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Partie III Etude numérique paramétrique de l’influence des hétérogénéités du sol sur le comportement des conduites

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Partie III

Etude numérique paramétrique de l’influence des

hétérogénéités du sol sur le comportement des conduites

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Chapitre 4

Construction d’un modèle numérique tridimensionnel de l’ensemble

sol-conduite

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Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

1 - INTRODUCTION L’analyse statistique des données de terrain effectuée dans le premier chapitre montre avant tout que la nature du comportement des conduites enterrées est réellement tridimensionnelle. En effet, les techniques d’installation des réseaux ainsi que les aléas rencontrés dans le sous-sol urbain fortement encombré conduisent inévitablement à une variabilité des conditions du sol le long des tronçons. Or, l’influence de cette variabilité du sol de la tranchée sur le comportement mécanique des conduites enterrées ne peut être traité par des modèles statistiques puisqu’à ce jour, les données concernant le sol nécessaires à ce type d’analyse sont inexistantes. L’approche de ce problème ne peut donc se faire que par un modèle déterministe. L’objectif de ce chapitre est de présenter la construction d’un tel modèle. Par ailleurs, la présence d’hétérogénéités dans le sol entraîne une sollicitation de la conduite dans le sens longitudinal, aspect actuellement négligé dans la réglementation. Afin de réaliser une étude approfondie de ce problème d’interaction sol – conduite de manière numérique, nous avons commencé par une étude bibliographique sur les modèles existants. Certes, les premiers éléments bibliographiques du chapitre 3 montrent que ces modèles reflètent mal un élément essentiel dans le comportement tridimensionnel des conduites : le joint. Néanmoins, cette étude bibliographique permet d’une part d’identifier des paramètres importants dans une approche numérique autres que ceux mis en évidence dans le chapitre 1, et d’autre part de fixer les objectifs de la présente étude. Ne disposant pas de données expérimentales sur lesquelles nous appuyer, la validation du modèle devra donc se faire essentiellement à partir de la littérature. Ceci nous oblige donc à procéder en deux temps : validation d’un modèle sans joint à partir d’études comparables, puis élaboration d’un modèle de joint à partir d’essais en laboratoire. Les deux composantes du modèle étant chacune validées séparément, nous présenterons certains des premiers calculs obtenus par le modèle complet. Les résultats qualitatifs de ces calculs seront rapprochés des conclusions de l’étude statistique afin de tester l’aptitude de ce nouveau modèle à capturer les phénomènes mis en évidence par cette dernière. En outre, avant d’aller plus loin dans l’approche numérique, ces résultats seront également utilisés afin d’examiner à posteriori, l’impact des hypothèses prises lors de l’implémentation du modèle de joint.

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2 - PRISE EN COMPTE DE LA VARIABILITE DU SOL DANS LE COMPORTEMENT DES CONDUITES : ETAT DE L’ART DES MODELISATIONS NUMERIQUES

L’approche traditionnelle de la problématique d’une conduite enterrée est un schéma de calcul bidimensionnel situé dans le plan transversal de la tranchée et reposant sur de multiples adaptations de la théorie des silos. Cependant, les limites des approches analytiques et la complexité de l’interaction sol – conduite ont, pendant des décennies, obligé à effectuer le dimensionnement des ouvrages sans véritable connaissance du champ de contraintes dans le sol environnant. L’avènement des méthodes numériques permet aujourd’hui de lever les incertitudes dues aux nombreuses hypothèses de l’approche analytique et donne naissance à une approche de dimensionnement dite directe beaucoup plus réaliste qui, petit à petit, s’impose dans les règlementations en vigueur (voir chapitre 2 pour plus de détails). Dans le but d’affiner le dimensionnement des ouvrages, la plupart de ces études s’inscrivent dans la lignée de la logique initiale de Marston d’un schéma bidimensionnel, chacune d’entre elles se concentrant sur l’un des nombreux aspects de la problématique. Naturellement, certaines traitent de l’influence des conditions de pose sur les conduites et des hétérogénéités du remblai générées lors du processus d’installation. Quant à l’aspect longitudinal des conduites, les études de la littérature exploitent la logique bidimensionnelle en s’inspirant par exemple largement des approches existantes sur des ouvrages pouvant s’apparenter à une conduite enterrée (comme un pieu dans une position horizontale). Le modèle de Winkler est désormais une référence en matière de représentation de la conduite dans le sens longitudinal. L’évolution de la puissance de calcul a permis, au cours des dernières années, l’émergence des modèles tridimensionnels pour représenter des conduites enterrées. De telles approches sont de plus en plus nombreuses dans le domaine des pipelines, mais toujours inexistantes en ce qui concerne les conduites d’assainissement. Dans cette section, nous ferons un tour d’horizon des différentes approches afin de dresser un état des connaissances relatives à l’influence des hétérogénéités dans le comportement des conduites enterrées.

2.1 - Plan transversal

2.1.1 Les premières approches Les premiers travaux numériques d’envergure ont été réalisés par le modèle SPIDA, que nous avons déjà évoqué dans le chapitre 2. Ils ont donné lieu à la méthode de dimensionnement SIDD, qui s’impose dans les pays du continent nord-américain. En ce qui concerne plus particulièrement les hétérogénéités du sol de remblaiement, nous pouvons citer les travaux de Selig et Packard (1987), qui utilisent le modèle SPIDA pour déterminer l’influence de plusieurs types d’hétérogénéité de la tranchée sur la distribution des efforts.

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Les configurations envisagées sont présentées sur la Figure 1 et le Tableau 1 tandis que les résultats obtenus uniquement sous l’effet du poids propre du remblai sont donnés dans le Tableau 2. Rappelons que le modèle SPIDA suppose des conditions de déformations planes pour l’ensemble sol-conduite.

a) b) c)

Figure 1. Répartition des hétérogénéités dans la tranchée (Selig et Packard, 1987)

Tableau 1. Description des configurations

Cas Figure Description

1 a

Zones 1, 2 et 6 : sol en place Zone 3 : remblai non compacté Zone 5 : remblai faiblement compacté Zone 7 : remblai bien compacté

2 a Partie A de la zone 7 identique à la zone 3

3 a Partie A de la zone 7 identique à la zone 5 Partie B de la zone 7 identique à la zone 5

4 a Zone A : identique à la zone 3 Zone B : identique à la zone 5

5 b Zone 2 : remblai très bien compacté 6 b Zone 2 : identique à la zone 3 8 c Zone 4 : remblai bien compacté 9 c Zone 4 : identique à la zone 3

Le Tableau 2 montre que l’effort normal n’est pas modifié par les 6 premiers cas de figures. Il diminue dans les deux derniers cas grâce au transfert favorable des charges à cause de la présence du sol non compacté dans la zone des hanches. En ce qui concerne le moment de flexion, il augmente dans les cas 2, 3, 5 et 6 principalement à cause de la réduction de la zone d’appui pour la conduite. Dans le cas 5 le moment augmente légèrement au radier à cause de la concentration de la contrainte dans cette zone. Dans le cas 8, l’augmentation de la

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contrainte normale aux reins s’oppose à l’ovalisation de la conduite ce qui conduit à la diminution du moment. Ceci est moins prononcé pour le cas 9 ce qui conduit à des moments légèrement plus élevés par rapport au cas 8.

Tableau 2. Les résultats de simulation par le modèle SPIDA (Selig et Packard, 1987)

Diab (1992) réalise une série de calculs quasi identiques en utilisant son modèle dit de premier niveau ayant les mêmes caractéristiques que le modèle SPIDA. Les résultats sont bien entendu conformes à ceux de Selig et Packard (1987). Diab (1992) va plus loin dans la caractérisation du rôle des parois latérales dans l’interaction sol-conduite. Il quantifie notamment la diminution des efforts dus aux frottements entre le sol de la tranchée et le sol extérieur. Ainsi, il estime que ce contact permet un déchargement de la conduite de l’ordre de 20-30 %. En revanche, si ce contact est altéré par le retrait impropre des blindages (altération du frottement vertical) ou par le compactage insuffisant du sol autour de la conduite (pas de développement de la pression horizontale), cas de figure souvent rencontrés, les coefficients de sécurité du fascicule 70 ne suffisent plus pour garantir la tenue structurelle des ouvrages. Ceci est illustré par une expérimentation sur modèle réduit en centrifugeuse où la distribution des contraintes autour de la conduite est relevée au cours de l’extraction des blindages. Différentes configurations de contact sol – conduite sont envisagées (parfait, glissement avec frottement, vide, glissement parfait). Il a été constaté l’existence d’un pic de contrainte normale au niveau de la clé de la conduite lors du passage du blindage à ce niveau. La valeur de la contrainte verticale est dans certains cas supérieure à la valeur finale de la contrainte après mise en place de toutes les couches de sol. Un tel cas de figure est illustré sur la Figure 2 où la contrainte verticale appliquée sur la clé de la conduite pendant le retrait du blindage est de 14 % supérieure à la contrainte finale.

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Figure 2. Distribution des forces autour de la conduite dans la configuration d’une

surface rugueuse du blindage et sable dense (d’après Diab, 1992)

Par ailleurs, Diab (1992) développe un autre modèle aux éléments finis de complexité plus élevée faisant intervenir pour le sol, des lois de comportement du type élasto-plastique avec écrouissage (Cam Clay modifié, voir Burland, 1972) et pour la conduite, un modèle également élasto-plastique capable de simuler l’écrouissage en compression et la fissuration en traction. Il s’agit d’un des modèles les plus évolués pour les conduites en béton. L’auteur réalise une série de calculs afin de valider son approche numérique et compare à cette occasion différents résultats. Une telle confrontation de la loi élastique non linéaire et de la loi elasto-plastique avec écrouissage sur un déversoir d’orage est présentée sur la Figure 3. Il peut être constaté que la loi élasto-plastique n’apporte pas vraiment de valeur ajoutée par rapport à la loi élastique non linéaire. Bien que le modèle de niveau de complexité supérieure soit plus satisfaisant d’une point de vue scientifique, l’auteur conclut que le modèle de premier niveau est mieux adapté aux problèmes d’interaction sol-conduite.

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Figure 3. Comparaison entre les valeurs des contraintes de compression calculées à

partir de la loi de Duncan et la loi de Cam Clay (d’après Diab, 1992)

2.1.2 Travaux de Benmansour (1996) Une modélisation numérique en éléments finis et en déformations planes des différents types de conditions de pose a également été réalisée par Benmansour (1996) à l’aide du logiciel CESAR. Ces calculs visent à vérifier et à compléter les résultats bibliographiques. Avant de passer à une analyse 3D du problème d’influence des conditions de pose, nous présenterons brièvement les principaux résultats de Benmansour dans l’objectif de comprendre la manière dont la variation des paramètres de la tranchée conditionne la répartition des efforts internes de la conduite en 2D. En dehors de l’hypothèse de déformations planes, le chargement de la conduite est effectué uniquement par le poids propre du remblai. La modélisation n’inclut pas de chargement en surface mais un calcul spécifique traite son influence. La conduite est modélisée par des éléments poutres et le sol par des éléments obéissant à une loi de comportement élastique. Diverses configurations ont été utilisées ; nous citerons ici les résultats obtenus pour une conduite en béton de 300mm de diamètre, avec 4m de recouvrement, une largeur de tranchée de 0,9m, un module de sol de la tranchée de 50 MPa et un module de sol en place de 200 MPa. Les différents facteurs considérés sont géométriques :

- la hauteur de recouvrement, - la largeur de la tranchée, - l’excentricité de l’axe de la conduite par rapport à l’axe de la tranchée, - l’angle de pose, c’est-à-dire la longueur du périmètre inférieur de la conduite en

contact avec le lit de pose ; ou rhéologiques :

- les caractéristiques du lit de pose, - les caractéristiques du matériau d’enrobage et de remblai, - l’effet des bourrages latéraux insuffisants.

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2.1.2.1 Influence des facteurs géométriques Lorsque la profondeur de pose augmente, les efforts internes de la conduite augmentent également puisque le poids du remblai devient plus important. En revanche, cette augmentation possède une allure asymptotique, c’est-à-dire qu’à partir d’une certaine hauteur de couverture (environ 6m), la valeur des efforts internes se stabilise. Ceci s’explique par un effet de voûte qui se développe lorsque la couverture devient importante. Ce résultat va donc dans le sens de l’Equation 3 du Chapitre 2 où le coefficient Cd tend vers une valeur constante à partir d’une certaine valeur de H/B. A titre indicatif, pour une couverture faible (0,8m), la contrainte verticale à la clé correspond à presque 80 % des poids des terres, tandis que pour une couverture élevée (6m), cette contrainte correspond à moins de 20 % du poids de remblai. En outre, un chargement en surface produit l’effet inverse, à savoir que les efforts diminuent avec la profondeur. Il existe donc une profondeur optimale pour les conduites chargées lorsque les efforts sont minimaux. Les efforts maximaux se situent aux reins pour l'effort normal (reprise des poids des terres), aux épaules et aux hanches pour l'effort tranchant, au radier, aux reins et à la clé pour le moment fléchissant. Pour le moment fléchissant, l’effet de la hauteur de couverture est illustré sur la Figure 4 et la Figure 5. Notons que l’auteur fait les mêmes constats pour les conduites de grand diamètre (800mm et 2000mm).

Figure 4. Effet de la hauteur de couverture sur le moment (d’après Benmansour, 1996)

Lorsque la largeur de la tranchée augmente (c’est-à-dire quand le sol non remanié est éloigné), la distribution des efforts internes reste identique mais leur intensité augmente (Figure 6). A partir d’une certaine valeur (environ 10 m ce qui correspond également à la valeur asymptotique du coefficient Cd de l’Equation 3, Chapitre 2), les efforts tendent vers ceux envisagés par Marston pour les conduites installées en remblai. L’augmentation des efforts s’explique par la diminution de la contribution des parois au soulagement des conduites par cisaillement. Dans ce contexte, il est évident qu’une asymétrie de l’axe de la conduite par rapport à la tranchée produit un effet sur les efforts internes : les efforts seront plus élevés du côté de la paroi plus éloignée (Figure 7). Ainsi, en passant d’un cas symétrique à une asymétrie

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maximale (environ 3 diamètres), l’accroissement des efforts du côté de la paroi éloignée est d’environ 120 %. Il est intéressant de noter qu’un accroissement allant de 50 à 90 % est également observé du côté de la paroi proche. En ce qui concerne l’angle de pose (défini en détail en Annexe III et égal à 120° sur la Figure 8), Benmansour n’observe aucune modification notable des efforts internes en fonction de la variation de ce paramètre (Figure 8).

Figure 5. Effet de la couverture sur le moment maximal (d’après Benmansour, 1996)

Figure 6. Effet de la largeur de la tranchée sur le moment (d’après Benmansour, 1996)

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Figure 7. Effet de l’assymétrie de la tranchée sur le moment (d’après Benmansour,

1996)

Figure 8. Effet de l’angle de pose sur le moment fléchissant (d’après Benmansour, 1996)

2.1.2.2 Influence des facteurs rhéologiques Afin d’appréhender l’influence du lit de pose sur les efforts de la conduite, Benmansour fait varier le module de ce dernier de 1 à 50 MPa (50 MPa étant le module du remblai). Il constate que les efforts augmentent de manière considérable avec le module du lit de pose. Cependant, l’essentiel de cette variation se fait dans le domaine 1-5 MPa (700 % d’augmentation). Ce phénomène s’explique surtout par un effet de voûte dans le remblai, particulièrement accentué par la compression du lit de pose. Par ailleurs, l’auteur relativise le résultat de cette étude bidimensionnelle qui suggère qu’un lit de pose très lâche mais uniforme le long des conduites favorise leur tenue structurelle. Cette

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tendance pourrait être toute autre lorsqu’on considère le comportement des conduites dans le sens longitudinal, car un lit de pose lâche pourrait donner lieu à des tassements différentiels.

Figure 9. Effet du module du lit de pose sur le moment fléchissant (d’après Benmansour,

1996) Le module du sol de la tranchée subit ensuite des variations allant de 20 à 200 MPa (200 MPa étant le module du sol en place). Lorsque le module de remblai passe d’un extrême à l’autre, les efforts internes de la conduites sont doublés, la valeur maximale étant observée lorsque le sol de la tranchée a le même module que le sol environnant (Figure 10). Encore une fois, ce résultat s’explique par la diminution du cisaillement le long des parois de la tranchée. Lorsque les modules du remblai et du sol en place sont égaux, la conduite reprend la quasi-totalité du poids des terres. Notons ici que contrairement à ce qui est indiqué sur la Figure 10, l’auteur ne traite pas la variation du module de la seule zone d’enrobage mais de la totalité du remblai. Or, la pratique montre que les remblais supérieurs sont généralement bien compactés, tandis que les difficultés se concentrent surtout dans la zone d’enrobage (présence des réseaux, de la nappe, difficulté de gestion des blindages, manque de place…). D’autre part, il considère dans tous les cas le sol en place plus rigide que le sol de la tranchée, ce qui n’est pas nécessairement le cas. La zone de bourrage telle qu’elle a été considérée par l’auteur est la zone d’enrobage située au niveau des hanches de la conduite. Son module est égal à 0,1 MPa afin de simuler les vides éventuels à cet endroit. Il apparaît que l’effort normal n’est pas particulièrement affecté par cette discontinuité alors que l’effort tranchant et le moment fléchissant sont, quant à eux, augmentés respectivement de 60 et de 100 % par rapport au cas d’enrobage uniforme. L’illustration des résultats pour le cas du moment fléchissant est donnée sur la Figure 11.

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Figure 10. Effet du module de l’enrobage sur le moment fléchissant de différent types de

conduites enterrées (BA – béton armé, d’après Benmansour, 1996)

Figure 11. Effet du module de la zone de bourrage sur le moment maximal (d’après

Benmansour, 1996)

2.2 - Plan longitudinal

2.2.1 Approche analytique Le comportement longitudinal des conduites d’assainissement rigides a été relativement négligé dans la mesure où l’on ne trouve que des approches simples par rapport aux travaux sur le comportement diamétral. L’une des premières approches, analytique, réalisée par Scarino (1981), consiste à calculer les conduites comme des poutres indéformables articulées et posées sur un continuum élastique. D’autres hypothèses de Scarino admettent que les joints transmettent 100 % de cisaillement et que les tassements différentiels n’ont aucun effet sur le chargement des conduites.

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Suite à l’application d’une charge w, la méthode consiste à calculer les forces de cisaillement au niveau des joints, puis d’estimer la force de contact en tenant compte de ces forces. Si la force de cisaillement sur un joint est égal à V, alors sur les joints adjacents elle sera égale à xV, x²V et ainsi de suite, x étant un coefficient de transmission déterminé par les équilibres successifs de différents éléments. Ainsi, de proche en proche, l’auteur arrive au schéma de calcul indiqué sur la Figure 12 où L représente la longueur de l’une des poutres.

0,0718V 0,0192V 0,2679V V

w – 0,0666V/L w – 0,9282V/L w + 3,4641V/L w + 0,2487V/L

Figure 12. Schéma de calcul analytique (Scarino, 1981) Lorsque la force de contact est calculée, les tassements (proportionnels) qu’elle engendre sont facilement obtenus. Connaissant les déplacements verticaux de chaque articulation, on peut alors calculer la rotation des joints. Par la suite, l’auteur considère plusieurs types de liaisons de l’ensemble des buses avec un bâtiment ou un regard.

2.2.2 Modèle de Winkler Les approches analytiques ont très rapidement cédé leur place à des modélisations numériques type éléments finis. Bien que les objectifs et les moyens utilisés dans ces approches diffèrent de l’une à l’autre, leur principe de base reste le modèle de Winkler (Figure 13). Le principe du modèle de Winkler (1867) consiste à discrétiser le sol dans la direction longitudinale par une série de ressorts indépendants. La principale difficulté consiste en l’appréciation de la rigidité des ressorts de façon réaliste. En effet, nous pouvons trouver dans la littérature de nombreuses manières de déterminer leurs valeurs numériques (Schmitt 1998, Balay 1985, Biot 1937, Vlassov et Leontiev 1956, Vesic 1963, Selvadurai 1985, Matsubara et Hoshiya 2000, Menard dans NF P 94-110, 1991). Les discontinuités dans le sol sont représentées par le biais des variations des raideurs. Le modèle de Winkler suppose que la conduite se déforme élastiquement en épousant la déformation du sol, ce qui mène à la proportionnalité entre contraintes et déformations du type :

P = kW Avec P : la pression appliquée en un point, W : le déplacement vertical en ce point.

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Conduite Charge

Joint Sol

Figure 13. Modèle de Winkler Les éléments de conduites sont généralement considérés comme des solides de rigidité élevée reliés, selon les auteurs, par différents types de joints (contact rigide, articulation parfaite, différents degrés de souplesse).

2.2.2.1 Approches qualitatives des hétérogénéités identifiées Jeyapalan et Abdel-Magid (1987) ont modélisé un tronçon de conduites RPM (Reinforced Plastic Mortar) afin d’évaluer l’influences d’hétérogénéité du sol support sur les efforts internes. Les conduites sont chargées par le poids propre du remblai. Les joints, comme les conduites, sont représentés par des poutres, mais plus courtes et moins rigides, sans possibilité de rotation. Les coefficients de réaction ont été déterminés à partir d’une analyse transversale. Cinq configurations différentes d’hétérogénéité ont été considérées :

A – sol homogène (k = 117 kN/m, sauf au niveau des joint où k = 58,4 kN/m), B - vides au niveau des joints (idem A, sauf au niveau des joints où k = 0,73 kN/m), C - appuis espacés dans un remblai dense (idem A, sauf au droit des appuis k = 1197

kN/m), D - appuis espacés dans un remblai lâche (idem A sauf au droit des appuis k = 1109

kN/m ), E - vide le long du tuyau – appuis au niveau des joints (k = 58,4 kN/m, sauf au niveau

des joint où k = 511 kN/m). La configuration A donne les moments minimaux tandis que le cas B apparaît le plus défavorable, avec une augmentation de plus de 260 % (Figure 14). Par ailleurs, la localisation des moments maximaux dépend de la configuration considérée : le moment maximal est à la mi-travée pour le cas E et sur le premier quart de chaque côté de la buse centrale dans les autres cas. Benmansour (1996) a réalisé, avec une approche similaire (programme RIDO ; méthode des forces), une étude paramétrique comparable à celle décrite précédemment dans le plan diamétral. L’influence sur la distribution des contraintes dans la conduite est testée pour plusieurs paramètres :

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- la rigidité relative sol – conduite (rapport de rigidité de la conduite sur celle du sol, kc/ks),

- la rigidité relative conduite – joint (kc/kj), - l’élancement (rapport longueur de la buse sur diamètre, l/D), - la profondeur de pose, - les discontinuités dans le sol le long de la conduite, - la présence de vides ou de points durs.

Figure 14. Influence des conditions d’appui sur une conduite RPM (d’après Jeyapalan et

Abdel-Magid, 1987) Les coefficients de réaction utilisés dans cette étude sont donnés par Selvadurai (1985) pour deux cas de figure :

- pour une conduite peu profonde (inférieure à 3 diamètres de la conduite) :

2165,0

s

sEk

ν−=

- pour une conduite profonde :

)43)(1()1(6

ss

ssEk

ννν−+

+=

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En se basant sur d’autres sources de données, Benmansour avance différentes valeurs numériques de coefficient de réaction selon l’état de compacité du remblai. Ainsi, pour un sable lâche k est compris entre 12 – 80 MN/m3, un sable moyennement dense entre 80 – 160 MN/ m3 et un sable dense entre 160 – 250 MN/m3. La plage de variation de la réaction du sol pour un état de compacité donné traduit le degré d’aléas et l’incertitude relativement importante intrinsèque à ce paramètre. Il est donc évident que les résultats obtenus ne pourront prétendre au mieux qu’à donner une tendance qualitative. Les conclusions concernant la profondeur de pose des conduites obtenues par ce calcul vont dans le même sens que celles du calcul transversal. Sous une combinaison de chargement par poids propre du remblai et une surcharge en surface, il apparaît une profondeur optimale de pose pour laquelle les efforts sont minimaux (Figure 15). Il s’agit de la profondeur où les effets des charges de surface se sont dissipés plus rapidement que n’est augmenté l’effet du poids propre.

Figure 15. Effet de la hauteur de couverture sur le moment de flexion longitudinal

(d’après Benmansour, 1996) L’étude des rapports de rigidité permet de traiter de manière qualitative l’influence du compactage sur le comportement longitudinal des conduites. Contrairement au cas équivalent dans le plan diamétral de la conduite, un module élevé du remblai diminue considérablement les efforts longitudinaux. Par exemple, lorsque la rigidité relative sol – conduite passe de 30 à 1700 (Figure 16), le moment fléchissant maximal est augmenté de 700 % pour une valeur élevée de la rigidité des éléments représentant les joints. Les résultats semblent être sensiblement liés à la rigidité relative conduite – joint, mais difficilement exploitables, puisque la valeur réelle de cette grandeur reste inconnue. En outre, lorsque la raideur des appuis sur une zone de quelques buses de longueur est diminuée d’un ordre de grandeur (simulation d’une hétérogénéité longitudinale, les efforts internes sont multipliés par 14 ou 18 suivant le type d’effort. La Figure 17 montre la variation du moment longitudinal de la conduite en fonction des rapports des modules des deux zones de sol. La valeur du module est rapportée à celle d’un cas de sol homogène de module Es1 = 100 MPa. L’introduction des joints a pour effet de diminuer les efforts internes de façon notable, cette diminution pouvant aller jusqu’à 22 % pour le moment fléchissant.

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Figure 16. Effet de la rigidité relative sol-conduite sur le moment longitudinal (d’après

Benmansour, 1996)

Figure 17. Effet de la variation de la rigidité du sol (d’après Benmansour, 1996)

Benmansour envisage également les configurations des hétérogénéités localisées d’environ 1 m de longueur. Les efforts dus à la présence d’un vide ou d’un point dur sont respectivement de 5 à 10 et de 25 à 40 fois supérieurs au cas du sol homogène. Au delà des aspects attendus d’interaction sol – conduite, ces études avant tout qualitatives mettent en exergue l’influence des joints sur la réponse de la conduite à une variabilité des paramètres mécaniques du modèle. Si cette influence est très sensible pour des variations spatialement étendues, elle semble avoir très peu d’effet sur les hétérogénéités localisées. Les résultats de ces simulations suggèrent que les joints apportent une certaine flexibilité à l’ensemble de l’ouvrage, bénéfique dans le contexte des hétérogénéités spatialement étendues. Par ailleurs, la flexibilité de l’ouvrage peut être également apportée en augmentant le nombre de joints, c’est-à-dire en utilisant des buses d’élancement plus faible. L’auteur examine

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l’influence de ce paramètre pour deux raideurs différentes d’appuis (Figure 18), mais l’apport du supplément de flexibilité est pratiquement négligeable dans les gammes d’élancements courants.

Figure 18. Effet de l’élancement des buses sur le moment longitudinal (d’après

Benmansour, 1996)

2.2.2.2 Approche généralisée par une analyse probabiliste Si les analyses précédentes se concentraient sur quelques exemples d’hétérogénéités bien identifiées, les travaux de Elachachi et al. (2002, 2004) visent à généraliser l’étude des influences des hétérogénéités afin d’aboutir à une notion de risque pour les ouvrages. Pour ce faire, une approche particulière a été adoptée : elle repose sur le couplage entre la modélisation avec l’approche de Winkler et la méthode stochastique de Monte-Carlo. L’idée de cette approche consiste à utiliser des distributions statistiques pour représenter les variations spatiales des caractéristiques du sol, puis de réaliser un grand nombre de calculs à l’aide du modèle déterministe. Les résultats peuvent alors être analysés statistiquement, de manière à évaluer la probabilité de dépassement de telle ou telle valeur critique. L’approche consiste donc en trois étapes :

- Discrétisation du champ aléatoire des raideurs du sol en un grand nombre de distributions pour une géométrie donnée. La qualité du générateur des distributions aléatoires est donc essentielle dans cette approche. Ici, les auteurs utilisent la théorie du champ aléatoire de Van Marcke (1983), ses caractéristiques étant contrôlées par la moyenne (m), la variance (σ²) et l’échelle de fluctuation (ou longueur de corrélation lc) du champ aléatoire k.

- Un calcul déterministe pour chaque distribution est effectué, donnant un jeu de valeurs maximales (moment fléchissant, contre-pente, rotation aux joints) pour une configuration de tronçon. Sachant que la longueur des buses reste constante, les variations dans le tronçon concernent les joints. Ignorant leur rigidité, les auteurs font varier la longueur fictive du joint afin d’obtenir des degrés différents de flexibilité.

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Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

- Les analyses statistiques des séries de réponses de la structure sont effectuées dans un premier temps à l’échelle du tronçon (études paramétriques), puis à l’échelle de la population, par l’intermédiaire des grandeurs M95 et CP95. Ces dernières correspondent respectivement au moment fléchissant et à la contre-pente dépassée dans 5 % des cas. Ainsi, une description des variations de M95 et CP95 en fonction des paramètres du champ aléatoire a pu être donnée.

Les hétérogénéités du sol sont donc illustrées par le paramètre longueur de corrélation (c’est-à-dire la « longueur à partir de laquelle les propriétés ne sont plus corrélées »). Qualitativement, une longueur de corrélation faible correspond à un sol très chahuté, alors qu’une longueur de corrélation élevée représente un sol dont la variabilité spatiale est lente. Pour une rigidité de joint fixée, quelle que soit la valeur du paramètre longueur de corrélation, la probabilité de dépasser le M95 diminue lorsque k augmente (Figure 19). Ce résultat est donc identique à celui de Benmansour relatif au rôle de la rigidité sol – conduite. Le même type de conclusion peut être tiré pour les contre-pentes. Cependant, pour une valeur de k donnée, les moments sont maximaux lorsque la longueur de corrélation vaut environ 1 à 2 fois la longueur de la buse. Il en va de même pour les contre-pentes, mais pour des longueurs de corrélation supérieures (2 à 3 fois la longueur de la buse).

