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Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM Agence française de développement Rapport final

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Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM Agence française de développement

Rapport final

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 2

Table des matières

Table des matières 2  

Introduction générale 4  

Compétitivité, avantages comparatifs, marchés pour les « filières d’avenir » 5  

Atouts et handicaps : un premier socle pour aborder les problèmes de compétitivité des DOM 6  

Approche théorique et approche « terrain » 7  

Les filières retenues pour analyse dans chaque DOM 8  

1. Le référentiel d’analyse 9  

1.1 Les problématiques des petites économies insulaires : croissance et compétitivité 9  

1.2 Les approches de la convergence : théorie et applications 11  

1.3 La croissance économique des SIDS par le prisme des théories de la croissance endogène 12  

1.4 La croissance des DOM : les approches structuralistes 13  

1.5 Un nouveau regard sur la croissance et la compétitivité des DOM 17  

1.6 Conclusion 19  

2. Les missions de terrain 19  

2.1 Cadrage des missions 19  

2.2 Déroulement des missions 19  

2.3 Structure des rapports de mission 20  

3. Éléments d’analyse par filière 20  

3.1 La filière Agriculture et agroalimentaire 20  

3.2 La filière Énergies renouvelables et maîtrise de l’énergie 40  

3.3 La filière Tourisme / écotourisme 70  

3.4 La filière Bois 99  

3.5 La filière Bâti tropical 109  

4. Synthèse sur les facteurs de compétitivité et les avantages comparatifs 116  

4.1 Guadeloupe : les filières Éco-tourisme, agriculture-Industries agroalimentaires et Énergies renouvelables 117  

4.2 Guyane : les filières Bois et Tourisme 128  

4.3 Martinique : les filières Agriculture-Industries agroalimentaires et Énergies renouvelables 134  

4.4 La Réunion : les filières Bâti tropical, ENR et Tourisme 140  

5. Conclusions 150  

5.1 Une valeur sûre : la réduction de la dépendance vis-à-vis de l’extérieur 150  

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5.2 Un potentiel prometteur : l’exportation de savoir-faire, d’ingénierie et d’expertise 151  

5.3 Une nécessité : l’exploration raisonnée des marchés de niche 151  

5.4 Une filière exportatrice « évidente » mais soumise à un contexte de forte concurrence et de grande volatilité : tourisme / éco-tourisme 152  

5.5 Les enjeux communs à l’ensemble des filières et les leviers d’action à mobiliser 152  

Annexe : liste des entretiens 157  

Personnes rencontrées lors de la mission en Guadeloupe : 157  

Personnes rencontrées lors de la mission en Guyane : 158  

Personnes rencontrées lors de la mission en Martinique : 158  

Personnes rencontrées lors de la mission à La Réunion : 159  

Annexe : données des douanes sur les échanges de marchandises 161  

Introduction 161  

Panorama général 161  

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Introduction générale

L’objectif de la présente étude est, au terme du cahier des charges de l’AFD, « d’engager une réflexion sur la compétitivité des territoires des DOM dans le contexte international actuel et d’identifier plus précisément les potentialités de développement d’activités (production de biens et de services) sur les marchés locaux et sur les marchés extérieurs ».

Les handicaps dont souffrent les petites économies insulaires ont fait l’objet de nombreux travaux dans la littérature économique depuis les années 1990, qui ont évidemment souligné la faible compétitivité « prix » de ces économies, faible compétitivité encore aggravée pour les DOM par leur appartenance à la sphère économique française et européennes (salaires élevés, contraintes réglementaires, …).

Assez peu de travaux en revanche se sont intéressés, jusqu’à une période récente, aux facteurs de compétitivité « hors prix » qu’il est possible de mettre en évidence et aux opportunités qu’ils créent1. Par ailleurs, si les atouts dont disposent les DOM, soit naturels (richesse environnementale et biodiversité, espace maritime, …), soit résultant des politiques publiques nationales et européennes (capacités de recherche, qualification des ressources humaines, aides diverses, …), sont bien soulignés, les raisons pour lesquelles ces atouts ne se sont guère traduits jusqu’ici par la création d’activité ont été peu analysées de façon approfondie.

Par ailleurs, un balayage rapide de la littérature (DOM aussi bien que « petites économies insulaires » en général) montre que l’approche reste généralement macro-économique : peu de travaux se sont intéressés aux stratégies des entreprises dans la perspective généralement retenue par l’ « économie industrielle », à part une thèse de 2009 sur la performance des entreprises en Guadeloupe2. On retiendra surtout la très récente étude de V. Caupin et B. Savoye (AFD), « Une entreprise dans un DOM. Est-ce que cela change la donne ? », qui contient des observations méthodologiques précieuses et un paragraphe sur les stratégies et trajectoires d’entreprises3, mais reste malgré tout assez loin d’une véritable approche micro-économique.

L’objectif de fond de l’étude s’est donc accompagné d’un objectif méthodologique : mettre en œuvre une approche « innovante » permettant d’expliquer pourquoi les atouts évoqués ne sont pas transformés en avantages comparatifs sur le terrain et n’ont donc pas produit d’effets en termes d’activités, d’exportations et d’emplois, en tout cas et a minima à un niveau satisfaisant. Cette approche innovante a privilégié dans toute la mesure du possible la dimension micro-économique, au niveau des entreprises, de leur stratégie (ou de leur absence de stratégie), de la culture et du comportement de leurs dirigeants, sans négliger pour autant les rapports complexes noués (ou insuffisamment noués) entre le monde de l’entreprise et le milieu politique

1 On retiendra néanmoins : Josling (T.), Stanford University, Trade Policy in Small Island Economies : Agricultural Trade Dilemmas for the OECS, IICA/NCFAP Workshop on Small Economies in the Global Economy, Grenada, August 1998. En dépit de son titre, cette communication propose une approche globale et évoque les avantages comparatifs (http://ctrc.sice.oas.org/geograph/caribbean/Jossling.pdf). 2 Ernatus (H.), Performance des entreprises dans une petite économie insulaire de la Caraïbe : le cas de la Guadeloupe, thèse de doctorat, Université de Paris I, Panthéon-Sorbonne, 2009. En dehors de la sphère des études universitaires, on rappelle que l’élaboration de la Stratégie régionale d’innovation de la Guadeloupe a donné lieu à une enquête conduite auprès des entreprises, enquête électronique accompagnée d’une cinquantaine d’entretiens face à face avec des dirigeants d’entreprise ; voir aussi : Vella (S.), SMEs and Economic Resilience Building, in: Occasional Papers on Island and Small States, Islands and Small states Institute, University of Malta, 2011 ; Vella (S.), Private Sector Development and SMEs, ibid., 2007. 3 Caupin (V.) et Savoye (B.), Une entreprise dans un DOM. Est-ce que cela change la donne ? Une analyse comparative des entreprises des DOM et de métropole, Focales 15, AFD, juin 2012.

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et administratif4. La traduction la plus visible d’une telle approche apparaît dans les encadrés consacrés à des entreprises spécifiques pour chaque filière et dans chaque DOM.

Compétitivité, avantages comparatifs, marchés pour les « filières d’avenir »

Les préoccupations qui ont conduit l’AFD à lancer la présente étude sont avant tout de nature structurelle et renvoient aux conditions de la compétitivité dans les DOM. Il est néanmoins important de souligner que ces conditions ont été affectées depuis 2008 sous le poids des données conjoncturelles et de la pression sur les dépenses publiques5.

Sachant que la compétitivité coût des territoires des DOM est globalement faible pour des raisons bien connues6, l’étude s’est plus particulièrement attachée à cerner les avantages comparatifs qui pouvaient être analysés en termes de compétitivité hors prix, en particulier : la différenciation des produits, généralement liée aux conditions locales y compris aux capacités locales d’innovation :

• soit concernant des produits et services spécifiques à la région (caraïbe, aire amazonienne, Océan indien et l’ensemble de la bande intertropicale) qui devront trouver leurs marchés à l’international hors région (ex. : produits « tropicaux », produits agricoles « à contre saison », tourisme7), en tenant compte des contraintes/avantages de l’appartenance à la zone euro et à l’Union européenne suivant le marché visé ;

• soit concernant des produits ou des services que les capacités mobilisables permettront d’adapter aux besoins de la région (énergies renouvelables, matériaux de construction, ingénierie, services liés à la santé, etc.) et qui devront trouver place sur le marché local et sur le marché régional8, voire pour certaines niches de produits et services sur le « grand » marché international.

Dans ce dernier cas, on a pris garde de ne pas négliger les éléments de compétitivité prix qui peuvent résulter des politiques publiques, nationales et européennes, de soutien à l’innovation, aux PME, à l’export, etc., susceptibles en principe de permettre d’abaisser les coûts –, politiques publiques qui n’existent pas ou n’existent que de façon embryonnaire la plupart du temps dans les pays de la région, en particulier pour ce qui est de la zone caraïbe dans les petits États insulaires voisins. Bien entendu, l’existence de telles politiques publiques n’est pas une garantie de leur efficacité, et l’on a pris soin d’évoquer cette question.

Les conditions de la compétitivité dans les DOM ont été abordées à la fois d’un point de vue horizontal et d’un point de vue vertical :

• d’un point de vue horizontal : en mettant en évidence les facteurs actuels et potentiels de compétitivité, et à l’opposé les handicaps, en recensant et en

4 Sur ce point, on consultera à nouveau avec intérêt Josling, 1998, op. cit. ; voir aussi : Curmi (L.), Governance and Small States, in: Occasional Papers on Island and Small States, Islands and Small states Institute, University of Malta, 2009. 5 Pour un exemple d’analyse dans la zone Pacifique : Jarayaman (T.K.), Global Financial Crisis and Economic Downturn : Challenges and Opportunities for the Small Island Countries in the Pacific, in: Occasional Papers on Island and Small States, Islands and Small states Institute, University of Malta, 2012; Antoniou (A.), The Global Financial Turmoil and Small States, in: Occasional Papers on Island and Small States, Islands and Small states Institute, University of Malta, 2009. 6 Voir notamment : INSEE - IEDOM - AFD (2008), L'ultra périphéricité, définit-elle un modèle de croissance ? ; Caupin (V.) et Savoye (B.), AFD (2012), op. cit.

7 Sachant qu’il peut y avoir un lien entre tourisme et production agricole / agroalimentaire locale. 8 Sachant que les marchés régionaux peuvent être très différents en matière de demande et de solvabilité : la proximité du Brésil ou la présence dans le bassin caraïbe autorise des perspectives et laisse apparaître des opportunités pour certains DOM que l’on retrouvera difficilement dans la zone Pacifique, voire dans l’Océan indien.

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explicitant leurs déterminants, et en établissant les interactions qui peuvent exister entre ces facteurs ;

• d’un point de vue vertical : en travaillant sur un certain nombre de filières de façon fine à travers l’examen des stratégies des entreprises concernées, et, dans la mesure du possible, des relations inter-branches ou inter-filières.

Atouts et handicaps : un premier socle pour aborder les problèmes de compétitivité des DOM

La communication de la Commission européenne de juin 2012, « Les RUP : un partenariat pour une croissance intelligente durable », et celle d’août 2008, « Les RUP : un atout pour l’Europe » ont mis en avant les atouts suivants de ces territoires : le potentiel insuffisamment exploité que représentent les ressources agricoles et un espace maritime (biodiversité marine, ressources halieutiques) ; la présence de nombreux centres de recherche et des savoir-faire adaptés aux pays de la zone intertropicale ; un niveau de formation/qualification élevé par rapport aux pays environnants ; une richesse environnementale (biodiversité) ; le potentiel en matière d’énergies renouvelables, d’éco-tourisme ; etc.

On doit cependant souligner que cette présentation vise à mettre en avant en quoi les RUP sont un atout pour l’Union européenne plus qu’à souligner leurs atouts dans la compétition internationale, même si les deux approches ne s’opposent pas. Elle mérite par ailleurs d’être affinée dans la mesure où les atouts évoqués peuvent bien constituer une base pour développer des avantages comparatifs, mais sur des marchés différents et avec des finalités différentes :

• ainsi, la présence de centres de recherche et le niveau de formation/qualification élevé peuvent fournir la base d’avantages comparatifs par rapport aux pays voisins en développement ou en émergence, qui ne disposent pas des mêmes ressources du fait de l’absence ou de la faiblesse des politiques publiques d’éducation et de recherche ; ces ressources peuvent ainsi permettre le développement et l’exportation de savoir-faire, de services d’ingénierie, etc. ; il est cependant important de noter qu’un des points critiques de la transformation de cet atout (relativement « abstrait ») en avantage comparatif « concret » est constitué par la traduction d’activités sans fin lucrative (recherche et coopération internationale en matière de recherche) en activités marchandes ;

• ainsi encore, les ressources agricoles et halieutiques, la richesse environnementale, la biodiversité, l’espace maritime, etc. sont des atouts globalement communs aux pays de la région :

− ces atouts peuvent fournir la base du développement de filières locales et attirer des investissements extérieurs (aquaculture, éco-tourisme, valorisation de la biodiversité) ;

− ils peuvent aussi procurer aux centres de recherche les moyens d’une différenciation et des opportunités d’expérimentation/prototypage, susceptibles de faire l’objet d’une valorisation (voir ci-dessus : traduction d’activités sans fin lucrative en activités marchandes) ;

− les marchés potentiels peuvent être aussi bien locaux que nationaux/européens, voire internationaux ;

− l’exploitation de leurs potentialités peut cependant se heurter à des contraintes techniques ou règlementaires fortes ; il en va par exemple du secteur de la pêche qui relève d’un cadre communautaire (orienté sur la limitation de l’exploitation de la ressource) non adapté à la situation des RUP (sous exploitation de la ressource halieutique, et pêche artisanale vieillissante peu en capacité de tirer profit de la richesse).

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En regard, le résumé exécutif de l’étude « Growth Factors in the Outermost Regions » soulignait que les RUP présentent toutes les caractéristiques des économies de petite taille9 : étroitesse du marché domestique (entraînant des tendances à des situations de monopole dans la production et le commerce), ressources domestiques rares (naturelles et humaines), faible produit intérieur, ainsi que possibilités limitées de diversification, incapacité à peser sur les prix internationaux, exportations limitées et marchés à l’exportation étroits (fort niveau d’importations par rapport au PIB), haut degré d’ouverture structurelle au commerce extérieur, coûts de transports et de communications élevés, etc. Dans le même temps, il faut noter que la littérature sur les « petites économies » privilégie souvent les « petits États insulaires en développement » alors que les RUP n’ont pas le même degré d’autonomie en ce qui concerne leur politique macro-économique, ce qui vaut en particulier pour les DOM et les place dans une situation spécifique.

A l’éloignement du marché européen (et de sa zone monétaire), à l’insularité et à la petite taille, à la topographie et au climat souvent difficiles, et à la dépendance économique à l’égard d’un petit nombre de produits, il faudrait encore ajouter, comme l’ont montré les études réalisées jusqu’ici sur les DOM : la faiblesse des services aux entreprises (privés ou bénéficiant d’un soutien public) concernant le développement de projets innovants (viabilité), la connaissance des marchés extérieurs, l’accès à des investisseurs extérieurs potentiels, etc. ; et, sur un plan sociopolitique, le temps de la décision politique généralement long et le manque relatif d’ingénierie de projets (tant dans le public que le privé), ainsi qu’une absence de « culture de la confiance » chez les dirigeants d’entreprise (qui les porte peu à mener des actions collectives pour explorer les marchés extérieurs ou pour se lancer dans des projets innovants).

Approche théorique et approche « terrain »

Nous avons réalisé pour la présente étude, comme le demandait le cahier des charges, une revue de la littérature et élaboré une synthèse des principales conclusions des études et rapports portant sur la compétitivité et l’ouverture commerciale des économies ultramarines. Cette revue et cette synthèse ont permis de faire le point, dans un premier chapitre (§ 1 : Le référentiel d’analyse), sur l’approche théorique des problèmes de compétitivité des DOM, et, au-delà, des petites économies insulaires. Ils nous ont conduits à mettre en lumière des questionnements et à dégager des hypothèses de travail qui ont servi de cadre de référence pour les missions de terrain réalisées dans chaque DOM (guides d’entretien, rapports de mission).

On doit noter que l’étude « Growth Factors in the Outermost Regions », réalisée pour la Commission européenne et précédemment citée, avait procédé de façon assez proche. En effet, cette étude était divisée en deux volets :

• un volet à caractère macro-économique avec une dimension théorique comprenant : une analyse des tendances socio-économiques récentes et de leurs facteurs sous-jacents ; l’examen de nouveaux modèles de croissance fondés sur des potentiels non exploités ou sous-exploités ; une analyse croisée des facteurs de croissance ; l’élaboration d’un indice de vulnérabilité ;

• un volet « analyses de terrains » dans chacune des régions ultrapériphériques.

Dans le premier volet, le chapitre consacré aux nouveaux modèles de croissance était très réduit et il était centré sur les énergies renouvelables, les services (maritimes, environnement et santé, ainsi que sur l’intérêt géopolitique).

Globalement, on peut considérer que cette étude mettait avant tout l’accent sur l’intérêt des RUP pour l’Europe et sur les handicaps qu’ils devaient surmonter, ainsi

9 Voir, à titre comparatif, pour une évaluation déjà ancienne des facteurs de vulnérabilité concernant les petits États insulaires : Briguglio (L.), Small Island Developing States and Their Economic Vulnerabilities, in : World Development, vol. 23, n°9, 1995.

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que sur leur vulnérabilité. L’analyse des facteurs de croissance portait sur les grands indicateurs macro-économiques.

On voit donc bien la différence d’approche avec la présente étude, orientée sur la compétitivité et sur l’ouverture commerciale, et donc sur les facteurs susceptibles de contribuer à surmonter les faiblesses et la vulnérabilité des économies des DOM, soit une approche à la fois théorique et pragmatique destinée à comprendre comment les atouts identifiés depuis longtemps dans les DOM peuvent être des facteurs de compétitivité sur les marchés locaux, nationaux, internationaux (dont les marchés régionaux), mais ne l’ont guère été de fait jusqu’à présent de façon concrète.

Les filières retenues pour analyse dans chaque DOM

Le cahier des charges de l’étude prévoyait que serait conduite une analyse de filières et/ou des stratégies d’entreprises, et il évoquait comme hypothèses l’industrie agro-alimentaire (dont la pêche), la filière « énergie renouvelables », d’autres filières industrielles, ou encore des filières dans le secteur des services.

Après échange avec le Comité de pilotage de l’étude et les délégations de l’AFD dans chaque DOM, les filières suivantes ont été retenues :

• Guadeloupe : agriculture et agroalimentaire ; énergies renouvelables et maîtrise de la demande énergétique ; tourisme / écotourisme

• Guyane : écotourisme ; bois ;

• Martinique : agriculture et agroalimentaire ; énergies renouvelables et maîtrise de la demande énergétique ;

• La Réunion : énergies renouvelables et maîtrise de la demande énergétique ; tourisme ; bâti tropical.

Pour chacune de ces filières, des entretiens approfondis ont été conduits avec des dirigeants d’entreprise de façon à comprendre au mieux les stratégies mises en œuvre pour améliorer la compétitivité et conquérir des marchés, qu’ils soient locaux ou extérieurs.

Comme on le voit, deux filières se retrouvent choisies dans trois DOM sur quatre, facilitant ainsi une analyse transversale : énergies et tourisme/écotourisme. Agriculture et agroalimentaire ont été retenus aux Antilles, Guadeloupe et Martinique.

Pour clore cette introduction générale, on rappellera que les différentes filières analysées évoluent dans des contextes géographiques sensiblement différents, qui affectent leur potentiel compétitif et les capacités d’exportation :

• Guadeloupe et Martinique sont en compétition dans l’univers caraïbe avec des pays voisins, petites économies insulaires, comme pays continentaux, qui bénéficient en général de coûts du travail sensiblement inférieurs ; en outre, les petits pays insulaires voisins jouissent d’un statut d’indépendance ou de large autonomie leur permettant de développer des services financiers off shore ; ces deux DOM sont donc soumis à une forte pression compétitive de la part de leurs voisins (produits agricoles et tourisme notamment).

• La Guyane est relativement isolée au milieu de voisins à faible revenu par tête, État brésilien de l’Amapa compris, et elle est soumise à une forte pression migratoire, avec un marché local qui reste largement à défricher.

• Enfin, la Réunion se trouve dans un univers complexe, marqué par le triple voisinage : de Maurice, qui est parvenu à créer un vrai processus de développement, fondé en partie sur le tourisme ; de l’Afrique du Sud, une puissance régionale émergente ; et de pays pauvres voire très pauvres (Comores, Madagascar), certains étant cependant en changement rapide (ex. : Mozambique). Cette configuration est par certains côtés proche de celle de la Guadeloupe et de la Martinique (coût de la main d’œuvre) ; cependant, combinée à un poids démographique important du territoire, elle ouvre des

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potentialités d’exportation de services et d’ingénierie, avec dans le même temps la présence d’un large marché local.

1. Le référentiel d’analyse

1.1 Les problématiques des petites économies insulaires : croissance et compétitivité

Une littérature théorique et empirique importante est consacrée à l’analyse de la croissance économique dans les petits espaces insulaires et, en particulier, dans les départements et les régions d’Outre-mer français (DOM-ROM). Cette littérature cherche d’une part, à étudier la nature et les mécanismes de la croissance économique de long terme dans ces espaces et d’autre part, à identifier les déterminants de leur compétitivité.

Les nombreux diagnostics comparatifs des trajectoires des espaces micro-insulaires et périphériques montrent une différentiation de parcours, jalonnés de réussites et d’échecs. Même si certains éléments d’une trame commune se dégagent, il semble évident que ni les dotations initiales en ressources ni les avantages et/ou contraintes géographiques ne puissent apparaître comme des conditions suffisantes pour expliquer les diversités des processus de développement économique engagés. La dimension institutionnelle mais aussi les choix de politique économique et de stratégie de croissance semblent également fortement déterminants.

Depuis les travaux de Kuznets (1960) et leurs prolongements (Seers, 1964, Demas, 1965), les économistes ont identifié un certain nombre de contraintes spécifiques au développement des petites économies insulaires (et/ou des plus petits pays : « small nations ») qui se résument en trois grandes catégories :

En premier lieu, des contraintes liées à des effets de taille. Elles se définissent, à de multiples niveaux, par le manque de ressources naturelles, l’étroitesse du marché domestique, un stock capital humain limité ou l’absence d’un seuil démographique minimal nécessaire à la mise en place rationnelle et opérationnelle d’un ensemble d’infrastructures publiques et de réseaux de communication. Ces contraintes sont, d’une part, à l’origine de la faiblesse des économies d’échelle, internes ou externes, avec comme résultat, la formation d’un tissu productif essentiellement peuplé de petites entreprises, sans forte spécialisation sectorielle, ainsi que l’absence significative d’investissements directs étrangers (IDE). Ces contraintes expliquent, d’autre part, l’absence d’économies de variétés, c’est-à-dire des avantages technologiques ou pécuniaires résultant de la complémentarité des activités au sein d’une firme et/ou d’une économie donnée (Dimou, 2004).

En second lieu, des contraintes liées à la distance considérable qui sépare ces économies des marchés mondiaux et qui altèrent à la fois, la nature des échanges économiques et celle des migrations humaines. L’éloignement géographique de ces régions est soumis à une distance-accès, responsable de la rupture des charges dans l’acheminement des produits, d’où la forte dépendance de l’activité productive vis-à-vis du secteur des transports (Crusol et al, 1988, Levratto, 2006). Outre le renchérissement de l’activité économique locale (les DOM représentent un cas rare d’application possible – bien que pas systématique – du concept d’inflation importée), cette dépendance a une conséquence fondamentale en matière de distribution et d’organisation des activités locales, puisque celles-ci sont fortement tributaires de la présence d’infrastructures de transport maritime et aérien ainsi que de services annexes de stockage, de logistique, de conditionnement et de distribution des marchandises (Dimou, 2006).

En troisième lieu, des contraintes liés aux caractéristiques géographiques de ces espaces telles que le climat et la topographie plutôt que la taille (Armstrong et Read, 2000). Bien que ces caractéristiques ne représentent pas, par elles-mêmes, des contraintes insurmontables en matière de développement économique, elles

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expliquent plusieurs phénomènes persistants dans les petites économies insulaires tels que la forte densité de population (du fait de la topographie), les spécialisations agricoles (liées au climat), ainsi qu’un niveau élevé de risques naturels et environnementaux dont la gestion préventive ou corrective peut s’avérer plus ou moins coûteuse.

Ces trois séries de contraintes, relativement communes à tous les espaces insulaires, sont à l’origine de leur fragilité et de leur grande vulnérabilité face aux chocs exogènes extérieurs, d’une part, et des stratégies de croissance limitées dont ils disposent, d’autre part. Le rôle de ces contraintes est analysé dans une littérature économique récente, développée à la suite des travaux originaux de Briguglio (1995, 2007) sur la vulnérabilité et la résilience des petites économies insulaires dénommées SIDS : Small Island Developing States (Adrianto et Matsuda, 2004, Briguglio et al, 2009 ; Naudé, Santos-Paulino et McGillivray, 2009a ; Santos-Paulino, 2010 ; voir aussi le rapport des Nations Unis UNU-WIDER 2010 sur la vulnérabilité des SIDS entre 2006 et 2010).

Le niveau d’agrégation spatiale commun dans ces travaux est défini par l’insularité et la petite taille ; or, celles-ci regroupent des situations institutionnelles et politiques fortement différenciées qui se traduisent par des trajectoires de développement économique divergentes. La littérature sur les SIDS traite de façon quasi-uniforme les DOM-ROM français, les RUP européennes, les îles américaines ou australiennes, les complexes micro-îliens du Pacifique, les îles touristiques des Antilles et/ou les plateformes financières chypriote ou caraïbes, qui représentent pourtant un ensemble relativement hétérogène, notamment en matière de niveau de développement économique.

Sur le plan statistique, le travail comparatif laisse certes, apparaître deux profils socio-économiques différents entre les territoires non-indépendants et les îles souveraines. Ainsi, les îles politiquement dépendantes affichent des niveaux de revenu par habitant (16 300 $) en moyenne deux à trois fois supérieurs aux îles indépendantes (6 100 $). En termes de structure productive, la part du secteur primaire dans le PIB est beaucoup plus faible dans les îles dépendantes (5% contre 16%), et celle du secteur tertiaire beaucoup plus élevée (80% contre 65%). Ces différences peuvent être interprétées par le fait que les rythmes de passage d’une économie traditionnelle vers une économie de services sont nettement plus rapides dans les îles dépendantes que dans les îles souveraines (Dupont, 2010).

Cependant, même lorsque l’on opère un classement selon des critères institutionnels, les tentatives de généralisation peuvent s’avérer périlleuses : ainsi, parmi les États indépendants, une comparaison entre l’île Maurice qui dispose d’une base industrielle solide et développe une plateforme logistique et financière permettant de s’imposer dans les échanges de biens et services dans le triangle Durban-Perth-Bombay et la république de Haïti qui figure parmi les pays les plus pauvres du monde et dont l’activité économique est fortement représentée par l’agriculture vivrière, est peu adéquate. De la même façon, le niveau de développement dans les RUP est fondamentalement différent, parfois y compris entre deux régions d’un même pays : ainsi, à Madère, le PIB par habitant exprimé en PPA est supérieur à la moyenne du Portugal, contrairement à l’autre RUP portugaise, les Açores. Dans les DOM, les écarts de niveau de vie avec la France hexagonale sont inférieurs de 40% en moyenne, avec des écarts néanmoins plus ou moins conséquents entre la Martinique et Mayotte, ou encore la Guyane qui n’est pas un espace insulaire. Enfin, Hawaii affiche un niveau de PIB par habitant supérieur à la moyenne américaine, contrairement à Guam, tandis que Porto-Rico représente un cas rare d’une île dépendante fortement spécialisée dans les activités industrielles à faible valeur ajoutée, telles que le textile.

Dans ce travail, nous nous focalisons plus particulièrement sur la croissance dans les DOM français et les perspectives de compétitivité sectorielles et entrepreneuriales qui en découlent. Ce travail est organisé en six sections, selon les approches théoriques utilisées pour analyser les processus de croissance économique et leur validation empirique : après la partie introductive, la seconde section examine les théories de croissance standard et les processus de convergence ; la troisième section rappelle les

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approches en termes de croissance endogène ; la quatrième section présente les approches structuralistes et les modèles qui en découlent (MIRAB actualisé, PROFIT, SITE) ; la cinquième section tente d’apporter un regard synthétique et critique des travaux réalisés jusque-là et cherche à engager de nouvelles perspectives de recherche sur les filières d’avenir et la compétitivité dans les DOM ; enfin la sixième partie résume ces perspectives dans une conclusion synthétique succincte.

1.2 Les approches de la convergence : théorie et applications

Les approches classiques de la croissance économique trouvent leurs origines dans les travaux de Solow (1956) et de Swan (1956). Dans le modèle initial de Solow, le taux d’épargne est entièrement exogène ; le taux de croissance de long terme repose sur la croissance démographique et le niveau de progrès technologique. Il conduit à une génération de modèles de croissance à deux facteurs de production (capital et travail) qui mettent l’accent prépondérant sur l’accumulation du capital.

En économie ouverte et en admettant l’hypothèse initiale d’une libre circulation du capital et du travail, ces modèles prévoient un processus de convergence des niveaux de revenu et/ou du PIB par habitant entre les différentes régions. Dans ces modèles fortement anti-interventionnistes, les politiques de relance et/ou les politiques sectorielles n’interviennent de façon significative ni dans la détermination ni dans l’accélération du processus de rattrapage des régions les plus développées par les régions en retard.

Ces approches ont généré un ensemble d’applications qui s’interrogent sur les processus de rattrapage réel des moyennes métropolitaines et européennes par les économies des DOM, depuis la départementalisation de 1946. Sur le plan empirique, cela conduit à tester la propriété de convergence du PIB et/ou du revenu entre des régions et des pays, en utilisant différentes définitions du concept, à savoir la b-convergence, la s-convergence et la convergence stochastique (Fuss, 1999 ; Islam, 2003).

De façon générale, la plupart des chercheurs montrent que le taux de croissance nominale du PIB dans les DOM et dans les RUP est supérieur à celui de la France métropolitaine et des moyennes européennes, ce qui permet de supposer un processus de rattrapage plus ou moins rapide10. Contrairement à la croissance extensive dans les RUP portugaises et espagnoles, alimentée, dans les premières, par une accumulation du capital (sous les effets des IDE) et, dans les deuxièmes, par la croissance du facteur travail, la croissance économique de long terme dans les DOM est de nature intensive et repose essentiellement sur des gains de productivité (Union Européenne, 2011).

Ces gains apparents de productivité sont générés, d’une part, par le développement et la modernisation des infrastructures publiques et, d’autre part, par l’amélioration des systèmes d’enseignement et de formation (principalement à La Réunion). Ils concernent essentiellement le secteur public mais aussi le secteur privé via la création d’externalités technologiques par le biais de l’investissement public en matière d’infrastructures. Accompagnés par une croissance des salaires plus élevée, ces gains de productivité expliquent en grande partie le paradoxe des DOM, à savoir un taux de croissance nominale de long terme élevé, parallèlement à la persistance voire à l’augmentation du taux de chômage sous la pression démographique.

La plupart des travaux empiriques sur les économies des DOM concluent à un processus de rattrapage des standards métropolitains dans le long terme, avec toutefois certains écarts persistants notamment au niveau du chômage. Le rapport sur les modèles de croissance de long terme dans les régions ultrapériphériques, publié par l’AFD, l’INSEE et l’IEDOM en 2007, propose une décomposition des processus de rattrapage observés, en trois processus distincts :

10 Entre 2000 et 2009, le taux de croissance annuel moyen du PIB par habitant en Europe (UE27) a été de 2,3%, en France de 1,9%, 2,6% en Martinique, 2,9% en Guyane, 3% en Guadeloupe et 4,2% à La Réunion.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 12

• Un processus de convergence des niveaux de PIB par habitant des différents pays européens et notamment des trois pays concernés par des RUP insulaires, à savoir la France, l’Espagne et le Portugal ; ce processus semble, néanmoins, moins significatif lorsque l’on applique des tests de racine unitaire entre 2000 et 2010, avec des écarts persistants entre les pays.

• Un processus de convergence des niveaux de PIB par habitant des RUP avec leurs métropoles respectives. Mise à part la Guyane, dans la fin des années 90, les DOM français enregistrent des taux de croissance annuels plus élevés que la moyenne nationale.

• Enfin, un processus de convergence des niveaux de PIB par habitant entre les différentes RUP européennes, certes lié aux deux processus de convergence précédemment cités, mais aussi à des mécanismes et des trajectoires sectorielles de croissance économique structurellement proches (tourisme, services).

Bien que la quasi-totalité des travaux empiriques semblent conclure en faveur d’un processus de rattrapage des standards européens, par les économies des DOM et des RUP, ce qui conduirait à considérer qu’indépendamment des stratégies de développement appliquées, les disparités économiques s’estompent dans le long terme grâce aux mécanismes du marché, certaines études récentes viennent mettre en cause l’efficacité d’un tel processus.

En travaillant sur le cas de La Réunion entre 1950 et 2006 Charles et al (2013) appliquent des tests de racine unitaire sur des données chronologiques en intégrant des effets de rupture structurelle (c’est-à-dire en intégrant des sauts dans les séries chronologiques des PIB par habitant liés à des chocs exogènes, tels que l’abandon du franc CFA en 1975), afin d’étudier la convergence stochastique de l’économie réunionnaise avec la France métropolitaine et l’Europe (ce qui conduit à tester si la différence entre les PIB par tête réels entre La Réunion et la France métropolitaine suit un processus stationnaire ou pas).

L’application des tests de racine unitaire sur des séries corrigées ne montre aucune évidence en faveur d’un éventuel processus de convergence réelle pour l’économie réunionnaise. Dans ce cas, malgré des taux de croissance du PIB nominaux impressionnants, la Réunion n’enregistre pas de convergence par rapport aux standards français et européens en termes de niveau de vie. Selon les auteurs, ces résultats, d’une part, mettent en cause le lien entre les performances globales de l’île et les progrès du niveau de vie de ses habitants et, d’autre part, laissent supposer que le modèle de croissance intensive s’appuyant sur une augmentation de la productivité des facteurs de production (notamment dans le secteur public) a rapidement atteint ses limites, une fois que l’équipement et les infrastructures publiques locales ont été modernisés.

Ces modèles ne renseignent ni sur la compétitivité des firmes ni sur les performances sectorielles, mais permettent de mesurer les résultats des stratégies de développement engagées dans le long terme.

1.3 La croissance économique des SIDS par le prisme des théories de la croissance endogène

Face aux défauts de l’approche classique de la croissance et des théories de la convergence, un groupe de modèles cherche à expliquer les mécanismes de la croissance de long terme par des variables déterminées de façon endogène, notamment par la prise en compte de l’éducation et du stock de connaissances accumulées (qualifié comme un capital humain) mais aussi en considérant certaines autres variables telles que le stock de capital physique ou les infrastructures de communication et d’information (Lucas 1988).

Les théories de la croissance endogène fournissent un cadre plus adapté à l’action institutionnelle et à la stratégie économique. Ils permettent d’enrichir

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 13

considérablement la famille des modèles de croissance mais rencontrent certains limites quant à la détermination et la mesure des variables endogènes ; par exemple, le stock de capital humain d’une région est généralement mesuré par le pourcentage de personnes actives ayant une formation supérieure au baccalauréat ; or, cette définition peut conduire à des biais d’interprétation si le niveau général d’éducation n’intervient pas de façon déterminante dans l’organisation des activités de production (par exemple dans une région spécialisée dans des activités fortement intensives en travail non qualifié).

La plupart des travaux empiriques sur la croissance des petites économies insulaires appliquent des variantes des modèles de croissance endogène. Parmi les premières applications, il convient de citer la contribution transversale de Milner et Westaway (1993) ou celle de Lewis et Craigwell (1998) sur la Barbade. Les modèles de croissance endogène furent également utilisés par la Banque mondiale pour comparer les performances de six régions / Etats insulaires (McCarthy et Zanalda, 2001), en intégrant des variables telles que le poids du commerce extérieur, la qualité des institutions, les investissements en capital humain ou les dépenses de gestion et de préservation de l’environnement naturel.

Parmi ces approches, celles d’Escaith (2001) et Peters (2001) apportent des éléments d’interprétation originaux et robustes, en ce qui concerne le caractère significatif des variables endogènes dans le processus de croissance économique. Appliqués respectivement sur 17 et 12 pays insulaires dans la période 1975-2000, ces travaux conduisent à trois séries de conclusions (Dupont, 2010) :

• en premier lieu, le taux d’investissement public a un impact positif sur la croissance économique de long terme (ce qui semble plus ou moins attendu) ; ceci signifie que l’amélioration des infrastructures publiques contribue doublement à la croissance économique de long terme : d’une part, par les effets directs sur la production et l’emploi ; d’autre part, par le transfert de certains effets d’apprentissage (learning-by-doing) du secteur public vers le secteur privé ;

• en second lieu, le taux d’inflation et le taux de croissance démographique ont un impact négatif sur la croissance de long terme. Si l’influence de la première variable est relativement attendue, celle de la deuxième rompt avec les hypothèses des modèles standards, selon lesquels la progression démographique était une condition nécessaire pour la croissance économique de long terme dans les petites économies insulaires ;

• en dernier lieu, le taux d’ouverture a un impact négatif lorsque les valeurs obtenues par les variables indiquant le niveau des infrastructures de communication, le développement des NTIC et la profondeur du marché financier local sont faibles et vice-versa ; ceci signifie que l’ouverture aux marchés nationaux ou mondiaux a un impact positif sur la croissance, uniquement au-delà d’un certain seuil de développement des infrastructures et des équipements publics locaux ; une telle conclusion pourrait justifier l’application initiale de mesures protectionnistes, telles que l’octroi de mer, dans les premières étapes de développement économique.

Les approches empiriques de la croissance endogène permettent de mesurer les impacts de certains choix en matière de politique économique sur la croissance de long terme. Dans le cas des DOM-ROM, elles montrent l’importance du développement du secteur public, de la modernisation des infrastructures, des équipements et du système éducatif, mais également l’absence notoire d’un stock de capital privé.

1.4 La croissance des DOM : les approches structuralistes

Les approches structuralistes représentent la partie la plus volumineuse et probablement la plus originale de la littérature sur la croissance des petites économies insulaires et des DOM-ROM. Ces approches partent du constat d’un certain nombre de

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 14

contraintes structurelles dans le développement des DOM qui conduisent à des trajectoires de croissance économique spécifiques (Logossah, 2007).

Ces contraintes sont d’abord celles énumérées dans l’introduction, à savoir la petite taille des espaces insulaires, limitant à la fois les avantages d’échelle et les tentatives de diversification (économies de variété), la rupture des charges dans l’acheminement des marchandises, liée à l’éloignement qui conduit à une dépendance vis-à-vis du secteur des transports et un ensemble de caractéristiques climatiques et topologiques particulières, limitant les choix possibles de développement agricole, agro-alimentaire ou touristique.

Lorsque l’on spécifie l’analyse de la croissance sur les DOM-ROM, il convient néanmoins d’ajouter un ensemble de caractéristiques propres à ces espaces.

En premier lieu, le niveau des salaires et des rémunérations est sensiblement élevé en comparaison aux autres espaces insulaires et notamment aux iles souveraines. Ce décalage dans les coûts salariaux est lié à plusieurs facteurs :

• une volonté politique de rattrapage social des salaires les plus faibles, synonyme d’une augmentation plus rapide du SMIC domien, afin de les ajuster aux normes de la France métropolitaine et de l’Europe ;

• l’ajustement de la base des salaires du secteur public à celui de la France métropolitaine, majorée par une prime d’éloignement et une prime d’indexation au niveau des prix insulaires (régime de sur-rémunération) ;

• l’augmentation des salaires nominaux à un rythme supérieur à celui de la progression de la productivité apparente du travail, mais aussi au taux d’évolution de l’indice des prix, ce qui rend à la fois le coût du travail peu compétitif et les postes de travail existants attractifs pour les travailleurs métropolitains ou européens qualifiés.

En deuxième lieu, le pouvoir d’achat des ménages est relativement élevé, du fait des transferts sociaux permanents, notamment en provenance de la France métropolitaine. Cette « rente administrative » (Miras, 1986 ; Poirine, 1995, Dimou, 2004) ne prend pas la forme traditionnelle de dépenses publiques effectuées par les agents institutionnels, mais plutôt celle d’un gonflement du revenu des ménages, permettant de soutenir la consommation finale. L’augmentation des prestations sociales versées aux ménages connaît ainsi un rythme constamment plus rapide que l’augmentation du revenu disponible brut.

Cette rente administrative alimente la croissance des économies domiènes par un effet multiplicateur de la demande, mais crée un « effet d’éviction » des activités productives tournées vers l’exportation et la compétitivité car ce sont les choix des ménages qui, de manière directe ou indirecte, guident l’allocation des ressources. Ces choix peuvent d’ailleurs conduire à une préférence pour les produits importés, d’où une dépendance renforcée vis-à-vis des échanges avec la France métropolitaine.

En troisième lieu, la majorité des échanges extérieurs des DOM-ROM s’effectue avec la France métropolitaine. Il convient de rappeler que ces échanges ne peuvent en aucun cas être assimilés à ceux d’une île souveraine avec ses partenaires internationaux. Les échanges entre les DOM-ROM et la France métropolitaine ne souffrent pas de la contrainte externe et le déficit permanent de la balance commerciale n’est pas un handicap structurel. En ce sens, il est tout à fait concevable d’opérer des choix en faveur de la croissance économique, de la compétitivité et l’emploi qui détériorent la balance commerciale des DOM-ROM, ce qui est impossible pour les îles souveraines.

Les approches structuralistes des économies insulaires ont généré différents modèles de croissance parmi lesquels, le modèle MIRAB (Migrations, Remittances, Aid, Bureaucracy) et/ou sa variante ARABE (Aide, Rente Administrative, Bureaucratie d’Etat), appliquée dans l’étude des DOM-ROM français (Bertram, 1986 ; Poirine, 1995) sont précurseurs. Nous présentons ici les trois modèles les plus récents, à savoir

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 15

le nouveau modèle MIRAB (Bertram et Poirine, 2007, Poirine, 2011), le modèle PROFIT (Baldacchino, 2006) et le modèle SITE (McElroy, 2006).

Le nouveau modèle MIRAB (Bertram et Poirine, 2007) est bâti sur l’hypothèse des effets d’une rente spécifique (liée soit à une spécialisation des exportations comme dans le cas de la nouvelle Calédonie, soit à l’existence d’une rente administrative, comme dans le cas de la plupart des DOM) sur l’activité économique. Il admet, d’une part, que l’existence d’un effet rente peut conduire à une mauvaise allocation des investissements productifs, mais intègre, d’autre part, certains éléments de la théorie de la base élargie (Davezies, 2008), en calculant un effet multiplicateur des dépenses autonomes (exportations de biens et services, dépenses publiques, IDE) sur l’économie locale. Contrairement au modèle initial, le nouveau modèle MIRAB apporte un regard croisé moins déterministe sur les effets de la rente administrative.

Baldacchino (2006) considère que les petites économies insulaires, notamment les îles dépendantes et/ou régions ultramarines européennes, puis australiennes ou néozélandaises, mettent à profit un statut juridique spécifique (celui de l’ultra-périphéricité) pour obtenir, de façon continue, des concessions de la part de leurs métropoles respectives en matière d’avantages de taxation, d’aides publiques ou de subventions d’investissement.

Le modèle PROFIT (People, Resources, Overseas management, Finance and Transport), initialement appliqué aux îles nord-atlantiques, met l’accent sur la capacité d’un secteur privé insulaire dynamique et entreprenant, essentiellement commercial et financier, à tirer profit du statut juridique régional pour influencer les choix des politiques de croissance. Dans le cas des DOM, un tel modèle permet d’interpréter l’apparition d’un ensemble d’entreprises d’import-distribution qui jouissent de facto d’une position oligopolistique sur le marché local. Cependant, le modèle PROFIT prévoit une diversification possible des activités, ce qui ne semble pas se confirmer dans les DOM.

Enfin, McElroy (2006) et Oberst et McElroy (2007) construisent un modèle qui met en évidence le rôle moteur d’un secteur touristique insulaire intensif en travail dans le processus de croissance économique de long terme. Dans le modèle SITE (Small Island Tourist Economy), une politique de relance touristique agressive (par les prix mais aussi par le marketing) conduit à un décollage des économies insulaires et au dépassement des contraintes structurelles liées à l’absence d’effets d’échelle et permet d’entamer un processus de diversification productive, essentiellement dans les domaines de la construction et des services. Oberst et McElroy (2007) s’appuient sur ce modèle pour expliquer les performances de certaines économies insulaires Caraïbes.

Dans la littérature sur les petits espaces insulaires, il n’existe pas encore de travaux de comparaison empirique des trois modèles, bien que certains auteurs considèrent le modèle SITE comme une application du modèle PROFIT (Parry et McElroy, 2009), tandis que ce dernier apparait comme une version plus riche et plus complète du nouveau modèle MIRAB. En réalité, ces modèles ne font qu’améliorer la prédictibilité des modèles classiques opposant les stratégies de substitution des importations et de promotion des exportations.

Dans le modèle SITE, davantage adapté aux petites économies insulaires souveraines, le secteur du tourisme apparait comme prédominant ; les modèles MIRAB et PROFIT, davantage adaptés aux îles non-indépendantes (et donc aux DOM), considèrent le rôle de la rente insulaire comme déterminant des trajectoires de croissance : dans le premier, elle génère des effets multiplicateurs, dans le second elle amorce une trajectoire de croissance particulière avec une éventuelle diversification des activités productives.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 16

Les travaux empiriques, associées aux approches structuralistes, proposent une analyse keynésienne de décomposition de la demande afin d‘étudier l’influence de ses différentes composantes sur la croissance économique11. Ces travaux cherchent à évaluer les contributions des exportations, du marché domestique et de la substitution des importations.

Une première série d’études empiriques a permis d’établir le rôle déterminant du marché domestique et de la demande intérieure (alimentée par les transferts publics) sur la croissance économique (Poirine, 1997, Dimou, 2004). Des travaux récents et relativement robustes sur un plan économétrique permettent d’affiner ces résultats. En utilisant des tests de racine unitaire, le test de co-intégration de Johanssen et le test de causalité de Granger, Dupont (2010) montre que, dans le cas des DOM-ROM, le marché domestique a un poids prépondérant dans la détermination de la croissance, tandis que les exportations et la substitution des importations jouent un rôle minimal. Ce résultat conforte partiellement les défenseurs des modèles MIRAB et PROFIT mais montre essentiellement que le clivage entre substitution des importations et promotion des exportations semble s’avérer un faux sujet. Dans cette optique, ni les subventions et aides aux entreprises et secteurs exportateurs, ni les taxations des importations (octroi de mer), censées protéger la production locale, sont pertinentes.

Ceci conduit à reconsidérer la validité du clivage traditionnel entre les secteurs exposés à la concurrence (essentiellement produits agricoles et agroalimentaires, produits de pêche, matières premières, tourisme) et les secteurs abrités (construction, services). Dans un travail très riche sur les performances des entreprises des DOM-ROM, Caupin et Savoye (2012) discernent les activités présentielles (dont le produit est consommé à l’intérieur d’un périmètre local et/ou régional) et les activités non-présentielles (dont le produit est destiné à l’exportation).

Leurs conclusions confirment celles des très nombreuses études empiriques monographiques (Ernatus, 2009), selon lesquelles les entreprises exportatrices des DOM se spécialisent dans des secteurs qui bénéficient d’un avantage concurrentiel permanent, car reposant partiellement sur une compétitivité hors coût (monopole ou oligopole naturel dans les produits agricoles exotiques ou leurs transformations agro-alimentaires, matières premières, la gestion énergétique, le tourisme tropical), tandis que les entreprises tournées vers le marché intérieur profitent soit d’un dispositif qui rend les importations plus chères (certains produits de consommation finale) soit des coûts de transport inexorablement élevés qui éliminent la concurrence extérieure pour de nombreux produits (notamment dans le domaine de la construction et des services).

Dans leur ensemble, ces travaux conduisent à une approche duale de la croissance économique dans les DOM, avec un secteur exposé, dont les exportations concernent des produits qui bénéficient d’une compétitivité hors coût et un secteur abrité qui fonctionne essentiellement selon le principe d’une compétitivité-prix mais dont la concurrence extérieure est éliminée soit par des dispositifs juridiques, soit par des coûts de transport élevés. Dans le secteur abrité, seule une faible partie des biens en circulation est issue d’un processus de substitution des importations.

Il convient de rappeler ici deux conclusions de la littérature récente :

• d’une part, sur le plan économétrique, ni les exportations ni la substitution des importations ne jouent un rôle de relance de la croissance économique qui est alimentée uniquement par le marché domestique dont la demande est soutenue par la rente administrative que représentent les transferts sociaux ;

• d’autre part, les modèles théoriques récents (new MIRAB, PROFIT, SITE) rejettent une approche strictement dichotomique et considèrent des liens

11 A l’origine de cette démarche méthodologique, on trouve les travaux de Chenery (1986). Dans le cas des DOM-ROM, cette méthodologie fut initialement investie par Poirine (1997).

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 17

organiques entre le marché domestique et le marché international, c’est-à-dire entre le secteur abrité et le secteur exposé.

1.5 Un nouveau regard sur la croissance et la compétitivité des DOM

La littérature récente sur les petites économies insulaires, les RUP ou les DOM-ROM apporte de nombreux éclairages sur les sources et les mécanismes de la croissance économique, la compétitivité des secteurs et des entreprises, mais aussi des choix de spécialisation productive. En matière de politique économique et de stratégie de croissance, l’action institutionnelle reste relativement « piégée » dans une conception dichotomique de l’organisation productive avec le fonctionnement de deux secteurs, abrité et exposé, le second étant plus ou moins important.

Nous proposons d’aborder, en dernier lieu, une analyse qui part des constats des travaux les plus récents sur l’économie des DOM-ROM et conduit à un changement de perspective dans la considération des processus de croissance. Cette analyse s’articule autour de quatre idées : la désacralisation de l’équilibre commercial, la mise en cause d’une approche dualiste de la compétitivité des entreprises et des secteurs (hors coût pour le secteur exposé et compétitivité prix pour le secteur abrité), la recherche des liens structurels entre filières et secteurs, générateurs d’effets multiplicateurs et/ou de compétitivité et enfin, l’émergence de certaines filières fortement dotées en capital humain, spécialisées dans des domaines spécifiques à l’environnement tropical et/ou insulaire.

En premier lieu, il convient de revenir sur le rôle de la balance commerciale des DOM. Les différents travaux empiriques –y compris dans la littérature la plus récente–, mais aussi les acteurs institutionnels, considèrent le déficit permanent de la balance commerciale des DOM comme un indicateur de dépendance. Une telle conclusion n’est pas fondamentalement erronée mais peut être fortement biaisée.

D’abord, comme ceci fut rappelé précédemment, les DOM ne souffrent pas de la contrainte externe dans leurs échanges avec la France métropolitaine, ce qui réduit le problème du déficit commercial à un problème de déficit des échanges régionaux.

Ensuite, la prise en considération des importations « en bloc » est erronée du point de vue de l’analyse de la croissance économique. Il est, à cet égard, indispensable de dissocier les effets spécifiques de certains postes de demande finale comme les exportations et les investissements. Les conclusions sont fondamentalement différentes selon que les importations augmentent pour satisfaire la consommation finale ou au contraire les exportations ou les investissements. Dans le dernier cas, la croissance des importations peut impliquer une meilleure compétitivité de l’économie locale. Ceci exige d’avoir un éclairage plus précis sur les dynamiques d’offre dans les DOM et la possibilité de créer des filières qui ne sont pas nécessairement 100% locales afin d’être compétitives dans les marchés internationaux. Or, une telle logique n’est pas compatible avec les politiques de croissance actuelles impulsées par les acteurs institutionnels de ces espaces, fortement ancrés dans les principes de l’import-distribution.

En second lieu, le clivage entre des entreprises /secteurs abrités et exposés, synonyme d’un double régime de compétitivité, doit être reconsidéré. D’abord, contrairement aux conclusions de la plupart des auteurs, en matière d’exportation, les DOM ne bénéficient pas d’une compétitivité hors coût, synonyme d’un régime quasi-monopolistique, mais d’un régime de concurrence monopolistique12. Ceci signifie que, lorsque les prix restent dans une fourchette donnée, les consommateurs identifient les produits comme spécifiques – ce qui permet de générer des économies d’échelles en matière de production. Par contre, lorsque les prix sortent de cette fourchette, les

12 Cette notion fut essentiellement forgée dans les travaux en économie internationale et régionale de la nouvelle économie géographique (Krugman, 1996).

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 18

consommateurs ont tendance à associer le produit avec d’autres produits en concurrence.

Le tourisme et certains produits agricoles et agro-alimentaires sont deux exemples typiques de cette situation. Sous un prix plafond, ces produits sont spécifiques à leur espace de production et jouissent d’une compétitivité hors coût. Au-delà de ce seuil (psychologique ou réel chez les consommateurs), ces produits rentrent en concurrence avec d’autres produits (autres destinations et/ou produits touristiques, autres denrées agricoles ou agro-alimentaires). La compétitivité prix et la compétitivité hors coût doivent, de ce fait, être combinées et non pas séparées, selon les secteurs et les filières productives.

Cette analyse doit être renforcée par le manque d’étanchéité entre le marché domestique et le marché d’exportation. Là encore, le tourisme est un exemple révélateur : dans le cas de La Réunion, l’activité touristique générée depuis plusieurs années repose davantage sur une demande interne (tourisme intra-réunionnais), renforcée par des effets de revenu (rente administrative) que sur une demande externe ; or, dans ce contexte, il n’est guère possible de développer un secteur et/ou une filière sans déterminer une stratégie claire en termes d’avantages productifs qui intègre à la fois, les avantages hors coût et la compétitivité par les prix.

En troisième lieu, dans le prolongement des modèles MIRAB (actualisé), PROFIT ou SITE, il est indispensable de bien distinguer les mécanismes de croissance sur lesquels une économie peut s’appuyer. On peut généralement spécifier trois processus cumulatifs interconnectés : les effets multiplicateurs, les effets de productivité et les effets de compétitivité :

• les premiers, d’inspiration keynésienne, décrivent les effets d’entraînement en amont ou en aval ainsi que les répercussions sur la formation des revenus d’un accroissement exogène de la demande finale lié aux exportations et/ou aux dépenses publiques ;

• les seconds permettent de prendre en compte les dynamiques d’offre qu’engendrent des gains de productivité liés à la mise en œuvre d’investissements de capacité, de rationalisation ou d’innovation ;

• les troisièmes, enfin, correspondent aux répercussions des gains de compétitivité (prix ou volume) sur la croissance régionale, à travers la mise en place d’un processus de substitution des importations et/ou à travers la promotion des exportations.

La conjugaison de ces trois mécanismes conduit à un cercle « vertueux » de croissance qui peut passer par des trajectoires industrielles différenciées (Catin, 1995). Dans les DOM, les deux premiers processus semblent plus pertinents, tandis que le troisième implique un changement de stratégie économique peu ou pas encore entamé.

