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Elsa DELIYANNI Docteur en Droit -Paris 2, Avocat Professeur Associée Département de Journalisme et de Communication, - Membre Institutionnel de IAMCRE Université Aristote de Thessalonique, Grèce 44 Tsimiski str. 546 23 THESSALONIKI, GREECE (Cab. D’Avocat) e-mail: [email protected] ‘Media, Information, and Communication: Celebrating 50 years of Theories and Practice’ Les limites des droits du citoyen « à l’information » et « à la communication », dans le cadre d’une conception « individualiste », de la liberté de communication I. INTRODUCTION Il est presque banal de confirmer la relation étroite qui existe entre l’évolution des technologies d’information et de communication et la naissance et consécration de droits fondamentaux correspondants : les modifications structurelles de l’espace public provoquées lors de toute évolution technologique des médiums de communication des pensées et des idées, conduit toujours à de revendications sociales nouvelles, qui aboutissent le plus souvent à l’adoption de principes et de règles de droit destinées à mieux servir les nouveaux besoins sociaux qui s’y profilent, tout en reflètant les principes de communication, qui prédominent au moment historique de leur reconnaissance. Or, la communication publique constitue un processus social fondamental, nécessaire à toute expression individuelle ainsi que collective, qui relève, de plus, de l’essence de l’homme, ce qui explique, la raison d’intégration de ces principes et règles dans la grande famille des droits de l’Homme. En ce sens : 1. l’invention de l’imprimerie avait déclenché un long processus de transformation sociale, ayant abouti -quelques siècles de suite-, à l’affirmation de la liberté d’expression et de communication, 2. alors que, la montée de la Presse d’opinion, au cours du 19me siècle, a conduit à la consécration de la liberté correspondante ; 3. les débats doctrinaux entrepris lors du 1 er moitié du 20me siècle, concernant les concentrations des entreprises de Presse, et leur impact sur le pluralisme, ont aboutit à leur tour, à la reconnaissance d’un droit du citoyen à l’information, corollaire de la liberté d’expression. 5. Enfin, depuis l’apparition des satellites de radiodiffusion, et, surtout, depuis que la technologie a ouvert des possibilités de communication horizontale et interactive, il 1

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Elsa DELIYANNIDocteur en Droit -Paris 2, AvocatProfesseur AssociéeDépartement de Journalisme et de Communication, - Membre Institutionnel de IAMCREUniversité Aristote de Thessalonique, Grèce44 Tsimiski str. 546 23 THESSALONIKI, GREECE (Cab. D’Avocat)e-mail: [email protected]

‘Media, Information, and Communication: Celebrating 50 years of Theories and Practice’

Les limites des droits du citoyen «   à l’information   » et «   à la communication   », dans le cadre d’une conception «   individualiste   », de la liberté de communication

I. INTRODUCTION

Il est presque banal de confirmer la relation étroite qui existe entre l’évolution des technologies d’information et de communication et la naissance et consécration de droits fondamentaux correspondants : les modifications structurelles de l’espace public provoquées lors de toute évolution technologique des médiums de communication des pensées et des idées, conduit toujours à de revendications sociales nouvelles, qui aboutissent le plus souvent à l’adoption de principes et de règles de droit destinées à mieux servir les nouveaux besoins sociaux qui s’y profilent, tout en reflètant les principes de communication, qui prédominent au moment historique de leur reconnaissance. Or, la communication publique constitue un processus social fondamental, nécessaire à toute expression individuelle ainsi que collective, qui relève, de plus, de l’essence de l’homme, ce qui explique, la raison d’intégration de ces principes et règles dans la grande famille des droits de l’Homme.

En ce sens : 1. l’invention de l’imprimerie avait déclenché un long processus de transformation sociale, ayant abouti -quelques siècles de suite-, à l’affirmation de la liberté d’expression et de communication, 2. alors que, la montée de la Presse d’opinion, au cours du 19me siècle, a conduit à la consécration de la liberté correspondante ; 3. les débats doctrinaux entrepris lors du 1er moitié du 20me siècle, concernant les concentrations des entreprises de Presse, et leur impact sur le pluralisme, ont aboutit à leur tour, à la reconnaissance d’un droit du citoyen à l’information, corollaire de la liberté d’expression. 5. Enfin, depuis l’apparition des satellites de radiodiffusion, et, surtout, depuis que la technologie a ouvert des possibilités de communication horizontale et interactive, il est question de confirmer le « droit du citoyen à la communication », plus large et plus englobant que son précédent, (le droit à l’information). Ce droit permettrait au citoyen de reconquérir l’espace public, occupé par les « médias » de toute sorte et de maîtriser, enfin, leur pouvoir informel et incontrôlable.

Cet exposé essaiera de répondre à la question de savoir, si, et dans quelle mesure, l’affirmation internationale successive du «droit à l’information» et du « droit à la communication » a, dans le temps, réussi

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à freiner, le pouvoir médiatique, et ce, par le biais de la formation d’un cadre juridique, adéquat :

-assurant au citoyen (i) son accès à la communication, (ii) sa participation active au dialogue public mené par les médias, ainsi que (iii) son droit d’exiger une information reflétant le mieux possible la réalité et,

-garantissant le pluralisme d’opinions ainsi que le pluralisme des genres, essentiels à toute société civile.

L’instauration de la TV privée en Europe, -suivie de la « dérégulation » et du recul graduel de l’Etat, du secteur de la radiodiffusion, a eu pour conséquence, la transformation profonde du fondement théorique de la liberté de communication : celle-ci, censée, traditionnellement, émaner de la liberté d’expression, devient de plus en plus, dépendante de la liberté d’entreprise (liberté économique) et des intérêts économiques privés et lucratifs. Qu’adviennent-ils dans ce contexte les droits à l’information et à la communication ? et qu’en est-il du débat démocratique ?

Cet exposé constitue l’aboutissement de différentes recherches, entreprises ces dernières années, dans le cadre de mes cours de droit des médias et de déontologie journalistique, ayant eues pour objectif de transcrire l’acquis institutionnel en matière de droit à l’information et de communication, ainsi que l’applicabilité et l’efficacité des textes de droit positif sur ce point. La pauvreté des résultats recueillies concernant la portée et l’étendue de l’acquis institutionnel aussi bien que le niveau de la protection garantie par la législation au profit du citoyen, nous ont par la suite obligés de rechercher les limites des droits à l’information et à la communication. Dans les paragraphes qui suivent, nous allons suivre le cours de ces recherches : nous allons constater l’insuffisance et l’inefficacité du droit à l’information (ainsi que du droit à la communication) (I), avant de tracer les limites respectifs de ces deux droits (II)1.

II. Indices de l’insuffisance et de l’inefficacité pratique de l’acquis institutionnel en matière de droit à l’information et à la

communication,

1. Le constat : une faible présence et une efficacité limitée du droit à l’information dans les textes du droit positif. L’affirmation théorique du droit à l’information à repondu, dans les années de l’Après Guerre, « … à la nécessité de protéger la liberté de l’information, non seulement à l’égard de l’Etat, mais surtout, contre les médias eux mêmes, afin de rendre au citoyen l’exercice plein et entier de la liberté d’expression, et de son droit d’être informé, tout en garantissant la formation d’une opinion publique capable d’orienter l’expression de la volonté politique »2.

1 La primauté sera donnée au droit à l’information, qui, faisant depuis longtemps, partie du droit positif, dans un grand nombre de pays, occupe beaucoup plus d’espace dans la littérature juridique que le droit à la communication. 2

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Ce droit fut intégré, dans le cadre de la liberté d’expression et d’information en tant que corollaire de celle-ci, qui selon l’article 10 de la CEDH, « ...comprend la liberté de communiquer et de recevoir des informations et des idées sans ingérence d’autorités publiques et sans considération de frontières... ».

