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MARS 2014 LES GRANDS PROJETS DE TRANSFORMATION : SE TOURNER VERS LES HOMMES PLUTÔT QUE VERS LA TECHNIQUE Ultra-concurrence mondiale, accélération du temps, évolution des modes de consommation, les entreprises sont confrontées à des changements stratégiques de plus en plus rapides. La numérisation de la société, l’augmentation des échanges d’information à l’intérieur de l’entreprise et dans son environnement placent les systèmes d’information au cœur de la compétitivité des entreprises. Pourtant, au lieu de générer un atout compétitif, les grands projets de transformation des systèmes d’information sont devenus un risque pour l’entreprise. Retards accumulés, dépassement des budgets, incompréhensions et tensions des collaborateurs, ces conduites de projets sont perçues depuis des années comme des intrusions et des projets à haut risque. Faisons l’hypothèse que si ces grands projets n’ont pu être contrôlés, maîtrisés, dominés depuis des années, c’est qu’ils ne peuvent pas l’être. Ils incarnent cette illusion managériale du top-down absolu, du contrôle et du règne de la technique. Faisons alors l’hypothèse que la réussite des grands projets de transformation ne passera pas par un renforcement du contrôle, des budgets et de la technique. Il n’existe pas de problème informatique insoluble, à condition d’accepter que derrière la technique, il y a des hommes, leurs aléas, leurs échecs mais aussi leur génie. 1 Focus IT Guillaume Gorge Executive Advisor

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Mars 2014

Les Grands Projetsde transformation :se tourner vers Les hommesPLutôt que vers La technique

Ultra-concurrence mondiale, accélération du temps, évolution des modes de consommation, les entreprises sont confrontées à des changements stratégiques de plus en plus rapides. La numérisation de la société, l’augmentation des échanges d’information à l’intérieur de l’entreprise et dans son environnement placent les systèmes d’information au cœur de la compétitivité des entreprises.

Pourtant, au lieu de générer un atout compétitif, les grands projets de transformation des systèmes d’information sont devenus un risque pour l’entreprise. Retards accumulés, dépassement des budgets, incompréhensions et tensions des collaborateurs, ces conduites de projets sont perçues depuis des années comme des intrusions et des projets à haut risque.

Faisons l’hypothèse que si ces grands projets n’ont pu être contrôlés, maîtrisés, dominés depuis des années, c’est qu’ils ne peuvent pas l’être. Ils incarnent cette illusion managériale du top-down absolu, du contrôle et du règne de la technique. Faisons alors l’hypothèse que la réussite des grands projets de transformation ne passera pas par un renforcement du contrôle, des budgets et de la technique. Il n’existe pas de problème informatique insoluble, à condition d’accepter que derrière la technique, il y a des hommes, leurs aléas, leurs échecs mais aussi leur génie.

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Focus IT

Guillaume GorgeExecutive Advisor

LES GRANDS PROJETS OU LA GESTION DES SYSTÈMES COMPLEXES

Qu’est-ce qu’un grand projetde transformation SI ?

on appelle grand projet de transformation, un projet de réforme profonde des systèmes d’information d’une entreprise, dès lors que ces systèmes sous-tendent l’évolution du business. Par exemple, c’est tout le système de la billetterie d’un grand voyagiste. s’il tombe en panne, le voyagiste n’est plus en mesure de réaliser son activité. Les projets dont nous allons traiter excluent d’une part les projets de création de nouveaux systèmes et d’autre part les erP, c’est-à-dire les systèmes d’information des fonctions supports : paie, comptabilité, etc.

Les systèmes informatiques des entreprises affrontent régulièrement trois défis :

� un changement de business model : numérisation, Big data, multi-canal, omni-canal…

� Le si hérité du passé ne peut plus évoluer facilement : non-qualité, nombreux incidents, désynchronisation des données…

� L’entreprise recherche des économies de coûts significatives et veut faire évoluer les solutions si et les modes de delivery : offshore, cloud, open source…

si une entreprise prend conscience qu’elle est face à l’un de ces trois défis, c’est une opportunité pour elle de s’interroger sur les deux autres défis.

en réalité, ces trois aspects sont indissociables et les entreprises sont souvent amenées à formuler et à réfléchir à ces trois besoins. Une transformation réussie, c’est une transformation qui permet à la fois de faire des économies, de désenclaver les systèmes existants et d’apporter un bénéfice business à l’entreprise.

