Ibn Tumart Doctrine

download Ibn Tumart Doctrine

of 118

Transcript of Ibn Tumart Doctrine

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    1/118

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    2/118

    V. ,'^1iIiI

    ii

    i

    Cibc Univers il:^ of CblcaQOICibraries1^

    :::'::;::;>:;>:iivZ;(isS:3?;sz,^i?^t?i^s';jf!SS2:-5M;7^^^^

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    3/118

    OOUVERNEMENT GNRAL DE l'ALGRIEe 3 ^ 3 'T o =>

    .^ J 1 ' -) T 2 3 3D 3 1,, 3 3 0=5

    . 0, J 3

    i-V: OHAMMEB 1 ' ^,t^ K

    ET LA THOLOGIE DE L'ISLAMDANS LE NORD DE L'AFRIQUE AU XP SICLE

    PARIJ-'I^ &OLDZIHER

    PROFESSEUR A L UNIVERSITE DE BUDAPESTj-L-^-N^-e^a^^--^

    ALGERIMPRIMERIE ORIENTALE PIERRE FONTANA29, RUE d'orlans, 29

    1903

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    4/118

    u^^

    :. *. ..I c * m

    * - -

    : : . :

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    5/118

    OD^VO

    MOHAMMED IBN TOUMERTET LA THOLOGIE DE L'ISLAM

    DANS LE MAGHREB, AU XP SICLE

    Durant un sicle et demi (515-674 H. = 1121-1275),l'histoire de l'Espagne et de l'Afrique a subi l'influenced'un mouvement religieux et politique, dont on trouveral'origine dans les documents qui forment les textes ru-nis dans le prsent volume.La dynastie des Almohades, comme toutes les royau-ts berbres qui se succdrent si rapidement les unesaux autres dans FAfrique du Nord, a exerc une influen-ce considrable" sur les progrs de l'Islam dans le mondeberbre.- Le mouvement almohade qui, en peu de temps, devaitrpandre la terreur travers le monde maghrbin, nesembla pas, ses dbuts, devoir aboutir de grandesactions militaires. Mais l'ardeur dogmatique d'un pau-vre berbre fanatique de la tribu kabyle des Mamoudaamena bientt une guerre religieuse, et, ds l'anne 538(1143), le gnral et premier khalife de ce rformateur,lev comme lui sur les bancs de l'Ecole, la portait au-del du dtroit.

    Le. soulyement des Musulmans d'Espagne, irritscontre les princes almoravides, venait tout juste pointpour lui. Des circonstances semblables, peu d'annes

    1

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    6/118

    f 2 .

    ' - .

    (? ?

    auparavant, avaient fait des Almoravides les matresde l'Espagne. En l'anne 567 (1172), cinquante anis a /peine aprs le premier groupement des Mamouda sous -,j-l'tendard du taouhid, toute l'Espagne musulmane tait 15runie sous le sceptre des Almohades.Ce ne dut point tre une mdiocre pouvante que cellequi accompagna leur irrsistible assaut. Un fakih anda-lou ressent un lel effroi devant les soldats d'''Abd^l-Moumen qu'il s'enfuit en Egypte; l, encore, il ne se .sent point en sret ; pouss toujours par une terreurpanique, il se sauve dans la haute Egypte et, de l; laMekke, o il lui semble encore sentir les Almohades surses talons. La peur le chasse, toujours plus loin, jusquedans l'Inde, o il peut enfin mourir tranquille en 551(1156) (1).L'tonnement, l'admiration devaient emplir le monde,

    voir la rapidit presque foudroyante des succs queremportait la cause almohade. C'est bien l'impression,que refltent les paroles qu'crivait, l'poque de lapremire grande pousse de la puissance almohade, unpote de l'Arabie mridionale, Nedjm al-dn "Omraal-Hakami, qui vcut en Egypte au temps des derniersF'atimites, et qui fut excut par Saladin en 1174.Au cours de considrations philosophiques sur le sort -des choses qui, aprs des dbuts misrables, s'lventau plus haut degr de la splendeur, il ne sait pointtrouver un exemple d'une jplus grande actualit que :celui-ci : V

    Cet Ibn Toumert tait, quand il a dbut, semblable, comme dit le vulgaire, de la viande au crochet du garde-manger.

    (1) Al-Maqqari, i, p. 620.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    7/118

    r: ^ 3 _-

    Et voici qu'il a si bien grandi (i) qu'il va chercher son "souffle jusque dans les toiles (2).

    Cette hyperbole anticipe un peu sur les succs d"'Abdel-Moumen. Les jours brillants d"Abd el-Moumen(524-558 = 1130-1163), ainsi que de ses successeursimmdiats, Abou Yaqoub Youssof (558-580 = 1163-1184)et du fils de ce dernier, Abou Youssof Yaqoub, sur-nomm El-Manour (580-595 = 1184-1198), eurent unefin rapide. Le dsastre que les chrtiens rservaient auxAlmohades Navas di Toiosa (609 = 16 juillet 1212), etsurtout les querelles intestines qui clatrent au seinmme de la dynastie et qui permirent la branche colla-trale des Hafsides de s'implanter dans la rgion deTunis, causrent bientt la ruine de l'empire qui s'taitlev avec une si extraordinaire rapidit. Une autretri'bu berbre, les Mrinides, surgit et prit la placedes Almohades.Dans la personne du quatorzime prince de la race

    d"'Abd el-Moumen, ""Abd el-Walid III al-Mou'taim, onvoit le dernier souverain almohade dpouiller son auto-rit dj toute nominale pour regagner en fugitif lesprofondeurs de l'Atlas, d'o le mouvement almohadetait sorti un sicle et demi auparavant.Dans le lieu qui, aux dbuts de ce mouvement, avait

    jou un rle si singulier, . Tinmelel, se runit bienplus tard, comme en un lieu consacr, le petit troupeaudes croyants fidles qui, thoriquement au moins, con-servait les traditions du royaume disparu du Mahdi.Leur centre, est le tombeau du Mahdi Ibn Toumert,

    (1) Je prfre la lecture (^jj* ^^\^(2) 'Oumra du Ymen, sa vie et son uvre, par H. DereiibOurg, i

    (Paris, 1897), p. 354, 1-2.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    8/118

    4 . :retrouv Tanne dernire par M, Edmond Doutt, jadisthtre de grandes ftes religieuses!^), plus tard expres-sion symbolique de la pit de la petite communaut quin'avait point cess d'espi'er la rsurrection de l'empiredu Mahdi. Au rapport de Lon l'Africain, on y tudiaitencore de son temps les crits qui font l'objet de lapublication laquelle j'ai l'honneur de joindre ces pagesd'introduction. Et a l'poque d'Ibn Khaldoun (mort en1406), les tribus berbres de la rgion de Tinmelelentretenaient encore l'esprance de voir l'empire duMahdi, fond par Ibn Toumert, renatre en Orient et enOccident (2).Nous n'avons point l'intention d'esquisser ici l'histoire

    de ce mouvement, de son essor et de son dclin : nousnous contenterons de prsente i* quelques observationssur ses premires origines. Il y a longtemps dj, en1887, la lecture du manuscrit unique de Paris, d'aprslequel la prsente dition a t faite, nous a fournil'occasion d'tudier avec quelque tendue les lmentscaractristiques du mouvement almohade, ainsi queles crits d'Ibn Toumert (^l Sauf pour quelques dtailsindispensables, nous ne saurions reproduire ici ce quenous avons expos dj dans cette vue d'ensemble, etnous ne pouvons dispenser le lecteur du prsent travailde recourir cette tude dj ancienne (*). 'Pour que les observations qui suivent viennent com-plter le travail paru en 1887, il nous faut donner, tout

    (1) Biog., p. 10, 9 ss.(2) Histoire des Berbres, l, p. 359.(3) Materialen zur Kenntniss der Almohadenbeioegung in Nord-

    afrika, Zeitsch. D. morgenland. Gesellseh, xli (1887), p. 30-140.(4) Nous devrons faire cependant une exception dans la troisimepartie de cette tude.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    9/118

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    10/118

    6 491 lig. (1098) (1) Le renseignement vague donn par Ibnal-A.thr.(Biog., p. 24, avant dern. 1.), d'aprs lequelIbn Toumert serait mort l'ge de 51 ou 55 ans (en 524= 1130) conduirait placer la date de sa naissance vers469 := 1076 ou 473 = 1080. De ce fait qu'al-Marrkechet l'auteur du Qartas ne donnent aucun chiffre ni pour ladate de sa naissance ni pour l'ge auquel il parvint, ilsemble bien qu'il faille conclure qu'ils ne croyaient paspossible de fournir rien de prcis sur ces poques, siessentielles cependant d'une biographie. La chronologiede ses annes d'tudes dans les pays d'Orient est toutaussi incertaine, et elles sont pourtant comme un tour-nant dans sa vie et dans ses aspirations. Au point devue gographique mme, les rcits de.ce voyage d'tudessont diffrents dans les diffrentes relations. Tout lemonde admet qu'il commena son voyage en l'anne501= 1107'2;; si l'on accepte pour sa naissance la datede 473 = 1080, il aurait eu 27 ou 28 ans lors de son dpartpour l'Orient; mais, selon Ibn al-Athr(Biog., p. 15, lOj etIbn Khallikan {ibid., p. 25, 14), il aurait effectu son vo^^dL-gefichabibatihiy pendant sa jeunesse , expression qui,d'aprs les ides que les Orientaux se font des diversespoques de la vie humaine, rie pourrait gure s'appli-quer un homme de 27 ou 28 ans (3), Son itinraire fut,

    (1) Comparer les renseigemeiits fournis par Zarkach : Chroniquedes Almohades et des Hafides, trud. E. Pugnau (Constantine, 1895),p. 2.

    (2) Marrakecl (Biog., p. 3, 4) 501 ; Ibu Khaldoun {ibid. p, 54, 'l6)(3) La priode de la vie dsigne par ce mol a pour limite appro-ximative la vingtime anne : par ex. Ghazli, Mounqids (Le Caire,

    1309) p. 3, 2 g>-Jo J^ ^3^^^ CUaL J^-^ tjrW-^ 0^>?~^ Cs?

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    11/118

    7 * 'd'aprs Ibn Khaldoun : Gordoue, Alexandrie, la Mekke,F'Irq (i); d'autres placent le plerinage la Mekkeaprs le sjour Baghdad et ne font passer le voyageur Alexandrie qu' son retour au Maghreb (2). H est trsprobable que c'est ce dernier renseignement qui est levrai.

    D'aprs l'une de ces sources (3), il sjourna Alexandrie l'ge de 18 ans. Si l'on suppose que la visite en Egypteeut lieu immdiatement avant le voyage de retour parles villes du Maghreb, cette indication, dans le cas o onla prendrait au srieux, pourrait servir de point de reprepour fixer approximativement la date de la naissance denotre auteur. Mais nous nous heurtons cette invrai-semblance qu'il ait justement termin son voyage d'tudes l'ge de 18 ans. Si nous acceptons avec al-Qift (danssa chronique, Hadji Khal., ii, p. 142) Tanne 511 = 1117,comme celle o Ibn Toumert quitta Alexandrie pourreprendre, vers l'ouest, la route de son pays, cet ge de18 ans nbus conduirait admettre qu'il tait n environen l'anne 491 = 1100 ; et ce' rsultat se trouve en opposi-tion flagrante avec Taffirmation d'Ibn al-Athir, suivantlaquelle il tait g de 51 55 ans en 524 = 1130.On pourrait emmler encore l'cheveau de ces conti-a-xlictions chronologiques. On parviendrait seulement seconvaincre de plus en plus de ce rsultat ngatif, qu'ilfaut dsesprer de fixer les dates de la vie du hros du

    (1) Zarkacli, loc. cit. : Gordoue, Muhdiya, Alexandrie, Baghdad.(2) Ibn KhalJikan (Biog., p. 26, 7). Marrakech (p. 3, 12) place aussi

    le sjour d'Ibn Touuiert Alexandrie immdiatement avant souretour dans sa patrie : mais il semble admettre qu'il y fit un secondsjour.

    (3) Zarkach, loc. cit.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    12/118

    - s - -mouvement almohade(i), et que nous ne ferions qu'ac-crotre la confusion si nous voulions mettre d'accord lesdates fournies par les divers crivains arabes.

