effondrement et refondation républicaine (1940-1946)

20
EFFONDREMENT ET REFONDATION RÉPUBLICAINE (1940-1946) F. Sudi-Guiral – Collège de Verrière Issoire - Groupe collège avril / mai 2012

Transcript of effondrement et refondation républicaine (1940-1946)

Page 1: effondrement et refondation républicaine (1940-1946)

EFFONDREMENT ET REFONDATION RÉPUBLICAINE (1940-1946)

F. Sudi-Guiral – Collège de Verrière Issoire - Groupe collège avril / mai 2012

Page 2: effondrement et refondation républicaine (1940-1946)

IV - LA VIE POLITIQUE EN FRANCE (environ 35% du temps consacré à l’histoire)

Thème 2 - EFFONDREMENT ET REFONDATION RÉPUBLICAINE (1940-1946)

CONNAISSANCES

La défaite de 1940 entraîne le renversement de la IIIe

République.

Le régime de Vichy, autoritaire et antisémite s’engage

dans la voie de la collaboration avec l’Allemagne

nazie.

En liaison avec la France libre, la Résistance

intérieure lutte contre l’occupant et porte les valeurs

de la République.

La Libération marque le retour à la République.

DÉMARCHES

Pétain et de Gaulle illustrent les deux attitudes devant la défaite

militaire. On présente les conditions de l’armistice et on explique le

renversement de la République.

La politique du régime de Vichy et sa collaboration avec l’Allemagne

nazie sont présentées en s’appuyant sur quelques exemples de ses

décisions et de ses actes.

La Résistance est abordée à travers l’exemple d’un réseau, d’un

mouvement ou d’un maquis. Une mise en perspective permet

d’expliquer la place de la France libre, ses liens avec la Résistance

intérieure et le rôle qu’elle a joué dans son unification.

L’étude du programme du CNR ou du préambule de la Constitution

de 1946 met en évidence la volonté de refonder les valeurs

républicaines en relation avec les grandes réformes de la Libération.

CAPACITÉS

Connaître et utiliser le repère suivant

- Appel du général de Gaulle : 18 juin 1940

- Régime de Vichy 1940-1944

- Fondation du Conseil National de la Résistance par J. Moulin : 1943

- Libération de la France, rétablissement de la République (la IVe), droit de vote des femmes, Sécurité sociale : 1944-1945

Raconter la défaite et expliquer ses conséquences, l’armistice et la fin de la IIIe République

Décrire

- Quelques aspects de la politique du régime de Vichy révélateurs de son idéologie

- La vie d’un réseau, d’un mouvement ou d’un maquis en montrant les valeurs dont se réclament les hommes et les femmes

de la

Résistance.

- Les principales mesures prises à la Libération (dont le droit de vote des femmes)

La question de la France durant la

Seconde Guerre mondiale désormais

abordée indépendamment de l’analyse du

conflit mondial vu par ailleurs comme une

guerre d’anéantissement (thème 3, IIe

partie).

Les bornes chronologiques données sont celles de la

disparition de la IIIe République et de la mise en place de

la IVe République une approche essentiellement

politique : comment le régime républicain et ses valeurs

ont-ils été remis en cause après la défaite de 1940 avant

d’être rétablis après la Libération ?

4 temps forts

Démarche inductive préconisée

Page 3: effondrement et refondation républicaine (1940-1946)

Proposition de mise en œuvre

• Cours en 5h (+ 1h d’évaluation), articulé autour des 4 temps forts donnés par le programme. 2h consacrées à la Résistance.

• On intègre l’histoire des arts. Le programme rappelle en effet qu’il y a un « Thème transversal au programme d’histoire : Les arts, témoins de l’histoire du monde contemporain. Ce thème ne fait pas l’objet d’un enseignement isolé ; le professeur choisit un itinéraire composé d’au moins une œuvre et/ou un artiste significatif pour chacune des parties du programme. »

• On privilégie la démarche inductive.

