Emilien simon mémoire - version finale a4 double

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LINFOBESITÉ Mémoire de recherche - Projet de fin d’études EMILIEN SIMON AVRIL 2013 L’ÉCOLE DE DESIGN NANTES ATLANTIQUE MANAGEMENT DU DESIGN ET DE L’INNOVATION

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L’ INFOBESITÉMémoire de recherche - Projet de fin d’études

EMILIEN SIMON

AVRIL 2013

L’ÉCOLE DE DESIGN NANTES ATLANTIQUE

MANAGEMENT DU DESIGN ET DE L’INNOVATION

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abstract

Information overload

The aim of this study was to explore the phenomenon of information overload

in the digital world and whch role the interactive designer may have and what their

contribution can be to solve this problem. There is two type of filter who present lot

of interest : the context of information and the power of the community, it allowed to

share and select our data with more efficiency.

There is so much interesting digital information that it is difficult to recognize what

really matters.

Since we consider information as a product we can sell, manipulate and control, it is

clear that it will start to be considered as a raw material, such as water, in the near future.

Interaction designers and all the actors of the digital world have a great responsability

on how we will treat the information in the next 10 years. In this project I plan to give an

opportunity to the user to educate themselves and also raire public awareness about

their personnal information. For this, I intend to offer a solution that would lower step

by step the assistance provided to the user about his own information treatment.

In conclusion, educating people throught a game seems to be a smart and playful

way to manage their data step by step. The local user community will be a significant

driving force of this system.

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Après 7 années de ma vie à l’école de design Nantes Atlantique, il a été facile pour

moi d’observer l’évolution du comportement de chacun vis à vis de la technologie. Je

me souviens que les professeurs ont progressivement intégré l’outil informatique dans

le processus créatif. L’utilisation de logiciels créatifs ou la recherche d’informations sur

internet ne sont ainsi arrivées que progressivement. Ceci j’imagine, afin de garder

en nous une part de créativité sans subir l’influence d’une aide d’outils extérieure.

En parlant d’aide extérieure, l’utilisation d’internet dans la scolarité a pris tellement

d’importance, que le Danemark, dans 10% de ces lycées, autorise l’utilisation d’internet

lors de certaines épreuves au bac.

Cependant malgré nous, l’ordinateur et l’utilisation d’internet sont devenus

indispensables. Aujourd’hui il est même rare de voir l’un d’entre nous assis seul avec

uniquement une feuille et un stylo. Depuis l’utilisation massive d’internet en cours,

j’ai pu observer que la communication dans mes classes devenait de plus en plus

rare. Aujourd’hui, malgré le fait que nous partagions le même espace, nous n’hésitons

plus à passer par l’intermédiaire de nos écrans pour s’échanger un point de vue, une

information ou une blague. Cet accès à l’information permanente s’est intensifié tout

au long de ma scolarité. Aujourd’hui, nous sommes connectés à nos réseaux sociaux et

pendant qu’une vidéo se charge, nous consultons l’actualité en écoutant de la musique

et vérifions nos boîtes mails régulièrement. L’accès à l’information en permanence a

donné énormément d’importance aux moteurs de recherche dans nos vies. Grâce

à son succès phénoménal, Google, après avoir créer un système d’exploitation

mobile nommé Android, a l’ambition de proposer à ses clients son propre système

d’exploitation bureautique. Ainsi, ce qui n’était qu’un moteur de recherche en 1998,

est comparable maintenant aux entreprises tel que Apple ou Windows grâce à son

rôle dans l’information.

Préambule

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En Février 2013, Nick D’Aloisio un jeune britannique vends son application à Yahoo

pour 30 millions de dollars. Le principe de son application : résumer automatiquement

des articles d’information afin que leurs contenus s’adaptent sur des écrans de tailles

différentes. L’infobésité ne serait donc pas forcement un problème mais pourrait

devenir une formidable source d’innovation, si nous profitions des enjeux de cette

masse d’information. J’ai passé la première moitié de mon parcours scolaire en design

d’interactivité à me former aux maniements de l’information au travers des projets que

j’ai réalisé sur 3 ans. La seconde moitié à développer mon intérêt pour le management

du design et de l’innovation. Ce mémoire qui se trouve au coeur des problématiques

de ma profession sera de nourrir mes futures interrogations dans le traitements de

l’information.

Nick Aloisio, créateur de l’application Summly

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introduction....................................................................................1

01. l'information NUMÉRIQUE ▶ Qu’est ce que l’information.............................................................2

▶ L’information numérique...................................................................4

▶ Le surplus d’information....................................................................6

02. notre rapport à l’information▶ Une autre manière de consommer...........................................8 ▶ Surconnectés..................................................................................................9

▶ Notre dépendance à l’information..........................................9

03. Le temps▶ Le culte de l’instantané........................................................................11

▶ Se déconnecter............................................................................................14

04. LES SOLUTIONS▶ Le stockage......................................................................................................16

▶ Les filtres............................................................................................................20

CONCLUSION.........................................................................................23

REMERCIEMENTS................................................................................25

Sources.........................................................................................................26

Sommaire

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Avoir une réflexion sur l’infobésité impose d’analyser en premier lieu ce qu’est

l’information numérique et d’identifier l’origine de ce surplus d’information et quelles

solutions peuvent tenter d’y remédier. En second lieu, il sera intéressant d’observer

notre rapport à l’information afin d’identifier quels sont nos points forts et nos points

faibles. Pour finir, je décrypterai un des repères que nous utilisons pour mieux nous

représenter la quantité d’information : le temps.

En se numérisant, l’information est devenu accessible à la majorité d’entre nous à

la seule condition de posséder un ordinateur et une connexion internet. Ce flux

d’information ininterrompu a changé notre manière de vivre au quotidien. En tant

qu’acteur et consommateur de l’information nous sommes de plus en plus sollicité

aux travers de nos notations, discussions, diffusions et sélections. Cette nouvelle

implication nous impose de faire de plus en plus de choix. Cependant, du à

l’accroissement exponentielle de l’information, il devient de plus en plus difficile

choisir ce qui compte réellement pour nous.

Marie- Anne Chabin experte reconnue au niveau international pour l’archivage et

la gestion de l’information numérique définit l’infobésité ainsi : «Infobésité est un

mot-valise, forgé en 1995, pour traduire l’anglais «information overload», expression

remontant aux années 1970 ; on dit aussi sur-information ou surcharge d’information,

expressions plus molles mais aussi plus exactes. En effet, «infobésité» suggère

l’ingestion par le sujet d’une quantité excessive d’informations qu’il ne parvient pas

à digérer et à éliminer, faisant alors de la rétention d’information (au sens médical du

terme), au détriment de son agilité intellectuelle et de son confort documentaire. Or,

l’idée initiale est que le sujet, dans cette société de l’information, de la consommation

et autres sommations numériques, est environné, entouré, surplombé de trop de

données pour pouvoir les ingérer correctement.»

