Glomérulonéphrites post-infectieuses

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Glomérulonéphrites post-infectieuses Plus ça change, moins c'est la même chose Alain Meyrier Hôpital Broussais-HEGP Paris

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Page 1: Glomérulonéphrites post-infectieuses

Glomérulonéphrites post-infectieuses

Plus ça change, moins c'est la même chose

Alain Meyrier Hôpital Broussais-HEGP

Paris

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Rappel historique (Evolution des idées)

•  1852: Samuel Wilks Cases of Bright's disease, with remarks (GN de la scarlatine. Les "corps malpighiens" apparaissent congestifs)

•  1910: Löhlein. Endocardites. "Glomérulonéphrite embolique" •  1914: Volhardt & Fahr: "Embolies bactériennes glomérulaires" •  1961: Jennings & Earle (JCI): description biopsique de la GNA •  1961-1963: C'est le Streptocoque hémolytique du groupe A. Le

pronostic est bon •  1963: McCluskey & Baldwin: l'évolution à long terme n'est pas toujours

favorable •  1963 --- 1976: Passage de la forme aiguë à la chronicité •  La GNA n'est pas toujours streptococcique et ne guérit pas toujours •  2009: Tout est dans tout et réciproquement

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•  Le même agent pathogène donner lieu à des glomérulopathies différentes

•  La même glomérulopathie peut être due à des agents pathogènes différents

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Physiopathologie

(1) Induction, dépendant d'un antigène (2) Transduction, caractérisée par des dépôts d'immunoglobulines (3) Médiation. Comporte nombre de cytokines provenant de monocytes

et macrophages, des cellules mésangiales, des plaquettes, et des cellules endotheliales, dont les fractions C5a et C3a du complément, l'interféron-γ et l'interleukine 2 (IL-2)

Batsford S et al. Is the nephritogenic antigen in post-streptococcal glomerulonephritis pyrogenic exotoxin B (SPE B) or GAPDH? Kidney Int 2006; 68:1120-1129

Nephritis-associated plasmin receptor, a group A streptococcal antigen identified as a glyceraldehyde phosphate dehydrogenase (GAPDH), and the cationic cysteine proteinase exotoxin B (SPE B) have been detected in the glomeruli of patients with acute GN following group A streptococcal infection. An antibody response to the latter was present. It is likely that these antigens, and especially SPE B have a pathogenic role in patients with acute poststreptococcal GN

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The Current Spectrum of Infectious Glomerulonephritis Experience with 76 patients and review of the literature

JJ Montseny, A Meyrier, D Kleinknecht & P Callard Medicine, 74:63-73, 1995

•  1976-1993: 76 pts (55 m, 21 f) 48 ± 17 ans (15-83) •  Bobigny (AM) et Montreuil (DK) •  76/1657 biopsies pour un syndrome néphrotique ou néphritique •  Exclusions: HIV, HBV, HCV, amylose, GN antérieure •  Européens: 56 (74%), Maghrébins 18 (24%), Malien 1, Asiatique 1

41/76 immunodéprimés (54 %)

•  Alcooliques: 23/41 (30%) dont 6/23 cirrhotiques •  Diabétiques: 6/18 (30%) •  Drogues IV: 5/18 (27,8%) •  BPCO: 6/18 (30%) •  Tuberculose: 1/18 (5,5%)

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Conditions d'inclusion en tant que "post-infectieux"

•  Foyer ou syndrome infectieux •  Récent (aigu) ou certain (chronique) •  Biopsie compatible avec des lésions d'origine infectieuse (C3) •  Pas de maladie systémique •  Pas ou très peu d'IgA

Trois critères au moins pour inclure

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L'infection d'origine

•  Appareil respiratoire: 28% •  Peau: 25% •  Broncho-pulmonaire/pleural: 18% •  Dentaire: 13% •  Endocardite: 13% •  Ascite infectée, ostéoarthrite, méningite, foyer

urologique, valve atrio-ventriculaire, aplasie médullaire, diarrhée fébrile: 1 chacun

MULTIPLES: 25%

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Les foyers habituels

• ORL • Dentaires (Gram + et Gram –) •  Pleuro-pulmonaires • Cutanés • Drogues IV •  Ascite infectée

Souvent deux ou trois ensemble

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Trois types de GN post-infectieuses Endocapillaires

44 (58%)

Immunodéprimés 41 %

PBR: Délai: 10 ± 16 j

ORL: 38 %

Peau: 25 %

Pneumo: 14 %

Valve: 7 %

Dents: 16 %

•  xxx

Extracapillaires 26 (34%)

Immunodéprimés 42 %

PBR: Délai: 14 ± 17 j

ORL: 15 % Peau: 27 % Pneumo: 21 % Valve: 27 % Dents: 11,5 %

MPGN 6 (8%)