Conformément à son interprétation « moderne », la lettre de cette disposition reconnaît un droit du citoyen à l’information, que l’Etat doit sauvegarder, par le biais de son intervention positive dans le domaine de la Presse et des médias électroniques. Alors, donc, que la théorie libérale classique n’acceptait aucune ingérence d’autorité publique dans les affaires de la Presse, la théorie libérale moderne :

- considère que le terme autorité publique doit être étendu à toute personne physique ou morale privée, qui exerce un pouvoir de droit privé (notamment d’ordre économique) et s’applique, donc, aux organisme de TV du secteur privé,

- admet que l’abstention de l’Etat ne peut plus suffir dans ce domaine et que l’Etat doit agir positivement, et adopter des règles adéquates, afin de protéger la liberté d’expression des interventions de pouvoirs économique privés3.

Dans ce contxte, il a été admis, que l’Etat :

- doit prévoir des règles générales qui introduisent des restrictions à la liberté des médias afin de protéger les droits des tiers, conformément aux prescriptions du §2 de l’article 10,

- de réglementer le droit de réponse, et

- de promouvoir le pluralisme des médias, par le biais d’une réglementation législative, qui, garantit la transparence, et la libre concurrence, dans le domaine des médias, tout en empêchant aux plus puissants de monopoliser le marché, ce qui aurait des résultats désastreux pour la liberté d’expression et d’information4.

Cependant, alors que la littérature juridique en matière de droit à l’information, est abondante, et les analyses correspondantes riches, l’on constate5 :

-que les « mesures positives » prises aux fins de protéger le droit du citoyen à l’information sont rares, ponctuelles, et de portée restreinte.

-que le citoyen est considéré comme un sujet passif, un simple récepteur d’ informations et d’ idées.

-qu’il n’est pas possible de déduire la reconnaissance d’un droit, général, à l’information au profit du citoyen, en l’état actuel des textes nationaux. De nombreux juristes, povenant, notamment, du domaine du droit d’auteur, font état d’un droit qui, au niveau des législations nationales reste un droit « fantôme »6.

Au niveau de l’application pratique du droit à l’information, il est à souligner que le citoyen, au profit duquel ce droit fut reconnu, est absent

3 F. Balle,4 G. Cohen Jonathan5 E. Deliyanni (2004), (2005)6 A. Lucas

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de toute revendication et de tout débat portant sur celui-ci7 : l’étude comparative, de la jurisprudence hellénique et française8, démontre, en effet, que ce droit bénéficie, en fait, beaucoup plus aux médias eux-mêmes (sujets de l’aspect actif de celui-ci) qu’à leur public, (sujet de l’aspect passif de celui-ci) et qu’en général, tout débat concernant le droit à l’information se déroule, principalement, entre les medias et les pouvoir public, ou bien, en cas de procès, entre les médias et les juges.

2. Le droit de réponse : un droit limité et illusoire. La quasi totalité des législations nationales des pays démocratiques, connaissent des dispositions législatives réglementant le droit de réponse. Au niveau européen ce droit fait partie de l’acquis communautaire, puisqu’il a été intégré depuis presqu’ une 20aine d’années, dans la Directive TV sans frontières, ainsi que, dans la Convention Européenne, sur la TV trans frontière9.

Conformément à l’article 23, §1 de la Directive, TV sans frontières, « 1. Sans préjudice d'autres dispositions civiles, administratives ou pénales adoptées par les États membres, toute personne physique ou morale, sans considération de la nationalité, dont les droits légitimes, en ce qui concerne notamment son honneur et sa réputation, ont été lésés à la suite d'une allégation incorrecte faite au cours d'un programme télévisé, doit pouvoir bénéficier d'un droit de réponse ou de mesures équivalentes. 2. Le droit de réponse ou les mesures équivalentes peuvent être exercés à l'égard de tous les organismes de radiodiffusion télévisuelle relevant de la compétence d'un État membre ».

Dans le cadre du droit positif hellénique, ce droit est d’abord reconnu au niveau Constitutionnel, (article 14, al. 5), où il prend la forme d’un droit d’exiger la rectification d’une publication inexacte. Il est, ensuite, prévu dans la loi 1092/1938 sur la Presse (Art 37-38), ainsi que, par l’article, 3, al.1, de la loi 2328/1995, sur la communication audiovisuelle10.

Or, dans le cadre d’une mentalité de communication « mass médias»11, le droit de réponse, corollaire du droit à l’information passif, (droit de recevoir des informations et des idées) reconnu au profit du citoyen, acquiert un caractère accessoire et défensif, est reste complètement dépendant au droit à l’information actif, (droit de communiquer des informations et des idées), reconnu au profit des médias et des journalistes. En d’autres termes, l’exercice du droit de réponse du citoyen, en tant qu’expression de son droit à l’information (passif), reste, le plus souvent, subordonné à la bonne volonté, des journalistes, des responsables de programmation du médium en question.

En effet, le droit de réponse touche au « contenu » du programme, qui fait partie du domaine de l’autorégulation (excluant toute ingérence d’autorité publique). Bien entendu, dans les pays qui connnaissent une longue tradition de libéralisme, les principes du droit de réponse seront mieux préservés. Dans ce cas là, c’est l’autorégulation qui lui assignera 7 E. Deliyanni (2006).8 Ch. Geiger,9 552/89, telle que modifiée ………10 11 J. d’Arcy (1969)

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un domaine plus large. Il n’en reste pas moins, qu’en l’état actuel des textes et des mœurs en matière de communication de masse, le droit de réponse sera toujours destiné à servir les médias, et ne favorisera jamais l’accès et la participation active du citoyen aux médias.

En Grèce, des études et enquêtes ont recherché et démontré le faible dégré d’applicabilité de cette législation, par les chaînes privées de la TV, ainsi que le rôle ambivalent et passif du CSA Grec dans ce domaine. Les organismes de TV préfèrent payer des amendes12 plutôt que d’accorder du temps d’antenne au citoyen lésé13.

Il est, aussi, essentiel de commenter le domaine restreint, assigné à ce droit dans le cadre de codes de déontologie de journalistes grecs. Le Code de la Fédération nationale des journalistes grecs, prévoit le dévoir du journaliste, de rectifier, la publication inexacte, mais, dans les termes et conditions strictes prévus par la législation susmentionnée. En revanche, en dehors du champ de la loi, dans bien d’autres hypothèses, où, au titre de son « devoir de respect de la diversité des opinions », le journaliste devrait, normalement, assumer une obligation de consacrer de l’espace aux lecteurs ou du temps d’antenne aux téléspectateurs, en vue de l’expression de leurs opinions sur des sujets d’actualité ou leurs plaintes à l’encontre du médium visé14 le Code susvisé ne prévoit aucun devoir « éthique » correspondant. Nous constatons, donc, que l’autorégulation n’accorde pas de domaine plus étendu au droit, par rapport à la législation, qui est elle-même très restreinte, ce qui est assez fâcheux.

