une réduction de valeur

sur un élément d’actif et que cette réduction de valeur n’est plus justifiée parce que la

valeur de cet élément s’est accrue dans l’intervalle, elle a l’obligation de comptabiliser une

« reprise de réduction de valeur ». Cette reprise de réduction de valeur correspond à une

plus-value exprimée.

À l’instar des plus-values réalisées, les plus-values exprimées dans la comptabilité d’une

entreprise font également parties de ses bénéfices imposables (art. 24, al. 1er, 2° du C.I.R.

1992).

La loi exonère cependant les plus-values qui sont simplement exprimées et non réalisées,

sauf celles qui sont exprimées sur les stocks de l’entreprise (matières premières, produits

ou marchandises) et les commandes en cours d'exécution (art. 44, § 1er, 1° du C.I.R. 1992).

La loi rend ainsi imposables les plus-values exprimées sur les stocks et commandes en

cours parce qu’elles constituent non des plus-values sur des avoirs affectés à l’exercice de

l’activité professionnelle mais des bénéfices opérationnels194.

194 Cass., 13 septembre 1966, Pas., 1967, I, p. 61.

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Section 5. 3ème catégorie de bénéfices : les bénéfices qui proviennent de certaines

plus-values latentes (art. 24, al. 1er, 3° du C.I.R. 1992)

Une plus-value est dite « latente » lorsque le bien auquel elle se rapporte vaut davantage

que sa valeur comptable mais que cet accroissement de valeur n’est pas exprimé dans la

comptabilité de l’entreprise.

Ainsi, dans l’exemple pris ci-dessus, avant que l’entreprise ne réévalue l’immeuble

comptabilisé pour 250.000 € mais valant en réalité 350.000 €, l’immeuble présentait une

plus-value latente (non exprimée et non réalisée) de 100.000 €.

Pour rappel, une entreprise n’est pas obligée d’exprimer une plus-value latente sur un

élément d’actif (art. 34 de l’AR/SOC), de telle sorte que l’administration ne peut en

principe imposer les plus-values latentes.

Par exception, les plus-values latentes sur des immobilisations financières et autres titres

en portefeuille qui sont affectés à l’exercice de l’activité professionnelle du contribuable

sont imposables au titre de bénéfices, « dans la mesure où leur valeur s’est accrue et à la fin

de la période imposable n’excède pas leur valeur d’investissement ou de revient » (art. 24, 3°

du C.I.R. 1992).

Cette hypothèse correspond à la situation où une réduction de valeur a été actée sur des

immobilisations financières du contribuable. Si cette réduction de valeur n’est plus

justifiée, celle-ci est ajoutée aux bénéfices imposables, même si le contribuable ne procède

pas à une reprise de réduction de valeur dans sa comptabilité.

Il n’en est ainsi que pour les actifs financiers qui sont investis à titre professionnel par le

contribuable, c’est-à-dire les immobilisations financières et autres titres de portefeuille

(actions et parts) qui sont affectés durablement à l’exercice de l’activité professionnelle du

contribuable. De ce fait, elle se présente très rarement dans le chef des personnes

physiques.

Les immobilisations financières sont les droits sociaux détenus par une entreprise dans

d’autres entreprises en vue de créer un lien durable et spécifique avec celles-ci et de

contribuer à l’activité propre de l’entreprise.

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Exemple :

Une entreprise achète des titres pour 25.000 € en 2010. En 2012, ces titres ne valent plus

que 20.000 €. L’entreprise procède alors à une réduction de valeur de 5.000 € sur ces titres.

En 2014, le cours des titres remonte et les titres valent désormais 30.000 €. Même si

l’entreprise n’acte pas une reprise de réduction de valeur dans sa comptabilité, elle est

imposable sur le montant de cette reprise, soit 5.000 €.

Le solde de la plus-value latente, également chiffré à 5.000 €, n’est pas imposable.

Section 6. 4ème catégorie de bénéfices : les bénéfices qui proviennent de réserves

occultes de l’entreprise (art. 24, al. 1er, 4° du C.I.R. 1992)

Les réserves occultes de l’entreprise sont de deux ordres :

- Celles qui sont dissimulées et qui n'apparaissent au bilan sous aucune

dénomination normale ou n'y apparaissent pas pour leur valeur réelle : sous-

évaluation d'inventaire, dette fictive ou dont le caractère certain n'est pas démontré

avec suffisance, etc. ;

- Celles qui résultent de distorsions entre les règles d'évaluation comptable et

fiscales, comme, par exemple, la comptabilisation de réductions de valeur qui ne

répondent pas aux conditions de déduction fiscale.

Les réserves occultes de l’entreprise peuvent résulter aussi bien de l'application correcte de

normes comptables qui se heurtent à des dispositions fiscales plus restrictives (comme, par

exemple, des amortissements comptables non admis fiscalement parce qu'ils sont basés sur

une valeur réévaluée du bien dans la comptabilité ou des amortissements comptables plus

rapides que ce que ne le permet le Code des impôts sur les revenus), que de pratiques

frauduleuses (des stocks non repris à l'inventaire par exemple).

Les réserves occultes sont reprises dans les bénéfices de la période imposable à laquelle se

rapporte le contrôle qui les fait apparaître, même si elles résultent d'écritures comptables

se rapportant à des périodes imposables antérieures. Le contribuable peut cependant

établir qu'elles ont été prises en compte pour déterminer les résultats fiscaux de ces

dernières périodes (art. 361 du C.I.R. 1992).

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L’imposition ainsi réalisée se rapporte donc en principe à la période imposable durant

laquelle les réserves occultes de l’entreprise sont découvertes par l’administration fiscale, et

non à celle au cours de laquelle ces réserves sont constituées. Le contribuable ne peut par

conséquent pas soutenir que les réserves occultes sont relatives à un exercice pour lequel

la prescription fiscale est atteinte.

Il a, en revanche, été jugé que cette mesure, qui déroge au principe de l'annualité de

l'impôt, ne peut être appliquée à des produits d'exploitation ordinaires (art. 24, al. 1er, 1°du

C.I.R. 1992), lesquels sont nécessairement rattachés à la période imposable au cours de

laquelle ils ont été recueillis (comme des revenus locatifs que le contribuable bailleur

professionnel a omis, à tort, de comptabiliser)195.

L'administration fiscale a, en matière de réserves occultes, une compétence liée. Cela

signifie qu’elle n'est pas autorisée à ne pas imposer une réserve occulte parmi les bénéfices

de la période à laquelle se rapporte le contrôle qui la fait apparaître, et à l'imposer parmi

les revenus d'une période imposable ultérieure. Il en est ainsi même si une investigation

relative à cette période ultérieure permettait, elle aussi, de constater cette réserve

occulte196.

Section 7. Primauté du droit comptable sur le droit fiscal

Selon la jurisprudence constante, « sauf dérogation expresse de la loi fiscale, les bénéfices

imposables des entreprises sont déterminés conformément aux règles du droit comptable 197».

La primauté du droit comptable sur le droit fiscal pour déterminer les bénéfices

imposables des entreprises ne vaut que dans la mesure où la législation fiscale ne déroge

pas de manière explicite à la réglementation comptable.

Il en va notamment ainsi pour l’évaluation de certaines créances, dont le régime est

examiné ci-dessous.

195 Civ. Louvain, 15 décembre 2006, F.J.F., n° 2008/75. 196 Bruxelles, 6 mai 2010, F.J.F., n° 2011/259 ; Mons, 27 février 2004, F.J.F., n° 2004/160. 197 Cass., 20 février 1997, Pas., 1997, I, n° 100, p. 259. Voyez également Cass., 2 octobre 2003, F.J.F., n°

2004/32.

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Section 8. Évaluation des créances irrecouvrables ou douteuses

a) Les créances irrécouvrables

Seules peuvent être déduites des bénéfices les créances définitivement irrécouvrables,

c'est-à-dire celles dont la perte est liquide, certaine et définitive198.

Selon le ministre des Finances, en cas de faillite du débiteur, la perte ne devient certaine

que lorsque le curateur, à la clôture définitive de la faillite, fait savoir au créancier qu'il ne

sera pas payé199.

Cette position rigide du ministre des Finances est néanmoins largement contestée par les

juridictions de fond.

Ces dernières admettent en effet la déduction de la perte d'une créance dès qu'il existe des

présomptions sérieuses en ce sens. Elles admettent, ainsi, que la certitude raisonnable et

suffisante que rien ne sera distribué aux créanciers du failli peut être acquise avant la fin de

la liquidation ou avant le jugement prononçant la clôture de la faillite200.

Ainsi, en cas de faillite du débiteur, il n’est pas nécessaire d’attendre la clôture de la

procédure. Il suffit que le curateur délivre au créancier une attestation d’irrecouvrabilité,

certifiant que la créance est définitivement perdue. La perte est alors liquide, certaine et

définitive à la date mentionnée dans ladite attestation.

b) Les créances douteuses

Du point de vue fiscal, une entreprise peut également pratiquer des réductions de valeur

pour créances commerciales douteuses si certaines conditions déterminées (art. 22 de

l’AR/C.I.R. 1992) sont réunies. Il s'agit, pour l'essentiel, des conditions suivantes :

- Il existe un risque de perte nettement précisé et non un risque d'ordre général, tel

un risque conjoncturel par exemple ;

- La perte probable résulte de circonstances particulières survenues pendant la

période imposable ;

198 Cass., 15 mai 1987, Pas., 1987, I, n° 541, p. 1113. 199 Voyez Quest. parl. n° 7 de M. Peeters du 22 décembre 1981, Bull. Contr., 1982, n° 605, p. 676. 200 Voyez notamment Bruxelles, 16 nombre 1982, F.J.F., n° 83/22.

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- La perte qui peut survenir doit présenter le caractère d’une perte professionnelle

admissible.

Bien que ces conditions soient excessivement strictes, la Cour de cassation a confirmé,

dans un arrêt du 22 avril 2010, que les réductions de valeur sur créances douteuses doivent

être individualisées sur le plan fiscal pour être déductibles, même si l'entreprise travaille

avec une clientèle très nombreuse qui l'autorise à pratiquer, sur le plan comptable, des

réductions de valeur forfaitaires calculées selon des statistiques du passé régulièrement

mises à jour201.

La loi exige effectivement que les pertes soient nettement précisées et que leur probabilité

résulte, « pour chaque créance », non d'un simple risque d'ordre général, mais bien de

« circonstances particulières ». Selon la Cour de cassation, il y a donc bien, en cette

matière, une dérogation expresse du droit fiscal aux dispositions comptables.

Section 9. Précisions sur la notion de « bénéfices »

Le Code des impôts sur les revenus apporte certaines précisions à la notion de

« bénéfices » (art. 24 du C.I.R. 1992), en énumérant de manière non limitative une série

d'éléments qu’il convient de considérer comme imposables au titre de bénéfices (art. 25 du

C.I.R. 1992).

Il en est ainsi même si ces bénéfices n'apparaissent pas comme tels dans la comptabilité de

l'entreprise ou qu’ils n’ont pas, selon la terminologie courante, le caractère de « bénéfices »

proprement dits.

À cet égard, on peut notamment citer les éléments suivants.

a) La rémunération que le contribuable s'attribue pour son travail personnel

Le texte légal utilise malencontreusement le terme « rémunération », ce qui peut prêter à

confusion. En effet, ce que retire un entrepreneur est toujours un bénéfice et non une

« rémunération », au sens juridique du terme.

Tout ce qui est le produit de son entreprise lui appartient, sans qu’il doive se l’attribuer au

titre de « rémunération ». Cette « rémunération » ne constitue donc pas une charge

201 Cass., 22 avril 2010, R.G. F.08.0094.N, Juridat.

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déductible par l’entreprise mais simplement une affectation de bénéfices.

La même règle s’applique aux prélèvements en espèces que l’entrepreneur effectue, pour

ses besoins personnels ou pour ceux de son ménage. Il est d’ailleurs logique que tout

prélèvement en espèces effectué par le contribuable à son profit soit traité comme un

bénéfice de l’entreprise et non comme une charge déductible.

En d’autres termes, les bénéfices sont imposables quelle que soit leur affectation. La loi

fiscale ne se préoccupe pas de ce que l’exploitant fait des bénéfices qui résultent de son

activité.

b) Les avantages de toute nature que le contribuable obtient en raison ou à l'occasion de

l'exercice de son activité professionnelle

Le bénéfice fiscal ne se limite pas aux revenus en argent. Tout avantage, quelle qu'en soit la

nature, obtenu en raison ou à l'occasion de l'exercice de l'activité professionnelle, est

imposable dans le chef de l'entrepreneur.

À cet égard, on peut par exemple songer au détaillant qui se voit offrir par un fournisseur,

gratuitement ou à un prix très réduit, un voyage touristique privé202.

Par contre, ne sont pas imposables dans le chef de l’entrepreneur les avantages minimes

qu’il perçoit, telle sa présence à une réception offerte à des fins publicitaires par l’un de ses

fournisseurs.

Ne sont pas davantage imposables dans le chef de l'entrepreneur les gains d'une loterie,

même si sa participation à la loterie lui a été offerte en raison de son activité

professionnelle. En effet, les gains éventuellement obtenus par l’entrepreneur au moment

du tirage au sort des billets sont la seule conséquence du hasard et non le produit de son

activité.

Il y a lieu, par conséquent, de se placer au moment de l’attribution effective de l’avantage

dans le chef de l’entrepreneur pour en apprécier la nature203.

Les avantages de toute nature sont normalement comptés pour leur valeur réelle dans le

chef de leur bénéficiaire (art. 36 du C.I.R. 1992). Par « valeur réelle », il y a lieu d'entendre

202 Gand, 7 mars 1989, F.J.F., n° 89/75. 203 Cass., 10 mai 2007, F.J.F., n° 2007/278.

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le montant que l'intéressé devrait débourser dans des circonstances normales pour

recueillir pareil avantage.

Pour en faciliter la détermination, un certain nombre d'avantages font toutefois l'objet

d'une évaluation forfaitaire (art. 18 de l’AR/C.I.R. 1992).

Les avantages de toute nature et les modalités de leur évaluation sont examinés, dans le

détail, ci-dessous (à propos des rémunérations).

c) Les produits de spéculations

Les spéculations sont des opérations effectuées à la suite de prévisions, d'observations et

d'études relatives aux fluctuations de la bourse et des prix, en vue de réaliser des bénéfices

à l'occasion des variations de cours des prix du marché.

Pour être imposables à ce titre, les spéculations doivent avoir lieu dans le cadre de l'activité

professionnelle du contribuable et concerner des avoirs affectés à l’exercice de cette

activité. Cette situation se présente donc rarement dans le chef des personnes physiques.

d) Les sommes consacrées à l'extension de l'entreprise ou à l'amélioration de l'avoir

investi

Les sommes affectées à l'acquisition d'immobilisations corporelles ou incorporelles et les

dépenses concourant à la construction, à l'extension ou à l'amélioration des actifs de

l'entreprise ne constituent pas des charges déductibles de ses bénéfices.

De telles dépenses sont en réalité des investissements qui font intégralement partie des

bénéfices de l’entreprise puisqu’elle ne s’appauvrit pas du fait de ces investissements. Tel

est par exemple le cas de l’acquisition d’un immeuble professionnel ou d’une clientèle.

À la différence des dépenses d'extension de l'entreprise, les frais d'entretien et de

réparation sont déductibles et ne sont pas ajoutées aux bénéfices de l’entreprise. Dans ce

cas, il s’agit effectivement de dépenses à fonds perdus qui n’augmentent pas la valeur des

éléments d’actif de l’entreprise.

En pratique, la distinction entre ces différents types de dépenses n'est cependant pas

toujours aisée à établir.

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e) Les indemnités obtenues en cours d'exploitation

Il s’agit d’abord des indemnités obtenues en compensation ou à l'occasion de tout acte

quelconque susceptible d'entraîner une réduction de l'activité professionnelle ou des

bénéfices de l’entreprise (voy. l'art. 171, 1°, c), et 4°, b) du C.I.R. 1992).

Il s’agit ensuite des indemnités obtenues en réparation d'une perte temporaire de bénéfices

(voy. les articles. 146 et s. du C.I.R. 1992), résultant d’une maladie, d’un accident, d’un

sinistre, d’une expropriation, etc. C’est que l'on appelle généralement les « revenus de

remplacement ».

Il en va ainsi, par exemple, de l'indemnité à charge de la personne responsable d'un

accident ayant causé à l'entrepreneur une incapacité temporaire de travail, de l'indemnité

perçue par l'entrepreneur dont le camion a été endommagé par un accident et qui couvre

le chômage du camion (c'est-à-dire la perte de revenus qui en découle), de l'indemnité due

en raison du non-renouvellement d'un bail commercial ou encore de l’indemnité perçue

par un exploitant en contrepartie de son engagement de ne plus vendre certains produits

sur un territoire donné (indemnité de non-concurrence).

Section 10. Les bénéfices laissés dans l’entreprise

a) Notions

Le revenu imposable de l’entreprise comprend tous les bénéfices qui sont laissés dans

l'entreprise pour augmenter l'avoir investi ou pour couvrir des dépenses ou pertes futures.

Par exception, sont toutefois exonérées les provisions pour risques et charges qui satisfont

à certaines conditions (art. 48 du C.I.R. 1992 et art. 24 à 27 de l’Aar/C.I.R. 1992).

Selon le droit comptable, les provisions pour risques et charges ont pour objet de couvrir

des pertes ou charges nettement circonscrites quant à leur nature mais qui, à la date de

clôture de l'exercice, sont probables ou certaines, mais indéterminées quant à leur montant

(art. 50 de l’AR/SOC).

b) Conditions à l’exonération des provisions pour risques et charges

La loi fiscale permet leur déduction des bénéfices imposables de l'entreprise moyennant le

respect de certaines conditions. Il faut que, à la fois :

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i) Les charges auxquelles les provisions sont destinées à faire face soient admissibles,

par nature, au titre de frais professionnels de l'exercice comptable ultérieur au cours

duquel elles auront acquis le caractère de dettes liquides et certaines.

Sont ainsi admises, par exemple, les provisions pour condamnation pouvant

résulter d'un procès civil en cours. Inversement, une provision destinée à couvrir

un risque d'ordre général n'est pas admise.

ii) Ces charges soient considérées comme grevant normalement les résultats de la

période durant laquelle la provision est constituée.

Ainsi, sont considérées comme grevant normalement les résultats de l'exercice

comptable, les charges qui résultent de l'activité professionnelle qui a été exercée ou

d'évènements survenus pendant l'exercice comptable considéré.

Il en va par exemple ainsi lorsque, à la suite de travaux de terrassement effectués

par un entrepreneur, un mur situé à proximité du chantier s'écroule et que le

montant du dommage occasionné par l'entrepreneur n'est pas encore connu à la fin

de l'exercice comptable. Le montant estimé de l'indemnité à payer peut être

immunisé à titre de provision.

Il peut aussi s'agir de charges qui n'ont pas encore été supportées mais qui sont

cependant couvertes anticipativement par des indemnités obtenues pendant la

période imposable du chef de sinistres, expropriations, réquisitions en propriété ou

d'autres évènements analogues.

Il en est notamment ainsi lorsque, en cas d'expropriation, l’entrepreneur reçoit une

indemnité en compensation des frais professionnels exceptionnels que cet

évènement lui occasionne, pour les frais de déplacement de son activité par

exemple.

Il peut encore s'agir de charges qui se rapportent, dans une mesure proportionnelle

à la durée de l'exercice comptable, à des frais de grosses réparations d'immeubles,

matériel et outillage (à l'exclusion de leur renouvellement) qu’il convient d’effectuer

périodiquement, à des intervalles réguliers n'excédant pas 10 ans (art. 25 de

l’AR/C.I.R. 1992).

Cette situation se rencontre entre autres, par exemple, lorsqu’une machine doit

subir tous les trois ans une révision complète dont le coût s'élève à environ 750 €.

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Dans ce cas, chaque année, une provision d’un montant de 250 € peut être

constituée par l’entreprise.

La comptabilité provisionne les risques qui ont pris naissance au cours de l'exercice

considéré ou d'exercices antérieurs, alors que la déductibilité fiscale n'est accordée

que pour les charges qui grèvent l'exercice en cours. Une provision constituée

tardivement n'est pas déductible. L’entreprise doit alors attendre que la charge se

concrétise effectivement (art. 49 du C.I.R. 1992).

iii) Les provisions soient comptabilisées à la clôture des écritures comptables de la

période imposable et que leur montant apparaisse dans la comptabilité à un ou

plusieurs compte(s) distinct(s).

iv) Le montant total des provisions subsistant à l'expiration d'une période imposable

quelconque soit justifié et détaillé, par objet, dans un relevé ad hoc à annexer à la

déclaration fiscale. Ce relevé comprend une brève description des éléments qui

rendent la perte probable.

Le contribuable qui a constitué de telles provisions doit réexaminer chaque année

l'opportunité de maintenir celles-ci au regard des motifs ayant justifié leur

constitution.

Les provisions initialement constituées sont, le cas échéant, corrigées en fonction

de l'évolution de l'entreprise (art. 27 de l’AR/C.I.R. 1992). Dans un tel cas, le

montant de la provision est réintégré dans les bénéfices de la période imposable au

cours duquel sa justification disparaît.

c) Modalités

L'immunisation d'une provision pour risques et charges revêt dès lors un caractère

provisoire et ne devient définitive qu'au moment où le risque ou la charge engendre

effectivement un coût d'exploitation. À ce moment, les charges auxquelles les provisions se

rapportent doivent être imputées sur ces provisions, afin de ne pas faire bénéficier

l'entreprise d'une seconde immunisation.

Si le contribuable ne procède pas lui-même à cette imputation, les provisions

antérieurement exclues des bénéfices deviennent sans objet. Elles sont alors considérées

comme un bénéfice imposable de l'exercice comptable au cours duquel la perte ou la

charge devient admissible.

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Si la perte ou charge réellement subie est supérieure à la provision admise en

immunisation, seul l'excédent peut être déduit parmi les frais professionnels de l'exercice

comptable correspondant. Si, par contre, elle est inférieure à la provision constituée,

l'excédent de provision est assimilé à un bénéfice de l'exercice comptable au cours duquel il

est apparu.

Section 11. Les avantages anormaux ou bénévoles

a) Notion d’ « avantage anormal ou bénévole »

Certains avantages anormaux ou bénévoles accordées par l’entreprise sont réintégrés dans

ses bénéfices (art. 26 du C.I.R. 1992).

Conformément à un principe fondamental d’interprétation du droit fiscal204, la notion d’

« avantage », non définie par le législateur, doit s’entendre dans son sens usuel.

Elle peut ainsi être définie comme étant « ce qui sert, ce qui profite » à celui qui le reçoit

(Littré), « ce qui est utile, profitable » (Petit Robert), « ce qui est utile, favorable »

(Académie française) ou encore « ce qui constitue ou apporte un profit matériel ou moral »

(Larousse).

La Cour de cassation a défini les adjectifs « anormaux » et « bénévoles » en précisant, dans

les deux cas, que la loi n’exige pas nécessairement que le transfert incriminé ait été réalisé

dans l’intention de soustraire un bénéfice taxable à l’impôt.

Selon la Cour de cassation, l’avantage anormal est « celui qui, eu égard aux circonstances

économiques du moment, est contraire à l’ordre habituel des choses, aux règles ou aux

usages commerciaux établis205 ».

De son côté, l’avantage bénévole est celui qui est accordé sans qu’il constitue l’exécution

d’une obligation ou qui est accordé sans contrepartie effective206.

L’appréciation du caractère anormal de l’avantage doit se faire eu égard aux faits et

circonstances propres qui entourent l’opération. Il s’agit donc d’une question de fait qui

204 Voyez Cass., 15 décembre 1983, Pas., 1984, I, n° 209, p. 436. 205 Cass., 10 avril 2000, Pas., 2000, n° 240, p. 751. 206 Cass., 31 octobre 1979, J.D.F., 1979, p. 418.

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relève de la libre appréciation de l’administration et, le cas échéant, du juge du fond appelé

à en connaître.

En cas de différend, la preuve de l’existence d’un avantage anormal ou bénévole imposable

incombe à l’administration.

b) Champ d’application spécial

Il en va notamment ainsi des avantages anormaux ou bénévoles consentis en faveur

d’entreprises étrangères interdépendantes et de ceux consentis en faveur d’entreprises ou

de personnes établies dans des « paradis fiscaux ».

La ratio legis de cette mesure, inspirée de dispositions analogues de droit étranger et de

droit international, est de faire échec aux manœuvres d’évasion fiscale internationale par

lesquelles des entreprises établies en Belgique tentent de transférer des bénéfices vers des

pays où leur taxation est nettement plus légère, ou vers des entreprises en perte.

Le fisc peut ajouter les avantages anormaux ou bénévoles aux revenus imposables lorsque

ceux-ci sont accordés par une entreprise établie en Belgique à l’un des bénéficiaires

suivants (art. 26, al. 2 du C.I.R. 1992) :

- Soit un contribuable non résident à l’égard duquel l’entreprise établie en Belgique se

trouve directement ou indirectement dans des liens quelconques

d’interdépendance.

L’interdépendance s’interprète largement. Elle peut aussi bien être juridique (une

entreprise détient une part importante du capital de l’autre) qu’économique (une

entreprise dépend d’une autre financièrement). Elle peut par ailleurs être directe ou

indirecte (deux entreprises sont sous le contrôle commun d’une troisième par

exemple).

L’existence d’un lien d’interdépendance est une question de fait qui peut se

manifester de maintes manières, comme lorsqu’une entreprise a une position

prépondérante dans le capital d’une autre entreprise, lorsqu’une entreprise a un

pouvoir de désignation des membres du conseil d’administration d’une autre

entreprise, lorsqu’une entreprise ne peut fonctionner normalement que grâce aux

capitaux, aux produits ou à l’étroite coopération technique d’une autre entreprise,

etc.

Page 173: INTRODUCTION : LES QUATRE IMPOTS SUR LES ......Le double critère de « domicile fiscal » et de « siège de la fortune » Le texte de l’article 2, §1 er , 1°, alinéa 1er du

173

- Soit un contribuable non résident ou un établissement étranger établi dans un pays

où ils ne sont pas soumis à un impôt sur les revenus ou bénéficient d’un régime

fiscal notablement plus avantageux qu’en Belgique.

Cette hypothèse vise les entreprises établies dans ce que l’on appelle plus

communément un « paradis fiscal ».

- Soit encore un contribuable non résident (« personne interposée ») qui a des

intérêts communs avec le contribuable ou l’établissement visé à l’une des deux

hypothèses considérées ci-dessus.

c) Champ d’application général

Plus généralement, le champ d’application de cette mesure comprend également les

transferts de bénéfices vers des bénéficiaires quelconques, qu’il s’agisse de personnes

physiques ou de personnes morales, qu’ils soient établis en Belgique ou à l’étranger (art. 26,

al. 1er du C.I.R. 1992).

Dans ce dernier cas, les avantages anormaux ou bénévoles ne peuvent toutefois être taxés

que si ces avantages n’interviennent pas pour déterminer les revenus imposables de leur

bénéficiaire. Cette échappatoire n’existe pas dans les trois hypothèses considérées ci-

dessus.

Dans ce cas, une imposition effective du bénéficiaire n’est pas pour autant exigée pour

éviter le redressement. Il suffit que l’avantage « intervienne » pour déterminer les revenus

imposables de son bénéficiaire, qu’il soit établi en Belgique ou à l’étranger. Dans le même

sens, le taux d’imposition de même que l’importance finale de l’impôt importent peu.

Cette « intervention » peut dès lors prendre la forme de la perte d’une déduction fiscale,

comme, par exemple, la perte d’amortissements fiscaux chez l’acheteur d’un immeuble bâti

à un prix anormalement bas.

La taxation d’avantages anormaux ou bénévoles n’a donc pas lieu dans les relations entre

deux entreprises belges. Ceci s’explique par le fait que, lorsqu’une entreprise belge octroie

un avantage anormal ou bénévole à une autre entreprise belge, l’avantage accordé

intervient nécessairement dans la détermination du bénéfice imposable de cette dernière.

Page 174: INTRODUCTION : LES QUATRE IMPOTS SUR LES ......Le double critère de « domicile fiscal » et de « siège de la fortune » Le texte de l’article 2, §1 er , 1°, alinéa 1er du

174

Un exemple permet de mieux illustrer ce propos.

Si une entreprise belge cède un immeuble dont elle est propriétaire à une autre entreprise

belge pour un prix anormalement bas, les amortissements actés par cette dernière

entreprise seront moins importants que si elle avait acquis l’immeuble à un prix

correspondant à sa valeur vénale.

Le bénéfice éventuellement réalisé par cette dernière entreprise lors de la cession

ultérieure de l’immeuble sera en outre plus élevé que si elle l’avait acheté à un prix

correspondant à sa valeur vénale.

Ceci justifie que l’avantage accordé lors de la vente et consistant en un prix anormalement

bas ne sera pas taxable dans le chef du vendeur.

d) Exemples et contre-exemples d’avantages anormaux ou bénévoles

Les opérations suivantes peuvent être citées au titre d’avantages anormaux ou bénévoles :

- La facturation à des prix trop bas de produits fabriqués par l’entreprise belge ;

- L’achat de marchandises à des prix dépassant le cours normal du marché ;

- L’accomplissement de prestations de services en faveur d’une entreprise étrangère

sans obtenir aucune rétribution ;

- La mise à disposition gratuite ou contre une indemnité anormalement basse

d’immeubles ou de personnel.

La Cour d’appel de Mons, se référant aux éléments de fait de la cause, aux circonstances

économiques du moment et à la situation des parties afin d’apprécier le caractère anormal

ou bénévole des avantages consentis, a exclu que puisse être considéré comme un avantage

anormal ou bénévole un prêt sans intérêt qui a permis d’éviter « une aggravation

hautement préjudiciable de la perte, retentissant sur le crédit du groupe », ainsi que « la

diminution de la valeur d’actions dont la vente était déjà prévue et organisée207 ».

De même, la jurisprudence considère que ne constitue pas un avantage anormal ou

207 Mons, 13 octobre 2006, Fiscologue, 2006, n° 1049, p. 12.

Page 175: INTRODUCTION : LES QUATRE IMPOTS SUR LES ......Le double critère de « domicile fiscal » et de « siège de la fortune » Le texte de l’article 2, §1 er , 1°, alinéa 1er du

175

bénévole, l’aide financière qu’une société mère apporte à sa filiale en difficulté sous la

forme, par exemple, d’un prêt sans intérêt ou de l’abandon d’une créance détenue sur cette

filiale, pour autant qu’il soit démontré que les charges qui en résultent ont été exposées en

vue de conserver des revenus imposables provenant de la filiale ou en vue de préserver le

propre prestige commercial et financier de la société mère208.

e) Évaluation des avantages anormaux ou bénévoles

L’évaluation de l’avantage anormal ou bénévole doit s’effectuer au niveau de son

bénéficiaire. Son montant doit donc être fixé en tenant compte de sa valeur réelle pour son

bénéficiaire. Il s’agit ici aussi d’une question de fait209.

Le redressement du bénéfice opéré sur la base des avantages anormaux ou bénévoles se

fait soit par l’ajout d’un profit dont l’entreprise s’est privée, soit par le refus de la déduction

de la partie jugée excessive d’une charge qu’elle a consentie.

f) Risque de double imposition

L’imposition au titre d’avantage anormal ou bénévole peut être pratiquée indépendamment

du rejet de la dépense au titre de frais professionnels qui ne satisferont pas aux conditions

prescrites par le législateur fiscal (art. 49 du C.I.R. 1992).

L’administration fiscale peut donc refuser la déduction de frais anormaux ou bénévoles

dans le chef d’un contribuable A, que celui-ci a payés à un contribuable B, sans que le

contribuable A ne puisse invoquer le fait que les avantages anormaux ou bénévoles sont

intervenus pour déterminer les revenus imposables du contribuable B.

Un risque de double imposition, consistant en la taxation de l’avantage anormal ou

bénévole dans le chef du contribuable B et du rejet éventuel de la dépense dans le chef du

contribuable A, ne peut pas être invoqué à l’encontre de l’administration fiscale.

Le texte légal consacre au contraire la double imposition comme sanction de certains

comportements jugés abusifs. La Cour constitutionnelle et la Cour de cassation ont toutes

deux validé cette interprétation210.

208 Mons, 19 mars 2004, T.F.R., n° 2004/73. 209 Cass., 20 septembre 1972, Journ. prat. dr. fisc., 1972, p. 272. 210 Voyez notamment : C. const., 6 novembre 2008, arrêt n° 151/2008, M.B., 4 décembre 2008, p. 63824 ;

Cass., 30 octobre 2008, F.J.F., n° 2009/102.

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176

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 3.3.3.3. LLLLES RÉMUNÉRATIONS DESES RÉMUNÉRATIONS DESES RÉMUNÉRATIONS DESES RÉMUNÉRATIONS DES TRAVAILLEURSTRAVAILLEURSTRAVAILLEURSTRAVAILLEURS

Section 1. Notion de rémunération des travailleurs

Cette catégorie de revenus professionnels comprend tout ce qui est le produit direct ou

indirect du travail au service d’un employeur (art. 31, in limine, du C.I.R. 1992).

Dans ce cadre, la notion d’ « employeur » est interprétée largement. Ce qui distingue les

contribuables visés, c’est un certain rapport de dépendance, sans que l’on ne doive

nécessairement aller jusqu’au lien de subordination211.

Par « travailleurs », on entend dès lors tant les contribuables sous contrat de travail que les

fonctionnaires et agents du secteur public dont l’emploi est dit « statutaire », les militaires

de carrière, les magistrats et les ministres d’un culte public.

Les différents éléments compris parmi les rémunérations imposables des travailleurs sont

examinés ci-dessous. Ces éléments sont imposables quelles que soient la qualité du

débiteur, leur qualification ou les modalités de leur détermination et de leur octroi (art. 30,

in limine, du C.I.R. 1992).

Section 2. Traitements et salaires

Les rémunérations comprennent les traitements, salaires et toutes autres rétributions

analogues, quelle qu’en soit la qualification : commissions, gratifications, primes,

indemnités, pourboires, etc. (art. 30, al. 2, 1° du C.I.R. 1992).

Il s’agit, de manière générale, de rémunérations payées en espèces qui procèdent de

l’exécution normale des prestations de travail, quelles que soient la qualification juridique

qui leur est donnée par les parties et la périodicité des paiements y afférents.

En revanche, le paiement indu, reconnu comme tel par le travailleur et l’employeur, qui a

été restitué, même au cours d’un exercice d’imposition postérieur à celui de son

attribution, ne constitue, en tout logique, pas une rétribution212.