Enfin, en dernier lieu, il convient de signaler l’émergence d’un secteur de la connaissance, liée à la présence de structures universitaires, d’écoles d’ingénieurs et d’instituts de recherche dans les DOM. Depuis quelques années, une partie de ce secteur de la connaissance se détourne des filières classiques et se spécialise dans la formation de savoirs et de savoir-faire spécifiques aux zones tropicales et aux zones insulaires (énergies renouvelables, gestion de l’environnement marin et des lagons, gestion de la biodiversité et conseils en agriculture tropicale, lutte contre les espèces envahissantes, génie civil en milieu tropical, etc.).

Ces savoir-faire sont exploités encore à petite échelle, souvent au sein du marché domestique, mais constituent les ressources potentielles pour certaines filières émergentes qui, au-delà des clivages existants, amorcent des perspectives de croissance à partir d’avantages comparatifs de nature technologique. Parmi les DOM, La Réunion, par la taille de sa population et de son marché mais aussi par certains choix politiques de longue durée, semble avoir une longueur d’avance dans ce domaine, avec la formation, par exemple, d’ingénieurs en conception de bâtiments HQE en milieu tropical, dont certaines compétences sont valorisées tant sur le marché

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 19

intérieur qu’à l’exportation (Australie, Nouvelle Zélande) ou avec la mise en place de programmes de protection de la biodiversité et de lutte contre les espèces envahissantes.

1.6 Conclusion

En guise de conclusion, il convient de rappeler les quatre conclusions /perspectives, issues de ce travail de revue critique de la littérature sur les DOM-ROM et les petites économies insulaires :

• la croissance économique et l’émergence de nouvelles filières ne doit pas nécessairement conduire à une réduction du déficit de la balance commerciale des DOM qui ne subissent pas de contrainte externe ;

• la pertinence du clivage dichotomique entre la compétitivité hors coût et la compétitivité par les prix doit être revue au profit d’un régime de concurrence monopolistique, plus réaliste en économie ouverte ;

• il est important d’identifier les effets multiplicateurs, les effets de compétitivité et les effets de productivité et leurs mécanismes sous-jacents, liés à l’émergence de différentes filières productives ;

• l’émergence d’une économie de la connaissance, spécialisée dans des domaines d’application spécifiques à l’environnement tropical et insulaire, conduit à l’émergence d’une nouvelle forme de compétitivité qui reste encore peu exploitée.

Il est, néanmoins, important de signaler que ces quatre conclusions / perspectives doivent être différenciées, selon les DOM considérés.

2. Les missions de terrain

Les missions de terrain se sont déroulées alors qu’était en train d’être achevé le Diagnostic stratégique national des régions ultrapériphériques du contrat de partenariat relatif aux programmes européens 2014-202013 et que les Régions d’Outre-mer (comme d’ailleurs celles de métropole) s’apprêtaient à lancer les études pour les stratégies de spécialisation intelligente (S3).

2.1 Cadrage des missions

Une réunion de préparation et de cadrage des missions s’est tenue le 21 mai avec pour objectif d’effectuer une lecture commune du rapport préliminaire (Revue de la littérature et synthèse des principales conclusions des études et rapports sur la compétitivité et l’ouverture commerciale des DOM), et de fixer une « feuille de route » pour les consultants en charge des missions dans les différents DOM.

Concrètement, il a paru important de bien centrer les questionnements ouverts par le rapport préliminaire et de rappeler la nécessité de donner une grande place à l’approche micro-économique, donc en particulier à la stratégie des entreprises et aux relations entre ces stratégies et le jeu des acteurs publics, tel qu’il s’exprime dans les différentes politiques publiques soutenant le développement des territoires et des filières concernées.

2.2 Déroulement des missions

Les missions se sont déroulées ainsi qu’il est indiqué dans le tableau ci-dessous.

13 Réalisé par le consortium Technopolis |ITD| / Amnyos / Oréade Brèche pour la DéGéOM.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 20

Énergies renouvelables et maîtrise de la demande énergétique (ENR/MDE)

Agriculture et agroalimentaire

A/IAA

Matériaux et construction

tropicale

Tourisme / écotourisme

Bois

La Réunion Matthieu Lacave

Technopolis |ITD| Semaine du 27 mai

X X X

Guadeloupe Yann Cadiou

Technopolis |ITD| Semaines du 27 mai /

du 3 juin

X X X

(écotourisme)

Martinique Anne-Gaëlle Muths

Technopolis |ITD| Semaine du 3 juin

X X

Guyane Tsiresy

Ranaivondrambola Erdyn

Semaine du 27 mai

X

(écotourisme)

X

L’organisation des missions n’a pas rencontré de problème particulier. Les délégations régionales de l’AFD ont apporté un appui.

La liste des entretiens réalisés est fournie en annexe.

Quelques entretiens, qui n’avaient pu être réalisés durant les missions, l’ont été par téléphone dans les jours qui ont suivi.

2.3 Structure des rapports de mission

Une réunion de debriefing a été organisée le 12 juin 2013 de façon à échanger rapidement sur les points clés issus des missions et à initier une lecture transversale des filières étudiées dans plusieurs DOM (agroalimentaire, énergies renouvelables et maîtrise de la demande énergétique, tourisme/éco-tourisme).

Lors de cette réunion, a été mis au point et adopté un modèle commun d’analyse des filières à utiliser pour chaque DOM, afin d’assurer que cette analyse soit harmonisée et que les éléments principaux concernant les avantages comparatifs et l’ouverture commerciale des DOM soient pris en compte de façon coordonnée.

3. Éléments d’analyse par filière

3.1 La filière Agriculture et agroalimentaire

L’analyse de la filière agriculture et agroalimentaire a été réalisée en Guadeloupe et en Martinique, soit dans deux contextes similaires relevant de l’univers caraïbe.

3.1.1 Périmètre de la filière 3.1.1.1 Définition de la filière

Selon les définitions de l’INSEE, l’agriculture est entendue comme la filière économique comprenant les cultures, l’élevage, la chasse, la pêche et la sylviculture. Il s’agit d’un secteur traditionnel de la Guadeloupe. L’agroalimentaire est entendu comme l’ensemble des activités industrielles qui transforment des matières premières issues de l’agriculture en produits alimentaires destinées à la consommation humaine.

Nous sommes partis du postulat que l’agriculture et l’agroalimentaire constituaient, compte-tenu de leurs interdépendances, une seule et même filière.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 21

3.1.1.2 Liens éventuels avec d’autres filières

Des liens existent entre cette filière et les filières suivantes : énergies renouvelables, transports et tourisme.

• La filière des énergies renouvelables, et en particulier la biomasse, issue de la culture de la canne et de la banane. La bagasse est utilisée de longue date comme bioénergie : historiquement en effet, les distilleries fonctionnent sur un modèle renouvelable dans la mesure où la bagasse est largement utilisée comme bioénergie des usines de sucre et de rhum.

En Guadeloupe, depuis la récolte 2010, une prime bagasse est accordée aux planteurs pour les cannes livrées à la sucrerie de Gardel au Moule dont la bagasse sert à produire de l’électricité dans la centrale thermique du Moule, couplée à la sucrerie. Cette rémunération est due au titre de la valorisation de la biomasse comme ressource énergétique (une unité de production installée avec une puissance de 31 MW (93,5 MW bagasse-charbon). En 2012, son montant est de 11,96 euros par tonne.

Des projets devraient voir le jour pour utiliser les déchets de ces productions, afin d’alimenter des centrales de biomasse, sachant toutefois que la production de biomasse ne devrait pas être en capacité d’alimenter une centrale. Par ailleurs, l’amélioration de l’efficacité énergétique dans l’agriculture (aide à la décision, amélioration de la logistique…) pourrait contribuer à améliorer la maîtrise de l’énergie. On estime en tout cas que la bagasse permet de couvrir entre 30 % et 50 % des besoins en électricité des îles des DOM.

• Les transports : la filière est génératrice de déplacements, pour les personnes qu’elle emploie, et en lien avec le transport de la production. Les prévisions en matière d’évolution de trafic (+ 1 à 2 % par an) mettent en lumière le risque d’une rapide saturation du réseau routier avec les impacts négatifs liés en termes environnemental, économique et social.

Un autre lien spécifique peut être fait avec le transport maritime, en particulier avec la filière de la banane : au-delà de la richesse et des emplois créés par la filière banane, ce commerce entre les DOM (Guadeloupe et Martinique) et l’Europe a une importance déterminante pour le transport maritime et la rentabilisation des lignes de fret, de l’Europe vers les Antilles. En effet, sans le transport des bananes (qui représentent 80 % du volume des échanges entre les Antilles et l’Europe), d’aucuns estiment qu’en deçà de 150 000 tonnes (pour la Martinique et la Guadeloupe), la rentabilité des lignes de transport maritime serait remise en cause14.

• On notera également que la production de rhum et plusieurs produits labélisés sont des produits « phares » de Guadeloupe en termes d’image et de tourisme15.

3.1.1.3 Entreprises et acteurs rencontrés

1. Guadeloupe

• acteurs institutionnels : SGAR, Conseil Régional, DIECCTE, DRRT

• organisations professionnelles représentatives de la filière : Association des Moyennes et Petites Industries de la Guadeloupe ; IGUAVIE (Interprofession Guadeloupéenne de la Viande et de l'élevage)

• entreprises : GMA (Grands Moulins des Antilles), Jus de fruits Caraïbes, Distillerie Séverin, Compagnie indépendante des épices, SAS Edouard (Café)

14 Source : Les déterminants de la compétitivité des filières bananes de Martinique et de Guadeloupe, Ludovic Temple, CIRAD, 2010

15 Cf. par exemple l’association Label Guadeloupe qui a été créée en mai 2006. Elle regroupe 13 producteurs labellisés RUP. Le label garanti la provenance des matières premières, du respect du savoir-faire traditionnel et des normes (http://www.labelguadeloupe.fr/).

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 22

2. Martinique

• acteurs institutionnels : SGAR, Conseil Régional, DAAF, DIECCTE

• organisations professionnelles représentatives de la filière : Association Martiniquaise pour la Promotion de l’Industrie, Syndicat de défense de l’appellation d’Origine « Rhum Agricole Martinique », IMAFLHOR (interprofession fruits, légumes et produits horticoles), AMIV (Association martiniquaise interprofessionnelle de viande), MADIVIAL (union des coopératives d’élevages), Banamart (union des producteurs de bananes de Guadeloupe et de Martinique)

• structures d’appui aux entreprises : Pôle agroalimentaire régional de Martinique, Technopole, grappe d’entreprise Innovagro

• entreprises : Chocolats Lauzéa Frères, Café et confiture La Tivolienne, transformation de produits maraichers Mastersalad, Rhum Neisson

L’ensemble de ces interlocuteurs a permis de couvrir une large partie des intervenants de la filière tant en Guadeloupe qu’en Martinique, ainsi que les problématiques propres à la plus grande partie des branches de la filière.

3.1.1.4 Données statistiques récentes disponibles

1. Guadeloupe

En 2010, le secteur primaire représentait en 1,1 % de la création de richesse de l’économie guadeloupéenne (2,8 % pour l’agro-alimentaire) et 1,8 % du salariat guadeloupéen. Depuis 2008, la production agricole connaît une croissance atone, en raison particulièrement de la baisse de la production sucrière (-12 % par rapport à 2007). La récolte 2009 a été perturbée par le mouvement social, mais également par les fortes pluies qui ont rendu difficiles les chantiers de récolte. Les exportations agro-alimentaires ont ainsi baissé de 14 %, entraînées par la chute des exportations de canne. Toutefois, les deux dernières années ont connu deux évolutions positives :

• la progression de la production de banane et du volume exporté (+34 % par rapport à 2008) ;

• la structuration de la filière fruits et légumes en interprofession (IGUAFLHOR, créée en mai 2009).

Sur le long terme, le secteur primaire est en baisse depuis le début des années 1990 en raison du poids croissant des activités tertiaires.

La population agricole16 totale s’élevait à 24 150 personnes en 2010, et elle a connu une diminution globale de 32 % depuis 2000 :

• l’agriculture mobilise moins de 2 % des effectifs salariés en Guadeloupe, mais beaucoup de travailleurs agricoles exercent leurs activités au sein d’exploitations familiales et ne sont pas comptabilisés ;

• la filière agricole est dominée par la production de banane (plus de 1500 emplois directs, autant d'emplois induits17) et de canne à sucre (deuxième activité agricole du département après la banane) ;

• les productions locales de fruits et légumes hors banane couvrent 65 % des besoins en 2010.

La pêche professionnelle18 en Guadeloupe totalise 878 navires dans l’ensemble de l’archipel (Guyader et al., 2011, SIH Guadeloupe). La pêche emploie 1677 marins

16 Diagnostic territorial stratégique de la Guadeloupe (2012). 17 http://www.guadeloupe.pref.gouv.fr/Actualites/Epandage-aerien-de-la-banane-autorisation-valable-12-

mois

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 23

pêcheurs et est exclusivement artisanale. Elle ne compte aucun navire de plus de 12 mètres et s’appuie sur 95 % d’unités non pontées (« saintoises »). Au cours de la dernière décennie, le nombre de navires a évolué de 12,7 %, alors que la puissance totale de la flotte a progressé de 69 %.

Le secteur agroalimentaire est dominé par la filière traditionnelle de production de rhum et de sucre, ainsi que par les activités de boulangerie-pâtisserie :

• le secteur agroalimentaire concentre le quart des entreprises, avec une très forte prédominance des TPE ;

• selon l’INSEE, en 2010, il y avait 534 établissements agroalimentaires réunissant 1661 salariés, dont 234 dans la transformation et conservation de la viande et préparation de produits à base de viande (14 %), 220 dans la fabrication de boissons (13 %), 166 dans la fabrication de produits laitiers (10 %) ;

• selon l’enquête « Besoins en main d’œuvre 2013 », les intentions de recrutement dans le secteur agroalimentaire s’améliorent ; si l’industrie manufacturière déclare 643 projets de recrutement en 2013 (484 en 2012), les industries agroalimentaires en annoncent 479 (628 en 2012) ;

• en termes d’emploi, les données disponibles concernant la filière rhum, issues du recensement agricole 2010, doivent être considérés avec une certaine prudence, dans la mesure où il est difficile de déterminer sur une exploitation dont la culture de la canne ne serait pas la seule production, la part de l’emploi affectée à cette filière. De même, l’estimation des emplois indirects est toujours difficile à réaliser.19

Tableau 1 Données et tendances-clés du secteur20

Indicateurs de contexte Guadeloupe France hors DOM SAU (2010) - ha 31 401 26 963 252

Variation SAU sur 10 ans -25% -3% Nombre d’exploitations(2010) 7 804 489 977

Variation du nombre d’exploitations sur 10 ans -35% -26% Superficie moyenne des exploitations (2010) –ha 4,02 52,63

Variation de la superficie moyenne des exploitations sur 10 ans +16% +32%

Nombre d’exploitations en agriculture biologique 21

26 16 446

Progression (nombre d’exploitations en AB) 2008-2009 22 (%) +23,8 En augmentation 23

Superficie forestière (milliers d’ha) 24 64 16 000 Part de l'agriculture dans l'emploi salarié25 1,80%

Part du secteur agricole dans la valeur ajoutée 26 1,1 % (2010)

1,6% (2011) Fabr. denrées alimentaires, boissons et produits à base de tabac

Part du secteur agro-alimentaire dans la valeur ajoutée 27

2,8 % (2010) Agriculture et pêche

1,8% (2011)

18 Le constat fait par le Diagnostic Stratégique Territorial 2014-2020 sur la thématique de la pêche présente les principaux enjeux du secteur au cours des dernières années.

19 Rapport Sénat 574 présentés par MM. Georges PATIENT et Éric DOLIGÉ. 20 Sources : Evaluation à mi-parcours du CPER et des PO FEDER/FSE 2007-2013 et DST 2014-2020 21 Agence Bio, 2008-2009 22 ODEADOM, 2013 23 Agence Bio 24 Site Ministère de l’agriculture (2013) 25 Rapports annuels IEDOM, 2011 26 IEDOM 2011 et Insee, comptes nationaux - base 2005

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 24

Indicateurs de contexte Guadeloupe France hors DOM Agriculture, sylviculture

et pêche Production totale de pêche (tonnes) (2011) 10 000 434 623 (2009) Nombre de navires de pêche 878 4 675 Nombre de personnes employées dans le secteur de la pêche 1 677 -

Nombre d’établissements dans le secteur agroalimentaire 534 -

Nombre de salariés dans le secteur agroalimentaire 1 661 -

2. Martinique

En 2011, on comptait en Martinique28 4 809 installations agricoles et 4 507 emplois salariés, avec dans les deux cas plus de 90% dans la culture et la production animale, la chasse et les services annexes ; la sylviculture et l’exploitation forestière, ainsi que la pêche ont un rôle moins important, avec respectivement 0,1% et 8,3% des exploitations.

Pour la filière banane, on estime à 9 000 le nombre d’emplois directs et indirects et à 60% la part des salariés agricoles travaillant dans le secteur.

Pour la filière canne-sucre-rhum, on estime à 3 800 le nombre d’emplois directs et indirects.

Pour la filière viande, on estime aujourd’hui à 600 le nombre d’emplois directs et à 1600 le nombre d’emplois total (directs et indirects).

Pour l’industrie agro-alimentaire, on comptait en 201029 2 795 salariés, dont : 23% pour la fabrication de boissons10, 3% pour la fabrication de produits laitiers, 6% pour la transformation et la conservation de la viande, 5,1% pour le travail du grain et aliments animaux, et 55,6% pour les autres industries.

L’industrie agroalimentaire est le premier secteur industriel de Martinique (devant le travail des métaux, la chimie et la parachimie et l’énergie) : elle représente 35% des entreprises et 36% des salariés des entreprises de l’Association Martiniquaise pour la Promotion de l’Industrie (AMPI)30.

3.1.2 Les enjeux identifiés 3.1.2.1 Les enjeux en termes d’emploi et de qualification des ressources humaines

Les enjeux en termes d’emploi restent relativement importants. Dans l’agriculture, les emplois sont en recul et les principales cultures – banane et canne à sucre – rencontrent des difficultés bien connues. Néanmoins, il faut rappeler que l’on a des difficultés à estimer le niveau d’emploi dans les exploitations familiales (temps partiel). Par ailleurs, le développement des cultures destinées à l’alimentation locale représente un enjeu non négligeable. L’industrie agroalimentaire constitue quant à elle un secteur industriel majeur dans les deux régions (environ 4500 salariés au total).

D’une façon générale, l’objectif d’une amélioration du niveau d’autosuffisance alimentaire (voir ci-dessous § 3.1.2.3) renvoie à de réels enjeux en termes d’emploi, dans un contexte qui reste en tout état de cause marqué par la prédominance des services dans la structure de l’emploi.

3.1.2.2 Les enjeux propres à la structuration de la filière

27 IEDOM 2011 et Insee, comptes nationaux - base 2005 28 Le nombre total d’emplois en Martinique est de 126 500 en 2008 (données INSEE) 29 Données INSEE 2010 : http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?reg_id=99&ref_id=t_3902R 30 Données AMPI 2012

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 25

Il faut noter des efforts récents à cet égard. Ainsi, en Guadeloupe, trois associations interprofessionnelles ont été créées ces dernières années, l’une en 2004, IGUAVIE (viande et élevage), une autre en 2005, IGUACANNE (canne à sucre), la dernière en 2009, IGUAFLHOR (fruits et légumes / horticulture) ; cette dernière connaît quelques difficultés dans son fonctionnement. En Martinique, deux organisations existent pour la banane, Banamart et Banalliance, tandis qu’une coopérative, la SOCOPMA, a été créée pour les fruits et légumes. La SOCOPMA fait actuellement l’objet d’une opération de sauvetage, et se trouve en situation plus ou moins de concurrence avec la CHM (Coopérative Horticole de Martinique), créée tout récemment.

De fait, la structuration de la filière demeure encore imparfaite tant en Guadeloupe qu’en Martinique, pour « fluidifier » les rapports entre producteurs, industriels et distribution.

3.1.2.3 Les réponses aux besoins du marché local et la réduction de la dépendance vis-à-vis de l’extérieur

L’enjeu est clairement celui d’un meilleur approvisionnement du marché local, tant en quantité qu’en qualité et régularité, et donc celui de la réduction de la dépendance alimentaire vis-à-vis de l’extérieur, qu’il s’agisse des importations en provenance de métropole ou bien de celles en provenance d’autres pays, notamment des pays de la région (ex. : Colombie pour les fruits et légumes). On rappellera que cette dépendance est forte, voire très forte pour certaines productions, sans qu’il y ait nécessairement d’amélioration dans la période récente. Par ailleurs, cette dépendance contribue à la cherté du coût de la vie.

Dans une agriculture encore dominée par la banane et la canne à sucre – avec, pour cette dernière, une production en aval qui est celle du rhum et des produits dérivés –, un meilleur approvisionnement passe par une diversification des productions.

La culture de la banane est d’une telle spécificité que nous ne l’avons pas intégrée aux éléments d’analyse du marché local (malgré la consommation locale de banane créole et banane plantain). Quant à la production de canne, elle tend à baisser au fil des années et a souffert de mauvaises conditions climatiques à répétition. Seul un tiers de la production est transformé en sucre (ex. : en Martinique, à la sucrerie du Galion, essentiellement pour le marché local), le reste de la production étant destinée au rhum (cf. infra § 3.1.2.4, marchés d’exportation).

On examinera ici quatre ensembles : les fruits et légumes, la viande et produits de l’élevage, les produits de la pêche, et les produits de l’industrie agroalimentaire.

Fruits et légumes :

Le développement du secteur des fruits et légumes répond directement à une logique de diversification de la production agricole, en dehors des productions traditionnelles de banane et de canne à sucre.

En Guadeloupe, la production locale couvrait 65% des besoins en 2010 et représentait environ le tiers de la production végétale totale (banane et canne à sucre comprises). En 2012, la production hors banane et canne à sucre se répartissait ainsi (pour un total de 52786 tonnes) : les ¾ pour les légumes, un peu moins d’un quart pour les fruits, et le reste (environ 4%) pour les plantes ornementales et les fleurs. Comme indiqué précédemment, une interprofession a été créée pour faciliter le développement du secteur et la diversification : IGUAFLHOR, qui vise à rassembler producteurs, grande distribution et agro-transformateurs, avec l’objectif de « fournir à la population guadeloupéenne des produits de qualité, en quantité et régularité ». Il est intéressant de signaler que le président de l’interprofession s’est récemment exprimé pour inviter les acteurs à se positionner dans une perspective interrégionale

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 26

« à l’échelle d’un marché d’un million d’habitants »31, avec « une mutualisation des moyens d’achat, de production et de distribution pourront garantir un revenu décent aux agriculteurs ».

En Martinique, la production locale est encore peu organisée. Les difficultés de la coopérative SOCOPMA en 2011 sont venues fragiliser une filière déjà peu structurée. En 2012, la production locale de fruits et légumes (ananas, banane créole, légumes, tubercules, fruits) était de 16 000 tonnes et les importations en frais de 24 400 tonnes, soit un taux d’approvisionnement du marché local par les producteurs locaux de 40% (ce taux était de 47% en 2010 et 51% en 2011)32. L’essentiel des ventes de fruits et légumes passe par les grandes et moyennes surface qui ont besoin pour achalander leurs rayons de produits en qualité et en quantité régulière, ce que ne semblent pas encore à même de fournir les producteurs locaux. Sans une meilleure organisation de la filière permettant de conforter l’offre, les importations continueront de fournir 60% du marché local. Il faut d’ailleurs noter que les importations viennent pour la majorité de grandes firmes agricoles internationales (République Dominicaine, Costa Rica, Brésil, Afrique du Sud) avec lesquelles les petites entreprises martiniquaises ne peuvent rivaliser (sur les coûts et la régularité de la production) et d’Europe (notamment pour les pommes et les pommes de terre qui représenteraient un quart des importations de fruits et légumes et que la Martinique ne peut pas produire).

Viande et produits de l’élevage :

En Guadeloupe, le chiffre d’affaires du secteur de l’élevage s’élève à 50,2 millions d’euros en 2010, représentant 19,7 % des recettes agricoles totales (part stable depuis l’année 2000).

Le taux de couverture global est de 21,2 % ; il est cependant marqué par de fortes disparités. Ainsi, le taux de couverture (viande congelée incluse) est de 44 % pour la viande porcine, 34 % pour la viande bovine, 13 % pour la viande d’ovin et de caprin, 8 % pour la viande de volaille. En 2009, la couverture en viande fraîche est respectivement de 93%, 72%, 100% pour les filières porcine, bovine et caprine33 ; le taux de couverture de la production d’œufs atteint 75,4 % en 2010 contre 46,3 % en 200734, alors que le taux de couverture de la production de volailles est seulement de 1,1 % en 2010.

Dans ce secteur également, une interprofession, IGUAVIE (interprofession guadeloupéenne de la viande et de l’élevage) a été créée en 2004 ; elle a pour objectif d’atteindre l’autosuffisance alimentaire du territoire, en développant l’acquisition de nouveaux matériels spécifiques pour les ateliers de découpe, qui viennent compléter les actions de lutte contre l’abattage clandestin menées par les services vétérinaires ; les conditions de mise en service d’un projet d’abattoir à Gourbeyre lancé en 2008 ne sont cependant pas encore remplies,

L’élevage constitue ainsi, aux côtés des fruits et légumes, une deuxième filière de diversification en Guadeloupe. La production animale n’est globalement pas en mesure de couvrir la demande intérieure, mais tend à s’en rapprocher fortement pour la viande fraîche et les œufs. Les importations restent donc indispensables. La filière agricole éprouve encore des difficultés à s’intégrer dans les réseaux de distribution car elle est trop peu structurée, en dépit de la création d’IGUAVIE.

31 http://www.interentreprises.com/fr/entretien/6046-radgi-bellone,-president-d%E2%80%99iguaflhor,-gerant-de-la-sica-caribeenne-de-fruits-et-legumes--%E2%80%9Cpour-nous-sortir-de-la-crise,-nous-devenons-raisonner-a-l%E2%80%99echelle-d%E2%80%99un-marche-d%E2%80%99un-million-d%E2%80%99habitants-%E2%80%9D

32 Données DAAF : Bilan de conjoncture agricole 2012 (mai 2013). 33 Toutefois ces chiffres doivent être nuancés car ils ne prennent pas en compte l’abattage clandestin qui

concernerait 30 % de la production locale (rapport IEDOM Edition 2013). 34 http://www.odeadom.fr/?page_id=37

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 27

En Martinique, le marché de la viande (fraiche et congelée) est essentiellement un marché d’importation (les taux d’approvisionnement du secteur sont faibles : 20% pour les bovins, 23% pour les porcins, 6% pour les ovins et les caprins et 11% pour les volailles). De gros efforts ont été faits par les organisations professionnelles pour renforcer l’offre locale (en qualité avec les études sur la viande de bœuf brahman par exemple et en quantité avec l’installation d’un nouvel abattoir de volailles en 2012) et structurer la filière. Une part importante du marché est tenue par les produits congelés de production industrielle (exemple des ailes et pilons de poulet importés d’Europe). La production locale ne peut concurrencer une telle production à très bas coût et tente de développer : une offre locale, identifiée comme telle et choisie par le consommateur pour son origine ; une offre de produits frais : la filière bœuf par exemple a atteint ses objectifs de couverture de l’offre de consommation de viande fraîche.

Par ailleurs, la production d’œufs permet aujourd’hui répondre à la demande locale, alors qu’il y a 15 ans, elle importait 85% de sa consommation. Les producteurs développent par ailleurs depuis 5 ans environ des produits innovants à destination des professionnels (boulangerie, pâtisserie, restauration collective).

Produits de la pêche :

En Guadeloupe, la production totale de la pêche, qui s’élève à 10 000 tonnes par an, ne suffit pas non plus à satisfaire la forte demande des consommateurs locaux (16 000 tonnes par an consommées, soit un taux de couverture de la pêche de 62 %). L’intégralité de la production guadeloupéenne est écoulée, en frais, sur le marché local, par des circuits de proximité (70 % de vente directe). A l’activité professionnelle, il convient néanmoins d’ajouter une importante pêche informelle ou de plaisance qui, bien que clandestine, dont le produit constitue un apport économique (et social) vital pour certaines populations.

L’activité de pêche est également sous dépendance stricte de la qualité des milieux d’où sont extraites les ressources halieutiques. L’état de santé des milieux littoraux et des récifs coralliens se dégrade inexorablement, en raison des pressions anthropiques croissantes et non maitrisées. L’aval de la filière (mareyage) commence à se structurer, mais la valeur ajoutée à la production brute demeure faible.

Il est à noter que les tentatives pour développer l’aquaculture ont tourné court pour un faisceau de raisons, en particulier la pollution au chlordécone au débouché des rivières en mer, la méconnaissance des marchés, le manque d’investissements privés, malgré des efforts qui ont notamment abouti au dépôt de brevets pour des casiers à immerger.

Produits de l’industrie agro-alimentaire :

En 2012, les produits-agro-alimentaires représentaient en Guadeloupe 16,3 % des importations (soit 435 millions d’euros) et 32,7 % des exportations (soit 61 millions d’euros). On notera que plus de la moitié de la production de rhum agricole (57 %) est commercialisée localement »35.

En Martinique, l’offre de produits agroalimentaires produits en Martinique est relativement limitée : elle couvre essentiellement le secteur des boissons (sodas, jus de fruits, produits à partir de fruits locaux ou de pulpes importées du Brésil ou de Thaïlande, eau, bière), des produits laitiers frais (dont les yaourts produits à partir de poudre de lait importée), de l’épicerie (café, confiture) et des glaces. Certains projets innovants comme Mastersalad/Saladinina (découpe et emballage de fruits et légumes frais de production locale à destination des particuliers et surtout de la restauration

35 Le rhum de Guadeloupe se décline en un rhum agricole (obtenu par fermentation alcoolique et distillation du jus de canne à sucre), eau de vie issue de la distillation du jus de canne fermenté, et en un rhum industriel (ou de sucrerie), boisson spiritueuse obtenue par fermentation de mélasses ou de sirops issus de la fabrication du sucre de canne. Douze unités de production sont recensées sur le territoire. En 2012, la production totale de rhum s’établit à 81 950 HAP (hectolitre d’alcool pur), soit une progression de 8,3 % sur un an (Rapport d’activité IEDOM, Edition 2013).

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 28

collective) ont été récemment développés pour répondre aux nouvelles habitudes de consommation des Martiniquais. Pour le reste, l’essentiel de l’offre de produits agro-alimentaires provient de métropole.

3.1.2.4 Exporter

Métropole et Union européenne :

En Guadeloupe, la France métropolitaine représente 53,6 % des exportations de biens. L’essentiel des exportations restantes (35,2 %) est destiné aux départements français d'Amérique (DFA) et aux collectivités voisines de Saint-Martin et Saint-Barthélemy, soit 76,2 millions d’euros. En 2012, les principaux postes d’exportation étaient les produits des industries agroalimentaires (32,7 %), les autres produits industriels (21,7 %) et les produits agricoles et de la pêche (19,2 %). Au total, l’ensemble agriculture + pêche + agroalimentaire représentent donc un peu plus de la moitié des exportations vers la France.

Les ventes de l’industrie agro-alimentaire vers l’Union européenne et la Caraïbe restent relativement faibles, avec respectivement 12,3 et 5,3 millions d’euros des exportations en 2012 (soit 5,7 % et 2,5 % du total). Les deux principaux partenaires européens (le Portugal et l’Espagne) importent de la Guadeloupe des produits agroalimentaires. Il faut ajouter que les flux d’exportation sont en partie constitués de réexportations de produits agroalimentaires et de biens expédiés à la Martinique36.

En tendance, sur les dix ans écoulés, la structure des exportations a nettement évolué, au détriment des produits de l’agriculture et de la pêche, qui représentaient 54,6 % des exportations en 200237.

Pour l'essentiel, la Guadeloupe exporte du sucre, de la banane, du melon (cf. encadré) et du rhum.

Encadré 1 Le melon paraît constituer un exemple réussi de diversification

Le melon est une filière bien structurée, dont l’origine remonte au début des années 1980, avec la création de l’Association des Producteurs de Melon. Dans sa quête de qualité, la filière obtient en mars 2012 une indication géographique protégée « melon de Guadeloupe » lui permettant de conforter son positionnement sur le marché local et le marché export. Avec une production de 2 910 tonnes en 2012, la filière s’emploie à retrouver son niveau de production d’avant l’année 2010 marquée par l’épisode des cendres du volcan de Montserrat (7 950 tonnes en 2009). Quatrième produit exporté en 2010 après le rhum, la banane et le sucre, le melon est majoritairement destiné à l’hexagone, à contre-saison de la production européenne. En 2011, les exportations s’établissent à 1 617 tonnes contre 1 601 tonnes en 2010. L’activité melonnière est limitée par la disponibilité du foncier agricole (malgré les rotations culturales « canne-melon » pratiquées), la faible capacité de fret des compagnies aériennes, sa forte dépendance aux conditions climatiques et également par la concurrence croissante des producteurs marocains et sénégalais.

Source : Entretiens et Rapport IEDOM 2012, Edition 2013.

Certains autres produits, avec un positionnement spécifique, ont un marché en France métropolitaine et dans l’Union européenne. On citera quelques produits illustratifs de stratégies commerciales différentes :

• pour la filière canne-sucre-rhum en 2012, le rhum est à 78,1 % un produit d’exportation et à 21,9 % un produit de consommation locale (80 % en 2011)38. C’est essentiellement le rhum industriel qui est vendu à l’extérieur,

36 Rapport IEDOM Edition 2013. 37 Rapport IEDOM Edition 2013. 38 Rapport IEDOM Editions 2012 et 2013.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 29

avec 75,6 % des exportations en 2012, à destination des liquoristes et des producteurs de punchs situés en métropole et en Europe – le rhum guadeloupéen bénéficie à ce titre des efforts faits par la profession ;

• dans le cadre du Plan banane signé le 5 décembre 2008 entre la filière banane de Guadeloupe et de Martinique, le ministère de l’Agriculture et les collectivités locales, la filière est engagée dans une démarche visant à adopter de meilleures pratiques agricoles par tous les planteurs, permettre une augmentation des bananes sous label de qualité et une meilleure valorisation de la production39 ;

• la production et le conditionnement du café local (cf. encadré SAS EDOUARD – Café CAPRES) : la société EDOUARD fonde sa stratégie sur une communication renforcée autour du café produit localement et visant à réduire un grand déficit d’image ; il s’agit d’allier authenticité et innovation ; l’entreprise se distingue par la diversité des saveurs proposées, le choix de noms pour répondre à tous les goûts, un packaging moderne (l’emballage reste debout, contient un pré-découpage pour une ouverture facile, une fermeture ZIP et une valve fraicheur au dos) ; la chaîne de production comporte des équipements de dernière génération assurant la préservation de l’environnement (recyclage de la chaleur) ; bien que le marché soit encore très majoritairement local, la stratégie à l’export vers Saint-Martin, la Martinique, et la métropole est en cours de mise en œuvre.

• le secteur des épices (cf. encadré La compagnie des épices) : La Compagnie des épices est une entreprise de fabrication et de conditionnement d’épices, de condiments et d’aromates. S’inscrivant dans une longue histoire de l’entreprise familiale spécialisée dans le commerce de gros et dont une partie de l’activité portait sur le commerce des épices ; l’entreprise est actuellement positionnée à hauteur de 5 % de son chiffre d’affaires sur le marché de métropole ; elle cherche au maximum à se fournir dans la zone caribéenne et s’est lancée dans la plantation expérimentale de muscadiers et de roucou, afin de maîtriser l’ensemble de la chaine de production et de créer de la valeur ajoutée en Guadeloupe ; compte tenu de la concurrence des produits importés, l’entreprise cherche à proposer des produits respectant des normes de qualité maximale.

Encadré 2 Exemple d’entreprise innovante : La Compagnie indépendante des épices

L’entreprise est implantée à Pointe-à-Pitre et connaît une croissance annuelle proche de deux chiffres depuis plusieurs années. A l’exception de l’année 2009, l’entreprise a constamment créé un emploi. Les bonnes épices de Monsieur Maurice est le nom commercial de l’entreprise. Il s’agit d’une entreprise de fabrication et de conditionnement d’épices, de condiments et d’aromates.

L’histoire des Bonnes Épices de Monsieur Maurice débute en 1948 dans le commerce de gros avec une partie de l’activité portant sur le commerce des épices. Néanmoins, les origines de ce savoir-faire sont bien antérieures. La démarche s’inscrit donc dans une longue tradition familiale aujourd’hui perpétuée à travers la Compagnie indépendante des épices. L’entreprise appuie son développement sur la maitrise de plusieurs savoir-faire.

Le premier savoir-faire de l’entreprise est d’avoir su créer une relation de qualité avec les producteurs et de se donner les moyens de la pérenniser. Cela permet de garantir la fraîcheur des épices et aromates. Le deuxième savoir-faire réside dans la qualité du service rendu aux clients, laquelle passe par la maîtrise des approvisionnements et de

39 http://www.bananeguadeloupemartinique.com

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 30

la fabrication (mélanges, conditionnement, etc.). L’entreprise cherche également à faire preuve de créativité et est continuellement à la recherche de nouvelles saveurs.

Le projet a bénéficié du conseil régional (projet initiative jeune – PIJ) pour démarrer l’activité. L’entreprise a ensuite régulièrement innové en installant une nouvelle chaîne de conditionnement et en proposant des produits dans des formules de conditionnement adaptées aux besoins des consommateurs et des industries agroalimentaires de l’archipel. Le packaging est en en constante évolution et une veille régulière sur les tendances nationale et internationale est régulièrement menée. De nouveaux produits sont également régulièrement proposés (« sauce chien », mélange de fruits locaux, etc., soit au total 116 produits déclinés en 250 références).

L’entreprise cherche au maximum à se fournir dans la zone caribéenne. Elle s’est récemment lancée dans la plantation expérimentale de muscadiers et de roucou, afin de maîtriser l’ensemble de la chaîne de production et de créer la valeur ajoutée en Guadeloupe. Compte tenu de la concurrence des produits importés, l’entreprise cherche à proposer des produits respectant des normes de qualité maximale.

Source : entretien Technopolis |ITD|, Produit PEYI n°4 – avril 2013.

Encadré 3 Exemple d’entreprise innovante : SAS EDOUARD – Café CAPRESS

La SAS EDOUARD a été créée en 2010. Sa jeune fondatrice, diplômée de l'École Supérieure de Commerce (ESC) de Montpellier, ses deux frères et sa sœur sont issus d’une famille positionnée depuis plusieurs générations sur le marché local du café.

S’appuyant sur l’expérience et le soutien de l’entreprise familiale, l’entreprise SAS EDOUARD a fondé sa stratégie sur une communication renforcée autour du café produit localement et visant à réduire un grand déficit d’image. Le nom CAPRESS est un métissage des mots café, expresso et capresse, la femme antillaise couleur café (représentée sur le paquet). Le projet a été mûri durant deux ans.

Il s’agit d’allier authenticité et innovation. L’entreprise se distingue par la diversité des saveurs proposées et le choix de noms pour répondre à tous les goûts : « Harmonie » est un métissage d’arabica et de robusta sélectionnés pour leur qualité. « Caractère » est un café plus corsé adapté pour le matin. « Volupté » est un mélange d’arabica des Caraïbes. Le café contient au-moins 17 % de café locaux.

Le packaging est moderne : l’emballage reste debout, il contient un pré-découpage pour une ouverture facile, ainsi qu’une fermeture ZIP et une valve fraîcheur au dos.

La chaine de production comporte des équipements de dernière génération assurant la préservation de l’environnement (recyclage de la chaleur) et ayant bénéficié d’une garantie OSEO pour leur financement.

Les grands distributeurs en Guadeloupe ont été assez réceptifs de la démarche. Le marché est encore essentiellement local : le café est disponible en petite et moyenne surface. La stratégie à l’export à Saint-Martin, la Martinique, et dans l’hexagone est en cours de mise en œuvre.

L’entreprise a bénéficié de la visite de Sylvia Pinel, ministre de l’Artisanat, du Commerce et du Tourisme le 19 avril 2013.

Source : Technopolis |ITD|, Produit PEYI n°4 – avril 2013.

En Martinique, la situation est largement similaire pour la banane et la filière canne-sucre-rhum.

En 2012, plus de 187000 tonnes de bananes ont été exportés de Martinique, essentiellement vers la métropole. Un tiers environ de la production de bananes de Martinique est vendu dans les pays de l'Union européenne hors France, dont un quart

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 31

en Roumanie, Tchéquie et dans les Pays Baltes40. La place de la banane de Martinique, comme de celle de Guadeloupe, est fragile sur le marché métropolitain : elle fait face à la concurrence d’autres productions (notamment d’Afrique), moins chères mais surtout plus régulières dans leurs volumes de production et donc plus à même de fournir le marché important de la grande distribution.

Dans la filière canne-sucre-rhum, le rhum est à 77% un produit d’exportation et à 23% un produit de consommation locale41. Le rhum martiniquais bénéficie à ce titre des efforts faits par la profession pour obtenir le label « Rhum agricole de Martinique – Appellation d’origine contrôlée » et garantir la qualité des produits liée au label.

Certains produits, avec un positionnement spécifique, ont un marché en France métropolitaine et dans l’Union Européenne.

On peut citer deux produits illustratifs de stratégies commerciales différentes :

• Les confitures de fruits tropicaux : l’entreprise La Tivolienne, par exemple, est située sur un marché de gamme supérieure (cf. haute teneur en fruits, faible teneur en sucre) et envisage son développement sur le marché de métropole, essentiellement pour les communautés antillaises (et africaines) de France métropolitaine. Elles se trouvent cependant sur ce marché en concurrence avec d’autres productions antillaises ou africaines.

• Les chocolats haut de gamme (cf. encadré chocolats Lauzéa Frères) : les Chocolats Lauzéa se sont à ce jour développés en Martinique (en Guadeloupe et en Guyane) sur un segment de clientèle haut de gamme et une frange du flux des touristes. Compte-tenu de l’étroitesse du marché local et du positionnement haut de gamme des produits, le développement de l’entreprise passe par une stratégie d’exportation vers la France métropolitaine et l’Europe.

Encadré 4 Exemple d’entreprise innovante : Les chocolats Lauzéa

Les chocolats Lauzéa sont nés il y a 10 ans de l’idée de valoriser les saveurs tropicales dans le chocolat et les pâtes de fruits (remplacer la noisette, la noix, la fraise, etc. par la coco, l’arachide, la goyave, etc.).

Ce travail qui était relativement aisé pour les pâtes de fruits, s’est avéré plus difficile pour les chocolats du fait de l’absence de production martiniquaise de cacao (la production avait existé, avant d’être abandonnée progressivement). L’entreprise Lauzéa intervient donc à ce jour sur la confection de bonbons de chocolat, à partir de pâtes de cacao importées d’autres pays de la Caraïbe, grands producteurs de chocolat comme Trinidad, Cuba, la Grenade. Cette fabrication de premier niveau sur la base de produits importés est le niveau de la chaine du chocolat le plus facile, celui également où la valeur ajoutée est la plus grande, et par conséquent, celui sur lequel il était plus aisé de démarrer une activité de chocolaterie en Martinique.

Outre la qualité des matières premières et des bonbons produits, c’est la stratégie de marketing qu’a développée l’entreprise qui a permis de positionner le produit sur un marché haut de gamme, en Martinique, en Guadeloupe, en Guyane. Ce positionnement permet de vendre les produits à un prix élevé et donc de compenser les coûts liés à l’importation des produits et les impossibles économies d’échelle liées à la petitesse du marché potentiel.

L’entreprise a tenté, sans réel succès, de développer son marché au sein de la Caraïbe mais se trouve confrontée à nombres de difficultés : formalités douanières, cout du transport, langue et étiquetage des produits, morcellement du marché de la Caraïbe (il s’agit d’ailleurs de juxtaposition de (très) petits marchés nationaux et non d’un marché

40 Source : UGPBAN 41 Données DAAF : Bilan de conjoncture agricole 2012 (mai 2013)

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 32

de la Caraïbe) habitudes de consommation, etc. Elle souhaite aujourd’hui développer ses produits en France métropolitaine ou en Europe, où la consommation de produits de luxe et de chocolat est bien plus élevée que dans les DOM. Elle se trouve confrontée cependant à l’absence d’outils d’accompagnement pour ce marché qui n’est, par définition, pas considéré comme de l’export pour Ubifrance (comme elle était d’ailleurs confrontée à l’absence d’accompagnement pour le marketing, alors que c’est cette stratégie de positionnement haut de gamme qui assure l’équilibre de l’entreprise).

L’entreprise, en association avec l’autre chocolatier de Martinique, cherche également à développer son activité en remontant la filière du chocolat et travaillant sur l’étape précédant la confection des bonbons, à savoir la transformation des fèves de cacao en pâte de cacao et chocolat, à partir de fèves de cacao martiniquais. Cela implique donc de travailler avec les producteurs pour reconstituer la filière cacaoyer en Martinique et produire la matière première, et avec les partenaires de la recherche agronomique et de l’innovation agroalimentaire que sont le CIRAD, la technopole et le PARM, pour développer les techniques de transformation. L’idée était de travailler sur le cacao comme sur la canne pour le rhum AOC et de développer le potentiel des produits par des techniques adaptées (projet Valcao). Ces nouvelles étapes du développement de l’entreprise sont celles où la valeur ajoutée est la plus faible, mais cette stratégie permet de développer la filière de façon cohérente et de proposer à terme un cacao de Martinique, utile pour la Martinique et ses producteurs, mais également pour renforcer l’image de marque des chocolats produits en Martinique comme Lauzéa (il n’y a pas à ce jour de cacao français). Les chocolatiers travaillant de toute façon de préférence à partir de cru de différentes origines, l’objectif n’est pas de soutenir la production de fèves pour les seuls transformateurs martiniquais mais de les accompagner à terme dans une stratégie d’export. Cette stratégie, sur 8 ans, doit permettre à terme de créer 34 emplois ETP d’après les projections de l’entreprise.

Zone régionale :

Pour la Guadeloupe, les échanges commerciaux avec la région Caraïbe (y compris Départements Français d’Amérique) représentaient 13,2 % des importations et 37,7 % des exportations en 2012. Les exportations à destination des États de la Caraïbe (hors DFA) sont très faibles (5,3 millions d’euros, soit 2,5 % des exportations totales). Les importations en provenance des États de la Caraïbe (hors DFA), d’un montant de 154 millions d’euros, pèsent 5,8 % des importations totales et celles en provenance des DFA 7,4 %. Les échanges avec l’Amérique du Nord concernent essentiellement des produits pétroliers en provenance de Porto-Rico et s’élèvent en 2012 à 256,3 millions d’euros, soit 9,6 % des importations en Guadeloupe42. La situation est comparable en Martinique.

Les enjeux d’exportation de la filière dans la Caraïbe (hors DFA) sont marginaux : en règle générale, les productions guadeloupéennes et martiniquaises sont insuffisantes pour fournir le marché local, la régularité des productions agricoles n’est pas assurée et ne permet donc pas de penser à une stratégie d’exportation. De plus, les pays de la zone sont en règle générale également producteurs des mêmes produits, avec des coûts de production en principe nettement plus faibles.

Par ailleurs, sur les marchés des États de la Caraïbe, les produits guadeloupéens et martiniquais se trouvent dans une situation de concurrence avec des « géants » agricoles ou agro-alimentaires (États-Unis, Brésil) et/ou des pays à moindre coût de main-d’œuvre (Colombie, Costa Rica, République Dominicaine, etc.), qui joue inéluctablement en leur défaveur. De plus, l’hétérogénéité de la Caraïbe se retrouve dans la réglementation des produits, dans les langues des emballages ou dans les habitudes de consommation de ses habitants et les produits guadeloupéens et martiniquais ne seraient pas forcément en bonne position sur les marchés de ces pays

42 Rapport IEDOM Edition 2013

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 33

(cf. banane créole vs. banane dollar). Enfin, les difficultés de transport au sein de la Caraïbe (faible fréquence des liaisons et coûts très élevés) restent un obstacle fondamental à l’export des produits martiniquais dans la zone.

Grand international :

Pratiquement le seul produit ayant à ce jour un potentiel d’export sur le « grand international » est le rhum. C’est notamment le cas du rhum martiniquais AOC, en raison premièrement du travail de qualité fait sur les produits, mais également des stratégies de positionnement commercial (dans un environnement hautement compétitif, tant sur le haut de gamme que sur une consommation de masse) et de conquête de nouveaux marchés (cf. participation à des salons en Europe, en Asie – Chine, Japon notamment).

Les enjeux identifiés sur ces marchés sont essentiellement liés à la capacité des acteurs à développer des productions labélisées intégrant les exigences concernant l’origine du produit ou des matières premières, le respect des savoir-faire traditionnels et des normes en vigueur, ainsi que l’inscription dans une démarche de qualité et de transparence. Pour le rhum de très haute qualité, on est sur des marchés largement apparentés aux marchés du luxe, avec les exigences et les contraintes propres à ces marchés43.

3.1.3 Avantages comparatifs identifiés actuellement et avantages comparatifs potentiels 3.1.3.1 La question de la compétitivité prix

Dans la filière agriculture-agroalimentaire, il existe peu de produits, voire très peu, qui soient compétitifs en termes de prix, que ce soit sur le marché local ou à l’exportation.

On notera cependant que la production locale d’œufs et de viande fraîche a fini par s’imposer, ce qui montre qu’il existe malgré tout quelques opportunités de réussite.

3.1.3.2 Les avantages comparatifs existants

Un premier avantage comparatif très général, par rapport aux producteurs de la zone régionale, est constitué incontestablement par l’accompagnement assuré par les acteurs publics dans le cadre des politiques publiques régionales, nationales et de l’UE (on appréciera plus loin leur efficacité, infra § 3.1.3.3), ainsi bien entendu que les mécanismes de marché (garanties de prix) pour des produits spécifiques.

L’accompagnement concerne :

• La structuration des filières agricoles en interprofessions thématiques. Ainsi, en Guadeloupe, outre le LPG (Les Producteurs de Guadeloupe – filière banane), les filières viandes, canne et maraîchage ont vu respectivement la création des interprofessions IGUAVIE, IGUACANNE et IGUAFLHOR. La structuration des filières concernées, même si elle est encore imparfaite comme on l’a précédemment souligné, constitue un élément qui conditionne la capacité des acteurs à lever des fonds, notamment auprès du FEADER.

• Le soutien aux agriculteurs pour les encourager à mieux produire et à adapter la production à la demande locale : qualité, régularité de l’approvisionnement, distribution, commercialisation de proximité, ce dernier enjeu étant transversal à l’ensemble de la production agricole

• Les démarches visant à encourager la R&D, l’innovation et le développement d’une stratégie de diversification sur des filières porteuses, qu’elles soient traditionnelles ou nouvelles :

43 Voir la sélection de rhums antillais que l’on trouve par exemple dans la boutique Davidoff à Genève.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 34

− en Martinique avec le Pôle agroalimentaire régional de Martinique (PARM) qui fait partie de la Technopole de Martinique, et le Campus agro-environnemental Caraïbe (ex-PRAM : Pôle de recherche agro-environnemental de Martinique) ;

− en Guadeloupe, avec les projets de création : d’une Technopole de Guadeloupe qui devrait voir le jour d’ici la fin de l’année 2013, et dont l’agroalimentaire serait une des cibles privilégiées ; d’une halle technologique dans le secteur de l’agro-transformation (appel d’offres en cours).

Ces démarches devraient renforcer l’appui possible sur les compétences de recherche présentes au niveau local et sur les capacités privilégiées d’accès à l’expertise hexagonale ou européenne, pour favoriser à moyen terme le transfert de nouvelles variétés (antiparasitaire par exemple) et la diversification des filières (fruit, jus, farine, aquaculture…).

Sur le marché local, un second avantage comparatif résulte de la perception favorable qu’ont les consommateurs locaux des produits « pays ».

Ainsi, les produits martiniquais bénéficient-ils d’une perception favorable qui repose soit sur une qualité supérieure et une typicité effective des produits (viande de bœuf brahman par exemple), soit sur l’image du « produit péyi » et les implications en termes de retombées locales pour l’économie et l’emploi. L’AMPI travaille d’ailleurs sur cette image de produits locaux et cherche à promouvoir les produits martiniquais sous le label « PIL », produit de l’industrie martiniquaise (produit qui peuvent recevoir ce label dès lors que la dernière transformation a été effectuée en Martinique : les jus de fruits faits avec des pulpes de fruits importées, finalisés et embouteillés en Martinique, peuvent ainsi être des produits martiniquais). Un sondage réalisé en 2012 indiquait que 85% des consommateurs martiniquais avaient une bonne image des produits PIL. L’AMPI de la Guadeloupe est engagée dans une démarche similaire.

Néanmoins, pour que cet avantage comparatif joue à plein, plusieurs conditions doivent être remplies : une qualité supérieure et une typicité effective des produits44 ; la connaissance des producteurs de produits frais par la distribution, dans une perspective de renforcement des circuits courts et d’approvisionnement régulier des différents réseaux de distribution locaux.

Ainsi, en Guadeloupe comme en Martinique, la couverture des besoins en viande de volaille fraîche n’est pas assurée car la grande majorité des poulets produits sont issus d’élevage industriel et ne sont pas nécessairement de qualité supérieure aux poulets importés.

Par ailleurs, concernant les fruits et légumes, la question des avantages comparatifs renvoie également à celle de la diversification des productions. Elle concerne aussi l’utilisation des surfaces agricoles (concurrence entre les productions et enjeu de gestion des conflits d’usage). Ainsi, le territoire guadeloupéen bénéficie de la présence d’un foncier agricole et d’un fort taux d’activité agricole pouvant servir de base pour la diversification des activités et l’approvisionnement de l’industrie agro-alimentaire (jus de fruits par exemple).

A l’export, les avantages comparatifs sont les suivants, avantages qui peuvent se combiner :

• Production à contre-saison pour l’exportation vers l’Europe : melon de Guadeloupe, banane « export » (mais grâce aux aides européennes qui permettent de compenser le handicap par rapport à la banane « dollar »).

44 Cf. : l’image du « produit péyi ».

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 35

• Qualité et typicité des produits (melon, confiture de fruits tropicaux, café, épices, …) : un avantage comparatif qui permet de toucher les communautés antillaises en Europe, tout comme les touristes.

• Positionnement sur le haut de gamme et les marchés du luxe : rhum, épicerie fine.

Pour le rhum par exemple, même les rhums martiniquais d’entrée de gamme se situent sur un marché de qualité supérieure aux produits concurrents : l’essentiel du rhum de Martinique, même le rhum blanc, est du rhum de canne quand les concurrents internationaux sont souvent des rhums de mélasse. Ce positionnement peut cependant être un frein avec les évolutions des habitudes de consommation vers des produits plus neutres que les rhums martiniquais (« mixologie »). Les catégories supérieures de rhum (rhum vieux) se sont développées sur un marché haut de gamme, en France et à l’étranger. L’appellation AOC est un atout certain dans cette stratégie.

• Innovation non-technologique (marché, packaging) : café, épices.

3.1.3.3 Potentiel pour renforcer les avantages comparatifs existants ou développer de nouveaux avantages comparatifs

Dans l’ensemble, les avantages comparatifs identifiés dans le paragraphe précédent doivent être encore consolidés pour la plupart.

• Pour l’agro-alimentaire, au-delà de la question des sources d’approvisionnement, il est également nécessaire de renforcer les capacités de première et deuxième transformation en tenant compte de la forte concurrence des produits importés et de la difficulté à mettre en place des outils de production adaptés à la taille du marché.