• On intègre le travail et l’évaluation par compétences :

- lire Repérer les informations dans un texte à partir des éléments explicites et des éléments implicites nécessaires

Dégager, par écrit ou oralement, l’essentiel d’un texte lu

- écrire Rédiger un texte bref, cohérent et ponctué, en réponse à une question ou à partir de consignes données

- avoir des connaissances et des repères Relevant du temps : les grands traits de l’histoire (politique, sociale, économique, littéraire, artistique, culturelle) de la France et de l’Europe

Relevant de la culture littéraire : œuvres littéraires du patrimoine

- situer dans le temps Situer des événements, des œuvres littéraires ou artistiques

Établir des liens entre les œuvres (littéraires, artistiques) pour mieux les comprendre

- lire et pratiquer différents langages Lire et employer différents langages : textes – cartes – images

- faire preuve de sensibilité, d’esprit critique, de curiosité Être sensible aux enjeux esthétiques et humains d’un texte littéraire

Être capable de porter un regard critique sur un fait, un document, une œuvre

- connaître les principes et fondements de la vie civique et sociale Principaux droits de l’Homme et du citoyen

Valeurs, symboles, institutions de la République

Règles fondamentales de la démocratie et de la justice.

Page 4: effondrement et refondation républicaine (1940-1946)

Un parcours à travers l’engagement et l’œuvre de René Char Le poète

(1907 l’Isle s/ Sorgue – 1988 Paris)

- publie ses premiers recueils en 1928-1929.

- dans les années 1930, s’associe aux Surréalistes (Eluard, Breton, Aragon) et est très proche de Dalí, Picasso, Kandinsky… par la suite prend ses distances avec le groupe.

- 1ers engagements contre les manifestations des ligues d’extrême-droite à Paris et les massacres lors de la Guerre d’Espagne.

Le résistant - 1939 : mobilisé, envoyé en Alsace -1940 : assiste à la débâcle, démobilisé, revient en Provence -1941 : entre dans la clandestinité et adhère à l’Armée secrète sous le nom d’Alexandre -1942/43 organise autour de Céreste (Bses- Alpes) un réseau de résistance et intègre la Section atterrissage et parachutage de la zone sud au sein des

FFC. -Juillet 1944 appelé à Alger par l’état-major interallié en vue de préparer le débarquement de Provence. -Septembre 1944 : affecté au bureau liquidateur de la SAP mais refuse de participer à l’épuration.

L’œuvre « de guerre » R. Char a catégoriquement refusé de publier pendant toute la durée de la guerre mais il n’a pas cessé d’écrire car la poésie est « la parole du plus haut silence ». Durant sa période de résistance, il consigne aussi dans un carnet toutes sorte d’informations : pensées, images, comptes, récits … qu’il cache au moment de partir à Alger, retrouve à son retour et détruit en partie ensuite mais dont les éléments restants donneront finalement matière à la rédaction des Feuillets d’Hypnos. Après la Libération, publication successive de -1945 : Seuls demeurent (1938-1944) -1946 : Feuillets d’Hypnos (1943-1944) -1947 : Le poème pulvérisé (1945-1947)

regroupés par la suite dans Fureur et Mystère.

Page 5: effondrement et refondation républicaine (1940-1946)

Quelques thématiques pour un travail transdisciplinaire

• Histoire

- la figure de R. Char peut constituer « un fil rouge » qui tout au long du cours incarnera les événements

- l’engagement du résistant

- son témoignage

- l’impact des événements vécus sur son écriture …

• Français

- l’écriture poétique ( ici, le fragment poétique)

- la « poésie de la détresse » : mise en perspective avec d’autres œuvres de poètes résistants ou d’autres périodes

- la parole essentielle…

Arts plastiques - Georges de La Tour , Job raillé par sa femme (1625-1650) dont une reproduction avait été installée au mur du quartier général de Char à Céreste et qu’il considérait comme emblématique de l’espoir qui animait les Résistants. (cf. Feuillets d’Hypnos, 178)

Page 6: effondrement et refondation républicaine (1940-1946)

1ère heure

La défaite de 1940

Quelles sont les conséquences de la défaite militaire de la France en juin 1940 ?