En tant qu’être humain notre capacité à assimiler l’information est limitée et sauf

changement radical de modèle, l’augmentation du flux d’informations sera de plus en

plus problématique. Ce mémoire relate mes recherches et interroge les différentes

facettes de notre relation avec l’information. L’enjeu de ce mémoire sera d’identifier

les différents facteurs pouvant être à l’origine de la surcharge informationnelle.

L’ensemble des points abordés ci-dessus sont incluent dans la problématique suivante

:

EN QUOI NOTRE RAPPORT À L’INFORMATION EST-IL DEVENU PROBLÉMATIQUE ?

Introduction

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▶ Qu’est ce que l’information

D’après la définition du Larousse : «Tout événement, tout fait, tout jugement porté

à la connaissance d’un public plus ou moins large, sous forme d’images, de textes,

de discours, de sons.» À titre de bref rappel, l’histoire de l’information commence au

début de la renaissance. Ce n’était que de simples copies de lettre recommandée

produites par des professionnels de l’information, diplomatique et politique, qui

étaient diffusées dans toute l’Europe. La circulation de ces nouvelles économiques et

politiques ont permis de tisser des liens de confiance entre les marchands au 16ème

siècles. Parallèlement se diffusaient dans les milieux populaires des «occasionnets»

pour raconter les événements extraordinaires et les rumeurs à caractère politique qui

se multiplièrent avec l’invention de l’imprimerie vers 1440. Depuis la révolution de

1792, la presse aura été l’outil indispensable de la démocratie. Elle contribuera à

créer de part sa fonction d’information la critique dont le public à toujours eu besoin

pour se sentir concerné et impliqué. Donc l’information, grâce à la presse et les divers

médias ont permis de mieux comprendre ce qui se passait près et autour de chez soi.

- Les médias

Par la suite, les quotidiens se sont vendus à des centaines de milliers d’exemplaires

vers la fin du 19ème siècle. Puis les annonceurs et leurs publicités ont permis le

développement et la diffusion des médias de masse. Depuis cette époque, les médias

de masse ont changé de forme en faveur du format numérique majoritairement diffusé

aujourd’hui. Mais Bernard Poulet ancien rédacteur en chef du «Courrier International»,

reste méfiant : «derrière l’abondance des informations sur le web, la multiplication des

sites et des journaux gratuits, le flot des commentaires de toutes sortes, forces est de

constater l’appauvrissement des contenus.» La baisse de qualité de notre information

est donc attribuée ici, à l’abondance de l’information. Mais le jugement qualitatif de

l’information n’est-il pas subjectif. Il l’est pour 2 simples raisons : Le premier, comme

nous le rappelle le lexicographe français Philibert-Joseph Le Roux est simple : «Tous

les goûts sont dans la nature». Le deuxième mentionné dans le documentaire sur

la chaîne Arte intitulé «La qualité dépend-elle de la diversité ?» nous rappelle que

la qualité dépendra souvent du contexte dans lequel elle est consommée. Ainsi,

certaines personnes apprécient parfois de «débrancher leur cerveau» en sortant du

travail. Mais la baisse de la qualité de l’information n’est pas le seul problème que

Bernard Poulet déplore.

*1 http://www.ecrans.fr/Presse-des-chiffres-et-des-pertes,15668.html

01. l'information NUMÉRIQUE

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Il accuse l’ensemble du système en incluant tous les différents acteurs de l’information

: «L’information serait devenue un produit comme les autres, sinon une matière

première dont un marché fixerait les cours et devrait être rentable au même titre que

toutes les autres industries.

- La crise de la presse

Une partie importante des revenus de la presse vient des annonceurs. Leurs

migrations massives vers internet comme support de communication montre

bien qu’ils ne se sentent pas du tout concernés par l’avenir de la presse écrite. Les

chiffres sont unanimes*1 et le résultat s’en fait ressentir, il démontre que la presse

est en pleine crise financière. À ces chiffres s’ajoute les 3.775 postes supprimés aux

États-Unis en 2011 qui selon le blog Paper Cuts représente 30% de perte de plus

que l’an dernier. Au-delà du drame humain que ces licenciements représentent, ce

sont autant de personnes qui ne participerons plus à la création d’une information

de qualité. La presse écrite a également un autre avantage : diversifier le support

de l’information. Ainsi, la disparition progressive de la presse écrite en se déclinant

en version numérique accentuera le phénomène d’infobésité. Nous risquons donc

d’avoir de plus en plus d’information qui sera de moindre qualité.

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▶ L’information numérique

Beaucoup de personnes considèrent encore que l’apparition d’un nouveau média est

censée faire disparaître celui qui le précédait. Pourtant, la radio n’a pas fait disparaître

la presse écrite et la télévision n’a pas tué la radio, même si celle-ci a vu son audience

divisée par deux depuis les années 1980. Les grandes chaînes de télévision perdent

aussi chaque année des dizaines de milliers de spectateurs. (Source : Médiamétrie

- Médiamat) L’information numérique a connu un développement fulgurant en très

peu de temps. Ainsi, la masse d’information qui nous entoure dépasse de loin notre

capacité à percevoir notre environnement numérique. Par exemple, internet aurait

doublé sa taille entre l’année 2010 et 2011 si on prend en compte la multiplication du

nombre de site web (source : pingdom.com).

- La perception du numérique

Notre contact avec l’environnement proche s’établit à travers cinq sens : la vue,

l’ouïe, le toucher, l’odorat et le goût. Ils nous permettent d’interpréter l’information

du monde qui nous entoure sous forme de stimulus. Selon une parution du CNRS*1,

notre système de perception est un processus actif : comme il n’est pas possible

d’absorber et de traiter toute l’information qui nous entoure, nous réalisons un

processus de sélection. Ce que résume le blogueur Richard Chappuis : Comment fait-

on pour archiver ? Dans ma tête, je ne suis pas obligé de « Enregistrer sous… » les

épisodes de ma vie, ni de leurs donner un titre, pour les retrouver et les organiser. Je

n’ai ni à supprimer définitivement ni à ranger les informations qui ne me sont plus utiles

maintenant, ni même à me demander si elles me seront utiles plus tard.»