Figure 19. Moment M95 en fonction de la rigidité et de la longueur de corrélation lc

L’effet de la variabilité du module de réaction peut également être appréhendée en définissant un coefficient de variation cv = σ/k où σ² est la variance du champ k. Sur la Figure 20 est donnée l’évolution du moment M95 en fonction des valeurs moyennes de k et de leur coefficient de variation. La valeur de cv = 0 correspond au cas homogène. Ainsi la Figure 20 montre que le moment M95 augmente de manière quasi proportionnelle à la dispersion du module de réaction k (pour un k fixé, la relation M95 – cv est linéaire). Compte tenu de la Figure 20, Elachachi et al. (2004) suggèrent qu’il est préférable d’avoir un sol en moyenne peu compact (à faible coefficient de réaction) mais homogène plutôt qu’un sol plus compact mais avec un coefficient de variation élevé. En outre, la longueur de corrélation étant fixée, les valeurs des moments dépendent plus ou moins fortement de la rigidité du joint. En effet, la Figure 21 représente l’évolution des moment M95 et M50 pour 3 différentes rigidités des joints :

- Cas 1 : joint très rigide (longueur fictive faible)

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Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

- Cas 2 : joint moyennement rigide (longueur fictive égale à la longueur de la buse) - Cas 3 : joint très souple (longueur fictive élevée).

Figure 20. Moment M95 en fonction de la rigidité k et le coefficient de variation cv

Figure 21. Moment M95 et M50 en fonction de la rigidité du joint et de la longueur de

corrélation Ainsi la rigidité du joint influence non seulement la valeur du moment (plus le joint est rigide, plus le moment est élevé) mais également l’effet que produit la longueur de corrélation : selon la rigidité des joints, l’hétérogénéité la plus défavorable du point de vu du moment change. Pour des joints rigides ou moyennement rigides, la longueur de corrélation donnant les moments maximaux vaut environ une à deux fois la longueur de la buse. Pour les joints souples, cette longueur est de l’ordre d’une demi buse.

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Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

Globalement, le comportement longitudinal des conduites est conditionné par trois paramètres :

- deux types de rigidité : module de réaction (dépendant du sol et de la conduite) et rigidité des joints,

- « vitesse » de variation des caractéristiques du sol dans la direction longitudinale ou longueur de corrélation.

2.2.3 Les modèles de pipelines Si la littérature portant sur l’aspect longitudinal des conduites d’assainissement reste pauvre et qu’aucun modèle tridimensionnel n’existe à ce jour, il n’en est rien en ce qui concerne les conduites d’eau, de gaz ou de pétrole. Les enjeux d’une dégradation de ce type de conduite étant considérés comme bien plus importants que ceux des conduites d’assainissement, les études des pipelines sont en quelque sorte des précurseurs dans le domaine des conduites enterrées. Bien que ce type de conduite soit assez différent des réseaux d’assainissement (pression interne et température élevées, diamètre important mais épaisseur faible, matériau souvent différent du béton, absence de joint), il est intéressant d’examiner quel type de modèle a pu être développé pour traiter les problèmes d’interaction de la conduite avec le sol environnant. Un état de l’art récent et relativement complet peut être trouvé dans Rubio et al. (2003). Nous pouvons également citer les travaux de Provakar (1983), Zhou et Murray (1993) ou Hendrix et al. (2004). D’une manière générale, les modèles 3D diffèrent suivant leur représentation de la conduite, du sol et de l’interface sol – conduite. Le pipeline est souvent représenté comme une poutre continue ou une coque mince, avec une loi de comportement pouvant être élasto-plastique dans les modèles les plus complexes. En ce qui concerne le sol, les différents auteurs utilisent aussi bien les modules de réaction que des lois élasto-plastiques non linéaires. L’interface entre le sol et la conduite peut faire intervenir une adhérence parfaite, un glissement parfait ou intégrer une interface de frottement plus complexe. En revanche, même les modèles les plus performants ne cumulent pas la complexité dans tous les aspects de la modélisation. Suivant les objectifs de l’étude, soit la conduite est représentée de façon complexe, soit le sol. Cependant, la littérature est très pauvre sur l’effet des hétérogénéités du sol sur les pipelines. Certaines de ces études se centrent sur l’influence des charges en surface sur les efforts internes des conduites. Nous les étudierons plus en détail dans la section 4 de ce chapitre. L’approche analytique de Boussinesq, utilisée par les réglementations en vigueur, est parfois examinée avec un modèle 3D (par exemple, Noor et Dhar, 2003). La modification de la diffusion de la charge dans le massif, due à la présence de la conduite, apparaît alors limitée et va dans le sens de la sécurité.

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Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

2.3 - Conclusions Le principal constat de l’étude bibliographique précédente est l’absence d’une approche tridimensionnelle de l’interaction sol-conduite bien que sa nature 3D ne fasse aucun doute. Ceci s’explique par l’impact de l’approche de Marson sur la pratique, mais également par la nécessité d’une puissance de calcul très importante dès lors qu’on envisage une approche 3D. L’émergence de la notion du risque et de la problématique du vieillissement des ouvrages dans le contexte de la gestion de patrimoine, allant de paire avec une croissance d’une conscience environnementale, amènent les gestionnaires à se préoccuper de l’aspect longitudinal du comportement des tronçons. Cependant, dans ce domaine, les considérations sont encore partielles et relativement simplistes. Si l’influence de la variabilité du sol sur le comportement longitudinal a déjà été abordée, les résultats sont souvent donnés à l’échelle du tronçon et non à l’échelle d’une buse. La non représentation du sol en tant que milieu continu empêche toute considération réaliste et concrète d’un type d’hétérogénéité particulier bien identifié sur le terrain. Pour cette raison on ne peut trouver à ce jour dans la bibliographie que des tendances de comportement ou des conclusions relativement générales. La dissociation des comportements longitudinal et transversal l’un de l’autre par des considérations bidimensionnelles indépendantes ne peut donner immédiatement le résultat de l’impact d’une hétérogénéité dans sa globalité. Les configurations qui vont dans le sens de la sécurité dans le plan transversal peuvent produire l’effet inverse dans le plan longitudinal. Il est ainsi difficile de suivre simultanément l’évolution des efforts longitudinaux et transversaux avec celle des sollicitations extérieures et de capturer le mécanisme le plus défavorable pour l’ouvrage. En revanche, un modèle tridimensionnel permet d’avancer sur tous ces aspects. En outre, il permet de prendre en compte le chargement en surface de nature ponctuelle dont la diffusion correcte dans le massif de sol peut être correctement représenté dans une configuration 3D. Cet aspect, très peu abordé dans la littérature qui se focalise sur le chargement par le poids propre du remblai, est pourtant essentiel pour les conduites faiblement enterrées. Pour pouvoir réaliser un tel modèle 3D il manque un élément essentiel : l’implémentation numérique d’un modèle du joint. Nous avons vu dans la bibliographie plusieurs techniques pour dépasser ce problème mais dont le principe commun consiste à envisager successivement les deux cas limites à savoir le joint très souple et le joint très rigide. Avec les résultats du chapitre 3, nous avons désormais à notre disposition un modèle rhéologique qu’il faudra implémenter dans un modèle 3D. Enfin, il ne faudra pas négliger les autres aspects de la modélisation 3D c’est-à-dire l’interface sol-conduite, les lois de comportement des matériaux et bien sûr, une représentation aussi réaliste que possible de la conduite. Les sections suivantes ont pour objectif de présenter la construction d’un modèle d’interaction sol-conduite en tenant compte de tous ces éléments.

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Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

3 - LE MODELE TRIDIMENSIONNEL FLAC3D Le code de calcul en trois dimensions FLAC3D (Fast Lagrangian Analysis of Continua) fait partie de la grande famille des outils numériques permettant la résolution de problèmes en contraintes – déformations dans un milieu continu. Comme la plupart des codes de calcul, FLAC3D donne, après résolution du problème, le tenseur des contraintes et des déformations en tout point de l’espace. On distingue trois grands groupes de logiciels selon la méthode de discrétisation utilisée pour résoudre les équations : différences finies, éléments finis et éléments discrets. Le code FLAC repose sur la méthode des différences finies : le milieu supposé continu est discrétisé en un ensemble de lieux où les variables sont connues. Il existe deux schémas de résolution des équations régissant le milieu continu : explicite et implicite. Le code FLAC est basé sur le schéma explicite, dont le principe consiste à effectuer le calcul dans un élément sans tenir compte des éléments voisins. Pour cette raison, et contrairement au schéma implicite, il n’est pas nécessaire de stocker une matrice de rigidité globale. Enfin, le logiciel FLAC est un code de calcul fondé sur une formulation numérique appelée « méthode des éléments lagrangiens » (Billaux et Cundall, 1993). En effet, les coordonnées des nœuds (points de discrétisation de l’espace) peuvent être réactualisées à chaque pas de calcul, ce qui donne la possibilité au maillage de suivre la déformation du milieu qu’il représente. Par opposition à cette formulation lagrangienne, la formulation eulérienne maintient le maillage initial au cours des calculs. Le principe du couplage des différences finies avec un schéma explicite de résolution implémenté dans le code FLAC est présenté en Annexe VI. Nous y avons expliqué notamment la méthode de discrétisation en différences finies, la formulation numérique des équations du mouvement ainsi que leur formulation nodale.

3.1 - Présentation générale du modèle et de ses objectifs Contrairement à la plupart des ouvrages enterrés, où les charges permanentes représentent la majorité des efforts appliqués, les conduites d’assainissement sont soumises à des chargements de service importants. Il s’agit, dans la grande majorité des cas, du chargement dû au trafic en surface puisque les conduites sont souvent placées sous les voies de circulation et insuffisamment enterrées pour que l’effet des surcharges puisse être négligeable. Le trafic routier peut être caractérisé par la répétition des charges ponctuelles, dont l’intensité est très variable. Le poids total d’un véhicule varie entre 140 et 320 kN, sachant que le poids total du véhicule le plus lourd autorisé est de 440 kN. Parallèlement, la charge permanente pour une canalisation enterrée à une profondeur de 1,5 m est de l’ordre de 40-50 kN/m, en avançant l’hypothèse de Marston selon laquelle la canalisation reprend l’ensemble de la charge du remblai (sans prendre en compte les frottements négatifs). Ainsi, un modèle numérique doit pouvoir convenablement représenter la diffusion dans le massif de la charge ponctuelle en surface ainsi que l’interaction sol – conduite.

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Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

Cependant, la modélisation d’une répétition de chargement ponctuel en surface suggère la construction d’un modèle complexe capable de simuler le chargement cyclique. Or l’état de l’art des approches numériques met en exergue l’absence totale d’un modèle tridimensionnel relativement complet ne serait-ce que dans le cas d’un chargement monotone. Nous avons donc choisi dans une première approche, de ne prendre en compte qu’un chargement monotone. Ce choix aura des conséquences importantes sur le contenu du « cahier des charges » du modèle à construire en permettant notamment de réduire la complexité de la loi de comportement du sol de la tranchée. Le fil directeur de la construction du modèle qui a orienté le choix de ses composantes était la nécessité d’intégrer simultanément tous les éléments de l’interaction sol-conduite quand bien même leur fonctionnement restait simple. Les sections suivantes vont détailler chacune des composantes. En particulier, la prise en compte des joints est un élément essentiel dès lors qu’on se fixe l’objectif d’étudier le comportement longitudinal. Le travail d’implémentation des résultats expérimentaux du chapitre 3 sera longuement présenté dans la section 5. Le maillage du massif de sol est représenté dans le plan transversal sur la Figure 22 et dans le plan longitudinal sur la Figure 23. La densité du maillage est plus élevée dans la zone d’enrobage de la conduite et au voisinage des joints. Le maillage de la conduite suit la même logique que celle du massif de sol (Figure 24).

Figure 22. Maillage dans le plan transversal (représentation d’un demi modèle)

Dans le code de calcul FLAC3D, les conduites enterrées peuvent être modélisées de deux manières : par des éléments de volume, ou par des éléments finis, dits éléments de structure. Une représentation correcte de la conduite par les éléments de volume requiert plusieurs « couches » d’éléments de volume dans l’épaisseur de la conduite, c’est-à-dire qu’une discrétisation en plusieurs nœuds est nécessaire. Sachant que nous traitons un problème en trois dimensions à l’échelle de plusieurs dizaines de mètres, ces éléments volumiques représentant la conduite ont une dimension de l’ordre du centimètre. La continuité du

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Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

maillage impose donc de créer un nombre très important de nœuds, ce qui se traduit par des durées de calcul extrêmement longues. Nous avons donc choisi de retenir les éléments de structure pour la modélisation de la conduite. Ces éléments de structure reposent sur l’hypothèse du comportement des conduites en coque mince, hypothèse qui sera examinée plus loin dans ce chapitre. En outre, un autre type d’éléments de structure sera utilisé pour construire un modèle de joint : les éléments poutres. Dans les paragraphes suivants, nous donnerons une brève description de ces deux types d’éléments. Par ailleurs, l’interface entre la conduite et le sol de la tranchée est également prise en compte dans le modèle numérique. Ces caractéristiques sont décrites dans la dernière partie de cette section.

Figure 23. Maillage dans le plan longitudinal (représentation d’un demi modèle)

Figure 24. Maillage de la conduite (représentation d’un quart de modèle)

Notre objectif étant la construction d’un modèle numérique relativement complet, il est difficile de valider l’ensemble de ses résultats sans une expérimentation in situ (notamment l’aspect longitudinal). De plus, il n’existe pas de simulation numérique en 3D intégrant l’ensemble des composantes présentes dans ce modèle, ce qui le rend incomparable avec d’autres approches. La comparaison avec les résultats de la littérature ne peut être effectué avec le modèle complet, mais avec une variante simplifiée dérivée du modèle complet. La procédure de mise en place du modèle est la suivante :

- Mise en place d’un massif de sol dont la contrainte verticale en chaque point est fonction de la masse volumique et de la profondeur. La contrainte horizontale est

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Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

définie par un K0 généralement égal à 0,5. Les limites verticales du maillage (où le déplacement horizontal est bloqué) sont placées suffisamment loin pour qu’elles ne produisent aucun effet sur les résultats.

- Un volume cylindrique du sol est excavé puis les éléments représentant la conduite sont mis à sa place. Un premier calcul permet ensuite d’atteindre l’état d’équilibre en tout point du modèle. Cet état d’équilibre est considéré comme l’état initial du modèle.

- Une charge surfacique est appliquée en une seule fois au droit de la conduite sur une surface relativement réduite de l’ordre de 0,9m².

- Le second calcul permet d’atteindre un nouvel état d’équilibre dit état final où les champs de déplacement et de contraintes sont relevés.

3.2 - Les éléments constitutifs

3.2.1 Les éléments de coque Le comportement d’un élément de structure est déterminé par sa matrice de rigidité, construite par la technique d’éléments finis habituelle. La taille de cette matrice de rigidité dépend du nombre de degrés de liberté par éléments. La formulation en éléments finis est ensuite intégrée dans le schéma explicite lagrangien et ne nécessite aucune inversion de la matrice de rigidité, comme c’est le cas dans les codes d’éléments finis classiques suivant un schéma implicite. Les éléments de coque (Figure 24) sont des éléments finis plats à 3 nœuds du type DKT-CST Hybride décrits par Cook et al. (1989). Ces éléments possèdent 6 degrés de liberté par nœud : 3 translations et 3 rotations. Ils sont donc capables de tenir compte à la fois du comportement en flexion (DKT) et de l’effet membrane (CST). La loi de comportement de ces éléments est linéaire et élastique, sans possibilité de rupture. Dans la mesure où nous nous intéressons aux interactions sol – conduite dans le domaine de service avant la dégradation des conduites, la représentation du comportement des conduites fissurées n’est pas nécessaire. Ainsi, le modèle linéaire élastique isotrope est considéré comme suffisant dans cette approche. L’interaction des éléments coques avec le maillage est assurée par l’interface décrite plus loin. Les efforts internes de la conduite sont exprimés dans un système de coordonnées local qui coïncide avec le repère cylindrique de la conduite (Figure 25). Ce repère est également le système dans lequel s’inscrivent les contraintes principales : radiale σr = σz, orthoradiale σy = σθ et axiale σx. Selon l’hypothèse des coques minces, la contrainte radiale est nulle. Les contraintes de compression sont négatives. La distribution des contraintes sur l’épaisseur (fictive) de la conduite est linéaire. Les valeurs extrêmes des contraintes sont relevées sur la fibre intérieure σi et extérieure σe (Figure 25 et Figure 26) de la conduite en fonction de la position angulaire. La contrainte orthoradiale crée, dans le plan transversal, un moment local My, et une résultante Ny (souvent très faible) définis par les équations 1 et 2 et exprimés par unité de longueur (Figure 27a):

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Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

∫+

−=

2

2..

t

t yy dzzM σ Equation 1

∫+

−=

2

2.

t

t yy dzN σ Equation 2

θ

Figure 25. Le système de coordonnées

Figure 26. Définition des contraintes principales

La contrainte axiale varie linéairement mais ne change pas de signe dans l’épaisseur de la conduite. Dans une position angulaire donnée, elle peut alors être décomposée en une partie constante σx1 créant la résultante Nx1 et une partie variable σx2 créant la résultante Nx2 et un moment local Mx (Equation 3). La somme des résultantes Nx1 et Nx2 forment la grandeur appelée force axiale Nx définie par l’Equation 4.

∫+

−=

2

2..

t

t xx dzzM σ Equation 3

∫+

−=

2

2.

t

t xx dzN σ Equation 4

Lorsque les caractéristiques du sol et les conditions de chargement sont uniformes (condition de déformations planes), la grandeur représentative du comportement (transversal) de la conduite sont le moment d’ovalisation My et l’effort normal Ny. Les deux autres grandeurs Nx

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Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

et Mx, caractérisant le comportement longitudinal de la conduite, sont alors proportionnelles aux précédentes (effet de Poisson). Dans tous les autres cas, le moment de flexion local Mx et la force axiale Nx se développent indépendamment en fonction de l’état de contraintes extérieure.

a) Plan transversal b) Plan longitudinal

σx1

My

σy > 0

Mx Nx1

Nx2+

+ σx2

Figure 27. Contraintes principales et leurs résultantes dans une section

3.2.2 Les éléments poutres Les éléments poutres sont des éléments bidimensionnels (à 2 nœuds) avec 6 degrés de liberté à chaque nœud (3 translations et 3 rotations). La formulation de la matrice de rigidité de ces éléments est donnée par McGuire et Gallaher (1979). Caractérisés par leur géométrie et leurs propriétés matérielles, ces éléments ont également un comportement élastique et isotrope. Ils sont considérés comme ayant une section symétrique de surface A, une longueur et un moment d’inertie. Les éléments poutres peuvent être joints entre eux ou aux nœuds du maillage par l’intermédiaire de liens permettant de transmettre (ou pas) les 6 degrés de liberté des nœuds. La possibilité de ne pas transmettre certains des efforts va être exploitée dans la modélisation des joints.

3.2.3 L’interface Le contact sol – conduite est représenté par une interface du type Coulomb capable de simuler le décollement du sol dans la direction normale ainsi que le glissement dans la direction tangente de la conduite (Figure 28). Les valeurs numériques des paramètres d’interface sont relativement difficiles à apprécier. Elles dépendent de la nature de la surface de contact (béton lisse ou rugueux), du niveau de contrainte et de la nature du sol.

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Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

τ

u σ

Compression Traction

C Cr

φt

τσ

t

Figure 28. Maillage et interface Pour définir des valeurs de référence, nous nous sommes appuyés sur les travaux de Bourdeau (1997) et Ogunro (1996), qui ont réalisé des essais de cisaillement à la boîte de Casagrande de grandes dimensions sur les alluvions de Rhône. L’avantage de ce matériau, c’est qu’il présente un angle de frottement interne φ’ relativement élevé, de l’ordre de 40°, ce qui semble être proches des caractéristiques des matériaux de la tranchée. Les résultats sont donnés dans le Tableau 3.

Tableau 3. Relation entre l’angle de frottement de l’interface et l’angle de frottement interne du remblai

Contrainte tan (ϕ ) Lien avec l’angle de frottement interne Contact alluvions – béton lisse

σ ≤ 50 kPa 0,65 – 0,7 ϕ = 0,85 φ’ σ = 75 kPa 0,6 ϕ = 0,77 φ’ σ ≥ 100 kPa 0,5 ϕ = 0,63 φ’

Contact alluvions – béton rugueux 50 < σ ≤ 130 kPa 0,65 ϕ = 0,85 φ’

3.2.4 Les éléments de volume Les éléments de volume sont les éléments utilisés pour représenter le massif de sol. Leur fonctionnement est défini par une loi ou modèle de comportement permettant de calculer les efforts intérieurs dans les nœuds à partir de grandeurs cinématiques qui décrivent la déformation du milieu. Cette relation fonctionnelle, spécifique au matériau, est donnée par la relation suivante :

)( ijij F εσ = Equation 5

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Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

Les lois de comportement sont implémentées par le biais d’un algorithme numérique incrémental : à partir de l’état de contrainte du pas précédent et de l’incrément de déformation totale du pas de temps actuel, l’incrément de contrainte correspondant est calculé et le nouvel état de contrainte est alors déterminé. Les incréments de contrainte et de déformation sont liés par une fonction des contraintes, des déformations ou des deux. Pour un matériau non visqueux, la formulation incrémentale se met sous la forme (Darve et al., 1988) :

)( ijij G δσδε = Equation 6

où les G est la fonction tensorielle. Les modèles de comportement que nous utiliserons pour les éléments de volume sont brièvement décrits.

3.2.4.1 Le modèle élastique Le tenseur des déformations dans le modèle élastique linéaire et isotrope est relié au tenseur des contraintes par la relation de Hooke :

ijkkijij EEδσνσνε ⋅⋅−⋅

+=

1 Equation 7

ijkkijijEE δε

νννε

νσ ⋅⋅

−⋅+⋅

−⋅+

=)21()1(1

Equation 8

avec ijδ : indice de Kronecker

E : module de Young ν : coefficient de Poisson Les paramètres d’élasticité E et ν sont liés au module volumique K et le module de cisaillement G par les relations :

)1(2 ν+⋅=

EG et )21(3 ν⋅−⋅

=EK

Nous utiliserons également le modèle élastique isotrope transverse, où les propriétés dans l’une des 3 directions sont différentes des autres. Par exemple, si la direction 3’ dans le repère principal 1’, 2’, 3’ est normale au niveau de l’isotropie, la matrice de Hooke exprimée dans ce repère est de la forme :

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Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

où E et G représentent respectivement le module de Young et le module de cisaillement dans les deux directions du plan d’isotropie et E’ et G’ représentent ces mêmes grandeurs dans la direction normale à ce plan.

3.2.4.2 Le modèle élastoplastique de Mohr – Coulomb Le modèle de Mohr - Coulomb est un modèle élastique parfaitement plastique se caractérisant par une élasticité linéaire isotrope de Hooke (E, ν), une surface de charge f(σij) et un potentiel plastique. C’est un modèle à deux paramètres de rupture, la cohésion c et l’angle de frottement interne ϕ. Contrairement au modèle élastique, ce modèle permet de simuler la rupture du sol par cisaillement. En notant σ1 et σ3 les contraintes principales extrêmes ( 321 σσσ ≤≤ ), la surface de rupture qui définit le seuil de contrainte au-delà duquel le comportement du matériau est irréversible peut être mise sous la forme :

Equation 9 ( 3

En notant ψ l’angle de dilatance, le potentiel plastique s’écrit :

0cos2sin)( 3131 =+⋅⋅−⋅+−−= ctecg ψψσσσσ Equation 10

Lorsque ϕψ ≠ , l’écoulement est non associé. Ogunro (1996) montre que l’angle de frottement interne des alluvions du Rhône se compose d’une partie liée au pur frottement entre grains – traduit par l’angle de frottement critique ϕcv – et une partie due à l’effet de la dilatance. Cette influence de la dilatance dépend de la contrainte normale, de la taille des grains et de l’état de compacité. La loi d’écoulement expérimentale peut se mettre sous la forme suivante :

maxmax 32ψϕϕ += cv Au pic Equation 11

)tan(06,1)tan()tan( max ψϕϕ += cv Pendant l’essai de cisaillement Equation 12

Pour les alluvions du Rhône, d’angle de frottement interne de 40° et d’angle de frottement critique de 33°, l’ange de dilatance vaut environ 10°.

0cos2sin)131 =− +− −= ϕϕσσσσ cf

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Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

3.2.4.3 Implémentation d’un nouveau modèle Parallèlement aux modèles de comportement existants, il est possible d’introduire de nouvelles lois de comportement mécaniques dans le code FLAC3D. Le modèle doit être implémenté en langage C++, puis compilé en un fichier DLL (Dynamic Link Library). Ce module de calcul a déjà été mis en œuvre pour divers modèles et a été validé sur divers chemins de chargement (par exemple Souley et al., 2003). Dans le cadre de cette thèse, nous avons mis en œuvre un modèle élastique non linéaire, dont le module de Young augmente avec la contrainte. Ce modèle sera utilisé dans la modélisation du joint (voir la section 5.1).

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Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

4 - VALIDATION DU PREMIER MODELE SIMPLE Compte tenu de la nature de la problématique à laquelle le modèle tridimensionnel est sensé apporter une contribution, nous avons choisi d’effectuer la première phase de validation sur le problème de diffusion d’une charge en surface. Puisque la conduite n’est représentée que par un tube assimilé à une coque mince, il s’agit d’un cas de figure simple d’interaction sol-conduite mais qui, toutefois, dépasse le cadre de la réglementation. L’avantage de ce cas de figure est également l’existence dans la littérature des études similaires pouvant servir de référentiel de comparaison aux résultats obtenus par la modélisation FLAC3D. La première approche de Thépot (2004) est analytique et présente l’avantage d’expliciter les efforts internes en fonction des paramètres de la conduite et du sol. La deuxième approche de Fernando et Carter (1998) est numérique tridimensionnelle et présente l’avantage de faire varier certains paramètres dont l’épaisseur de la conduite.

4.1 - Approche analytique en contraintes planes Nous avons vu, dans le chapitre 2, que le modèle de Marston – Spangler prend en compte les charges en surface en supposant une diffusion dans le massif de celle-ci selon la théorie de Boussinesq, sans tenir compte de la présence de la conduite. La pression qui en résulte est intégrée dans le modèle bidimensionnel de Winkler situé dans le plan transversal au côté de celle issue des charges permanentes. Par la suite, les efforts sont calculés en utilisant notamment les modules conventionnels pour le sol qui rendent compte de l’interaction sol – conduite mais qui sont inappropriés pour le calcul de la diffusion des charges dans le massif. Thépot (2004) propose de corriger le calcul par l’introduction d’un coefficient de microdéformations qui augmenterait les valeurs des modules de sol. Il établit une solution analytique explicite en déformations planes qui permet de calculer l’effet sur une conduite enterrée de rayon moyen R, avec pression uniforme pv appliquée sur toute la surface d’un massif. Cette méthode repose sur l’hypothèse du comportement de la conduite en coque mince. Le moment de flexion et l’effort normal dans l’épaisseur de la conduite sont donnés en chaque point repéré par l’angle par rapport à la verticale :

où C et F sont les coefficients de couplage exprimés comme suit :

151

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Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

Les indices « s » et « c » renvoient respectivement au sol et à la conduite tandis que l’angle θ permet de repérer la position angulaire sur le périmètre de la conduite du point de calcul des efforts. Le coefficient F est lié au critère de rigidité traduisant la rigidité de la conduite relative au sol environnant. Si F < 10, la conduite peut être considérée comme rigide, sinon, son comportement est celui d’une conduite flexible. Une simulation bidimensionnelle par éléments finis a été entreprise par Thépot avec une charge répartie de pv = 100 kPa, une hauteur de couverture telle que h/D = 2 et une épaisseur telle que t/D soit légèrement inférieur à 0,2. Les résultats de la simulation numérique, donnés sur la Figure 29, sont très conformes à cette formulation analytique.

Figure 29. Solution analytique et numérique des efforts internes induits par une charge

répartie en surface

4.2 - Approche numérique pseudo – tridimensionnelle Fernando et Carter (1998) ont mené une étude paramétrique bidimensionnelle sur une conduite élastique soumise à une charge plus ou moins concentrée sur une surface carrée. Par une utilisation judicieuse des transformées de Fourier (Small et Wang, 1988) et en supposant le sol uniforme dans la troisième direction, les résultats obtenus dans le plan transversal peuvent être extrapolés le long de la conduite. Le sol et la conduite sont supposés élastiques avec, entre eux, un contact parfait sans glissement (absence d’interface). Les paramètres variés dans cette étude sont (Figure 30):

- la surface d’application de la force (déterminée par l’arête 2a) appréhendée par le paramètre adimensionnel 2a/D qui prend 3 valeurs : 0,1, 0,5 et 1,0.

- la hauteur de recouvrement h par le biais du paramètre h/D (0,1, 0,25 et 0,5). Au-delà de la valeur 0,5, les auteurs affirment que la charge en surface n’a plus d’influence sur le moment induit dans la conduite ;

- l’épaisseur de la paroi t par le biais de t/D (entre 0,0005 et 0,01) ; - 3 rapports de module de la conduite sur le module de sol Ec/Es 100 000, 10 000 et

1 000 correspondant respectivement à des conduites métalliques, plastiques et en béton.

152

Page 37: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

Figure 30. Configuration de Fernando et Carter (1988)

Les résultats, également donnés sous la forme adimensionnelle, montrent l’influence de ces paramètres sur :

- le moment de flexion transversale Mz ; - le moment de flexion longitudinale Mx ; - la contrainte axiale (force de compression).

