INTERVENANTS « TRAVAILLER ET ETRE HEUREUX : …
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« TRAVAILLER ET ETRE HEUREUX : COMMENT DÉFINIR ET
MESURER LE BIEN-ETRE ? »
MARDI 6 MARS 2018
UNE RENCONTRE DU CLUB «RH & MANAGEMENT» EN
PARTENARIAT AVEC PSYA
Le bien-être au travail recouvre de nombreuses définitions. Il semble que les
notions de plaisir, d’engagement et de sens soient des composantes centrales du
bien-être professionnel. Dès lors, comment appréhender ces dimensions au sein
des organisations et quels types d’actions mettre en place?
Aujourd’hui, il existe différentes approches éclairantes sur ces sujets. La
psychologie positive est une nouvelle orientation de la recherche en psychologie,
distincte de la pensée positive. Elle se définit comme l’étude des facteurs
d’épanouissement et de fonctionnement optimal pour les personnes et les
organisations.
Grâce à cette discipline, nous pouvons identifier de nouveaux critères qualitatifs
de mesure du bien-être au sein des organisations. S’appliquer à les mesurer
permet-il de faire progresser les fondamentaux du bien-être au travail ?
A travers une présentation scientifique, des exercices concrets, et des
témoignages, cette matinale vous invite à imaginer quelles pratiques
vertueuses installer au sein de votre organisation pour offrir davantage de
ressources à vos collaborateurs.
Matinale animée par Robin Fiault, consultant-formateur, cabinet Psya
INTERVENANTS
Célia Badet, directrice
régionale du cabinet Psya
Robin Fiault, consultant-
formateur, cabinet Psya
Baptiste Frattina,
Ingénieur Qualité Environnement
et Développement Humain chez
Guichon-Valves
Compte-rendu Ecobiz 6 mars 2018 1
Introduction de Célia Badet, directrice régionale Psya
Rebattre les cartes
Comment allier bien-être au travail et performance d’une entreprise ?
Cette dualité amène une modification profonde de certains paradigmes de la ligne managériale. Cette
plongée dans un mouvement perpétuel, une recherche constante d’agilité, de souplesse, de réactivité
est-elle compatible avec la notion de bien-être ?
Un cheminement est à suivre pour l’intégrer dans la culture d’entreprise. Pour ce faire, une remise en
question de l’organisation et des personnes doit s’effectuer pour permettre de traverser les zones de
turbulence propres à tout changement. Le cabinet Psya a pour vocation d’accompagner l’évolution d’une
société en profonde mutation.
Compte-rendu Ecobiz 6 mars 2018 2
Qu’est-ce que la psychologie positive ?
La psychologie positive est une discipline de la psychologie fondée officiellement en 1998 par Martin E.
P. Seligman. La psychologie positive s’intéresse à la santé et au bien-être, à ce qui rend les
humains résilients, heureux, optimistes. C'est l’étude des forces, du fonctionnement optimal et des
déterminants du bien-être. L'hypothèse de la psychologie positive est qu'en étudiant pourquoi et
comment certains animaux et certaines personnes surmontent mieux que d'autres les difficultés de la vie,
il sera possible de trouver des moyens de développer ces qualités chez tout un chacun. Son objectif est
de promouvoir l’épanouissement et l’accomplissement de soi, au niveau individuel, groupal et social. La
psychologie positive « étudie ce qui donne un sens à la vie », selon Martin E. P. Seligman.
Une approche humaniste
Abraham Maslow, psychologue
américain a classé les besoins
humains en cinq niveaux à
satisfaire pour atteindre ce qu’il
nomme « l’accomplissement
personnel ».
Ces niveaux sont représentés
sous la forme d’une pyramide
des besoins qui sont
hiérarchisés. Idéalement, ses
valeurs personnelles doivent
être en accord avec celles de
son environnement
professionnel. Avoir une ligne
cohérente permet de sécuriser
son entourage. Tout décalage
fait naître un hiatus, le
questionnement apparaît et
notre image s’en trouve fragilisée.
Carl Rogers, psychologue humaniste américain a développé une approche centrée sur la personne. Elle
repose sur la conviction que l’homme possède un fort potentiel d’évolution et d’épanouissement inné qui
se développe de lui-même pour peu qu’il bénéficie d’un contexte favorable. Il s’agit d’autonomiser la
personne dans son cheminement.
Les 3 piliers de la psychologie positive
Porter plus souvent l'attention vers les aspects satisfaisants
du quotidien, que ce soit à propos de soi, l’autre et l’environnement
Développer une attitude de bienveillance, non-jugement par
rapport à soi, autrui et l’environnement
Développer l’engagement dans des actions qui
correspondent à ses valeurs
« L'objectif n'est pas de
résoudre un problème
particulier mais d'aider
l'individu à se développer afin
qu'il puisse faire face aux
problèmes actuels et à des
problèmes ultérieurs d'une
façon mieux intégrée.»