*1 http://www.cnrs.fr/insb/recherche/parutions/articles2011/al-giraud.htm

L’économie de la télévision (2002-2011)

Evolution de la part d'audience des chaînes (points , 4 ans et plus, ensemble de la journée)

-1,0

1,0

-1,4

1,4

-0,3

0,3

-0,9

0,9

-1,7

1,7

-3,7

3,7

3,2

-6,2

6,2

5,2

-4,2

4,2

4,1

-4,0

4,0 4,5

-2,9

2,9 3,

4

0

chaînes historiques¹ autres chaînes

2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011

Source : Médiamétrie – Médiamat.

¹ Dont France 5 et Arte sur leurs tranches horaires de di�usion analogique (respectivement avant/après 19 heures). ² Chaînes TNT, thématiques, locales, régionales, interactives, étrangères et non signées.

dont chaînes TNT

Évolution de la part d’audience des chaînes télévisées

Source : Médiamétrie - Médiamat, L’économie de la télévision

4

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Internet par sa nature immatérielle diffuse l’information sur un écran. Peut importe

sa taille ou sa forme, à l’heure actuellle, un écran agit uniquement sur notre sens de

l’ouïe et de la vue. Notre perception spaciale de l’information numérique n’est donc

pas complète. L’utilisation des logiciels pour organiser notre espace nécessite un

fort investissement de temps à l’opposé de notre cerveau qui classe et sélectionne

l’information de façon automatique. La capacité naturelle de sélection dont fait

preuve l’homme grâce à son cerveau signifie que la capacité à organiser notre univers

informationnel serait donc plus compliqué qu’il n’y paraîtrait. Ainsi, John Perry dans

son livre «La procrastination», explique que pour palier au surplus d’informations, nous

avons développé deux systèmes d’organisation, verticale et horizontale. L’organisation

verticale serait représentée par la multiplication des dossiers sur nos ordinateurs et

l’organisation horizontale par la multiplication des icônes sur notre bureau. De ce

fait, la dématérialisation de nos données sur Internet influencerait directement notre

capacité à visualiser l’information dont nous avons besoin. Il s’agit donc de privilégier

l’accès à l’information utile plutôt que la propriété. Le flux d’information est une

des clés : derrière la notion de conductivité on montre la nécessité de permettre à

l’information de transiter à travers l’organisation là où elle doit aller et non pas là où

veut la garder.

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▶ Le surplus d’information Aref JDEY, spécialiste dans la recherche et le management de l’information, anime

le blog de référence «Demain la veille». Il soutient que l’infobésité ne touche pas

uniquement à l’information numérique et existe depuis longtemps. On retrouve ce

sentiment de dépassement, de surcharge, à toutes les époques de l’humanité. De

la Grèce Antique à aujourd’hui, chaque époque la ressent comme quelque chose

de nouveau, comme quelque chose de particulier à son époque. Dans le dialogue

socratique «phèdre» de Platon, Socrate critique déjà l’écriture comme quelque chose

qui nous fait perdre notre mémoire. Descartes explique dans «Recherche de la vérité

par la lumière naturelle», qu’on passe plus de temps à choisir les livres qu’à les trouver.

Par exemple, la bibliothèque du Congrès situé à Washington possède 34,5 millions de

livres. Pourtant, si on lit un livre par semaine et ce sur une durée comprise entre 10 et

100 ans, le plus motivé des lecteurs ne saura en lire qu’une infime partie : 4600 ! Ayant

conscience de cela, afin de ne pas «perdre» notre temps sur un ouvrage «médiocre»,

nous pourrions tenter de rechercher sur internet le livre qui a le plus de chance de

nous plaire. Mais le phénomène se reproduit également sur internet et il est même

renforcé. Nous ne pourrons donc jamais tout voir, tout lire ou tout écouter mais ce

n’est pas ce qui importe. Anaïs Saint-Jude, fondatrice et responsable du programme

BiblioTech de la bibliothèque de Stanford, lors de sa présentation sur la scène du Lift*

2012, estime que : “La surcharge d’information fait partie de la condition humaine: nous

sommes confrontés par trop de possibilité, trop de complexité [...] Ce sentiment de

surcharge exprime autrement notre insatiable curiosité et notre besoin d’innovation.»

Le surplus d’information ne serait dans ce cas pas un problème mais une solution et

ferait partie intégrante de notre envie de chercher, trouver, ranger, classer et comprendre le monde qui nous entoure.

- La difficulté de choisir

«Le seul mauvais choix est l’absence de choix.» Amélie Nothomb

Dans la conférence Ted, le psychologue Barry Scwartz en s’appuyant sur son livre

«The Paradox of Choice: Why More Is Less» nous explique que de nos jours, nous

les citoyens industrialisés, nous attendons tellement la perfection que nous sommes

toujours un peu déçus. Ainsi, la quantité d’information disponible et les outils qui

sont supposés nous guider pour faire le meilleur choix ne nous permettent pas d’être

agréablement surpris. Selon lui réduire ses attentes constituerait le secret de notre bonheur.

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- Difficulté à se concentrer

Une étude réalisée en 2009 par trois chercheurs de l’Université de Stanford montre

que les gens qui sont constamment en ligne et font plusieurs choses à la fois perdent

plus facilement leur concentration. Le temps nécessaire pour retrouver son niveau

de concentration est ensuite 10 à 15 fois plus élevé que le temps d’interruption. De

plus, selon la loi de Carlson notre cerveau a besoin de temps (environ 3 minutes) pour

fonctionner à plein régime sur une tâche donnée. Jonathan Spira, chercheur sur le

surplus d’information, affirme que l’infobésité a un impact négatif sur la mémoire et sur

la concentration. Il compare ce phénomène à une drogue: «Nous développons une

tolérance à l’infobésité et nous avons besoin de toujours plus d’informations pour nous

satisfaire.» Notre dispersion de l’attention aurait donc de grandes conséquences sur

notre capacité à consommer de l’information.

- Ce qu’en retient le designer

S’il faut réduire la quantité d’information numérique qui nous parvient, quels

systèmes ou outils seront enclin à provoquer la sensation de satiété numérique ?

Quelles facultés manque-t-il à l’outil informatique pour lui donner notre savoir-faire

physiologique en matière de traitement de l’information? La première révolution

de l’information était quantitative, la seconde sera probablement qualitative ainsi

l’information primera et non pas la facilité ou la nécessité d’y accéder.

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▶ Une autre manière de consommer Depuis la création d’internet, nos rapports avec l’information ont complètement été

bouleversés. L’ arrivée du « Web 2.0 » a permis l’avènement du «web social» et nous

sommes passés de simples consommateurs à celui d’acteurs de l’information. Cette

nouvelle liberté a permis à quiconque d’exprimer son avis, de partager l’information

qu’il considérera comme importante à ses yeux, celle-ci est à l’origine du succès des

réseaux sociaux qui font aujourd’hui partie de notre quotidien tel Instagram qui le

rend exceptionnel grâce à des différents filtres sur nos photos personnelles. De plus,

les nouveaux outils technologiques qui permettent de capturer de mieux en mieux

notre environnement (cameras GoPro) nous ont rapprochés d’une information de

plus en plus endogène.