Section 3. Avantages de toute nature obtenus en raison ou à l’occasion de l’exercice

de l’activité professionnelle

211 Cass., 23 novembre 1965, Pas., 1966, I, p. 399. 212 Cass., 20 juin 2002, Pas., 2002, p. 1405.

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177

c) Définition d’ « avantages de toute nature »

Les rémunérations comprennent également les avantages de toute nature obtenus par le

travailleur, autrement qu’en espèces, en raison ou à l’occasion de l’exercice de son activité

professionnelle.

Si la notion d’ « avantages de toute nature » doit être interprétée dans son sens le plus

large, les avantages doivent avoir pour lien de causalité déterminant le travail, ce qui ne

serait pas, par exemple, le cas d’un geste de pure libéralité.

La notion d’« avantages de toute nature » suppose la preuve d’une causalité nécessaire

entre l’activité professionnelle et l’avantage accordé : si l’activité professionnelle n’avait pas

été exercée, l’avantage de toute nature n’aurait pas été perçu.

L’avantage de toute nature peut être attribué directement par l’employeur mais peut

également résulter de la prise en charge par celui-ci ou par un tiers de dépenses privées ou

professionnelles qui incombent normalement au travailleur.

Pour qu’une imposition puisse intervenir au titre d’avantages de toute nature dans le chef

du travailleur, il est en tout cas nécessaire qu’il ait personnellement bénéficié de l’avantage

accordé213.

La preuve que l’avantage a été accordé au travailleur et qu’il l’a été pour rémunérer les

prestations professionnelles de ce dernier incombe à l’administration.

Certains avantages, qualifiés d’ « avantages sociaux », sont par ailleurs exonérés d’impôts

dans le chef de leur bénéficiaire (art. 38, § 1, al. 1, 11°du C.I.R. 1992).

d) Exemples d’avantages de toute nature

On peut citer au titre d’avantages de toute nature les exemples suivants :

- La disposition gratuite d’un véhicule de société pour les déplacements privés du

travailleur ;

- La disposition gratuite d’un immeuble ;

213 Cass., 16 avril 1999, F.J.F., n° 99/130.

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- La disposition de marchandises à titre gratuit ou à prix réduit ;

- Le fait que le travailleur puisse, aux frais de son employeur, se faire accompagner de

son conjoint lors d’un séminaire à l’étranger ;

- L’octroi d’options sur actions ou d’actions à prix réduit ;

- La mise à disposition d’un ordinateur au travailleur qui l’utilise à des fins privées.

e) Contre-exemples d’avantages de toute nature

Par contre, ne constituent pas des avantages de toute nature imposable, par exemple :

- Le paiement direct aux enfants du travailleur d’une allocation d’études par une

ASBL, caisse auxiliaire de l’employeur (car rien ne permet d’établir que ce paiement

couvre des frais qui incomberaient légalement aux parents)214 ;

- La mise à disposition d’un logement en faveur d’un ingénieur qui assure un service

de garde 24 heures sur 24 dans une usine, et ce, même si le logement que

l’ingénieur a conservé en ville résulte d’une décision de convenance

personnelle (l’administration n’est pas juge de l’opportunité des décisions du

contribuable).

f) Évaluation des avantages de toute nature

Lorsqu’un avantage est obtenu autrement qu’en espèces, se pose le problème de son

évaluation. Le principe est de taxer l’avantage pour sa valeur réelle dans le chef de son

bénéficiaire. Le coût que représente l’avantage dans le chef de l’employeur est

généralement sans influence.

Le montant imposable de l’avantage de toute nature qu’il convient de prendre en

considération est donc celui que le travailleur devrait débourser dans des conditions

normales pour en bénéficier. Il s’agit généralement du prix qu’il paierait pour obtenir cet

avantage d’un tiers.

Lorsque l’avantage n’est pas consenti à titre gratuit, cet avantage reste imposable dans le

214 Cass., 16 avril 1999, F.J.F., n° 99/130.

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179

chef du travailleur mais son montant doit être diminué de l’intervention pécuniaire de ce

dernier (art. 36, § 2, al. 10 du C.I.R. 1992 et art. 18, § 4 du C.I.R. 1992)215.

Des forfaits ont par ailleurs été prévus pour évaluer certains avantages (art. 36 du C.I.R.

1992 et art. 18 de l’AR/C.I.R. 1992). Ces forfaits n’ont d’autre but que de faciliter

l’évaluation de certains avantages particuliers, c’est-à-dire de contribuer à la fixation rapide

et correcte de la valeur réelle de ceux-ci et d’éviter ainsi des litiges multiples sur des

montants de faible importance.

Les avantages de toute nature suivants ont notamment été évalués forfaitairement (art. 18

de l’AR/C.I.R. 1992) :

- Les prêts consentis sans intérêt ou à un taux d’intérêt réduit ;

- La disposition gratuite d’un véhicule à des fins personnelles ;

- La mise à disposition gratuite d’un immeuble bâti ;

- La disposition gratuite du chauffage et de l’électricité ;

- La disposition gratuite de domestiques, jardiniers, chauffeurs, etc. ;

- La fourniture gratuite de repas ;

- La mise à disposition gratuite d’un équipement informatique à des fins personnelles

(ordinaire, connexion et abonnement à internet).

Comme il ne peut pas être dérogé au critère d’évaluation à la valeur réelle, le contribuable

pourrait néanmoins défendre, dans des cas exceptionnels, une évaluation plus proche de

cette valeur que celle fournie par les barèmes forfaitaires, si celle-ci lui était supérieure.

En outre, lorsque l’avantage est évalué par une réglementation sociale ou économique (une

règle de sécurité sociale par exemple), cette évaluation est en principe applicable en

matière fiscale (art. 18, § 2 de l’AR/C.I.R. 1992).

215 Cass., 16 septembre 2004, F.J.F., n° 2004/278.

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Section 4. Indemnités obtenues en raison ou à l’occasion de la cessation de l’activité

a) Champ d’application

Il s’agit des indemnités payées en raison de la cessation du travail ou de la rupture du

contrat de travail, que ce soit en vertu d’une obligation légale ou contractuelle. Pour être

imposable, l’indemnité doit trouver sa cause dans l’exercice de l’activité professionnelle du

travailleur au profit de son employeur.

Sont spécialement visées les indemnités de licenciement payées au travailleur, y compris

les indemnités payées par le Fonds d’indemnisation des travailleurs licenciés en cas de

fermeture d’entreprise (art. 31, al. 2, 3° du C.I.R. 1992).

Il s’agit également des indemnités perçues par un travailleur en échange du respect d’une

clause de non-concurrence216.

Les indemnités de non-concurrence sont le produit indirect du travail, l’engagement de

non-concurrence naissant de l’exercice du contrat de travail et portant sur une activité

déterminée définie par le contrat. Or, la notion de « rémunération » est définie largement

et comprend tout produit direct ou indirect du travail.

Dans ce cadre, l’accord de non-concurrence, même s’il est conclu après la rupture du

contrat de travail, ne peut être dissocié de la relation de travail rompue, de sorte que le lien

causal avec l’activité professionnelle exercée antérieurement est établi.

b) Indemnités de licenciement et indemnités pour dommage moral

Si en droit privé, il faut distinguer les indemnités de licenciement des indemnités pour

préjudice moral subi à l’occasion d’un licenciement, tel n’est en principe pas le cas en droit

fiscal.

La jurisprudence considère généralement que même les indemnités pour dommage moral

trouvent leur origine dans le lien de travail et ont donc un caractère professionnel qui les

rend imposables217.

Tel est le cas par exemple des indemnités accompagnant une fermeture d’entreprise, et ce,

216 Cass., 3 novembre 1997, Pas., 1997, I, n° 442, p. 1117. 217 Voyez notamment Liège, 20 mars 1996, Act. fisc., 1996, n° 27 ; Bruxelles, 18 octobre 1996, F.J.F., n° 96/258.

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même s’il est exact qu’un licenciement a des conséquences psychologiques négatives218.

Mais tout est une question d’appréciation des circonstances propres à chaque cas d’espèce.

Il peut en effet arriver que les indemnités pour dommage moral ne trouvent pas leur

origine dans le lien de travail.

Ainsi, l’indemnité perçue par le travailleur en compensation du dommage moral subi ne

semble pas être imposable en cas de non-respect manifeste, par l’employeur, des règles

applicables en cas de fermeture d’entreprise et de licenciement collectif219.

Il en est également ainsi de l’indemnité perçue par le travailleur en compensation du

dommage moral en cas de violation, par l’employeur, de son engagement conventionnel de

maintenir l’emploi à un niveau donné pendant une période déterminée220.

c) Modalités d’imposition

Les indemnités imposables jouissent en principe d’une imposition à un taux atténué (art.

171, 5°, a) du C.I.R. 1992). Elles sont taxées au taux moyen de la dernière année d’activité

professionnelle normale, si ce taux est plus favorable au contribuable. L’influence de la

progressivité de l’impôt sur une indemnité qui représenterait plusieurs années de

rémunérations est ainsi évitée.

Dans ce cadre, la Cour de cassation a confirmé la position administrative selon laquelle

l’année antérieure au cours de laquelle le contribuable n’aurait pas eu d’activité

professionnelle rémunérée ne peut servir d’année de référence221.

En revanche, la dernière année d’activité ne doit pas forcément être une année d’activité en

tant que salarié. Si, pendant la dernière année normale d’activité, une profession

indépendante a été exercée, c’est le taux de cette année qui doit être pris en considération.

Section 5. Indemnités obtenues en réparation totale ou partielle d’une perte

temporaire de rémunérations

Les indemnités accordées en compensation d’une perte totale ou partielle de

rémunérations due à la maladie, l’invalidité, le chômage ou un accident, font également

218 Gand, 15 mai 1997, F.J.F., n° 97/157. 219 Civ. Liège, 13 décembre 2004, F.J.F., n° 2005/218. 220 Mons, 18 septembre 2009, J.L.M.B., 2010, p. 184. 221 Cass., 17 janvier 2008, Juridat.

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partie des rémunérations des travailleurs. Ces indemnités sont imposables au titre de

revenus professionnels que leur débiteur soit l’employeur ou un tiers.

À titre exemplatif, les éléments suivants tombent dans ce registre (art. 31, al. 2, 4° et 31bis

du C.I.R. 1992) :

- Les allocations de chômage.

- Les indemnités d’incapacité temporaire (accidents du travail, maladies

professionnelles) qui réparent une perte de rémunérations.

Pour que les prestations soient imposables, il faut, d’une part, que la victime subisse

une perte de revenus professionnels et, d’autre part, que l’indemnité répare cette

perte de revenus professionnels.

La Cour de cassation a ainsi jugé que n’est pas imposable l’indemnité allouée en

vertu d’un contrat d’assurance dit « revenu garanti » lorsque le redevable n’a subi au

cours de l’exercice fiscal considéré aucune perte de revenus professionnels222.

- Les indemnités payées soit par un tiers responsable du fait dommageable ayant

entraîné une perte temporaire de rémunérations, soit par l’assureur subrogé à ce

tiers.

Ces prestations constituent des revenus de remplacement en considération desquels le

Code des impôts sur les revenus octroie une réduction d’impôt (art. 146 et s. du C.I.R.

1992).

Section 6. Rémunérations proméritées par les travailleurs même si elles sont payées

à ses ayants cause

Il s’agit des rémunérations qui sont payées aux travailleurs après la cessation complète et

définitive de leur activité professionnelle, ou des rémunérations qui sont payées aux ayants

cause de ces travailleurs.

Cette dernière hypothèse recouvre par exemple le paiement aux héritiers de

rémunérations afférentes à une activité professionnelle exercée antérieurement au décès

du travailleur (art. 31, al. 2, 5° du C.I.R. 1992).

222 Cass., 23 septembre 1993, Pas., 1993, I, n° 371, p. 740.

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Section 7. Indemnités allouées au travailleur et remboursement de dépenses

propres à l’employeur

a) Principes

Les rémunérations imposables comprennent encore les indemnités allouées au travailleur,

sauf celles en remboursement de dépenses propres à l’employeur (art. 31, al. 2, 1°, in fine,

du C.I.R. 1992).

Les dépenses dites « propres à l’employeur » sont des dépenses prises en charge par le

travailleur pour le compte de son employeur et qui lui sont remboursées par ce dernier. Il

s’agit, par exemple, des frais d’hôtel pris en charge par le travailleur lors de missions

effectuées à l’étranger pour son employeur.

Le remboursement au travailleur de ces dépenses ne lui procure aucun avantage et sont

déductibles dans le chef de l’employeur. En revanche, les frais à charge de l’employeur et

récupérables à ce titre, comme le remboursement à un représentant de commerce de ses

frais de déplacement, ne constituent pas des dépenses déductibles pour l’employé.

Les dépenses propres à l’employeur peuvent faire l’objet d’un remboursement réel sur la

base de pièces justificatives ou d’un remboursement forfaitaire, pourvu qu’il soit établi de

manière sérieuse, c’est-à-dire sur base de « normes qui sont le résultat d’observations et de

recoupements nombreux223 ».

b) Charge de la preuve

Selon la Cour de cassation, il y a lieu de présumer que les sommes payées par l’employeur

en remboursement de frais professionnels ne constituent pas un revenu professionnel

imposable dans le chef de l’employé qui les perçoit, sans que celui-ci ait à justifier de leur

emploi à l’égard de l’administration fiscale224.

L’administration conserve néanmoins le droit d’établir que les « indemnités » allouées

constituent en fait des « rémunérations » imposables225. Si l’administration reste en défaut

d’apporter la preuve qu’il s’agit de rémunérations déguisées, l’employé est donc couvert par

223 Com. I.R., n° 31/36. 224 Cass., 2 janvier 1962, Pas., 1962, I, p. 507. 225 Cass., 23 janvier 1987, F.J.F., n° 88/79.

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une présomption de non-imposabilité.

Par contre, si l’administration prouve que tout ou partie des sommes déclarées comme

« remboursement de frais propres à l’employeur » constitue(nt) en fait des rémunérations

déguisées, celles-ci sont taxées dans le chef de l’employé.

c) Indemnités forfaitaires et remboursement de dépenses propres à l’employeur

L’administration fiscale présume imposable, jusqu’à preuve du contraire, les indemnités

forfaitaires allouées au travailleur. Par hypothèse, l’employeur ne dispose pas, dans ce cas,

des pièces justificatives qui lui permettraient d’établir l’affectation de l’indemnité à la

couverture effective de frais qui lui sont propres.

De son côté, la jurisprudence estime généralement que la présomption de non-

imposabilité doit subsister malgré le caractère forfaitaire de l’indemnité, quitte à

considérer que le travailleur (sur lequel la charge de la preuve ne repose pas) puisse rendre

plausible l’existence réelle des frais que ces indemnités servent précisément à couvrir226.

Certaines indemnités forfaitaires que l’administration considère elle-même comme « fixées

d’après des normes sérieuses » échappent en tout état de cause à l’imposition dans le chef

de leur bénéficiaire, pour autant que la réalité des frais exposés soit simplement

démontrée. Il s’agit de celles dont le montant ne dépasse pas celui des indemnités de même

nature accordées par l’État belge aux membres de son personnel.

On songe spécialement aux indemnités pour déplacements de services par un travailleur

du secteur privé avec sa voiture personnelle qui ne dépassent pas le barème prévu pour les

agents de l’État. Les indemnités forfaitaires que le ministère des Affaires étrangères alloue

à ses fonctionnaires pour des missions à l’étranger peuvent également être utilisées dans le

secteur privé pour déterminer la quote-part de l’indemnité afférente à des déplacements de

service à l’étranger qui est exonérée dans le chef de l’employé au titre de remboursement de

frais propres à l’employeur.

226 Voyez notamment en ce sens : Anvers, 15 février 2000, T.F.R., 2000, n° 185, p. 681 ; Bruxelles, 3 mai 2012,

R.G.C.F., 2012, p. 357.

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185

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 4.4.4.4. LLLLES RÉMUNÉRATIONS DESES RÉMUNÉRATIONS DESES RÉMUNÉRATIONS DESES RÉMUNÉRATIONS DES DIRIGEANTS DDIRIGEANTS DDIRIGEANTS DDIRIGEANTS D’’’’ENTREPRISEENTREPRISEENTREPRISEENTREPRISE

Section 1. Notion de « dirigeant d’entreprise »

La loi distingue deux catégories de dirigeants d’entreprise :

- Il y a, d’une part, la personne physique qui exerce un mandat d’administrateur, de

gérant, de liquidateur, ou une fonction analogue au sein de la société (art. 32, al. 1er,

1° du C.I.R. 1992) (première catégorie) ;

- Il y a, d’autre part, la personne physique qui exerce au sein de la société une

fonction dirigeante ou une activité dirigeante de gestion journalière, d’ordre

commercial, technique ou financier, en dehors d’un contrat de travail (art. 32, al.

1er, 2° du C.I.R. 1992), mais sans être investie d’un mandat (seconde catégorie).

La loi considère que toutes les rémunérations allouées par une société qui possède la

personnalité juridique, quelle que soit sa forme sociale, à des mandataires de droit ou de

fait ou à des dirigeants d’entreprises opérant en dehors d’un contrat de travail, sont des

rémunérations de dirigeants d’entreprise.

Cette considération est valable indépendamment du fait que la personne physique

concernée soit ou non aussi actionnaire de la société.

Section 2. Première catégorie de dirigeant d’entreprise

La première catégorie de dirigeants d’entreprise comprend les mandataires sociaux, c’est-

à-dire les administrateurs, gérants et liquidateurs de sociétés, ainsi que les personnes

physiques exerçant une fonction analogue.

La notion de « fonction analogue » couvre des attributions qui, par leur étendue ou leur

importance, sont normalement propres aux administrateurs de société, sans que soit

requis un mandat de l’assemblée générale de la société227. L’exercice de fonctions analogues

suppose, à tout le moins, le dépassement de la simple gestion journalière de la société228.

227 Cass., 17 novembre 1956, Pas., 1957, I, p. 285. 228 Cass., 4 mars 1958, Rev. prat. soc., 1959, p. 100.

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186

Toute personne physique qui est mandatée par la société pour exercer un mandat

statutaire ou une fonction analogue entre dans la première catégorie de dirigeant

d’entreprise. Il n’existe aucune autre condition.

A contrario, si l’associé d’une société privée à responsabilité limitée (S.P.R.L.) preste

uniquement dans les liens d’un contrat de travail, sans être nommé gérant ni être considéré

comme exerçant une fonction analogue, sa rémunération est imposée comme celle d’un

travailleur et non comme celle d’un dirigeant d’entreprise.

Section 3. Seconde catégorie de dirigeant d’entreprise

La seconde catégorie de dirigeants d’entreprise comprend les personnes physiques qui

exercent au sein d’une société une fonction dirigeante ou une activité dirigeante de gestion

journalière, d’ordre commercial, technique ou financier, en dehors d’un contrat de travail.

Il ressort de cette définition que, pour relever de cette seconde catégorie de dirigeant

d’entreprise, quatre conditions doivent être remplies de façon cumulative :

- La personne doit exercer une fonction dirigeante ou une activité journalière ;

- Cette fonction doit se rapporter à la gestion journalière (art. 525 et 526 du Code des

sociétés), d’ordre commercial, technique ou financier ;

- Pareille fonction ou activité doit être exercée en dehors d’un contrat de travail ;

- Elle doit être exercée au sein de la société.

Section 4. Notion de « rémunération »

Les rémunérations des dirigeants d’entreprise sont toutes les rétributions allouées ou

attribuées à une personne physique qui appartient à l’une des deux catégories de dirigeants

visées ci-dessus. La qualité du débiteur, la qualification de ces rétributions ou leurs

modalités de détermination et d’octroi sont sans importance (art. 30 du C.I.R. 1992).

Les rémunérations des dirigeants d’entreprise comprennent notamment (art. 32, al. 2 du

C.I.R. 1992) :

- Les tantièmes (attributions d’une participation aux bénéfices de la société), les

jetons de présence (rémunérations des membres d’un conseil d’administration), les

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187

émoluments et toutes autres sommes fixes ou variables allouées par des sociétés,

autres que des dividendes ou des remboursements de frais propres à la société ;

- Les avantages, indemnités et rémunérations analogues à ceux visés dans le chef des

travailleurs, parmi lesquels les avantages de toute nature et les indemnités de

rupture (art. 31, al. 2, 2° à 5° du C.I.R. 1992).

L’avantage de toute nature attribué à un dirigeant d’entreprise constitue une rémunération

imposable dès lors qu’il trouve directement ou indirectement son origine dans l’exercice de

ses fonctions de dirigeants, et ce, quelle que soit la manière ou la forme de sa perception.

S’il n’est pas nécessaire que ces avantages soient, à proprement parler, la contrepartie d’une

prestation professionnelle229, il incombe à l’administration fiscale de démontrer que

l’avantage a été attribué à la personne physique intéressée en sa qualité de dirigeant

d’entreprise plutôt que, par exemple, en sa qualité d’actionnaire.

Les évaluations forfaitaires des avantages de toute nature prévues sont également

applicables aux dirigeants d’entreprise (art. 36, § 2 du C.I.R. 1992 et art. 18 de l’AR/C.I.R.

1992).

Section 5. Extension de la notion de « rémunération » pour les dirigeants de la

première catégorie à certains loyers et avantages locatifs

Pour les dirigeants d’entreprise de la première catégorie (art. 32, al. 1er, 1° du C.I.R. 1992),

la notion de rémunération comprend encore la quotité requalifiée de certains loyers et

avantages locatifs.

L’hypothèse visée par cette mesure est celle du dirigeant qui donne en location à la société

qu’il administre un immeuble qui lui appartient à un prix exagéré, afin de remplacer un

revenu professionnel par un revenu immobilier.

Pour combattre ce mécanisme, le loyer qui dépasse le loyer dit « normal », fixé

forfaitairement à 5/3 du revenu cadastral revalorisé, est requalifié en rémunération et

imposable au titre de revenu professionnel (art. 13 du C.I.R. 1992 et art. 1 de l’AR/C.I.R.

1992).

Par ailleurs, de la quotité du loyer ainsi requalifiée en rémunération de dirigeants

229 Cass., 16 janvier 1992, Pas., 1992, I, n° 252.

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188

d’entreprises, les frais relatifs au bien immobilier donné en location ne sont pas

déductibles.

La ratio legis de cette mesure explique qu’elle ne soit en principe applicable qu’aux

dirigeants d’entreprise qui exercent un mandat rémunéré au sein de la société, et non à

ceux qui exercent en son sein un mandat non rémunéré.

Exemple :

Monsieur A. loue un bien immobilier lui appartenant à la société privée à responsabilité

limitée SBS, au sein de laquelle il exerce la fonction de gérant. Le montant du loyer s’élève à

20.000 € et le revenu cadastral du bien loué à 2.500 €.

La quotité du loyer qui est assimilée à une rémunération dans le chef de Monsieur A se

calcule comme suit :

Loyer 20.000 €

Revenu cadastral 2.500 €

Revenu cadastral revalorisé (ex. d’imp. 2014) (2.500,00 x 4,19) 10.475 €

Revenu immobilier (10.475 x 5/3) 17.458,33 €

Rémunération (20.000 – 17.458,33) 2.541,67 €

En revanche, le dirigeant d’entreprise qui concède un droit d’emphytéose ou de superficie à

sa société n’est pas exposé au risque de requalification des revenus immobiliers qu’il

perçoit de ce chef.

Cette mesure ne s’applique pas davantage lorsque le dirigeant d’entreprise est le locataire

principal du bien immobilier et qu’il sous-loue le bien à la société.

Enfin, si le bien immobilier est donné en location à la société par le conjoint du dirigeant

d’entreprise ou ses enfants, la quotité du loyer qui excède le loyer dit « normal » n’est pas

non plus considérée comme un revenu professionnel, puisqu’aucun texte légal ne vise ces

derniers.

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Section 6. Principe d’attraction

a) Notion

La fiscalité des dirigeants d’entreprise est régie par un principe, communément dénommé

« principe d’attraction ».

Ce principe implique que toutes les sommes et tous les avantages payés ou attribués par

une société à ses dirigeants sont considérés fiscalement comme des rémunérations de

dirigeants d’entreprise, quand bien même ils rémunéreraient, dans les faits, d’autres tâches

que celles exercées en tant que dirigeants d’entreprise.

La cause de l’attribution du revenu est sans influence puisque le principe d’attraction a

pour effet de soustraire certains revenus de la catégorie et du régime fiscal auxquels ils

appartiennent normalement. Ce principe s’inscrit donc en marge de l’économie générale

du Code des impôts sur les revenus qui distingue plusieurs catégories de revenus selon

leur nature et leur cause et détermine en conséquence leur régime d’imposition.

Lorsqu’un contribuable exerce dans une même société un mandat rémunéré de dirigeant

d’entreprise et une activité salariée (sous contrat de travail), les revenus obtenus de

l’exercice de cette dernière activité sont dès lors considérés par l’administration fiscale

comme des revenus provenant d’une activité de dirigeant d’entreprise, même si cette

rémunération ne présente, dans les faits, aucun lien avec l’exercice de la fonction de

dirigeant d’entreprise.

Ce principe ne vise que les revenus qui ont la nature d’un revenu professionnel. Sont donc

exclus de son champ d’application les revenus immobiliers (tels les loyers non assimilés à

des rémunérations), les revenus mobiliers (les intérêts, les dividendes, etc.) et les revenus

divers.

b) Exceptions

Ce principe connaît par ailleurs deux exceptions qui concernent les dirigeants d’entreprise

de la première catégorie.

En premier lieu, il n’est pas applicable aux personnes physiques qui exercent un mandat

non rémunéré d’administrateur, de gérant, de liquidateur ou des fonctions analogues dans

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des associations sans but lucratif (ou autres personnes morales visées à l’art. 220, 3° du

C.I.R. 1992).

Il n’en est toutefois ainsi que pour autant que les revenus de biens immobiliers qu’ils

perçoivent éventuellement de cette même association (ou personne morale) ne soient pas

pris en considération pour la requalification au titre de rémunérations.

En second lieu, il n’est pas non plus applicable aux personnes physiques qui exercent des

fonctions salariées dans une société dans laquelle elles exercent également un mandat non

rémunéré d’administrateur, de gérant, de liquidateur ou des fonctions analogues.

De la même manière, cette seconde exception ne vaut que pour autant que les revenus de

biens immobiliers qu’ils perçoivent éventuellement de cette société ne soient pas pris en

considération pour la requalification au titre de rémunérations.

Section 7. Précompte professionnel et versements anticipés

Les dirigeants d’entreprises sont soumis à la retenue du précompte professionnel mais

aussi aux versements anticipés en cas d’insuffisance de précompte retenu. Cette situation

peut particulièrement se rencontrer si une personne physique exerce des fonctions

dirigeantes au sein de plusieurs sociétés.

On peut à cet égard préciser qu’une société n’est pas libre de ne pas verser le précompte

professionnel relatif aux rémunérations de son dirigeant au motif que celui-ci effectue des

versements anticipés d’impôt. Le précompte professionnel n’est jamais un choix mais

résulte d’une obligation légale.

En cas de non-versement du précompte, l’administration fiscale enrôle effectivement celui-

ci dans le chef de la société, sans qu’il ne soit tenu compte de la situation de la personne

physique concernée.

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 5.5.5.5. LLLLES RÉMUNÉRATIONS DESES RÉMUNÉRATIONS DESES RÉMUNÉRATIONS DESES RÉMUNÉRATIONS DES CONJOINTS AIDANTSCONJOINTS AIDANTSCONJOINTS AIDANTSCONJOINTS AIDANTS

Sont également considérés comme des revenus professionnels les rémunérations des

conjoints aidants dits « sans statut social ». Il s’agit des conjoints aidants qui n’exercent

aucune autre activité leur procurant une protection sociale propre (et pour lesquels la loi-

programme du 24 décembre 2002 a mis sur pied un régime social spécifique). Est « un

conjoint aidant » le conjoint d’un travailleur indépendant qui aide effectivement celui-ci

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191

dans l’exercice de son activité.

Est plus précisément imposable au titre de revenu professionnel l’attribution d’une quote-

part des bénéfices ou des profits au conjoint aidant qui, pendant la période imposable

considérée, n’exerce aucune autre activité professionnelle lui procurant une protection

sociale propre au moins égale à celle du statut social des travailleurs indépendants (art. 30,

3°, 33 et 33bis du C.I.R. 1992).

Cette quote-part doit correspondre à une rémunération normale pour les prestations

effectuées par le conjoint aidant, sans qu’elle puisse dépasser 30 % du montant net des

revenus provenant de l’activité exercée avec l’aide du conjoint. Il est fait exception à cette

limitation s’il est manifeste que les prestations du conjoint aidant correspondent à une part

plus importante des revenus.

Pour ce qui concerne les conjoints aidants dits « avec statut social », c’est-à-dire les

conjoints aidants bénéficiant d’un statut social à part entière en raison d’une activité

professionnelle propre exercée par ailleurs, un régime fiscal spécifique est d’application

(art. 86 du C.I.R. 1992). Ce régime est commenté plus amplement ci-dessous.

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 6.6.6.6. LLLLES PROFITSES PROFITSES PROFITSES PROFITS

Section 1. Activités génératrices de profits

a) Professions libérales, charges et offices

Les activités dont les revenus sont imposables au titre de profits (art. 23, § 1, 2°, CIR) sont

tout d’abord celles des professions libérales : avocats, médecins, dentistes, vétérinaires,

architectes, conseils fiscaux, experts-comptables, réviseurs d’entreprises, écrivains, etc.

Il s’agit aussi des « charges et offices » dont sont titulaires les notaires, huissiers de justice,

titulaires d’un mandat politique, etc.

Les titulaires de professions libérales, charges et offices sont des personnes qui exercent

une activité professionnelle en qualité d’indépendant mais qui, à la différence de celles qui

perçoivent des bénéfices, n’ont aucune activité commerciale, industrielle, agricole ou

artisanale. On considère généralement que la nature de leurs prestations est

principalement d’ordre intellectuel.

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b) Autres occupations lucratives

Les revenus imposables au titre de profits sont également ceux qui résultent de l’exercice d’

« autres occupations lucratives », soit de toutes les activités « professionnelles » autres que

celles visées par une autre catégorie de revenus professionnels.

En réalité, en appréhendant les revenus tirés d’ « autres occupations lucratives », la loi a

entendu exclure toute dérogation à la règle générale de la taxation des revenus à caractère

professionnel.

Il s’agit dès lors d’une catégorie résiduaire de revenus professionnels comprenant, de

manière générale, tous les revenus professionnels qui ne sont pas considérés comme des

bénéfices ou des rémunérations.

Dès qu’une personne physique accomplit un ensemble d’opérations qui sont suffisamment

fréquentes et liées entre elles pour constituer une occupation continue et habituelle, elle se

voit soumise dès lors à l’impôt des personnes physiques sur les profits tirés de ces

opérations, et ce, au titre de revenus professionnels230.

Ainsi, il a notamment été jugé que les prix en argent gagnés par les sportifs de haut niveau

doivent être imposés dans leur chef comme des profits231. Il a également été jugé que

constituent des profits les revenus d’une activité répétée d’achat à bas prix et de

restauration d’immeubles (il s’agissait de 33 immeubles sur une période de 13 ans), avec

recours quasi systématique à l’emprunt, pour ensuite les donner en location232.

Section 2. Notion de « profits »

Les activités génératrices de profits étant ainsi définies, le Code des impôts sur les revenus

(art. 27 du C.I.R. 1992) précise ensuite que les profits sont constitués par les recettes (et

non par les créances), par les avantages de toute nature obtenus en raison ou à l’occasion

de l’exercice de l’activité professionnelle et par les plus-values sur des biens affectés à

l’exercice de la profession.

Ils sont encore constitués par certaines indemnités obtenues pendant l’exercice de la

profession, soit en raison d’une réduction de l’activité ou des profits qu’elle génère, soit en

230 Cass., 23 avril 1968, Pas., 1968, I, p. 1005 ; Cass., 7 décembre 2000, Pas., 2000, n° 676, p. 1896. 231 Civ. Bruges, 8 juin 2010, Cour. fisc., 2010, p. 613. 232 Cass., 14 décembre 2007, F.J.F., n° 2008/100.

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193

raison d’une perte temporaire de profits.

Ils sont enfin constitués par les indemnités perçues par les parlementaires agissant en tant

que tels ou pour l’exercice de fonctions spéciales au sein de leur assemblée (hormis les

remboursements de frais), et par les conseillers provinciaux.

Les indemnités qui compensent une réduction de l’activité ou des profits et celles qui

réparent une perte temporaire de profits sont imposées selon le même régime que celui

applicable aux entreprises.

Section 3. Taxation sur les recettes

Contrairement aux entreprises (titulaires de bénéfices), imposées sur leurs créances, les

titulaires de professions libérales, charges, offices et autres occupations lucratives sont en

principe imposées sur les recettes qu’ils perçoivent.

Les profits sont donc imposables au moment où ils sont effectivement perçus, et non au

moment où les prestations professionnelles sont fournies ou facturées.

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 7.7.7.7. LLLLES BÉNÉFICES OU PROFES BÉNÉFICES OU PROFES BÉNÉFICES OU PROFES BÉNÉFICES OU PROFITS DITS DITS DITS D’’’’ACTIVITÉS ANTÉRIEUREACTIVITÉS ANTÉRIEUREACTIVITÉS ANTÉRIEUREACTIVITÉS ANTÉRIEURESSSS

Section 1. Notion

Les bénéfices ou profits d’activités antérieures comprennent en premier lieu ceux qui sont

obtenus ou constatés (art. 23, § 1er, 3° et 28 du C.I.R. 1992) :

- Soit en raison ou à l’occasion de la cessation complète et définitive d’une activité

professionnelle indépendante (entreprise, profession libérale, charge, etc.) ou d’une

branche de cette activité.

On songe par exemple aux plus-values réalisées par un contribuable personne

physique sur la cession d’éléments de l’actif à l’occasion d’une mise en société.

- Soit postérieurement à la cessation de l’activité mais découlant de l’activité

professionnelle antérieurement exercée.

On songe par exemple aux arriérés d’honoraires.

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194

Les bénéfices ou profits d’activités antérieures sont susceptibles d’être taxés distinctement

sauf si la globalisation avec les autres revenus du contribuable s’avère plus intéressante

pour ce dernier.

Section 2. Revenus obtenus ou constatés en raison ou à l’occasion de la cessation

complète et définitive de l’activité professionnelle

a) Champ d’application

Le régime des plus-values de cessation ne s’applique qu’en cas de cessation complète et

définitive de l’activité professionnelle indépendante. Il se rapporte aux plus-values portant

sur des éléments de l’actif affectés à l’activité professionnelle (au sens de l’art. 41 du C.I.R.

1992).