Immunodéprimés 50 %

PBR: Délai: 9 mois

ORL: 0 % Peau: 17 % Pneumo: 33 % Valve: 0 % Dents: 0 %

JJ Montseny & al Medicine 1995

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Trois types de présentation clinique

•  Syndrome néphritique aigu, retardé de 10 -20 j par rapport au foyer déclenchant, hypocomplémentémique, d'évolution spontanément favorable

•  Glomérulonéphrite rapidement progressive

•  Glomérulonéphrite chronique

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Trois types de présentation clinique

Syndrome néphritique aigu, retardé de 10 -20 j par rapport au foyer déclenchant, d'évolution spontanément favorable

Tout ici est faux

•  Formes latentes, connues depuis toujours ("albumino-cytologiques") avec les mêmes lésions florides de GN endocapillaire

•  Foyer initial datant de plusieurs mois

•  Evolution précocement défavorable: le complément reste bas, l'histologie montre l'apparition de croissants ou d'une GNMP

•  Evolution tardive vers une GN chronique après des années silencieuses

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Cas clinique

•  Algérien de 14 ans •  Hématurie pendant des semaines •  4 mois plus tard transféré à Bobigny •  Syndrome néphritique aigu •  Amygdales infectées •  PBR: GNA floride, endocapillaire pure •  Refus de soins et repart en Algérie •  Décédé d'IRC

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1ère PBR: GNA endocapillaire post-streptococcique

2e PBR: persistance des lésions. Hypocomplémentémie persistante

3e PBR: apparition de croissants. Syndrome néphrotique. Ins. Rénale.

4e PBR: GNRP. Insuffisance rénale terminale

AUTRE CAS CLINIQUE. HOMME DE 40 ANS

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Cas clinique

•  67 ans •  Prostatectomie pour adénome •  Fièvre pendant un mois •  Apparition d'un purpura des jambes •  Souffle d'insuffisance mitrale •  Créatinine 850 µmol/L •  Biopsie rénale: GNRP •  Dialyse •  4 h plus tard: coma profond, mort •  Autopsie: rupture d'un anévrysme mycotique encéphalique •  Endocardite mitrale à Entérocoque

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Cas clinique

•  Immigré roumain de 50 ans •  Acné ± infectée depuis toujours •  Nombreux foyers d'infection dentaire •  Tableau de GNC •  PBR: GNMP •  Evolution vers la dialyse

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La GNMP de type I post-infectieuse d'évolution favorable après éradication du foyer causal

Meilleur exemple: la GNMP des valves atrio-ventriculaires

•  Environ 160 cas publiés •  Fièvre, arthralgies, consomption, anémie •  Anémie hémolytique, AAN, hypocomplémentémie,

cryoglobulines, facteur rhumatoïde •  Staph. epidermidis •  Ablation du matériel infecté: 50% de stabilisation ou

d'amélioration de la GNMP

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Deux terrains de prédilection

Alcoolique Keller CK & al. QJM, 87:97-102 1994

30 cas de GN post-infectieuses 17/30 alcooliques Origine: dents 7, peau 4, abcès 2, pneumonie 2,

endocardite 1, inconnu 3 8/17 → Ins. Rénale terminale

Montseny JJ & al Medicine74:63-73, 1995

76 cas de GN post-infectieuses 23/76 alcooliques (dont 6 cirrhotiques) Origine: dents, peau, ascite, inconnu

L'alcoolique est immunodéprimé, a une incidence d'hémocultures positives 7 fois plus importante que dans la population non-éthylique et 3 fois plus d'endocardites (Strep. pneumoniae et entérobactéries)

Diabétique Haas M. Human Pathol 34:3-10, 2003

Such lesions found in 83 specimens including 26 with a primary diagnosis of postinfectious GN and 57 in which it was an incidental finding

IF: C3 in > 90%

23/57 (40%) exhibited diabetic nephropathy, either alone or in combination with another lesion

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Haas M. Incidental healed postinfectious glomerulonephritis: a study of 1012 renal biopsy specimens examined by electron microscopy. Human Pathol 34:3-10, 2003

•  Biopsies examined for the presence of distinct subepithelial and intramembranous deposits indicative of postinfectious infection

•  Excluding clinical immune complex diseases •  Such lesions found in 83 specimens including 26 with a primary diagnosis •  of postinfectious GN and 57 in which it was an incidental finding •  IF: C3 in >90% •  23/57 (40%) exhibited diabetic nephropathy, either alone or in combination

with another lesion

In summary incidental evidence of resolving or largely healed postinfectious GN was found in 57/543 (up to 10.5%) of renal biopsy specimens with a primary diagnosis of an immune complex-related glomerular disease

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Eléments de tendance pronostique

Plutôt meilleur •  Origine ORL •  IF en "ciel étoilé" •  Protéinurie < 1,5 G/24 h •  Eradication du (des) foyer(s)

infectieux •  Pas de comorbidités (dont l'âge et un état

d'immunodépression)

