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La Faculté de Droit Virtuelle est la plate-forme pédagogique de la Faculté de Droit de Lyon www.facdedroit-lyon3.com Date de création du document : année universitaire 2005/06 Consultez les autres fiches sur le site de la FDV : www.facdedroit-lyon3.com Mise à jour au 20 mars 2009 F F I I C C H H E E P P E E D D A A G G O O G G I I Q Q U U E E V V I I R R T T U U E E L L L L E E Diplôme : Master 1 Matière : Droit des sûretés Web-tuteur : Sabine ROBERT_ Catherine d’Hoir- Lauprêtre S S E E A A N N C C E E N N ° ° 8 8 L L A A N N O O T T I I O O N N D D E E G G A A R R A A N N T T I I E E A A U U T T O O N N O O M ME E S S O O M M M MA A I I R R E E C C O O O M M M. . 1 1 2 2 J J J U U U I I I L L L L L L E E E T T T 2 2 0 0 0 0 5 5 I. L’AUTONOMIE DE L’OBJET, CRITERE DE QUALIFICATION DE LA « GARANTIE AUTONOME » 7 A. L’INEFFICACITE DE LA QUALIFICATION RETENUE PAR LES PARTIES 7 Com., 2 février 1988 8 Com., 28 janvier 1992 9 B. L’AUTONOMIE DE LOBJET DE LA GARANTIE COMME CRITERE DETERMINANT 9 Le principe 10 Civ. 1 ère , 6 juillet 2004 10

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Faculté de Droit de Lyon www.facdedroit-lyon3.com

Date de création du document : année universitaire 2005/06

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Mise à jour au 20 mars 2009

FFFIIICCCHHHEEE PPPEEEDDDAAAGGGOOOGGGIIIQQQUUUEEE VVVIIIRRRTTTUUUEEELLLLLLEEE

Diplôme : Master 1

Matière : Droit des sûretés

Web-tuteur : Sabine ROBERT_ Catherine d’Hoir-Lauprêtre

SSSEEEAAANNNCCCEEE NNN°°°888––– LLLAAA NNNOOOTTTIIIOOONNN DDDEEE GGGAAARRRAAANNNTTTIIIEEE

AAAUUUTTTOOONNNOOOMMMEEE

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CCCOOOMMM... 111222 JJJ UUUIIILLL LLL EEETTT 222000000555

I. L’AUTONOMIE DE L’OBJET, CRITERE DE QUALIFICATION DE LA « GARANTIE AUTONOME » 7

A. L’ INEFFICACITE DE LA QUALIFICATION RETENUE PAR LES PARTIES 7

Com., 2 février 1988 8

Com., 28 janvier 1992 9

B. L’ AUTONOMIE DE L ’OBJET DE LA GARANTIE COMME CRITERE

DETERMINANT 9

Le principe 10

Civ. 1ère, 6 juillet 2004 10

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Com., 18 mai 1999 11

L’exception : le cas particulier des garanties financières et professionnelles 13

Ass. Plen., 4 juin 1999 13

Civ. 1ère, 12 décembre 2000 14

II. L’INOPPOSABILITE DES EXCEPTIONS, CARACTERISTIQUE ESSENTIELLE DE LA « GARANTIE AUTONOME » 15

A. LE PRINCIPE DE L ’ INOPPOSABILITE DES EXCEPTIONS 15

Com., 17 octobre 1984 16

B. L’ ATTENUATION DU PRINCIPE EN CAS DE FRAUDE OU D ’ABUS MANIFESTE 16

Com., 10 juin 1986 16

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La garantie autonome est une sûreté personnelle récente et originale1, issue de la pratique internationale. En droit interne, les créanciers y ont eu recours afin de remplacer le cautionnement, qui, de leur point de vue, est une technique juridique trop protectrice du débiteur de la garantie. Cette sûreté présente, en effet, des avantages certains pour le créancier, de sorte que ce dernier cherchera à la substituer au cautionnement. Il s’agit d’un engagement de payer une somme d’argent pris à titre de garantie de l’exécution d’un contrat de base, mais donnant naissance à une obligation autonome par rapport audit contrat. L’expression « garantie autonome » manifeste bien la différence de nature existant entre cette sûreté et l’engagement de caution, lequel se définit, au contraire, par son caractère accessoire. Technique de garantie engendrée par la pratique contractuelle, la garantie autonome jusqu’alors régie par les clauses contractuelles, le droit commun des contrats et la jurisprudence, est désormais intégrée dans le code civil par l’ordonnance du 23 mars 2006 : l’article 2321 alinéa 1er la définit comme « l’engagement par lequel le garant s’oblige, en considération d’une obligation souscrite par un tiers, à verser une somme soit à première demande, soit suivant des modalités convenues ». La garantie autonome se décline en diverses variantes, issues de l’imagination des parties et de la liberté contractuelle, selon le type d’obligations garanties ou les modalités d’exécution de la garantie. Le législateur consacre par là même la licéité de la garantie à première demande justifiée soit celle dont la mise en œuvre est subordonnée à l’indication, par le bénéficiaire, au garant des raisons de sa demande ( Com. 12 juillet 2005).

La validité de cette sûreté réelle est parfois discutée. Certains ont tenté de remettre en cause la garantie autonome lorsque celle-ci était conclue entre particuliers et certaines juridictions du fond, sensibles à de telles argumentations, ont requalifié l’engagement en cautionnement.

Cependant, fidèle au principe de liberté contractuelle, la jurisprudence considère, en général, que de tels engagements sont valables quel que soit le contexte économique ou juridique de leur conclusion2. Désireux d’échapper à leurs obligations, certains plaideurs ont fondé leur action en annulation sur la théorie générale des contrats, notamment les vices du consentement, mais aussi la cause (article 1131 du Cciv.). La Cour de cassation a néanmoins précisé que l’engagement de garantie à première demande n’est pas dénué de cause dès lors que le donneur d’ordre, même s’il n’est pas partie au contrat de base, a un intérêt économique à la conclusion de ce dernier (Com. 19 avril 2005). Ceci n’est pas incompatible avec le principe d’indépendance qui concerne l’exécution de la garantie.

1 La technique est, en effet, nouvelle en droit interne français. 2 Selon une partie de la doctrine, une limite peut être posée en matière de consommation, dans la mesure où la législation prévoit des formes protectrices en matière de cautionnement et qu’il semble difficilement envisageable de les éluder en recourant à la garantie autonome.