• Dans le cas spécifique des chocolats Lauzéa, le potentiel d’exportation n’est pas encore développé. Il pourrait reposer sur les habitudes de consommation des métropolitains et des européens (marché belge et suisse), sur une distribution sélective, etc. Le produit bénéficie en effet selon son créateur d’une image doublement positive de la Martinique (luxe et gastronomie français et exotisme caribéen).

• Il nous semble que la démarche conduite par la Compagnie indépendante des épices, les Cafés CAPRESS et les Chocolats Lauzéa, est intéressante, originale et innovante, car elle vise à dépasser les problèmes d’approvisionnement local (seule une partie, souvent faible, de l’approvisionnement est locale) tout en s’appuyant sur une typicité antillaise et un haut niveau de qualité, qui devraient permettre d’échapper à la contrainte de la compétition par les prix.

Enfin, pour ce qui est de la pêche, la présence et l’accessibilité des ressources de grands pélagiques du large offrent un potentiel de développement aux Antilles. Une partie de la flotte artisanale exploite ces ressources grâce à des pêches sélectives, autour des Dispositifs de Concentration de Poissons (DCP) ancrés, ce qui autorise le redéploiement de l’effort de pêche depuis la zone côtière, fortement exploitée, vers la ressource du large. Ce redéploiement indispensable pour la durabilité de l’activité est néanmoins contrarié par des mesures inadaptées de la politique commune de la pêche (PCP) et du Fonds européen pour la pêche (FEP) : arrêt des aides à la construction neuve, interdiction du financement public des DCP ; etc. De la même façon, les conditions locales devraient permettre un développement, ou un renouvellement des tentatives de développement de l’aquaculture.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 36

3.1.4 Handicaps et points faibles Au-delà des handicaps généralement mis en avant comme l’étroitesse des marchés locaux, le coût de la main-d’œuvre, ou encore la vulnérabilité environnementale45, on retiendra :

• Une structuration et une professionnalisation limitée de la filière :

En Guadeloupe, celles-ci restent encore balbutiantes dans plusieurs secteurs (volaille, pêche, fruits et légumes malgré la création d’IGUAFLHOR, ...) et l’on constate une désaffection des jeunes générations pour les métiers concernés, en particulier dans la pêche (profession vieillissante).

Dans la pêche, cette situation réduit les capacités d’organisation des circuits de distribution et de commercialisation, d’amélioration de l’accompagnement des entreprises, de renforcement de la formation des jeunes pêcheurs, de développement de nouveaux savoir-faire, etc. Le manque de structuration et de professionnalisation empêche aujourd’hui les acteurs d’accéder au FEP, et dans le futur à un éventuel POSEI pêche (le sujet en cours de discussion). Par ailleurs, le secteur est confronté à la pêche clandestine qui fait entrer des produits concurrents aux produits locaux et légaux.

Par ailleurs, l’appui au regroupement d’entreprises bute sur la capacité à trouver des porteurs de projet institutionnels ou représentatifs des entreprises concernées, ayant les moyens de travailler à la préparation et au suivi du projet (ingénierie de projet), et la capacité à créer du consensus. Le temps de développement de telles actions est souvent très long. De fait, le nombre de porteurs de projets en mesure de répondre à ces contraintes est limité.

En Martinique, l’organisation des filières de production agricole reste faible. Certes, des progrès significatifs ont été réalisés ces dernières années dans quelques filières (banane, viande par exemple), mais ces avancées restent fragiles comme l’attestent les problèmes de la SOCOPMA (filière fruits et légumes) de 2011. Ce manque de structuration ne permet pas d’organiser la production pour répondre à la consommation de frais (notamment dans les grandes surfaces) ou aux besoins des industriels : l’un des points de fragilité de l’entreprise Mastersalad (salades ensachées) est l’irrégularité de l’approvisionnement et par conséquent la variabilité du prix46. La goyave est à l’opposé un contre-exemple et illustre les avantages de l’organisation de la filière : alors qu’il y a une dizaine d’années, le groupe Denel (jus et confiture) traitait 80 tonnes de fruits par an, il en traite aujourd’hui 1 500. Pour arriver à ce résultat, un travail a été mené pour organiser l’amont de la filière (plantation de vergers, création de l’association des vergers et jardins tropicaux). De la même façon, des champs d’ananas ont été replantés récemment, afin de relancer la production locale47 et fournir l’usine.

• Les aléas climatiques et à la volatilité des prix qui affectent les activités agricoles.

• La concurrence des pays de la zone caraïbe (Colombie, Costa Rica, République Dominicaine, Venezuela, …) et du Brésil qui, outre des coûts de production inférieurs, ne sont pas soumis aux normes et réglementations européennes relatives à la qualité et à la sécurité alimentaire.

45 cf. Production de bananes et problème de la pollution des sols à la chlordécone. 46 Les aléas climatiques aggravent ces problèmes de variation des prix : le kilo de laitue est passé de 1,80€ à

près de 5€ e, juin 2013 (les pluies ont rendu impossible la production locale – la salade était importée de République dominicaine où les infrastructures agricoles sont plus performantes)

47 Alors que la production d’ananas était de 15 000 tonnes par an dans les années 90, elle est aujourd’hui de 575 tonnes (données DAAF 2013). La hausse du prix des intrants est une des premières explications de la chute de la productivité de la filière

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 37

• La dépendance par rapport aux importations des intrants.

• Des difficultés d’accès au foncier et la réduction de la SAU (du fait de l’étalement urbain). Il est intéressant de signaler que, pour pallier cette faiblesse, certains planteurs de bananes martiniquais exploitent également des terres en Afrique afin de pouvoir fournir en continu le marché de la grande distribution européenne et ainsi ne pas perdre le marché de la grande distribution au profit des grandes agricultures exportatrices.

• Un déficit en termes de capacités d’améliorations techniques : mécanisation, irrigation, savoirs technico-économiques, etc.

Si la Martinique bénéficie de la présence du PARM et du PRAM, il n’existe plus en Guadeloupe depuis 1998 de centre de transfert technologique ou plateforme technologique labellisés par le Ministère de la Recherche. Dans le domaine agricole, il existe toutefois les deux instituts techniques du ministère de l’Agriculture IT2 (plantes tropicales) et IKARE (élevage). Par ailleurs, comme on l’a signalé, les projets de Technopole et de halle technologique pour l’agroalimentaire sont en bonne voie.

• Un manque d’outils de financement de l’amorçage des projets d’innovation (technologique ou non)48 dans les industries agroalimentaires, la culture des entreprises restant marquée par l’intérêt plus grand porté sur le financement des investissements matériels, plutôt que sur l’amélioration de l’organisation de l’entreprise, des processus de production ou de commercialisation.

3.1.5 Evaluation du rôle joué par les politiques publiques et les dispositifs d’accompagnement Les politiques publiques jouent un rôle essentiel pour la filière agricole et agro-alimentaire à plusieurs niveaux :

• Le régime des aides européennes permet aux productions locales de se défendre face à la concurrence internationale et de maintenir l’activité. L’organisation commune du marché (OCM) structure le marché intérieur pour les produits agricoles, dont les bananes : bien que leur portée ait été considérablement réduite au fil des réformes, la PAC reste dotée d’outils d’intervention qui ont pour fonction de soutenir les prix, à commencer par une forte protection à l’importation et complétée à titre secondaire par des mécanismes d’intervention sur le marché intérieur.

• La sauvegarde du foncier agricole : ainsi, en Guadeloupe, le Conseil Général évite de vendre son foncier agricole et le loue au travers de baux présentant des clauses environnementales strictes. Toutefois, la volonté politique liée à la mise en place des ZAP ne fait pas encore l’unanimité et la pression foncière liée à la réalisation des logements sociaux, malgré une bonne réserve foncière des bailleurs, entraîne la diminution progressive de la SAU.

• Les aides aux agriculteurs : aide à l’installation des jeunes agriculteurs ; aide à l’investissement pour la modernisation des exploitations (cofinancement régional des mesures du FEADER) ; formation des exploitants agricoles.

• La structuration du secteur agricole et le renforcement des interprofessions, déjà mentionnés à plusieurs reprises, avec des résultats inégaux et imparfaits, mais plutôt positifs dans l’ensemble.

48 Plusieurs entreprises rencontrées ont insisté sur les points suivants : l’absence d’outils simples comme il en existe en métropole (Prestation Technologique Réseau des Réseaux de Diffusion Technologique ou Réseaux de Diffusion de l’Innovation) ; l’absence d’ingénieurs d’OSEO Innovation sur le territoire et d’un fonds dédié à l’amorçage de projets innovants (les fonds de capital investissement gérés par la SAGIPAR ciblent les entreprises établies sur des projets présentant un risque peu élevé).

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 38

• Le FEDER et le FEADER offrent différentes solutions de soutien aux entreprises du secteur agroalimentaire (notamment pas des aides à l’investissement ou des aides techniques importantes) facilitant l’émergence de projets d’unités artisanales et semi-artisanales pouvant répondre à la demande locale et aux enjeux de diversification.

• Le soutien à des actions d’information, de communication et de sensibilisation : observatoires économiques et sociaux (Guadeloupe : viande, canne, maraîchage, diversification) ; actions de sensibilisation et de communication sur les filières agricoles. Il n’y a pas cependant nécessairement de stratégie de communication globale à l’échelle de la filière. De plus, l’impact de ces actions multiples, notamment la participation récurrente au Salon national de l’Agriculture (Guadeloupe) n’est pas mesuré en termes d’indicateurs économiques (augmentation des commandes et donc du CA ; impact sur l’emploi ; etc.). On notera en Guadeloupe la réalisation d’un état des lieux relatif à la contamination des sols et rivières polluées à la chlordécone (services de l’État) ; pour faire face à ce grave problème, la Région a mis en place un plan « banane durable » ; les acteurs locaux (notamment la Chambre d’Agriculture) se sont d’ailleurs approprié l’objectif de diminution de 50 % d’apports en intrants, à l'horizon 2018, sous l'impulsion de la politique nationale "programme éco-phyto".

• Le soutien de structures publiques d’aide à l’innovation comme, en Martinique, la Technopole, le PARM (Pôle agroalimentaire régional de Martinique), la grappe d’entreprises Inovagro, ainsi que le soutien à la R&D et au transfert de technologie (Guadeloupe : Chambre d’Agriculture et INRA ; Martinique : PRAM), permettent de bénéficier d’un soutien technique ou technologique important dans la création et le développement de projets innovants.

• Dans le domaine des outils d’ingénierie financière, l’État a mis en place, suite aux États Généraux de l’Outre-mer (EGOM), le FOGAP, mais cela ne règle pas complètement les problématiques de trésorerie des entreprises. Par ailleurs, des dispositifs existants dans d’autres régions pourraient être utilement activés, tels que la garantie SIAGI (elle est opérationnelle en Guadeloupe pour les entreprises artisanales, mais pas pour les entreprises agricoles).

• Les aides à l’export sont également appréciés des entreprises, même si d’aucuns regrettent que l’exploration du marché métropolitain ne soit pas considéré comme de l’export. Les entreprises martiniquaises, en vertu des dispositifs d’aide à l’export, peuvent ainsi être soutenues pour explorer le marché de Dubaï ou Hong Kong, mais pas le marché métropolitain (malgré la nécessité de gérer un fret transatlantique, des formalités administratives et douanières, des délais de livraison, des habitudes de consommation différentes qui font dire aux entrepreneurs qu’ils sont de facto dans une situation d’export).

3.1.6 La filière considérée est-elle une filière d’avenir ? Dans quelle mesure ? 3.1.6.1 Globalement / sur des niches spécifiques

A court, moyen et long terme, la filière dispose d’un réel potentiel de création d’emplois et de richesses, suivant des logiques de consolidation de l’offre locale et de substitution à l’import, de diversification et aussi dans une perspective d’exportation sur différentes niches car elle présente un réel potentiel de développement de produits nouveaux.

Les principaux défis restent l’amélioration de la sécurité alimentaire et la couverture de la consommation locale. Il s’agit d’assurer une augmentation de la production locale pour améliorer la couverture alimentaire et la compétitivité face aux importations. D’autres enjeux sont relatifs à la meilleure valorisation des produits à l’exportation et à la préservation des ressources et de la biodiversité.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 39

Dans un contexte de forte dépendance aux imports, il est donc important de soutenir la production locale en vue d’améliorer la compétitivité du secteur agricole et l’autosuffisance alimentaire.

3.1.6.2 Quel type de stratégie d’entreprise / de filière (actions collectives) pourrait être nécessaire pour conforter sa position ?

A l’échelle des entreprises, plusieurs stratégies d’entreprise / de filière (actions collectives) semblent pertinentes pour la filière :

• la participation à la structuration des filières et des interprofessions (déjà bien engagée pour les plus importantes) ;

• l’engagement dans des démarches de diversification, modernisation des exploitations, amélioration de la qualité des produits ;

• l’appui sur des démarches de mise en place de promotion des produits locaux (démarches qualité notamment) ;

• le développement d’innovations de marché par la création de produits agroalimentaires d’exportation sur les marchés européens en s’appuyant tant sur le marché des communautés antillaises (diaspora) que sur celui des touristes ayant visité les territoires, sans que les matières premières soient nécessairement produites localement en totalité (ex. : épices, café, chocolats) ;

• la poursuite et l’extension de stratégies marketing haut de gamme : rhum en premier lieu, mais aussi pour les produits innovants évoqués ci-dessus.

3.1.6.3 Quel type de soutien public pourrait être nécessaire pour conforter sa position ?

Parmi les nombreuses possibilités proposées par les acteurs rencontrés, on retiendra les orientations suivantes du soutien public nécessaire pour conforter la position de la filière :

• l’appui au déblocage de la situation foncière qui est un frein important aux activités (et même à l’accès aux aides européennes surfaciques) ;

• le renforcement du soutien apporté à la structuration et l’organisation des interprofessions (assistance technique performante et moyens humains correspondants) dont les faiblesses peuvent limiter le développement de la filière agroalimentaire ;

• la poursuite de la modernisation des exploitations, le soutien à l’installation des jeunes agriculteurs et pêcheurs et la formation à la transmission avec un accompagnement individualisé ;

• le soutien des circuits courts, des modes de culture traditionnelle (conseils, formations et vulgarisations techniques) et à la place des produits sur les marchés locaux (identification, labels, communication) ;

• la mise en œuvre de services d’assistance-conseil-formation et d’une aide à la transmission des exploitations agricoles. Le but est d’une part de rendre la profession plus facile d’accès aux nouveaux exploitants (outils financiers, aide au démarrage, assouplissement des démarches, appui technique) et d’autre part de donner au statut d’agriculteur une image plus attrayante (formations, innovation, recherche et développement, transfert de connaissance) ;

• dans l’industrie agroalimentaire, les soutiens peuvent concerner le développement des équipements structurants de production et de transformation, et l’adaptation des productions locales aux besoins qui nécessitent notamment des démarches d’appui aux innovations technologiques (nouveaux produits) et non technologiques (packaging, process organisationnel…) ;

• l’accompagnement et l’aide au développement spécifique des entreprises en milieu rural tropical : soutien aux investissements (même petits) pour la

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 40

modernisation des exploitations et des infrastructures, et pour l’adaptation des installations aux risques naturels et sanitaires et aux aléas climatiques ;

• le soutien à la recherche et développement et à l’accès aux réseaux de Recherche et d’expertise technique des autres DROM, de la métropole et de l’Europe ;

• la création ou le renforcement des dispositifs d’aide à l’innovation (technopole, centres techniques, PTR, etc.) venant notamment en appui aux projets d’expérimentation ;

• le renforcement des outils de financement des fonds propres des entreprises pour soutenir leurs projets de développement et de diversification ; le secteur bancaire est toujours perçu comme étant trop « frileux », surtout lors des phases de pré-commercialisation ou de pré-industrialisation qui comportent une part de risque ;

• l’accompagnement du positionnement des produits sur des marchés export de niches haut de gamme.

3.2 La filière Énergies renouvelables et maîtrise de l’énergie

La filière énergies renouvelables et maîtrise de la demande énergétique (ENR/MDE) a été étudiée dans trois DOM : Guadeloupe, Martinique, la Réunion. Les problématiques sont très voisines dans ces territoires : il s’agit de réduire la dépendance énergétique, en particulier concernant les énergies fossiles, et de préserver au maximum un environnement fragile. A ce double titre, les petits territoires et économies insulaires fournissent un remarquable terrain d’expérimentation.

3.2.1 Périmètre de la filière 3.2.1.1 Définition de la filière

« Les énergies renouvelables (ENR) constituent une des clés de la transition énergétique, en apportant une des réponses au défi climatique et de la sécurité d’approvisionnement. Elles entraînent une transformation du système énergétique qui peut se décentraliser en permettant à chaque citoyen, à chaque entreprise et à chaque territoire de devenir un acteur de la production d’énergie sans CO2 »49.

Il existe une grande diversité d’ENR : productible hydraulique, pompages inclus ; éolien ; énergies marines ; solaire photovoltaïque ; solaire thermique ; géothermie profonde ; pompes à chaleur ; biomasse à partir de divers matériaux, déchets et résidus (bois-énergie, bagasse, déchets urbains, etc.) ; biocarburants (taux d’incorporation en pouvoir calorifique).

On s’est intéressé dans l’analyse aux différents sous-segments qui pouvaient être développés dans chaque DOM. En outre, à la Réunion, on a pris en compte, dans le champ de l’efficacité énergétique, le secteur des smart grids et du véhicule électrique, qui font appel à des compétences relevant du solaire.

Dans la littérature50, la filière ENR recouvre les métiers suivants :

49 Grenelle de l’environnement Comité de filière (2009) : Énergies Renouvelables - rapport du comité de filière énergies renouvelables, Comité national de pilotage du plan de mobilisation des territoires et des filières sur le développement des métiers de la croissance verte 2009 Rapport à Valérie Létard, Secrétaire d’État auprès du Ministre d’État, Ministre de l’Écologie, de l’Énergie, du Développement durable et de la Mer, en charge des Technologies vertes et des Négociations sur le climat.

50 Notamment le Rapport du comité de filière énergies renouvelables (2009) du Grenelle de l’environnement.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 41

• les fabricants de matériaux et d’infrastructure pour la production d’ENR (ex : fabriquant de panneaux solaires, fabriquant de turbines pour les éoliennes, etc.) ;

• les installateurs et assembleurs (ex : entreprises d’installation de panneaux photovoltaïques) ; les entreprises de maintenance de ces équipements, notamment dans les bâtiments ;

• les producteurs et fournisseurs d’énergie à partir de sources renouvelables (EDF, Suez GDF, etc.) ;

• les bureaux d’études et entreprises d’ingénierie (par exemple sur la conception de nouveaux systèmes, tels les bureaux d’études thermiques pour du diagnostic) ;

• le conseil technique et les services non marchands, exercés notamment au sein des collectivités locales par exemple dans le cadre de l’élaboration d’un plan climat-énergie territorial ;

• les métiers en lien avec l’aide au financement des énergies renouvelables ; en effet un plan financier est souvent complexe à bâtir en la matière, en tenant compte, par exemple pour des panneaux PV, des tarifs d’achat, du renouvellement et de la maintenance des panneaux sur une longue durée qui nécessitent des techniques d’actualisation.

3.2.1.2 Liens éventuels avec d’autres filières prises en considération sur le territoire (ou qui pourraient l’être)

Trois secteurs apparaissent particulièrement impactés par le développement de la filière ENR/MDE :

• Le secteur du BTP dans son ensemble, pour tout ce qui concerne l’approvisionnement et la consommation en énergie des bâtiments, en particulier la filière « bâti tropical » à la Réunion (mais aussi en Guadeloupe à travers certains domaines couverts par le pôle Synergîle). On ajoutera qu’à la Réunion, Les grands projets d’infrastructure d’ENR en cours de développement sur le territoire (ex : projet SWAC) auront des retombées sur l’activité du secteur à court et moyen terme si ces projets trouvent leur financement.

• Le secteur industriel de la fabrication des appareils producteurs d’énergie, moins homogène, compte tenu de la diversité de formes d’énergies et d’équipements.

• L’agriculture pour la biomasse, issue de la culture de la canne. La canne combustible porte une perspective prometteuse. En substitution du charbon dans la centrale bagasse-charbon actuelle de la Guadeloupe, ou à travers de nouvelles unités industrielles à partir de 2015, elle doit permettre à la biomasse, associée au biogaz de décharge, au biogaz de méthanisation dans les exploitations agricoles et à l’incinération d’ordures ménagères, de représenter 360 GWh par an (18 % du mix énergétique). Une centrale mixte bagasse-charbon vient aussi d’ouvrir à la Réunion. En Martinique, les distilleries fonctionnent sur un modèle renouvelable dans la mesure où la bagasse est largement utilisée comme bioénergie des usines de sucre et de rhum ; par ailleurs, des projets devraient voir le jour pour utiliser les déchets de ces productions, afin d’alimenter des centrales de biomasse, sachant toutefois que la production martiniquaise de biomasse ne pourrait jamais suffire à alimenter une centrale.

Les liens avec l’agriculture peuvent parfois être plus sophistiqués. Ainsi, à la Réunion, Austral Energy (Groupe Akuo) a développé un concept de ferme solaire (Agri-Energy) permettant d’utiliser l’emprise des terrains pour des productions agricoles. L’entreprise y développe notamment le concept de serre photovoltaïque permettant d’utiliser une grande partie des terrains pour la production de plantes et légumes.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 42

On indiquera enfin l’utilisation du bois en Guyane pour le développement d’une filière bois-énergie.

3.2.1.3 Entreprises rencontrées : bref descriptif et évaluation de leur représentativité

1. Guadeloupe

• acteurs institutionnels : SGAR, Conseil Régional, DIECCTE, DRRT

• entreprises : AKUO, ARCHISOLAR, AEROWATT, ALINEA SOLAR, GENERGIES, SUNZIL, TERANOV, VERGENT.

2. Martinique

• acteurs institutionnels : SGAR, Conseil Régional, ADEME

• organisations professionnelles : Association Martiniquaise pour la Promotion de l’Industrie (dont un petit nombre d’adhérents seulement s’inscrit dans le secteur des ENR ou a une réflexion en matière d’ENR dans le cadre de sa stratégie industrielle)

• entreprises : EDF, Solarélectric

3. La Réunion

• acteurs institutionnels : SGAR, Conseil Régional, NEXA (Agence régionale de développement), ADEME, Témergie, ARER (Agence régionale de l’énergie)

• organisations représentatives de la filière : Association pour le Développement Industriel de la Réunion ; Syndicat des énergies renouvelables

• entreprises : EDF ; GDF SUEZ ; Akuo Energy ; Aerowatt ; Vergnet ; Austral Energy ; Corexsolar ; Réuniwatt ; Solarprod ; Schneider Electric ; Convergence.

L’ensemble de ces interlocuteurs permet de couvrir une large part des intervenants de la filière, et plusieurs problématiques propres à chaque branche de la filière. On notera cependant que certains des interlocuteurs principaux se trouvent en métropole.

3.2.1.4 Quelques données générales sur la place des énergies renouvelables dans les DOM51

L’ensemble des DOM dispose du statut de zone non-interconnectée (ZNI) au réseau électrique continental. Ce statut rend compte d’un certain nombre de spécificités liées à des contraintes structurelles communes : la non interconnexion aux réseaux européens de transport d'électricité, l’absence de ressources fossiles, une taille ne permettant pas le développement du nucléaire, etc.

Ces contraintes se traduisent par une dépendance énergétique qui s’est accrue ces dernières années sous l’effet d’une augmentation de la demande (croissance démographique et augmentation du niveau de vie), ainsi que par des émissions de CO2 par habitant encore importantes, alors même que les énergies renouvelables ont connu ces dernières années un important développement.

Le développement des énergies renouvelables, combiné à des efforts en termes de maitrise des dépenses énergétiques, permet à ses régions de soutenir leur mutation vers une économie à faible teneur en carbone, mais également de garantir leur indépendance énergétique.

Malgré leurs contraintes structurelles, les DOM disposent d’atouts indéniables qui résident en premier lieu dans leurs gisements en énergies renouvelables à la fois importants et diversifiés.

51 Voir DéGéOM, Diagnostic stratégique national des régions ultrapériphériques du contrat de partenariat relatif aux programmes européens 2014-2020, pp.38s.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 43

L’ensemble des DOM bénéficie d’un taux d’ensoleillement qui a permis un développement important et rapide du solaire photovoltaïque et thermique. A titre d’exemple, la part de l’énergie solaire photovoltaïque dans le mix-énergétique guadeloupéen est passée de 0,16% en 2008 à 2% en 2011-12, alors même que la demande en énergie a augmenté. Ce développement a été appuyé jusqu’en 2011 par une politique tarifaire nationale de rachat de l’électricité particulièrement attractive. L’arrêt brutal de ces dispositions (moratoire) menace aujourd’hui le développement de la filière dans l’ensemble des DOM. Le solaire thermique a également connu un fort développement, notamment sous l’effet de nouvelles dispositions règlementaires. La RTA DOM13 (et ses déclinaisons régionales telles que la RT Guadeloupe) et la mise en place de dispositifs d’aide cofinancés ADEME/Région à destination des particuliers et des entreprises a ainsi favorisé la diffusion du chauffe-eau solaire (CES) dans les habitats individuels et collectifs. C’est le cas particulièrement à la Réunion.

Au cours de la période de programmation 2007-2013, le développement de la biomasse a également constitué un enjeu fort dans l’ensemble des DOM. A titre d’exemple, la part de la valorisation énergétique de la bagasse dans le mix énergétique réunionnais est passée de 0,53% en 2008 à 9,8% en 2011.

Comparativement, sur la même période, le développement de l’éolien terrestre (on shore) dans les DOM a été plus limité pour deux raisons principales : des disponibilités foncières particulièrement tendues en milieu insulaire et des contraintes réglementaires importantes (déclarations et autorisations propres aux installations classées ICPE, servitudes et contraintes radioélectriques, etc.). A titre d’exemple, la part de l’énergie éolienne dans le mix énergétique martiniquais a même baissé de 0,36% en 2008 à 0,1% en 2011, la demande en énergie ayant augmenté sur la période.

Chaque DOM dispose d’un mix énergétique qui lui est propre, en fonction de ses atouts et contraintes propres : il n’y a pas de mix énergétique type. Afin de réduire leur dépendance énergétique, chaque DOM a opté, selon les ressources dont il dispose, pour une diversification de ses sources d’énergies renouvelables.

La Guyane et à La Réunion disposent d’importantes ressources hydrauliques. Ce potentiel est déjà bien exploité à travers des ouvrages de grande hydraulique, parfois couplés à des systèmes de stockage (afin de pallier l'intermittence de certaines ENR). Les ouvrages de petite hydraulique (au fil de l’eau, etc.) sont toutefois encore relativement peu développés. La part de l’énergie hydraulique dans le mix énergétique guyanais atteint 56% en 2011.

La Réunion et la Guadeloupe disposent d’importantes ressources géothermiques. Mais ce potentiel reste encore pas ou peu exploité. La Guadeloupe accueille la seule centrale géothermique (haute température) de France ; cette dernière a néanmoins connu d’importants problèmes de fonctionnement au cours des dernières années. La part de l’énergie géothermique dans le mix énergétique guadeloupéen représente seulement 3,3% en 2011, pour un potentiel estimé à plus de 20% des besoins énergétiques de l’ile.

A l’exception de la Martinique et de Mayotte, la part des ENR dans le mix énergétique est déjà importante et supérieure à la moyenne nationale. Néanmoins, et en l’absence de réelles solutions de stockage, la plupart des DOM ont déjà atteint le seuil de 30% d’énergies intermittentes sur le réseau (éolien, solaire) au-delà duquel la sécurité de l’approvisionnement en électricité n’est plus garantie.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 44

Tableau 2 Indicateurs de contexte

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Part des énergies renouvelables dans la production d’électricité52

2010 N/D 30% 56% 7% 5,3% 34% N/D

Taux de dépendance énergétique53 2011 N/D 90% 75% 98% 94,7% 88,3% 54,5% Répartition du mix énergétique54 :

- Thermique 2011 N/D 58% 39% 97% 94,7% 22% N/D

- Charbon 2011 N/D 30% 0% 0% 0% 47% N/D

- Bagasse 2011 N/D 3,2% 1,4% 0% 0% 9,8% N/D

- Hydraulique 2011 N/D 0,9% 56% 0% 0% 15% N/D

- Géothermique 2011 N/D 3,3% 0% 0% 0% 0% N/D

- Biogaz 2011 N/D 0% 0% 0% 0% 0,2% N/D

- Éolien 2011 N/D 2,7% 0% 0,1% 0% 0,4% N/D

- Photovoltaïque 2011 N/D 2% 3,9% 2,4% 5,3% 5,2% N/D

- Incinération 2011 N/D 0% 0% 0% 0% 0% N/D

3.2.2 Les enjeux identifiés 3.2.2.1 Les enjeux en termes d’emploi

A titre de remarque préliminaire, il faut souligner que les données chiffrées sur les entreprises et les emplois de la filière ENR/MDE sont difficilement accessibles. La nomenclature INSEE ou Eurostat des activités économiques n’identifie pas les énergies renouvelables comme secteur ou sous-secteur, de sorte que la classification des emplois et des formations qui leur sont liés souffrent d’imprécisions.

Par ailleurs, il ne faut pas attendre avec les énergies renouvelables de révolution en termes de création de nouveaux métiers, si ce n’est le métier de développeur de projet ou de contrôleur/coordonnateur qualité. Pour le reste, les énergies renouvelables offriront davantage d’emplois sur des métiers traditionnels avec des nouvelles compétences, mais pas de nouveaux métiers. Les métiers seront très diversifiés et exploiteront des ressources qui ne sont absolument pas délocalisables.

1. Guadeloupe

Au 31 décembre 2007, l’INSEE recensait 1251 emplois pour l’ensemble du secteur de l’énergie. Néanmoins, on peut spécifier les effectifs d’emplois concerné selon certains segments d’ENR (données 2008) :

• Biomasse : 40 personnes sont employées dans l’usine de la Compagnie thermique du Moule (CTM), et la distillerie de Bologne dispose aussi d’une unité de biomasse/biogaz (au total environ 60 emplois). Le projet d’usine bagasse-charbon de Marie-Galante produirait 15 MW avec 60 autres emplois.

• Géothermie : sur le territoire français, les DOM (hors Guyane) sont les principaux sites potentiels pour le développement de la géothermie de moyenne à haute enthalpie grâce à leur volcanisme récent) ; on trouve une quinzaine d’emplois directs (chez CFG Services exploitant du site de la société Géothermie Bouillante). La création d’une nouvelle centrale au nord de Bouillante est en projet et pourrait atteindre une production de 30 MW avec

52Source : DéGéOM (Comité économique, social et environnemental, Les énergies renouvelables en Outre-mer : laboratoire pour notre avenir, juillet 2011)

53 Source : IEDOM, Rapports régionaux, 2011 54 Source : EDF, Bilan prévisionnel de l’équilibre offre / demande d’électricité, 2012

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 45

une mise en service prévue en 2015 et quelques emplois à la clé. Les emplois indirects dans les entreprises sous-traitantes (ex.: bureaux d’études sous-sol/surface, environnement), mais aussi dans les applications indirectes en cas d’exploitation de l’eau séparée (agriculture, etc.) sont mal connus.

• Hydroélectricité : quelques dizaines d’emplois (estimation d’après un entretien au Conseil régional) pour une quinzaine de sites chez les propriétaires-exploitants suivants : Force Hydraulique Antillaise, EDF Énergies Nouvelles, EDF.

• Éolien (une douzaine de sites) : il est envisagé d’installer 50 à 80 éoliennes supplémentaires sur 5 à 10 nouveaux parcs éoliens) : 19 emplois dans la société Vergnet Caraïbes (cf. Encadré 6) avec des emplois induits (rembobinage génératrice, entretien des chariots, manutention/grutage, transport, intérim) ; 20 emplois directs en Guadeloupe dans la société Aerowatt.

2. Martinique

Le nombre des emplois du secteur des ENR en Martinique est encore faible et qui plus est, variable. Si le nombre d’entreprises dans la filière était de 4 en 2004, il était passé à 22 en 2008, avant de chuter de nouveau à 2 (deux entreprises d’une quinzaine de salariés) aujourd’hui suite au moratoire de 2010 sur le photovoltaïque.

Selon les objectifs de la politique du Conseil régional de Martinique, extrêmement volontariste en matière d’énergies renouvelables, l’objectif en termes d’emploi pour le secteur est de 1 200 à 2 000 à l’horizon 2020.

3. La Réunion

Dans le cadre de la préparation du projet GERRI55, des données chiffrées ont été avancées qui portent à 3 000 les emplois dans le secteur de l'énergie, avec un potentiel de création de 15 000 emplois d'ici à 15 ans, et à 200 le nombre d’entreprises, en majorité des TPE/PME. En 2008, on recense 320 emplois pour la seule filière chauffe-eau solaire (pour 27 M€ de chiffres d’affaires annuels)56.

Le nombre d’emplois directement créés dans le cadre de la mise en œuvre du PRERURE57 a été évalué à 2 500 d’ici 202558, soit 1500 dans le secteur de la MDE et 1 000 dans celui des ENR (dont 65 % pour le solaire thermique).

L’annuaire 2009 du secteur de l’énergie, réalisé par l’agence de développement économique de La Réunion, permet de se faire une idée de la nature du tissu entrepreneurial constitutif de la filière ENR/MDE. Cet annuaire distingue 7 secteurs d’activités59, chaque entreprise pouvant appartenir à plusieurs de ces secteurs. Un premier constat s’impose : la filière ENR/MDE regroupe un nombre relativement important d’entreprises, environ 80 selon l’annuaire (dont la totalité ou une partie des activités concernent l’énergie60).

De par leurs activités, les entreprises de la filière ENR/MDE couvrent pour la plupart le secteur du solaire, la MDE étant le plus souvent une activité complémentaire. Ce secteur du solaire regroupe majoritairement des entreprises développant des activités autour du photovoltaïque et/ou des chauffe-eau solaires (CES). Si l’on considère le

55 Grenelle de l’Environnement à la Réunion : Réussir l’Innovation (ou bien : Green Energy Revolution : Reunion Island).

56 Source : PRERURE Réunion – Mise en œuvre et actualisation – 30 mai 2008 57 Plan régional des énergies renouvelables et de l’utilisation rationnelle de l’énergie. 58 Source : PRERURE Réunion – Synthèse – Avril 2003 59 Solaire, éolien, bioénergie, froid, pétrole/charbon, maîtrise d’énergie, autres. 60 En moyenne les activités de ces entreprises concernent à 83 % le secteur de l’énergie, mais ce chiffre cache

de grandes disparités, la plupart des entreprises intervenant à 100 % dans le secteur de l’énergie, quelques entreprises de l’annuaire intervenant de manière anecdotique dans ce secteur.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 46

chiffre d’affaires, on trouve quelques grosses entreprises, soit des exploitants (Compagnie thermique de Bois Rouge par exemple), soit des filiales de grands groupes (Tenesol par exemple). Si le CA moyen est d’environ 3,5M€61, près de la moitié des entreprises concernées réalise un CA inférieur à 1M€62. Par ailleurs, il s’agit majoritairement de TPE : 42 % des entreprises de la filière ENR/MDE à La Réunion ont entre 1 et 5 salariés, et 29 % entre 5 et 15 salariés.

3.2.2.2 Les réponses aux besoins du marché local et la réduction de la dépendance vis-à-vis de l’extérieur

Le développement des ENR répond prioritairement à des enjeux locaux pour « approvisionner » le marché local, tout en assurant l’indépendance énergétique des territoires tout en assurant la transition vers une économie à faible teneur en carbone.

1. Guadeloupe

La filière ENR en Guadeloupe s’appuie sur la présence de grands groupes ou de leurs filiales sur le territoire (EDF, GDF Suez), de quelques filiales de PME nationales (Sunzil, Akuo Energy/Austral Energy, Aerowatt, ...) et de quelques PME locales.

En 2008 on comptait environ 25 producteurs électriques répartis dans ces différents types d’ENR :

• géothermie (Géothermie Bouillante) ;

• éolien (SCEC, Aérowatt, SIFF, Française des Alizés, Energie Portlands) ;

• photovoltaïque (Tenesol Caraïbes, Apex BP Solar Caraïbes, Solar Electric, JSA technology, Énergy Caraïbes, Quatum Caraïbes, Energipole Quantum, Optimum Energie, Helliade Bellevue, Fian Solar, Akuo Énergy, Solar Associates, Helios Energie Guadeloupe) ;

• hydraulique (FHA, EDF EN).

Avec le potentiel énergétique naturel de l’archipel, la production nette d’électricité issue des énergies vertes a progressé de 30 % entre 2000 et 201263. Le Conseil régional affiche depuis 2008 des objectifs ambitieux en matière d’ENR avec 50 % d’énergies renouvelables dans le mix énergétique à l’horizon 2020 ; cet objectif s’appuie sur la production de 66 MW par les éoliennes, 90 MW par le photovoltaïque, 45 MW par la géothermie et 27 MW par la biomasse (cf. Figure 1).

Figure 1 Mix électrique 2020 de la Guadeloupe (scénario PRERURE 2008)

61 Moyenne pour les 62 entreprises (sur 80) ayant indiqué leur CA. 62 Hors réponses non-disponibles (N/D), soit 23 % des entreprises concernées. 63 Rapport Iedom 2012.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 47

Source : Conseil régional - http://www.synergile.fr/fichiers/Eolien_210313/Conseil%20Regional%20de%20Guadeloupe%20%20elements%20contextuels%20et%20strategiques.pdf

En 2013, la part des ENR dans la production d’électricité est de 15 %.

Si l’insularité, combinée à l’étroitesse du marché intérieur, constitue généralement un frein pour le développement de projets industriels, celle-ci entraîne également un fort effet incitatif pour développer de nouvelles solutions et techniques de production d’ENR puis diffuser certaines solutions innovantes sur le marché local et au-delà (voir infra § 3.2.5.3).

La diversité des conditions naturelles permet d’expérimenter différents modes de production dans des conditions réelles. En 2011, un avis du CESE64 présente l’Outre-mer comme un « laboratoire » et une « vitrine » du savoir-faire national en matière d’énergies renouvelables, invitant à ce qu’une « attention soit portée aux expériences menées dans ces territoires » et à la mise en place de financements spécifiques.

La liste des partenariats actuels d’EDF en Guadeloupe montre d’ailleurs en quoi le territoire est un réel lieu de recherche et d’expérimentation :

• relation avec le pôle de compétitivité Capénergies et Synergîle sur la question du stockage, de l’insertion ENR, de la prédiction ;

• participation à des projets européens (ADRESS, Anémos) ;

• partenariat avec Tenesol et Saft sur l’ENR garanti ;

• etc.

EDF travaille également à la création d’une STEP marine (station de transfert d’énergie par pompage) en bord de mer au nord de Grande- Terre, qui remplirait un bassin situé 50 m à 80 m plus haut, grâce à l’énergie du vent et du soleil. Une réserve de 50 MW serait ainsi disponible, facilement mobilisable. Autre voie, testée par les acteurs comme Aerowatt, Sunzil et Vergnet notamment : doter les centrales de batteries, qui prennent le relais lors des baisses de production. Elles pourraient, en particulier, permettre de restituer l’électricité solaire en fin de journée.

Les retombées économiques et de production de valeur ajoutée sur le territoire devraient se situer essentiellement à deux niveaux : en phase de mise en chantier des infrastructures et réseaux (pour le bâtiment et la construction, ainsi que les bureaux d’études et d’ingénierie) ; en phase de maintenance.

Le développement technique, la conception et le savoir-faire sur les techniques se feront en grande partie par les grands porteurs de projet (EDF, GDF Suez et leurs filiales). Des retombées peuvent également être envisagées dans le BTP ou les transports collectifs.

Encadré 5 Aerowatt, producteur d’électricité indépendant

Aerowatt est une entreprise dont le métier est la production et la vente de l’électricité verte à partir de l’éolien et du solaire. La société est présente à toutes les étapes de la vie d'une centrale : recherche de sites et démarches administratives, études du gisement éolien et solaire, études techniques, recherche de financements, construction, exploitation et vente d'électricité. Implanté à proximité d'Orléans, le groupe rassemble une équipe de 48 collaborateurs, dont 22 dédiés au développement des projets.

Créée en 1966, l’entreprise est implantée de longue date dans les Outre-mer français avec une capacité totale en exploitation au 1er janvier 2013 dans la Caraïbe de 16 MW

64 Comité économique, social et environnemental, Les énergies renouvelables en Outre-mer : laboratoire pour notre avenir, juillet 2011

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 48

dans l’éolien et 7 MWc dans le solaire, sur une capacité totale de 121 MW dans l’éolien (28 centrales et 21 MWc dans le solaire photovoltaïque). L’entreprise est présente en France hexagonale, à La Réunion, Saint-Pierre et Miquelon et en Nouvelle-Calédonie.

Les premières installations ont été mises en place en 1992 sur la base d’une volonté régionale forte et du développement d’un savoir-faire spécifique à l’entreprise, la connaissance du vent (avec sa filiale Winergy). Trois générations d’éoliennes construites par Vergnet SA ont été mises en place suivant une logique adaptée au contexte insulaire et avec une mise en sécurité cyclonique.

Aerowatt a réalisé en 2011 un chiffre d’affaires de 27,5 M€, dont 20,6 M€ provenant de la vente d’énergie verte et environ 5 % concerne l’export.

Depuis 2003, l’entreprise est qualifiée « entreprise innovante » par OSEO. Le 4 avril

2013, JMB Energie (ex-concurrent d’Aerowatt) a franchi en hausse, par suite d’acquisitions réalisées sur le marché dans le cadre de son offre publique d’achat simplifiée visant les titres de la société Aerowatt, le seuil statutaire et légal de 95% du capital et des droits de vote d’Aerowatt. L’entreprise était valorisée 35,4 M€ avant l’opération.

En 2009, Aerowatt Energies a été créée par Aerowatt (actionnaire à 65 % et opérateur industriel) et la Caisse des Dépôts (35 %). Cette co-entreprise a vocation à détenir les droits de propriété et d’exploitation de plusieurs parcs éoliens et solaires. En 2010, la Caisse des Dépôts a annoncé la poursuite de sa stratégie de soutien aux projets d’investissement dans les énergies renouvelables dans le cadre de son plan stratégique et des objectifs fixés par les pouvoirs publics en apportant 3 M€ en fonds propres de la Caisse des Dépôts dans Aerowatt Energies pour la réalisation et l'exploitation de 4 parcs éoliens et solaires supplémentaires. Avec cette deuxième phase d’investissement, le portefeuille total de projets détenus par Aerowatt Energies atteint 10 centrales d’une puissance totale de plus de 31 MW pour un apport cumulé en fonds propres de la Caisse des Dépôts de 5,7 M€.

Le principal risque est lié à l’évolution de la règlementation, soit le changement du prix de rachat de l’électricité.

2. Martinique

Compte-tenu de la part encore très importante des centrales thermiques au fuel et de la faible part des ENR dans le mix énergétique martiniquais, un effort important doit déjà être fait pour tenir les objectifs du Schéma Régional Climat Air Énergie Martinique (50% d’ENR dans le mix énergétique à l’horizon 2020), voire du Grenelle de l’environnement (23% d’ENR dans le mix énergétique en 2020) et de la Stratégie Europe 2020 (20% d’ENR dans le mix énergétique en 2020).

En 2012, 1 590GWh ont été livrés sur le réseau contre 1 576GWh en 2011, soit une croissance de 0,9% : sur cette production totale, seuls 6,3% du mix énergétique de Martinique provient des énergies renouvelables (15,7% de la puissance installée), contre 93,7 % (84,3 % de la puissance installée65) pour l’énergie d’origine thermique.

Il faut souligner toutefois les progrès importants intervenus au cours des derniers mois : les ENR ont progressé de 2,7% dans le mix énergétique entre 2011 et 2012. Cette hausse est le produit des investissements réalisés en 2010 et 2011, avant le moratoire national sur le rachat de l’énergie photovoltaïque et la décision locale d’interdire les fermes photovoltaïques au sol (ce choix a été fait afin de protéger la surface agricole utile déjà menacée). La production d’énergie renouvelable a augmenté de 83,5 % de 2011 à 2012, passant de 54,5 GWh à 100 GWh.

65 La part importante des énergies renouvelables intermittentes explique l’écart entre le poids des énergies renouvelables dans la puissance installée et leur poids dans l’électricité effectivement produite.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 49

A la différence des autres DOM, le mix énergétique de la Martinique est peu diversifié. En Guadeloupe en effet, le thermique reste la première source mais une part non négligeable de la production repose sur le mélange bagasse-charbon et sur l’hydroélectricité, tandis qu’en Guyane et à La Réunion, le thermique n’est plus la première source d’énergies (hydraulique en Guyane, bagasse-charbon à La Réunion).

S’agissant des énergies renouvelables intermittentes, dont la production est variable et peut affecter sensiblement l’équilibre offre-demande des systèmes non connectés, la situation en Martinique est la suivante :

• Le photovoltaïque (5,1 % de la production d’énergie en Martinique) : le nombre d’installations a sensiblement progressé en 2012 (970 contre 873 fin 2011), entraînant une hausse significative de la capacité installée (cf. supra). Ce développement est lié à la mise en place d’incitations fiscales depuis 2006 et à l’instauration d’une obligation d’achat de l’électricité solaire par les distributeurs. Ces conditions ont toutefois été réduites au fur et à mesure (baisse du taux de crédit d’impôt pour l’acquisition d’une installation photovoltaïque dans la résidence principale, amendement à l’obligation d’achat d’électricité par les distributeurs, baisse du prix de rachat du kWh) et depuis 2008, le gestionnaire du réseau électrique est autorisé à déconnecter les producteurs d’énergies intermittentes au-delà d’un seuil de 30 % de la puissance appelée.

• L’éolien (0,1 % de la production) : à ce jour, la Martinique ne compte qu’un seul site éolien (parc de Morne Carrière au Vauclin). Un autre projet (avec stockage) a été retenu dans le cadre d’un appel d’offre de l’État en 2010.

Le photovoltaïque et l’éolien soulèvent des questions importantes en termes d’innovation. En effet, le développement des énergies intermittentes est à ce jour limité car le réseau électrique ne peut absorber plus de 30% d’énergies intermittentes : des solutions en termes de stockage doivent donc être trouvées pour renforcer la place des ENR dans le mix énergétique.

Pour ce qui est des énergies renouvelables stables, dont le profil de production peu fluctuant et prévisible permet de maintenir durablement une production constante, l’incinération d’ordures ménagères est à ce jour la seule source (1,2% de la production). Elle provient d’un seul site, l’usine d’incinération des ordures ménagères exploitée par la Martiniquaise de Valorisation. Sa capacité de traitement devrait fortement augmenter dans les années à venir.

D’autres projets sont à l’étude ou d’ores et déjà validés et devraient également permettre d’accroitre la part des ENR (et notamment des ENR stables) dans le mix énergétique martiniquais : projet de géothermie des mers développé avec le Pôle Mer Bretagne, projet de biomasse avec la centrale du Galion qui devrait se développer sur un mix charbon-bagasse (avec de la bagasse importée du Brésil, la bagasse martiniquaise ne permettant pas d’alimenter une centrale de cette taille). L’enjeu est grand pour ce dernier site de production car le ratio bagasse/charbon sera un déterminant important de la part des ENR globales dans le mix martiniquais. Des projets de petite hydraulique ou de géothermie sont également à l’étude : on estime notamment que l’énergie géothermique pourrait devenir la première source d’énergie renouvelable en Martinique d’ici 2020

La production est ainsi encore faible, alors que : les enjeux environnementaux et économiques sont grands ; les objectifs politiques régionaux, nationaux et européens sont ambitieux ; le potentiel de développement des ENR est grand en Martinique. La question de l’autonomie énergétique et du développement des ENR est ainsi un enjeu majeur du développement de l’ile. Cette idée est d’ailleurs le fondement de la politique du Conseil régional de Martinique qui voit dans les ENR un enjeu financier important (pour la collectivité par l’autonomie énergétique et pour les particuliers par la revente au réseau), doublé d’une opportunité économique (création d’emplois) et d’une nécessité environnementale.

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Cette politique repose sur :

• l’habilitation législative Énergie dont la Martinique dispose depuis juillet 2011 et qui lui permet de fixer ses propres règles pour la maîtrise de la demande d’énergie, la réglementation thermique pour la construction des bâtiments et le développement des ENR ;

• la création d’une agence martiniquaise de l’énergie (effective depuis mai 2012) ;

• la création d’une société d’économie mixte sur les ENR (juin 2013).

D’après l’ensemble de nos interlocuteurs, les objectifs sont ambitieux mais atteignables, dès lors que les moyens sont mis à disposition des acteurs, acteurs institutionnels, entreprises et consommateurs d’énergie.

3. La Réunion

La Région Réunion affiche depuis bientôt 10 ans des objectifs ambitieux en matière d’ENR avec 100% d’énergies renouvelables dans le mix énergétique à l’horizon 2020. Aujourd’hui, la part des ENR dans la production d’électricité est de 34% (dont une bonne part issue de l’hydraulique, et dans une moindre mesure de la bagasse et du photovoltaïque). Un effort particulièrement important a été mené sur l’installation de chauffe-eau solaires avec près de 121 081 CES individuels installés, ce qui constitue la deuxième place au niveau européen après Chypre. La région est au 3ème rang européen en termes de puissance photovoltaïque soit 107.2 Wc/hab., et en termes de surface de capteurs solaires thermiques installés soit 610m²/1000 hab.

La filière ENR est constituée d’environ 200 entreprises, représentant environ 3000 emplois dans le secteur de l’énergie. Elle s’appuie sur la présence de grands groupes ou de leurs filiales sur le territoire (EDF, GDF Suez et Séchilienne Sidec), de quelques filiales de PME nationales (Sunsil, Akuo Energy/Austral Energy, Giordano, Aerowatt….) et de quelques PME locales (Corex, Convergence, Réuniwatt…).

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 51

Source : Annuaire Energie 2009 – AR (agence de développement économique de la Réunion)

Malgré plusieurs lois plus ou moins récentes favorisant les investissements en Outre-mer et notamment en matière d’ENR/MDE, on constate – au regard de l’ancienneté de ces entreprises – que l’effet d’aubaine que l’on pouvait attendre en termes de créations d’entreprises n’est pas évident. Ainsi, il s’agit d’entreprises « matures » : plus de la moitié des entreprises de la filière ENR/MDE à La Réunion a été créée avant 200066.

En termes de services offerts par ces entreprises, ceux-ci sont assez divers et globalement les besoins semblent bien couverts67. On note un nombre important de

66 Hors réponses non-disponibles (N/D), soit 13 % des entreprises concernées. 67 Source : Annuaire Energie 2009 – AR (agence de développement économique de la Réunion)

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bureaux d’études locaux offrant des services allant des études d’opportunité (22) à l’ingénierie juridique (6) et financière (12) en passant par l’ingénierie technique (35). Par ailleurs, un nombre important d’entreprises interviennent au niveau de l’installation (31) et de la maitrise d’œuvre (24). On ne constate pas en la matière de différences majeures selon les secteurs d’activités – solaire, éolien, bioénergie, MDE (cf. graphes ci-après).

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 53

Source : Annuaire Energie 2009 – AR (agence de développement économique de la Réunion)

On examine ci-après les différents segments de la filière dont le tableau suivant synthétise les éléments de caractérisation.

• Segments ENR • Éléments de caractérisation de la filière

• Biomasse • 120 emplois directs

• 20 M€

• Acteur majeur : Séchilienne Sidec, GDF Suez

• Filière relativement mature

• Biocarburants (algues)

• 5 emplois

• 1 seule entreprise, pas de filière

• Pas de CA (mode projet)

• Énergie des mers (SWAC, ETM, houle…)

• 15 emplois industriels directs

• Pas de CA (mode projet)

• Acteur majeur : DCNS, une entreprise en constitution SEAWATT

• Pas de filière à proprement parlé

• Un impact local fort sur le niveau de dépendance énergétique

• Des retombées économiques durant la période des chantiers, moindres ensuite car étant autonomes les systèmes ont besoin simplement d’opérations de contrôle et maintenance (CA potentiel de 30 à 50 M€).

• Des verrous technologiques et industriels importants, et une filière à forte intensité capitalistique (structuration autour de grands acteurs EDF/DCNS).

• Éolien • 20 emplois

• 3 acteurs majeurs : AEROWATT, VERGNET, EDF Énergies Nouvelles, ALIZEO

• Peu de possibilités de développement du marché local, sauf sur le micro-éolien (habitat individuel, exploitation agricole)

• VERGNET déjà très largement présent sur l’Océan Indien et l’Afrique (à partir de sa base métropolitaine)

• Pas de potentiel de recherche sur le territoire dans le domaine.

• Photovoltaïque • 420 emplois (2011) (mais 900 détruits sur 2010-2011)

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• 50 M€ de CA

• Une vingtaine d’entreprises

• Potentiel d’export faible à court terme sauf sur les approches de production délocalisées pour l’autoconsommation (ingénierie/service)

• Smart grids • Une vingtaine d’emplois (CA 2M€ environ)

• 2 acteurs majeurs : EDF, Schneider Electric (PEGASE), quelques start-ups

• Une filière transversale liée à toutes les filières de l’énergie (solaire, éolien, énergie des mers…) tant au niveau de la production que du stockage

• Un potentiel d’intégration au secteur du bâtiment (bâtiment à forte performance énergétique)

Source : Etude sur la caractérisation des filières de la croissance verte à La Réunion, DEAL, 26 octobre 2012 (Aprim & Associés).

Le solaire :

La situation de la filière solaire/PV à La Réunion a connu une phase critique après la révision du tarif de rachat de l’électricité solaire par le Gouvernement en 2010-2011. Le secteur a connu une véritable bulle avec la mise en place de tarifs avantageux de rachat (40 à 60 ct € du KWh) et une fiscalité incitative pour les particuliers (déduction de 50% des impôts). La révision de ce cadre incitatif aurait détruit près de 900 emplois et provoqué la fermeture d’une dizaine d’entreprises.

Cela a donné lieu à l’émergence d’une filière, fragmentée cependant entre de nombreuses petites entreprises spécialisées dans l’installation de PV pour l’habitat individuel ou collectif. De réels savoir-faire locaux ont émergé, mais essentiellement sur l’installation. La filière aval de recyclage du PV reste à ce stade encore peu développée, la majorité des déchets étant exportée en container.

Les entreprises qui ont survécu à la crise sont aujourd’hui essentiellement positionnées sur de la maintenance, et tentent de développer davantage de valeur ajoutée sur des niches au croisement avec d’autres filières, agriculture et bâtiment à faible impact énergétique notamment. C’est le cas par exemple de projets pour le développement de matériaux placés en surimposition de toitures pour l’amélioration du rendement de panneaux PV en milieu tropical (COREX), ou de pompes solaires pour l’irrigation des terres, et de centrales Agri-Energy (Akuo) permettant la production d’huiles essentielles, ou dans le domaine des smart grids (Milener, Pegase, etc.).

Par ailleurs, l’avenir de la filière passe également, selon les acteurs rencontrés, non plus par l’installation de grandes fermes photovoltaïques dont le business model a été mis à mal par la révision du tarif de rachat, mais par la mise en place de petites unités de production couplées à des solutions de stockage chez les particuliers (solution d’autoconsommation) ou les entreprises (secteur tertiaire). La Région Réunion a mis en place un dispositif d’aide portant à la fois sur l’installation de PV et la pose de batteries chez les particuliers pour développer le marché local.

