François Chevalier. Les Ejidos

Monsieur Franois Chevalier

Ejido et stabilit au MexiqueIn: Revue franaise de science politique, 16e anne, n4, 1966. pp. 717-752.

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Chevalier Franois. Ejido et stabilit au Mexique. In: Revue franaise de science politique, 16e anne, n4, 1966. pp. 717-752.

doi : 10.3406/rfsp.1966.392950

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfsp_0035-2950_1966_num_16_4_392950

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/author/auteur_rfsp_2360http://dx.doi.org/10.3406/rfsp.1966.392950http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfsp_0035-2950_1966_num_16_4_392950

Ejido et Stabilit au Mexique

FRAN OIS CHEVALIER

LA

VOLUTION mexicaine ne semble pas tant avoir t uvre de la capitale que bien plutt des provinces et des cam pagnes et la ville de Mexico parat souvent avoir subi les vnements au lieu de les conduire ce qui ne signifie nullement que certaines prises de conscience et attitudes dterminantes ne fussent lies dans le monde rural des ides venues de la capitale ou travers elle Depuis le dbut du sicle ailleurs les rvo lutions politiques qui ont entran des transformations sociales profondes en Amrique latine Argentine mise part ont t ralises prsent sinon toujours en dehors des capitales et des villes importantes du moins sans que leur appui ft dcisif tels les exemples bolivien et surtout cubain avec les mmes rserves bien sr que pour la ville de Mexico Etant donn le dveloppement de la centralisation au Mexique la croissance considrable de la ville de Mexico et dans de moindres limites de industrie la capitale tend videmment prendre une place exceptionnelle et une influence elle avait certes pas auparavant mais il ne faut pas oublier que la majorit de la population mexicaine vit encore de la terre ou plus ou moins directement elle malgr des statistiques peut-tre un peu pres ses offrir le tableau un pays citadin et urbanis en clas

Etude prsente Londres pour le colloque Obstacles to change iii Latin America The Royal Institute of International Affairs Chatham House et revise depuis lors en utilisant le recensement de 1960 trs rcem ment paru et obtenu rapidement grce Moiss Gonzalez Navarro IV censos agr cola-ganadero ejidal 1960 Resumen general Mxico Direcci general de estad stica 1965 564

Ce travail est redevable de plusieurs informations importantes et diverses suggestions Claude Bataillon agrg de gographie alors Mexico) que je tiens remercier ici

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sant habituellement en dehors des populations rurales les agglo mrations recenses de 500 000 habitants ce qui est que rarement le cas dans ce pays il est vrai que dans les 654 de la population totale que reprsentaient en 1950 les localits de moins de 000 habitants entraient des personnes qui ne vivent assez indirectement de la terre et parfois pas du tour il faut considrer aussi que dans les localits plus importantes rsident des journaliers agricoles et des familles tirant de la terre une partie de leur revenu Depuis lors ce pourcentage est rduit selon le huitime recensement de population il tait en I960 environ 578

Quoi il en soit sans garder sa prpondrance antan le monde rural continue peser lourdement dans la vie du pays mme si cela apparat pas vident observateur habituel impres sionn abord par une trs grande ville Mexico et par une srie de ralisations spectaculaires dans les domaines urbain industriel routier Or un lment essentiel et caractristique de ce monde rural remodel par la rvolution est bien actuellement Xejdo qui avec la trs petite proprit occupe de loin la premire place non dans le domaine conomique mais du point de vue social par la masse hommes qui en vivent en dpendent ou rattachent ft-ce en partie Cet ejido est pas suffisamment connu dans sa ralit mme surtout actuelle malgr des travaux importants et classiques mais del anciens Eyler Simpson 1937 Whetten 1947 etc. et la trs petite proprit est moins encore

Mais abord est-ce que Vejido sommairement dfini Il agit principalement une unit de terres cultives place sous le rgime de la proprit communale ou collective mais distribue en petites exploitations individuelles ou familiales Ainsi les bn ficiaires ont-ils que usufruit de leur lot notamment sous le con trle un comisariado ejidal de trois membres en principe lu par eux

Quant aux ejidos agricoles exploits collectivement ils ne reprsentent plus en surface que 32 du total en 1960

Il est important de voir ce est devenu maintenant ce Mexique li la terre qui avait pris une part si active dans la rvolution sociale principalement Vejido qui en est directement issu Nous

aprs les recensements de 1950 et 1960 Cf par exemple DURAN OCHOA J.) Poblaci Mexico Buenos Aires Fondo de Cultura econ mica 1955 279 p. 14

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aurons abord reconnatre les origines de institution et le milieu dans lequel elle pris naissance car elle en garde la marque profonde sa rnovation par rdenas qui tendue tout le pays et troitement associe au gouvernement sa diversifi cation et sa lente volution depuis lors compris et mme surtout dans ses secteurs pauvres qui intressent encore la grande majorit des ejidatarios Nous nous demanderons dans quelle mesure la rvolution agraire Vejdo et la relative satis faction apporte aux aspirations paysannes ont pu modifier la mentalit des ruraux dans le sens de la conservation des rsultats acquis mais aussi quelles ractions produisent les nouveaux pro blmes agraires que cre surtout une rapide croissance dmogra phique. Nous nous demanderons enfin si apparemment cette masse rurale ne pse pas sur la politique mexicaine travers des orga nismes et syndicats dont le fonctionnement rel pas t suf fisamment clairci ailleurs

On en arrive l aux phnomnes les plus complexes dont tude peur paratre dcevante sinon quasi impossible raliser Fi l nous semble pourtant que la connaissance des structures co nomiques et sociales dans la perspective de leur volution histo rique jointe celle des cultures au sens anglo-saxon du mot peuvent venir au secours de observation directe pour jeter quel que lumire sur ces mentalits et sur influence relle elles peu vent avoir dans la vie du pays encore il ne soit gure possible de chiffrer ces phnomnes dans tat actuel des sciences de homme

Mais comme pour compliquer encore les choses il nous faut reconnatre aussi que ces structures et leur volution ne sont elles- mmes imparfaitement traduites dans des statistiques ailleurs nombreuses bien que le fait ne paraisse pas avoir srieusement attir attention de beaucoup conomistes et sociologues En effet mme lorsque celles-ci sont trs sres et il nous est arriv de voir comment elles taient labores parfois au niveau municipal elles concernent surtout on le verra des situations lgales qui ne concident pas toujours il en faut avec la ralit observable est ce tabli dernirement un grand connais-

est scmble-t-il avis vers lequel incline SCOTT Mexican government in transition Urbana University of Illinois Press 195 333 p.) repris par CLINE H.) Mexico Revolution ro evolution 1940-1960 London Oxford Uni versity Press 1963 375 p. 156

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seur du monde rural mexicain Moiss De La Pena qui fait une trs intressante critique des statistiques dont nous dispo sons Il agit essentiellement des publications de la Direcci general de estad stica abord le Censo agr cola ganadero de 1930 et Ie Censo ejidal de 1935 puis les deux Censos confondus pour 1940 II) 1950 III et I960 W) ce dernier paru la fin de 1965 en net progrs par rapport aux prcdents Il ajoute les publications du Departamento agrario sous le titre Memoria del departamento agrario dont la premire publie en 1943-1944 concerne poque 1915-1940 et la dernire mne en 1958 5 Malheureusement on ne peut pas toujours comparer avec certitude des chiffres successifs ou parallles parce ils ne sont pas systmatiquement tablis sur les mmes bases ainsi en ce qui concerne les attributions de terres aux ejidos les chiffres peuvent soit se limiter aux remises dfinitives soit inclure des remises provisoires sujettes confirmation

Quant aux nombreuses publications statistiques tablies par des institutions nord-amricaines ou des organismes internationaux il reste que pour le monde rural tous en sont rduits en gnral

faire des recoupements sur des donnes qui parfois pchent la base et sont autant moins sres il agit de phnomnes ordre moins conomique et plus social donc plus com plexes et difficiles chiffrer Ainsi les statistiques gnrales sont- elles une utilisation dlicate pour un essai comme celui-ci qui se fondera galement sur certains faits historiques aux cons quences toujours actuelles et sur de trop rares enqutes monogra phiques sur le terrain le tout interprt la lumire observa tions complmentaires faites il est vrai de fa on seulement spo- radique mais directe au cours une quinzaine annes passes au Mexique Une telle tude pose donc des problmes et appelle surtout de nouveaux travaux monographiques et statistiques sans lesquels nos explications et conclusions provisoires en toute rigueur ne pourront tre que des probabilits voire des hypothses dans un contexte et par des mcanismes encore en grande partie obscurs

DE LA PENA Moiss) El pueblo su fierra Mito realidad de la retorma agraria en Mxico Mxico Cuadernos americanos 1964 895

Nous avons pas pu revoir toutes ces statistiques au moment de la rdaction de cet article

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Ejido et Stabilite au Mexique

ejido issu de la communaut villageoise traditionnelle

Au Mexique il faut distinguer abord entre le Centre-Sud du pays caractris Jadis par la prsence de nombreuses commu nauts villageoises hritires des populations de cultivateurs indi gnes sdentaires restructures par la colonie espagnole et les vastes provinces du Nord o les villages indpendants taient bien moins nombreux et de structures habituellement beaucoup plus lches

Dans le Centre et le Sud du pays ces communauts retrou vrent parfois une unit et une personnalit elles taient en voie de perdre asses rapidement pour faire front la grande proprit qui au xixe sicle et au dbut du xxe se trouvait en pleine expan sion tait poque o les chemins de fer lui ouvraient de nouveaux dbouchs et o les gouvernements de tendances lib rales ou positivistes essentiellement celui de Pornrio Diaz fai saient tomber les barrires traditionnelles qui limitaient son dve loppement

Cette expansion des haciendas intressait certes des terres neuves brousses forts steppes.. mettre en valeur dans le Nord ou les terres chaudes Mais les propritaires avaient besoin de uvre le meilleur moyen de obtenir tait enlever aux villages les mdiocres terres dont ils disposaient encore afin que leurs habitants fussent obligs de venir travailler sur leurs domaines Ce ne sont pas seulement les communauts indien nes traditionnelles assez localises qui furent obi et de cette expansion mais en gnral les groupes paysans enclavs entre les grands domaines au dbut du XXe sicle ces enclaves taient srement bien plus nombreuses que les statistiques de poque ne le laisseraient supposer mme peut-tre vers le Nord Dans le Centre et le Sud il agissait gnralement anciennes commu nauts indiennes reconnues comme telles par la colonie mais qui taient dj fortement accultures au cours du xixe sicle parlaient espagnol et avaient plus ou moins perdu leurs institu-