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Cour de cassation

chambre commerciale

N° de pourvoi: 03-20365

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt confirmatif attaqué, que, sur ordre de la société Burton Steel (le donneur d’ordre), qui avait conclu un marché de travaux avec la société JED (le bénéficiaire), la BNP Paribas (la banque) a délivré à ce dernier une garantie de retenue de garantie le 21 septembre 1995 qui expirait le 31 décembre suivant au plus tard, aucune réclamation reçue après cette date n’étant prise en considération ; que la réclamation devait être adressée soit par lettre recommandée soit par télex codé ; que la banque, qui avait reçu par fax, le 27 décembre 1995, copie du courrier recommandé, a payé le bénéficiaire le 10 janvier suivant, puis débité le compte du donneur d’ordre à due concurrence ; que le donneur d’ordre, mis ultérieurement en redressement judiciaire et M. X..., désigné commissaire à l’exécution du plan, ont reproché à la banque d’avoir pris en considération la réclamation, en faisant valoir que la lettre recommandée du bénéficiaire avait été reçue le 2 janvier 1996, postérieurement à la date de l’expiration de la garantie ;

Sur le moyen unique, pris en ses première et deuxième branches :

Attendu que le donneur d’ordre et le commissaire à l’exécution du plan font grief à l’arrêt d’avoir rejeté leur demande tendant à la condamnation de la banque au paiement de la somme de 17 750,40 euros alors, selon le moyen :

1 / que la garantie donnée par un établissement de crédit en remplacement de la retenue de garantie a pour objet de garantir l’obligation de bonne exécution, par l’entrepreneur, des travaux définis au contrat de base, ce dont il résulte qu’il ne s’agit pas d’une garantie autonome ; qu’en l’espèce, la lettre de garantie indiquait “qu’il avait été convenu de libérer la retenue de garantie de 10 % prévue dans la commande contre remise d’une garantie du même montant” ;

qu’affirmant, que cette garantie avait un caractère autonome, la cour d’appel a violé l’article 1134 du Code civil ;

2 / que la contradiction de motifs équivaut à l’absence de motifs ; qu’en affirmant, d’une part, “qu’il résulte de la garantie consentie le 21 septembre 1995 par la banque que celle-ci garantissait au bénéficiaire de façon irrévocable la somme de 116 435 francs à sa première demande écrite indiquant que le donneur d’ordre n’avait pas rempli ses obligations” et, d’autre part, que la garantie était “indépendante dans son exécution d’éventuelles défaillances du débiteur “, la cour d’appel s’est déterminée par des motifs contradictoires, violant ainsi l’article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, d’une part, qu’ayant constaté que la garantie litigieuse stipulait que la banque garantissait irrévocablement le règlement de la somme de 116 435 francs, à première demande écrite du bénéficiaire sans pouvoir en différer le paiement ni soulever d’objection ou de contestation, et relevé encore que l’étendue de l’engagement était fixée au moment de sa conclusion et était indépendante, dans son exécution, d’éventuelles défaillances du débiteur, c’est à bon droit, que la cour d’appel a statué comme elle a fait ;

Attendu, d’autre part, que l’exigence d’une demande “justifiée”, qui ne confère pas au garant une quelconque faculté d’en discuter le bien fondé, ne suffit pas à exclure la qualification de garantie autonome ; que dès lors, c’est sans se contredire que la cour d’appel, après avoir constaté que la garantie litigieuse comportait une mention exigeant que la réclamation soit motivée

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par l’indication que le donneur d’ordre n’avait pas rempli ses obligations, sans que le garant puisse, cependant, en différer le paiement ou soulever d’objection, a retenu que la garantie constituait un engagement autonome ;

D’où il suit que le moyen est infondé ;

Mais sur le moyen, pris en sa troisième branche :

Vu l’article 1134 du Code civil ;

Attendu que pour rejeter la demande du donneur d’ordre et de M. X..., ès qualités, l’arrêt retient que le donneur d’ordre a adressé une lettre recommandée à la banque le 27 décembre 1995, dont la copie a été envoyée par fax le même jour, ce dont il résulte qu’antérieurement à la date d’expiration de la garantie, la banque avait reçu, de la part du bénéficiaire de celle-ci, une demande en paiement ;

Attendu qu’en statuant ainsi, après avoir constaté par motifs adoptés que la lettre recommandée était parvenue à la banque le 2 janvier 1996, alors qu’une réclamation conforme aux stipulations de la lettre de garantie avait été reçue par la banque après sa date d’expiration, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 30 septembre 2003, entre les parties, par la cour d’appel d’Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Caen ;

Condamne la société BNP Paribas aux dépens ;

Vu l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la BNP Paribas et la condamne à payer à la société Burton Steel et à M. X..., ès qualités, la somme globale de 2 000 euros ;

Com., 19 avril 2005

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 5 février 2002, rectifié par un arrêt du 14 mai 2002), que, sur ordre de la société Leygafinance, importatrice de matières premières, et pour permettre à la société Caisoon security limited (la société Caisoon), avec laquelle elle envisageait de conclure un contrat de fourniture, de financer son propre approvisionnement au moyen de facilités de caisse que devait consentir à celle-ci le Crédit lyonnais Luxembourg, le Crédit lyonnais France a souscrit en faveur de ce dernier une garantie à première demande que la société Leygafinance a contregarantie ; que le contrat de fourniture n'ayant jamais été conclu mais la garantie ayant été appelée par le Crédit lyonnais Luxembourg, la société Leygafinance, appelée elle-même à exécuter son propre engagement, a demandé judiciairement la nullité de la garantie à première demande pour absence de cause ;

Attendu que la société Leygafinance fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer au Crédit lyonnais France, à charge, pour ce dernier, de payer le Crédit lyonnais Luxembourg la contrevaleur au 13 juin 2001 de la somme de 2 515 810,25 US dollars outre intérêts, alors, selon le moyen :

1 / que la garantie à première demande, obligation causée, suppose l'existence d'un contrat de base entre le donneur d'ordre et le bénéficiaire ; qu'en l'absence d'un tel contrat de base servant objectivement de support à la garantie, cette dernière est intrinsèquement nulle ; qu'en l'espèce, n'existaient, de première part aucun lien contractuel direct entre la société Leygafinance, donneur d'ordre et le Crédit lyonnais Luxembourg, bénéficiaire, et de

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seconde part, aucune opération commerciale déterminée qui fut en cours entre la société Leygafinance et la société Caisoon, le projet initial pour lequel avait été bloqué la somme de 3 050 000 US dollars (lettres des 26 novembre et 23 décembre 1999 de la société Caisoon à la société Leygafinance) n'ayant pas vu le jour et aucune autre transaction précise n'ayant pu être constatée lorsque la garantie à première demande litigieuse a été sollicitée et constituée, même si les relations commerciales perduraient alors entre les parties ;

que la société Leygafinance invoquait dans ces circonstances, "la nullité non pas du contrat de base puisqu'il n'existe pas de contrat de base (mais) la nullité de la garantie elle-même" ; que néanmoins les juges du fond ont cru pouvoir retenir comme constitutif d'un contrat de base, la fourniture de matière première par la société Caisoon à la société Leygafinance et, en conséquence, comme cause de la garantie à première demande consentie par le Crédit lyonnais France, garant au Crédit lyonnais Luxembourg, bénéficiaire, sur ordre de la société Leygafinance, la fourniture de crédit par le Crédit lyonnais Luxembourg à la société Caisoon et comme cause de la contre-garantie consentie par la société Leygafinance au Crédit lyonnais France, ladite garantie de premier rang ; qu'en l'état de ces seules constatations et énonciations, qui éludent totalement la question de l'absence de tout lien de droit entre la société Leygafinance, donneur d'ordre et le Crédit lyonnais Luxembourg, bénéficiaire, et l'absence d'un contrat de base qui soit lié à une opération commerciale alors en cours entre la société Leygafinance et la société Caisoon, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1131 et 1134 du Code civil ;