Sont considérés comme étant affectés à l’activité professionnelle les immobilisations

acquises ou constituées dans le cadre de cette activité et figurant parmi les éléments de

l’actif, celles qui font l’objet d’amortissements ou de réductions de valeur admis

fiscalement, et les immobilisations incorporelles constituées pendant l’exercice de l’activité

professionnelle et qui figurent parmi les éléments de l’actif.

La cessation d’une branche d’activité est assimilée à la cessation complète et définitive de

l’activité professionnelle. Une branche d’activité est l’ensemble des éléments investis dans

une division de l’entreprise qui constitue, du point de vue technique, une exploitation

indépendante, c’est-à-dire un ensemble capable de fonctionner par ses propres moyens.

Un exemple permet de mieux éclairer la notion de « branche d’activité ».

Une entreprise à deux activités distinctes : la fabrication de pâtisseries et la livraison de ces

produits aux détaillants. L’exploitant décide de conserver l’activité de fabrication mais de

céder l’activité de transport et le matériel nécessaire à cette dernière activité.

L’entreprise cède de la sorte une branche d’activité parce que la branche « transport » de

l’entreprise est distincte de la fabrication des produits et peut être cédée sans porter

atteinte à la branche « fabrication ».

Pour déterminer si une plus-value est imposable à ce titre, il importe d’examiner, au regard

de l’ensemble des circonstances de fait, si la cession de l‘élément d’actif concerné résulte ou

non de la cessation de l’activité du contribuable.

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195

Un certain délai peut ainsi s’être écoulé entre la cessation complète et définitive de

l’activité professionnelle et la réalisation de la plus-value. Pour être imposable, celle-ci doit

avoir été obtenue en raison ou à l’occasion de la cessation de l’activité professionnelle.

Pour échapper à l’impôt, le contribuable peut établir que l’élément concerné a été utilisé

durablement à des fins privées entre le moment de la cessation et la cession et a, partant,

perdu sa nature d’actif affecté à l’activité professionnelle.

b) Période d’imposition

La plus-value est soumise à l’impôt à concurrence de sa valeur réelle au cours de l’année

durant laquelle elle a été obtenue ou constatée233.

Une plus-value « obtenue » est imposable au moment où la créance du cédant à l’égard du

cessionnaire devient certaine et exigible. Si la cession est soumise à une condition

suspensive, la créance ne devient certaine et liquide qu’au moment où la condition se

réalise234.

La plus-value « constatée » dans un acte quelconque (partage, déclaration de succession,

...) est quant à elle imposable à la date de l’acte qui en révèle l’existence.

c) Taux d’imposition

Selon la nature des actifs réalisés, le taux d’imposition des plus-values de cessation est en

principe de 16,5 % ou de 33 % (art. 171, 1°, c) et 4°, b) du C.I.R. 1992).

Le taux de 33 % s’applique aux plus-values sur immobilisations incorporelles (brevets,

marques, savoir-faire, etc.) ne dépassant pas le total du bénéfice des quatre années

précédentes. Le solde de la plus-value, c’est-à-dire la quotité de la plus-value qui dépasse

ce plafond, est globalisé et imposé au taux marginal de l’impôt des personnes physiques.

Le taux de 16,5 % s’applique à toutes les plus-values sur immobilisations corporelles ou

financières, ainsi qu’aux plus-values sur immobilisations incorporelles si la cessation de

l’activité a lieu à partir de 60 ans, résulte du décès ou est définitive et forcée.

Dans cette dernière circonstance, les plus-values sur immobilisations incorporelles sont

233 Cass., 2 décembre 1999, F.J.F., n° 2000/102. 234 Cass., 19 juin 2008, F.J.F., n° 2009/39.

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196

donc imposées au taux de 16,5 %, et non de 33 %, dans la mesure où elles n’excèdent pas le

total du bénéfice des quatre années précédentes. Le solde est également globalisé et

imposé au taux plein de l’impôt des personnes physiques.

d) Régimes d’immunisation

La loi prévoit des régimes d’immunisation temporaire des plus-values réalisées. Ces

régimes visent les plus-values qui se dégagent lors de la continuation de l’activité

professionnelle du contribuable par son conjoint ou l’un ses descendants (art. 46, § 1er, 1°

du C.I.R. 1992) et, sous certaines conditions, lors de l’apport d’une « universalité de biens »

(par exemple un fonds de commerce) ou d’une branche d’activité à une société (art. 46, §

1er, 2° du C.I.R. 1992).

Ces régimes ne prévoient qu’une immunisation temporaire des plus-values dans le chef du

contribuable qui cède son activité professionnelle. La loi considère en effet que le

cessionnaire (le contribuable qui continue l’activité professionnelle du cédant) est censé

prendre la place de ce dernier.

La loi considère donc fictivement, en cas d’immunisation temporaire, que les actifs cédés

n’ont pas changé de propriétaire, sous réserve de dispositions particulières (art. 46, § 2 du

C.I.R. 1992).

Section 3. Revenus obtenus ou constatés postérieurement à la cessation de l’activité

Certaines indemnités peuvent également être perçues après la cessation de l’activité ou

d’une branche d’activité (art. 28, al. 1, 3°, a) et b du C.I.R. 1992).

Si elles compensent une réduction de l’activité ou des bénéfices ou des profits, elles sont

imposées au taux moyen d’imposition subi par le contribuable sur les revenus de sa

dernière activité normale, sauf si la globalisation lui est plus favorable (art. 171, 5°, c du

C.I.R. 1992). Ce même régime s’applique aux arriérés d’honoraires perçus après la

cessation de l’activité professionnelle.

Dans la plupart des cas, la taxation au taux moyen est plus avantageuse pour le

contribuable que la globalisation de ses revenus, mais il peut en être autrement des

revenus perçus après la cessation de l’activité professionnelle puisque cette cessation

entraîne forcément une réduction des revenus imposables.

En revanche, si elles réparent une perte temporaire de bénéfices ou de profits, elles sont

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197

soumises au régime des revenus de remplacement, c’est-à-dire à l’impôt progressif par

tranches de l’impôt des personnes physiques. Elles bénéficient cependant d’une réduction

d’impôt (art. 146 et s. du C.I.R. 1992).

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 8.8.8.8. LLLLES PENSIONSES PENSIONSES PENSIONSES PENSIONS,,,, RENTES ET ALLOCATIORENTES ET ALLOCATIORENTES ET ALLOCATIORENTES ET ALLOCATIONS EN TENANT LIEUNS EN TENANT LIEUNS EN TENANT LIEUNS EN TENANT LIEU

Section 1. Champ d’application

De manière générale, les pensions, rentes (viagères ou temporaires) et allocations en

tenant lieu, imposables au titre de revenus professionnels comprennent trois catégories de

revenus.

a) Il s’agit d’abord des pensions, rentes et allocations en tenant lieu qui se rattachent

directement ou indirectement à l’activité professionnelle du contribuable (art. 34, § 1er, 1°

du C.I.R. 1992).

Sont imposables à ce titre les pensions de retraite et de survie (légales et extralégales),

rentes et allocations en tenant lieu, quels qu’en soient le débiteur, la qualification et les

modalités de détermination et d’octroi.

On songe particulièrement aux pensions légales versées sur base de la législation relative à

la sécurité sociale à des personnes qui y sont assujetties (ouvriers, employés, etc.), aux

pensions légales des personnes soumises à un statut légal ou réglementaire (comme les

agents de l’État), aux pensions légales des travailleurs indépendants et aux pensions

complémentaires versées par l’employeur aux anciens membres de son personnel en vertu

d’une obligation contractuelle.

Sont également imposables à ce titre les pensions, rentes et allocations en tenant lieu, qui

constituent la réparation totale ou partielle d’une perte permanente de revenus

professionnels qui résulte d’un accident ou d’une maladie.

La qualification du revenu, l’identité du débiteur (employeur, fonds des accidents du

travail, fonds des maladies professionnelles, tiers responsable d’un accident, compagnie

d’assurance, etc.) et les modalités de détermination et d’octroi du revenu sont ici aussi sans

importance.

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198

Cela vise notamment les allocations perçues par la victime d’un accident du travail ou

survenu sur le chemin du travail, ou par la victime d’une maladie professionnelle, frappée

d’incapacité permanente, si ces allocations viennent réparer une perte permanente de

rémunérations.

Les rentes légales allouées aux ayants droit du contribuable (son conjoint, ses enfants ou

ses parents), si celui-ci vient à décéder à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie

professionnelle, sont en revanche exonérées d’impôt. L’administration présume dans cette

hypothèse, pour des raisons pratiques de preuve, que les indemnités perçues ne réparent

pas une perte de revenus.

b) Il s’agit ensuite des pensions, pensions complémentaires, rentes, capitaux et valeurs de

rachat de contrats d’assurance-vie, constitués en tout ou en partie au moyen de primes

pour lesquelles le contribuable a bénéficié d’une réduction ou d’une déduction d’impôt, ou

constitué au moyen de cotisations patronales, ainsi que des pensions complémentaires des

travailleurs indépendants.

c) Enfin, sont visées les prestations versées dans le cadre d’une épargne-pension (compte-

épargne ou assurance-épargne) constituée au moyen de versements ou primes ayant donné

lieu à une réduction ou à une déduction d’impôt.

Section 2. Éléments hors champ d’application

Les indemnités perçues ne sont imposables que si elles réparent une perte effective de

revenus professionnels. Ainsi, les indemnités obtenues en réparation d’un dommage moral

ou matériel ou encore les remboursements de frais médicaux ne sont pas imposables au

titre de revenus professionnels (mais elles le sont en général comme revenus mobiliers ou

revenus divers).

Les rentes versées à un autre titre que celui de pension, comme les rentes viagères payées

en contrepartie de la vente d’un immeuble ou les rentes alimentaires payée en raison d’une

obligation alimentaire résultant du droit civil, ne sont pas non plus imposables au titre de

revenus professionnels.

Section 3. Particularités de l’imposition

À moins qu’elles bénéficient d’une taxation à un taux distinct (10 %, 16,5 %, 18 %, 20 % ou

33 %), ces différentes catégories de revenus sont imposables globalement, moyennant

l’octroi d’une réduction d’impôt (art. 146 et s. du C.I.R. 1992).

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Les pensions, rentes et allocations en tenant lieu qui sont payées ou attribuées globalement

à deux conjoints sont considérés comme des revenus de chaque conjoint en proportion des

droits personnels dont dispose chacun d’eux. Cette proportion est fixée par l’organisme qui

se porte garant pour l’attribution des droits à la pension (art. 35 du C.I.R. 1992).

Les participations bénéficiaires attachées aux contrats d’assurance-vie sont par ailleurs

exonérées d’impôt des personnes physiques à la condition qu’elles soient versées en même

temps que les pensions ou capitaux auxquels elles se rattachent (art. 40 du C.I.R. 1992).

L’assureur est lui-même imposé sur ces participations bénéficiaires. Il supporte en effet

une taxe annuelle sur les participations bénéficiaires non déductible dans son chef (art.

198, al. 1, 4° du C.I.R. 1992). L’assureur répercute économiquement cette charge sur

l’assuré, de telle sorte que c’est l’assuré qui la supporte in fine.

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 9.9.9.9. LLLLES PLUSES PLUSES PLUSES PLUS----VALUES RÉALISÉESVALUES RÉALISÉESVALUES RÉALISÉESVALUES RÉALISÉES,,,, OBTENUES OU EXPRIMÉOBTENUES OU EXPRIMÉOBTENUES OU EXPRIMÉOBTENUES OU EXPRIMÉES DANS LE CADRE DE ES DANS LE CADRE DE ES DANS LE CADRE DE ES DANS LE CADRE DE

LLLL’’’’EXERCICE DEXERCICE DEXERCICE DEXERCICE D’’’’UNE ACTIVITÉ PROFESSUNE ACTIVITÉ PROFESSUNE ACTIVITÉ PROFESSUNE ACTIVITÉ PROFESSIONNELLEIONNELLEIONNELLEIONNELLE

Section 1. Généralités

Pour rappel, les bénéfices des entreprises comprennent les accroissements de valeur des

éléments d’actif affectés à l’exercice de l’activité professionnelle lorsque ces plus-values ont

été réalisées ou exprimées dans la comptabilité (art. 24, al. 1er, 2° du C.I.R. 1992).

Les profits des professions libérales, charges, offices ou autres occupations lucratives

comprennent également les plus-values réalisées sur des éléments de l’actif affectés à

l’exercice de la profession (art. 27, al. 2, 3° du C.I.R.1992).

Une plus-value est dite « réalisée » lorsqu’elle est obtenue lors de l’aliénation (la vente par

exemple), y compris l’échange ou l’apport, du bien qui la génère et qui quitte alors le

patrimoine de son bénéficiaire. Par contre, la plus-value « exprimée » est celle qui découle

simplement de la réévaluation d’un bien dans la comptabilité d’une entreprise.

Le Code des impôts sur les revenus prévoit divers cas d’exonération, définitive ou

temporaire, ou d’imposition à un taux réduit de certaines plus-values ou quotités de plus-

values, exprimées ou réalisées pendant l’exercice de l’activité professionnelle (art. 44, 44bis,

44ter, 46, 47 et 171 du C.I.R. 1992).

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La plupart de ces hypothèses d’exonération ou d’imposition à un taux réduit sont

envisagées ci-dessous.

Section 2. Plus-values non visées

En principe, une personne physique n’est pas imposée, faute de disposition expresse en ce

sens, sur les gains en capital qu’elle réalise en dehors de son activité professionnelle, ou

dans le cadre d’une activité rémunérée de travailleur ou dirigeant d’entreprise (art. 23, §

1er, 4° du C.I.R. 1992).

Les seules exceptions à cette règle concernent certaines plus-values imposées au titre de

revenus divers (art. 90 du C.I.R. 1992), examinées dans le titre qui y est consacré.

Section 3. Plus-values réalisées

Une plus-value réalisée peut être soit volontaire, soit forcée.

Une plus-value est dite « volontaire » lorsqu’elle découle de la volonté délibérée du

contribuable. Elle se rencontre par exemple suite à une vente, un apport en société ou un

échange.

En principe, doivent être considérées comme réalisées volontairement toutes les plus-

values réalisées ou constatées à l’occasion d’un acte translatif, déclaratif ou constitutif de

droits réels sur un bien affecté à l’exercice de l’activité professionnelle du contribuable.

La plus-value forcée se rencontre quant à elle en cas d’expropriation, de réquisition en

propriété, de perception d’une indemnité suite à un sinistre, etc. À l’inverse de la plus-

value volontaire, la plus-value forcée est indépendante de la volonté du contribuable.

La plus-value réalisée est égale à la différence positive entre, d’une part, l’indemnité perçue

(en cas de plus-value forcée) ou la valeur de réalisation du bien (en cas de plus-value

volontaire), diminuée des frais de réalisation, et, d’autre part, sa valeur d’acquisition ou

d’investissement, diminuée des réductions de valeur et amortissements admis

antérieurement.

La valeur d’acquisition ou d’investissement correspond, selon le cas, au prix d’acquisition,

au coût de revient ou à la valeur d’apport du bien (art. 35 et s. de l’AR/SOC).

Les frais de réalisation exposés par le contribuable qui réalise une plus-value doivent être

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201

déduits du montant de l’indemnité ou de la valeur de réalisation du bien. Il s’agit des frais

qu’il a exposés au moment de la réalisation de la plus-value (frais de notaire, frais de

courtage, frais bancaires, etc.) et des frais exposés antérieurement qui ont un rapport avec

la réalisation du bien (des frais de publicité par exemple).

Section 4. Plus-values exprimées

Les plus-values simplement exprimées mais non réalisées sur tous les biens autres que des

stocks ou des commandes en cours d’exécution sont immunisées (art. 44, § 1er, 1° du C.I.R.

1992).

Restent néanmoins imposables les plus-values exprimées sur participations et valeurs de

portefeuille, dans la mesure où des réductions de valeur actées antérieurement par rapport

à leur valeur d’acquisition sont compensées par une hausse subséquente de leur valeur.

Une plus-value latente est imposable dans les mêmes conditions (art. 24, al. 1er, 3° du

C.I.R. 1992).

Section 5. Quotité monétaire des plus-values

Les plus-values réalisées sur des immobilisations incorporelles, corporelles ou financières

ainsi que sur d’autres valeurs de portefeuille sont exonérées pour une quotité monétaire

qui représente, de façon très imparfaite, la partie de la plus-value censée résulter de

l’inflation (art. 2, § 1er, 7° et 44, § 1er, 2° du C.I.R. 1992).

L’inflation correspond à une hausse généralisée des prix durant une période considérée. Il

résulte de ce phénomène monétaire que l’on peut acheter moins de biens et de services

qu’antérieurement pour un même euro. Inversement, un euro vaut moins qu’avant.

Pour tenir compte de l’inflation dans le calcul de la plus-value, le prix d’achat du bien est

multiplié par un coefficient dépendant de l’année de son acquisition. Du prix d’achat

réévalué, on déduit les amortissements et réductions de valeur antérieurement admis pour

obtenir le montant exonéré de la quotité monétaire.

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Exemple :

Un bâtiment, acquis en 1920 pour 1.000.000 de francs belges (25.000 €) est vendu

aujourd’hui, après avoir été entièrement amorti, pour l’équivalent de 10.000.000 de francs

belges (250.000 €).

Le prix d’achat réévalué du bien est de 6.150.000 francs belges (152.454,5 €),

correspondant au prix d’achat (1.000.000 francs belges) multiplié par un coefficient de

6,15.

Dans la mesure où les amortissements admis sont de 1.000.000 francs belges, la quotité

monétaire de la plus-value s’élève à 5.150.000 francs belges (6.150.000 – 1.000.000)

(127.665,2 €).

La plus-value de 10.000.000 francs belges n’est par conséquent imposable que pour

4.850.000 francs belges (10.000.000 – 5.150.000) (120.228,3 €).

L’importance de ce mécanisme s’est toutefois considérablement amoindrie au fil du temps

puisque les biens acquis après 1949 ne peuvent pas bénéficier de cette immunité (comme

s’il n’existait plus d’inflation depuis 1950 !).

Section 6. Plus-values réalisées sur certains immeubles non bâtis

Les plus-values réalisées sur des biens immeubles non bâtis (des terrains) qui se rapportent

à des exploitations agricoles ou horticoles sont totalement et inconditionnellement

immunisées au titre de revenus professionnels, même si les terres sont affectées à l’activité

professionnelle du contribuable.

Elles peuvent cependant se voir imposer distinctement au titre de revenus divers si les

biens immeubles sont détenus depuis moins de huit ans (art. 44, § 2 et 90, 8° du C.I.R.

1992).

Section 7. Plus-values à long terme réalisées sur des immobilisations corporelles et

financières

Les plus-values sur immobilisations corporelles et financières affectées à l’exercice de

l’activité professionnelle du contribuable depuis plus de cinq ans sont imposées

distinctement au taux réduit de 16,5 %.

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Pour ce qui concerne les plus-values sur immobilisations corporelles, le taux distinct ne

trouve toutefois application que si le contribuable n’opte pas pour le régime de la taxation

étalée envisagé ci-dessous (art. 47 et 171, 4°, a) du C.I.R. 1992).

Si la plus-value est réalisée sur des immobilisations corporelles ou financières qui n’ont pas

été affectées à l’exercice de l’activité professionnelle du contribuable depuis plus de cinq

ans, elle est imposable au taux plein, soit le taux progressif par tranches de l’impôt des

personnes physiques.

Section 8. Report de taxation (ou « taxation étalée ») sous condition de remploi

a) Champ d’application personnel

Peuvent seules bénéficier de ce régime les plus-values réalisées par les exploitants

d’entreprises industrielles, commerciales ou agricoles (y compris les marchands de biens),

et les titulaires de professions libérales, charges, offices ou occupations lucratives (art. 47

du C.I.R. 1992). Il s’agit des contribuables qui perçoivent respectivement des bénéfices et

des profits.

b) Champ d’application matériel

Ce régime s’applique aux biens qui ont la nature d’immobilisations corporelles ou

incorporelles lorsqu’il s’agit de :

- Plus-values forcées, réalisées à la suite d’un sinistre, d’une expropriation, d’une

réquisition en propriété ou d’un autre évènement analogue, quelle que soit la durée

de détention des biens ;

- Plus-values réalisées volontairement, lors de la vente, de l’échange ou de l’apport en

société de biens immobilisés depuis plus de cinq ans.

Il n’est toutefois pas requis que le contribuable qui a réalisé la plus-value en ait été

propriétaire pendant cinq ans.

Pour rappel, du point de vue comptable, constitue une immobilisation un bien affecté

durablement, par une entreprise, à son exploitation.

Il en découle que, même s’ils sont non amortissables, les terrains affectés durablement à

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l’exercice de l’activité professionnelle sont également susceptibles de bénéficier de ce

régime puisqu’ils ont la nature d’immobilisations corporelles235.

En revanche, les immeubles que les marchands de biens détiennent à titre de stocks et non

d’immobilisations ne peuvent bénéficier de l’immunité. Dans ce cadre, sont à ranger parmi

les stocks les immeubles acquis ou construits en vue de leur revente.

Pour ce qui concerne les immobilisations incorporelles (brevets, marques, savoir-faire,

etc.), le régime ne s’applique aux plus-values réalisées lors de leur cession que dans la

mesure où ces immobilisations ont fait l’objet d’amortissements fiscalement admis.

Ce n’est pas le cas des éléments incorporels qui ont été constitués par l’entreprise elle-

même et non acquis de tiers, comme une clientèle constituée par l’entreprise236.

c) Mécanisme

Lors de sa réalisation, la plus-value est immunisée temporairement. Son imposition est

reportée et a lieu proportionnellement aux amortissements des biens acquis en remploi.

Exemple :

Un bien immeuble d’une valeur fiscale de 12.500 € est vendu pour 25.000 €.

Si le contribuable remploie le prix de vente dans l’achat d’une machine de 25.000 €

amortissable linéairement en 5 ans, l’amortissement déductible est chaque année de 5.000

€ (25.000 € x 20 %).

Par conséquent, la plus-value réalisée de 12.500 € est imposée chaque année à raison de

2.500 € (12.500 € / 5).

Cette taxation a lieu par le rejet des charges déductibles, chaque année, de 2.500 €

d’amortissement.

Ce système revient en pratique à reporter l’imposition de la plus-value. Pour le

contribuable, le fait d’être imposé sur une période étalée plutôt que sur un exercice donné

235 Com. I.R., 47/21. 236 Cass., 15 mars 2012, Pas., 2012, n° 173, p. 601.

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représente en soi un avantage financier considérable.

Plus généralement, la quotité de la plus-value à imposer peut être calculée au moyen de la

formule suivante : Q = (P x A) / V, où :

- Q est la quotité de la plus-value imposable pour une période imposable considérée ;

- P est le montant de la plus-value réalisée ;

- A est le montant des amortissements des actifs de remplacement ;

- V est le prix de vente ou l’indemnité à remployer.

Lorsque le bien acquis en remploi cesse d’être affecté à l’activité professionnelle du

contribuable, par exemple parce qu’il est lui-même aliéné, échangé ou apporté, et a fortiori

lors de la cessation de l’activité professionnelle, le solde subsistant de la plus-value devient

imposable.

Il n’est donc pas possible d’effectuer un « remploi du remploi » et de remplacer le bien

acquis en remploi par un autre en conservant l’immunité temporaire de la plus-value.

Si le remploi n’est pas réalisé dans les formes et les délais requis, la plus-value est

considérée comme un bénéfice ou un profit de la période imposable au cours de laquelle

expire le délai de remploi. Un intérêt de retard est dû à partir du 1er janvier de l’exercice

pour lequel l’immunité a été accordée (art. 416 du C.I.R. 1992).

d) Notion de « plus-value forcée »

Le régime de la taxation étalée s’applique non seulement aux plus-values réalisées

volontairement (art. 47 du C.I.R. 1992) mais également aux plus-values forcées. Il s’agit de

plus-values réalisées sur des immobilisations incorporelles ou corporelles à la suite d’un

sinistre, d’une expropriation, d’une réquisition en propriété ou d’un autre événement

analogue, quelle que soit la durée de détention des biens au moment où la plus-value est

réalisée.

La notion de sinistre (ou d’autre événement analogue à un sinistre) ne suppose pas

nécessairement une faute. Un sinistre peut être occasionné par une tempête ou d’autres

circonstances relevant de la force majeure.

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On entend par « événement analogue » un événement que le contribuable n’a pu ni

empêcher ni prévenir et qu’il n’a pu que subir, entraînant du même coup une charge fiscale

qui le prive des moyens de reconstruction de son patrimoine dans son état antérieur.

Il s’agit, en d’autres termes, d’événements que le bénéficiaire des indemnités n’a pas

seulement subis contre son gré mais qui doivent aussi être le fait d’une autorité ou avoir le

caractère brutal, rapide et imprévisible d’un sinistre.

e) Conditions du remploi

La plus-value réalisée volontairement ne bénéficie de la taxation étalée que si un montant

égal au prix de vente des éléments d’actif aliénés (et non le seul montant de la plus-value

réalisée) est remployé par le contribuable.

En cas d’aliénation forcée, la somme à remployer correspond au montant de l’indemnité

perçue.

En cas d’apport en société et en cas d’échange, la somme à remployer correspond

respectivement à la valeur des actions de la société reçues en raison de l’apport et à la

valeur du bien reçu en échange.

Le remploi doit être effectué en immobilisations incorporelles ou corporelles

amortissables, neuves ou non, utilisées dans un État membre de l’Espace économique

européen (Union Européenne + Norvège + Islande + Liechtenstein) pour l’exercice de

l’activité professionnelle. Les actions ou parts, ainsi que les terrains, ne peuvent pas servir à

titre de remploi puisqu’ils ne sont pas amortissables.

En revanche, la loi n’exige pas que le remploi soit effectué en éléments d’actif de même

nature que ceux aliénés. Le remploi en plusieurs éléments amortissables est permis.

Lorsque le remploi est effectué en bien(s) partiellement affecté(s) à l’exercice de l’activité

professionnelle du contribuable, seul le montant de la valeur fiscalement amortissable du

(des) bien(s), c’est-à-dire la proportion de la quotité professionnelle du (des) bien(s), est

prise en considération à titre de remploi, à l’exclusion de sa quotité privée.

Ainsi, si un bien acquis en remploi est affecté à 50 % seulement à l’exercice de l’activité

professionnelle du contribuable, seul 50 % du prix d’acquisition du bien est pris en

considération à titre de remploi.

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Le contribuable qui opte pour la taxation étalée est tenu de faire connaître son choix au

service de taxation en joignant à la déclaration fiscale relative à la période imposable de

réalisation de la plus-value un relevé particulier.

Le contribuable indique dans ce relevé quels investissements il affecte en remploi d’une

plus-value déterminée. Ce relevé doit également être produit pour les exercices

d’impositions suivants, jusqu’à la taxation complète de la plus-value.

f) Délais de remploi

Le délai ordinaire de remploi est de :

- 3 ans après la fin de la période imposable de perception de l’indemnité si la plus-

value est forcée ;

- 3 ans à partir du début de la période imposable de réalisation de la plus-value si

celle-ci est volontaire.

Exemple :

Si un contribuable personne physique ou société qui clôture ses comptes par année civile

réalise une plus-value d’une manière non volontaire en 2015, cela signifie que le point de

départ du délai de remploi prendra cours après la fin de la période imposable de

perception de l’indemnité, c’est-à-dire le 1er janvier 2016. Le contribuable pourra donc,

dans ce cas, faire usage du régime du remploi jusqu’au 31 décembre 2018.

Si, au contraire, le contribuable réalise une plus-value volontaire en 2015, le point de

départ du délai de remploi commencera le 1er janvier de la période au cours de laquelle la

plus-value a été réalisée, c’est-à-dire le 1er janvier 2015. Le contribuable pourra donc, dans

ce cas, faire usage du régime du remploi jusqu’au 31 décembre 2017.

La plus-value résultant d’une vente est censée réalisée le jour où le vendeur a acquis une

créance certaine et liquide sur l’acheteur, sans qu’il y ait lieu de tenir compte de la date de

perception effective du prix.

Pour les plus-values réalisées volontairement, le délai de 3 ans est porté à 5 ans lorsque le

bien acquis en remploi est un immeuble bâti, un navire ou un aéronef. Cette prolongation

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du délai de remploi s’explique par le délai plus long nécessaire pour acquérir ce genre de

bien, surtout à l’état neuf.

Ce délai de 5 ans prend cours, au choix du contribuable :

- Soit le premier jour de la période imposable de réalisation de la plus-value ;

- Soit le premier jour de la pénultième période imposable précédant celle de la

réalisation de la plus-value.

Ce second point de départ possible permet notamment au contribuable qui va céder un

immeuble, de construire, avant la vente de cet immeuble, un nouvel immeuble, destiné à

abriter son activité professionnelle, éligible à titre de remploi de la cession encore à

intervenir.

Le remploi doit, en tout état de cause, être effectué avant la cessation de l’activité

professionnelle du contribuable.

Exemple :

En pratique, lorsqu’un contribuable personne physique ou société qui clôture ses comptes

par années civile réalise une plus-value en 2015 et décide d’acquérir un immeuble bâti, un

navire ou un aéronef en remploi, il aura le choix en ce qui concerne la prise de cours du

délai de remploi :

- soit le point de départ du délai de remploi prendra cours le 1er janvier 2015, ce qui lui

permettra de pouvoir faire usage du régime du remploi jusqu’au 31 décembre 2019 ;

- soit le point de départ du délai du remploi sera considéré comme ayant pris cours le 1er

janvier 2013 (« le premier jour de la pénultième période imposable »). Dans ce cas, il

pourra utiliser le régime du remploi jusqu’au 31 décembre 2017.

Enfin, la force majeure ne peut pas dispenser du respect des conditions d’immunisation de

la plus-value, mais elle peut avoir pour effet de proroger le délai de remploi jusqu’au

moment où elle cesse d’exister.

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Section 9. Plus-values réalisées sur des véhicules d’entreprise

Pour encourager les entreprises à remplacer leurs véhicules d’entreprise affectés au

transport rémunéré de personnes ou de biens par des véhicules respectueux de

l’environnement, le législateur fiscal a entièrement immunisé, sous condition de remploi,

les plus-values réalisées sur des véhicules d’entreprise (art. 44bis du C.I.R. 1992).

Ce régime s’applique aux plus-values réalisées à l’occasion d’un sinistre, d’une réquisition

en propriété ou d’un autre événement analogue (plus-values forcées), ainsi qu’aux plus-

values réalisées volontairement pour autant que les véhicules aient la nature

d’immobilisation corporelle depuis plus de trois ans au moment de leur aliénation.

Les véhicules d’entreprise sont plus particulièrement définis comme étant :

- Soit des véhicules affectés au transport rémunéré de personnes : autobus, autocars,

taxis, etc. ;

- Soit des véhicules affectés au transport de biens : camions, tracteurs, remorques ou

semi-remorques avec un poids maximal admis d’au moins quatre tonnes.

Pour que le contribuable puisse bénéficier de ce régime, il doit remployer le montant de

l’indemnité perçue (en cas de plus-value forcée) ou de la valeur de réalisation (en cas de

plus-value volontaire) à l’acquisition de véhicules d’entreprise qui répondent à des normes

écologiques déterminées (art. 20 de l’AR/C.I.R. 1992) et qui sont affectés à l’exercice de

l’activité professionnelle du contribuable.

Le délai de remploi est de :

- Un an expirant après la fin de la période imposable de perception de l’indemnité en

cas de plus-value forcée ;

- Deux ans prenant cours le 1er jour de l’année civile de la réalisation de la plus-value

si elle est volontaire.

Les plus-values réalisées sur les véhicules d’entreprise sont entièrement exonérées, d’abord

provisoirement (tant que le remploi n’a pas eu lieu), ensuite définitivement (en cas de

remploi dans les formes et les délais prévus).

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À défaut de remploi dans les formes et les délais prévus, la plus-value est taxable pour la

période au cours de laquelle le délai de remploi expire. La taxation de la plus-value est

assortie d’un intérêt de retard à partir du 1er janvier de l’exercice d’imposition pour lequel

l’immunité a été accordée (art. 416, al. 1 du C.I.R. 1992).

Pour bénéficier du régime fiscal d’exonération, le contribuable doit aussi joindre un relevé

ad hoc à sa déclaration fiscale afférente à la période imposable de réalisation de la plus-

value ainsi qu’à ses déclarations suivantes, jusqu’à l’exercice d’imposition lors duquel le

délai de remploi expire.

Section 10. Plus-values réalisées sur actions ou parts ou immobilisations

financières

Bien que cette situation se rencontre très rarement dans le chef de personnes physiques, de

telles plus-values, réalisées par une personne physique dans le cadre de son activité

professionnelle, sont imposables (art. 45 du C.I.R. 1992).

Si les actions ou parts ou immobilisations financières ont été acquises depuis plus de cinq

ans, la plus-value réalisée peut cependant bénéficier d’une taxation distincte à un taux de

16,5 % (art. 171, 4°, a) du C.I.R. 1992).

Section 11. Plus-values réalisées sur voitures et minibus

Les plus-values relatives à des voitures et minibus (art. 66 du C.I.R. 1992) ne sont prises en

considération, pour une éventuelle taxation, qu’à concurrence des trois quarts de leur

montant (art. 24, al. 3 et 27, al. 3 du C.I.R. 1992).

Il s’agit d’un corollaire de la limitation à 75 % de la déduction des dépenses de voiture au

titre de frais professionnels, examinée ci-dessous.

Section 12. Les plus-values internes

Le mécanisme des « plus-values internes » consiste pour une personne physique à apporter

ou vendre avec plus-value une participation qu’elle détient à une holding qui lui est liée. La

plus-value ainsi réalisée est dite « interne ».

Ce mécanisme permettait ensuite de sortir les réserves et bénéfices futurs de la société

apportée sans perception du précompte mobilier, via des réductions du capital (ou des

remboursements du prix de cession) par la holding.

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En principe, de telles opérations n’étaient pas taxables sauf à titre de revenus divers

lorsqu’elles excédaient le cadre de la gestion normale du patrimoine privé.

Les articles 96 à 99 de la loi-programme du 25 décembre 2016 ont introduit dans le Code

des impôts sur les revenus 1992 un nouveau régime visant à « assurer l’application du

précompte mobilier dans le cas d’un apport des actions ou parts d’une société dans une

autre société, qui n’entraîne pas de taxation de plus-value [à titre de revenus divers], suivi

par un remboursement de capital libéré de cette dernière société »237

L’article 184, al. 3, du CIR 92, dispose désormais que :

« Dans l'éventualité d'un apport d'actions ou parts pour lequel les plus-values, soit, sont

exonérées en vertu de l'article 45, § 1er, alinéa 1er, 2°, et ne tombent pas sous l'exonération

des plus-values sur actions ou parts prévue à l'article 192, soit, ne sont pas imposables

conformément à l’article 90, alinéa 1er, 9°, premier tiret, ou à l’article 228, § 2, 9°, h, le

capital libéré à l'occasion de l'échange de nouvelles actions ou parts émises par la société

bénéficiaire de l'apport est égal à la valeur d'acquisition des actions ou parts apportées dans

le chef de l'apporteur. »

Il en résulte que le capital réellement libéré de la holding n’est augmenté qu’à concurrence

du capital libéré représenté par les titres apportés dans le capital de la société. La

différence, c’est-à-dire le montant de la plus-value, est à reprendre en réserves taxées.