Sur ce produit, les technologies existent (batterie plomb, batterie sodium-souffre…), et le savoir-faire est présent à La Réunion y compris dans des PME locales : COREX, Sunsil (ex-Tenesol), Giordano, Dijou, etc.

Les chauffe-eau solaires :

Il y a eu la constitution d’une vraie filière avec une maîtrise de l’emboutissage, assemblage, installation, maintenance qui représente aujourd’hui près de 600 emplois (entretien avec les services de la Région) pour une quinzaine d’entreprises.

La raison tient au fait qu’il s’agit de solutions lowtech, facilement maîtrisables par les PME locales, nécessitant peu de R&D et à faible intensité en capital. Par ailleurs, le développement du secteur a fait l’objet d’une intervention (subventions) fortement soutenue par la collectivité régionale, sur une longue période, avec un business model attractif privilégiant la location-vente aux particuliers plutôt que la vente (bien adapté

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 55

aux revenus réunionnais), et appuyé par la règlementation thermique qui impose depuis 2012 des CES dans toute construction neuve (RT-DOM), y compris les habitations collectives.

La biomasse :

La filière biomasse est relativement dynamique, principalement orientée autour de l’utilisation de la bagasse (déchets agricoles de la canne à sucre) et du mélange de la bagasse et du charbon (2 centrales thermiques mixtes bagasse-charbon assurant 17% de l’électricité de l’Ile) avec des compétences locales. Elle représente 120 emplois directs locaux. Le principal opérateur est la Séchilienne Sidec qui a développé à partir de l’expérience réunionnaise un savoir-faire distinctif et exporte son modèle aux Caraïbes et à Maurice.

La filière tente aujourd’hui de se diversifier en utilisant les déchets verts. Avec 140 000 tonnes de déchets verts produits annuellement (entretien ADEME), les perspectives de développement sont prometteuses. Une partie de ces 140 000 tonnes est aujourd’hui transformée en compost, mais cette production n’est plus écoulée car trop chargée en métaux. Une alternative prometteuse semble être la valorisation énergétique de ces déchets, d’autant que le groupe Séchilienne Sidec travaille activement dans le domaine, et qu’AKUO Energy (présent à La Réunion via sa filiale Austral Energy) y développe des savoir-faire68. Par ailleurs, un autre projet de centrale fonctionnant à base de déchets verts est porté par GDF Suez.

L’ADEME et le Conseil régional appuient différents projets dans le domaine : un projet porté par Séchilienne Sidec avec Enertime (une entreprise métropolitaine) pour développer de petites unités de production de biomasse d’1 MGW ; un projet sur la méthanisation des déchets organiques avec Séchilienne Sidec et le groupe Ho Schung Environnement (HSE).

Le développement de la filière bute cependant sur le manque d’organisation de la collecte de tri des déchets verts pour produire la biomasse. Il y a un vrai enjeu à développer une plateforme de collecte/tri et prétraitement de la biomasse avant sa valorisation énergétique pour assurer la sécurité de l’approvisionnement.

Il y a aussi un vrai savoir-faire spécifique à développer dans ce domaine avec un potentiel d’export sur les pays de la bande intertropicale. Par ailleurs, il y a des possibilités également pour envisager de mettre en place des filières d’approvisionnement depuis l’extérieur vers la Réunion en produit vert pour alimenter des centrales de production biomasse.

Des études sont également en cours pour étudier le potentiel d’une filière bois-énergie dans les Hauts, qui disposent d’un potentiel de 87 000 tonnes de bois énergie, dont 45 000 tonnes facilement accessibles. L’étude en cours vise à évaluer et qualifier la ressource, identifier les technologies d’exploitation à mettre en place, les coûts de transport et la rentabilité économique d’une exploitation.

Enfin, un projet se développe autour des biocarburants à partir d’algue (Albius), porté par l’entreprise BIOALGOSTRAL (5 emplois fin 2012) en partenariat avec Akuo, qui entend exploiter le process mis au point par l’entreprise allemande IGV sur l’ensemble de la bande intertropicale. La Réunion servirait de point d’expansion de l’entreprise pour développer sur place la production d’algues et la fabrication de biocarburant.

Le projet fait l’objet d’un financement dans le cadre des investissements d’avenir avec un budget total de l’ordre de 60 millions d’euros. Il fait partie de la dizaine de projets financés au niveau national et européen sur la production de carburants à partir d’algue. Un des sous-produits de la production d’algues, outre le biocarburant, est également leur valorisation pour des applications agroalimentaires et cosmétiques.

68 AKUO Energy développe des projets relatifs à la biomasse en Métropole, en Picardie notamment.

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L’agence régionale NEXA est entrée au capital de la société à hauteur de 80% afin de lui apporter les fonds propres nécessaires au développement du projet. Un accord de partenariat serait en cours de signature avec la Séchilienne Sidec pour l’approvisionner en biocarburant.

A ce jour, on ne peut parler de filière dans la mesure où il n’y a qu’un seul opérateur, et pas de feuille de route stratégique sur le sujet de la valorisation des micro-algues. Par ailleurs le projet dans son état actuel se situe encore relativement en amont de la chaîne de la valeur, et ne mobilise pour le moment que peu de compétences et savoir-faire locaux.

Les « smart grids » :

Dans le domaine de la gestion intelligente des réseaux électriques (smart grids), il existe à la Réunion une poignée de PME, souvent de jeunes pousses, actives dans le domaine de la prévision de la production d’électricité solaire ou de la comptabilité de l’efficacité énergétique des bâtiments. Par ailleurs, l’opérateur national (producteur et distributeur à la Réunion) est également actif.

Il existe en effet deux projets d’envergure d’expérimentation et/ou de démonstration portés par EDF :

• Le projet MILENER. Il vise à tester les réseaux électriques intelligents en milieu insulaire pour permettre une meilleure intégration des énergies intermittentes décentralisées (comme le solaire) aux systèmes électriques et, plus globalement, assurer une meilleure gestion énergétique. Porté par EDF, il associe également 6 partenaires industriels (BPL Global, Delta Dore, Edelia, Saft, Schneider et Tenesol). Le projet est financé au titre des investissements d’avenir (Appel à manifestations d’intérêt de l’ADEME « Réseaux électriques intelligents »).

• Le projet PEGASE « Prévision des énergies renouvelables et garantie active par le stockage d’énergie » (retenu dans le cadre de l’Appel à manifestations d’intérêt de l’ADEME « Expérimentations liées aux infrastructures de recharge pour les véhicules électriques et hybrides rechargeables »).

Le projet PEGASE réunit neuf partenaires (Aerowatt, EDF EN, EDF R&D, EDF SEI, EP-LMD, Météo France, Sidec, l’Université de la Réunion) avec pour objectif de développer les méthodes et outils de :

− prévision court terme (jusqu’à 48 heures) et très court terme (jusqu’à quelques heures) de gabarits de production de parcs photovoltaïques et éoliens à partir de moyens de prévisions météorologiques ;

− gestion de l’information pour être en mesure de gérer l’ensemble des flux de données en temps réel et rendre ainsi le réseau électrique plus intelligent ;

− gestion du stockage d’énergie par batterie NaS (sodium-soufre) pour corriger les écarts de production avec la prévision photovoltaïque et éolienne tout en permettant des services à différents horizons temporels allant du transfert d’énergie (quelques heures) au réglage de fréquence (quelques secondes).

Cette expérimentation permettra de coupler, pour la première fois en France, une ferme photovoltaïque et/ou éolienne (de 3 à 10 MW) avec un moyen de stockage par batterie NaS (1 MW) suivant un plan de production qui intègrera la prévision de production. Elle permettra aussi de tester une gestion foisonnée de plusieurs centrales renouvelables en temps réel, avec le stockage d’énergie.

Cependant, le nombre d’acteurs locaux du domaine est relativement limité. Ils ne sont pas tous bien connectés aux projets d’envergure portés par EDF. Il n’est pas certain que ces « grands projets » permettent de développer le savoir-faire local.

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Par ailleurs, les quelques PME locales, souvent innovantes, du domaine sont confrontées à la problématique de leur financement des fonds propres. C’est ainsi que le groupe de Convergence, propriétaire de Teéo, a installé le siège de cette dernière à Lyon pour commercialiser son logiciel sur le marché métropolitain, en partie faute de solution de financement de son développement à La Réunion.

Segments de la filière basés sur un savoir-faire développé à l’extérieur avec des retombées potentiellement importantes pour le territoire : SWAC, véhicule électrique :

Un autre ensemble de segments des ENR est présent en mode projet à La Réunion sans toutefois que, derrière ces segments, l’on puisse identifier des entreprises locales ou des savoir-faire développés localement. Toutefois, ces projets peuvent potentiellement avoir des retombées économiques pertinentes pour le territoire et contribuer à développer du savoir-faire à terme.

• Les projets de SWAC (Sea Water Air Conditioning), production de froid à partir de l’exploitation du différentiel de température de la mer

Trois projets sont en cours de développement : un projet porté par GDF Suez pour alimenter en climatisation l’agglomération de la Communauté intercommunale du Nord (CINOR) : ce projet est aujourd’hui en phase de recherche des financements ; un projet porté par EDF pour la climatisation d’un hôpital dans le sud de l’Ile sur la commune de Saint Pierre ; un projet sur la commune du Port pour la mise en place d’une unité de production de froid sur la zone industrielle contiguë au port.

Le projet porté par GDF Suez est le plus ambitieux par son ampleur (150 M€) ; outre l’unité de production de froid, il s’accompagne de la construction du réseau de distribution du froid sur 23 km.

La technologie SWAC est déjà mise en pratique en Polynésie (un hôtel) et à Hawaï, où elle est déjà bien développée. Le verrou pour le développement de ces projets est donc moins dans la technologie à mettre en œuvre que dans le business model susceptible d’assurer la rentabilité économique des projets. Une partie des revenus sera générée par un tarif d’évitement des consommations électriques (pour la climatisation), qui reste encore à fixer. Une autre partie de la faisabilité des projets est également conditionnée par les financements publics mobilisables. Le projet de SWAC de GDF porte sur environ 87 M€ d’aide demandée (dont 70 M€ sur la partie réseau du projet).

Les retombées économiques et de production de valeur ajoutée sur le territoire interviendront essentiellement : en phase de mise en chantier des infrastructures et réseaux (pour le bâtiment et la construction, ainsi que les bureaux d’études et d’ingénierie) ; il est estimé que 40 à 50% des travaux se feront par recours à des entreprises locales ; en phase de maintenance.

Le développement technique, la conception et le savoir-faire sur la technique se feront essentiellement par les porteurs de projet (EDF, GDF Suez et ses filiales…).

Cependant, les promoteurs des projets (en particulier GDF Suez) soulignent que des retombées potentielles pourront voir le jour au travers de la valorisation des eaux de mer millénaires (eaux chargées en nutriments) rejetées par la centrale de production de froid, avec des applications dans le domaine de l’aquaculture, de la cosmétique (une telle valorisation existe déjà à Hawaï), et du tourisme. Des partenariats sont en discussion sur la partie valorisation avec l’Université (étude du potentiel de valorisation).

De manière indirecte, les projets de SWAC peuvent également conforter les expertises locales en matière de génie climatique des bâtiments. En effet, dans le cadre de ces projets, le coût du froid produit devrait être facturé à un prix proche de celui de l’électricité nécessaire pour produire du froid. Dès lors, la mise en place des SWAC doit s’accompagner de travaux sur l’isolation des bâtiments et les systèmes de gestion électriques des bâtiments desservis afin de limiter les pertes et d’optimiser la

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consommation des futurs clients. Il y a donc potentiellement des retombées sur la filière du « bâti tropical ».

• La « mobilité verte »

La Région ambitionne également de développer la mobilité verte à la fois par une offre de transport collectif en site propre pour encourager l’utilisation de véhicule collectif comme alternative à la voiture individuelle, mais également, parce que la voiture restera un mode privilégié de transport dans les années à venir, via le développement de la voiture électrique. Le projet VERT (cofinancement ADEME/Région/FEDER) en partenariat avec Renault vise à répondre à ce dernier défi en testant des flottes de véhicules électriques sur des bornes de recharge alimentées en électricité produite à partir de PV (sur le modèle de l’autoconsommation chez les particuliers pour l’alimentation électrique de l’habitat). Le coût total du projet est de 3,7 M€ (subvention des investissements d’avenir de 860 k€). Outre EDF, le consortium réunit Sunzil, Schneider Electric, Total, ADAMELEC et le groupe GBH (importateur et distributeur de Renault pour le déploiement des bornes de recharge dans les concessions et hypermarchés du groupe).

Le démonstrateur est constitué par :

• un parc de 18 véhicules électriques de type Kangoo et Fluence de Renault ;

• des bornes de recharge développées par Schneider Electric ;

• des générateurs photovoltaïques fournis par Tenesol dont la puissance est adaptée en fonction, notamment, des besoins du profil « utilisateur » en puissance de recharge quotidienne ; une batterie « tampon » permet de garantir la disponibilité de l’énergie pour les recharges et la bonne intégration au système électrique ;

• des sites de recharge complémentaire, dans trois stations service Total. Ces sites donnent aux utilisateurs l’assurance de pouvoir recharger leur véhicule en secours ;

• des entreprises expérimentatrices (flottes des véhicules), motivées par un rôle de précurseur sur le déploiement des véhicules électriques dans l’île.

Segments plus hypothétiques : énergie thermique des mers (ETM), PELAMIS (énergie de la houle), géothermie, éolien

• Le projet d’énergie thermique des mers (ETM) porté par DCNS

Le projet d’ETM, à la différence du SWAC, est encore en phase de recherche et développement technologique. Parmi les verrous technologiques figurent le développement du sous-système moteur du dispositif ainsi que les techniques de pompage en eau profonde pour assurer un débit suffisant.

L’enjeu est aujourd’hui pour DCNS de disposer d’un premier démonstrateur pour attaquer ensuite le marché mondial sur les sites propices.

En termes de retombées économiques pour le territoire, la construction du démonstrateur ETM peut faire appel aux compétences locales en matière de chaudronnerie et de charpente marine. Elle est estimée à 1 million d’heures de travail. La Région Réunion serait en co-maîtrise d’ouvrage avec DCNS sur le projet. Le scénario d’unité d’ETM est déjà intégré dans le mix énergétique de la Réunion à l’horizon 2030.

La question du financement et du modèle économique est un verrou important, d’autant que la Réunion et la Martinique sont en « concurrence » pour accueillir ce projet. A la Martinique, le coût du projet est estimé à 350 millions d’euros.

Les discussions avec les acteurs font aujourd’hui apparaître de fortes divergences sur l’opportunité d’un tel projet à La Réunion. Toutefois, une convention de partenariat de recherche a été signée entre la Région Réunion, DCNS et l’Université, le 22 mars 2012 pour engager un partenariat de recherche sur l’énergie thermique via le prototype à

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terre livré en février 2012 par DCNS à la Région Réunion. La convention vise à encadre le programme de R&D du prototype à terre, reproduction à échelle réduite du système de production électrique d’une future centrale ETM. L’Université apporte des capacités scientifiques pour travailler sur le système énergie.

• Le projet PELAMIS (énergie de la houle)

Il est porté par EDF en partenariat notamment avec l’entreprise COREX. Le projet a été accompagné au démarrage par l’ADEME et a fait l’objet d’un dossier de candidature aux investissements d’avenir, non retenu cependant car trop orienté vers le développement industriel, sans programme de recherche et développement technologique. Depuis, le projet a été reconfiguré pour intégrer une composante de R&D sur une technologie de stockage associé au PELAMIS. Cependant, le financement du pilote n’est pas encore bouclé (20 M€ d’investissement), faute de tarif de rachat de l’électricité suffisamment attractif pour assurer la rentabilité des investissements.

• La géothermie

La Réunion devrait disposer logiquement d’un potentiel de géothermie important du à la présence du volcan. Cependant, l’évaluation du potentiel bute aujourd’hui sur l’inscription du volcan et du parc au patrimoine mondial de l’humanité par l’UNESCO, et l’engagement pris d’interdire la géothermie dans le cœur du parc. Des discussions sont en cours pour relancer des études exploratoires.

Il n’y a pas de filière sur le domaine.

• L’éolien

L’éolien est une filière de niche. Les sites porteurs sont déjà exploités, avec deux fermes éoliennes (18 MGW), et la présence de 3 acteurs, filiales de groupes métropolitains : Aerowatt (conception et installation), Vergnet (équipement et maintenance), EDF Énergies Nouvelles.

Les possibilités de développement du marché local sont donc limitées (contraintes géographiques fortes).

A l’export, Vergnet est déjà fortement présente, depuis son siège en Métropole, elle possède une position de leader de la fourniture de fermes éoliennes clé en main dans l’Océan Indien avec une technologie d’éoliennes repliables (risque cyclonique). Elle dispose de 700 éoliennes en Afrique et dans l’Océan Indien.

3.2.2.3 Exporter

Le potentiel d’exportation concerne porte essentiellement sur du savoir-faire et de l’ingénierie technique, et secondairement sur de l’expertise en matière de définition de stratégie et de politique publique énergétique.

Les entreprises intervenant dans les DOM et susceptibles de commercialiser savoir-faire et ingénierie sont souvent les mêmes ou appartiennent aux mêmes groupes (voir ci-dessous l’exemple de Vergnet SA).

Jusqu’à présent, l’exportation d’expertise en matière de stratégie et de politique publiques reste à l’état de potentialité.

1. Guadeloupe

Une étude et un projet interrégional peuvent être signalés dans cette perspective :

• L’étude GEOEXPORT portant sur une identification plus précise des compétences françaises aptes à être mobilisées pour la réalisation de projets, notamment à l’export (ADEME/AFPG/SER). Les objectifs sont d’analyser la chaîne de valeur pour la géothermie, d’identifier les compétences, les forces/faiblesses, les besoins, d’établir un plan d’action opérationnel avec notamment la création d’un ou de deux pôles français conduits par des acteurs industriels et/ou financiers de premier plan, la structuration d’une offre française sous forme de « packages »

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 60

complets couvrant l’ensemble des phases du cycle d’un projet, une déclinaison sur deux ou trois projets concrets.

• Le projet INTERREG « Géothermie Dominique » accordant une place importante à l’intégration environnementale et à l’acceptabilité des projets. Ce projet vise à préparer les conditions pour la mise en œuvre d’un programme caribéen de développement de la géothermie et à aider à positionner une offre française sur la zone. Néanmoins, EDF semble avoir décidé d’abandonner le projet de centrale géothermique de 130 MW à la Dominique pour des raisons liées « aux contraintes financières du projet ».

Encadré 6 Vergnet SA et sa filiale en Guadeloupe Vergnet Caraïbes

Vergnet SA avec un CA d’environ 68 M€ en 2011, regroupe environ 300 collaborateurs, avec 9 implantations dans le monde (France, Caraïbes, Pacifique, Océan Indien, Afrique) pour deux métiers : la conception et la fabrication d’éoliennes rabattables, avec un CA de 55 M€, essentiellement à l’export ; et la production d’eau en zones désertiques pour un CA de 13 M€. Le parc installé est d’environ 750 éoliennes. Vergnet a deux sites de production : l’un à Ormes (Orléans), siège du groupe Vergnet ; l’autre à Béziers pour la production de pales. Le capital est détenu à hauteur de 15 % par la famille Vergnet, 27 % par le FSI (entré en 2011), et 40 % en flottant Euronext. L’offre de Vergnet comprend toute une gamme d’éoliennes rabattables de 200 kW à 1 MW.

• GEV MP de 275 kW : parc installé de 350 éoliennes pour des centrales de 1 à 10 MW ;

• GEV MP de 200/275 kW : version non cyclonique pour l’éolien de proximité ;

• GEV HP de 1 MW pour les centrales de +10 MW.

La « niche » de Vergnet peut se caractériser par :

• des sites difficiles, avec peu d’infrastructures et peu de moyens logistiques ;

• des conditions climatiques extrêmes.

Vergnet a remporté un succès commercial important en Éthiopie (120 MW). Les départements et territoires d’Outre-mer constituaient jusqu’à présent un marché quasiment exclusivement Vergnet (350 éoliennes), avec des filiales maintenance aux Antilles (18 personnes), La Réunion (15 personnes) et Nouvelle-Calédonie (24 personnes).

Vergnet a proposé des innovations technologiques dans le cadre de l’appel d’offres « éolien terrestre dans les DOM et en Corse » : une gamme d’éoliennes anticycloniques ; une électronique de puissance ; un système de prévision ; un stockage de l’électricité.

Le résultat de l’appel d’offres n’a pas été à la hauteur de son ambition puisque Vergnet n’a été retenu que sur trois projets (deux en Guadeloupe et un en Martinique), en partenariat avec Aerowatt, soit un total de 19 MW alors qu’elle escomptait 45 MW.

Les DOM apparaissent comme des zones privilégiées pour les fabricants d’éoliennes pour y obtenir leurs premières références industrielles, avant d’exporter leurs produits. C’est ainsi que Vergnet a installé seulement 20 % de sa production en France (essentiellement en Guadeloupe et à la Réunion), 17 % dans le Pacifique, 58 % en Afrique, 2 % dans les Caraïbes hors DOM, 2 % en Europe (hors France).

L’Outre-mer est pour Vergnet une vitrine importante pour son activité, à l’exportation, et un élément important de crédibilité pour son actionnaire public, le FSI (Bpi-France).

Source : Éolien et photovoltaïque : enjeux énergétiques, industriels et sociétaux, Rapport à Monsieur le Ministre du Redressement productif et Madame la Ministre de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie établi par le CGEIETet le CGEDD, Septembre 2012.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 61

2. Martinique

Le marché des ENR en Martinique est à ce jour, compte-tenu de la maturité de la filière, un enjeu uniquement pour le marché local : la filière n’est pas encore assez développée pour envisager une logique d’exportation de technologies ou de services.

Néanmoins, des perspectives existent à plus long terme et pourront être développées sur la base de la structuration de la filière en Martinique. La politique du Conseil Régional vise notamment à développer les savoir-faire en Martinique et tirer avantage de l’avance en termes de technologies et de services liés aux ENR pour exporter l’expertise martiniquaise dans la zone : le « modèle » d’un schéma de production et de consommation d’électricité dans un contexte insulaire caribéen (riche en potentiel photovoltaïque notamment, doté également de possibilités pour la biomasse mais fragilisé par les contraintes climatiques – cyclones notamment – et géographiques – séismes) peut être exporté dans les autres territoires de la Caraïbe, qu’ils s’agissent de petites iles ou de zones isolées comme dans le Nord du Brésil.

Selon nos interlocuteurs, la Martinique a eu une avance technologique sur les autres pays de la région, avance qu’elle a perdue à mesure que la filière des ENR en Martinique était fragilisée. La production décentralisée d’énergie photovoltaïque et l’injection dans le réseau qui se font depuis peu en métropole étaient diffusées en Martinique dès 2003. Les travaux sur l’autoconsommation des bâtiments, la gestion des sites isolés ou la question de la revente au réseau sont des points traités de longue date par les entreprises martiniquaises. Les différentes mesures défavorables au secteur du photovoltaïque auraient freiné le traitement des questions de stockage des énergies intermittentes.

3. La Réunion

Les activités des entreprises du secteur de l’énergie, selon les chiffres 2009 de l’Agence régionale de développement (NEXA), concernent très peu l’export : seulement 12 % déclarent mener des activités à l’export. Il s’agit évidemment des plus grosses d’entres elles : Séchilienne Sidec, Tenesol, COREM, Vergnet, COREX, SAGEES, CIFER (Dijoux), COTEL, Alisea, etc.

L’export concerne essentiellement du savoir-faire et de l’ingénierie technique dans les domaines suivants :

• la biomasse bagasse et bagasse-charbon (Séchilienne Sidex) sur la Caraïbe et Maurice, avec une compétence et un savoir-faire local ; le projet de GDF Suez de faire un projet pilote de valorisation énergétique des déchets verts confirme le potentiel à l’export de cette filière ;

• les chauffe-eau solaires : le potentiel est considéré comme non négligeable ; Maurice encourage aujourd’hui le développement du CES, qui jusqu’à maintenant était d’origine chinoise essentiellement et de fiabilité moyenne ; l’Afrique du Sud fait de même ; les avantages comparatifs que propose La Réunion dans ce domaine tiennent essentiellement à la qualité de fabrication et à la sécurité des CES (normes) ; le coût de fabrication n’est toutefois pas compétitif face aux produits chinois à Maurice et en Afrique du Sud ; cela a conduit une entreprise comme le groupe Dijou à implanter directement sur place en Afrique du Sud une unité de fabrication afin de produire aux normes locales et aux prix locaux ;

• les fermes photovoltaïques adossées à des exploitations agricoles – concept Agri Energy d’Akuo – dans les Antilles avec des projets de développement sur l’ensemble des systèmes insulaires de la bande intertropicale ; cependant, cette exportation de services et d’ingénierie se fait principalement à partir du siège parisien de la société en valorisant le savoir-faire développé et acquis à La Réunion.

Le potentiel à l’export est considéré comme élevé, sans toutefois qu’il y ait encore des projets concrétisés, dans le domaine des biocarburants (Bio Algue Austral) et du concept d’autoconsommation chez les particuliers et les entreprises dans le domaine

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 62

du solaire (petite solution de production photovoltaïque avec des solutions de stockage). Les marchés visés sont notamment ceux des systèmes insulaires de la bande intertropicale ou des zones non (ou mal) interconnectés aux réseaux électriques. Par ailleurs, le marché est appelé à se développer particulièrement dans les pays émergents comme la Malaisie ou la Thaïlande (où des entreprises japonaises sont déjà présentes et proposent des solutions de petite production solaire couplée à du stockage). Les acteurs considèrent qu’il y a un réel potentiel à l’export, non pas des produits eux-mêmes, mais de l’ingénierie et du savoir-faire dans les îles de la zone.

Dans le domaine des smart grids, les quelques savoir-faire présents sont en phase de développement et s’adressent à des marchés plutôt matures avec une priorité donnée à l’accès au marché métropolitain auprès des grands opérateurs d’électricité.

Dans le domaine du véhicule électrique (VERT), des SWAC, et de l’ETM, le potentiel à l’export est évidemment important. Toutefois, il s’agit davantage de projets d’expérimentation/démonstration porté par de grands industriels nationaux, sans nécessairement le développement d’un savoir-faire local spécifique potentiellement exportable.

• concernant le SWAC, le potentiel pour la Réunion se situe davantage au niveau du savoir-faire en termes de valorisations qui pourront être faites autour des projets de SWAC ; l’exportation des systèmes de production de SWAC sera en fait assurée par les industriels porteurs des projets ;

• concernant le véhicule électrique, les résultats de cette expérimentation ont vocation à être utilisés sur les territoires ayant des caractéristiques similaires, notamment les Régions ultrapériphériques (RUP), mais aussi toutes les zones présentant une combinaison similaire d’attrait pour les véhicules électriques et de réseau fragile et/ou au mix électrique fortement carboné.

Un autre domaine potentiel d’export concerne l’exportation de l’expertise en matière de définition de stratégie de politique publique énergétique. Le projet réalisé par l’ARER sur Mayotte de définition de scénarii de développement des ENR en alternative aux énergies fossiles pourra être répliqué dans les îles voisines, particulièrement dans les territoires couverts par la programmation du FED (sur la future programmation 2014-2020, les enjeux de l’économie décarbonée devraient être un des piliers de l’intervention du FED) et avec l’avantage de pouvoir privilégier, dans la construction des mix énergétiques, des solutions développées à La Réunion avec des compétences et des savoir-faire locaux.

3.2.3 Avantages comparatifs identifiés actuellement et avantages comparatifs potentiels 3.2.3.1 La question de la compétitivité prix

L’exportation de matériels semble peu réaliste, du fait des coûts de production, et tant que des normes aussi rigoureuses que les normes françaises et européennes, ne sont pas adoptées dans les pays cibles, comme le montre l’exemple du groupe Dijou pour les chauffe-eau solaires avec la création d’une unité de production en Afrique du Sud.

En revanche, le problème ne se pose pas dans les mêmes termes pour l’exportation de savoir-faire, d’ingénierie et d’expertise.

3.2.3.2 Les avantages comparatifs existants

Les avantages comparatifs sont globalement les suivants :

• Le rôle de la commande publique : si ce rôle est surtout important pour le marché local, il permet aussi de développer un savoir-faire et une expertise susceptibles d’être exportés dans les pays de la bande intertropicale, et en particulier dans les pays insulaires ou les territoires continentaux isolés (ex. : dans le Nord du Brésil).

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 63

• Le soutien des politiques et dispositifs publics qui abaissent les coûts d’expérimentation, de développement et d’installation, et parfois aident à structurer la filière en mettant l’accent sur la R&D et l’innovation, comme avec Synergîle en Guadeloupe et Témergie à la Réunion.

• Un contexte insulaire, géographique et climatique propice au développement de nouvelles techniques et technologies de production d’ENR et de gestion des réseaux électriques. Les contraintes de l’intermittence sur la gestion du réseau électrique imposent le développement de solutions de stockage, une optimisation de la gestion des réseaux, et une diversité dans le mix énergétique au niveau de la production d’électricité. Par ailleurs les ressources naturelles locales servent de point d’appui pour diversifier le mix énergétique (exemple de la biomasse69). Toutefois, il ne faut pas surestimer cet avantage comparatif, dans la mesure où d’autres territoires ayant des niveaux de développement équivalent ou supérieur évoluent dans un contexte similaire. On peut notamment citer l’exemple d’Hawaï.

• Une présence ancienne de filières économiques sur les énergies renouvelables et la présence de grands opérateurs industriels nationaux et internationaux (EDF, GDF et dans une moindre mesure Vergnet, etc.) qui développent des projets d’expérimentation/démonstration de nouvelles technologies et procédés industriels. Les savoir-faire développés à l’occasion de ces expérimentations le sont essentiellement à l’intérieur de ces entreprises et de leurs filiales, tandis que l’irrigation du tissu économique et la mobilisation des capacités scientifiques locales demeurent limitées. Toutefois, des partenariats locaux existent, et ces projets participent de l’image du territoire au plan national et international pour en faire un territoire d’excellence énergétique. Par ailleurs, ils offrent des opportunités en termes de valorisation des retombées des projets, dans le champ de l’agriculture ou du bâtiment par exemple.

• Une part relativement élevée d’ENR dans la production d’électricité avec un mix énergétique déjà diversifié à la Réunion et en Guadeloupe, ce qui sert de démonstrateur des capacités du territoire et de ses entreprises à se diriger vers l’indépendance énergétique.

• L’existence de savoir-faire locaux sur des technologies et procédés industriels (biomasse, chauffe-eau, modèle d’autoconsommation en PV avec solution de stockage…) qui sont adaptés au milieu tropical et au contexte insulaire, et avec une intensité technologique facilement maîtrisable et peu chère à développer pour les pays émergents. A cela s’ajoute la possibilité de jouer sur la qualité française et européenne dans l’environnement régional, face à la concurrence de produits chinois ou indiens peu chers mais peu fiables (ex. : CES à Maurice).

3.2.3.3 Potentiel pour renforcer les avantages comparatifs existants ou développer de nouveaux avantages comparatifs

Le potentiel pour renforcer les avantages comparatifs existants réside à notre avis dans un renforcement de la capacité d’expertise locale par un approfondissement des relations entre les groupes nationaux présents sur place, les PME et les équipes de R&D locales ; même si l’on sait bien que les capacités de recherche se trouvent pour la plus grande partie en métropole (grands groupes, pôles de compétitivité), il y a une capacité d’expertise à renforcer au niveau de l’expérimentation et du développement technologique ; pour ce faire, Synergîle en Guadeloupe et Témergie à la Réunion offrent de précieux points d’appui.

De nouveaux avantages comparatifs pourraient être créés en assurant :

69 Cf. l’Etat des lieux réalisé par le Conseil régional en 2010 : Valorisation énergétique de la biomasse en Guadeloupe - État des lieux et perspectives.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 64

• un effort construit de marketing associant entreprises, recherche et pouvoirs publics pour promouvoir au niveau international tant le savoir-faire, l’expertise et l’ingénierie sur les technologies développées en matière d’ENR/MDE que l’expertise en matière de stratégie et politiques publiques visant à assurer l’indépendance énergétique de petits territoires insulaires ou de territoires continentaux isolés ;

• le développement de capacités de réponse à des appels d’offres dans ce domaine, qu’il s’agisse d’appels d’offres proprement nationaux, ou bien d’appels d’offres sur financements internationaux (FED, Banque mondiale, Banque interaméricaine de développement, Banque africaine de développement, etc.).

3.2.4 Handicaps et points faibles Les handicaps et faiblesses des ENR varient d’une source d’énergie à l’autre. Pour le photovoltaïque et l’éolien, le principal handicap est technologique et dépend des solutions à venir pour le stockage de l’énergie. Pour le photovoltaïque, le grand enjeu est la réglementation, les mesures incitatives et les dispositifs d’accompagnement : le cadre de l’énergie photovoltaïque, après avoir été porteur, est devenu tellement strict ces dernières années que nombre d’entreprises ont fait faillite.

Ces considérations générales mises à part, le principal point faible de la filière à l’heure actuelle concerne le fait que l’impact sur le territoire en termes de création d’entreprises, d’emploi et de valeur ajoutée demeure relativement limité et qu’il est reste de toute façon assez mal connu.

Au-delà de ces constats, on peut relever un certain nombre de handicaps et de points faibles plus ou moins spécifiques à chaque territoire.

1. Guadeloupe

La Guadeloupe est actuellement en limite de capacité de production électrique. Et les délestages ponctuels opérés par EDF rendent nécessaires aux yeux de tous une augmentation de la puissance disponible.

Cependant, plusieurs freins au développement de la filière, à la fois dans une logique de réponse à la demande locale et d’expansion géographique, peuvent être identifiés :

• le développement de la filière ENR repose sur une approche en mode projet dans plusieurs segments (biomasse, STEP Marine, éolien…) et relève davantage du domaine du potentiel que de la réalité économique traduite en termes de création d’entreprises, d’emplois et de création de valeur ajoutée ;

• la filière ENR est fortement dépendante des évolutions des prix de rachat de l’électricité par EDF ;

• dans le solaire et l’éolien, l’essentiel de l’activité est constituée par de la maintenance ; il n’y a pas de fabrication de matériels sur place ; toutefois des activités de recherche et développement sont conduites actuellement ;

• dans l’éolien :

− la présence de radars limite le développement (Radar de Météo France) ; malgré les études scientifiques en cours sur l’effet des éoliennes sur les mesures, les technologies de pales transparentes aux radars permettraient sans doute une bonne coexistence entre radars et éoliennes ;

− l'aménagement pose certains problèmes d’aménagement : besoin de support des panneaux plus solides qu'en métropole pour répondre aux normes parasismiques et anticycloniques (à l’inverse cela oblige à mettre en place des solutions innovantes, telles que les éoliennes rabattables dans le cas de passage d’un cyclone).

2. La Réunion

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 65

Différents freins au développement de la filière, à la fois dans une logique de réponse à la demande locale et d’expansion géographique, peuvent être identifiés :

• La filière ENR dans son ensemble reste fragmentée, malgré la présence du cluster TEMERGIE. Ainsi :

− Le niveau de coopération et de mutualisation interentreprises et entre les entreprises et les acteurs de la recherche est insuffisant. Les entreprises restent peu accompagnées sur la veille marché et technologique, la participation à des salons en Métropole, la formation, etc.

− Dans le secteur de la biomasse, qui est un gisement à fort potentiel identifié par l’ensemble des acteurs rencontrés, le manque de structuration de la filière de collecte, tri et prétraitement constitue un verrou pour développer de futurs projets biomasse

Sur de nombreux segments, le développement de la filière se fait aujourd’hui en mode projet et ressort davantage du domaine du potentiel que de la réalité économique traduite en termes de création d’entreprises, d’emplois et de création de valeur ajoutée. C’est notamment le cas des énergies marines (énergie thermique des mers, énergie de la houle, SWAC…) qui pour la plupart d’entre elles sont encore en phase de développement technologique, pour laquelle la Réunion peut servir de terrain d’expérimentation puis de démonstration.

• La production de valeur ajoutée sur le territoire par la filière dans son ensemble demeure encore aujourd’hui faible :

− Dans le solaire et l’éolien, l’essentiel de l’activité est constitué par de la maintenance. Il n’y a pas de production sur place. Toutefois des activités de recherche et développement sont conduites actuellement à l’Université (laboratoires Piment et L2P) et dans quelques PME régionales autour notamment de la prévision de la production d’énergie solaire (Réuniwatt), des solutions de stockage individuel adossées à des petits systèmes de production (Corex, …), et des solutions de gestion des réseaux (smart grids) (Teéo, …).

− Dans le domaine des énergies marines, les projets sont à forte intensité capitalistique nécessitant un portage par de grands acteurs industriels qui maîtrisent en interne le développement des technologies, sans que cela profite nécessairement au développement des PME locales du secteur.

3.2.5 Evaluation du rôle joué par les politiques publiques et les dispositifs d’accompagnement Les acteurs, en particulier les entreprises interrogées, font ressortir un certain nombre de points critiques sur le rôle d’accompagnement joué par les politiques publiques dans le domaine :

• Les cadres règlementaires et financiers nationaux ne correspondent pas toujours aux spécificités des DOM. C’est le cas notamment du tarif de rachat de l’électricité fixé nationalement sans adaptation aux contraintes insulaires, ou des projets démonstrateurs dans le cadre des investissements d’avenir, qui ne donnent pas de manière spécifique une place aux DOM.

− Il y aurait lieu par exemple de développer une politique régionale d’expérimentation permettant de tirer l’offre de solutions et de conforter le développement d’un marché local.

− Néanmoins, une réglementation spécifique à l’outre-mer, en matière de thermique, acoustique et aération, la RTAA-DOM, est parue le 17 avril 2009 : pour le thermique, elle impose notamment l’installation de chauffe-eaux solaires à hauteur de 50 % au moins des besoins.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 66

• Les projets en cours de développement réclament des efforts financiers conséquents de la part du secteur public ; or, ces projets sont parfois dans une logique de concurrence, sans qu’il y ait une très forte visibilité sur les filières prioritaires à soutenir de la part des acteurs publics.

• Le financement des fonds propres des entreprises pour soutenir leur projet de développement et de diversification apparaît en général insuffisant, avec un secteur bancaire considéré comme ne jouant pas le jeu. Ce point est particulièrement ressenti par les acteurs lors de la phase de pré-commercialisation ou pré-industrialisation, comportant une part de risque élevé.

• On dénote un manque de visibilité sur la stratégie à l’international poursuivie par les acteurs publics du développement économique : pays cibles, secteurs cibles accompagnés, animation de l’international en région, etc.

En Guadeloupe, on peut également citer les éléments spécifiques suivants :

• La loi N°2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer, (LODEOM) donne désormais la compétence « Réglementation thermique dans le bâtiment, économies d’énergie » à la Région Guadeloupe (utilisation de l’article 73 de la Constitution). Cette innovation unique en France doit permettre d’adapter plus facilement les normes à la réalité de la Guadeloupe dans un souci d’exemplarité ; le 27 juillet 2011 a été renouvelée l’habilitation en matière d'énergie de la Région Guadeloupe, seule collectivité de France à avoir mis en œuvre la faculté de délibérer dans ce domaine de la loi.

• La région a adopté en juin 2008, le PRERURE (Plan énergétique régional pluriannuel de prospection et d’exploitation des énergies renouvelables (ENR) et d’utilisation rationnelle de l’énergie, qui fixe comme ambition pour 2020 un objectif d’utilisation de 50 % d’énergies en ENR. Le PRERURE repose sur les trois orientations fondamentales suivantes :

− le rééquilibrage du soutien financier de la région en faveur de la maîtrise de l’énergie (MDE), alors que jusqu’à présent les énergies renouvelables ont bénéficié de la grande majorité des aides régionales (photovoltaïque notamment) ;

− la combinaison des outils d’intervention en faveur de l’efficacité énergétique ;

− le renforcement des partenariats (Région - ADEME - EDF).

• Par ailleurs, les pouvoirs publics, soucieux du développement de l’énergie éolienne et photovoltaïque, ont mis en place depuis quelques années des dispositifs de soutien sous forme de tarifs de rachat garantissant l’équilibre économique de la production, et, plus récemment, d’appels d’offres (cas de l’éolien en mer et du photovoltaïque de puissance). Cependant des incertitudes pèsent sur les évolutions des tarifs de rachat.

3.2.6 La filière considérée est-elle une filière d’avenir ? Dans quelle mesure ? La filière ENR/MDE dans son ensemble est une filière d’avenir pour les DOM dans la mesure où elle répond à une demande locale pour assurer l’autonomie et la sécurité énergétique du territoire. Tous les grands projets en cours de développement portés par les grands industriels visent bien à changer profondément la nature du mix énergétique actuel, en s’affranchissant de la problématique des sources intermittentes d’énergie.

Le développement de la filière est un enjeu de court et de moyen terme :

• à court terme, il ‘agit de développer l’offre régionale, consolider la filière et mettre les acteurs en position d’atteindre les objectifs fixés en termes de part des ENR dans le mix énergétique ;

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 67

• à plus long terme, il s’agit d’envisager les perspectives d’export de savoir-faire, d’ingénierie et d’expertise.

Le développement de démonstrateurs est un enjeu clé pour disposer d’exemples concrets à l’international (stratégie d’Aérowatt, Vergnet, etc.).

Pour les énergies intermittentes comme l’éolien, l’ensemble « éolien + stockage + prévisions » peut très probablement aussi trouver un marché à l’exportation, et notamment dans les îles. Les futurs projets promus par des développeurs français ne se feront pas exclusivement avec des fabricants français, mais pourront aussi utiliser des éoliennes de fabricants étrangers. Il n’en reste pas moins que le développement de l’éolien dans les DOM favorise incontestablement le maintien et le développement d’une filière française de l’éolien terrestre en zones cycloniques non interconnectées, puisque la plupart des projets y sont réalisés aujourd’hui par des sociétés françaises, avec des fabricants français.

1. Guadeloupe

Pour aller au-delà de 30 %70 d’ENR dans le mix énergétique, les orientations pour l’avenir pourraient être les suivantes :

• développer les ENR stables à puissance garantie – biomasse, géothermie, hydraulique, énergie des mers – sachant que :

− la production des ENR dépend de la source d’énergie (géothermie : 8 000 h par an ; hydraulique : de 4 à 8 000 h par an selon les sites ; bagasse : 2 à 4 000 heures par an, dans la saison de coupe de la canne à sucre ; éolien : 2 200 h par an ; Photovoltaïque : 1 500 h par an) ;

− 10MW de géothermie sont équivalents à 36 MW d’éolien et 53MW de photovoltaïque ;

• faire participer toutes les ENR aux services systèmes à travers les réglages de fréquence et de tension ;

• stocker les ENR intermittentes sachant que les rendements varient d’une solution à une autre (batteries : rendement de 70 à 80 % ; STEP marine : rendement de 70 à 80 % ; air comprimé : rendement de 50 % ; pile à combustible : rendement de 30 %) ; un moyen de stockage est en effet nécessaire car les énergies renouvelables en grande quantité engendrent des discontinuités non acceptables sur le réseau ;

• adapter la charge à travers un asservissement de certains usages à la production et l’utilisation de compteurs communicants ;

• poursuivre les travaux de R&D, en partenariat avec les laboratoires et les producteurs.

2. Martinique

La production est encore faible alors que les enjeux environnementaux et économiques sont grands, les objectifs politiques régionaux, nationaux et européens sont ambitieux et que le potentiel de développement des ENR est considérable. Il y a donc de fortes marges de développement.

70 La limite des 30% est intégrée dans l’arrêté ministériel du 23 avril 2008 relatif aux prescriptions techniques de conception et de fonctionnement pour le raccordement à un réseau public de distribution d’électricité : « Toute installation de production visée par les dispositions du I de l’article 19 et mettant en œuvre de l’énergie fatale à caractère aléatoire telles les fermes éoliennes et les installations photovoltaïques peut être déconnectée du réseau public de distribution d’électricité à la demande du gestionnaire de ce réseau lorsque ce dernier constate que la somme des puissances actives injectées par de telles installations atteint 30 % de la puissance active totale transitant sur le réseau. Les circonstances dans lesquelles ces déconnections peuvent être demandées sont précisées dans la convention de raccordement et les modalités selon lesquelles elles sont effectuées le sont dans la convention d’exploitation. »

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 68

Le soutien public attendu par les entreprises porte notamment sur les mesures réglementaires relatives aux ENR (arbitrage entre la protection de la SAU et possibilité d’installer des fermes photovoltaïques par exemple, tarif de rachat de l’électricité avec des solutions techniques adaptées aux conditions climatiques de Martinique, etc.), les mesures incitatives pour les particuliers (cf. aide pour l’installation de panneaux photovoltaïque ou chauffe-eaux solaires) ou la stimulation de la commande publique (cf. équipement des lycées).

L’habilitation législative, comme en Guadeloupe (voir ci-dessus § 3.2.8) est, de l’avis de tous, un élément essentiel du développement des ENR car il permettra à la Martinique de répondre en fonction de considérations et d’enjeux locaux (et non sur la base d’un cadre national, fort peu adapté aux spécificités martiniquaises : non-interconnexion du réseau, coût de l’électricité mais également potentiel naturel des ENR à développer).

Encadré 7 Le photovoltaïque en Martinique : cas de l’entreprise Solarélectric

Solarélectric est une entreprise « fabricant et installateur de solutions solaires » créée en 2002 et qui s’est développée depuis 2003 dans les DOM. Ses métiers sont la fabrication de panneaux solaires, la conception d’installations « clés en main », la production de kits résidentiels complets pour les installateurs, la mise en œuvre de grands projets défiscalisants dans les DOM.

L’entreprise s’est développée dans les DOM à la fois sur la base du potentiel naturel de ces territoires et sur les contraintes spécifiques des systèmes d’alimentation en électricité (non-interconnexion au réseau et nécessité de développer des systèmes pour des petits territoires). Elle a bénéficié également de dispositifs d’aides spécifiques (défiscalisation).

L’entreprise a ainsi connu au cours des années 2000 un grand essor qui lui a permis de consolider et développer ses activités, notamment de R&D et de travailler aux solutions de stockage d’une énergie intermittente comme le solaire.

Différents obstacles sont cependant venus entraver cette marche (fin de la défiscalisation, baisse du prix de rachat de l’électricité, moratoire sur les installations, etc.). Si Solarélectric a pu maintenir son activité (notamment grâce à des activités connexes et à des projets financés via le FEDER ou l’ADEME), la grande majorité des autres entreprises du secteur, des installateurs avant tout, ont fait faillite. Il reste à ce jour en Martinique deux entreprises de taille dans le secteur de l’énergie photovoltaïque (contre 22 en 2008).

Les nouvelles dispositions régionales prévues sur les énergies renouvelables (habilitation législative, agence martiniquaise de l’énergie, société d’économie mixte, etc.), ainsi que le travail d’innovation sur les techniques, les produits et les services, devraient permettre à l’entreprise de retrouver de son niveau d’activité.

3. La Réunion

L’enjeu pour la Réunion est d’assortir les objectifs de sécurité et d’autonomie énergétique d’une ambition et d’une réalité économique, c'est-à-dire d’être en capacité de développer des compétences, des savoir-faire et des emplois locaux et de la valeur ajoutée produite localement, et cela de manière pérenne. Les grands projets (ETM, SWAC, PEGASE, PELAMIS, …) en cours fourniront des heures de travail pour le secteur du BTP lors de la réalisation des chantiers, et quelques-unes pour assurer le contrôle et la maintenance des installations. Sauf à mieux arrimer les PME locales et les compétences scientifiques locales, le développement de savoir-faire locaux et leur maintien sur place sont plus hypothétiques. Les secteurs de la biomasse, des chauffe-eau solaires (avec l’obligation d’équiper les nouvelles constructions et logements collectifs) et du petit photovoltaïque à usage individuel sur un modèle d’autoconsommation sont sans doute à court terme davantage porteurs de savoir-faire, de création d’emplois et de valeur ajoutée sur le territoire.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 69

Dans une optique d’expansion régionale, la filière ENR est également d’avenir mais sous l’angle exclusivement d’exportation de services et d’ingénierie, et d’expertise. Pour cela, le développement de démonstrateurs à la Réunion est un enjeu clé pour disposer d’exemples concrets à l’international. C’est la voie qu’ont emprunté des sociétés comme Akuo, Vergnet, Séchilienne Sidec qui s’appuient sur les projets développés dans les îles françaises pour entamer une stratégie d’expansion à l’international.

• Segments ENR • Export

• Biomasse • Potentiel d’exportation de l’ingénierie liée à la mise en place de centrales bagasse, bagasse/charbon, et de centrales de valorisation des déchets verts (projet en cours sur Maurice de la Séchilienne Sidec)

• Exploration possible de filières d’importation de déchets verts

• Biocarburants (algues)

• Possibilité, à partir du site réunionnais, d’implanter des unités de production d’algues dans des contextes climatiques similaires

• Énergie des mers (SWAC, ETM, houle…)

• Possibilité d’exporter l’ingénierie liée à la valorisation des eaux millénaires dans le cadre du projet SWAC (aquaculture, cosmétique, thermalisme…)….sous réserve de structurer le volet valorisation des retombées des SWAC à la Réunion

• L’export des procédés SWAC, PELAMIS, ETM se fera par les grands groupes industriels directement sans nécessairement de retombées pour la Réunion.

• Éolien • Pas de savoir-faire particulier à La Réunion. VERGNET est déjà largement présent à l’export

• Photovoltaïque • Potentiel d’export d’ingénierie et de services sur les approches de production délocalisées pour l’autoconsommation

• Smart grids • Potentiel d’export à moyen terme, une fois les technologies maturées, et principalement orienté vers les pays matures, la Métropole en particulier.

Encadré 8 Une start up réunionnaise : Réuniwatt

Réuniwatt est une jeune start-up réunionnaise qui développe un système de prévision de production d’électricité solaire adapté aux zones insulaires non interconnectées, permettant de gérer les intermittences de la production d’électricité à partir de sources solaires.

L’entreprise a été lauréate du concours des entreprises innovantes du ministère de la Recherche. Elle a bénéficié de l’Incubateur régional et accueille actuellement un doctorant pour une thèse CIFRE. Elle travaille étroitement avec les chercheurs du laboratoire PIMENT de l’Université.

Elle compte aujourd’hui 6 salariés, contre 2 il y a un an, et un VIE à Maurice accompagné par le Conseil régional.

Le marché visé est d’abord celui des opérateurs photovoltaïques en milieu insulaire (par exemple des producteurs comme Akuo Energy, Séchilienne Sidec, etc.). Le marché local réunionnais et le marché des autres RUP et PTOM sont visés en premier lieu. Un troisième marché visé est celui des opérateurs électriques et de réseau (RTE, ERDF…). Un dernier marché est celui des opérateurs de smart grids pour proposer des solutions intégrées de stockage avec des techniques de prédiction des pointes de production.

Encadré 9 Le marché émergent de l’analyse des dépenses énergétiques des bâtiments

Teéo (Télégestion Efficacité Énergétique Optimisée)

Teéo a mis au point un logiciel de mesure des dépenses énergétiques d'un bâtiment, et veut saisir l'opportunité des nouvelles normes pour s'imposer en métropole.

Implantée depuis mars 2011 dans le quartier Lyon Confluence et depuis le début de l'année à Paris, la société entend se positionner sur le marché émergent de l'analyse

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 70

des dépenses énergétiques des bâtiments. Née à La Réunion en 2008, l'entreprise appartient au groupe local Convergence (électricité industrielle),

Le logiciel développé se connecte sur les compteurs d'eau et d'électricité ou de gaz et centralise ces données de consommation, converties en euros. Les mesures sont accessibles via Internet, en temps réel. Les anomalies sont rapidement détectées : climatiseurs qui fonctionnent inutilement, fuites d'eau...

La solution est commercialisée sous forme d'abonnement annuel, le produit a déjà séduit diverses administrations et entreprises industrielles insulaires.

L’entreprise compte aujourd’hui 5 salariés pour un chiffre d'affaires de 750000 euros. Le marché est porteur avec la nouvelle norme ISO 50001 qui nécessite des mesures de performance énergétique.

L’entreprise entend à terme rester indépendante des fabricants de matériels électriques (de type Schneider Electric) pour se positionner comme « tiers de confiance » en comptabilité énergétique.

3.3 La filière Tourisme / écotourisme

L’analyse de la filière tourisme a été retenue pour la Réunion, tandis que, pour la Guadeloupe et la Guyane, l’analyse a été plus spécifiquement focalisée sur l’éco-tourisme. Néanmoins, l’analyse de l’écotourisme renvoie à certaines problématiques communes à l’ensemble de la filière tourisme, comme le transport aérien ou encore la concurrence de pays à coûts du travail inférieurs.

Notre approche consiste à considérer le tourisme comme une activité exportatrice de services.

Contrairement à ce que l’on vient de voir pour la filière ENR/MDE, les contextes sont très différents suivant les DOM étudiés, Guadeloupe, Guyane et la Réunion.

En Guadeloupe, la filière s’appuie sur une réelle tradition, mais elle a subi des à-coups considérables dans son développement et elle est confrontée à la concurrence des îles de la Caraïbe qui sont à même d’offrir des prix plus attractifs (ex. : la République Dominicaine) ou des prestations haut de gamme. Dans ce contexte, l’éco-tourisme constitue une niche qui est en train d’être explorée par les acteurs de la filière.

La situation de la Guyane est sensiblement différente, dans la mesure où le tourisme n’a véritablement démarré que dans les années 1980 et où la filière n’est pas structurée, dans un environnement régional où le tourisme reste une activité peu importante (nord du Brésil, Suriname, Guyana71).

Enfin, la filière tourisme à la Réunion est caractérisée par l’importance particulière du tourisme affinitaire (même si le tourisme affinitaire joue un rôle significatif aussi dans les deux autres DOM) et du tourisme domestique, ainsi que par la concurrence de Maurice qui bénéficie de coûts inférieurs et a développé avec succès une stratégie de positionnement sur le moyen-haut de gamme (les Seychelles étant sur le très haut de gamme).

3.3.1 Périmètre de la filière 3.3.1.1 Définition de la filière

La chaîne de la valeur de la filière tourisme se compose d’une grande diversité d’acteurs autour de différentes fonctions et acteurs :

• Hébergement

• Restauration

71 La situation est un peu différente pour le Venezuela, notamment avec le site de Canaïma et les tepuys.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 71

• Transport

• Agences de voyage et réceptifs

• Tour opérateurs

• Locations de voiture

• Entreprises de loisirs et commerce plus largement

• Gestionnaires de sites naturels (parcs par exemple)

En règle générale, la quasi-totalité des acteurs est présente sur place à l’exception des tours opérateurs (basés en métropole essentiellement).

Il est utile de bien cerner ce que l’on entend par écotourisme. Le terme a été fondé par l'archéologue Hector Caballos-Lascurain en 1983. Même si la définition de la Société Internationale de l'Écotourisme (The International Ecotourism Society - TIES)72 fait référence chez les professionnels, il n'existe pas de charte officielle ou de marque déposée sur le terme d’« écotourisme », et le terme peut donc être librement utilisé par tous les acteurs de l'industrie touristique, parfois à mauvais escient.

L'écotourisme est défini par la TIES comme « un voyage responsable dans des zones naturelles qui conserve le milieu et soutient le bien-être des populations locales » (TIES, 1990).73 Il rassemble toutes les formes de tourisme axées sur la nature (observations..) et les cultures traditionnelles qui règnent dans les zones naturelles. Il comporte une part d’éducation et d’interprétation de l’environnement (faune, flore…).

