Guide d'enquête sur le supplément au loyer sur le marché privé

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Guide d'enquête sur le supplément au loyer sur le marché privé Front d'action populaire en réaménagement urbain (janvier 1988)

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Guide d'enquêtesur le supplément au loyer

sur le marché privé

Front d'action populaire en réaménagement urbain(janvier 1988)

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2004-11-0536

Pourquoi une enquête sur le supplément au loyer ?Le FRAPRU a produit ce document pour permettre à tous les groupes

avec lesquels nous sommes en contact de prendre connaissance du programmede supplément au loyer sur le marché privé. Mais il vise surtout à per-mettre aux groupes de s'outiller pour enquêter localement sur l'applica-tion de ce programme.

Nous avons jusqu'ici dénoncé ce programme à partir des exemples quinous viennent d'Ontario et d'ailleurs ainsi que parce qu'il détourne des

prévus pour du vrai logement social. Il est important maintenantde pouvoir ramasser des cas concrets pour démontrer qu'au Québec aussi,ce programme sert à enrichir les propriétaires en fournissant du logementtemporaire et de moins bonne qualité.

Nous demandons donc à tous les groupes qui le peuvent de contribuer,dans la mesure de leurs énergies, à cette importante enquête. Nous pen-sons qu'il faut multiplier les dénonciations de ce programme, tant locale-ment que nationalement. Aussi nous aimerions prendre connaissance des infor-mations que vous pourriez recueillir et ce le plus rapidement possible.Certains aspects de cette enquête peuvent se réaliser rapidement; quelspropriétaires ont obtenu les suppléments au loyer, quels types de loge-ments, à quels prix, où sont-ils situés. Le niveau de satisfaction des lo-cataires ne pourra probablement pas se vérifier avant l'automne.

Vous trouverez donc ci après:

- un petit historique du supplément au loyer- un résumé de l'entente- une critique du programmeet surtout- le guide d'enquête sur l'application du supplément au loyer

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Petite histoire du supplément au loyer

Le programme de supplément au loyer permet aux Offices municipauxd'habitation de louer des logements vacants sur le marché privé pour yloger des ménages inscrits sur les listes d'attente pour un HLM. Ceprogramme fait partie de l'entente cadre Canada-Québec sur l'habitationsociale. Il est donc considéré par les gouvernements comme étant un pro-gramme de logement social.

Le gouvernement québécois jonglait avec l'idée du supplément au lo-yer sur le marché privé depuis plusieurs années. Déjà en 1984, le Livrevert sur l'habitation publié par le gouvernement péquiste envisageaitun tel programme. Mais c'est en mai 1987 que les gouvernements annonçaientun premier projet expérimental de 400 unités. En effet, l'annonce faiteà ce moment par les ministres responsables de l'habitation, Stewart Mclnnesau fédéral et André Bourbeau au provincial prévoyait une expérience de400 unités à un coût de $1 million pour 1987.

Le 24 septembre dernier, le ministre Bourbeau annonçait que 600unités étaient ajoutées au programme. Avant même que l'«expérience» seconcrétise, on passait à un total de 1000 unités. A l'automne, lesmunicipalités effectuèrent les appels d'offre pour les logements. Aprèsun début lent, difficile même à Québec, le programme semble connaîtreun bon succès. Le 7 janvier 1988, la Ville de Montréal annonçait qu'unecentaine de propriétaires avaient offert plus de 500 logements pour les260 unités de supplément au loyer que la ville s'est fait attribuer.

Rappelons que le 29 janvier 1987, le ministre Bourbeau déclaraitque les suppléments au loyer pourraient à moyen terme remplacer la construc-tion de HLM pour familles. Il est donc important de faire cesser cette«expérience» qui détourne l'argent prévu pour du logement social.

Les suppléments au loyer accordés en 1987

AylmerBaie-ComeauCharlesbourgChicoutimiDrummondvilleGaspéGranbyHullJonquièreLavalLorettevilleMontréalMontréal-Nord

105

303530102040355020

26075

QuébecRimouskiRouynSept-IlesSaint-HubertSaint-HyacintheSherbrookeTerrebonneTrois-RivièresVal d'OrValleyfieldVanierVerdun

12535103010301010355

101050

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Résumé du programme

Gestion et financement

Le programme de supplément au loyer sera géré par les Offices municipauxd'habitation. Le financement sera assuré de la même façon que les HLM:62% par le gouvernement fédéral, 28% par le gouvernement provincial et10% par la municipalité, en 1987. (En 1988, ce sera 59% par le fédéral;31% par le provincial et 10% par la ville).