Dans le cas du chargement symétrique, l’auteur retrouve le comportement anneau de la conduite dans des configurations typiques telles que sous un remblai faible avec une charge répartie ou sous un remblai plus important avec une charge plus concentrée. Comme on pouvait le supposer, l’influence de la charge diminue avec l’augmentation de la hauteur du remblai ; les moments maximaux créés par des charges ponctuelles sont plus élevés que ceux produits par la même charge mais répartie sur une plus grande surface. En revanche, la dissipation suivant l’axe de la conduite des efforts à partir de la verticale du point d’application de la charge est bien plus rapide sous une charge concentrée que sous une charge répartie. Les auteurs montrent qu’à partir d’une distance équivalente au diamètre multiplié par deux, les efforts dans la conduite deviennent négligeables. Ce résultat est obtenu pour des diamètres très élevés et des hauteurs de recouvrement très faibles. Il est donc très probable qu’il ne puisse pas être valable pour les conduites d’assainissement. Le chargement non symétrique engendre des efforts plus faibles que précédemment, mais situés à des endroits différents. Pour cette raison, les calculs désormais effectués seront tous envisagés avec une charge symétrique. Compte tenu de la plage de variation des paramètres h/D et t/D, le problème traité par Fernando et Carter est celui d’une conduite de grand diamètre à parois minces très faiblement

153

Page 38: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

enterrée, c’est-à-dire le cas typique des pipelines. Elle ne fait donc pas partie de la gamme que nous considérons ici. Néanmoins, le rapport h/D = 0,5 est le cas de figure qui se rapproche le plus de la couverture type d’un réseau d’assainissement. De même, le rapport des modules rentrant dans le cadre des conduites en béton est le plus faible des trois. Le cas de figure se rapprochant le plus à la configuration type des conduites en béton est donné sur la Figure 31. En ce qui concerne l’épaisseur, les conduites d’assainissement sont sujettes à de très faibles variations, le paramètre t/D n’ayant qu’une importance limitée. Les épaisseurs rencontrées étant davantage le résultat du mode de fabrication des conduites, le rapport t/D n’est pas vraiment dimensionnant. Typiquement, pour des buses en béton, le rapport t/D est situé entre 0,05 et 0,1, ce qui est sensiblement différent de la gamme considérée ici. En revanche, t/D = 0,1 est à la limite de la validité de l’hypothèse des coques minces retenue pour représenter les conduites.

Figure 31. Exemple de résultat type de Fernando et Carter (1998)

154

Page 39: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

4.3 - Modélisation numérique tridimensionnelle de la diffusion d’une charge en surface sur une conduite enterrée Le but de ce premier calcul est de vérifier que la méthode de modélisation par différences finies, qui est à la base du modèle tridimensionnel développé, est bien en accord avec les études similaires menées par d’autres outils numériques. Pour pouvoir comparer les résultats avec ceux que nous avons cités précédemment, nous nous sommes placés dans des configurations identiques de géométrie (en termes de paramètres importants de l’étude, à savoir les rapports t/D ou h/D) et de caractéristiques mécaniques du sol et de la conduite. Ainsi, nous avons envisagé trois configurations différentes avec des diamètres de 4, 1,3 et 0,5 mètres.

4.3.1 L’équivalence des grandeurs utilisées Dans une étude traditionnelle, le comportement transversal d’une conduite enterrée est caractérisé par le moment d’ovalisation (flexion) et l’effort normal. Dans notre modèle 3D, ces grandeurs sont respectivement représentées par le moment My et la résultante Ny mais la correspondance entre eux n’est pas immédiate. Pour cette raison, plutôt que les valeurs numériques, il est plus pertinent de s’attarder sur les allures des courbes représentatives. Néanmoins, la correspondance peut être facilement retrouvée, par exemple, dans le cas de l’effort normal en faisant l’équilibre d’un volume élémentaire de la paroi (Figure 32).

σy+dσy

dθ R

dl t σe

σy

Figure 32. Equilibre d’un volume élémentaire de la paroi

Si le sol applique sur la conduite la contrainte σe, alors l’équilibre dans le système local s’écrit :

0)( =−−+ dlttd eyyy σσσσ Equation 13

En écrivant dl = Rdθ et en utilisant l’expression de la résultante Ny (Equation 2), nous pouvons écrire :

∫= θσ dRdN ey Equation 14

155

Page 40: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

Nous identifions alors l’effort normal élémentaire de l’anneau par , ce qui permet d’établir la relation entre l’effort normal et la résultante orthoradiale N

∫= θσ ddN e

y:

RNN y = Equation 15

Cette relation permet notamment de comparer les résultats analytiques et numériques de Thépot (2004) avec nos calculs. Les résultats publiés par Fernando et Carter (1998) sont en revanche exprimés par les mêmes grandeurs que les nôtres, rendant la comparaison immédiate.

4.3.2 Validation du modèle simple

4.3.2.1 Charge localisée Les résultats obtenus dans le plan transversal par le modèle 3D simple, sur une configuration identique à celle de Fernando et Carter (h/D=0,5) sont présentés sur la Figure 33. Ils sont rigoureusement identiques à ceux que ces auteurs ont trouvé par un calcul bidimensionnel.

-0.1

0

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0 50 100 150

Position angulaire (degrés)

σθ/q

-0.02-0.015

-0.01-0.005

00.005

0.010.015

0.020.025

0.030.035

0 50 100 150

Position angulaire (degrés)

Mom

ent n

orm

alis

é M

y/P

a) Contrainte orthoradiale normalisée (cas t/D = 0,01)

b) Moment transversal normalisé (cas t/D = 0,05)

Figure 33. Conduite soumise à une charge ponctuelle

En ce qui concerne les efforts longitudinaux, Fernando et Carter utilisent les séries de Fourier pour calculer le moment longitudinal Mx. Les résultats obtenus (Figure 34b) sont semblables à ceux de notre modèle 3D (Figure 34a). La différence des valeurs à l’origine est simplement due à la différence du rapport h/D envisagé. Qualitativement, la dissipation des efforts internes au fur et à mesure que l’on s’éloigne du point d’application de la charge suit la même tendance. Cependant, nous observons que cette dissipation est plus rapide pour un calcul par les séries de Fourier. D’autre part, nous avons réalisé des calculs complémentaires en faisant varier la surface 2a² d’application de la charge, « a » étant la longueur de l’arête. Cette fois, les caractéristiques géométriques retenues sont celles des conduites d’assainissement (au lieu des pipelines). Les

156

Page 41: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

résultats obtenus sont donnés sur les Figure 35 et Figure 36. Nous retrouvons des résultats similaires à ceux de Fernando et Carter pour le même type de rapport 2a/D.

0

0.005

0.01

0.015

0.02

0.025

0.03

0 0.5 1 1.5 2

Position longitudinale adimensionnelle y/D

Mom

ent a

dim

ensi

onne

l M

/P

MxMy

a) Model tridimensionnel (h/D=0,5) b) Model bidimensionnel extrudé (h/D=0,1) d’après Fernando et Carter

Figure 34. Evolution des moments le long de la conduite

-0.04-0.03-0.02-0.01

00.010.020.030.040.050.06

0 50 100 150

Position angulaire (degrés)

Mom

ent n

orm

alis

é M

y/P

2a/D=0.12a/D=0.52a/D=1

-0.04-0.03-0.02-0.01

00.010.020.030.040.050.06

0 50 100 150

Position angulaire (degrés)

Mom

ent n

orm

alis

é M

y/P

2a/D=0.12a/D=0.52a/D=1

a) t/D = 0,05 b) t/D = 0,01

Figure 35. Moment transversal My dans la conduite sous charge ponctuelle, h/D = 0,5

-0.015-0.01

-0.0050

0.0050.01

0.0150.02

0.0250.03

0 50 100 150

Position angulaire (degrés)

Mom

ent n

orm

alis

é M

x/P

2a/D=0.12a/D=0.52a/D=1

-0.0006-0.0004-0.0002

00.00020.00040.00060.0008

0.0010.00120.0014

0 50 100 150

Position angulaire (degrés)

Mom

ent n

orm

alis

é M

x/P 2a/D=0.1

2a/D=0.52a/D=1

a) t/D = 0,05 b) t/D = 0,01

Figure 36. Moment longitudinal Mx dans la conduite sous charge ponctuelle, h/D = 0,5

157

Page 42: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

4.3.2.2 Charge répartie Les résultats obtenus pour la conduite soumise à une charge répartie en surface sont donnés sur la Figure 37. Ils sont proportionnels à ceux obtenus par Thépot au moyen de la méthode analytique et par la modélisation en éléments finis. Ainsi, en multipliant l’effort orthoradial Ny par le rayon et en inversant la convention de signe, nous retrouvons l’effort normal.

-40

-35

-30

-25

-20

-15

-10

-5

00 50 100 150

Position angulaire (degrés)

Effo

rt o

rtho

radi

ale

Ny

(kN

/m)

-2

-1.5

-1

-0.5

0

0.5

1

1.5

2

0 50 100 150

Position angulaire (degrés)M

omen

t ort

hora

dial

e M

y (k

Nm

/m)

a) Effort normal b) Moment de flexion

Figure 37. Conduite soumise à une charge répartie (h/D = 2)

4.3.3 Conclusion Suite à l’examen de la littérature concernant la problématique d’interaction sol-conduites, nous n’avons trouvé que des cas simples, certains d’entre eux pouvant être traités par des approches analytiques. Ainsi, dans le plan transversal, nous avons choisi de présenter les résultats numériques de la modélisation CESAR de Thépot qui ont l’avantage d’être comparés aux résultats analytiques. Bien que les grandeurs physiques utilisées soient différentes des nôtres, nous avons montré la cohérence de ces résultats avec les calculs FLAC3D. Pour la vérification de l’aspect longitudinal, nous avons utilisé l’étude de Fernando et Carter (1998) qui se rapproche le plus de notre modèle 3D. Si les résultats dans le plan transversal sont identiques aux nôtres, une légère différence est observée dans le plan longitudinal notamment en ce qui concerne la distance d’influence de la charge en surface. Nous avons conclu que cette différence provenait des approximations intrinsèques à la méthode des transformées de Fourrier. Notons que ces comparaisons sont effectuées sur un modèle sans joint et ayant une interface sol-conduite rigide. L’intégration de ces deux aspects dans le modèle FLAC3D aboutira à un modèle numérique nouveau qui, par définition, ne pourra pas être comparé à d’autres approches. En ce qui concerne l’interface, ce qui importe le plus n’est pas tant la valeur des différents paramètres, mais la possibilité ou non que celle-ci permette le frottement et le glissement. Cependant, nous nous sommes assurés que les valeurs des paramètres de l’interface choisis reposent sur des expérimentations (voir section 3.2.3). En revanche, il est certain que l’introduction des joints soit fondamentale pour le futur modèle 3D. Ceci est suggéré par l’ensemble des études menées à ce jour. Nous avons donc adopté une méthodologie de validation du modèle numérique du joint avant d’effectuer des calculs complets. Elle sera l’objet de la section suivante.

158

Page 43: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

5 - MODELISATION NUMERIQUE DU JOINT ET VALIDATION SUR LES EXPERIMENTATIONS EN LABORATOIRE

Le modèle rhéologique du joint développé dans le chapitre 3 démontre un comportement en compression bilinéaire local de la couronne représentant le joint. Ce fonctionnement est également à l’origine du comportement en flexion. En revanche, le comportement en cisaillement du joint semble être indépendant des deux autres. La sollicitation réelle du joint d’une conduite enterrée étant complètement inconnue, nous pouvons supposer qu’elle est une résultante de la composition de ces trois sollicitations élémentaires. Par conséquent, le modèle du joint doit pouvoir représenter à la fois le comportement en compression, la flexion et le cisaillement. L’objectif de cette étude numérique est la mise au point d’un tel modèle. Cependant, il est très probable que, pour la grande majorité des conduites enterrées, au moins une des 3 sollicitations élémentaires soit négligeable. En effet, dans la plupart des cas, la seule sollicitation significative sera la flexion. Le niveau de compression est sans doute lié à la force de frottement entre la conduite et le sol et en ce sens, dépend de la nature du contact sol – canalisation. Quant au cisaillement, son rôle pourrait être significatif dans les cas de forts tassements différentiels, notamment à l’occasion de la pose en milieu meuble. Si le modèle complet du joint, qui est aussi le plus complexe, est nécessaire pour représenter tout type de sollicitation, son utilisation peut s’avérer peu pertinente dans les cas de figure bien appréhendés où une variante plus simple serait amplement suffisante. Ainsi, outre le modèle complet, nous avons envisagé une série de modèles numériques de degrés de complexité variables reposant sur des approches différentes. Chacun de ces modèles simule correctement, dans son domaine d’utilisation, certains types de sollicitations, ce qui a pour avantage de rendre leur utilisation complémentaire. Dans un premier temps, nous avons transposé, dans la mesure du possible, le modèle rhéologique du chapitre 3 dans le code de calcul numérique. Ce modèle est caractérisé par une loi de comportement du joint non linéaire dans une approche locale. Dans un deuxième temps, une analyse du domaine de fonctionnement du joint montre qu’une approche globale (nécessitant un temps de calcul plus court), se substituant à un modèle local, peut être tout à fait satisfaisante. Cette approche, très différente de la première, est fondée sur un calage des paramètres mécaniques du modèle sur les résultats expérimentaux. Ainsi, une modélisation numérique du dispositif expérimental décrite dans le chapitre 3 a été effectuée afin de mener une analyse inverse aboutissant à ce calage.

5.1 - Modèle phénoménologique du joint dans le FLAC3D

5.1.1 Implémentation du modèle local non linéaire La Figure 5 du Chapitre 3 représente l’essai de compression, c’est-à-dire l’évolution de l’effort axial en fonction du déplacement horizontal. La courbe représentative de N=R(δh,f)δh

159

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Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

peut être exprimée au moyen d’une forme bilinéaire caractérisée par trois paramètres : les deux pentes interprétées comme les rigidités R du joint en compression et le seuil de changement de rigidité donné en termes de déplacement ou de force. Pour le calcul analytique, le seuil de changement de rigidité a été exprimé par une valeur de déplacement horizontal. Pour faciliter la mise en œuvre du modèle local dans le code de calcul FLAC3D, nous avons préféré utiliser les valeurs de force. La mise en place du modèle local consiste donc en l’expression de la rigidité comme fonction non linéaire de l’effort axial (Figure 38). Pour éviter un changement brutal et peu réaliste de la rigidité, nous supposons que ce changement s’opère de manière progressive sur une plage de variation de l’effort axial compris entre deux valeurs, N1 et N2.

Rigidité

R2

R1

N1 N2 Effort axial

Figure 38. Evolution non linéaire du joint avec l’effort axial Comme pour le modèle analytique (Figure 29, Chapitre 3), le joint est représenté par une couronne volumique de largeur er et d’épaisseur eh. Le coefficient de Poisson de la couronne est pris égal à zéro, ce qui permet de réduire l’expression de Hooke à une dimension :

axialaxial Eεσ = Equation 16

Cette équation peut s’écrire sous la forme suivante :

h

h

r ee

Erde

dN ∆=

θ Equation 17

avec : ∆eh – réduction de l’épaisseur initiale. La somme de ces incréments donne le déplacement horizontal δh, θ – position angulaire, r – rayon moyen.

θθππ

dee

EredN h

h

r )(2

0

2

0∆= ∫∫ Equation 18

160

Page 45: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

Dans le cas de la compression, ∆eh est indépendant de l’angle θ. Cette expression une fois intégrée donne l’effort axial en fonction du déplacement horizontal δh :

hh

r

ere

EN δπ2

= Equation 19

Nous pouvons désormais exprimer le module de Young de la couronne en fonction de la rigidité du joint, déterminée expérimentalement. Nous obtenons donc un module élastique non linéaire représenté par les cinq paramètres E01, E02, A, B et ec indiqués sur la Figure 39. Les valeurs numériques sont représentées dans le Tableau 4. Le paramètre ec est introduit tel que E1 = E01 ec et E2 = E02 ec. Il permet de déterminer, d’après les résultats expérimentaux, le comportement d’une couronne ayant une géométrie imposée par le maillage.

E01

E02

Module élastique

σ1

A B

σ2 Contrainte axiale

Figure 39. Modèle local non linéaire du joint

Tableau 4. Valeurs numériques des paramètres du modèle local

E01 E02 A B ec ν 31561 kPa 163562 kPa -183926 kPa 1539 0,1 0,0

Nous observons sur la Figure 40 que l’hypothèse d’une transition linéaire entre les deux valeurs de rigidités constantes donne un résultat très proche de la réalité. L’erreur maximale dans la zone de transition est de l’ordre de 10%.

161

Page 46: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

0

5

10

15

20

25

30

35

0 0.001 0.002 0.003 0.004 0.005 0.006 0.007

Déplacement horizontal (m)

Effo

rt a

xial

(kN

)

Essai de compression

Modèle local

Figure 40. Calage du modèle local sur l’essai de compression du joint

5.1.2 Modélisation numérique du dispositif d’essai Une modélisation numérique par le code FLAC3D du dispositif expérimental pour les essais sur le joint a été réalisée afin de simuler son comportement en flexion. Les deux éléments de conduite ont été représentés par les éléments de structure du type coque, les liaisons spécimen – appui par des éléments de volume et le cadre de chargement par des éléments de volume combinés avec des éléments poutre (Figure 41).

Figure 41. Maillage du modèle numérique du dispositif des essais

Les liaisons entre les éléments poutre et éléments volumiques sont définies de manière à représenter les rotules du cadre de chargement. En revanche, les liaisons entre les éléments coques et les éléments de volume sont totales. La couronne représentant le joint est attachée de part et d’autre aux éléments coques (Figure 42), qui prennent à cet endroit une forme particulière (en coupe longitudinale, il s’agit d’une forme en « L », Figure 42b).

162

Page 47: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

a) Vue 3D b) Schématisation en plan

Éléments coques

Couronne volumique

Figure 42. Modèle de joint local

La force axiale est appliquée directement sur les nœuds situés à l’extrémité des éléments de structure par le biais des forces nodales. Les conditions aux limites (conditions d’appuis) sont définies sur les nœuds centraux des éléments de volume se trouvant sur la face inférieure des deux liaisons conduite – appui. Afin de charger verticalement le dispositif, nous avons choisi d’appliquer des incréments de force (plutôt que de déplacements) sur les quatre nœuds des éléments poutre représentant le cadre de chargement. La force totale est progressivement augmentée par incréments de 4 x 0,01 kN, appliqués après stabilisation de la phase précédente. Afin de s’assurer que le système est en quilibre, un critère de stabilisation sévère a été adopté.

5.1.3 Validation du modèle local sur les essais de flexion La modélisation des essais de flexion a été réalisée pour les valeurs des efforts axiaux N de 5, 10 et 30 kN. Le temps de calcul étant assez long, nous n’avons pas considéré les cas où N = 17 et 25 kN, qui présentent ici un intérêt moindre. Les résultats obtenus sont indiqués sur la Figure 43. L’essai de flexion réalisé pour l’effort axial N = 5 kN est correctement représenté. Il en va de même pour la première partie de l’essai à N = 10 kN. Au delà de 0,2 degrés de rotation (environ 6 mm de déplacement vertical), le modèle de joint adopte globalement une rigidité nouvelle plus importante qu’au début de l’essai. Ceci s’explique facilement par l’analyse de l’état des contraintes dans le modèle. En effet, au fur et à mesure que le moment de flexion augmente, les deux éléments de conduites sont de plus en plus inclinés l’un par rapport à l’autre. Ainsi, à partir de 6 mm de déplacement vertical, le contact entre les buses est perdu dans la partie inférieure du joint. Dans le modèle rhéologique, l’augmentation de la rigidité dans la partie supérieure du joint est « compensée » par cette perte de contact. En revanche, dans le modèle numérique, compte tenu de la géométrie de la couronne (largeur bien supérieure à la réalité), la partie inférieure du joint n’est jamais mise en traction. Par conséquent, le passage des éléments supérieurs dans le domaine à rigidité plus élevée se traduit par un accroissement de la rigidité globale du modèle, observée sur la Figure 19 b.

163

Page 48: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

0

1

2

3

4

5

0 0.2 0.4 0.6 0.8 1

Rotation du joint (degrés)

Mom

ent d

e fle

xion

(kN

m)

Modèlenumérique

-1

0

1

2

3

4

0 0.2 0.4 0.6 0.8 1

Rotation du joint (degrés)

Mom

ent d

e fle

xion

(kN

m)

Modèlenumérique

a) Effort axial N = 5 kN b) Effort axial N = 10 kN

-6

-4

-2

0

2

4

6

8

10

0 0.2 0.4 0.6 0.8 1

Rotation du joint (degrés)

Mom

ent d

e fle

xion

(kN

m)

Modèlenumérique

c) Effort axial N = 30 kN

Figure 43. Résultats de la modélisation des essais de flexion par le modèle local du joint

En ce qui concerne l’essai à N = 30 kN, tous les éléments de la couronne évoluent dès le début de la simulation dans le deuxième domaine de rigidité. Pour cette raison, la pente de la courbe moment-rotation reste constante. Le résultat de la modélisation est assez médiocre car la rigidité en déchargement qui caractérise l’essai physique n’est pas implémenté dans le modèle numérique.

5.1.4 Les limites du modèle local Bien que phénoménologiquement, le modèle local permette de représenter le comportement du joint de manière assez réaliste, il présente néanmoins des limites qui en réduisent l’utilisation sous sa forme actuelle. Tout d’abord, en ce qui concerne le comportement en compression, les chemins de chargement et de déchargement sont identiques. Or, les essais de compression montrent que lorsqu’une zone de joint se trouve dans le domaine à rigidité élevée, le déchargement de celle-ci est beaucoup plus rapide que son chargement. La rigidité sur le chemin de déchargement est donc plus élevée que celle observée en chargement. Par conséquent, la simulation des essais de flexion lorsque l’effort axial est élevé s’avère moins satisfaisante que lorsque ce dernier est faible. Le fait de suivre le même chemin en chargement et en déchargement n’a pas de conséquence sur le comportement du joint lorsque l’effort axial est faible, car dans ce domaine, les chemins de chargement et de déchargement coïncident.

164

Page 49: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

Par ailleurs, le comportement en cisaillement du joint, indépendant de la flexion et de la compression, n’est pas pris en charge. En effet, la rigidité du joint en cisaillement étant très élevée, les caractéristiques mécaniques de la couronne devraient être beaucoup plus importantes pour pouvoir simuler le cisaillement. Il n’est donc pas possible, sans éléments supplémentaires, de prendre à la fois en compte les trois comportements simples du joint. En outre, la vocation de ce modèle de joint est son introduction dans un cas de figure de conduite enterrée. La gestion correcte de l’interface (sans interactions parasites) entre les éléments de volume représentant le sol et les éléments représentant le joint peut s’avérer relativement complexe. Enfin, le temps de calcul d’un problème de conduite enterrée comportant l’évolution non linéaire (en fonction des contraintes) du module élastique des joints est supérieur à celui d’un modèle élastique linéaire. La transformation du modèle local actuel en une version qui distingue les chemins de chargement et de déchargement augmenterait davantage la charge processeur nécessaire. Dans le cadre d’une étude paramétrique comportant un grand nombre de simulations, le gain de temps processeur peut être considérable.

5.2 - Modèle numérique global Afin de dépasser les limites du modèle local, nous avons procédé à une modélisation du joint de manière globale, en faisant évoluer tous les éléments de la couronne volumique avec les mêmes caractéristiques d’élasticité linéaire. Cette modélisation débouche sur une hypothèse contraire aux résultats des essais, à savoir la linéarité du comportement du joint sur tout le domaine et sous tout type de sollicitations. En particulier, le comportement en flexion d’un tel modèle global ne dépend plus de l’effort normal. Si la rigidité en flexion évolue globalement de manière linéaire avec l’effort axial, ce que suggère la Figure 14 du Chapitre 3, nous observons que, pour des valeurs faibles de l’effort axial, comprises au moins entre 0 et 10 kN, la rigidité en flexion du joint semble constante. Comme ce domaine est également caractérisé par une rigidité constante en compression, le modèle global du joint pourrait être valide, à condition que le domaine de service du joint soit également caractérisé par ces valeurs de l’effort axial. La vérification de cette hypothèse sera effectuée dans la section 5.3 de ce chapitre. La méthode générale de l’élaboration du modèle global du joint consiste en l’analyse inverse : les conditions de l’expérimentation sont reproduites par un modèle numérique, puis l’on recherche les valeurs des paramètres élastiques du modèle de joint de façon à ce que le comportement global du modèle numérique corresponde à celui du montage expérimental. La modélisation du dispositif expérimental, à l’exception du joint, est décrite dans la section 5.1.2. Dans l’ensemble, on distingue trois approches différentes :

- la modélisation du joint par les éléments de volume, - la modélisation par une approche du type Winkler, - la modélisation par une composition des deux approches précédentes.

165

Page 50: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

5.2.1 Modèle global tridimensionnel

5.2.1.1 Construction du modèle L’idée de la couronne volumique pour simuler le joint est maintenue, mais la disposition des éléments de structure est très différente par rapport au modèle local. La géométrie du modèle est représentée sur la Figure 44. Les éléments de structure sont créés de manière à représenter la forme réelle du joint. Ils suivent les contours de la fibre moyenne des buses.

a) Vue 3D b) Schématisati

4,5 cm

7,5 cm

Figure 44. Modèle de joint global

La couronne, composée d’éléments volumiques, est attachée aux nœuds dpar le biais de liaisons totales. Une telle représentation permet de numérique FLAC3D car en libérant un nœud sur deux ceux-ci peuveéléments de sol. Ainsi, les éléments de structure représentant la colleretteles efforts en provenance du massif qu’en provenance du joint.

5.2.1.2 Choix de la loi de comportement Le choix de la loi de comportement est fondamental puisque c’est ecomportement du modèle. Elle doit être caractérisée par un nombre suindépendants permettant d’effectuer le calage. Nous avons considéré sélastique isotrope à deux paramètres et la loi élastique isotrope transverse L’objectif de la couronne volumique est de simuler le comportement compression, flexion et cisaillement. La disposition des éléments de d’autre de la couronne a pour conséquence le mode de fonctionnement su

- le comportement en compression du joint est simulé par le cisaillvolumique ;

- le comportement en cisaillement du joint entraîne la compressioclé, sa traction au radier, son cisaillement aux reins et une solliciailleurs ;

- le comportement en flexion se traduit par un mode de sollicitacouronne dépendant de la position angulaire.

166

Couronnevolumique

Éléments coque

on en plan

es coques adjacentes simplifier le modèle nt être attachés aux reçoivent aussi bien

lle qui va piloter le ffisant de paramètres uccessivement la loi à cinq paramètres.

sous sollicitations de structure de part et ivant :

ement de la couronne

n de la couronne à la tation plus complexe

tion complexe de la

Page 51: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

La loi de comportement élastique isotrope à deux paramètres E et ν a été rapidement écartée, faute d’un nombre suffisant de variables indépendantes. Si le module de cisaillement G est calé pour représenter la compression du joint, il intervient également dans la flexion, où sa valeur est trop importante, ainsi que dans le cisaillement, où elle est cette fois insuffisante. La loi isotrope ne permet donc de modéliser que l’un de ces trois comportements. La loi élastique isotrope transverse offre l’avantage de présenter cinq paramètres indépendants, à savoir E, E’, ν, ν’ et G’ (section 3.2.4.1). Compte tenu de la forme circulaire de la couronne, le plan d’isotropie pour chaque élément de volume est le plan normal à la direction radiale de la couronne. Ainsi, la compression du joint est pilotée par le paramètre G’, tandis que la flexion et le cisaillement devraient être pris en charge par les autres paramètres. Cependant, nous avons remarqué que le comportement en flexion est très sensible à la plupart des paramètres, y compris G’, en raison de la complexité des sollicitations dans la couronne lors d’un essai de flexion. Ainsi, un calage très précis de la compression impose une valeur du module de cisaillement G’ trop élevée pour la flexion (Figure 45a). En revanche, le comportement en cisaillement du joint étant beaucoup plus rigide que les deux autres, il est assez mal représenté (Figure 45b). Bien que les cinq paramètres de la loi isotrope transverse soient indépendants, un écart trop important entre eux engendre des instabilités numériques. Par conséquent, la couronne volumique ne pourra pas représenter correctement à la fois le cisaillement et les deux autres comportements.

Tableau 5. Valeurs numériques des paramètres du modèle global

Paramètres E E’ G’ ν ν’ Figure 45 100 kPa 300 kPa 2500 kPa 0,3 0,3 Figure 47 100 kPa 250 kPa 1700 kPa 0,3 0,3

0

2

4

6

8

10

12

0 0.5 1 1.5 2 2.5

Rotation du joint (degrés)

Mom

ent d

e fle

xion

(kN

m)

N = 10 kN

N = 5 kN

Modèlenumérique

0

10

20

30

40

50

60

70

0 1 2 3 4

Déplacement vertical (mm)

Effo

rt v

ertic

al (k

N) Essai de cisaillement

Modèle numérique

a) Flexion b) Cisaillement

Figure 45. Calage de la flexion et du cisaillement pour le calage exact de la compression Nous avons pu constater que la variation des paramètres de la loi isotrope transverse affecte moins la compression que la flexion. Par exemple, lorsque le paramètre le plus influent G’ varie de 10 % par rapport à la valeur exacte, la réponse du modèle quant à elle n’est altérée que de 5 % (Figure 46). Par conséquent, il est possible de trouver un jeu de paramètres qui

167

Page 52: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

permettent une représentation correcte de la flexion sans grande détérioration du calage de la compression. Le résultat du calage optimal pour ces comportements est indiqué sur la Figure 47. Compte tenu des hypothèses prises auparavant et des objectifs de l’utilisation du modèle, ces résultats peuvent être qualifiés de satisfaisants. Ainsi, la loi isotrope transverse permet la représentation satisfaisante de deux comportements élémentaires sur trois.