L’écotourisme repose sur quatre principes :

• la valorisation de la préservation et de la protection de l’environnement et de la biodiversité en minimisant les impacts ;

• la contribution équitable au développement économique local en améliorant les opportunités d’emploi local ;

• la prise en compte des besoins des communautés hôtes en recherchant une meilleure compréhension de la nature, de la société et de la culture locale ;

• la promotion d’une expression touristique authentique et responsable.

L'écotourisme (ou agritourisme, tourisme vert, tourisme sportif…) est une forme de tourisme en expansion, qui vise à réduire ou annuler les dégâts écologiques lors du voyage. C'est un tourisme proche de la nature, axé sur des activités respectueuses de l'environnement, où le touriste est logé dans des hébergements responsables (ecolodges, chez l'habitant, gîtes, etc.) et avec une philosophie stricte de préservation de l'écosystème.74

L’écotourisme se pratique dans la nature, en petits groupes au sein de petites structures, alors que le tourisme durable est une notion plus large qui veut dire « développement durable du tourisme », et qui concerne également les hôtels dans les villes ou les compagnies de transport par exemple.

L’estimation des marchés repose notamment sur la capacité à recenser le nombre de groupe accueillis par an dans la région, sachant que les groupes d’écotouristes restent généralement plus du double de temps que d’autres touristes à l’intérieur du territoire, dépensent plus et sont composés de 2 à 3 personnes en moyenne.

72 La Société Internationale d’Écotourisme est le réseau mondial de l’écotourisme qui regroupe plus de 90 pays et des affiliations avec plus de 40 associations régionales et nationales d’écotourisme.

73 GRENELLE DE L’ENVIRONNEMENT - Comité de filière Tourisme, Rapport du Comité national de pilotage du plan de mobilisation des territoires et des filières sur le développement des métiers de la croissance verte, 2009.

74 http://www.ecotourisme.info/

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 72

La filière éco-tourisme s’inscrit complètement dans la stratégie de la Guadeloupe de ne pas développer le tourisme de masse, notamment face aux différentiels de prix des territoires voisins (Dominique, Cuba…), mais plutôt de s’orienter vers un accueil haut de gamme avec des services plus lisibles et à plus fortes valeur ajoutée. Concernant la Guyane, cette filière apparaît comme la plus à même de développer les activités touristiques sur le territoire, de par les caractéristiques bien particulières qu’il offre.

3.3.1.2 Liens éventuels avec d’autres filières

Le tourisme génère d’importants effets directs et indirects sur les autres branches de l’économie locale (commerce, transport, services,…) en termes de valeur ajoutée et de créations d’emplois.

Deux grands secteurs apparaissent directement impactés par le développement de l’écotourisme :

• l’agriculture, la pêche et l’agroalimentaire : les produits agricoles et issus de l’agro-transformation peuvent fournir, comme on l’a indiqué en traitant de la filière agroalimentaire, un point d’appui marketing de la destination touristique (tourisme gastronomique), mais également trouver de nouveaux débouchés auprès de la clientèle touristique qui génère de nouveaux revenus ;

• le bâtiment et la construction, et en particulier le bâti tropical durable, peuvent également être impactés par l’activité touristique, que cela soit en termes de construction d’infrastructures touristiques, ou bien de positionnement marketing de l’offre touristique (concept global de tourisme vert ou de tourisme respectueux de l’environnement).

3.3.1.3 Entreprises rencontrées

1. Guadeloupe

• acteurs institutionnels : SGAR, Conseil Régional, DIECCTE, DRRT

• organisations représentatives de la filière : le Parc national, l’association Guadeloupéenne d'Écotourisme (A.G.E.) et le Comité du Tourisme des îles de Guadeloupe

• entreprises : Gîte Mabouya, Caraïb'Bay Hôtel, Anse Caraïbe plongée

2. Guyane

Nous avons mené de manière croisée l’analyse de la filière tourisme et l’évaluation de la pertinence du positionnement éco-touristique.

L’étude s’est appuyée sur la rencontre de deux niveaux d’acteurs :

• Des acteurs ayant des activités structurantes de la filière :

− CTG (Comité du Tourisme de Guyane, en charge de la promotion et du marketing de la destination Guyane)

− ATOUT France (Agence Nationale de développement touristique de la France)

− Chambre de Commerce et d’Industrie (CCIG : rencontre avec le responsable du pôle tourisme, chargé de l’appui opérationnel des entreprises)

− Le Parc naturel régional (PNRG : établissement public participant à la valorisation des espaces ruraux, principalement sur la bande littoral)

− Compagnie des Guides de Guyane (association) : la compagnie des guides de Guyane a un positionnement structurant fort du secteur en travaillant notamment sur un large volet professionnalisation ; elle peut constituer un exemple pour le reste de la filière.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 73

• Certains acteurs participant à l’essor de la démarche nature/durable/éco-touristique :

− Point Information touristique de Cayenne : le futur Office du Tourisme de la « ville porte » de la Guyane.

− AMAZONIE DÉCOUVERTE (ecolodge) : ce lodge durable s’est installé à Roura ; il envisage le développement d’une offre basée sur la découverte du fleuve

− GUYA'RANDO (guide de Guyane) : cette société avait initialement un positionnement traditionnel (randonnée en forêt) ; elle innove aujourd’hui en développant des offres culturelles (histoire) dans Cayenne

− JAL Voyages (agence de voyage) : JAL Voyages est un acteur historique de l’éco-tourisme Guyanais ; elle propose en effet depuis plus de 25 ans une offre éco-touristique reconnue nationalement

− KWATA (association) : Kwata agit sur pour la sensibilisation et l’éducation du grand public au thème de la biodiversité ; l’association est notamment connue pour ses activités en lien avec les tortues marines

3. La Réunion :

• acteurs institutionnels : AFD, SGAR, Conseil Régional, IRT (Ile de la Réunion Tourisme)

• Club du tourisme : association des professionnels du tourisme réunionnais

• entreprises : Bourbon Voyages, Hôtel & Co

3.3.1.4 Données statistiques disponibles

1. Guadeloupe

Les données chiffrées sur les entreprises de la filière éco-tourisme sont difficilement accessibles. La nomenclature INSEE ou Eurostat des activités économiques n’identifie pas l’éco-tourisme comme secteur ou sous-secteur d’activité, de sorte que la classification des emplois et des formations qui leur sont liés souffrent d’imprécisions. Les indicateurs habituellement suivis par l’INSEE sont les suivants : taux d'occupation ; nombre de nuitées ; durée moyenne du séjour ; part des nuitées étrangères ; nombre d'hôtels ouverts selon le nombre d'étoiles ; nombre mensuel de chambres offertes. L'enquête « fréquentation hôtelière » est réalisée chaque mois auprès de l'ensemble des hôtels homologués de la région. Les indicateurs concernent les hôtels75 hors Iles du Nord.

Les chiffres clés de 2013 de la fréquentation touristique en Guadeloupe en 2011-2012 sont les suivants :

• 417 000 touristes de séjour ont été accueillis en 2011 (soit une hausse de 6,5 % par rapport à 2010 et des données comparables à celles de 2008) ;

• 5,3 millions de nuitées ont été recensées en 2011 (soit une hausse de 3,6 % par rapport à 2010, mais ce chiffre est inférieur aux résultats des années 2006 à 2008) ;

• alors que les nuitées hôtel en 2006 et 2007 représentaient près de la moitié des nuitées, leur part dans le total des nuitées est en constante diminution au profit de celles dans les gîtes et locations ; ce résultat est a priori en ligne avec la politique

75 Les hôtels sont classés ou homologués tourisme par arrêté préfectoral après délibération de la commission départementale d'action touristique. Ils sont classés en six catégories, de 0 à 5 étoiles, en fonction de leur confort, de leur équipement et de leurs services. Les critères de classement sont stricts et ont été définis par arrêté du 14 février 1986. Pour être qualifié d'« hôtel de tourisme », un établissement hôtelier doit comporter au moins 5 chambres.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 74

régionale d’aide à la construction et à la montée en gamme des gites et meublés76 ;

• la provenance des touristes sur les marchés France, Allemagne et Suisse ont respectivement augmenté entre 2011 et 2012 de 4 %, 44 % et 47 %, tandis que le marché italien s’est effondré de 46 % ; le marché extérieur a progressé au total de 3 % ;

• la dépense totale est estimée à 419 millions d’euros en 2011 (contre 238 millions d’euros en 2006), avec une dépense moyenne de 2058 euros par ménage et par séjour et de 1000 euros par personne et par séjour ;

• la durée moyenne des séjours est de 13 jours et 46 % des touristes viennent en Guadeloupe pour la première fois.

La fréquentation des meublés de tourisme pose des problèmes plus complexes que celle des hôtels, car ils sont beaucoup plus nombreux et ils sont peu souvent classés et labélisés. Le Comité du tourisme effectue actuellement un travail dans ce domaine, car ils constituent le principal vecteur de la progression du tourisme en Guadeloupe.

Globalement, on assiste à une reprise après la crise de 2008-2009, également portée par les troubles induits par les « révolutions arabes », mais avec une tendance marquée en faveur des gîtes et locations.

A défaut de données spécifiques à l’écotourisme pour les raisons indiquées plus haut, l’analyse de l'annuaire http://ecotourisme.lespages.fr, qui est un service de Voyageons-autrement.com et des sites http://www.guadeloupe-ecotourisme.fr et http://www.ecotourisme-guadeloupe.org, permet d’identifier une quarantaine de structures présentes sur le territoire dans l’écotourisme.

Les structures de la filière écotourisme concernent l’hébergement, les activités culturelles et sportives. Elles sont géographiquement réparties de la manière suivante :

• Anse Bertrand : trois structures (Le Domaine de Belle Plaine, Le Tapeur, Les Attelages du Comté) ;

• Bouillante : six structures (Ecobalades Guadeloupe, Cases Créoles de Gwo Caillou, Habitation Massieux, Rêve et Alizé, Canopée) ;

• Baie Mahaut : une structure (Jacky Action Sport) ;

• Capesterre Belle Eau : une structure (Le Jardin de Cantamerle) ;

• Deshaies : deux structures (Caraïb'Bay Hôtel77, Les bungalows Arsenault) ;

• Goyave : une structure (Le jardin d'eau) ;

• Petit Bourg : une structure (Palmaretum) ;

• Pointe à Pitre : une structure (Nature Expérience) ;

• Pointe Noire : 10 structures (Le Parc aux Orchidées, Le Parc des Mamelles, Anse Caraïbe plongée, Gite Beaugendre, KAZ Créole, Rocher Caraïbe, Parc aquacole, Rêve de sable, Anse Caraïbe plongée78, Nautica plongée) ;

• Port Louis : une structure (Eden Plongée) ;

• Saint Claude : deux structures (Vert Intense, Zion Trek) ;

• Sainte Rose : quatre structures (La Créolina, Nico Excursion, Alavama, Habitation Matouba) ;

76 Parallèlement l’hôtellerie est à un croisement : bien que des efforts de qualité aient été accomplis, il devient nécessaire et impératif qu’elle se renforce en quantité et en qualité.

77 Encadré . 78 Cf. Encadré .

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 75

• Saint François : une structure (Esprit caraïbe) ;

• Trois Rivières : deux structures (Gites "an-TIKAZ-la", Le parc archéologique des roches gravées) ;

• Vieux habitants : quatre structures (Domaine de Vanibel, Bungalows Les Cocotiers, Objectif plongée, La Grivelière) ;

• Terre de Bas les saintes : une structure (Rêve de Robinson).

2. Guyane

Le tourisme guyanais a fait ses débuts quantifiables dans les années 1980. C’est aujourd’hui une filière établie qui accueille annuellement environ 110 000 visiteurs (chiffre 2009), représente la 2ème source de richesse du territoire (9% du PIB) 79 et contribue à hauteur de 26% à l’effort d’exportation80. Les estimations de l’effet sur l’emploi de cette filière établissent une participation à hauteur de 6 000 postes qui se répartissent dans divers secteurs et des structures de tailles très variables, dont une majorité de micro-entreprises et de TPE. Il est à noter que la filière touristique guyanaise n’a pas de structure, et qu’un nombre non négligeable81 d’acteurs travaille dans l’économie parallèle.

Selon les données disponibles auprès de la CCIG, la fréquentation de la Guyane est en croissance constante depuis 2005. Même si le flux touristique a connu une légère contraction conjoncturelle en 2009 avec 110 000 visiteurs, cette contraction est survenue après un pic historique de plus de 140 000 visiteurs en 2007. Les chiffres pour 2011 ne sont pas connus, mais tout laisse penser que le tourisme récepteur dispose encore d’un potentiel de valorisation sur les segments des touristes affinitaires, d’agrément et les croisiéristes82. En complément de ce tourisme entrant, le marché local (agrément et affaires) est également important, car il représente environ 20 % de l’activité de la filière. Avec une croissance démographique annuelle de 4%, la valeur absolue de ce flux d’activité devrait croître quasi-mécaniquement.

Tout comme en Guadeloupe, et pour les mêmes raisons, on ne dispose pas de données spécifiques à la filière écotourisme.

3. La Réunion

Sur une longue période, les chiffres de la fréquentation touristique à La Réunion marquent une progression en dents de scie avec une stagnation entre 2000 et 2005, un pic de baisse en 2006 et un pic de hausse en 2011. En 2011, La Réunion accueillait 471 268 touristes extérieurs, nouveau record de la destination. La croissance dans les activités touristiques a contribué à la reprise de l’activité économique en 2011 avec un montant global de la dépense évalué à 388,7 M€, sur l’ensemble de l’année. Cela venait après 3 années difficiles, consécutives à la crise sanitaire du chikungunya.

En 2012, suite à la crise économique, la fréquentation est en diminution pour s’établir aux alentours de 446 500 touristes83. Cette dynamique heurtée marque la forte dépendance du tourisme réunionnais vis-à-vis de la métropole.

Sur la même année 2012, le tourisme au plan mondial a connu une progression de 4%. A Maurice, une destination touristique en concurrence avec la Réunion (dans une certaine mesure au moins), la situation est restée stable (+0,1%), la diminution forte des touristes français de métropole (-13%) ayant été compensée par l’accroissement de

79 Selon le travail de retraitement de données réalisé par ATOUT France en Guyane 80 Le tourisme orienté vers la Métropole et le Antilles est considéré comme une activité d’exportation. 81 Mais non quantifiable. 82 En favorisant la famille et de manière plus modérée les groupes. 83 Le Tourisme à La Réunion en 2012, Insee Partenaires, avril 2013 (INSEE/Observatoire du Tourisme de

La Réunion).

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 76

touristes réunionnais et la clientèle des pays émergents (+59% de Russie, +38% de Chine).

Source : Le Tourisme à La Réunion en 2012, Insee Partenaires, avril 2013

Le tourisme à la Réunion est principalement affinitaire (visite famille, amis) depuis 2004. Le tourisme d’agrément représente environ 40% des flux (contre 65% en Guadeloupe), et il marque le pas en 2012. Le tourisme d’affaires représente environ 10% en moyenne.

Source : Le Tourisme à La Réunion en 2012, Insee Partenaires, avril 2013

Le mode d’hébergement principal, par suite de la diminution tendancielle du tourisme d’agrément, est aujourd’hui la famille et les amis loin devant les hôtels.

Le secteur de l’hôtellerie et de l’hébergement a été durement affecté par la crise du chikungunya, celle-ci ayant fait reculer la fréquentation des hôtels de 40%, entraînant des fermetures temporaires ou définitives d’établissement, et la reconversion d’hôtels en résidences hôtelières. La conséquence en est qu’aujourd’hui l’hôtellerie classée compte 4500 lits contre 5900 lits en 2006, 50 hôtels contre une soixantaine avant la crise. Cela dit, la faible capacité hôtelière de la Réunion était déjà une réalité avant 2006. A titre de comparaison, la Réunion compte deux fois de moins de lits que la région Limousin, et se positionne au dernier rang des régions françaises en termes de densité hôtelière (0,5 lits pour 100 habitants).

Dans le même temps, l’offre non homologuée (gites, chambres d’hôtes, meublés de tourisme, villages-vacances, etc.) a connu une croissance forte, et propose 9000 lits, le double des hôtels classés. Elle génère en revanche très peu d’emplois (380 en 2011).

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 77

Source : IRT, Fréquentation touristique 2011 à La Réunion

3.3.2 Les enjeux identifiés 3.3.2.1 Les enjeux en termes d’emploi et de qualification des ressources humaines

1. Guadeloupe :

Le diagnostic territorial stratégique de Guadeloupe (2012) rappelle que « malgré une amélioration de sa situation économique avec une croissance de son PIB au cours de ces dernières décennies, l’archipel guadeloupéen connaît toujours un sous-emploi et son corollaire le chômage. Aussi, pour le prochain programme, l’accent doit être mis sur le développement économique local en renforçant la qualification et en soutenant d’avantage les secteurs porteurs d’emploi, tels que les métiers de la mer, le tourisme, l’artisanat ou la croissance verte ».

L’emploi salarié lié au tourisme est estimé à 5,4 % de l’effectif salarié total (contre 4,9 % pour la Martinique), dont un tiers dans l’hébergement (la restauration étant le deuxième secteur d’activité concerné par le tourisme).

En 2009, 5 000 entreprises avaient une activité liée au tourisme, sachant que quatre entreprises sur dix sont des restaurants et cafés, et qu’une entreprise sur quatre exerce son activité dans le secteur du transport. Le ratio entre la quarantaine d’entreprises précédemment identifiées et les 5000 entreprises recensées dans le secteur du tourisme montre bien dans quelle mesure l’écotourisme est en Guadeloupe une filière de niche.

Le secteur de l’hébergement et de la restauration, qui représente 7,9 % du tissu d’entreprises guadeloupéen au 1er janvier 2012, est le principal employeur touristique de la région (7 067 salariés, soit 9,0 % du total). En 2012, 8,9 % des nouvelles entreprises créées en Guadeloupe l’ont été dans ce secteur (444 créations).

Les données sur le tourisme laissent apparaitre une progression de la richesse produite du territoire en lien avec la diversification vers l’écotourisme, même si l’appareil statistique dans ce domaine n’est pas développé et ne permet pas d’identifier clairement le nombre d’emplois dans la filière « écotourisme ».

2. Guyane :

L’écotourisme recèle probablement un potentiel de création d’emplois significatif. Selon les estimations d’ATOUT France, un doublement de l’activité de la filière s’accompagnerait de la création de près de 9 000 nouveaux emplois. Ces derniers se répartiraient sur l'ensemble de la filière, notamment dans les métiers conventionnels tels que les transports, l’hôtellerie, les loisirs et la restauration. Ces emplois nécessiteraient des niveaux de qualification variables mais généralement plutôt faibles, du CAP au Bac+2.

Dans le contexte démographique guyanais actuel, où le taux de croissance annuel de la population de 4% est associé à un fort taux de chômage (21%), l’opportunité de créer

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 78

autant d’emplois rapidement accessibles (formations courtes) ne doit pas être négligée. Il est alors important pour la région de s’investir dans le développement de cette filière.

3. La Réunion :

L’activité touristique à La Réunion constitue depuis les années 70 un axe de diversification de l’économie régionale. Elle est considérée par l’ensemble des acteurs comme porteuse de développement économique (voir par exemple le Diagnostic Stratégique Territorial 2014-2020 de La Réunion). Elle figure comme une priorité régionale 2010-2014 de la collectivité régionale. Celle-ci a mis en place ainsi une nouvelle politique touristique portant notamment sur la structuration de l’offre touristique, le repositionnement de la « marque » Réunion, qui bénéficie du classement récent des « Pitons, Cirques et Remparts » au patrimoine mondial de l’humanité par l’UNESCO, et le renforcement de la coopération régionale autour de la marque « Iles Vanille ». L’objectif affiché est d’accueillir 600 000 touristes à l’horizon 2015.

Ce chiffre est sans doute beaucoup trop ambitieux au regard de la dynamique actuelle du secteur et des capacités d’accueil de l’île.

Les activités liées au tourisme emploient 6 750 salariés au 1er janvier 2011, soit 3,2% de l’emploi total, ce qui est relativement faible comparativement aux autres régions françaises, et notamment aux Antilles (5,4% en Guadeloupe, 4,9% à la Martinique). La Réunion se classe parmi les dernières régions françaises juste devant le Nord-Pas-de-Calais, la Picardie ou la Haute-Normandie.

Cependant, le nombre d’emplois en 2011 a retrouvé son niveau d’avant la crise du chikungunya en 2006 (+ 500 emplois).

Source : Emplois Touristiques 2011, CEROM-AFD-IEDOM-INSEE, Décembre 2012

Le secteur de l’hôtellerie et de l’hébergement est le premier secteur d’emploi représentant 27% de l’emploi touristique, en forte diminution sur la période 2006-2011 (-15%). L’emploi est principalement porté par l’hôtellerie classée (80% des emplois) qui représente une cinquantaine d’hôtels, dont très peu d’hôtels 4* (généralement les plus pourvoyeurs d’emplois, et les plus attractifs).

Viennent ensuite les secteurs des loisirs (23%) et de la restauration (21%). Le secteur des loisirs a connu une très forte croissance sur la même période 2006-2011 (+20%) à l’instar du secteur des transports aériens et services aéroportuaires (+21%) et des transports intérieurs et locations de voiture (+46%).

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 79

3.3.2.2 Le marché local

La question du marché local de la filière « écotourisme » renvoie à celle de l’utilisation par les guadeloupéens de l’offre de services locale. Il n’existe pas d’études sur cette question à notre connaissance pour ce qui est de la Guadeloupe.

On doit néanmoins préciser qu’en termes de qualification des produits touristiques, le CTIG a récemment travaillé sur une déclinaison de l’offre touristique d’activités : balnéaire, culture, vert, et gastronomique. L’objectif était de valoriser une offre d’activités non homogène en interne pour les guadeloupéens et en externe pour les touristes. Le Conseil régional effectue également un travail avec l’Union des professionnels de l’animation touristique en vue de structurer et fédérer les acteurs autour de produits bleus, produits verts, produits gastronomiques, etc.

En Guyane, comme on l’a indiqué précédemment, le marché local est loin d’être négligeable, car il représente environ 20 % de l’activité de la filière, et, avec une croissance démographique annuelle de 4%, il semble naturellement appelé à croître en valeur absolue.

A la Réunion, l’activité touristique s’adresse en partie aux résidents. Il n’existe cependant pas d’études récentes sur cette question à notre connaissance.

Le compte satellite du tourisme pour 2005 réalisé par le CEROM indiquait (avant la crise de 2006) que sur les 806 millions d’euros de dépenses des touristes comptabilisés, près de 57% avaient été réalisées par la clientèle locale, principalement auprès des agences de voyage (pour sortir du territoire notamment), du commerce et de la restauration (tourisme sur place). Le rapport constatait qu’en agrégeant les dépenses des résidents à celles des touristes affinitaires, cela représentait plus de 75% des dépenses touristiques.

Par ailleurs, les professionnels du tourisme rencontrés sont unanimes à considérer que la clientèle touristique locale n’est pas à négliger. La Réunion, avec bientôt plus d’un million d’habitants, dispose d’une masse critique non négligeable de consommateurs de produits touristiques. Les hôteliers avancent que la clientèle locale représente déjà presque 30% de leur clientèle totale (principalement sur les catégories 3*). L’enjeu sur cette clientèle est double :

• elle est difficile à capter et à fidéliser, une très forte concurrence existe entre les structures ;

• la concurrence de Maurice est de plus en plus forte pour les maintenir sur place.

Néanmoins, l’enquête IPSOS de septembre 2012 commandée par l’IRT montre que la Réunion est une destination de plus en plus privilégiée par les résidents, 10% du panel ayant déclaré passer leurs vacances à la Réunion, contre 7% en 2006.

3.3.2.3 Le tourisme comme activité exportatrice

1. Guadeloupe :

Le tourisme est l’une des rares activités exportatrices de la Guadeloupe puisqu’elle représente une part importante des recettes d’exportations (60 % en 2008). En 2005, la contribution du secteur touristique au PIB régional était estimée par l’INSEE à 5 %. La prise en compte des données concernant le tourisme fait quasiment doubler le taux d’exportation du territoire (2,9 % à 6 % en 2008).

A nouveau, il faut souligner qu’il est impossible de fournir des données spécifiques concernant l’écotourisme.

Selon l’enquête de l’INSEE sur les flux touristiques en 2010-20112, la majorité des visiteurs sont des touristes d’agrément (63 %). La part des touristes affinitaires (31 %), venus voir leur famille ou des amis, faiblit légèrement mais demeure importante. Le

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 80

tourisme d’affaires reste en revanche marginal84. Plus d’un visiteur sur deux réalise durant son séjour une excursion dans les autres îles de l’archipel. Ainsi, un tiers des touristes ont visité les Saintes, 17 % se sont rendus à Marie-Galante et 9 % à la Désirade.

La crise économique mondiale et les perturbations sociales de février 2009 (intervenues en pleine saison touristique) ont donné un sérieux coup de frein à l’activité touristique, alors même qu’après la crise du début des années 2000 s’amorçait une reprise depuis fin 2006 et début 2007. Quelques chiffres traduisent ce constat : -16 % du nombre de touristes en provenance de la métropole, diminution des séjours en hôtels (-30 % de clients), chute du taux d’occupation (- 8 points) en 2009.

L’année 2010 a été une année de transition pour le tourisme guadeloupéen : sans revenir aux niveaux constatés en 2008, on a assisté au redémarrage dans certains secteurs d’activité touristique. Le nombre de passagers à l’aéroport Pôle Caraïbe a augmenté de 6 % par rapport à l’année 2009. Dans l’hôtellerie, la fréquentation s’est améliorée : 17 % de clients supplémentaires, 12 % de nuitées en plus et un taux d’occupation des chambres en progression de 4,5 points.

Le marché extérieur a progressé au total de 3 % entre 2011 et 2012, avec une augmentation de 4% des touristes français, de 44% des touristes allemands et 47% des touristes suisses (alors que le marché italien s’effondrait, sans doute du fait de la crise qui a frappé le pays). La dépense totale des touristes est estimée à 419 millions d’euros en 2011 (contre 238 millions d’euros en 2006), avec une dépense moyenne de 2058 euros par ménage et par séjour et de 1000 euros par personne et par séjour.

Tableau 3 Nombre de nuitées par mois (2008-2012) – en milliers (décembre 2012)

Tableau 4 Évolution du nombre de croisiéristes (2008-2012)

Source : Guadeloupe Port Caraïbe, Rapport IEDOM 2012 (édition 2013).

Le tourisme de croisière a également progressé depuis l’année 2007. Avec plus de 300 000 croisiéristes ayant fréquenté la destination, pour la saison 2012- 2013, les îles de Guadeloupe confirment leur redressement et leur percée sur ce secteur depuis l’année difficile de 2010 - cf. Figure 2).

84 Rapport Ideom 2012, Edition 2013.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 81

Figure 2 Évolution 2006-2013 du nombre de croisières dans les îles de Guadeloupe

Source : CTIG 2013.

2. Guyane :

Comme on l’a précédemment indiqué, la filière tourisme dans son ensemble contribue à hauteur de 9% au PIB et à hauteur de 26% aux exportations.

Tout comme en Guadeloupe, il est impossible de fournir des données spécifiques à l’écotourisme.

3. La Réunion :

Le tourisme est là encore l’une des rares activités exportatrices de la Réunion. Les exportations de biens représentent moins de la moitié des exportations totales de La Réunion telles qu’elles sont retracées dans les comptes économiques régionaux établis par l’Insee. En effet, la « correction territoriale » apportée par les comptables nationaux dans l’évaluation des grands agrégats économiques conduit à considérer comme des exportations les consommations faites sur le territoire par les touristes. Les exportations liées à cette correction s’élèvent à 314,8 millions d’euros en 2012, contre 306,8 millions d’euros pour les exportations de biens (dont plus de 50% sont des produits issus de l’agro-transformation).

Les recettes du tourisme extérieur sont composées à la fois des dépenses effectuées avant le séjour mais revenant directement à la Réunion (achat de forfaits à une agence ou un organisme de voyage, acompte sur réservation), et des dépenses au cours du séjour. Les premières représentaient 44,5 M€ en 2011, les secondes représentent en 2012 environ 315 M€. La baisse de la fréquentation et de la dépense moyenne et la diminution du tourisme d’agrément (plus consommateur d’hébergement hôtelier ou de gîtes) expliquent la baisse par rapport à 2011 (344 M€). Le budget global par ménage est de l’ordre de 2500 €.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 82

Le marché principal se porte sur la métropole de manière très prédominante (81%), viennent ensuite l’Europe (5,2% en hausse sur 2011), puis l’Ile Maurice (3,8% en léger recul sur 2011), le reste représentant 10% du flux. La baisse de la fréquentation sur 2012 a concerné toutes les provenances, à l’exception de la zone Océan indien (Mayotte, Maurice, Comores, Madagascar, Seychelles, Afrique du Sud), qui représente 10% des touristes et se maintient sur 2012.

A titre de comparaison, le tourisme sur Maurice offre un profil complètement différent. Avec 965 000 visiteurs en 2012, les touristes issus des BRICS représentent près de 20% des flux.

Pour remplir l’objectif officiellement fixé de 600 000 touristes extérieurs (à un horizon plus lointain sans doute que 2015), La Réunion est clairement confrontée à un double enjeu :

• le maintien de sa position sur son marché « naturel » métropolitain ;

• la diversification de sa clientèle sur les marchés secondaires que sont les autres pays européens et les pays émergents, qu’ils soient dans l’Océan indien et ou dans le sud-est asiatique, ou la Russie.

C’est en partie ce à quoi tend à répondre le concept marketing des « Iles Vanille » qui réunit Madagascar, Mayotte, les Seychelles, Maurice, les Comores et la Réunion (les Maldives n’y figurent pas). L’objectif est de réunir ces îles au sein d’une même destination afin de leur conférer davantage de visibilité au plan international et de capter des marchés sur lesquels elles émergent à peine. L’ambition est de développer la complémentarité des offres et des positionnements respectifs, via des offres combinées, et de s’appuyer pour cela sur une amélioration de la desserte aérienne et un allègement des formalités administratives.

En incluant les Maldives, la destination « Océan indien » représente 2,6 millions de touristes extérieurs annuellement, soit moins de 1% du tourisme mondial, avec deux groupes d’îles aux profils très différents : (i) des îles orientées vers le tourisme affinitaire et incluant une forte dépendance vis-à-vis de la clientèle française métropolitaine (Réunion, Madagascar, Mayotte) ; (ii) des îles ayant fait le choix d’une relative spécialisation économique sur le tourisme exploitant leur capital naturel, accueillant majoritairement du tourisme d’agrément et disposant d’une clientèle plus diversifiée, même si l’Europe y représente entre 65 et 75% des touristes (Maurice, Seychelles, Maldives).

Au sein de ce groupe, le profil touristique de la Réunion est marqué par les tendances suivantes :

• La croissance de la fréquentation touristique à La Réunion est comparativement beaucoup plus faible que dans les autres îles. Maurice et les Maldives ont connu

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 83

une croissance de 30% sur les années récentes, les Seychelles une croissance plus modérée mais régulière et maîtrisée.

• A l’instar de Madagascar et de Mayotte, La Réunion est en très grande partie à l’écart de la diversification vers les marchés émergents : Chine, Inde, Russie, principalement. Si ces pays ne représentent qu’un peu plus de 15% des touristes de ces îles, leur croissance est très forte (+61% en provenance d’Asie pour Maurice, Maldives et Seychelles, et +23% en provenance de Russie). Maurice et Maldives ont absorbé l’essentiel de la croissance apportée par ces marchés émergents. Aujourd’hui Maurice dispose par exemple de deux rotations quotidiennes de la compagnie Emirates à destination du hub de Dubaï.

• La Réunion envoie un nombre croissant de touristes (résidents réunionnais) à Maurice (115 000 arrivées en 2011). Elle concentre 80% des flux inter-îles (pour un total de 230 000 touristes inter-îles).

• Avantages comparatifs identifiés actuellement et avantages comparatifs potentiels

3.3.2.4 La question de la compétitivité prix

Globalement, on peut dire qu’aucun des trois DOM étudiés n’est en principe compétitif au niveau des prix pratiqués, pour l’essentiel du fait des coûts de main-d’œuvre, mais aussi à cause des prix relativement élevés des produits agroalimentaires, ce dernier point nous ramenant aux problèmes évoqués à propos de la filière agriculture / agroalimentaire. Le coût du transport aérien joue lui aussi un rôle, du fait d’une concurrence limitée sur les destinations concernées.

Le constat doit sans doute être nuancé pour la Réunion, si l’on considère la concurrence de Maurice ou des Seychelles, destination relativement chère pour la première, très chère pour la seconde. Dans ce cas, ce n’est plus le prix qui joue, mais la qualité et la spécificité de l’offre.

Par ailleurs, dans la mesure où l’analyse est concentrée sur l’écotourisme en Guadeloupe et en Guyane, on peut considérer que, là aussi, la qualité et la spécificité de l’offre peuvent compenser le handicap des prix élevés.

3.3.2.5 Les avantages comparatifs existants

1. Guadeloupe

Les entretiens ont permis de mettre en lumière plusieurs avantages comparatifs pour l’écotourisme, dont certains, il est vrai, sont des avantages comparatifs qui concernent l’ensemble de la filière, mais ont un impact positif sur l’écotourisme :

• la richesse de la biodiversité de la Guadeloupe (faune, flore…), les opportunités données par le fait que la Guadeloupe constitue un archipel et dispose d’un littoral varié (activité de nautisme…), et la présence du parc naturel ; la Guadeloupe est le seul archipel de la Caraïbe à avoir autant de profils géomorphologiques ; elle dispose d’une grande spécificité, celle d’avoir cinq réserves naturelles dans lesquels les territoires ont pu être préservés on y compte aussi de nombreuses traditions culturelles ;

• la très forte proximité avec la France hexagonale qui constitue le marché privilégié du territoire : en 2009, les résidents de France métropolitaine représentent 95 % des touristes de séjour ;

• le développement de nouveaux modes d’hébergement (comme déjà indiqué) : la part de la clientèle hôtelière est en baisse et représente 34 % des touristes et seulement 21 % des nuitées ; à l’inverse, la clientèle en gîte et location progresse (31 %) tout comme celle des touristes « affinitaires », en séjour dans la famille ou chez des amis (33 %) ; ces deux derniers modes d’hébergement, qui se caractérisent par des durées de séjour plus longues, notamment l’hébergement en famille (18 jours en moyenne), totalisent 72 % des nuitées ;

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 84

• le fonctionnement de la gouvernance d’ensemble : le Conseil régional est reconnu comme pilote du plan d’actions sur le tourisme ; la collaboration entre le Conseil régional et ses partenaires semble fonctionner plutôt bien et elle se caractérise par une bonne articulation des missions de chacun ;

• un certain nombre d’actions phares marquantes montrent la pertinence des ambitions et des axes recommandés par les schémas régionaux ; ces différentes actions ont permis d’accompagner la reprise du secteur touristique entamée à partir de 2010, même si le niveau de 2008 n’a pas encore été entièrement retrouvé (cf. supra), ainsi peut-on citer :

− la structuration et la montée en gamme de l’offre en hébergements touristiques ; le parc hôtelier guadeloupéen qui avait été durement touché par la crise économique et les grèves de 2009 a pu monter en gamme ; par ailleurs le nombre important de gites nouvellement crées permet de compenser le nombre de structures d’hébergement qui ont dû fermer durant la période de crise du secteur (2009-2010) ;

− l’accueil des croisiéristes a progressé ; la Guadeloupe a connu un fort développement de l’activité de croisière entre 2005 et 2007 (+25 % en 2007) pour se stabiliser ensuite sur la période 2008-2010 (36 000 croisiéristes environ par an) ; l’aménagement d’infrastructures dédiées à l’arrivée des bateaux sur le port de Pointe à Pitre et la mise en relation des commerçants et artisans locaux avec les croisiéristes ont permis d’accroitre les capacités d’accueil des croisiéristes et de tirer profit de leur passage en Guadeloupe, et amorcé une percée dans ce secteur ; la coordination instaurée entre le Comité du Tourisme, le port et l’aéroport paraît avoir porté ses fruits ;

− pour ce qui est des transports, l’aide au cabotage a permis de partiellement compenser les surcoûts de transport de marchandises et de personnes vers les îles de l’archipel qui peuvent ainsi mieux tirer profit du tourisme ; le Conseil régional a également soutenu l’aménagement des terminaux, la mise en place d’une billetterie nominative, et l’organisation d’horaires de transport réguliers ;

− en matière de politique communale, on peut souligner la signature de conventions d’objectifs de développement touristique prioritaires avec sept territoires : ces conventions permettent d’encourager les communes à s’engager dans le développement touristique de leur territoire ; le Conseil régional cofinance les projets et programmes d’activités touristiques définis dans le cadre de ces conventions ;

− la signature d’un contrat de destination entre les acteurs du tourisme et d’une importante campagne de promotion, d’une durée de huit mois et d’un montant d’1,2 million € ;

− l’adaptation de l’ingénierie financière des projets a permis de rendre les aides publiques plus accessibles aux petits porteurs de projets, ceci est particulièrement vrai pour les projets de gîtes qui se sont multipliés ces dernières années (et fortement soutenus dans le cadre du PO FEDER) ;

− la mise en place d’une Licence Tourisme à l’Université Antilles-Guyane.

Encadré 10 Caraïb'Bay Hôtel à Deshaies

Caraïb'Bay est un hôtel aujourd’hui 3 étoiles présent en Guadeloupe depuis une dizaine d’années. Le Caraïb’Bay Hôtel se situe sur la commune de Deshaies, dans la partie sous le vent de la Basse-Terre. Il est situé au sein d'un jardin tropical de 11 000 m² où se côtoient une grande variété de plantes et d’arbres exotiques.

L’hôtel est constitué de bungalows peu chers et de trois villas en location (location Guadeloupe). Il met à disposition 12 duplex et emploie 10 salariés (la masse salariale représente 42 % du CA).

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 85

Disposant au total d’une capacité d’accueil de 60 occupants, il affiche aujourd’hui une vraie identité et un engagement citoyen à Deshaies : promotion du tourisme éco-responsable, mise en place d’un tri-sélectif (avant l’heure), utilisation de peinture à l’eau de chaux dans les bâtiments, développement d’extensions en bois dans le sens des alizées afin de limiter l’usage de la climatisation…

L’entreprise a bénéficié de cofinancements du FEDER et d’un accompagnement OSEO pour réaliser différentes installations : chauffe-eau solaire, climatisation classe A, rénovation de villas, construction d’un mur anti-bruit, le changement de meubles… Toutefois, malgré les aides et dispositifs mis en place, l’entreprise a pu rencontrer des difficultés pour obtenir des prêts bancaires (même avec 70 % de subventions publiques) et il a fallu que l’entreprise dispose d’une bonne trésorerie.

L’hôtel de charme est membre de l'Association guadeloupéenne d'écotourisme (AGE), dont tous les membres répondent à des critères précis mais surtout à état d'esprit commun. L’entreprise réalise également d’importants efforts pour être référencée sur le plus grand nombre de site Internet assurant la promotion de l’écotourisme. Elle communique comme les autres membres de l’association AGE sur l’offre à disposition en Guadeloupe en matière d’écotourisme. Comme la Guadeloupe est perçue par le gérant comme une destination dont le prix est élevé en comparaison de Cuba ou de la Dominique (qui bénéficient de coûts de production plus faible et peuvent ainsi disposer d’un nombre plus important de salariés), le gérant a décidé de passer à une offre « all inclusive », avec la recherche de nouvelles activités à proposer, un effort important sur le contact humain, …

Pour le gérant, le territoire dispose aujourd’hui de nombreux atouts : la richesse de sa biodiversité, un Lycée des métiers de l’hôtellerie à Gosier et Sainte-Anne qui accueille plus de 5000 personnes, une grande campagne de promotion interne (permettant de développer la culture du tourisme en Guadeloupe) et externe (spots télévisés, campagnes d’affiche 4x3, etc.).

Encadré 11 Anse caraïbe plongée à Pointe Noire

Anse Caraïbe Plongée est club de plongée subaquatique tournée vers l’écotourisme. L’entreprise offre la possibilité de faire des baptêmes, des découvertes pour les niveaux 1, 2, 3 et 4, ainsi que des formations pour les niveaux 1, 2, 3 agrées et validées par la FFESSM ou PADI.

Le Club de plongée est situé sur la plage Caraïbe à Pointe Noire. Il a été créé en 2000. L’offre de services proposés vise à limiter au maximum l’impact sur l'environnement marin. L’entreprise propose des séjours de plongée intégrés : location de gîte, voiture à disposition à l’aéroport, forfait plongée incluant des plongées en Guadeloupe et dans les îles voisines : les Saintes ou Marie-Galante. Elle communique également beaucoup sur l’offre à disposition en Guadeloupe en matière d’écotourisme, notamment celle proposée par les entreprises membres de l’AGE.

L’entreprise réalise d’importants efforts pour être référencée sur le plus grand nombre de sites Internet assurant la promotion de l’écotourisme et regrette qu’aucun tour opérateur ne fonde sa stratégie en Guadeloupe en s’appuyant sur les principes de l’écotourisme.

2. Guyane

Malgré son niveau d’activité important, la filière touristique guyanaise est encore en cours de construction. Cette situation présente l’avantage d’offrir une grande flexibilité dans les choix structurants et stratégiques destinés à stimuler la croissance de cette activité. Des atouts certains permettront au département de se démarquer de ses concurrents régionaux et même internationaux.

Le premier avantage comparatif saillant de la Guyane, qui lui offre un positionnement tactique au niveau mondial, est d’être l’unique territoire européen en Amazonie. Cette situation confère au territoire des avantages de poids, notamment sur un public occidental. On peut particulièrement citer l’appartenance à la zone euro,

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 86

un sentiment certain de sécurité (stabilité politique, sécurité des biens et des personnes, équipements et services de santé aux standards européens.

Le second avantage renvoie à la place du tourisme spatial. Le tourisme lié au spatial en Guyane est sans équivalent dans le monde85. C’est une des raisons principales de la venue en Guyane qui capte la majorité du flux touristique d’affaires ainsi qu’une bonne partie du flux touristique d’agrément. 86 Cette position conduit parfois à considérer Kourou comme un marché captif au sein même de la Guyane. Le spatial elle joue toutefois aussi un rôle important dans le développement touristique des autres parties de la Guyane. Le CSG et le CNES participent ainsi beaucoup au développement de sites et d’activités extra-spatiales. Par exemple, ils sont propriétaires de sites tels que le zoo de Guyane et les îles du Salut, très prisés pour le tourisme de nature.

3. La Réunion

Les entretiens ont permis de mettre en lumière plusieurs avantages comparatifs :

• L’inscription par l’UNESCO des « Cirques, pitons et remparts » au patrimoine mondial de l’humanité confirme la présence d’un patrimoine naturel exceptionnel et fournit un argument marketing discriminant pour la région. Ce point est largement reconnu par les professionnels du secteur et les institutions rencontrés. Cependant, dans le même temps, l’inscription par l’UNESCO et le Parc national imposent des obligations de respect environnemental des sites qui peuvent constituer un frein à leur exploitation à des fins touristiques.

• Au-delà de l’inscription à l’UNESCO, la richesse du territoire du point de vue de sa biodiversité, de son patrimoine culturel, historique, gastronomique, est mise en avant comme un élément permettant d’offrir une palette diversifiée d’activités touristiques.

3.3.2.6 Potentiel pour renforcer les avantages comparatifs existants ou développer de nouveaux avantages comparatifs

En ce qui concerne la Guadeloupe, il y a sans doute un effort à faire pour promouvoir davantage l’identité caraïbe, tant en ce qui concerne les ressources naturelles et la biodiversité que la dimension culturelle. Le tourisme en Guadeloupe reste encore très « banal » ou « généraliste » et le développement de l’écotourisme passe sans doute par davantage de sophistication dans la construction d’une image forte de l’archipel Guadeloupe.

La Guyane dispose de sérieux atouts à valoriser dans le cadre d’un positionnement nature ou éco-touristique. La région se distingue aussi bien au niveau international que régional. Ses atouts à renforcer et valoriser se situent notamment sur :

• Une offre « naturelle » diversifiée et de qualité :

La Guyane s’appuie sur un environnement très largement protégé (réserves naturelles, parcs, …) pour proposer de nombreuses activités en lien avec la nature. La politique de protection environnementale, parfois extrême, permet aujourd’hui à la Guyane de jouir d’une biodiversité riche et intacte à travers les activités en forêt (découverte en lodge, carbet ou autonomie) ou en mer (pêche sportive), les randonnées pédestres sur des circuits et sentiers de la bande littoral, les randonnées fluviales ou encore les activités de découvertes de la nature (comme les sites de ponte des tortues)87.

85 Il est possible d’assister à des lancements de fusées dans de bonnes conditions de visibilité. 86 Kourou absorbe presque 50 % du flux total de touristes (estimation des acteurs locaux). 87 La Guyane possède les plus importants sites de ponte des tortus luths.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 87

Les sites accessibles se distinguent alors par leur caractère exceptionnel en comparaison des autres zones géographiques du monde. Régionalement, la qualité de ces sites est bien supérieure à ce qu’on peut trouver au Brésil ou au Suriname. Cette situation avantageuse est de nature à favoriser le tourisme de nature et le tourisme vert.

• Une diversité culturelle importante :

Le mélange important de populations en Guyane offre de nombreuses cultures à découvrir. Historiquement, les Amérindiens et Bushinenge sont à la base des «cultures guyanaises et amazoniennes ». S’y sont ajoutés les nombreux Créoles, Indiens d'Inde, Chinois, Hmongs, Haïtiens, Surinamiens, Brésiliens, Blancs descendants de colons… apportant avec eux la diversité.

Une telle diversité favorise la découverte culturelle et historique de « plusieurs Guyanes ». Cet axe, souvent négligé, fait partie intégrante de l'écotourisme. La Guyane peut alors se démarquer de la plupart des zones touristiques mondiales, à l’exception peut-être du Brésil qui réunit une même diversité, sur un territoire tout de même beaucoup plus vaste.

A la Réunion, existent des opportunités pour tirer parti des îles voisines afin de capter de la clientèle plus internationale : européens non francophones, russes et asiatiques. Si l’offre de séjours combinés « Réunion » avec « Maurice » ou les autres îles de l’Océan indien) diminue tendanciellement depuis une dizaine d’année (45% de l’ensemble des arrivées à La Réunion en 1996 contre 25% en 2010), il y a des possibilités pour exploiter le potentiel de clientèle présent à Maurice à partir de produits de type « excursions » (une visite de 2 jours sur la Réunion autour du volcan pour un tourisme basé à Maurice, vendue par son tour opérateur dans son pays d’origine, ou directement sur place à Maurice). Les Maldives et les Seychelles ne le permettent pas faute de liaisons aériennes.

Le marché sud-africain est également prometteur. La fin de l’obligation de visa est un avantage certain pour développer ce marché.

3.3.3 Handicaps et points faibles Globalement, et mis à part le handicap constitué par un manque de compétitivité en termes de prix, la filière tourisme/écotourisme souffre de deux handicaps communs aux trois DOM étudiés : une insuffisante structuration de la filière – que l’on peut aller jusqu’à qualifier de défaut d’une organisation de type cluster – et des liaisons aériennes exclusives avec Paris.

Au-delà de ces deux handicaps, il est nécessaire d’aller plus avant dans le détail pour chacun des trois DOM dans la mesure où, ainsi qu’on l’a indiqué, les contextes sont très différents.

1. Guadeloupe

Outre les facteurs structurels reconnus dans le Traité fondateur de l’Union européenne et les effets de la crise de 2009, plusieurs autres facteurs nuisent au développement du tourisme en Guadeloupe88 :

• L’offre d’hébergement est vieillissante bien que, depuis 2004, un effort important ait été consenti sur la modernisation et la montée en gamme de l’hébergement touristique. Des structures sont exemplaires de ce point de vue comme : Creole Beach, Toubana, Club Med, Pierre et Vacances, etc.

88 Dans une note de juillet 2011 sur le tourisme en Guadeloupe, l’INSEE dresse un état des lieux du tourisme, de ses forces et de ses faiblesses. Nous en reprenons ici les principaux éléments. Note INSEE juillet 2011 : Le tourisme : la Guadeloupe et le tourisme : un sentiment d’inachevé

http://www.insee.fr/fr/insee_regions/guadeloupe/themes/etudes_detaillees/diag971/diag971_08.pdf

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 88

• L’image du tourisme en Guadeloupe doit encore être renforcée, notamment en matière d’accueil et de services :

− le positionnement marketing doit être consolidé en s’appuyant sur les importants efforts réalisés à l’externe et à poursuivre par le CTIG et sur la présence du Lycée professionnel, car le tourisme dans la Caraïbe est un marché très concurrentiel ;

− les clients potentiels connaissent moins le contenu de la destination Guadeloupe et le territoire manque d’un produit différencié.

• Le nombre de création d’entreprises dans le secteur est en baisse selon les dernières données disponibles. Néanmoins, les récentes évolutions non enregistrées dans les statistiques paraissent plus favorables : en 2009, 820 entreprises ont été créées dans les secteurs d’activité liés au tourisme, un chiffre cependant en baisse de 10 % par rapport à l’année précédente. Le nouveau statut de l’auto-entrepreneur n’a pas suffi à résorber les effets des crises économique et sociale. Il faut aussi remarquer que les entreprises (notamment celles qui ont investi) ont réussi à mieux résister à la crise et il y a pu y avoir des maintiens d’emplois là où ailleurs, les entreprises ont largement licencié.

• L’offre d’hébergement reste très concentrée : 82 % des 12 100 lits recensés sont situés sur deux territoires, le Grand centre et l’Est Grande-Terre. Les communes de Gosier, Sainte-Anne et Saint-François y abritent la plupart des structures hôtelières. Il faut cependant intégrer dans l’analyse les meublés de tourisme et les villas à la location. Ainsi, en termes de capacité d’hébergement, le nord Basse-Terre devient un territoire très dynamique. Il ne faut toutefois pas s’attendre au développement de grands hôtels dans le nord de Basse-Terre et Grande-Terre. Dans ces zones, l’approche est centrée sur le développement des meublés de tourisme ou les petits hôtels de charme du fait de l’identité touristique de ces zones.

• La Guadeloupe est en retrait par rapport aux autres îles de la Caraïbe, sachant cependant que la Guadeloupe n’a pas comme stratégie de développer le tourisme de masse, exposé à la forte concurrence de pays voisins tels que Cuba ou la République Dominicaine. En 2008, selon la Caribbean Tourism Organization (CTO), la Guadeloupe est classée au 12e rang des destinations touristiques dans les Antilles (grandes et petites Antilles). Avec 433 000 touristes, elle se place derrière ses voisines de la Martinique (481 000), St Martin (475 000) et devance Sainte Lucie (295 000) et la Dominique (80 000). Par comparaison, les deux premières destinations touristiques antillaises, la République Dominicaine et Cuba accueillent six millions de visiteurs. Si la plupart des pays de l’espace Caraïbe sont tributaires de la clientèle nord-américaine, la clientèle des USA ne représente que 6 % des touristes en Guadeloupe. Cependant ces données doivent être interprétées avec précaution dans la mesure où, par exemple, en Martinique, on compte systématiquement les plaisanciers, alors qu’en Guadeloupe, les chiffres sont ceux de l’Insee qui ne compte que les touristes en provenance de Paris.

• L’absence de liaisons aériennes directes avec les principales capitales européennes (à l’exception de Paris) et avec les États-Unis et les aléas concernant la mise en place d’une desserte au départ de l’aéroport Roissy-Charles de Gaulle, destinée à renforcer l’attractivité de la Guadeloupe sur les marchés européens. Après plus d'un an et demi d'exploitation, la compagnie aérienne Air France a annoncé en début d’année 2013 la fin de la desserte de la Guadeloupe et de la Martinique au départ de Roissy pour la mai 2013. Les raisons avancées de cet arrêt sont les suivantes : le faible taux de remplissage, l'atonie des marchés italiens et espagnols, notamment dans un contexte de crise économique et financière. C'est la troisième fois en l'espace de quelques années qu'Air France se voit contrainte d'arrêter ses rotations vers les Antilles françaises au départ de Roissy.

• Enfin, concernant plus spécifiquement le volet écotourisme :

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 89

− La structuration de la filière écotourisme n’est pas encore aboutie, notamment dans la mesure où les associations d’acteurs en place n’ont pas les mêmes définitions de la filière et des principes qui doivent la régir. En dehors de quelques sites Internet maintenus par les associations en place, il n’existe pas de marketing spécifique pour cette filière (la filière est néanmoins citée à deux reprises dans le diagnostic territorial stratégique 2014-2020).

− En dehors de l’organisation de formations aux labels de qualité, aucune action de formation structurante n’a été réalisée, ni sur l’ensemble de la filière tourisme, ni sur la filière écotourisme. La CCI et le Conseil régional ont organisé des formations aux labels de qualité principalement destinées aux personnels des structures d’hébergement.

− Le manque global de développement d’une logique de cluster du tourisme permettant, d’inscrire plus généralement l’écotourisme (qui dispose d’ores et déjà d’un certain nombre d’acteurs positionnés sur ce segment) dans l’ensemble des segments de la filière tourisme : tourisme de pleine nature, tourisme historique et culturel, tourisme de santé, tourisme sportif, tourisme de mariage et de lune de miel, tourisme d’affaires…). En effet, il n’existe pas à notre connaissance d’études de marché, ni de cadre politique pertinent en Guadeloupe pour mettre en œuvre une politique différenciée du tourisme, s’appuyant sur une logique de développement de cluster pouvant donner lieu au développement d’un réel écosystème d’affaires, alors même que ce type de cluster est le ciment de la chaîne de valeur informationnelle, le support de la compétitivité des acteurs et de l’attractivité des destinations touristiques.

Tous ces handicaps convergent et contribuent à amoindrir l’attractivité et la compétitivité de la destination Guadeloupe, qui pourtant dispose de nombreux atouts.

2. Guyane

Les handicaps et points faibles spécifiques à la Guyane sont les suivants :

• Une communication insuffisante pour la destination Guyane :

L’offre existante est sans conteste importante et diversifiée ; elle manque toutefois de visibilité. La consommation par le touriste, aussi bien étranger que local, est dès lors pénalisée. Une des raisons est que cette diversité de l’offre n’est pas accompagnée d’un répertoriage (et d’une qualification) systématique. Par ailleurs, elle ne bénéficie pas non plus d’une synergie suffisante entre les différents acteurs de la filière89.

Si l’offre est peu visible, c’est aussi le cas pour la Guyane en tant que destination : on constate en effet un manque important de promotion de la destination. Cette lacune peut s’expliquer par le manque d’investissement public, notamment financier90. À ce manque de communication vers l’extérieur, s’ajoute la communication souvent préjudiciable provenant de l’extérieur. La Guyane peine ainsi à sortir de son image d’ « enfer vert » liée à la présence historique du bagne. Cette image donne lieu à un dénigrement et une communication alarmiste injustifiée, notamment par les Métropolitains.

• L’absence d’un observatoire fiable sur le tourisme :

Il y a peu de données fiables sur le tourisme en Guyane, notamment sur la fréquentation effective des hôtels, la consommation de biens et services ou l’ampleur

89 L’exemple typique est celui de l’hôtelier faisant la promotion des activités récréatives locales. 90 Selon ATOUT France, l’investissement public en faveur du tourisme en Guyane est cinq fois inférieur à

celui constaté dans les autres DOM et jusqu’à dix fois inférieur à celui constaté en France Métropolitaine. (Euros par habitant)

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 90

du tourisme local. Ce manque d’éléments objectifs est un véritable handicap pour la filière en termes d’investissement : il n’est en effet pas possible d’évaluer les risques pour convaincre des investisseurs. Cela est d’autant plus pénalisant que les banques ont une activité d’investissement (quasi-)nulle en Guyane.