2 / que la société Leygafinance faisait ressortir dans ses écritures d'appel le caractère léonin de la garantie litigieuse, en ce que l'engagement pris par la société Leygafinance était du fait, de l'absence d'un contrat de base, dénué de toute contrepartie et notamment que "c'est la société Leygafinance qui supportera la charge de la dette en définitive, alors qu'au départ c'est elle qui est créancière d'une obligation de remboursement sur la société Caisoon ; que la société Leygafinance faisait ainsi pertinemment valoir qu'elle s'était trouvée abusivement contrainte de souscrire une garantie pour qu'une facilité de caisse soit octroyée, non pas à elle-même, mais à la société Caisoon, dont elle se trouvait en réalité par ailleurs créancière, de sorte que cette garantie, dépourvue de toute contrepartie, était nécessairement abusive et léonine ;

que l'arrêt attaqué, qui n'a pas répondu à ces conclusions pertinentes, ne satisfait pas aux exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que l'engagement d'un garant à première demande est causé, dès lors que le donneur d'ordre a un intérêt économique à la conclusion du contrat de base, peu important qu'il n'y soit pas partie ;

Attendu que l'arrêt ne retient pas, contrairement à ce qu'affirme le moyen, que le contrat de base était constitué par la fourniture de matière première mais relève, par motifs adoptés, que l'engagement de la société Leygafinance était destiné à assurer à la société Caisoon les moyens financiers permettant à celle-ci de procurer la matière première à fournir à la société Leygafinance et , par motifs propres, que la cause de la garantie à première demande consentie par le Crédit lyonnais France en faveur du Crédit lyonnais Luxembourg était constituée par la facilité de caisse accordée par ce dernier à la société Caisoon ; qu'il résulte de ces constatations et appréciations que la société Leygafinance avait un intérêt économique à la conclusion du contrat de base constitué par la facilité de caisse accordée par le Crédit lyonnais Luxembourg à la société Caisoon ; que la cour d'appel, qui a répondu en l'écartant, au moyen évoqué à la deuxième branche, et a décidé que la garantie à première demande était causée, peu important que la société Leygafinance ne soit pas partie au contrat de base et que l'opération commerciale d'acquisition, que ce contrat rendait possible, n'ait pas été

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conclue, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Comme son nom l’indique, la « garantie autonome » se caractérise donc par son autonomie par rapport à l’engagement dont elle est destinée à garantir l’exécution. La principale conséquence découlant de ce caractère est le principe, essentiel, de l’inopposabilité des exceptions (II). Cependant, la mise en œuvre d’un tel principe et des solutions qui y sont attachées, suppose, au stade de la qualification, de disposer d’un critère de définition de cette sûreté, afin, notamment, d’éviter toute confusion avec le cautionnement (I).

I. L’autonomie de l’objet, critère de qualification de la « garantie autonome »

Si, d’un point de vue théorique, l’on dispose d’une définition désormais légale de la « garantie autonome » et que cette dernière est clairement distinguée du cautionnement. En revanche, d’un point de vue pratique, la distinction est plus délicate à opérer. Or, la qualification présente un enjeu capital en raison de la différence de régime opposant ces deux sûretés personnelles. Il est donc nécessaire de disposer d’un critère simple permettant de faire la différence entre la garantie autonome et le cautionnement et facilitant l’opération de qualification. Le critère retenu par la jurisprudence est celui de l’autonomie de l’objet de l’engagement (B), la terminologie utilisée par les parties n’ayant pas d’incidence(A).

A. L’inefficacité de la qualification retenue par les parties

La terminologie employée par les parties dans la rédaction de leur contrat n’est pas déterminante. Selon la Cour de cassation, le vocabulaire utilisé par les parties est indifférent et ne saurait, en aucun cas, avoir une incidence sur la qualification retenue, en définitive, par les juges, dès lors que ceux-ci ne correspondent pas à l’économie réelle du contrat. Ainsi, le recours à des termes propres au cautionnement n’est pas exclusif de la qualification de garantie autonome, s’il ressort des clauses contractuelles que la volonté des parties était de conclure une garantie non accessoire (Com. 2 février 1988). A l’inverse, l’emploi d’une terminologie propre aux contrats de garanties autonome3 ne suffit pas pour que cette qualification soit retenue par les juges. Ceux-ci écarteront donc la

3 Intitulé du contrat, stipulation de paiement à première demande, stipulation du caractère inconditionnel et irrévocable de l’engagement.

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qualification de garantie autonome dès lors que, malgré la rédaction du contrat, l’engagement ne répond pas aux caractères de cette sûreté personnelle. Cette requalification est aujourd’hui parfaitement admise par la Cour de cassation (Com. 28 janvier 1992).

CCoomm..,, 22 fféévvrr iieerr 11998888

Sur le premier moyen :

Vu l'article 1134 du Code civil ;

Attendu que constitue une garantie autonome, interdisant au garant d'invoquer les exceptions qui appartiendraient au débiteur, le contrat par lequel la banque s'engage à effectuer, sur la demande d'un donneur d'ordre, le paiement d'une somme à concurrence d'un montant convenu, sans que l'établissement financier puisse différer le paiement ou soulever une contestation pour quelque motif que ce soit ;

Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que la société d'habitations à loyers modérés " Toit et Joie " (société T et J) ayant chargé la Société métropolitaine de génie civil (SMGC) de la construction de logements et de locaux commerciaux, la Banque de placement et de crédit (la banque) a donné le 13 juin 1980, par un acte distinct comportant la clause et les mentions ci-dessus énoncées, sa garantie à la société T et J à concurrence d'un montant de " l'avance de démarrage " de deux millions de francs accordée par cette société à l'entrepreneur ; que cet acte, tout en comportant les mots " caution personnelle et solidaire " et la référence aux sommes dont le titulaire serait débiteur au titre de " l'avance de démarrage " prévue par une clause du contrat d'entreprise au profit de la SMGC, stipule que la banque s'engage, dans la limite du montant de sa garantie, à payer tout ou partie des sommes dont la SMGC serait débitrice au titre de " l'avance de démarrage " sur l'ordre de la société T et J et " sans pouvoir différer le paiement ni soulever des contestations pour quelque motif que ce soit " ; qu'à la suite du prononcé du règlement judiciaire de la SMGC, cette société, assistée du syndic, et la société T et J sont convenues, par un échange de lettres des 14 et 20 octobre 1981, de résilier amiablement le contrat d'entreprise ; que préalablement, le 9 octobre précédent, la société T et J a mis en demeure la banque de remplir son engagement de garantie en lui payant la somme prévue ; que, sur le refus de la banque, la société T et J l'a assignée en paiement ;