Aprs avoir rdig la prsente tude nous avons lu un intressant article de Alfonso CASO s Renaissance conomique des communauts indi gnes au Mexique Diogene Paris) 1963 qui souligne brivement les ressem blances entre Yejido et le capulli aztque fondu dans la vieille organisation communautaire

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tions traditionnelles origine mixte indigne et coloniale espa gnole Surtout elles avaient perdu souvent une partie de leurs anciennes terres communales Il pouvait agir enfin de groupes mtis forms secondairement sur des parcelles de terre indpen dantes souvent aux dpens des indignes

Sur ces questions nous ne disposons aucune tude prcise aucuns chiffres permettant valuer mme titre exemple localis les gains des propritaires une part les pertes des com munaux autre part et en un mot la situation relle la veille de la rvolution de 1910

est en tout cas dans une rgion troite et relativement riche la province de Morelos proche de Mexico que volution dcrite est particulirement nette au moins nos yeux pour mieux la connatre L des groupes paysans semi-indpendants arrivaient encore accrocher sur des terres assez troites parfois simples tacololes ou creux cultivables dans les sierras toutes proches Ils compltaient leurs ressources par quelques activits artisanales ou en allant louer leurs bras dans les haciendas et la ville Les pressions exer aient sur eux les modernes haciendas sucrires environnantes pour obtenir de la main-d uvre bon march ren forcrent visiblement la solidarit de ces petits cultivateurs qui en tchant de faire front pour viter de devenir de simples pons et Journaliers agricoles retrouvrent en partie semble-t-il la vieille cohsion communautaire dj relche par le jeu des changes avec la capitale toute proche et souvent abandon de la langue

huatl Ainsi ces groupes paysans rent-iis bloc autour un des leurs Zapata lorsque celui-ci se souleva pour soutenir le modeste programme agraire de Madero et ce mouvement gnral peut rellement tre qualin en ses dbuts de dernier grand soulve ment indien Chavez Orozco pour des raisons que nous avons exposes ailleurs7 alors que le milieu tait beaucoup plus accultur que dans autres zones plus traditionnellement indignes

Ce sont ces villages auxquels agrgrent des peones bien plus que les noyaux mmes de peones rsidant dans les haciendas qui servis par la volont inbranlable de Zapata et sa vision de plus en plus nette des problmes finirent par imposer une orien-

Cf CHEVALIER Un facteur dcisif de la rvolution agraire au Mexique le soulvement de Zapara 1911-1919 Annales Economies Socits Civilisations 16 l) janv-fvr 1961 pp 66-82

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tation agraire au gouvernement lgal celui de la capitale Celle-ci naquit essentiellement de la volont des villages de desserrer fcau qui les touffait de rcuprer tout ce ils avaient perdu gnralement au cours des dernires dcennies ce qui en rendait le souvenir autant plus vif et cuisant des terres et des ptu rages communaux ou ejidos ce mot servant bientt dsigner ensemble des terres rcupres surtout celles de culture sur les quelles le groupe villageois se retrouvait enfin plus au large

Malheureusement nous connaissons peine quelques-uns des premiers ejidos au sens mexicain et rvolutionnaire du mot qui ont rellement t crs dans telles zones des provinces de Moro los Puebla Mexico ou Guerrero domines par le mouvement zapatiste partir de 1912 et surtout en 1915 et 1916s Il ne faut ailleurs pas imaginer une autre organisation que celle qui dcoulait tout simplement des rgles traditionnellement en honneur dans les vieilles communauts paysannes de la colonie attribution de parcelles de labour individuelles naturellement inalinables ne ft-ce que pour viter leur retour aux haciendas avec bien entendu obligation de les cultiver sous peine une nouvelle attri bution droits pour les seuls membres du groupe couper du bois faire patre leurs animaux ou pratiquer des cultures tem poraires dans les communaux rcuprs tout cela sans doute sous le contrle des autorits traditionnelles lues mais eut-il pas certaines innovations ds cette poque Dans ce pays cependant o la proprit prive tait solidement implante depuis des sicles et o les paysans voulaient surtout viter expansion des hacien das leurs dpens elle fut reconnue concurremment la pro prit communale ou villageoise

Une nouveaut cependant la Caisse rurale de prts de Etat de Morelos dont le Lie az Soto Gama assesseur de Zapata nous assur elle fonctionn rgulirement en 1915 1916 sous autorit du gouvernement zapatiste comme une sorte de mutuelle de cultivateurs limitant ses membres aux individus jugs responsables

Notamment Ixcamiipan et Jolalpan Puebla) cuman Tlalt zapan Ane- necuilco Mor.) Mixquiahuala Hgo Cf DIAZ SOTO GAMA A.) La cuesti agraria en Mexico voir 203 etc. az Soto Gama qui tait le conseiller juridique de Zapata nous assur il eu beaucoup de cas concrets semblables Cf aussi MENDIETA NUNEZ Efecfcs sociales de la reforma agraria en fres comunidades ejidales Mxico U.N.A.M. I960 146

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est-ce pas l en fait ejido presque tel il se gnralisera par la suite La loi zapatiste en perfectionne organisation 26 octobre 1915 fvrier et Juillet 1917 inspirant toujours du systme communautaire en ajoutant une teinte indigniste qui voque le caipulli prhispanique assez proche du clan et cer tains emprunts au socialisme international ou au socialisme chr tien de az Soto Gama Mais comme la lgislation rapatisre tait pas reconnue ces ejidos de fair seront illgaux thorique ment ignors et soumis revision des dtails prs ils semblent pourtant avoir t reconnus un peu plus tard par la loi de la capi

qui pouvait difficilement revenir sur des situations acquises et sur la solution zapatiste si prestigieuse aux yeux de tous les ruraux du Sud En 1920 enfin le prsident Obregon sanctionnait emploi du mot elido dans sa nouvelle acception de dotation de terres principalement de culture

Ainsi Yefido mexicain reprsente-t-il sa naissance comme le prolongement de la communaut villageoise traditionnelle qui del relchait son emprise sur les individus au xixe sicle un peu comme la fin de Ancien Rgime en France par exemple ou comme rcemment encore dans telle rgion conservatrice des vieil les structures agraires dans la pninsule ibrique mais cette communaut est trouve localement renforce face aux haciendas envahissantes et en fin de compte restaure sous des formes pres que traditionnelles abord puis en parcie nouvelles la faveur de la Rvolution

Au dpart Vejido est donc nullement une exploitation agri cole de type semi-collectif qui se serait substitue au grand domaine en adoptant certaines de ses structures Ces dernires taient entirement diffrentes de celles du village et organisation de la hacienda reposait notamment sur une discipline et un prin cipe autorit dont hritrent pas les responsables des ejidos ni les reprsentants du gouvernement central sauf bien plus tard on le verra et seulement de fa on partielle dans certains

ejidos collectifs ou par le jeu un dirigisme Etat voire priv de fait dans des secteurs agricoles plus ou moins capitaliss

Ainsi tous les documents officiels disponibles assignent-ils aux ejidos du Morelos des dates relativement tardives postrieures la mort de Zapata II faudrait pouvoir vrifier les situations de fait gnralement antrieures aux crations lgales

10 Ley de ejidos du 30 dcembre 1920 arr 13 La tierra dorada los pueblos se denominar ejido > Le mot apparat pas dans la Constitution de 1917

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II est trs significatif cet gard que ce soit seulement en 1934 que les noyaux de peones acasalados est--dire vivant dans les haciendas aient t autoriss se constituer en nouveaux centres de peuplement dots ejidos encore ces agglomrations de tra vailleurs des haciendas ne pouvaient-elles tre reconnues comme nouveaux villages ejidos que sur leur demande expresse et lors il tait pas possible en rpartir les habitants dans les ejidos dj existants alentour13 Cette mesure tait mme dans la ligne une trs ancienne tradition puisque dj les vice-rois avaient pu autoriser certaines agglomrations de peones existant dans les limites des haciendas devenir des pueblos en titre adminis trant eux-mmes sans autres terres il est vrai que le tundo legal env 101 ha les propritaires en redoutaient pas moins cette demi-autonomie rclame par leurs gens notamment dans le Nord du Mexique

Il est significatif enfin que ce ne soit gure avant le code agraire de 1934 que le gouvernement local de ejido se soit vraiment dgag semble-t-il de celui du village par la cration du commisa- riado ejidal de trois membres qui reprsente toujours organisation actuelle dans chaque unit l3

Cette comunidad ce pueblo dont est issu Vejido se situait au point de convergence entre ancien caipui et le village commu nautaire espagnol que reprsente en grande partie la rduc tion et le village de mission Le pueblo t agrandi souvent divis en plusieurs ejidos mais il pas t substantiellement transform Il mme pu recevoir souvent des parcelles jidales si petites elles ne constituaient un complment de ressources ou supplment de salaire pour ses habitants qui restaient journa liers des haciendas voisines 14 Ce village pu se venger parfois sur les haciendas qui touffa ent comme lorsque les rapatistes brlrent des moulins sucre mais aprs avoir repris son d rtabli quilibre il pas prtendu abord liminer une insti tution qui elle-mme traditionnelle faisait partie de son horizon mental

11 Code agraire mexicain du 22 mars 1934 articles 43 45 et 99 prsident Abelardo Rodr guez) confirm et dvelopp par rdenas 12 CHEVALIER Survivances seigneuriales et prsages de la rforme

agraire dans le Nord au Mexique erue historique juil.-sept 1959 13 Code agraire dj cit art 119 122 14 Cf FERNANDEZ FERNANDEZ R.) cit par SILVA HERZOG J.) El

agrarismo mexicano la reforma agraria Mxico Fondo de cultura eco mica 1959 pp 546-547