• Objectifs

- rappeler les circonstances de la défaite militaire de juin 1940

- présenter les attitudes opposées de Pétain et de de Gaulle face à cet événement

- présenter les conditions de l’armistice

- expliquer le renversement de la IIIe République

• Notion Vocabulaire

République débâcle – exode - armistice

• Démarche envisagée

1) Les circonstances de la défaite en mai-juin 1940 sont présentées au moyen d’un récit fait par le professeur. La fiche de travail 1 sert de support R. Char est témoin des événements.

2) Lecture et analyse successives du message du maréchal Pétain aux Français (17 juin 1940) et de l’appel du général de Gaulle (18 juin).

3) On examine les conséquences militaires, territoriales (carte) et surtout politiques de la défaite : le renversement de la République, les pleins pouvoirs octroyés à Pétain et la naissance de l’État français (doc. extraits de la Loi constitutionnelle du 10 juillet 1940) .

Page 7: effondrement et refondation républicaine (1940-1946)

Fiche de travail 1 La défaite de 1940

Doc. 1- Les troupes allemandes défilent sur Doc. 2 L’exode de la population française les Champs Elysées (14 juin 1940) (photographie de juin 1940)

À partir de ces deux documents, décrivez la situation de la France en juin 1940. Comment s’explique-t-elle ?

René Char, poète mobilisé et témoin de la défaite

R. Char est né en 1907 à l’Isle-sur-la-Sorgue, dans le Vaucluse. Dès 1928, il publie un premier recueil de poèmes. Au cours des années 1930, il se lie avec les Surréalistes (P. Eluard, A. Breton, Aragon) et plusieurs de ses textes sont illustrés par des peintres du groupe (Dalí, Kandinsky, Picasso). De cette époque datent ses premiers engagements : en 1934, il s’oppose aux manifestations des ligues fascistes à Paris ; en 1937, il dénonce les massacres opérés pendant la Guerre d’Espagne.

En septembre 1939, R. Char est mobilisé à Nîmes, dans un régiment d’artillerie. Il part en Alsace jusqu’en mai 1940. À cette date, l’avancée allemande contraint son unité à battre retraite vers le sud du pays. R. Char assure alors la coordination et la protection de sa colonne. Arrivé à Gien, avec d’autres soldats, il aide les populations civiles démoralisées à franchir le pont sur la Loire, sous les bombardements de l’aviation allemande. Il témoigne de cette période sombre dans une lettre adressée à sa femme le 19 juin 1940 :

« Nous avons été de toutes les bagarres et ce soir nous filons du côté de Poitiers. Ah ! J’en ai vu de belles ! La lâcheté des uns, la panique des autres, l’absence de toute aviation de soutien, le dénuement complet des armes. Quelle responsabilité pour les démagogues qui nous ont mis là ! Les salauds ces politiciens. Mais le moment n’est pas à gémir. Ne t’inquiète pas, je n’ai pas eu une égratignure. Je sais que j’en sortirai vivant pour après. J’ai tenu dans mes bras des femmes et des enfants ensanglantés, quand terrorisés par les bombes d’avions la plupart de ceux qui devait les secourir

fuyait. Mais je n’ai pas vu que des lâches. De-ci de-là des HOMMES, les hommes de demain. Mon amour, crois en l’avenir, notre avenir. »

Avec ses hommes, R. char réussit à gagner le sud-ouest de la France. Il est démobilisé le 26 juillet et rentre dans le Vaucluse en septembre1940.

Relevez les mots et les expressions employés par R. Char pour décrire la situation des Français devant l’avancée allemande. D’après cette lettre, quel est néanmoins son état d’esprit dans ce moment particulièrement difficile ?