0

5

10

15

20

25

30

35

40

0 10 20 30 40 50 6

Module de cisaillement G' (%)

Dép

lace

men

t hor

izon

tal

(%)

0

Figure 46. Sensibilité de la compression au module de cisaillement G’

0

2

4

6

8

10

0 0.5 1 1.5 2 2.5

Rotation du joint (degrés)

Mom

ent d

e fle

xion

(kN

m)

N = 10 kN

N = 5 kN

Modèlenumérique

0

5

10

15

20

25

30

35

0 1 2 3 4 5 6

Déplacement horizontal (mm)

Effo

rt n

orm

al (k

N)

Essais de compression

Modèle numérique

7

a) Flexion b) Compression

Figure 47. Calage simultané de la flexion et de la compression

5.2.2 Modèle global de Winkler La difficulté consistant à représenter simultanément l’ensemble des essais de laboratoire par le même jeu de paramètres oblige à rechercher d’autres types de modèles. Aussi l’idée de Winkler a-t-elle été développée pour représenter un milieu élastique continu par des éléments élastique distincts. La couronne volumique du modèle précédent a été remplacée par les éléments finis à deux nœuds du type poutre. Reliant les coques des buses adjacentes, ces éléments sont placés à des intervalles réguliers dans les directions radiale et axiale (Figure 48). Les éléments poutre sont élastiques et ne fonctionnent qu’en traction/compression grâce à une gestion judicieuse des degrés de liberté de leurs nœuds. Un calcul de flexion et de compression avec des éléments radiaux seuls permet de vérifier que ces derniers exercent une influence négligeable sur ces comportements. En outre, le calcul similaire avec des éléments axiaux seuls montre que leur influence sur le cisaillement est

168

Page 53: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

également négligeable. Le calage du cisaillement et de la compression est donc aisé et réussi. Pour la flexion, le résultat de calage est donné sur la Figure 49. Ce résultat est obtenu avec les valeurs des paramètres indiquées dans le Tableau 6. Le modèle est plus rigide que la valeur moyenne des essais en flexion (notamment dans la deuxième phase d’essai) car les éléments poutre axiaux se trouvant sur la partie inférieure du modèle n’ont pas la possibilité de rompre le contact lorsqu’ils passent de la compression à la traction.

a) Vue 3D b) Schématisation en plan

Éléments poutre

Éléments coque

Figure 48. Modèle de joint par des éléments structures

Le modèle de joint par les éléments de structure laisse la possibilité de simuler deux des trois comportements élémentaires, comme c’était le cas du modèle tridimensionnel. En revanche, les types de sollicitations correctement prises en charge ne sont pas les mêmes (cisaillement et compression au lieu de flexion et compression). Néanmoins, ce modèle demeure également valable en flexion si la rotation du joint reste faible.

-1

1

3

5

7

9

11

0 0.5 1 1.5 2 2

Rotation du joint (degrés)

Mom

ent d

e fle

xion

(kN

m)

Modèlenumérique

.5

Figure 49. Validation de la flexion par le modèle de Winkler (essai N = 10 kN)

Tableau 6. Valeurs numériques des paramètres du modèle de Winkler

Paramètres E ν Section Inertie de flexion Inertie de torsion Eléments axiaux 4,5 MPa 0,3 4.10-4 m² 1,33.10-8 m4 2,67.10-8 m4

Eléments radiaux 110 MPa 0,3 4.10-4 m² 1,33.10-8 m4 2,67.10-8 m4

169

Page 54: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

5.2.3 Modèle global mixte Le comportement en cisaillement est caractérisé par une rigidité 20 fois supérieure à celle de la flexion ou de la compression. L’idée du modèle mixte est de le simuler par des éléments indépendants. Ainsi, la flexion et la compression sont prises en charge par la couronne volumique à laquelle sont ajoutés les éléments poutre radiaux (Figure 50). Une gestion appropriée des liens entre les différentes composantes du modèle rend la présence des éléments poutre invisible par les éléments de volume. En revanche, la présence des éléments de volume rigidifie l’ensemble du modèle, ce qui nécessite un recalage du module élastique des éléments poutre afin de représenter le cisaillement. Ainsi, la valeur obtenue sans la couronne volumique de 110 MPa est revue légèrement à la baisse (90 MPa).

a) Vue 3D b) Schématisati

4,5 cm

7,5 cm

Élément poutre

Éléments coque

Figure 50. Modèle global mixte

Au final, le modèle mixte permet d’atteindre les objectifs initialement fixtous les comportements sont correctement représentés de manière simuinconvénient est la complexité de sa mise en œuvre dans le code de calcdonné qu’un nœud ne peut être lié à son environnement qu’une seupratique de connections des éléments représentant la collerette avec les éle sol demeure non résolu. Notre méthode consiste à mailler cette zoneafin qu’un nœud sur deux soit respectivement lié aux éléments de joint etLes efforts internes dans les éléments coque définis à partir de ces nœudsdifféremment par rapport aux autres nœuds. En conséquence, les valeurau voisinage des joints ne correspondront pas à une réalité physique purement numérique. Rappelons aussi que la modélisation globale du joint n’est valable que paxiaux. La section suivante présente les résultats de quelques calculs pavec le modèle numérique intégrant cette représentation du joint comnotamment de vérifier que l’ordre de grandeur de l’effort axial reste, daconsidérées, dans le domaine d’utilisation du modèle global de joint (eentre 0 et 17 kN).

170

Couronnevolumique

on en plan

és dans la mesure où ltanée. Son principal ul. Par ailleurs, étant le fois, le problème léments représentant de manière très fine aux éléments de sol. seront donc calculés s des efforts internes mais sont de nature

our de faibles efforts réliminaires réalisés plète. Ils permettent ns les configurations n première approche

Page 55: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

6 - PREMIERS CALCULS A L’AIDE DU MODELE COMPLET. VALIDATION DU MODELE GLOBAL DU JOINT

Dans ce chapitre, nous avons progressivement construit un modèle numérique tridimensionnel de l’ensemble sol – conduite à l’aide du code de calcul FLAC3D. A défaut d’un référentiel de comparaison disponible, la validation de ce modèle a été effectuée en deux temps. Tout d’abord, une version simplifiée du modèle, à savoir sans joints et sans interface, nous a permis de nous placer dans la configuration déjà traitée dans la littérature. Nous avons pu alors établir la correspondance entre les grandeurs classiques et celles du modèle 3D, puis valider la conformité des résultats. Dans un deuxième temps, une implémentation numérique dans le code de calcul a été effectuée d’un modèle de joint établi et validé à partir des essais en laboratoire. La simulation correcte de ces essais a été obtenue dans le domaine des faibles efforts axiaux allant jusqu’à 17 kN. Quant à la dernière composante du modèle, l’interface sol – conduite, en l’absence de résultats expérimentaux appropriés, la validation ne pourra pas être effectuée de la même manière. Nous supposons donc que l’interface du type Coulomb (avec possibilité de glissement et décollement) implémentée dans le modèle est suffisamment représentative. L’objectif de la présente section est donc d’allier toutes les composantes du modèle dans un cas d’étude afin de tester sa capacité à représenter le comportement des conduites dans un remblai hétérogène. Ce cas d’étude permettra également d’illustrer le comportement du joint et de vérifier la validité des hypothèses de modélisation.

6.1 - Cas d’étude : description de la configuration étudiée Un tronçon en béton composé de 3 buses (longueur l = 3,8 m, diamètre D = 500 mm, épaisseur e = 5,3 cm) a été modélisé dans quatre configurations différentes ; celles-ci sont décrites dans le Tableau 7 et représentées sur les schémas intitulés Figure 51 et Figure 52. Deux types d’hétérogénéités (répartie et localisée) ont été combinés avec deux positions de chargement en surface. L’hétérogénéité répartie (cas 2, Ehétérogénéité = 5 MPa) représente une zone moins compactée jusqu’à la hauteur des reins sur une longueur de 3,4 m, alors que les hétérogénéités localisées sur une longueur de 0,2 m représentent des zones faibles autour des joint (cas 3 et 4, Ehétérogénéité = 1 MPa). La hauteur de couverture est de 1 m, tandis que dans les autres directions, les limites spatiales sont définies de manière à éviter tout influence de ces dernières sur les résultats. Le modèle élastique est pris aussi bien pour la conduite (E = 40 GPa, ν = 0,2) que pour le sol (E = 50 MPa, ν = 0,33, γ = 20 kN/m3, K0 = 0,5). Après l’obtention d’un état d’équilibre de la tranchée, celle-ci est chargée en surface par une pression répartie sur une surface rectangulaire de 0,24 m². L’intensité de cette charge est déterminée de façon à amener la conduite à la fissuration dans le cas de référence (c’est-à-dire le cas prévu par le fascicule 70). Etant donné le comportement élastique des conduites, un

171

Page 56: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

critère de rupture est défini dans l’espace principal des contraintes de la conduite. Cette dernière est donc considérée au début de la fissuration lorsque l’une des contraintes principales atteint 3 MPa en traction. Une procédure d’application des incréments de pression permet de déterminer une valeur de charge totale égale à 191 kN. Ce niveau de chargement est ensuite appliqué en surface dans les 3 autres cas.

Figure 51. Caractéristiques géométriques Figure 52. Maillage : représentation d’un quart de modèle (cas 2)

6 m

Tableau 7. Synthèse des configurations modélisées

N°1 Cas de référence N°2 Hétérogénéité répartie

N°3 Hétérogénéité localisée N°4 Variante avec charge alignée

Notons que la position longitudinale de la conduite est repérée sur un axe dont l’origine est située au milieu de la buse centrale. Ainsi, les joints délimitant la buse centrale sont placés à +/- 1,9 m par rapport à l’origine de l’axe.

1,3 m

Conduite D=500 mm

1 m

Hétérogénéité crée par un enrobage « mou » sur une longueur de 3,4 m

3 m

Remblai

Sol en place

172

Page 57: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

6.2 - Influence des hétérogénéités Pour tous les cas de figure, à l’exception du cas 4, la section la plus sollicitée est celle située au droit de la charge. Les contraintes principales de traction les plus importantes (celles de la paroi intérieure de cette section) sont recherchées. La contrainte radiale étant nulle par hypothèse de calcul des éléments coques, elle n’est pas représentée. La contrainte orthoradiale σθ, variable dans l’épaisseur, est liée au moment transversal My ; elle gouverne le comportement en anneau de la conduite. La contrainte axiale σx est à l’origine du moment longitudinal Mx supposé nul dans le fascicule 70. Ce moment est créé par la variation de la contrainte dans l’épaisseur. Les contraintes principales pour chaque configuration sont représentées sur la Figure 53.

-4000

-3000

-2000

-1000

0

1000

2000

3000

4000

0 30 60 90 120 150 180

Position (degrés)

Con

trai

nte

(kPa

) σθ σx

-4000

-3000

-2000

-1000

0

1000

2000

3000

4000

0 30 60 90 120 150 180

Position (degrés)

Con

trai

nte

(kPa

)σx

σθ

a) Référence : cas 1 b) Hétérogénéité répartie : cas 2

-4000

-3000

-2000

-1000

0

1000

2000

3000

4000

0 30 60 90 120 150 180

Position (degrés)

Con

trai

nte

(kPa

)

σθ

σx

-4000

-3000

-2000

-1000

0

1000

2000

3000

4000

0 30 60 90 120 150 180

Position (degrés)

Con

trai

nte

(kPa

)

σθ

σx

c) Hétérogénéité locale : cas 3 d) Hétérogénéité locale : cas 4

Radier Radier

Radier Radier

Clé Clé

Clé Clé

Limite traction Limite traction

Limite traction Limite traction

Figure 53. Contraintes principales dans la conduite (parois intérieure)

Dans le cas de référence, le critère de rupture est atteint par la contrainte orthoradiale à la clé de la conduite. Il s’agit donc d’une rupture par écrasement de la section transversale. Ce comportement en anneau se traduit en réalité par la fissuration longitudinale de la conduite à la clé. Dans le cas 2 d’une hétérogénéité répartie, la contrainte axiale au radier devient la plus importante, tandis que la contrainte orthoradiale à la clé diminue. Nous observons donc un début de changement de mécanisme de rupture. Cette fois, la tendance au développement de la fissuration se produit au radier dans le plan diamétral de la conduite. Elle se traduit par l’apparition d’une fissure circulaire.

173

Page 58: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

Ce résultat peut être rapproché de l’analyse des données urbaines réalisée dans le premier chapitre. Nous sommes en présence d’un cas de figure intermédiaire qui, d’après la valeur des différents facteurs (diamètre, couverture, trafic), est susceptible de générer des fissures aussi bien circulaires que longitudinales. Comme nous ne disposons pas d’informations sur l’état du sol, l’approche logistique ne peut donc pas prévoir lequel des deux scénarios sera dominant. En introduisant une hétérogénéité dans le modèle numérique, nous sommes capables de décrire un mode de changement du mécanisme de rupture et ainsi expliquer en partie les résultats observés sur le terrain. Les résultats du cas 3 montrent que si l’hétérogénéité localisée est située loin du point d’application de la charge, l’effet qu’elle peut produire sur le comportement de la conduite est négligeable. Le déplacement vertical de la conduite est également identique à celui du cas de référence (Figure 54a). Grâce à sa rigidité élevée par rapport au sol environnant, la conduite joue alors le rôle d’une sorte de filtre pour ce type d’hétérogénéités.

-1.2

-1

-0.8

-0.6

-0.4

-0.2

0

0.2

-15 -10 -5 0 5 10 15

Position longitudinale (m)

Dép

lace

men

t ver

tical

(m

m)

Cas 1Cas 2Cas 3

-1.2

-1

-0.8

-0.6

-0.4

-0.2

0

0.2

-15 -10 -5 0 5 10 15

Position longitudinale (m)

Dép

lace

men

t ver

tical

(m

m)

a) Charge placée au milieu de la buse b) Charge placée au-dessus du joint (cas 4)

Figure 54. Déformée de la conduite (clé)

En revanche, si cette hétérogénéité est alignée avec la charge (cas 4), le niveau de contrainte dans la conduite diminue de manière importante. Une réorganisation totale des contraintes peut alors être observée. Elle s’accompagne d’une augmentation du déplacement vertical maximal de la conduite de plus de 40 % par rapport au cas 3. Cette fois, nous sommes en présence d’un scénario de déboîtement des conduites sans fissuration.

6.3 - Influence des joints

6.3.1 Validation du modèle global du joint Le calage du modèle global du joint est correct pour la sollicitation par cisaillement. En ce qui concerne la flexion et la compression, ce modèle est valide moyennant trois hypothèses :

- l’effort axial de compression qui s’applique sur le joint doit rester inférieur à 17 kN environ pour que la rigidité du joint en compression reste constante ;

- la rigidité du joint en flexion est constante et indépendante de la compression, ce qui est valide lorsque l’effort axial ne dépasse pas 10 kN ;

- il n’y a pas de contact béton – béton entre le collet et le fût du joint ; c’est le cas si le déplacement angulaire entre les buses reste inférieur à un degré.

174

Page 59: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

Les courbes des déplacements verticaux montrent que la valeur maximale du déplacement ne dépasse pas 1,1 mm, ce qui correspond à une rotation de moins de 0,02°. Le joint reste donc bien dans son domaine de fonctionnement, très loin de l’angle de contact. En ce qui concerne l’effort axial, il est variable aussi bien dans la section que le long de la conduite. La Figure 55 montre la distribution de cet effort dans la section centrale la plus sollicitée. Elle indique notamment que la moitié inférieure de la section est mise en traction, tandis que la partie supérieure est comprimée. Nous retrouvons donc un comportement similaire à celui d’une poutre horizontale chargée verticalement. La force résultante est alors obtenue en intégrant cette distribution sur le périmètre de la conduite :

∫=π

θθ2

0)( dRNN moyenx Equation 20

Dans le cas 2, nous obtenons ainsi N = 13,6 kN, qui représente la valeur maximale.

-150

-100

-50

0

50

100

150

200

0 30 60 90 120 150 180

Position (degré)

Forc

e ax

iale

(kN

/m)

Radier Clé

Figure 55. Distribution de l’effort axial dans la section centrale (cas 2) Au fur et à mesure que nous nous éloignons de la section située au droit d’application de la charge, l’amplitude de l’effort global N diminue pour atteindre zéro au voisinage des joints. Ceci n’est pas la conséquence d’une certaine symétrie de distribution mais d’une diminution de l’amplitude de l’effort local. La forme de la distribution de l’effort dans la section est similaire à celle de la Figure 55 sur toute la longueur de la buse centrale. En revanche, cette distribution est inversée sur les buses adjacentes (partie inférieure comprimée et parie supérieure tendue), tandis que l’amplitude de la distribution augmente de nouveau. Cette évolution de l’effort axial le long du tronçon est indiquée sur la Figure 57 et sera évoquée dans le paragraphe suivant. L’important est de constater que globalement, au voisinage des joints, le domaine de validité du modèle global du joint en termes d’effort axial est bien confirmé dans tous les cas envisagés. Ce résultat préliminaire encourage l’utilisation du modèle global dans d’autres cas de figure, sachant que la vérification de sa validité devra être à chaque fois effectuée.

175

Page 60: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

6.3.2 Rôle des joints dans un tronçon de conduite L’origine de la redistribution des efforts internes dans le cas 4 est bien illustrée par l’évolution des moments le long du tronçon (Figure 56). En effet, pour simplifier l’interprétation des résultats à l’échelle du tronçon, nous pouvons assimiler les conduites à des poutres. Il devient alors possible d’appréhender un moment de flexion globale qui traduit le comportement longitudinal. Exprimé par rapport à l’axe de la conduite, le moment de flexion globale le long de la conduite est donné par :

θθπ

dRNMM moyenxxaxial ∫ +=2

0)cos( Equation 21

avec : Mx : moment local donné par l’Equation 3, Nx : effort axial donnée par l’Equation 4, Rmoyen : rayon moyen de la conduite égale à 0,2765 m, θ : angle défini par la Figure 25. Le moment longitudinal étant proche de zéro au niveau des joints, le tronçon se comporte qualitativement comme une série de poutres articulées. Il s’agit d’un résultat attendu compte tenu des ordres de grandeur de la rigidité du joint en flexion et de la conduite.

0

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8

0.9

-15 -10 -5 0 5 10 15

Position longitudinale (m)

Mom

ent l

ongi

tudi

nal m

axim

al

(kN

m)

Figure 56. Distribution du moment longitudinal par rapport à l’axe de la conduite

Dans l’Equation 21, le moment local Mx est négligeable devant la composante créée par l’effort axial. La distribution du moment global présentée sur la Figure 56 est donc liée à celle de l’effort axial. Pour capturer cet aspect du comportement global dans la direction longitudinale, il nous suffit donc de représenter directement la distribution de l’effort axial Nx le long de la conduite. La Figure 57 montre ce résultat pour les quatre cas de figures envisagés. Le résultat du cas 3 est encore une fois très proche du cas de référence, tandis qu’une augmentation de la valeur maximale est observée dans le cas de l’hétérogénéité répartie (Figure 57b). Nous retrouvons donc un résultat cohérent : en présence d’une zone faible sur la longueur d’une buse, l’aspect longitudinal du comportement mécanique de la conduite s’est accentué.

176

Page 61: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

Le cas 4 illustre la réorganisation de la distribution de l’effort axial, déjà constatée sur la courbe des moments. La dissymétrie observée de part et d’autre du point d’application de la charge dans ce cas s’explique par l’absence de joints sur l’un des côtés. Ainsi, la présence des joints permet une réduction de l’effort axial dans la conduite. Cependant, cette réduction logique et attendue, qui véhicule souvent l’idée que la flexibilité des joints permet de négliger les effets des hétérogénéités, s’avère relativement peu importante. L’effet de la rigidité des joints sur le niveau des efforts internes fait l’objet du paragraphe suivant.

-150

-100

-50

0

50

-15 -10 -5 0 5 10 15

Position longitudinale (m)

Forc

e ax

iale

(kN

/m)

-150

-100

-50

0

50

-15 -10 -5 0 5 10 15

Position longitudinale (m)Fo

rce

axia

le (k

N/m

)

a) Référence : cas 1 b) Hétérogénéité répartie : cas 2

-150

-100

-50

0

50

-15 -10 -5 0 5 10 15

Position longitudinale (m)

Forc

e ax

iale

(kN

/m)

-150

-100

-50

0

50

-15 -10 -5 0 5 10 15

Position longitudinale (m)

Forc

e ax

iale

(kN

/m)

c) Hétérogénéité locale : cas 3 d) Hétérogénéité locale : cas 4

Figure 57. Distribution de l’effort axial le long du tronçon (clé)

6.3.3 Influence de la rigidité du joint Pour déterminer l’apport des joints en termes de réduction des efforts internes, les quatre calculs précédents ont été effectués avec des joints rigides, c’est-à-dire des joints dont la rigidité est égale à celle de la conduite. Il s’agit donc de tester l’hypothèse du fascicule 70 sur ces quatre cas de figures. Les résultats sont toujours donnés en fonction des contraintes principales de la Figure 58. Le cas 3 est quasiment identique au cas de référence, qui lui-même est très proche du cas de référence du calcul avec les joints réels. Il apparaît donc que les joints peuvent être négligés dans le cas de référence, même lorsque l’on considère la contrainte axiale. Considérant le cas 2, nous vérifions que la présence de l’hétérogénéité répartie accentue le comportement longitudinal, ce qui se traduit par une augmentation de la contrainte axiale. Il

177

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Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

est intéressant de noter que dans ce cas de figure, la présence de joint ne diminue l’effort axial que d’environ 10 %. Dans le cas 4, les efforts les plus importants sont observés. L’alignement de la charge avec une zone faible localisée a pour conséquence une plus grande sollicitation de la conduite dans son plan diamétral. La contrainte axiale est également amplifiée mais le comportement transversal reste prépondérant. Par ailleurs, en comparant ce résultat avec celui obtenu par le modèle comportant les joints, le cas de figure 4 est le cas où l’erreur commise par le fait de négliger les joints est la plus importante.

-4000-3000-2000-1000

01000200030004000

0 30 60 90 120 150 180

Position (degrés)

Con

trai

nte

(kPa

) σθ σx

Joints souples

-4000-3000-2000-1000

01000200030004000

0 30 60 90 120 150 180

Position (degrés)

Con

trai

nte

(kPa

)

σxσθ

Joints souples

a) Référence : cas 1 b) Hétérogénéité répartie : cas 2

-4000-3000-2000-1000

01000200030004000

0 30 60 90 120 150 180

Position (degrés)

Con

trai

nte

(kPa

) σθ σx

-4000-3000-2000-1000

01000200030004000

0 30 60 90 120 150 180

Position (degrés)

Con

trai

nte

(kPa

)

σθσx

Joints souples

c) Hétérogénéité locale : cas 3 d) Hétérogénéité locale : cas 4

Radier Clé

Figure 58. Contraintes principales dans la conduite avec joints rigides (paroi intérieure)

178

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Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

7 - CONCLUSION Ce chapitre décrit les différentes étapes de la construction d’un modèle numérique tridimensionnel de l’ensemble sol – conduite. L’étude bibliographique montre qu’en général, le sol et la conduite sont modélisés de manière sophistiquée exclusivement dans les approches bidimensionnelles, ce qui ne permet pas la prise en compte de la variabilité longitudinale du sol. L’aspect longitudinal des conduites n’est considéré que par le biais de modèles comportant des hypothèses très fortes, aussi bien sur le sol que sur la conduite. Néanmoins, ces modèles permettent d’identifier des paramètres importants du comportement de la conduite, tels que la variation de la rigidité du sol. Le modèle que nous avons construit est basé sur des composantes restent relativement simples: les lois de comportement du sol et de la conduite sont élastiques, l’interface entre ces deux derniers est une interface du type Coulomb et les joints sont modélisés de manière globale. En revanche, notre approche présente l’avantage de cumuler tous ces éléments en un seul modèle tridimensionnel. C’est pourquoi sa validation a été effectuée en deux temps, faute de référence disponible. Il reste à réaliser une expérimentation de chargement d’une tranchée in situ, afin de valider le modèle numérique par des résultats expérimentaux. Ceci permettrait d’évaluer la validité des nombreuses hypothèses inhérentes à la démarche de modélisation numérique. En outre, le modèle numérique intègre une représentation des joints reposant sur des essais en laboratoire sur spécimens réels. En effet, à partir des résultats expérimentaux, nous avons développé plusieurs modèles de joints présentant des degrés de complexité croissante et répondant à des objectifs complémentaires. La variante la plus simple permet de simuler la réponse à un type de sollicitation uniquement, tandis que la variante la plus complexe est a priori capable de prendre en charge tout type de sollicitation. Le calage du modèle global du joint est valide dans la gamme des faibles efforts axiaux. D’après les premières simulations et analyses a posteriori, cette hypothèse est tout à fait vérifiée. Une étude de cas réalisée à l’aide du modèle complet démontre l’intérêt de l’utilisation d’un tel modèle. Ce dernier permet notamment de capturer qualitativement la modification du comportement de référence d’une conduite lorsqu’elle repose dans un environnement hétérogène. Désormais, la principale difficulté consiste à traduire de manière correcte, en termes de paramètres mécaniques, l’état réel de la tranchée et du sol environnant. Les simples variations du module de sol pour modéliser un compactage moindre méritent un examen plus approfondi. L’introduction d’une loi plus complexe pour représenter le sol peut, en fonction de la nature des simulations, s’avérer nécessaire ; ceci fera l’objet du chapitre suivant.

179

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Chapitre 4 : Construction d’un modèle numérique tridimensionnel

180

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Chapitre 5

Effets des conditions de pose sur le comportement de la canalisation

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

1 - INTRODUCTION Nous avons vu dans le chapitre précédent que le modèle numérique tridimensionnel intégrant les joints est un outil puissant dans la démarche de compréhension des phénomènes d’interaction sol-conduite enterrée. L’étude de cas présentée à la fin du chapitre 4 souligne l’influence capitale de la variabilité du sol aussi bien géométrique que rhéologique sur le comportement d’un tronçon. L’objectif de ce dernier chapitre est d’examiner les effets des différents paramètres caractérisant les hétérogénéités du sol à travers une étude paramétrique menée sur un nombre limité de configurations identifiées comme étant à haut risque pour les tronçons. En ce qui concerne les paramètres (géométriques) de la conduite, nous avons pu dégager, dans le chapitre 1 par le modèle statistique, certaines tendances de comportement. Nous avons constaté alors que les conduites à faible diamètre et/ou élancement important avaient tendance à adopter un comportement poutre. A l’inverse, les conduites de très grand diamètre et/ou élancement très faible semblent adopter un comportement en anneau dans leur plan diamétral. Bien entendu, il est difficile d’affirmer que la seule géométrie des conduites détermine leur comportement quand bien même on se trouverait dans les domaines extrêmes. Les conditions du sol de la tranchée ou les conditions de chargement doivent certainement jouer un rôle. Néanmoins, le linéaire concerné par ces conduites représente une partie mineure par rapport au linéaire des gammes intermédiaires. De plus, l’incertitude sur le comportement mécanique des conduites la plus importante se situe justement dans cette gamme des conduites moyennes susceptibles de basculer dans tel ou tel mécanisme de dégradation sous l’influence des conditions externes. Pour ces raisons, les diamètres intermédiaires des conduites constituent une priorité dans le cadre de ce travail. Dans tout ce chapitre, nous considérerons donc des conduites classiques de diamètre égal à 500 millimètres. Les paramètres géométriques de la tranchée ont déjà été abordés notamment par Benmansour (1996). Ainsi dans le chapitre 4 nous avons résumé les principaux résultats traduisant l’influence de différents paramètres géométriques ou rhéologiques de la tranchée dans une approche bidimensionnelle du problème sans chargement en surface. Dans ce chapitre, nous allons plus loin en examinant les effets des hétérogénéités tridimensionnelles les plus souvent rencontrées dans le cadre d’un chargement en surface. Concrètement, ces hétérogénéités se déclinent sur le terrain avec des zones dites faibles ayant des taux de compactages réduits et donc des caractéristiques mécaniques différentes du reste du remblai. Cependant, relier un taux de compactage avec les paramètres mécaniques nécessaires pour alimenter un modèle numérique s’avère être une entreprise difficile. A partir de la bibliographie et du cadre réglementaire, nous allons dans un premier temps constituer une tranchée de référence décrite en termes de paramètres mécaniques du sol. Dans un deuxième temps, nous envisageons 3 types d’hétérogénéités spatiales, chacune d’entre elles ayant 5 longueurs différentes permettant de considérer plusieurs types d’interaction sol-conduite. Pour finir, un examen des effets sur les résultats de la méthode de modélisation mise en œuvre sera présenté en dernière partie de ce chapitre. Nous verrons notamment en quoi la prise en compte du phasage lors de la mise en place de la tranchée modifie les résultats de la modélisation initialement choisie.

182

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

2 - MODELISATION DE LA TRANCHEE

2.1 - Composition de la tranchée Une tranchée type correctement réalisée selon le fascicule 70 se compose de trois zones distinctes :

- la zone de remblai proprement dit, - la zone d’enrobage comprenant le lit de pose, l’assise de la canalisation, les remblais

latéral et initial, - la zone de sol en place constituant la fondation.

Figure 1. Composition de la tranchée type selon le Fascicule 70

Pour chaque couche de sol de la tranchée, le Fascicule 70 définit les objectifs de densification. Le taux de compactage est donné en terme de pourcentage de la densité optimale déterminée par l’essai Proctor normal ou modifié. Pour la zone de remblai, le Fascicule 70 renvoie à la norme NF P 98-331 qui se caractérise par les deux paramètres suivant :

- une valeur minimale de masse volumique moyenne (ρdm) - une valeur minimale de masse volumique en fond de couche (ρdfc ), à la cote 4 cm au

dessus de l’interface avec la couche sous-jacente, mesurée sur une tranche de 8 cm d’épaisseur.