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II est remarquable ailleurs avant rdenas ces ides fus sent implicitement admises par presque tous les gouvernements mexicains qui depuis Carranza Calles sauf Obregon) considraient comme but de la rvolution agraire tablissement une moyenne ou petite proprit individuelle laquelle condui sait le patrimoine familial inalinable suivant un terme de la Constitution de 1917 art 27 VII sans exclure absolu ment existence des haciendas Ils avaient d admettre ejido sous la pression paysanne populaire des pays du Centre et du Sud sensibiliss par le mouvement zapatiste qui malgr son caractre local malgr son chec apparent depuis assassinat de son chef projetait toujours son ombre suivant un terme expressif qui vient sous la plume mme de ses ennemis sur les discussions assembles et rsolutions gouvernementales Sans oser toujours avouer la plupart de ces hommes forms dans la tradition lib rale considraient donc Vejido comme une sorte de pis-aller une simple tape sans espoir de progrs conomique un compromis rendu ncessaire par les circonstances pour acheminer vers une paysannerie de propritaires ces pueblos encore si emptrs dans leurs traditions communautaires que la Constitution de 1917 les qualifie de corporations 15 Ainsi en 1923 se contentait-on at tribuer un lopin de terre de ha Vejidatario contre 25 au petit propritaire le premier serait peu prs satisfait et rcol terait de quoi nourrir sa famille tandis que le second produirait aussi pour la vente Enf ces gouvernants taient des hommes du Nord est--dire de pays o la communaut villageoise de cultivateurs existait pas aussi nette et avait jamais les pro fondes racines des pays de tradition indienne du Centre et du Sud Il serait ailleurs trs utile de savoir si avant rdenas ej do

peu prs tel il t dcrit avait vraiment russi implanter dans les provinces septentrionales une importante tude en cours de Moiss Gonz lez Navarro du Colegio de Mxico nous apprendra sans doute

Il faut reconnatre cependant que la brve prsidence de Portes Gil 1928-1930 semblait dj annoncer de grandes innovations

15 Art 27 VI Ce terme de corporaciones de poblaci est repris notam ment dans un dcret de Calles du 31 juillet 1925 Ce qui est dit plus haut de Carranza et Calles empche pas que certaines ides inspiration socia liste aient t inclues dans la Constitution de 1917 sous influence une aile gauche zapatiste de tendances plus radicales

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une tape dcisive dans le dveloppement de ejido rdenas 193 -19 0)

Pas plus que pour ses prdcesseurs nous ne prrendons tu dier de fa on systmatique uvre agraire de rdenas qui t dcisive Elle est ailleurs mieux connue Mais dans notre perspective il faut souligner certaines de ses initiatives qui tout en inflchissant le mouvement de rforme agraire ont rendu irrversible et dfinitif

Aprs le long gouvernement des gens du Nord celui qui arrivait au pouvoir Mexico tait un homme du Michoacan issu un milieu de paysans cultivateurs dans lequel il avait grandi plus sensible srement aux aspirations des pueblos de tradition indigne Le prsident allait voir dans Vejido ou plutt dans un ejido rnov non plus une sorte de pis-aller impos par les cir constances et destin cder un jour la place autre chose mais une institution bien adapte au pays et destine durer Car la petite proprit crivait-il dans un message en aucune fa on ne peut tre considre comme la forme vers laquelle on tend travers les ejidos qui constituent une institution distincte bien dtermine dans son origine dans son tablissement dans son organisation et dans ses fonctions conomiques 16 Comme Zapata quelques annes aprs le dbut de son mouvement mais beaucoup plus nettement que dans son cas rdenas tait influenc par le socialisme international dont il se rclamait lui-mme et ses ides semblaient venir relancer prolonger et surtout rnover le mouvement communautaire agrariste labor par les zapatistes plus de vingt ans auparavant Avant tout comme Zapata il avait la volont aboutir

On rpte en citant des chiffres variables que rdenas distribu lui seul beaucoup plus de terres que tous ses prd

cesseurs runis une partie de ces terres taient les meilleures du pays que la moyenne par ejidatario plus que doubl alors il fait reculer usure en fondant le Banco Nacional de Cr dito Ejidal qui dvelopp considrablement le crdit rural n en 1926 avec Calles On se proccupe moins de distinguer les attributions ou occupations non confirmes de terres de la remise de titres dfinitifs sur ces terres Comme le fait observer Moiss

16 Cit par SILVA HERZOG Jes s) op 410

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De La Pe oeuvre des vingt-cinq dernires annes en ce domaine reprsent en partie la rgularisation et la connrmation attri

butions ou occupations antrieures est ainsi que les prdces seurs de rdenas ont attribu au total 73 000 ha titre provi soire et 666 000 titre dfinitif intressant au total 778 000 hommes et que rdenas lui seul en distribu 861 000 sujets confirmation et 17889000 titre dfinitif intressant au total 810 000 ejidatarios Ces chiffres sont plus impression nants que ceux dont on fait tat habituellement car tout semble indiquer que les attributions dfinitives postrieures 1940 et surtout 1946 concernent une partie des 9861000 ha remis sans titres dfinitifs sous rdenas1T

Pour la premire fois en 1936 des haciendas irrigues juste ment les plus productives et les plus riches taient transformes on le sait en ejidos collectifs franchement diffrents cette fois-ci de Vejido de subsistance issu de la vieille comunidad pay sanne encore que la nouvelle institution en gardt des traces et ne ft pas con ue suivant des ides socialistes orthodoxes Enfin en 1937 tous les peones des haciendas purent demander librement former des ejidos18 la fin du mandat de rdenas les ejidos possdaient ainsi la majorit des terres irrigues de haut rendement 994 320 ha contre 905 770 pour la proprit prive ce qui reprsentait en soi une vraie rvolution conomique et sociale19

Mais une autre initiative capitale et peu cite fut organi sation de la Confederaci Nacional Campesina ou C.N.C. qui fut troitement associe au parti officiel de gouvernement le P.N.R. devenu ensuite le P.R.I. On ne voit l habituellement un moyen de plus essentiel ailleurs pour le Prsident et le Parti de contrler la masse des lecteurs paysans il est bien vrai que la C.N.C jou et joue toujours dans ce sens surtout au moment des lections prsidentielles il faut retourner aussi la proposition et nous croyons que par son canal les millions ejidatarios en titre ou en fait ont rellement un certain rle

17 DE LA PENA Moiss) El pueblo su crra op cit nous avons arrondi les chiffres au millier habitants)

18 Modification de art 45 du Code agraire par dcret du aot 1937 19 Censo ejidal de 1940 cf aussi STONE R.G Mexico Economie and

social conditions in Mexico September 1952 London H.M.S.O. 1953 94 Overseas economic surveys) Ie total des terres jidales lve suivant ces sources 28922000 ha en 1940 Je remercie ici Jean Meyer agrg histoire qui bien voulu complter mes chiffres sur ces documents

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dans orientation de la politique intrieure du Mexique comme le voulait rdenas en les associant au parti Mais par quelles voies prcisment comment dans quelles limites Voil ce que de nouvelles recherches devraient contribuer claircir

En tout cas aprs implantation de cette importante rforme il et fallu un vrai bouleversement politique pour que les ejidatarios lis dsormais au systme de gouvernement du pays perdissent toute leur influence Un tel accident tait difficilement concevable alors une fraction croissante de la classe majoritaire du pays prenait quelque conscience de ses intrts qui jouaient videmment dans le sens de la conservation des rsultats acquis

tous points de vue rsultats considrables qui pour essentiel reprsentaient le prolongement et le dveloppement trs vaste chelle une rforme dont on sait elle tait profondment enracine dans les structures mmes du monde rural Aussi est-il ais de constater que vingt-cinq ans aprs avoir quitt le pouvoir

rdenas jouit toujours un prestige sans gal dans la campagne mexicaine

La nouvelle orientation agraire et les exploitations hautement capitalises aprs 19

Aprs le grand effort ralis entre 1934 et 1940 il subsistait malgr tout des latifundia importance moindre cependant on ne dit est ainsi on cru constater aprs le recense ment de 1950 il existait encore officiellement cette date 708 domaines agricoles de plus de huit cents hectares totalisant plus de trois millions et demi hectares de terres de culture 20 ce qui et encore reprsent un norme capital Mais connaissant le milieu gographique on observera il agit srement de zones fort peu peuples montagneuses et tropicales pauvres o il arrive que la terre soit cultive une anne sur dix ou moins encore par le systme de la roza ou culture itinrante ainsi a-t-on pu crire que sur les 19928211 ha de labour recenss 9105707 se trou vaient en repos jachre Enfin il faudrait vrifier si dans ces grands domaines entrent pas des proprits publiques ou appar tenant des communauts indignes

20 Dans un travail fort intressant par ailleurs GUTELMAN Michel) endo dans la rforme agraire au Mexique Paris 1962 dactyl mmoire soutenu Ecole pratique des iiautes tudes 1962) pp 269 et 293

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Bien plus importants srement sont les grands domaines le vage et de bois ou pacages qui au-dessus de 1000 ha confondus avec ceux de culture taient au nombre de 10 519 et totalisaient 80 974 000 ha dans le recensement Mais Moiss De La Pe en critiquant les statistiques observe il faut en retrancher la plus grande partie des 393 domaines communaux et Etat totalisant prs de 20 millions hectares Nanmoins il subsiste ou subsistait plusieurs milliers immenses domaines privs repr sentant sans doute plus de 60 millions hectares21

Il agit bien entendu de zones de brousse tropicale et surtout de montagnes et plaines semi-dsertiques presque vides habi tants et propres seulement un levage trs extensif est ail leurs rdenas lui-mme qui cr la inat ect abilid ad ganadera ou inaffectabilit pour cause levage soumise rvision prio dique afin viter des attributions de terres qui puissent dsor ganiser ce genre levage tout en tant presque sans intrt du point de vue social Mais avec la construction de nouvelles routes et voies de pntration sous effet de la pression dmographique croissante certaines de ces terres latifundiaires ont pris de la valeur et ont t sollicites avec de plus en plus insistance ce sont surtout elles qui ont fait objet attributions nouvelles rela tivement peu nombreuses sous certains des successeurs de rde nas puis beaucoup plus importantes sous la prsidence de pez Mateos 1958-1964 qui fait tat de la remise de 10043000 ha entre 1958 et 1962 seulement dont 4453000 ha aux ejidos et