Attendu que, par arrêt infirmatif et pour rejeter cette demande, la cour d'appel a jugé que la clause était ambiguë et devait être interprétée en faveur de celui qui avait contracté l'obligation ;

Attendu qu'en statuant ainsi, sans reconnaître le caractère autonome de la garantie donnée par la banque, alors que, en dépit de la présence des mots " cautionnement ", " caution personnelle " et " débiteur ", ce caractère résultait de la clause par laquelle l'établissement financier s'engageait à ne pas différer le paiement lorsqu'il recevrait l'ordre d'y procéder et à ne soulever aucune contestation pour quelque motif que ce soit, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :

CASSE ET ANNULE l'arrêt rendu le 20 juin 1985, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens

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CCoomm..,, 2288 jjaannvviieerr 11999922

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 3 avril 1990), que, d'ordre de la société Gur Insaat Ve Ticaret As (la société Gur), la banque Yapi Ve Kredi Bankasi As (la banque Yapi) a souscrit, au profit de la banque Paribas, une contre-garantie par laquelle elle s'engageait " irrévocablement et inconditionnellement " à lui payer une certaine somme si la société Gur " manque à son obligation de paiement " souscrite au profit d'un fournisseur français ; qu'une prorogation d'échéance, au 31 octobre 1985, a été consentie par son cocontractant à la société Gur et parallèlement à la banque Paribas par la banque Yapi ; qu'en novembre 1985, la banque Paribas a versé au fournisseur français la somme prévue et a appelé la garantie de la banque Yapi, qui a refusé de lui reverser cette somme ;

Attendu que la banque Yapi reproche à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer la somme stipulée à l'acte de contre-garantie, alors, selon le pourvoi, d'une part, que le caractère autonome de la garantie de la banque Paribas, comme de la contre-garantie de la banque Yapi, résultait de l'emploi de l'expression payment guarantee et des adverbes irrevocably et unconditionnaly , peu important que les documents de base aient ajouté que la garantie était acquise " si Gur manque à son obligation de paiement ", cette clause imposant seulement au bénéficiaire de la garantie de motiver l'appel de la garantie, mais ne permettant pas à la banque de subordonner sa garantie à la démonstration de la défaillance du débiteur ; qu'ainsi, en décidant que la garantie de la banque Yapi envers la banque Paribas constitue un cautionnement et non une garantie à première demande, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ; et alors, d'autre part, que, dans son télex du 12 novembre 1984, la banque Yapi indiquait clairement à la banque Paribas que sa garantie était valable jusqu'au 15 juillet 1985, et, dans son télex du 9 juillet 1985, qu'elle était prorogée jusqu'au 31 octobre 1985 ; qu'ainsi, en affirmant qu'il n'était pas démontré que la contre-garantie de la banque Yapi ait eu une durée limitée au 31 octobre 1985, la cour d'appel a dénaturé ces télex et violé l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, que, pour refuser d'assimiler à une garantie bancaire à première demande, indépendante de tout contrat commercial, l'engagement de la banque Yapi, l'arrêt relève qu'il n'est réputé " inconditionnel " que pour sa souscription et non pour son exécution, celle-ci étant, au contraire, expressément subordonnée à la condition du manquement à ses obligations par l'importateur turc, d'ordre duquel il a été souscrit ; qu'en l'absence de tout terme exprimant l'autonomie de l'engagement bancaire, il en retient qu'il s'agit d'un cautionnement ; que, par cette interprétation, la cour d'appel n'a pas méconnu la loi des parties ;

(…);

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi

B. L’autonomie de l’objet de la garantie comme critère déterminant

Il ressort des décisions de jurisprudence que l’élément constitutif déterminant de la qualification de « garantie autonome » est l’autonomie

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de l’objet de l’engagement. En principe, un engagement ne sera qualifié de « garantie autonome » que si son objet est indépendant du contrat de base en considération duquel il a été conclu. A défaut, il ne pourra s’agir que d’un cautionnement. Cependant, certaines décisions remettent en cause ce critère et qualifient de « garantie autonome » des engagements qui ont pourtant pour objet la dette du débiteur principal.

Le principe

Pour que la qualification de « garantie autonome » soit retenue, l’engagement doit donc avoir un objet propre et autonome et non la dette du débiteur principal. En effet, bien qu’elle soit, initialement, déterminée en considération de l’objet du contrat de base, la dette issue de l’engagement ne doit pas dépendre de ce que doit le débiteur du contrat de base. La somme due doit être déterminée de manière autonome et ne doit pas être liée au sort de l’obligation principale. Il doit résulter des clauses du contrat que le débiteur s’engage à payer une certaine somme, à première demande, de manière inconditionnelle et irrévocable. Si cette condition n’est pas remplie, et que certaines clauses lient l’engagement de payer à la dette principale, il ne s’agira que d’un simple cautionnement. En effet, le caractère accessoire de l’objet de l’engagement est exclusif de la qualification de garantie autonome (Civ. 1ère 6 juillet 2004).

CCiivv.. 11èèrree,, 66 jjuuii ll lleett 22000044

Attendu que M. et Mme X... se sont portés cautions solidaires du remboursement de deux prêts, d'un montant total de 3 300 000 francs, consentis à la société Financière PIC 92 par la Banque parisienne de Crédit et la Banque nationale de Paris ; que, le 25 juin 1993, M. Y..., associé minoritaire de la société Financière PIC 92, a apposé sa signature précédée de la mention manuscrite suivante "Bon pour garantie à première demande d'une somme de 264 000 francs deux cent soixante quatre mille francs", au pied d'un acte sous seing privé dactylographié intitulé "garantie à première demande", comprenant notamment, sous la rubrique "engagement" la clause suivante : "M. Jacques Y... s'engage irrévocablement, inconditionnellement et solidairement, d'ordre et pour compte de la société Financière PIC 92, à rembourser à M. et Mme X..., indépendamment de la validité et des effets juridiques du contrat de cautionnement consenti par les bénéficiaires, à première demande de leur part, selon les modalités ci-dessous et sans faire valoir d'exception ni d'objection résultant dudit contrat ou d'une quelconque contestation y afférente, tout montant jusqu'à un montant maximal de 264 000 francs (deux cent soixante quatre mille francs) en principal majoré de 8 % (huit pour cent) de toutes les sommes qu'ils peuvent ou pourront devoir aux établissements de crédit mentionnés ci-dessus au titre d'intérêts, commissions, prime d'assurance, frais et accessoires" ; que se prévalant de l'engagement contenu dans l'acte précité, M. et Mme X... ont assigné M. Y... en paiement de la somme de 177 755,76 francs ; que l'arrêt confirmatif attaqué a dit que cet acte constituait un cautionnement, déclaré celui-ci nul par application des articles 1326 et 2015 du Code civil et rejeté, en conséquence, la prétention de M. et Mme X... ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches, tel qu'il figure au mémoire en demande et est reproduit en annexe :