Ainsi, on distingue 5 objectifs de densification : q2, q3, q4 et q5 (Tableau 1). La zone d’enrobage doit atteindre un objectif de densification q5 pour les cas courants, et q4 pour les cas particuliers (faible hauteur de remblai, grand diamètre, chantiers importants, nature des canalisations, disponibilité des matériaux d’enrobage…). Les parties inférieures de remblai

183

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

doivent être compactées au taux q4 tandis que le taux de compactage des parties supérieures varie selon le type de chargement en surface :

- tranchée sous chaussée : la partie supérieure de remblais et la couche d’assise de chaussée doivent être compactées respectivement au taux q3 et q2 ;

- tranchée sous trottoir ou accotement : le taux de compactage des parties supérieures est le q3 ;

- tranchée sous espace vert : le taux de compactage requis est le q4.

Tableau 1. Définition des objectifs de compactage

Objectifs de densification q2 q3 q4 q5

ρdm 97 % ρOPM 98,5% ρOPN 95% ρOPN 90% ρOPN

ρdfc 95% ρOPM 96% ρOPN 92% ρOPN 87% ρOPN

Tableau 2. Classification des sols (fascicule 70)

Groupe de sol Equivalence GTR Description

G1 D1, D2 Sables et graves propres,

concassés (Dmax < 50 mm). Sables ou graves peu silteuses

G2 B2, B4 Sables ou graves peu argileux

G3 A1, B1, B3, B5Sables et graves très silteux, limons peu plastiques, sables

fins peu pollués (IP < 12)

Sols utilisables en enrobage

G4 A2, B6

Sables et graves argileux à très argileux, sables fins argileux, limons argiles et marnes peu

plastiques (IP < 25) Sols

inutilisables en enrobage

G5 A3, A4 Argiles et argiles marneuses, limons très plastiques (IP > 25)

En ce qui concerne la nature des sols utilisés pour le remblaiement, la réglementation en vigueur exclue l’emploi des sols à fort indice de plasticité (Tableau 2). Les sols acceptables sont classés en 4 catégories relativement similaires à celles des autres réglementations internationales. Pour chacune des catégories acceptables, le fascicule détermine les valeurs numériques des modules conventionnels et des coefficients de pression latérale intervenant dans le dimensionnement (voir Annexe III). Ce que nous pouvons conclure, dans l’optique d’une modélisation numérique, c’est que la tranchée est un milieu complexe caractérisé par de nombreux paramètres dépendants de la mise en place du sol ainsi que de sa nature. De manière générale, le sol de la partie inférieure de la tranchée est caractérisé par un taux de compactage de 95 % de l’Optimum Proctor

184

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

Normal (OPN). Les hétérogénéités de cette zone issues de la mise en place impropre du remblai se traduiront donc par un écart plus ou moins important avec cette densité de référence. Par conséquent, il convient d’exprimer les divers paramètres caractérisant l’état de la tranchée en fonction de ce paramètre. Comme le suggère le fascicule 70 à travers les valeurs des modules conventionnels, pour un taux de compactage donné, les valeurs des paramètres mécanique du sol de la tranchée pourront varier selon la nature du sol. Ceci est illustré par les résultats de Boscardin et al. (1990) obtenus sur 3 types de sol testés par des essais triaxiaux (Figure 2). Les travaux de Boscardin et al. seront exploités plus en détail dans la section suivante. Pour le moment, précisons simplement la nature des 3 sols (d’après Diab, 1992) :

SW – sable et gravier de granulométrie homogène ML – sable et graves limoneux, sable et grave argileux de granulométrie élevée CL – limon inorganique et sable argileux de granulométrie fine

a) Module de compressibilité b) Module sécant à 50 % de la rupture

Figure 2. Module de sol en fonction du taux de compactage (d’après Boscardin et al. 1990)

Dans la section suivante une synthèse bibliographique aura pour objectif de donner l’évolution de ces paramètres mécaniques avec le taux de compactage. Cependant, les différents auteurs n’ayant pas utilisé les mêmes types de sol ni les mêmes instruments de mesure, les résultats sont à considérer de manière qualitative. Ils donnent en effet une fourchette de valeurs possible pour chaque niveau de compacité.

185

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

2.2 - Caractéristiques mécaniques d’un remblai compacté

2.2.1 Choix de la loi de comportement du sol Comme nous l’avons vu précédemment, il n’y a à ce jour pas de modélisation en 3D de l’ensemble sol-conduite intégrant tous les paramètres du phénomène. De nombreux modèles existent mais même les plus performants d’entre eux ne cumulent pas la complexité dans tous les aspects de la modélisation. Les représentations les plus sophistiquées à ce jour prenant en compte la conduite mais également le sol et l’interface sol-conduite sont essentiellement bidimensionnelles situées dans le plan diamétral de la conduite. Dans de tels modèles, les lois de comportement du sol sont élasto-plastiques telles que celle de Drucker-Prager (Selvadurai et Pang, 1988) ou Cam-Clay (Diab, 1992) ou encore élastiques non-linéaires comme la loi de Duncan utilisée par Diab (1992). L’utilisation de tels modèles du sol requière la connaissance de nombreux paramètres. Dans l’optique d’une étude du comportement des conduites enterrées en relation avec la variabilité du sol de la tranchée, nous avons choisi de privilégier la représentation phénoménologique du comportement en mettant l’accent sur les éléments identifiés comme importants dans la bibliographie ou dans la première partie de ce travail : l’aspect tridimensionnel du problème, la prise en compte des joints et l’interface sol-conduite. Ayant déjà introduit dans le modèle numérique de nombreuses composantes susceptibles d’influencer les résultats, l’utilisation d’une loi de comportement complexe du sol, sans véritables connaissances des variations de ses paramètres avec l’état du sol, peut s’avérer aussi dangereuse qu’inadaptée. Nous avons donc choisi d’utiliser dans le cadre de ce travail la loi de comportement élastique linéaire de Mohr-Coulomb. Nous supposons donc que le sol de la tranchée est élastique ce qui est probablement une hypothèse extrêmement forte en phase de réalisation des travaux. L’impact de cet état initial fera l’objet d’une étude particulière dans le chapitre 5. En revanche, les travaux de Thépot (2004) démontrent qu’en service, c’est-à-dire sous chargement en surface, le sol de la tranchée se situe dans sa majeure partie en élasticité. En effet, les zones plastiques apparaissent seulement dans des domaines très localisés en clé de la conduite. D’autre part, Kitane et McGrath (2006) montent, en reproduisant par un calcul 3D les résultats d’une expérimentation in situ de chargement d’une conduite faiblement enterrée, que la loi de comportement de Mohr Coulomb donne des résultats satisfaisant pourvu que le module de Young augmente avec la profondeur. Néanmoins, une interrogation persiste quant à la loi de comportement pertinente en présence des zones faibles de la tranchée. Ne connaissant pas le comportement des zones hétérogènes dans ce type de problèmes, la possibilité de plastifier, certes de manière très idéalisée, qui est autorisée par le modèle de Mohr-Coulomb permettra à ce modèle de se rapprocher de la phénoménologie du problème sans introduire de nombreux paramètres. Les valeurs à donner aux paramètres de modèle de Mohr-Coulomb seront déterminées à partir de la bibliographie. Benmansour a réalisé, à l’aide d’un calcul bidimensionnel transversal, une étude comparative pour deux types de sol (sable dense, E = 50 MPa et sable lâche, E = 10 MPa) en utilisant successivement la loi élastique et la loi de Mohr-Coulomb. Il montre alors qu’en terme d’efforts internes, la différence entre les deux lois de comportement est très faible pour le

186

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

sable dense (inférieure à 5 %). En revanche, elle devient considérable lorsque les caractéristiques de la tranchée sont celles d’un sable lâche avec environ 50 % d’écart. Par ailleurs, l’influence de l’intensité du chargement sur la loi de comportement, peut être limité en évitant les valeurs extrêmes de la charge en surface.

2.2.2 Choix du module de sol

2.2.2.1 Influence de la contrainte Les travaux de Biarez et Hicher (1994), Janbu (1963) ou Biarez (1962) portant sur le comportement des matériaux granulaires démontrent que le module du sol augmente avec la contrainte. En général, pour les sols sableux ou argileux communs, la non-linéarité du module élastique peut être appréhendée par une relation du type :

napE = Equation 1

où p est la contrainte moyenne ( 32131 σσσ ++=p ) et a et n sont des paramètres déterminés

expérimentalement. La valeur de n est, chez la plupart des auteurs, voisine de 0,5. Selon les travaux de Hardin et Richard (1963) le paramètre a peut être relié à l’indice des vides via l’Equation 2 où on voit apparaître deux constantes du matériau A et b :

)1()²(.

eebAa

+−

= Equation 2

Le paramètre b dépend de la nature du matériau mais également de la valeur de l’indice des vides, sa plage de variations se situant entre 1 et 4. En s’appuyant sur les travaux de Selig (1988, 1990) Kitane et McGrath (2006) proposent une évolution du module de Young avec la profondeur pour un sol graveleux compacté à 85 et 95 % de l’optimum standard Proctor (Figure 3).

0

10

20

30

40

50

60

0 1 2 3 4 5 6

Profondeur (m)

Mod

ule

de Y

oung

(MPa

)

SW 95%SW 85%

Figure 3. Evolution du module de Young avec la profondeur (d’après Kitane et

McGrath, 2006)

187

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

2.2.2.2 Influence des déformations L’amélioration de la précision de mesure des essais triaxiaux dans les années 1980 permet de confirmer les résultats des essais dynamiques à la colonne résonnante menés quelques années auparavant : la valeur du module d’élasticité d’un sol augmente lorsque le taux de déformation diminue. Un résultat type d’évolution du module avec la déformation est donné sur la Figure 4 représentant la fameuse « courbe en S ».

Figure 4. Evolution du module sécant avec la déformation (d’après Thépot, 2004)

Certains auteurs ont alors cherché des formulations mathématiques pouvant représenter cette évolution du module avec la déformation. Il s’agit en général d’une formulation hyperbolique faisant intervenir le module maximal ainsi que la déformation de rupture. Nous pouvons citer par exemple le modèle de Hardin et Drnevitch (1972) :

r

sE

E

εε

+=

1

max Equation 3

Avec : Es – le module sécant Emax – le module en très petites déformations εr – la déformation de rupture par cisaillement. La relation de l’Equation 1 est en général obtenue dans le domaine de petites déformations (10-5 à 10-3). La non linéarité du module élastique liée au domaine de déformations peut assez rapidement compliquer cette expression. Les travaux de Biarez (1962) avaient également pour objectif de tester la validité de l’Equation 1 dans les domaines voisins. Pour garder la simplicité de la formule, l’auteur suggère d’une part des valeurs de n plus faibles, voisines de

188

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

0,3 dans le domaine de très petites déformations inférieures à 10-5 et d’autre part, une augmentation progressive de la valeur de n de 0,5 à 1 au fur et à mesure que l’on s’éloigne du domaine des petites déformations. Ce que la Figure 4 illustre parfaitement, c’est que la valeur du module de sol pourra varier d’un ordre de grandeur selon le taux de déformation du sol autour de la conduite.

2.2.3 Evolution des paramètres mécaniques avec le taux de compactage

2.2.3.1 Formulation empirique Hicher (1996) a réalisé des travaux sur les propriétés élastiques des matériaux granulaires afin de vérifier expérimentalement la relation de l’Equation 1 en très petites déformations, en réalisant des essais dynamiques et statiques à partir d’un appareil d’essai triaxial adapté aux très petites déformations (entre 10-3 et 10-6). La synthèse de plusieurs résultats portant sur une gamme très large de sols permet d’approximer l’Equation 1 en supposant que le module élastique est inversement propositionnel à l’indice des vides :

ep

CE .= Equation 4

Cette expression est valable dans le domaine des très petites déformations. Pour les argiles et sables à limite de liquidité inférieure à 50%, la constante C est égale à 450, tandis que pour les argiles avec une limite de liquidité supérieure à 50% C est égale à 750. En reliant l’indice des vides au taux de compactage et à partir de l’Equation 1, il est théoriquement possible de déterminer une relation entre le module élastique E et le taux de compactage. En effet, l’indice des vides est relié au poids volumique sec par la relation suivante :

1−=d

seγγ

Equation 5

γs le poids volumique du squelette voisin à 26,5 kN/m3, γd le poids volumique sec relié au taux de compactage par dOPNd compactagedetaux γγ ×= On obtient finalement la relation suivante :

ds

dpCEγγ

γ−

= . Equation 6

L’inconvénient de cette formulation est son domaine de validité c'est-à-dire les très petites déformations. En utilisant un poids volumique caractéristique des graves ou des sables, nous obtenons des valeurs du module de Young extrêmement élevées, cohérentes avec les valeurs de la courbe en « S » (Figure 4) mais difficilement utilisables en dehors de leur domaine de validité.

189

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

2.2.3.2 Des valeurs expérimentales Les études permettant de faire le lien entre le taux de compactage et les paramètres du sol sont relativement peu nombreuses. En ce qui concerne le compactage des tranchées, nous pouvons utiliser les sources de Benmansour (1996), les travaux de Selig (Boscardin et al.1990), ou de Thépot (2004). Plus globalement, le compactage des sols a été abordé de diverses manières dans l’objectif de réalisation des routes. A titre d’exemple nous pouvons citer les travaux de Adu-Osei et al. (2000). Les ordres de grandeur des paramètres de différents types de sol sont relativement variables. Nous avons résumé dans le Tableau 3 celles qui sont souvent avancées dans la littérature (Benmansour, 1996, Diab 1992, Boscardin et al. 1990). Le coefficient de Poisson est généralement égal à 0,3 tandis que l’angle de dilatance pour la loi de Mohr-Coulomb est moins renseigné. Nous avons donné quelques indications pour l’évolution de ce paramètre avec l’angle de frottement interne du sol dans le chapitre 4 (section 3.2.3).

Tableau 3. Ordre de grandeur des paramètres des différents sols

Type de sol Module de Young (MPa) Cohésion (kPa) Angle de

frottement (°) Sable dense 50 – 80 Très faible 40 – 45 Sable moyen 25 – 50 Très faible 35 – 40 Sable lâche 10 – 25 Très faible 30 – 35 Argile raide 7 – 40 10 – 680 20 – 25 Argile ferme 5 – 25 8 – 680 15 – 20 Argile molle 2 – 5 5 – 680 10 – 15

Une campagne expérimentale pluriannuelle in situ a été réalisée par la SAGEP sur différents types de collecteurs (maçonnerie, fonte, PVC et béton) installés dans un sol identifié comme sable argileux (Thépot 2004). Une tranchée de référence réalisée suivant les règles du Fascicule 70 a été mise en place pour une conduite souple en PVC. Le matériau de remblaiement est un sable graveleux du type D1 dans la classification du GTR. Les essais de vérinage, puis un calcul inverse, permettent d’établir une relation entre le module d’Young et le taux de compactage valable dans le domaine de 95% à 97% de l’OPN :

4,11(%)14,0log −= TE

Ainsi, pour un taux de compactage de 95%, on trouve E = 80 MPa. Ce module apparaît comme la borne supérieure des valeurs données dans le Tableau 3. Le résultat de Thépot pourrait s’expliquer par le fait que les mesures du module de Young par vérinage interne sont valables dans la gamme des déformations voisines de 10-3. Adu-Osei et al. (2000) ont effectué des travaux sur l’effet du compactage sur les propriétés orthotropes du sol. Ils ont ainsi étudié deux types de Graves Non Traitées, des GNT issues de calcaire concassé (GNT1) et des GNT issues de graves siliceuses (GNT2), compactées selon trois techniques de compactage différentes. Les auteurs supposent l’évolution du module élastique de chargement – déchargement du sol selon la formule de Janbu (1963). Pour une

190

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

pression de confinement de 40 kPa et un déviateur de 30 kPa ils donnent les résultats du Tableau 4 :

Tableau 4. Les valeurs des propriétés mécaniques du remblai (d’après Adu-Osei et al.)

Type de sol

Taux de compactage

(% OPN)

γ (kN/m3)

Ey(MPa)

Ex (MPa)

ν vertical

ν horizontal

GNT1 95 21,5 161 65 0,15 0,3

GNT2 95 23 192 277 0,18 0,36 Ces résultats mettent en évidence une orthotropie du matériau compacté très accentuée pour un taux de compactage équivalent à q4. Nous remarquons cependant, que les caractéristiques du module et du coefficient de Poisson du matériau GNT1 dans la direction horizontale correspondent aux résultats des autres sources. En revanche, la valeur du module dans la direction horizontale pour le GNT2 parait pour le moins très surprenante.

2.2.3.3 Les valeurs de référence En absence de sources de données fiables et étendues, les travaux de Selig du début des années 90 (Selig 1988, Boscardin et al. 1990) font office de référence en la matière. Ils sont utilisés par plusieurs auteurs dont Diab (1992) et Kitane et McGrath (2006). Destinées aux modèles bidimensionnels utilisant la loi non – linéaire de Duncan pour représenter le sol (programmes de dimensionnement SPIDA (Heger et al. 1985) et CANDE (Musser 1989), la réglementation AASHTO 1978 (T180), AASHTO 1989 (T-99)), l’équipe de Selig réalise une série d’essais triaxiaux afin de constituer une base de données permettant d’alimenter le modèle de Duncan pour les configurations courantes. Nous y trouvons notamment les trois types de remblai (SW, ML, CL) déjà mentionnés sur la Figure 2. Pour la loi Mohr – Coulomb, nous retiendrons de cette base uniquement la partie linéaire de la loi de Duncan. Les résultats (Tableau 5) sont calculés pour un confinement de σ3 = 35 kPa, ce qui correspond à une profondeur de 1,5 m environ. Les résultats pour les limons (sol CL) ne sont pas donnés puisque ce sol n’est pas utilisé en tant que remblai. Une extrapolation de ces résultats (mis à part la valeur à 100 % de l’OPN) expérimentaux permet de trouver une relation entre le module de Young et le taux de compactage :

Pour le sol SW : 63,1(%)035,0log −= TE avec R² = 0,9234 Pour le sol ML : 16,2(%)037,0log −= TE avec R² = 0,9878

Ces relations sont représentées sur la Figure 5. Il apparaît que le module de Young augmente de manière quasi linéaire avec le taux de compactage pour des niveaux de compactage élevés.

191

Page 76: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

Tableau 5. Paramètres mécaniques de Selig et al. pour des remblais compactés (après extrapolation des données initiales)

Type de sol

Taux de compactage

(%OPN) γ (kN/m3) E initial

(MPa) ϕ (°) c (kPa)

95 22,5 51 48 0 90 21,4 41 42 0 85 20,1 31 38 0 80 19 22 36 0

Sable graveleux

(SW) 60 14,5 2 29 0 100 21,4 46 36 38 95 20,3 29 34 27 90 19,2 15 32 24 85 18,2 9 30 21 80 17,1 6 28 17

Sable argileux

(ML)

50 10,6 1 23 0

0

10

20

30

40

50

60

60 65 70 75 80 85 90 95 100Taux de compactage (%)

Mod

ule

d'Yo

ung

(MPa

)

SW

ML

Figure 5. Module de Young en fonction du compactage (d’après Selig)

2.2.4 Conclusion Le module de remblai d’une tranchée classique est essentiellement fonction de :

- la nature du sol, - le taux de déformation, - le niveau de contrainte, - le taux de compactage.

Nous allons désormais nous placer dans le contexte de l’utilisation de matériau d’apport pour le remblaiement de la tranchée correspondant à la catégorie 1 des réglementations en vigueur. Il s’agit donc du matériau SW de la base de Selig. En ce qui concerne l’influence du taux de déformation sur le module de Young, il est impossible de déterminer avec certitude le domaine exact de la courbe en « S » dans lequel se trouve le remblai. Les différentes études montrent que typiquement le module peut varier d’un ordre de grandeur en fonction des déformations. Le domaine de déformation étant variable en

192

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

fonction des conditions de chargement en surface, nous pouvons faire la même hypothèse que beaucoup d’autres auteurs, à savoir qu’au voisinage de la rupture de la conduite, le remblai se trouve dans le domaine des déformations classiques. En outre, dans le cas présent, la conduite est enterrée sous une couverture d’un mètre environ. La zone d’enrobage ou du sol en place jouant un rôle important dans le comportement de la conduite se situe donc à une profondeur allant de 1 à 2 mètres ce qui correspond à une variation de la pression moyenne de 20 à 40 kPa. Compte tenu des incertitudes, nous pouvons raisonnablement supposer dans le cas présent le module de Young indépendant de la contrainte. Enfin, le taux de compactage de la tranchée semble être le paramètre déterminant la valeur du module de Young mais il est également le moins connu. En évaluant la qualité de différents résultats publiés à ce jour, nous avons choisi de retenir les données de Selig dans la suite de l’étude.

193

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

3 - INFLUENCE DE LA VARIABILITE SPATIALE DES HETEROGENEITES

3.1 - Présentation des cas étudiés

3.1.1 Le cas de référence Dans cette section nous considérons 3 types d’hétérogénéités souvent observées, chacune d’entre elles résultant soit des difficultés d’exécution des travaux soit d’un mode opératoire de mise en place impropre identifié à posteriori. A l’exception de la zone hétérogène, les caractéristiques mécaniques du sol en place, du remblai, et de la conduite sont identiques dans tous les cas. Ils sont résumés respectivement dans le Tableau 6, Tableau 7 et Tableau 8.

Tableau 6. Caractéristiques mécaniques du sol en place

Module de sol

Coefficient de Poisson

Angle de frottement

Cohésion Angle de dilatance

Limite traction

Poids volumique

K0

50 MPa 0,33 35° 5 MPa 15° 1 kPa 20 kN/m3 0,5

Tableau 7. Caractéristiques mécaniques du remblai

Module de sol

Coefficient de Poisson

Angle de frottement

Cohésion Angle de dilatance

Limite traction

Poids volumique

K0

50 MPa 0,33 48° 0 MPa 10° 0 kPa 20 kN/m3 0,5

Tableau 8. Caractéristiques mécaniques de la conduite et de l’interface sol – conduite

Module de béton

Coefficient de Poisson

Poids volumique

Angle de frottement de l’interface

Diamètre intérieur

Epaisseur

40 GPa 0,2 25 kN/m3 40° 0,5 m 0,053 m Nous avons choisi les caractéristiques données par Boscardin et al. dans le Tableau 5 pour définir le remblai compacté au niveau q4. D’autre part, le sol en place étant au moins aussi bien compacté que le sol de la tranchée son module de Young devrait être supérieur ou égal à celui du remblai. En ce qui concerne la réglementation, il est spécifié que le sol en place doit être considéré comme un remblai compacté au niveau q4 ce qui est cohérent avec le module que nous avons fixé. Par ailleurs, dans la dernière section de ce chapitre nous montrerons que la configuration la plus défavorable pour la conduite est celle où les modules du sol en place et celui du remblai sont égaux. La configuration géométrique de référence ne varie pas d’un type d’hétérogénéité à l’autre. Les grandeurs caractéristiques sont données sur les Figure 6,Figure 7 et Figure 8. Nous sommes en présence d’une tranchée de largeur définie par le fascicule 70 à partir du diamètre de la conduite et de profondeur minimale nécessitant l’emploi de blindages.

194

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

3.1.2 L’hétérogénéité dans l’assise Ce type d’hétérogénéité est rencontré lorsque le lit de pose se trouve dans un état lâche et lorsque les bourrages latéraux sont insuffisants. Ce cas de figure est relativement courant d’une part à cause de la difficulté d’exécution des bourrages et d’autre part, pour faciliter le réglage du fil d’eau. En effet, le passage des compacteurs étant réalisé à énergie réduite et à une distance raisonnable de la conduite pour préserver son intégrité structurelle, l’objectif de densification q4 n’est souvent pas atteint. La zone décompactée est schématisée sur la Figure 6 et ses caractéristiques sont données dans le Tableau 9. Qualitativement, nous avons considéré un remblai lâche avec une forte diminution du module, de l’angle de frottement et de la densité par rapport au reste de la tranchée.

Charge en surface

Assise

TranchéeSol en place B = 1,5 m

Couverture = 1,05m

D = 0,5 m

Lit de pose = 0,1 m

Figure 6. Zone décompactée dans l’assise de la conduite

3.1.3 L’hétérogénéité sous la tranchée Le guide d’application et l’annexe A du fascicule 70 mentionnent le remaniement du fond de fouille et le tassement qui s’en suit comme le mécanisme déstabilisateur de la canalisation le plus fréquent. En effet, le remaniement du sol se produit lorsque le poids des terres qui équilibrait la pression de la nappe est supprimé par excavation de la tranchée. Ce remaniement résulte en la diminution de la résistance sur une certaine épaisseur sous le fond de fouille qui entraîne un tassement après remblaiement de la tranchée. Afin de prendre en compte cette diminution de la résistance du sol, nous avons diminué le module élastique dans une couche de 24 cm d’épaisseur située sous le lit de pose. Contrairement à l’hétérogénéité précédente, la diminution du module élastique concerne l’ensemble de la largeur de la tranchée et non uniquement la partie localisée sous la conduite.

195

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

Un schéma du cas étudié est donné sur la Figure 7 tandis que les caractéristiques mécaniques sont données dans le Tableau 9.

Sol remanié = 0,24 m

Charge en surface

Lit de pose = 0,1 m

TranchéeSol en place

D = 0,5 m

Couverture = 1,05mB = 1,5 m

Sol remanié au fond de fouille

Figure 7. Zone décompactée située sous la tranchée

3.1.4 L’hétérogénéité dans la zone d’enrobage La présence des blindages dans la tranchée rend l’exécution réglementaire du processus de remblaiement long et fastidieux. En effet, les blindages sont idéalement relevés de manière progressive par couche de remblai avant leur compactage. Or, dans la zone d’enrobage, la levée progressive des blindages est encore plus complexe dû à la présence de la conduite. En conséquence, cette zone de la tranchée est réalisée en une seule fois d’autant plus que la vérification de la densité dans cette zone par pénétromètre est délicate. Le compactage est donc réalisé sur une couche de remblai beaucoup plus épaisse que les règles de l’art ne le recommandent. Thépot (2004) réalise une expérimentation de remblaiement sur une conduite de diamètre 400 mm à l’aide des matériaux du type D1 et D2. L’expérience consiste à réaliser d’une part une tranchée parfaite selon les recommandations du fascicule 70 et d’autre part une tranchée dans laquelle la zone d’enrobage est compactée en une seule fois. La vérification de la résistance de pointe du PDG 1000 ou la mesure directe du module du sol par le vérinage interne indiquent tous les deux le même résultat : le module de la zone d’enrobage est environ 3,5 fois plus faible dans le cas de la tranchée défectueuse malgré l’énergie de compactage relativement importante. Dans la pratique, ce rapport pourrait être bien plus important. Pour cette raison, nous avons considéré ce cas de figure dans notre étude d’influence des hétérogénéités sur le comportement des conduites avec un rapport 7 entre le module de sol

196

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

homogène et le module du sol de l’hétérogénéité. La configuration modélisée est donnée sur la Figure 8 et dans le Tableau 9.

Charge en surface

TranchéeSol en place B = 1,5 m

Remblai = 0,92 m

Enrobage = 0,1 m

Zone d’enrobage D = 0,5 m

Lit de pose = 0,1 m

Figure 8. Zone décompactée dans l’enrobage de la conduite

Tableau 9. Caractéristiques mécaniques des zones hétérogènes

E (MPa)

ν C (kPa)

φ (°)

ψ (°)

γ ( kN/m3)

K0

Assise 3 0,33 0 29 10 14 0 Remaniement 3 0,33 0 29 10 14 0,5

Enrobage 7 0,33 0 29 10 14 0,5 Puisqu’un module de sol très faible cause des instabilités numériques, le cas de l’hétérogénéité dans l’assise sensée représenter un sol extrêmement lâche peut poser des problèmes de modélisation. Nous avons donné au module de sol de l’assise la valeur de 3MPa qui peut paraître relativement élevée. Lors de la mise en place du modèle, cette valeur du module est accompagnée par un K0 égal à zéro traduisant l’absence des contraintes horizontales à l’instant initial. Un équilibre des contraintes est ensuite atteint avant de charger la tranchée en surface.

3.1.5 Les dimensions longitudinales Conformément aux résultats du chapitre 4, les efforts les plus importants sont observés dans la section située au droit de la charge. Cependant, le comportement du tronçon est variable en fonction du point d’application de la charge surfacique. Ce dernier est donc compris entre deux cas limites : charge au milieu d’une buse et charge alignée avec le joint. Nous considérons ici les deux positions de la charge dénommées respectivement position A et B

197

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

(Figure 9). Dans les deux cas, la zone décompactée est centrée sur la charge mais prend plusieurs longueurs. Une synthèse des cas étudiés est donnée dans le Tableau 10.

Charge en position A

Lbuse = 3.7 m

Charge en position B

Lhétérogénéité

Figure 9. Dimensions longitudinales des zones faibles et position de la charge

Tableau 10. Dimensions longitudinales de la zone décompactée en fonction de la position de la charge

Configuration A Configuration B L = 0,2 m L = 0,2 m L = 1,0 m L = 1,8 m L = 1,9 m L = 3,4 m L = 3,5 m

Assise

L = 5,6 m L = 5,5 m L = 0,2 m L = 0,2 m L = 1,8 m L = 1,9 m L = 3,4 m L = 5,6 m L = 5,5 m

Remaniement du fond de

fouille L = 14,0 m L = 0,2 m L = 0,2 m L = 1,0 m L = 1,8 m L = 1,9 m L = 3,4 m L = 3,5 m

Enrobage

L = 5,6 m L = 5,5 m Les longueurs d’hétérogénéités sont choisies en fonction de la longueur des buses. La longueur 0,2 m correspond à une hétérogénéité très localisée mais qui englobe la zone de joint si elle est alignée avec ce dernier. La longueur 1,8 m représente une demie buse tandis que celle de 3,4 m est voisine de la longueur du fut entre deux joints. De même, 5,6 m correspond à la longueur d’un élément entier y compris les joints alors que 14 m correspond aux deux éléments avec les joints. Compte tenu des configurations envisagées, nous avons modélisé 5 buses complètes (4 joints) au-delà desquelles les joints ne sont plus représentés car leur influence est négligeable. La longueur totale du tronçon envisagé est de 24 mètres. Cette longueur est suffisante pour que les bords du modèle n’aient aucune influence sur les résultats.