206 000 aux communauts indignes de statut un peu diffrent de ejido 22

il eu arrt ou changement orientation depuis 1940 dans le mouvement de rforme agraire ce est donc pas tant propos de ces latifundia de terres pauvres si importantes fussent les surfaces reprsentes du moins aprs on ait fait le nces saire pour satisfaire des rclamations locales et surtout depuis arrive au pouvoir du prsident pez Mateos

Mais la situation ne se prsente pas de la mme fa on pour les riches terres nouvellement irrigues aux rendements consid rables et rguliers sur lesquelles les statistiques officielles sont moins explicites

21 DE LA PENA Moiss) op cit pp 338-343 22 Departamento de Asuntos agrarios colonizaci Memoria de labo

res presentada por Roberto Barrios Mxico 1962 cf les tableaux de dotation de terres pour 1958-1962 et 1961-1962

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cet gard les successeurs de rdenas agirent souvent comme ils consirraient que somme toute on avait fait essentiel du point de vue agraire et que le pays devait surtout augmenter sa production grce au progrs technique sans parler de industria lisation Le souci du dveloppement conomique prit rapidement le pas sur les proccupations ordre social surtour on le sait sous la prsidence de Alem 1946-1952 On intensifia la construction de barrages pour irrigation de cultures riches desti nes exportation On attira les capitaux trangers Sans avouer on tendit considrer que Yejido mme amlior tait pas susceptible de adapter rapidement des exploitations modernes de type commercial Ce fut donc nouveau la proprit prive qui eut les faveurs non plus un futur patrimoine familial prconis par Calles qui malgr son anticlricalisme militant rejoi gnait l une conception des chrtiens sociaux mais un riche domaine de dimensions nullement modestes cr dans les zones nouvellement irrigues qui passrent en partie aux mains des hommes affaires et des amis du rgime La premire mesure Aleman fut en effet le 31 dcembre 1946 de porter de 100 300 hectares de terres irrigues la surface maxima de la petite proprit celle-ci cependant gardait ce nom il ne fallait pas effrayer la C.N.C. il agissait de cultures dites riches telles que le caf le cacao les fruits la vigne la canne sucre Il se dveloppa rapidement sur les ctes du Nord-Ouest et dans diverses zones irrigues tempres chaudes ou tropicales une agriculture intensive hautement capitalise qui trouvait aux Etats- Unis tout proches des dbouchs pratiquement illimits Des arti fices juridiques extrmement varis parfois pittoresques sur les quels nous ne pouvons insister ici permirent encore de tourner la limite suprieure de 300 ha pour constituer en fait certaines exploitations ou plantations trs vastes qui sans tendre comme les vieux latifundia des dizaines de milliers hectares en produisent pas moins des revenus suprieurs Cette proprit un genre nouveau exploite de fa on moderne et employant des salaris apparat gure dans les statistiques et elle est difficile

valuer parce elle est entre les mains de personnages influents et de puissants intrts que des critiques mme voiles formules par la vieille garde agrariste ou par des lments plus jeunes de la C.N.C. engagent videmment rester dans ombre

ces nouvelles exploitations capitalises en ajoutent autres gnralement moins importantes mais constitues aussi par de

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bonnes terres irrigues qui reprsentent notamment les morceaux des haciendas laisss leurs anciens propritaires Ceux-ci ont t obligs intensifier et moderniser la culture pour produire le maximum sur des espaces rduits est l note justement agronome Ren Dumont dans son livre Terres invantes un effet imprvu de la rforme agraire et de la pression de Tejido sur la proprit prive Ainsi les terres irrigues en proprit prive ont-elles presque doubl de surface entre 1940 et 1950 788000 ha contre 905000 alors que pour les ejicos elles augmentaient que de 23 1221000 ha contre 994000 Le recensement de I960 nous prsente une situation relativement plus favorable pour les dotations jidales 427 949 ha irrigus dans les ejidos contre 2087360 en proprit 23

Les gains raliss par ces diverses entreprises capitalises ont t autant plus considrables que les salaires ne suivaient avec retard la diminution rapide du pouvoir achat de la monnaie due

inflation Suivant les calculs de conomiste Loper Rosado la valeur relle des salaires agricoles minimum aurait baiss de 46 entre 1940 et 1950 Dans le total du revenu national leur part serait passe de 305 en 1939 23 en 1950 tandis que paralllement celle des bnfices en gnral se serait leve de 261 42 24

Bien tablis par un conomiste de valeur ces chiffres trs difficiles calculer sont sans doute discutables Mais mme ils sont exagrs il reste certain que les salaires rels des journaliers agricoles moins dfendus que les ejidatarios ont diminu dans de nombreuses rgions du Mexique prcipitant cette poque le mouvement migration saisonnire des braceros aux Etats-Unis La situation tait ailleurs diffrente dans certaines zones fron tires des Etats-Unis particulirement riches du point de vue agricole et depuis lors il semble que dans ensemble du pays ces salaires rels aient regagn du terrain perdu

Ce type agriculture donna un intrt si lev aux capitaux investis fut un tel stimulant pour esprit entreprise et cra une telle fivre de gain il se propagea certains secteurs de terres irrigues et riches des nouveaux ejidos crs par rdenas ou

23 Censos de 1940 et 1950 et Censo de 1960 31 Voir aussi STONE R.G.) op cit

24 LOPEZ ROSADO Noyola V. Jr. Los salarios reales en Mxico 1939-1950 El trimestre econ mico 1951 206 cit et comment par SILVA HERZOG op cit. 500

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plus rarement par ses successeurs Un excellent exemple celui de la valle du Yaqui dans le Nord-Ouest nous est signal par

Claude Bataillon aprs une tude trs rcente de agronome Fernandez Fernandez25 Voici quelle est la situation

1937 1952 1962 Surface irrigue en ha ............ 52000 120 203000 Nombre de dtenteurs ............... 178 933 Moyenne par dtenteur en ha ...... 16 24 32 Nombre c/rdaar os inn 7m

de terres en ejidos 300 700 200 37 30 32 -. l-A -(t.LX .............. J w/*-

Moyenne par ejidatario en ha ...... 13 20 Moyenne par petit propritaire en ha 39 38 44

En fait ces chiffres officiels ne reprsentent imparfaitement la situation car les exploitations relles aux mains de certaines familles atteignent 500 et mme 000 hectares oppos un nombre important ejidatarios concentrent les crdits du Banco Ejidal sur une partie de leur parcelle et donnent en location le reste 40 de la surface jidale est ainsi afferme Mais cer tains ejidatarios plus entreprenants ajoutent au contraire des terres affermes leur parcelle leurs exploitations deviennent des entreprises capitalistes rentables qui re oivent du crdit priv comme est le cas globalement pour quelques bons ejidos)

Ainsi coexistent de petits cultivateurs semi-rentiers aids par des crdits de Etat et protgs contre viction par la loi jidale et des agriculteurs exploitants de moyens et surtout de grands domaines hautement capitaliss Fernandez conclut au niveau technique lev de ce systme que le gouvernement se garde bien de dtruire malgr son caractre semi-illgal Cette zone produit en effet 40 du bl mexicain et du coton sur 60 000 ha o viennent travailler 000 braceros avant aller aux Etats-Unis)

Dans des rgions proches des Etats-Unis gnralement boni fies depuis la guerre est une grande entreprise prive Anderson and Clay ton qui avance argent ncessaire la culture du coton et qui achte les rcoltes aussi bien aux ejidatarios aux pro pritaires est le cas Mexicali qui produit 22 du coton mexicain) o les ejidos sont trs importants ils re oivent autant eau irrigation que les proprits prives et que les lots

25 Communication faite au Congrs tudes agraires de Tepic Nay.) Mexique en 1964

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sont de 20 ha Matamoros du coton mexicain les ejidos ne reprsentent que 20 de la terre et est la proprit prive qui domine elle est en grande partie aux mains hommes politiques qui ont pu acqurir crdit du gouvernement des lots de 100 ha pour 000 pesos

Quant aux anciennes haciendas productrices de coton ou autres denres riches qui furent transformes en ejidos collectifs par

rdenas est toute une tude particulire il faudrait faire pour savoir comment elles sont rellement exploites hui Notons seulement que dans la plupart des ejidos collectifs les par celles se sont individualises par une tendance naturelle des ejidatarios que pas contrecarre semble-t-il octroi adquat de crdits par le Banco Ejidal sous une prsidence comme celle de Alem 338 621 ha ejidos agricoles collectifs contre 9990625 ha ejidos individualiss en I960)26 Paralllement se dveloppait souvent sous des formes diverses une restructuration opre par des initiatives et des capitaux privs en marge natu rellement de organisation elidale est ainsi que des entrepre neurs payant une rente aux ejidatarios pouvaient reconstituer des units agricoles de grandes dimensions Mais on pourrait difficile ment parler l une rapparition des grands domaines en raison du caractre prcaire temporaire et mouvant de ces nouvelles exploitations Par ailleurs le Banco Ejidal rserve surtout son crdit pour les cultures irrigues et riches en premier lieu pour le coton qui parat absorber plus de la moiti des sommes avances

Du point de vue conomique est avant tout ces exploita tions capitalises proprit prive ou certains ejidos riches on doit le dveloppement spectaculaire de la production agricole mexicaine qui peu prs tripl de valeur relle depuis vingt- cinq ans ce qui est remarquable dans un pays montagneux et pauvre le fait est assez connu pour il soit mutile insister Mais il ne agit pas tant des produits alimentaires de base comme le mas pour lequel les statistiques trs difficiles tablir sont probablement trop optimistes27 que des produits chers ou des denres exportation comme on pouvait attendre tel le coton dont la production aise chiffrer est passe de 65 495 tonnes en 1940 414000 en 1959 reprsentant suivant les statis-

26 IV Censos ganadcro cjida 1960 op cit. 567 27 est opinion trs fonde de Moiss De La Pe exagration

du dveloppement de la production mais non de la production elle-mme) op cit. 489

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Ejido ei Stabilit au Mexique

tiques officielles une valeur peine moindre que celle du mas rcolt sur des terres six fois plus tendues 28