Carl Rogers, psychologue
humaniste américain
Compte-rendu Ecobiz 6 mars 2018 3
Quelques limites de la «positive attitude»
■ La psychologie positive propose de développer l’optimisme : le joueur compulsif s’entête continue
d’espérer même après plusieurs échecs (Gibson et al., 2004)
■ Le recadrage positif ou comment ne pas répéter ses erreurs en identifiant les possibilités qu’un
échec ouvre. (Anderson, 1999 et Fincham, 2001) En contre-partie, il peut réduire la motivation à
s’améliorer (Steele et al., 2002) et à améliorer la situation (McNultyet al., 2008)
■ La colère modérée améliore la capacité de négociation d’une personne ayant habituellement une
faible capacité à conclure (Van Kleefet Cote, 2007)
■ La quête effrénée du bonheur peut générer de la frustration.
Bien comprise, la psychologie positive aide à voir le verre ni à moitié vide, ni à moitié plein mais constitué
de 50 % d’eau et de 50 % d’air.
«Bien-être» : de quoi parle-t-on ? Comment le mesurer?
Les composantes du bien-être : PERMA
« Le bien-être est un
processus qui se
construit à travers le
temps, se modifie au
cours de la vie en
fonction des événements
et des expériences, et
façonne l’identité»
Delle Fave, 2011, Univ.
de Milan
« La santé est un état de complet de bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité.» Préambule à la Constitution de l’OMS, 1946
Compte-rendu Ecobiz 6 mars 2018 4
Des outils de mesure qualitative ont été développé par Peterson & Seligman et par Ben Shahar.
Des tests psychométriques mesurent des variables telles que l’optimisme, la résilience, la
reconnaissance, la cohérence comportementale, la flexibilité psychologique, l’auto-compassion. Ces
divers tests peuvent être trouvés sur Google Scholar + ouvrage « Psychologie positive en environnement
professionnel» Éd. de Boeck, dir. Martin-Krumm.
Le bien-être et la performance ont-ils un lien ?
Les employés qui s’estiment heureux ont 2,25xmoins de risque de déclencher un burnout et sont 32%
plus engagés que leurs pairs ;
Selon leur manager, les employés épanouis témoignent d’une performance globale supérieure de
16%par rapport à leurs pairs (Spreitzeret Porath, 2012)
Les travailleurs heureux sont ceux qui sont le plus productifs : +12% de productivité et -10% pour les
employés insatisfaits (Oswald, Proto et Sgroi, 2014)
Ceux qui ont le niveau d’émotions positives le plus élevé obtiennent de meilleures notes à tous les
indicateurs de performances (ex: ventes, satisfaction client, gestion des stocks, fidélisation, etc.)
(Marks, 2006)
La performance est augmentée par le bien-être au travers de 5 piliers :
Innovation
Coopération
Santé
Efficacité
Mobilisation
Comment aborder la psychologie positive dans les organisations ?
Une étude sur 20 000 employés dans 29 pays, a examiné 50 facteurs de performance. Quand les
managers se concentrent sur les forces des employés, le gain de performance peut atteindre 36,4% et
lorsqu’ils se concentrent sur les faiblesses, la perte peut atteindre 26,8%
(Corporate Leadership Council, 2002)
■ Travailler sur les forces d’une équipe
Définition : « capacité préexistante, à ressentir, se comporter, réfléchir, de façon authentique et
énergisante » (A. Linley)
En plus du format « photolangage » où chacun a identifié et expliqué ses forces; qu’on a « attribué » des
forces aux autres (renforcement du lien interpersonnel): possibilité de créer un tableau
■ Développer la reconnaissance
Le sentiment de reconnaissance (ou gratitude) est celui qui favorise le plus le bien-être psychologique et
l’esprit d’équipe
Il est possible de le développer par des pratiques
Le journal de gratitude : notez chaque soir entre 1 et 3 choses pour lesquelles vous vous
sentez reconnaissant. Cela peut venir d’une personne, d’une organisation ou de l’environnement.
La lettre & visite de gratitude : remerciez une personne de votre entreprise, que ce soit pour
son soutien ou de nouvelles idées intéressantes en lui écrivant une lettre et en la déposant sur
son bureau.
Le sentiment de gratitude protège de la dépression
Compte-rendu Ecobiz 6 mars 2018 5
Les interventions de Psya en psychologie positive
Plusieurs formats possibles : journée, demi-journée (3h), ateliers de 3x 3h… // sensibilisations et
conférences
Témoignage de Baptiste Frattina, Ingénieur Qualité Environnement
et Développement Humain chez Guichon-Valves
Créée en 1921, cette PME industrielle spécialisée dans la robinetterie rassemble 95 personnes à
Chambéry avec 70% d’hommes et 30% de femmes.