    C'est pourtant l'une de ces impossibilits chronolo-giques que doit son origine un vnement, o une partiedes biographes et des historiens trouve Texplication" detoute la carrire d'Ibn Toumert. Il se serait assis auxpieds du grand Abou Hmid al-Ghazli, et c'est directe-ment de ses leons qu'il aurait tir l'inspiration qui luipermit d'accomplir sa mission auprs de ses compatrio-tes : rformer la foi et les murs, lutter contre les insti-tutions actuelles de l'empire, dmolir enfin le gouver-nement existant et fonder une dynastie nouvelle.Dans ce tableau, on fait figurer au second plan, ledessein d'al-Ghazli de se servir de l'ardent jeunehomme, venu de l'Occident, pour tirer vengeance de

    l'indigne traitement que les fouqaha des Almoravidesavaient fait subir ses uvres (2).Des gens' l'imagination plus vive ne font point remon-

    ter tout l'vnement l'influence de l'enseignement deGhazli, mais ils veulent que le grand Imam de l'Orientait su reconnatre la mission rserve par Dieu, ds leprincipe, l'Alide maghrbin, et cela d'une faon mys-trieuse, par la lecture des prophties du Djafr critespar li, auxquelles rpondaient exactement les qualits

    (1) Le comble de l'erreur est ralis par Ibii al-Athr (p. 20, dern. 1.),qui fait durer sa puissance pendant 20 ans; mais ce peut tre unefaute de copiste : ^jJi

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    13/118

    -.

    9 personnelles de son lve. Les dlTers biographes placeiitles relations personnelles d'Ibn Toumert avec Ghazli diffrentes poques de son sjour d'tudes en Orientet vont jusqu' lui attribuer une dure de trois annes(Qarts, p. 38, 12).Quelques-uns (Ibn Ath., p. "15, 13 ; Ibn Khall., p. 25, 14),

    placent cette rencontre en Iraq, spcialement Baghdad ;selon d'autres, ce fut Jrusalem ou Damas(i) ; on con-serve mme, en cette dernire ville, le souvenir de laplace o le futur Mahdi entra en d'intimes entretiens avecle savant professeur, retir dans un couvent de solitaires.A cela se rapporte un passage de Khalil ben Chhin al-Zhhiri, incomprhensible dans l'dition de Paris. A pro-pos des lieux saints de Damas, cet historien de la civi-lisation des Mamelouks dit (^) :

    Les mots souligns ne donnent un sens, que, si l'on y lit :

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    14/118

    ~ 10 -ces deux personnages. Ghazli, de 488 499; accomplitle clbre voyage qu'il consacra au complet dve-loppement de ses facults contemplatives. Comme nousl'avons vu plus haut, Ibn Toumert, de son ct, n'entre-prit son voyage d'tudes en Orient qu'en l'anne 501(1107). Gomment donc aurait-il pu rencontrer Ghazli,soit Baghdad que celui-ci quitta en 488, soit Damasd'o il partit avant 490, soit Jrusalem qu'il dt bienquitter avant 492, puisque les croiss s'en emparrentcette mme anne ?

    Il serait en outre bien invraisemblable de fixer la ren-contre des deux personnages au second et rapide sjourque Ghazli ft Baghdad au retour de son plerinagede dix ans.De telles constatations chronologiques, jointes aux

    1 rapports des crivains orientaux impartiaux qui consid-Irent l'pisode de Ghazli comme une lgende populaire,ont conduit les crivains modernes de l'Europe effacercompltement de la biographie d'Ibn Toumert sa ren-contre avec Ghazli(2). Notamment l'minent orientalisteamricain, Duncan B. Macdonald, qui a repris sur une pluslarge base les recherches sur Ghazli, laisses dans l'om-bre depuis l'essai de Richard Gosche (1859) ^'^\ a fait lalumire sur ce point douteux de chronologie.

    (1) Gf. D. B. Macdonald The life of A]-6hazzli in Journal of theAmerican Oriental Society, xx (1899), p. 99, 101.

    (2) Gomp. Aug. Millier : der Islatn im Morgen und Abendlande, ii,p. 641.

    (3) Outre le travail cit plus haut (note 1), voir encore l'tude duinme auteur : Emotionid Religion in Islam as alecled by Musicand Singing in Journal of the Royal Asiatic Society, 1901, p. 195suiv. Nous devons, en mme temps qu' Macdonald, de rcentes etimpoi-tantes publications sur Ghazli: au Baron Carra de Yaucc, ausavant hollandais T. I. de Boer, ainsi qu' M. Miguel Asin, de Sara-

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    15/118

    11 D'ailleurs, en dehors de ces raisons de douter, il existe

    encore de srieuses difficults de fait qui vont ren-contre d'une influence personnelle de Ghazli sur lestendances de la doctrine d'Ibn Toumert, sous la forni,du moins, que les documents orientaux ont prtendudonner cette influence. D'aprs eux, Ibn Toumert aurait \t amen par Ghazli la mthode ach'^arite d'interpr-/tation des documents religieux de l'Islam.Ce serait aux leons du matre qu'il aurait emprunt ;

    la thorie qui considre comme hrtique l'explication :littrale des expressions anthropomorphiques du Coran, ;et qui impose l'emploi du tawl (ou sens figur) de cesexpressions, pour Tintroduire aussitt dans le mondemaghrbin et pour l'y enseigner la pointe de l'pe.Or, Ghazli n'et pu l'attirer de telles doctrines l'poque de son recueillement soufite, et ce seraitcependant cette date seule que l'on pourrait placerleur rencontre. A cette poque, le grand Imam, commenous l'apprennent des documents prcis qui exposentses ides sur l'enseignement religieux du peuple, taitfort loign de la thorie qui et entran un ach'^arite,inflexible devant les consquences de ses ides, fairepntrer jusque dans le vulgaire ignorant les rsultatsde la spculation dogmatique. Quant la vengeance querimam aurait voulu exercer- contre les perscuteursde ses crits sous la domination almoravide, elle nepouvait se prsenter sa pense cette poque. Noussavons que, dans les dernires annes o i professa

    gosse. M. Lon Gautlner a caractris excellemineiil rattiUide deGhazli . l'gard de la philosophie dans sa leon d'ouverture : LaPhilosophie musulmane (Bibliothque orientale elzv., Paris, 1900),p. 55-65.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    16/118

    1^.-l'Acadmie Nizamiya de Baghdad, il prit un vif intrt l'affermissement et au succs de la dynastie almoravide,et qu'il employa son autorit thologique faire recon-natre la lgitimit religieuse du mouvement qui amenal'expulsion des moulouk al-iioaf de l'Andalousie (lesprinces provinciaux) et la runion de l'Islam maghrbinsous le sceptre de Ymir al-mouslhnin de la dynastiealmoravide. A cette poque, c'est--dire immdiatementavant la visite du jeune Ibn Toumert, le tadjsim, quitait impos au Maghreb sous la domination des Almo-ravides, ne troubla nullement la conviction qui luifaisait reconnatre ces princes pour les chefs lgitimesde l'Islam occidental. Et, d'autre part, la mise au bcherde ses uvres n'eut lieu que sous le fils de ce Youssofben Tachfin (mort en 500 = 1106), qu'il avait soutenude son autorit thologique, une poque o Ibn Toumertavait quitt dj les lieux o s'exerait l'influence per-sonnelle du grand ImamW.Nous voyons donc comment de tous cts se pressent

    les raisons d'effacer l'pisode de Ghazli de la biogra-phie d'Ibn Toumert. Il est absolument inadmissible, tantau point de vue de la chronologie qu' celui des faitseux-mmes; on doit y voir seulement une satisfactiondonne au besoin qu'avait le peuple de chercher et detrouver une cause dterminante, en dehors de sa propreindividualit, l'lvation de l'homme nergique qui,dans un clat de lumire surnaturelle, parvenait au .pou-voir en renversant l'autorit existante. Tous ceux quis'occupent de littrature orientale savent avec quelacharnement les Orientaux cherchent rattacher les

    (1) Macdonald, loc. cit., p. 112.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    17/118

    - 13 ^manifestations de l'effort personnel aux causes les plusmesquines W.Le nom de Ghazli n'apparat, au point de dpart de lacarrire d'Ibn Toumert, qu' une poque o venait des'vanouir l'antipathie que la thologie maghrbine avaitnourrie jusque l contre le systme du grand Imamde l'Orient (2); son nom s'entourait alors en tous lieux del'aurole de la saintet, et il n'y avait plus que quelquesHanbalites aux principes irrductibles, tels que le sontaujourd'hui les Wahhabites, qui refusaient de s'inclinerdevant le nom du restaurateur de l'Islam (3),L'orthodoxie maghrbine elle-mme dut bientt aussi

    plier le genou devant l'homme quivenait de porter la phi-losophie indpendante un coup si rude qu'elle n'en devaitpoint gurir avant longtemps, devant l'homme qui, tout enservant de cible aux philosophes dans leur lutte contrel'orthodoxie triomphante (*), livrait toute sa pense auxreprsentants de la foi('^), avides d'y rechercher les argu-. (1) Dans les environs de ana, se trouve le vieux chteau de Warwar.Les indignes croient que celui qui devient possesseur de ce chteaua aussitt la cervelle si bien drange qu'il se figure tre prophte,khalife ou sultan, et qu'il poursuit constamment cette chimre. Onexplique ainsi le soulvement du Zeidite 'Abd Allah hen Hamza qui,ayant russi s'emparer de ce chteau, au temps de l'AyyoubiteToktekin, invoqua aussitt une gnalogie alide pour prtendre l'Imamat. (Kazwini, d. Wstenfeld, ii, p. 42.)

    (2) Nous reviendrons sur ce sujet dans un chapitre spcial.(3) L'ouvrage intitul ^^.x^-^l J^_iJ\ , que le mufti de la Mekke,Gheikh Mohammed Sa'id Bbeil, a compos contre le Wahhabite'Ahd Allah al-Sihdi traite, dans son chapitre 20, de la glorificationde Ghazli. (Gf. ZDMG., lu, p. 156.)(4) C'est contre les Ach'arites, et particulirement contre Ghazli,

    qu'est dirige la polmique rsume dans le Fal el-Maql d'Avevros,publi par M. J. Millier (Munich, 1859) et plus rcemment au Caire(Matba'a 'ilmiyya, 1313).

    (5) Mme en dehors de l'Islam, voy.,p. ex., \&\\\'ve Al-Khasari deJehouda Hallevi ; D. Kaufmann a montr dans sa Geschichte der

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    18/118

    14 ments qu'ils lanceraient contre le systme, solidementdfendu, des philosophes. C'est un fait caractristiqueque, pour la plupart, les plus anciens manuscrits connusdu Tahfout al-falsifa (l'croulement des philosophes),de l'uvre qui fora Averros crire, pour la com-battre, un ouvrage spcial, sont d'origine maghrbine.

    Ainsi l'Islam occidental s'associait l'apothose queles fidles de l'Orient prparaient Ghazli ; il ne se con-tentait pas de suivre avec eux les doctrines Ihologi-ques du Matre; il en acceptait aussi toute la lgendeglorieuse.Dans tout grand savant, l'admiration nave des igno-

    rants veut trouver un homme extraordinaire, voire mmeun sorcier. Il faut que son profond savoir l'ait fait pn-trer dans le monde du mystre. La littrature pseudpi-graphique et la lgende du moyen-ge ont attribu Aristote et Platon tous les arts et toutes les puissancesmystiques, et il n'a pas t besoin d'un si fort recul dansle pass pour faire de Gerbert un ncroman. Nous-mmes, dans notre enfance, n'avons-nous pas su, avecnos camarades, tisser la toile des lgendes o nous enve-loppions certains de nos matres, dont la science profondefaisait l'objet de notre enfantine admiration?Le savoir humain atteint seulement par le travail pro-fond de Tesprit, ne s'impose pas aux. mes naves. La

    Attributenlehre in der jdischen Religions philoso23hie (Gotha, 1877,p. 120, ss.) que l'auteur a emprunt Ghazli le point de vue o il seplace dans cet ouvrage. D'aprs les recherches de M. Yahuda, dontles rsultats ne tarderont pas tre livrs au public, le livre asc-tique de R. Bahya h. Pakouda contient un grand nombre d'extraitsdes traits de Ghazli.

    (1) R. Gosche : Uber Ghazzli's Lehen undWerhe (Abhandlungender Kou. Akademie in Bei'lin, 1858, p. 291).