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Attendu qu'après avoir retenu que l'acte litigieux contenait, outre la clause précitée, une stipulation ainsi libellée : "le présent engagement oblige le garant (...) à payer aux bénéficiaires, huit pour cent (8 %) dans la limite de deux cent soixante quatre mille francs (264.000 francs) en principal de toutes les sommes tant en principal qu'en intérêts, commissions, primes d'assurances, frais et accessoires que les bénéficiaires pourraient devoir aux établissements de crédit susvisés au titre de l'emprunt de 3 300 000 francs qu'ils ont consenti à la société Financière PIC 92 au cas où cette dernière ne pourrait faire face à ses obligations" , la cour d'appel, constatant que cette stipulation figurait sous la rubrique "portée de l'engagement", en a déduit que l'engagement souscrit par M. Y... tendait à garantir les époux X... à concurrence d'une fraction de la dette née du cautionnement qu'ils avaient souscrit pour garantir le remboursement du prêt consenti à la société Financière PIC 92 par la Banque parisienne de Crédit et la Banque nationale de Paris, dans la limite de la somme de 264 000 francs ; que dès lors qu'ayant pour objet la propre dette des époux X... à l'égard de ces établissements de crédit, un tel engagement ne revêtait pas le caractère d'une garantie autonome, il ne peut être fait reproche à la cour d'appel d'avoir exclu cette qualification sans vérifier si celle-ci n'était pas susceptible de résulter d'autres clauses du même acte ; qu'aucun des deux griefs n'est donc fondé ;

Mais sur le second moyen, pris en ses quatre branches : (…) la cour d'appel a violé ceux-ci par fausse application et le premier par refus d'application ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en ses dispositions autres que celle qualifiant de cautionnement l'engagement souscrit par M. Y..., l'arrêt rendu le 7 juin 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;

Notons que la mise en œuvre du critère tiré de l’autonomie de l’objet ne doit pas être pas stricte et littérale. En effet, toute référence au contrat de base n’est pas exclusive de la qualification de garantie autonome. Ainsi, la référence au contrat de base pour la détermination de ce qui est dû au titre de la garantie autonome, n’emportera donc pas la requalification de l’engagement en cautionnement, dès lors que l’exécution de ce dernier est sans influence sur cette détermination (Com. 18 mai 1999).

CCoomm..,, 1188 mmaaii 11999999

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'en 1977, sur ordre de la société Technip, et avec des contre-garanties de la BFCE, la banque du Caire a émis au profit de la société Gofi deux garanties pour la bonne fin et l'exécution conforme de deux chantiers ; que la durée de ces garanties était fixée à 30 mois ; qu'en juin 1990, un organisme public substitué à la société Gofi a appelé les garanties ; qu'en janvier 1991, une sentence arbitrale, rendue en Egypte, considérant les garanties encore en vigueur, à la suite de renouvellements successifs, a condamné la banque du Caire à verser les montants réclamés ; que quelques jours plus tard, à Paris, la juridiction des référés, saisie auparavant, a interdit à la banque du Caire et à la BFCE d'exécuter les garanties ; que peu après, des sentences arbitrales, sous l'égide de la chambre de commerce internationale, ont décidé que l'une des garanties devait être " libérée et restituée " et que la société Technip était créancière de sa cocontractante égyptienne ; que la société Technip a réclamé, devant la

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juridiction commerciale, à Paris, la " libération " des garanties, et, subsidiairement, la constatation du caractère abusif de l'appel de ces garanties ;

Sur le second moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 1134 du Code civil ;

Attendu que pour écarter l'autonomie des garanties, l'arrêt retient qu'elles ne seraient indépendantes du contrat de base que si les lettres de garanties ne se référaient pas à cette convention : qu'il relève qu'elles comportent au contraire des mentions s'y référant expressément, telles que : " Par référence au contrat conclu le 22 mai 1977 entre... pour la délivrance d'une brasserie à.. ", " selon l'article 5 du contrat... ", " garantie pour les obligations du contractant ", " nous garantissons... pour la bonne exécution et la performance appropriée du contrat ", " Nous nous engageons à payer à première demande malgré toute contestation du contractant (Technip) ou d'un tiers " ; qu'il en déduit qu'aux termes mêmes de ces lettres le paiement des garanties ne peut être exigé qu'autant que l'exécution ou les résultats des prestations font l'objet d'un litige ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que les garanties étaient stipulées irrévocables et inconditionnelles " nonobstant toute contestation du [donneur d'ordre] ou d'un tiers ", et que leur étendue, fixée au moment de leurs conclusions, était indépendante, dans son exécution, d'éventuelles défaillances du débiteur, alors que de telles garanties ne sont pas privées d'autonomie par de simples références au contrat de base, n'impliquant pas appréciation des modalités d'exécution de celui-ci pour l'évaluation des montants garantis, ou pour la détermination des durées de validités, la cour d'appel a méconnu la loi des parties ;

Et sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 1134 du Code civil ;

Attendu que pour retenir la caducité des garanties, l'arrêt considère que les lettres de garanties prévoyaient leur expiration 30 mois après la date de la dernière livraison et leur prorogation en cas de prestations supplémentaires mais seulement pour 10 % du prix des fournitures correspondant à cette extension ; qu'il relève que les ultimes livraisons se situent en août 1979 ; qu'il en déduit que les garanties sont devenues caduques 30 mois plus tard ;

Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs sans considérer, ce à quoi les conclusions de la banque du Caire l'avait invitée, que les garanties indépendantes avaient été prorogées à la suite de demandes successives de la BFCE, déclarant intervenir au nom de la société Technip, et que celle-ci ne contestait pas ces prorogations, mais prétendait voir reconnaître la caducité des garanties en invoquant l'exécution du contrat de base, ce qui était contraire à l'autonomie des garanties, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 septembre 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.

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L’exception : le cas particulier des garanties financières et professionnelles

Les garanties financières et professionnelles obligatoires ont pour objet le remboursement des fonds que certains professionnels sont susceptibles de détenir pour le compte de leurs clients. Le plus généralement, elles sont fournies par des sociétés de caution mutuelle, dont l’objet social est le cautionnement. Malgré le caractère manifestement accessoire desdits engagements, dont l’objet est la dette des professionnels envers leurs clients, la Cour de cassation, réunie en Assemblée plénière, a mis fin aux incertitudes liées à leur qualification en retenant celle de garantie autonome (Ass. Plen. 4 juin 1999). Si une telle position s’explique par la volonté de soumettre lesdites garanties au principe de l’inopposabilité des exceptions, elle est néanmoins contestable du point de vue de la notion de garantie autonome, qui suppose l’autonomie de l’objet de l’engagement. Elle est donc source de confusions et d’incertitudes conceptuelles. Cette solution, consacrée en matière de garantie de restitution de fonds, a été étendue à d’autres garanties financières spécifiques et comporte un risque de dérives non négligeable. (Civ. 1ère 12 décembre 2000, qui ne requalifie pas en cautionnement un engagement, qui, bien qu’intitulé « garantie autonome », portait sur les sommes dues par le débiteur principal)