L’apparition des nouveaux moyens de communication a bouleversé une grande partie

de nos comportements sociaux : manière de se parler, de se rencontrer, d’écouter, de

lire, d’écrire et de consommer. La plupart des spécialistes affirment que l’on n’a jamais

autant lu ni communiqué que depuis l’apparition d’Internet. Cependant, nous avons

redéfini le terme «lire» et «communiquer». Bernard Poulet spécialiste de l’information

l’explique ainsi : «Que veut dire communiquer quand la connexion est manifestement

plus importante que le message ?» En effet, communiquer implique selon sa propre

définition d’avoir un échange d’information, ce qui n’est plus forcement le cas

aujourd’hui : La communication est de plus en plus indirecte. Par exemple, lorsque

nous diffusons une information sur Facebook ou Twitter, celle-ci restera peut-être

sans réponse. De même, concernant la lecture : les chercheurs de l’ University College

de Londres lors d’une étude sur les manières de lire des internautes ont relevé que

la plupart des visiteurs de ces sites avaient tendance à ne lire qu’une ou deux pages

avant de passer au document suivant. Ce survol de l’information montre que notre

curiosité est proportionnelle à la quantité d’information disponible, rendant donc

difficile l’arrêt de la consommation dans ce flux d’information. Ce qui est clairement

une des conséquences en lien avec l’infobésité.

02. notre rapport à l'information

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▶ Surconnectés Nos téléphones connectés en permanence sur internet nous permettent de

franchir une nouvelle étape dans notre connection aux flux, plus celui-ci augmentera

son débit, plus nous serons enclin à le suivre. La proximité qu’ils nous offrent est

telle qu’il sera même difficile d’en sortir. Ainsi, le professeur Sergio Chaparro dans le

cadre d’un cours sur les technologies de l’information à l’université Rutgers, en 2006,

avait demandé à ses élèves de délaisser leur téléphone portable pendant trois jours.

Résultat: seuls 3 étudiants sur 220 avaient réussi à aller jusqu’au bout de l’expérience.

De cette expérience et de celle réalisée sur 2132 personnes à Londres deux années

plus tard est née le terme « nomophobie » ou la peur de perdre son téléphone. Ces

expériences montrent que la proximité et à la disponibilité de l’information nous

ont rendus lentement dépendants à la celle-ci. Selon Xavier de la Porte, producteur

de l’émission « Place de la Toile » sur France Culture, cette dépendance serait en

partie lié à nos téléphones qui : « tuent chaque seconde d’ennui en un effleurement

d’écran ». Si faire disparaître l’ennui semblerait bénéfique pour l’humain, le centre

de recherche sur les questions sociales d’Oxford, nous met en garde : « La surcharge

informationnelle restreint considérablement le temps alloué à la réflexion personnelle,

à la pensée, ou simplement à la digression mentale[...]. Avec un téléphone portable

continuellement allumé et une pléthore de distractions possibles pour l’œil, il est

compréhensible que certains trouvent difficile de s’ennuyer de manière introspective. »

▶ Notre dépendance à l’information Le neurologue Irving Biederman démontre*1 qu’une nouvelle information déclenche

chez chacun d’entre nous des réactions d’ordre chimique qui nous font nous sentir

bien. Caterina Fake, cofondatrice de Flickr complète en disant : «Notre connexion

permanente aux médias sociaux nous rend plus attentifs à ce que l’on rate et vous

donne le faux sentiment de participer à ce que font les autres par leur intermédiaire.»

Le fait d’être connecté en continue amplifierait donc notre dépendance et serait à

l’origine de l’effet FOMO (Fear of Missing Out) qui se manifeste par la peur de manquer

une information. Ceci est renforcé par la facilité que nous avons à nous comparer par

l’intermédiaire de nos réseaux sociaux. Ainsi, on pourra en permanence se comparer

non seulement à ses amis, collègues ou voisins, mais aussi avec des personnes que

l’on ne connaît pas. Le site klout.com vous permettra par exemple de connaître votre

score d’influence sur vos réseaux sociaux.

*1http://online.wsj.com/public/article/SB120527756506928579-3wNdJRXhkpLqY4EDBt4j3ly1f

oo_20090312.html?mod=rss_free

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- Ce qu’en retient le designer

Les informations endogènes devraient prendre de plus en plus d’importance ces

prochaines années en devenant de plus en plus facile et rapide à produire. Il faudra

alors créer des services qui proposent de réduire cette nouvelle masse incontrôlable

d’information.

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▶ Le culte de l’instantané- Qu’est ce que le temps ?

Le temps est une notion simple et compliquée à la fois, Saint Augustin le philosophe

l’expliquait ainsi: «Quand on ne me le demande pas, je sais ce qu’est le temps ; quand

on me le demande, je ne sais plus.» Dans son livre « Les Tactiques de Chronos » le

physicien français Etienne Klein décrit le temps comme un mot incluant les concepts

de simultanéité, de succession et de durée et conclu que la mort est l’une des meilleures représentations que nous avons du temps car celle-ci est à échelle

humaine. Alban Gonord, dans l’ouvrage sobrement intitulé «Le temps» complète au

travers des explications des plus grand philosophes ce que pourrait être le temps.

Parmi toutes ces définitions, toutes plus intéressantes les unes que les autres, son

analyse de « L’oubli vital » de Nietzsche m’a semblé la plus pertinente dans la notion

d’infobésité : « L’importance capitale qu’il faut attribuer à l’oubli qui permet de bien

«digérer» les choses de la vie et de ne pas s’y attarder. C’est cet oubli encore qui permet

de libérer le regard du flux ininterrompu du temps et de l’orienter vers un horizon

futur et déterminé.[...] L’oubli permet de créer, c’est à dire de participer activement

au présent en sachant ce qu’il faut puiser dans le passé en délimitant un horizon à

venir. [...] » Ainsi, lorsqu’il parle de «digérer» ,de «flux ininterrompu» et «d’oubli», le

rapprochement entre la notion de temps et d’infobésité semble clair.