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    19/118

    15 science de leurs hros, comme ses facults, doit avoirquelque chose d'extraordinaire, d'incomprhensible etd'inaccessible au vulgaire. Le sage, l'homme qui a pn-tr la nature des choses, doit tre prophte ou sorcier.La postrit devait donc rehausser la grandeur deGhazli de quelques pouces de mystre. Le restau-rateur de la religion devait tre en mme temps unthaumaturge; il devait avoir eu part la science queDieu ne donne qu' ses lus. Et il avait des droits d'au-tant plus certains cette science, que, pendant troiscourtes journes (^ il est vrai, il avait t lev laignit de Qot'b.Les connaissances mystrieuses que ''Aliben Abi T'aleb avait possdes le premier et auxquellesDja'^far al-diq avait eu part en qualit d'hritier lgitime,n'churent aprs lui qu'au seul Ghazli : il connut lesvertus secrtes des noms de Dieu (2); il sut tirer desversets coraniques les sortilges (3) qui font connatrel'avenir, qui permettent soit de dtruire ses ennemis etd'attirer sur eux la mort et la ruine, soit d'atteindre lebut de ses dsirs, de s'affranchir du danger (*), de conju-rer les djinns (S), les esprits, toutes les forces du monde

    (1) Macdonald, ihid. p. 109, 14. On Ta nomm mme : >^s^^\ (_.^Uaap. Damr (d. de 1284), i, p. 307; et d'autres pithtes, ibicL, p.'325.(2) Voir le commentaire attribu Ghazli du trait sur les noms

    de Dieu aL^j-^o^JI .-^, dont 'Ali serait l'auteur. Flligel, Cataloguedes Mss. orientaux de Vienne, n i66i (2).

    (3) Ghazli lui-mme renvoie des formules d'amulettes dans sonmmoire autobiographique intitul Al-Mounqid min al-dall. LeCaire, 1309, p. 32.

    (4) V. aussi Gosche, l. c, p. 309, note 8.(5) Kazwini, d. Wistenfeld, ii, p. 272, au mot ^_j*

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    20/118

    16 .infraterrestre. C'est l le sujet du livre secret qu''Ali algu Dja'^far : Ghazli seul a su le comprendre aprslui, et il en communiqua la connaissance aux plus ins-truits parmi les gens de Dieu W. Gejivre, qui estdsign sous le titre de ^-^j ? 7 , ou sous celui de lesecret bien gard et la perle cache , est gnralementcompt parmi les ouvrages de Ghazli : pour en donnerune ide, je reproduis ici en note l'introduction de cetrait magique, d'aprs un manuscrit du Muse Nationalde Budapest (2). Dans divers paragraphes, on fait parlerfrquemment Ghazli (^^^Visr^ Jlij_De mme, les grands recueils, qui traitent des vertussecrtes des versets du Coran et des formules, parlentde Ghazli comme de la principale autorit, immdiate-

    (6) Mouliyi ed-din ibn 'Arabi a beaucoup pratiqu la science dudjafr. L'un de ses ouvrages sur le djafr est en manuscrit Alger. .(Pagnan, n 1522.) Cf. Brockelmann, Geschichte der arahichen Lit-teratur, i, p. 446, \v" 78-81.

    (1) Manuscrits orientaux, nxxxixdemon catalogue (6) fol. 54*-69'._^\ f\Lco'^\

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    21/118

    -li-ment aprs. Dja'^lar al-diq, et ils citent ses avis U).L'homme que l'on appelait la preuve de l'Islam devaittre parfaitement initi ces secrets et ces formules,qui pouvaient corriger les hasards du temps w-^jj>,UjJl . Si l'on voulait une preuve de la facult qu'on lui

    attribuait de parvenir de pareils rsultats, on le trou-verait dans ce fait, qu'en maints endroits, il a t consi-dr comme l'auteur de la qacida Mounfaridja(2), de soncontemporain Youssof ben Mohammed al-Tauzari (morten 513 = 1119) (?). Ce clbre pome passe pour contenirle grand nom de Dieu, et en le rcitant, le fidle trouve^une aide efficace contre les peines de la vie. On nepouvait attribuer un si merveilleux brviaire nul autrequ' Ghazli.Nous avons vu(4) que la lgende lui faisait connatre,

    lire et interprter^^) ce mystrieux livre du djafr, d'ori-gine 'alide lui aussi, o il a t donn bien peu de

    ^ 93 ^^js-***^! 3^13 i^^\ 'As^Xof \UjJI ^_Jl^3 JX^j^aA^i; :J^A-uJ\ ^55^1^ ^2^Lk\jlJa^^\ (^ ^3) U^r^^ k-JucJJl^

    (1) ^2^1 ojJl 1.^^]^ 'SJtio\ k\.^3Jlj cS[t^^ ;lr^^ uf^^ 2^^-de Roukn al-dii 'Abd al-Rahman alQourachi, in E. G. Browne, Hand-lisl of tlieMuhammedan Marmscripts of the University of Cambridge(Cambridge, 1900) n 285.

    (2) Voir les preuves que j'en ai donnes in WZK M., xv (1901),p. 44, note 4.

    (3) Manuscrits de la Bibliothque de Vienne, n" 141 (2).(4) Ci-dessus, p. 16.(5) ZDMG, XLi, p. 124.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    22/118

    18 mortels de jeter les regards '*). Ds lors qu'tait ne lalgende de la rencontre d'Ibn Toumert avec le grandImam, il n'y manquait plus que de montrer celui-ciretrouvant dans le livre du djafr la description duMahdi, son signalement et le programme de la missiondivine, qui mettrait entre ses mains les destines duMaghreb et de l'Islam (2). Et ainsi la lgende devaits'enrichir d'un nouvel pisode. Ibn Toumert n'avaitpoint seulement tudi avec Ghazli la dogmatiqueach'^arite et les Ououl al-dn ; puisqu'il tait reconnupar lui comme l'lu de Dieu, il devait aussi avoir tiniti par l'Imam ses tudes de Kabbale et choisi parlui comme adepte dans les sciences secrtes. En fait, ilcircule dans la littrature musulmane un crit apocry-phe de Ghazli, qui a pour titre^ U v^-i^ ^^..^UJIJL(^.IjJ! Secret des deux mondes et rvlation de ce quiest dans les deux demeures , ou plus brivement j^l.^jXJ; cet ouvrage, dont j'ai eu connaissance par unmanuscrit de la Bibliothque khdiviale du Caire (3), a lrcemment lithographie dans l'Inde. Au dbut de ce livre,

    attribu Ghazli qui l'aurait compos la demande de nombre de rois de la terre voulant, grce lui,atteindre le but de leurs dsirs, on fait ainsi parler l'au-teur : La premire personne qui a fait une copie de cet ouvrage et qui l'a tudi prs de moi, loi7i de l'il des

    (1) Il est i^eut-tre rimam, dont le livre de djafr est menlionndans un texte cit dans mes Ahhandlunc/en sur arah. Philologie, ii,p. Lxxvin, note 1.

    (2) Biog., p. 38, 17 ; 49, 3. Selon d'autres rapports, ce serait IbnToumerl lui-mme qui aurait tudi les livres de djafr et de malJi-him, et qui y aurait reconnu son propi'e signalement. Biog., p. 4, 6;27, 15.

    "

    (3) Catalogue du Caire, vu, p. 683.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    23/118

    ,

    ^ _ 19 _ hommes, i'poque o, revenu de mes voyages, j'en-c seignais pour la seconde fois l'Acadmie Nizamiya, fut un homme du Maghreb, nomm Mohammed ibn Toumert, desgensde Salamiya(?), et j'en tirai l'horos- cope qu'il y rgnerait (*) .Cependant il n'en faudrait point conclure que ce soit

    par un pur mirage de lgende que le nom de Ghazli setrouve ml aux dbuts comme la suite de la carrired'Ibn Toumert. En- niant qu'il y ait eu influence person-nelle d'homme homme, nous n'avons pas mis en ques-tion l'influence des ides. Si nous voulons considrerIbn Toumert, ses vues et ses projets thologiques, abs-traction faite de ses tendances politiques et sociales,nous devons le voir, au cours de ses voyages en Orient,subissant l'impulsion de l'homme dont les salles de laNizamiya rptaient encore la gloire, l'poque o lejeune Maghrbin cherchait accrotre en Orient ses con-naissances thologiques.

    L'opposition manifeste par Ibn Toumert contre lespratiques thologiques en usage dans sa patrie maghr-bine, reflte, sous bien des rapports, le Contraste qui exis-tait entre la doctrine thologique de Ghazli et certainesthories voisines, dans la mesure o elles se manifestaientalors en Orient. Cela ne veut pas dire qu'Ibn Toumertait t imprgn de la doctrine de Ghazli jusqu'aufond de l'me ; il s'en faut de beaucoup. Il n'a mme paspntr trs profondment les ides matresses du sys-

    viJOJLl iol^ (selon rdilion indienne lilliographie. Communiculionde M. Macdonald).

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    24/118

    - o -tme thologique du matre. Bien qu'il ait toujours gard,au dire de tous ses biographes, les apparences d'une vieasctique W, il n'eut jamais le moindre got pour laMoukchafa, pour la connaissance mystique, pour l'effortintrieur qui permet de vivre dans la conscience les ra-lits de la vie religieuse, et qui est le but principal de larecherche religieuse dans le systme de Ghazli. Dans lascience du droit, leurs mthodes sont, comme nous leverrons, absolument diffrentes : elles le sont mme surcertains points de thologie.

    Citons seulement comme exemples deux points parti-culiers. La dogmatique discute la question de savoir s'ilest possible que Dieu impose l'homme des devoirs qu'iln'est matriellement point capable de remplir (2) : Ghazlise prononce pour l'affirmative (3), La puissance de Dieuest sans limites ; aucune considration ne saurait en-chaner sa volont souveraine; quand il transmet sesordres aux hommes, il ne doit point examiner s'ils sontcapables d'y obir (*). Avec une partie des Ach'^arites, avecles Mtouridiles et tous les MoHazilites, Ibn Toumert sepronona pour la ngative. Parmi les sept conditionsfondamentalesqui font qu'un ordre ou une dfense sontobligatoires , il place celle-ci que l'acte imposn'excde point les facults de celui qui est contraint de

    (1) Biog., p. 15, 13 ; 25, avant-dern. ].(2) Cf. sur cette question Fakhr al-dn al-Rz, Maftih al-r/haih,

    VIII, p. 746 (commentaire sur Sourate 111, v. 2).(3) La question controverse 3'^ '^ ^ ^^-^ix?^ ^* amplementtraite dans Seyd Mourtad, Ithafcd sadt, 11, p. 181 ss. Les Khri-

    djites l'admettent, Aglini, xx, p. 104, 16, Ibn al-Rawendi lana con-tre cette thorie son pamphlet ^Loi^\ (ow yJ:.^ CUi, WZKM,1890, p. 233.

