Eric Harland Quintet -...

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SAMEDI 27 AVRIL 2013 – 20H Première partie Eric Harland Quintet Eric Harland, batterie Walter Smith III, saxophone Taylor Eigsti, piano Nir Felder, guitare Harish Raghavan, contrebasse entracte Deuxième partie Ibrahim Maalouf Quintet Ibrahim Maalouf, trompette Mark Turner, saxophone Frank Woeste, piano Ira Coleman, contrebasse Clarence Penn, batterie Fin du concert vers 23h. Imprimeur BAF | Licences E.S. 1-1056849, 2-1056850, 3-105851 Les partenaires média de la Salle Pleyel

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SAMEDI 27 AVRIL 2013 – 20H

Première partie

Eric Harland Quintet

Eric Harland, batterie

Walter Smith III, saxophone

Taylor Eigsti, piano

Nir Felder, guitare

Harish Raghavan, contrebasse

entracte

Deuxième partie

Ibrahim Maalouf Quintet

Ibrahim Maalouf, trompette

Mark Turner, saxophone

Frank Woeste, piano

Ira Coleman, contrebasse

Clarence Penn, batterie

Fin du concert vers 23h.

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Ibrahim Maalouf Quintet

Avant de souffler le vent, avec son splendide Wind, sorti à l’automne, Ibrahim Maalouf a donné

dans la tempête… À 33 ans, le trompettiste franco-libanais n’effectue pas un changement

de cap, mais affirme simplement le choix d’un temps plus apaisé. Comme si l’urgence des

questions posées par la trilogie qui avait précédé trouvait un début de réponse. Une trilogie

entamée en 2007 avec Diasporas, poursuivie en 2009 par Diachronism et conclue dans son

Diagnostic en 2011. Une série introspective malgré ses attraits expressionnistes. Ibrahim

Maalouf avait besoin de se situer, de savoir d’où parler, d’où jouer… Dans le monde, comme

dans son temps.

Superflue désormais la question « jazz ou pas jazz ? » qu’on lui adressait presque aussi

souvent qu’il se la posait. Non seulement le garçon a un son magnifiquement timbré, une

signature immédiate (et pas uniquement à cause de sa trompette à quarts de tons), mais il

est un sacré improvisateur. Non orthodoxe, certes, davantage mûri dans les modes orientaux

que dans les règles standardisées de Broadway, mais alliant rigueur et imagination avec

une puissance d’expression qui force l’admiration de la plupart des trompettistes de jazz

américains contemporains. Il faut dire qu’il les a impressionnés en 2001 lorsqu’il remporta à

Washington le premier prix de la National Trumpet Competition… Un extra-terrestre qui jouait

d’une trompette à quatre pistons, inventée par son père, le virtuose Nassim Maalouf, pour

pouvoir jouer naturellement les quarts de tons des maqâms arabes.

Un père qui fut avant Ibrahim lui-même élève de Maurice André et qui donna la passion de

la musique à son fils de 9 ans en l’emmenant jouer à ses côtés. « J’appréciais les concerts,

je trouvais ça très valorisant. Mais je n’aimais pas beaucoup la trompette, je passais plus de

temps à jouer du piano », confiait Ibrahim à Jeune Afrique. Il a suivi scrupuleusement le

cursus des trompettistes classiques, jusqu’au Conservatoire National Supérieur de Musique

de Paris. Et s’il a rêvé un temps de devenir architecte, c’est en réalisant que son père avait

inventé un instrument révolutionnaire qu’il se décida à être musicien pour porter l’histoire un

peu plus loin. Dans les années 2000, il va multiplier les rencontres avec des artistes touchés

par son originalité et qui vont élargir son horizon : Lhasa, Vincent Delerm, Arthur H, Sting,