Du point de vue social ce genre de dveloppement agricole intresse trs directement un petit nombre de personnes En effet en 1958 il avait seulement 15 104 ejidata os recenss disposant de plus de 10 ha irrigus dont 191 de plus de 20 ha Mme si on peut considrer une partie des parcelles jidales irrigues comprises entre et 10 ha participent de agriculture hautement capitalise celle-ci intresse encore une fraction des 16670 arlos de ce secteur29 Quant aux terres non irri gues il faudrait assimiler aux prcdentes en raison un climat exceptionnellement favorable ou un levage capitalis elles ne peuvent intresser un nombre rduit ejidos Ainsi le nombre ejidafarios en titre directement concerns par ce type de dveloppement ne doit-il pas dpasser quelques dizaines de milliers de ordre peut-tre de ou du total et probable ment moins)

Ennn les propritaires de plus de 10 ha irrigus ne sont que 28 657 30 parmi lesquels beaucoup ailleurs sont des citadins appels ironiquement Mexico agriculteurs-nylon En ajoutant les propritaires des exploitations irrigues non recenses par le Ministre des ressources hydrauliques et ceux de tous les moyens et grands domaines capitaliss et non irrigus on arri verait encore un chiffre relativement modeste

Ces ej datarios un nouveau genre ont visiblement quelque poids dans les milieux gouvernementaux et peut-tre dans la C.N.C pour les mmes raisons ordre conomique que les pro pritaires ou gros fermiers de riches domaines irrigus influence de ces derniers est ailleurs autant plus importante que nombre entre eux sont des hommes politiques clients du rgime et amis de tel des anciens prsidents cause de la prosprit de leurs domaines producteurs de denres exportation et source des indis pensables dollars on ferme les yeux sur certaines irrgularits

28 Mxico cincuenta os de Revoluci La Econom Mxico Fondo de cultura econ mica 1960 621 voir 125)

29 Ibid 366 Ne sont pas inclues sous cette rubrique les petites par celles jidales irrigues recevant un certain crdit du Banco Ejidal et dont il sera question ci-dessous aprs le Censo de I960 il au total 178761 cjidafarios ayant des lots irrigus 150)

30 Ibid Total obtenu en ajoutant les anciens petits propritaires aux colons Ce chiffre concide presque avec celui du Censo de 1960 31

28486 obtenu en additionnant les propritaires de 10 25 ha et ceux de 25 50 ha

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Du point de vue social autre part ces exploitations en partie mcanises posent relativement peu de problmes car elles se trouvent surtout dans des zones basses et des terres tropicales nouvellement irrigues toutes peu habites et loignes des ejidos pauvres et surpeupls des plateaux ce qui vite les graves diffi cults tensions ou conflits que provoque gnralement ce genre de voisinage

Ainsi le gouvernement a-t-il russi garder un quilibre de compromis entre les ncessits une politique de dveloppement agricole en grande partie fonde sur la libre entreprise et autre part sa tendance sous certaines pressions sociales maintenir la rforme agraire dans la voie trace par la rvolution mexicaine

el do traditionnel et la petite exploitation paysanne

En 1960 le Mexique comprait au total 18699 ejidos dont des degrs trs divers 088 comportaient des terres irrigues La grande majorit entre eux restent dans la ligne traditionnelle de Yejido issu de la communaut villageoise est--dire dot de petits lots de terres non irrigues et pratiquant peu prs sans crdit des cultures vivrires de base ou bien cultivant aide un peu de crdit gouvernemental de minuscules parcelles irri gues prleves sur les terres des haciendas voisines Ces ejidos ont certes continu accrotre en nombre et en surrace aux dpens surtout des grandes exploitations extensives mesure que croissait la pression dmographique est--dire ils ont re de vastes tendues de brousse et pacages par millions hectares mme sous la dernire prsidence Mais nous disposons de moins de chiffres pour les attributions de terres irrigues de beaucoup les plus utiles on sait pourtant elles ont totalis 206 000 ha entre 1950 et I960 suivant le dernier recensement

La population continuait cependant augmenter un rythme rapide dernirement prs un million individus par an assure-t- on Mexico pour un total actuel proche une quarantaine de millions habitants Il lieu de se demander quel pourcentage de cette population dpend des ejidos Or il est pas ais de le savoir avec quelque certitude encore que le recensement de 1960 marque un grand progrs du point de vue dmographique aprs le Censo de 1940 il avait 601 479 cjidatarios en titre mais le total des diffrentes catgories ne donne que 222 859

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En 1950 les recensements donnent les chiffres de 1378320 et 552 926 sans doute selon on inclut ou non les bnficiaires

de certaines catgories de dotations de terres non confirmes les nombres les moins levs reprsentant seulement les ejidafarios pourvus de titres dfinitifs sur leurs lots31 Selon les calculs de conomiste Flores qui paraissent trs vraisemblables les pay sans ayant re des terres seraient au nombre de 196043 en 1958

Mais surtout le Censo de I960 beaucoup plus prcis que les prcdents indique 523 796 ejidatarios pourvus de terres 73 895

datarios sans terres et 723 536 ejidatarios associs soit 321 227 au total Il donne mme le nombre habitants que repr

sentent les familles des ejidatarios en incluant les gens qui couvrent plus de la moiti de leurs dpenses avec les produits de ejido elles totalisaient 12 320 824 personnes Le Censo signale

encore combien de journaliers ou salaris de plus de quinze ans ont travaill sur les ejidos 605 160 et inversement combien e/i- datarios ont travaill extrieur 387 42832

Que signifient ces chiffres ailleurs fort difficiles tablir on le sait dans le vaste monde rural mexicain Sur les ejidos ne vivent pas seulement les ejidatarios en titre bnficiaires un lot de terre mais aussi un grand nombre de gens plus ou moins associs eux parce ils ne trouvent pas ailleurs occupations permanentes il agit enfants adultes parents etc. qui vivent dans les communauts ejidales en dehors de leurs travaux saison niers ou occasionnels comme braceros aux Etats-Unis journaliers man uvres etc Flores estime ailleurs il avait en 1961 au moins un million hommes qui avaient sollicit vainement une parcelle ejidae et avaient pu obtenir un document reconnais sant leurs droits futurs certificado de derechos sauo est donc probablement bien plus du tiers de la population totale qui dpend ft-ce partiellement des ejidos Et sans doute faudrait-il tenir compte encore des paysans trs petits propritaires et mtayers medieros qui on le verra sont proches des ejidatarios et en partie confondus avec eux

31 Ces diffrentes sources statistiques devraient tre entirement revues compares et critiques pour que on puisse tre sr des chiffres ce que nous avons pu faire

32 Cf Censo dc I960 op r. tabi 41 et 42 pp 557-560 33 Cf TAMAYO Jor L. Geograf general de Mxico l* ed. IV

Geograf econ mica Mxico Instituto mexicano de investigaciones econ micas 1962 781 p. pp 83 84 92

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Ejidos pauvres comme les communauts dont ils sont issus et trs souvent ejidos surpeupls voil la situation que nous pouvons constater pour la majorit entre eux qui ainsi offrent gure intrt pour importants capitaux privs pas plus que pour les capitaux Etat du point de vue strictement conomique Mais pour des raisons ordre social et politique ces derniers de toute fa on insuffisants fourniront des crdits aux secteurs les moins dfavoriss selon le Cen de I960 633535000 pesos environ 250 millions de francs actuels sont octroys aux ejidos par des institutions nationales de crdit tandis que des banques prives avancent 242 911 000 pesos aux ejidos les plus rentables bien sr oppos de ce qui se passe pour les ejidos et pro prits hautement capitaliss ces ejidos majoritaires de faible valeur conomique ont une importance sociale considrable et ils psent croyons-nous dans la vie politique de fa on encore impor tante

Examinons de plus prs cette situation conomique et sociale de la grande majorit des ejidos Pour eux les causes une cer taine stagnation conomique sont simples presque videntes

En premier lieu elles rsident dans le fait que les ejidos ont naturellement t crs l o se trouvaient les pueblos dont ils sont issus est--dire les anciens noyaux de population dont ta blissement obi des raisons ordre historique bien plutt conomique mises part videmment les zones semi-dser tiques o toute agriculture tait impossible avant irrigation moderne Ce phnomne est certes commun tous les peuple ments antrieurs au dveloppement de conomie moderne mais ses consquences sont bien plus graves dans un pays comme le Mexique essentiellement montagneux compartiment et coup par les ravinements du haut plateau avec des pluies gnralement insuffisantes et mal rparties dans anne elles laissent une saison compltement sche qui devient de plus en plus longue

mesure que on va vers le Nord Les conditions gographiques et climatiques commandent donc

conomie de ces ejidos dans la mesure o la main de homme ne les pas substantiellement modifies Or les grandes trans formations modernes ont assez peu intress leur milieu naturel ni irrigation de vastes zones par la construction de barrages

on vu en chiffres ni la marche la mer est--dire

34 Ces chiffres sont donns par le Censo sous toutes rserves

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Ejido er Stabilit au Mexique

les efforts de mise en valeur des plaines ctires chaudes raliss surtout depuis vingt ans Les statistiques officielles montrent ail leurs entre 1940 et 1950 les ejidos ont accru leur superficie de terres arables que de 545646 ha contre 3311 537 pour la proprit prive Entre 1950 et 1960 cet accroissement t de 538 381 ha pour les ejidos qui atteignent alors 10 329 347 ha et de 350 268 ha pour la proprit prive qui atteint alors 13487663 ha

Des progrs considrables ont t raliss certes dans en seignement lectrification ouverture de voies de communica tion etc. mais ils ont pas toujours amlior immdiatement les niveaux de vie individuels des ejidatarios et paysans Les normes avantages des voies de communication ont pu tre momentan ment contrebalancs par lvation du cot de la vie la dispa rition artisanats locaux occasion de nouvelles dpenses etc Enfin les distributions de terres qui ont t faites notamment pour levage ont eu habituellement que des effets limits en raison de la rapide croissance dmographique pas toujours compense par migration vers la ville favorise par industrialisation si importante soit-elle