198

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

En ce qui concerne le niveau de chargement en surface, la réglementation française ou européenne concernant le poids maximum autorisé sur les routes peut donner un ordre de grandeur. En effet, la réglementation française précise que l'essieu simple de l’un des camions d’un convoi du type BC ne doit pas dépasser 120 kN. La roue la plus chargée soumet donc un effort de 60 kN, sur une surface de 30 x 30 cm². Pour les convois du type Br, la roue la plus chargée transmet un poids de 100 kN appliqué sur une surface de 30 x 60 cm². Dans la pratique, ces valeurs sont souvent dépassées, le poids pouvant monter à 200 kN pour un essieu simple (Thépot, 2004). L'Eurocode 1 – partie 3 traitant des charges d'exploitations à appliquer sur les ponts fixe des valeurs maximales plus proches de la réalité. Le système de fatigue dit LM1, combine des charges ponctuelles et des charges réparties, avec un découpage transversal en plusieurs voies. La voie la plus chargée reçoit un tandem de 2 x 300 kN sur une surface d'impact d'une roue de 40 x 40 cm² et une charge répartie de 9 kPa, soit une pression totale de 1900 kPa. Le système LM2, constitué d'un essieu avec roues jumelées, définit une charge totale de 400 kN (200 kN par roues jumelées) sur une surface d'impact de 35 x 60 cm², soit une pression de 950 kPa. Il apparaît donc que l’intensité de la charge transmise par une roue ainsi que la surface sur laquelle cette charge est appliquée soient très variables d’un règlement à l’autre. Nous avons choisi d’appliquer une charge totale de 100 kN soit une pression de 1667 kPa sur une surface de 20 x 30 cm². Il s’agit d’un cas de figure particulier où l’intensité de la charge totale est celle d’un convoi Br (réglementation française) mais appliquée sur une surface proche du type Bc. De cette manière, la contrainte appliquée sur le sol est proche de celle de LM1.

3.1.6 Le modèle numérique Le modèle numérique comporte un peu plus de 100000 nœuds dans le massif du sol et environ 12500 éléments de structure. Ce maillage est suffisamment fin pour ne pas influencer les résultats. La Figure 10 montre un quart du maillage d’une buse. La procédure du calcul est identique à celle présentée dans le Chapitre 4 à savoir une phase de stabilisation du système massif – conduite avant l’application du chargement en surface puis une nouvelle phase de stabilisation. A la fin de chaque calcul, un certain nombre de grandeurs nécessaires à la compréhension du comportement des conduites sont systématiquement relevées aussi bien dans le massif que dans la conduite. A ce titre, la Figure 11 montre la localisation des points où les contraintes verticales et horizontales dans le massif sont relevées dans la direction longitudinale. En ce qui concerne la conduite, les efforts internes donnés par la suite dans la direction longitudinale sont relevés en clé et en radier des buses. Les déplacements verticaux du tronçon sont en revanche ceux du radier. Afin de décrire simultanément l’écrasement de la conduite dans le plan transversal (ovalisation) et sa flexion longitudinale, nous utilisons les grandeurs définies dans la section 4 du chapitre précédent :

- le moment d’ovalisation My dans le plan transversal ; - la force axial Nx traduisant le comportement global en poutre du tronçon.

199

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

Rappelons que la majeure partie de la contrainte de flexion longitudinale vient de la force axiale qui représente une sorte de résultante de la distribution de cette contrainte sur l’épaisseur de la conduite.

Figure 10. Maillage d’un quart d’une buse

Figure 11. Positions des contraintes relevées le long du tronçon

Remblai

Sol en place

σh

σv

σv

σv

3.2 - Configuration A : synthèse des résultats

3.2.1 Cas de référence Afin de donner une interprétation qualitative de l’influence de ces différents types d’hétérogénéités sur le comportement du tronçon, une analyse du cas de figure du remblai homogène appelé référence sera donnée. L’analyse de tous les autres cas sera ensuite faite par rapport à ce Cas de référence. Par ailleurs, nous avons déjà démontré dans le chapitre 4 que l’action des joints modifie le comportement du tronçon en fonction du type et de la position des hétérogénéités. Il est donc nécessaire d’analyser leur influence dans le cas d’un remblai homogène pour pouvoir ensuite différentier les effets qui relèvent des hétérogénéités. Enfin, rappelons que la mise en œuvre pratique du modèle numérique de joint génère un certain nombre d’anomalies numériques visibles dans les résultats. Il est donc indispensable d’identifier et de quantifier ces effets avant de procéder à une analyse approfondie de résultats des calculs. Pour ce faire, une variante de la configuration de référence a été envisagée avec un tronçon identique à celui de la référence mais dont le fonctionnement des joints a été inhibé. Il s’agit

200

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

donc d’un tronçon sans joint mais qui est identique à la référence du point de vue géométrique ou de son mode de mise en œuvre.

3.2.1.1 Les contraintes dans le sol Pour décrire l’évolution en 3D des contraintes dans le massif, nous avons choisi de coupler une représentation dans le plan transversal (situé au droit de la charge), avec l’évolution le long du tronçon aux points particuliers représentés sur la Figure 11.

a) Contrainte verticale b) Contrainte horizontale

Figure 12. Les contraintes dans le remblai dans le plan transversal

La Figure 12 montre que dans le plan transversal, la clé et une partie des épaules de la conduite sont exposés à une concentration de contrainte verticale qui en grande partie s’estompe très vite en direction des reins pour garder une valeur presque constante ailleurs. Dans la direction longitudinale, cette concentration de contrainte se dissipe également très vite c’est-à-dire sur environ 1,2 mètres de part et d’autre de son centre (Figure 13a). Sur la partie inférieure, l’accroissement de contrainte dû à la charge en surface se dissipe très lentement et seulement à partir des éléments adjacents (Figure 13b). La conduite diffuse donc la charge qu’elle reçoit sur une longueur beaucoup plus importante que la zone d’influence de la charge au niveau du radier dans le sol sans conduite. Ce comportement était attendu compte tenu du rapport de rigidité conduite – sol très élevé. En ce qui concerne la contrainte horizontale, la Figure 12b donne sa répartition dans le plan transversal au droit de la charge. Ses variations sont moins importantes que celles de la contrainte verticale mais néanmoins nous pouvons observer deux valeurs similaires au dessus et en dessous de la conduite et une diminution de contrainte aux reins. Nous avons vu dans le chapitre 2 que la contrainte horizontale ne détermine le comportement de la conduite de manière directe qu’au niveau des reins. A cet endroit, elle s’oppose directement aux efforts d’ovalisation dans le plan transversal. C’est donc à cet endroit que nous choisissons de relever son évolution dans la direction longitudinale (Figure 13c). Contrairement à la contrainte verticale, la contrainte horizontale diminue dans la zone d’influence de la charge.

201

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

En représentant sur la Figure 13 les résultats du calcul avec joint inhibé (appelé « sans joint » dans la légende), nous pouvons mettre en évidence le rôle des joints dans le cas d’un remblai homogène. La seule différence notable par rapport au tronçon sans joint est observée pour les contraintes verticales dans le lit de pose. En effet, une légère augmentation de la contrainte est observée aux bords de la buse centrale lorsque l’on introduit les joints au lieu d’une légère diminution pour le tronçon sans joint. Nous observons ici un phénomène similaire à celui du champ de contrainte verticale d’une fondation flexible par rapport à une fondation rigide.

-100

-80

-60

-40

-20

0-8 -4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Con

trai

nte

vert

ical

e (k

Pa)

Sans tronçonAvec jointSans joint

-60

-50

-40

-30

-20

-10-8 -4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Con

trai

nte

vert

ical

e (k

Pa)

Sans tronçonAvec jointSans joint

a) Contrainte au dessus de la conduite b) Contrainte verticale dans le lit de pose

-16

-14

-12

-10

-8-8 -4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Con

trai

nte

horiz

onta

le

(kPa

)

Sans tronçonAvec jointSans joint

c) Contrainte horizontale aux reins de la conduite

Figure 13. Evolution des contraintes du sol dans la direction longitudinale

En comparant ces résultats avec un calcul du chargement de sol vierge sans conduite nous pouvons également déterminer de quelle manière cette dernière perturbe la diffusion de la charge dans le massif. Tout d’abord, le décalage des courbes b et c en dehors de la zone d’influence de la charge (différence des contraintes à l’état initial avant le chargement) est dû à la différence du poids entre un cylindre vide et un même volume de sol. Ensuite nous pouvons remarquer que l’interaction sol-conduite ne modifie presque pas la distribution des contraintes verticales au-dessus de la conduite (la courbe a ne montre que de légères différences au niveau des joints). En revanche, les contraintes verticales dans le lit de pose sont atténuées au droit de la charge mais sont distribuées plus loin dans la direction longitudinale. Cet effet filtre que joue la conduite absorbe près de 20 % du pic de contrainte mais augmente d’environ 60 % la longueur de la zone d’influence de la charge. Notons également que la diminution de la contrainte horizontale est accentuée par la présence de la conduite (15 % sans conduite contre 40 % avec la conduite).

202

Page 87: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

En outre, nous pouvons observer aux environs de chaque joint une perturbation du champ de contraintes aussi bien verticales qu’horizontales. Cette perturbation n’est pas liée au comportement mécanique du joint puisqu’elle apparaît également dans le cas du tronçon sans joint. Elle est le résultat de la forme géométrique particulière qu’ont les buses à ces endroits afin de pouvoir introduire le modèle du joint du chapitre 4. Afin que les contraintes de la coque puissent être transmises à la fois au sol et à la couronne représentant le joint, le mode de mise en œuvre du modèle est également un facteur perturbateur du champ de contraintes dans le sol. Cependant, compte tenu de l’allure des résultats obtenus pour un cylindre parfait (sans joint), bien que localement les perturbations soient très importantes, le champ de contraintes dans son ensemble n’est pas modifié par ces anomalies numériques. Par la suite, nous avons choisi de ne pas éliminer les points problématiques mais il faudra faire une lecture globale des résultats sans tenir compte des variations locales au niveau des joints.

3.2.1.2 Les efforts de la structure Pour les mêmes raisons que précédemment, les résultats des efforts internes et des déplacements de la conduite sont donnés pour les cas avec et sans joint. La force axiale traduisant le comportement en flexion longitudinale du tronçon est donnée dans le plan transversal sur la Figure 14, la partie inférieure de la section étant en traction et la partie supérieure en compression. Les valeurs extrêmes de la force axiale sont situées au radier et à la clé sachant que c’est la valeur du radier qui produira le moment de flexion de rupture. L’évolution des ces valeurs extrêmes dans la direction longitudinale est donnée sur la Figure 16. La buse centrale est de loin la plus sollicitée par flexion longitudinale et le risque d’apparition de la fissure circulaire est maximal au radier de la section située au droit de la charge. A partir de là, le moment de flexion diminue relativement vite pour s’annuler au niveau des joints et changer de signe sur les buses adjacentes (traction à la clé). Nous retrouvons également les résultats du chapitre 4 montrant le rôle des joints dans la diminution des efforts de flexion : la valeur maximale est plus faible pour un tronçon avec joints et la dissipation des efforts plus rapide. Le même type de courbe est donné pour le moment d’ovalisation dans le plan transversal situé au droit de la charge (Figure 15). Cette fois les extrema locaux sont trouvés au radier, aux reins et à la clé de la section. La Figure 17 donne l’évolution des valeurs du moment d’ovalisation à la clé et au radier sachant que le même type de courbe mais de signe opposé est observé aux reins de la conduite. Il suffira donc de représenter l’une de ces 3 valeurs pour capturer l’évolution du moment le long du tronçon. La valeur maximale du moment diminue parallèlement à l’intensité du chargement à la clé, jusqu’à ne plus observer d’ovalisation à l’extérieur de la zone d’influence de celui-ci. Par ailleurs, pour ce type de comportement les joints n’apportent logiquement aucune diminution du moment d’ovalisation qui est donc entièrement piloté par le champ de contrainte dans le remblai d’enrobage. Les courbes de résultats des efforts internes ne présentent pas les mêmes perturbations numériques locales que celles représentant les contraintes dans le remblai. Ceci est une conséquence du mode opératoire de récupération des données, qui ne tient pas compte de certains points de la coque proches des joints.

203

Page 88: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

-60

-40

-20

0

20

40

600 30 60 90 120 150 180

Position longitudinale (m)

Forc

e ax

iale

Nx

(kN

/m)

Avec jointSans joint

-1.2

-0.8

-0.4

0

0.4

0.8

1.20 30 60 90 120 150 180

Position longitudinale (m)

Mom

ent M

y (k

Nm

/m)

Avec jointSans joint

Figure 14. Force axiale dans la section la plus sollicitée

Figure 15. Moment d’ovalisation dans la section la plus sollicitée

Radier Clé

-20

-10

0

10

20

30

40

50-8 -4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Forc

e ax

iale

Nx

(kN

/m)

Avec jointSans joint

-50

-40

-30

-20

-10

0

10

20-8 -4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Forc

e ax

iale

Nx

(kN

/m)

Avec jointSans joint

a) Radier b) Clé

Figure 16. Force axiale de flexion longitudinale

0.1

0.3

0.5

0.7

0.9-8 -4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Mom

ent M

y (k

Nm

/m)

Avec jointSans joint

0.1

0.3

0.5

0.7

0.9-8 -4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Mom

ent M

y (k

Nm

/m)

Avec jointSans joint

a) Radier b) Clé

Figure 17. Moment d’ovalisation le long du tronçon

En ce qui concerne les déplacements de la conduite, nous avons constaté que seuls les déplacements verticaux sont non nuls. En outre, étant donnée la rigidité de la conduite par rapport à celle du sol, nous avons choisi de ne garder pour chaque section de la conduite, qu’un seul point de mesure des déplacements verticaux (la génératrice inférieure du tronçon, Figure 18a).

204

Page 89: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

La différence du champ de déplacement vertical entre un tronçon avec et un tronçon sans les joints est relativement importante. Dans le cas du tronçon avec joints, on peut clairement distinguer des mouvements de corps rigide (déplacements identiques en tout points d’une buse) en plus des déformations de la structure. Ceci génère donc le déplacement maximal globalement plus important dans le cas du tronçon avec joints que dans celui du tronçon sans les joints. Remarquons aussi que malgré une certaine sollicitation des joints situés aux côtes +/- 5,6m, les éléments adjacents à la buse centrale se déplacent pratiquement de la même manière que ceux du tronçon sans joints. Cela traduit un niveau d’encastrement de la conduite relativement important qui empêche les buses de se déplacer en tant que corps rigides. Cependant ce mouvement de corps rigide est prononcé pour la buse centrale malgré son niveau de déformation élevé. Il est généré par un écrasement des joints, qui est illustré sur la Figure 18b par un zoom de la zone entourée sur la Figure 18a. Le déplacement de la coque de part et d’autre du centre de la couronne est inégal traduisant ainsi selon le cas, une compression ou une extension de cette dernière. Cette déformation locale de la couronne permet d’obtenir à l’échelle de la buse un déplacement angulaire du joint. Mais il existe également une compression globale de la couronne au radier (extension à la clé) qui est à l’origine du mouvement global vers le bas de la buse centrale. Cette compression appelée écrasement du joint pourra être quantifiée par la différence d’amplitudes de déplacement des coques situées de part et d’autre de la couronne de joint.

-0.3

-0.25

-0.2

-0.15

-0.1

-0.05

0-8 -4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Dép

lace

men

t ver

tical

(m

m)

Avec jointSans joint -0.25

-0.21

-0.17

-0.13

-0.09

-0.051 1.5 2 2.5

Position longitudinale (m)

Dép

lace

men

t ver

tial

(mm

)

3

Ecrasement du joint

a) Graph général b) Détail de la zone du joint

Figure 18. Déplacement vertical au radier du tronçon

En résumé, lorsque le remblai est homogène en tout point de la tranchée, la charge surfacique crée d’une part une ovalisation de la conduite dans le plan transversal qui s’explique par un accroissement des contraintes verticales dans le remblai à la clé et au radier et une diminution de la contrainte horizontale aux reins. L’essentiel de la valeur de ce moment d’ovalisation se dissipe à l’intérieur de la zone d’influence du chargement au niveau de la conduite. D’autre part, ce même chargement crée une flexion longitudinale de la conduite qui elle se retrouve bien au-delà de la zone d’influence du chargement, mais qui s’annule au niveau des joints. Cette absorption totale du moment de flexion au niveau des joints résulte néanmoins en une déformation aussi bien angulaire que volumique de celui-ci. Elle permet aux buses d’effectuer des mouvements de corps rigide tout en transmettant les efforts d’une buse à l’autre. Cependant, le mouvement d’ensemble des éléments reste relativement limité car l’essentiel de l’action des joints qui le permet est bloquée par le remblai d’enrobage bien

205

Page 90: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

compacté qui crée des conditions d’encastrement relativement sévères. Ces dernières seront fondamentalement modifiées dans le cas où le sol n’est plus homogène mais présente des zones faibles moins compactées. L’objectif des différents cas de figure présentés par la suite sera donc de déterminer la ou les modifications dans le comportement du tronçon suite au changement local des propriétés du remblai, et d’analyser dans quelle mesure cette modification du comportement altère la tenue structurelle de l’ouvrage.

3.2.2 Zone décompactée dans l’assise de la conduite Pour ce type d’hétérogénéité nous observons (Figure 19) que la contrainte verticale dans le massif du sol qui arrive à la clé de la conduite est identique à celle du cas de référence quelle que soit la taille de la zone décompactée. La diffusion des contraintes dans le massif au dessus des buses n’est donc pas modifiée par la présence de ce type d’hétérogénéité.

-100

-80

-60

-40

-20

0-8 -4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Con

trai

nte

(kPa

)

5.63.41.81.00.2ref

Figure 19. Contrainte verticale au dessus de la conduite

En ce qui concerne la distribution de la contrainte verticale en dessous de la conduite (Figure 20), nous observons des différences importantes par rapport à la référence mais qui vont toute dans le même sens. En effet, la contrainte verticale diminue dans la zone décompactée ce qui est cohérent avec les déplacements observés dans cette zone (Figure 21). Au voisinage immédiat de cette zone un pic de contrainte est observé pour toutes les configurations à l’exception de la longueur 3,4m pour laquelle ce pic est masqué par la présence des joints. Au-delà de cette zone limite, le retour à la distribution de référence est très rapide. Par conséquent, dans le cas de l’hétérogénéité dans l’assise de la conduite, la contrainte verticale « contourne » la zone décompactée créant ainsi un lieu de concentration de cette dernière aux limites de la zone décompactée. Les déplacements de la conduite se caractérisent par un accroissement de la valeur maximale de déplacement au radier (nœud situé au droit de la charge) en fonction de la taille de la zone décompactée. Pour les hétérogénéités de faible taille (1,0 et 1,8 mètres) cette augmentation de la valeur maximale s’explique principalement par l’accroissement de la déformation de la conduite. En revanche, pour les hétérogénéités de taille approchant celle de la longueur d’une buse (3,4 et 5,6 mètres), l’augmentation des déplacements de la buse centrale s’explique surtout par une augmentation importante de l’écrasement du joint.

206

Page 91: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

-50

-45

-40

-35

-30

-25

-20-8 -4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Con

trai

nte

(kPa

)

5.63.41.81.00.2ref

Figure 20. Contrainte verticale en dessous de la conduite

-0.35

-0.3

-0.25

-0.2

-0.15

-0.1

-0.05

0-8 -4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Dép

lace

men

t ver

tical

(mm

)

5.63.41.81.00.2ref

Figure 21. Déplacements verticaux du tronçon au radier

En effet, la Figure 22 montre que dans ces cas, le taux d’écrasement du joint devient très élevé. Le cas de la plus petite zone décompactée (0,2 m) est légèrement différent des autres cas dans la mesure

207

Page 92: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

où l’écrasement du joint et le déplacement sont quasi égaux à ceux du cas de référence. Par ailleurs, mise à part la buse centrale, le champ de déplacement dans les autres éléments du tronçon est identique à celui de la référence et ceci quelque soit la taille de la zone décompactée. Conformément à ce à quoi nous pouvions nous attendre en observant l’évolution du champ de déplacement, la flexion longitudinale augmente avec la taille de la zone décompactée jusqu’à ce que celle-ci atteigne la longueur de la buse centrale (Figure 23). La déformation de la buse étant de plus en plus importante, il est normal de trouver des efforts axiaux de plus en plus forts la buse se comportant comme une poutre chargée verticalement et encastrée aux endroits où s’achève la zone décompactée. Ce comportement peut être expliqué par la différence de rigidité entre la zone décompactée et le reste du massif. En revanche, lorsque la taille de la zone décompactée affecte les joints, leur écrasement « compense » la déformation et résulte davantage en un mouvement de la buse comme un corps rigide plutôt qu’un corps déformable. Pour cette raison, l’intensité de l’effort de flexion diminue pour les hétérogénéité 3,4 et 5,6 mètres jusqu’à arriver au niveau de celui de la référence. Pour la zone décompactée de taille très inférieure à celle de la buse (0,2 m) le tronçon se comporte comme un filtre annulant les effets de ces dernières.

0

0.05

0.1

0.15

0.2

0.25

0 1 2 3 4 5 6

Longueur de la zone faible (m)

Ecra

sem

ent d

u jo

int (

%)

Figure 22. Taux d’écrasement du joint en fonction de la taille de l’hétérogénéité

-10

0

10

20

30

40

50

60-8 -4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Forc

e ax

iale

(kN

/m) 5.63.41.81.00.2ref

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8-8 -4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Mom

ent M

y (k

Nm

/m) 5.6

3.41.81.00.2ref

Figure 23. L’effort axial au radier de la conduite

Figure 24. Moment d’ovalisation dans le plan transversal

208

Page 93: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

Enfin, la Figure 24 illustre une diminution du moment d’ovalisation de la conduite dans la zone décompactée. Ceci est cohérent avec les résultats de la littérature et notamment ceux de Benmansour présentés dans le chapitre 4. Ce phénomène s’explique par l’affaiblissement de la force de résistance du sol au radier.

3.2.3 Zone décompactée sous la tranchée De manière similaire à l’hétérogénéité précédente, le champ de contraintes qui s’applique sur la génératrice supérieure du tronçon est identique à celui observé pour le cas de référence (Figure 25). Il n’y a que pour la longueur de la zone décompactée de 14 m que la contrainte verticale est légèrement supérieure à la référence pour les éléments qui s’éloignent de la zone d’influence de la charge.

-100

-80

-60

-40

-20

0-8 -4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Con

trai

nte

(kPa

)

145.63.41.80.2ref

Figure 25. Contrainte verticale dans le massif au dessus de la conduite

Ce résultat peut paraître surprenant au premier abord car une couche plus compressible située sous la tranchée devrait entraîner des déplacements verticaux de l’ensemble de la tranchée qui à leur tour mobilisent des forces de frottement le long des parois de la tranchée. Ces forces de frottement auraient donc pour effet de diminuer par un effet de voûte la charge verticale qui s’applique sur la conduite. Or en observant le champ de contrainte verticale obtenu avant l’application de la charge surfacique (Figure 26), nous pouvons constater une augmentation globale de cette contrainte dans toute la tranchée et plus particulièrement dans la zone décompactée. Le mécanisme de voûte ne s’est donc pas mis en place dans le remblai supérieur. Bien que la hauteur du remblai supérieur soit probablement insuffisante pour permettre au mécanisme de déchargement de se mettre en place, la raison principale réside certainement dans le mode opératoire du calcul numérique. Le fait d’introduire la conduite dans le massif induit un soulagement du sol situé en dessous de celle-ci car le poids de la conduite est inférieur au poids du sol excavé. Même si la zone décompactée se comprime fortement, la tranchée a tendance à se soulever au dessus du lit de pose ce qui augmente la contrainte verticale au lieu de la diminuer (Figure 27). Lorsque la charge est appliquée en surface, le tassement de la zone décompactée est effectivement amplifié mais son influence reste très limitée dans la partie inférieure de la conduite (Figure 28). Le phénomène d’effet de voûte ne se produit donc pas dans le remblai supérieur ce qui explique que le chargement en clé de la conduite soit identique à celui de la référence.

209

Page 94: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

Figure 26. Contrainte verticale avant l’application de la charge en surface, cas 5.6

Figure 27. Déplacement vertical avant l’application de la charge, cas 5.6

Figure 28. Déplacement vertical après l’application de la charge, cas 5.6

210

Page 95: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

Sur la Figure 29 est représentée l’évolution le long du tronçon de la contrainte verticale relevée en dessous de la conduite. Pour les hétérogénéités dont la zone décompactée est inférieure à la longueur d’une buse, cette évolution est très proche de celle observée dans le cas de référence. Les effets du remaniement du fond de fouille ne se font véritablement sentir que si la longueur de la zone affectée dépasse la longueur d’une buse et inclue les joints. Effectivement, la contrainte verticale se trouve augmentée de manière considérable entre les joints et la limite de la zone décompactée. Les pics très localisés que nous pouvons observer au droit des limites de la zone décompactée n’ont pas de réalité physique et ne sont que des phénomènes numériques.

-45

-40

-35

-30

-25-10 -6 -2 2 6 10

Position longitudinale (m)

Con

trai

nte

(kPa

)

145.63.41.80.2ref

Figure 29. Contrainte verticale en dessous de la conduite

Les déplacements du radier de la conduite représentés sur la Figure 30 sont cohérents avec l’évolution de la contrainte verticale en dessous du tronçon. En effet, pour les longueurs de la zone décompactée inférieures à la longueur de la buse, les déplacements verticaux sont identiques à ceux de la référence. La buse centrale joue donc un rôle de filtre des hétérogénéités du fond de la tranchée. En revanche, dans les zones où les contraintes verticales sont augmentées par rapport à la référence, nous observons un soulèvement des buses adjacentes à la buse centrale. Pourquoi ? Du point de vu de la zone décompactée, la conduite et le lit de pose ne font qu’un seul corps rigide. Cet ensemble apparaît comme encastrée lorsqu’il se trouve dans la zone de référence. En revanche, lorsqu’il est au dessus de la zone décompactée, il a suffisamment de liberté pour épouser les mouvements du sol. Or celui-ci ayant un comportement élastique, tasse au droit de la charge mais se soulève ailleurs. Le maximum de ce mouvement ascendant est obtenu aux joints c’est-à-dire aux endroits les plus flexibles de l’ensemble conduite – lit de pose.

211

Page 96: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

En ce qui concerne la flexion de la conduite, la Figure 31 montre que la valeur maximale augmente légèrement par rapport à la référence pour tous les cas envisagés. Cette augmentation est de même amplitude pour tous les cas à l’exception de la longueur de la zone décompactée la plus grande. Pour ce dernier cas, les effets de l’hétérogénéité concernent toutes les buses bien que la zone d’influence de la charge ne se situe qu’au niveau de la buse centrale. Un résultat similaire est observé pour le moment d’ovalisation My représenté sur la Figure 32. En effet, le moment est augmenté par la présence de l’hétérogénéité sur toute la partie du tronçon située au dessus du sol remanié. Cette augmentation s’explique par l’augmentation de la contrainte verticale dans le lit de pose déjà constaté sur la Figure 29.

-0.3

-0.25

-0.2

-0.15

-0.1

-0.05

0

0.05

0.1-10 -6 -2 2 6 10

Position longitudinale (m)

Dép

lace

men

t ver

tical

(mm

)

145.63.41.80.2ref

Figure 30. Déplacement vertical au radier

-15

-5

5

15

25

35

45

55-12 -8 -4 0 4 8 12

Position longitudinale (m)

Forc

e ax

iale

(kN

/m) 14

5.63.41.80.2ref

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8-8 -4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Mom

ent M

y (k

Nm

/m) 14

5.63.41.80.2ref

Figure 31. Force axiale au radier Figure 32. Moment d’ovalisation au radier

212

Page 97: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

3.2.4 Zone décompactée dans l’enrobage Ce cas de figure est certainement le cas le plus complexe parmi ceux envisagés. Sa différence réside principalement dans le champ de contraintes qui s’applique en clé de la conduite. Contrairement à tous les cas précédents, la distribution de la contrainte verticale est ici non seulement très différente de celle de la référence, mais également peut être variable selon la taille de la zone décompactée. Ceci est illustré sur la Figure 33 où, pour plus de lisibilité, la distribution de la contrainte verticale le long du tuyau est donnée sur une longueur centrale de 7 mètres du tronçon. Au-delà, pour tous les cas de figure la contrainte verticale reste constante et égale à celle de la référence. Cette distribution inégale conduit inévitablement à un comportement plus complexe du tronçon. Le cas particulier de la très petite zone décompactée (0,2m) est qualitativement différent des autres cas et sera traité à part. De manière générale pour toutes les autres configurations, nous pouvons faire plusieurs observations communes. La contrainte maximale est atteinte au droit de la charge et son niveau dépasse celui de la contrainte de référence. L’augmentation de contrainte est progressive jusqu’à la longueur d’hétérogénéité 3,4 m à partir de laquelle elle se stabilise. La dissipation de cet accroissement de contrainte sous la charge se fait progressivement sur la longueur de la zone décompactée. Les pics de contrainte observés aux limites de cette zone sont purement numériques n’ayant pas de signification physique.