Lorsqu’une entreprise, à l’issue de cette réflexion, décide de se lancer dans un grand projet de transformation, il lui faut mettre en place des processus, une organisation et une gestion très spécifiques. Parce qu’ils découlent de prises de conscience simultanées de ces défis, les

grands projets de transformation sont porteurs de grandes angoisses et de fortes attentes au sein de l’organisation.

Gérer un grand projet,c’est gérer l’imprévisible

La manière à notre sens la plus dangereuse de considérer un grand projet de transformation si, c’est d’imaginer que le projet n’est qu’une agrégation de solutions techniques (technologies, déploiement des moyens, architecture technique). cette approche implique que l’expertise et les experts peuvent mettre la main sur l’entreprise pour appliquer des solutions identiques à une autre entreprise du secteur. elle implique aussi l’idée qu’à condition de maîtriser les techniques, un projet de transformation est prévisible. Cette idée reçue est à l’origine de la majorité des échecs des grands projets de transformation.

un grand projet, c’est par définition un système complexe. un système complexe c’est un ensemble d’un grand nombre d’individus ou d’entités en interaction dont le comportement en tant que système est impossible à prévoir car il ne se résume pas à la somme du comportement de chacun, du fait des interactions.

Dans l’une de ses vidéos dans TED, Nicolas Perony prend l’exemple d’un groupe de chiots. Ils courent et sautent dans tous les sens, et dès qu’on verse du lait dans une gamelle, ils se positionnent en rond autour de la gamelle et, en se poussant les uns les autres, forment une rosace parfaite, tournant harmonieusement autour de la gamelle. Personne ne peut prévoir ce comportement avant de l’avoir observé.

un système informatique existant est lui-même un ensemble d’applications, qui offre des services « de bout en bout » à ses utilisateurs. chaque application a été développée par des individus selon leurs propres règles et leurs propres méthodes. il est donc difficile de prévoir avec certitude comment ces applications vont se comporter après une transformation majeure de plusieurs d’entre elles.

Par exemple, acheter un abonnement téléphonique dans la boutique d’un Opérateur Télécom va mettre en œuvre plusieurs dizaines d’applications (voire plusieurs centaines), sous la responsabilité de plusieurs équipes (plusieurs centaines de personnes, voire plusieurs milliers en comptant les sous-traitants), qui doivent les faire évoluer de manière synchrone.

Pour mener à bien un grand projet de transformation, il est nécessaire de renoncer à la sécurité psychologique de la continuité, de la linéarité et de la prévisibilité. Les dysfonctionnements d’un grand système informatique résultent d’un manque de coordination ou d’information des hommes en amont. Et c’est par les hommes qu’on peut résoudre ces dysfonctionnements, jamais uniquement par la technique.

LES ÉCUEILS DES GRANDS PROJETS DE TRANSFORMATION

depuis des années, la très grande majorité des entreprises sont mécontentes des résultats de leurs grands projets de transformation. une étude mcKinsey de 2012 montre que 52% des grands projets informatiques (dont le budget est supérieur à 15 millions de dollars) dépassent leur budget ou sont en retard (cf. tableau page 3).

Pourtant, les grands cabinets de conseil spécialisés dans les projets de transformation continuent à appliquer des méthodes qu’ils n’ont jamais remises en cause. Ils dédient des équipes spécifiques, déconnectées des équipes existantes de la Direction des Systèmes d’Information. ils déploient les solutions it d’un secteur donné à un moment donné. Les grands cabinets n’en réfèrent qu’au directeur Général ou au dsi et attendent de lui qu’il répercute les informations auprès des équipes de la dsi, et qu’il lève les obstacles. Leur mode de fonctionnement, c’est la substitution : de leurs équipes aux équipes du client, de leurs connaissances et de leurs techniques à celles de la DSI existante.

immanquablement confrontés à l’imprévu et prisonniers de la rigidité de leurs contrats, les grands cabinets de conseil n’ont pas d’autres solutions que de demander au client d’allonger la durée de la mission et de consommer de nouveaux budgets.

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LES 3 CLÉS DE SUCCÈS : L’HUMAIN, L’HUMAIN ET L’HUMAIN

Adapter la gouvernance : faire du DSI un directeur exécutif stratégique

Le facteur primordial de réussite d’un grand projet de transformation, ce sont les hommes. L’approche managériale du projet est fondamentale. de ce point de vue, il faut faire le constat de l’enclavement des problématiques it dans les entreprises. combien de directeurs Généraux se sont déjà découragés, repoussés par l’aspect technique : « la dsi, je n’y comprends rien ! ». combien diraient la même chose pour la finance, les ressources humaines ou les métiers ?