La comptabilisation de cette réserve taxée implique la réalisation d’un bénéfice taxable

dans le chef de la holding. Les travaux parlementaires indiquent que ce bénéfice sera

neutralisé par une augmentation équivalente de la situation de début des réserves dans la

déclaration fiscale de la holding.

Cette écriture comptable est donc sans conséquence pour la holding mais est, en revanche,

source d’une nouvelle imposition dans le chef de l’entrepreneur. En effet, ultérieurement à

cette opération, le capital réellement libéré reste à son niveau historique et la distribution

des réserves taxées emportera une taxation au titre de dividendes, au taux de 30 % (tarif en

vigueur depuis le 1er janvier 2017).

237 Doc. Parl., session 2016-2017, n° 54 2208/001, p. 48.

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212

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 10.10.10.10. LLLLES EXONÉRATIONS À CAES EXONÉRATIONS À CAES EXONÉRATIONS À CAES EXONÉRATIONS À CARACTÈRE SOCIALRACTÈRE SOCIALRACTÈRE SOCIALRACTÈRE SOCIAL OU CULTURELOU CULTURELOU CULTURELOU CULTUREL

Section 1. Prestations sociales ou para-sociales immunisées

Le Code des impôts sur les revenus immunise diverses prestations sociales (art. 38 du

C.I.R. 1992).

Pour certaines d’entre elles, l’exonération expresse se justifie dans la mesure où elles

constituent, à tout le moins indirectement, le produit d’un travail.

Pour d’autres, le Code ne fait au contraire que confirmer l’exonération dont elles auraient

dû bénéficier de toute façon. Sont visées ici des prestations qui n’ont, soit aucun lien

véritable, soit aucun lien direct, soit aucun lien nécessaire avec l’exercice d’une activité

professionnelle.

Parallèlement à ces prestations sociales, il y a des prestations para-sociales immunisées qui

ont un lien indirect avec l’exercice d’une activité professionnelle mais qui n’ont pas le

caractère d’un revenu professionnel.

Parmi les prestations immunisées, il convient de citer, par exemple :

- Les allocations de naissance, primes d’adoption et allocations familiales légales ;

- Les allocations aux personnes handicapées ;

- Les pensions ou rentes accordées aux victimes militaires et civiles des deux guerres

et à leurs ayants droit ;

- Les allocations pour frais funéraires.

Section 2. Indemnité « vélo » et mise à disposition d’une bicyclette

Est encore immunisée l’indemnité kilométrique allouée spécifiquement pour les

déplacements effectivement faits en vélo entre le domicile et le lieu de travail à

concurrence d’un montant maximum indexé de 0,145 € par kilomètre (art. 38, § 1er, al. 1er,

14° du C.I.R. 1992).

L’immunisation est étendue à la mise à disposition d’une bicyclette et d’accessoires (en ce

compris les frais d’entretien et de garage), pour autant que la bicyclette soit utilisée

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effectivement pour les déplacements entre le domicile et le lieu de travail.

Cette exonération n’est pas cumulable, pour le même déplacement, avec celle portant sur

l’indemnité octroyée par l’employeur en remboursement de frais de déplacement entre le

domicile et un lieu fixe de travail (art. 38, § 1er, al. 1er, 9°, et 2 du C.I.R. 1992).

Cette exonération ne peut donc être combinée avec celle de 250 € indexés si elle concerne

le même trajet. Rien n’empêche toutefois le contribuable de se rendre à la gare en vélo et de

prendre ensuite le train pour se rendre à son travail pour combiner les deux exonérations.

Section 3. Remboursement de frais de déplacement

Est immunisée dans le chef du travailleur l’indemnité reçue de son employeur en

remboursement de ses frais de déplacement entre son domicile et son lieu du travail, à

concurrence de montants et selon des distinctions déterminés (art. 38, § 1, al. 1, 9° du

C.I.R. 1992).

La nature de l’indemnité octroyée par l’employeur est en revanche sans importance. Elle

peut être légale, réglementaire, statutaire, libre, etc.

Au contraire de l’exonération de l’indemnité « vélo », cet avantage est réservé aux

indemnités payées aux travailleurs dont les frais professionnels sont fixés forfaitairement.

Pour les travailleurs qui déduisent leurs frais réels, l’intervention patronale n’est donc plus

exonérée mais constitue un avantage imposable.

L’exonération n’est pas non plus accordée aux dirigeants d’entreprise.

Pour déterminer l’étendue de l’exonération, une distinction est opérée selon le mode de

transport utilisé par le travailleur :

- S’il s’agit d’un transport public en commun, la totalité de l’indemnité est exonérée.

Il en va ainsi même si l’intéressé ne possède pas d’abonnement et que l’utilisation de

ce mode de transport n’est pas régulière.

- Si le travailleur a recours à un transport collectif des membres du personnel

organisé par l’employeur, l’indemnité est exonérée à concurrence du prix d’un

abonnement première classe en train pour cette distance.

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214

Par « transport collectif organisé », il y a lieu d’entendre le transport en commun

des membres du personnel au moyen de tout véhicule susceptible de permettre le

transport d’au moins deux personnes.

Il peut s’agir d’un autocar, un autobus, un minibus, un véhicule utilitaire, une

voiture ou une motocyclette. Le covoiturage peut également être considéré comme

un transport collectif si le trajet est effectué par deux travailleurs au moins.

Il n’est cependant question de « transport collectif organisé » par l’employeur que si

ce dernier en fixe les règles et en gère les modalités d’utilisation.

- Si le travailleur a opté pour d’autres modes de transport que ceux visés ci-dessus, le

montant exonéré est limité à 250 € indexés par an (380 € pour l’exercice

d’imposition 2016).

Les trajets effectués à pied sont également visés par la catégorie des « autres modes

de transport ».

Lorsque différents modes de transport sont utilisés pour le déplacement entre le domicile

et le lieu de travail, l’intervention patronale exonérée est fixée par mode de transport. Les

exonérations peuvent donc être cumulées.

Si l’employeur octroie une indemnité globale, l’exonération est d’abord appliquée à

concurrence de 125 € indexés (190 € pour l’exercice d’imposition 2016), ensuite à

concurrence des frais de transport public en commun et, pour le solde, à concurrence du

prix d’un abonnement première classe en train.

Section 4. Avantages sociaux

Sont immunisés les avantages sociaux qu’obtiennent les travailleurs et dirigeants

d’entreprise, ainsi que les anciens travailleurs et anciens dirigeants d’entreprise (ou encore

leurs ayants droit), qui peuvent être rangés dans l’une des trois catégories suivantes (art.

38, § 1, al. 1, 11° du C.I.R. 1992).

a) Il s’agit d’abord des avantages dont il n’est pas possible, en raison des modalités de leur

octroi, de déterminer le montant effectivement obtenu par chacun des bénéficiaires.

Cela concerne le transport collectif de personnel organisé par l’employeur entre le

domicile et le lieu de travail, aux voyages collectifs pour le personnel, aux festivités

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organisées à l’occasion de la mise à la retraite de membres du personnel ou d’autres

événements similaires, à la distribution de fruits pour la consommation immédiate et à la

distribution de rafraîchissements pendant les heures de travail, aux repas sociaux pris au

restaurant de l’employeur (dans la mesure où le bénéficiaire intervient pour 1,09 € au

moins), etc.

b) Il s’agit ensuite des avantages qui, bien que « personnalisables », n’ont pas le caractère

d’une véritable rémunération, tels que l’aide offerte dans des circonstances exceptionnelles,

comme un décès.

c) Il s’agit enfin des menus avantages ou cadeaux d’usage obtenus à l’occasion ou en raison

d’événements sans rapport direct avec l’activité professionnelle, tel qu’un cadeau offert à

l’occasion d’un mariage ou de la naissance d’un enfant.

Les avantages sociaux immunisés qui appartiennent à l’une de ces trois catégories ne sont

pas déductibles au titre de frais professionnels dans le chef de celui qui les paie (art. 53, 14°

du C.I.R. 1992).

Les avantages sociaux ne rentrant dans aucune de ces trois catégories d’avantages

immunisés constituent des avantages de toute nature imposables dans le chef de leur

bénéficiaire s’ils sont alloués en raison ou à l’occasion de son activité professionnelle.

Section 5. Titres-repas

L’intervention de l’employeur ou de l’entreprise dans les titres-repas (plus communément

dénommés « chèques-repas ») est considérée légalement comme un avantage social

immunisé pour son bénéficiaire (travailleur ou dirigeant d’entreprise) pour autant que

toutes les conditions suivantes soient remplies :

- Les titres-repas ne sont pas octroyés en remplacement de rémunération, de primes,

d’avantages de toute nature ou de toute autre allocation en tenant lieu.

- L’octroi des titres-repas est prévu par une convention collective de travail conclue

au niveau du secteur ou de l’entreprise ou, si la conclusion d’une convention

collective n’est pas possible, par une convention individuelle écrite étant entendu

que, dans une entreprise occupant des travailleurs, le même règlement doit

s’appliquer tant aux dirigeants d’entreprise qu’aux travailleurs.

- Le nombre de titres-repas octroyés doit être égal au nombre de journées de travail

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effectivement fournies par le travailleur ou le dirigeant d’entreprise.

- Le titre-repas est délivré au nom du travailleur ou du dirigeant d’entreprise.

- Le titre-repas mentionne clairement que sa validité est limitée à douze mois et qu’il

ne peut être accepté qu’en paiement d’un repas ou pour l’achat d’aliments prêts à la

consommation.

- L’intervention de l’employeur ou de l’entreprise dans le montant du titre-repas ne

peut excéder 5,91 € par titre-repas.

- L’intervention du travailleur ou du dirigeant d’entreprise s’élève au minimum à

1,09 € (article 38/1, § 1er, 1° et § 2 du C.I.R. 1992).

Si ces conditions ne sont pas remplies, le titre-repas est constitutif d’un avantage de toute

nature taxable dans le chef de son bénéficiaire mais déductible pour l’employeur ou

l’entreprise (pour autant qu’une fiche et un relevé récapitulatif conforme aux dispositions

du Code des impôts sur les revenus soient établies par l’employeur personne physique (art.

57 du C.I.R. 1992).

Si ces conditions sont remplies, l’intervention de l’employeur ou de l’entreprise dans le

montant des titres-repas n’est pas déductible dans son chef, à l’exception du premier euro

par titre-repas (art. 53, 14° du C.I.R. 1992).

Section 6. Chèques sport et culture et éco-chèques

Les chèques sport et culture et les éco-chèques sont des titres qu’un employeur ou une

entreprise remet à ses travailleurs et dirigeants leur permettant, pour les premiers, de

payer les services d’opérateurs culturels et d’associations sportives subsidiés ou au moins

reconnus et, pour les seconds, d’acheter les produits et services à caractère écologique

visés dans une convention collective conclue au sein du Conseil national du travail (article

38/1, § 1er, 2° et 3° du C.I.R. 1992).

L’avantage dont bénéficie le travailleur ou le dirigeant d’entreprise dans le cadre de

l’attribution de ces chèques par l’employeur ou l’entreprise est immunisé d’impôt pour

autant que toutes les conditions suivantes soient remplies :

- Les chèques ne sont pas octroyés en remplacement de rémunération, de primes,

d’avantages de toute nature ou de toute autre allocation quelconque.

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217

- L’octroi des chèques est prévu par une convention collective de travail conclue au

niveau du secteur ou de l’entreprise ou, si la conclusion d’une convention collective

n’est pas possible, par une convention individuelle écrite étant entendu que, dans

une entreprise occupant des travailleurs, le même règlement doit s’appliquer tant

aux dirigeants d’entreprise qu’aux travailleurs.

En matière d’éco-chèques, la convention collective de travail ou la convention

individuelle mentionne la valeur nominale maximum du chèque (avec un

maximum absolu de 10 €), ainsi que la fréquence d’octroi pendant une année civile.

- Le chèque est délivré au nom du travailleur ou du dirigeant d’entreprise.

- Le chèque mentionne clairement que sa validité est limitée à 15 mois, du 1er juillet

de l’année au 30 septembre de l’année suivante, pour les chèques sport et culture et

à 24 mois à dater de leur mise à disposition pour les éco-chèques.

- Le montant total des chèques octroyés par l’employeur ou l’entreprise ne peut

dépasser par travailleur ou dirigeant d’entreprise 100 € par an pour les chèques

sport et culture et 250 € par an pour les éco-chèques. Ces montants ne sont pas

indexés.

- Les chèques ne peuvent être échangés contre espèces ni totalement ni

partiellement.

- L’intervention du travailleur ou du dirigeant d’entreprise s’élève au minimum à

1,09 € (article 38/1, § 3 et 4 du C.I.R. 1992).

Si ces conditions ne sont pas remplies, les chèques sont constitutifs d’un avantage de toute

nature taxable dans le chef de leur bénéficiaire mais déductible pour l’employeur ou

l’entreprise. En revanche, si ces conditions sont remplies, l’intervention de l’employeur ou

de l’entreprise dans les chèques est non déductible dans son chef (art. 53, 14° du C.I.R.

1992).

Section 7. Avantages non récurrents liés aux résultats

Les employeurs ont également la possibilité, sous certaines conditions et sur la base de

critères objectifs, d’accorder à tous leurs travailleurs ou à un groupe de travailleurs, des

bonus liés à la réalisation d’objectifs collectifs (article 38, § 1er, 24° du C.I.R. 1992).

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218

Des exemples d’objectifs admis sont la réduction des accidents du travail ou de

l’absentéisme ou l’augmentation du chiffre d’affaires ou du résultat.

Ces bonus sur le résultat, qui doivent être attribués en espèce, sont exonérés d’impôt des

personnes physiques dans le chef du travailleur, alors même qu’ils sont déductibles comme

frais professionnels pour l’employeur (art. 52, 3° et 9°, CIR). L’exonération est toutefois

limitée par année civile à 2.695 € indexés (2.722 € pour l’exercice d’imposition 2016).

Section 8. Indemnités versées aux bénévoles, artistes et pompiers volontaires

Les indemnités versées à des bénévoles ne sont pas imposables tant qu’elles n’excèdent pas

un plafond journalier et un plafond annuel (art. 10 de la loi du 3 juillet 2005). Les plafonds

sont fixés à des montants indexés de 24,79 € par jour et de 991,57 € par an.

Ces indemnités représentent en fait le remboursement forfaitaire de frais de déplacement,

de séjour et de tous les frais pour lesquels, du fait de leur nature et de leur montant

minime, il n’est pas d’usage de produire des pièces justificatives.

Il est par ailleurs permis de combiner l’indemnité forfaitaire perçue dans le cadre du

volontariat et le remboursement des frais réels de déplacement, pour maximum 2.000

kilomètre par an et par volontaire.

Le bénéficiaire des indemnités doit être une personne physique qui exerce sans aucune

rémunération des activités de manière désintéressée dans le cadre d’une structure

organisée ou réglementée, en faveur d’un club ou d’une association, avec ou sans

personnalité juridique.

Le commettant qui a sous sa direction les bénévoles ne peut toutefois se livrer à une

exploitation ou à des opérations de caractère lucratif. En principe, il ne peut pas non plus

être une personne physique pour bénéficier de l’exonération.

Le Code des impôts sur les revenus exonère également :

- Les « indemnités forfaitaires de défraiement » octroyées en raison de la fourniture

de prestations artistiques et/ou de la production d’œuvres artistiques pour le

compte d’un donneur d’ordre, pour un montant maximum de 2.000 € par an

(2.444,74 € pour l’exercice d’imposition 2016), et pour autant que certaines

conditions soient respectées (art.38, §§ 1er, al. 1, 23°, et 4 du C.I.R. 1992).

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- Les allocations des pompiers volontaires et des agents volontaires de la Protection

civile, à concurrence de 2.850 € indexés (4.350 € pour l’exercice d’imposition 2016)

(art. 38, § 1er, al. 1, 12° du C.I.R. 1992).

Section 9. Autres avantages immunisés

Sont encore exonérés :

- Le revenu obtenu par le chômeur qui fournit des prestations dans le cadre d’un

contrat de travail A.L.E. (Agence locale pour l’emploi), à concurrence de 4,10 € par

heure de prestation (art. 38, § 1er, al. 1er, 13° du C.I.R. 1992).

Le contrat de travail A.L.E. permet aux chômeurs de conserver leurs allocations de

chômage tout en gagnant un complément de 4,10 € nets par heure de travail

prestée. Il peut s’agir de tâches ménagères, d’entretien de jardins, de garde ou

d’accompagnement d’enfants, de malades, de personnes âgées ou handicapées, de

formalités administratives, etc.

- L’intervention de l’employeur dans le prix d’achat payé par un travailleur pour

l’achat d’un ordinateur avec ou sans périphériques, connexion internet et

abonnement corrélatif (art. 38, § 1, al. 1, 17° du C.I.R. 1992).

L’immunité ne vaut que dans la mesure où l’intervention de l’employeur n’excède

pas 550 € indexés (840 € pour l’exercice d’imposition 2016) et elle n’est accordée que

si les rémunérations brutes imposables du travailleur n’excèdent pas 21.600 €

(32.990 € pour l’exercice d’imposition 2016).

L’intervention de l’employeur reste déductible dans son chef au titre de frais

professionnels, même si elle n’est pas taxable dans le chef du travailleur.

Au contraire d’un équipement informatique mis à la disposition du travailleur et

générant, le cas échéant, un avantage de toute nature imposable dans son chef,

l’équipement informatique est, dans cette hypothèse, la propriété du travailleur.

- Les indemnités forfaitaires perçues par les tuteurs désignés par le service des

tutelles du Service Public Fédéral Justice, en vue d’assurer la représentation de

mineurs étrangers non accompagnés, pour autant qu’elles se rapportent à un

maximum de cinq tutelles exercées au cours de la période imposable (art. 38, § 1, al.

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1er, 21° du C.I.R. 1992).

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CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 11111111.... LLLLES EXONÉRATIONS À ES EXONÉRATIONS À ES EXONÉRATIONS À ES EXONÉRATIONS À CARACTÈRE ÉCONOMIQUECARACTÈRE ÉCONOMIQUECARACTÈRE ÉCONOMIQUECARACTÈRE ÉCONOMIQUE

Section 1. Des exonérations qui vont au-delà de la déduction des frais réels

Les exonérations pour personnel supplémentaire ou tutorat et la déduction pour

investissement permettent en réalité au contribuable de déduire de ses bénéfices ou profits

plus que le coût du personnel, du stagiaire ou de l'investissement.

Il s'agit dans ce cadre d'une utilisation de la fiscalité en tant qu'instrument de stimulation

économique.

Section 2. Immunisation pour personnel supplémentaire affecté à certaines tâches

au sein de l’entreprise

Les entreprises peuvent déduire de leurs bénéfices une somme de 10.000 € indexés (15.270

€ pour l’exercice d’imposition 2016) par unité de personnel supplémentaire recruté et

affecté à temps plein en Belgique (art. 67 du C.I.R. 1992) :

- À un emploi de chef de service des exportations, c'est-à-dire un responsable chargé

de la prospection des marchés étrangers et des contacts avec la clientèle ;

- À un emploi de chef de service de la section « Gestion intégrale de la qualité ».

Certaines conditions doivent être réunies pour bénéficier de ces exonérations, notamment

en ce qui concerne les qualifications que doivent posséder les travailleurs, les activités

qu'ils doivent exercer et les formalités à remplir par l'employeur (art. 45 et 46 de l’AR/C.I.R.

1992).

Section 3. Immunisation pour personnel supplémentaire des petites entreprises et

des titulaires de professions libérales

Les petites entreprises et les titulaires de professions libérales occupant moins de 11

travailleurs au 31 décembre 1997 ou à la fin de l'année au cours de laquelle a commencé

l'exercice de leur profession (si celle-ci a débuté à une date ultérieure) peuvent déduire de

leurs bénéfices ou profits une somme de 3.720 € indexés (5.680 € pour l’exercice

d’imposition 2016), par unité de personnel supplémentaire occupé en Belgique, dont le

salaire n'excède pas un montant actuellement fixé à 90,32 € bruts par jour ou 11,88 € bruts

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222

par heure (respectivement 100 € bruts par jour et 13 € bruts par heure) (art. 67ter du C.I.R.

1992).

La limitation du salaire de la personne engagée vise à stimuler l'engagement de personnes

moins qualifiées. L'employeur reçoit en quelque sorte un avantage fiscal pour compenser

les coûts cachés de formation du personnel.

Cette exonération n'est pas cumulable avec la précédente. Une mesure anti-abus existe par

ailleurs pour contrer notamment tout transfert abusif de personnel au sein d'un même

groupe d'entreprises.

Section 4. Exonérations pour tutorat de stagiaires

Une exonération est octroyée aux entrepreneurs, titulaires de professions libérales,

charges, offices et autres occupations lucratives, lorsqu'ils bénéficient du « bonus de

tutorat » de certains stagiaires. Il s’agit d’une intervention financière accordée aux

employeurs offrant aux jeunes un poste de stage en vertu d'un apprentissage pratique (art.

67bis du C.I.R. 1992 et art. 46bis de l’AR/C.I.R. 1992).

Cette exonération est égale à 20 % des rémunérations déduites au titre de frais

professionnels, qui se rapportent aux stagiaires concernés.

Section 5. La déduction pour investissement

a) Notion

Il est permis aux entrepreneurs ainsi qu'aux titulaires de professions libérales de déduire de

leurs bénéfices un pourcentage du prix d'achat ou de revient des biens d'investissement

amortissables sur plus de deux ans, acquis ou constitués à l'état neuf et affectés à l'exercice

de leur activité professionnelle en Belgique (art. 68 à 77 du C.I.R. 1992 et art. 47 à 49bis de

l’AR/C.I.R. 1992).

La caractéristique de la déduction pour investissement réside dans le fait qu’elle porte sur

des sommes qui ne sont pas de véritables frais à proprement parler. En effet, les biens

immobilisés visés par cette déduction donnent déjà lieu à un amortissement et c’est en

supplément de cet amortissement comptable qu’est accordé le droit à déduction.

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223

b) Champ d’application

Sont seules susceptibles de donner droit à la déduction pour investissement :

- Les immobilisations corporelles acquises à l'état neuf, ce qui exclut l'acquisition de

terrains, qui, par définition, ne peuvent jamais être neufs ;

- Les immobilisations incorporelles neuves, ce qui exclut une clientèle cédée par un

tiers puisque cette clientèle a été progressivement constituée par le cédant.

c) Les taux de la déduction pour investissement

Le pourcentage déductible varie selon le type d'actifs et peut fluctuer en fonction du taux

d'inflation de l'année précédant celle de l'investissement (art. 69 du C.I.R. 1992).

Le pourcentage de base de la déduction est aujourd'hui égal, pour les personnes physiques,

au taux d'inflation de la pénultième année précédant l'exercice, majoré de 1,5 point, avec

un minimum de 3,5 % et un maximum de 10,5 %.

Le pourcentage de base ainsi calculé est majoré de 10 points pour :

- Les investissements qui tendent à promouvoir la recherche et le développement de

produits nouveaux et de technologies avancées, pour autant que ces derniers

n'aient pas d'effets sur l'environnement ou visent à minimiser les effets négatifs sur

l'environnement ;

- Les investissements économiseurs ou récupérateurs d'énergie ;

- Les brevets ;

- L'installation de systèmes d'extraction ou d'épuration de l'air installé dans le fumoir

d'un restaurant ou d'un café.

Le pourcentage de base est majoré de 17 points pour les investissements de sécurisation,

c'est-à-dire les immobilisations corporelles qui tendent à une sécurisation des locaux

professionnels (fabriques, usines, ateliers, magasins, remises, garages, etc.) et de leur

contenu, ainsi que des véhicules d'entreprise (art. 44bis, § 1er, al. 3 et 319 du C.I.R. 1992).

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Les investissements visés comprennent notamment l'installation de matériel empêchant ou

retardant l'accès aux locaux professionnels ou encore l'installation de caméras équipées

d'un système d'enregistrement.

d) Les modalités de la déduction pour investissement

En principe, la déduction pour investissement s'opère en une fois, dans la déclaration se

rapportant à la période au cours de laquelle l'investissement a été comptabilisé. Le bénéfice

de cette déduction est subordonné à la production, à l'appui de la déclaration fiscale, d'un

formulaire ad hoc (art. 47, 1° de l’AR/C.I.R. 1992).

Une formule de déduction étalée est cependant ouverte, sur option, aux contribuables qui

occupent moins de 20 travailleurs le 1er jour de la période imposable au cours de laquelle

les immobilisations sont acquises ainsi qu’aux contribuables qui investissent dans la

recherche et le développement de produits nouveaux et de technologies avancées

respectueux de l’environnement.

La déduction étalée consiste à déduire, pour chaque période imposable intervenant dans le

« programme d'amortissement » des biens considérés, une somme égale à un certain

pourcentage des amortissements admissibles (art. 70 du C.I.R. 1992).

e) Les investissements exclus de la déduction

La déduction pour investissement n'affecte en rien la déduction des amortissements. Elle

est en revanche refusée pour les biens qui ne font pas l'objet d'amortissements (terrains,

œuvres d'art, etc.).

La déduction n'est pas non plus applicable aux voitures, ni aux biens donnés en leasing et

amortissables dans le chef du preneur de leasing.

La déduction ne peut être accordée pour les immobilisations qui ne sont pas affectées

exclusivement à l'exercice de l'activité professionnelle, c'est-à-dire celles qui sont affectées

par le contribuable à des fins tant professionnelles que privées (achats mixtes), quelles

qu'en soient les proportions.

En ce qui concerne les biens immobiliers bâtis qui ne sont pas affectés exclusivement à

l'exercice de l'activité professionnelle, la déduction pour investissement peut cependant

être appliquée pour les locaux ou espaces pour lesquels il apparaît, de manière

incontestable, qu'ils sont affectés exclusivement à l'exercice de l'activité professionnelle et

Page 225: INTRODUCTION : LES QUATRE IMPOTS SUR LES ......Le double critère de « domicile fiscal » et de « siège de la fortune » Le texte de l’article 2, §1 er , 1°, alinéa 1er du

225

qu'ils sont manifestement séparés des locaux ou espaces privés du contribuable.

Il existe enfin une mesure anti-abus qui permet d'éviter qu'un contribuable qui ne dispose

pas du droit à la déduction pour investissement puisse bénéficier de cet avantage de

manière indirecte en faisant effectuer l'investissement par un contribuable qui aurait droit

à cette déduction et qui lui céderait ensuite un droit d'usage sur ce bien (art. 75, 3° du

C.I.R. 1992).

f) Limitation de la déduction

La déduction pour investissement ne peut créer une perte dans le chef du contribuable.

Si les bénéfices de ce dernier s'avèrent insuffisants pour l'absorber, la partie non déduite

peut être reportée indéfiniment, sous réserve du respect de modalités particulières (art. 72

du C.I.R. 1992).

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 12121212.... LLLLES FRAIS PROFESSIONNES FRAIS PROFESSIONNES FRAIS PROFESSIONNES FRAIS PROFESSIONNELSELSELSELS

Section 1. Principe de la taxation sur le revenu net

Un revenu n'est normalement imposable qu’à concurrence de son montant net. Du revenu

professionnel brut, on déduit donc les dépenses qui ont permis l’acquisition du revenu ou

sa conservation.

Une dépense est déductible au titre de frais professionnels si les quatre conditions

suivantes sont simultanément réunies (art. 49 du C.I.R. 1992) :

- Elle se rattache à l'exercice de l'activité professionnelle ;

- Elle a été supportée en vue d'acquérir ou de conserver des revenus professionnels ;

- Elle a été faite ou supportée pendant la période imposable ;

- Elle est prouvée quant à sa réalité et à son montant.

C'est au contribuable qu'il incombe d'apporter la preuve qu'une dépense remplit les

conditions de déduction au titre de frais professionnels.

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226

Section 2. Notion de « dépense »

En tout état de cause, une dépense n’est déductible au titre de frais professionnels que si

elle est engagée par le contribuable à fonds perdu.

Il n’en va pas ainsi lorsque la dépense entraîne l’apparition, dans le patrimoine du

contribuable, d’un actif équivalent qui vient se substituer dans sa comptabilité au montant

dépensé (par exemple l’acquisition d’un bien immobilisé, comme une machine).

À proprement parler, il s’agit dans ce cas, d’un point de vue fiscal, d’un investissement et

non d’une dépense déductible.

Section 3. 1ère condition de déductibilité : le lien nécessaire avec l’activité

professionnelle

Pour être déductibles, les frais professionnels doivent se rattacher à l'exercice de l'activité

professionnelle du contribuable. Il importe peu, en revanche, que l'activité soit exercée à

titre complémentaire et non à titre principal, pourvu que son caractère professionnel soit

avéré.

L'exigence d'un lien nécessaire entre les frais et l'activité professionnelle implique que si

l'activité professionnelle n'avait pas existé, la dépense n'aurait pas été engagée. L’inverse ne

vaut par contre pas : ce n'est pas la dépense qui doit être nécessaire à l'activité

professionnelle. C’est le lien entre la dépense et cette activité qui doit être nécessaire.

Les circonstances qui ont fait naître la charge ou la dépense doivent donc être propres à

l'activité professionnelle. Aucune disposition légale n'exige cependant que, pour être

déductible, une dépense ait été faite au moyen de fonds déjà affectés à l'exercice de

l'activité professionnelle238.

Sont évidemment exclues de la déduction les dépenses à caractère purement privé, car

elles ne satisfont pas à cette première condition.

Les frais mixtes, c'est-à-dire les frais exposés partiellement à des fins professionnelles et

partiellement à des fins privées doivent faire l'objet d'une ventilation239. Cela vaut

238 Cass., 22 avril 1958, Bull. contr., 1958, n° 344, p. 297 ; Cass., 12 novembre 1958, Bull. contr., 1959, n° 350, p.

75. 239 Com. I.R., n° 49/2.

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227

notamment pour les loyers, les charges locatives, les frais de chauffage, d'électricité et

d'assurance de biens immobiliers à usage mixte, pour les frais de voiture lorsque celle-ci est

utilisée tant pour des déplacements privés que professionnels et pour les frais de voyage et

de séjour à l'étranger, si ce voyage comporte à la fois des motivations privées et

professionnelles.

Section 4. 2ème condition de déductibilité : une dépense effectuée en vue d’acquérir

ou de conserver des revenus professionnels imposables

Pour être déductible, la dépense ne doit pas seulement avoir un lien avec l'activité

professionnelle, elle doit aussi avoir pour finalité l'acquisition ou la conservation de

revenus professionnels imposables. La dépense doit être engagée dans un but intéressé, et

non dans une intention libérale.

Lorsqu’une entreprise lance une campagne publicitaire afin de promouvoir la vente de ses

produits, son but est évidemment d’acquérir ou de conserver des revenus professionnels,

et les dépenses afférentes à la campagne publicitaire sont alors déductibles au titre de frais

professionnels. Il en est ainsi même si, en pratique, la campagne publicitaire n’a entraîné

aucun résultat positif pour l’entreprise.

Les cotisations versées à un club de services ou à un club sportif ne peuvent être admises

en déduction que dans la mesure où le contribuable prouve que son affiliation contribue à

l'obtention ou à la conservation de revenus imposables, en établissant par exemple qu'une

partie de sa clientèle se retrouve sur la liste des membres du club240.

Parmi les frais destinés à l'acquisition ou à la conservation de revenus imposables, on peut

citer, par exemple, les frais exposés en vue du maintien en bon état d'immeubles exploités

ou pour garantir des actifs affectés à l'exercice de l'activité professionnelle contre l'incendie,

le vol ou d'autres risques.

La Cour de cassation a également jugé que les frais de conseil fiscal pour remplir une

déclaration fiscale comprenant des revenus professionnels ont bien été exposés en vue de

conserver des revenus imposables241.

Le législateur fiscal exige qu'il y ait un lien entre, d'une part, la dépense ou l'opération qui

provoque la dépense et, d'autre part, les revenus imposables, mais il n’est pas nécessaire

240 Voyez notamment Civ. Gand, 4 juin 2012, Cour. fisc., 2012, p. 500. 241 Voyez notamment Cass., 4 mai 2000, Pas., 2000, n° 271, p. 836.

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228

d’établir que, sans avoir exposé la dépense, il eût été impossible d'obtenir les revenus242.

La loi, qui utilise les termes « revenus imposables », ne requiert pas non plus que les

revenus que la charge permet d'acquérir soient imposés, c'est-à-dire qu'ils soient

effectivement soumis à l'impôt.

Par ailleurs, pour être déductibles, les frais ne doivent pas nécessairement avoir été faits ou

supportés en vue d'acquérir ou conserver des revenus de l'année même ou de l'exercice

comptable au cours duquel ils ont été faits243.

Par contre, les dépenses effectuées pour une activité future totalement distincte de

l’activité actuelle ne sont pas déductibles.

On ne doit cependant pas confondre une activité future et une absence momentanée de

revenu. Il faut mais il suffit qu'il y ait une activité.

La déductibilité des frais professionnels n'est pas soumise à la condition que l'activité du

contribuable ait effectivement engendré des revenus imposables.

Les termes « en vue d'acquérir ou de conserver » des revenus n'impliquent pas que la

dépense doive être volontaire. Ainsi, une dépense subie contre son gré peut être admise. La

finalité de la charge est donc une question de corrélation et non de volonté.

Il ne résulte pas non plus de la loi que la déductibilité des frais professionnels serait

subordonnée à la condition qu'ils soient inférieurs au montant des revenus professionnels

déclarés qu'ils ont permis d'acquérir ou de conserver244.

Ainsi, la circonstance que, par exemple en début d'activité, une exploitation soit en perte

n'est pas anormale. Cette circonstance ne justifie pas en soi le rejet des dépenses engagées

par le contribuable et l'administration fiscale ne peut déduire du seul fait du dépassement

des recettes par les dépenses que ces dernières sont nécessairement déraisonnables.

En somme, si l'administration fiscale peut apprécier la finalité professionnelle de la

dépense, elle n'est pas autorisée à apprécier l'opportunité ou l'utilité de la dépense qu'il a

plu au contribuable d'effectuer. Il en découle qu'il n'appartient pas à l'administration

242 Cass., 27 février 1987, F.J.F., n° 87/115. 243 Cass., 3 novembre 2000, Pas., 2000, n° 595, p. 1668. 244 Cass., 27 janvier 1959, Pas., 1959, I, p. 536.