- Un des fantasme de l’homme : le contrôler

S’il y a un art dans lequel l’homme a des fantasmes sur le contrôle du temps, c’est

dans le cinéma. Que se soit dans la saga «Retour vers le futur» du réalisateur Robert

Zemeckis qui propose de pouvoir influencer notre destinée, dans «Primer» de Shane

Carruth qui nous démontre de manière scientifique la possibilité et complexité d’un

voyage dans le temps, dans «Next» de Lee Tamahori qui montre l’humain capable de

ralentir le temps à sa guise, dans «Minority Report» de Steven Spielberg et la série

«Person of Interest» de Jonathan Nolan où l’humain est capable de prédire les crimes

avant qu’ils ne se réalisent. Mais lorsque Google recrute l’équipe qui a conçu Behavio,

une Startup qui propose de prédire le futur en croisant nos données, la réalité rattrape

la fiction. Malgré l’existence de certains moteurs de recherches qui ne conservent

pas les données personnelles comme Ixquick, d’après un article*1 paru sur le journal

«Le Monde», Google aurait déjà plus de données sur la France que l’INSEE (L’Institut

national de la statistique et des études économiques).

*1http://www.lemonde.fr/idees/article/2013/01/07/les-donnees-puissance-du-futur_1813693_3232.html

03. Le temps

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- Culte du présent

«Une photographie, c’est un fragment de temps qui ne reviendra pas.» Martine Franck

La photographie a été pendant longtemps le meilleur moyen de capturer le présent,

son utilisation dans les journaux a toujours été un excellent moyen de marquer les

esprits comme le montre cette photo de Malcolm Browne en 1963, représentant

l’immolation par le feu d’un moine bouddhiste. Aujourd’hui les nouveaux outils tel

que Twitter nous permettent d’être toujours plus «proche» de l’information. Cette

proximité se calcule par la durée entre le moment où l’événement a lieu et le moment

ou nous recevons cette information. Ainsi, plus ce laps de temps sera court, plus

l’information paraîtra proche de l’utilisateur. Cependant, dans cette course contre le

temps, les journaux télévisés ne semblent ne pas réussir à s’adapter et nous pouvons

de plus en plus régulièrement entendre s’excuser les journalistes pour avoir diffuser

de fausses informations sans en avoir vérifier la source. Par exemple La chaîne Tf1 s’est

excusée, après avoir présenté un reportage sur la pluie de météorites ayant eu lieu le

15 Février 2013 en Russie. Elle avait en réalité diffusé une vidéo filmée le 29 Juin 2011

au Mexique.

Burning Monk - Immolation par le feu d’un moine bouddhiste, Malcolm Browne, Saïgon, 1963

12

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Plus grave encore, Sunil Tripathi qui accusé (à tort) par les réseaux sociaux d’être

coupable des attentats de Boston du 15 Avril 2013 a été retrouvé mort seulement

10 jours après les faits. Avec l’augmentation massive des formats de diffusion de

l’information sur internet, l’avenir du journalisme sera probablement axé sur la

capacité à prouver la crédibilité des informations annoncées. Comme nous avons

pu l’observer lors des différents débats pour l’élection présidentielle où chaque chiffre

énoncé par le candidat était aussitôt contrôlé donnant ainsi au futur président un score

de fiabilité et donc de confiance.

- Consommer le plus rapidement possible

Partout, l’information devient de plus en plus rapide à consommer comme si cette

accélération nous permettait de rendre le présent plus intense. Ainsi, les formats

des articles sur nos smartphones deviennent de plus en plus court à lire. La vidéo

voit également son format se rétrécir comme le prouve les séries à succès tel que

«Kaamelot» de Alexandre Astier (2005), «Scène de ménage» par Alain Kappauf (2009)

ou «Bref» de Kyan Khojandi (2011). Twitter semble avoir encore une fois une longueur d’avance avec son application Vine qui permet la création de vidéo de 6 secondes

seulement. L’utilisation de Vine a déjà été utilisée dans la bande annonce du film «

Wolverine » de James Mangold. Plus représentatif encore du potentiel de cette

application, le festival de cinéma Tribeca*1, a mis sur pied un concours autour de Vine.

*1 http://tribecafilm.com/festival

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▶ Se déconnecter Se déconnecter fait partie d’un mouvement plus large nommé «slow life». Le site

internetactu.net décrit parfaitement le phénomène dans l’article intitulé «Sortir de la

tyrannie du présent»*1. L’article conclu sur une remarque du journaliste Paul Salopek

qui dit «[...]Nous n’avons pas besoin de plus d’informations, nous avons besoin de plus

de sens… Il faut beaucoup ralentir pour comprendre[...]»

Harmut Rosa dans «Accélération Une critique sociale du temps», ajoute «le véritable

luxe serait de prendre son temps.» Il nous propose cette histoire pleine de sens : «

Dans une lointaine contrée rurale d’Europe du Sud, un pêcheur est assis face à une

mer d’huile, et pêche avec une vieille canne artisanale. Un entrepreneur prospère, qui

s’offre un congé en solitaire au bord de la mer, l’aperçoit au cours d’une promenade,

l’observe un moment, secoue la tête et lui demande pourquoi il pêche à cet endroit.

Là-bas, près des brisants, il pourrait prendre deux fois plus de poissons. Le pêcheur

le regarde, étonné. «Pour quoi faire ?», demande-t-il d’un air perplexe. Eh bien,

il pourrait vendre les autres poissons au marché de la ville voisine, acheter avec le

produit de sa vente une canne à pêche en fibre de verre toute neuve, et en plus des

hameçons spéciaux extrêmement efficaces. Le produit quotidien de sa pêche en serait

certainement doublé sans aucune peine. «Et alors ?», demande le pêcheur toujours

aussi perplexe. Et alors, répond l’homme d’affaires qui commence à perdre patience,

il pourrait rapidement acheter un bateau, naviguer en haute mer, prendre dix fois plus

de poissons, et devenir ainsi rapidement assez riche pour s’offrir un chalutier moderne.

L’homme d’affaires rayonne, grisé par sa propre vision. «Bien, dit le pêcheur, et qu’est

ce que je fais après ?»

*1 http://www.internetactu.net/2013/02/05/sortir-de-la-tyrannie-du-present/

Lorenz Potthast - The Decelerator Helmet – Une vision ultra-ralentie on Vimeo.