AAssss.. PPlleenn..,, 44 jjuuiinn 11999999

Sur le moyen unique :

Vu l'article 3 de la loi du 2 janvier 1970, ensemble les articles 17 et 39 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972 ;

Attendu qu'en raison de son autonomie, la garantie financière exigée des personnes exerçant des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce et affectée au remboursement des fonds, effets ou valeurs qu'elles ont reçus n'est pas éteinte lorsqu'en cas de redressement ou de liquidation judiciaire de l'agent immobilier, le client ne déclare pas au passif sa créance de restitution de la somme versée ; qu'en conséquence, ce client peut assigner directement le garant ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Faraya a cédé un fonds de commerce à M. Oulmouddane par l'intermédiaire de la société Cabinet Cazabat et associés, agent immobilier, qui a séquestré entre ses mains le prix de vente ; que la venderesse a assigné ce cabinet après sa mise en liquidation judiciaire ainsi que M. Baumgartner, le mandataire-liquidateur et la Caisse de garantie de la Fédération nationale de l'immobilier (FNAIM) en condamnation solidaire au paiement du solde de la somme séquestrée ;

Attendu que pour rejeter la demande, l'arrêt constate que la société Faraya a omis de déclarer sa créance au représentant des créanciers et retient que cette créance étant éteinte, la FNAIM, qualifiée de caution, pouvait également invoquer cette cause d'extinction ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

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CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a décidé que la société Faraya était mal fondée en sa demande de condamnation de la FNAIM à lui payer la somme de 50 000 francs et en ce qu'il l'a condamnée à payer à celle-ci la somme de 5 000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, l'arrêt rendu le 2 mai 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles.

MOYEN ANNEXE (…)

CCiivv.. 11èèrree,, 1122 ddéécceemmbbrree 22000000

Sur le pourvoi formé par M. Jean-Claude Bic, demeurant 19, rue de Château Salins, 54280 Mazerulles,

en cassation d'un arrêt rendu le 12 février 1996 par la cour d'appel de Nancy (1re chambre civile), au profit de la société Compagnie générale de location d'équipements (CGLE), société anonyme, dont le siège est avenue de Flandre, 59700 Marcq-en-Baroeul,

défenderesse à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 7 novembre 2000, où étaient présents : M. Renard-Payen, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Sempère, conseiller rapporteur, M. Ancel, conseiller, Mme Petit, avocat général, Mme Aydalot, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Sempère, conseiller, les observations de la SCP Peignot et Garreau, avocat de M. Bic, de la SCP Defrenois et Levis, avocat de la société Compagnie générale de location d'équipements (CGLE), les conclusions de Mme Petit, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :

Attendu que la Compagnie générale de location a consenti à la Société gestion et finance la location d'un véhicule automobile ; que M. Bic, gérant de cette société a signé un contrat intitulé "garantie autonome" en faisant précéder sa signature de la mention manuscrite : "je me porte garant des sommes dues aux termes de la présente à la première demande du bailleur..." ; que la Compagnie générale de location se prévalant de la résiliation du bail en raison de loyers impayés a assigné M. Bic en paiement de la somme de 109 250 francs ;

Attendu que M. Bic fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Nancy, 12 février 1996) d'avoir fait droit à cette demande alors, selon le moyen :

1 / que la cour d'appel n'a pas recherché si la lettre de garantie qui se bornait à mentionner sans aucune limitation toutes les sommes dues au titre d'un contrat de location dont elle était autonome, constituait valablement un engagement au paiement d'une somme à concurrence d'un montant convenu ;

2 / qu'elle n'a pas recherché également si le garant s'était engagé à ne pas différer le paiement lorsque l'ordre lui serait donné d'y procéder et à ne soulever aucune contestation pour quelque motif que ce fut ;

Mais attendu, sur les deux branches, que la cour d'appel a vérifié que M. Bic avait eu une parfaite connaissance de la nature et de la portée de son engagement, lorsqu'il avait signé un contrat intitulé "garantie autonome", par

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lequel, et par une mention manuscrite dépourvue d'ambiguïté, il s'était porté garant des sommes dues par le bailleur à première demande écrite de la Compagnie générale de location, qu'elle en a exactement déduit que la mise en jeu de cette garantie n'était pas subordonnée à la défaillance du débiteur principal ;

qu'elle a ainsi sans être tenue de procéder à des recherches supplémentaires, légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

II. L’inopposabilité des exceptions, caractéristique essentielle de la « garantie autonome »

Certes, en tant que garantie, la « garantie autonome » est nécessairement liée à un contrat de base dont elle garantit l’exécution. Cependant, un tel lien n’est que chronologique, en ce sens que c’est en considération d’un contrat principal et en vue de la garantie de l’exécution de ce dernier, que l’engagement est pris. Une fois conclu, l’engagement est indépendant du contrat de base et est autonome quant à son existence, son objet, son exécution et son extinction. Le législateur consacre le caractère autonome de cette garantie en disposant que « sauf convention contraire, cette sûreté ne suit pas l’obligation garantie », en cas de transmission à un tiers (art. 2321 al. 4 du code civil).

Le sort de l’engagement de garantie autonome n’est pas lié à celui de la dette du débiteur principal, que ce soit quant à sa validité, son étendue, sa durée, son exécution, son extinction, la loi applicable en cas d’éléments d’extranéité. La principale conséquence de cette autonomie est l’inopposabilité des exceptions (A), cependant, celle-ci est écartée en cas de fraude ou d’abus manifeste (B).

A. Le principe de l’inopposabilité des exceptions

Ce principe est consacré dans l’article 2321 al. 3 c.civ. au terme duquel « le garant ne peut opposer aucune exception tenant à l’obligation garantie ». La jurisprudence antérieure à l’ordonnance de mars 2006 demeure applicable.

L’engagement qualifié de « garantie autonome » est soumis au principe d’inopposabilité des exceptions. Le garant ne peut opposer au créancier bénéficiaire les exceptions tirées du contrat de base. Ainsi, s’il peut opposer au bénéficiaire les exceptions tirées du contrat de garantie, il ne pourra se prévaloir de la nullité, de la résolution, de la résiliation ou de l’exécution du contrat de base (cf. Com. 18 mai 1999 , préc. p.9). De même, il ne pourra opposer la compensation, la confusion, la novation de l’obligation du débiteur principal, ou encore l’inexécution fautive, par le créancier bénéficiaire, des obligations mises à sa charge par le contrat de

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base (Com. 17 octobre 1984). Le garant supporte donc le risque d’un appel en garantie injustifié.