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229

d'imposer à un contribuable l'organisation de son travail.

L'administration peut néanmoins écarter les dépenses dites « somptuaires », c’est-à-dire les

dépenses qui dépassent de manière déraisonnable les besoins professionnels du

contribuable (art. 53, 10° du C.I.R. 1992). Cette exception est examinée ci-dessous.

Enfin, le fait qu’une dépense trouve son fondement dans un comportement illicite ne fait

pas obstacle à ce qu’elle puisse être déduite. En l’espèce, la Cour de cassation a en effet

cassé un arrêt de la Cour d’appel de Gand qui avait estimé que des frais ne pouvaient être

déduits à titre de charges professionnelles dès lors qu’ils avaient été exposés en violation de

la loi du 5 août 1992 concernant le travail des enfants245. En l’espèce, il s’agissait d’un

contribuable qui avait un commerce ambulant de marchand de glaces et qui se faisait aider

pendant les vacances scolaires par ses enfants, mineurs d’âge, à qui il versait une

rémunération. Quoiqu’illégale, cette rémunération est déductible, parce qu’elle a servi à

l’obtention de revenus professionnels.

Section 5. 3ème condition de déductibilité : le rattachement des frais à la période

imposable

Les frais doivent avoir été faits ou supportés pendant la période imposable considérée.

C’est bien entendu le cas de celles qui ont été effectivement payées ou supportées pendant

la période imposable. Par charges effectivement supportées mais non payées pendant la

période imposable, on songe spécialement aux amortissements.

Il faut y adjoindre les dépenses ou charges qui ont acquis au cours de la période imposable

le caractère de dettes ou pertes certaines et liquides et ont été comptabilisées comme telles

(art. 49, al. 2, in fine du C.I.R. 1992). Pour rappel, une dette est liquide lorsque son montant

est connu. Elle est certaine lorsque son existence n’est pas douteuse.

La règle vaut aussi pour les titulaires de professions libérales, charges, offices ou autres

occupations lucratives : l'imposition de ces derniers sur leurs recettes, c’est-à-dire sur les

sommes effectivement perçues par eux (et non sur leurs créances) n'a pas pour corollaire

une limitation de leurs frais professionnels à leurs seuls décaissements effectifs.

245 Voyez à ce sujet Cass., 31 octobre 2014, www.fiscalnet.be ; F. LEDAIN, « Peu importe pour leur déduction

que les frais professionnels reposent sur un comportement illicite ! », Hebdo FiscalNet, 24 janvier 2015. Dans

le même sens au sujet d’un avocat qui, après avait détourné de l’argent dans l’exercice de ses fonctions de

curateur de faillite, a remboursé une partie de ces sommes : Cass., 22 novembre 2013, www.fiscalnet.be.

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230

La notion de « dépense professionnelle » ne se limite donc pas à un décaissement effectif.

Il est par exemple permis de déduire la perte due à un événement dommageable à

caractère exceptionnel, comme la destruction d'une machine, une opération de change

malheureuse ou un vol subi par le contribuable.

En tout état de cause, les dépenses comptabilisées pour un exercice donné ne sont plus

déductibles lors des exercices ultérieurs. Il n’est donc pas possible de « récupérer » les

dépenses dont la déduction n’a pas été revendiquée pour l’exercice auquel elles sont

rattachées. Cela résulte du principe de l’annualité de l’impôt.

Section 6. Cas particulier des frais exposés après la cessation de l’activité

professionnelle

Quant aux frais exposés après la cessation de l'activité professionnelle, la Cour d'arbitrage

(aujourd'hui dénommée « Cour constitutionnelle ») a posé le principe de la déductibilité

des frais nécessités par l'activité professionnelle antérieure mais supportés

postérieurement à la cessation de cette activité246.

L'enseignement de la Cour est donc que la déductibilité au titre de frais professionnels n'est

admise que si les frais payés après la cessation de l'activité professionnelle trouvent leur

cause dans cette activité professionnelle.

Il s'agit, par exemple, des intérêts payés après la cessation d'une activité professionnelle sur

des emprunts contractés et affectés à des fins professionnelles avant la cessation de cette

activité.

La Cour constitutionnelle n’a toutefois pas jugé discriminatoire le fait que des

amortissements fiscaux ne soient plus possibles après la cessation de l’activité

professionnelle d’un contribuable247. Pour justifier sa position, la Cour a notamment

précisé que l’arrêt qu’elle a rendu le 21 juin 2000 ne concernait pas les charges et dépenses

« afférentes à des éléments qui, par suite de la cessation de l’activité professionnelle, font

l’objet d’un usage non professionnel ».

246 C.A., 21 juin 2000, F.J.F., n° 2002/62. 247 C.C., 15 décembre 2011, Fiscologue, 2012, n° 1281, p. 10, note S. VAN CROMBRUGGE.

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Section 7. 4ème condition de déductibilité : la preuve de la réalité et du montant des

frais

a) Généralités

En principe, dès lors qu’un contribuable doit prouver que les frais dont il demande la

déduction constituent des prestations réellement fournies248, les dépenses déductibles au

titre de frais professionnels doivent être justifiées quant à leur réalité et à leur montant.

Cette preuve doit être apportée par le contribuable soit par des documents probants

(factures, contrats, etc.), soit, lorsqu’il n’est pas possible pour ce dernier d’apporter des

documents probants, par tous autres moyens de preuve admis en droit commun, y

compris la présomption de l'homme mais à l'exclusion du serment.

Si tout document susceptible de faire preuve de la réalité et du montant des dépenses

déductibles doit être admis à cette fin, la nécessité de justifier le montant de chaque

dépense n'est pas absolue et d'autres voies sont envisageables pour le contribuable.

b) Forfaits collectifs

Des forfaits peuvent en effet être négociés, sur le plan national ou local, à l'intervention de

groupements professionnels (art. 342, § 1er, al. 2 du C.I.R. 1992).

Ces accords peuvent notamment porter sur des dépenses ou charges pour lesquels il n'est

pas d'usage de demander ou de recevoir des pièces justificatives (comme les frais de

représentation et divers des avocats249, les menus frais d’entretien des locaux

professionnels, etc.…).

c) Forfaits individuels

Un accord individuel peut également être conclu entre l'administration fiscale et le

contribuable (art. 50, § 1er du C.I.R. 1992). L'accord porte tantôt sur le montant d'une

dépense ou sur un pourcentage de dépenses par rapport au revenu, tantôt sur la partie

professionnelle d'une dépense mixte.

248 Cass., 18 janvier 2013, www.juridat.be. 249 Pour davantage de précisions à ce sujet, voyez X, « Nouvel accord collectif pour les frais professionnels des

avocats », Act. fisc., 2011, n° 31.

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232

L’accord peut être tacite mais il doit être certain. C’est au contribuable qu’il appartient d’en

établir l’existence s’il allègue avoir conclu un tel accord avec l’administration.

Le fait que l’administration fiscale ait conclu un accord individuel avec un autre

contribuable est sans importance à cet égard, même si les circonstances qui entourent cet

accord sont similaires. Cette situation se justifie par le caractère d’ordre public de l’impôt.

Un accord individuel conclu sans réserve peut par ailleurs être révisé mais seulement pour

l'avenir250, sauf lorsqu'intervient un changement dans les conditions d'exercice de la

profession modifiant les données ayant servi de base à l'accord (ou lorsque le contribuable

a obtenu l'accord au moyen de données inexactes).

À défaut d'accord individuel, l'administration fiscale reste tenue d'évaluer les dépenses et

charges du contribuable de manière raisonnable. Sous peine d’arbitraire, l’administration

ne peut donc pas rejeter purement et simplement des dépenses sous prétexte du défaut

d’éléments probants y afférents.

d) Preuve de la réalité des frais

La Cour de cassation a précisé, à juste titre, que les accords individuels et l'évaluation

raisonnable (art. 50, § 1er du C.I.R. 1992) ne visent que des dépenses qui ont été

effectivement supportées (c'est-à-dire dont la réalité est démontrée) mais dont le montant

n'a pas pu être établi.

Ceci vaut aussi, à notre avis, pour les forfaits collectifs (art. 342, § 1er, al. 2 du C.I.R. 1992).

Ils ont en effet été arrêtés par l'administration fiscale pour l'évaluation des dépenses ou

charges personnelles qu'il n'est généralement pas possible de justifier au moyen de

documents probants.

Il est donc requis que le contribuable exerce sa profession dans des conditions telles que

l'on puisse considérer qu'il est bien amené, en fait, à supporter dans une mesure normale

les dépenses couvertes par les forfaits collectifs.

Pour les frais qu'il n'est pas possible de justifier par des documents probants, le

contribuable doit pouvoir établir, de manière raisonnable, qu'il s'agit soit de frais

professionnels dont les documents probants ont été volés ou égarés par inadvertance, soit

250 Voyez par exemple Bruxelles, 8 novembre 1988, F.J.F., n° 89/55 ; Anvers, 16 décembre 1991, F.J.F., n°

92/52 ; Liège, 4 janvier 1989, J.D.F., 1989, p. 167.

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de frais professionnels pour lesquels il n'est pas de pratique courante d'exiger ou d'obtenir

des documents justificatifs.

L'administration admet que des documents probants ne sont pas nécessairement requis

pour justifier des dépenses suivantes :

- Les frais que l'on range traditionnellement dans la catégorie des frais de

représentation ;

- Certains frais inhérents à l'utilisation d'une voiture automobile à usage mixte

(essence, huile, produits d'entretien, accessoires de faible valeur) ;

- Les menus frais d'entretien des locaux professionnels (matériels et produits

d'entretien par exemple) ;

- Certains frais de déplacement occasionnels (transports en commun, taxis, etc.).

Section 8. Forfaits légaux

Le législateur fiscal a prévu la possibilité pour les bénéficiaires de rémunérations, les

titulaires de professions libérales, charges, offices ou autres occupations lucratives, les

dirigeants d'entreprise et les conjoints aidants de renoncer à apporter la preuve concrète

de leurs frais professionnels et de bénéficier de forfaits légaux déductibles (art. 51 du C.I.R.

1992).

Ainsi, en vertu du forfait légal applicable aux dirigeants d'entreprise et aux conjoints

aidants, les frais professionnels déductibles dans leur chef se chiffrent respectivement à

3 % et à 5 % de leurs revenus professionnels, diminués des cotisations sociales ainsi que des

cotisations personnelles d'assurance complémentaire soins de santé (art. 51, al. 2, 2° et 3° et

52, 8° du C.I.R. 1992).

Pour l’exercice d’imposition 2018 (revenus de l’année 2017), ces pourcentages sont, pour

les rémunérations des travailleurs et les profits des professions libérales, charges, offices ou

autres occupations lucratives, de :

- 30 % de la première tranche de 8.620,00 € ;

- 11 % de la tranche de 8.620€ à 20.360,00 € ;

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- 3 % de la tranche excédant 20.360,00 €.

Ces forfaits légaux sont limités par un montant maximum absolu déductible au titre de

frais professionnels. Pour l’exercice d’imposition 2015, le montant maximum est de

4.320,00 € pour les travailleurs et les titulaires de professions libérales, charges, offices ou

autres occupations lucratives et de 2.440,00 € pour les dirigeants d'entreprises et les

conjoints aidants.

Récemment, la loi-programme du 19 décembre 2014 a prévu cette légère augmentation du

forfait de frais professionnels applicable aux rémunérations des travailleurs en deux étapes,

en ce qui concerne leurs revenus de 2015 et 2016. Les indépendants, les dirigeants

d’entreprises, les salariés qui ont fait le choix de déduire leurs frais réels ou encore les

retraités ne tireront toutefois aucun avantage de cette mesure, dès lors qu’elle ne vise que

les rémunérations des travailleurs251.

Le tableau ci-dessous permet d’illustrer la manière dont le forfait des frais professionnels

afférent aux rémunérations des travailleurs a évolué depuis l’adoption de la loi :

Tranches Revenus 2014 Revenus 2015 Revenus 2016

De 0 à … 3.750 : 28,7% 3.430 : 34,35% 3.110 : 40%

3.750 à 7.450 :10% 3.430 à 7.500 :

12,80%

3.110 à 7.550 : 15,6%

7.450 à 12.400 : 5% 7.500 à 11.232,50 :

4%

7.550 : 3%

Plus de 12.400 : 3% Plus de 11.232,50 :

3%

Montant absolu

(à indexer)

2.592,50 2.671,50 2.750

Par ailleurs, pour les travailleurs « navetteurs », le forfait légal est très légèrement

augmenté, en vue de tenir compte des frais résultant de l'éloignement du domicile par

rapport au lieu de travail, d'un montant qui dépend de la distance entre le domicile du

contribuable et son lieu de travail (art. 28 de l’AR/C.I.R. 1992).

251 Pour davantage de précisions à ce sujet, voyez T. AFSCHRIFT, « La taxation des personnes physiques :

craintes et opportunités », in Séminaire Idefisc, 27 novembre 2014, pp. 1 et s.

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235

Lorsque le montant des charges réelles mentionné par un contribuable dans sa déclaration

fiscale ou résultant d'un contrôle fiscal est inférieur au forfait légal qui lui est applicable, ce

forfait lui est automatiquement appliqué par l'administration fiscale.

Lorsqu'un contribuable exerce plusieurs activités professionnelles différentes, il peut

déduire le forfait légal relatif à chacune d'elles, si la loi le lui permet, ou à certaines d'entre

elles seulement.

Aucun forfait légal n'est cependant prévu pour les titulaires de bénéfices, ni pour les

bénéficiaires de profits qui se rattachent à une activité indépendante antérieure, ni encore

pour les bénéficiaires de pensions et rentes.

Section 9. Dispositions anti-abus : rejet des frais déraisonnables et de certaines

dépenses d’agrément

Les dépenses qui dépassent de manière déraisonnable les besoins du contribuable ne sont

pas admises en déduction (art. 53, 10° du C.I.R. 1992). Il s'agit des dépenses somptuaires,

c'est-à-dire des dépenses inspirées moins par un motif d’ordre professionnel que par le

désir ou le souci d'afficher un certain standing, d'entretenir des relations sociales ou

mondaines.

Pour être rejetées, il faut à la fois que la dépense soit, dans son principe, déraisonnable, et

que son montant le soit. Ainsi par exemple, si un employeur rémunère un travailleur de

manière excessive, le fisc ne peut rejeter cette dépense si le travailleur effectue des

prestations utiles à l’entreprise, même si ces prestations sont payées à un tarif

anormalement élevé.

Pour apprécier le caractère déraisonnable d'une dépense, l'administration fiscale, qui

supporte la charge de la preuve, doit tenir compte de la nature de la profession et de ses

caractéristiques propres, de même que des conditions dans lesquelles elle est exercée et

des revenus qu'elle procure au contribuable.

C'est en matière de frais de représentation et de frais de voiture qu'on trouve la

jurisprudence la plus abondante à cet égard. Ce rejet peut d’ailleurs s'ajouter aux

limitations légales existantes (limitation à 75 % pour les voitures et à 50 % pour les frais de

représentation).

L'administration fiscale est donc autorisée à rejeter la partie déraisonnable des frais

professionnels du contribuable et de n'admettre qu’un pourcentage de ceux-ci pour le

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236

solde.

Généralement, la jurisprudence n'admet pas que le lien entre les revenus du contribuable

et les dépenses puisse constituer à lui seul un critère suffisant pour en apprécier le

caractère déraisonnable. Ainsi, l'usage d'une Porsche a été jugé normal même en présence

d'un bénéfice modeste, dès lors qu'il était établi que le but recherché par le contribuable

était de recueillir des revenus professionnels importants252.

Dans la majorité des cas, les dépenses litigieuses sont des dépenses dont le caractère

professionnel est lui-même discutable, et le rejet des frais déraisonnables a essentiellement

pour objet d’écarter des dépenses qui présentent un lien avec l’activité professionnelle qui

est à ce point indirect qu’elles ne peuvent raisonnablement avoir de justification

professionnelle.

Le Code des impôts sur les revenus énumère par ailleurs une série de dépenses jugées

somptuaires qui sont en principe rejetées des frais professionnels du contribuable. Il s’agit

de dépenses de chasse, de pêche, de yachting, de résidences d'agrément, etc. (art. 53, 9° du

C.I.R. 1992).

Ces charges restent cependant admises en déduction dans l'éventualité et dans la mesure

où le contribuable établit qu'elles sont nécessitées par l'exercice de son activité

professionnelle en raison de leur objet, ou qu'elles sont comprises parmi les rémunérations

imposables des membres du personnel au profit desquels elles ont été exposées (ce qui

permet d’éviter une double imposition).

Section 10. Liste non exhaustive de frais professionnels

Le Code des impôts sur les revenus contient une liste de frais professionnels qui n'a aucun

caractère limitatif (art. 52 du C.I.R. 1992).

À la lecture de cette liste, peuvent notamment être considérés comme des frais

professionnels déductibles, s'ils respectent les conditions et, le cas échéant, les limites

prévues par le Code, les éléments suivants :

- Les rémunérations, courtages, commissions, indemnités, honoraires, avantages de

252 Voyez à ce sujet J. VAN DYCK, « Frais ‘déraisonnables’ : comment les ramener à un niveau ‘raisonnable’ »,

Fiscologue, 2010, n° 1229, p. 3 ; C. BUYSSE, « La Porsche du courtier en assurances », Fiscologue, 2012, n° 1302,

p. 11.

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237

toute nature, etc., payés ou supportés par le contribuable.

- Les charges sociales supportées par l'employeur sur les rémunérations.

- Les cotisations de sécurité sociale de l’employeur lui-même.

- Les amortissements admis fiscalement.

- Le loyer dû pour l'immeuble professionnel pris en location, de même que les

charges locatives et tous les frais généraux qui résultent de son entretien (frais de

chauffage, d’éclairage, etc.).

Lorsque l’immeuble loué n’est affecté que partiellement à l’exercice de l’activité

professionnelle, seuls le loyer et les charges locatives qui se rapportent

effectivement à la partie de l’immeuble utilisée à des fins professionnelles sont

déductibles.

- Le précompte immobilier, en ce compris les centimes additionnels y relatifs, qui se

rapporte à un immeuble professionnel.

- Les intérêts des capitaux empruntés en vue d'être engagés dans l'activité

professionnelle.

- Les frais généraux à caractère professionnel : frais téléphoniques et publicitaires,

frais de déplacement, frais de voiture, frais d’entretien des locaux professionnels,

etc.

- Les frais d'étude, lorsque la formation ainsi acquise permet d'exercer avec plus de

compétence une profession déjà exercée au moment où les frais sont engagés, et

donc de maintenir ou d'accroître les revenus professionnels du contribuable.

Si la jurisprudence est généralement favorable à la déduction de frais relatifs à une

formation complémentaire qui a un lien direct avec l'activité professionnelle

exercée durant la formation (telle une formation en ostéopathie pour un

kinésithérapeute), elle penche par contre nettement pour l'exclusion des frais

exposés en vue d'accéder à une nouvelle activité professionnelle. La Cour de

cassation a eu l’occasion de confirmer cette position, dans un arrêt rendu le 3 avril

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238

2014253. Dans cet arrêt, la Cour a en effet réaffirmé que les frais d’étude ne sont

déductibles que s’ils se rapportent à des activités professionnelles déjà exercées.

- Les dépenses de voyage à l'étranger à des fins professionnelles.

Pour les congrès et voyages d'études qui se déroulent à l'étranger, l'administration

fiscale recherche par ailleurs si une partie des frais exposés ne se rapporte pas à des

dépenses d'agrément ou à d'autres dépenses à caractère purement privé :

divertissement, tourisme, gastronomie, frais de voyage et de séjour du conjoint, etc.

- Les taxes qui ont un caractère de frais généraux : taxe de circulation, taxes locales

frappant les exploitations professionnelles, droits de douane, etc.

Section 11. Frais professionnels non-déductibles

Les frais suivants ne sont pas considérés comme des frais professionnels déductibles dans

le chef du contribuable et restent inclus dans la base imposable à l'impôt des personnes

physiques (art. 53 du C.I.R. 1992) :

- Les frais ayant un caractère personnel, tels que les frais d'entretien du ménage,

d'instruction ou d'éducation, le loyer de l’habitation privée, etc.

Ces frais sont tous ceux que le contribuable supporte indépendamment de

l’exercice de son activité professionnelle.

- L'impôt des personnes physiques, en ce compris les versements anticipés, les

précomptes, la taxe communale additionnelle, la cotisation spéciale de sécurité

sociale, les accroissements, majorations, frais et intérêts de retard s'y rapportant.

Les autres impôts sont déductibles au titre de frais professionnels s’ils constituent

des dépenses effectuées pour acquérir ou conserver des revenus imposables. Il en

est notamment ainsi du précompte immobilier afférant au revenu cadastral de

l’immeuble affecté à l’exercice de l’activité professionnelle du contribuable (art. 53,

5° du C.I.R. 1992).

- Les amendes pénales et administratives, confiscations et pénalités.

253 Cass., 3 avril 2014, Cour. fisc., 2014, n° 12, note L. DE CONINCK, pp. 558-560.

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239

Il s’agit, par exemple, des amendes infligées aux entreprises pour violation du droit

européen de la concurrence, des amendes pour infractions au Code de la

circulation routière, des amendes fiscales en matière d’impôts sur les revenus, des

amendes infligées pour violation de la législation en matière de T.V.A., des amendes

transactionnelles payées sur invitation du parquet afin d’éviter des poursuites

pénales, etc.

- Les commissions accordées directement ou indirectement dans le cadre d'actes de

corruption, en Belgique ou à l’étranger.

Cette liste ne présente évidemment qu'un caractère exemplatif. D’autres frais sont en effet

considérés comme non-déductibles quoi qu’ils ne soient pas expressément visés par

l’article 53 du C.I.R. 1992.

A titre d’exemple, on peut citer les dépenses de propagande électorale exposées par un

homme politique en vue d’être réélu254.

Section 12. Prise en charge des pertes d’une société par un dirigeant d’entreprise

a) Généralités

Les pertes d'une société peuvent être prises en charge par son dirigeant d'entreprise et

déduites de ses propres revenus professionnels si les conditions ci-dessus sont

cumulativement réunies (art. 53, 15° du C.I.R. 1992).

S’il y a plusieurs dirigeants d’entreprise au sein d’une même société, ses pertes s’imputent

en fonction de la participation de chacun dans son capital. La totalité des pertes sociales ne

peut donc être mise à charge d’un seul dirigeant d’entreprise.

b) 1ère condition de déductibilité : le versement irrévocable et inconditionnel d’une

somme d’argent

La prise en charge de la perte doit se réaliser par le versement irrévocable et sans condition

d’une somme d’argent.

Ce versement couvre toute opération qui constitue un décaissement effectif du dirigeant

d’entreprise au profit de sa société (un virement bancaire par exemple). Il est nécessaire,

254 Pour plus de détails à ce propos, voyez Cass., 30 octobre 2014, www.juridat.be.

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240

pour que cette condition soit remplie, que la société enregistre une entrée effective de

fonds.

Ainsi, une simple écriture comptable effectuée dans les comptes de la société ne constitue

pas, en elle-même, la preuve du versement d’une somme d’argent faite au profit de la

société par son dirigeant d’entreprise.

c) 2ème condition de déductibilité : la sauvegarde des revenus professionnels périodiques

du dirigeant d’entreprise

Le versement doit également être fait en vue de sauvegarder des revenus professionnels

que le dirigeant d’entreprise retire périodiquement de sa société.

Le terme « sauvegarder » implique à fortiori que le contribuable concerné doit déjà avoir

recueilli des revenus professionnels de la société dont il est le dirigeant. Cependant, ce

simple fait n’implique pas forcément que la prise en charge des pertes de la société soit

effectuée en vue de sauvegarder des revenus professionnels que le contribuable retire de la

société.

Les revenus professionnels doivent avoir un caractère répété et plus ou moins régulier. Les

gérants et administrateurs qui perçoivent une rémunération mensuelle remplissent

évidemment cette condition. En principe, il en va de même si la rémunération est versée

sur une base annuelle.

d) 3ème condition de déductibilité : l’affectation de la somme versée à la réduction des

pertes

La somme versée doit par ailleurs être affectée par la société à la réduction de ses pertes.

C’est au dirigeant d’entreprise qu’il appartient d’établir que les fonds versés à sa société ont

effectivement servi à l’apurement de ses pertes professionnelles.

e) Absence de condition de proportionnalité

En revanche, il n’est pas requis que le montant des pertes sociales pris en charge par le

dirigeant d’entreprise soit en proportion avec les revenus qu’il retire de sa société.

Dans le respect d’une interprétation stricte de la loi fiscale, aucune condition de

proportionnalité ne peut dès lors être ajoutée aux trois conditions de déductibilité qui

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241

précèdent255.

L’administration fiscale estime en revanche que la disproportion entre le montant des

pertes prises en charge par le dirigeant d’entreprise et le montant des revenus retirés de la

société constitue un critère dont elle peut tenir compte pour apprécier si la prise en charge

est effectuée pour sauvegarder des revenus professionnels propres dans le chef du

dirigeant d’entreprise. Ce point de vue n’est pas fondé, mais il faut admettre que, parfois,

cette disproportion peut faire douter de l’objectif de sauvegarde des rémunérations.

Section 13. Les amortissements

a) Notion d’ « amortissement »

Le Code des impôts sur les revenus admet la déduction, au titre de frais professionnels, des

« amortissements relatifs aux frais d’établissement et aux immobilisations incorporelles et

corporelles dont l’utilisation est limitée dans le temps » (art. 52, 6° du C.I.R. 1992)., tels que

ces termes sont définis par la législation comptable.

Il existe une condition à la déductibilité des amortissements au titre de frais

professionnels. La déduction n’est admise que dans la mesure où ces amortissements

« sont nécessaires et où ils correspondent à une dépréciation réellement survenue pendant

la période imposable » (art. 61 du C.I.R. 1992).

L’amortissement correspond, en droit fiscal, à une charge professionnelle qui est déduite

des revenus professionnels bruts du contribuable afin de déterminer le résultat effectif de

son activité professionnelle.

Cette charge doit correspondre à une dépréciation réellement survenue pendant la période

imposable, en raison de l’usure du bien (la dépréciation technique) ou de sa désuétude (la

dépréciation économique ou technologique). Il appartient au contribuable d’établir la

réalité de cette dépréciation.

L’amortissement doit par ailleurs être appliqué par le contribuable quel que soit le résultat

de l’exercice considéré. Il ne peut être différé au motif que ce résultat serait déficitaire.

En droit comptable, l’amortissement a pour fonction de répartir le coût d’un élément

d’actif immobilisé sur sa durée d’utilisation économique probable, plutôt que d’en évaluer

255 Cass., 8 juin 2006, F.J.F., n° 2006/281 ; Cass., 18 octobre 2007, T.F.R.net, n° 2008/40.

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242

la valeur.

Cette divergence entre la notion d’ « amortissement » en droit fiscal et en droit comptable

se trouve atténuée par le recours du premier à des taux forfaitaires d’amortissement

calculés en fonction de la durée normale d’utilisation du bien.

b) Champ d’application

La faculté d’amortir n’est pas limitée aux sociétés ni même aux entreprises. Elle est ouverte

à tout contribuable investissant des biens dans son activité professionnelle.

Il peut s’agir du médecin qui achète un appareillage médical, de l’employé qui acquiert une

voiture pour aller à son travail ou qui affecte une partie de son habitation à l’exercice de

son activité professionnelle, etc256.

Leur utilisation n’étant en principe pas limitée dans le temps, les terrains ne sont pas

susceptibles d’être amortis, sauf s’il s’agit de terrains dits « d’extraction » (mines, carrières,

etc.). Il en va de même de toutes les immobilisations incorporelles et corporelles dont

l’utilisation n’est pas limitée dans le temps, quand bien même ils subiraient une

dépréciation de leur valeur.

Les amortissements doivent en outre porter sur des frais d’établissement ou des

immobilisations incorporelles ou corporelles, de telle sorte qu’il n’est pas possible au

contribuable d’amortir des immobilisations financières, des stocks, des commandes en

cours d’exécution, des créances, etc., même en cas de dépréciation de leur valeur.

c) Amortissement des objets d’art et instruments de musique

L’administration fiscale a toujours considéré que les objets d’art (peintures, sculptures,

antiquités, etc.) qui ne font pas partie intégrante des locaux où ils se trouvent, ne sont pas

susceptibles d’être amortis, étant donné qu’ils ne subissent en général aucune dépréciation

par suite de l’exercice de la profession257. Dans certains cas, l’écoulement du temps peut au

contraire accroître leur valeur.

256 Cass., 28 juin 1996, Pas., 1996, I, n° 273, p. 728. 257 A contrario, l’administration reconnaît que les objets d’art incorporés dans des bâtiments peuvent être

amortis au même taux d’amortissement que le bâtiment. Voy. à ce propos la circulaire Ci.RH 243/605.796

(AAFisc n° 1/2011), du 11 janvier 2011. Voyez également J. VAN DYCK, « Objets d’art incorporés dans des

bâtiments : nouveau régime », Fiscologue, 2011, n° 1235, p. 3.

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243

Sauf lorsqu’une dépréciation effective a pu être établie par le contribuable, la jurisprudence

fiscale confirme généralement la position administrative258.

En revanche, les juges se montrent plus favorables à l’amortissement d’instruments de

musique utilisés par des professionnels de cet art259.

d) Amortissement de la clientèle

Le principe même de l’amortissement d’une clientèle, qui constitue une immobilisation

incorporelle, ne peut être mis en doute dès lors qu’il s’agit d’une clientèle acquise, et non

d’une clientèle constituée par le contribuable lui-même.

On ne peut considérer, à cet égard, que le caractère stable ou l’augmentation du montant

des revenus perçus au moyen d’une clientèle acquise exclut toute dépréciation de cette

même clientèle260.

Un tel raisonnement procède en fait d’une confusion entre le rendement de l’activité

professionnelle du nouvel exploitant et la valeur propre de la clientèle qui était attachée au

fonds de commerce au moment de sa cession.

La clientèle existant au moment de l’acquisition du fonds disparaît suite aux circonstances

de la vie (décès, déménagements, concurrence, etc.) et est remplacée par une nouvelle

clientèle, attirée par le travail du nouvel exploitant du fonds. Cette nouvelle clientèle est un

élément d’actif différent de celui sur lequel porte l’amortissement.

e) Base amortissable

C’est le coût historique de l’investissement, c’est-à-dire ce que le bien a coûté lorsqu’il a été

investi. Il s’agit plus précisément de sa valeur d’investissement ou de revient, qui constitue

la base de calcul de l’amortissement (art. 61 du C.I.R. 1992).

Par valeur d’investissement ou de revient, on entend, suivant le cas, le prix d’acquisition (ce

qui comprend les frais accessoires au prix d’achat tels que les frais d’enregistrement, les

frais de notaire, les frais d’expertise, les honoraires de l’architecte, etc.), le prix de revient

258 Voyez notamment Civ. Mons, 24 mai 2005, F.J.F., n° 2006/63 ; Civ. Anvers, 5 mai 2007, F.J.F., n° 2007/282 ;

Civ. Liège, 25 février 2008, Cour. fisc., 2008, p. 486 ; Gand, 26 octobre 2010, Fiscologue, 2011, n° 1233, p. 4,

note S. VAN CROMBRUGGE. 259 Voyez notamment Mons, 17 décembre 2004, F.J.F., n° 2005/221. 260 Cass., 21 octobre 2005, F.J.F., n° 2006/195.

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244

ou la valeur d’apport du bien au jour de l’investissement.

Le prix de revient comprend le coût des matières premières et fournitures mises en œuvre

pour produire le bien, les coûts de fabrication directement imputables aux produits ou aux

groupes de produits considérés et, le cas échéant, une quote-part des coûts indirects de

production.

Si un bien amortissable est acquis moyennant un prix qui comprend, outre une partie fixe,

une partie variable basée sur un pourcentage du chiffre d’affaires ou des bénéfices à

réaliser au cours des années suivantes, l’acquéreur doit, le cas échéant, activer cette partie

variable et l’amortir sur la durée d’utilisation restante du bien acquis261.

Cette durée d’utilisation est en effet propre au bien acquis. Elle est généralement

indépendante du prix payé et de l’échelonnement éventuel du paiement de ce prix.

f) Méthodes d’amortissement

Si l’amortissement fiscal doit correspondre à une dépréciation réellement survenue

pendant la période imposable, la très grande diversité des situations à envisager a rendu

nécessaire le recours à des méthodes d’amortissement déterminant des quotités forfaitaires

d’amortissement, en fonction des différents types d’immobilisations. Dans ce cadre, le

droit fiscal admet diverses méthodes.

i. L’amortissement linéaire ou constant

L’amortissement linéaire ou constant consiste à déduire, chaque année, un pourcentage

fixe de la valeur d’investissement ou de revient du bien à amortir en fonction de la durée

probable d’utilisation du bien. Ce pourcentage, qui varie selon les catégories de biens, est

égal à 100 / durée normale d’utilisation du bien exprimée en années.

Ainsi, par exemple, pour une machine de bureau utilisée normalement pendant 10 ans, le

pourcentage normal d’amortissement est de 10 %. Dès lors, pour une machine de 50.000 €,

l’annuité d’amortissement est égale à 5.000 €, correspondant à 50.000 € x 10 %.

Quelques exemples d’annuités linéaires d’amortissement généralement admises sont repris

ci-dessous, sous réserve de l’application éventuelle de taux plus élevés s’il s’agit de biens

sujets à une dépréciation plus rapide :

261 Cass., 23 avril 2010, T.F.R., 2001, n° 398, p. 256.

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245

- Immeubles à usage de bureaux, immeubles commerciaux ou affectés à une

profession libérale : 33,33 ans ;

- Bâtiments industriels : 20 ans ;

- Matériel et machines de bureau : 10 ans ;

- Véhicules automobiles : 5 ans ;

- Matériel informatique : 5 ans, voire 3 ans vu la rapidité avec laquelle un tel matériel

devient obsolète ;

- Immobilisations incorporelles (fonds de commerce, clientèle, brevets, licences,

marques et autres droits similaires, goodwill, etc.) : 5 ans minimum ;

- Recherche et développement : 3 ans minimum.

Il existe également un régime spécial de doublement des amortissements linéaires relatifs à

certains biens, dont jouissent sur autorisation les entreprises qui peuvent bénéficier des

aides prévues dans le cadre des lois d’expansion économique (art. 64bis du C.I.R. 1992).

ii. L’amortissement dégressif

Le système d’amortissement linéaire ne prend pas en considération le fait que le bien, lors

de sa mise en usage, se déprécie fortement. Pour cette raison, on admet en général que

l’amortissement d’un bien puisse être pratiqué selon une méthode dégressive, sur option

du contribuable.