Page 8: effondrement et refondation républicaine (1940-1946)

2ème heure

Le régime de Vichy

Quels sont les caractères du régime qui s’installe après la défaite ?

• Objectifs

- définir le régime de Vichy

- présenter sa politique à partir de quelques exemples de ses décisions et de ses actes.

• Notions Vocabulaire

régime autoritaire État français – Milice – rafle

collaboration – antisémitisme

• Démarche envisagée

1) À partir de la fiche de travail « R. Char, poète engagé et surveillé », on aborde la contrôle de la population française par les autorités de Vichy qui collaborent avec l’occupant.

2) On complète ensuite un tableau de synthèse permettant d’analyser le fonctionnement du régime de Vichy et de voir en quoi il s’oppose au régime républicain et à ses valeurs.

Page 9: effondrement et refondation républicaine (1940-1946)

Fiche de travail 2 R. Char, poète engagé et surveillé

En août 1940, R. Char a regagné son domicile de l’Isle-sur-la-Sorgue. Dès le 21 septembre, le

commissaire spécial d’Avignon demande qu’on lui fournisse tous les renseignements que l’on pourra « recueillir confidentiellement » sur R. Char et qu’on lui indique « notamment quelle est exactement, à l’heure actuelle, son attitude au point de vue politique et national ». En octobre, du fait de ses anciennes relations avec les Surréalistes, R. Char est dénoncé comme militant d’extrême-gauche auprès du préfet du Vaucluse. La police de Vichy procède alors à une perquisition minutieuse aux Nérons, propriété de sa famille. Prévenu par un policier de l’imminence de son arrestation, R. Char quitte l’Isle-sur-la-Sorgue pour le village de Céreste dans les Basses-Alpes où, grâce à des amis, il trouve avec sa femme un refuge momentanément sûr.

Doc. 1

Doc. 2 Doc. 3 Document établi par la Gestapo avec la complicité de la police À la Libération, R. Char retrouve cette liste du régime de Vichy. à Avignon et dresse un bilan en note :

Questions Doc. 1- Comment la police de Vichy agit-elle vis-à-vis de René Char ? Pourquoi ? Comment le poète évite-t-il l’arrestation ?

Doc. 2- Présentez ce document. Comment expliquer que certains Français soient qualifiés d’ « indésirables » ? Doc. 3- D’après les notes de R. Char, qu’est-il arrivé à nombre d’entre eux ?

Une note du cabinet du préfet du Vaucluse, datée du 27 février 1941, montre combien il faiasait l’objet d’une surveillance constante ainsi que ses proches : « Le jeune Moustrou [neveu de Char] habite avec son père grand mutilé de 1914 et sa mère (née Char) à la villa de sa grand-mère Mme Char, veuve d’un ancien maire de l’Isle. Dans la même villa habitaient jusqu’à ces derniers temps, le professeur Lebouchet et sa femme communistes militants qui ont eu leur changement ; et également jusqu’à ces derniers temps le communiste René Char avec sa femme, juive parisienne, dont les parents juifs sont réfugiés à l’Isle ; actuellement René Char habite la maison des demoiselles Roze impasse de la République à l’Isle toujours. Le communiste René Char est en contact ininterrompu avec les militants communistes de l’Isle, voit journellement Fay, président de l’importante et agissante cellule de l’Isle. »

Liste des indésirables demeurant à l’Isle au 30 avril 1943

Noms Profession

Yzorce pêcheur Curel Francis chauffeur chez Grillet Fidèle menuisier Fay Bouscarle Vallat secrétaire hospices Capdegelle directeur d’études Curel (Mad

me) institutrice

Bellion Léon trésorier du parti Irisson photographe Brunel ouvrier du gaz Cubino chef d’atelier Meyer employé Rousselot Michel Yvonne institutrice Bressy ancien facteur Char René homme de lettres Papelon Roberto Doumas instituteur Irène marchand des 4 saisons Veda réparateur de machines …

Résultat :

Yzorce père : déporté en Allemagne Curel Francis (mon compagnon, celui que je nomme souvent dans mes poèmes, l’Elagueur) : déporté en Autriche Fidèle : déporté, mort en déportation Bellion : déporté, se meurt de tuberculose Irisson : déporté Papelon : assassiné Etc…

Page 10: effondrement et refondation républicaine (1940-1946)

À l’aide du manuel, rappelez comment le régime de Vichy s’est mis en place, qui le dirige et quelle partie du territoire il administre.