3. Droit à l’information et son conflit avec le monopole du droit d’auteur. Depuis quelques années, l’on assiste à la montée d’un conflit, entre les titulaires du droit d’auteur, et les citoyens, usagers de l’Internet15 : les usagers contestent la mise en place et l’emploi de mesures techniques qui contrôlent l’accès et l’utilisation des œuvres protégées sur les réseaux 16, dans le but de garantir une protection plus efficace des titulaires17. Les mesures techniques, en question étant susceptibles de neutraliser le jeu des exceptions pour copie privée reconnues au profit des usagers, ces derniers invoquent leur « droit à l’information » et revendiquent à ce titre, la reconnaissance d’un droit d’accès aux œuvres ou bien un droit de copie.18

Or, il a été constamment soutenu par une grande partie de la doctrine du droit d’auteur, que le droit à l’information ne peut pas jouer un rôle de limite externe au droit d’auteur. Leurs analyses, et

12 Il est, en effet, prévu, par la loi, que, si l’organisme responsable refuse d’accorder du temps d’antenne, son obligation de rectifier, pourrait être reconvertie en amende, à payer à la personne lésée.13 S. Kaitatzi -Witlock14 15 16 M. Vivant, Droit d’auteur et droits voisins dans la société de l’information, Commission Nationale Française pour l’UNESCO, Paris 28-29 novembre 2003, Rapport de synthèse, 4 ; M. Vivant, Propriété intellectuelle et nouvelles technologies. A la recherche d’un nouveau paradigme, http://severino free.fr/texteslocaux/michelvivantnouveauparadigme.html (accès : janvier 2006), 3.17 Cette protection englobant l’introduction du concept de l’ « utilisation légitime » d’une œuvre divulguée, l’obligation de recourir à des mesures techniques de protection, ainsi que la mise en place d’une protection des mesures techniques contre le détournement.18

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constructions sont cohérentes au niveau juridique, même si elles peuvent être contestées au niveau politique19. Nous reprenons les principaux arguments:

(i) le monopole du droit d’auteur constitue un corollaire de la liberté d’expression, au même titre que le droit à l’information ; son conflit avec la liberté d’expression et le droit du public à l’information est un conflit ancien, qui fut résolu au sein de la liberté d’expression au moment, où il a été question d’adopter des exceptions et limitations au droit d’auteur, afin d’apporter un équilibre entre les droits privées des auteurs et l’intérêt du public. Cette solution destinée à concilier les intérêts susvisés fut introduite dans le texte de la Convention Internationale de Berne, (article 13bis) qui, accorde aux législateurs nationaux la faculté de prévoir (dans la législation nationale) des exceptions aux droits des auteurs, afin de satisfaire, aux intérêts du public. Il n’y a, donc, plus de place pour reconnaître un nouveau « droit » de copie au profit des usagers de l’Internet20.

(ii) selon les propres termes de l’article 10.1 de la CEDH, la liberté d’expression s’applique sur « des informations ou des idées », or il y a lieu de distinguer le concept d’information, de celui de l’œuvre de l’esprit, car le premier concept, se rapporte à des faits d’actualité, à des idées brutes, qui n’ont pas de forme, alors que le second protège la forme originale21. Même, si la baisse du seuil d’originalité a récemment ouvert la protection du droit d’auteur à des formes, qui n’auraient jamais pu auparavant, réclamer cette protection22, faute de satisfaire aux exigences traditionnelles d’originalité, il semblerait, difficile, dans un sens strictement juridique, que la portée du droit à l’information puisse paralyser le jeu du droit exclusif de l’auteur, qui se rapporte à une œuvre de l’esprit23, faute d’adoption de règles de droit expresses à cette fin.

Dans les deux hypothèses susvisées : l’on verrait mal l’Etat, qui est contraint de prendre des mesures positives en vue de protéger « les droits des tiers », conformément à l’alinéa 2, de l’article 10 CEDH, dont le droit d’auteur et le droit des citoyens à l’information y participent, adopter des règles pour limiter le droit d’auteur, si ces dernières ne constituaient pas des « mesures nécessaires dans une société démocratique ». Dans tous les cas le législateur ou même à un stade ultérieur, le juge, (si le droit à l’information était invoqué à l’encontre d’un titulaire du droit d’auteur lors d’un procès) doivent balancer les intérêts en conflit. Or, il est difficile de confirmer, que la portée restreinte du droit du citoyen à l’information (qui est un droit passif et accessoire du droit à l’information reconnu au profit des médias)24 soit en mesure de

19 20 A. Lucas (2003)21 (l’œuvre de l’esprit, à l’exclusion des idées, (de libre parcours), qui peuvent être contenues dans l’œuvre).22 M. Vivant, Propriété intellectuelle et nouvelles technologies. A la recherche d’un nouveau paradigme, http://severino free.fr/texteslocaux/michelvivantnouveauparadigme.html (accès : janvier 2006), 3.23 Pour une analyse détaillée concernant le concept d’information et celui de l’œuvre de l’esprit,, v. A. Lucas, Droit d’auteur et liberté d’expression dans la Société de l’Information,www, Ifj.org:/docs/Athènes1-%20A%20Lucas. Doc, (accès : janvier 2006).24 Comme il a déjà été mentionné.

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prédominer sur les droits de propriété littéraire et artistique, sauf dans des cas exceptionnels, par exemple, en cas d’abus du droit d’auteur25.

Même si l’on substitut au droit classique du citoyen à l’information un nouveau droit, le droit à la communication, il est à craindre que la même solution prévaudrait. En effet, la Constitution Hellénique fut, de son côté, parmi les premières à introduire, dans son article 5A, un « droit du citoyen à la communication électronique », lors de la réforme constitutionnelle de l’an 2000. La doctrine hellénique de droit Constitutionnel considère que la présence de ce nouveau droit dans la Constitution n’apportera pas de changements considérables aux garanties offertes au citoyen, et, que, de toute façon, la réalisation de ce droit dépend de la volonté du législateur d’adopter des mesures de droit positif. En ce sens, il est, à souligner, que, selon la lettre de cette disposition26, l’exercice de ce droit à la communication, reste subordonné à la protection des « droits d’autrui » dont le droit d’auteur fait partie. Il serait, dès lors illusoire de s’attendre, à ce le législateur, décide de restreindre le droit d’auteur dans le but de favoriser les droits des citoyens à la communication et ce, au delà des limites susvisées et, en plus, au delà de ce que lui permettraient ses engagements internationaux en matière de droit d’auteur,.

4. Portée restreinte du « droit du citoyen à une information pluraliste qui reflète le plus possible la réalité ». a) Dans le domaine de la Presse. Le droit positif hellénique, ne reconnaît pas, au moins en ce qui concerne la Presse, un devoir de cette dernière ni un droit du citoyen, à une information objective, au titre de son droit à l’information, qui permettrait au second de demander à la justice, l’application de sanctions civiles ou pénales en cas de violation de cette obligation27. Une telle obligation contreviendraient aux principes de liberté de la Presse, -qui est, de prime abord, une liberté civile-. En effet, le juge, qui devrait se prononcer sur l’objectivité d’une publication allait substituer son propre jugement subjectif au concept d’objectivité, ce qui constituerait une « ingérence d’autorité publique » en matière de la Presse, prohibée expressément par la Convention CEDH. Art 10, al. 128.

Le droit positif hellénique29, reconnaît, en revanche, le « devoir de vérité » du journaliste, dont le contenu porte sur la « vérité subjective », et se résume en une obligation de bonne foi, dont le journaliste doit faire preuve à tous les stades du traitement de l’information. Or, même dans ce cas là, la condamnation d’un journaliste pour manque à son devoir de vérité est directement liée à la violation des « droits d’autrui » (par ex., en cas de publication inexacte qui porte atteinte à la réputation de la personne visée par la publication -diffamation mensongère)30 ou bien, en

25 V. en ce sens, A. Lucas, Droit d’auteur et liberté d’expression dans la Société de

l’Information,WWW. Ifj.org:/docs/Athènes1-%20A%20Lucas. Doc, (accès : Janvier 2006). Il est à souligner, à cet égard, que la nouvelle loi française, dite DADVSI, prévoit expressément que le public ne bénéficie pas de droit de copie privée au titre de son droit à l’information.26 K. Hrysogonos, op. cit., 196.27 28 29 Ce devoir n’est pas expressément prévu, par la législation, mais fut reconnu par la jurisprudence.30 V. Affaire Koutsogiorgas et aussi, affaire concernant la publication de photos de femmes blessée lors d’un accident de voiture dans un reportage de magazine féminin intitulé : « violence au sein de la famille ; femmes battues et violées par leurs maris ».