Amadou & Mariam, M, Salif Keita, Disiz La Peste…

Il en sort chaviré, empli de questions, pas sûr des réponses, mais avec la conviction qu’il

lui faut avancer sur cet entrelacs de musiques d’aujourd’hui. Bingo. Appuyé sur un sens de

l’urgence forgé dans ses allers-retours entre Paris et Beyrouth et sur le vécu new-yorkais face

à Ground Zero, son refus de choisir, d’élaguer, d’édulcorer, est en phase avec un public jeune

qui dévore toutes ces musiques simultanément. Il fonce, crée son propre label, se jette dans

une rencontre du jazz et du Moyen-Orient qui aurait fait escale dans les ghettos du Bronx et

les clubs électrisés de Berlin.

C’est après ce parcours dense, intense, qu’il se retrouve face à l’une de ses plus fondatrices

émotions musicales. Un disque qui l’a fasciné depuis toujours, avec sa part de mystère et sa

question ouverte, béante, sur la création musicale : la musique enregistrée par Miles Davis

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pour le film de Louis Malle Ascenseur pour l’échafaud. Une musique totalement improvisée

face à l’écran, en studio, avec un quintette de jazz pourtant on ne peut plus « classique » :

trompette, sax, piano, basse, batterie. Et Ibrahim se jette à l’eau en inversant carrément

les rôles pour faire à rebours le trajet de Miles. Le trompettiste américain s’était entouré à

Paris de musiciens résidant sur place, lui part à New York avec son complice Frank Woeste

aux claviers pour s’entourer de ce qui se fait de mieux sur place : Mark Turner (sax), Larry

Grenadier (contrebasse) et Clarence Penn (batterie).

Des jazzmen pur sucre pour enregistrer une musique imaginée pour le film muet de René

Clair La Proie du vent. Une commande de Serge Toubiana, le patron de la Cinémathèque, qui

tombe à pic. Souffle, lyrisme, panoplie d’émotions : face au doute, à la suspicion, à l’attente,

l’excitation, la sensualité, les complications, les surprises… Douze moments, comme autant

de scènes découpées, de courts-métrages sonores, avec la très palpable douceur d’un son

de groupe d’une folle élégance. Un avis de vent frais. C’est ce répertoire-là, avec juste un

changement de bassiste, qu’il propose aujourd’hui. Avec un sens de la narration et de la

dramaturgie qui est aussi un environnement naturel pour celui qui est accessoirement le

neveu de l’écrivain Amin Maalouf…

Eric Harland Quintet

Dans le jazz, les brillants trompettistes, comme les pianistes ou les saxophonistes,

commencent en général très tôt une carrière de leader. En ce qui concerne les batteurs,

aussi reconnus soient-ils, il en va différemment : la plupart ne s’afficheront jamais sous leur

nom, et ceux qui passent le cap ont déjà derrière eux une solide carrière de sideman. Le cas

d’Eric Harland, le batteur actuel de Charles Lloyd, de Chris Potter ou du prestigieux SFJazz

Collective, est un peu différent. Ses collaborations s’étaient déjà accumulées, de Betty Carter

à Joshua Redman, de McCoy Tyner à Wynton Marsalis, mais il n’avait que 30 ans lorsque la

musique de son premier album fut enregistrée en 2008.

Ce Live by Night, publié sur le label français Space Time, le présente à la tête de son groupe

Voyager (dont seul le guitariste a changé). Une maturité qui n’aura pas attendu longtemps et

qui place la barre haut. Explorer ainsi les entrelacs du piano et de la guitare c’est refuser la

facilité. Le batteur doit se faire coloriste pour se créer ses propres espaces. Et en embauchant

l’un des saxophonistes les plus prometteurs de la scène new-yorkaise, Eric Harland ne baisse

pas la garde par rapport à l’exigence de ceux qu’il accompagne d’ordinaire. Ce qui frappe

d’emblée dans la direction du batteur, c’est l’option résolument narrative de la musique.

À Ibrahim Maalouf les images, à Eric Harland le scénario !

Alex Dutilh

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