Cette option, qui présente pour le contribuable un caractère irrévocable, doit être notifiée

à l’administration fiscale au moyen d’un formulaire ad hoc. Cette notification doit être

opérée dans le délai prescrit pour la remise de la déclaration fiscale afférente à la période

imposable au cours de laquelle les biens ont été acquis ou constitués (art. 41 de l’AR/C.I.R.

1992).

Le pourcentage déduit dans le cadre de l’amortissement dégressif est, au maximum, le

double du taux linéaire. Par ailleurs, l’annuité d’amortissement dégressif ne peut pas

dépasser 40 % de la valeur d’investissement ou de revient du bien investi (art. 64, al. 3 du

C.I.R. 1992). Sauf la première année, ces pourcentages ne sont pas calculés sur le coût

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historique de l’investissement, mais sur le solde de sa valeur restant à amortir.

En outre, la dotation d’amortissement annuelle est toujours au moins égale à l’annuité

d’amortissement linéaire (ou au solde restant à amortir, si le montant de celui-ci est

inférieur à celui de l’annuité linéaire). En d’autres termes, lorsque le taux de

l’amortissement dégressif devient inférieur à celui de l’amortissement linéaire (s’il avait été

appliqué), le taux de l’amortissement linéaire trouve application.

Un exemple permet de mieux cerner les subtilités du mécanisme de l’amortissement

dégressif.

Exemple :

Un matériel est acheté en 2015 pour un montant de 7.500 €. La différence entre un

amortissement linéaire au taux de 20 % et un amortissement dégressif au taux de 40 % est

la suivante.

Amortissement linéaire :

Année Dotation

2015 1.500 €

2016 1.500 €

2017 1.500 €

2018 1.500 €

2019 1.500 €

Amortissement dégressif :

Année Solde restant à amortir Dotation

2015 7.500€ 3.000 €

2016 4.500 € 1.800 €

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2017 2.700 € 1.500 €

2018 1.200 € 1.200 €

L’amortissement dégressif présente l’avantage de permettre d’amortir plus rapidement des

investissements et donc de déduire chaque année des revenus professionnels bruts une

proportion supérieure à ce qu’aurait permis l’amortissement linéaire.

En principe, l’amortissement dégressif d’un bien trouve toutefois application sur une

période plus courte que celle applicable dans le cadre d’un amortissement linéaire.

En outre, l’amortissement dégressif n’est pas admis pour les voitures et minibus non

destinés à un service de taxi ou à la location avec chauffeur (art. 43, 1° de l’AR/C.I.R. 1992),

ni pour les immobilisations incorporelles acquises ou constituées à partir du 1er janvier

1990, ni pour les immobilisations dont l’usage a fait l’objet d’une cession au profit d’un tiers

par le contribuable qui procède à leur amortissement (art. 43, 2° de l’AR/C.I.R. 1992).

g) Précisions techniques en matière d’amortissement

i. L’amortissement lors de l’année de l’acquisition du bien

À l’impôt des personnes physiques, l’amortissement peut être pratiqué l’année de

l’acquisition du bien, sans qu’il y ait lieu de réduire l’annuité d’amortissement en fonction

de la date effective de cette acquisition.

L’administration fiscale admet en effet que puisse être déduite une annuité complète

d’amortissement l’année de l’acquisition du bien amortissable.

ii. L’amortissement des frais accessoires, des coûts indirects de production et des frais

d’établissement

Le prix d’acquisition comprend, outre le prix d’achat, les frais accessoires d’acquisition (art.

36, al. 1er de l’AR/SOC). Ces frais, de même que les coûts indirects de production qui

entrent en considération dans le prix de revient, peuvent être (art. 62 du C.I.R. 1992) :

- Soit amortis en une fois l’année où ils sont exposés ;

- Soit amortis par annuités fixes dont le nombre est déterminé par le contribuable ;

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- Soit inclus dans la base d’amortissement de l’élément auquel ces frais se rapportent,

et amortis en même temps et selon les mêmes modalités que cet élément.

Les frais d’établissement peuvent être amortis selon l’une des deux premières méthodes

applicables en matière de frais accessoires (art. 62 du C.I.R. 1992 et art. 58 de l’AR/SOC).

Les frais d’établissement rassemblent tous les frais qui ont trait à la constitution, au

développement et à la restructuration d’une entreprise.

iii. La révision des taux d’amortissement

De manière générale, les amortissements doivent continuer à être pratiqués sur la base des

taux d’amortissement initialement fixés. Une révision des taux d’amortissement peut

cependant intervenir, sur demande écrite et motivée du contribuable, pour être augmentés

ou diminués, lorsque les contingences économiques ou technologiques ou un changement

des conditions d’exploitation le justifient. Il en va de même en cas d’erreur d’appréciation

objective du contribuable quant aux conditions économiques ou technologies

originaires262.

En outre, si, au cours de la période imposable, un investissement amortissable subit une

dépréciation exceptionnelle en raison, par exemple, d’une utilisation intensive ou d’une

défaillance technique, les taux d’amortissement peuvent également être augmentés.

iv. Les discordances entre le droit fiscal et le droit comptable

Les quotités d’amortissement admises par l’administration fiscale pour certains types de

biens peuvent être inférieures aux amortissements admis ou repris par la réglementation

comptable (en application des critères de prudence, de sincérité, de bonne foi et de

continuité) (art. 32 de l’AR/SOC).

Les différences de dotations aux amortissements fiscales et comptables peuvent en

particulier résulter des critères distincts utilisés en matière de durée d’amortissement : la

durée probable de dépréciation du côté fiscal, la durée probable d’utilisation du côté

comptable.

Les excédents d’amortissements comptables par rapport aux amortissements admissibles

262 Com. I.R., n° 61/216 et 61/217.

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249

sur le plan fiscal sont taxables comme réserves occultes, sauf si cet excédent correspond en

réalité à une dépréciation exceptionnelle survenue au cours de l’exercice comptable

considéré263.

Même si l’impôt est perçu sur la partie excédentaire des amortissements comptables, le

contribuable peut toujours, au cours des années suivantes, porter un amortissement fiscal

normal en déduction de ses revenus professionnels, jusqu’à ce que la valeur

d’investissement ou de revient de ces éléments soit intégralement amortie d’un point de

vue fiscal264.

h) La mise hors d’usage d’un actif amortissable

Lorsqu’un bien amortissable est mis hors d’usage, suite à une vente, une cession, un apport

en société ou sa destruction avant l’expiration de sa période normale d’amortissement, une

moins-value ou une plus-value peut, selon le cas, se dégager.

Une moins-value se rencontre lorsque les amortissements admis jusqu’à la fin de la

période imposable antérieure ne couvrent pas la différence entre le prix d’achat et le prix

de cession de l’élément mis hors d’usage.

Par contre, lorsque le prix de cession dépasse le prix d’achat diminué des amortissements

admis jusqu’à la fin de la période imposable antérieure, l’excédent est considéré comme

une plus-value.

Comme la plus-value est en principe imposable, la moins-value est en principe déductible

des revenus professionnels bruts du contribuable.

L’administration fiscale a toujours admis une annuité complète d’amortissement pour

l’année de l’acquisition du bien, quelle que soit la date effective de cette acquisition. Elle

n’admet en revanche aucune annuité pour l’année de sa réalisation (Com.IR 92, n° 61/84 et

61/100).

La jurisprudence considère néanmoins qu’aucune disposition légale ne prévoit la

restriction voulue par l’administration fiscale. Elle admet dès lors généralement qu’un

amortissement prorata temporis puisse être pratiqué l’année de l’aliénation du bien, si le

contribuable apporte la preuve d’une dépréciation réellement survenue au cours de cette

263 Com. I.R., n° 61/93. 264 Cass., 12 octobre 1931, Bull. contr., 1931, n° 59, p. 11.

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250

période265.

Section 14. Déduction des intérêts des capitaux empruntés

a) Généralités

Les intérêts des capitaux empruntés à des tiers et engagés dans l’exploitation

professionnelle sont également considérés comme des frais professionnels (art. 52, 2° du

C.I.R. 1992).

Deux conditions essentielles peuvent être relevées. Pour être déductibles, les intérêts

supportés doivent avoir trait à des capitaux (i) empruntés à des tiers et (ii) engagés dans

l’exploitation professionnelle.

La première condition, en vertu de laquelle le prêteur doit être un tiers, signifie

simplement que le prêteur et l’emprunteur ne peuvent pas être la même personne. Cette

condition permet, par exemple, qu’un professionnel ne puisse pas prétendre à la déduction

d’intérêts sur des capitaux privés qu’il se serait prêté à lui-même dans le cadre de son

activité professionnelle.

Quant à la seconde condition, elle implique que les intérêts d’un emprunt ne peuvent être

assimilés à des dépenses déductibles dans le chef du contribuable que si cet emprunt est

inhérent à l’exercice de sa profession266, conformément aux règles générales de déduction

des frais professionnels (art. 49 du C.I.R. 1992).

Cette considération a pour conséquence, comme le confirme la Cour de cassation, que les

intérêts des capitaux empruntés ne sont considérés comme des frais professionnels dans le

chef du contribuable qu’à la condition de constituer une dépense faite ou supportée,

pendant la période imposable, en vue d’acquérir ou de conserver des revenus imposables267.

C’est le contribuable qui doit apporter la preuve que les conditions de déduction des

intérêts des capitaux empruntés sont remplies. Dans ce cadre, l’affectation réelle donnée

aux fonds empruntés l’emporte sur les stipulations éventuelles du contrat d’emprunt268.

265 Voyez notamment à ce sujet Gand, 19 octobre 2010, F.J.F., n° 211/189 ; Civ. Arlon, 12 octobre 2011, F.J.F.,

n° 2012/162. Contra Civ. Louvain, 9 septembre 2011, Fiscologue, 2011, n° 1267, p. 1. 266 Cass., 9 novembre 2007, T.F.R., 2008, n° 344, p. 637. 267 Cass., 31 octobre 1979, Pas., 1980, I, p. 280. 268 Com. I.R., n° 52/36.

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251

b) Taux d’intérêt maximum

Le Code des impôts sur les revenus fixe une limite à la déduction des intérêts afin

d’empêcher qu’un contribuable réduise sa base imposable en contractant, auprès d’un tiers

complice, un prêt portant intérêt à un taux excessif. Cette limitation permet notamment

d’éviter des transferts de fonds abusifs entre une entreprise en bénéfice et une entreprise

en perte.

Ainsi, constituent des dépenses non admises au titre de frais professionnels déductibles les

intérêts d’obligations, de prêts, de créances, de dépôts et d’autres titres constitutifs

d’emprunts, dans la mesure où ils dépassent un montant correspondant à un taux

« normal », également appelé « taux du marché ».

Ce taux « normal » correspond au taux pratiqué sur le marché compte tenu des éléments

particuliers propres à l’appréciation du risque lié à l’opération et notamment de la situation

financière du débiteur et de la durée du prêt (art. 55, al. 1er du C.I.R. 1992).

Il n’existe évidemment pas de taux normal s’imposant de manière identique à tous les

prêts. Il faut tenir compte d’un taux normal fluctuant en fonction des circonstances

propres à chaque cas.

Ainsi, le taux normal peut être très élevé si le risque d’insolvabilité du débiteur est très

important. À l’inverse, le taux normal peut être réduit si le prêt est assorti de garanties

sérieuses (comme une hypothèque ou une caution personnelle) fournies au créancier, ou si

la notoriété du débiteur est telle qu’elle implique un faible risque de non-recouvrement du

prêt.

Toutes les circonstances propres à chaque cas, qu’elles soient favorables ou défavorables,

doivent dès lors être prises en considération pour déterminer le taux normal autorisé dans

une situation déterminée. Le cas échéant, la charge de la preuve du caractère excessif du

taux du prêt incombe à l’administration fiscale.

Récemment, la Cour d’appel de Mons a jugé que le taux moyen de la Banque Nationale de

Belgique, peut raisonnablement constituer un élément qui permet d’évaluer si un taux

convenu entre parties est « normal269 ». Cela paraît douteux, ou en tous cas inapplicable

aux petites entreprises qui n’ont en général pas accès à des taux aussi favorables.

269 Voyez à ce propos Mons, 15 octobre 2014, Act. fisc., 2015, n° 1, note N. THEMELIN. Contra Civ. Mons, 17

mars 2014, Fiscologue, 2014, n° 1404, p. 6, note C. BUYSSE.

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252

Lorsque le taux d’intérêt pratiqué excède le taux normal autorisé, les intérêts sont

néanmoins déductibles à concurrence de ce taux, le solde étant simplement rejeté des frais

professionnels déductibles.

Pour montrer que le taux d’intérêt pratiqué ne dépasse pas le taux du marché, le

contribuable peut démontrer, par exemple, qu’il n’a pas pu obtenir de crédit à des

conditions plus avantageuses.

Par ailleurs, il est fait exception à cette limitation dans certains cas. Il en va notamment

ainsi pour les intérêts payés aux établissements de crédit agréés dans un État membre de

l’Espace économique européen et aux intérêts payés en raison d’obligations émises

publiquement, quel que soit leur taux (art. 56 du C.I.R. 1992).

Tenant compte de cette exception, le contribuable avisé peut donc solliciter une

proposition de crédit auprès d’une banque, dont le taux d’intérêt n’est pas contestable, puis

appliquer les conditions de ce crédit au prêt contracté auprès d’un tiers.

Section 15. Intérêts, redevances et rémunérations de prestations de services payés à

l’étranger

a) Principe et champ d’application

En principe, ne sont pas admises au titre de frais professionnels déductibles les sommes

payées au titre d’intérêts quelconques à une personne ou à une entreprise non-résidente ou

à un établissement étranger qui est établi dans un pays-refuge.

Cette mesure s’applique également aux paiements qui portent sur des redevances pour la

concession de l’usage de brevets d’invention, de procédés de fabrication ou d’autres droits

analogues, ou sur des rémunérations de prestations de services.

En outre, l’application de cette mesure n’est pas limitée aux seules entreprises. Elle

concerne en effet tout contribuable qui postule la déduction au titre de frais professionnels

d’intérêts, de redevances et de rémunérations de prestations de services payés à l’étranger.

Cette mesure appréhende par ailleurs les versements effectués à un tiers établi dans un

pays-refuge, que ces versements soient directs ou indirects. Ainsi, la situation d’une

entreprise belge qui emprunte auprès d’une banque étrangère qui se finance elle-même

auprès d’une société holding établie dans un pays-refuge rentre, par exemple, dans son

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champ d’application.

Un pays-refuge est un pays dans lequel le revenu n’est pas soumis à un impôt sur les

revenus ou dans lequel il bénéfice, pour les revenus considérés, d’un régime d’imposition

notablement plus avantageux qu’en Belgique (art. 54 du C.I.R. 1992).

C’est à l’administration fiscale qu’il incombe de rapporter la preuve que le pays de

destination des revenus peut être considéré comme un pays-refuge au sens de cette

mesure.

S’il est relativement aisé de déterminer si une personne est soumise ou non, dans le pays

où elle est établie, à un impôt sur les revenus, la notion vague de « régime d’imposition

notablement plus avantageux » prête évidemment à critique.

b) Exception et limitation

Par exception, les intérêts, redevances et rémunérations de prestations de services payés à

l’étranger sont admissibles au titre de frais professionnels déductibles lorsque le

contribuable justifie, par toutes voies de droit, que les paiements effectués répondent à des

opérations réelles et sincères et qu’ils ne dépassent pas les limites normales.

La sincérité d’une dépense est naturellement une notion subjective. La Cour de cassation a

défini l’emprunt réel et sincère comme celui qui « répond aux besoins financiers réels de

l’entreprise270 ».

Dans ce cadre, il a notamment été jugé que la preuve de la réalité et de la sincérité d’une

opération d’emprunt est rapportée lorsqu’il est établi que la société qui a emprunté à

l’étranger ne bénéficiait plus auprès de sa banque, en raison de ses pertes, que d’un crédit

fort précaire et onéreux, et qu’elle avait des raisons de rechercher d’autres sources de

financement271.

En l’espèce, il résultait des pièces produites que la société avait procédé vainement à

plusieurs tentatives, tant en Belgique qu’à l’étranger, pour s’attirer de nouveaux capitaux.

De plus, les fonds avaient été réellement mis à la disposition de la société belge qui les avait

notamment utilisés pour apurer une dette vis-à-vis d’une banque.

270 Voyez Cass., 10 novembre 1964, Pas., 1965, I, p. 251. 271 Voyez Gand, 27 septembre 1988, R.G.F., 1989, p. 82.

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254

La Cour de cassation a par ailleurs précisé que seule est non déductible la partie des

dépenses qui n’est pas normale ou qui se rapporte à des opérations dont le caractère réel et

sincère n’est pas établi272, c’est-à-dire l’excédent par rapport à une dépense « normale ».

c) Violation du droit européen

De son côté, la Cour européenne de justice a considéré, dans un arrêt rendu le 5 juillet

2012, que cette mesure constituait une restriction injustifiée à la libre prestation de

services au sein de l’Union européenne (il s’agissait, en l’espèce, de rémunérations de

prestations de services273).

Selon la Cour, « une telle règle spéciale, qui prévoit des conditions plus strictes pour obtenir

la déduction des frais professionnels que celles prévues par la règle générale (art. 49 CIR) et

dont le champ d’application n’est pas déterminé avec précision au préalable, est susceptible

de dissuader, d’une part, les contribuables belges d’exercer leur droit à la libre prestation des

services et de recourir aux services de prestataires établis dans un autre État membre et,

d’autre part, ces derniers d’offrir leurs services à des destinataires établis en Belgique ».

La Cour ajoute que cette mesure ne satisfait pas aux exigences du principe de sécurité

juridique, qui requiert que les règles de droit soient claires, précises et prévisibles dans

leurs effets, en particulier lorsqu’elles peuvent avoir sur les individus et les entreprises des

conséquences défavorables.

Section 16. Intérêts d’emprunts contractés en vue de payer un impôt

Les intérêts rémunérant un emprunt contracté en vue de payer l’impôt

proportionnellement afférent aux revenus professionnels sont admis en déduction au titre

de frais professionnels, pour autant que le contribuable ait effectivement affecté les fonds

empruntés à cette fin.

Sont également admis au titre de frais professionnels déductibles les intérêts se rapportant

à un emprunt contracté en vue d’effectuer des versements anticipés (art. 157 et s. du C.I.R.

1992) pour payer la partie de l’impôt des personnes physiques qui se rapporte aux revenus

professionnels du contribuable.

En revanche, la déduction au titre de frais professionnels des intérêts d’un emprunt

272 Voyez Cass., 27 septembre 1966, Journ. prat. dr. fisc., 1967, p. 23. 273 C.J.U.E., 5 juillet 2012, aff. C-318/10, F.J.F., n° 2012/246 ; Cass., 10 janvier 2013, T.F.R., 2013, n° 442, p. 445.

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contracté pour payer des arriérés d’impôt a été refusée par certaines décisions, peut-être

discutables274.

Section 17. Intérêts de dettes contractées par des dirigeants d’entreprise en vue

d’acquérir des actions ou parts

Les dirigeants d’entreprise peuvent déduire, au titre de frais professionnels, les intérêts de

dettes contractées auprès de tiers en vue de l’acquisition d’actions ou parts représentatives

du capital d’une société résidente dont ils perçoivent des rémunérations périodiques

pendant la même période (art. 52, 11°du C.I.R. 1992).

Il est requis que le dirigeant d’entreprise perçoive des rémunérations périodiques

directement de la société pour laquelle les intérêts sont payés, et non, par exemple, d’une

filiale de cette société.

En revanche, la loi fiscale ne contient aucune exigence quant au montant de la

rémunération périodique ni aucun rapport de proportionnalité entre le montant des

intérêts déduits et le montant de la rémunération perçue.

La disproportion éventuelle entre le montant emprunté et la rémunération proméritée ne

constitue donc pas en elle-même un motif suffisant pour rejeter la déduction des intérêts

de cet emprunt au titre de frais professionnels.

En principe, la déduction des intérêts au titre de frais professionnels est par ailleurs refusée

si l’emprunt est contracté auprès de la société elle-même ou d’une entreprise qui lui est

liée. La dette doit normalement être contractée auprès d’un tiers.

En outre, la déduction cesse d’être admise en cas d’aliénation des actions ou de

remboursement du capital (art. 53, 16° du C.I.R. 1992).

Section 18. Condition de publicité de la déduction des rémunérations, commissions,

honoraires, etc.

La déduction au titre de frais professionnels des rémunérations (à l’exception de celles

attribuées au conjoint aidant), honoraires, courtages, commissions, indemnités, avantages

en nature, indemnités forfaitaires allouées en remboursement de frais propres à

l’employeur, etc., est subordonnée à la production de fiches individuelles et de relevés

274 Voyez notamment Bruxelles, 3 décembre 1999, Cour. fisc., 2000, p. 176.

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récapitulatifs (art. 57 à 59 du C.I.R. 1992 et art. 30 à 33 et 86 à 95 de l’AR/C.I.R. 1992).

Il s’agit, par exemple, des fiches de rémunération 281.10 et relevés récapitulatifs 325.10, et,

pour les commissions, courtages, ristournes, vacations, honoraires, gratifications,

rétributions ou avantages de toute nature, des fiches 281.50 et relevés 325.50.

Cette condition de publicité a pour objet de permettre à l’administration fiscale de

contrôler non seulement la réalité et le caractère déductible des dépenses invoquées par le

contribuable mais surtout le caractère effectif de leur imposition dans le chef de leurs

bénéficiaires.

La remise des fiches et relevés doit avoir lieu avant le 30 juin de l’année qui suit celle à

laquelle ces documents se rapportent s’il s’agit de commissions, courtages, honoraires, etc.,

qui constituent pour leurs bénéficiaires des revenus professionnels (imposables ou non en

Belgique) (art. 57, 1° du C.I.R. 1992).

En ce qui concerne les rémunérations et pensions allouées aux membres du personnel et

aux dirigeants d’entreprise, les fiches et relevés doivent en principe être déposés avant le 1er

mars de l’année qui suit celle à laquelle ces documents se rapportent (art. 57, 2° du C.I.R.

1992 et art. 32, 92 et 93 de l’AR/C.I.R. 1992).

Section 19. Rémunérations des membres de la famille du contribuable travaillant

avec lui

La rémunération du conjoint n’est jamais déductible au titre de frais professionnels, sauf s’il

s’agit de la rémunération octroyée au conjoint aidant qui n’exerce aucune autre activité lui

procurant une protection sociale propre (art. 33 et 53, 12° du C.I.R. 1992).

La non-déductibilité des rémunérations attribuées au conjoint aidant est logique si l’on

tient compte du régime de la quote-part attribuée à ce conjoint (art. 86 du C.I.R. 1992).

Sans l’interdiction de déduction, le conjoint bénéficierait en effet d’un double avantage

fiscal : d’une part, l’attribution d’une quote-part des bénéfices ou profits au conjoint aidant

et, d’autre part, la déductibilité des rémunérations qui lui sont attribuées.

Les rémunérations des autres membres de la famille qui habitent avec le contribuable ne

sont déductibles au titre de frais professionnels que dans la mesure où elles ne dépassent

pas un traitement « normal » eu égard aux prestations de leur bénéficiaire.

Dans ce cadre, un traitement est jugé « normal » lorsqu’il est équivalent à celui qui serait

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257

payé à une personne extérieure à la famille, exerçant la même activité dans les mêmes

conditions.

Elles ne sont par ailleurs déductibles que si le membre de la famille qui en est le

bénéficiaire fournit, en qualité d’aidant, des prestations qui, sans leur concours, devraient

normalement être effectuées par de la main-d’œuvre salariée étrangère à la famille 275.

L’objet de cette mesure est d’éviter que le contribuable répartisse artificiellement ses

revenus professionnels entre les différents membres d’une même famille afin d’échapper

aux tranches les plus élevées de l’impôt des personnes physiques.

Enfin, la condition de publicité commentée ci-dessus est également de mise pour ces

rémunérations.

Section 20. Frais de voiture

a) Généralités

La déduction des frais de voiture au titre de frais professionnels a toujours été la source

d’un important contentieux entre les contribuables et l’administration fiscale.

Le contribuable qui prétend déduire des frais de déplacement au titre de frais

professionnels doit établir l’utilisation de sa voiture et le nombre de kilomètres qu’il a

parcourus à des fins professionnelles.

La preuve de ces déplacements peut être apportée par le contribuable de différentes

manières. Il s’agit, par exemple, de la présentation des factures d’achat et d’entretien du

véhicule utilisé à titre professionnel mentionnant le nombre de kilomètres parcourus.

b) Rejet de 25 % des frais de voiture

Les charges et dépenses afférentes à l’utilisation, en Belgique ou à l’étranger, de voitures et

minibus ne sont déductibles au titre de frais professionnels qu’à concurrence des trois

quarts du montant qui se rapporte à leur partie professionnelle (art. 66 du C.I.R. 1992).

Corollairement, les plus-values ou moins-values éventuellement réalisées sur les véhicules

frappés par la limitation de déduction ne sont prises en considération qu’à concurrence des

275 Com. I.R., n° 57/38.

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trois quarts de leur montant.

Les frais de voiture comprennent l’amortissement, l’entretien, les réparations, le carburant,

les assurances et taxes, la location d’emplacements de parking, etc., à l’exclusion des frais

de mobilophonie.

Le rejet de 25 % des frais de voiture s’applique aussi aux frais dont le contribuable obtient

le remboursement de tiers, tels que les frais de voiture remboursés par l’employeur à ses

employés.

c) Rejet des frais privés et des frais professionnels déraisonnables

La quotité des frais de voiture afférente à l’usage privé du véhicule n’est pas déductible. Il

faut par conséquent calculer la quotité professionnelle de l’utilisation du véhicule, puis

appliquer la limite de 75 % à la seule quotité des frais relatifs à l’utilisation professionnelle

du véhicule.

Par ailleurs, rien n’empêche l’administration fiscale de rejeter une partie des frais de

voiture, avant l’application du rejet de 25 % prévu légalement, si elle estime que ces frais,

de par leur importance et leur nature, dépassent de manière déraisonnable les nécessités

professionnelles du contribuable (art. 53, 10° du C.I.R. 1992).

Pour rappel, le simple fait que les dépenses ne soient pas proportionnelles aux revenus

professionnels du contribuable ne permet pas à l’administration fiscale d’en refuser la

déduction pour dépassement déraisonnable des nécessités professionnelles276.

d) Exception au rejet de 25 % des frais de voiture

Par exception, le rejet de 25 % des frais de voiture professionnels ne s’applique pas (art. 66,

§ 2 du C.I.R. 1992) :

- Aux charges de financement liées à l’acquisition du véhicule (intérêts d’emprunt),

ainsi qu’aux frais de mobilophonie ;

- Aux frais exposés par l’employeur ou par la société pour l’octroi d’un avantage de

toute nature taxable dans le chef de son bénéficiaire, afin d’éviter une double

imposition ;

276 Voyez notamment Gand, 10 février 2000, F.J.F., n° 2000/285.

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- Aux frais se rapportant, pour leur exploitant ou leur propriétaire, aux taxis, aux

voitures louées avec chauffeur, aux voitures des auto-écoles et aux véhicules donnés

exclusivement en location à des tiers.

S’agissant de taxis, de voitures louées avec chauffeur ou de véhicules donnés

exclusivement en location à des tiers, le rejet de 25 % des frais de voiture s’applique

néanmoins dans le chef de leur exploitant, dès lors qu’il s’agit de véhicules qui

appartiennent à des tiers ou que le montant des frais de voiture est remboursé à des

tiers (art. 66, § 3 du C.I.R. 1992). L’usage final de ces véhicules est également soumis

à la limitation.

Enfin, la Cour constitutionnelle a jugé, en 2013, que le fait que les garagistes

propriétaires de véhicules de remplacement ne soient pas soumis à la limite de

déduction de 75 %, alors que ceux qui ne sont pas propriétaires de ces véhicules le

sont, n’est pas discriminatoire277.

e) Déplacements entre le domicile et un lieu fixe de travail

i. Généralités

Pour ce qui concerne les frais de voiture afférents aux déplacements entre le domicile et un

lieu fixe de travail, le rejet de 25 % des frais de voiture est remplacé par une détermination

forfaitaire des frais réels déductibles au titre de frais professionnels, fixée à 0,15 € par

kilomètre parcouru, quel que soit le type et le coût du véhicule (art. 66, §§ 4 et 5 et 178 du

C.I.R. 1992).

Le forfait de 0,15 € par kilomètre parcouru n’est applicable que si le contribuable entend

déduire au titre de frais professionnels ses frais réels, et non s’il opte pour la déduction

d’un forfait de frais professionnels (lequel comprend le déplacement entre le domicile et un

lieu fixe de travail).

En revanche, et bien qu’il s’agisse davantage d’un cas d’école, il est applicable même si les

frais réels exposés pour les déplacements entre le domicile et un lieu fixe de travail

s’avèrent moins importants.

277 C.C., 13 novembre 2013, n° 153/2013, www.const-cour.be.

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260

ii. Champ d’application

Le forfait de 0,15 € par kilomètre parcouru couvre en principe tous les frais afférents à

l’utilisation de la voiture : amortissement, entretiens, réparations, assurances, taxes,

parking, nettoyage, carburant, etc. Seuls en sont exclus les frais de financement et de

mobilophonie, qui ne correspondent pas à des frais de déplacement proprement dits.

Il trouve à s’appliquer à tous les déplacements entre le domicile et un lieu fixe de travail.

Dans ce cadre, il importe peu que le contribuable exerce une partie de son activité

professionnelle à son domicile278 ou que la voiture ne soit pas utilisée régulièrement. Dans

le même sens, sont sans incidence les jours et les heures au cours desquels les

déplacements sont effectués (urgence professionnelle, jour férié, nuit, etc.).

Il s’applique aux trajets entre le domicile et un lieu fixe de travail, et entre un lieu fixe de

travail et le domicile, mais pas entre deux lieux fixes de travail. Ainsi, dans le chef d’un

professeur enseignant successivement au cours de la même journée à Bruxelles et à Liège,

le forfait s’applique entre son domicile et Bruxelles, puis entre Liège et son domicile, mais

pas entre Bruxelles et Liège.

En revanche, le contribuable qui ne dispose pas d’un lieu fixe de travail ne peut en

bénéficier. Cette hypothèse peut concerner, par exemple, un représentant de commerce.

iii. Preuve des déplacements

Pour bénéficier du forfait de 0,15 € par kilomètre parcouru, le contribuable doit apporter la

preuve de l’utilisation de sa voiture pour des déplacements entre son domicile et un lieu

fixe de travail. Le contribuable doit également justifier le nombre de kilomètres parcourus

à cette fin279.

En revanche, le principe même du forfait dispense le contribuable de produire les pièces

justificatives du montant réel des frais de voitures afférents aux déplacements entre son

domicile et un lieu fixe de travail.

Le déplacement entre le domicile et un lieu fixe de travail qu’il convient de retenir n’est pas

nécessairement le plus court mais celui qui peut être considéré comme « normal ». Ainsi,

un trajet plus long effectué par autoroute est acceptable si le gain de temps et l’espoir

278 Cass., 21 novembre 2002, J.D.F., 2005, p. 46 ; Cass., 12 juin 2003, FisconetPlus. 279 Com. I.R., n° 66/70.

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261

d’obtenir de meilleures conditions de sécurité sont significatifs pour le contribuable280.

En tout état de cause, il n’appartient pas à l’administration fiscale de critiquer le choix du

contribuable d’établir son domicile en un lieu éloigné de son (ses) lieu(x) fixe(s) de travail,

en dehors du cas où ce domicile revêtirait un caractère illégal ou fantaisiste.

Si le contribuable effectue le déplacement entre son domicile et un lieu fixe de travail

plusieurs fois par jour (parce qu’il déjeune à son domicile par exemple), le forfait peut

s’appliquer pour chaque déplacement, à la condition que les trajets revendiqués soient

plausibles.

Afin d’en vérifier la plausibilité matérielle, l’administration fiscale vérifie si le contribuable

dispose du temps pour effectuer chaque déplacement, compte tenu de la longueur et de la

durée normale du trajet, de la durée de son temps d’interruption autorisé au travail, etc.

iv. Conditions

Afin d’éviter que le forfait soit appliqué plus d’une fois par des contribuables qui se

déplaceraient en commun, le bénéfice exclusif du forfait est réservé au contribuable

lorsque le véhicule utilisé est sa voiture personnelle. La voiture personnelle du

contribuable est celle qui :

- Soit est sa propriété ou est immatriculée à son nom ;

- Soit est mise à sa disposition de manière permanente en vertu d’un contrat de

location ou de leasing ;

- Soit appartient à son employeur ou à sa société, l’avantage de toute nature résultant

de l’utilisation du véhicule étant imposé dans son chef. Le contribuable peut alors

déduire de cet avantage imposable (minoré le cas échéant de son intervention) le

forfait de 0,15 € par kilomètre parcouru.

Dans cette hypothèse, le montant déductible calculé forfaitairement ne peut pas

être supérieur à l’avantage de toute nature imposable dans le chef du contribuable.

Dans les deux premiers cas, le forfait de 0,15 € par kilomètre parcouru peut être invoqué

par le conjoint, le cohabitant légal, voire l’enfant du contribuable, étant entendu qu’il ne

280 Voyez notamment Liège, 8 février 2002 et 13 septembre 2002, F.J.F., n° 2002/250 et 2002/251.

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262

peut bénéficier qu’à un seul des contribuables qui effectuent des déplacements en commun

(art. 66, § 5, al. 2 du C.I.R. 1992).

Dans le troisième cas, l’époux qui utilise, pour se rendre à un lieu fixe de travail, le véhicule

mis à la disposition de son conjoint par l’employeur ou la société de ce dernier, ne peut en

principe rien déduire au titre de frais de voiture.

Le ministre des Finances a toutefois admis que, lorsque des conjoints effectuent ensemble

le déplacement entre leur domicile et leur lieu de travail, l’un puisse bénéficier de

l’intégralité du forfait de 0,15 € par kilomètre parcouru et l’autre du forfait général de frais

professionnels (art. 51 du C.I.R. 1992)281.

v. Disposition générale applicable à tous les déplacements entre le domicile et un lieu

fixe de travail

Dans l’ensemble de ces situations, il y a lieu de tenir compte de la mesure suivante, qui a

été prise pour encourager les déplacements entre le domicile et le lieu de travail autrement

qu’avec sa voiture personnelle (c’est-à-dire à vélo, à pied, par transport public en commun,

etc.) et pour régler le régime fiscal des « carpoolers » (art. 66bis du C.I.R. 1992).