Plus que les habitants des anciens pueblos touffs par les haciendas au dbut du sicle les ejidatarios tirent profit de par celles individuelles Mais celles-ci restent fort rduites on le sait Suivant le recensement de 1940 874 des ejidatarios en titre cultivaient des lots infrieurs 10 ha ce qui dj serait peu compte tenu de la faible proportion de terres irrigues et du fait que dans des terres gnralement peu favorables il est difficile de cultiver chaque anne la totalit de la surface disponible par la suite la situation se serait trs lgrement amliore la pro portion tant abaisse 8428 en 1950 et 838 en 196035 En ralit les cas concrets ejidos traditionnels que nous con naissons nous donnent penser que depuis 1940 le nombre des personnes dont le sort dpend de ces modestes lots individuels

t abord en augmentant et nullement diminu par la suite Car depuis vingt-cinq ans de nombreux adultes vivent de Vejido soit avec leurs parents ejidatarios en titre soit comme locataires une fraction de parcelle en contradiction videmment avec la loi ejidale formant une population rattache en fait la commu naut elidale mais dpourvue de droits et partiellement mouvante

35 Ces proportions ressortent de tableaux tablis par GUTELMAN op cit. pp 279-280 puis par nous pour 1960 partir du Censo 562

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On retrouve l une situation parallle celle de certaines communauts indignes du haut Prou par exemple o exis

tent deux types habitants les comuneros ou vecinos en titre jouissant une terre ils ne peuvent aliner ailleurs en dehors de la communaut ils constituent une sorte de classe suprieure issue des anciens habitants en nombre relativement stable) ct eux tous ceux qui sont dpourvus de terre Avec toutefois une diffrence essentielle est que les haciendas subsistent intactes alentour et que les communauts pruviennes sont gnralement enserres par ces grands domaines avec lesquels elles se trouvent souvent en tat de friction autant plus elles gardent le sou venir cuisant avoir t en partie dpouilles une poque assez rcente quelques dcennies ordinairement Elles les envahissent quand elles le peuvent comme nous avons constat de visu esp rant ainsi rsoudre leur problme de plus en plus aigu du manque de terres

Les ejidos mexicains se trouvent donc dans une situation bien meilleure si mdiocres soient-ils parfois leurs lots sont gnrale ment bien plus importants et moins pauvres que les quelques sillons des communauts andines situes entre et 000 altitude Ils ont limin les haciendas voisines aprs une longue rivalit qui avait dbouch dans le soulvement zapatiste et la Rvolution Les riches proprits prives qui existent hui ne se trou vent gnralement pas en contact avec eux Aussi les ejidatarios gardent-ils impression avoir gagn la partie Ils ont la terre avec peu ou pas de crdit certes de l les diverses formes usure dont dpendent toujours les cultivateurs trs pauvres pour des avances de mas occasion des semailles ou avant la rcolte pour la location animaux de travail pour des secours en cas accident ou simplement une aide occasion un mariage ou un enterrement. ainsi pour beaucoup la moiti ou les trois quarts de la rcolte servent-ils rembourser les avances Mais les plus frustes de ces paysans dont une partie importante reste illettre ne con oivent pas trs clairement semble-t-il le lien entre ces maux et absence ou insuffisance du crdit Peut-tre voient- ils difficilement au-del de la possession de la terre autant que ceux qui les exploitent peuvent tre des personnages issus du mme milieu eux

Enfin les modestes ejidataros peuvent parfois profiter du crdit gouvernemental en particulier dans les zones de culture de la canne comme le Morelos mais en change ils sont obligs de


rserver cette production au moins le tiers de leurs terres dans ce cas assez frquent le groupe est renforc par absence relative de tensions internes autres que celles qui peuvent natre de ex trme exigut des parcelles due au surpeuplement de Vejico Dans la conjoncture prsente est l la situation la plus favorable

Sous angle conomique on vu un autre handicap pour Yejico traditionnel dans la situation congele cre par une organisation qui freine la mobilit toujours ncessaire au progrs conomique est ainsi que exprime agronome Ren Dumont dans Terres vivantes ou une fa on analogue conomiste mexi cain Manuel Girault

est peu prs dans les mmes termes que exprimaient en France les hommes clairs du xvine sicle et au Mexique les libraux du xixe lorsque les premiers dnon aient les graves incon vnients que prsentaient les servitudes collectives de nos vieilles communauts paysannes et les seconds immobilisme que crait organisation archaque des comunidades indiennes Pour nos anciens conomistes comme pour les hommes de la Rforme mexi caine ces structures traditionnelles interdisaient aux individus dous un esprit de progrs agrandir ou amliorer leur exploi tation Ils avaient pas tort mais depuis lors exprience bien montr au Mexique on ne pouvait impunment prcipiter la lente volution des communauts vers individualisme sans risques de provoquer leur destruction brutale physique parfois et acca parement de toutes leurs terres par les haciendas voisines ou par des commer ants et leveurs plus volus est un point commun de plus entre ejido traditionnel et la communaut dont il est issu car les expriences librales des sicles en Am rique fort mal connues ailleurs invitent une grande prudence si on veut viter ces ejidos le sort de beaucoup de communauts tant au Mexique travers tout le continent en particulier dans les pays andins o nous tudions

Actuellement organisation des ejidos est pas en gnral trs rigide et on ne peut parler vritablement une situation congele Les individus dous initiative ont quelques possibi lits amliorer leur situation sur place Nous le voyons dans un des rares exemples ejido tudi de fa on prcise ce qui con firme des observations non chiffres que nous avons pu faire par ailleurs Ce cas illustre en gnral bon noinbre des phnomnes dcrits

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Cet ejido du Morelos t tabli en 1924-1930 mais il reste savoir il pas simplement pris la suite un ejido zapatiste

En contrepartie de obligation de cultiver la canne sucre sur le tiers des terres le crdit est organis petite chelle) ce qui est pas toujours le cas

Voici la structure de ejido que nous avons rsume et syn thtise en un bref tableau

127 ha irrigus 54 ejdatarios en titre

19 cultivent exactement leur lot 11 cultivent plus que leur lot dont donnent en location tout leur lot femme malades.

18 donnent en location une partie de leur lot femmes etc.

En outre un nombre important non chiffr de non-e/7cfa- tarios vivent sur place du moins une partie de anne Parmi eux 21 aident leurs parents cultiver leurs lots ou ont obtenu en loca tion des morceaux de lots ce qui reprsente au total 69 culti vateurs effectifs pour les 127 ha et quelques supplments alen tour Les autres bien plus nombreux sont en gnral ouvriers agricoles tendue des terres cultives rellement et non lgale ment par chaque chef de famille se prsente ainsi

au sommet de chelle de trs modestes concentrations de parcelles 408 ha en moyenne au milieu 218 ha en moyenne pour 19 ejidatarios en bas de chelle 14 ha en moyenne pour 21 tout petits exploitants dont 14 non ejidatarios

Parmi les premiers quelques cultivateurs entreprenants rcoltent aussi du riz qui est un bien meilleur profit mais exige plus de soins et une mise de fonds plus importante Tout au bas de chelle une srie ouvriers agricoles font des efforts dsesprs pour devenir de petits cultivateurs locataires ce qui est diff cile en raison du haut loyer des terres 800 000 pesos hectare soit 350 400 du fait de la concurrence ils rus sissent parfois est grce leurs conomies de braceros tempo raires aux Etats-Unis

observateur Schwartz conclut que sur cet ejido on tire le meilleur parti possible une mauvaise situation due au surpeuplement et une pulvrisation de la terre et voit en fin de compte une image relativement quilibre de la rpartition des terres Il estime en mcanisant agriculture 15 de la main-

uvre actuelle suffirait la vraie solution serait donc de pouvoir


employer les hommes ailleurs 36 De notre ct nous avions assez souvent retir des impressions parallles de la visite autres ejidos o la situation est ailleurs pas toujours aussi favorable la majorit entre eux ont que des terres non irrigues o sont pratiques des cultures de subsistance essentiellement le mas tra ditionnel et surtout ils ne re oivent pas de crdits ce qui favo rise les multiples formes de prts usuraires gnralement en nature soit par des capitalistes de extrieur soit plus souvent encore par des boutiquiers ou moyens exploitants du cr plus entreprenants ou plus conomes que les autres L le danger accaparement des lots voire de ruine complte et limination des ejidatarios est plus grand ailleurs

Ainsi les rgles freinant la mobilit des terres dans Vejido sem blent-elles fort prudentes du moins dans tat actuel des choses La situation est pas suffisamment congele pour interdire certaines initiatives extra-lgales que les puristes qualifient peut- tre trop vite abus elles restent dans certaines limites Mais si tous les freins taient enlevs il nous parat certain la fois dans les zones irrigues les plus riches qui intressent le grand capital et dans les rgions les plus pauvres et les plus dpourvues de crdit o svit usure on reviendrait souvent ac caparement des terres et limination physique des plus faibles La loi mme peu applique reste une menace lorsque ceux elle est cense protger ont malgr tout quelque poids dans la politique du gouvernement comme est le cas pour la C.N.C. depuis

rdenas Enfin entre les extrmes de Vejido entirement capitalis ou

totalement dpourvu de crdit se situe un dbut de paysannerie j idale dont on vu un exemple dans le cas cit du Morelos L Vejido est plus la vieille communaut traditionnelle il en faut et individualisme fait de lents et srs progrs elido reflet populaire traduit visiblement une poque de transition Il nous semble que la mentalit des ejdatarios volu et continue vo luer vers celle du petit propritaire bien plutt que vers une forme de socialisme comme certains croient le voir du moins si Vejido est emport par son propre poids comme suivant sa dynamique interne et en absence interventions extrieures suffisamment nergiques pour en modifier la trajectoire est ce que on cons-

36 SCHWARTZ T.) usage de la terre dans un village ejido du Mexique Etudes rurales 10 1963 pp 37-49

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tate galement dans la rforme agraire bolivienne o on assiste une extraordinaire fragmentation de toute la ierre occupe par

les groupes villageois malgr les efforts pour implanter un mini mum de coopration dans la culture)