    (4) Ihya, i, p, 141 (5 al.). Nous citons ici cet ouvrage d'aprs lapremire dition, Boulaq. 1289.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    25/118

    21 l'excuter W. Imposer des devoirs, dont on ne peut supporter raccomplissement, est une absurdit f^). Mais voici un fait beaucoup plus grave, car ce n'est

    point seulement avec les ides d'une cole particulire,mais avec toute l'orthodoxie sunnite qu'Ibn Toumert vase trouver en contradiction. Dans l'intrt de ses propresprtentions au mahdisme, il rejette la thorie sunnitede l'autorit des moicdjtahidouni^) (savants reconnus parlem* savoir comme interprtes originaux de la loi, l'opinion desquels se conforment les mouqallidon, imi-tateurs sans originalit), et en face d'eux, il place commecontre-poids Vlmam ma^oian, l'imam infaillible de lacommunaut musulmane, dignit qu'il rserve toutnaturellement au mahdi, c'est dire lui-mme (*).L'un des points les plus importants de son "aqda,de ce credo sur lequel il faisait prter serment sesadeptes (3), c'est la croyance un Imam connu {ma"-loum), au sens que donne cette expression la doctrinedes chi''ites. Celui qui meurt sans avoir connu l'Imam de son temps, meurt d'une mort de djahiliyai^hy. Or, Gha-zli ne s'est pas seulement prononc contre la doctrine deVnam ma^oum dans des crits spciaux de polmique :

    (1) Mas'oudi, Prairies d'or, d. Pais, vr, p. 21, 8 ; cf. Al-Mo'Ui-zilah, d. T. W. Arnold (Hydei-ibad, 1898), p. 16, 11. CjJ>

    ...-y^ JjjAjilkJl 333 >^.aJ1 ,3150 U^^(2) uvres, p. 28, 4, in fine, cf., p. 108, 11 ss.(3) IhicL, p. 25, 15 ss.(4) IhicL, p. 246, 257, 12. ' "(5) Biog., p. 9, 8 suiv. ; 55, 14 ; 59, fia ; uvres, p. 252, 2 ; 257, 9.(6) Al-Gliahrastui, d. Gureion, p. 147. 3 : ^.Sja^. ^j Cj^ ^^

    '^>^.& ^JS> ^^J^. *Ja Cj^ ^\y* viX33^^a ^^jjj>\^ SL^ Cj^-o

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    26/118

    il lui a encore consacr dans ses mmoires autobiogra-phiques un chapitre particulier de polmique, dans lequelil numre en outre tous ces crits spciaux(i).D'autre part, dans les principaux traits de sa doctrine

    thologique, Ibn Toumert se rattache des ides et despoints de vue, qui sont en opposition avec la situationthologique du Maghreb et qui avaient pris corps dansl'cole de Baghdad et particulirement dans la doctrinede Ghazli.Nous allons chercher, dans le chapitre suivant, jeter

    quelque lumire sur cette partie de l'histoire thologiquedu Maghreb.II

    A l'poque o se placent les vnements qui font l'objetde cette tude, l'Islam maghrbin tait domin par l'unedes coles {madzhib), dont l'orthodoxie musulmanereconnat galement la valeur, lemadzhabqm porte le nom

    ^' de Mlik ben Anas. La victoire complte de l'cole mal-kite dans l'Afrique duNord, date de l'anne 440 (1048) envi-,ron. La doctrine mdinoise s'y tendit et s'y affermit,grce aux adeptes maghrbins de Mlik et ceux de sondisciple ""Abd al-Rahmn ibn Qsim, mort au Caire en 191(806), qui avec sMoudaiowana donna au rite malkite sonlivre fondamental ; cet ouvrage dut particulirement sonautorit, en Afrique, aux el+orts heureux de Sahnonben 'Abd al-Salm'2) (160 = 776 240 = 854). Au mme

    (1) Al-Mounqidz min al-dhall (ie Caire, 1309), p. 19.(2) Cf. O. Hondas; Sahnoun, im jurisconsulte musulman du msicle de riigire, dans le Recueil des Mmoires publis par les pro-

    fesseurs de l'Ecole de Langues Orientales roccasiou du Centenaire(1895). -

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    27/118

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    28/118

    24. ';'-..Il ne faut point, comme on l'a fait trop souvent et

    rcemment encore (i), partir de ce principe que les repr-sentants du rite malkite ont apport Ttude du hadithune ardeur inconnue des reprsentants des autres rites,particulirement des hanfites, et en conclure que dansle dveloppement de la lgislation, ils repoussaient abso-lument l'emploi de ce que l'on nommait le ray. Les juris-consultes musulmans, ainsi qu^on l'a dit plus d'une. fois,estiment au contraire que la doctrine malkite, commecelle de T'^Iraq, est caractrise par ses tendances versle ray, et ils ne font sous ce rapport aucune diffrence entreles deux doctrines. Si l'on se demande quelle fut l'impor-tance que dans la pratique le fiqh malkite reconnut auxtraditions, particulirement en Espagne et en Afrique,on acquiert la preuve trs nette qu'aprs la victoire de leur.rite, les fouqaha malkites se sont occups fort peu destraditions et qu'ils ont emprunt tous leurs matriauxd'tude, aux manuels de fourou", dont l'autorit taitadmise par l'cole.Nous pourrions mme trouver eh Espa-gne des exemples d'un vritable mpris pour les hadiths.La doctrine malkite fut introduite en Espagne vers la findu deuxime sicle de l'hgire ("2). On avait suivi, jusque l.

    (1) En ce sens, August Millier lui-mme, dans Der/s?am hn Morgeniind AbencUand, n, p. 464; Broekelmann : Gesch. der arah. Litte-ratur, i, p. 179.

    (2) On considre d'ordinaire Yahya ben Yahya al-Mamoudi commecelui des lves de Malek qui introduisit le madzliab malkite enEspagne, sous le Khalife Hicliam (mort en 796) : Dozy, Gesch. derMauren in SjMiiieji, i, p. 281. Sur les divergences enfre les ides deYahya et les doctrines de Malek, voir Ibn al-Faradi, d.^Godera, ii,n" 1554. Les sources arabes mlent ces vnements le nom de

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    29/118

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    30/118

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    31/118

    .-,-" 27' ge.ait compltement d'tudier le Coran- et les haditfas duProphte et que les savants les plus illustres ne consa-craient nullement cette tude l'ardeur qu'il convientd'y apporter W.L'tude exclusive des fourou" n'eut point pour seul

    rsultat de gner l'accs, aux sources, c'est dire auxhadiths: elle supprima en mme temps l'tude delasciencedes MoitZ al-fiqh, qu'avaitfonde Al-Ghafi''y, dans sa cl-bre Risla fi Hlm ouotd al-fiqh (2), en exposant excellem-ment la mthode suivre pour utiliser dans le fiqh les ma-triaux fournis par les hadiths et pour en tirer les cons-quences pratiques. Cette tude tait le meilleur moyend'viter le machinal taqld, o tombrent, de raresexceptions prsi^), les juristes de cette poque. AuMaghreb, l'tude des Ouol tait en gnral absolumentnglige NL> j>. Jst^j . _

    cl lUU.De telles exceptions sont signales par l'expression : ^..^-ftijo j^l^-ft-XJ\ tsjpj y^^^J '>ss.\^\ t_,->_ftij^ , par ex. Ibn al-Faradi, n"; 1047.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    32/118

    28 ces une rforme, il ne pouvait puiser une meilleuresource qu' la Ihya de Ghazli ; celui-ci n'avait-il point,en effet, contre des tendances analogues, mani lafrule avec une pieuse ardeur ? La plus grande partiedu KUab al-Hlm, dans sa Renaissance des sciencesde l'Islam, est. pour nous un document durable del'opinion qu'il professait l'gard des tendances quidominaient alors le monde du fiqhW. Il y considre lascience, ^ilm, comme le culte divin du cur, comme une prire intrieure, comme le moyen que possde la conscience humaine de s'approcher de Dieu (-). Ilaurait eu peine retrouver une semblable dfinitiondans le bavardage de casuistique o se perdaient lesgens qui, parmi leurs disputes canoniques et leurs subti-lits juridiques, prtendaient s'occuper de science reli-gieuse. Ce qu'ils nomment fiqli est pour lui une chose quin'a rien voir avec la religion ; ce n'est point une scienceen vue de l'au-del, Hlm al-akhira, mais une occupationtoute temporelle, Hlm al-dounia, un mtier comme tousles autres mtiers terre terre. Gomment pouvait-on s'imaginer que la science qui traite des lois du divorce, des conditions du mariage, des transactions avec paiement' anticip du prix de vente, de questions de location, de paiement comptant, etc., put tre une

    (1) Il veproduit ailleurs le mme jugement sur les tudes de fou-vou', par ex. dans le Ildjam cd-'awaniin, le Caire, 1309, p. 27, en.liaut : dans le trait parntique : Ya ayyouha al-ioalad .

    (2) Ihya, i, p. 48 : ^^^-Ji ^yi^^^^^l is^Lo^ ^_^Xi.J\ 'iA^ ,JuaJ\Celle dfinition rpond l'expression faqih cd-nafs, que Ton trouvepar ex. dans l'autobiographie d'Avicenne : \ ji\ ^_^.\^^ cJ^3^yj*J\ SuXA (Jf\ ^U >_AjJ\_5 ^^^-;j-*ca>X)\_5 ^ s.a3\ j_j_s . Ibn AbiOueybi'a, d. A. Miller, ii, p. i, 17,

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    33/118

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    34/118

    . 30 - peine un mdecin appartenant la foi musulmane !

    cette profession est toute abandonne aux juifs et aux chrtiens (1) ; en revanche, on se presse pour tudier le fqh, et l'art des discussions juridiques et la science des diffrencesqui existent entre les madzahib, ji^LJAa., ^j^Ls^ ; la mme ville est pleine de gens qui s'occupent rendre des fatwas et donner sur n'importe quoi des consultations juridiques. On ne se fait point volontiers mdecin ; car la science mdicale ne donne point le moyen d'administrer des fondations pieuses, des legs-et des biens d'orphelins; alors que le fqh mne des fonctions lucratives, qui vous font plus gros que votre voisin (2) . Voil bien la proccupation de l'ambitionterrestre et de l'intrt pcuniaire, que l'auteur ne cessede dnoncer en maints passages de ces analyses (=^). D'ail-leurs la littrature vient l'appui de sa thse : il existe,,en effet, toute une srie de posies didactiques o lesavantages de l'tude du fiqh sont clbrs au pointd vue de la carrire laquelle elle donne accs. Jusll-nien procure ici opes et honores. "^Oumara, dans une lettreo il adresse des remontrances son correspondant,peut donc dire : Tu n'appartiens pas la classe des fouqaha, pour pouvoir prtendre de grands hon- neurs('*). Dans la partie de ses mmoires o il fait lercit de ses annes d'enseignement l'Acadmie Nizha-miya, Ghazli dit qu' il propageait alors une science qui conduit aux honneurs et que, par ses exemples et

    (1) Ihya, I, p. /i2 infr; il revient souvent, sur ce sujet.(2) Ibicl. , 1, p. 20 et in, p. 370. s.(3) Ihid., I, p. 40.(4) Oumara du Yibnen, sa vie et son uvre, par H. Dcrenbourg,

    I, p. 460, dern. 1. ^iCi^^ fJ-^^ (_>*-u*sv l^a-jJl j^Y

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    35/118

    31-' par ses paroles, il y prparait les gens, de tout son pouvoir (1). Et si le Fiqh a pris une direction aussitemporelle, il l'attribue particulirement la situationirrgulire dans laquelle se trouvait le Khalifat : les titu-laires de cette institution, dont la lgitimit voyait chaquejour s'affaiblir son principe, avaient besoin de gens capa-bles de jeter, pour ainsi dire, sur leurs actes un voile delgalit; c'est cela que se consacrent les fouqaha, et41s y trouvent leur compte (2). Tout en affirmant queleur science est un moyen de se rapprocher d''Allah, ilsont, devant le matre, l'attitude la plus humble, pourgagner de grasses prbendes (3). Le fiqh devient ainsi unmoyen de faire triompher des tendances condamnablesau point de vue moral, et ses reprsentants les plus cl-bres n'hsitent pas faire servir leurs talents de casuis-tes des besognes o le droit est viol au profit deleurs desseins gostes. Ghazli en trouve un exempledans le Qout al-Qoulob, 'P^OM Tlib al-Mekki (*), ol'on voit le grand jurisconsulte d'Haroun al-Rachid, leclbre Abou Youssouf, recourir un stratagme pourviter le paiement annuel de la zekat : la fin de chaqueanne, au moment o la taxe tait tablie, il faisait pas-ser en bonne et due forme tout son bien sur la tte desa femme; puis, quand l'anne nouvelle parvenait safin, la femme transfrait de nouveau le tout son mari,si bien que les biens ne restaient jamais une anne

    (1) Al-Mounqidh, p. 30, 15; _j6JlsJ\ yJ^\ o^j^^ v*X)3 (^ Ci-JS^\jr^3

    (2) Ihya, i, p. 41.(3) Ibid., p. 56, par. 2.(4) IbicJ., p. 17.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    36/118