Les frais professionnels afférents aux déplacements entre le domicile et un lieu fixe de

travail, effectués autrement qu’avec sa voiture personnelle, sont déductibles à concurrence

de 0,15 € par kilomètre parcouru ; soit exactement le même montant que les déplacements

effectués au moyen d’une voiture personnelle.

La distance qui est prise en considération du domicile au lieu fixe de travail est cependant

plafonnée à 100 kilomètres (aller simple) (art. 43/1 de l’AR/C.I.R. 1992), ce qui n’est pas le

cas pour les trajets effectués au moyen d’une voiture personnelle.

Les frais réels afférents aux déplacements entre le domicile et un lieu fixe de travail

effectué par un autre moyen qu’une voiture personnelle peuvent par ailleurs être pris en

compte si le contribuable apporte la preuve qu’ils sont plus importants que ce qui résulte

du forfait de 0,15 € par kilomètre parcouru limité à 100 kilomètres par trajet.

Dans certains cas, la déduction forfaitaire illimitée de 0,15 € par kilomètre parcouru (art.

66 du C.I.R. 1992) peut être combinée avec la déduction de 0,15 € par kilomètre parcouru

limitée à 100 kilomètres par trajet (art. 66bis du C.I.R. 1992). C’est le cas, par exemple, du

281 Voyez Bull. Q.R., Chambre, sess. 1992-1993, Q.P. n° 363 du 14 janvier 1993.

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contribuable qui utilise sa voiture personnelle pour se rendre de son domicile à la gare et

qui utilise ensuite le train pour se rendre à son travail.

vi. Limitation

La déduction des frais professionnels réels, incluant le forfait de 0,15 € par kilomètre

parcouru pour les frais de déplacements entre le domicile et un lieu fixe de travail, est

incompatible avec l’exonération de l’indemnité allouée par l’employeur en remboursement

des frais de déplacements entre le domicile et un lieu fixe de travail.

Le contribuable qui se trouve dans cette situation doit dès lors opérer un choix : soit

déduire ses frais réels et faire application du forfait de 0,15 € par kilomètre parcouru, soit

bénéficier de l’exonération de l’intervention patronale, dans les limites y relatives (art. 38, §

1er, al. 1er, 9° du C.I.R. 1992.

vii. Récapitulatif

De manière générale, pour déterminer la déduction des frais de voiture au titre de frais

professionnels, le contribuable doit ventiler ses frais en deux éléments :

- Les frais relatifs aux déplacements privés, qui ne sont pas déductibles.

- Les frais professionnels, qui sont déductibles, doivent être décomposés comme

suit :

• Pour les déplacements entre le domicile et un lieu fixe de travail, les frais

déductibles sont fixés forfaitairement à 0,15 € par kilomètre parcouru ;

• Pour tous les autres déplacements, les frais sont déductibles à concurrence

de 75 % de leur montant, à l’exception des frais de mobilophonie et des frais

de financement.

Section 21. Transport collectif des membres du personnel et promotion de l’usage de

la bicyclette

a) Principe

Les frais relatifs à l’organisation par l’employeur (ou un groupe d’employeurs) d’un

transport collectif des membres du personnel entre le domicile et le lieu de travail sont

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264

entièrement déductibles dans le chef de l’employeur (art. 64ter, al. 1er, 1° et 3° et al. 2 à 5 du

C.I.R. 1992).

Cette déduction concerne les frais d’entretien, les frais de réparation, la taxe de circulation,

les assurances, le carburant, etc., à l’exclusion des frais qui ont trait aux conducteurs des

moyens de transport.

Elle vise également les dépenses payées à des entreprises qui, à la place de l’employeur (ou

du groupe d’employeurs), effectuent le transport collectif des membres du personnel entre

le domicile et le lieu de travail.

b) Conditions

Cette déduction est cependant subordonnée à deux conditions.

Il faut, en premier lieu, que l’employeur établisse la réalité et le montant des frais qu’il

entend déduire au titre de frais professionnels, conformément au principe général de

déduction des frais professionnels (art. 49 CIR).

En second lieu, les frais déductibles doivent avoir trait directement à des minibus, des

autobus et des autocars ou au transport rémunéré de personnes à l’aide de ces véhicules.

Pour ce qui concerne les transports collectifs organisés au moyen d’une voiture, les frais de

voiture ne sont déductibles au titre de frais professionnels qu’à concurrence de 75 % de

leur montant.

c) Promotion de l’usage de la bicyclette

La déduction intégrale est étendue aux frais faits ou supportés spécifiquement en vue de

favoriser l’usage de la bicyclette par les membres du personnel entre leur domicile et leur

lieu de travail (art. 64ter, al. 1er, 3° du C.I.R. 1992).

Section 22. Frais de sécurisation

De manière à rendre plus attractifs les investissements et les dépenses en matière de

sécurisation, le législateur a porté à 120 % le montant déductible de ces frais, pour autant

qu’ils répondent à l’une des trois catégories énumérées par la loi (art. 64ter, al. 1er, 2° du

C.I.R. 1992).

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265

Ces catégories sont les suivantes :

- Les frais d’abonnement pour le raccordement à une centrale d’alarme autorisée

pour la gestion d’alarmes qui proviennent de systèmes installés dans des biens

immobiliers afin de prévenir ou de combattre les délits contre les personnes ou

contre les biens ;

- Les frais de recours à une entreprise de gardiennage autorisée pour effectuer des

transports protégés (tels qu’ils sont visés par la réglementation sur le transport de

valeurs) ;

- Les frais de recours collectif par un groupe d’entreprises à une entreprise de

gardiennage autorisée pour l’exécution de missions de gardiennage relatives à la

surveillance et à la protection de biens mobiliers ou immobiliers.

Section 23. Vêtements professionnels

a) Principe

Les frais de vêtements professionnels ne sont déductibles au titre de frais professionnels

que s’ils se rapportent à des « vêtements spécifiques » à l’exercice de la profession du

contribuable.

Cette expression recouvre tout d’abord les vêtements de travail imposés par la

réglementation relative à la protection du travail ou par une convention collective du

travail, comme la tenue ignifugée du travailleur de fonderie.

Cette expression vise également les vêtements spéciaux portés dans le cadre de l’exercice

de la profession, qui y sont adaptés et qui, compte tenu de la nature de l’activité

professionnelle exercée, sont obligatoires, nécessaires ou d’usage.

Il s’agit, par exemple, de la salopette du garagiste, du training du professeur de

gymnastique, de l’habillement de l’hôtesse de l’air, de la tenue de tennis du professeur de

tennis, de l’habit du garçon de restaurant, de l’habit du chef d’orchestre et de la toge de

l’avocat.

En revanche, cette expression exclut les vêtements qui, dans la vie privée courante, sont

considérés ou peuvent servir comme tenues de ville, du soir, de cérémonie, de voyage ou

de loisir (art. 53, 7° du C.I.R. 1992), comme le costume, la robe ou le tailleur du cadre

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d’entreprise, les vêtements que les agences publicitaires mettent à disposition de leurs

mannequins, etc.

S’il entend les déduire au titre de frais professionnels, il appartient au contribuable de

démontrer qu’il a dû exposer des frais de vêtements spécifiquement destinés à l’exercice de

sa profession. La charge de la preuve repose donc sur lui.

b) Exception

Par exception, les frais de vêtements des motards sont déductibles dès lors que l’aspect

sécuritaire des vêtements prend le pas sur l’aspect vestimentaire. À proprement parler, ces

frais ne sont pas considérés comme des frais de vêtements mais comme des frais

d’équipement de protection.

Cette dérogation au principe général de déduction des vêtements spécifiquement destinés

à l’exercice de la profession ne trouve toutefois application que si l’équipement constitue de

manière prépondérante un élément essentiel à la sécurité de celui qui les porte.

Section 24. Frais de restaurant, de réception et de cadeaux d’affaires

a) Frais de restaurant

Le montant déductible au titre de frais de restaurant est actuellement limité à 69 %.

Sont considérés comme frais de restaurant les frais de repas et de boissons servis dans un

établissement où des repas sont préparés et vendus pour y être consommés.

La limitation à 69 % ne concerne pas les frais engagés par un représentant du secteur

alimentaire et dont celui-ci établit le caractère nécessaire, dans l’exercice de l’activité

professionnelle, dans le cadre d’une relation potentielle ou réelle de fournisseur à client.

b) Frais de réception

Le montant déductible au titre de frais de réception est limité à 50 %. La même limitation

s’applique aux montants remboursés à ce titre par des tiers.

Il importe de ne pas confondre les frais de réception, qui sont déductibles à 50 %, avec les

frais de publicité, qui sont intégralement déductibles.

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267

Ainsi, il a été jugé que l’organisation de divertissements par une entreprise à l’occasion de

la promotion de ses produits donne lieu à une déduction non limitée si ces divertissements

ont un caractère véritablement publicitaire et que les frais qui s’y rapportent visent à attirer

le maximum de monde et à favoriser les ventes282.

En pratique, la distinction entre les frais de réception et les frais de publicité n’est

cependant pas toujours aisée à établir.

La jurisprudence est par ailleurs divisée sur le traitement fiscal qu’il convient d’accorder

aux frais dits de « catering », c’est-à-dire aux frais de boissons et de repas fournis aux

artistes et aux intervenants de spectacles (musiciens, membres de l’équipe technique, ...)

sur les lieux de ceux-ci.

Selon d’aucuns, il ne s’agirait pas de frais de réception, ni de frais de restaurant, de telle

sorte qu’ils ne seraient visés par aucune limitation de la déduction au titre de frais

professionnels283. Selon d’autres, il s’agirait de frais de réception dont la déduction au titre

de frais professionnels est limitée à 50 %284.

Récemment, la Cour de cassation a été interrogée au sujet de la problématique des frais de

« catering ». En l’espèce, une société qui organisait des évènements à la demande de clients

avait fait appel à des grossistes en viande. La Cour a jugé que les frais de « catering »

devaient être considérés, en l’espèce, comme des frais de réception, en précisant toutefois

que si la société organisatrice avait pu démontrer qu’elle avait refacturé directement ces

frais de « catering » à ses clients, elle aurait pu éviter la limitation de déduction de 50 %285.

c) Frais de cadeaux d’affaires

Est également limité à 50 % le montant déductible au titre de frais professionnels des frais

de cadeaux d’affaires, à l'exclusion des articles publicitaires portant de manière apparente

et durable la dénomination de l'entreprise donatrice. La même limitation s’applique aux

montants remboursés à ce titre par des tiers.

Ici aussi, il y a lieu de faire une délicate distinction entre les cadeaux d’affaires, dont les

frais sont déductibles à 50 %, et les articles publicitaires, dont les frais sont intégralement

déductibles.

282 Voyez Gand, 24 janvier 2012, Fiscologue, 2012, n° 1292, p. 14. 283 Voyez notamment Civ. Louvain, 11 mai 2012, F.J.F., n° 2013/13. 284 Voyez notamment Bruxelles, 16 novembre 2011, F.J.F., n° 2012/103. 285 Cass., 20 février 2014, Fiscologue, 2014, n° 1379, p. 14, note C. BUYSSE.

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Du point de vue de l’administration fiscale, sont à considérer non comme des cadeaux

d’affaires mais comme des articles publicitaires, les objets qui respectent les trois

conditions suivantes :

- Les articles doivent jouir d’une large diffusion ;

- Ils sont de valeur modique (stylos à bille, briquets, porte-clés, etc.) ;

- Ils portent de manière apparente et durable le logo ou la dénomination de

l’entreprise donatrice286.

Il s’agit plus fondamentalement de déterminer si les produits concernés sont des cadeaux

offerts sans contrepartie dans le cadre de relations professionnelles régulières (cadeaux

d’affaires) ou s’ils sont l’objet d’une technique promotionnelle à destination de la clientèle

de nature à inciter des achats de biens ou de services (articles publicitaires)287.

Enfin, les frais professionnels exposés pour la distribution d’échantillons gratuits sont

également déductibles dans leur intégralité.

Section 25. Cotisations d’assurance complémentaire contre la maladie et

l’invalidité

Sont également déductibles à titre de frais professionnels les cotisations d’assurance libre

versées en vue de se prémunir contre les risques d’une incapacité de travail pour cause de

maladie ou d’invalidité (art. 52, 10° du C.I.R. 1992).

Ces versements visent à bénéficier, en cas d’incapacité de travail, d’une indemnité

complémentaire par rapport aux allocations légales.

Par rapport aux cotisations de sécurité sociale, ces cotisations ne doivent pas être versées à

une société mutualiste, mais peuvent l’être à une compagnie d’assurance privée.

Les versements sont considérés comme des frais personnels ordinaires (et non comme des

cotisations sociales), de sorte qu’ils sont, le cas échéant, compris dans le forfait légal de

frais professionnels.

286 Com. I.R., n° 53/155. 287 Voyez Mons, 8 mai 2009, F.J.F., n° 2010/137.

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269

Section 26. Régimes de pension complémentaire financée par l’employeur,

l’indépendant ou l’entreprise

a) Contexte général

En Belgique, le système des pensions repose sur trois piliers, que l’on peut succinctement

présenter comme suit :

- Le 1er pilier est celui de la pension légale, qui est financé par les cotisations

obligatoires des travailleurs et auquel tout le monde a droit (dans une proportion

variable) ;

- Le 2ème pilier est constitué des pensions complémentaires issues de l’activité

professionnelle du salarié, de l’indépendant, du dirigeant d’entreprise, etc. ;

- Le 3ème pilier est financé par les assurances-pension, souscrites librement et

individuellement auprès d’une banque ou d’une compagnie d’assurance.

Les 2ème et 3ème piliers sont des régimes de pensions extralégaux qui permettent au

contribuable de se voir garantir, durant la retraite, des revenus plus confortables que ceux

qui lui sont garantis par la pension légale.

On peut ajouter à ces trois piliers un 4ème pilier de pension qui reprend l’épargne

individuelle que se constitue librement le contribuable, de sa propre initiative, sans

avantage fiscal particulier à la clé.

b) Régime de pension complémentaire du travailleur salarié

Pour le travailleur salarié, le régime de pension complémentaire ressortissant du 2ème pilier

peut s’organiser soit au niveau sectoriel, soit au niveau de l’entreprise. Tant les entreprises

que les secteurs d’entreprises peuvent en effet s’engager dans des plans de pension

complémentaires au bénéfice du travailleur salarié.

Sous réserve du respect de nombreuses conditions et dans certaines limites, les cotisations

et primes patronales versées dans ce cadre ne sont pas considérées comme des avantages

imposables dans le chef du travailleur mais constituent des frais professionnels déductibles

dans le chef de l’entreprise qui les accorde (art. 52, 3°, b) et 59 du C.I.R. 1992 et art. 35, 2 de

l’AR/C.I.R. 1992).

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c) Régime de pension complémentaire de l’indépendant

L’indépendant, en tant que personne physique, dispose aussi de la possibilité de financer

librement une pension complémentaire ressortissant du 2ème pilier. Cette pension

complémentaire est dénommée « pension libre complémentaire pour travailleurs

indépendants » (P.L.C.I.) (art. 41 et s. L. 24/12/2002 et A.R. 12/01/2007).

Les cotisations personnelles versées par l’indépendant pour se constituer une pension

complémentaire sont déductibles au titre de frais professionnels dans son chef, à condition

qu’elles ne dépassent pas un montant maximum déterminé par la loi.

d) Régime de pension complémentaire du dirigeant d’entreprise

Il existe enfin des pensions complémentaires ressortissant du 2ème pilier qui sont financées

par une personne morale en faveur de son dirigeant d’entreprise indépendant et/ou de ses

ayants droit.

Ces pensions complémentaires peuvent être constituées au moyen d’engagements de

pension, individuels ou collectifs, ou de promesses individuelles de pension financée en

interne, avec ou sans assurance « dirigeant d’entreprise ».

L’assurance « dirigeant d’entreprise » permet à une entreprise (le preneur d’assurance) de

s’assurer contre le risque découlant du décès ou de l’arrivée à l’âge de la retraite de son

dirigeant (l’assuré). L’entreprise réunit alors les qualités de preneur d’assurance et de

bénéficiaire du contrat d’assurance.

Il advient fréquemment que, parallèlement à la souscription de ce contrat, l’entreprise

conclue avec son dirigeant une seconde convention, qui correspond à une promesse

individuelle de pension, en vertu de laquelle elle s’engage au paiement d’avantages lors de

sa retraite ou en cas de décès. L’assurance « dirigeant d’entreprise » permet à l’entreprise

d’honorer financièrement ses engagements à l’égard de son dirigeant.

Si le capital d’assurance perçu par l’entreprise contribue à la formation de son bénéfice

imposable, les sommes que versent l’entreprise à son dirigeant (ou à ses ayants droit) à titre

de pension complémentaire peuvent être déductibles au titre de frais professionnels.

Cette déductibilité est soumise au respect de conditions qui sont, pour partie, identiques à

celles applicables à la déductibilité des cotisations et primes versées dans le cadre du

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régime de pension complémentaire du travailleur salarié. Des conditions de déductibilité

spécifiques s’ajoutent cependant dans le cadre du régime de pension complémentaire du

dirigeant d’entreprise (art. 195 du C.I.R. 1992).

Cette déductibilité reste également subordonnée au respect des conditions générales

applicables à la déduction au titre de frais professionnels. Il est dès lors nécessaire que les

dépenses aient été faites ou supportées pendant la période imposable en vue d’acquérir ou

de converser des revenus imposables288.

Section 27. Régimes de la prime bénéficiaire accordé aux travailleurs.

La Loi programme du 25 décembre 2017289 a modifié la loi du 22 mai 2001, désormais

intitulé loi relative à la participation des travailleurs dans le capital des sociétés et à

l’établissement d’un prime bénéficiaire pour les travailleurs.

Le Gouvernement a donc prévu, par la modification de cette loi, une nouvelle mesure qui

consiste en la possibilité pour les sociétés d’octroyer à leurs travailleurs un bonus sur leur

bénéfice distribuable. Ce bonus ou cette prime permet de récompenser de manière simple

et flexible les travailleurs via l’octroi d’une somme d’argent sans toutefois leur donner un

droit de vote au sein de l’entreprise.

Cette prime bénéficiaire, c’est-à-dire une prime octroyée en espèces dans le cas où une

société (ou un groupe de sociétés) souhaite distribuer une partie ou la totalité de l'exercice

comptable aux travailleurs (bénéfice après impôt)

Cette prime a l’avantage de ne pas être soumise aux cotisations ordinaires de sécurité

sociale dès lors que l’employeur ne paie aucune cotisation et que le travailleur subit une

cotisation de solidarité égale à 13,07% du montant de la prime.

Quant à son traitement fiscal, dans le chef du travailleur, cette prime est soumise à une

taxe de 7% (taxe assimilée aux impôts sur les revenus). Elle sera, en outre, mentionnée sur

l’avertissement-extrait de rôle.

Dans le chef de l’employeur, cette participation aux bénéfices est considérée comme une

dépense non admise à l’impôt des sociétés.

288 Cass., 15 janvier 2009, F.J.F., n° 2009/172. 289 Loi-programme du 25 décembre 2017, M.B., 29 décembre 2017.

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CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 11113333.... LLLLES PERTES PROFESSIONES PERTES PROFESSIONES PERTES PROFESSIONES PERTES PROFESSIONNELLESNELLESNELLESNELLES

Section 1. Imputation des pertes d’une activité professionnelle sur les revenus d’une

autre activité professionnelle

On entend par « perte professionnelle » le solde négatif qui résulte – après application des

différentes déductions examinées ci-dessus – d’une ou de plusieurs activités

professionnelles du contribuable pendant une période imposable donnée (art. 23, § 2, 2° du

C.I.R. 1992)290.

Lorsque le contribuable subit une telle perte dans une ou plusieurs de ses activités

professionnelles, cette perte est portée en déduction des revenus des autres activités

professionnelles exercées pendant la même période imposable. Elle ne peut par contre pas

être imputée sur des revenus mobiliers ou immobiliers non requalifiés, ni sur des revenus

divers (même s’ils sont globalisés).

Encore faut-il, bien sûr, que l’activité génératrice de la perte ait le caractère d’une véritable

activité professionnelle.

Section 2. Pertes d’une société sans personnalité juridique

Pour rappel, les revenus d’une activité exercée par une société civile ou une association

sans personnalité juridique ou assimilée sont considérés comme attribués à ses associés ou

membres (art. 29 du C.I.R. 1992).

Sauf pour les groupements d’intérêt économique et les groupements européens d’intérêt

économique, les pertes professionnelles ne peuvent normalement pas être déduites des

revenus professionnels des associés ou membres de ces sociétés ou associations (art. 80 du

C.I.R. 1992).

Cette mesure a pour objet d’empêcher la déduction par un contribuable des pertes d’une

société ou d’une association sans personnalité juridique dans laquelle il n’est justement

intervenu qu’en vue de déduire ces pertes.

Par exception, les associés ou membres peuvent déduire leur quote-part dans les pertes de

la société ou de l’association dans les cas suivants et dans la mesure où :

290 Cass., 23 février 1990, Pas., 1990, I, n° 386, p. 745 ; Cass., 2 mars 1990, Pas., 1990, I, n° 401, p. 775.

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- Ils recueillent des bénéfices ou des profits par ailleurs et que les pertes à imputer

sur ces bénéfices ou profits résultent d’une activité de même nature ;

Une activité de même nature n’implique pas une activité identique mais une activité

appartenant au même secteur d’activités et étroitement liée à l’activité en perte291.

- Ils établissent que les pertes résultent d’opérations qui répondent à des besoins

légitimes de caractère financier ou économique (art. 80 du C.I.R. 1992).

Le fait que les pertes professionnelles résultent d’opérations qui répondent à des

besoins légitimes de caractère financier ou économique suppose en tout en état de

cause que les pertes ne soient pas la conséquence d’une construction purement

fiscale292.

Section 3. Imputation des pertes professionnelles sur les revenus professionnels du

conjoint

La perte professionnelle qui subsisterait dans le chef d’un conjoint, après avoir effectué les

imputations visées ci-dessus, peut être déduite des revenus professionnels de l’autre

conjoint (art. 129 du C.I.R. 1992).

Section 4. Report illimité des pertes professionnelles dans le temps

Lorsqu’un contribuable n’a pas pu imputer totalement la perte subie pendant une année

imposable donnée, sur des revenus professionnels de cette période, l’excédent peut être

déduit, successivement, des bénéfices des années ultérieures, sans limite de temps (art. 23,

§ 2, 3° et 78 du C.I.R. 1992). C’est ce que l’on appelle le « report illimité des pertes ».

Lors de la survenance d’un exercice bénéficiaire, le contribuable peut donc imputer sur ces

bénéfices les pertes subies au cours des années précédentes. S’il choisit d’imputer ces

pertes, elles doivent être déduites des bénéfices des premiers exercices bénéficiaires. En

d’autres termes, le contribuable ne peut pas choisir les exercices bénéficiaires sur lesquels

il entend déduire ses pertes professionnelles antérieures.

À l’inverse du système qui prévaut en Belgique, beaucoup de pays connaissent un système

de report des pertes sur des exercices bénéficiaires antérieurs. Ce système, dénommé

291 Com. I.R., n° 80/8. 292 Voyez notamment Bruxelles, 5 octobre 2006, J.D.F., 2008, p. 337.

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« carry back », permet des remboursements d’impôts ou l’octroi de crédits d’impôt.

Le « carry back » présente un intérêt financier pour l’entreprise car elle ne doit pas

attendre la réalisation de bénéfices futurs pour imputer ses pertes et peut prétendre à des

dégrèvements d’impôts antérieurs.

Il peut toutefois, dans les pays où il existe, amener des entreprises à engendrer des pertes

pour éponger des bénéfices antérieurs. Il a également pour conséquence que l’État n’est

pas assuré du caractère définitif de ses recettes.

Section 5. Disposition anti-abus en matière d’avantages anormaux ou bénévoles

Le Code des impôts sur les revenus exclut l’imputation de pertes professionnelles sur la

partie des bénéfices ou profits, de l’exercice ou d’exercices ultérieurs, qui provient

d’avantages anormaux ou bénévoles que le contribuable a retirés, directement ou

indirectement, d’une entreprise à l’égard de laquelle il se trouve directement ou

indirectement dans des liens d’interdépendance (art. 79 du C.I.R. 1992).

Cette mesure vise à faire échec à la manœuvre d’évasion fiscale par laquelle un

entrepreneur, un titulaire de profession libérale, charge, office ou autre occupation

lucrative, ou une société prospère se rend maître d’une entreprise en perte et lui transfère,

par divers moyens, le maximum de bénéfices, aux fins de leur absorption par les pertes de

l’entreprise déficitaire et d’échapper ainsi à toute imposition.

Elle vise plus généralement à empêcher tout transfert de bénéfices à des fins purement

fiscales entre entreprises interdépendantes dont l’une dispose de pertes récupérables. Les

moyens qui peuvent être utilisés à cette fin sont, par exemple, l’achat de biens à des prix

exorbitants ou la vente de biens à des prix dérisoires par l’entreprise bénéficiaire.

Les avantages consentis doivent être réellement anormaux ou bénévoles pour que cette

mesure puisse trouver application. Tel n’est pas nécessairement pas le cas, par exemple, de

l’industriel qui se rend maître d’une entreprise déficitaire dans le but d’accaparer une

clientèle ou un marché et qui consent des efforts justifiés pour assainir la situation de cette

entreprise293.

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 14.14.14.14. IIIIMPOSITION DES REVENUMPOSITION DES REVENUMPOSITION DES REVENUMPOSITION DES REVENUS PROFESSIONNELS DESS PROFESSIONNELS DESS PROFESSIONNELS DESS PROFESSIONNELS DES CONJOINTSCONJOINTSCONJOINTSCONJOINTS

293 Com. I.R., n° 79/7.

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275

Section 1. Quote-part attribuée au conjoint aidant

a) Principes

Si l’entrepreneur ou le titulaire d’une profession libérale, charge, office ou autre occupation

lucrative exerce son activité professionnelle avec l’aide effective de son conjoint (comme un

commerce où les deux époux servent la clientèle), le premier peut déduire de ses revenus

professionnels une quote-part censée attribuée à son conjoint (art. 86 à 89 du C.I.R. 1992).

Cette quote-part est traitée, dans le chef de son conjoint, comme des revenus

professionnels.

Ce transfert de revenus professionnels n’est cependant possible que lorsque la déclaration

fiscale est établie au nom des deux conjoints.

L’attribution d’une quote-part au conjoint aidant s’avère généralement avantageuse par

l’effet de taux d’imposition moindres dans le chef du conjoint aidant et, le cas échéant, par

la déduction de frais professionnels globalement plus importants.

Ce régime avantageux ne vaut toutefois que pour les seuls conjoints aidants « avec statut

social ». En sont donc exclus les conjoints aidants « sans statut social ».

Pour rappel, est dit « sans statut social » le conjoint aidant « qui, pendant la période

imposable considérée, n’exerce pas d’activité professionnelle lui ouvrant des droits propres à

des prestations dans un régime obligatoire de pension, d’allocations familiales et d’assurance

contre la maladie et l’invalidité, au moins égales à celles du statut social des travailleurs

indépendants, ni ne bénéficie d’une prestation dans le cadre du régime de la sécurité sociale

lui ouvrant de tels droits propres » (art. 33, al. 1er du C.I.R. 1992).

b) Limites

L’attribution d’une quote-part au conjoint aidant ne peut avoir lieu que si l’aide du conjoint

aidant est effective et que ce dernier ne bénéficie pas de revenus professionnels provenant

d’une activité distincte supérieurs à 8.700 € indexés (13.240 € pour l’exercice d’imposition

2015).

La quote-part doit par ailleurs correspondre à une rémunération normale des prestations

du conjoint aidant et ne peut excéder, en principe, 30 % du total des revenus de l’activité

professionnelle exercée avec l’aide du conjoint.

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276

Par exception, la quote-part peut excéder cette limite si le contribuable établit, au moyen

d’éléments sérieux et objectifs, que l’importance et la nature des prestations du conjoint

aidant lui ouvrent droit à une « rémunération normale » plus importante.

Cela vise, par exemple, le conjoint aidant qui travaille à temps plein avec son conjoint dans

une exploitation commerciale ou au conjoint aidant qui supplée largement son mari

malade.

Section 2. Quotient conjugal

a) Notion

Les revenus de l’activité professionnelle de chacun des conjoints (et cohabitants légaux)

sont soumis séparément au calcul de l’impôt.

Lorsqu’un des deux conjoints ne travaille pas ou recueille peu de revenus professionnels,

une fraction des revenus professionnels de l’autre conjoint lui est attribuée (art. 87 du

C.I.R. 1992). C’est ce que l’on appelle le « quotient conjugal ». Il doit être considéré comme

une indemnité indirecte (et fictive) pour le travail du conjoint au foyer.

L’attribution au conjoint qui ne travaille pas est égale à 30 % des revenus de l’autre conjoint,

avec un maximum de 6.700 € indexé (10.230 € pour l’exercice d’imposition 2016).

Lorsque les revenus professionnels de l’un des conjoints n’atteignent pas 30 % du total des

revenus professionnels des deux conjoints, il lui est attribué un quotient conjugal tel que

ses revenus professionnels totaux atteignent 30 % de ce total, avec un maximum de 6.700 €

indexés (10.230 € pour l’exercice d’imposition 2016).

Ce transfert de revenus professionnels s’opère après déduction des frais professionnels et,

le cas échéant, des pertes professionnelles. En revanche, les revenus professionnels

imposés distinctement ne sont pas pris en considération dans ce cadre (art. 89 du C.I.R.

1992).

b) Revenus exonérés

Le Code des impôts sur les revenus prévoit encore que les personnes mariées sont

considérées comme des isolés « lorsqu’un conjoint recueille des revenus professionnels pour

un montant supérieur à 6.700 € indexés qui sont exonérés conventionnellement et qui

n’interviennent pas pour le calcul de l’impôt afférent à ses autres revenus » (art. 126, § 2, al.

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277

1er, 4° du C.I.R. 1992).

Cette mesure vise notamment les fonctionnaires européens et les fonctionnaires de

l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN), qui sont exemptés d’impôts en

Belgique.

Sauf si leur traitement est inférieur ou égal à 6.700 € indexés, ils sont fiscalement

considérés comme des isolés. De ce fait, leurs conjoints ne peuvent bénéficier du quotient

conjugal.

On comprend aisément la volonté du législateur de vouloir priver de l’imposition

commune les couples dont l’un des conjoints perçoit ce type de revenus (voir : Doc. parl.,

ch., 1990-1991, n°1366/1, p.12).

Il s’agit, assez logiquement, d’éviter que de la matière imposable en Belgique soit transférée

à un contribuable dont les revenus professionnels sont exonérés par l’application du

mécanisme du quotient conjugal. En effet, les revenus professionnels de ce dernier ne

pouvant être pris en considération, il faudrait considérer qu’il n’en percevrait aucun. Le

quotient conjugal permettrait alors de lui transférer une partie des revenus professionnels

de son conjoint percevant des revenus ordinaires.

La Cour de Justice de l’Union européenne avait d’ailleurs confirmé la validité et le

caractère non discriminatoire de cette exclusion. Dans son arrêt, la Cour avait commencé

par rappeler que les avantages fiscaux devaient être appliqués sans discrimination aux

fonctionnaires européens. Elle avait, ensuite, constaté que le législateur belge avait entendu

subordonner le bénéfice du quotient conjugal à la condition que l’un des conjoints ne

perçoive pas de revenus pour un montant supérieur au 10.090-€ indexés. Selon la Cour, il

s’agissait d’une condition objective ne pouvant être source d'une discrimination envers les

fonctionnaires européens (CJCE, 14 octobre 1999, C-229/98, www.curiae.eu).

Cette analyse doit, à notre sens, être approuvée. La conclusion inverse aurait d’ailleurs

conduit à une discrimination envers les ménages percevant des revenus « ordinaires ».

Il n’en est pas moins que cette exclusion est susceptible d’entraîner, dans un cas particulier,

une discrimination envers les couples concernés. C’est en tout cas ce qu’a estimé la Cour

constitutionnelle à l’occasion d’un arrêt du 29 mars 2012 (Cour Const., 29 mars 2012,

n°51/2012).

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La Cour fut interrogée sur le cas d’un couple dont un des conjoints, fonctionnaire

européen, percevait, outre ses revenus exonérés, des revenus professionnels autres

imposables en Belgique. L’autre conjoint ne percevait en revanche aucun revenu. La Cour

estima, qu’en l’espèce, il était discriminatoire de priver ce couple de l’application du

quotient conjugal.

La Cour commença par se référer aux travaux préparatoires de la loi et à rappeler la ratio

legis de cette exclusion : empêcher que des revenus imposables en Belgique soient

transférés au conjoint bénéficiant de revenus exonérés sans réserve de progressivité.

Dans la situation inverse, c'est-à-dire lorsque c’est le conjoint non exonéré qui perd le

profit du quotient conjugal, l’exclusion du régime ne repose sur aucun critère objectif.

Faisant référence à l’arrêt précité de la Cour de justice, la Cour constitutionnelle a conclu

que la différence de traitement est, dans ce cas, source de discrimination.

Cet arrêt était une bonne nouvelle pour les couples concernés puisqu’ils peuvent depuis, en

dépit de leur assimilation fiscale à des isolés, bénéficier de l’application du quotient

conjugal.

Section 3. Qualification des revenus attribués

En raison du décumul intégral des revenus des conjoints et du calcul séparé du revenu

imposable de chaque conjoint, il est nécessaire, dans le régime de l’imposition commune,

de connaître la qualification des revenus professionnels qui ont été attribués dans le cadre

du quotient conjugal ou de l’attribution au conjoint aidant.

À cet égard, il importe simplement de préciser que la qualification d’origine des revenus

attribués subsiste et que la quote-part attribuée est censée provenir proportionnellement

des revenus professionnels si ceux-ci relèvent de différentes sous-catégories (art. 89, al. 2

du C.I.R. 1992).

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279

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 11115555.... LLLLE PRÉCOMPTE PROFESSIE PRÉCOMPTE PROFESSIE PRÉCOMPTE PROFESSIE PRÉCOMPTE PROFESSIONNELONNELONNELONNEL

Section 1. Redevables du précompte professionnel

Les contribuables qui doivent retenir le précompte professionnel et le verser au Trésor

peuvent être classés en cinq catégories (art. 270 et 271 du C.I.R. 1992 et art. 87 de

l’AR/C.I.R. 1992). Ces catégories sont les suivantes :

- Les contribuables qui, à titre de débiteurs, dépositaires, mandataires ou

intermédiaires, payent ou attribuent en Belgique ou à l’étranger des rémunérations

à des travailleurs ou à des dirigeants d’entreprises, ou des pensions, rentes ou

allocations en tenant lieu.

- Les contribuables qui emploient en Belgique, sous contrat de travail, des personnes

rémunérées totalement ou partiellement au pourboire ou par des pourcentages de

service, par la clientèle.