CCoomm..,, 1177 ooccttoobbrree 11998844

Sur le second moyen :

Vu l’article 1134 du Code civil ;

Attendu que selon l’arrêt déferré, la société de droit iranien Butiran a conclu en avril 1978, avec la société française Delattre Levivier (la société Delattre) un contrat aux termes duquel cette dernière devait lui construire une usine et lui livrer le matériel en Iran au plus tard le 30 avril 1979, qu’en contre partie du versement d’un acompte, et en vue de son remboursement éventuel en cas d’inexécution de ses obligations par la société Delattre, la société Butiran a obtenu le 13 juin 1978 la garantie de la Banque de l’Union Européenne (la B.U.E.) que le matériel n’ayant pas été livré, la société Butiran a réclamé à la B.U.E. la restitution de l’acompte qu’elle avait versé ;

Attendu que tout en énonçant que la B.U.E. a entendu donner une garantie à première demande, autonome par rapport au contrat pour l’exercice duquel elle est accordée, la Cour d’appel, pour débouter la société Butiran de son action retient l’inexécution fautive par celle-ci de ses obligations ;

Qu’ainsi la Cour d’appel n’a pas tiré de ses constatations les conséquences légales de ses énonciations ;

Par ces motifs, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le premier moyen , casse et annule l’arrêt rendu le 17 janvier 1983 entre les parties, par la Cour d’appel de Paris.

B. L’atténuation du principe en cas de fraude ou d’abus manifeste

La jurisprudence a admis un tempérament au principe du caractère autonome de la garantie et de l’inopposabilité des exceptions tirées du contrat de base dans l’hypothèse où l’appel en garantie est manifestement frauduleux ou abusif. L’exception d’abus et de fraude est désormais consacré dans l’article 2321 C. civ. , l’alinéa 2 visant expressément « les cas d’abus ou de fraude manifestes du bénéficiaire ou de collusion de celui-ci avec le donneur d’ordre ». Cette solution est fondée sur la maxime fraus omnia corrumpit, dont la portée est très générale (Com. 10 juin 1986). Pour des raisons de preuve, les cas dans lesquels l’appel de la garantie est effectivement rejeté en raison de fraude ou d’abus manifeste demeurent rares. Le plus fréquemment, les juges se réfèrent à ce tempérament pour l’écarter.

CCoomm..,, 1100 jjuuiinn 11998866

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :

Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 20 juin 1984) que la société " National Iranian Oil Company " (société NIOC) a conclu avec la société " Pipe Line Service " (société PLS) un contrat portant sur la

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fourniture, l'installation et la mise en service d'un système de protection cathodique de deux oléoducs ; que, sur ordre de la société PLS transmis par la banque de Paris et des Pays-Bas (banque Paribas), la banque Etebarate, aux droits de laquelle se trouve la banque Tejarat, a délivré à la société NIOC, maître de l'ouvrage, une garantie de bonne fin, s'engageant à payer à première demande de la société NIOC, et sur l'appréciation de celle-ci que l'entrepreneur avait contrevenu à l'exécution des engagements découlant du contrat, toute somme à concurrence d'un montant déterminé ; que la banque Paribas a contre-garanti la banque Eterabate dans les mêmes termes ; qu'à la suite de l'appel qu'elle a reçu de la société NIOC pour la totalité de la garantie, la banque Tejarat a appelé la contre-garantie de la banque Paribas ; que la société PLS a saisi le juge des référés d'une demande tendant à ce qu'il soit fait défense aux banques de payer le montant de la garantie et celui de la contre-garantie ;

Attendu que la société NIOC, le ministère des pétroles de la République islamique d'Iran se constituant au nom et faisant suite à la société NIOC, et la banque Tejarat font grief à la Cour d'appel d'avoir accueilli la demande de la société PLS, alors, selon le pourvoi, d'une part, que l'engagement de payer à la première demande constitue une garantie autonome, à l'égard du contrat conclu entre l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage, qui doit être exécutée dès l'avis donné par ce dernier de l'appel de la garantie ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que l'engagement de la banque Tejarat et celui de la banque Paribas s'analysent incontestablement comme des garanties et contre-garantie à première demande ; qu'en faisant défense aux banques d'honorer leurs engagements au seul motif que les travaux exécutés par l'entrepreneur avaient été reçus sans contestation ni réserve par le maître de l'ouvrage qui par ailleurs était débiteur de cet entrepreneur, ce que les banques ne pouvaient ignorer, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil, alors que, d'autre part, l'objet même de la garantie à première demande interdit aux banques garantes, tout comme à l'entrepreneur, d'exciper des exceptions que ce dernier pouvait opposer au maître de l'ouvrage, bénéficiaire des garanties, pour refuser de payer le montant des lettres ; qu'en déduisant la fraude du maître de l'ouvrage, à laquelle les banques ne devaient pas s'associer de ce qu'il a appelé les garanties tout en étant débiteur de l'entrepreneur au titre du marché principal, la Cour d'appel a violé par fausse application le principe " fraus omnia corrumpit " ;

Mais attendu que si la garantie à première demande est autonome par rapport au contrat de base, en revanche l'interdiction d'opposer les exceptions tenant à l'inexécution du contrat cède en cas de fraude manifeste ; qu'ayant relevé que la société NIOC n'avait pas réglé à la société PLS les sommes qu'elle lui devait en vertu de certificats de terminaison de travaux à 100 % établis par elle-même et des certificats de paiement approuvés par son ingénieur chef et son service comptable, et que la société NIOC avait été amenée à demander à la société PLS des travaux supplémentaires ayant fait l'objet de factures qu'elle avait laissées impayées sans les avoir contestées, la Cour d'appel a pu déduire de l'ensemble de ces circonstances que l'appel de la garantie de bonne fin apparaissait comme une manoeuvre frauduleuse ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi

Récemment la Cour de cassation a jugé que « l’appel, sans fraude ni abus manifeste, de la garantie(ou contre-garantie) fait obstacle à ce que le garant (ou contre-garant) demande, sur le fondement de l’inexécution par le bénéficiaire du contrat de base, la restitution de ce qu’il a versé en exécution de son obligation autonome » (com. 4 juillet 2006, les faits de l’espèce étant antérieurs à l’entrée en vigueur de la réforme des sûretés).