• Une dispersion des forces:

Si la filière n’est pas structurée, c’est aussi parce que les branches qui la composent ne le sont pas elles-mêmes (hôtellerie, restauration, transports ou agences de voyage). Il est en effet important de souligner que sans structuration des différentes branches, la filière aura du mal à s’organiser et à s’étoffer91. On constate donc que les acteurs communiquent peu sur la stratégie d’ensemble de leurs branches respectives, au travers de syndicats forts ou de groupements professionnels par exemple.

Certes, des initiatives appuyées par des institutions publiques (CTG, CCIG…) émergent, mais elles sont encore limitées (Offices du Tourisme, guides, hébergeurs…). Cette difficulté résulte du manque de dynamisme interne au sein des branches92 couplé à une faible professionnalisation : les différentes branches sont en effet composées majoritairement de très petites entreprises qui se concentrent principalement sur des problématiques de mise en conformité aux différentes normes et règlements (parfois élémentaires)93 ou de gestion d’une trésorerie fragile par exemple.

On peut identifier par ailleurs un certain nombre de menaces qui pèsent spécifiquement sur le développement futur de l’écotourisme :

• la sécurité dans l’intérieur des terres ;

• la présence d’orpailleurs clandestins dans les terres dégrade les conditions de travail des acteurs du tourisme et leur compétitivité : ces derniers subissent en effet souvent des vols d’équipements (pirogues, moteurs) ;

• le protectionnisme local : l’éco-tourisme est destiné à promouvoir une consommation écologique et durable et la découverte des cultures ; certaines populations situées dans des zones d’intérêt touristique ont déjà montré leur hostilité à l’égard de la mise en place de structures touristiques sur leur territoire ; ainsi, malgré la connotation positive du concept d’éco-tourisme qui prévaut au niveau occidental, il ne suscite pas forcément l’engouement des populations locales (peur du voyeurisme, de corruption culturelle…).

3. La Réunion

La majorité des professionnels du tourisme rencontrés ne considère pas le prix du transport aérien comme un réel handicap comparatif : ils considèrent en effet que la Réunion est une destination long courrier, et à ce titre coûtera nécessairement cher dans les années à venir (hausse du prix des carburants), au même titre que les autres destinations de l’aire régionale. Il n’est pas assuré que cette vision optimiste soit recevable si elle ne s’accompagne pas d’une stratégie touristique ciblée de façon appropriée.

Un handicap essentiel réside bien en effet dans le positionnement de l’offre touristique de la Réunion par rapport aux autres destinations long courrier qui existent dans la zone. Il s’agit avant tout d’un problème de : (i) définition du positionnement de la marque Réunion (ce que l’on « vend ») ; (ii) puis de mise en adéquation du message

91 Il n’y a en effet pas de représentants capables de porter d’une voix les choix et visions de son secteur pour mettre en œuvre des actions d’envergure.

92 Le défaut de dynamisme s’illustre par exemple dans le secteur de l’hôtellerie par la durée attendue avant de s’attaquer au problème du manque de lits. Un hôtel est en cours de construction à Cayenne, le premier depuis près de 20 ans.

93 Les restaurateurs travaillent actuellement sur la mise aux normes de leurs établissements.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 91

avec l’offre touristique sur place, car le coût du transport aérien implique une attente des consommateurs pour, une fois sur place, disposer de services de qualité en rapport avec le prix du billet ; (iii) et d’organisation du secteur dans son ensemble.

Les principaux handicaps mis en avant sont ainsi les suivants :

• Le positionnement marketing de l’offre touristique réunionnaise apparaît comme fluctuant au fil des années.

Le positionnement marketing a souvent varié au cours des 10 dernières années, à tel point que les acteurs rencontrés ont du mal à indiquer quels sont la marque, la signature et le positionnement de l’offre réunionnaise. Il y a sans doute un besoin de stabiliser le marketing de l’île pour mieux construire son identité et la complémentarité avec les îles voisines (Maurice, Seychelles en particulier).

L’enjeu est de créer une image et de s’y tenir dans un contexte concurrentiel fort avec les îles voisines, et de définir des cibles prioritaires.

• La proximité de destinations de tourisme balnéaire (Maurice, Maldives, Seychelles), qui offrent un produit « tropical » correspondant à une demande de la clientèle européenne non francophone, et de manière croissante à la clientèle asiatique (voyages de noces par exemple auprès des clients chinois et indiens).

Par ailleurs, le différentiel de compétitivité-prix avec ces îles au niveau de l’hébergement fait qu’elles sont moins exposées aux exigences des encadrements sociaux et environnementaux.

Enfin, même si le tourisme asiatique croit fortement sur Maurice, les deux destinations s’adressent à une même clientèle européenne, et dans le contexte de ralentissement actuel de l’activité, sont dans une situation de concurrence accrue.

• L’offre d’hébergement vieillissante et le manque de capacité d’accueil en termes d’hôtellerie, sans que de grands acteurs de l’hôtellerie internationale se soient positionnés sur cette destination. Cette absence des grands acteurs internationaux est sans doute un frein pour promouvoir plus largement la destination. Elle se conjugue à un positionnement de l’hôtellerie classée sur une offre moyenne gamme. Seuls 5 hôtels fin 2011 (sur 50) étaient classés au moins 4*.

Par ailleurs la faible capacité d’accueil hôtelier ne permet pas de répondre aux demandes éventuelles de tours opérateurs pour de grosses commandes (500 chambres). Le secteur n’a pas la masse critique pour cela.

Ces mêmes structures hôtelières, aujourd’hui peu nombreuses, vivent d’une partie de la clientèle locale, du tourisme d’affaires et d’agrément (le taux d’occupation serait supérieur selon nos interlocuteurs à la moyenne nationale94); elles ne sont pas toujours incitées à développer une stratégie de diversification via des partenariats avec les tours opérateurs en France ou en Europe.

• La fragmentation de la « filière » tourisme. Elle s’appuie sur une multitude d’opérateurs sur différents sous-segments, sans qu’une organisation et des actions collectives soient réellement menées entre les professionnels. Il n’y a pas d’instance de dialogue récurrent entre les professionnels des loisirs, de l’hébergement, les réceptifs et les transporteurs.

Le Club Tourisme est toutefois un pas en avant vers cette structuration, mais avec une réelle difficulté à initier des démarches mutualisées et partagées par l’ensemble des acteurs de la chaîne de la valeur.

• Les compagnies aériennes (trois) disposent d’une clientèle captive de réunionnais, et de touristes affinitaires et d’affaires qui les incite peu à développer des stratégies

94 Aux environs de 70 à 75% selon nos interlocuteurs. Le taux d’occupation moyen en France est de 65% au deuxième semestre 2012 (L’industrie hôtelière française en 2012, KPMG).

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 92

touristiques durables en partenariat avec des tours opérateurs métropolitains ou européens. Le marché principal de l’aérien est en effet constitué des résidents réunionnais, auxquels s’ajoute la clientèle touristique affinitaire. Par ailleurs, la dépendance vis-à-vis de la liaison aérienne vers Paris constitue un frein à la diversification de la clientèle européenne non francophone.

• L’utilisation des technologies de l’information et de la communication (TIC) est encore insuffisamment développée parmi les professionnels (achat en ligne notamment), en particulier dans les activités de loisir. C’est un enjeu d’autant plus important que l’Internet a changé les comportements des consommateurs et a contribué largement à développer les voyages sur mesure.

3.3.4 Evaluation du rôle joué par les politiques publiques et les dispositifs d’accompagnement 1. Guadeloupe

Le développement d’un tourisme durable constitue un axe fort de la stratégie économique du territoire.

Dans le cadre de l’axe « T » comme Tourisme du Schéma Régional de Développement Économique, de nombreuses actions ont été menées pour répondre aux différentes problématiques identifiées. Ces actions sont pour partie mises en œuvre directement par le Conseil régional ou indirectement via le CTIG, et pour partie opérées par des partenaires tels que la DIECCTE. On note que les acteurs interrogés se réfèrent exclusivement au Schéma de Développement et d'Aménagement Touristique (SDAT) comme cadre d’orientations stratégiques en matière de tourisme. Le SRDE a servi de fondement aux réflexions menées dans le cadre de l’élaboration du SDAT en 2009 ainsi que pour la définition d’une feuille de route sur le tourisme. Le PO FEDER a eu pour mérite de développer les investissements productifs au niveau des gîtes, contribuant ainsi, comme on l’a déjà indiqué, au développement significatif de la part des gîtes dans le nombre de nuitées en Guadeloupe.

La Région est reconnue comme pilote du plan d’actions sur le tourisme. La collaboration entre le Conseil régional et ses partenaires fonctionne plutôt bien et se caractérise par une bonne articulation des missions de chacun.

Le SDAT définit sept territoires géo-touristiques ayant chacun une identité touristique territoriale spécifique, qu’il convient de développer tout en gardant la cohérence globale de l’archipel. Pour ces territoires, le SDAT entend notamment :

• favoriser la diversification de l’offre et la montée en gamme ;

• développer les infrastructures de nautisme (accueil des croisiéristes haut de gamme, grande plaisance ou plaisance) et renforcer le positionnement sur le nautisme ;

• valoriser les sites naturels et encourager l’adoption de démarches environnementales dans les projets touristiques.

La politique régionale du Tourisme se définit aussi à travers quatre axes principaux95 :

• l’accompagnement des organismes de promotion et d’animation touristique (offices du Tourisme et syndicats d’initiative) : aide attribuée pour leur programme d’activités annuel, et programme d’aide à la normalisation de leurs structures ;

• la modernisation de l’industrie hôtelière : La Région reconnaît cette action comme obligatoire, pour permettre à la Guadeloupe de disposer, désormais, d’un parc

95 Cf. SDAT Guadeloupe 2012.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 93

d’hébergements plus diversifié et compétitif, la concurrence de nos voisins de la Caraïbe se faisant de plus en plus ressentir ;

• le soutien à l’aménagement et au développement de l’offre de produits touristiques : l’action régionale a pour objectif de proposer, aux acteurs locaux du tourisme, qui sont les communes et les associations, un soutien à l’investissement pour favoriser le développement d’un tourisme durable et intégré ; la filière « écotourisme » n’est pas identifiée en tant que tel à ce stade, mais plusieurs gîtes liés à la filière ont pu profiter des investissements publics réalisés ;

• la promotion externe de la destination de la Guadeloupe : l’objectif premier de la Région a été de restructurer l’Office du Tourisme de la Guadeloupe, afin de lui permettre de continuer à mener sa mission de promoteur sur les différents marchés, et de renforcer, ainsi, la notoriété de la destination Guadeloupe à l’étranger.

Des efforts de structuration de l’offre d’hébergement touristique ont donc été entrepris par le Conseil régional avec l’État et le CTIG afin d’assurer la mise aux normes et améliorer la qualité des produits :

• une réforme des classements des hôtels a permis une mise à niveau des hôtels aux standards internationaux ;

• les structures d’hébergement et d’activités touristiques ont été encouragées à obtenir des labels de qualités tels que le label « qualité du Tourisme » accordé par le CTIG, le label « tourisme handicap » ou les labels « clé vacances » et « gîtes de France » pour les gites ;

• le PO FEDER 2007-2013 a axé l’accompagnement de l’offre touristique sur la montée en gamme de l’hébergement ; ainsi des subventions sont accordées aux entrepreneurs pour la construction de nouveaux hébergements, la rénovation ou l’extension d’établissements existants, ou la réalisation d’aménagements périphériques type : salle de sport ou de massage, SPA, Jacuzzi, mur antibruit, achat de mobilier, etc. ;

• l’aide sur fonds régionaux représente jusqu’à 35 % de l’investissement ; combinée avec les Fonds européens, elle va jusqu’à 50 % voire 75 % de l’investissement ; parmi les critères d’éligibilité à cette aide l’établissement demandeur doit avoir au minimum deux étoiles en vue de passer à trois ou quatre étoiles.

Le travail de structuration de l’offre d’hébergement touristique et d’amélioration de la qualité de l’offre est considéré comme un grand succès par le Conseil Régional et ses partenaires (État et CTIG) qui se sont beaucoup impliqués dans cette action.

La Région effectue un suivi de l’offre d’hébergement touristique à travers un outil permettant de cartographier sur le territoire l’offre d’hébergement et les catégories correspondantes. Le suivi de l’offre se fait à partir des données sur les établissements demandeurs de subventions, et aussi sur les chiffres d’enregistrement des établissements aux référentiels de qualité. Le secteur informel (important pour ce concerne les gites et chambres d’hôtes) n’est pas suivi. La DIECCTE a également un outil interne de suivi de l’offre d’hébergement.

Ce travail de structuration de l’offre doit se poursuivre. La Région et ses partenaires devraient assurer un contrôle permanant des organismes au-delà de l’attribution des labels (inspections, suivi client, etc.). Actuellement, le label n’est suivi que trois ans après son attribution. La DIECCTE envisage par ailleurs d’élargir le label « qualité tourisme » à l’animation touristique.

2. Guyane

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 94

La règlementation est en général bénéfique à la préservation de la biodiversité. Cependant, la sur-règlementation peut avoir un effet inverse. C’est le cas notamment avec certaines règles édictées au niveau de l’État qui sont aujourd’hui considérées par certains acteurs96 comme une source de difficultés. Il arrive en effet parfois que ces règles et normes soient prises en réaction à des évènements ponctuels97 ou ne tiennent pas compte des contraintes locales et de l’existant. 98

Encadré 12 JAL Voyages

JAL voyages est une société indépendante vieille de plus de 30 ans. Elle compte aujourd’hui entre dix et vingt collaborateurs qui accueillent annuellement plus de 10 000 touristes et réalisent un chiffre d’affaire de l’ordre d’un million d’euros.

Cette PME est un acteur incontournable de l’éco-tourisme guyanais. Elle est reconnue nationalement, grâce notamment aux éco-lodges des marais de Kaw alliant tourisme/découverte de la nature et préservation active de la biodiversité (JAL Voyages a par ailleurs participé à des ouvrages éducatifs et de sensibilisation à l’écotourisme).

Son gérant, monsieur Jean-Louis Antoine, entrevoit un triplement de l’activité, et mécaniquement une croissance des effectifs de l’entreprise, dans les 5 années à venir. Il croit en effet aux bienfaits de l’élargissement du marché en Guyane, notamment par l’accueil des frontaliers et des croisiéristes, souhaité par une majorité des acteurs du tourisme.

La société envisage ainsi d’investir massivement, et particulièrement dans la construction de nouvelles infrastructures ou le rachat de campements abandonnés. A défaut de financements bancaires, ces projets, pouvant dépasser un million d’euros d’investissement, seraient principalement financés par des fonds propres et le concours des financements européens.

JAL Voyages, comme d’autres acteurs, voit toutefois aujourd’hui l’ensemble de son activité menacé par de nouvelles règlementations, particulièrement celle obligeant les sites isolés à fournir de l’eau puisée dans un puits (règlementation européenne), et la décision préfectorale de reclasser les marais de Kaw en réserve.

La règlementation sur l’approvisionnement en eau est aujourd’hui difficilement à satisfaire dans les marais de Kaw car il faudrait alors réaliser un forage à plusieurs centaines de mètres des lodges. De manière pratique, cela signifierait la mise en place d’une logistique spécifique pour cet approvisionnement qui, au-delà d’être coûteuse, aurait paradoxalement un impact non négligeable sur l’environnement.

Le reclassement des marais, est quant à lui un coup de massue pour cette activité d’écolodge. En effet elle conduira, à terme, à l’interdiction de la navigation et de la présence des lodges sur les marais, mettant alors en péril plusieurs emplois.

La filière tourisme ne dispose à l’heure actuelle d’aucune stratégie réelle de développement, ce qui s’explique par un manque de concertation au niveau institutionnel99. Les résultats de cette situation sont notamment la promotion défaillante de l’offre (précédemment soulignée), le manque de structuration de la filière et un dispositif d’aides peu lisible.

96 Exemple : les règlementations sur l’approvisionnement en eau dans les sites isolés sont issues de normes européennes. Les sites isolés doivent désormais fournir de l’eau de boisson et de toilette issue de forages. Les pratiques consistant à purifier l’eau de rivière ne sont plus admises alors que l’eau est faiblement contaminée en Guyane. Aucun financement n’est prévu pour répondre à ces nouvelles contraintes.

97 Exemple : arrêté de non circulation dans une zone à la suite de l’égarement de randonneurs. 98 Exemple : des reclassements de sites (réserves …) mettant en péril des activités éco-touristiques. 99 Le tourisme est en effet piloté par différentes strates publiques : locales, régionales, nationales.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 95

La structuration stratégique permettrait une optimisation du système d’offre par synergie entre les secteurs : en Guyane, la conséquence du manque de stratégie est par exemple l’inexistence d’offres complètes (package all-inclusive).

La filière actuelle se résume pour l’instant à une somme d’expériences isolées et non coordonnées dont les résultats, s’ils ne sont pas négligeables – la filière tourisme est la deuxième source de richesse en Guyane –, pourraient être optimisés. Ce défaut de structuration rend la filière fragile, notamment face à la croissance du tourisme dans les pays voisins100.

Les aides, en plus d’être insuffisantes, sont surtout trop dispersées et ne répondent pas à une action d’ensemble. Les acteurs de la filière ont une bonne perception des efforts publics, mais ne savent que rarement où se tourner pour trouver de l’appui (financier ou même technique).

Quelques initiatives sont menées par différents acteurs institutionnels de la filière mériteraient d’être appuyées et multipliées, permettant ainsi d’améliorer la structuration de réseaux professionnels et la professionnalisation des acteurs. Parmi les plus marquantes, nous pouvons citer :

• les démarches de professionnalisation et d’assistance à la mise aux normes du secteur de la restauration engagées par la CCIG ;

• la démarche qualité engagée par le CTG, pour la fédération et l’amélioration de la qualité des hébergements.

3. La Réunion

Le tourisme est affiché comme un secteur prioritaire porteur de développement économique en région par les différents documents programmatiques.

Le Schéma Régional de Développement Économique de la Réunion (SRDE) adopté le 21 février 2013 entend mieux valoriser la richesse de l’île à des fins touristiques. Pour cela, les priorités suivantes ont été définies :

• Le soutien aux professionnels du tourisme pour favoriser le développement d’une offre de qualité. En conséquence la région a redéfini le contour de ses instruments d’intervention en faveur du secteur : taux d’intervention plus important, élargissement de la base d’éligibilité des dépenses, augmentation du plafond de subvention, élargissement des secteurs éligibles, ainsi que l’inclusion, pour chacune des aides, d’un volet dédié à la certification ou à la labellisation touristique.

• La dynamisation des initiatives publiques dans le domaine des aménagements touristiques, via une politique d’appel à projets. L’objectif est de d’améliorer les conditions d’accueil et de développer de nouveaux sites touristiques majeurs.

• L’accompagnement du secteur par les institutionnels du tourisme. L’objectif est de mieux associer les professionnels à la gouvernance de la politique touristique, autour notamment de quatre filières : le balnéaire, la randonnée, le tourisme de nature et les loisirs touristiques.

• Le soutien aux actions collectives et groupements de professionnels dans le domaine du tourisme. L’objectif est de favoriser la mutualisation et la coopération interentreprises pour la réalisation de projets communs et innovants (nouveaux produits ou marchés par exemple).

100 Le Suriname est en train de se positionner en tant que hub régional, ce qui pourrait conduire à capter une partie du flux de touristes. Le tourisme guyanais est actuellement en « mode rattrapage » (notamment sur la capacité d’accueil qui rend difficile la vente de la destination, notamment pour les groupes).

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 96

• Le développement de la coopération régionale autour du concept « Iles Vanille » avec pour objectif de capter une partie de la clientèle internationale de Maurice.

Le secteur fait l’objet d’un soutien continu depuis au moins deux générations de programmes européens FEDER. Le PO FEDER 2007-2013 inclut ainsi une ligne « aide aux entreprises touristiques » qui ne cible pas uniquement le secteur hôtelier (les gîtes sont également concernés par exemple). En octobre 2012, la programmation a porté sur 30 projets pour un montant de 5,76 M€, dont 5,43 M€ portant sur des opérations de création, extension ou rénovation d’hôtels. Au côté du FEDER, le Conseil régional intervient en cofinancement. Sur les opérations hôtelières, ce sont près de 3,62 M€ qui ont été apportés par la Région.

L’État apporte également un soutien au secteur via l’exonération de cotisations sociales patronales (LODEOM, applicable depuis le 1er juillet 2010), ou via le dispositif de défiscalisation qui permet de réduire l’assiette fiscale (montant hors taxes de l’investissement net de subvention). Par ailleurs, l’aide passe aussi par des dispositifs de type Prêt Participatif à la Rénovation Hôtelière (OSEO/AFD) pour les hôtels de 15 ans et plus.

3.3.5 La filière considérée est-elle une filière d’avenir ? Dans quelle mesure ? 1. Guadeloupe

Plus que le tourisme en général, la filière écotourisme est une filière d’avenir, mais une filière de niche, dans la mesure où il existe d’ores et déjà un écosystème d’acteurs (au moins une quarantaine d’entreprises) positionnés sur ce marché.

Cette filière offre une grande opportunité pour le territoire du fait de la nécessité de devoir sortir aujourd’hui d’une logique de compétitivité-coût pour s’engager dans une dynamique de compétitivité-hors coût, axée principalement sur la qualité et l’originalité des services offerts sur le marché.

Dans ce cadre, quatre mots-clés sont à retenir, différenciation, diversification, spécialisation et labellisation, pour conduire un développement touristique économiquement viable, écologiquement soutenable, humainement et éthiquement convenable, et avec comme soubassement un contenu typiquement et spécifiquement local du produit. De ce fait :

• la destination Guadeloupe devra sans doute tenter de convertir une partie des touristes de masse en touristes d’intérêts spéciaux (écotourisme, tourisme de pleine nature, tourisme historique et culturel, tourisme de santé, tourisme sportif, tourisme de mariage et de lune de miel, tourisme d’affaires…) sur la base de la mise en place de cluster(s) « tourisme », tout en attirant d’autres visiteurs ;

• en matière de promotion, elle devra sans doute continuer d’œuvrer pour développer une meilleure visibilité et lisibilité de la destination sur le marché du tourisme international et éviter une guerre des prix avec les autres concurrents de la Caraïbe, guerre dans laquelle elle est perdante d’emblée, en raison de la forte intensité de main-d’œuvre caractérisant les activités touristiques et du niveau généralement plus élevé des coûts salariaux et plus généralement des coûts de production101 aux Antilles françaises ;

• il importe également de suivre une démarche plurisectorielle pour exploiter les synergies entre les différents acteurs de la filière du tourisme et plus largement avec les autres secteurs d’activité liées car cela permet de limiter la dépendance à l’égard d’un marché extrêmement volatile.

101 Cf. Louis Dupont, Analyse empirique de la relation entre tourisme et compétitivité : l’exemple des antilles françaises, The George Washington University, novembre 2012.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 97

Par ailleurs, au-delà des progrès déjà réalisés au cours des dernières années, certaines actions ont rencontré des freins ou auraient sans doute besoin d’être renouvelées pour aller plus loin :

• l’accompagnement de l’évolution des qualifications des personnels : en dehors des formations aux labels de qualité principalement destinées aux structures d’hébergement, peu d’actions structurantes ont été mise en œuvre sur le plan de la formation professionnelle continue destinée au secteur du tourisme ;

• l’offre touristique n’est pas encore suffisamment commercialisée via Internet ; le CTIG travaille actuellement à la mise en place d’un outil de web marketing valorisant l’ensemble de l’offre d’activités et d’hébergement touristique de l’archipel avec une possibilité de paiement en ligne ;

• la situation de l’hôtellerie guadeloupéenne reste en situation de grande fragilité économique et financière (voir le rapport de l’Inspection générale des Finances, « Médiation de l’hôtellerie en Guadeloupe et en Martinique », Ministère de l’Économie et Ministère du Budget, 2011) ;

• enfin, pour aller plus loin dans l’aide à la décision et l’évaluation des politiques publiques mises en place, il serait nécessaire de mettre en place un système de suivi des indicateurs de réalisation (quantitatifs et qualitatifs) du SDAT ou du SRDE partagé par le Conseil régional et leurs principaux partenaires. Ces indicateurs devraient a minima contenir des données concernant l’emploi, et être segmentées de façon à suivre efficacement l’évolution des différents segments de la filière tourisme, en particulier l’écotourisme.

2. Guyane

La filière tourisme dans son ensemble peut être considérée comme une filière d'avenir pour la Guyane. Cette activité est pourvoyeuse d'emplois et créatrice de richesses. Elle occupe par ailleurs déjà une place prépondérante dans l’économie guyanaise.

D’ici 10 ans, il est envisageable de doubler l’activité touristique, ce qui mécaniquement multiplierait les emplois (+ 9 000 d’ici 10 ans) 102 et les structures d’accueil touristique (hôtels, lodges, zones aménagées…). Au sein de la filière tourisme d’ensemble, l’écotourisme a une place éminente du fait des caractéristiques mêmes du territoire.

Pour atteindre ce résultat, le positionnement103 de la Guyane doit toutefois être remanié :

• l’attention doit prioritairement porter sur le confort et l’accessibilité pour les familles, en « adoucissant » notamment l’image aventurière (masculine et solitaire) de la Guyane ;

• le tourisme de nature et le tourisme durable sont plus flexibles pour l’ensemble de la filière et devront garantir le respect et la valorisation de la biodiversité et de l’environnement ;

• le positionnement éco-touristique peut être promu dans les zones protégées (parcs, réserves…) ou indigènes (en prenant en compte toutefois les éventuelles résistances culturelles).

Au-delà du travail sur le positionnement, les actions urgentes et importantes à mettre en place consistent à :

• Définir une stratégie d’ensemble :

102 Estimation ATOUT France. 103 Le département est aujourd’hui fortement positionné sur le tourisme de nature, d’aventure sportive et de

haute technologie (spatial), mais dispose aussi d’implantations historiques axées sur l’éco-tourisme (ex : marais de Kaw).

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 98

Sans stratégie, la filière sera contrainte de progresser par tâtonnements. Le dernier « Schéma Régional de Développement du Tourisme et des Loisirs » de Guyane datait de 1998. Sa mise à jour en 2012 traduit la volonté politique d’agir, lors de la prochaine période de programmation PO-CPER – et même au delà— avec une stratégie cohérente pour la filière.

• Mobiliser plus de moyens en faveur de la filière :

Il est important que la Guyane puisse bénéficier du même soutien pour le développement de sa filière touristique que les autres DOM ou la métropole. Cela correspond, selon les chiffres d’ATOUT France, à un quintuplement des budgets annuels alloués. Ce soutien deviendra plus lisible une fois la stratégie de la filière effectivement établie.

• Inciter à la structuration de la filière :

La structuration de la filière est cependant aussi de la responsabilité individuelle des entreprises. A terme, elle doit permettre une optimisation du système d’offre.

3. La Réunion

La filière tourisme est clairement une filière d’avenir à La Réunion, et c’est une filière porteuse d’emplois localisés sur le territoire. Le potentiel existe (richesse du patrimoine naturel, historique, gastronomique, etc.), mais il n’est pas encore pleinement exploité.

Les acteurs se retrouvent pour considérer qu’il y a lieu de franchir un cap. Pour cela, de nombreux verrous subsistent et sont bien identifiés.

Il y a sans doute lieu d’abord de mieux définir le positionnement de l’offre touristique réunionnaise dans la concurrence régionale et internationale. Comparativement aux destinations voisines, la Réunion ne peut se vendre comme une destination « tropicale » en tant que telle, destinée à accueillir en masse des touristes. Elle a sans doute davantage à gagner à la construction et à la promotion de niches touristiques diversifiées sur le marché européen, jouant sur ses différents atouts (écotourisme, tourisme de pleine nature, tourisme historique et culturel, tourisme de santé, tourisme sportif, tourisme d’affaires, etc.).

Cela suppose de conduire un travail partenarial avec l’ensemble des acteurs pour créer des univers thématiques propres à chaque niche afin d’adapter le discours marketing, de cibler les clientèles et les pays cibles d’émission. L’adoption de démarches de type cluster avec les professionnels du tourisme, telle qu’elle est promue par le SRDE, est sans doute pertinente.

Il y a peut-être lieu également de décliner ce positionnement sur chacun des territoires composant l’île afin de donner une identité touristique à chacun des territoires (spécialisation), non seulement en vue de diffuser l’activité sur tout le territoire, d’éviter les phénomènes de concentration, mais aussi de faire de la programmation et de l’aménagement touristique en impliquant les collectivités territoriales de l’île. D’autres îles (Corse, par exemple, pour rester dans le cadre français, et Guadeloupe dans une mesure encore modeste – voir ci-dessus) ont promu non sans intérêt de telles démarches.

Dans ce schéma-là, la coopération régionale représente une réelle opportunité pour diversifier la clientèle touristique d’agrément de la Réunion. Le partenariat avec Maurice peut être équilibré. D’un côté, la Réunion peut tirer parti du concept d’ « Iles Vanille » en captant des clients européens non francophones et asiatiques de Maurice sur des courts séjours d’excursion. De son côté, Maurice peut profiter de la manne touristique en provenance de la Réunion, et notamment des touristes résidents réunionnais. Il reste cependant à donner à ce concept un vrai contenu pratique avec les professionnels du secteur, et en particulier avec les transporteurs aériens (partenariats entre compagnies).

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 99

Ces efforts doivent également s’accompagner d’une montée en gamme de l’infrastructure d’hébergement, en particulier de l’hôtellerie, mais également des gîtes et autres hébergements touristiques (politique de labellisation et certification).

On ne doit pas oublier, en tout état de cause, que La Réunion reste, comparativement aux Antilles ou au Golfe Persique et à l’Afrique du Nord, une destination lointaine (11h00 d’avion) et qui, par conséquent, restera chère (hausse du prix du carburant aérien). Il est dans ces conditions difficile d’envisager un positionnement touristique de masse. Ce n’est d’ailleurs pas l’orientation suivie par les acteurs sur place.

Sont nécessaires en conséquence :

• Une stratégie de diversification en direction de niches de marché : tourisme culturel, tourisme sportif, tourisme de séminaire, tourisme affinitaire, écotourisme, etc.

• Une stratégie de positionnement ciblé pour mieux diversifier les clientèles :

− le marché francophone belge et suisse à court terme, en « vendant » la destination comme sur le marché français ;

− vis-à-vis des cibles de clientèle européennes non francophones, un effort de différenciation par rapport à Maurice et aux Maldives (ne pas se positionner comme une destination « tropicale » normale) en offrant les paysages et la nature, autour de l’argument du Volcan et des Cirques (UNESCO) ;

− vis-à-vis du potentiel de clientèle asiatique, via le concept des « Iles Vanille », c'est-à-dire vendre la Réunion par le biais des autres îles (Maurice et Maldives notamment) ; il n’y a pas en effet de dessertes aériennes directes (passage par Maurice obligatoire), l’offre réunionnaise est atypique par rapport à la demande asiatique (voyages de noces), les formalités de police sont complexes (sauf via un réceptif à Maurice).

3.4 La filière Bois

La filière bois a été uniquement analysée en Guyane où la ressource est particulièrement abondante, mais très sous-exploitée.

3.4.1 Périmètre de la filière 3.4.1.1 Définition de la filière

Histoire et positionnement

Le massif forestier tropical humide amazonien couvre plus de 90% du territoire Guyanais, ce qui représente une superficie de près de 8 millions d'hectares et fait du bois la ressource la plus visible et l'une des plus abondantes en Guyane. Par ailleurs, avec près de 1300 essences répertoriées sur une même zone administrative, cette ressource est aussi l'une des plus diversifiées au monde.

La particularité de la forêt guyanaise est d'appartenir en exclusivité à l'État, contrairement à ce qu'on observe en métropole. La gestion durable de ce patrimoine naturel a en majeure partie été confié à l'ONF (Office National des Forêts) de Guyane104. Dans ce cadre, les prélèvements ne peuvent s'effectuer que sur les aires aménagées du domaine forestier permanent, représentant une superficie totale de 2,4 millions d'hectares. Parmi les 90 essences commerciales existantes, l'office autorise

104 5,5 millions d'hectares, exception faite du massif du Parc Amazonien.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 100

annuellement l'exploitation de 47 d'entre elles pour un volume maximum de 215 000 m3105.

L'exploitation industrielle du bois est une activité relativement récente, qui n'a réellement débuté que dans les années 1960-1970, avec l'installation des premières exploitations forestières. Aujourd'hui, la filière bois représente la quatrième activité économique du département et elle est devenue une des activités clés pour l'emploi et la création de valeur par l'industrie Guyanaise, avec 210 entreprises employant environ 900 personnes.

La croissance démographique soutenue de la Guyane (4%) conduit à des besoins spécifiques. Le bois permet de répondre à certains de ces besoins fondamentaux, notamment pour la construction de logements et la fourniture d’énergie électrique. Ces points sont les deux raisons saillantes ayant conduit à l’étude de la filière bois et de son organisation.

Une production pour un marché local, et concentrée sur un débouché, la construction

La récolte annuelle de bois en Guyane est estimée à environ 75 à 80 000 m3. Après une première transformation, environ 30 000 m3 de bois scié et raboté sont fournis au marché.

Plus de 90% de ce produit de première transformation sont absorbés par le marché local où son utilisation est dédiée à trois grands secteurs :

• BTP (environ 85%) :

Le bois scié est principalement destiné à la réalisation de charpentes, menuiseries et revêtements pour la construction de logements, bâtiments scolaires et administratifs, structures d'ouvrages d'art… La demande est particulièrement importante

• Ebénisterie (environ 8%) :

L'industrie (ou l’artisanat) de l’ameublement est faiblement développé en Guyane du fait de coûts de production peu concurrentiels. Ainsi, les produits d’importation occupent une place prépondérante car ils correspondent davantage au pouvoir d'achat et habitudes de consommation locaux. L’ébénisterie Guyanaise se positionne de fait sur des niches haut de gamme.

• Caisserie / emballage (environ 7%) :

Les exportations guyanaises de bois ne sont pas négligeables. A l'heure actuelle, il s’agit cependant d’une activité encore accessoire pour la filière et qui concerne quasi-exclusivement les bois sciés, 95% des exportations en 2009. Les principaux destinataires de ces produits se situent sur le marché national français, en fait celui des Antilles françaises, la Guadeloupe et la Martinique représentant plus de 90% des volumes exportés en 2009.

Une filière concentrée sur quelques secteurs forts

En lien avec les marchés les plus développés, les secteurs forts de la filière sont ceux de :

• l'exploitation forestière ;

• du sciage-rabotage ;

• de la menuiserie et charpente.

L'artisanat apporte aussi une valeur non négligeable à l’économie de la filière bois. Toutefois, le secteur est encore trop fragmenté pour que son activité fasse l’objet d’une véritable évaluation.

105 Cela représente 15 400 ha exploitables annuellement.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 101

Ces secteurs sont majoritairement constitués de TPE et de micro-entreprises, avec quelques PME dont la taille excède rarement 15 personnes. Par ailleurs, la présence de quelques entreprises appartenant à de grands groupes, n’éclipse pas le fait que les structures sont majoritairement indépendantes.

3.4.1.2 Liens éventuels avec d’autres filières prises en considération sur le territoire (ou qui pourraient l’être)

Un lien nouveau se développe avec la filière de l'énergie. La biomasse permet de générer de l'énergie, notamment sous forme électrique et calorifique. En Guyane, le choix est fait de favoriser la synergie entre la filière bois et celle de la biomasse. En effet, il est possible de combiner leurs activités de manière complémentaire, ce qui de manière opérationnelle se traduit par la valorisation énergétique des produits connexes de la filière bois (sous-produits non exploités) dans des brûleurs générant de l'électricité.

En contraste avec ce qu’on observe en général dans la filière bois, les cinq entreprises représentantes du secteur de l’énergie des filiales de grands groupes : ABIODIS (Groupe Fabbri), EDF EN (Groupe EDF), ENDEL (Groupe GDF-Suez), NEOEN (Groupe Direct Énergie) et VOLTALIA (famille Mulliez – groupe Auchan).

3.4.1.3 Entreprises rencontrées

En 2009, la MFBG106 dénombrait 210 entreprises génératrices d’environ 900 emplois directs et d’un revenu de près de 60 millions d'euros classant cette filière à la 4ème place des activités économiques en Guyane. La filière bois, et son lien étroit avec la filière biomasse énergie, ont été analysés au fil des rencontres avec, outre les institutions publiques structurantes et en position de vigie (ONF, DAF, SGAR), les acteurs économiques privés suivants :

• L’interprofessionnelle du bois/MFBG :

Ce groupement est un organe représentant l’ensemble de la filière bois. Il est organisé en collèges de métiers qui discutent et échangent sur les voies de développement de la filière.

• Société Forestière Amazonia (exploitation forestière) :

La SFA est la société la plus active du secteur de l’exploitation forestière. Elle développe des outils performants pour augmenter l’efficacité de la récolte du bois. Son engagement auprès du secteur permet à l’ensemble de gagner en professionnalisme. De manière interne, la société travaille sur de nouveaux modes de management qui favorisent la fidélisation des ouvriers. Cette société pourrait être un exemple pour le secteur et un moteur pour la filière.

• Scierie du Larivot (sciage et rabotage) :

La Scierie du Larivot est l’une des plus grandes de Guyane. Son positionnement intégré permet d’avoir une vision complète de la chaîne de valeur et illustre la tendance (regroupement exploitation forestière/scierie).

• CBCI (menuiserie et charpente) :

CBCI appartient au groupe VEOLIA. La société se positionne sur les marchés à haute valeur ajoutée, et utilise pour cela du matériel à la pointe de la technologie. On peut voir que ce positionnement n’est pas forcément le plus adapté lorsque la demande est principalement publique avec des chantiers à faible valeur ajoutée (crise des finances publiques).

• Charpente Réalisation Industrielle (CRI) (menuiserie et charpente) :

106 La Maison de la Forêt et du Bois de Guyane.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 102

CRI est une société indépendante. Elle montre un dynamisme intéressant, notamment dans le développement de nouveaux marchés (à l’export ou pour le marché local) avec l’élaboration de nouveaux produits utilisant le bois guyanais (des maisons en kit).

• Voltalia (biomasse) :

Voltalia est la première société à disposer d’une centrale biomasse opérationnelle en Guyane. Nous avons donc ici un premier retour opérationnel de la coopération entre la filière bois et la filière biomasse.

3.4.2 Enjeux identifiés 3.4.2.1 Un marché local du bâtiment à satisfaire

Le bois occupe une place importante dans le BTP Guyanais où il est utilisé pour la réalisation de structures entrant dans la fabrication de logements, bâtiments administratifs et éducatifs, ouvrages d'art...

La demande la plus forte, et non totalement satisfaite, se situe actuellement au niveau des logements. En effet, les collectivités guyanaises doivent annuellement mettre sur le marché près de 3 500 nouveaux logements sociaux pour satisfaire les besoins locaux. Elles ne parviennent à réaliser que 40% de cet objectif et une des raisons de ce retard provient des chantiers freinés par l’insuffisance de bois scié sur le marché local. La production guyanaise annuelle de bois pour le bâtiment est estimée à 25 000 m3, un volume qui répond parfois difficilement à la demande (sections, essences, quantités…) des maitres d’ouvrage107.

Une telle situation incite dans certains cas – rares pour le moment – le secteur de la construction à importer du bois afin de compléter ses approvisionnements. Si le BTP s’oriente aujourd’hui principalement vers les résineux traités européens, des produits de substitution qui soulèvent quelques questions quant à leur résistance en milieu tropical, la filière ne néglige pas la présence d’un autre concurrent potentiel : le Brésil. En effet, même si pour l’instant ce pays se positionne sur le marché de l’ameublement, il pourrait aussi se montrer compétitif dans le secteur de la construction, grâce notamment à des bois similaires et des coûts de production moins élevés.

À terme, le risque pour la filière est donc de voir ces importations complémentaires se transformer en importations de substitution.

L’enjeu prioritaire pour la filière est donc de parvenir à satisfaire son marché local, afin de préserver ses débouchés et, in fine, ses emplois.

3.4.2.2 Une croissance de la filière biomasse à soutenir

La production guyanaise de biomasse à vocation énergétique est pour l’instant exclusivement issue des scieries. La filière biomasse collecte annuellement 30 000 tonnes108 de produits connexes valorisés dans la production électrique. Un tel volume de bois permet actuellement l’alimentation d’une unité de 2 MWe, produisant annuellement 12 GWh.

La filière biomasse ne peut toutefois pas dépendre de la seule production de connexes par les scieries. En effet, si ces dernières parvenaient à doubler leur production de bois sciés, elles ne réussiraient à fournir que 70 000 tonnes de biomasse, soit la consommation de deux centrales à de 2 MWe. La filière peut heureusement espérer compter sur un autre gisement annuel, certes moins accessible, mais sûr et plus conséquent, provenant109 :

107 Ces derniers sont conseillés par leurs maitres d’œuvre. 108 Sur 35 000 m3 générés par l’ensemble des scieries de Guyane. 109 Voir le rapport « Étude technico-économique sur les possibilités de la biomasse pour l’alimentation

électrique de la Guyane » réalisé en 2007 par l’ONF et le CIRAD.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 103

• des bois détruits lors de l’extraction du bois d’œuvre (environ 320 000 tonnes) ;

• de l'ouverture de pistes en forêt (environ 23 000 tonnes) ;

• des déboisements agricoles et urbains (environ 275 000 tonnes).

Ce gisement de près de 620 000 tonnes permettrait l’alimentation d’unités de production totalisant 41 MWe sur tout le territoire, pour une production électrique annuelle d’environ 250 GWh.

La problématique de l’exploitation de cette ressource, notamment de son acheminement vers les usines de production électrique, reste entière. Cette exploitation nécessitera une forte coordination de la filière bois, particulièrement à son interface avec la filière biomasse.

Les destins des deux filières sont liés en tout état de cause. En effet, d’un côté la filière bois a besoin de voies supplémentaires de création de valeur afin d’améliorer sa compétitivité, et de l’autre, même si les nouvelles centrales de transformation de la biomasse parvenaient à se délier de l’activité des scieries, la filière biomasse serait toujours dépendante du secteur incontournable de l’exploitation forestière.

L’enjeu est évidemment de taille car :

• La production électrique par biomasse permettrait de répondre au besoin de transition énergétique de la Guyane. La mobilisation du gisement de biomasse précédemment mentionné pourrait, d’ici 2020, permettre de couvrir une part importante de la demande guyanaise en énergie électrique (baisse de la dépendance énergétique et amélioration du bilan carbone).

• Le développement de la filière biomasse permettrait aussi de développer l’emploi. La construction d’une dizaine d’unités de production de 2 MWe conduirait par exemple à créer 100 à 200 emplois (directs et indirects).

3.4.3 Avantages comparatifs identifiés actuellement ou potentiels La Guyane subit la menace latente de l’importation de bois européens et brésiliens (ceux-ci bénéficiant de coûts de production inférieurs. La filière bois dispose toutefois d’atouts sérieux pour résister à cette concurrence.

3.4.3.1 Une commande publique motrice et support de la filière

La commande publique (logements sociaux, infrastructures) constitue le moteur de l’économie de cette filière. Même s’il reste du chemin à parcourir pour combler tous les besoins du BTP, l’offre de la filière bois convient tout de même bien au besoin. Le caractère récurrent et soutenu de la demande prémunit la filière des aléas et risques généralement constatés dans des marchés fluctuants et permet alors à la filière de s’organiser plus sereinement et efficacement.

Au-delà de cet effet support, la présence d’un marché public intérieur fort est aussi une protection précieuse contre les importations brésiliennes. En effet, les commandes publiques privilégient les produits labellisés et marqués CE. Sur ce dernier point, le marquage (CE) des produits est rendu obligatoire depuis 2008 pour tous les bois de structure utilisés sur le territoire national. L’ensemble des scieurs et charpentiers français s’investissent dans l’obtention de cette certification ; ce qui ne sera pas forcément intéressant pour de nouveaux entrants brésiliens.

3.4.3.2 La certification de la filière

L’ensemble du domaine forestier permanent de Guyane est actuellement labellisé PEFC (et bientôt FSC) ; c’est une grande première pour un territoire de l’Outre-mer qui donne l’opportunité à l’ensemble des produits issus du bois de Guyane de pouvoir, un jour, arborer ces labels. Ces derniers sont un gage de la qualité et de la durabilité de la gestion de la ressource forestière. Ils auront donc un impact fortement positif sur l’image et les débouchés des produits du bois, aussi bien sur la scène nationale qu’internationale.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 104

À court/moyen terme, les produits du bois guyanais pourront s’aligner sur l’image durable que présente déjà la majorité des bois européens et bénéficieront d’une meilleure image que les bois brésiliens (dont la forêt est à moins de 1% certifiée). Ce souci affiché pour le développement durable sera un moyen de lutter contre l’introduction de bois étrangers sur le marché local mais aussi sur le bassin d’exportation principal de la Guyane (Antilles).

Néanmoins, pour bénéficier du droit d’utilisation du label PEFC (ou FSC), l’ensemble de la chaîne de valeur devra se conformer à la norme PEFC. À l’heure actuelle, seules deux entreprises sont parvenues à obtenir leur labellisation ; l’ensemble de la filière bois se mobilise toutefois pour permettre la certification du plus grand nombre dans la filière (échéance prévue : 5-10 ans).

3.4.3.3 Une ressource importante, variée, et adaptée aux milieux tropicaux

Le bois issu de la forêt guyanaise est mieux adapté que le bois européen dont le comportement est insuffisamment documenté en milieu tropical. A cela s’ajoute le fait que la ressource forestière est abondante et très diversifiée.

D’une part, la forêt exploitable représente une superficie de près de 2,4 millions d’hectares dont la gestion raisonnée offre à la région une visibilité à long terme (> 30 ans) sur ses disponibilités en bois. Cela facilite en théorie la planification de la récolte.

D’autre part, la forêt guyanaise dispose de 1200 essences de bois différentes, dont 70 sont actuellement utilisables commercialement110. La diversité des essences disponibles améliore le potentiel de variété de l’offre111 et elle constitue un avantage certain par rapport à l’offre européenne (environ 300 essences).

3.4.4 Handicaps et points faibles 3.4.4.1 Un système d’approvisionnement fragile

L’approvisionnement en bois est le principal facteur limitant le développement de la filière. Cette situation est notamment due aux moyens disponibles pour l’extraction puis l’acheminement des grumes.

Les exploitants forestiers sont seuls habilités à extraire du bois en forêt. Le niveau de production qu’ils réalisent n’est toutefois pas suffisant pour couvrir la demande de l’ensemble de l’aval de la filière. Cela a pour conséquences majeures le fonctionnement en sous-régime de certaines scieries et l’impossibilité pour les charpentiers-menuisiers de répondre à l’ensemble des commandes.

Les principales causes, intrinsèques au secteur, de ce faible niveau de productivité sont :

• Un nombre insuffisant d’acteurs :

La Guyane compte actuellement moins de 15 exploitants forestiers. Cette activité étant économiquement risquée, elle présente un faible attrait (relatif) pour l’investissement.

• La fragilité de la majorité des acteurs en place :

Les exploitations forestières guyanaises sont principalement des TPE montrant une grande fragilité financière. Les moyens mis en œuvre pour satisfaire aux exigences112 élevées de la gestion durable de la forêt sont alors souvent réduits, ce qui nuit à l’efficacité de l’activité.

110 La qualité du bois fourni est généralement mieux adaptée aux marchés soumis à des conditions climatiques de type tropical humide.

111 La mobilisation de nouvelles essences nécessiterait toutefois un travail relativement long de validation selon les systèmes normatifs en place.

112 Les acteurs ont une obligation de résultat.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 105

Le fait le plus marquant de la mise en place de la gestion durable est l’établissement de la charte d’exploitation à faible impact. Elle a entrainé une forte augmentation du besoin en stockage (saisonnalité) et en ressources technologiques, notamment pour la géolocalisation de précision (5 tiges à retrouver par hectare) ; ce qui a participé à la disparition de nombreuses petites structures.

Une fois extrait, le bois doit être acheminé vers des scieries qui sont souvent concentrées dans les grandes zones urbaines. Les infrastructures sont parfois inadaptées pour optimiser le coût de cette opération. Par exemple, les ponts ont une résistance trop faible, ce qui oblige à multiplier les convois.

Encadré 13 une PME indépendante : la société forestière Amazonia

La SFA est une PME indépendante positionnée dans le secteur de l’exploitation forestière et le transport de grumes. Cette société en croissance réalise actuellement un chiffre d’affaire annuel de l’ordre de 1,5 millions d’euros. Elle se positionne par ailleurs comme première exploitation forestière en Guyane avec à son actif en 2012 la réalisation de près de 33% des extractions de grumes guyanais. Par ailleurs, SFA est aussi la seule exploitation forestière à bénéficier des labels PEFC et EFI en Guyane.

La société forestière Amazonia a su mettre de nombreux atouts de son côté pour surmonter deux des principaux freins généralement rencontrés par les exploitants forestiers : le déficit en ouvriers spécialisés et le manque d’outils de pointe.

Pour pallier le problème de main d’œuvre du secteur, SFA participe activement à la formation des ouvriers du secteur, en coopération notamment avec le centre de formation de Matiti. En interne, elle travaille aussi de manière intensive à l’amélioration des conditions de travail, notamment l’ergonomie des postes et les conditions de vie sur les camps, afin d’assurer la fidélité de ses employés. Cela permet aujourd'hui à la société de compter sur une dizaine d’éléments spécialisés et fidélisés qui participent à la pérennisation de son activité.

SFA possède s’appuie aussi fortement sur une politique d’innovation agressive, ce qui lui permet de posséder actuellement l’outil de production le plus avancé de Guyane. Cet outil a été développé en interne grâce à de forts investissements financiers et humains (département R&D interne). SFA participe toutefois aussi au développement du secteur, comme l’illustre sa forte coopération avec l’ONF pour fournir à l’ensemble des acteurs un outil de base performant avec un SIG (Système d’Information Géographique) de haute précision.

La Société Forestière Amazonia a indéniablement un rôle moteur et exemplaire dans son secteur. Ce rôle la pousse à entretenir son leadership, notamment au travers de l’innovation et d’une démarche qualité continue. Dans un avenir proche, SFA ne pense pas augmenter significativement de taille ; elle peut toutefois envisager une croissance de son revenu grâce à des outils sans cesse améliorés et permettant une productivité sans égal dans le secteur.

3.4.4.2 Faible lisibilité du marché et inadéquation offre-demande

Le débouché principal du bois guyanais est le BTP. Or, le lien entre la filière bois et ce secteur est souvent compliqué à établir, du fait notamment d’un manque de communication. Ainsi les opérateurs de la filière bois souffrent-ils souvent d’un manque de lisibilité du marché car les commandes, du fait d’un défaut d’anticipation des chantiers, ne tiennent pas compte des contraintes de la filière (notamment sur la saisonnalité de l’exploitation forestière).

Par ailleurs, bien que la Guyane propose 70 essences commerciales, seule une minorité de ces essences a la faveur des maitres d’œuvre. Cet état de choses conduit à une pression intense sur ces ressources spécifiques et à une difficulté croissante pour répondre à la demande, tant en termes de quantité (nombre) que de qualité (nature et taille) de grumes.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 106

Une des missions de l’interprofessionnelle du bois consiste à améliorer l’adéquation offre-demande en communiquant notamment sur les contraintes amont de la filière et les nouvelles essences en cours d’essai et de validation/normalisation (via la MFBG).

3.4.4.3 Des secteurs formés par des entreprises de trop petite taille

La filière bois est constituée de peu de PME, dont la taille excède d’ailleurs rarement 15 personnes. Quelques-unes d’entre elles bénéficient de l’adossement à de grands groupes, mais cette configuration n’est pas représentative. La faible proportion de PME empêche la filière d’acquérir la masse critique qui pourrait lui permettre de :

• améliorer sa capacité d’autofinancement :

Cette caractéristique est d’autant plus dommageable que l’effort bancaire d’appui à l’investissement ou au financement de la trésorerie (pour les stocks) est inexistant en Guyane.

• devenir plus attractive auprès de la main d’œuvre locale :

La filière souffre pour l’instant d’un défaut d’attrait auprès des jeunes, ce qui risque de conduire à un défaut de main d’œuvre locale pour absorber la croissance prévue de l’activité.

3.4.4.4 Un équilibre financier précaire de la filière

La compétitivité coût de la filière semble artificiellement maintenue par deux phénomènes principaux :

• La vente à perte du bois sur pied :

L'ONF supporte de lourds frais d’exploitation qu’elle ne reporte pas toujours sur le prix de vente aux exploitants forestiers. Les frais d’ouverture de pistes sont un des principaux postes de dépenses menaçant l’équilibre financier de cet acteur clé de la filière ; la fin programmée de ces opérations n’est pourtant pas prévue avant une trentaine d’années.

• Un soutien financier public prépondérant :

Le financement privé en Guyane est très faible. Ainsi le modèle financier et la compétitivité de la filière se basent-ils de manière prépondérante sur les outils publics (financiers et fiscaux) dont le renouvellement peut être remis en cause. La menace liée aux choix politiques de programmation des fonds européens, mais surtout au remaniement possible de la « défiscalisation », est bien réelle.

La compétitivité coût est décisive pour la filière. Sa remise en cause, ajoutée au manque de capacités de production, serait une porte ouverte aux produits de substitution européens et brésiliens, aussi bien sur le marché local que sur le bassin d’exportation prioritaire de la Guyane (les Antilles).

3.4.4.5 Des normes parfois inadaptées

Globalement, la normalisation a plutôt eu un impact positif sur la filière en forçant la professionnalisation du milieu (marquage CE, gestion durable). Néanmoins, les règles de dimensionnement des éléments de structure (charpentes) restent à ajuster. En effet, les modes de calcul européens des structures peuvent être vécus comme une menace pour la filière car ils conduisent à des demandes parfois difficiles à satisfaire localement, et incitant donc potentiellement à l’importation. Le sentiment est que la spécificité locale n’est pas toujours prise en compte et que les bois tropicaux sont actuellement exploités de manière inadaptée113.

113 Les bois tropicaux présentent des densités spécifiques (résistance et assemblage), de moins fortes sections et des irrégularités plus fréquentes (limitant les sections et longueur de produits sciés accessibles) en comparaison des bois européens.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 107

Un travail d’adaptation de ces règles est en cours, notamment en coopération avec la DAAF qui travaille activement à la remontée au niveau européen des spécificités régionales.

3.4.5 Evaluation du rôle joué par les politiques publiques et les dispositifs d’accompagnement 3.4.5.1 Un vaste dispositif d’aides publiques

Le soutien public par la demande, précédemment souligné, est complété par un important dispositif d’aides. Globalement, les acteurs semblent satisfaits de ces dispositifs, dont l’utilisation pourrait, selon certaines voix, être mieux contrôlée afin d’en optimiser l’effet.

Les dispositifs les couramment mobilisés et venant en support d’investissements privés assez fragiles sont :

• Les dispositifs européens :

Ce sont principalement les fonds FEADER pour les exploitations forestières et les fonds FEDER pour le reste de l’industrie. Ces deux fonds ont principalement servi à la modernisation des équipements. Ils sont complétés par le FSE, soutenant la formation dans différents centre spécialisés (CFPA, RSMA, …).