- Les contribuables qui paient ou attribuent des revenus d’artistes ou de sportifs non-

résidents.

Le précompte professionnel est effectivement dû par l’organisateur du spectacle ou

de l’épreuve sportive qui a lieu en Belgique. Dans certains cas et sous certaines

conditions, il peut être renoncé à la perception du précompte professionnel en

faisant application d’une convention préventive de la double imposition.

- Les contribuables qui ont l’obligation de faire enregistrer les actes et déclarations

constatant la cession à titre onéreux, par un contribuable non-résident, de biens

immobiliers situés en Belgique ou de droits réels portant sur de tels biens (art. 35 C.

Enr.). Il s’agit, par exemple, des notaires et des huissiers de justice.

- Les contribuables qui, au titre de curateurs de faillites, liquidateurs de concordats

judiciaires, et liquidateurs de sociétés ou qui exercent des fonctions analogues, sont

tenus d’honorer des créances ayant le caractère de rémunérations.

En principe, les redevables du précompte professionnel retiennent le précompte sur les

revenus qu’ils paient ou attribuent à leurs bénéficiaires. Les employeurs de personnes

rémunérées au pourboire ont, de leur côté, le droit de se faire remettre anticipativement le

montant du précompte dû sur les pourboires ou pourcentages de service (art. 272 CIR).

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280

Section 2. Dispenses de versement du précompte professionnel

a) Principe

Le précompte professionnel est généralement retenu dans son intégralité sur les salaires

payés par l’employeur et versé au Trésor. Le montant ainsi retenu est ensuite imputable par

le travailleur sur l’impôt des personnes physiques.

Dans certains cas, l’employeur est cependant dispensé de verser au Trésor une partie du

précompte préalablement retenu, de manière à pouvoir le réinvestir. Les cas les plus

intéressants de dispenses de versement du précompte professionnel sont les suivants.

b) La recherche scientifique

Une dispense de versement au Trésor de 80 % du précompte professionnel relatif aux

rémunérations des chercheurs assistants et postdoctoraux est octroyée aux universités,

écoles supérieures, fonds national de la recherche scientifique (F.N.R.S.), institutions

scientifiques agréées, etc., débiteurs de ces rémunérations, pour autant qu’ils aient retenu

la totalité du précompte professionnel sur ces rémunérations (art. 275/3 CIR et art. 95/1

ARCIR).

Cette dispense de versement n’a pas pour objet d’octroyer un complément de

rémunération aux chercheurs scientifiques mais d’encourager la recherche scientifique en

mettant plus de moyens à la disposition des universités et autres institutions de recherche.

Sous réserve du respect de conditions déterminées, cette dispense de versement est

également accordée à certaines entreprises et sociétés. C’est notamment le cas des

entreprises qui paient ou attribuent des rémunérations à des chercheurs affectés à des

projets ou programmes de recherche ou de développement menés en exécution de

conventions de partenariat conclues avec des universités, hautes écoles ou institutions

scientifiques agréées.

c) Heures supplémentaires

L’employeur est dispensé de verser une quotité du précompte professionnel qui correspond

à un pourcentage du salaire de base afférent aux heures supplémentaires ayant donné lieu

à un sursalaire, dans les limites de 130 heures par an et par travailleur, sauf exceptions (art.

275/1 du C.I.R. 1992 et art. 95/1 de l’AR/C.I.R. 1992).

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Le pourcentage de la dispense est actuellement fixé à 32,19 % par heure prestée pour

laquelle s’applique un sursalaire légal de 20 %, et à 41,25 % par heure prestée pour laquelle

s’applique un sursalaire légal de 50 % ou de 100 %.

Par exception, cette dispense de versement ne profite pas à certains employeurs

(spécialement dans le secteur non-marchand) et à certains travailleurs (ceux qui ne sont

pas soumis à l’ensemble des régimes de la sécurité sociale).

d) Travail en équipe ou de nuit

Les employeurs de certains travailleurs qui effectuent un travail en équipe ou de nuit sont

dispensés de verser le précompte professionnel retenu à hauteur de 15,6 % des

rémunérations et primes d’équipe payées à ces travailleurs (le calcul s’effectuant par

travailleur et par période de précompte professionnel), sauf exceptions.

Cette dispense de versement ne trouve toutefois application qu’à la condition que soit

retenu sur ces rémunérations et primes l’intégralité du précompte professionnel (art. 275/1

du C.I.R. 1992 et art. 95/1 de l’AR/C.I.R. 1992).

La définition du travail en équipe suppose la succession d’au moins deux équipes de deux

travailleurs au cours de la même journée. Le travail de nuit s’exerce normalement entre 20

heures et 6 heures, étant exclus les travailleurs qui prestent uniquement entre 6 heures et

24 heures ou qui commencent à travailler à partir de 5 heures.

e) Jeunes sportifs

Les rémunérations attribuées à des sportifs qui n’ont pas atteint l’âge de 26 ans au 1er

janvier de l’année qui suit celle de la demande de dispense bénéficient d’une dispense de

versement au Trésor de 80 % du précompte professionnel (art. 275/6 du C.I.R. 1992 et 95/1

de l’AR/C.I.R. 1992).

Une dispense de versement identique est accordée lorsque le sportif a atteint l’âge de 26

ans, à condition que la moitié de cette dispense soit affectée à la formation de jeunes

sportifs (de 12 à 23 ans) au 1er janvier de l’année qui suit celle de la demande de dispense.

f) Dispense générale de versement de 1 % du précompte professionnel retenu

Il est encore octroyé une dispense générale de versement du précompte professionnel à

hauteur de 0,25 % du montant brut des rémunérations, à condition que l’intégralité du

Page 282: INTRODUCTION : LES QUATRE IMPOTS SUR LES ......Le double critère de « domicile fiscal » et de « siège de la fortune » Le texte de l’article 2, §1 er , 1°, alinéa 1er du

282

précompte professionnel soit retenue sur ces rémunérations (art. 275/7 du C.I.R. 1992).

g) Zones d’aide

Une loi du 15 mai 2014 a instauré un régime d’incitant fiscal pour les investissements

s’accompagnant de nouveaux emplois, qui sont réalisés dans une zone d’aide déterminée

sur la proposition d’une Région.

Ce régime de faveur prend la forme d’une dispense partielle temporaire de versement du

précompte professionnel. L’arrêté royal du 13 juin 2014 en a réglé certains aspects.

Cela n’est toutefois pas suffisant. En novembre 2014, le ministre compétent a en effet

déclaré que pour mettre effectivement le système en œuvre, le Règlement européen du 17

juin 2014 déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur devait

être transposé dans la législation belge et que des accords de coopération devraient être

conclus avec les Régions. La loi visant à adapter le pacte de compétitivité a été adoptée à la

Chambre, le 4 mars 2015.

Pour que la dispense temporaire du précompte professionnel prévue dans le cadre du

régime des zones d’aide soit effective, il faudra, en outre, que des accords de coopération

avec les Régions soient signés294.

Section 3. Fait générateur et paiement du précompte

a) Principe

Le précompte professionnel dû par le débiteur des revenus doit être versé au Trésor dans

les 15 jours qui suivent l’expiration du mois au cours duquel les revenus ont été payés ou

attribués (art. 412, al. 2 du C.I.R. 1992). À défaut de paiement spontané, il est enrôlé et

recouvré par l’administration fiscale.

Dans le même délai, une déclaration spécifique au précompte professionnel doit être

introduite par son redevable, en principe par voie électronique (art. 90 de l’AR/C.I.R.

1992).

294 Voyez à ce propos X, « Dispense du versement du Pr.P. dans les zones d’aide : on progresse », Act. fisc.,

2015, n° 6.

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283

b) Dispositifs particuliers

Des dispositifs particuliers existent cependant pour les « petits redevables » et les « gros

redevables ». Il s’agit respectivement des débiteurs d’un précompte professionnel de moins

de 25.000,00 € indexés (38.180 € pour l’exercice d’imposition 2016) l’année précédente et

des débiteurs d’un précompte professionnels de plus de 2.500.000,00 €295 indexés l’année

précédente.

Il est prévu une trimestrialisation des paiements en faveur des « petits redevables »,

moyennant le paiement d’un acompte sur le précompte professionnel du 4ème trimestre (au

plus tard le 15 décembre de l’année en cours) (art. 412, al. 3 du C.I.R. 1992). Cet acompte

est égal au précompte professionnel réellement dû pour les mois d’octobre et de novembre

de l’année en cours.

Il est mis à charge des « gros redevables » une anticipation du paiement du précompte

professionnel (au plus tard le 24 décembre de l’année en cours) afférent aux revenus des 15

premiers jours du mois de décembre (art. 412, al. 2 du C.I.R. 1992).

Section 4. Barèmes du précompte professionnel

Les barèmes et règles qui sont applicables pour le calcul du précompte professionnel

varient selon la nature du revenu : rémunérations, pensions et rentes, allocations de

chômage, etc. (annexe III de l’AR/C.I.R. 1992).

Des règles spécifiques sont prévues pour les revenus professionnels attribués de manière

occasionnelle ou échappant à la globalisation dans le chef de leur bénéficiaire (allocations

exceptionnelles, arriérés, indemnités de dédit, etc.).

Le précompte professionnel peut également faire l’objet de réductions en raison de la

situation familiale du contribuable qui est le bénéficiaire des revenus professionnels

considérés.

Les barèmes du précompte professionnel tiennent finalement compte des taxes

communales additionnelles (art. 469, al. 2 du C.I.R. 1992 et art. 233/1 de l’AR/C.I.R. 1992).

295 L’article 412, alinéa 3 du C.I.R. 1992 ne mentionne toutefois pas de montant indexé pour la somme de

2.500.000,00 €, dans sa version relative à l’exercice d’imposition 2015.

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284

De manière générale, le précompte professionnel tend à se rapprocher de l’impôt des

personnes physiques qui serait dû par le contribuable s’il ne bénéficiait que des revenus

professionnels soumis à ce précompte.

En pratique, le caractère forfaitaire du précompte professionnel a cependant pour

conséquence de ne pas pouvoir intégrer toutes les particularités liées à la situation fiscale

du contribuable.

Section 5. Imputation du précompte professionnel sur l’impôt des personnes

physiques afférent aux revenus professionnels

Le précompte professionnel est intégralement imputable sur la partie de l’impôt des

personnes physiques qui frappe les revenus professionnels (art. 296 du C.I.R. 1992).

L’imputation du précompte professionnel s’explique par le fait qu’il constitue, en règle, non

pas un impôt autonome mais un mode de perception « à la source » de l’impôt dû par le

bénéficiaire des revenus296.

L’imputation a lieu même si l’employeur, qui a effectivement retenu le précompte

professionnel, est en défaut de le verser au Trésor. Dans le même sens, le précompte

professionnel non retenu par l’employeur mais réellement versé au Trésor est imputable.

L’éventuel excédent de précompte professionnel peut être imputé sur l’impôt des

personnes physiques frappant les autres revenus. Il peut également être remboursé.

296 Cass., 4 mai 1995, F.J.F., n° 95/1966.

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285

TITRE TITRE TITRE TITRE VIVIVIVI.... TAXATION DES COMPTETAXATION DES COMPTETAXATION DES COMPTETAXATION DES COMPTES TITRES.S TITRES.S TITRES.S TITRES.

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 1.1.1.1. IIIINTRODUCTIONNTRODUCTIONNTRODUCTIONNTRODUCTION

Le projet de Loi du 11 décembre 2017297 a pour objet d’introduire à partir du 1er janvier

2018 une taxe sur les comptes titres qui sont détenus par des investisseurs personnes

physiques tant en Belgique qu’à l’étranger pour les habitants du Royaume, et uniquement

en Belgique pour les non-résidents.

Selon le Gouvernement, cette taxe est introduite, en droit belge, dans le but d’une politique

fiscale plus juste.

La limite de 500.000 euros aurait ainsi été établie afin que seuls les patrimoines plus élevés

soient imposés.

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 2222.... CCCCHAMP DHAMP DHAMP DHAMP D’’’’APPLICATIONAPPLICATIONAPPLICATIONAPPLICATION

Cette taxe ne viserait que la part du titulaire, personne physique, dans un ou plusieurs

comptes-titres dont la valeur moyenne équivaut à/ou dépasse 500.000 euros.

Tout titulaire dont la part n’atteint pas le montant de 500.000 euros est exclu du champ

d’application de cette taxe.

Dès le moment où la part du titulaire égale ou dépasse 500.000 euros, la taxe est due sur

l’entièreté de la part à partir du premier euro.

Le titulaire peut être plein propriétaire, usufruitier ou nu-propriétaire.

Les titres inscrits sur des comptes-titres qui sont visés, sont les actions cotées ou non

cotées, les obligations cotées ou non, les sicav, les ETF, les certificats d’actions ou

d’obligations, les warrants, les bons de caisse.

N’entrent pas dans le champ d’application, les options (alors que les warrants le sont), les

assurances-vie (en ce compris les fonds de la Branche23), les fonds d’épargne-pension, les

actions nominatives (pour protéger les PME et les sociétés avec un actionnariat familial),

les comptes à terme et les liquidités.

297 Projet de Loi du 11 décembre 2017, Doc. Ch.

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286

Le taux s’élève à 0,15 %.

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 3333.... RRRREDEVABLE DE LA TAXEEDEVABLE DE LA TAXEEDEVABLE DE LA TAXEEDEVABLE DE LA TAXE

Les personnes qui sont redevables de cette taxe sont les personnes physiques. Sont donc

exclues du champ d’application de cette taxe les personnes morales (sociétés, les

fondations privées belges, …).

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 4444.... DDDDÉCLARATION ET PAIEMEÉCLARATION ET PAIEMEÉCLARATION ET PAIEMEÉCLARATION ET PAIEMENT DE LA TAXENT DE LA TAXENT DE LA TAXENT DE LA TAXE

L’agent payeur est la banque dans laquelle le compte-titres est ouvert. Si le compte-titres

présente un solde supérieur ou égal à 500.000 euros, la banque prélèvera d’office la taxe.

Si le compte-titres est inférieur à 500.000 euros, mais que cette limite est franchie en

ajoutant les avoirs qu’il détient ailleurs, il peut demander un ‘opt-in’ et opter pour la

retenue de la taxe.

Les banques étrangères ne sont pas contraintes de prélever cette taxe. C’est donc au

contribuable de la déclarer s’il est dans les cas prévus par la loi.

CCCCHAPITRE HAPITRE HAPITRE HAPITRE 5555.... EEEENTRÉE EN VIGUEURNTRÉE EN VIGUEURNTRÉE EN VIGUEURNTRÉE EN VIGUEUR

A l’heure de la rédaction du présent syllabus, le projet de loi n’a toujours pas été adoptée

par la Chambre en ce que ce projet suscite de nombreuses difficultés.

En effet, la première version dudit projet a déjà fait l’objet d’une condamnation par le

Conseil d’Etat le 11 octobre 2017, et ce pour plusieurs raisons.

La première était que les actions non cotées n’étaient pas visées. Le projet de loi a été

amendé sur ce point.

La deuxième remarque concernait le fait que seules les personnes physiques étaient

redevables. Ce point n’a pas été amendé par le gouvernement.

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287

La troisième remarque faisait référence au fait que les titres nominatifs n’entraient pas

dans le champ d’application. Ce point n’a pas été revu par le gouvernement pour protéger

les PME et les sociétés familiales.

A ce jour, la procédure parlementaire suit son cours.

Lorsque le projet de loi aura été adopté par la Chambre, la taxe entrera en vigueur à partir

du 1er janvier 2018.

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PARTIE II. L’impôt sur les revenus (1/2) ........................................................................................ 1

Chapitre 1. L’article Ier du Code des impôts sur les revenus ........................................................ 1

Chapitre 2. Les critères de distinction ............................................................................................. 1

Chapitre 3. La méthode suivie par le Code des impôts sur les revenus .................................... 2

TITRE I. Les personnes soumises à l’impôt des personnes physiques ...................................... 4

Chapitre 1. La notion d’ « habitants du Royaume » - Règle générale ........................................ 4

Section 1. Le double critère de « domicile fiscal » et de « siège de la fortune » .................. 4

Section 2. La notion de domicile fiscal ........................................................................................ 5

Section 3 : Les présomptions de résidence ................................................................................. 8

Section 4. La notion de siège de la fortune ............................................................................... 11

Section 5. Les personnes visées à l’article 4 du Code .............................................................. 11

Chapitre 2. Cas d’un changement de statut au cours d’une année ........................................... 12

Chapitre 3. Incidence de l’existence de conventions préventives de la double imposition . 13

TITRE II. Apercu général de la détermination de la base imposable et de l’impôt ............... 15

Chapitre 1. La notion de revenu ..................................................................................................... 15

Chapitre 2. Les catégories de revenus imposables ....................................................................... 17

Chapitre 3. Le principe de la globalisation des revenus ............................................................. 20

Section 1 : Principe ........................................................................................................................ 20

Section 2 : Taux d’imposition progressifs et calcul de l’impôt .............................................. 21

Chapitre 4. Exceptions à la globalisation ....................................................................................... 22

Chapitre 5. Imposabilité du revenu mondial ............................................................................... 23

Chapitre 6. Les additionnels communaux .................................................................................... 24

Chapitre 7. L’impôt est perçu par voie de précomptes ............................................................... 25

Section 1 : Les précomptes .......................................................................................................... 25

Section 2 : Les versements anticipés .......................................................................................... 26

TITRE III. Les revenus immobiliers ............................................................................................... 28

Chapitre 1. Définitions ..................................................................................................................... 28

Section 1. Les biens immobiliers ................................................................................................ 28

Section 2. La notion de « revenu » immobilier ........................................................................ 28

Chapitre 2. La double imposition des revenus immobiliers ...................................................... 29

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Chapitre 3. Le revenu cadastral ....................................................................................................... 31

Section 1. Définition ..................................................................................................................... 31

Section 2. Fixation et modification du revenu cadastral ........................................................ 32

Section 3. L’intérêt de la base imposable forfaitaire ............................................................... 33

Chapitre 4. l’imposition des revenus immobiliers AU PRÉCOMPTE immobilier ................ 34

Section 1. Définition ..................................................................................................................... 34

Section 2. Qui est redevable du précompte immobilier ? ...................................................... 34

Section 3. Base et mode de calcul du précompte immobilier ............................................... 36

Section 4. Taux du précompte .................................................................................................... 37

Section 5. Les réductions et les exonérations du précompte immobilier ........................... 39

Section 6. Imputation du précompte immobilier .................................................................... 43

Chapitre 5. L’imposition des revenus immobiliers à l’impôt des personnes physiques ....... 44

Section 1. Débiteur de l’impôt .................................................................................................... 45

Section 2. Réduction et immunité des revenus de biens immobiliers ................................. 46

Section 3. Les frais déductibles ................................................................................................... 54

Section 4. Modes de détermination de la taxation des revenus immobiliers à l’impôt des

personnes physiques ..................................................................................................................... 62

Chapitre 6. Les avantages du système de taxation des revenus immobiliers à l’impôt des

personnes physiques ......................................................................................................................... 79

Titre IV. Les revenus mobiliers ....................................................................................................... 81

Chapitre 1. Généralités ..................................................................................................................... 81

Section 1. Définition ..................................................................................................................... 81

Section 2. Les quatre catégories de revenus mobiliers ........................................................... 81

Section 3. Système du précompte mobilier libératoire .......................................................... 82

Section 4. Obligation de déclaration des revenus qui n’ont pas subi le précompte .......... 83

Section 5. Les revenus mobiliers encaissés directement à l’étranger ................................... 84

Section 6. Affectation des avoirs mobiliers à l’exercice de l’activité professionnelle ........ 84

Section 7. Revenu imposable net ................................................................................................ 85

Chapitre 2. Le précompte mobilier ................................................................................................ 87

Section 1. Taux .............................................................................................................................. 87

Section 2. Redevable du précompte ........................................................................................... 88

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Section 3. Moment d’exigibilité du précompte mobilier ....................................................... 89

Section 4. Déclaration et paiement du précompte mobilier ................................................. 89

Section 5. Précompte supporté à la décharge du bénéficiaire ............................................... 90

Section 6. Imputation et remboursement ................................................................................. 90

Chapitre 3. Les dividendes ............................................................................................................... 91

Section 1. Généralités ................................................................................................................... 91

Section 2. Dividendes « proprement dits » ............................................................................... 91

Section 3. Attribution gratuite d’actions au titre de dividendes ........................................... 93

Section 4. Attribution d’actions en cas d’incorporation de réserves ................................... 94

Section 5. Remboursements de capital ...................................................................................... 95

Section 6. Assimilation des parts bénéficiaires à du capital .................................................. 97

Section 7. Dividende ou rémunération d’associé ? .................................................................. 98

Section 8. Assimilation de certains intérêts d’avances ........................................................... 98

Section 9. Boni de liquidation et boni d’acquisition ............................................................. 104

Section 10. Exonérations diverses ............................................................................................ 108

Chapitre 4. Les intérêts ................................................................................................................... 108

Section 1. Généralités ................................................................................................................. 108

Section 2. Produits de prêts ....................................................................................................... 109

Section 3. Primes d’émission ou de remboursement ............................................................ 112

Section 4. Proratisation et titres à revenus fixes .................................................................... 113

Section 5. Produits divers de dépôts d’argent (swaps et primes d’options) ...................... 114

Section 6. Intérêts de dépôts d’épargne et autres exonérations .......................................... 115

Section 7. Intérêts de créances hypothécaires, intérêts attribués à des investisseurs

professionnels et exonérations de précompte mobilier ....................................................... 118

Section 8. Revenus du leasing immobilier et de droits assimilés ........................................ 118

Section 9. Revenus compris dans certains bons d’assurance .............................................. 121

Section 10. Produits de contrats d’assurance liés à un fonds d’investissement ............... 124

Section 11. Revenus provenant de certaines SICAV de capitalisation .............................. 125

Section 12. La composante en intérêts reçue en cas de rachat de parts ou de partage de

l’avoir social de certains organismes de placement collectif (OPC) .................................. 127

Chapitre 5. Les loyers et les redevances....................................................................................... 129

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Section 1. Nature du revenu ...................................................................................................... 129

Section 2. Détermination du revenu net ................................................................................. 129

Chapitre 6. Les rentes viagères ou temporaires ......................................................................... 130

Section 1. Notions ....................................................................................................................... 130

Section 2. Assimilation partielle à des revenus mobiliers .................................................... 131

Section 3. Modalités d’imposition ............................................................................................ 131

Chapitre 7. Les droits d’auteur ...................................................................................................... 133

Section 1. Généralités ................................................................................................................. 133

Section 2. Détermination du caractère professionnel des droits ........................................ 134

Section 3. Retenue du précompte mobilier ............................................................................ 134

Chapitre 8. La quotité forfaitaire d’impôt étranger ................................................................... 134

Section 1. Notion ......................................................................................................................... 134

Section 2. Taux ............................................................................................................................ 135

Section 3. Non-application ou non-imputation de la QFIE ................................................ 136

Chapitre 9. La coopération européenne en matière de fiscalité de l’épargne ....................... 138

Section 1. Directive sur la fiscalité des revenus de l’épargne............................................... 138

Section 2. Notion d’ « intérêts » ............................................................................................... 141

Section 3. Transposition en droit belge .................................................................................. 143

Chapitre 10. Les revenus mobiliers et les conventions préventives de la double imposition

............................................................................................................................................................. 144

Section 1. Généralités ................................................................................................................. 144

Section 2. Dividendes ................................................................................................................. 144

Section 3. Intérêts ........................................................................................................................ 145

Section 4. Redevances ................................................................................................................. 146

TITRE V. Les revenus professionnels .......................................................................................... 147

Chapitre 1. Notions introductives ................................................................................................ 147

Section 1. Définition ................................................................................................................... 147

Section 2. Imposition des revenus illicites .............................................................................. 148

Section 3. Imposition des revenus « indirects » .................................................................... 150

Section 4. Imposition des revenus de biens immobiliers et mobiliers à caractère

professionnel ................................................................................................................................ 151

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Section 5. Catégories de revenus professionnels ................................................................... 151

Section 6. Détermination du revenu net ................................................................................. 152

Section 7. Régime des sociétés civiles ou associations sans personnalité juridique ........ 152

Chapitre 2. Les bénéfices ................................................................................................................ 154

Section 1. Notion d’ « entreprises » ......................................................................................... 154

Section 2. Catégories de bénéfices ........................................................................................... 155

Section 3. 1ère catégorie de bénéfices : les bénéfices qui proviennent de toutes les

opérations « ordinaires » traitées par l’entreprise ou à son intermédiaire (art. 24, al. 1, 1°

du C.I.R. 1992) ............................................................................................................................. 156

Section 4. 2ème catégorie de bénéfices : les bénéfices qui proviennent de plus-values

réalisées ou exprimées (art. 24, al. 1, 2° du C.I.R. 1992) ....................................................... 158

Section 5. 3ème catégorie de bénéfices : les bénéfices qui proviennent de certaines plus-

values latentes (art. 24, al. 1er, 3° du C.I.R. 1992) .................................................................. 161

Section 6. 4ème catégorie de bénéfices : les bénéfices qui proviennent de réserves occultes

de l’entreprise (art. 24, al. 1er, 4° du C.I.R. 1992) .................................................................. 162

Section 7. Primauté du droit comptable sur le droit fiscal .................................................. 163

Section 8. Évaluation des créances irrecouvrables ou douteuses ....................................... 164

Section 9. Précisions sur la notion de « bénéfices » .............................................................. 165

Section 10. Les bénéfices laissés dans l’entreprise ................................................................. 168

Section 11. Les avantages anormaux ou bénévoles ............................................................... 171

Chapitre 3. Les rémunérations des travailleurs .......................................................................... 176

Section 1. Notion de rémunération des travailleurs ............................................................. 176

Section 2. Traitements et salaires ............................................................................................. 176

Section 3. Avantages de toute nature obtenus en raison ou à l’occasion de l’exercice de

l’activité professionnelle ............................................................................................................. 176

Section 4. Indemnités obtenues en raison ou à l’occasion de la cessation de l’activité .. 180

Section 5. Indemnités obtenues en réparation totale ou partielle d’une perte temporaire

de rémunérations ........................................................................................................................ 181

Section 6. Rémunérations proméritées par les travailleurs même si elles sont payées à ses

ayants cause .................................................................................................................................. 182

Section 7. Indemnités allouées au travailleur et remboursement de dépenses propres à

l’employeur ................................................................................................................................... 183

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Chapitre 4. Les rémunérations des dirigeants d’entreprise ..................................................... 185

Section 1. Notion de « dirigeant d’entreprise » ..................................................................... 185

Section 2. Première catégorie de dirigeant d’entreprise ...................................................... 185

Section 3. Seconde catégorie de dirigeant d’entreprise ........................................................ 186

Section 4. Notion de « rémunération » ................................................................................... 186

Section 5. Extension de la notion de « rémunération » pour les dirigeants de la première

catégorie à certains loyers et avantages locatifs ..................................................................... 187

Section 6. Principe d’attraction ................................................................................................. 189

Section 7. Précompte professionnel et versements anticipés.............................................. 190

Chapitre 5. Les rémunérations des conjoints aidants ............................................................... 190

Chapitre 6. Les profits ..................................................................................................................... 191

Section 1. Activités génératrices de profits ............................................................................. 191

Section 2. Notion de « profits » ................................................................................................ 192

Section 3. Taxation sur les recettes .......................................................................................... 193

Chapitre 7. Les bénéfices ou profits d’activités antérieures ..................................................... 193

Section 1. Notion ......................................................................................................................... 193

Section 2. Revenus obtenus ou constatés en raison ou à l’occasion de la cessation

complète et définitive de l’activité professionnelle ............................................................... 194

Section 3. Revenus obtenus ou constatés postérieurement à la cessation de l’activité .. 196

Chapitre 8. Les pensions, rentes et allocations en tenant lieu ................................................. 197

Section 1. Champ d’application ................................................................................................ 197

Section 2. Éléments hors champ d’application ...................................................................... 198

Section 3. Particularités de l’imposition .................................................................................. 198

Chapitre 9. Les plus-values réalisées, obtenues ou exprimées dans le cadre de l’exercice

d’une activité professionnelle ........................................................................................................ 199

Section 1. Généralités ................................................................................................................. 199

Section 2. Plus-values non visées .............................................................................................. 200

Section 3. Plus-values réalisées ................................................................................................. 200

Section 4. Plus-values exprimées .............................................................................................. 201

Section 5. Quotité monétaire des plus-values ........................................................................ 201

Section 6. Plus-values réalisées sur certains immeubles non bâtis .................................... 202

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Section 7. Plus-values à long terme réalisées sur des immobilisations corporelles et

financières ..................................................................................................................................... 202

Section 8. Report de taxation (ou « taxation étalée ») sous condition de remploi .......... 203

Section 9. Plus-values réalisées sur des véhicules d’entreprise ........................................... 209

Section 10. Plus-values réalisées sur actions ou parts ou immobilisations financières .. 210

Section 11. Plus-values réalisées sur voitures et minibus .................................................... 210

Section 12. Les plus-values internes ........................................................................................ 210

Chapitre 10. Les exonérations à caractère social ou culturel .................................................. 212

Section 1. Prestations sociales ou para-sociales immunisées .............................................. 212

Section 2. Indemnité « vélo » et mise à disposition d’une bicyclette ................................. 212

Section 3. Remboursement de frais de déplacement ............................................................ 213

Section 4. Avantages sociaux .................................................................................................... 214

Section 5. Titres-repas ................................................................................................................ 215

Section 6. Chèques sport et culture et éco-chèques ............................................................. 216

Section 7. Avantages non récurrents liés aux résultats ........................................................ 217

Section 8. Indemnités versées aux bénévoles, artistes et pompiers volontaires .............. 218

Section 9. Autres avantages immunisés .................................................................................. 219

Chapitre 11. Les exonérations à caractère économique ........................................................... 221

Section 1. Des exonérations qui vont au-delà de la déduction des frais réels .................. 221

Section 2. Immunisation pour personnel supplémentaire affecté à certaines tâches au

sein de l’entreprise....................................................................................................................... 221

Section 3. Immunisation pour personnel supplémentaire des petites entreprises et des

titulaires de professions libérales .............................................................................................. 221

Section 4. Exonérations pour tutorat de stagiaires ............................................................... 222

Section 5. La déduction pour investissement ......................................................................... 222

Chapitre 12. Les frais professionnels ........................................................................................... 225

Section 1. Principe de la taxation sur le revenu net .............................................................. 225

Section 2. Notion de « dépense » ............................................................................................. 226

Section 3. 1ère condition de déductibilité : le lien nécessaire avec l’activité professionnelle

........................................................................................................................................................ 226

Section 4. 2ème condition de déductibilité : une dépense effectuée en vue d’acquérir ou de

conserver des revenus professionnels imposables ................................................................ 227

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Section 5. 3ème condition de déductibilité : le rattachement des frais à la période

imposable ...................................................................................................................................... 229

Section 6. Cas particulier des frais exposés après la cessation de l’activité professionnelle

........................................................................................................................................................ 230

Section 7. 4ème condition de déductibilité : la preuve de la réalité et du montant des frais

........................................................................................................................................................ 231

Section 8. Forfaits légaux ........................................................................................................... 233

Section 9. Dispositions anti-abus : rejet des frais déraisonnables et de certaines dépenses

d’agrément .................................................................................................................................... 235

Section 10. Liste non exhaustive de frais professionnels ..................................................... 236

Section 11. Frais professionnels non-déductibles ................................................................. 238

Section 12. Prise en charge des pertes d’une société par un dirigeant d’entreprise ........ 239

Section 13. Les amortissements ................................................................................................ 241

Section 14. Déduction des intérêts des capitaux empruntés ............................................... 250

Section 15. Intérêts, redevances et rémunérations de prestations de services payés à

l’étranger ....................................................................................................................................... 252

Section 16. Intérêts d’emprunts contractés en vue de payer un impôt ............................. 254

Section 17. Intérêts de dettes contractées par des dirigeants d’entreprise en vue

d’acquérir des actions ou parts ................................................................................................. 255

Section 18. Condition de publicité de la déduction des rémunérations, commissions,

honoraires, etc. ............................................................................................................................. 255

Section 19. Rémunérations des membres de la famille du contribuable travaillant avec

lui .................................................................................................................................................... 256

Section 20. Frais de voiture........................................................................................................ 257

Section 21. Transport collectif des membres du personnel et promotion de l’usage de la

bicyclette ....................................................................................................................................... 263

Section 22. Frais de sécurisation ............................................................................................... 264

Section 23. Vêtements professionnels ..................................................................................... 265

Section 24. Frais de restaurant, de réception et de cadeaux d’affaires .............................. 266

Section 25. Cotisations d’assurance complémentaire contre la maladie et l’invalidité .. 268

Section 26. Régimes de pension complémentaire financée par l’employeur, l’indépendant

ou l’entreprise .............................................................................................................................. 269

Section 27. Régimes de la prime bénéficiaire accordé aux travailleurs. ............................ 271

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296

Chapitre 13. Les pertes professionnelles ..................................................................................... 272

Section 1. Imputation des pertes d’une activité professionnelle sur les revenus d’une

autre activité professionnelle .................................................................................................... 272

Section 2. Pertes d’une société sans personnalité juridique ................................................ 272

Section 3. Imputation des pertes professionnelles sur les revenus professionnels du

conjoint ......................................................................................................................................... 273

Section 4. Report illimité des pertes professionnelles dans le temps................................. 273

Section 5. Disposition anti-abus en matière d’avantages anormaux ou bénévoles ......... 274

Chapitre 14. Imposition des revenus professionnels des conjoints ........................................ 274

Section 1. Quote-part attribuée au conjoint aidant .............................................................. 275

Section 2. Quotient conjugal ..................................................................................................... 276

Section 3. Qualification des revenus attribués ....................................................................... 278

Chapitre 15. Le précompte professionnel ................................................................................... 279

Section 1. Redevables du précompte professionnel .............................................................. 279

Section 2. Dispenses de versement du précompte professionnel ....................................... 280

Section 3. Fait générateur et paiement du précompte .......................................................... 282

Section 4. Barèmes du précompte professionnel .................................................................. 283

Section 5. Imputation du précompte professionnel sur l’impôt des personnes physiques

afférent aux revenus professionnels ......................................................................................... 284

TITRE VI. TAXATION DES COMPTES TITRES.................................................................... 285

Chapitre 1. Introduction ................................................................................................................ 285

Chapitre 2. Champ d’application .................................................................................................. 285

Chapitre 3. Redevable de la taxe ................................................................................................... 286

Chapitre 4. Déclaration et paiement de la taxe .......................................................................... 286

Chapitre 5. Entrée en vigueur ........................................................................................................ 286