Au Mexique cette volution de la parcelle jidale vers une sorte de petite proprit apparat assez bien dans des cas comme celui qui t prcdemment chiffr pour la province de Morelos L une trentaine ejidatarios sur 54 en titre cultivent chacun quelques hectares de terres irrigues depuis trente-cinq ou qua rante ans probablement Ce sont des gens conservateurs recon nat en passant Schwartz Le cas est particulirement net peut- tre lorsque les ejidatarios pratiquent la polyculture avec prdomi nance du mas traditionnel dans des conditions peu prs accep tables comme nous avons pu le constater au cours de conversa tions dans les provinces de Mxico et Morelos par exemple ces hommes stabiliss sur leur lot ont pris une mentalit de paysans profondment attachs leur lopin de terre pour qui la culture est un genre de vie bien avant tre un moyen de gagner de argent comme crivait Andr Siegfried il quarante ans avant que les anthropologues sociaux redcouvrent rcemment ce type social ils ont appel folk

Quelle diffrence a-t-il entre cette catgorie ejiclatarios et des petits propritaires ayant acquis leurs parcelles depuis la rvo lution Que les seconds aient le droit de vendre ou hypothquer leur terre Mais en fait les premiers pourraient aussi aliner et les uns comme les autres usent que rarement de cette facult car ils envisagent gure autres fa ons de vivre Les uns comme les autres sont visiblement attachs la Rvolution agraire ou plus exactement aux personnalits qui la symbolisent avec cer taines rserves pour des groupes anciens de petits propritaires pour des raisons ordre religieux Ainsi explique la popularit extraordinaire unique au Mexique un homme comme rdenas que nous avons bien souvent constate comme aussi celle plus localise et bien plus lointaine dans le temps de Zapata que seuls maintenant les gens gs ont pu connatre personnellement

Mais revenons exemple prcis du Morelos il est vrai un certain nombre ejidafarios ont alin de fa on temporaire seu lement tout ou partie de leur lot car il se fait une sorte de slection naturelle mais ce sont visiblement les cultivateurs sta bles qui donnent le ton chez ceux qui ont pas de terre nat ambition et espoir en acqurir par des locations de longue

Ejido er Stabilit au Mexique

dure qui feront eux de petits cultivateurs la situation fort prcaire Ils font des efforts considrables pour parvenir notam ment grce leurs conomies de braceros ils engloutissent par fois sans russir dans les loyers trs levs on vu

Ce milieu paysan des ejidos offre donc souvent beaucoup des caractristiques un milieu de trs petits propritaires avec lequel il tend se confondre mme attachement la terre et mme stabilit lorsque leurs lots leur sont garantis ce qui pas tou jours t le cas mais aussi parfois mme tendance un indivi dualisme excessif ce qui est un phnomne en partie rcent distinct de la communaut o les autorits traditionnelles et les anciens faisaient rgner un ordre coutumier peu prs disparu hui Chacun tend se replier sur sa terre et isoler de ses voisins lorsque ne est pas cre une discipline nouvelle du fait principalement un certain dirigisme de la part du gouver nement mexicain quand il peut fournir des crdits et des cadres

En raison de la monte dmographique celui-ci se trouve en effet devant le grave problme de la pulvrisation des parcelles qui apparat en partie dans les statistiques En attendant de pouvoir porter remde par ouverture de nouveaux dbouchs dans industrie ou ailleurs ce qui est une oeuvre de longue baleine peut-tre faudrait-il multiplier les ejidos comme celui que nous connaissons Santa Maria Narivitas Etat de Mexico o le gou verneur regroup les minuscules portions de chaque lot semes de mas haricots lgumes et fourrages en ou zones de cul tures relativement vastes qui sont cultives par quipes il cr enfin des activits artisanat menuiserie soudure etc. et de petit levage pour procurer aux ejidatarios des occupations et res sources supplmentaires Mais cette exprience russie dans en semble est malgr tout assez coteuse et ncessite la prsence durant plusieurs annes un agronome et de cadres subalternes que le Mexique ne possde en petit nombre Enfin quelques scissions se sont produites dans ido sous effet des critiques de ceux qui voient du communisme dans toute tentative or ganisation cooprative du travail

Ce sont des problmes analogues que pose la trs petite pro prit sur laquelle nous ne pouvons nous tendre ici Elle est moins connue encore que les ejidos car on mme pas une ide approxi mative de importance numrique de celle qui est antrieure la Rvolution et apparaissait pas dans les statistiques Pour tre assez localiss les petits propritaires en taient pas moins nom-

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breux par exemple dans la partie leve de Etat de Jalisco et les zones limitrophes o prcisment ils semblent avoir constitu es sentiel des troupes du soulvement Cristero en partie contre-rvo lutionnaire pour des raisons ordre essentiellement religieux

Mais la petite proprit est issue en majorit de la Rvolution Il avait au total aprs le recensement de 1950 020 747 petits propritaires de moins de ha sur 504 397 ha soit 8254 des propritaires du pays sur 1351 de la surface en culture possde en proprit prive dans le pays En I960 ils taient 899 108 sur 328 106 ha Mais ces chiffres sont-ils trs srs Suivant un calcul ralis en 1964 par la C.N.C. il existerait actuellement un demi-million 498399 de proprits de moins de

ha3 Comme pour la trs petite exploitation jido la minuscule

proprit ne peut souvent se maintenir et parfois se constituer que grce certaines conditions dont on mesure mieux impor tance quand on constate les effets de leur absence en tels pays Amrique du Sud nous voulons parler de phnomnes comme migration saisonnire des braceros trs suprieure aux statis tiques semble-t-il 800 000 chaque anne Les journaliers eji datarios et trs petits propritaires vont chercher aux Etats-Unis un complment de ressources qui supple au manque de crdit leur permet viter endettement et de limiter le rle de usure acqurir et de conserver un lopin de terre gnralement dans anciennes terres de communaut ou enfin de louer une fraction de parcelle jidale est grce Dieu et aux Amricains que ai pu acqurir ma terre nous disait Tiacotepec un petit propritaire de trois hectares et demi de terres non irrigues mais relativement humides qui redevient ailleurs bracero de temps en temps pour maintenir ou amliorer sa situation acquise Ainsi la proximit des Etats-Unis et de son immense rservoir de capitaux joue-t-elle de cette fa on et par autres voies moins directes comme un facteur de stabilisation sociale fragile il est vrai mais indispensable aux chelons les moins levs une petite paysannerie mexicaine

Du point de vue conomique la situation de la grande majorit des ejidos reste donc mdiocre comme on pouvait attendre

37 Cf le Censo agr cola ganadero pour 1950 Les pourcentages ont t calculs par GUTELMAN op cit. 269 Cf aussi le Censo de 1960 pp 16 25

38 Pressa latina Praha) janv 1965


une institution reste asse; proche des anciennes communauts dont elle est issue dans un vaste pays gnralement montagneux et sec Les progrs importants qui ont t raliss depuis la Rvo lution agraire ont t compenss et peut-tre au-del par une croissance dmographique plus rapide encore que le dveloppement industriel et aussi un moindre degr par augmentation gn rale des besoins qui est un phnomne de caractre universel

tout cela on ne voit pas actuellement de solutions trs rapide ment satisfaisantes si des investissements massifs gigantesques mme ne sont raliss dans industrie et dans la constitution de vastes zones irrigues ou bonifies qui seraient mises la dispo sition des paysans Mais sans doute pour ceux-ci le travail serait-il plus efficace et les rendements meilleurs si on pouvait au moins comme dans exemple de Santa Maria Nativitas utiliser des semences slectionnes regrouper les cultures des minuscules par celles pour un travail en quipe et dvelopper certaines activits artisanales

Du point de vue psychologique social et finalement poli tique la situation apparat diffrente Sous rserve tudes beau coup plus prcises et enqutes systmatiques sur les mentalits les pages qui prcdent ont tendu montrer le dveloppement frquent dans les ejidos en absence nergiques interventions extrieures une paysannerie pas trs loigne de celle de petits propritaires individualistes qui vivent pour leurs champs plus encore que de leurs champs

Mme trs pauvres et sans autre crdit souvent que les res sources sporadiques du bracero les ejidatarios qui ont re leur lot titre permanent ce qui est pas toujours le cas ont bien impression que la terre est eux et pour le moment ils ne con oivent pas trs nettement autre objectif essentiel que de conserver cette quasi-proprit Il est pas rare ailleurs ils soient aussi les authentiques propritaires de quelque parcelle situe non loin de l La hacienda irritante ou pressante disparu enfin car les morceaux qui subsistent ont plus une importance dcisive sur les plateaux mexicains pour la plupart les nouveaux

domaines irrigus se trouvent loin et il peu occasions de frictions encore il ait parfois des occupations de zones irri gues par des paracaidistas litt parachutistes ou paysans sans terre

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Aprs tout chacun eu sa chance semblent penser bien des ejidatarios qui manifesteraient presque occasion une certaine admiration pour les gens habiles qui ont su se servir les premiers et garder la meilleure part du gteau Il certes de nouveaux matres voire parfois de petits despotes on aime pas et on craint le boutiquier prteur le politicien local commissaire jidal dput prsident municipal... qui peut tre aussi une sorte de cacique est--dire celui sans qui rien ne peut se faire dans le pueblo Mais si on ne oppose pas leurs desseins ils vous laissent vivre tant bien que mal sur votre lopin de terre

Quant au gouvernement il fait constamment des dclarations en faveur des paysans voquant les rsultats de la Rvolution et la remise de la terre aux ejidos il promet de eau des routes des coles et de fait quelques-unes des promesses sont renues il jure il est en train liminer les gros exploiteurs ennemis de la Rvolution. Les paysans sont toujours aussi pau vres mais ils restent attachs cette Rvolution qui leur donn ce ils dsirent le plus un morceau de terre Quand on le leur demande ils donnent leur vote au parti qui en rclame sauf parfois lorsque le cur leur dit le contraire Ils se souviennent de

rdenas et ils attendent patiemment des Jours meilleurs Comme le dit Moiss De La Pe qui les connat si bien ils gardent esprance c)