Plutôt pire •  Origine cutanée ou viscérale

•  Purpura •  Endocardite •  IF en "guirlande" •  Croissants •  Age ("Senectus ipse morbus") •  Immunodépression •  Créatinine > 250 µmol/L •  Syndrome néphrotique •  Foyer(s) persistant(s)

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Agents pathogènes à l'origine de GN postinfectieuses

Microbes

Streptococcus Staphylococcus Pneumococcus Enterobacteriaceae Salmonella Meningococcus Brucella Rickettsia Legionella

Virus

Echovirus Adenovirus Enterovirus dont Cocksackie Rubella Varicella Parvovirus B 19 Mycoplasma pneumoniae

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Mycoplasma Pneumoniae-Associated Nephritis in Children

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Martin JM, Barbadora KA. Continued high caseload of rheumatic fever in western Pennsylvania: Possible rheumatogenic emm types of Streptococcus pyogenes.

J Pediatr. Jul 2006;149(1):58-63 .

In a study published in 2006, Martin and Barbadora showed that the disease remains a problem in western Pennsylvania with 121 new cases from 1994-2003. Consistent with earlier reports, most patients were children and most had carditis.

Extrapolation to the US population: ~ 3000 new cases over 10 years

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Declining Incidence of AGN from 1970 through 1994

(Necker Hospital, Paris)

36

11 3 2 1

31

34

17 12 9

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29 16

8 2 2

115

51

37

13 16

Declining Incidence of Type I MPGN and Lobular GN from 1970 through 1994

(Necker Hospital, Paris)

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Comparative frequency of membranoproliferative glomerulonephritis (MPGN) in patients originating from France and from North Africa,

1971-76 and 1977-83 (Necker Hospital)

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Incidence of GN Diagnosed by Renal Biopsy in Milan, Italy, 1972 through 1995

21 14 6 6.9

14

12

10 3

26 31

31 35.9

7 7

6

4.5

20 20

21

20.4

12 16 26

11.4

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Prévention

1) Eau et savon 2) Antibiotiques

3) Hygiène dentaire

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La sécurité sociale met depuis quelques temps l'accent sur la surconsommation d'antibiotiques dont la France

s'était faite la championne. Cela n'est pourtant pas sans conséquence pour la santé de votre enfant...

Les antibiotiques, c'est pas automatique

Un constat inquiétant

Nous avons tendance à croire les antibiotiques rapidement efficaces pour tout mais ils ne combattent pas

les maladies d'origine virale. En fait, ces médicaments n'ont aucun effet dans plus de 70 % des cas.

Plus préoccupant, leur sur-consommation conduit à une perte de leur efficacité face à des bactéries

qui apprennent progressivement à résister à leur action. Ainsi, certaines maladies deviennent aujourd'hui

plus difficiles à guérir et pourraient ne plus être soignées du tout, demain.

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Cases of Acute Glomerulonephritis in Martinique 1979 - 1992

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32 000 dialysés en France

•  Hypothèse: si comme en 1970 1/3 étaient atteints de GNMP, cela ferait 10 000 cas

•  Prix annuel moyen d'une dialyse: 38 000 €

•  Coût rapporté aux GNMP: 380 M €

•  La baisse de 23,4% de la consommation d'antibiotiques a économisé 850 M €

•  RAA+ GNC = ?

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Le Moing V, Lacassin F, Delahousse M, Duval X, Longuet P, Leport C, Vildé J-L. Clinical Infectious Diseases, 1999; 28: 1057-1061

Use of Corticosteroids in Glomerulonephritis Related to Infective Endocarditis:

Three Cases and Review

0 100 200 300 400 500 600 700 800 900

Lower normal values of C3 serum levels Serum creatinine

Upper normal values of CIC blood levels

CIC blood levels C3 serum levels

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Conclusions

•  Les glomérulopathies post-infectieuses sont très fréquentes •  En Europe, mais pas nécessairement ailleurs, la GNA classique est en train

de disparaître au même rythme que la MPGN, suggérant fortement que la seconde (dite "idiopathique") est une forme évolutive de la première

•  Les foyers responsables sont multiples, souvent associés •  Les agents responsables sont divers, bactériens (dont le Staphylocoque) •  ou viraux •  Les alcooliques et les diabétiques forment une population à risque •  L'étude systématique de biopsies rénales montre la fréquence de l'origine

infectieuse passée inaperçue d'une GN à complexes immuns, volontiers surajoutée à une GN d'autre nature, notamment diabétique

•  Le traitement curatif est décevant. La prévention se base sur l'eau chaude et le savon, les soins dentaires, les antibiotiques larga manu et la modération des apports alcooliques

•  La Sécurité Sociale n'a rien compris au problème de santé publique posé par les GN post-infectieuses pas plus qu'au rhumatisme articulaire aigu.