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Page 22: Emilien simon   mémoire - version finale a4 double

Après, s’enthousiasme l’entrepreneur, il contrôlera la pêche sur toute la côte et il pourra

faire travailler pour lui toute une flotte de bateaux de pêche. « Ah, répond le pêcheur,

et moi, qu’est-ce que je fais, s’ils travaillent pour moi ?» Eh bien, il n’aura plus qu’à

rester assis sur la plage toute la journée, à profiter du soleil et à pêcher. « Oui, dit le

pêcheur, c’est justement ce que je suis en train de faire». » Alors qu’on s’inquiétait

hier de la fracture numérique, qui donnerait aux milieux aisés une avance en termes

d’équipement et d’accès aux nouvelles technologies, les précurseurs d’hier sont ceux

qui peuvent aujourd’hui s’offrir le luxe de décrocher. L’école «Waldorf School of the

Peninsula» en Californie propose même à des parents de limiter l’exposition aux écrans

jusqu’à l’équivalent de la sixième, et n’introduit l’outil informatique qu’en quatrième.

- Ce que retient le designer

Le temps pourrait bien devenir la nouvelle unité de mesure de l’information au

détriment de son espace occupant nos disques durs. Donner la possibilité à l’utilisateur

de se déconnecter de notre service contrairement aux apparences, pourrait s’avérer

être un plus.

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▶ Le stockage- Accroissement des capacités de stockage

L’augmentation des capacités de stockage depuis les années 1950 concerne non

seulement les supports physiques des programmes et contenus détenus par les uti-

lisateurs finaux, mais aussi les serveurs et les capacités des offreurs. Cette capacité

augmente grâce aux progrès de la densité de stockage (volume stocké/cm2). Ces

augmentations de performances se combinent avec une concurrence très vive sur les

prix, en sorte que le coût de stockage (prix/volume) diminue aussi de manière expo-

nentielle (Morris et Truskoski, 2003), permettant des gains d’efficacité dans toutes les

filières de l’informatique associées (PC, baladeurs, serveurs,...)

- Le stockage est moins coûteux

En se basant sur le disque dur externe qui est le format de stockage le plus répandu

aujourd’hui, le modèle standard propose une capacité de 500 Go (équivalent d’environ

500 films, 125 000 chansons ou 500 000 images). Aujourd’hui sur le site materiel.net, la

différence de prix entre le 500 Go (proposé à 53 euros) et le 1000 Go (1To) n’est que

d’environ 8 euros. Le format 1 To est donc rapidement devenu la nouvelle référence

en terme de quantité/prix. Pourtant, il faut savoir qu’en cas d’accident, le coût d’une

récupération des données passe d’une moyenne de 450 euros pour un disque dur

500 Go à environs 550 euros pour le modèle 1 To. L’enjeu aujourd’hui n’est plus le

rapport quantité/prix, mais le rapport quantité/prix/fiabilité. C’est pourquoi nous

voyons aujourd’hui apparaître des sites internets qui propose de sauvegarder nos

données en ligne. Par exemple, le site dropbox.com propose de stocker nos informa-

tions moyennant un prélèvement mensuel.

Les avantages principaux étant la garantie d’une information protégéz contre les acci-

dents du quotidien (chute, chaleur,...) et l’accessibilité à ses données personnelles à

partir de nos appareils tel que smartphone et ordinateur fixe et portable.

04. LES SOLUTIONS

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En revanche, l’offre n’est pas équivalente à l’achat d’un disque dur externe sur

le rapport quantité/prix. En effet, la location d’un espace de 500 Go sera facturé en

moyenne 50 euros par mois, ce qui correspond au prix d’un disque dur externe d’un

espace de stockage équivalent.

De plus, ce système de stockage en ligne pose le problème de la propriété de nos

données puisque la sécurité sur internet est encore loin d’être parfaite.

Pour finir, si nous comparons uniquement en terme de coût pour l’utilisateur, alors

qu’il suffit par exemple d’imprimer ses photos pour les regarder, d’un baladeur pour

écouter sa musique ou d’un classeur pour ses documents administratifs, cette nou-

velle solution de stockage sur internet impose l’achat de matériel informatique, d’une

connexion internet et d’un abonnement mensuel ce qui représente un investissement

important.

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- On stock de plus en plus

Aujourd’hui, nous gardons certains réflexes du passé pour stocker notre

information. Ainsi, nos films sur cassette ou dvd nécessitaient une armoire parfois très

encombrante pour les plus cinéphiles d’entre nous. Notre musique sur vinyl imposait

souvent un rangement très encombrant et nos disques compacts signifiaient des

tours dépassant parfois le mètre. Nos photos étaient stockées sur des albums et il

était très amusant de les ressortir lors des grandes réunions de famille. Aujourd’hui,

la dématérialisation de toutes ces données montre que notre comportement a

radicalement changé. Par exemple, nos listes interminables de films rendent difficile le

choix de ceux-ci, à l’opposé des séries où l’on se contente de suivre l’épisode qui suit ;

les radios sur Internet sont capables d’analyser nos goûts au fur et à mesure de notre

écoute (exemple : pandora.com) et ont remplacé nos disques compacts. De même,

nous accumulons nos photos sur les réseaux sociaux sans jamais plus les regarder.

Donc, nous stockons de plus en plus parce que le support a évolué. La numérisation

des données a permis une nouvelle polyvalence qui a brisé les couples contenus/

supports. En effet, chaque type de contenu était stocké et diffusé sous une forme

propre, spécifique, incompatible avec celle d’autres contenus : disque vinyle pour

le son, papier pour l’édition, cassettes vidéo pour l’image. Aujourd’hui, la diversité

des support de stockage n’est plus exclusive et assimilée à un style de contenu. Par

exemple, un film pourra être stocké et consulté sur un téléphone portable, une tablette

tactile et un ordinateur portable.

Francois Ferracci - LOST MEMORIES, 2012

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Page 26: Emilien simon   mémoire - version finale a4 double

Avoir un doublon de ce film sur un ordinateur fixe n’a aucune conséquence, le

phénomène est multiplié par le nombre de support que nous possédons. Ainsi, la

diversification de ces moyens de stockage et de consultation renforce la difficulté

à organiser et à classer notre information. La synchronisation entre les différents

supports sera donc probablement une des clés de réussite du futur.

- La mémoire artificielle

Marie-Anne Chabin, dans son livre intitulé «Sérendipité et autres curiosité» explique

«Les mémoires informatiques sont de plus en plus puissantes, et celles des individus de

plus en plus plates, étendues mais peu profondes. [...] plus on est abreuvé de données

et plus on a de mal à les tamiser, à les capitaliser[...].» L’outil informatique est donc

handicapé de ne pouvoir « oublier » et de « se rappeler» comme nous en sommes

capables. Nous considérons donc cette extension de mémoire artificielle comme une

extension de notre mémoire personnelle et nous faisons de moins en moins appel à

cette dernière. Notre répertoire téléphonique est un exemple flagrant car aujourd’hui

en cas d’urgence, sans notre téléphone il nous sera plus difficile de nous rappeler du

numéro d’un de nos proches. Cela atténue progressivement la confiance que nous

pouvons avoir en notre propre mémoire. De plus, ceci est un cercle vicieux, car plus

nous utilisons notre mémoire artificielle, moins la personnelle est performante et moins

nous avons confiance en nous, plus nous utilisons notre mémoire artificielle. Pourtant,

notre mémoire qui fait office de filtre naturel, trie notre information automatiquement,

et selon son degré d’importance (Source : Ca m’intéresse N°371, paru le 28 décembre

2011), ce qui n’est pas le cas de notre mémoire artificielle présente sur les disque durs.