3.4.5.2 Les dispositifs nationaux :

Le dispositif d’allégement fiscal est l’un des principaux leviers du développement et du renforcement de la compétitivité industrielle de la filière bois (et du reste de l’industrie guyanaise). Il est complété par des dispositifs plus modestes tels que les apports du CIOM, de la DATAR/FNADT et du FED.

• Les dispositifs mis en place par les collectivités :

Les collectivités soutiennent la filière par des investissements directs. Malgré des efforts non négligeables, ces initiatives locales semblent souvent peu lisibles tant sur leur portée que leur intensité.

• Les dispositifs de soutien parapublics :

Le soutien apporté par l’AFD et OSEO, avec un système de cautionnement, est parmi les plus remarquables et les plus appréciés.

Il faut cependant noter que la période de programmation de la majorité de ces fonds arrive à échéance en 2013. La filière est donc actuellement en attente des nouveaux arbitrages touchant la Guyane pour la période de programmation 2014-2020. Par ailleurs, la menace de suppression des dispositifs d’incitations fiscales est vécue avec angoisse par l’ensemble de la filière.

3.4.5.3 Quelques acteurs institutionnels incontournables

Au-delà des aspects financiers (financement et demande motrice du marché), le secteur public semble relativement peu interagir avec la filière bois.

Pour des questions n’ayant pas trait à des financements, pour lesquels les guichets sont multiples, deux interlocuteurs forts semblent toutefois incontournables pour améliorer l’organisation de la filière : la DAAF (Direction de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt) et l’ONF (Office National des Forêts) :

• La DAAF travaille à faire remonter au niveau européen les requêtes de prise en compte de la spécificité locale (au niveau règlementaire particulièrement).

• L’ONF est quand à lui l’acteur incontournable de la filière, car seul gestionnaire de la forêt. Il participe à l’organisation de la filière et à la professionnalisation des acteurs, particulièrement les exploitants forestiers.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 108

3.4.6 La filière considérée est-elle une filière d’avenir ? La filière bois constitue une véritable filière d’avenir pour l’économie guyanaise, notamment sur un positionnement « bois durable » permis par le label PEFC. Elle occupe déjà une place prépondérante dans l’économie et présente des atouts forts pour poursuivre son développement.

3.4.6.1 La filière bois : expertise, dynamisme et structuration.

La filière s’appuie sur des entreprises ayant une expertise forte des métiers du bois et dont la majorité présente plus de 10 ans d'expérience (chacune dans leurs secteurs respectifs) : ces acteurs expérimentés peuvent et doivent devenir les moteurs de l’amélioration de la filière.

Cette expertise est complétée par un dynamisme individuel non négligeable des acteurs. Il se caractérise par de l’innovation technologique et de l’innovation de marché. Des solutions qui seront bénéfiques pour l’ensemble de la filière sont ainsi en cours de développement localement. On peut par exemple citer les développements en cours sur :

• les systèmes de cartographie et de planification d’itinéraires qui permettront l’amélioration de l’exploitation forestière ;

• les techniques de réalisation de lamellé-collé en bois tropicaux qui permettront l’amélioration de l’adéquation offre-demande ;

• la fabrication de maisons en kit à base de bois tropical de Guyane qui ouvriront le marché privé (tourisme, logement).

Enfin, de manière collective, la coopération entre les différents acteurs permet une meilleure communication, facteur de développement de la filière. Cette coopération est illustrée par la création de l’interprofessionnelle du bois (2009) où l’ensemble des professionnels de la filière, regroupés en collèges, sont représentés. Plus récemment un outil opérationnel de l’interprofessionnelle, la MFBG, qui réalise des essais et travaille sur la normalisation des bois de Guyane, a été mise en place.

3.4.6.2 Un potentiel de création d’emploi important (à l’échelle de la Guyane)

Les objectifs de la filière sont pour l’instant réalistes avec une exploitation ciblée de 100 000 m3, soit un accroissement de la production de l’ordre de 33%. Cette intensification de la production devrait entraîner un développement de l’ensemble de la filière et notamment des secteurs de l’exploitation forestière, du transport et de la logistique des grumes, ainsi que de la maintenance des outils.

Pour la seule exploitation forestière, un rapport de l’ONF de 2007 prévoyait déjà la création de plusieurs dizaines d'entreprises, apportant à la Guyane des investissements financiers de l’ordre de 30M€, et près de 300 nouveaux emplois directs et durables en 10 ans.

3.4.6.3 Deux axes prioritaires à travailler

Pour parvenir à répondre aux enjeux de la filière précédemment mentionnés (marché du bois d’œuvre et de la biomasse), la filière bois doit aujourd’hui renforcer la capacité du chaînon limitant actuellement la chaîne de valeur et améliorer l’adéquation entre l’offre et la demande.

• Le renforcement de la capacité de l’exploitation forestière ne peut se faire qu’avec une meilleure professionnalisation du secteur : celui-ci manque globalement d’efficacité sur des problématiques d’ordre technique (outils vieillissants, difficulté de recrutement …) et financier (professionnalisation de la gestion financière, consolidation de la trésorerie pour le financement des stocks …).

• L’amélioration de l’adéquation offre-demande est accessible par une meilleure communication sur les qualités du bois de Guyane auprès des maitres d’œuvre et d’ouvrage (inciter à la diversification de la demande), ainsi que par la qualification

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 109

active d’un nombre d’essences plus élevé (proposer une meilleure diversité de solutions).

Ces deux pré-requis conditionnent l’intensification de l’activité de la filière aussi bien pour répondre au marché du bois d’œuvre que le marché de la biomasse.

3.5 La filière Bâti tropical

La filière « bâti tropical » a été retenue pour la Réunion. Il convient cependant de souligner qu’elle aurait pu l’être également en Guadeloupe dans la mesure où quelques laboratoires de recherche travaillent dans ce domaine, qui est par ailleurs aux marges du pôle Synergîle.

3.5.1 Périmètre de la filière 3.5.1.1 Définition de la filière

Globalement, la filière peut être définie comme comprenant la création, la restauration, la rénovation ou la réhabilitation de bâtiments, avec prise en compte des spécificités tropicales (avec les risques afférents : cyclones, termites, …) et des problématiques actuelles de développement durable et de maîtrise de l’énergie (dans un environnement où la ressource énergétique est rare et chère).

Concrètement, la filière bâti tropical ou bâtiment à faible impact environnemental dans un contexte tropical recouvre deux grands champs d’activités :

• les matériaux et la construction : c'est-à-dire les matériaux bio-sourcés issus de ressources végétales renouvelables, recyclables et générés à partir de ressources locales ; et les acteurs du bâtiment qui mettent en œuvre ces matériaux ;

• les systèmes énergétiques qui regroupent les équipements contribuant à la maitrise de l’énergie (par exemple : équipements de régulation, services d’optimisation de la consommation énergétique…), l’utilisation d’énergies renouvelables (ENR) dans le bâtiment (photovoltaïque intégré dans le bâti, chauffe-eau solaire) au travers des équipements permettant leur intégration au bâti. Cela inclut également les services de diagnostic énergétique.

La chaîne de la valeur de la filière peut être décomposée autour des métiers suivants :

• les fabricants et/ou distributeurs de matériaux pour la construction ;

• les fabricants, distributeurs et/ou installateurs d’équipements contribuant à la maîtrise de l’énergie ;

• les entreprises de bâtiments et travaux publics ;

• les services d’ingénierie et de conception (bureaux d’études, architectes) ;

• les aménageurs et promoteurs publics et privés ;

• les propriétaires de patrimoine bâti, en particulier les collectivités publiques (par exemple la Région pour le parc de lycées).

3.5.1.2 Liens éventuels avec d’autres filières prises en considération sur le territoire (ou qui pourraient l’être)

La filière bâti tropical entretien des liens étroits avec la filière ENR dans sa composante photovoltaïque, chauffe-eau solaire et smart grids. La filière bâti tropical est sans doute d’ailleurs l’un des points d’appui essentiels de la diversification des acteurs du solaire.

3.5.1.3 Entreprises rencontrées : bref descriptif et évaluation de leur représentativité

L’éventail des interlocuteurs rencontrés permet de couvrir l’ensemble des intervenants de la filière, ainsi que les problématiques propres à chaque branche de la filière.

Ont été rencontrés :

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 110

• des acteurs institutionnels : SGAR, Conseil Régional

• des organisations représentatives de la filière : Association pour le Développement Industriel de la Réunion (ADIR), NEXA, Société Immobilière du Département de la Réunion (SIDR), École d’architecture du Port, CIRBAT

• des entreprises : CBO Territoria, Pierre & Bois, Socotec Réunion

3.5.1.4 Quelques chiffres et données de contexte

On rappelle qu’au niveau national, la filière bâtiment dans son ensemble (incluant les phases de construction et d’usage des bâtiments) représente 310 000 entreprises, et 1,3 millions d’emplois. A La Réunion, le secteur représente 17 000 emplois directs et un chiffre d’affaires de l’ordre de 1,3 milliards d’euros en 2011. Ces effectifs restent nettement en dessous du plus haut point atteint en octobre 2008 (près de 25 000 salariés)114. Les TPE dominent très fortement : 94% des entreprises ont moins de 10 salariés (dont 63% aucun), et 1% seulement a plus de 50 salariés.

Les années 2009 et 2010 auront marqué une chute sévère et historique de l’activité du BTP, suite au choc économique. L’allègement des règles de défiscalisation, le recul de la commande publique, la fin des grands chantiers ont pesé sur la construction dès octobre 2008.

L’année 2011 se solde par un chiffre d’affaires du BTP estimé autour de 1,35 milliard d’euros. La situation a cessé de s’aggraver, mais le bilan économique reste critique. Le logement social et l’augmentation de la commande publique intervenue en 2011 ont permis un regain de l’activité (graphique1).

En effet, la production de logements sociaux a fortement augmenté depuis 2009, portée par de nouveaux modes de financement et de production. Côté financement, la Loi de développement économique pour l’outre-mer (LODEOM) permet de compléter la ligne budgétaire unique (LBU) par un investissement en défiscalisation. Côté production, depuis 2008, les bailleurs ont eu la possibilité, dans le cadre du plan de relance, d’acquérir des opérations en vente en l’état futur d’achèvement (VEFA) auprès d’opérateurs privés. Le logement social représente aujourd’hui plus du quart de l’activité de la filière.

114 INSEE, Le BTP se stabilise, 2012, http://www.insee.fr/fr/insee_regions/reunion/themes/revue/revuehs12/revuehs12_BTP.pdf

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 111

En revanche, la production de logements privés, hors opérations vendues aux bailleurs sociaux, a poursuivi sa baisse en 2011.

La commande publique de manière générale (en bâtiment et travaux publics) aura connu en 2011 un regain d’activité. Comparativement aux années 2000 – 2008, au cours desquelles la commande publique représentait environ la moitié de l’activité de la construction, sa part a très fortement augmenté depuis deux ans pour représenter plus de 65 % de l’activité de la filière en 2011.

3.5.2 Enjeux identifiés Les enjeux en termes d’emploi sont évidemment importants, du fait du poids du BTP dans l’économie régionale.

On insistera donc ici pour l’essentiel sur les enjeux en termes de marchés.

3.5.2.1 Marché local

L’enjeu majeur de la filière BTP dans son ensemble, et de la filière bâti tropical en particulier, est avant tout la réponse à la demande intérieure, sous la conjugaison de trois facteurs :

• les besoins en logement du territoire (1500 logements sociaux / an en 2007-2008, 4500 / an en 2011) et les besoins en équipements structurants (croissance démographique) ;

• les changements de règlementation fixant de nouvelles exigences (c’est le cas par exemple dans le domaine des chauffe-eau solaires imposés pour toute construction neuve par la RTAA-DOM) ;

• l’état du patrimoine bâti qui présent un retard important en matière de consommation énergétique ; en effet :

« Un bâtiment tertiaire moyen sur l’Île consomme un équivalent de 100 à 150 kWh/m2/an d’énergie électrique alors que les exigences européennes de 2012 en matière de bâtiment basse consommation précisent que tous les bâtiments devront consommer en métropole 50 kWh en énergie primaire, soit 22 kWh/m2/an d’énergie électrique. Lorsqu’elles sont appliquées à La Réunion, ces exigences descendent à 15 kWh/m2/an »115. Il y a donc un enjeu de rénovation du patrimoine existant. En matière de chauffe-eau solaire dans le logement social, la Société immobilière du Département de la Réunion (SIDR, société d’économie mixte) a équipé 9500 logements depuis 2000 pour un parc de 22000 logements).

Pour mémoire, les projections au plan national menées dans le cadre du Grenelle de l’Environnement font état d’un potentiel de création nette de valeur et d’emplois de l’ordre de 10% sur la filière BTP dans son ensemble116.

La filière « bâti tropical » dispose d’un fort potentiel de développement intérieur avec des acteurs actifs tout au long de la chaîne de la valeur.

Dans le domaine des matériaux, les matériaux traditionnels sont principalement importés (béton, placoplâtre, bois…). La biomasse locale (déchets végétaux) est très peu exploitée pour la construction, tandis que la filière biomatériaux n’existe pas.

Bourbon Isolation Écologique importe de la ouate de cellulose recyclée. Haclave Océan Indien développe l’intégration de scories (pierre de lave) en fort pourcentage dans le béton permettant de fournir un matériau fabriqué localement, renouvelable et recyclable. Ce projet est toutefois en phase préindustrielle de développement sur la base d’un procédé breveté, mais connaît des difficultés pour se financer. D’autres

115 Etude sur la caractérisation des filières de la croissance verte à La Réunion, DEAL, 26 octobre 2012 (Aprim & Associés).

116 Les filières industrielles stratégiques de l’économie verte, CGDD, mars 2010

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 112

projets sont à l’étude (en phase de R&D) sur l’utilisation du Chryptomeria (bois local) pour de l’aggloméré (sans que cela ait nécessairement un fort potentiel de développement faute de ressources suffisantes), et du bambou à croissance rapide (École d’Architecture).

Dans le domaine des systèmes énergétiques, Schneider Electric distribue ses équipements, ses solutions et services pour optimiser la transmission, la conversion et la gestion de l’énergie. TEEO développe aussi des systèmes de gestion électrique. Les entreprises du solaire (COREX par exemple) développent des solutions de production d’électricité solaire à partir de photovoltaïque couplé à du stockage chez les particuliers.

Par ailleurs, un savoir-faire se développe sur les techniques de construction spécifiques au milieu tropical (par exemple pour la ventilation naturelle des bâtiments en alternative à la climatisation). Arcelor Mittal Réunion développe sur place des systèmes de ventilation sous les toitures, l’École d’Architecture a déposé des brevets sur des systèmes de tours d’extraction (mis en œuvre dans le cadre de la ville nouvelle aménagée par CBO Territoria sur la commune de Sainte-Marie) ; Eco Tôle Réunion réalise des études et des pliages de « tôles tropicales ».

Dans le domaine de la climatisation, l’ADEME a accompagné un projet du PREBAT sur la climatisation des locaux tertiaires (notamment bibliothèque, amphithéâtre…) en vue d’en réduire l’usage, voire de le supprimer en utilisant des principes constructifs adaptés au climat tropical. Autour de ce projet, l’ADEME a structuré un réseau d’acteurs associant les architectes, les BET (LEU par exemple), les entreprises locales de construction, CBO Territoria (aménageur).

Côté aménageur, la SIDR développe des projets de bâtiment durable dans le domaine du logement social. CBO Territoria, société d’aménagement privée, développe un éco-quartier sur le site Beauséjour (Commune de Sainte Marie) qui inclut la pose de CES, des équipements de stockage de froid sur les bâtiments professionnels, des systèmes de circulation de l’air dans les bâtiments et d’économie de consommation en eau, etc., intégrés dès la phase de conception du bâtiment et du quartier dans son ensemble, ce qui permet dans une certaine mesure de maîtriser les coûts (même si cela reste 10 à 15% plus cher que les constructions normales).

Dans le domaine de la recherche et développement et de la formation, la Réunion dispose également d’acteurs dédiés.

A l’Université, deux laboratoires, le PIMENT et le LPBS, sont concernés et conduisent notamment des projets ANR (programme PREBAT et HABISOL).

La Chambre des Métiers a créé le CIRBAT, labélisé pôle d’innovation pour les TPE et l’Artisanat par le Ministère de l’Industrie (DGCIS) sur le bâti tropical. Le CIRBAT effectue des travaux de recherche appliquée et dispose d’un matériel de test et de contrôle mis à disposition des acteurs privés (par exemple dans le domaine du traitement contre les termites).

De son côté, l’IUT a développé un pôle de formation dans le domaine de la maîtrise de l’énergie et des ENR ; tandis que l’école d’ingénieurs ESIROI propose une spécialité « ingénieur construction durable ».

L’École d’Architecture (110/120 étudiants pour 35 enseignants) est également très active et bien reconnue sur le domaine. Antenne de l’ENSAM (Montpellier), elle travaille régulièrement avec les acteurs locaux (SEM, CBO Territoria, les collectivités, les bureaux d’étude….) et a noué des accords de coopération avec le CEA sur l’intégration au bâti des panneaux solaires. Depuis peu, l’École développe des collaborations à l’échelle de l’Océan Indien.

Des travaux sont conduits également dans le domaine de la certification.

L’ACERBAT, en lien avec le CIRBAT, travaille à la certification « tropicalisée » de matériaux et procédés de construction, et tient à jour une « matériauthèque ». Les

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 113

industriels ont créé le label GEOCERT qui certifie que les produits sont adaptés à l’environnement climatique réunionnais (humidité, U.V., cyclones et termites).

ACERBAT (Association pour la Certification des Entreprises Réunionnaises du BATiment) est issue du programme d’action du contrat de filière et elle a été fondée en 2010 par les partenaires locaux (ADIR, Chambre des Métiers, CERBTP). Elle est positionnée comme un organisme d’évaluation de la conformité des produits et services du bâtiment en milieu tropical auprès des organismes de certification locaux et nationaux. Elle porte le projet d’un centre d’expertise technique du bâtiment (objectif visé : un CSTB pour les matériaux adaptés au climat tropical) favorisant la mise en œuvre, l’innovation et l’adaptation des règles de construction au contexte local. Elle a donc comme objectifs de permettre le développement industriel de procédés et matériaux nouveaux et leur usage dans la production des bâtiments publics et privés.

L’association est gestionnaire des marques de qualité des produits et services GEOCERT® et artisan Qualité® et elle a mis en place des partenariats avec des instances de normalisation et des organismes techniques et scientifiques, afin de participer activement, en liaison avec les acteurs locaux, à l’adaptation des textes normatifs.

L’association sert donc de relais local d’information des certifications existantes à la Réunion, met à disposition des moyens d’évaluation locaux nécessaires pour assurer les contrôles prévus dans les référentiels de certification (identification des auditeurs et inventaire des installations d’essais), et propose des adaptations des référentiels de certification aux contraintes environnementales locales en complémentarité avec la certification concernée pour valoriser cette adaptation au contexte réunionnais (en associant la marque GEOCERT®).

Par ailleurs, le Conseil d’Architecture, d’Urbanisme et de l’Environnement (CAUE974) anime un centre de Ressources Qualité Environnementale du Cadre Bâti, enviroBAT-Réunion qui vise à diffuser les bonnes pratiques, organiser des formations à destination des acteurs du BTP et des collectivités, et des ateliers techniques avec la profession.

3.5.2.2 Marché extérieurs

Les acteurs identifient clairement de belles opportunités à l’international pour le savoir-faire réunionnais dans le domaine du « bâti tropical durable ».

Des besoins communs émergent sur tout le pourtour de l’Océan indien, notamment dans le domaine de la maîtrise énergétique des bâtiments. Les programmes intégrés nationaux et les programmes intégrés régionaux du FED flèchent les investissements sur des bâtiments plus durables.

La Réunion dispose de l’ensemble des acteurs sur la chaîne de la valeur et est donc en capacité de proposer des offres intégrées de services, de la conception à la réalisation, intégrant les aspects matériaux et gestion énergétique des bâtiments. Il reste cependant à : (i) développer localement cette offre de services autour d’opérations exemplaires ; (ii) structurer cette offre, et la promouvoir dans une approche globale à l’échelle du bâtiment ou d’un quartier.

Dans le domaine des chauffe-eau solaires, ce potentiel commence à se réaliser avec le projet d’implantation du groupe Dijou en Afrique du Sud pour la production de CES, et le positionnement de Solar Prod sur le marché mauricien. Dans les deux cas, la stratégie adoptée est la production locale de CES dans les pays visés (Solard Prod fabrique à la Réunion) pour être compétitif vis-à-vis de la concurrence chinoise.

Par ailleurs, l’École d’Architecture est à l’initiative de l’association IONAS (Indian Ocean Network of Architecture Schools) qui regroupe des écoles d’architecture d’Afrique du Sud, de Malaisie, de Singapour, d’Inde et d’Australie. L’initiative démarre, l’objectif à terme est de développer les échanges d’étudiants, les échanges de

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 114

connaissances (à travers des projets communs). Un accord est également signé avec Maurice pour la mise en place d’un Master à l’Ile Maurice.

L’ADEME anime également un programme d’échanges avec Maurice (issu d’un accord intergouvernemental signé par le Gouvernement mauricien et le Ministère français de l’Outre-mer) sur l’efficacité énergétique des bâtiments et pour faire du transfert de savoir-faire vers les architectes et les bureaux d’études mauriciens (organisation de séminaires thématiques en présence d’acteurs mauriciens mais également de sud-africains).

La mise en place de ces réseaux d’experts est a priori prometteuse pour générer dans le court-moyen terme des échanges d’affaires.

3.5.3 Avantages comparatifs actuels ou potentiels Sur le marché local, la construction durable « tropicalisée » revient 10 à 15% plus cher (comme c’est le cas en métropole) à condition d’adopter des approches intégrées dès la conception des ouvrages, ce qui permet ainsi de maîtriser les coûts.

Toutefois, les avantages comparatifs de l’utilisation de ce type d’approches se situent à différents niveaux :

• utilisation de ressources locales pour les matériaux, à la place d’intrants importés (exemple des scories de lave à la place du béton), avec la possibilité de développer des filières locales de production ;

• réduction de la facture énergétique des bâtiments (avec un amortissement du surcoût sur de longues périodes, généralement sur 15 à 20 ans) ;

• participation à la réduction des émissions de CO2 et à l’adoption de démarches environnementales (exemple de la limitation de l’usage conforme aux exigences de la règlementation et des objectifs de l’UE).

A l’international, l’avantage comparatif de la Réunion sur le bâti tropical tient à la présence d’acteurs tout au long de la chaîne de valeur de la filière, potentiellement en capacité de proposer des offres de services intégrés.

Elle tient également à un potentiel de recherche et développement dans le domaine lié aux travaux de l’université et de l’École d’Architecture, ainsi que du pôle CIRBAT.

Les travaux sur la certification des matériaux (CIRBAT et ACERBAT) constituent également des avantages intéressants pour proposer des référentiels et des normes de certification aux pays voisins susceptibles d’utiliser les matériaux utilisés à La Réunion.

En revanche, il est clair que l’exportation de produits fabriqués à La Réunion (de type CES) n’est pas suffisamment compétitive vis-à-vis de la concurrence des produits chinois dans la zone. L’alternative est l’implantation dans les pays de la zone pour développer des unités de production.

3.5.4 Handicaps et points faibles La filière est cependant confrontée à différents freins qui pénalise son développement tant sur le marché local que dans une logique d’expansion à l’international :

• les acteurs du « bâti tropical » demeurent encore peu nombreux et isolés sans interaction suffisante entre eux, ce qui fait qu’ils irriguent encore peu la filière BTP dans son ensemble ;

• la plupart des projets en cours portant sur des innovations concernent majoritairement des constructions nouvelles, alors que les besoins de rénovation sont très importants ;

• les projets démonstrateurs de bâtiments passifs ou à énergie positive sont encore peu nombreux, faute d’une dynamique suffisante ; l’approche globale et transversale des problématiques MDE, et plus largement de la construction

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 115

adaptée aux contraintes tropicales est encore peu mise en œuvre, même si les différents acteurs de la chaîne sont présents.

• le sujet est encore insuffisamment porté par la commande publique pour initier cette dynamique et conforter les compétences et savoir-faire développés localement ; le domaine de la rénovation thermique du parc de logements sociaux pourrait fournir un point d’appui pertinent pour initier à une grande échelle le regroupement des acteurs et consolider la croissance de la filière ; on notera que l’agence AFD de Saint-Denis étudie actuellement la question sur une cible de 5600 logements sociaux sur la période 2014-2020 et a d’ores et déjà identifié 5 postes de travaux qui pourrait intéressés la filière :

− les travaux de remise aux normes (réhabilitation de façades, travaux de confort…) ;

− les travaux relatifs à l’énergie et à l’eau (pour maitriser les consommations d’énergie et d’eau dans les parties communes) ;

− les CES (obligatoires) ;

− la résidentialisation (travaux par exemple sur la mise en valeur des parties communes) ;

− et le désamiantage ;

• l’inertie est également forte sur l’usage de nouveaux matériaux de la part des fabricants de béton et des importateurs de matériaux pour la construction.

A l’international, les freins sont importants :

• les entreprises du domaine sont petites et peu structurées en interne pour aller à l’export, d’autant que le marché local suffit pour le moment à les faire vivre ;

• les barrières règlementaires et de certification sont importantes, d’où l’importance de développer une expertise réunionnaise spécifique sur la certification et de se mettre en réseau avec des organismes similaires dans les territoires voisins pour influer sur la production des normes ;

• le manque de structuration de l’offre réunionnaise et le déficit d’approche mutualisée entre les acteurs freine le développement sur des territoires voisins prometteurs comme Maurice.

3.5.5 Evaluation du rôle joué par les politiques publiques et dispositifs d’accompagnement Le caractère incitatif des politiques publiques en région est jugé insuffisant. Les acteurs plaident pour une politique régionale de la commande publique qui fasse davantage de place à la question du bâti tropical.

Par ailleurs, la visibilité des aides à l’export et d’accompagnement à l’international est jugée faible.

3.5.6 La filière considérée est-elle une filière d’avenir ? La filière bâti tropical est clairement une filière d’avenir porteuse d’emplois locaux, avec une possibilité d’exportation de services et d’ingénierie. D’ores et déjà, des pionniers se positionnent à l’international dans les CES, mais aussi quelques bureaux d’études techniques.

La Réunion dispose d’acteurs situés sur l’ensemble de la chaîne de la valeur de la filière, y compris sur la partie R&D et certification. Elle est en capacité de drainer un secteur d’activité majeur de l’île, le BTP dans son ensemble, et de jouer du croisement avec les acteurs « solaristes » en région et les quelques PME positionnées sur les smart grids.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 116

Cependant, son développement nécessite différents types d’accompagnements et d’actions :

• Il y a lieu d’accompagner une démarche de structuration de type « cluster » autour d’une feuille de route pour la filière afin de coordonner les différents acteurs qui ressortissent de différents domaines : BTP, smart grids, ENR mais également matériaux et gestion des déchets (recyclage des matériaux de construction). Cette structuration constitue le préalable à une démarche cohérente d’approche des marchés régionaux (Maurice, Seychelles en particulier).

• Il y a lieu de développer des compétences pour les phases de construction (utilisation de nouveaux matériaux, intégration des pratiques MDE), mais également dans les phases d’exploitation et de maintenance des systèmes de gestion intelligente des parties énergétiques des bâtiments, et dans le domaine de la certification, de l‘audit et du conseil.

• Il y a lieu de mener une politique d’accompagnement public incitative et de long terme, notamment via la rénovation thermique du patrimoine public, et l’inclusion dans les marchés publics de lots ciblés sur des champs d’activités en relation avec le bâti tropical. De telles actions seront structurantes pour amener les gros opérateurs à s’intéresser au bâtiment tropical durable, et appuyer le développement des savoir-faire locaux. Pour cela, les entreprises du secteur considèrent qu’il y a des actions de sensibilisation à l’égard des maîtres d’ouvrage pour comprendre les approches des coûts globaux des projets sur 10 à 15 ans, et non pas raisonner sur le simple surcoût de construction immédiat.

• Il y a lieu également d’appuyer les actions de R&D sur de nouveaux matériaux en particulier sur l’usage de la biomasse pour la construction, et en relation avec ces travaux de soutenir les processus de certification (ACERBAT), et le financement de l’industrialisation des procédés (financement de l’amorçage).

• Il y a lieu enfin de diffuser les pratiques pour qu’elles irriguent l’ensemble du secteur. Des grands du secteur de la construction sont pour le moment absent de ces évolutions (ex : le groupe Apavou).

4. Synthèse sur les facteurs de compétitivité et les avantages comparatifs

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 117

4.1 Guadeloupe : les filières Éco-tourisme, agriculture-Industries agroalimentaires et Énergies renouvelables

La filière Eco-Tourisme en Guadeloupe

Points clés de la filière

Points clés Maturité Émergente

Potentiel de création d’emplois

Fort – Moyen (effets directs importants sur les autres branches de l’économie locale : commerce, transport, services, et surtout l’agriculture, la pêche et l’agroalimentaire, ainsi que le bâtiment et la construction, et en particulier le bâti tropical durable)

Perspective Moyen terme

Positionnement Régional

Demande Demande spécifique dans l’éco-tourisme difficilement mesurable à ce stade

Données sur le Tourisme en général : 417 000 touristes de séjour ont été accueillis en 2011 pour une dépense totale estimée à 419 millions d’euros

On estime néanmoins que les groupes d’écotouristes restent généralement plus du double de temps que d’autres touristes à l’intérieur du territoire, dépensent plus et sont composés de 2 à 3 personnes en moyenne

Importance de la filière économique

Filière considérée comme le premier secteur économique

L’emploi salarié lié au tourisme est estimé à 5,4 % de l’effectif salarié total dont un tiers dans l’hébergement (la restauration étant le deuxième secteur d’activité concerné par le tourisme)

Les données sur le tourisme laissent apparaitre une progression de la richesse produite du territoire en lien avec la diversification vers l’écotourisme, mais l’appareil statistique dans ce domaine n’est pas développé et ne permet pas d’identifier clairement le nombre d’emplois dans la filière

Excellence scientifique

Mise en place d’une Licence Tourisme à l’Université Antilles-Guyane

Observatoire pour observer et analyser les tendances (CTIG)

Dynamisme de l'innovation

A ce stade, la dynamique porte surtout sur un travail effectué par le comité du Tourisme pour réaliser un diagnostic déclinant offre touristique d’activités (balnéaire, culture, vert, gastronomique…)

Les investissements sont centrés sur la rénovation et la création d’hébergements

Partenariat Région Guadeloupe - CCI –IG - CCI du Var pour la transposition d’un label environnemental dans le cadre du programme « Itinéraire Eco 3 »

Feuille de route et Le schéma de développement et d’aménagement touristique

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 118

objectifs long terme

(SDAT) de la Guadeloupe a été approuvé par la collectivité régionale lors de l’assemblée plénière du 24 septembre 2009. Cet outil d’aide à la décision permet de définir les grandes orientations de développement touristique en précisant ses implications en termes de développement économique et d’aménagement du territoire. Office du Tourisme de la Guadeloupe

Signatures de conventions d’objectifs de développement touristique par territoire

Leviers du développement à court et moyen terme

Potentiel de création d’emplois et de valeur

0  

1  

2  

3  

4  

5  Atouts  de  la  région  

Demande  

Importance  de  la  filère  économique  

Excellence  scienBfique  

Dynamisme  de  l'innovaBon  

Feuille  de  route  et  objecBfs  long  terme  

La  Filière  Eco-­‐Tourisme  en  Guadeloupe  

Socle  du  développement  à  

court  terme    

Socle  du  développement  à  moyen  terme    

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 119

Synthèse Atouts-Faiblesses-Opportunités-Menaces

Atouts Faiblesses • Richesse de la biodiversité de la

Guadeloupe • Forte proximité avec la France

hexagonale qui constitue le marché privilégié du territoire

• Structuration et la montée en gamme de l’offre en hébergements / développement de nouveaux modes d’hébergement

• Gouvernance d’ensemble en place et fonctionnant plutôt bien

• Nombreuses actions phares montrant la pertinence des ambitions et des axes recommandés par les schémas régionaux avec une déclinaison de la stratégie par territoire

• La présence d’acteurs positionnés sur le segment de l’éco-tourisme

• Etc.

• L’offre globale d’hébergements est vieillissante malgré les progrès réalisés et elle reste très concentrée

• Absence de liaisons aériennes directes avec les principales capitales européennes (à l’exception de Paris)

• La structuration de la filière écotourisme n’est pas encore aboutie

• Aucune action de formation structurante n’a été réalisée, ni sur l’ensemble de la filière tourisme, ni sur la filière écotourisme, en dehors de l’organisation de formations aux labels de qualité

• Manque global de développement d’une logique de cluster du tourisme

• Etc.

Opportunités Menaces

Formations : quelques initiatives (hôtellerie, restauration…) Appui des pouvoirs publics : CTIG, Chambre de Commerce et d’Industrie des Îles de Guadeloupe, Syndicat d’initiatives, Parc national de la Guadeloupe…

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Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 120

• Existence d'un gisement de clients à « convertir » (habitants, croisiéristes, touristes régionaux, une partie des touristes de masse…) en touristes d’intérêts spéciaux (écotourisme, tourisme de pleine nature, tourisme historique et culturel, tourisme de santé, tourisme sportif, tourisme de mariage et de lune de miel…)

• Développement d’une logique de cluster du tourisme permettant d’inscrire plus généralement l’écotourisme dans l’ensemble des segments de la filière tourisme

• Développement d’une meilleure visibilité et lisibilité de la destination sur le marché du tourisme international en évitant une guerre des prix avec les autres concurrents de la Caraïbe

• Engagement dans une démarche stratégique plurisectorielle pour exploiter les synergies entre les différents acteurs de la filière tourisme/Eco-tourisme et plus largement avec les autres secteurs d’activité

• Renforcement de l’image du tourisme en Guadeloupe (positionnement marketing…).

• Maintien dans une logique de compétitivité-coût et prise de retard dans le développement d’une dynamique de compétitivité-hors coût, axée principalement sur la qualité et l’originalité des services offerts sur le marché

• Perte d’attractivité liée au vieillissement des structures d’hébergements

• Perte de visibilité de l’offre touristique liée aux faiblesses de la commercialisation d’une offre différenciée, diversifiée, spécialisée et labellisée

La filière Agriculture – Agro-alimentaire en Guadeloupe

Points clés de la filière

Points clés Maturité Mature

Potentiel de création d’emplois

Fort

Perspective Court terme, Moyen terme, Long terme

Positionnement Régional

Demande Les enjeux sont ceux de la sécurité alimentaire et d’un meilleur approvisionnement du marché local, tant en quantité qu’en qualité et régularité, et donc celui de la réduction de la dépendance alimentaire vis-à-vis de l’extérieur, qu’il s’agisse des importations en provenance de métropole ou bien de celles en provenance d’autres pays.

Une situation contrastée en terme d’autosuffisance pour quatre ensembles : fruits et légumes ; viande et produits de l’élevage ; produits de la pêche et produits de l’industrie agroalimentaire.

Une perception favorable qu’ont les consommateurs locaux

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 121

des produits dits « pays »

Lien important avec la filière des énergies renouvelables (en particulier la biomasse) et celle des transports (risque d’une rapide saturation du réseau routier)

Importance de la filière économique

Environ 4 % de la valeur ajoutée (secteur agricole : 1,1 % en 2010 ; secteur agro-alimentaire : 2,8 % en 2010).

Le secteur agroalimentaire concentre le quart des entreprises, avec une très forte prédominance des TPE.

L’emploi salarié dans l’agriculture est mal connu.

Excellence scientifique

Des compétences de recherche présentes au niveau local (INRA, CIRAD, BRGM…).

Des équipes de recherche reconnues en agronomie présentes sur le territoire

Dynamisme de l'innovation

De nombreux exemples de projets innovants, par exemple à l’export

Projet de création d’une Technopole de Guadeloupe qui devrait voir le jour d’ici la fin de l’année 2013, et dont l’agroalimentaire serait une des cibles privilégiées

Projet de création d’une halle technologique dans le secteur de l’agro-transformation

Feuille de route et objectifs long terme

La stratégie a notamment été portée par le SRDE adopté en 2006 et actuellement en cours d’évaluation.

Elle s’est aussi appuyée sur la SRI adoptée fin 2009.

Les travaux portant sur la prochaine génération de stratégies régionales en matière d’innovation sont en cours de réalisation en Guadeloupe (SRI-SI ou S3 impulsées par la Commission européenne) ; en Guadeloupe, la SRI 2009 accordait une place importante à la filière.

La stratégie est aussi en cours de mise à jour dans le cadre de la préparation des Programmes opérationnels 2014-2020.

Leviers du développement à court et moyen terme

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 122

Potentiel de création d’emplois et de valeur

Synthèse Atouts-Faiblesses-Opportunités-Menaces

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Atouts  de  la  région  

Demande  

Importance  de  la  filère  économique  

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Dynamisme  de  l'innovaBon  

Feuille  de  route  et  objecBfs  long  terme  

La  Filière  Agriculture-­‐Agro-­‐alimentaire  en  Guadeloupe  

Socle  du  développement  à  

court  terme    

Socle  du  développement  à  moyen  terme    

Infrastructures : aéroport international, infrastructures routières et maritimes. Formations : nombreuses initiatives, notamment portées par les interprofessions en cours de structuration Appui des pouvoirs publics : Interprofessions, organismes de recherche (CIRAD, INRA…), Instituts Techniques nationaux, Chambre d’Agriculture…

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Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 123

Atouts Faiblesses • Présence d’un foncier agricole et d’un

fort taux d’activité agricole pouvant servir de base pour la diversification des activités et l’approvisionnement de l’industrie agro-alimentaire

• Accompagnement performant assuré par les acteurs publics dans le cadre des politiques publiques régionales, nationales et de l’UE • structuration des filières agricoles

en interprofessions thématiques (Les Producteurs de Guadeloupe, IGUAVIE, IGUACANNE et IGUAFLHOR

• soutien aux agriculteurs et aux pêcheurs pour les encourager à mieux produire et à adapter la production à la demande locale

• Perception favorable qu’ont les consommateurs locaux des produits « pays »

• De nombreux exemples de projets innovants sur lesquels il est possible de capitaliser (par exemple à l’export autour des éléments suivants : la production à contre-saison, la qualité et typicité des produits, le positionnement sur le haut de gamme et les marchés du luxe, l’innovation non-technologique : marché, packaging)

• Etc.

• Apparitions de difficultés d’accès au foncier et réduction de la Surface Agricole Utile (du fait de l’étalement urbain)

• Désaffection des jeunes générations pour certains métiers concernés (pêche, agriculture…)

• Forte exposition aux aléas climatiques et à la volatilité des prix affectant les activités agricoles

• Structuration et professionnalisation des acteurs de la filière encore limitées

• Déficit en termes de capacités d’améliorations techniques : mécanisation, irrigation, savoirs technico-économiques, etc.

• Manque d’outils de financement de l’amorçage des projets d’innovation (technologique ou non) dans les industries agroalimentaires, la culture des entreprises restant marquée par l’intérêt lié au financement des investissements matériels, plutôt que par l’amélioration de l’organisation de l’entreprise, des processus de production ou de commercialisation

• Forte exposition à la concurrence des pays de la zone caraïbe et du Brésil : coûts de production inférieur, moindre importance des normes et réglementations européennes liés à la qualité et à la sécurité alimentaire

• Etc.

Opportunités Menaces

• Présence et accessibilité des ressources de grands pélagiques du large offrant un potentiel de développement

• Renforcement des capacités de première et deuxième transformation en tenant compte de la forte concurrence des produits importés et de la difficulté à mettre en place des outils de production adaptés à la taille du marché

• Structuration des filières et des interprofessions (déjà bien engagée pour les plus importantes)

• Engagement dans des démarches de diversification, modernisation des exploitations, amélioration de la qualité des produits

• Diminution progressive de la SAU • Poursuite de la réduction de la portée

des outils de la PAC ayant pour fonction de soutenir les prix (forte protection à l’importation, mécanismes d’intervention sur le marché intérieur)

• L’appui au regroupement d’entreprises continue de buter sur la capacité à trouver des porteurs de projet institutionnels ou représentatifs des entreprises concernées, ayant les moyens de travailler à la préparation et au suivi du projet (ingénierie de projet), et sur la capacité à créer du consensus.

• Etc.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 124

• Emergence de projets d’unités artisanales et semi-artisanales avec l’appui du FEDER et du FEADER (aides à l’investissement ou aides techniques importantes)

• Poursuite et l’extension de stratégies marketing haut de gamme

• Développement d’une stratégie de communication globale à l’échelle de la filière

• Etc.

La filière Énergies renouvelables en Guadeloupe

Points clés de la filière

Points clés Maturité Émergente

Potentiel de création d’emplois

Moyen - fort (on estime le potentiel à plusieurs centaines d’emplois directs : le nombre d’emplois directement créés dans le cadre de la mise en œuvre du PRERURE a été évalué à 2 500 d’ici 2025, soit 1500 dans le secteur de la MDE et 1 000 dans celui des ENR, dont 65 % pour le solaire thermique)

Perspective Court et moyen terme :

- à court terme, il ‘agit de développer l’offre régionale, consolider la filière et mettre les acteurs en position d’atteindre les objectifs fixés en termes de part des ENR dans le mix énergétique ;

- à plus long terme, il s’agit d’envisager les perspectives d’export de savoir-faire, d’ingénierie et d’expertise.

Positionnement Régional

Demande - La filière est portée par la demande locale : l’enjeu est d’assurer l’autonomie et la sécurité énergétique du territoire.

- Comme les autres DROM, la Guadeloupe dispose d’un mix énergétique qui lui est propre (Géothermie : 3,3 % ; Bagasse : 3,2% ; Eolien : 2,7 % ; Photovoltaïque : 2 % ; hydroélectricité : 0,9 % en 2011)

- Les ENR contribuent à hauteur de 30 % de la production d’électricité

- Trois secteurs apparaissent particulièrement impactés par le développement de la filière en Guadeloupe : BTP, fabrication des appareils producteurs d’énergie, l’agriculture pour la biomasse

Importance de la filière économique

- 1251 emplois pour l’ensemble du secteur de l’énergie au 31/12/2007 d’après l’INSEE (périmètre plus vaste que celui de la filière Energies renouvelables)

- Données chiffrées sur les entreprises et emplois difficilement accessibles.

- La filière s’appuie sur la présence de grands groupes ou de

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 125

leurs filiales sur le territoire (EDF, GDF Suez), de quelques filiales de PME nationales (Sunzil, Akuo Energy/Austral Energy, Aerowatt...) et de quelques PME locales.

- Les énergies renouvelables offriront davantage d’emplois sur des métiers traditionnels avec des nouvelles compétences, mais pas de nouveaux métiers.

- Le potentiel d’exportation concerne porte essentiellement sur du savoir-faire et de l’ingénierie technique, et secondairement sur de l’expertise en matière de définition de stratégie et de politique publique énergétique.

Excellence scientifique

Présence du pôle Synergile et d’un réseau de membres significatifs

La liste des partenariats actuels d’EDF en Guadeloupe montre en quoi le territoire est un réel lieu de recherche et d’expérimentation

Dynamisme de l'innovation

La Guadeloupe est un territoire de recherche et d’expérimentation par excellence : les contraintes de l’intermittence sur la gestion du réseau électrique imposent le développement de solutions de stockage, une optimisation de la gestion des réseaux, et une diversité dans le mix énergétique au niveau de la production d’électricité

Feuille de route et objectifs long terme

La région a adopté en juin 2008, le PRERURE (Plan énergétique régional pluriannuel de prospection et d’exploitation des énergies renouvelables (ENR) et d’utilisation rationnelle de l’énergie, qui fixe comme ambition pour 2020 un objectif d’utilisation de 50 % d’énergies en ENR.

Leviers du développement à court et moyen terme

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5  Atouts  de  la  région  

Demande  

Importance  de  la  filère  économique  

Excellence  scienBfique  

Dynamisme  de  l'innovaBon  

Feuille  de  route  et  objecBfs  long  terme  

La  Filière  Énergies  renouvelables    en  Guadeloupe  

Socle  du  développement  à  

court  terme    

Socle  du  développement  à  moyen  terme    

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 126

Potentiel de création d’emplois et de valeur

Synthèse Atouts-Faiblesses-Opportunités-Menaces

Atouts Faiblesses • Part déjà relativement élevée d’ENR

dans la production d’électricité avec un mix énergétique déjà diversifié

• Existence de savoir-faire locaux sur des technologies et procédés industriels

• Présence ancienne de filières économiques sur les énergies renouvelables et la présence de grands opérateurs industriels nationaux et internationaux (EDF, GDF et dans une moindre mesure Vergnet, etc.) qui développent des projets d’expérimentation/démonstration de nouvelles technologies et procédés industriels

• Rôle important de la commande publique : fort soutien des politiques et dispositifs publics qui abaissent les coûts d’expérimentation, de développement et d’installation, et

• L’impact sur le territoire en termes de création d’entreprises, d’emploi et de valeur ajoutée demeure relativement limité et reste de toute façon assez mal connu

• Capacités de production électriques actuellement limitées (délestages ponctuels opérés par EDF)

• Le développement de la filière ENR repose sur une approche en mode projet dans plusieurs segments (biomasse, STEP Marine, éolien…) et relève davantage du domaine du potentiel que de la réalité économique traduite en termes de création d’entreprises, d’emplois et de création de valeur ajoutée

• La filière ENR est fortement dépendante des évolutions des prix de rachat de l’électricité par EDF.

Infrastructures : 25 producteurs électriques (2008) répartis dans la géothermie, l’éolien, le photovoltaïque, l’hydrolique… Appui des pouvoirs publics : Grands groupes ou leurs filiales, Synergile, Agence de développement économique…

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Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 127

parfois aident à structurer la filière en mettant l’accent sur la R&D et l’innovation, comme avec Synergîle

• Etc.

• Les cadres règlementaires et financiers nationaux ne correspondent pas toujours aux spécificités des DOM. C’est le cas notamment du tarif de rachat de l’électricité fixé nationalement sans adaptation aux contraintes insulaires, ou des projets démonstrateurs dans le cadre des investissements d’avenir, qui ne donnent pas de manière spécifique une place aux DOM.

• Etc.

Opportunités Menaces

• Contexte insulaire, géographique et climatique propice au développement de nouvelles techniques et technologies de production d’ENR et de gestion des réseaux électriques.

• Renforcement de la capacité d’expertise locale par un approfondissement des relations entre les groupes nationaux présents sur place, les PME et les équipes de R&D locales.

• Le potentiel d’exportation porte essentiellement sur du savoir-faire et de l’ingénierie technique, et secondairement sur de l’expertise en matière de définition de stratégie et de politique publique énergétique.

• Les menaces varient d’une source d’énergie à l’autre : • photovoltaïque et l’éolien : le

principal handicap est technologique et dépend des solutions à venir pour le stockage de l’énergie ;

• photovoltaïque : trois grands enjeux ou inconnues dans la durée (réglementation, mesures incitatives et dispositifs d’accompagnement)

• éolien : la présence de radars limite le développement de cette source d’énergie

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 128

4.2 Guyane : les filières Bois et Tourisme

La filière Bois en Guyane

Points clés de la filière

La filière Bois en Guyane : points clés Maturité

En maturation

Potentiel de création d’emplois Moyen

Perspective Moyen terme

Positionnement Local/Régional

Demande La totalité de la production est actuellement absorbée par les besoins du marché. Cette demande provient principalement du secteur du BTP.

Le marché pourrait absorber les 215 000 m3 de bois que la filière a le droit d’extraire annuellement, soit un potentiel de croissance de volume supérieure à 100%.

Importance de la filière économique 4ème filière économique de Guyane

Excellence Technique Expérience importante des acteurs du domaine (les entreprises ont généralement plus de 10 ans).

Dynamisme de l'innovation De nombreuses sociétés travaillent sur le développement de nouvelles offres de produits réalisés à partir de bois Guyanais (élargissement des débouchés).

Feuille de route et objectifs long terme Groupes de travail au niveau de

l’interprofessionnelle du bois

Leviers du développement à court et moyen terme

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 129

Potentiel de création d’emplois et de valeur

Synthèse Atouts-Faiblesses-Opportunités-Menaces

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5  Atouts  de  la  région  

Demande  

Importance  de  la  filère  économique  

Excellence  scienBfique  

Dynamisme  de  l'innovaBon  

Feuille  de  route  et  objecBfs  long  terme  

La  Filière  Bois  en  Guyane  

Socle  du  développement  à  

court  terme    

Socle  du  développement  à  moyen  terme    

Infrastructures : Routes nationales sur la bande littoral, quelques routes vers le centre des terres, de nombreuses pistes ouvertes par l’ONF.

Formations : Quelques formations pertinentes au RSMA (Formation aux métiers de la scierie), au Centre de Formation d’Apprentis Agricoles de Matiti et au Lycée Professionnel des Métiers du Bâtiment de Balata

Appui des pouvoirs publics : DAF, SGAR…

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Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 130

Atouts Faiblesses

• La filière peut compter sur une demande intérieure motrice. (La région Guyane a pour objectif de réaliser de plus 1 500 nouveaux logements sociaux par an.)

• La filière repose sur des entreprises d’expérience (supérieur à 10 ans pour la plupart)

• La forêt de Guyane est déjà certifiée PEFC (bientôt FSC), les entreprises sont en cours de certification et pour fournir des produits labélisés.

• Le système d’approvisionnement est fragilisé par la santé économique et le nombre limité d’exploitants forestiers.

• L’offre et la demande ont parfois du mal à se retrouver (le bois produit ne convient pas toujours à la demande et la demande ne convient pas toujours aux réalités de la filière bois).

• Aucun secteur de la filière ne possède de leader.

• Manque de main d’œuvre qualifiée.

Opportunités Menaces

• La forêt guyanaise possède environ 70 essences commercialisables. Seulement dix (environ) sont pour l’instant qualifiées, notamment pour le domaine du BTP.

• La filière pourrait connaitre un essor important si elle parvient interagir convenablement avec le secteur biomasse.

• La filière est pour l’instant compétitive grâce aux soutiens publics (tarifs avantageux du bois sur pieds, subventions…)

• Les normes européennes utilisées en Guyane pour le l’exploitation du bois ne tiennent pas compte des spécificités locales.

• Défaut d’attrait des métiers du bois auprès de la jeunesse et des personnes en reconversion.

La filière Tourisme en Guyane

Points clés de la filière

La filière Tourisme en Guyane : points clés Maturité

Émergente

Potentiel de création d’emplois Fort

Perspective Moyen terme

Positionnement Régional

Demande 110 000 visiteurs annuels en 2012, avec un potentiel de doublement d’ici 2020.

Importance de la filière économique 2ème filière économique (9% du PIB, en

réintégrant les comptes satellites du tourisme)

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 131

Excellence Technique Peu de formations spécialisées

Pas d’observatoire pour observer et analyser les tendances

Dynamisme de l'innovation Quelques offres caractéristiques de la destination (Séjours sur les marais, pêche sportive, observation des tortues luths…)

Feuille de route et objectifs long terme Schéma régional de développement du tourisme

et des loisirs (en cours de validation)

Leviers du développement à court et moyen terme

Potentiel de création d’emplois et de valeur

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5  Atouts  de  la  région  

Demande  

Importance  de  la  filère  économique  

Excellence  Technique  

Dynamisme  de  l'innovaBon  

Feuille  de  route  et  objecBfs  long  terme  

La  Filière  Tourisme  en  Guyane  

Socle  du  développement  à  

court  terme    

Socle  du  développement  à  moyen  terme    

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 132

Synthèse Atouts-Faiblesses-Opportunités-Menaces

Atouts Faiblesses

• Biodiversité unique et préservée

• Présence de la base spatiale de Kourou

• Positionnement en tant que territoire européen : véhicule une image globalement positive sur la sécurité (des biens, des personnes, sanitaire, financier…)

• Communication insuffisante pour la promotion de la destination

• Défaut d'une feuille de route stratégique forte (pour l'instant) appuyée politiquement et financièrement par les pouvoirs locaux

• Structuration inexistante de la filière (peu d'interactions et de synergies entre acteurs complémentaires)

• Absence d'un observatoire du tourisme donnant de la crédibilité à la destination (pour les investisseurs) et permettant aux acteurs d’anticiper sur les

SUPPORT

Infrastructures : 1 aéroport international, infrastructures routières surtout développées sur la bande littorale.

Formations : quelques initiatives en cours de développement (pour l’hôtellerie et la restauration et les guides)

Appui des pouvoirs publics : CTG, Atout France, CCI, Parc Amazonien de Guyane, Parc Naturel Régional de Guyane

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Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 133

tendances

Opportunités Menaces

• Filière en construction : possibilité de positionnement en tant que modèle régional de tourisme vert et durable

• Existence d'un important gisement de clients à convertir (habitants, croisiéristes, touristes régionaux)

• Réglementation mettant en péril des activités économiques (même historiques)

• Protectionnisme local faisant barrière au développement touristique dans certaines parties du territoire

• Dégradation inquiétante de la sécurité à l’intérieur des terres (présence de l’orpaillage illégal)

• Capacité d'accueil insuffisante (incapable d'absorber un accroissement de la demande)

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 134

4.3 Martinique : les filières Agriculture-Industries agroalimentaires et Énergies renouvelables

La filière Agriculture et agroalimentaire en Martinique

Points clés de la filière

La filière Agriculture et agroalimentaire en Martinique : points clés

Maturité Filière très ancienne mais encore peu structurée

Potentiel de création d’emplois

Elevé

Perspective Court et moyen terme

Positionnement Local et métropolitain essentiellement

Demande Marché local : 400 000 habitants, 490 000 touristes par an

Marché métropolitain (dont les diasporas antillaises et africaines pour certains produits)

Marché mondial (de luxe, pour quelques produits : rhum)

Importance de la filière économique

5% du PIB de la Martinique (INSEE 2009), 5,6% des salariés (Pôle emploi 2010)

Excellence scientifique Secteur d’activités parmi les plus innovants de Martinique et les plus dotés de structures d’appui (PARM, Technopole, IT2C, INRA, etc.)

Dynamisme de l'innovation L’un des plus forts secteurs d’innovation de Martinique : innovation sur les produits agricoles, sur la transformation, sur le positionnement marketing

Feuille de route et objectifs long terme

Programme de développement rural de Martinique

Leviers du développement à court et moyen terme

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 135

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5  Atouts  de  la  région  

Demande  

Importance  de  la  filère  économique  

Excellence  scienBfique  

Dynamisme  de  l'innovaBon  

Feuille  de  route  et  objecBfs  long  terme  

La  filière  agriculture  et  agroalimentaire    en  MarOnique  

Socle  du  développement  à  

court  terme    

Socle  du  développement  à  moyen  terme    

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 136

Potentiel de création d’emplois et de valeur

Synthèse Atouts-Faiblesses-Opportunités-Menaces

Atouts Faiblesses • Filière historique de production

de l’île ; agroalimentaire comme première industrie et premier secteur d’innovation

• Richesse de la biodiversité • Potentiel climatique élevé et

ressource en eau suffisante • Soutien des politiques publiques

pour la préservation des terres cultivables

• Conditions météorologiques pouvant extrêmes

• Vieillissement des salariés de la filière et problématique importante de la reprise des exploitations agricoles

• Etroitesse du marché local • Concurrence extrêmement forte

des produits d’importation (à des coûts ne permettant pas à la Martinique d’être compétitive)

• Habitudes de consommation (pomme et pomme de terre : produits agricoles les plus consommés de l’île dont la production locale n’est pas possible)

Potentiel : importance de la biodiversité agricole, végétale et animale

Formations : trois lycées agricoles (trois formations BTSA sur le végétal, l’animal et l’agroalimentaire), formation professionnelle

Appui des pouvoirs publics : implication du Conseil régional pour la production locale vivrière et l’innovation dans l’agro-alimentaire, PARM, Technopole Infrastructures : aéroport international, infrastructures routières et maritimes, rénovation et création d’hébergements.