Sélection et attribution des unités de supplément au loyer

Les suppléments au loyer seront attribués à des unités de logement àpartir d'appels d'offre des OMH. Les logements sélectionnés devront êtrede qualité standard à un coût équivalent à la moyenne du marché, tel quedéterminé par la SHQ. Si l'OMH ne réussit pas à trouver des logements auprix du marché elle pourra signer des ententes à un prix supérieur. Unmaximum de 25% des logements d'un immeuble pourront être désignés pourrecevoir des suppléments au loyer.

Versement du supplément au loyer

L'OMH versera au propriétaire une subvention couvrant la différenceentre le loyer payé par le locataire et le montant du loyer tel que fixédans l'entente entre l'OMH et le propriétaire. Dans le cas où ce loyersera supérieur au loyer du marché, le locataire sera appelé à combler unepartie de cette différence.

Entente OMH-propriétaire

Les ententes entre l'OMH et les propriétaires seront d'une durée de 5 anset renouvelables avec l'accord des deux parties jusqu'à une durée maximalede 35 ans. Si après 5 ans, le propriétaire veut mettre un terme à l'entente,il pourra le faire. Les locataires auront alors le droit de demeurer dansleur logement et les propriétaires continueront à recevoir le supplémentau loyer tant que les locataires occuperont le dit logement. Si l'OMHveut mettre un terme à une entente avec un propriétaire en cours decontrat de 5 ans, il pourra le faire moyennant un avis de 6 mois aupropriétaire.

Sélection des locataires

La sélection des locataires se fera par les OMH selon les mêmes règlesque pour les HLM. Les locataires devront être admissibles au HLM et êtreinscrits sur la liste d'attente.

Loyer payé par les locataires

Le loyer est le même que dans les HLM, c'est-à-dire 25% du revenu duménage.

Dans les cas où un OMH ne réussira pas à trouver des logements au prix dumarché, les locataires qui occuperont de tels logements assumeront ladifférence jusqu'à un maximum de 30% de leur revenu.

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Etat des logements

Les logements sélectionnés par les OMH devront faire l'objet d'uneinspection avant la signature de l'entente avec les propriétaires.Les logements désignés pour le supplément au loyer devront êtrelivrés dans un état conforme au code civil (au code du logementmunicipal quand il y en a). Les OMH seront également responsablesde voir à ce que les logements soient maintenus dans un bon état.

Bail

Les locataires seront liés par un bail avec le propriétaire et lesmêmes clauses que pour un HLM s'appliqueront. Le montant du loyer serafixé par l'OMH.

Pour l'entretien de leur logement, les locataires devront s'adresserau propriétaire. Si celui-ci n'effectue pas les réparations nécessaires,les locataires pourront s'adresser à l'OMH qui devra alors s'assurerque le propriétaire effectue les réparations.

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Critiques au programme de supplément au loyer

Une aide coûteuse aux propriétaires

Les unités de supplément au loyer seront accordés pour des logements,donc à des propriétaires. Le prix moyen du loyer du marché, tel que définipar la SHQ risque d'être la règle à partir de laquelle OMH et propriétairessigneront des ententes. Les gouvernements paieront donc très cher pourdes logements temporaires.

Le gros argument des gouvernements est en effet que le supplément auloyer permet de loger plus de locataires à moindre coût. «Les HLM nouscoûtent $500 par mois. La formule de location avec supplément au loyercoûtera entre $200 et $250 par mois au gouvernement»? déclarait AndréBourbeau (1). En affirmant cela, le gouvernement fait un calcul malhonnê-te et à très court terme, car il oublie que le coût de constructiond'un HLM s'amortit au fil des années, de sorte qu'un HLM construit"en1973 est désormais presque entièrement payé et que son déficit d'exploi-tation est complètement couvert par le loyer payé par les locataires.C'est d'ailleurs ce qu'avoue l'Association des offices municipauxd'habitation dans une étude sur les coûts du logement public (2):

Autrement dit ce que l'état avance maintenant pour défrayerle coût de ce logement, elle le récupérera plus tard aumoment où le loyer payé par le locataire dépassera les coûtsreliés à ce logement. Il importe donc d'analyser ces déficitsd'exploitation en fonction de la vie utile du logement et nondans le court terme.

Pour les locataires des logements

Des logements plus chers

Dans les cas où les OMH signeront des ententes avec des propriétairesavec des loyers supérieurs au prix du marché, ce seront les locatairesqui paieront la différence jusqu'à un maximum de 30%. Ce qui constitueun précédent dangereux pour les programmes de logements sociaux. Deplus, quand les revenus du ménage locataire dépasseront le seuil d'ad-missibilité au HLM, celui-ci devra payer le plein loyer du marché, cequi équivaudra à des évictions.