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cas d’atteinte à des intérêts collectifs visés par l’al.2 de l’article 10 (sécurité nationale31, ordre public). En revanche, un citoyen, qui assigne un journal, tout simplement, parce que, tel reportage était inexact32 ou ne mentionait pas l’ensemble des opinions exprimées sur le sujet en question, serait déclaré non recevable pour agir.

b) Dans le domaine de la communication audiovisuelle. Dans le domaine de la communication audiovisuelle, qui constitue une concession de service public, les organismes de télévision assument, en revanche, un devoir d’objectivité et de qualité, conformément à l’article 15 de la Constitution Hellénique. Le contenu détaillé des devoirs des organismes de la TV doit faire l’objet de codes de déontologie, qui prennent, en matière de communication audiovisuelle, la forme de décret, et qui conduisent à l’application de sanctions administratives33. Le CSA Grec a, de son côté, adopté des codes de déontologie concernant les émissions à contenu journalistique , et le code de déontologie des programmes à contenu non informatif. Ces Codes prévoient un ensemble de règles concernant la conformité de l’information fournie par rapport à la réalité, ainsi que la qualité de celle-ci. Or, il est à souligner, que, puisque le contenu du programme relève de la liberté d’expression de l’organisme de TV et reste soumis à l’autorégulation, l’intervention de l’Autorité Indépendante doit rester dans ce domaine, aussi, limitée aux cas de violation de la législation nationale. (L’application de sanctions administrative par le CSA sera, en conséquence, limitée à des cas de violation de la législation en vigueur -lorsque les droits des tiers et des intérêts collectifs majeurs seront violés par le programme litigieux)34.

Il ne faut pas, bien entendu, méconnaître le fait, que la violation extrême des règles de droit et de déontologie par les organismes de TV helléniques est due, à un problème spécifique : c’est que l’ ensemble de l’audiovisuel, fonctionne sur la base de concessions dont le statut vis à vis de la loi est douteux. Et les gouvernements successifs n’ont pas pris les initiatives nécessaires pour surmonter cette situation. Donc, le problème majeur, en matière de communication audiovisuelle, en Grèce, ne se situe pas tant au niveau de l’existence de règles, qu’à celui de l’absence de volonté politique pour les faire appliquer35, combinée d’un manque de

31 V. Les arrêts du CSA grec, concernant l’affaire « IMIA » (1996), -images d’une émission informative, qui avait diffusé des images qui montraient de façon détaillée l’emplacement exact des bateaux de la flotte Grecque, au moment où celle-ci partait du port de Pirée, en direction de l’île rocheuse intitulée  « IMIA » placée près des côtes de la Turquie, où une dispute entre grecs et turcs avait eu lieu au sujet de la nationalité de l’île susvisée. 32 V. pour la jurisprudence française, Cour de Cassation, Chambre criminelle, 17 Décembre 1991, publié au Bulletin Les faits relatifs au déroulement d'une information judiciaire, même relatés de façon inexacte, ne sont pas susceptibles de revêtir un caractère diffamatoire. " … le fait, pour un journaliste, de relater sans la moindre animosité ni esprit tendancieux, un élément exact d'une enquête judiciaire relève de l'exercice légitime du droit de l'information et ne saurait dès lors être constitutif de diffamation, quand bien même l'article incriminé contiendrait une erreur matérielle, dès lors que celle-ci ne contient intrinsèquement l'imputation d'aucun fait contraire à l'honneur ou à la considération de la personne qu'elle concerne.33

V. Y. Karakostas (2002), 22-23., Y. Kiki (1998), H. Anthopoulo (1999) et E. Deliyanni (2002) Liberté d’expression et d’information et nouvelles de guerre. 34 En plus, même, si, suite à la Réforme Constitutionnelle de l’an 2000, le CSA Grec a acquis tous les attributs qui font de lui une véritable « Autorité Administrative Indépendante », (il dispose d’un véritable pouvoir de régulation du paysage audiovisuel) ce dernier refuse d’agir de façon proactive (déterminer positivement et préalablement à toute violation de la loi la signification du concept d’objectivité et de qualité) et limite son rôle régulateur 1. à l’adoption de quelques directives sur des questions ponctuelles, prévoyant ce que les chaînes ne doivent pas faire, 2. et au prononce ment de sanctions administratives en cas de violation de la loi. 35 Le CSA invoque toujours cet argument pour justifier son défaut d’exercice de son pouvoir régulateur, v. sur ce point l’article de Ch. Tsiggou, sur l’application par le CSA du principe Constitutionnel de qualité des programmes TV, au DiMEE, Oct 2006.

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culture libérale en matière de TV, puisque, cette dernière naquit et se développa au moment de la dictature des colonels, à la fin des années ’60.

Or, même en dehors de ce problème tout à fait spécifique, concernant le statut de l’audiovisuel hellénique, le problème majeur dont souffre le système médiatique, actuel, réside, comme on le verra par la suite, dans le fait, que, selon la culture libérale classique, la communication est susceptible d’appropriation par le biais de droits subjectifs, ceux des médias et des journalistes, alors que, en tant que bien public, elle devrait être insusceptible d’appropriation. C’est cette même mentalité qui est reflétée dans les textes assignant une portée restreinte au « droit du citoyen à une information pluraliste qui reflète le plus possible la réalité ».

5. Etude de jurisprudence : le droit à l’information, un droit dont bénéficient essentiellement les médias. L’étude de la jurisprudence hellénique et française, vient étayer les analyses qui précèdent. Dans la quasi-totalité d’affaires étudiées, nous avons constaté, que le droit à l’information bénéficiait beaucoup plus aux médias qu’au public des médias36, (agissant dans leur qualité de téléspectateurs). En effet, les téléspectateurs sont presque absents des affaires judiciaires37. Ils le sont uniquement, au titre de leurs droits à la personnalité (en tant que sujets d’actualité) transgressés par les journalistes et les médias ou bien, dans leur qualité de « consommateurs», en cas de violation de leurs intérêts correspondants, reconnus par la législation en vigueur. Or, le citoyen ne peut pas être réduit à un consommateur, car l’acte de consommation constitue une attribution infime et tout à fait accessoire de la citoyenneté.

Si le citoyen est absent dans l’exercice judiciaire ou extrajudiciaire de son droit à l’information, les médias, sont, en revanche, très présents dans l’exercice de leur propre droit. Cela est normal, puisque dans une société démocratique de tradition libérale, les médias « assument une mission importante …………… : ils contribuent, par le biais de l’information qu’ils fournissent, à la formation de l’opinion politique et à la construction d’une citoyenneté éclairée ». Les journalistes invoquent, et exercent, dans ces cas là, l’aspect actif du droit à l’information (droit de diffuser des informations…) dont ils sont sujets, celui-ci comprenant une obligation d’informer le public, lorsqu’il s’agit de diffuser des informations relevant de l’intérêt public, (puisque, en tant que représentants du citoyen aux médias les journalistes sont censés exercer la liberté d’expression et tous ses corollaires au nom de celui-ci).

Il est, donc, presque constant que journalistes et médias invoquent le droit à l’information, lors de procès d’atteinte à la personnalité ou de diffamation mensongère, intentés contre eux par de citoyens objets

36 V. la jurisprudence Hellénique, qui accepte à l’unanimité, que le droit du public à l’information découle de la liberté d’expression et d’information et de la mission sociale de la Presse et est reconnu au profit des journalistes et de toutes personne liée au fonctionnement de la Presse, pour ce qui concerne la publication de toute information (faits et commentaires) concernant des personnes, dont les actes et le comportement présentent un intérêt pour le corps social., v. à cet égrard C.A d’Athènes, 2323/86, Justice Hellénique, 1986, 694 ; C.A d’Athènes, 1652/88, Justice Hellénique, 1989, 816 ; Areios Pagos, 1147/98, Nomiko Vima, No, 47, 112 ; T.G.I. d’Athènes, 4703/98 , Arch. De Jurisprudence 1998, 523 ; Areios Pagos, 825/2002, Chr. De Droit privé, 2002, 691 ; Areios Pagos, 167/2000, Nomiko Vima, 2001, 248. Cp. aussi la jurisprudence Française et Allemande, citée par Ch. Geiger, op. cit., 391 sv.. 37 Affaire Big Brother.