Dans le nouveau régime, qui détient le pouvoir ? Comment l’exerce-t-il ? Dans quels buts la Milice est-elle constituée ? Selon vous, contre qui son action est-elle dirigée ?

Un régime autoritaire

En quoi consiste la politique de collaboration acceptée par Pétain ? Comment la justifie-t-il ?

Un régime qui collabore

Que prévoient ces textes de loi ? Qu’est-ce qui a inspiré leur rédaction ? Recherchez dans le manuel ce qu’est une rafle et donnez un exemple précis.

Un régime antisémite

Pourquoi peut-on dire que le régime de Vichy est contraire à la démocratie et qu’il a bafoué les valeurs de la République ?

« Le chef de l’État français a la plénitude du pouvoir gouvernemental, il nomme et révoque les ministres et secrétaires d’État qui ne sont responsables que devant lui. Il exerce le pouvoir législatif. Il promulgue les lois et assure leur exécution. Il dispose de la force armée. Le Sénat et la Chambre des députés sont ajournés jusqu’à nouvel ordre. »

Extrait de la loi constitutionnelle, 10 juillet 1940.

« La Milice française est composée de volontaires prêts à soutenir l’État et à concourir au maintien de l’ordre intérieur. »

Annexe à la loi du 30 janvier 1943.

« J’ai rencontré, jeudi dernier le chancelier du Reich.[…] C’est librement que je me suis rendu à l’invitation du Führer. Je n’ai subi, de sa part, aucun diktat, aucune pression. Une collaboration a été envisagée entre nos deux pays. J’en ai accepté le principe. C’est dans l’honneur et pour maintenir l’unité française dans le cadre d’une activité constructive du nouvel ordre européen que j’entre, aujourd’hui, dans la voie de la collaboration. Ainsi, dans un avenir proche, pourrait être allégé le poids des souffrances de notre pays, amélioré le sort de nos prisonniers, atténuée la charge des frais d’occupation. » Message radiodiffusé du maréchal Pétain le 30 octobre

1940.

« Nous, Maréchal de France, chef de l’État français […] décrétons : Art. 1 – Est regardé comme juif pour l’application de la présente loi, toute personne issue de trois grands-parents de race juive ou de deux grands-parents si son conjoint lui-même est juif. Art. 2 – L’accès et l’exercice des fonctions publiques sont interdits aux Juifs. Art. 5 – Les juifs ne pourront exercer l’une des professions suivantes : directeurs, administrateurs, gérants, rédacteurs de journaux, revues, […] metteurs en scène, entrepreneurs de spectacles […].»

Loi du 3 octobre 1940.

Art. 1 – Les étrangers de race juive pourront être internés dans des camps spéciaux par décision du préfet de leur département. »

Loi du 4 octobre 1940.

Page 11: effondrement et refondation républicaine (1940-1946)

3ème heure

La Résistance (1)

Qui sont les résistants ? Pourquoi et comment se sont-ils battus ?