    - 3 -entire dans les mmes mains. Il vitait ainsi Tobliga-tion du zekat. Abou Hanifa ajoute cette remarque : C'est la logique du fiqh d'Abou Youssouf ! Quels jolistours il aurait su tirer du livre sur les fictions du droit du grand cadi Al-Khaa ? (i).Pour se donner l'apparence du savoir, ils se targuentsurtout de discuter les espces les plus rares (nawdir,gharaHU^)),Q\, ils y emploient la casuistique la plus vaine^^).Ce sont surtout leurs discussions publiques que Ghazliestime condamnables. Il y voit l'origine et l'occasion detoutes les mauvaises passions, la vanit, l'envie, la dla-tion, l'hypocrisie, les ambitions terrestres,.etc. ('*', et pardessus tout, le vain dsir de paratre. Ils cherchent surtout traiter des questions que l'on peut appeler al-ioubouliyt, c'est dire celles pour qui l'on bat la caisse et qui excitent l'attention publique. Dans ces dbats, ils peuvent taler tout au long leur talent de dispute. Mais ils ngligent, pour de semblables occu- pations, les recherches vritablement actuelles : ils disent de celles-ci qu'elles ne sont que vieux rappor- tages, khabariyt, que l'on retrouve dans tous les coins ; ce ne sont pas des ioubouliyt, avec quoi l'on fait du bruit (^). Pour parer de telles tendances d'une trom- peuse honntet, le cheiin a trouv le moyen de faire croire aux hommes qu'on peut donner une pareille

    (1) Voir Kitab al-hiyal, qui a t aussi imprim au Caire en 1316.(2) Il faut, noter qu'un moraliste juif, qui suit en cette matire lesmmes principes que Ghazli, Bakhya hen Pakouda, met aussi endehors du domaine des sciences religieuses l'tude des riTilDJ mSxi^

    (Chbhth hal-leh/tl/hth).(3) Ihya, y p. 43.(4) Comparez le chapitre intitul 'ijJ\JJc\ Cj^^ O^:^? ' ^> P- *^' ^(5) J/mL, I, p. 43.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    37/118

    33 -a science le nom de Fiqh(^) . Prends bien garde auxc( diables humains; quant aux vrais dmons, lu peux vivre sans les craindre, depuis que les hommes ont assum leur tche d'aveuglement et d'erreur (2) .On pourrait augmenter considrablement cette antho-

    logie des jugements o Ghazli stygmatise les tudes la mode. Chacun d'eux ramne cette conclusion, quela science des fouqaha, l'extravagant systme des/bw-row% ne rentre dans la catgorie des sciences religieu-ses, ni par elle-mme, ni par le but que se proposentses adeptes. Elle fait partie des sciences juridiques,a_j^j^-Jl -*_l , qui sont purement temporelles, puis-qu'elles dirigent tous leurs efforts vers les intrts dece- monde. Mais la religion est affaire du cjir, qui est tout fait en dehors de la sphre d'action du faqih(3) . Et ce n'est point du cur que sortent lesfourou^, et ce n'est point lui qu'ils vont, pas plus enleurs parties essentielles qu'en ce qui n'y est qu'excrois-sance parasite. Quiconque veut pratiquer la loi pouratteindre la vie religieuse, doit revenir aux sources etaller puiser directement l'eau vivifiante du Coran et dela Sounna; il lui faut cesser d'envisager la loi sous sonaspect temporel. C'est ce que ne font point les adeptesdes fourou" (^) ; le sage, qui, dans ses tudes religieuses,cherche Dieu, n'a rien faire avec ces matres de la loiterrestre.Le jugement ferme et svre que Ghazli porte sur

    cette doctrine et sur ses reprsentants ne va point jus-(1) Ihid., I, p. 32.(2) Ihya, i, p. 37.(3) IfncL, I, p. 17, 13; ^..a.J\ ^y_^ ^ ^is.^ ^^iJ^\ \^\_^(4) Ibid., I, p. 32 (sur le sens du mot jJLc).

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    38/118

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    39/118

    35 (f venue, il a abandonn ces ludes et il s'est mis s'oc- cuper de son me. Ne te laisse pas garer par les paroles de ceux gui prtendent que la fatvM est la base fondamentale de la loi et que l'on ne saurait en saisir les motifs, sans tudier la science des divergences des opinions, '27m al-khilf^^). Ghazli ne rabaisse la valeur de ces tudes que lors-

    qu'il a en vue le perfectionnement de l'me indivi-duelle , la vie religieuse et la connaissance de la reli-gion, Coran et Sounna, point de fourou" : telle est ladevise du thologien qui, dans l'lude de la loi, a pourbut le perfectionnement individuel.La campagne entreprise par Ghazli contre les tudesde fiqh et leurs applications pratiques pouvait tre^ nousl'avons vu, reprise sous la mme forme au Maghreb ;c'taient en effet les mmes tendances qui, l'poque onous nous sommes placs, caractrisaient la tournured'esprit des fouqaha d'Occident.La lecture du Kiiab al-'^ilm du Ihya "ouloum al-din,leur mettait devant les yeux comme un miroir o ilspouvaient aisment se reconnatre ; ce fait sufiSt expli-quer comment les fouqaha des princes almoravides cru-rent devoir poursuivre cet ouvrage. Les sources nousmontrent que leurs colres n'eurent point pour origineprincipale des motifs dogmatiques ; elles furent bienplutt allumes par la campagne de mpris que Ghazliavait mene contre les tout-puissants adeptes des fou-rou" et contre leurs subtilits pdantesques. Il y avaitune chose au moins qu'on ne pouvait lui pardonner,c'tait d'avoir appliqu l'pithte de fou aux gens

    (1) Jhya, I, p. 40.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    40/118

    - 36 -qui croyaient gagner par ces choses le salut de leurme(i).

    ~- D'une faon gnrale, les ides de Ghazli et les crits' dans lesquels il les exposait, ne reurent point toutd'abord au Maghreb un accueil' favorable. Gomrae nousl'avons indiqu plus haut, ce ne fut que plus tard que desindividualits isoles y subirent l'influence sans cessegrandissante du Matre et se laissrent pntrer de sonesprit. Le verdict ren^u par les Fouqaha pour la dfensede leurs intrts gostes ne put empcher, en effet, quecent ans exactement aprs Ghazli, l'tude des Oicolneft en honneur au Maghreb, ct des fourou^, et quel'on n'y tudit et commentt l'ouvrage de Ghazli sur les-Ouol : al-Moustaf min "Uni al-ouol^^).On entourait du nimbe de la saintet la fgure de cethomme, jadis accus d'hrsie, et l'on plaait son imageparmi celles des pres de l'Eglise les plus vnrs etdes thaumaturges les plus admirs de l'Islam. Mais, auMaghreb, les thologiens contemporains et ceux de lagnration qui suivit immdiatement, se montrrentrfractaires aux ides que Ghazli avait voulu servirdans ses uvres magistrales, et ils luttrent ardemmentcontre elles. Les conservateurs irrductibles ne pou-vaient s'accoutumer l'ide que le salut pt exister endehors des traits et des recueils malkites de jurispru-dence, encore moins la pense que le salut ft trou-ver partout ailleurs que dans les formulaires arides

    (J) Ithaf al-sadt; i, p. 161. ^ISla-'^Li ,|chJUJll J>-j.

    (2) Ahmed ben Mohammed al-Ichbili (moi't en 651 de l'hg.), fit unmoukhtaar (abrg) du moustafa; Abou 'Ali ai-Hassan al-Fihri(mort en 776), crivit sur cet ouvrage un commentaire, auquel Sole-man ben Daoud al-GharnAti (mort en 832), ajouta des. gloses.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    41/118

    37 qu'ils apprenaient par cur, qu'ils enseignaient, et dontles rgles leur servaient construire des chteaux decasuistique.Bien que ce ne soit point exclusivement Fattitudeiprise par Ghazli sur ce point particulier qui ait provo-

    ,qu l'opposition des thologiens du Maghreb, maisqu'elle ait t galement souleve par d'autres thsesthologiques de VIhya, nous voulons montrer par quel-ques dates de bibliographie comment les Maghrbinsdistingus se lancrent l'attaque du systme de Ghazli.En effet, ct des contemporains illustres, qui, pourainsi parler, aboyrent contre les crits de Ghazli, commele fameux qadi ""lyadh, nous troruvons ds crivains cl-bres de ce mme sicle qui s'empressrent de consacrer leurs ardentes polmiques des ouvrages spciaux :Abou Bekr ben al-Wali.d al-Tortochi (451-525), qui,dans une lettre un ami, avait mis le jugement quel'auteur de VIhya avait rejet la vraie foi (i), composaun trait o il se lana l'attaque de toutes les positionsde Vlhi/ai^'; un ardent Ach'^arite d'Elvira, Mohammedben Khalaf (mort en 537), composa un ouvrage intitul :J,lj._i3!^ jjaiO! ^ J,^'^V^ (J^^^ w^l^(3), et il est vrai-ment trange que Ghazli, que l'on peut- certainementconsidrer sans exagration comme le sauveur du sys-tme ach'^arite en pleine dcadence\(4), ait t en butteaux violentes attaques des adeptes mmes de cettedoctrine. C'est que s'il tait Ach''arite, il n'tait pointde stricte observance. En Dogmatique, comme en Fiqh,jxirare in verba magisiri lui et t odieux. L aussi il

    (1) Ithf, I, p, 28 j2xf.'^^ c?** "^-**^. D^ iXiJls(2) Al-Dhahhi (Bibl. hisp.-arab.), d. Godera, p. 138, linult.(3) Ibu al-Abbar,r/i7?ii7, d. Godera, p. 173.(4) ZDMG, XLI, p. 64.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    42/118

    38 disait la ncessit de s'clairer soi-mme aux sources dela lumire : et le sel mystique, qu'il. semait sur la dog-matique, donnait aux phrases fades de l'Ecole un gotque ne pouvait supporter le palais des dialecticiens.

    IPour lui, et nous y reviendrons surtout plus loin, le^ Kalm n'tait pas un but en soi et n'tait pas destin tourner la tte aux hommes. Ghazli n'tait point nonplus un franc Ach"=arite, de la tte aux pieds, et parmises propositions dogmatiques, plus d'une ne semblaitpas correcte aux Acha'^rltes pur-sang. Sa tendance aumysticisme cartait de lui par exemple Abou ""Abd Allahal-Mzari (1), commentateur de l'Imam. al-Haramen,dont il semblait s'tre jur de suivre mot mot lesparoles. Ce savant tait d'ailleurs un trange polmiste : Si je n'ai point moi-mme lu son livre, disait-il, j'ai du moins connu ses lves et ses adeptes. Chacun d'eux m'apportait quelque nouvel exemple de sa m - thode, et j'ai pu ainsi me faire une ide de son sys- tme et de son enseignement i^l Ce qu'il apprenaitainsi des doctrines qu'il prtendait combattre lui sem-blait tre largement suffisant.Nous voyons par l combien le sol tait mal prparau Maghreb pour les ides de Ghazli.Nous ne nous tromperons donc point en disant que ce

    furent les doctrines qu'il professait sut* l'importance accorder aux fourou", qui eurent une influence domi-nante sur la marche que suivit Ibn Toumert en exposantla loi. Dans son voyage en Orient, il avait appris

    '^ connatre la science des ouol al-fiqh, nglige en

    (1) Voyez sur lui Ftignan, iu Iraduclion du Bcajan al~Moghrih, i,469, note 4.

    (2ljthf, le.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    43/118

    39 Occident (1) : et elle lui enseignait comment, sans treattach un madhab, on pouva'it rechercher soi-mmela loi dans les sources. Sa dispute d'Aghmt eut pourbut de prouver aux fouqaha d'''AIi ben Youssouf benTachefn, ces grands hommes des fourou" , qu'ilsn'taient que des ignorants dans la mthodologie dudroit (2). II ne fait point porter la dispute sur les fourou",mais sur les ouol. C'est l l'important pour lui, si l'onveut arriver dduire d'une faon correcte les dtailsde la lgislation.Et dans la suite de ce morceau de polmique, il dve-

    loppe prcisment avec complaisance ce qui appartient la science des ouol al-fiqh, avec ses enchanementsstrictement logiques et l'application de ses catgories l'ensemble de la science du droit. Les principes fonda-mentaux de la science des ouol sont exposs danscette partie de ses crits, et Ton peut recommander cepassage, jusqu' la page 62 de la prsente dition, ainsique les pages 106-109, 181-207, tous ceux- qui souhai-tent d'acqurir une connaissance approfondie de lamthodologie du droit musulman.Dans son expos des diffrents chapitres de la loi, ilse rfre exclusivement au Coran et aux Hadiths, jamais un code driv. Avec quelle apret il affirme ici sonopposition ces fouqaha, que nous avons essay decaractriser et qui, en dehors de leurs livres de fourou'^,tiennent,tout en mpris, mme l'interprtation du Coranet des Hadiths !