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▶ Les filtres- Individuels ou universels

Lors d’une conférence TED*, JP Rangaswami le technologue et économiste propose

cette idée : « L’information est comparable à la nourriture : la façon dont nous produi-

sons nos aliments et notre information sont similaires.» , il cite alors les points com-

muns qui existe entre l’obésité et l’infobésité et conclu sur une réflexion de Clay Shirky

spécialiste de l’information qui dit « la surcharge d’information n’existe pas, il y a seu-

lement une défaillance du filtre » Pour «filtrer» notre consommation de nourriture nous

disposons d’atouts physiologiques telle que la sensation de satiété qui nous permet

de réguler notre appétit. Notre système gustatif qui, associé à notre mémoire, nous

permet d’apprécier la qualité de ce que nous mangeons. Cependant, ces systèmes de

filtration physiologiques n’existent pas encore dans l’univers du numérique, ainsi nous

avons créer un ensemble de solutions palliatives à cela. De ce fait, pour réguler notre

appétit et nos préférences, nous utilisons des agrégateurs de flux rss*1 qui ne règlent

en fait qu’une partie du problème puisqu’il n’y a pas de limite à la quantité de flux

suivi. Autre exemple, selon Eli Pariser auteur du livre «Filter bubble», pour augmenter

la pertinence de notre résultat qui s’affiche lors d’une recherche sur internet, Google

sélectionne ce qui s’affiche selon 57 critères et cela même hors connexion. Cette solu-

tion paraîtrait très appréciable si elle ne posait pas le problème de la liberté de choix

sur internet*2. Les systèmes de filtres ne s’appliquant uniquement qu’à l’individu ne

résolve donc le plus souvent qu’une partie du problème et en créer d’autres bien plus

complexes. C’est pourquoi j’ai décidé de mettre en avant les filtres applicables à un

ensemble de personnes.

*1 S’abonner au flux rss de sites Internet donne la possibilité de consulter rapidement l’activité de ses sites

préférés en obtenant une vue d’ensemble grâce à l’utilisation d’agrégateurs qui permettent de réunir ses

articles sur une même interface, un peu à la manière d’une boite mail.

*2 http://www.ted.com/talks/lang/fr/eli_pariser_beware_online_filter_bubbles.html

Feedreader - Agrégateur de flux rss

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- La communauté est devenu un filtre pour l’information

Depuis la création des réseaux sociaux comme Facebook en 2004, la diffusion de

l’information a progressé exponentiellement. Aujourd’hui, il n’est pas rare de trouver

des personnes inscrites sur plusieurs réseaux sociaux. Tout est fait dans le but de nous

encourager à partager le plus largement possible notre information et diffuser celle

des autres personnes. Il est par exemple possible de partager une information sur

l’ensemble de ses réseaux en une seule fois, comme le propose le site socialcam.

com. L’influence de la communauté sur la popularité d’une information est telle, que

sa crédibilité et donc sa diffusion sont limitées. L’importance des communautés dans

l’approbation de l’information est telle qu’elle remplace progressivement celle des

spécialistes. Exemple concret, le nombre d’avis sur un film, un album, un article, etc,...

prime sur l’expertise d’une seule personne. Pour illustrer cette idée, le journaliste

américain James Surowiecki, dans son livre «la sagesse des foules» donne l’exemple,

d’une foule dans un marché aux bestiaux qui fournit le poids exact d’un taureau,

en faisant la moyenne de huit cent réponses. Cette tendance de fond se confirme

lorsqu’on observe le nombre de site dédiés à la critique dans de nombreux domaines

culturels tel que la musique, le cinéma, la bande dessinée, le livre, le jeux vidéo.

-La communauté à l’échelle locale

Grâce à la géolocalisation, qui permet de localiser précisément notre position, grâce

au développement des moteurs de recherches locaux et à la progression fulgurante de

la téléphonie mobile, tous les critères sont réunis pour mettre en avant une information

de proximité. «Life is local», a exprimé Tim Bowler, directeur général du Johnson Press

(l’un des plus trois grands groupes britanniques de journaux locaux et régionaux.) qui

à côté de ses 18 quotidiens et de ses trois cents hebdomadaires, a développé 323

sites Internet afin de couvrir tous les besoins de ses lecteurs en matière d’informations

et de services.

En France, le groupe Ouest-France a créer en 1999 le site maville.com, un réseau de

site Internet de proximité, composé de guides urbains, d’actualité, de services, de

petite annonces et de publicité à échelle de la ville et du département. Clay Johnson

référence en matière de données ouvertes au public précise : «Créer un mouvement

d’information durable, un peu comme les mouvements d’agriculture durable.

Consommez des informations locales. Consommez des informations à propos de vos

amis et de votre famille avant tout. Soyez plus concernés par votre épouse que par

celle du président. Ou que par les stars. » L’information locale fera donc ainsi office de

filtre naturel en redonnant de la valeur à l’information elle-même.

21

Page 29: Emilien simon   mémoire - version finale a4 double

21

- Le multi-écran

Le numérique a permis d’augmenter l’expérience du média en mêlant de manière

interactive sons, vidéos, photos et des différents types de données disponibles telles

que la géolocalisation, la température, l’altitude, etc... Cette amélioration a largement

contribué au succès des écrans qui grâce à leurs interfaces ont permis l’agencement

de l’information et sa meilleure hiérarchisation de façon ergonomique. Grâce à ses

différents supports pour l’information, celle-ci est fragmentée et donc plus facile à

consommer. Le fournisseur d’accès internet Numéricable inclus par exemple une

tablette tactile dans son offre. Plus marquant encore, Toute l’interface de Window 8 a

été clairement conçue dans le but d’optimiser la lecture de l’information sur tablette

numérique, cependant leur nouvelle interface ne se prête pourtant pas à un écran de

22 pouces par exemple.

- Ce que retient le designer

L’augmentation de la capacité de stockage de notre information quelque soit sa forme,

n’apportera aucune solution à l’infobésité. la solution se situe donc dans la création

de filtres performants capable de s’appliquer à l’ensemble d’une communauté. Ainsi,

l’approbation qualitative de l’information par une communauté, en revalorisant celle-

ci permettrait la création d’un filtre social durable et fiable.