Les valeurs choisies et partagées
Esprit d’équipe Combativité Authenticité Enthousiasme Professionnalisme
« Nous sommes passés
d'une économie industrielle -
où on embauchait des bras -
à une économie de la
connaissance - où on
embauchait des têtes - et
maintenant une économie
humaine - où on embauche
des coeurs. » Dov Seidman,
Compte-rendu Ecobiz 6 mars 2018 6
Son diplôme d’ingénieur industriel hydraulique en poche, Baptiste Frattina a également obtenu un DU de
psychologie positive, sous la responsabilité de Rebecca Shankland à Grenoble. Son expérience personnel l’a
amené à s’intéresser aux conditions et processus qui contribuent à l’épanouissement ou au fonctionnement
optimal des personnes, des groupes et des institutions. Il est également à l’origine de deux initiatives
couronnées de succès.
Les ateliers mindfulness
Baptiste Frattina propose 4 ateliers de 15 minutes hebdomadaires de méditation en pleine conscience aux
collaborateurs de Guichon-Valves. Pour être conscient de son corps, être focalisé, se recentrer, retrouver le
chemin vers ses pensées, ses ressentis, et bien sûr les autres.
L’atelier Care
Financé par l’Adème, ce projet se formalise sous forme de 8 ateliers de 2 semaines avec des volontaires.
97 % des collaborateurs qui se sont portés volontaires souhaitent s’outiller pour gérer le stress et la pression,
créer du lien, et également apprendre des pratiques nouvelles.
Les propositions
Compte-rendu Ecobiz 6 mars 2018 7
Les questions de l’assistance
Y-a-t-il eu moins de départs ?
Oui et surtout moins d’absentéisme.
Des retours sont-ils faits aux collaborateurs ?
Oui, régulièrement des résultats sont présentés, des explications sont apportées quant à la démarche elle-
même visant le bien-être individuel. Participer à ces deux études requiert de donner une existence à la
démarche d’amélioration et le besoin de donner du sens ressort clairement. Ces actions s’inscrivent dans une
vision globale de l’entreprise qui concordent avec ses valeurs. Des forces mêlées des salariés et des
dirigeants découlent un vrai travail de coopération.
Pour être prosaïque, le but final reste le profit de l’entreprise ?
Oui, tout le monde est gagnant, le CA et les résultats sont en hausse.
Comment se passent les discussions avec les partenaires sociaux ?
Il y a un décalage mais l’essentiel est que la discussion demeure possible.
La gouvernance partagée favorise-t-elle cette démarche ?
La réponse est double : non, parce que cette démarche a été mise en place avant l’adoption de cette forme de
gouvernance et que les 6 personnes qui partagent cette gouvernance n’ont pas le même avis sur la question.
Et oui parce-que la direction demeure inspirante.
Comment se répartit la participation ?
Elle représente 1/3 d’ateliers et 2/3 de bureaux. Des passerelles sont faites, les discussions créent du lien qui
perdurent dans le temps.
Qu’en est-il de votre RSE ?
La Responsabilité Sociétale des Entreprises correspond à la responsabilité d'une entreprise vis-à-vis des
impacts de ses décisions et activités sur la société et sur l'environnement. Notre RSE est valorisée. Par
exemple, des personnes d’Areva et de Total participent à nos ateliers de mindfulness.
Vos initiatives impactent-elles votre recrutement ?
Oui, je pense au cas d’une personne qui a consenti à faire un effort financier en contrepartie de
l’environnement que nous proposons. Bien sûr, c’est à double tranchant, certains peuvent trouver notre esprit
rédhibitoire.
Les données récoltées sont-elles exploitées ?
Un collectif analyse les données. L’Adème qui a financé un atelier attend bien sûr des chiffres précis. Pour
permettre la mesure fiable d'une évolution et son analyse, nous avons mis au point un baromètre qui respecte
une méthodologie d'étude stable dans le temps.
Un atelier axé sur le bien-être physique est-il prévu ?
Une réflexion est menée sur les gestes et postures dédiées à la production.
Le niveau social des salariés interfère-t-il ?
C’est une question d’étape. Il s’agit pour nous de démocratiser un maximum ces pratiques en les rendant
attractives pour le plus grand nombre. La façon de porter une démarche et sa clarté déterminent son succès, il
est primordial de partir de l’écoute, des préoccupations et des besoins réels pour ne pas être maladroit dans
ses propositions. Rien de pire que de répondre à côté. Nous avons donc mené une réflexion quant à notre
politique bien-être pour réussir le défi d’embarquer un maximum de personnes dans cette belle aventure.
Bibliographie – Pour aller plus loin
Rebecca Shankland, La psychologie positive, Dunod, 2014
Rebecca Shankland, Les pouvoirs de la gratitude, Odile Jacob, 2016
Huet, Rohou, Thomas, La boîte à outils du bien-être au travail, Dunod, 2017
Ilios Kotsou, Eloge de la lucidité, Robert Lafont, 2014
Martin-Krumm, Tarquinio, Shaar, Psychologie positive en environnement professionnel, De Boeck, 2013