    L'esprit qui a inspir la cration des madahib est tout fait tranger au systme qu'il expose. Pour lui, la prati-

    (1) Biogr., p. 25, pnult.(2) uvres, p. 4, iiifi'. Bloyr., p. 41, 9 s.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    44/118

    ^0 que ne saurait concevoir de deux manires une seule etmme question. C'tait cependant parfaitement possibleselon l'esprit des coles de fiqh, qui, grce leur foidans les moudjiahidoun, tiraient la loi de sources qui nesauraient tre considres comme des sources autori-ses. En reconnaissant l'autorit des inoudjtaliidoun onest conduit, comme par degr, l'anantissement dela loi vritable. Et que l'on remarque ici par paren-thse qu'en exposant ces ides^ notre auteur est enopposition directe avec Ghazli,qui attache une grandeira-portance affirmer les principes de Yidjiihad et qui s'op-pose la thorie de l'imam ma'^oumW. Au contraire, IbnToumert efface le nom des moitdjtahidoun de la hirar-chie des savants du vritable Islam. Ils heurtent en effetses prtentions au titre d'Imam impeccable. La doc-trine suivant laquelle deux moudjiahidoun peuvent, surun mme point de droit, avoir un enseignement oppos,lui parat absurde (2). L'adhsion une cole juridiquespciale {iaqlld)^ il l'appelle ignorance i3). De semblablesides sont la mort des tudes de fourou".C'est encore Ibn Toumert qu'il faut faire remonterl'origine des doctrines de ses successeurs immdiats.Les principes qu'il avait poss servirent ses adeptesde base des progrs dont il avait d'avance trac lui-mme le programme.

    Ils se consacrrent avec ardeur l'tude des hadithset se refusrent reconnatre les madahib. On a dit d'''Abdel-Moumen qu'il fut v._,^J4 o^U^ ^^Ult , celui qui a(1) Mounqid, p. 16.(2) uvres, p. 25.(3) Ihid., p. 12, av. dern. contre le taqld. p. 227, 14.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    45/118

    4i aboli les divergences entre les madaliibW . Abou YaqoiibYoussouf, fils d'^Abd el-Moumen, savait par cur l'undes deux ahih. II rdigea pour . ses guerriers unrecueil de traditions sur le djihad(^), que l'on trou-vera en appendice de la prsente dition (p. 377 s.)-

    Ce. petit recueil ne saurait provenir du Iml '^khel-Moumen, car la suscription en est date de l'anne579, poque laquelle 'Abd el-Moumen n'tait plusdepuis longtemps de ce monde.- Mais ce ne fut que le troisime prince almohade quiprit srieusement en main la suppression des fourou".Il tira les consquences extrmes des ides que l'tudede la doctrine de Ghazli avait inspires Ibn Toumert.

    Alors disparut la science des applications juridi- ques (forou.");W tait un objet de crainte pour lesjuris- tes, et il ordonna de livrer aux flammes les livres du Rite (malkite), pralablement dbarrasss des (pas-ce sages provenant des) traditions du Prophte et du Koran. C'est ainsi que de nombreux ouvrages furent brls dans tous ses tats, tels par exemple la Modaiv-a-ivana de Sah'non, le trait d'Ibn Younos, les Neiodiret le Mokhiaer d'Ibn Abo Zeyd, \e Tahdhib d'el- Berdba'i, la Wd'ik'a d'C^^Abd el-Melik] Ibn H'abib et autres ouvrages analogues. Moi-mme, tant Fez, je les ai vu apporter par charges qu'on amoncelait et auxquelles on mettait le feu. Dfense fut faite de s'oc- cuper de spculation (ra'y) et d'en rien tudier, sous peine de ,chtiments svres. Certains des tradition- naires qui vivaient autour de lui eurent ordre d'extraire

    (1) Al-Marrkechi, p. 183.(2) ZDMG, t. XLi, p. 120,"'6.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    46/118

    42 -des dix recueils de ce genre spcialement connus : lesah'iK [de Bokhari et de Moslim], Termid'hi, le Mou-watia, les Sounen d'Abo Dwod, les Soutien deNis'i, les Sounen d'El-Bezzr, le Mosnad d'Ibn AboGheyba, les Sounen de Drak'ot'ni et les Sounen deBeyhak'i, des traditions concernant la prire et ce, quiy a trait, sur le modle des traditions recueillies parMohammed ben Toumert sur la purification. Le recueilqui fut ainsi compos par ses ordres, lui-mme le dic-tait au peuple et forait celui-ci l'apprendre, si bienqu'il se rpandit dans tout le Maghreb et tait supar cur de tous, grands et petits, car cette connais-sance tait rcompense par de prcieux cadeaux devtements et d'argent. En somme, son but tait deruiner la doctrine malkite et de la chasser entire-ment du Maghreb, pour amener le peuple ne pluspratiquer que le sens apparent du Kqran__et^ desTraditions ; tel aussi avait t le but de son pre et deson grand pre, mais ceux-ci, la diffrence deYa'^k'ob, ne l'avaient pas affich. Ce qui, mes yeux,prouve ce que j'avance, c'est le rcit fait par le JiafizAbo Bekr ben el-Djadd plusieurs personnes, de quije le tiens : La premire fois, dit-il, que je pntraichez le Prince des croyants Abo Ya'^k'ob, il avaitdevant lui le trait d'Ibn Yonos : Abo Bekr , medit-il, je rflchis ces opinions diverses qui ont tmises sur la religion divine : t'es-tu demand quellepouvait tre l'interprtation exacte d'entre ces quatreou cinq, ou mme davantage, proposes sur telle outelle question, et laquelle doit tre adopte par celui quin'est que disciple [et non chef d'cole] ? Je me mis lui expliquer ces difficults; mais, m'interrompant :Abo Bekr , dit-il, il n'y a. que ceci (montrant le

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    47/118

    43 Koran), ou cela (montrant les Traditions d'Abo Daw- od qu'il avait sa droite), ou bien encore l'pe 'i'.

    Sous le rgne de Ya'k'ob, on proclama ouverte-ce ment [le but] qui avait t tenu cach sous les rgnes de son pre et de son grand pre (2). ^)

    IIIIl rsulte logiquement de ce qui prcde que, partouto allaient rgner les ides d'Ibn Toumert, il n'y avait

    plus aucune place o le fiqh malkite pt exercer sonautorit ; sa thorie de la loi, telle qu'il l'enseignait,tait exclusive de la lgalit des madhib et de leursmanires diffrentes (ikhtilaft), de rsoudre les ques-tions secondaires de la lgislation (fourou").En mme, temps, le rformateur enlevait toute raisond'tre au principe qui avait permis aux divers mada-bib d'aboutir des diffrences d'interprtation, c'est dire au ray al-moudjtahidin, la pense indpendante, l'opinion fonde sur un enchanement spculatif, os'taient plu des matres rputs comptents pour four-nir de leur propre fonds une solution doctrinale auxquestions que ne rsolvait point un texte rvl. Il taittout naturel que cette solution varit avec les diffrentsmoudjtahidoun ; et c'est l ce que Ibn Toumert suppri-

    (1) Il y a de vieux exemples de ce mot. Dans Tahari, m, p. 1469,le KhaJife Mcimoun dit : uA-yj^l V^ iS^^3 cJ^J^ ^ys^\ J^^^ssr'\ j^j^\-ti . Une dclaration du sultan esiJagnol Abou'l-Walid estcalque sur le mme modle ; M. J. Millier : Beitrge zur Gesc/iicheder loestUchen Araber, p. 128. Cf. Ghazli ; Ildjam al-'aioanim :le Caire, 1309, p. 21, 8, qui dit des premiers adeptes du Prophte :

    (2) Al-Marrakechi, p. 201-203, traduction 'agnan.

    y

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    48/118

    - 44 niait en refusant la rflexion subjective personnelle,au raisonnement, toute influence sur le dveloppementde la lgislation.

    Il ressort de sa dispute d'Aghraat avec lesfouqahaW,que l'lment essentiel de sa doctrine sur les fonde-ments du droit peut se rsumer en cet axiome : al'aqlleisa lahou fi al-char'^ madjl, c'est dire qu'on ne peut pas accorder au raisonnement la moindre place dans les lois de la religion (2) . Ce sont les sourcesobjectives, matrielles, du droit., que l'on doit prendrepour base de la lgislation, c'est dire le Coran, la tra-dition transmise de faon authentique, et le consensusde la oic77mai^), fond sur des traditions qui, traverstoutes les gnrations, ont. t soutenues par des autori-ts nombreuses formant une chane ininterrompue(tawiour). Ainsi se trouve absolument exclu l'lmentsubjectif, personnel, ce qu'il appelle dhann, hypothse,opinion, et qui, devons-nous ajouter, a, sous la formedu consensus de la oumma, trouv sa place ncessaireparmi les sources rgulires du droit, ds le dbut desspculations juridiques dans l'Islam. Que l'on ne croiepoint que ceux qui rejettent le plus nettement tout l-ment du dhann soient partout ceux-l mmes qui invo-quent le plus nergiquement le point de vue tradition-naliste. Nous trouvons la preuve du contraire dansun trange document de la littrature juridique del'Islam, dont il faut tenir compte ici, bien qu'il ait vu lejour prs de deux cents ans aprs Ibn Toumert. Nos' (1) uvres, p. 4, 9 s.- (2) uvres, p. 17, 3 ; comp. p. 44, 1 : fi'l-sani' dans les chosesfondes sur raulorit ti-aditionnelle ,p. 128, 6, 146, 14 ss.^ (3) McL, p. 16, 4 av. dern. ; 18, 8.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    49/118

    - 45 -^lecteurs connaissent le nom et savent l'autorit en tho-logie d'Ibn Qayim al-Djaouziya, ardent lve et adeptedu grand professeur hanbalite Taq al-Dn Ibn Teimiya.Matre et lve taient, en dogmatique, des partisans sirespectueux des paroles rvles et de l'exclusive lgalitde leur signification littrale que, quatre cents ans aprsl'uvre d'apaisement d'el-Ach'^r, ils pouvaient tre,sans trop d'injustice, accuss de iadjsm et de tachhh^^).Nous les trouvons aussi parmi les adversaires les plustenaces de l'intervention du itaZm. C'est sur Ghazliqu'eux aussi rejettent tout le fiel de leur haine (2). Tradi-tionniste fanatique, Ibn Djaouziya crivait en mmetemps un livre de droit sous le- titre de: al-iourouqal-hikmiya fi l siysa al-chaV^iya, Les chemins lgaux du gouvernement religieux.Cet ouvrage, que l'on peut lire maintenant dans unebelle dition imprime (3), ne traite point de physiogno-monique (firsa), comme Brockel-mann l'a dit sur la foidu catalogue de manuscrits de Gotha (*); mais l'auteury manifeste son dessein de montrer que depuis lestemps primitifs de l'Islam les rgles du droit n'ont past fondes exclusivement sur l'vidence juridique pure-ment objective, mais qu'elles ont pu l'tre aussi sur la pen-se subjective, intrieure, sur une impression, sur desamri (indices). Nous voyons donc qu'il n'a point senti

    Vi(1 ) Schreiner : Beitrage zur Geschichte (1er theoloc/lscJien Beice-gungen im Islam, Leipzig, 1899, p. 76-108 (= ZDMG. lu, 541 suiv.,

    Liu, 59 suiv.).(2) Les jugements ports sur lui ont t runis dans Alos :

    Djla' al-'aynein. Boulaq, 1298.(3) Le Caire (Socit littraire), 1317.(4) Geschichte der arahischen Litteratur, ii, p. 106, n 27. Dans cemme passage, les n" 7 et 27 sont aussi dsigns lort comme des

    ouvrages diffrents.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    50/118

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    51/118

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    52/118

    48 plus faiblement fondes, mais seulement en vertu d'unal qui leur prte cette force.Notre auteur, au cours de cette discussion, trace un

    expos trs serr de la nature de ces deux groupes detraditions, de leurs varits- et des conditions exigespour leur validit ; c'est un trait mthodique du rlequ'elles jouent dans la pratique juridique (i) et qui-constitue l'une des questions capitales de la science desou'oul. Ces pages nous montrent aussi comment cecontempteur du ray, ou comme il l'appelle, du dhann,accepte les traditions tort et travers, les unes commedes sources de valeur absolue, les autres comme dessources de valeur relative. Il va jusqu' polmiquercontre les gens de l'Iraq qui repoussent les traditionsinterrompues fmaras7J (2).Parmi les traditions de tmoiour, ce sont celles des