Cette mentalit se dessine plus clairement aux yeux de obser vateur qui visit plusieurs pays des Andes par exemple o subsistent intgralement de vieilles structures sociales principale ment celles de la proprit Tantt la paysannerie non plus pauvre mais misrable semble tout fait immobile tantt on sent un malaise et une inquitude o perce parfois un sentiment hostile et agressif dont on ne sait trop il est dsespoir ou espoir bien dif rent en tout cas de atmosphre comparativement dtendue qui rgne dans les ejidos mexicains que nous connaissons et mme nous a-t-il sembl chez les paysans boliviens qui se sont appropri la terre Nous ne voudrions pas simplifier schmatiser et par l dformer image de situations complexes et mouvantes extrmement difficiles saisir Surtout nous ne voudrions pas pro jeter inconsciemment sur la ralit observe des ides apparence trop logique et rationnelle pour ne pas paratre suspectes en-

39 Nous avons trouv confirmation des observations qui prcdent dans les pages rcentes de Moiss DE LA PENA op cit. pp 330-336


quteur Cependant en passant nos observations au crible une critique aussi objective que possible nous ne pouvons chapper aux impressions profondes que nous ont successivement causes nos contacts avec ces diffrents milieux ruraux

Quant au fonctionnement interne des ejidos il est certes pas aussi dmocratique que la thorie pourrait le laisser supposer car les assembles gnrales de chaque unit en principe sou veraines sont souvent domines en fait par les petits caciques les coalitions intrts particuliers ou compadrazgos du cr elles sont en partie prisonnires aussi un certain dirigisme ou parfois no-paternalisme gouvernemental qui tend affirmer sous la tutelle du Dpartement agraire de Mexico justement soucieux de contrler certains abus et malversations des responsables locaux orienter aussi conomie j idale par octroi de quelques crdits et achat des rcoltes travers les organismes officiels Il en est pas moins vrai que les cjidatarios sont amens se runir priodiquement pour voquer des problmes qui les intressent au premier chef ils peuvent opiner dans les cas o les intrts personnels des gros ne sont pas en jeu et que dans les autres cas ceux-ci doivent ft-ce pour la forme obtenir leur vote ou leur adhsion Ainsi Vejido reprsente-t-il dans une certaine mesure et mieux que la trs petite proprit un apprentissage admi nistration de ses propres affaires et un moyen veiller esprit de coopration Parfois il est vrai les assembles provoquent fort peu intrt de la part des ejidataros qui assistent pas volon tiers mais dans autres cas ceux-ci trouvent occasion et le moyen exprimer leurs plaintes ou leurs ux Surtout lorsque Vejido est importance rduite ou moyenne il tend remdier

une certaine carence de organisation municipale qui gure autonomie et de moyens propres malgr des aspirations popu laires maintes fois exprimes au sicle passe au moins dans le Nord et malgr les ides des premiers rvolutionnaires libraux sur la vie municipale prmisses obligatoires de la dmocratie

Mais en dehors du domaine de leur propre administration les ejidos ont un autre rle dans la politique gnrale celui-l travers la Confederaci Nacional Campesina qui reprsente depuis 1938 la gnralisation tout le Mexique et incorporation au Parti officiel par rdenas un syndicat paysan cr en 1935 dans diverses provinces En effet tous les trois ans les commis sariats excutifs lus dans chaque ejido dlguent deux de leurs membres pour choisir dans tout le pays plus de 500 comits

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locaux dsignant leur tour 32 comits provinciaux Ceux-ci li sent enfin parmi leurs membres le comit national excutif de la C.N.C 14 personnes qui reprsente les ejidos dans le parti officiel et pse sur son Comit central excutif donc sur la dsi gnation du prsident et sur le gouvernement en gnral40

Suivant un tableau statistique des effectifs syndicaux lis au parti officiel P.R.I.) tabli par Scott qui signale ailleurs le caractre dans une certaine mesure artificiel des chiffres donns en raison de adhsion obligatoire) la C.N.C et les syndicats affilis compteraient 650 000 membres dont 500 000 ej datarios sur un total de 621 000 syndiqus venant de loin avant la C.T.M Confdration des travailleurs mexicains avec ses

500 000 adhrents Tous les autres syndicats sont beaucoup moins nombreux sauf la Confdration nationale de la petite proprit agricole avec 850 000 membres rattache au secteur

populaire du P.R.I. fond seulement aprs rdenas Mais ce dernier syndicat groupe aussi sous le nom de petits propri taires des exploitants hautement capitaliss et gros fermiers qui

ont pris une grande influence alors que la C.N.C reste semble- t-til plus proche des paysans ejidatarios dfendant mme les int rts des ejidos avec une certaine rigidit comme le reconnat Scott 41 Mais il est vident que le gouvernement dirig par le prsident qui peut se rvler peu agrariste intervient de son ct dans le choix des membres de la C.N.C aux chelons levs et que par consquent les influences sont au moins rciproques autre part au niveau local les intrts particuliers sont puis sants on le sait Malgr tout il parat bien travers la C.N.C une fraction plus consciente de la masse paysanne des efidararios parvienne associer dans une certaine mesure la prsidence ses tendances et ses aspirations comme avait voulu rdenas et que la C.N.C elle-mme constitue souvent par ses interven tions comme aile gauche du P.R.I

Il est trs difficile apprcier cette influence encore on puisse chiffrer par exemple au Parlement fdral le nombre des dputs du P.R.I prsents par le secteur agraire ou le nombre des gouverneurs de provinces ayant la mme origine Mais les

40 TUCKER William P.) The Mexican government today Minneapolis University of Minnesota Press 1957 pp 53-54

41 SCOTT Robert) Mexican government in transition Urbana University of Illinois Press 1959 333 voir 171 Cf les effectifs syndicaux pp 166-167

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effets en sont visibles Malgr les pressions videntes des secteurs urbains et des puissants intrts conomiques avec lesquels les prsidents successifs sont forcment en contact il est tout fait significatif aucun de ces derniers si diffrents fussent-ils de temprament ait jamais pris de mesure contraire institution de Vejico mme si certains entre eux ont en fait nettement favoris autres secteurs agricoles et si les plus proches colla borateurs de un eux pouvaient dans le priv laisser percer des convictions intimes opposes Toutes les dclarations officielles ont dfendu ou mme exalt institution comme si elle tait le symbole mme de la Rvolution Toutes les statistiques ou allu sions officielles ont voulu prsenter une continuation de oeuvre de rdenas

En particulier le prsident antrieur actuel tenu suppri mer au profit des ejidos beaucoup des latifundia qui subsistaient dans des zones isoles ou arides sous le nom inaffectabilit levage A-t-il attribu aux ejidos beaucoup de terres nouvel lement irrigues est l un point important que les statistiques actuellement disponibles ne permettent pas encore lucider clai rement avenir dira si un virage plus nettement social tait amorc Mais il semble arrivent dj au niveau le plus lev les protesta tions qui commencent lever sous effet tant une pression dmographique croissante que une lente prise de conscience de la part lments jeunes et plus volus de la C.N.C Enfin et surtout la rvolution agraire cubaine est pas sans influer sur une partie de opinion comme bien sur sur la politique du prsident qui surveille ses rpercussions dans le pays

Ainsi depuis rdenas agrarisme apparat-il comme une politique relativement constante du gouvernement mexicain par ticulirement attentif depuis quelques annes maintenir en paix une masse de paysans ejidafar os quelquefois inquite surtout depuis peu mais toujours attache dans ensemble au souvenir de la Rvolution agraire qui de fait t le seul avantage rel et tangible obtenu depuis bien longtemps par le monde rural Si fruste soit-il celui-ci en bien le sentiment et comme Whetten nous avons jamais entendu un seul ejidatario regrettcr un pasy jug rvolu

Mais politique jidale paix sociale et stabilit politique ne vont-elles pas de pair Ne seraient-elles pas dans une large mesure les faces diffrentes un mme phnomne historique Il est impossible de mettre en parallle cette paix et cette stabilit mexi-

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came avec celles assurent au moins apparemment ces longs gouvernements personnels toujours plus ou moins appuys sur un appareil militaire ou policier Le cas du Mexique est donc peu prs sans prcdent parmi les pays forte population origine indigne ou mtisse est--dire en partie hritier une situation coloniale Il aurait lieu admettre comme trs probable que la stabilit politique est lie absence de graves tensions sociales voire une certaine possibilit de exprimer aussi pour la majo rit de la population intresse surtout conserver des rsultats acquis dans le domaine agraire mme si les avantages obtenus sont devenus actuellement presque illusoires pour elle du point de vue conomique

Cette stabilit est lie aussi bien sr aux progrs trs impor tants de industrie de conomie urbaine et en partie de co nomie agricole des communications er des changes tous facilits en un sens par immense rservoir de capitaux que reprsentent les Etats-Unis tout proches Mais il ne faut pas perdre de vue que les secteurs urbains compris les secteurs ouvriers stables qui sont les grands bnficiaires de cette situation font figure de privilgis et que malgr leur croissance ils restent une minorit dans un vaste pays adviendrait-il de cette belle stabilit poli tique si la situation venait se dtriorer dans un monde rural de plus en plus dense dans un pays o montent des gnrations pour qui uvre de rdenas est del ancienne sinon dpasse Les gens encore satisfaits par la Rvolution les secteurs urbains les plus prospres suffiraient-ils contrler la situation politique

Enfin on pourrait se demander si industrialisation et exten sion de irrigation qui exigent des investissements normes com bins autres facteurs dveloppement normal du secteur ter tiaire activits nouvelles braceros emigration... suffiront eux seuls viter des tensions en allgeant le surpeuplement du monde rural Autrement dit la croissance conomique un probable take

ou dcollage seront-ils suffisants pour rsoudre le problme assez court terme En tout cas dans la conjoncture actuelle

tant nationale que mondiale il semble probable que dans un proche avenir le gouvernement mexicain devra faire preuve imagination et dployer de srieux efforts pour conserver les bnfices de sa rvolution agraire et sociale Peut-tre ce pays qui invent un agrarisme politique original saura-t-il trouver des solutions la fois efficaces dans le domaine conomique et satisfaisantes du point de vue social et politique

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PlanL'ejido issu de la communaut villageoise traditionnelle Une tape dcisive dans le dveloppement de l'ejido : Cardenas (1934 -1940)La nouvelle orientation agraire et les exploitations hautement capitalises aprs 1940.L'ejido traditionnel et la petite exploitation paysanne

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