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Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 137

Opportunités Menaces

• Marché intérieur à conquérir • Potentiel d’exportation de

certains produits sur certaines clientèles (diasporas caribéennes ou africaines en métropole) ou certains produits (positionnement du rhum sur le marché du luxe international)

• Organisation progressive des filières et des structures interprofessionnelles agricoles

• Développement de nouvelles habitudes de consommation (image positive renforcée de la production locale)

• Potentiel de production de bioénergie

• Diminution des surfaces agricoles utiles

• Pollution des sols (chlordécone) • Rivalité historique entre les

surfaces dédiées aux cultures vivrières et aux cultures d’exportation (banane, sucre)

• Structuration encore fragile des filières et faibles coopération entre les acteurs

• Fragilité des entreprises locales (petites entreprises à faible trésorerie), faible capacité d’innovation

La filière Energies renouvelables en Martinique

Points clés de la filière

Les énergies renouvelables en Martinique : points clés

Maturité Filière naissante

Potentiel de création d’emplois

Moyen

Perspective Moyen terme

Positionnement Local, voire régional

Demande Croissance élevée de la consommation d’énergie en Martinique dû à un dynamisme économique soutenu.

Emissions de gaz à effet de serre, actuellement élevées, à diminuer (importance des produits pétroliers dans la production d’électricité mise en cause).

Importance de la filière économique

Une vingtaine d’entreprises dans le secteur du photovoltaïque en 2000, deux aujourd’hui

Excellence scientifique Bon niveau, espace de recherche appliquée

Dynamisme de l'innovation Application locale de produits et services développés dans les autres régions d’outre-mer et en métropole

Feuille de route et objectifs long terme

Le Schéma Régional Climat Air Energie, conçu par le Conseil Régional et l’Etat, fixe comme objectif : 50% des d’énergies renouvelable à l’horizon 2020

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 138

Leviers du développement à court et moyen terme

Potentiel de création d’emplois et de valeur

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5  Atouts  de  la  région  

Demande  

Importance  de  la  filère  économique  

Excellence  scienBfique  

Dynamisme  de  l'innovaBon  

Feuille  de  route  et  objecBfs  long  terme  

La  Filière  ENR  en  MarOnique  

Socle  du  développement  à  

court  terme    

Socle  du  développement  à  moyen  terme    

Non-interconnexion des réseaux et fortes émissions de gaz à effet de serre qui imposent de trouver des solutions nouvelles

Formations : création d’une école d’ingénieurs en lien avec l’UAG spécialisée dans le secteur des matériaux et de l’environnement, formation technique et formation continue (installation PV, etc.)

Appui des pouvoirs publics : Forte implication du Conseil Régional (cf. habilitation législative énergie), agence martiniquaise de l’énergie, SEM Energie

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Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 139

Synthèse Atouts-Faiblesses-Opportunités-Menaces

Atouts Faiblesses • Atouts naturels de la Martinique

(ensoleillement) • Potentiel naturel pour l’énergie

thermique des mers • Potentiel de production de

biomasse (quoique insuffisant) • Expériences et techniques

développées dans d’autres régions d’outre-mer transposables à la Martinique

• Faiblesse naturelle : zone cyclonique (qui empêche l’installation de champ d’éolienne en mer par exemple et impose des contraintes techniques pour le photovoltaïque)

• Non adaptation des politiques publiques aux spécificités locales, donc application d’une législation parfois contre-productive.

• Fragilité des entreprises du secteur (de 20 entreprises dans le photovoltaïque à 2 aujourd’hui)

Opportunités Menaces

• Développement du photovoltaïque et de l’énergie des mers.

• Développement de production d’électricité à partir des déchets, de petites installations hydrauliques, de biomasse, de géothermie et d’énergie thermique des mers.

• Progrès  techniques  sur  le  stockage  des  énergies  intermittentes  

• Développement de solutions techniques adaptées au contexte local (PV en toiture, petites productions, etc.)

• Leviers d’action des politiques publiques pour soutenir la filière : défiscalisation tarif de rachat de l’électricité

• Accords  de  coopération  avec  le  Para  pour  l’importation  de  biomasse  

• Protection de la surface agricole utile (pour l’agriculture, qui empêche l’installation de fermes photovoltaïques)

• Politiques publiques aléatoires (tarifs de rachat, moratoire sur le photovoltaïque, etc.)

• Concurrence de les terres agricoles pour Potentiel en énergies renouvelables limité, et mal connu (ex : géothermie).

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 140

4.4 La Réunion : les filières Bâti tropical, ENR et Tourisme

La filière Bâti Tropical à la Réunion

Points clés de la filière

La filière Bâti Tropical à la Réunion : points clés Maturité A consolider

Potentiel de création d’emplois

Potentiel de requalification des emplois dans le BTP (plus forte valeur ajoutée) ; et création d’emploi dans le secteur de l’ingénierie et des services en particulier. Les projections au niveau national font état d’une création nette de valeur et d’emplois de 10% (CGDD)

Perspective Moyen terme

Positionnement Marché local réunionnais en premier lieu pour répondre aux exigences de réduction de la consommation d’énergie

Demande Demande croissante, mais qui doit être impulsée par les acteurs de la commande publique (opérations exemplaires)

Importance de la filière économique

17 000 emplois directs et un CA de 1,3 milliards d’euro en 2011 pour le secteur du BTP

Excellence scientifique Deux laboratoires (PIMENT et LPBS) sont impliqués, conduisent des travaux financés par l’ANR, et nouent des partenariats avec des groupes et PME locaux.

Dynamisme de l'innovation Une dynamique entrepreneuriale autour de petites PME locales, et de groupes implantés localement en association avec la recherche. Des moyens d’essais et de plateformes techniques à la chambre des métiers autour du pôle CIRBAT.

Feuille de route et objectifs long terme

L’accent est moins mis sur le bâti tropical que sur les ENR dans les documents de programmation stratégique. Cela dit les travaux relatifs à la stratégie de spécialisation intelligente l’identifient comme domaine de spécialisation

Leviers du développement à court et moyen terme

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 141

Potentiel de création d’emplois et de valeur

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5  Atouts  de  la  région  

Demande  

Importance  de  la  filère  économique  

Excellence  scienBfique  

Dynamisme  de  l'innovaBon  

Feuille  de  route  et  objecBfs  long  terme  

La  Filière  BâO  Tropical  à  la  Réunion  

Socle  du  développement  à  

court  terme    

Socle  du  développement  à  moyen  terme    

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 142

Synthèse Atouts-Faiblesses-Opportunités-Menaces

Atouts Faiblesses • Des acteurs actifs à la Réunion

tout au long de la chaine de la valeur : producteur de matériaux, système énergétique du bâtiment, technique de construction, climatisation, aménageurs, concepteurs, R&D, formation, etc.

• Des acteurs de la R&D et de la formation reconnus et ouverts sur des partenariats avec les entreprises locales, et disposant de plateformes techniques ouvertes (CIRBAT)

• Des compétences en cours de développement autour de la certification (ACERBAT) et de

• Des acteurs du « bâti tropical » encore peu nombreux et isolés sans réelle démarche de cluster (mutualisation)

• Encore peu de démonstrateurs de bâtiments passifs ou à énergie positive, ou à l’échelle de quartiers

• Un thème encore insuffisamment porté par la commande publique pour initier la dynamique et conforter les savoir-faire locau (ex : rénovation thermique du parc de logement social)

• Difficulté à faire émerger de nouveaux matériaux locaux (scories, déchets végétaux, etc.) en substitution au tout béton

Appui des pouvoirs publics : les compétences en bâti tropical figurent au rang des thématiques de la future stratégie de spécialisation intelligente, mais le développement de la filière dépendra largement de la place accordée au bâti tropical dans la commande publique pour mettre sur le marché et testé à grande échelle de nouvelles techniques.

Formations : une offre de formation diversifiée à l’IUT, à l’Ecole d’ingénieur (ESIROI), à l’Ecole d’Architecture, mais également à la Chambre des Métiers (CIRBAT)

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Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 143

la normalisation indispensables à la diffusion des nouvelles techniques et procédés

Opportunités Menaces

• Des besoins en rénovation des bâtiments, et en logement qui devraient tirés la demande pour du bâti tropical

• Potentiel à l’exportation en particulier (i) en matière de certification et de normalisation (pour « vendre » les normes réunionnaises et faciliter l’entrée des entreprises sur les marchés extérieurs) ; (ii) d’ingénierie et de conception du bâti tropical (des échanges existent déjà au niveau de l’ADEME et de l’Ecole d’Architecture)

• Utilisation de ressources locales pour des matériaux de substitution au béton

• Difficulté à susciter la demande auprès des MO (+10 à 15% de surcoût) faute d’approches intégrées et globales sur le long terme (l’amortissement est sur le long terme 20 à 25 ans).

• Implication encore limitée des majors nationales et locales dans le développement du bâti tropical pour assurer une diffusion des procédés chez les artisans du secteur

La filière ENR à la Réunion

Points clés de la filière

Les énergies renouvelables à la Réunion : points clés Maturité Maturité de certains sous segments (biomasse,

PV, CES)

Potentiel de création d’emplois

Important

Perspective Moyen terme

Positionnement Régional dans le domaine de l’ingénierie (Maurice, Afrique du Sud)

Demande Croissance élevée de la consommation d’énergie (croissance démographique, élévation du niveau de vie).

Taux de dépendance énergétique restant élevé (88% contre 54,5% au plan national).

Importance de la filière économique

200 entreprises, 3000 emplois (avec des perspectives estimées à 15 000 emplois d’ici à 15 ans)

Excellence scientifique Bon niveau, espace de recherche appliquée

Dynamisme de l'innovation Développement de vrais savoir-faire locaux qui ont pu trouver (ou pourront) des applications

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 144

dans d’autres régions d’outre-mer notamment (ex : centrales agri-energy ; utilisation de la bagasse, valorisation des déchets verts, smart grids)

Feuille de route et objectifs long terme

Un objectif ambitieux affiché depuis 10 ans : 100% d’énergie renouvelable dans le mix énergétique à l’horizon 2020.

La part actuelle des ENR dans la production d’électricité est de 34% (principalement hydraulique, et bagasse et PV dans une moindre mesure).

Leviers du développement à court et moyen terme

Potentiel de création d’emplois et de valeur

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Demande  

Importance  de  la  filère  économique  

Excellence  scienBfique  

Dynamisme  de  l'innovaBon  

Feuille  de  route  et  objecBfs  long  terme  

La  Filière  ENR  à  la  Réunion  

Socle  du  développement  à  

court  terme    

Socle  du  développement  à  moyen  terme    

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 145

Synthèse Atouts-Faiblesses-Opportunités-Menaces

Atouts Faiblesses • Un contexte insulaire,

géographique et climatique propice au développement de nouvelles techniques et technologies de production d’ENR et de gestion des réseaux, applicables à la bande intertropical ou aux systèmes insulaires (test-bed approach)

• Présence de tissu de PME/TPE, et de filiales de groupes nationaux

• Des savoir-faire locaux sur des technologies et procédés industriels (biomasse, chauffe-eau, modèle d’autoconsommation en PV avec solution de stockage) avec une intensité technologiquement facilement maîtrisable et peu chère à développer pour des pays émergents.

• Relative fragmentation de la filière ENR dans son ensemble, malgré la présence du cluster TEMERGIE

• Pratique de coopération et de mutualisation inter-entreprises et avec les acteurs de la recherche encore insuffisant développés avec pour enjeu de mieux arrimer le savoir-faire local aux grands projets de démonstration en cours (SWAC, ETM, PELAMIS, VERT…)

• Des cadres règlementaires et politiques nationaux ne correspondant pas toujours aux spécificités locales (tarif de rachat, PIA)

Non-interconnexion des réseaux et fortes émissions de gaz à effet de serre qui imposent de trouver des solutions nouvelles pour approvisionner le marché local (lutter contre la dépendance)

Appui des pouvoirs publics : Fort partenariat local et continuité de la stratégie depuis 10 ans, structuration de la filière en cours autour du cluster Temergie

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Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 146

Opportunités Menaces

• Réorientation en cours du secteur du PV sur des niches à plus forte VA (que la pause et la maintenance) croisant d’autres filières telles que l’agriculture (Agri-énergy, pompes solaires pour l’irrigation…) ou le bâtiment (smart grid), et le développement de solutions de stockage couplée à de petites unités chez les particuliers

• Diversification en cours de la filière biomasse autour de l’utilisation des déchets verts ; mais également autour des bio-carburants

• De grands projets portés par des acteurs industriels extérieurs avec des retombées en termes de mise en chantier et de maintenance

• Des expériences à l’export du savoir-faire sur des technologies d’ores et déjà maîtrisées – PV, CES, biomasse (Maurice, Afrique du Sud)

• Multiplicité de grands projets en cours de développement réclamant des efforts financiers du secteur public conséquents, et qui sont parfois dans une logique de concurrence dans la recherche des financements

• Financement des fonds propres des PME innovantes pour soutenir leur projet de développement et de diversification jugé insuffisant

La filière Tourisme à la Réunion

Points clés de la filière

La filière Tourisme à la Réunion : points clés Maturité A consolider, un potentiel encore

insuffisamment exploité

Potentiel de création d’emplois

Potentiellement fort avec des effets directs importants sur les autres branches de l’économie locale : commerce, transport, services, et surtout l’agriculture, la pêche et l’agroalimentaire, ainsi que le bâtiment et la construction, et en particulier le bâti tropical durable

Perspective Moyen-Long terme

Positionnement Positionnement de l’offre touristique essentiellement sur le marché métropolitain

Demande 446 500 visiteurs en 2012, pour un objectif affiché de 600 000 visiteurs en 2015, et 1 million en 2020 (SRDAT)

Importance de la filière économique

6 750 salariés dans le secteur soit 3,2% de l’emploi total (parmi les dernières régions françaises sur cet indicateur)

Excellence scientifique Observatoire du Tourisme de l’IRT pour analyser

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 147

les tendances et les marchés (notamment à l’échelle de l’Océan Indien)

Dynamisme de l'innovation Utilisation des TIC encore insuffisamment développée parmi les professionnels des activités de loisir

Feuille de route et objectifs long terme

Schéma Régional de Développement et d’Aménagement Touristique (2000), et SRDE (2013)

Leviers du développement à court et moyen terme

Potentiel de création d’emplois et de valeur

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5  Atouts  de  la  région  

Demande  

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Feuille  de  route  et  objecBfs  long  terme  

La  Filière  Tourisme  à  la  Réunion  

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Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 148

Synthèse Atouts-Faiblesses-Opportunités-Menaces

Atouts Faiblesses • Inscription par l’UNESCO des

« Cirques, pitons et remparts » au patrimoine mondial de l’humanité, un argument marketing discriminant pour la région.

• Richesse du territoire du point de vue de sa biodiversité, de son patrimoine culturel, historique, gastronomique, permettant d’offrir une palette diversifiée d’activités touristiques.

• Une activité source de revenus à l’export non négligeable

• Positionnement marketing de l’offre touristique réunionnaise fluctuant

• Proximité de destinations de tourisme balnéaire (Maurice, Maldives, Seychelles), qui offrent un produit « tropical » correspondant à une demande de la clientèle européenne non francophone, et de manière croissante à la clientèle asiatique

• Offre d’hébergement hôtelière vieillissante et insuffisante

• Fragmentation de la « filière » tourisme

• Manque de stratégies touristiques des compagnies aériennes (clientèles captives)

• Usage des TIC pour la commercialisation de l’offre et des activités de loisir

Infrastructures : 1 aéroport international, infrastructures routières surtout développées sur la bande littorale, mais une faible capacité hôtelière (en décroissance)

Formations : une offre de formation diversifiée

Appui des pouvoirs publics : le tourisme est une priorité régionale de la mandature 2010-2014, l’IRT assure la promotion du territoire

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Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 149

Opportunités Menaces

• Clientèle locale non négligeable (1 million d’habitant à terme) qui offre un potentiel de développement sous réserve de les fidéliser et d’être attractif par rapport à Maurice

• Regroupement des îles Océan Indien autour du concept des « Iles Vanille » en vue de développer la complémentarité des offres et des positionnements respectifs via des offres combinées : potentiel de la Réunion pour développer à partir de Maurice des « excursions » de 2 ou 3 jours (plus difficile au départ des Maldives et Seychelles faute de dessertes directes)

• Potentiel de diversification de l’offre autour d’une stratégie de différentes niches avec des univers thématiques propres adaptés aux différentes cibles (avec une déclinaison territoriale)

• Dépendance forte à l’égard de la métropole, et un territoire à l’écart du virage de la diversification vers les BRIC et les pays émergents asiatiques (à la différence de Maurice)

• Forte concurrence de Maurice, exacerbée par la crise mondiale (Maurice dépend aussi en partie de l’Europe), y compris pour attirer des touristes réunionnais (flux en augmentation)

• Montée en gamme de l’infrastructure d’hébergement en particulier de l’hôtellerie qui reste à accomplir

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 150

5. Conclusions

5.1 Une valeur sûre : la réduction de la dépendance vis-à-vis de l’extérieur

S’il est un élément sur lequel l’accord se fait très généralement, c’est bien l’objectif de réduction de la dépendance vis-à-vis de l’extérieur. Encore faut-il bien s’entendre sur les conditions dans lesquelles cette réduction de la dépendance est profitable à l’économie des DOM et à leur développement : les prix des produits et services locaux ne doivent pas être plus élevés que ceux des produits importés ; la qualité et la régularité de l’approvisionnement doivent être garanties.

L’enjeu est bien celui d’assurer un développement des territoires à travers la réduction de la dépendance, et non pas celui du déficit commercial, car la balance commerciale est un problème d’ordre national, et non local.

Quatre filières sont à même de contribuer à la réduction de la dépendance vis-à-vis de l’extérieur : agriculture / agroalimentaire ; ENR/MDE ; bois ; bâti tropical.

Agriculture / agroalimentaire :

On est ici dans un enjeu majeur dans la mesure où le déficit alimentaire reste important et où la concurrence des produits importés à bas coût est très forte, en particulier sur la viande congelée et sur les fruits et légumes.

L’exemple de la viande fraîche et des œufs montre qu’il est possible, dans certaines conditions, d’améliorer la situation, puisque dans ces deux secteurs, l’autosuffisance est atteinte ou presque.

Par ailleurs, outre la qualité et la régularité de l’approvisionnement (qui supposent une bonne structuration et une bonne intégration de la filière), la stratégie marketing des produits « pays » semble se révéler efficace (préférence des résidents pour les produits locaux).

Énergies renouvelables et maîtrise de la dépense énergétique :

L’enjeu est à nouveau majeur pour de petits territoires insulaires ou isolés, à la fois en termes de niveau d’indépendance énergétique et aussi de préservation de l’environnement (bilan carbone). Au niveau stratégique et du côté des décideurs politiques et acteurs institutionnels, il s’agit de choisir le bon mix énergétique, tenant compte du jeu entre énergies intermittentes et énergies stables ainsi que des techniques de stockage, des diverses opportunités technologiques et des différents business models (dont certains intègrent un prix de rachat de l’électricité produite par les particuliers).

La Guadeloupe et la Réunion sont déjà parvenues à un taux significatif d’ENR dans le mix énergétique, tandis que la Martinique est en situation de rattrapage.

Enfin, la maîtrise de la demande, notamment à travers les smart grids, domaine dans lequel la Réunion a déjà entrepris un effort important, constitue une dimension importante de la filière.

Bois :

La richesse en bois de la Guyane fait de cette ressource un élément significatif de réduction de la dépendance vis-à-vis de l’extérieur à la fois en ce qui concerne les matériaux de construction et la production d’énergie (bois-énergie).

Il reste cependant beaucoup d’efforts à faire pour que la contribution du bois joue un rôle vraiment déterminant : organisation de la filière, développement de la commande publique, promotion.

Bâti tropical :

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 151

La filière peut contribuer quelque à la réduction de la dépendance dans la mesure où elle conduit à une maîtrise de la consommation énergétique et à une utilisation de matériaux produits localement.

5.2 Un potentiel prometteur : l’exportation de savoir-faire, d’ingénierie et d’expertise

Ce potentiel a commencé, quoiqu’encore modestement, d’être exploité dans la filière ENR/MDE, à partir de la Guadeloupe vers la Dominique et surtout à partir de la Réunion vers Maurice ou la Nouvelle-Zélande. Il existe de réelles perspectives qui relèvent néanmoins pour une bonne part de groupes métropolitains – qu’il s’agisse de très grands groupes comme EDF ou de groupes plus modestes mais très spécialisés dans les ENR. La vraie question est de savoir comment impliquer davantage les PME des DOM dans des consortiums intervenant à l’exportation.

L’exportation d’expertise en matière de stratégie énergétique et de politiques publiques (mix énergétique) n’est pas effective, mais la piste mériterait d’être explorée.

Il en va de même pour le savoir-faire et l’ingénierie en matière de bâti tropical, y compris de matériaux de construction pour la bande intertropicale.

L’étude n’a pas permis d’aborder directement le secteur des services liés à la connaissance, mais les missions que nous avons conduites récemment dans les DOM indiquent qu’il y a là aussi un potentiel de marché, souvent à travers des marchés publics, par exemple dans le domaine de la protection de la biodiversité ou des systèmes d’alerte en matière de maladies transmises par des vecteurs. Encore faut-il avoir une bonne connaissance des appels d’offres sur financements internationaux (Banque mondiale, BID, BAD, FED, etc.) ou de ceux lancés par des grandes fondations.

5.3 Une nécessité : l’exploration raisonnée des marchés de niche

Parmi ces marchés de niche, on trouve d’abord les services à forte valeur ajoutée ou à fort contenu de connaissance que nous venons d’évoquer dans le paragraphe précédent.

La filière où les opportunités d’exploration raisonnée de marchés de niche sont également importantes est bien entendu la filière agriculture / agroalimentaire. Si les opportunités sont très faibles voire inexistantes sur le marché de la zone caraïbe, elles sont à développer sur le marché métropolitain et européen.

A l’heure actuelle, le marché de niche « traditionnel » est celui du rhum. Il s’agit d’un marché complètement international (hors, bien entendu, ce qui relève de la consommation locale) pour lequel l’objectif de développement futur doit être un positionnement haut de gamme, voire très haut de gamme (qualité et typicité), par différenciation d’avec les marques appartenant aux grands groupes multinationaux. La Martinique est déjà assez bien préparée à cette démarche, la Guadeloupe l’est probablement moins.

Sur le marché métropolitain et européen, le développement des marchés de niche commence de reposer sur des démarches associant contre-saison (melon de Guadeloupe), typicité et qualité des produits (café, épices, chocolats, …), innovation non technologique (marché, packaging), et positionnement haut de gamme. Cette démarche peut utiliser comme levier la clientèle métropolitaine des communautés antillaises et celle des touristes ayant fréquenté les DOM.

Quelques-unes des entreprises engagées dans ces démarches ont une stratégie que l’on peut qualifier de « stratégie Jambon de Parme ». Cette stratégie, mise au point à partir des années 1920 à Parme, a consisté à établir ce que nous appelons aujourd’hui une appellation d’origine contrôlée sur la base d’une charte des producteurs historiquement la première démarche de type AOC), tout en ouvrant l’approvisionnement en viande de porc à une zone géographique très large, dépassant non seulement le terroir de Parme, mais même l’Émilie-Romagne. Une telle stratégie,

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 152

qui est celle de la Compagnie des Épices ou encore des chocolats Lauzéa, nous paraît très adaptée au contexte des DOM, marqué par des capacités inévitablement réduites d’approvisionnement local. Son plein succès requiert néanmoins que l’image spécifique des DOM, en l’occurrence de la Guadeloupe et de la Martinique, soit fortement définie et positionnée en métropole et en Europe en termes de marketing, ce qui n’est pas véritablement le cas aujourd’hui.

Enfin, l’écotourisme est typiquement un marché de niche susceptible d’être développé (voir ci-dessous § 5.4).

5.4 Une filière exportatrice « évidente » mais soumise à un contexte de forte concurrence et de grande volatilité : tourisme / éco-tourisme

En principe, le tourisme doit constituer par excellence la filière exportatrice des DOM, du fait de leurs atouts climatiques et de la sécurité qu’ils offrent en étant français et européens (stabilité politique, sécurité sanitaire, appartenance à la zone euro, etc.). On y ajoutera, avec l’évolution des clientèles touristiques l’atout de la biodiversité et des richesses naturelles, en particulier pour la Guyane qui n’est pas par ailleurs aussi attractive pour le tourisme classique que les autres DOM.

A l’heure actuelle, le tourisme dans les DOM, après le choc initial de la crise, suivi de troubles sociaux, bénéficie des crises dans les destinations méditerranéennes (printemps arabes) qui provoque un transfert des clientèles touristiques vers des destinations sans problème. Il reste que, sur la durée, la fréquentation touristique dans les DOM est en dents de scie et que la bonne formule pour asseoir les différents DOM comme des destinations touristiques bien reconnues et bien identifiées n’a pas encore été trouvée.

Les DOM sont en effet confrontés dans leur aire régionale respective à la concurrence de :

• destinations de masse à bas prix (République Dominicaine, Mexique/Cancún) ;

• destinations à forte identité en termes politico-culturels (Cuba) ou en termes de positionnement (Costa-Rica et de plus en plus Panamá pour l’écotourisme) ;

• destinations haut de gamme (Bahamas, Maurice, Maldives), voire très haut de gamme (Seychelles).

Dans un tel contexte concurrentiel, les DOM souffrent d’un fort déficit de positionnement stratégique et de construction d’une identité/image reconnue sur le marché international (donc, bien entendu, hors tourisme affinitaire).

Du même coup, les investissements dans les équipements et l’hébergement se font plus ou moins bien et dans un climat d’incertitude par rapport aux clientèles susceptibles d’être ciblées.

Dans le cas particulier de l’écotourisme, qui représente à n’en pas douter un marché potentiel important à l’échelle des territoires concernés, la compétitivité prix compte sans doute moins que la compétitivité hors coût (notamment, la forte spécificité d’un territoire en matière de flore et de faune, son caractère préservé et/ou îlien, etc.), ce qui peut permettre aux DOM de concurrencer les pays qui, comme Costa-Rica, ont déjà une bonne longueur d’avance sur ce marché. Là encore cependant, l’identité et l’image restent encore largement à construire, et les hébergements et services adaptés (en qualité et spécificité) à réaliser.

5.5 Les enjeux communs à l’ensemble des filières et les leviers d’action à mobiliser

Au terme de cette étude, il convient de faire un retour tant sur le référentiel d’analyse qui nous a servi de cadre de réflexion que sur les principales problématiques évoquées dans les termes de référence.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 153

En premier lieu, on voit bien à travers l’analyse des filières retenues que les thèmes de la compétitivité et de l’ouverture commerciale ne doivent pas être vus à travers le prisme de la balance commerciale : l’enjeu est bien de trouver des opportunités de diversification et de croissance soit sur le marché domestique des DOM eux-mêmes, soit sur les marchés extérieurs, quels qu’ils soient (métropole, autres pays de l’UE, zone régionale, …), de façon à enclencher un mécanisme vertueux de développement. L’équilibre de la balance commerciale est un problème national, non le problème des DOM.

En second lieu, le « cercle vertueux » de la croissance peut passer par des trajectoires différenciées avec des processus cumulatifs interconnectés renvoyant aux effets multiplicateurs, aux effets de productivité et aux effets de compétitivité (supra § 1.5) :

• les premiers, d’inspiration keynésienne, décrivent les effets d’entraînement en amont ou en aval ainsi que les répercussions sur la formation des revenus d’un accroissement exogène de la demande finale lié aux exportations et/ou aux dépenses publiques :

− ils peuvent résulter : d’un développement et d’une diversification de la filière tourisme (notamment écotourisme) ; de l’exportation de savoir-faire, d’ingénierie et d’expertise dans le domaine ENR/MDE et dans celui du bâti tropical ; plus marginalement de l’exportation accrue de produits agricoles et agroalimentaires ;

− complémentairement, ils peuvent résulter de l’effort de RDTI – public et privé – consenti dans quelques domaines : à nouveau ENR/MDE et bâti tropical, mais aussi agronomie, biotechnologies, santé, etc. ;

• les seconds permettent de prendre en compte les dynamiques d’offre qu’engendrent des gains de productivité liés à la mise en œuvre d’investissements de capacité, de rationalisation ou d’innovation :

− ils peuvent résulter à terme des progrès réalisés dans le domaine ENR/MDE, en y comprenant en particulier l’utilisation des déchets naturels (bagasse, bois-énergie) et bâti tropical ;

• les troisièmes, enfin, correspondent aux répercussions des gains de compétitivité (prix ou volume) sur la croissance régionale, à travers la mise en place d’un processus de substitution des importations et/ou à travers la promotion des exportations :

− ils peuvent résulter des progrès réalisés dans la production agricole et agroalimentaire locale, la production d’ENR et une meilleure maîtrise de la demande énergétique, l’utilisation du bois produit localement pour la construction et la production d’énergie (Guyane) ;

− ils peuvent également résulter de l’exportation de produits ou de services de niche en bénéficiant de facteurs de compétitivité hors coût (spécificité, typicité, positionnement haut de gamme), tout en restant dans une fourchette de prix qui ne conduise pas les consommateurs vers des produits ou services de substitution.

Comme on le voit, nous restons prudents dans la formulation, en signalant que ces trois types d’effets « peuvent » se produire.

En troisième lieu, en effet, une problématique essentielle soulevée dans les termes de référence de l’étude était la suivante : pour quelles raisons les atouts des DOM généralement reconnus – présence de centres de recherche, niveau de formation/qualification élevé, ressources agricoles et halieutiques, richesse environnementale, biodiversité, espace maritime –, qui constituent potentiellement des avantages comparatifs, ne se sont pas concrétisés jusqu’ici, ou en touts cas ne se sont concrétisés qu’insuffisamment, en termes de développement.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 154

Les travaux de terrain permettent de mettre en lumière trois principaux facteurs explicatifs qui peuvent se traduire en autant de leviers d’action : le déficit de positionnement en termes de marché ; l’insuffisante structuration des filières ; un effort limité de capitalisation sur et de promotion de l’ingénierie, des savoir-faire et de l’expertise.

Le déficit de positionnement en termes de marché :

On constate de façon générale dans les filières analysées le manque d’une stratégie de positionnement suivie avec constance, mise en œuvre effectivement et évaluée dans ses résultats. Ce manque renvoie bien entendu à la responsabilité des décideurs politiques, mais ce serait une erreur de leur en faire porter la responsabilité exclusive : la plupart des acteurs institutionnels, dont les organisations patronales, en portent aussi leur part. Les DOM sont en manque d’une identité forte, faute d’une stratégie de positionnement stabilisée et soutenue collectivement par l’ensemble des acteurs.

Un tel constat est, comme on l’a déjà souligné, particulièrement frappant dans le domaine du tourisme.

Il s’accompagne d’une connaissance généralement faible des marchés potentiels à l’extérieur des territoires concernés, laquelle ne facilite évidemment pas les choix stratégiques ni pour les entreprises, ni pour les acteurs politiques et institutionnels. L’impression prévaut souvent que la mondialisation, ou mieux la globalisation des marchés, n’a pas encore pleinement pénétré la culture des acteurs locaux (grands groupes de distribution mis à part).

La faiblesse de la connaissance des marchés et le déficit de positionnement entraînent des répercussions négatives sur la recherche d’investisseurs. Comme nous avons pu le constater dans le cadre d’une autre étude117, des projets d’entreprise ont du mal à trouver des financements faute d’un positionnement clair.

Un effort important est donc à faire pour clarifier le positionnement stratégique des filières (et de leurs différents segments) sur la base d’une connaissance des marchés potentiels nettement améliorée.

Du même coup, les stratégies de spécialisation intelligente (S3) qui sont aujourd’hui lancées devraient porter une attention particulière à ce problème.

L’insuffisante structuration des filières :

Le constat d’une insuffisante structuration des filières revient de façon systématique, quelle que soit la filière analysée, même s’il est incontestable que des progrès ont été réalisés au cours des toutes dernières années, comme on a pu le voir dans l’étude. Cette insuffisante structuration s’accompagne souvent d’une fragilité élevée dont elle est en partie la cause.

Elle renvoie à ce qui est fréquemment qualifié d’ « hyper-individualisme » ou de ce que nous préférons appeler la manque d’une « culture de la confiance » à la fois entre les différentes catégories d’acteurs – politiques, administrations, entreprises et leurs organisations, université/recherche – et entre entreprises d’une même filière.

Même dans la filière bâti tropical à la Réunion, pourtant relativement bien organisée, on constate que les interactions sont encore insuffisantes.

La réponse réside sans doute dans un effort pour engager une démarche de type « cluster » sur la base du couple coopération/concurrence (« co-opetition »). Il ne peut s’agir que d’une démarche de moyen terme destinée à construire les relations de

117 Etude de faisabilité de la Technopole de Guadeloupe réalisée par Technopolis |ITD| pour la Région Guadeloupe.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 155

confiance entre acteurs118 qui sont actuellement défaillantes, et qui est évidemment inséparable d’une stratégie de positionnement à la fois claire et suivie dans la durée.

Un effort limité de capitalisation sur et de promotion de l’ingénierie, des savoir-faire et de l’expertise :

On a pu constater, dans l’analyse de la filière ENR/MDE, que commençaient à se développer des exportations de savoir-faire et d’ingénierie (à la Réunion notamment et aussi en Guadeloupe). Ces exportations restent néanmoins surtout le fait de groupes nationaux installés dans les DOM. Il y a encore peu de capitalisation au profit des entreprises proprement locales, et dans la filière bâti tropical qui pourrait offrir des perspectives.

D’une manière plus générale, l’émergence déjà soulignée (supra § 1.5) d’un secteur de la connaissance, lié à la présence de structures universitaires, d’écoles d’ingénieurs et d’instituts de recherche, a commencé en partie à se détourner d’une focalisation quasi-exclusive sur les filières classiques et à se spécialiser dans la formation de savoirs et de savoir-faire spécifiques aux zones tropicales et aux zones insulaires (énergies renouvelables, gestion de l’environnement marin et des lagons, gestion de la biodiversité et conseils en agriculture tropicale, lutte contre les espèces envahissantes, génie civil en milieu tropical, etc.). Ces savoir-faire, encore exploités à petite échelle, souvent au sein du marché domestique, sont susceptibles de favoriser l’émergence de nouvelles filières à partir d’avantages comparatifs de nature scientifique et technologique : protection de la biodiversité, lutte contre les espèces envahissantes, systèmes d’alerte à certaines maladies (« vector-borne diseases »), etc.

Le développement de ce secteur de la connaissance suppose :

• la connaissance fine des marchés potentiels ;

• la capitalisation en termes économiques et entrepreneuriaux sur les actions et programmes sans but lucratif (PCRD, INTERREG), en prenant appui sur les réseaux générés par ces mêmes programmes, par des connexions efficaces entre milieux académiques et entrepreneurs ;

• les outils financiers appropriés (ingénierie financière) ;

• des actions de promotion spécifiques et un travail systématique sur les appels d’offres sur financements internationaux.

Comme on le voit, on retrouve comme conditions de réussite, la connaissance des marchés et le positionnement stratégique, ainsi que la confiance entre les différentes catégories d’acteurs reposant sur une démarche de type « cluster ».

Là encore, les stratégies de spécialisation intelligente (S3) pourraient alimenter utilement non seulement la réflexion, mais aussi le développement d’instruments et d’actions de politiques publiques.

On conclura en rappelant que la présente étude a permis de mettre en lumière des stratégies d’entreprise qui surmontent ou tentent de surmonter les facteurs de blocage, notamment :

• entreprises qui se positionnent sur des niches de marché en acceptant de s’approvisionner pour partie à l’extérieur de leur territoire – et se libèrent ainsi des contraintes locales ;

• entreprises qui jouent le jeu de l’intégration avec les producteurs (agroalimentaire) ;

118 Dans tous les travaux relatifs aux clusters, l’accent est mis à juste titre sur le rôle clé d’une « culture of trust ».

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 156

• entreprises qui font le choix d’une forte valeur ajoutée et de l’innovation constante (y compris non-technologique).

De tels exemples doivent être à la fois soutenus et promus, même si le risque d’échec peut être parfois élevé.

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 157

Annexe : liste des entretiens

Personnes rencontrées lors de la mission en Guadeloupe :

• Institutionnels :

− Agence Française de Développement – Guadeloupe : PALACH Aurélie

− Agence Française de Développement – Guadeloupe : DAIJARDIN Muguette

− Agence Française de Développement – Guadeloupe : BOISSELET Bertrand

− Préfecture de région – SGAR : BERTHON Eric

− Préfecture de région - DIECCTE/Chargé de mission S3 : DEGAILLANDE Ludovic

− Préfecture de région – DRRT : FILS-LYCAON Bernard

− CR Guadeloupe - Direction de la stratégie et des interventions économiques : VARDE Sylvie

− CR Guadeloupe - Direction de l'environnement et du cadre de vie : BON André

− CR Guadeloupe - Direction de l'environnement et du cadre de vie : JULES-SORET Céline

− CR Guadeloupe - Direction de l'agriculture, de la pêche et du développement rural : JETIL Marie-Ange

• Filière ENR et MDE :

− AKUO : MONROUX François

− ARCHISOLAR : MAQUIABA Jean-Luc

− AEROWATT : DUPUY Eric

− ALINEA SOLAR : BESTAUX Jean-Christophe

− GENERGIES : MEZIERE Andrès

− SUNZIL : VIAL-COLLET Alain

− TERANOV : CHOURAKI Jacques

• Filière agriculture et agroalimentaire :

− Association des Moyennes et Petites Industries de la Guadeloupe / GMA (Grands Moulins des Antilles) : DESALME Franck

− Jus de fruits Caraibes : GIACOMIN Laurent

− Distillerie Séverin : MARSOLLE José

− Compagnie indépendante des épices : MATAS Stéphane

− Iguavie : SHITALOU Elie

− SAS Edouard : EDOUARD Laurie

• Filière tourisme :

− AGE (Association Guadeloupe Ecotourisme) / Anse Caraïbe plongée : JASOR Christine

− Gîte Mabouya / Caraïb'Bay Hôtel : LONGUET Benoit

− Comité de Tourisme des îles de Guadeloupe : ROSIER Willy

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 158

Personnes rencontrées lors de la mission en Guyane :

• Institutionnel :

− Préfecture de région – SGAR : PANCHOUT Julien

− CR Guyane - Direction de l'agriculture et de la forêt : DALLE Julie

• Filière bois :

− Maison de la Forêt et du Bois de Guyane :BONJOUR Isabelle

− Office National des Forêts (ONF) : BINET David

− Société forestière Amazonia : GUTH Aline

− Scierie du Larivot : TALAGRAND Olivier

− Charpente Bois et Couverture Industrialisées (CBCI) : RIGHES Mars

− Construction Réalisation Industrielle (CRI) : VAN CHAM Lai

− Voltalia (biomasse) : CYRILLE Alain

• Filière éco-tourisme :

− Comité du Tourisme de Guyane (CTG) : BATHILDE Alex

− Comité du Tourisme de Guyane (CTG) : BAILLS Marie-Claire

− Parc Naturel Régional : GIFFARD Pascal

− ATOUT France : BIRONNEAU Didier

− CCI Guyane : DONATIEN Linda

− Compagnie des guides de Guyane : AUCLAIRE Frédéric

− Office de tourisme de Cayenne : CAFFIER Catherine

− Amazonie découverte : VASSEUR Joëlle

− Guya'rando : AUCLAIRE Frédéric

− Jal voyages : ANTOINE Jean-Louis

− Kwata : DE THOISY Benoit

Personnes rencontrées lors de la mission en Martinique :

• Institutionnel :

− Agence Française de Développement – Martinique : BOUGAULT Hervé

− Agence Française de Développement – Martinique : ARDON Philippe

− Préfecture de région – DIECCTE : CHARLERY-ADELE Jean-Max

− CR Martinique : MOUTAMALLE Lise

− Préfecture de région – SGAR : MAFFRE Philippe

− CR Martinique - Direction de l'environnement : BEJGANE Marwane

− DAAF : HOFFERER Sabine

• Filière ENR et MDE :

− ADEME : BORDAGE Michel

− EDF : BOISSEAU Christophe

− EDF : YP-TCHA BAVIER Evelyne

− Solarelectric : JEDRE Ludovic

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 159

− Agence martiniquaise de l'énergie : BELLEMARE Laurent

• Filière agriculture et agroalimentaire :

− IMAFLHOR : LAVIOLETTE André

− AMIV (Viande) : DEGRAS Philippe

− Madivial (Viande) : MILIA Ange

− Madivial (Viande) : JEAN-LOUIS Pierre

− AMPI (industrie) : CRESTOR Richard

− Banamart : MONTEUX Bernard

− Rhum Neisson / Syndicat de défense de l'appelation AOC du Rhum Martinique : NEISSON Claudine

− Rhum Neisson / Syndicat de défense de l'appelation AOC du Rhum Martinique : PADERNA Jean-Claude

− PARM : ROCHEFORT Katia

− Technopole-CACEM : GESTEL Gilles

− Chocolats Lauzéa : LAUZÉA Thierry

− La Tivolienne : TOUSSAY Hervé

Personnes rencontrées lors de la mission à La Réunion :

• Institutionnel :

− Agence Française de Développement – Réunion : DUBERNET Marc

− CR Réunion – Tourisme : FRUTEAU Colette

− CR Réunion - Développement durable : DIEUDONNE Jules

− Préfecture de région – SGAR : THIBIER Fabrice

− Préfecture de région – SGAR : KREMER Olivier

− Préfecture de région – DIECCTE : BLIN Thierry

• Transversal :

− Association pour le Développement Industriel de la Réunion : DELMONT DE PALMAS Françoise

− NEXA : HOLSTEIN Philippe

− NEXA : BIGEY Gaston

− NEXA : LORION Frédéric

• Filière ENR et MDE :

− ADEME : BEUTIN Philippe

− ARER : EZAVIN Pierre-Yves

− Temergie : ROSA Anthony

− Syndicat des énergies renouvelables / Aérowatt : BORCHIELLINI Serge

− EDF : BURIEZ Nicolas

− GDF SUEZ : BASSAC Eric

− Akuo Energy : BALLANDRAS Jean

− Vergnet : RIVARD Marc

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 160

− Austral Energy : ARCELIN Steve

− Corexsolar : GALBOIS Patrice

− Réuniwatt : SCHMUTZ Nicolas

− Solarprod : MOUNOUSSAMY Valère

− Schneider Electric : GUEFFIER Antony

− TEEO / Convergence : VIENNE Dominique

• Filière matériaux et construction tropicale :

− Société immobilière du Département de la Réunion : JOUANEN Philippe

− Société immobilière du Département de la Réunion : GAERTNER Hervé

− Ecole d'architecture du Port : ROSIER Pierre

− CIRBAT : MOUROUVAYE Alçay

− CIRBAT : PICHARD Chloé

− CBO Territoria : WUILLAI Eric

− Pierre & Bois : NAZE Pierre-Philippe

− Socotec Réunion : LAURENT Alain

• Filière tourisme :

− Ile de La Réunion Tourisme (IRT) : VINCENT Raoul

− Bourbon Voyages : FRECAUT Catherine

− Hôtel & Co : MANSON Fabrice

− Club du tourisme : CHATEL Katherine

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 161

Annexe : données des douanes sur les échanges de marchandises

Introduction

Les données de la balance commerciale présentées dans cette section concernent les principaux produits échangés en niveau d'agrégation spécifique A129119, données établie par la Direction générale des Douanes et droits indirects.

Ces données ne retracent que les échanges de marchandises et non de services120. Les données douanières répondent donc difficilement aux exigences de l’étude concernant les filières stratégiques étudiées pour les quatre DROM (tourisme-écotourisme, énergie renouvelable et maîtrise de l’énergie, bâti tropical…), hormis dans les cas des secteurs agriculture (données par type de produit disponibles), pêche et agroalimentaire.

Panorama général

Le total cumulé des exportations de La Réunion, Martinique, Guadeloupe et Guyane en 2012 était de 670 millions d’euros, alors que les importations représentent 5,7 milliards d’euros, ce qui se traduit par des soldes commerciaux déficitaires (5 milliards d’euros en 2012 contre 4,2 milliards en 2011), avec des taux de couverture très faibles (cf. Figure 3 et Tableau 5). Entre 2011 et 2012, les exportations des quatre DROM ont reculé de 13 % tandis que les importations ont augmenté de 14 %.

Figure 3 Importations et exportations dans les quatre DROM en 2011 et 2012

119 La direction des Douanes utilise plusieurs niveaux d'agrégation spécifiques de la nomenclature NAF-CPF révision 2 (2008), nommée « nomenclature agrégée ». Les statistiques produits sont généralement présentées selon trois niveaux d'agrégation : A17, A38 et A129. Cette nomenclature est gérée par l'INSEE et remplace la Nomenclature économique de synthèse (NES) en 2009. Les données sont établies sur la base d’échanges FAB/FAB (Cf. http://lekiosque.finances.gouv.fr/imagesdouane/source1.htm) 120 Les principales séries du commerce extérieur de la France sont non seulement corrigées des variations saisonnières, mais également estimées pour tenir compte des déclarations tardivement adressées à la douane. Les échanges FAB/FAB prennent en compte une estimation des flux sous les seuils déclaratifs. Les données régionales et départementales du commerce extérieur sont établies, en retenant, en principe, le département de production ou de consommation des marchandises. Cependant, pour des raisons d’ordre pratique notamment, on admet que soit indiqué le département de départ ou d’arrivée des marchandises. Ainsi, par exemple, les importations de produits pétroliers se concentrent sur quelques départements seulement (cf. http://lekiosque.finances.gouv.fr/Appchiffre/regionales/surcadre_regionales.asp).

33  

960  

-­‐927  

497  

792  

-­‐295  

31  

1128  

-­‐1097  

209  

2136  

-­‐1927  

30  

852  

-­‐822  

399  

1672  

-­‐1273  

35  

1274  

-­‐1239  

206  

1924  

-­‐1718  

-­‐3000   -­‐2000   -­‐1000   0   1000   2000   3000  

Export  

Import  

Solde  

Export  

Import  

Solde  

Export  

Import  

Solde  

Export  

Import  

Solde  

Guade

loup

e  Guyane  

MarBn

ique

 Ré

union  

2012  

2011  

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 162

Sources et notes : Directions des douanes. Données CAF-FAB hors matériel militaire, valeurs brutes de collecte en millions d'euros.

Tableau 5 Importations et exportations en 2011 et 2012

Guadeloupe Guyane Martinique Réunion 2011 2012 2011 2012 2011 2012 2011 2012 Exportations AZ - Produits agricoles, sylvicoles, de la pêche et de l’aquaculture - - - - - - 1 1 C1 - Produits des industries agroalimentaires (IAA) 5 5 1 1 3 3 130 133 C2 - Produits pétroliers raffinés et coke 2 - - - 7 12 1 5 C3 - Équipements mécaniques, matériel électrique, électronique et informatique 3 3 19 25 3 3 22 10

C4 - Matériels de transport 10 9 467 351 2 5 12 9 C5 - Autres produits industriels 9 8 9 16 2 2 19 21 CB - Textiles, habillement, cuir et chaussures - - - - - - 1 1 CC - Bois, papier et carton - - - 1 - - 1 1 CE - Produits chimiques, parfums et cosmétiques 2 2 2 2 - 1 5 7 CF - Produits pharmaceutiques - - - - - - 1 1 CG - Produits en caoutchouc et en plastique, produits minéraux divers 2 2 - - - - 1 2 CH - Produits métallurgiques et produits métalliques 4 2 5 12 - 1 4 5 CM - Produits manufacturés divers 1 2 1 1 1 1 5 5 DE - Hydrocarbures naturels, autres produits des industries extractives, électricité, déchets 5 4 1 6 15 10 24 27

JZ - Produits de l’édition et de la communication - - - - - - 1 - Total 33 30 497 399 31 35 209 206 Importations AZ - Produits agricoles, sylvicoles, de la pêche et de l’aquaculture 13 17 6 7 13 13 39 40 C1 - Produits des industries agroalimentaires (IAA) 81 82 36 37 63 69 217 236 C2 - Produits pétroliers raffinés et coke 420 351 104 53 306 348 590 633 C3 - Équipements mécaniques, matériel électrique, électronique et informatique 124 80 135 103 118 94 306 210

C4 - Matériels de transport 95 76 398 1 198 93 90 403 218 C5 - Autres produits industriels 191 208 104 273 183 179 500 509 CB - Textiles, habillement, cuir et chaussures 25 22 7 8 19 16 54 55 CC - Bois, papier et carton 31 35 6 6 20 20 72 75 CE - Produits chimiques, parfums et cosmétiques 17 20 32 189 28 28 55 62 CF - Produits pharmaceutiques - - 1 - 1 - 3 1 CG - Produits en caoutchouc et en plastique, produits minéraux divers 50 52 23 26 51 54 118 122 CH - Produits métallurgiques et produits métalliques 33 44 21 30 33 32 116 110 CM - Produits manufacturés divers 35 35 15 14 31 30 82 84 DE - Hydrocarbures naturels, autres produits des industries extractives, électricité, déchets 34 37 9 1 351 479 75 75

JZ - Produits de l’édition et de la communication 1 1 - 1 1 1 5 4 Total 960 852 792 1 672 1 128 1 274 2 136 1 924 Solde AZ - Produits agricoles, sylvicoles, de la pêche et de l’aquaculture -13 -17 -6 -7 -13 -13 -38 -39 C1 - Produits des industries agroalimentaires (IAA) -76 -77 -35 -36 -60 -66 -87 -103 C2 - Produits pétroliers raffinés et coke -418 -351 -104 -53 -299 -336 -589 -628 C3 - Équipements mécaniques, matériel électrique, électronique et informatique -121 -77 -116 -78 -115 -91 -284 -200

C4 - Matériels de transport -85 -67 69 -847 -91 -85 -391 -209 C5 - Autres produits industriels -182 -200 -95 -257 -181 -177 -481 -488 CB - Textiles, habillement, cuir et chaussures -25 -22 -7 -8 -19 -16 -53 -54 CC - Bois, papier et carton -31 -35 -6 -5 -20 -20 -71 -74 CE - Produits chimiques, parfums et cosmétiques -15 -18 -30 -187 -28 -27 -50 -55 CF - Produits pharmaceutiques 0 0 -1 0 -1 0 -2 0 CG - Produits en caoutchouc et en plastique, produits minéraux divers -48 -50 -23 -26 -51 -54 -117 -120 CH - Produits métallurgiques et produits métalliques -29 -42 -16 -18 -33 -31 -112 -105 CM - Produits manufacturés divers -34 -33 -14 -13 -30 -29 -77 -79 DE - Hydrocarbures naturels, autres produits des industries extractives, électricité, déchets -29 -33 -8 5 -336 -469 -51 -48

JZ - Produits de l’édition et de la communication -1 -1 0 -1 -1 -1 -4 -4 Total -927 -822 -295 -1273 -1097 -1239 -1927 -1718 Sources et notes : Directions des douanes. Données CAF-FAB hors matériel militaire, valeurs brutes de collecte en millions d'euros.

La structure des importations des quatre DROM est dominée par les produits manufacturés : les Produits pétroliers raffinés, Autres produits industriels et Matériels de transport (Centre Spatial de Guyane) constituent les trois principaux produits d’importation des quatre DROM (soit un total de 58 % des

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 163

importations) - cf. Tableau 5. Les exportations sont encore moins diversifiées que les importations : les Matériels de transport (Centre Spatial de Guyane), les Produits des industries agroalimentaires (IAA), les Produits pétroliers raffinés et coke et les Produits Hydrocarbures naturels, autres produits des industries extractives, électricité, déchets constituent les trois principaux produits d’exportation des quatre DROM (soit un total de 81 % des exportations).

Figure 4 Répartition par secteur des importations et exportations de quatre DROM en 2011 et 2012

Sources et notes : Directions des douanes. Données CAF-FAB hors matériel militaire, valeurs brutes de collecte en millions d'euros.

Des exportations et importations des quatre DROM géographiquement concentrées sur quelques pays.

Pour les cas de la Guadeloupe et de La Réunion, la moitié des exportations sont concentrées dans les cinq premiers pays d’exportations. Les exportations sont encore

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 164

plus concentrées géographiquement dans les cas de la Martinique (72 %) et de la Guyane (85 %) - cf. Tableau 6.

Tableau 6 Principaux pays d’exportation (hors hexagone) de quatre DROM, tous secteurs confondus

REGION Pays Total en milliers d'euros % Total 29575 100% Polynésie française 1 4069 14% Antilles néerlandaises 2 3276 11% Espagne 3 2636 9% Pays NDA 4 2215 7% Allemagne 5 2209 7%

Guadeloupe

Autres 51% Total 398760 100% Pays NDA 1 152000 38% Luxembourg 2 119000 30% Allemagne 3 26580 7% Suisse 4 21337 5% Trinité et Tobago 5 20130 5%

Guyane

Autres 15% Total 37950 100% Etats-Unis 1 15009 40% Belgique 2 5101 13% Pays NDA 3 2751 7% Antilles néerlandaises 4 2249 6% Trinité et Tobago 5 2097 6%

Martinique

Autres 28% Total 206245 100% Vietnam 1 25074 12% Espagne 2 23838 12% Madagascar 3 20432 10% Mayotte 4 20181 10% Inde 5 14334 7%

Réunion

Autres 50% Sources et notes : Directions des douanes. Données CAF-FAB hors matériel militaire, valeurs brutes de collecte en milliers d'euros.

Pour les cas de la Guadeloupe et de La Réunion, plus du tiers des importations proviennent des cinq premiers pays d’importation. Pour la Guyane et la Martinique, la dépendance vis-à-vis de quelques pays est encore plus marquée puisque ce sont respectivement 85 % et 78 % des importations qui proviennent des cinq premiers pays d’importation (cf. Tableau 7).

Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM 165

Tableau 7 Principaux pays d’importation (hors hexagone) de quatre DROM, tous secteurs confondus

REGION Pays Total en milliers d'euros % Total 852302 100% Etats-Unis 1 243445 29% Autres pays 2 98582 12% Iles vierges des USA 3 92854 11% Chine 4 68854 8% Trinité et Tobago 5 49625 6%

Guadeloupe

Autres 35% Total 1671701 100% Corée du Sud 1 997341 60% Allemagne 2 199582 12% Italie 3 105486 6% Etats-Unis 4 68933 4% Suisse 5 57014 3%

Guyane

Autres 15% Total 1274187 100% Norvège 1 424966 33% Etats-Unis 2 318735 25% Autres pays 3 120441 9% Allemagne 4 67879 5% Royaume-Uni 5 62546 5%

Martinique

Autres 22% Total 1923247 100% Singapour 1 539868 28% Chine 2 210037 11% Autres pays 3 169221 9% Afrique du Sud 4 119980 6% Allemagne 5 116157 6%

Réunion

Autres 40% Sources et notes : Directions des douanes. Données CAF-FAB hors matériel militaire, valeurs brutes de collecte en milliers d'euros.