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d’actualité38. Le droit (et obligation) du journaliste d’informer le public, rentre, dans ce cas là, en conflit, avec les droits de la personnalité (réputation, vie privé, droit au nom etc) de la personne objet d’actualité. Et le juge, doit balancer les intérêt en question, et décider, quel est l’intérêt qui prévaut, dans les faits concrets de l’espèce.

Dans ce contexte, le droit à l’information reconnu afin de protéger le citoyen, peut, par un effet boumerang, devenir, une arme puissante entre les mains des médias et des journalistes, contre le citoyen, qui permet aux premiers de déjouer l’essence et la destination des règles d’éthique professionnelle39 40. Cela constitue, bien entendu, un abus dans l’exercice de leur liberté d’information, or, en matière médiatique, l’imposition de

38 Y. Karakostas39En jurisprudence hellénique ce droit est constamment invoqué en justice en vue de faire limiter par le juge les droits à la vie privée, des citoyens objets d’actualité. Il y a eu, même, des affaires, où des journalistes d’émissions à scandales, après avoir dévoilé par le biais de caméras cachées de moments intimes de la vie de personnes célèbres, n’avaient pas hésité d’invoquer ce droit, prétendant que la vie intime de cette personne célèbre intéressait l’opinion publique, dans la mesure, où celle-ci commettait des crimes, dans le cadre de sa vie intime. V. notamment les affaires Korkolis et Aslanis.V. pour la jurisprudence française, 1.Cour de Cassation, Chambre criminelle, 17 Décembre 1991, publié au Bulletin. « … le rédacteur de l'article, s'étant fondé sur des déductions personnelles qu'il n'a nullement vérifiées et qui se sont révélées inexactes, ne peut exciper de sa bonne foi ; qu'en faisant paraître ledit article dans la publication dont il est directeur, X... s'est rendu coupable de délit de diffamation envers un particulier ; que l'arrêt ajoute que le prévenu n'a pas hésité à jeter le discrédit sur une personne en la désignant à l'opinion publique et même à sa vindicte comme l'auteur possible d'un crime particulièrement odieux en s'appuyant sur de pures hypothèses ; que la présentation sensationnelle de l'article n'avait d'autre but que de piquer la curiosité des lecteurs à propos d'une affaire qui avait déjà connu trop de péripéties », (ce qui, selon l’arrêt, ne relève nullement de l’exercice légitime du droit à l’information reconnu au journaliste). « Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a fait l'exacte application de la loi……Qu’… elle a, à partir d'éléments extrinsèques échappant au contrôle de la Cour de Cassation, constaté que, loin d'être montrée sous un jour favorable, la partie civile était, au contraire, l'objet d'une présentation faite avec une désinvolture et une légèreté exclusives de toute bonne foi, alors que, de surcroît, la volonté de renseigner le public et l'absence d'animosité personnelle ne suffisent pas à détruire l'intention de nuire ». 2. Au contraire, dans l’arrêt Cour d'appel VERSAILLES 29 Juin 2006 Numéro JurisData : 2006-311086, il a été décidé, qu’ en relatant les circonstances dramatiques dans lesquelles ont disparu plusieurs membres d'une famille française dans le Tsunami, un magazine n'a fait que satisfaire le droit des lecteurs à une légitime information du public, s'agissant d'un événement d'actualité. Peu importe que l'article ait donné des informations sur la composition de cette famille, les raisons de ces vacances familiales de fin d'année en ce lieu, et ait décrit les dernières images que les rescapés ont eu de leurs proches; peu importe aussi que l'article ait été illustré d'une photographie ancienne représentant les grands-parents et leurs petits-enfants lors de précédentes vacances, alors que certains d'entre eux ont disparu lors du drame. Il n'y a pas eu dépassement des limites admissibles du droit à l'information ni exploitation commerciale d'une photographie évocatrice de moments heureux. Le principe de la liberté d'expression reconnu par la l'article 10 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme permet au journaliste de s'exprimer librement. L'article en cause ne porte donc pas atteinte à la vie privée ni au droit à l'image des proches des disparus.3. Limites du droit à l’information : a)V. comment l’arrêt de la Cour d'appel PARIS 17 Juin 2005 Numéro JurisData : 2005-289495 trace les limites du droit à l’information du réalisateur d’un documentaire, s’agissant des droits d’une personne sur son image. L'article 10§2 de la Convention européenne des droits de l'homme, qui fonde la liberté d'expression et le droit à l'information du public, peut être soumis à des restrictions en raison de la protection des droits d'autrui. En ce sens, la diffusion de l'image d'une personne suppose en principe son autorisation préalable …, et le titulaire du droit à l'image peut s'opposer à la diffusion des images même en l'absence d'atteinte intolérable, sauf si elles relatent un évènement d'actualité ou l'exercice public de son activité par une personne publique. En l'espèce, le long métrage incriminé retrace une présentation de haute couture d'une maison prestigieuse réalisée dans un lieu public, ce qui constitue bien un évènement public. En revanche, l'ajout de nouvelles scènes destinées à décrire la personnalité d'une personne publique, au travers de clichés réalisés essentiellement dans des lieux privés, relève du documentaire et non de l'exploitation d'un évènement public. Aussi, le réalisateur ne peut-il invoquer la liberté d'expression pour être dispensé d'obtenir le consentement des intéressés à la diffusion des images….b) Cour d'appel PARIS 18 Mars 2004 Numéro JurisData : 2004-26004. Limites du droit à l'information du public, article 10 paragraphe 2 de la Convention européenne des droits de l'homme, limites au principe de la liberté d'expression, obligation de réparation du préjudice subi : La vie sentimentale, le mariage et la maternité constituent des faits ayant le caractère d'intimité prévu par l'article 9 du code civil de sorte que les légendes et commentaires accompagnant les photographies litigieuses, dont notamment "X et Y, le deuxième été de leur amour, c'est la raison

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sanctions a posteriori n’est pas d’un grand secours pour les personnes qui deviennent objet d’actualité41. Ainsi, l’impuissance théorique du droit à l’information se double de l’inefficacité de celui-ci, au niveau de son application pratique. Par ailleurs, il est à souligner, que l’invocation par les médias du droit du public à l’information et tout a fait hypocrite ; car, en fait, c’est bien de leur propre « droit à l’information active » qu’il s’agit, et de leur propre privilège de dominer l’espace public en tant qu’acteurs exclusifs42.

Il n’existe pas du tout de jurisprudence grecque en matière de conflit entre droit d’auteur et droit du citoyen à l’information. De même, il semble qu’ n’y ait pas de jurisprudence française mettant en cause un particulier contre un titulaire du droit d’auteur, qui accepte de faire jouer le droit du citoyen à l’information, en tant que limite externe du droit d’auteur. En revanche, le juge français accepte de faire jouer le droit à l’information en tant que limite du droit d’auteur, dans des cas spéciaux, lorsque le droit à l’information est invoqué par un média à l’encontre d’un autre média, qui détient les droits exclusifs de diffusion d’une oeuvre ou d’un évènement majeur,).43