De moins bonne qualité

Les logements loués par les OMH seront possiblement de moins bonnequalité. Ils n'auront pas été construits avec les critères de logementpublic. Ce seront des logements qui étaient vacants; ceux-ci sont souvent

(1) Journal de Montréal, 29 janvier 1987(2) L'Association des Offices municipaux d'habitation du Québec et le

Laboratoire de recherche en Sciences immobilières de l'UQAM, Lescoûts du logement public, février 1986

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des logements de moins bonne qualité, en mauvais état, mal situés, loindes services. Les locataires n'auront pas accès à des services comme dessalles communautaires et des buanderies comme dans les HLM.

Théoriquement, les logements devront être en bon état, tant au momentde l'entrée des locataires que durant les 5 années. Mais déjà, àMontréal-Nord et à Québec, nous avons des cas où les requérant-e-sde HLM ont refusé les logements que l'OMH leur offrait sur le marchéprivé parce que ceux-ci étaient dans un état pitoyable. De plus, leprogramme de supplément au loyer prévoit que les OMH devront s'assurerque les logements seront entretenus par les propriétaires, mais riende précis n'est prévu. A quelle fréquence les logements seront-ilsinspectés?

Avec une faible sécurité d'occupation

C'est le taux d'inoccupation des logements vacants sur le marché privéqui amènera les propriétaires à s'intéresser au programme de supplémentau loyer. Lorsque le taux de vacance deviendra plus bas, les proprié-taires pourront assez facilement se débarrasser de leurs locatairessubventionnés pour remettre leur logement en location à un loyer élevésur le libre marché. Pour ce faire, ils pourront ne pas respecterl'entente avec l'OMH et ainsi forcer celle-ci à résilier l'entente, lelocataire se retrouvant ainsi évincé. Ou encore les propriétairespourront au bout de l'entente de 5 ans décider de ne pas renouvelercelle-ci. Mais l'entente continuera à s'appliquer aussi longtemps quele locataire demeurera dans le logement pour un maximum de 3 5 ans.Connaissant l'expertise des propriétaires pour évincer des locataires,il y a fort à parier qu'ils trouveront moyen de se débarrasser de leurslocataires pour pouvoir louer de nouveau à qui ils veulent et à unfort prix.

Ces affirmations nous les tirons de l'expérience des suppléments au lo-yer en Ontario. Le nombre de suppléments au loyer a chuté de 10 816 à9 059 pour une perte de 1757 logements entre 1978 et 1980. Quand leministre Bourbeau affirme que les suppléments au loyer permettent de lo-ger plus de monde, il aurait peut-être avantage à regarder dans sa pro-vince voisine les résultats d'un programme identique.

Et une intégration difficile

Les expériences de supplément au loyer en Ontario ont démontré certainsproblèmes dans l'intégration des locataires à l'intérieur de l'immeuble.Pour éviter ce problème, le programme prévoit qu'un maximum de 25% deslogements d'un immeuble pourront recevoir un supplément au loyer. Deplus, officiellement, les locataires ne seront pas identifiés comme sub-ventionnés. Mais il est loin d'être évident que ces mesures éviteronttous les problèmes.

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Bref, la meilleure façon d'aider... les propriétaires

Les expériences des autres provinces le démontrent, et un comité du gou-vernement ontarien le concluait même, « Le complément au loyer représen-la façon la moins souhaitable de fournir des logements aux personnes àfaible revenu.» (3) Si le gouvernement du Québec va aujourd'hui de l'a-vant avec un tel programme c'est bien sûr pour aider les propriétairesqui sont au prise dans bien des villes avec un taux élevé de logementsinoccupés. Mais c'est aussi parce qu'en même temps qu'il met en placele supplément au loyer privé, il assassine le logement social, à peine2 000 HLM se réalisent par année et seulement 800 unités de logement coop.Le programme de supplément au loyer est donc une mesure temporaire quidonne l'illusion qu'autant de logements sociaux se réalisent, mais avecle retrait probable de certains propriétaires du programme au bout de 5ans, on se retrouvera avec une diminution du nombre de logements subven-tionnés.

Rapport sur la Société d'habitation de l'Ontario et les commissions lo-cales de logement» Comité permanent sur l'administration de la justice,1981, Toronto, p.4.

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QUESTIONNAIRE D'ENQUÊTE

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