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Cour de cassation

chambre commerciale

N° de pourvoi: 04-19577

Statuant tant sur le pourvoi principal de la Banque centrale populaire du Maroc que sur le pourvoi incident relevé par SCP Brouard Daude, liquidateur judiciaire de la société Etlafric ;Attendu, selon l’arrêt attaqué, que d’ordre de la société Etlafric, mise ultérieurement en liquidation judiciaire, la banque Barclays bank (la banque contre-garante) a émis, au profit de la Banque centrale populaire du Maroc (la BCPM) une contre-garantie autonome à première demande pour garantir la bonne exécution, par le donneur d’ordre, d’un contrat de fourniture conclu avec la société Martco ; qu’un litige étant né sur les modalités d’exécution du contrat de base, la société Etlafric a assigné la société Martco en paiement de dommages-intérêts ; que la cour d’appel de Paris a sursis à statuer sur ce litige, tandis que, par un autre arrêt devenu irrévocable, elle a jugé ni abusif ni frauduleux l’appel de la contre-garantie par la BCPM, à concurrence d’ un montant partiel ;

que la Barclays bank, qui avait déclaré sa créance au passif de la société Etlafric, résultant d’une condamnation judiciaire de celle-ci à la rembourser du paiement intervenu, ainsi que la SCP Brouard Daude, liquidateur judiciaire de la société Etlafric, ont parallèlement réclamé, dans le cadre de la procédure sur l’exécution du contrat de base, la condamnation solidaire de la société Martco et de la BCPM, au paiement d’une certaine somme ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal :

Attendu que la BCPM fait grief à l’arrêt d’avoir rejeté sa demande tendant à voir écarter des débats les conclusions signifiées au nom de l’intimée, la Barclays bank, le 22 mars 2004, jour de l’ordonnance de clôture, alors, selon le moyen :

1 / qu’après l’ordonnance de clôture aucunes conclusions ne peuvent être déposées à peine d’irrecevabilité prononcée d’office ;

qu’en refusant d’écarter des débats les écritures de la contre-garantie dont elle a constaté qu’elles avaient été signifiées le jour même de l’ordonnance de clôture, sans relever qu’elles auraient été signifiées et déposées avant le prononcé de cette ordonnance, la cour d’appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l’article 783 du nouveau code de procédure civile ;

2 / que saisie d’une demande tendant à voir écarter des débats des conclusions tardives, le juge peut seulement constater qu’elles ne le sont pas et que la partie a eu le temps d’y répondre, sans pouvoir apprécier la nécessité d’une réponse, ni la réponse que la partie devait ou pouvait donner, qu’en se refusant à écarter des débats les conclusions déposées par la contre-garantie le jour même de l’ordonnance de clôture pour la raison que les développements additionnels y contenus soit ne nuisaient pas à l’exposant, soit ne nécessitaient pas une réponse, la cour d’appel a violé les articles 16 du nouveau code de procédure civile et 6 de la Convention européenne de sauvegarde ainsi que les droits de la défense ;

Mais attendu qu’ayant constaté que les dernières conclusions de la Barclays bank avaient été signifiées le jour de l’ordonnance de clôture, ce dont il résulte qu’elles sont présumées signifiées avant celle-ci et relevé que ces conclusions ne contenaient pas de moyens nouveaux nuisant à la BCPM ou nécessitant une réponse, la cour d’appel a souverainement retenu qu’elles avaient été produites en temps utile au sens des textes visés par le moyen ; que celui-ci n’est pas fondé ;

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Sur le troisième moyen du pourvoi incident :

Attendu que le liquidateur, ès qualités, fait grief à l’arrêt d’avoir rejeté sa demande tendant à voir condamner la société Martco au paiement de la contre-valeur en euros de la somme de 196 000 dollars US en réparation du préjudice que lui a occasionné le retard de paiement de la société Martco dans la bonne exécution d’une vente ultérieure conclue avec une autre société en invoquant un défaut de réponse en violation de l’article 455 du nouveau code de procédure civile ;

Mais attendu que ce grief ne serait pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ;

Mais sur le second moyen du pourvoi principal, pris en sa deuxième branche :Vu l’article 1134 du code civil ;

Attendu que l’appel, sans fraude ni abus manifeste, de la garantie ou contre-garantie, fait obstacle à ce que le garant, ou contre-garant, demande, sur le fondement de l’inexécution par le bénéficiaire du contrat de base, la restitution de ce qu’il a versé en exécution de son obligation autonome ;

Attendu que pour condamner la BCPM, banque garante, à restituer à la banque contre-garante la somme de 457 078, 28 euros outre intérêts, l’arrêt énonce que les décisions irrévocables qui ont jugé l’appel en paiement ni abusif ni frauduleux n’ont concerné que la mise en oeuvre de cette contre-garantie sans trancher son bien fondé, qui dépend de l’existence ou de l’étendue de la créance invoquée par son bénéficiaire ;

Attendu qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

Sur le premier moyen du pourvoi incident :

Vu l’article 1134 du code civil ;

Attendu que pour rejeter la demande du liquidateur, ès qualités, tendant à la condamnation solidaire de la BCPM et de la société Martco au paiement de la somme de 584 386,32 euros sur le fondement du contrat de base, l’arrêt retient que le préjudice du liquidateur, ès qualités, était seulement hypothétique, la déclaration de créance de la Barclays bank à son passif n’étant assimilée qu’à une demande en paiement ;

Attendu qu’en statuant ainsi, alors que l’arrêt retient lui-même que la Barclays bank avait fait valoir la créance qu’elle détenait à l’encontre de la société Etlafric, en la déclarant à son passif, après avoir constaté que celle-ci résultait d’une condamnation par jugement à la rembourser ; qu’il retient encore que l’exécution défectueuse du contrat, exclusivement imputable au bénéficiaire, se trouvait à l’origine de la créance la Barclays bank à l’encontre de la société Etlafric ; qu’il en résulte que cette dernière était en droit d’exercer, sur le fondement du contrat de base, une action contre le bénéficiaire ou le garant en indemnisation ou en restitution des sommes provenant d’un paiement indu, dès lors qu’elle en était comptable vis-à-vis de la Barclays bank, de sorte que son préjudice n’était pas hypothétique, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations ;

Et sur le deuxième moyen du pourvoi incident :

Vu les articles 1149 et 1150 du code civil ;

Attendu que pour rejeter la demande du liquidateur, ès qualités, tendant à la condamnation de la société Martco à supporter les frais financiers dus au retard de paiement de la cargaison durant 70 jours, soit la contre-valeur en euros de la somme de 113 648,48 dollars US outre intérêts, l’arrêt relève que ces frais financiers n’étaient pas visés par l’engagement de la société Martco relatif au coût d’escompte de la lettre de crédit, contenu dans le télex du 21 juin 1995 (1991) ;

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Attendu qu’en statuant ainsi, alors qu’elle avait constaté que le paiement contractuellement convenu de la marchandise livrée, au moyen d’une lettre de crédit payable à vue émise par la société Martco, était intervenu avec retard, ce dont il résultait que l’acquéreur était tenu de réparer ces dommages prévisibles causés directement par le manquement à son obligation contractuelle, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il condamne la BCP du Maroc à payer à la société Barclays bank PLC, à titre de restitution, la somme de 457 078,28 euros, outre intérêts, en ce qu’il déboute la SCP Brouard Daude, ès qualités, de sa demande de condamnation de la BCP du Maroc et de la société Martco fondée sur le contrat de base au paiement de la somme de 584 386,32 euros à titre de dommages-intérêts, et en ce qu’il déboute la SCP Brouard Daude, ès qualités, de sa demande dirigée contre la société Martco tendant à sa condamnation à supporter ses frais financiers soit la contre-valeur en euros de la somme de 113 648,43 euros outre intérêts, l’arrêt rendu le 23 juin 2004, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Barclays Bank PLC aux dépens ;

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