des passions, des mariages, des bébés" ou "la rumeur court qu'ils se marieront bientôt, cet été peut-être à Ibiza ou X possède une villa" constituent des atteintes à la vie privée de ce mannequin. Ces propos, loin d'illustrer un événement d'actualité, ne sont destinés qu'à le créer pour susciter la curiosité du public en dévoilant sans retenue la relation existant entre ce mannequin et le footballeur. Une somme de 10.000 euros sera attribuée à la requérante pour réparer le préjudice qu'elle a subi sans qu'il soit nécessaire de prescrire une mesure de publication de la décision de justice.4. Cour d'appel VERSAILLES 9 Septembre 2004 Numéro JurisData : 2004-253226 L'article de presse qui commente un ouvrage consacré aux événements du 11 septembre 2001 et qui présente son auteur comme un imposteur soutenant une thèse sans véritable enquête préalable, reposant sur le mensonge et des vérités tronquées, porte atteinte à son honneur et à sa considération. Il est constitutif d'une diffamation publique au sens de l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881. Toutefois, le bénéfice de la bonne foi doit être reconnu aux auteurs de cet article. En effet, la thèse éminemment polémique défendue dans l'ouvrage et selon laquelle aucun avion ne se serait écrasé sur le Pentagone, appelait, dans le libre exercice du droit à l'information et la liberté d'expression une réponse proportionnée à l'émotion suscitée par cette thèse audacieuse de la part d'un magazine d'actualité. Dans un tel contexte, le ton polémique et les termes employés ne dépassent pas le seuil de prudence et d'objectivité dont doit faire preuve tout journaliste.40 Dans un sens inverse, il s’agit ici du seul et unique cas, où le droit à l’information peut joue dans un sens favorable au citoyen. Car, lorsque la « balance du juge » joue en faveur du citoyen, ce dernier peut toucher des dommages et intérêts importants ; or cela aboutit inévitablement à une commercialisation extrême des droits de la personnalité.41 Le rôle pédagogique et proactif du CSA pourrait jouer un rôle important dans ce domaine.42

Cour de PARIS, Chambre correctionnelle 11, 29 Juin 2000 Numéro JurisData : 2000-126854 Dans le cas d’espèce, le prévenu avait été été relaxé en 1ère Instance, du chef de publication d'un sondage relatif à une élection législative pendant la semaine précédant le scrutin, car les textes d'incrimination seraient incompatibles avec les articles 10 et 14 de la CEDH. Dans la mesure où les électeurs avaient accès aux sondages publiés à l'étranger, grâce aux moyens de communication modernes l'interdiction des sondages en vigueur dans la législation française portait atteinte à la liberté d'expression et ne constituait plus une mesure nécessaire pour assurer la liberté des élections et la sincérité du scrutin. Dès lors l'interdiction des sondages créerait une discrimination entre les citoyens au regard du droit à l'information. La cour d'appel a, au contraire, considéré, que les sondages réalisés dans la perspective d'un scrutin, pourraient avoir une influence sur le choix des électeurs et que, par conséquent, leurs effets relèvaient de la protection des droits d'autrui au sens de l'article 10 paragraphe 2 de la CEDH. Ces droits d'autrui consistent dans les droits des électeurs d'exercer un libre choix et dans ceux des candidats. La prohibition de la publication des sondages apparaît, donc, comme une condition nécessaire de l'expression du libre choix des électeurs. Par ailleurs, le fait que ces derniers puissent prendre connaissance de sondages effectués à l'étranger ne caractérise pas une discrimination au sens de l'article 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il ne peut être, dès lors, soutenu que la législation nationale perd sa justification au motif qu'elle peut être contournée par les moyens modernes de communication.43 V. Geiger

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6. Pluralisme La garantie du pluralisme et la diversité des médias, figurent parmi les domaines privilégiés d’intervention positive dont l’Etat se réserve, en vue de protéger le droit du public à l’information. Selon l’opinion doctrinale prédominante, la garantie du pluralisme constitue un objectif essentiel de l’Etat dans ce domaine44.

Or, l’intervention positive de l’Etat reste, dans ce domaine aussi, très limitée, et les mesures prises, dans ce domaine, sont facilement contournables.

En effet, conformément aux théories libérales, (classique et moderne), et, notamment, conformément à la doctrine juridique qui sous-tend la politique Européenne de l’audiovisuel, le principe du pluralisme est conçu de prime abord comme principe émanant de la liberté d’expression (de l’organisme de radiodiffusion) et de la liberté de la Presse (liberté de communication), et non pas comme un droit fondamental de l’Homme, ni même, comme un principe autonome à valeur constitutionnelle, émanant directement du principe démocratique45. Or, si le pluralisme ne peut pas être conçu comme un droit fondamental, il ne peut pas, selon cette doctrine, primer sur le droit à la liberté d’expression, ni sur la liberté de la Presse en cas de conflit.

Cette conception est exprimée dans l’ensemble des textes de la Commission Européenne46 et imprègne, la Directive sur la Télévision sans frontières, ainsi que la Convention Européenne correspondante. Conformément, au Livre Vert de la Commission, sur les concentrations, le pluralisme est une « dérogation » et une « limitation légitime de la liberté d’expression» de l’organisme de TV47.

Par conséquent, dans la mesure, où la liberté de communication de l’organisme est elle même, implicitement conçue comme une liberté subjective, qui serait dérivée à la fois de la liberté d’entreprise et de la liberté d’expression, le pluralisme est toujours condamné à s’écraser entre ces deux libertés. En ce sens :

-lorsque, au nom du pluralisme externe (afin de préserver une pluralité d’opérateurs sur le marché) l’on adopte des mesures limitant la liberté de communication, cette dernière est pensée sur le modèle de la liberté d’entreprise et son traitement relève du droit de la concurrence ou du droit de propriété. Or, le droit ne peut pas atteindre la propriété du capital financier et ne peut pas a priori, toucher à la structure de la propriété48.

-lorsque, en revanche, c’est le pluralisme interne qui est en cause, et il est question de poser des limitations au contenu du programme de l’organisme (afin de satisfaire à de critères de qualité ou bien à la préservation du pluralisme d’opinions) la liberté de communication est pensée sur fond de liberté d’expression49. Le droit ne peut pas intervenir au contenu du programme, sous peine de violer la liberté d’expression de l’organisme de TV. Le droit n’intervient, dans ce domaine, que de façon réactive, pour réparer des préjudices (protection des mineurs – 44 G. Cohen-Jonathan45 46 47 48 J. M. Ferry49

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protection de la personnalité) et, en vue d’imposer une sorte de « fairness doctrine » (droit de réponse50, partage du temps d’antennes pendant la période électorale). Reste, cependant, en dehors de toute réglementation, la question de qualité de l’offre globale audiovisuelle. Toute tentative de réglementation dans ce domaine (ex. quotas culturels, quotas européens) fut un échec total : elle fut jugée soit parfaitement contournable, soit trop autoritaire, car violant la liberté d’expression.

En effet, ici, aussi, la reconnaissance du droit à l’information répondait plutôt au souci de protéger les médias qui assumaient une obligation d’informer le public, contre les intérêts privés, que le citoyen lui-même. Le citoyen est bien entendu censé représenté par les médias, car, selon la théorie libérale le journaliste est censé porter la voix du peuple à l’espace public; mais est-ce que ce schéma continue de refléter la réalité ?

III. Analyse théorique des limites du droit à l’information et du droit à la communication

Dans les paragraphes qui suivent, nous contesterons l’efficacité de ce droit pour des raisons qui tiennent à la fois, à sa portée limitée, à sa nature juridique, et à son statut philosophique particulier, qui rentre en conflit avec la théorie libérale sur la Presse et les Médias.

1. Aspect actif, aspect passif du droit à l’information et la mentalité  « mass médias ». Selon l’article 10 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme, ce droit, corollaire de la liberté d’expression, comprend la liberté de communiquer ou de recevoir des informations…. et s’analyse, donc, en deux aspects distincts : un aspect actif (qui comprend le droit et l’obligation du journaliste et des Médias d’informer le public et d’exercer leur contrôle envers le pouvoir politique, notamment, en ce qui concerne les questions relevant de l’intérêt public) et un aspect passif (qui comprend le droit du public de recevoir sans obstacle tout message qui l’intéresse)51.