    Mdinois qu'il place en premire ligne,- et qui sont pourlui la source impollue de la loi, selon l'esprit du Pro-phte et de ses compagnons. Tout ce que les savantsce de Mdine ont rapport, et tout ce d'aprs quoi ils ont dirig leurs actes, voil. le droit chemin. L'Islam, les lois, le Prophte et ses compagnons existaient Mdine en un temps o sur aucun autre point du globe on ne pouvait trouver ni religion, ni prire, ni appel la prire, ni trace de lois. A cette poque, la vraie religion n'exis- tait ni en Iraq, ni dans les autres pays. Donc, les gens de Mdinepeuvent, ajuste titre, servir pour nous de preu- ves contre tous les autres. Mais quand quelqu'un vient la rescousse, en disant: Nous avons cependant recueilli

    (1) uvres, p. 47 s.(2) uvres, p. 53 s.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    53/118

    ' - 49 -ds compagnons des propositions mises par le Pro-phte, gui ne concordent point avec la pratique mdi-noise; pourquoi donc, les Mdiriois dans leur pratiquedu droit se sont-ils carts de ces traditions ? Si quel-qu'un fait cette question, nous pouvons lui rpondreainsi. Cette contradiction peut s'expliquer de troismanires diffrentes : a) ou les Mdinois ont montr l'gard de ces traditions une opposition consciente etintentionnelle ; b) ou ils l'ont fait par ignorance (doncinvolontairement) ; c) ou, enfin, ils y avaient tconduits par des raisons licites. Supposer seulementla premire cause est une absurdit, car il enrsulterait que les gens de Mdine seraient exac-tement le contraire de ce que Dieu mme a dit qu'ilssont, c'est dire des adeptes du Prophte, qui mar-chent d^nslavoie droite . Il est galement impossible d'accepter la secondeexplication, car nous savons quel zle les Mdinoisont dploy pour la religion, et qu' Mdine toustaient dans l'entourage du Prophte (et qu'ils ont dainsi connatre sa volont). Reste la troisime expli-cation. Il peut y avoir raison licite d'opposition, soitquand le contenu de la tradition envisage a t lgale-ment abrog, soit quand les traditions en question sontsouponnes d'tre fausses ou interpoles ou n'exci-tent pas une confiance sufifisante. Sans aucun doute, lapratique des Mdinois fournit donc des argumentscontre tout ce qui lui est oppos. Et pour donner

    cette dmonstration plus de valeur, on allgue l'exemplede l^lve d'Abou Hanifa lui-mme, du partisan dtermindu ray, Abo Youssuf, quand, au sujet des divergencesqui existent sur l'importance du moudd (modius) quiapparat si frquemment dans la loi, il s'incline devant ce

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    54/118

    - 50 -que les gens de Mdine ont dcid en cette matire l*)'." Ceserait le vritable moudd nabaioi^'^).

    Il- est trs possible qu'en prsentant ainsi la traditionet la pratique mdinoise comme le meilleur guide de laloi, on ait insidieusement cherch obtenir une sorte de captatio benevolentise de l'cole malkite dominante,dont le pre, Malik ben Anas, tait Valmm dr al- hidjraii.K l'poque o le droit musulman commence se dvelopper, l'cole mdinoise est constamment enopposition avec l'cole de l'Iraq. Ibn Toumert se rfrecomme un texte canonique fondamental, la Mou-watta(3), cl des recueils de traditions de Moslim,qui est cit le plus souvent, d'al-Bokhr, auquel il faitles emprunts les plus tendus, d'al Tirmid, d'AboDawod et d'al-Nasa'^i ; ce dernier n'est cit qu'une seulefois (p. 84, 18). Il ne renvoie jamais des travaux de codi-fication. Car c'est son principe de prsenter la loi del'Islam d'aprs les sources traditionnelles, et non d'aprsles ouvrages de fourou" ('^).D'une faon gnrale, il ne rentrait point dans lesplans du rformateur de faire de son livre un traitde droit. Il n'a trait dans ce domaine que les chapitresde laprire(S), del purification (6) du butin c^), de l'inter-diction du vin(8). Les autres parties traitent exclusivement

    (1) uvres, p. 48 infr 49 infr.(2) Muham. Studien, ii, p. 22, note 6.(3) uvres, p. 78, 7 ; 86, 1 ; 91, 8 ; 118 pnult. ; 129, 15.(4) Il se rfr (p. 97, 3 infr; 101, 14 ; 103, 5 infr), l'cole des

    Chafltes, dont il accepte le principe de l'istihb, p. 135, 10; 138,1 ; 156, 5 infr.\ (5) uvres, p. 63 ss.

    (6) P. 280 ss.(7) P. 347.(8) P. 363 ss.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    55/118

    - 51

    f des questions concernant les 02

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    56/118

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    57/118

    53 ciaux(i), nous le trouvons entirement du ct de l'colezahirite(2).Tout en n'admettant point le qiyas parmi les principes

    d'o l'on fait sortir la loi, tout en donnant une thoriepntrante (') des diverses sortes de mauvais qiyas, il nes'en tient point cependant la forme qujB le fondateurde l'cole zhirite, Dawoud ben '^Ali, a permis sous lenom de qiyas djali (analogie vidente)''*). Dans le cas oles choses que l'on compare appartiennent des catgo-ries juridiques parfaitement identiques, ou encorequand dans une loi dtermine la lgitimit de l'analo-gie rsulte des termes mmes employs, il ne faut point priori dcider qu'il n'y a point qiyas charH. Ce que l'ondoit exclure, c'est l'emploi spculatif de l'analogie, leqiyas qli, avec ses diffrentes modalits (S).Nous avons prcdemment mis l'hypothse que IbnToumert avait connu les crits d'Ibn Hazm (mort en456} (6) ; elle s'appuye sur deux ordres de faits: a) sur lesconcordances que nous pouvons constater entre sesides et celles du grand savant zhirite d'Andalousie;on retrouve chez lui par ex. ce qu'Ibn Toumert a dit desnoms de DieuO; b) et sur les polmiques qu'Ibn Tou-mert poursuivit en faveur des doctrines qu'Ibn Hazmavait tout particulirement dfendues. Il attaque par

    (1) uvres, p. 38; 99, 4; 101, 1 ; 131, 2.; 155, 13; c'est toujours le

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    58/118

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    59/118

    55 dogmatique ach'^arite ; elle devait remplacer ratta-chement crdule l'interprtation verbale, anthropo-morphique, qui tait gnralement admise dans ce pays,et qu'il dclara hrtique, mconnaissant Dieu(i). Enface de ces doctrines, il plaa son iaouhid, expressionqu'il emprunta la thorie mo"=tazilite. Les MoHazilitesdonnaient, en effet, le nom de iaouhid leur dfinitionde l'ide de Dieu et leur faon de concevoir lesattributs divins ; ils exprimaient par l qu'ils ne recon-naissaient point l'existence d'attributs ternels attachs l'essence de la divinit et qu'ils mettaient au premierplan l'unit de pette essence ternelle; ils repoussaientla croyance en des attributs accessoires ternels, ce qui,d'aprs eux, quivalait admettre la pluralit de l'essenceternelle. Parmi les rsultats qu'avait eus son fructueuxvoyage d'tudes et dont il saisissait volontiers l'occasionde se faire gloire (2), aucun n'eut plus d'importance pourlui et pour toute sa carrire que la place qu'il donnait auvrai croyant dans les questions de dogme.Dans l'auditoire des thologiens illustres de Bagh-dad(3), Ibn Toumert apprit connatre toutes les subti-lits des questions alors controverses (*) dans le kalm.Il s'appropria tout spcialement les dfinitions quidoivent faire concorder les expressions anthropomor-phiques des textes religieux traditionnels avec la

    (1) Biog., p. 57, 3.(2) Nous faisons ici allusion une digression un peu tire par lescheveux sur les mathmatiques et ixutres sciences profanes. uvres

    p. 60-61.(3) On mentionne surtout encore 'AU ben Mohammed al-Tabar,connu sous le nom de al-Kiy al-Hars (mort en- 504), disciple derimam al-Haramejm. (Biogr., p. 15, 25 ; 25, 4 av. dern.).(4) Sa profonde connaissance des finesses des dfinitions d'cole

    nous apparat dans ses uvres, p. 195, ss. et ailleurs.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    60/118

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    61/118

    57 sang), des kafir n'est heureusement estime hall, qu'enthorie : mais ses biens sont hors la loi. N'exerce-t-onmme point contre lui toute la rigueur du texte de la loi,garde-t-ontout d'abord envers lui une attitude d'expecta-tive, prise au srieux, cette expression de kafir n'entranepas moins pour un musulman les consquences socialesles plus graves. Un tel homme est comme excommuni ;on ne peut manger avec lui la mme table ; on ne peutfaire alliance avec lui; son mariage consomm avec,une musulmane est nul ; on ne saurait faire la prire,quand c'est lui qui la dirige; on vite de l'approcher;son tmoignage n'est pas valable ; toutes les oprationsjuridiques dans lesquelles il intervient, sont sans valeur ;la prire des morts mme n'est point faite sur lui. Par,trois fois, on doit chercher le ramener ; si cettetentative ne russit point, il est considr comme unkafir endurci; C'est ainsi que le clbre mystique ""Abdal-Qadir al-Djlni dpeint la situation de l'homme qui, \/'avec les Mo'^tazilites, par exemple, croit la cration duCoran (1). G soup, tait en mme temps un adepte de la

    , doctrine hanbalite.Du moment o la qualification de kafir entranait detelles consquences, on comprend que des personnagesrflchis, qui voyaient dans la vie religieuse une graveactualit et non point des exercices de sophistique, n'aientappliqu la dnomination de kfir qu'avec" une granderserve. Ils posrent en principe qu'on doit hsiter

    (1) Dans son ouvrage Al-Ghounya : ^\ j_j^_ls.'* \ * cj ,^j-^ '

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    62/118

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    63/118

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    64/118

    - 60 -de rsoudre cette question W. L'cole dominante nestyg-matisait point, il est vrai, du nom de contempteurs de Dieules pieux personnages attachs l'ancienne foi. Mais ily avait des Ach'^arites qui soutenaient cette opinion ;il y en avait du moins qui poussaient l'intolrancejusqu' dclarer que quiconque n'acceptait pas leursdfinitions, n'avait point, de la divinit, une conceplioacorrecte. L'intervention de Dieu dans l'activit del'homme et dans les incidents des grands phnomnesnaturels, par exemple, devait tre comprise en ce sensque Dieu, en chaque atome du temps, cre pour le sujetagissant Taccidence de l'acte; quiconque s'en fait uneautre ide, quiconque, par exemple, peut attribuerl'activit terrestre une facult d'action prtablie parDieu, celui-l nie que Dieu agisse activement sur les

    {[] Cf. Iin Hazm : Kith al-milal ical-nihal, ii (man. de Leyde,n" 480), fol. 28, recto : C. -^^^

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    65/118

    6i choses (1); sa croyance en Dieu n'esl donc point parfaite.C'est ces coles ach'arites extrmes qu'Ibn Toumertse rattachait (2), et il ne se contentait pas d'exprimerthoriquement ces ides; il tait bien rsolu en tirerles consquences pratiques.

    Or, selon les thories orthodoxes, c'est le chef del'tat islamique qui est responsable devant Dieu de larectitude de la situation religieuse, en doctrine commeen pratique. Le souverain est un pasteur, et il est respon-sable pour son troupeau t^).Ainsi les souverains almoravides devaient rendre

    compte de la conception matrialiste que se faisait deDieu la masse des habitants du Maghreb, et qui tait encontradiction avec le vritable monothisme, tel que lesdogmatistes l'exigeaient; eux seuls devaient tre rendusresponsables du tadjsim et du iachbih'de leurs sujets. Ilfallait combattre les Almoravides, puisqu'ils taient' lacause des hrsies qui persistaient dans le dogme. Ilsralisaient un rgime sans Dieu. Contre eux, la guerretait djihd fi sabl Allah.