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Page 30: Emilien simon   mémoire - version finale a4 double

Le premier risque dans ce mémoire était de souffrir des effets de mon propre sujet

et donc de me perdre dans l’énorme quantité d’information disponible autour de moi.

Mes recherches ont donc été méthodiques et mes résultats immédiatement classés

en catégorie selon leurs pertinences, fiabilités et apports.

Au fur et à mesure de ma progression, je me suis rendu compte de la complexité de

ce sujet entre autre sur la notion de temps. Mais j’ai pris cette sophistication comme

un défi et cela a attisé ma motivation et m’a permis de m’enrichir personnellement

et professionnellement. Ce sujet m’a inspiré de nouvelles idées proche des

problématiques liées à ma spécialisation comme : Comment hiérarchiser les données?

Comment apporter une information pertinente aux consommateurs ? Comment

utiliser les nouvelles données que nous capturons autour de nous ? Comment filtrer

l’information par l’approbation d’une communauté ? Mais à fait naître en moi des

questions plus originales que je garde précieusement sur le coin d’un carnet comme :

Comment améliorer de manière qualitative une information qui devient quantitative ?

Comment réduire ses attentes afin de mieux apprécier la découverte d’une information

? Comment utiliser notre connexion aux flux de données afin de se déconnecter ?

Ce sujet touche énormément d’aspects de l’information numérique. Son seul point

faible étant l’ampleur du travail à réaliser sur chacun d’entre eux. Mais ce problème sera

résolu je l’imagine par mon travail en équipes pluridisciplinaires. Mes rôles principaux

en tant que designer seront ma capacité à proposer des idées créatives et innovantes

en m’assurant dans la mesure du possible de veiller au bon déroulement du projet, de

sa problématique de départ à sa réalisation. Ma formation en management du design

et de l’innovation semble donc rassembler toutes les compétences requises.

CONCLUSION

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Dans ce mémoire j’ai décris l’information comme étant un outil indispensable à la

démocratie. J’ai expliqué que sa conversion au format numérique signifiait d’encou-

rager la diversification de son support et de privilégier l’accès à une information utile.

J’ai souligné que le surplus d’information faisait partie intégrante de notre envie de

chercher, trouver, ranger, classer et comprendre le monde qui nous entoure et que

notre difficulté à choisir était due essentiellement à notre niveau d’exigence. J’ai mis

en valeur que notre participation à la création de l’information avait changé notre

rapport avec elle mais avait également créer une forme de dépendance et que nous

ne prenons plus de temps d’apprécier celle-ci. En parcourant les solutions possibles à

l’infobésité je retiendrais que la crédibilité et la fiabilité de l’information étaient les

bases sans lesquelles un projet ne pouvait pas fonctionner. J’attacherai un soin parti-

culier à créer et varier les supports de mon information. J’ai conclu qu’il fallait mettre

en avant une information locale car celle-ci était source de contact humain. Ainsi la

suite de ce projet sera dirigée par le questionnement suivant :

«Comment rester exigeant avec l’information qui nous entoure malgré la tentation du moindre effort pour la trouver ?»

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Page 32: Emilien simon   mémoire - version finale a4 double

Je remercie Jean-yves Chevalier et Delphine Giuliani pour leur suivi et leurs conseils

tout au long de l’écriture de ce mémoire. Je souhaitais adresser mes remerciements

les plus sincères aux personnes qui m’ont apporté leur aide et qui ont contribué à

l’élaboration de ce mémoire. Je n’oublie pas mes parents pour leur contribution, leur

soutien et leur gentillesse. Je tiens à exprimer ma reconnaissance envers ma maman

qui a eu la patience de lire et corriger ce travail. Enfin, j’adresse mes remerciements à

tous mes proches et amis, qui m’ont toujours soutenu et encouragé dans les moments

les plus durs.

Merci à Clément, Vincent, Thomas, Michael, Betty, et tous les autres !

REMERCIEMENTS

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▶ Bibliographie

John Perry, La Procrastination - L’art de reporter au lendemain, Edition Autrement, 2012

Marie-Anne Chabin - Sérendipité et autres curiosités, recueil, 2012

Olivier Carpentier - Les ressort de la mémoire, page 58, Ca m’intéresse N°371, 28

décembre 2011

Philippe Chantepie, Alain Le Diberder - Révolution numérique et industries culturelles,

La découverte, 2010

Bernard Poulet - La fin des journaux et l’avenir de l’information, Gallimard, 2009

James Surowieck - la sagesse des foules, Lattès, 2008

Hartmu Rosa - Accélération une critique social du temps, La découverte, 2005

Jeremy Rifkin - L’âge de l’accès, La découverte, 2005

Etienne Klein - Les tactiques de Chronos, Flammarion, 2004

Alban Gonord - Le temps, Flammarion, 2001

Nietzsche - Seconde Considération intempestive, GF-Flammarion, page75-81, 1988

SOURCEs

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Page 34: Emilien simon   mémoire - version finale a4 double

▶ Webographie

Rémi Sussan, «Sortir de la tyrannie du présent», 2013

http://www.internetactu.net/2013/02/05/sortir-de-la-tyrannie-du-present/

Anaïs Saint-Jude, «Perspective on information overload», Lift 2012

http://www.youtube.com/watch?v=ny022v-zTOE&feature=related

Xavier de la Porte, «Les smartphones ont-ils tué l’ennui ?», internetactu.net, 2012

http://internetactu.blog.lemonde.fr/2012/10/12/les-smartphones-ont-ils-tue-lennui/

JP Rangaswami, «Information is food», 2012

http://www.ted.com/talks/lang/en/jp_rangaswami_information_is_food.html

Claire Abrieux, «L’information au régime», 2012

http://www.rslnmag.fr/post/2012/04/02/Linformation-au-regime-!.aspx

Jenna Wortham, «Feel Like a Wallflower? Maybe It’s Your Facebook Wall», The New

York Times, 2011

http://psychcentral.com/blog/archives/2011/04/14/fomo-addiction-the-fear-of-missing-out/

Barry Schwartz, «The paradox of choice», 2009

http://www.ted.com/talks/barry_schwartz_on_the_paradox_of_choice.html

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▶ Filmographie

Retour vers le futur - réalisateur Robert Zemeckis, 1985

Primer - Shane Carruth, 2007

Next - Lee Tamahori, 2007

Minority Report - Steven Spielberg, 2002

Person of Interest - Jonathan Nolan, 2011

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EMILIEN SIMON

emiliensimon.com

[email protected]

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