Epidémiologie et facteurs de virulence des Escherichia coli responsables d’infections néonatales

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mise au point | formation Escherichia coli et infections néonatales Epidémiologie des infections néonatales Une étude réalisée aux Etats-Unis entre 2006 et 2009 chez 396 000 nouveau-nés dont 389 étaient infectés (incidence 1/1 000) a montré que le 1 er germe responsable d’infections néonatales précoces était le streptocoque B suivi par E. coli (1/3 des IN précoces prouvées) (tableau I). Une autre étude pédiatrique (Stoll, 2011) a montré qu’en fonction du terme, l’épidémiologie était différente et que chez les prématurés, E. coli est le 1 er germe en cause (taux d’incidence x 10 < 2 500 g et x 100 < 1 500 g). Une étude réalisée en France entre 2001 et 2007 (GPIP/ ACTIV) a montré que dans les méningites néonatales pré- coces, E. coli était le 1 er germe responsable chez les préma- turés avec une mortalité élevée (15 %) et un pourcentage de séquelles neurologiques important (50 %) (figure 1). 13 OptionBio | Lundi 31 mars 2014 | n° 505 Les infections néonatales ne sont pas rares (1 % des nouveau-nés) et sont principalement dues au streptocoque du groupe B et à E. coli. La connaissance de la caractérisation génétique des souches d’E. coli responsables d’infections néonatales ainsi que de leurs facteurs de virulence est aujourd’hui bien précisée. L’émergence de bactéries multirésistantes aux antibiotiques est un phénomène inquiétant. Cette émergence concerne certaines entérobactéries communautaires dont E. coli, responsable entre autre d’infections urinaires et de bactériémies chez la femme enceinte et d’infections néonatales. L’importance de ces souches chez la femme enceinte est un problème d’actualité. © PHANIE | Figure 1. Epidémiologie des méningites néonatales en fonction du terme. Les infections néonatales peuvent survenir de façon précoce (dans les 3 premiers jours après l’accouchement) ou tardives (survenant alors au-delà du 3 e jour de vie). Selon qu’elles sont précoces ou tardives, l’épidémiologie n’est pas tout à fait la même mais dans tous les cas, E. coli est un des germes le plus souvent impliqué. Epidémiologie et facteurs de virulence des Escherichia coli responsables d’infections néonatales

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Escherichia coli et infections néonatales

Epidémiologie des infections néonatalesUne étude réalisée aux Etats-Unis entre 2006 et 2009 chez 396 000 nouveau-nés dont 389 étaient infectés (incidence 1/1 000) a montré que le 1er germe responsable d’infections néonatales précoces était le streptocoque B suivi par E. coli (1/3 des IN précoces prouvées) (tableau I).Une autre étude pédiatrique (Stoll, 2011) a montré qu’en fonction du terme, l’épidémiologie était différente et que chez les prématurés, E. coli est le 1er germe en cause (taux d’incidence x 10 < 2 500 g et x 100 < 1 500 g).Une étude réalisée en France entre 2001 et 2007 (GPIP/ACTIV) a montré que dans les méningites néonatales pré-coces, E. coli était le 1er germe responsable chez les préma-turés avec une mortalité élevée (15 %) et un pourcentage de séquelles neurologiques important (50 %) (figure 1).

13OptionBio | Lundi 31 mars 2014 | n° 505

Les infections néonatales ne sont pas rares (1 % des nouveau-nés) et sont principalement dues au streptocoque du groupe B et à E. coli. La connaissance de la caractérisation génétique des souches d’E. coli responsables d’infections néonatales ainsi que de leurs facteurs de virulence est aujourd’hui bien précisée.L’émergence de bactéries multirésistantes aux antibiotiques est un phénomène inquiétant. Cette émergence concerne certaines entérobactéries communautaires dont E. coli, responsable entre autre d’infections urinaires et de bactériémies chez la femme enceinte et d’infections néonatales. L’importance de ces souches chez la femme enceinte est un problème d’actualité.

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| Figure 1. Epidémiologie des méningites néonatales en fonction du terme.

Les infections néonatales peuvent survenir de façon précoce (dans les 3 premiers jours après l’accouchement) ou tardives (survenant alors au-delà du 3e jour de vie). Selon qu’elles sont précoces ou tardives, l’épidémiologie n’est pas tout à fait la même mais dans tous les cas, E. coli est un des germes le plus souvent impliqué.