C’est, uniquement, l’aspect passif du droit, qui est consacré au profit du citoyen, ce qui correspond au modèle de communication vertical et univoque, et exprime la mentalité « mass media » qui s’est développée à l’ère d’émergence des grands medias audiovisuels, au lendemain de la 2me Guerre mondiale. Cette conception qui accorde une primauté aux médias, sur le citoyen, dont le rôle de récepteur est, par la force des choses, passif est, d’ailleurs, constamment confirmée, par la Cour de Strasbourg52, dont la jurisprudence souligne le rôle important des médias dans la société démocratique, et relève même l’obligation des médias d’informer le citoyen53, lorsqu’il s’agit des questions d’actualité qui

50 V. Cep. commentaire sur le droit de réponse, ci- dessus.51

G. Cohen Jonathan, in E. Décaux et P. H. Imbert, sous la direction de L. E. Pettiti, La Convention Européenne des Droits de l’Homme, Paris, Economica 1998, 372-73. 52 Y. Kiki, Le droit de l’information, éditions Sideratos, Athènes 1998, 27 (en langue grecque) ; v. aussi la jurisprudence citée par G. Cohen Jonathan, op. cit. 371 sv. 53H. Darbishire, Lois, réglementation et déclarations Intergouvernementales affectant les médias européens : évaluation critique. Document de travail. Séminaire des Nations Unies / UNESCO, sur la

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relèvent de l’intérêt public. Cette jurisprudence donne une primauté absolue aux médias, en tant qu’intermédiaires privilégiés de la communication publique et considère que l’espace public devait par la force des choses appartenir à ces derniers. Il n’en reste pas moins, que le citoyen est dans ce contexte, considéré, comme un sujet passif, qui a confié le rôle de la communication aux médias qui le représentent. Ainsi, même si la reconnaissance de ce droit exprime une volonté de prendre en compte, -dans le processus de la communication- aussi bien celui qui reçoit que celui qui diffuse un message, il place le récepteur dans une position d’infériorité par rapport au diffuseur. Cette réalité est reflétée par les textes juridiques : le droit du citoyen à l’information est accessoire et subordonné au droit correspondant (droit à l’information actif), reconnu au profit des journalistes et des médias.

3.Remarques concernant sa nature juridique : un droit social, corollaire d’une liberté civile individuelle. Le droit à l’information est, bien entendu, rattaché à la liberté d’expression et d’information, qui est bien une liberté civile, or il comprend, en même temps un aspect social, qui rend compte de la nécessité de protéger le citoyen (passif), contre le pouvoir des médias. En ce sens, le droit à l’information est affilié à la famille des droits sociaux, qui constituent des droits - créances envers l’Etat. Ce dernier, dans son rôle de « garant ultime des libertés dans une société démocratique », se voit, imposer une obligation d’action positive, en vue de garantir au citoyen une information objective et pluraliste, qui correspond le plus possible à la réalité. Dans ce contexte, l’obligation précitée se résume en un devoir pour l’Etat, d’adopter les règles nécessaires, en vue de protéger les droits des tiers, conformément aux conditions de l’alinéa 2, de l’article 10, de prendre les mesures législatives nécessaires pour la promotion du pluralisme, et de réglementer le droit de réponse.

Or, c’est précisément sur ce point concret, que se situe l’impuissance majeure du droit du public à l’information. Sa mise en œuvre et, donc, son efficacité, dépendent de l’acquis institutionnel, formé par les mesures législatives, prises dans le cadre de l’obligation de l’Etat d’agir dans ce domaine. Si ce dernier légifère dans ce domaine, un acquis institutionnel est formé et l’Etat ne peut pas facilement revenir sur des solutions déjà adoptées. En revanche, dans le cas, où l’Etat ne s’acquitte pas de son obligation, il est très difficile, voire, impossible, de le contraindre54.

Mais, pourquoi, alors, l’acquis institutionnel reste faible ? Le paragraphe ci- après essayera de nous en donner la reponse.

3. Mise en cause du fondement philosophique du droit à l’information. En Europe de l’Après Guerre, les médias électroniques furent soumis au contrôle de l’Etat. Au même moment, la doctrine Marxiste a eu un impact certain, sur le fondement philosophique, ainsi que sur le contenu des libertés, en général. La liberté n’apparaît plus, comme une donnée préexistante au sens du droit naturel, que l’on doit

promotion de médias indépendants et pluralistes, Sofia, Bulgarie, 10-13 septembre 1997, 4. 54 K. Hrysogonos, Droits individuels et sociaux, éditions A. Sakkoulas, Athènes 2002, 196.

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protéger contre toute ingérence étatique ; c’est une aptitude que l’on doit conquérir55. On passe, donc, d’une conception des libertés individuelles comme des resistances au pouvoir, à une nouvelle interprétation du rôle de l’Etat, où celui-ci devient le garant ultime des libertés face aux nouveaux pouvoirs d’ordre privé et, notamment, économique56, qui se profilent graduellement dans la société de l’après guerre. L’Etat a dans ce contexte un devoir d’action, en vue de protéger le citoyen, contre ces pouvoirs57 et c’est dans ce contexte théorique que la doctrine de l’Etat Social prend naissance.

La reconnaissance du droit à l’information constitue une extension de cette tendance doctrinale dans le domaine des médias. Or, celui-ci vient remettre en cause le dogme du libéralisme, en matière de la Presse, selon lequel, l’Etat devait s’abstenir de toute, « ingérence »58 et, donc, de toute action positive dans ce domaine. Et c’est sur point précis que commence le débat éternel, quant à la ligne sur laquelle l’on doit tracer la frontière entre le devoir d’abstention et le devoir d’action positive59, ce débat expliquant, par ailleurs, la portée restreinte du droit à l’information, ainsi que l’embarras du législateur d’étendre le domaine de celui-ci par le biais de l’adoption de règles nouvelles60. L’adoption de mesures législatives, qui auraient pour objet de limiter la liberté des médias ou d’imposer des obligations à ceux-ci, quant au contenus de leurs programmes, risquerait d’être considérée comme une « ingérence » d’autorité publique, conformément à la lettre de l’article 10, al.1, alors, qu’en revanche, son abstention de légiférer risque d’avoir un effet désastreux pour les droits des tiers, pour le pluralisme et partant, pour la démocratie.

4. Des réserves semblables soulève la reconnaissance ainsi que l’adoption en droit positif interne, d’un droit du citoyen à la communication. Vers la fin des années 1960, la proposition avait été faite61, de remplacer le droit du citoyen à l’information par un droit de celui-ci à la communication, au vu des nouvelles technologies de la communication, qui se profilaient à l’époque, qui permettraient la communication entre les peuples de la planète. Dans un article publié à la Revue de l’Union Européenne de radiodiffusion, J. d’Arcy, Directeur de l’UER à l’époque, étudiait la nature des satellites de radiodiffusion, ainsi que le statut juridique de ses satellites, qui ouvraient des possibilité de communication sans précédent, dans l’histoire de la radiodiffusion. Dans cette publication il était question de méthodes et moyens, pour préserver

55 V. en ce sens F. Balle, Médias et Société, 10me édition, Paris, Montchrestien, 2002, 277 sv.56 G. Vlachos, La structure des Droits de l’Homme et le problème de leur interprétation en régime pluraliste, R.T.D.Comparé, 1972, 279 sv.57 G. Cohen Jonathan, op. cit. 369 sv.58 V. la lettre de l’article 10, al.1, CEDH, selon laquelle le droit à la liberté d’expression comprend la liberté de communiquer ou de recevoir des informations « … sans ingérence d’autorités publiques et sans considération de frontières… ». 59 E. Deliyanni (2004), op. cit, §93 sv.60 Cette analyse donne éventuellement une réponse aux auteurs, qui se posent la question, pourquoi l’analyse de ce droit est faite uniquement sous l’angle institutionnel, ce droit visant à la mise en place de règles permettant de garantir la liberté et le pluralisme, v. à cet égard Ch Geiger, Droit d’auteur et droit du public à l’information, approche de droit comparé, Paris, Litec 2004, 135, note 4 et 339 sv. 61 Jean d’Arcy, Satellites de radiodiffusion et droit à la communication, Revue de l’UER, nov. 1969, 118B., 14-18.