    C'est ce point de vue dogmatique qu'Ibn Toumert seplace pour rejiverser le gouvernement rgnant.Du moment o la vieille conception de Dieu, avec soniachbh, tait dclare koufr, incrdulit, le combat qu'onlui livrait ne pouvait plus tre considr au point de vueinoffensi d'une querelle d'cole, mais sous celui du droitdel guerre. Parmi les prtendus reprsentants du ratio-nalisme le plus libral de l'Islam, parmi les Mo'^tazi-lites, il y avait des matres qui enseignaient : |i>! j^l ^

    (1) Maimonide, Dallat al-h'irn, i, ch. 73, propos. 6 (conclusion).(2) Ibn Khaldoun, Bioc/., p. 57, 3. '(3) Muhammed, Studien, \i, p. 68.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    66/118

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    67/118

    63 aous le trouvons tout voisin de la conception mo^tazi-lite. Il avait emport, des salles d'cole des mouiakalli-moun vers sa patrie maghrbine, une pe hors dufourreau.

    Pour mieux comprendre ce mouvement, nous jette-rons un coup d'il sur l'attitude que les thologiens duMaghreb avaient prise, jusqu'au v" sicle de l'Islam, enface des enseignements de dogmatique spiritualiste qui, de rares exceptions prs, rgnaient alors en Orient.On peut dire, d'une faon gnrale, que ce sont choses

    dont ils ne se proccupaient gure. Dans une phrasedevenue clbre, celui qui fut pour eux le pre de l'Eglise,Malik hen Anas, leur impose comme condition de resterindiffrents toutes les subtilits dogmatiques; on doitcroire la parole crite, et ne point raisonner sur laforme sous laquelle on doit se la reprsenter. Cette atti-tude fut, dit-on, le mrite des salaf, c'est dire de lapremire gnration de l'Islam. Tout confiant en lavrit littrale de la parole de Dieu et renonant avechumilit invoquer le pouvoir de la raison humaine, ondoit rpter ce qui est crit; et le tenir pour vrai en sonfor intrieur; que nul ne se proccupe des modificationsque ces paroles pourraient subir.par l'interprtation. Lalettre du Coran repousse la ressemblance de Dieu avecla crature; d'autre part, il lui reconnat les attributs dela crature matrielle : que l'on rpte ces deux ensei-gnements paisiblement et d^une foi humble.Rsoudre les contradictions et faire concorder les

    antinomies n'est point le rle du croyant ; on doit fuir

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    68/118

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    69/118

    65 leurs conceptions religieuses, s'en tiennent la lettredes livres traditionnels (^s n'en admettent aucune expli-cation rationnelle (2), et vont mme jusqu' repoussernergiquement tout lment de recherche spculativedans les questions de dogmatique (3).En consquence, les iouqah qui ngligent toute tudeindpendante des sources et s'en tiennent servilement leurs codes de /owroM'^, ont reu le-nom de p-^^' hjA^i^).Ghazli dsigne sa faon, sous le nom de elJjJ! h^L^i^),les thologiens qui mettent le salut des croyants dans lapratique extrieure des prescriptions de la loi et n'ontaucun sens de la vie religieuse intrieure. Les tradition-

    (1) Sur les Haclnoiya ou Hachaiciya, nous n'avons encore queTexcellente tude du regrett savant hollandais, G. van Vloten : LesHaclnoiya et Nahita^(d-dnH les Actes du onzime Congrs interna-tional des Orientalistes. Paris 1897. Troisime section). Il y a exposles diverpes considrations qui peuvent expliquer cette dnominationobscure de la secte. A ces explications, on peut en ajouter uneautre, mentionne par des savants orientaux. Les adeptes de lathorie antropomorphique auraient reu le nom de ^ i^ *ivr- ,parce que ses adhrents, qui' suivaient les leons de Hasan Bari,auraient t renvoys par lui des premiers rangs qu'ils occupaient,vers les cts ^^ *oU) .-] de la salle de cours : (J,l a ^ ... s

    l ^.U> ^\ A_iJi.i\ 1 M. (J,\ j^^lyb \_5>. UasLco Ithf al-sdat, ii,p. 58.'

    *-

    .

    (2) De mme dans le Judasme, Yosef ben Aqnin appelle Hachioiyaou Zahiriya, ceux qui repoussent' toute interprtation allgorique dela Bible (p. ex. du Cantique des Cantiques) : Steinschneider in Erschund Griiher, Encyclopdie der Wissensch, ii* seet., t. 31, p. 55 Ma.

    (3) Agh. IX, p. 112, 3 cp. Philosophie et Thologie d'Averros :

    (4) 'Imd al-din al-Soukkar, in Jthf al-sdat, i, p. 285.(5) Ihya, i, p. 39, 2.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    70/118

    66 nistes crdules et sans critique, qui ajoutent foi toutesles lgendes et toutes les fables, sont : J^l 'iJj^(1) v^ J^l . Ghazli appelle l'uyre des Ikhouan al-afa'isuAsi\ h jLcs. (2).

    Il ne faut point supposer cependant que si un vote ett mis au Maghrebpar le suffrage universel, il y auraiteu unanimit en faveur de la doctrine des Hachwiya. Eneffet l'exclusivisme avec lequel une orthodoxie intransi-geante refusait brutalement tout accommodement, rendaitimpossible l'existence d'une thologie modre, qui,comme l'ach^arisme en Orient, et pris une influenceprpondrante; il poussait ainsi en Occident les partis l'extrme. Tous les gens qui entreprenaient le voyaged'Orient pour y gagner la science, ne reculaient pointavec tremblement devant les bida'^ de l'Orient (3), bien quece ft l'attitude de plusieurs savants voyageurs duMaghreb, par exemple de Tortouchi et d'''Abdari (*); tousne revenaient pas en. Occident sans avoir subi l'influencede l'tat o ils avaient trouv l-bas les croyances ; tousne rapportaient point dans V'adoualaiioi nave des salaf.Au iii^ et au iv sicle, plus d'un voyageur revint d'Orientavec les croyances moHazilites, qu'il avait puises direc-tement l'enseignement des matres mo'tazilitesl^);penseurs isols, qui ne pouvaient troubler l'onde purede l'orthodoxie et qui ne rpandirent point autour d'eux

    -- (1) Voir des exemples dans mes Ahhandung'en sur arbischenPhilologie, il, p. xc, note 2. ,

    (2) Mounqids, p. 19, 18. Cette dnomination est aussi applique auxgnostiques abens, par Masoudi, Prairies d'or, i, p. 199 iv, p. 64.^ (3) ZDPV, xvu, p. 116; Revue de l'histoire des religions, xxi,p. 296.

    (4) J'ai donn les noms de quelques-uns d'entre eux, in ZDMG, xli,p, 65, note 1.

    (5) Il3n al-Farudh, i, p. 405 n 1401.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    71/118

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    72/118

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    73/118

    - 69 de libre pense, qui prit le nom de Masarriya^\). Cettecole parat tre tombe, par pur esprit d'opposition l'Islam, dans les bizarreries les plus ridicules (2). J'aiindiqu, dans un autre travail rcent, que certainsadeptes de la Masarriya avaient pris comme orientationde la qibla celle du soleil levant au lieu de la directionde la ka'^ba, et avaient reu pour cette cause le nom ded}il-al-iachrq(^\A la mme poque, les crits des Ikhouan l-afafurent introduits au Maghreb, et le mouvement qui les

    rpandit et les fit adopter est intimement li au progrsque faisait alors la libre-pense. En effet, mesure quela thologie officielle renonait plus compltement toute recherche spculative en matire de dogma-tique, et qu'elle s'obstinait se tenir l'cart ducourant rationaliste, les libres-penseurs perdaient toutscrupule, se libraient de toute considration religieuseet mettaient des thories, qui approchaient tout prs dupoint o l'on renie compltement l'Islam et o il n'y aplus aucun accommodement possible avec la religionpositive. C'est alors, en effet, qu'apparut en Espagne lemouvement sceptique qui soutient le principe de l'galevaleur des preuves (iakfou al-adilla), et dont lesadeptes repoussaient priori la possibilit de toutsavoir certain ; alors aussi on pouvait mme voirs'lever, contre une orthodoxie intransigeante, des repr-sentants de la religion universelle (al-din al-koulli),

    J (1) Dozy : Geschichte der Mauren in Sjicmieyi, ii, chap. 13.(2) Cf. Sclireiner : Der Kalm, p. 3.5, note 7. 11 serait trs dsirable

    ({u,e l'on runt les thories attribues aux Masarrites dans lespolmiques diriges contre eux. On pourra alors seulement donnerun tableau d'ensemble de ce mouvement.-

    (3) WXKM, XV (1901), p. 324, note 2.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    74/118

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    75/118

    71 -la doctrine ach'^ari te et, pour ainsi parler, construit unpont qui permettait de passer de l'orthodoxie musulmane la pense libre et et mis des formules qui rentraientdans le cadre des enseignements de la religion tradi-tionelle.Pour avoir une vue nette de la vie religieuse, il est

    utile.de s'arrter un instant devant cet trange tableauet de rechercher, l'poque qui nous occupe, quellesfurent les consquences qu'entranrent pour le com-mun peuple des croyants l'un et l'autre de ces mouve-ments de la pense.

    VLes gens du kalm exigeaient que le vulgaire mme

    acceptt les rsultats de leurs recherches dialectiques.Il ne leur sufQsait point qu'on et la nave et tradition-nelle croyance en Dieu. C'taient leurs formules souslesquelles les plus simples des hommes devaientconserver en eux-mmes les articles de la foi. Ce devaittre l'obligation gnrale de tout moukallaf sans excep-tion, c'est dire de tout homme tenu d'obir la loi.Nous avons vu d'ailleurs que les Mo'^tazilites consid-raient comme exclusive de la foi monothiste (taouhd)l'ide que le peuple se faisait des attributs de Dieu ; uncertain nombre d'entre eux allait jusqu' mettre cettethse que quiconque n'est pas mo'tazilite, ne saurait tre Musulman (i) .

    (1) Voir ZMG, lu, p. 158, note 1. Sur riiitolrance des Moutakal-limoun en gnral, voir plusieurs passages de Schreiner, Geschichtecler theologischen Beioegungen ini Islam, p. 60, ou ZDMG, lu,p. 524, note 2. ,

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    76/118

    72 La dislinclioii enire ces Ihoriciens et les Ach^arites

    n'est point une question de principe, mais seulement dedegr. Il est obligatoire, suivant leur doctrine aussi, que

    ., ^chaque Musulman se soit fait une connaissance intime de^ Dieu 'ala iariq al-isiidll, c'est dire au moyen du raison-nement (i) , sinon, il ne saurait tre un vrai musulman.Croire Dieu, aux prophtes et la vie ternelle etaccepter cette croyance sous sa forme traditionnellecomme un hritage que l'on reoit avec confiance; maisrenoncer avec rsignation la possibilit de rpondrepar des preuves aux plus graves questions, ce n'estpoint, leur sens, tre un vrai croyant. .Tout catchismerdig dans le sens ach'^arite met cette propositiondans l'un de ses premiers paragraphes. J'en citerai unseul exemple : celui du manuel intitul al-fiqh al-akbar,attribu faussement Ghafi^y et rcemment imprime.Il est dit dans le quatrime fal : & Sachez que la toute(c premire obligation absolue de tout moukallaf est de parvenir la connaissance de Dieu par le moyen de la spculation et du raisonnement (al-nazhr wal isUdll il ma'^rifat AUhJi^) y>. Le clbre historien Tabari,qui s'est consacr la thologie avec autant d'ardeurqu' l'histoire (3), va Jusqu' enseigner que tout Musulman qui a atteint l'ge de la pubert et qui ne connat pas Dieu, avec tous ses noms et tous sesa attributs, par le raisonnement, est un kfir dont la

    (1) Le contraire est -i'"^l_5 -b-uJ\ : par ex., Abou Talib al-Mekki,QoiU al~QouJob, i, p 147 : jJ^^\j JM^X-Xwj'^Lj Jl^, ,^ ^.^^^^j(2) Imprim au Claire (Matha'a adahiya, 1900). Il serait absourded*attribuer l'Imam al-Gliafi'y ce petit \i\ve, qui porte des tracesnombreuses de sou origine ach'arite.(3) Cf. la liste de ses uvres tbologiques in WZKM., ix, p. 362 s.

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    77/118

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    78/118

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    79/118

  • 8/2/2019 Ibn Tumart Doctrine

    80/118

    - 76 ques extrieures, de se mler le moins possible des- choses qui ne les regardaient pasO, de croire sans rsistance aux vrits obscures, de se dtourner des hrsies d'imiter les vertueux anctres et de fuir les nouveauts. (2)

    Cette attitude,