-100

-80

-60

-40

-20

0-3.5 -2.5 -1.5 -0.5 0.5 1.5 2.5 3.5

Position longitudinale (m)

Con

trai

nte

(kPa

)

5.63.41.81.00.2ref

Figure 33. Contrainte verticale au dessus de la conduite

Pour le cas de la première hétérogénéité l = 0,2m, l’apparente diminution de contrainte dans la zone décompactée n’a pas de réalité physique. Il s’agit de mêmes variations de contrainte observées dans tous les cas aux frontières de la zone décompactée. Ces variations étant dues au mode de calcul des contraintes, elles ne traduisent que le changement brutal, d’un volume

213

Page 98: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

élémentaire à un autre, des propriétés du massif. Pour ce cas précis, la position très rapprochée des points de mesure de contrainte fait en sorte que amplitude de cette variation est accentuée par rapport aux autres. Le modèle 3D atteint ici ses limites puisqu’il n’y a aucun point pouvant donner la valeur hors pic. Il aurait donc fallu réaliser à cet endroit un maillage beaucoup plus fin, pour que le modèle puisse donner un résultat pertinent qui, compte tenu des autres résultats, se trouverait vraisemblablement très près de la référence. Ceci nécessiterait un temps de calcul extrêmement long pour une configuration qui, par sa pertinence, ne le justifiait pas. Les effets des hétérogénéités à la clé sont limités à la buse centrale dans la mesure où ils sont déjà invisibles pour le cas 3,4m. Cette observation est à mettre en relation avec la longueur de la zone d’influence d’une charge en surface à la profondeur de 1,05m. Théoriquement en 2 dimensions, la distribution dans le massif d’une charge concentrée est donnée par la théorie de Boussinesq. En première approximation, cette distribution peut être caractérisée par une pente de 3 pour 2 (56° par rapport à l’horizontale). Ainsi en clé de la conduite, la largeur de la zone d’influence de la charge serait selon Boussinesq de 1,6 m. Le calcul numérique 3D et en présence de la conduite montre que cette largeur vaut environ 2,4 m. Ainsi le mécanisme de diffusion de la charge devient clair. En présence d’une zone décompactée dans l’enrobage, la conduite apparaît comme une poutre encastrée dans la partie homogène du remblai et les contraintes se concentrent sur la partie susceptible de se déformer davantage. Plus cette dernière est large, plus l’augmentation de contrainte est importante jusqu’à atteindre le maximum quand la largeur de la zone décompactée est égale à la largeur de la zone d’influence de la charge. Ainsi pour les zones faibles plus étendues, le maximum de contrainte n’évolue plus avec la longueur de la zone décompactée. Par ailleurs, l’augmentation de la contrainte dans la zone décompactée est typiquement le résultat de l’interaction sol-conduite. En effet, un calcul de diffusion d’une charge surfacique dans le massif homogène et hétérogène mais sans tronçon, montre que la simple présence d’une hétérogénéité sans conduite diminue au lieu d’augmenter la contrainte verticale (Figure 34).

-100

-80

-60

-40

-20

0-8 -4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Con

trai

nte

vert

ical

e (k

Pa)

RefZone faible 1,8m

-100

-80

-60

-40

-20

0-8 -4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Con

trai

nte

vert

ical

e (k

Pa)

Avec tronçonSans tronçon

Figure 34. Diffusion de la contrainte verticale dans le massif (sans la conduite)

Figure 35. Diffusion de la contrainte dans le remblai hétérogène (l=1,8m)

Ceci est d’ailleurs cohérent avec la loi élastique de Hooke où une diminution du module de Young dans une partie du massif s’accompagne d’une diminution de la contrainte afin de

214

Page 99: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

maintenir la continuité du champ de déformations. Cependant, lorsque cette hétérogénéité est associée à la conduite (Figure 35), la contrainte augmente pratiquement de 100 % alors que dans un cas sans hétérogénéité l’introduction de la conduite modifie la contrainte de manière négligeable (Figure 13a). La distribution de la contrainte verticale dans le lit de pose, donnée sur la Figure 36, s’explique en grande partie par celle observée en clé du tronçon. L’accroissement de contrainte dans la zone hétérogène n’est pas étranger au même phénomène qui se produit de l’autre côté de la buse. Plus la charge est importante à la clé, plus elle est transmise au radier. Cependant, sa dissipation n’est plus progressive sur la longueur de la zone décompactée mais reste constante. La buse a donc joué un rôle de filtre atténuant les pics et redistribuant les contraintes de manière uniforme.

-50

-45

-40

-35

-30

-25

-20-6 -2 2 6

Position longitudinale (m)

Con

trai

nte

(kPa

)

5.63.41.81.00.2ref

Figure 36. Contrainte verticale en dessous de la conduite

Notons également que lorsque la longueur de la zone décompactée dépasse celle de la buse centrale, la charge se concentre davantage sur la buse centrale libérant ainsi les éléments adjacents. Ceci est la conséquence de la déformation des joints donnée sur la Figure 38 où est représenté l’écrasement moyen de la couronne de joint. Pour la longueur de la zone décompactée 5,6m l’écrasement est beaucoup plus important que celui de la référence. Ce cas ne fait qu’illustrer la tendance générale du phénomène pour toutes les configurations : plus la zone décompactée est proche des joints, plus ils sont sollicités, et plus ils ont de possibilité de se déformer soulageant ainsi les buses adjacentes. Ce phénomène explique également les déplacements verticaux de la Figure 37 où on constate clairement pour le cas 5,6m moins de déplacement des éléments adjacents et un accroissement

215

Page 100: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

de celui-ci sur l’élément central. Ce résultat est cohérent avec la diminution des contraintes verticales à ces endroits dans le lit de pose. Bien que la buse centrale se déplacent le plus dans le cas 5,6m, compte tenu de l’écrasement du joint (Figure 38), elle ne se déforme pas le plus mais descend dans son ensemble. Par ailleurs, l’hétérogénéité 0,2m est complètement filtrée par la buse centrale et ne produit aucune influence sur les déplacements du tronçon. Pour les cas 1,0m et 1,8m l’écrasement du joint est quasi identique et légèrement inférieur à celui de la référence car en dehors de la zone décompactée le tronçon apparaît encastré. Ceci explique que le déplacement maximal de la buse est à son tour inférieur à la référence.

-0.3

-0.25

-0.2

-0.15

-0.1

-0.05

0-8 -4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Dép

lace

men

t ver

tical

(mm

)

5.63.41.81.00.2ref

Figure 37. Déplacement vertical du radier de la conduite

0

0.1

0.2

0.3

0.4

0 1 2 3 4 5 6

Longueur de la zone faible (m)

Ecra

sem

ent d

u jo

int (

%)

Figure 38. Ecrasement du joint en fonction de la taille de la zone décompactée

En ce qui concerne la flexion longitudinale, la Figure 39 montre la cohérence entre la force axiale et la contrainte verticale exercée à la clé du tronçon. En effet, la valeur maximale de la

216

Page 101: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

force axiale augmente avec la longueur de la zone décompactée. Comme dans le cas des contraintes, l’accroissement de la flexion par rapport à la référence s’atténue progressivement pour disparaître aux limites de la zone décompactée. Lorsque la longueur de la zone décompactée dépasse la longueur de la buse, la sollicitation des joints permet de diminuer l’effort de flexion longitudinale et de transférer partiellement ce dernier vers les éléments adjacents.

-20

-10

0

10

20

30

40

50

60-8 -4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Forc

e ax

iale

(kN

/m) 5.6

3.41.81.00.2ref

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8-8 -4 0 4 8

Position longitudinale (m)M

omen

t My

(kN

m/m

) 5.63.41.81.00.2ref

Figure 39. Force axiale au radier du tronçon

Figure 40. Moment d’ovalisation au radier du tronçon

-16

-15

-14

-13

-12

-11

-10

-9

-8

-7-4 -3 -2 -1 0 1 2 3 4

Position longitudinale (m)

Con

trai

nte

(kPa

) 5.63.41.81.00.2ref

Figure 41. Contrainte horizontale dans le massif au niveau des reins

La Figure 40 représente le moment d’ovalisation relevé au radier le long de la conduite. Ses valeurs diminuent dans la zone décompactée pour retrouver les valeurs de la référence à l’extérieur de celle-ci. Ce résultat parait incohérent avec les contraintes verticales puisque à cet endroit ces dernières augmentent aussi bien à la clé et qu’au radier. Le moment

217

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

d’ovalisation devrait donc augmenter au lieu de diminuer. Les résultats observés ne peuvent s’expliquer que par l’évolution de la contrainte horizontale aux reins représentée sur la Figure 41. En effet, dans le cas de référence la contrainte horizontale aux reins diminue dans la zone d’influence de la charge. Lorsque la zone décompactée se superpose à la zone d’influence de la charge, cette diminution est beaucoup moins importante dans toute la zone décompactée. Comme la contrainte horizontale s’oppose aux efforts d’ovalisation, le moment My est d’autant diminué.

3.2.5 Synthèse Dans les paragraphes précédents nous avons vu de quelle manière un type d’hétérogénéité modifie la distribution des contraintes et le comportement de la conduite par rapport au cas de référence d’un remblai homogène. Une constatation commune à tous les cas de figures est que les efforts internes sont maximaux dans la même section du tronçon quelque soit l’hétérogénéité, à savoir celle située au droit de la charge. Ceci permet donc de comparer directement les effets de différentes hétérogénéités afin de mettre en évidence les configurations les plus défavorables. La Figure 42 montre comment évolue la force de flexion longitudinale et le moment d’ovalisation en fonction de la taille de la zone décompactée. En ce qui concerne la flexion, l’hétérogénéité de l’enrobage provoque les efforts les plus élevés notamment lorsque la longueur de la zone décompactée est égale à la longueur d’une buse. La force axiale présente en effet un pic pour la valeur de 3,4m. Une tendance similaire est également observée pour l’hétérogénéité dans l’assise de la conduite, mais le pic est atteint lorsque la longueur de la zone décompactée est celle d’une demi buse. En revanche, dans le cas du remaniement du fond de fouille, plutôt qu’une valeur pour un pic de force, il existe une valeur seuil de la longueur de la zone décompactée au-delà de laquelle les efforts de flexion ne varient plus (longueur d’une demi buse). Naturellement, nous pouvons imaginer qu’une telle valeur seuil existe également pour les deux autres types d’hétérogénéités, mais les calculs que nous avons pu réaliser ne permettent pas de tirer une telle conclusion. Pour affiner et compléter cette analyse, il serait donc intéressant d’envisager d’autres calculs pour des longueurs d’hétérogénéités plus importantes.

30

35

40

45

50

550 2 4 6

Longueur de la zone faible (m)

Forc

e ax

iale

(kN

/m)

Sol remaniéEnrobageAssise

0.6

0.65

0.7

0.75

0.80 2 4 6

Longueur de la zone faible (m)

Mom

ent d

'ova

lisat

ion

(kN

m/m

)

Sol remaniéEnrobageAssise

a) Force axiale au radier b) Moment d’ovalisation au radier

Figure 42. Efforts internes maximaux en fonction du type d’hétérogénéité

218

Page 103: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

Conformément aux conclusions des paragraphes précédents, ces résultats sont à relier avec ceux de la Figure 43 illustrant le comportement du joint en fonction du type d’hétérogénéité. L’augmentation de leur déformation permet notamment de comprendre la réduction de la valeur maximale de la force de flexion et l’existence d’un pic. Par ailleurs, l’existence d’une valeur seuil au-delà de laquelle la variation de la géométrie de l’hétérogénéité n’influence plus les efforts est davantage caractéristique du moment d’ovalisation. Pour le remaniement du fond de fouille, les variations du moment d’ovalisation sont identiques à celles de la force axiale c'est-à-dire une augmentation de la valeur maximale dans un premier temps puis une valeur constante au-delà d’une demi buse. En revanche, si l’hétérogénéité est dans l’assise ou dans l’enrobage de la conduite, le moment d’ovalisation diminue dans un premier temps puis reste constant pour des hétérogénéités ayant une zone décompactée supérieure à la longueur d’une buse. Un résultat surprenant peut être observé pour le cas d’enrobage où le moment d’ovalisation passe par un minimum avant d’atteindre le palier final. Ceci suggérerait donc l’existence d’une valeur optimale du module de sol vis-à-vis du comportement transversal. Néanmoins, d’autres calculs dans cette zone sont à envisager avant de pouvoir confirmer une telle hypothèse.

0.1

0.2

0.3

0.4

0 2 4 6Longueur de la zone faible (m)

Ecra

sem

ent d

u jo

int (

%)

Sol remaniéEnrobageAssise

Figure 43. Ecrasement du joint en fonction du type d’hétérogénéité

3.3 - Configuration B : charge et hétérogénéité alignés avec joint Dans cette section seront donnés les résultats d’une variante des calculs précédents qui consiste à appliquer la charge surfacique au droit d’un joint plutôt qu’au droit du milieu d’une buse. La géométrie des différentes zones faibles est quasi identique à celles envisagées précédemment (Tableau 10), le centre de ces zones étant à présent aligné avec le centre de l’un des joints du tronçon. Puisque les mécanismes mis en jeu sont comparables à ceux déjà décrit auparavant, les résultats seront donnés de manière très synthétisée. Il s’agit de comprendre la modification du comportement du tronçon lorsque le centre de l’hétérogénéité et le point d’application de la charge changent de position. Comme dans la section précédente, nous allons brièvement nous arrêter sur le comportement du cas de sol homogène avant de le garder comme référence pour tous les autres cas.

219

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

3.3.1 Cas de référence La diffusion des contraintes dans le remblai dans la configuration B se fait de manière très similaire à celle de la configuration A. En effet, les contraintes verticales et horizontales autour de la conduite sont distribuées de manière identique mise à part la contrainte verticale dans le lit de pose. Dans le cas A, l’accroissement de cette contrainte dû à la charge en surface est quasiment constant sous la buse chargée puis se dissipe le long des buses adjacentes. Dans le cas B, le centre de la zone d’influence de la charge se trouve aligné avec le joint et la dissipation commence immédiatement de part et d’autre de ce dernier. Ceci est illustré sur la Figure 44 où la distribution de la configuration A est décalée de manière à aligner les chargements. Notons cependant, que la valeur maximale de la contrainte dans la configuration B est légèrement supérieure à celle de la configuration A même si sa dissipation longitudinale est plus rapide. Les perturbations numériques des résultats au voisinage des joints rendent difficile la lecture de sa véritable valeur maximale. Néanmoins cette dernière est de l’ordre de 40 kPa contre 37 kPa pour la configuration A.

-50

-45

-40

-35

-30

-25

-20-12 -8 -4 0 4 8 12

Position longitudinale (m)

Con

trai

nte

(kPa

)

Configuration A

Configuration B

Figure 44. Contrainte verticale dans le lit de pose

-0.4

-0.3

-0.2

-0.1

0-12 -8 -4 0 4 8 12

Position longitudinale (m)

Dép

lace

men

t ver

tical

(m

m)

Configuration AConfiguration B

-0.36

-0.32

-0.28

-0.241 1.5 2 2.5

Position longitudinale (m)

Dép

lace

men

t ver

tical

(m

m)

a) Graphe général b) Zoom

α

Figure 45. Déplacement au radier En conséquence, les déplacements de la conduite sont modifiés par rapport à ce que nous avons pu observer dans la configuration A. La Figure 45a montre que la valeur maximale des déplacements est augmentée de 30% tandis que les buses se déplacent en se déformant très peu. Le comportement caractéristique du joint n’est plus l’écrasement mais la rotation comme

220

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

le montre la Figure 45b. Les deux coques placées de part et d’autre de la couronne du joint subissent des mouvements de rotation dans le sens opposé l’une de l’autre. Ce mouvement de rotation peut être mesuré par l’angle α défini sur la Figure 45b. En ce qui concerne la flexion longitudinale, nous avons déjà montré dans le chapitre 4 que le chargement au dessus du joint change considérablement le comportement du tronçon. Dans la configuration A, l’essentiel de la flexion était concentrée sur la buse centrale tandis que la Figure 46 montre que dans la configuration B, l’effort de flexion est reparti quasi équitablement sur les deux buses adjacente au joint chargé. Cette répartition de la force axiale a pour conséquence une diminution de près de 450 % de sa valeur maximale. Il s’agit donc de la configuration où le joint joue le rôle décisif dans le comportement du tronçon.

-13

-8

-3

2

7

12-12 -8 -4 0 4 8 12

Position longitudinale (m)

Forc

e ax

iale

(kN

/m)

-6

-2

2

6

10-12 -8 -4 0 4 8 12

Position longitudinale (m)

Forc

e ax

iale

(kN

/m)

a) Radier b) Clé

Figure 46. Force de flexion longitudinale dans la conduite

En outre, si les buses adjacentes subissent une légère flexion, celle-ci est de signe opposé par rapport à la configuration A, la fibre tendue se trouvant désormais à la clé de la conduite. Le moment maximal est toujours obtenu au radier mais il a pour action de comprimer la section à cet endroit. Si les efforts sont suffisamment élevés, la rupture circulaire s’amorcera donc à la clé et non au radier. Du point de vue mécanique, il est donc pertinent de relever les résultats de la force axiale à la clé. Cependant, l’objectif de cette partie étant la comparaison du comportement par rapport à la configuration A, pour plus de clarté nous avons choisi de continuer à présenter les résultats au radier de la conduite. La distribution de la force axiale à la clé suit bien entendu les évolutions dans le même sens que celles au radier. Par ailleurs, conformément à ce qui a été observé dans la configuration A et compte tenu de la rotation des buses, la force axiale devrait fortement diminuer au voisinage des joints. Or si cela est effectivement le cas pour l’une des buses concernées, la force axiale de traction augmente localement dans l’autre buse créant ainsi une discontinuité de la force axiale. Cette fois le phénomène n’est pas de nature numérique mais est une conséquence directe de modélisation de la collerette. En effet, l’effort de traction apparaît localement sur la buse présentant le changement brutal de géométrie afin de représenter la tulipe du tuyau. La force de traction s’explique par une mise en butée locale du sol qui modifie le comportement du tronçon à cet endroit. Le phénomène est d’autant plus accentué que la charge se trouve au droit de cette partie de la buse. Dans le cas réel, le phénomène est probablement négligeable étant donnée que le changement de la géométrie se fait de manière progressive.

221

Page 106: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

La répartition du moment d’ovalisation de la conduite (Figure 47) est en revanche très similaire à celui de la configuration A : seule la valeur maximale est atténuée d’environ 10 % par rapport au cas A. Celle-ci étant bien entendu relevée dans la section située au droit de la charge, c'est-à-dire au niveau du joint, la distribution du moment est légèrement perturbée par la présence de ce dernier. Rappelons que les résultats de la configuration A ont été décalés afin d’aligner les sections se trouvant au droit de la charge.

0.1

0.3

0.5

0.7

0.9-12 -8 -4 0 4 8 12

Position longitudinale (m)

Mom

ent M

y (k

Nm

/m) Configuration A

Configuration B

0.1

0.3

0.5

0.7

0.9-12 -8 -4 0 4 8 12

Position longitudinale (m)M

omen

t My

(kN

m/m

) Configuration AConfiguration B

a) Radier b) Clé

Figure 47. Moment d’ovalisation de la conduite

3.3.2 Hétérogénéité de l’assise Les résultats pour ce type d’hétérogénéité sont donnés sur les Figure 48 à Figure 51. Les déplacements verticaux augmentent avec la taille de la zone décompactée puis se stabilisent vers la longueur de la zone décompactée l=3,5m (environ 37 % d’augmentation par rapport à la référence pour l= 5,5m). La force axiale augmente également tant que la longueur de la zone décompactée ne dépasse pas celle de la buse (86 et 110 % pour les buses adjacentes et pour l=3,5m), tandis que le moment d’ovalisation globalement diminue lorsque la longueur de la zone décompactée augmente. Rappelons que dans la configuration A, l’augmentation continue des déplacements atteignait 17 % pour l=5,6m (Figure 21) et l’augmentation de la force axiale sur la buse centrale n’était que de 12 % pour l=1,8m (Figure 23). Du point de vue mécanique, le comportement du tronçon en fonction de la longueur de la zone décompactée est très proche de celui de la configuration A. En effet, c’est toujours la différence de rigidités entre le sol homogène et la zone décompactée qui est à l’origine de ces résultats mais cette fois, le mécanisme mis en jeu est différent : le comportement du tronçon est une conséquence de la possibilité de rotation du joint. Vu depuis le joint, la conduite apparaît encastrée lorsqu’elle se trouve dans le sol homogène et presque libre au dessus de la zone décompactée. La rotation du joint est facilitée d’autant plus que la longueur de cette partie libre est importante. Par exemple, l’hétérogénéité 0,2m n’a pas d’influence sur les déplacements alors qu’elle autorise la rotation du joint au même titre que les autres hétérogénéités. Pour que le joint puisse pleinement fonctionner en rotation, il est nécessaire que les buses adjacentes puissent également se déplacer plus facilement. A partir d’une longueur seuil de la zone décompactée (environ 3m sur la Figure 49), la rotation maximale autorisée par la géométrie des buses est atteinte et la taille de la zone

222

Page 107: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

décompactée n’influence plus la rotation du joint. Les déplacements verticaux (Figure 48), la déformation des buses adjacentes et la force axiale (Figure 50) n’augmentent plus. Dans le plan transversal, la conduite suit le même mécanisme d’ovalisation que celui de la configuration A : une diminution du moment maximal dans la zone décompactée grâce à la diminution de la contrainte verticale dans le lit de pose (Figure 51).

-0.5

-0.4

-0.3

-0.2

-0.1

0-4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Dép

lace

men

t ver

tical

(m

m) 5.5

3.51.90.2ref

10

12

14

16

18

0 1 2 3 4 5 6

Longueur de la zone faible (m)A

ngle

de

rota

tion

(0.0

01 d

egré

s)Figure 48. Déplacement vertical du radier Figure 49. Rotation du joint

-30

-20

-10

0

10-4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Forc

e ax

iale

(kN

/m)

5.53.51.90.2ref

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7-4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Mom

ent d

'ova

lisat

ion

(kN

m/m

)

5.53.51.90.2ref

Figure 50. Force axiale au radier Figure 51. Moment d’ovalisation au radier Par ailleurs, l’influence de l’hétérogénéité sur la force axiale parait plus important que son influence sur les déplacements. Cependant, cette augmentation de la force de flexion est toute relative compte tenu de sa valeur maximale bien inférieure à celle de la configuration A (20 kN/m au lieu de 45 kN/m pour la configuration A). Parallèlement, la valeur maximale du déplacement est supérieure dans la configuration B. Par conséquent, même si le moment de flexion longitudinal au milieu des buses adjacentes augmente sensiblement, le mode de « ruine » du tronçon chargé au droit du joint sera davantage exprimé en termes de déplacements (ouverture des joints) qu’en termes d’effort de traction (fissure circulaire).

3.3.3 Remaniement du fond de fouille Lorsque la zone décompactée se trouve sous la tranchée, l’influence des hétérogénéités sur la conduite sont illustrées sur les Figure 52 à Figure 55. Qualitativement, le déplacement vertical maximal augmente avec la taille de la zone décompactée de la même manière que précédemment mais d’amplitude plus faible (environ 21 % pour l=5,5m, Figure 52).

223

Page 108: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

Néanmoins, il avait tendance à diminuer dans la configuration A. L’effet filtre que joue la buse centrale de la configuration A est remplacé par la rotation du joint légèrement facilitée par la présence d’une couche compressible sous la tranchée (Figure 53). Comme dans le cas précédent, l’effet de l’hétérogénéité sur la rotation du joint atteint un palier à partir de la longueur 3,5m ce qui correspond également à la valeur pour laquelle le déplacement vertical atteint sa valeur maximale. Ajoutons qu’également dans le cas présent, les buses se déplacent à la manière de corps rigides avec très peu de déformation des fûts. Comparée au cas de référence, la force axiale augmente avec la longueur de l’hétérogénéité de manière très importante (de 75 à 100 % d’augmentation selon la buse pour l=3,5m, Figure 54 ) alors qu’elle n’était que de 12 % dans la configuration A. Cependant, de la même manière que pour l’assise, la conséquence sur la conduite de la flexion est moins importante que celle des déplacements compte tenu des valeurs faibles pour le cas de référence. En ce qui concerne le moment d’ovalisation, l’effet de l’hétérogénéité est négligeable quelque soit la longueur de la zone décompactée.

-0.5

-0.4

-0.3

-0.2

-0.1

0-4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Dép

lace

men

t ver

tical

(m

m) 5.5

3.51.90.2ref

10

12

14

16

18

0 1 2 3 4 5 6

Longueur de la zone faible (m)

Ang

le d

e ro

tatio

n (0

.001

deg

rés)

Figure 52. Déplacement vertical Figure 53. Rotation du joint

-25

-20

-15

-10

-5

0

5

10-4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Forc

e ax

iale

(kN

/m)

5.53.51.90.2ref 0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7-4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Mom

ent d

'ova

lisat

ion

(kN

m/m

)

5.53.51.90.2ref

Figure 54. Force axiale au radier Figure 55. Moment d’ovalisation au radier

3.3.4 L’hétérogénéité dans la zone d’enrobage Les résultats de ce cas de figure sont donnés sur les Figure 56 à Figure 59. Globalement, nous observons le même comportement que dans les deux cas précédents pour les déplacements (une augmentation d’environ 36 % pour l=5,5m), la force axiale (augmentation de 130 et 150

224

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

% selon la buse pour l=5,5m) et une modification négligeable des moments d’ovalisation dans la zone hétérogène.

-0.5

-0.4

-0.3

-0.2

-0.1

0

0.1-8 -4 0 4 8 12

Position longitudinale (m)

Dép

lace

men

t ver

tical

(m

m)

5.51.90.2ref 10

12

14

16

18

20

0 1 2 3 4 5 6

Longueur de la zone faible (m)

Ang

le d

e ro

tatio

n (°

)

Figure 56. Déplacement vertical Figure 57. Rotation du joint

-30

-20

-10

0

10-4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Forc

e ax

iale

(kN

/m)

5.51.90.2ref

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7-4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Mom

ent d

'ova

lisat

ion

(kN

m/m

)5.51.90.2ref

Figure 58. Force axiale au radier Figure 59. Moment d’ovalisation au radier Par ailleurs, l’accroissement de la force axiale est cette fois bien plus importante ce qui est dû à la concentration des contraintes en clé de la conduite dans la zone décompactée déjà identifiée lors de l’analyse du même cas dans la configuration A. Rappelons que dans cette configuration, ce même mécanisme est également à l’origine de l’augmentation importante de la flexion (25 % pour l’enrobage contre 12 % pour les deux autres cas, Figure 42a).

3.3.5 Synthèse Contrairement à la configuration A, tous les cas envisagés dans la configuration B donnent globalement les mêmes résultats ce qui renvoie à un même mécanisme physique. D’abord nous constatons une augmentation des déplacements verticaux avec l’augmentation de la longueur de la zone hétérogène. Les valeurs maximales de déplacement sont supérieures à la référence de 37, 36 et 21 % respectivement pour l’assise, l’enrobage et le remaniement du fond de fouille. Ainsi, le remaniement du fond de fouille semble avoir le moins de conséquence sur le déplacement du tronçon tandis que les deux autres hétérogénéités produisent des effets comparables. La Figure 60 montre que quel que soit le type de l’hétérogénéité, le déplacement atteint quasiment la totalité de sa valeur maximale lorsque la longueur de la zone décompactée est égale à la longueur de la buse. Cette conclusion est

225

Page 110: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

moins évidente pour le cas de l’enrobage où la valeur l=3,5m manquante fausse quelque peu l’allure de la courbe.

0.3

0.35

0.4

0.45

0.5

0 1 2 3 4 5 6

Longueur de la zone faible (m)

Dép

lace

men

t max

imal

(m

m)

EnrobageSol remaniéAssise

10

12

14

16

18

20

0 1 2 3 4 5 6

Longueur de la zone faible (m)

Ang

le d

e ro

tatio

n (0

.001

deg

rés)

EnrobageSol remaniéAssise

Figure 60. Déplacement vertical maximal en fonction du type d’hétérogénéité

Figure 61. Rotation du joint en fonction du type d’hétérogénéité

Le palier de la courbe représentant le déplacement maximal en fonction de la longueur de la zone décompactée s’explique par le palier de la courbe représentant l’angle de rotation du joint en fonction de cette même longueur de la zone décompactée (Figure 61). Si l’angle de rotation des buses présente la même évolution que le déplacement maximal, cependant, il ne permet pas de remonter immédiatement au déplacement sans faire intervenir l’interaction sol – conduite. Par exemple, pour l’hétérogénéité 5,5m, la valeur de l’angle de rotation pour l’enrobage est supérieure à celle obtenue pour l’assise alors que le déplacement de la conduite pour le cas de l’assise est supérieur au déplacement de celle-ci dans le cas de l’hétérogénéité dans l’enrobage. Notons que l’angle de rotation que nous utilisons ici se rapproche de l’angle de rotation tel que nous l’avons défini dans le chapitre 3. Il est donc possible de vérifier, à posteriori, que la rotation des joints pour les conduites enterrées est extrêmement faible par rapport aux amplitudes envisagées lors des essais en laboratoire. Ensuite, nous observons une augmentation très forte des valeurs maximales de la force axiale par rapport à la valeur de référence (entre 76 et 150 % selon le cas, Figure 62a). Les allures des courbes sont similaires à celles de la configuration A. Néanmoins, si la valeur maximale de la force est atteinte pour les hétérogénéités dans l’assise et sous la tranchée (lorsque la longueur de la zone décompactée égale à la longueur de la buse), le cas de l’enrobage semble présenter une valeur maximale au-delà des hétérogénéités considérées. En outre, les valeurs de la force axiale dans la configuration B restent plus faibles que celles de la configuration A. Ceci est illustré sur la Figure 63a pour le cas de l’hétérogénéité dans l’enrobage. Enfin, dans la configuration B, le moment d’ovalisation est très peu affecté par rapport au cas de référence. La Figure 62b montre que dans la plupart des cas, le moment d’ovalisation a tendance à diminuer par rapport à la référence mais cette diminution est beaucoup moins importante que celle de la configuration A. Malgré cela, la Figure 63b montre que le moment d’ovalisation dans la configuration B reste inférieur à celui de la configuration A.