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Concernant les IN tardives, les études ont montré que E. coli est beaucoup plus souvent responsable que le streptocoque B, sachant que les chiffres ne reposent que sur les infections prouvées hors les IN tardives sont large-ment sous-diagnostiquées (100 nouveau-nés traités pour 1 infection prouvée selon les données de l’hôpital Robert-Debré entre 2005-2009).

Mode d’acquisition d’E. coliLes modes d’acquisition d’E.coli par le nouveau-né sont diffé-rents selon qu’il s’agit d’une acquisition précoce périnatale ou d’une acquisition tardive.L’acquisition par voie transplacentaire (lors d’une bactériémie) ou par voie ascendante lorsque les membranes sont intactes ne sont pas observées et c’est lorsque les membranes sont rompues et lors du per partum que se fait l’acquisition à partir de la colonisation vaginale. Concernant l’acquisition tardive, elle est essentiellement environnementale.

Pathogenèse des infections néonatales à E. coli et facteurs de virulenceDe nombreux facteurs de virulence sont impliqués dans la patho-genèse des infections et des méningites néonatales à E. coli.

Chez le nouveau-né, après colonisation digestive, les E. coli gagnent la circulation par translocation, la multiplication intra vasculaire des bactéries étant alors sous l’influence de diffé-rents antigènes (Ag O18, O1, O7, O45, Ag K1 de capsule) et des systèmes de captation du fer (sidérophores). De nombreux autres facteurs sont impliqués dans la traversée de la barrière hémato méningée par transcytose à partir du sang. Des facteurs d’adhésion (S fimbriae, Pili de type 1), d’invasion (IbeA, toxine CNF1) et de survie (capsule K1) interviennent conjointement.

Caractérisation génétique des E. coli responsables d’IN précocesL’étude génotypique de 223 souches d’E. coli impliquées dans des IN précoces (186 méningites, 37 urosepsis) a permis d’iden-tifier 39 séquences types répartis en 4 groupes phylogénétiques (A-B1-B2-D), les souches responsables d’IN précoces apparte-nant essentiellement aux groupes B2 et D.Les souches peuvent être caractérisées soit par leur anti-gène O (26 sérogroupes O) soit par leur génotype de virulence (39 génotypes et 96 clones).Parmi les différentes séquences types identifiées, l’une d’entre elles, ST29, est plus souvent impliquée dans les IN précoces. Au sein de cette séquence type qui appartient au groupe phy-logénétique B2, trois sous-types ou groupes clonaux, dont le pouvoir pathogène est différent, ont été identifiés. Les sous-groupes STc29-O18 et STc29-O45 sont impliqués dans les méningites néo-natales alors que le sous-groupe STc29-O2 est plus souvent responsable d’urosepsis (tableau II).L’analyse des empreintes de virulence de ces souches d’E. coli responsables de méningites et appartenant au ST29 a montré qu’elles ne possédaient pas toutes le même équipement en facteurs de virulence, ce qui expliquerait les différences dans l’expression de leur pathogénicité (tableau III). |source : D’après une communication de S. Bonacorsi, Hôpital Robert-Debré, Paris33e Réunion interdisciplinaire de chimiothérapie anti-infectieuse - Paris – Novembre 2013

Tableau I. Epidémiologie des germes responsables d’infections néonatales précoces.

GermeHémoculture +

n %

Gram positif

Streptocoque B 159 43

Streptocoque groupe viridans 20 5

S. aureus 9 2

Entérocoque 10 3

Streptocoque A 9 2

Staphylocoque à coagulase - 3 < 1

Autres G+ 21 6

Gram négatif

E. coli 107 29

Haemophilus 11 3

Autres G- 19 5

Candida albicans 2 < 1

Total 370 10

Tableau II. Pouvoir pathogène du sous-type de ST-29.

Méningite Urosepsis

STc29-O18 28 % 3 %

STc29-O2 0 % 11 %

STc29-O45 28 % 16 %

Tableau III. Facteurs de virulence des souches de E. coli responsables de méninigte et appartenant au ST-29.

Expression clinique Sérotype paGII Sidérophores Toxine Hly SfaS IbeA

Méningite O18 :K1 - + -/+ + + + +

Méningite Urosepsis O45 :K1 + + + + - - -

Urosepsis O2 :K1 + + + + - - -