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la liberté d’information et de communication et le pluralisme, à l’échelle mondiale.

Par la suite, dans les années 1970-80, il a été de nouveau question au sujet des possibilités de reconnaître ce droit, lors des débats portant sur le NOMIC (nouvel ordre mondiale en matière d’information et de communication) au sein de l’UNESCO. Les argument de base militant pour la reconnaissance de ce droit furent de deux ordres :

-que les satellites et les autres médias permettant la communication transfrontière, nous conduisent dans le sens de la reconnaissance de ce droit.

-et, qu’en conséquence, l’heure est peut être arrivé pour la réalisation de la société de communication mondiale, une société dont les traits caractéristiques principaux seront la la solidarité et la fraternité.

Les questions concernant la reconnaissance de ce droit furent liées à l’époque, à celles de préservation des identités culturelles du planète, qui couraient le risque de disparaître, en raison de la monopolisation de l’information et de sa dissemintion, au niveau mondial par un tout petit nombre d’agences d’information, d’origine occidentale, sous l’influence de la publicité multinationale62.

L’adoption du droit à la communication, ouvrirait aux citoyens l’accès aux medias et au dialogue public, tout en contribuant au changement de mentalité au sujet de la communication de masse. :

1. Le citoyen ne serait plus traité de sujet passif dans le cadre de la communication, bénéficiant d’un simple droit de recevoir l’information transmise par les tous puissants Médias.

2. la communication en tant que processus et non seulement le contenu de celle-ci entrerait dans le cadre de la protection. Ainsi, toute sorte de communication en non seulement la communication informative et éducative, rentrerait dans le cadre de la liberté d’expression et de communication. ce qui conduirat à un traitement égalitaire de tous les médias et de l’offre globale des médias audiovisuels.

Cependant, la proposition de reconnaître le « droit de l’homme à la communication »63 -qui imposerait à l’Etat d’intervenir, selon des règles qui garantissent sa neutralité, en vue d’une plus grande multiplicité des médias, de leur diversité et pluralité, ainsi que de leur plus grande accessibilité par les citoyens, tout en rendant compte de la possibilité de ces derniers de participer activement au processus de la communication- appelle des réserves64 semblables à celles, qui avaient suivi l’analyse du droit à l’information :

1. l’incapacité des gouvernements de concevoir une communication qui ne serait pas verticale univoque et massive, mais horizontale et interactive – en raison de la mentalité « mass médias » profondément ancrée dans leurs mœurs

62 Hamelink,63 J.d’Arcy :1969 197764 F. Balle : 2001

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2. le risque d’assister à la naissance de nouveaux monopoles de diffusion, publics ou privés dans le domaine de la communication.

L’adoption de ce droit dans le cadre du droit positif rencontrerait, par ailleurs, un certain nombre d’obstacles. Son intégration dans les législations nationales signifirait que l’Etat assumerait la double obligation :

-de communiquer à tous les citoyens journalistes ou pas, toutes les informations qui font d’eux des citoyens actifs et non seulement des sujets passifs de droits et

-de prendre les mesures législatives nécessaires dans le cadre de règles qui garantissent sa neutralité, en vue d’une plus grande multiplicité des médias, de leur diversité et pluralité, ainsi que de leur plus grande accessibilité par les citoyens65, tout en rendant compte de la possibilité de ces derniers de participer activement au processus de la communication.

La seconde condition viendrait, cependant, en conflit, avec l’obligation de l’Etat de s’abstenir de toute ingérence dans le domaine des médias, (et, plus particulièrement : de toute ingérence sur le programme de l’organisme de TV, qui constitue à la fois un élément fondamental de sa liberté d’expression, + un élément patrimonial de l’entreprise). Cela, signifierait, que l’on devrait renoncer à toute régulation de l’audiovisuel, dans un odjectif de pluralisme ?

Non : Il faut, cependant, une conception de la liberté de communication, affranchie des prémisses individualistes qui la gardent subordonnée aux intérêts privés commerciaux et industriels66.

IV. Conclusion.

Perspectives Les contradictions et impasses que laissent apparaître les analyses qui précèdent, nous permettent de conclure, que, la simple reconnaissance et superposition de droits ne conduisent pas à une meilleure protection du citoyen contre les médias. La condition préalable pour la préservation des droits du citoyen à la communication est la « Constitutionnalisation du pouvoir médiatique ». Ce constat rejoint les tendances les plus récentes en matière de philosophie politique, qui font état de la nécessité, de revoir et de mettre, éventuellement, à jour le fondement philosophique de l’ensemble des libertés et des droits, qui s’attachent à la communication67, afin que la portée ainsi que le contenu juridique de celles-ci reflètent la réalité contemporaine dans ce domaine.

Dans cette direction, il est de plus en plus soutenu et proposé, qu’il y ait lieu:

- de décider que la liberté de communication appartient à tous les citoyens et ne constitue pas un privilège de la Presse et des médias de toute sorte,

65 F. Balle : 200166 .J.M. Ferry :199467 .J.M. Ferry :1994, 2000, B. Libois :1994.

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-de dissocier la liberté de communication de la liberté d’expression car, cette coincidence est anachronique est ne repond plus à la réalité contemporaine.

Plus particulièrement : la liberté de communication prise dans son sens de liberté de l’intermédiaire, qui assume la communication publique- doit être affranchie des « prémisses individualistes » qui la soutiennent et qui appartiennent à une époque historique, pendant laquelle l’expression des idées et leur communication publique avait lieu sans aucun intermédiaire. Dans ce contexte, l’on doit68 sur le plan théorique, dissocier, la liberté de communication, des libertés civiles dont celle-ci est censée découler : la liberté d’expression, et la liberté d’entreprise69. La liberté de communication doit être qualifiée de liberté publique et communautaire70, dans le sens qu’elle appartienne aux citoyens et à la communauté, et qu’elle ne puisse pas déboucher sur la reconnaissance de droits privatifs, et de privilèges ; une liberté, qui, loin de constituer un droit subjectif permettant de sanctionner un intérêt d’ordre privé, est qualifiée de principe71 ou bien d’objectif72 démocratique de valeur constitutionnelle.

Cette dissociation se présente comme la seule possibilité de désintermédiation de décommercialisation et, enfin, de démocratisation de l’espace public, en vue de rendre au citoyen ces droits à la communication. Et c’est cette nouvelle conception de la liberté de communication, qui constituerait le substrat théorique du droit du citoyen à la communication, un droit de participer librément et dans le cadre du principe d’égalité, à l’espace public médiatique73.

Un grand nombre de questions juridiques restent, cependant à répondre. Parmi les questions les plus importantes, figure celle, qui consiste à dissocier la « nature publique » de la liberté de communication, par rapport au contrôle étatique, voir même, par rapport au monopole d’Etat.

68 D. Cornu, op. cit, 176-179 ; E. Deliyanni (2004), op. cit, §43, 96, 99-100.69 J. M. Ferry, op. cit., 265 sv. ; v. également sur ce sujet : I. Berlin, quatre essais sur la liberté, éditions Scripta, Athènes 2001, 253 sv.70 Il y a une deuxième question majeure, qui est en train d’être débattue au sein de la philosophie politique : la question de la hiérarchie entre les valeurs démocratiques et les libertés civiles individuelles. Il est vrai que la tradition constitutionnelle européenne place d’habitude les secondes à un niveau hiérarchique supérieur que les premières, mais il ne semble pas, qu’il y ait de réponse unanime sur ce sujet, v. à cet égard A. Manitakis, Droit Constitutionnel Hellénique I, éditions Sakkoula, Athènes - Thesalonique, 2003, 48-64.71 Selon la doctrine hellénique.72 Selon le Conseil Constitutionnel et la doctrine française.73 J. M. Ferry, op. cit., 265 sv

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