226

Page 111: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

10

15

20

25

300 1 2 3 4 5 6

Longueur de la zone faible (m)

Forc

e ax

iale

(kN

/m)

Sol remaniéEnrobageAssise

0.35

0.45

0.55

0.65

0.750 1 2 3 4 5 6

Longueur de la zone faible (m)

Mom

ent d

oval

isat

ion

(kN

m/m

)

Sol remaniéEnrobageAssise

a) Force axiale à la clé b) Moment d’ovalisation au radier

Figure 62. Efforts internes maximaux en fonction de la longueur d’hétérogénéité

0

10

20

30

40

50

600 2 4 6

Longueur de la zone faible (m)

Forc

e ax

iale

(kN

/m)

Configuration AConfiguration B

0.45

0.55

0.65

0.75

0.850 1 2 3 4 5 6

Longueur de la zone faible (m)

Mom

ent d

oval

isat

ion

(kN

m/m

)

A : Sol remanié B : Sol remaniéA : Enrobage B : Enrobage

a) Force axiale (Enrobage) b) Moment d’ovalisation

Figure 63. Comparaison configuration A vs. B

3.4 - Conclusions et limites de la démarche

3.4.1 Conclusion sur les mécanismes et états limites Dans le chapitre 4 nous avons montré comment l’introduction d’une hétérogénéité dans le remblai de la tranchée peut conduire au changement du mécanisme de rupture. Dans cette section, nous avons envisagé trois types d’hétérogénéités dans deux configurations différentes. Ces hétérogénéités entraînent bien sûr des modifications dans la distribution des contraintes dans le sol qui se répercutent sur la distribution des efforts internes dans le tronçon. A la lumière des résultats présentés dans cette section, nous pouvons imaginer deux grands modes de rupture : rupture de service et rupture structurelle. La rupture de service se produit lorsque les déplacements des buses dépassent des valeurs admissibles pour un bon fonctionnement de l’ouvrage. Ce cas de figure est caractéristique de la configuration B où nous observons dans certains cas, un accroissement des déplacements de près de 40 % alors que dans la configuration A ils ne dépassent pas 20 %. Le dysfonctionnement du tronçon attendu affectera les joints et apparaîtra par exemple sous forme de perte d’étanchéité par l’ouverture des joints.

227

Page 112: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

La rupture structurelle est atteinte lorsque les contraintes de traction dans l’épaisseur de la conduite dépassent la valeur de résistance du béton (armé dans le sens longitudinal ou non armé dans le sens circonférentiel). Les calculs montrent que l’introduction de l’une des trois types d’hétérogénéités, en général affecte très peu l’ovalisation de la conduite, mais accentue la flexion longitudinale. Les premiers calculs réalisés à la fin du chapitre 4 montrent que dans le cas d’un sol homogène, le mécanisme de rupture est la flexion circonférentielle (ovalisation) appréhendée par le moment d’ovalisation My. Dans ce cas, la contrainte circonférentielle (ou orthoradiale) σθ atteint sa limite de traction à la clé de la conduite (fissure longitudinale). Rappelons aussi que la flexion longitudinale engendre une contrainte axiale σx de traction dans la partie inférieure de la section donnant lieu à un moment local Mx négligeable devant un moment global capturé par la force axiale Nx (Figure 64). Pour le cas de référence, cette contrainte axiale est plus faible que la contrainte circonférentielle. Mais dans la mesure où la présence d’une hétérogénéité a tendance à diminuer le moment d’ovalisation et à augmenter la force axiale, il est légitime de s’attendre à un changement de mécanisme de rupture (limite de traction atteinte par σx au radier plutôt que par σθ à la clé).

a) Plan transversal b) Plan longitudinal

My

σθ > 0 σx > 0

Mx

Nx

Figure 64. Schéma des contraintes principales dans une section de la buse

Bien que l’accroissement de la force axiale soit le plus important dans la configuration B, compte tenu des valeurs absolues de la force assez faibles, il est clair que cette configuration aura très peu de chance d’aboutir à une rupture structurelle avant un désordre de service. En revanche, l’augmentation de la force axiale dans la configuration A, bien que plus timide (entre 12 et 25 %), peut s’avérer suffisante pour atteindre la rupture. Sur la Figure 65 sont représentées les contraintes axiale et circonférentielle dans les différents cas de figure de la configuration A où la force axiale est maximale. Nous constatons que les deux contraintes se rapprochent le plus pour les hétérogénéités dans l’enrobage et l’assise, mais que la contrainte circonférentielle reste plus défavorable dans tous les cas. Ceci soulève la question de la pertinence des hétérogénéités envisagées pourtant identifiées par différentes études comme les cas à fort risque pour le tronçon. Ce constat permet également de s’interroger sur la manière dont la modélisation a été effectuée ou encore sur la pertinence des valeurs numériques des différents paramètres du modèle. En tout cas, le sens d’évolution des

228

Page 113: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

contraintes (diminution de σθmax et augmentation de σxmax) requière d’aller plus loin dans la modélisation des hétérogénéités.

-2000

-1000

0

1000

20000 30 60 90 120 150 18

Position angulaire (°)

Con

trai

nte

(kPa

)

σθ

σx

0

-2000

-1000

0

1000

20000 30 60 90 120 150 18

Position angulaire (°)

Con

trai

nte

(kPa

)

σθ

σx

0

a) Référence b) Assise (l=1,8m)

-2000

-1000

0

1000

20000 30 60 90 120 150 18

Position angulaire (°)

Con

trai

nte

(kPa

)

σθ

σx

0

-2000

-1000

0

1000

20000 30 60 90 120 150 18

Position angulaire (°)

Con

trai

nte

(kPa

)

σθ

σx

0

c) Remaniement du fond de fouille (l=14m) d) Enrobage (l=3,4m)

Figure 65. Contraintes dans la section la plus sollicitée, configuration A

3.4.2 Pertinence de la loi de comportement du sol Outre l’évolution des valeurs des contraintes l’une par rapport à l’autre, la Figure 65 montre que pour le niveau de chargement appliqué en surface, les contraintes de la section la plus sollicitée sont inférieures à 2 MPa en traction. Sachant que la résistance en traction d’un béton non armé est habituellement située autour de 3 MPa, le tronçon apparaît donc relativement éloigné de la rupture même si l’intensité de la charge est celle d’un convoi Br. Ce résultat souligne alors toute l’importance d’un chargement cyclique et une détérioration progressive des ouvrages suite à l’accumulation des déformations résiduelles. Cependant, la mise en œuvre d’un tel modèle nécessiterait d’une part, une loi de comportement complexe avec écrouissage et d’autre part, une grande puissance de calcul. Une piste d’étude possible pourrait être l’approche d’Abdelkrim et al. (2004) où les auteurs proposent une méthode d’évaluation des tassements résiduels d’une infrastructure de transport soumise à une charge de trafic. Le tassement résiduel au Nième cycle est obtenu à partir d’une méthode explicite fonction du nombre de cycles et des caractéristiques de ces derniers (une analyse des contraintes d’un cycle de chargement – déchargement en élasticité est donc nécessaire pour déterminer ces caractéristiques). Bien entendu, cet aspect du comportement des tronçons sous chargement cyclique sort complètement du cadre de la présente étude où, compte tenu de l’état de l’art sur le sujet, une première approche avec un chargement monotone était le

229

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

nécessaire point de départ. Ces résultats suggèrent donc une nécessité d’aller plus loin dans la modélisation. Par ailleurs, l’analyse de l’état de contrainte dans le remblai pour les différents types d’hétérogénéité, montre que certaines zones de remblai atteignent la limite de plasticité au cours de calcul. Nous distinguons néanmoins deux types de plastification :

- la plastification que nous qualifions de « numérique » car elle n’est que le résultat de la méthode numérique de modélisation que nous avons adopté,

- la plastification « physique » obtenue par le cisaillement de certaines zones de sol. La Figure 66 montre les zones plastifiées au cours du calcul pour un sol homogène et pour les deux configurations de chargement. Nous observons ainsi deux types de zones plastifiées « p » et « n ». Dans les zones p (past) le critère de plasticité a été atteint au début de calcul à cause de l’application brutale de la charge en surface mais ces zones ne sont plus dans le domaine de plasticité à la fin du calcul. Les zones n (now) se trouvent toujours dans le domaine de plasticité à la fin du calcul à cause des perturbations numériques engendrées par le modèle de joint. Par conséquent, le critère de plasticité n’est véritablement atteint que dans une ligne verticale d’éléments du massif de la configuration B.

Configuration B Configuration A

Zones p

Zones n

Figure 66. Plastification des zones du sol homogène

Lorsque le remblai de la tranchée est hétérogène, une redistribution des contraintes fait apparaître d’autres zones dans le domaine de la plasticité. Pour l’hétérogénéité dans l’assise, le critère de plasticité est atteint à la clé de la conduite, au niveau des hanches et de manière localisée, dans le massif sous la charge (Figure 67a). Remarquons que par rapport à la référence, l’étendue des zones p affecte aussi la zone décompactée, conséquence directe de la valeur nulle du K0. Pour l’hétérogénéité dans l’enrobage, elles sont essentiellement localisées à la clé de la conduite ou dans le massif sous la charge surfacique (Figure 67b). Elles apparaissent dès la longueur 1,8m de la zone décompactée. De manière générale, ces résultats illustrent l’intérêt d’utiliser une loi de comportement élasto-plastique pour le remblai même pour des niveaux de chargement encore insuffisants

230

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

pour atteindre la rupture. Or nous avons vu dans la section précédente, que la caractérisation mécanique d’un sol de remblai compacté reste très difficile à ce jour. Le recours à une loi de comportement élasto-plastique complexe pour obtenir d’avantage de précision dans les résultats pourrait n’être qu’illusoire.

a) Assise (l=5,6m) b) Enrobage (l=5,6m)

Figure 67. Plastification des zones du sol hétérogène (Configuration A)

231

Page 116: Etude numérique paramétrique de l’influence des ...

Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

4 - INFLUENCE DE L’ETAT INITIAL : PRISE EN COMPTE DU PHASAGE

Dans l’étude paramétrique précédente, nous avons souligné à plusieurs reprises les différentes influences de la technique de modélisation sur les résultats obtenus. La mise en place du tronçon et de la tranchée ont été réalisées en faisant l’abstraction du processus de construction. Techniquement, l’état initial des contraintes est obtenu en trois étapes :

- mise en place d’un massif de sol avec un champ de contrainte défini par la valeur de K0,

- excavation du volume de sol nécessaire à la mise en place de la conduite puis introduction éventuelle des hétérogénéités,

- stabilisation de l’ensemble pour arriver à un état d’équilibre pris comme l’état initial avant chargement.

Cette manière de modéliser la tranchée pourrait avoir une influence sur le champ de contraintes dans le sol de manière à amener certaines zones plus ou moins près de la limite de plasticité ce qui modifierait l’évolution ultérieure des contraintes. Afin de quantifier l’influence éventuelle de la mise en place du modèle (état initial), nous nous proposons de considérer, pour un cas simple, une autre méthode de modélisation tenant compte du processus d’installation de la tranchée par couches successives. Pour ce faire, il est nécessaire de développer une méthode de modélisation numérique du processus dynamique de compactage, ce qui s’avère être une opération très délicate du fait de nombre important de paramètres. Avant de développer une procédure de mise en œuvre des couches successives, nous avons commencé par une étude bibliographique sur le sujet.

4.1 - Comment modéliser le processus de compactage ?

4.1.1 L’étude bibliographique Le processus de compactage est typiquement un problème dynamique qui se distingue d’un problème statique par la variation dans le temps aussi bien des forces appliquées que des réponses du sol. Comparé à un problème statique, le problème dynamique fait apparaître des grandeurs nouvelles telles que les forces d’inertie qui s’opposent à l’accélération de la charge, la propagation de l’énergie dynamique par différents types d’ondes ou le déphasage entre l’excitation et la réponse. De plus, les propriétés mécaniques du sol sont différentes sous un chargement dynamique et difficiles à obtenir. Toute la difficulté de la modélisation du processus de compactage par une approche simplifiée consiste à déterminer un chargement statique équivalent à l’effort dynamique réel fourni par le compacteur et qui résulte en un état de contrainte équivalent. L’intensité de la charge appliquée en surface de la couche compactée est certainement fonction de l’engin de compactage, mais également d’un facteur dynamique lui-même dépendant d’un certain nombre de paramètres. L’effet d’une action de compactage sur un sol a été largement abordé

232

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

dans la littérature, chacune des études mettant en évidence un aspect supplémentaire de la complexité du processus. Hirikawa et al. (2000) considèrent la distribution de contraintes dans un sable soumis à un compactage par cylindre roulant. L’expérience consistait à appliquer des cycles de chargement (les allers-retours du rouleau) à charge constante. Les contraintes normales (σv) et les contraintes de cisaillements (τ) au fond de la couche de sable ont été mesurées à l’aide des capteurs placés dans le sol. Ces mesures ont montré que la répartition de contrainte verticale suivait une distribution de Gauss caractérisée par deux paramètres h et w, qui contrôlent respectivement l’amplitude de la courbe et son étalement. Ces paramètres dépendent des conditions de chargements (nombre de passes, nature du contact, poids V du cylindre).

a) Contrainte verticale b) Contrainte de cisaillement Note : d - la distance du point de mesure au cylindre roulant ; R - le rayon du cylindre.

Figure 68. Diffusion des contraintes lors du compactage par cylindre roulant Ainsi la distribution des contraintes dans un sol compacté est étroitement liée aux paramètres du mode de compactage. Par conséquent, pour un même objectif de compactage en terme de densité, les caractéristiques du sol seront différentes selon la technique utilisée. Hameury et al. (2000) comparent les résultats sur le gradient de masse volumique obtenus par vibrocompression avec ceux obtenus au marteau vibrant pour un même taux de compactage visé (q2). Il apparaît que pour un petit nombre de couches, le compactage au marteau vibrant conduit à des variations de densité nettement plus élevées que la vibrocompression. Adu-Osei et al. (2000) se sont intéressés à l’influence de la technique du compactage sur les propriétés orthotropes du sol compacté (module de Young et coefficient de Poisson). Ils ont ainsi étudié des Graves Non Traitées (GNT) compactées selon trois techniques de compactage différentes : pilonnage, vibrocompactage, et giratory shear compaction. Les essais triaxiaux réalisés sur les éprouvettes issues de chaque mode de compactage fournissent des modules de chargement-déchargement très différents selon la technique employée. Pour une même densité sèche finale de 23,5kN/m3, et pour un même essai triaxial, le module prend les valeurs de 208 MPa pour le compactage dynamique, de 169 MPa pour le vibrocompactage, et de 305 MPa pour la méthode de « giratory shear compaction ». Par ailleurs, le compactage peut entraîner une réorganisation plus ou moins importante des grains, ce qui se traduit par des paramètres élastiques plus ou moins différents selon la direction de l’échantillon. Les différentes études citées plus haut suggèrent que chaque mode de compactage conduit à une distribution de contraintes propre et non homogène sur la hauteur du sol compacté. Pour

d/R

τ/V σv/V w w

h

d/R

233

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

modéliser correctement le processus, Adam et Kopf (2000) proposent une méthode par « sous-structures » qui consiste à traduire de manière indépendante en un système d’Equations dynamiques, chacune des composantes de l’interaction sol-structure (à savoir le sol et l’engin compactant). D’une part, le continuum élastique semi infini représentant le sol chargé dynamiquement est ramené à une portion sous forme d’un cône tronqué également semi infini (Figure 69) dont les paramètres géométriques dépendant des caractéristiques de la charge notamment de la surface de chargement. Moyennant cette hypothèse, il est possible alors, en écrivant l’équilibre dynamique d’une tranche du cône (Figure 69), d’établir une relation différentielle du type force-déplacement dans laquelle apparaissent des paramètres gouvernant le comportement du sol à savoir une rigidité et un amortissement. Les auteurs développent également une manière simplifiée d’introduire une zone située immédiatement sous le compacteur dans laquelle les déformations plastiques sont prises en compte.

Figure 69. Equilibre des forces d’une « sous-structure » d’Adam et Kopf (2000)

D’autre part, la modélisation du compacteur est particulière à chaque type d’engin. Le principe consiste à écrire leurs Equations de mouvement faisant intervenir les paramètres tels que la force appliquée ou la vitesse angulaire. L’étape suivante de la modélisation consiste à coupler ces différents systèmes d’Equation en respectant un certain nombre de règles de compatibilité elles mêmes traduites en termes d’Equations. Enfin, pour un type donné de rouleau compactant, l’ensemble des Equations est implémenté dans un modèle afin de réaliser les simulations numériques. En conclusion, ces quelques études suggèrent que la modélisation du processus de compactage s’avère être une entreprise complexe nécessitant la mise au point des méthodes lourdes incompatibles avec les objectifs de ce travail. Ainsi, plutôt que de modéliser le processus utilisé pour créer un état de contrainte dans une couche de remblai, nous avons choisi d’appliquer directement à la couche en question, le résultat simplifié de ce processus sous forme de l’état final de contraintes défini par les travaux de Selig (1990).

234

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

4.1.2 Modélisation du processus de compactage Le principe de la modélisation du phasage consiste à appliquer aux différentes couches du remblai de manière successive, deux valeurs de module de Young dites initiales et finales. La valeur initiale très faibles (1MPa) a pour but de représenter la couche de surface en cours de compactage. En revanche, la finale bien plus élevée (50 MPa) est affectée lorsque la couche suivante a été mise en place. Les autres caractéristiques du remblai sont restées inchangées par rapport aux calculs de la section 3. La construction de la tranchée est désormais réalisée en 4 phases :

- Phase 0 : mise en place d’un massif de sol avec un champ de contrainte défini par K0 = 0,5 ;

- Phase 1 : excavation de la tranchée et calcul d’un nouvel état d’équilibre (nouveau champ de contrainte) ;

- Phase 2 : mise en place de la conduite et de l’enrobage (y compris le lit de pose) avec leurs caractéristiques initiales (y compris un K0) puis calcul du nouveau champ de contraintes ;

- Phase 3 : mise en place de la couche de sol suivante avec des caractéristiques initiales, affectation des caractéristiques finales à la couche précédente puis calcul du nouveau champ de contraintes ;

- Phase 4 : mise en place des autres couches de la même façon que précédemment. A la fin de la phase 4, le processus de mise en place de la tranchée est achevé et nous obtenons un état équivalent à l’état initial dans la procédure sans phasage.

La tranchée ainsi obtenue est chargée en surface de la même manière que la tranchée réalisée sans phasage.

4.2 - Influence de l’état initial dans une tranchée hétérogène Bien que la mise en place de la tranchée soit fondamentalement différente de celle de la section précédente dite sans phasage, les contraintes verticales dans le remblai à l’issue du chargement ne changent que très peu (Figure 70). En revanche, la contrainte horizontale aux reins est distribuée de manière différente (Figure 71). Lorsque la mise en place est effectuée avec phasage, les contraintes horizontales au niveau des parois de la tranchée sont relâchées au début du processus. Après l’ajout de chaque couche, un équilibre des contraintes dans la tranchée est atteint où la composante horizontale ne vaut plus la moitié de la composante verticale, comme pour le cas sans phasage, mais a une valeur bien inférieure (environ 5 kPa). Si la tranchée est ensuite chargée en surface, l’ovalisation vient mobiliser une résistance latérale du sol ce qui augmente la contrainte horizontale. Dans le modèle sans phasage, cette contrainte horizontale étant déjà assez élevée au moment du chargement, diminue afin d’atteindre l’équilibre au niveau de la conduite. La Figure 72 montre d’une part que le déplacement maximal relevé après chargement sur la tranchée réalisée avec phasage est supérieur à celui de la même tranchée sans phasage. D’autre part, la longueur de la conduite affectée par la charge en surface est plus grande que dans le cas sans phasage. Le tronçon a donc tendance à subir une flexion plus importante dans le cas avec phasage. Ce résultat est cohérent avec la distribution de la force axiale (Figure 73)

235

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

où on constate une augmentation de cette dernière sur la même portion du tronçon et dans toute la section (plus de compression à la clé et plus de traction au radier Figure 74b).

-100

-80

-60

-40

-20

0-8 -4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Con

trai

nte

vert

ical

e (k

Pa)

AvecphasageSansphasage

-70

-60

-50

-40

-30

-20

-10

0-8 -4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Con

trai

nte

vert

ical

e (k

Pa)

Avecphasage

Sansphasage

a) Clé b) Radier

Figure 70. Contrainte verticale dans le remblai

-16

-14

-12

-10

-8

-6

-4-8 -4 0 4 8

Position longitudinale (m)

Con

trai

nte

horiz

onta

le

(kPa

)

AvecphasageSansphasage

-0.8

-0.6

-0.4

-0.2

0

0.2-10 -6 -2 2 6 10

Position longitudinale (m)

Dép

lace

men

t ver

tical

(m

m)

AvecphasageSansphasage

Figure 71. Contrainte horizontale dans le remblai aux reins de la conduite

Figure 72. Déplacement vertical au radier

-20

0

20

40

60

80

100-10 -6 -2 2 6 10

Position longitudinale (m)

Forc

e ax

iale

Nx

(kN

/m) Avec

phasageSansphasage

-80

-60

-40

-20

0

20-10 -6 -2 2 6 10

Position longitudinale (m)

Forc

e ax

iale

Nx

(kN

/m)

AvecphasageSansphasage

a) Radier b) Clé

Figure 73. Force de flexion longitudinale En ce qui concerne l’ovalisation de la conduite dans le plan transversal, nous pouvons constater une augmentation des valeurs du moment au radier, aux reins et à la clé par rapport au calcul sans phasage (Figure 74a). Cependant, cette observation est à nuancer car elle

236

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

résulte de deux phénomènes superposés : l’augmentation du moment sous le chargement en surface et l’augmentation du moment sous le poids propre du remblai. En effet, pour le cas avec phasage, l’augmentation du moment au radier dû à la charge est de 45 % contre 210 % pour le cas sans phasage. Si la valeur finale du moment obtenu avec phasage est supérieure à celle sans phasage, c’est que le moment initial crée par le poids propre du remblai était bien supérieur dans le cas avec phasage. Ceci peut être observé sur les graphiques de la Figure 75.

-0.8

-0.4

0

0.4

0.80 30 60 90 120 150 180

Position longitudinale (m)

Mom

ent M

y (k

Nm

/m)

AvecphasageSansphasage

-120

-80

-40

0

40

80

1200 30 60 90 120 150 180

Position longitudinale (m)Fo

rce

axia

le N

x (k

N/m

)

AvecphasageSansphasage

a) Moment d’ovalisation b) Force axiale

Figure 74. Distribution des efforts dans la section la plus sollicitée

Ainsi, nous observons que le moment initial obtenu après phasage mais avant le chargement en surface, est d’environ 50 % supérieur à celui sans phasage. La valeur nettement supérieure du moment My initial dans le cas avec phasage s’explique par la Figure 71 : la contrainte horizontale aux reins de la conduite est bien plus faible dans le cas avec phasage. Or, cette contrainte est celle qui traduit la résistance du sol à l’ovalisation de la conduite. Plus elle est faible, moins la résistance latérale du sol s’oppose à l’ovalisation et plus le moment My est élevé. Lorsque la conduite est chargée en surface, cette contrainte augmente sensiblement dans le cas avec phasage et diminue dans le cas sans phasage ce qui explique la diminution de la différence entre les deux cas dans la zone d’influence de la charge. Remarquons que les irrégularités locales du moment au radier sont de nature purement numérique dues au changement brutal du module de Young. Par conséquent, la construction de la tranchée en tenant compte du phasage influence les résultats de deux manières :

- par modification du champ de contrainte initial ce qui induit une translation des courbes de certains résultats ;

- par modification des effets du chargement sur les déplacements et les efforts internes en terme d’amplitude de la valeur maximale (moment d’ovalisation) ou de la longueur d’influence (force axiale et déplacement vertical).

Les différences observées entre les deux manières de modéliser la tranchée s’expliquent par la différence des chemins de contraintes et la proximité plus ou moins grande du remblai de la limite de plasticité. En effet, dans le cas de la mise en place avec phasage, chaque couche nouvellement installée se déforme plus facilement dans le sens vertical permettant une diminution de la contrainte horizontale. Cette possibilité de déformation, supplémentaire par rapport au cas sans phasage, amène également le remblai plus près de la limite de plasticité de

237

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

manière à atteindre cette dernière lorsqu’est appliquée la charge en surface. Ceci est illustré sur la Figure 76 où nous pouvons observer une partie du remblai se trouvant dans la zone d’influence de la charge en état de plasticité. Le même cas sans phasage ne présente aucune zone plastique à cet endroit. Si la diminution de la contrainte horizontale explique la distribution du moment d’ovalisation, le développement d’une zone plastique au dessus de la conduite explique l’augmentation de sa flexion longitudinale.

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6-10 -6 -2 2 6 10

Position longitudinale (m)

Mom

ent M

y (k

Nm

/m) Avec

phasageSansphasage

0.2

0.4

0.6

0.8-10 -6 -2 2 6 10

Position longitudinale (m)M

omen

t My

(kN

m/m

) AvecphasageSansphasage

a) Radier b) Clé

Figure 75. Moment d’ovalisation transversale

Figure 76. Zone plastiques dans le remblai construit par phasage (un quart de modèle)

238

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

5 - CONCLUSION Le rôle de la géométrie des conduites et de la tranchée ayant déjà été abordé par ailleurs, nous nous sommes focalisés dans ce chapitre sur les influences de la variabilité du sol de remblaiement le long du tronçon. Pour ce faire, 3 types d’hétérogénéité ont été envisagés, chacune d’entre elles étant déjà mentionnée ou identifiée dans la littérature comme la configuration à risque. Contrairement à l’approche du chapitre 4, l’objectif de cette étude paramétrique n’était pas de proposer une explication des observations du terrain, mais de rechercher et éventuellement identifier les configurations les plus défavorables pour la tenue structurelle ou fonctionnelle des conduites. Globalement, la présence des hétérogénéités dans le sol modifie peu le comportement transversal de la conduite et ceci dans la plupart des cas dans le sens de la sécurité. En revanche, le comportement longitudinal, flexion et déplacement vertical, est considérablement modifié en relation étroite avec le fonctionnement des joints. Bien que la présente étude nécessite d’aller plus loin dans la modélisation afin d’affiner les tendances observées, nous avons pu mettre en évidence, selon les cas, les configurations géométriques des hétérogénéités pour lesquelles un maximum de flexion ou de déplacement vertical a été observé. La présente étude étant pionnière en la matière, nous l’avons définie et menée moyennant un certains nombre d’hypothèses concernant la représentation du sol. En effet, si en première approche l’hypothèse du modèle de sol de Mohr-Coulomb semble être un bon compromis entre la simplicité et la capacité de capturer le comportement phénoménologique de l’interaction sol-conduite, l’hypothèse concernant les caractéristiques mécaniques d’un matériau pulvérulent compacté à 95 % de sa densité optimale est plus discutable. Le paramètre majeur du comportement du sol, à savoir son module de Young, dépendant d’un grand nombre de facteurs, peut varier d’un ordre de grandeur par rapport à ce que nous avons défini comme sa valeur de référence. Cependant, en nous plaçant, d’une part, dans une configuration particulière de géométrie et de chargement, nous avons pu considérablement réduire la plage de variation de ce paramètre et nous assurer, de cette manière, de la qualité des résultats obtenus. D’autre part, en considérant des valeurs plutôt faibles dans la plage de variation du module, nous nous sommes placé dans des situations défavorables pour la conduite. Les résultats ainsi obtenus minimisent alors le risque de rater des phénomènes critiques pour la tenue des ouvrages, mais ne dispensent en aucun cas du besoin d’effectuer une étude paramétrique sur la variabilité rhéologique du sol. La deuxième catégorie d’hypothèses concerne la méthodologie de simulation de l’interaction sol-conduite. Tout d’abord, une hypothèse importante concerne le chemin des contraintes dans le sol compacté. Nous avons vu que l’abstraction du processus de construction de la tranchée par couches successives aboutit à des résultats qui, dans une certaines mesure, ne vont pas dans le sens de la sécurité. Nous avons proposé à la fin du chapitre, une alternative à la méthode de modélisation initialement retenue, sans véritable connaissance de la qualité de ses résultats. Pour d’autres investigations plus précises attachant plus d’importance à l’aspect quantitatif de l’interaction sol-conduite, il est indispensable de confronter les résultats numériques des deux méthodes avec des mesures réelles afin de définir une procédure numérique aboutissant à un état de contrainte le plus réaliste possible.

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Chapitre 5 : Effets des conditions de pose sur le comportement des canalisations

En outre, le modèle du joint tel que nous l’avons implémenté, génère localement des résultats parasités ce qui empêche leur lecture très détaillée. Néanmoins, les résultats globaux ne sont pas affectés par ces phénomènes numériques. La sensibilité du modèle numérique aux différents paramètres du sol autres que le module de Young ou la sensibilité aux paramètres d’interface sol-conduite n’ont pas été présentés dans ce chapitre étant donné le caractère qualitatif de l’étude. Cependant, l’effet d’un certain nombre de paramètres a été analysé par Frochen et Paquet (2006) : il ressort que ces paramètres ont une influence négligeable sur les résultats compte tenu de la précision de ces derniers. Par ailleurs, pour aller plus loin dans la caractérisation de l’interaction sol-conduite en relation avec la variabilité du sol, ce chapitre a démontré le besoin à la fois d’un travail de modélisation simplifiée du processus de compactage ainsi que d’une prise en compte d’un chargement cyclique en surface. Les deux aspects présentant un caractère cyclique commun, les perspectives de la modélisation future doivent inévitablement intégrer une procédure capable de prendre en charge cet aspect du problème.

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