Les grands projets de transformation sont une occasion pour le dsi de changer de statut au regard de son directeur Général, et de toute l’entreprise. La posture souvent technique des dsi renforce l’idée que l’informatique ne se voit pas, qu’elle est comme un sujet caché. or l’évolution des business models implique un rôle croissant des systèmes informatiques : comment le secteur de la distribution, avec l’explosion de l’e-commerce, pourrait-il se passer d’avoir une réflexion transversale sur ses si ? Le dsi est un acteur qui, pour réussir les grandes transformations, doit anticiper les évolutions business et faire de la prospective au même titre que les autres dirigeants.

ce repositionnement implique que le dsi se voie résolument à la fois comme un manager d’équipes et comme un directeur Business. Lorsqu’il pilote un grand projet de transformation, un DSI a deux missions : coordonner les experts et formuler le sens et l’objectif dès que cela est nécessaire. avoir une vision des objectifs, apprendre à déléguer, stimuler la créativité et la coopération, partager avec le comex les « pains and gains »… L’erreur serait de croire et de communiquer sur le projet en

Source : McKinsey-Oxford study on reference-class forecasting for IT projects.

Projetc type Averagecost overrun

Averageschedule overrun

Averagebenefits shortfall

Software

Nonsoftware

Total

66

43

45

33

43

45

33

133

45

% of IT projects with given issue (for those with budgets > $15 million in 2010 dollars).

disant que tout est prévisible. Le dsi devient un directeur exécutif à part entière dès lors qu’il peut exposer les aléas - inévitables - du projet tout en conservant toute son attention sur les bénéfices à en attendre pour le business. c’est la condition de la confiance et du soutien de son directeur Général.

Le facteur déterminant :l’Empowerment des équipes

Les méthodes qui prédominent aujourd’hui dans la conduite de grands projets de transformation excluent les équipes de la dsi en charge du si existant, aboutissant non seulement à les démotiver fortement, mais aussi à se priver d’une source indispensable de connaissances.

L’empowerment des équipes, c’est l’opposé même du principe de substitution appliqué par les grands cabinets de conseil. or, se substituer totalement aux équipes condamne la réussite d’un projet. non seulement les équipes détiennent la connaissance la plus aboutie de l’existant, mais le succès du projet dépend de leur capacité à s’approprier le système cible. Par exemple, l’organisation des grands projets dissocie encore couramment les équipes en charge du legacy (l’existant) et de la cible. comment peut-on être pertinent dans la définition et la construction de la cible sans tenir le moindre compte de l’existant ? une stratégie de transformation efficace devra affecter une partie de l’effort sur l’existant, à la fois pour sécuriser l’atteinte de la cible, et pour focaliser la cible sur le nouveau business.

Le concept même d’Empowerment appelle une démultiplication des responsabilités et l’autonomisation des acteurs. Lorsque les équipes sont investies et responsabilisées, elles ont les moyens de s’impliquer dans la réussite, de mieux communiquer entre elles, et d’inventer des ajustements collectivement quand les difficultés apparaissent.

face à un système complexe fait de nombreux individus responsabilisés, le dsi ne peut plus contrôler l’ensemble du processus. c’est bien là l’essence de son changement de rôle. Pour l’aider face à cette nouvelle situation, il existe des outils et des méthodes spécifiques qui permettent de créer puis de coordonner l’empowerment. ces outils visent d’une part à fragmenter la conduite du grand projet de transformation, tout en inscrivant chaque « fragment » dans une perspective globale cohérente. cette fragmentation cohérente permet de s’assurer que : � Le sens et les objectifs ont été formulés et

qu’ils sont présents à l’esprit des équipes.

� La cible technique est identifiée et connue par tous.

� Le programme est découpé en séquences courtes, à visibilité et taille humaines.

� Le dsi est accompagné dans sa fonction managériale et de prospective business.

Les grands projets restent majoritairement des locomotives lancées dans l’entreprise, sans égard pour leurs forces vives. La création de haute valeur ajoutée est possible dans ce marché où les entreprises sont majoritairement insatisfaites. Implication des équipes, faible intrusion, accompagnement stratégique des dirigeants et engagement sur les résultats sont les composantes de la création de haute valeur ajoutée de la conduite des grands projets de transformation.

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