• Objectifs

- présenter la Résistance intérieure et son action

- mettre en évidence les motivations, l’engagement et les valeurs des résistants

• Notion s Vocabulaire

résistance - clandestinité maquis – réseau – réfractaire - STO

• Démarches envisagées

Le programme préconise une démarche inductive : « La Résistance est abordée à travers l’exemple d’un réseau, d’un mouvement ou d’un maquis. »

ici : action de R. Char et de ses compagnons à Céreste

plusieurs possibilités de mise en œuvre, en fonction du niveau des classes :

Page 12: effondrement et refondation républicaine (1940-1946)

1) soit travailler à partir du film de Jérôme Prieur « René Char, nom de guerre Alexandre », Arte (2006), dont on visionne des extraits avant de procèder à une analyse à partir d’un questionnaire.

Précisez le contexte décrit par le film (moment,

lieu, acteurs…).

Quel type d’action R. Char et ses hommes mènent-ils ? Quels sont leurs buts ?

Pourquoi ont-ils dû entrer dans la clandestinité ?

Comment ces résistants sont-ils organisés?

De quels moyens disposent-ils pour mener leur combat ?

Quels risques encourent-ils ?

Qui leur procure de l’aide et comment ?

Page 13: effondrement et refondation républicaine (1940-1946)

2) soit faire un travail de groupe sur un dossier documentaire incluant des passages des Feuillets d’Hypnos et accompagné d’un questionnaire comparable à celui proposé pour le film, suivi d’une mise en commun.

Dossier documentaire (séance 3) Le poète résistant

1941- R. Char entre dans la clandestinité : à Céreste, l’Isle-sur-Sorgue, Aix-en-Provence, Avignon, Digne, il noue des rapports avec des opposants et des résistants. 1942- R. Char est de plus en plus actif dans la Résistance : il adhère à l’Armée secrète (A.S.). Sous le nom de guerre d’Alexandre, il devient le chef du secteur de l’A.S. Durance-Sud. Il effectue des sabotages contre une armée d’occupation italienne. 1943- R. Char rejoint les Forces françaises Combattantes (F.F.C.). Il reçoit le grade de capitaine et devient le chef départemental de la Section d’atterrissage parachutage (S.A.P.) créée par l’état-major du général de Gaulle à Alger. R. Char dépend du réseau « Action » de la France Libre. La S.A.P. Basses-Alpes a réceptionné 53 parachutages, constitué 21 dépôts d’armes, un réseau de communications radio et un système de transports clandestins. 1944- Pendant les derniers mois de guerre, R. Char perd au combat ses plus proches amis de Résistance (E. Cavagni, R. Bernard, R. Chaudon, F. Cuzin). Il leur consacrera plusieurs passages dans les Feuillets d’Hypnos. Avril : lors d’une opération nocturne des Allemands sur Céreste, R. Char fait une grave chute en allant déposer des armes : il est soigné et caché par les habitants du village pendant une quarantaine de jours. Juillet : à peine rétabli, R. Char est appelé à Alger auprès de l’état-major interallié d’Afrique du Nord. Au centre des missions parachutées, il doit préparer le débarquement en Provence. Fin août : retour à Avignon.

Doc. 2

« Réfractaires, mes camarades, Vous vous comptez aujourd’hui nombreux et chaque jour vous augmente. Toutes les forêts de France qui vous dissimulent s’entrouvriront bientôt pour vous laisser passer, vous et votre armée victorieuse, votre armée d’hommes libres ! L’ennemi vous redoute. Vous ne devez pas le décevoir. Cependant ne commettez pas l’imprudence de vous offrir à lui. Nous devons rester vivants les derniers et le battre jusqu’au dernier. Réfractaires, rien ne m’inquiète. J’ai confiance en vous. »

Le chef S.A.P. des Basses-Alpes, Le capitaine Alexandre.

Doc. 1 Horrible journée ! J’ai assisté, distant de quelque cent mètres, à l’exécution de B. Je n’avais qu’à presser la détente du fusil-mitrailleur et il pouvait être sauvé ! Nous étions sur les hauteurs dominant Céreste, des armes à faire craquer les buissons et au moins égaux en nombre aux SS. Eux ignorant que nous étions là. Aux yeux qui imploraient partout autour de moi le signal d’ouvrir le feu, j’ai répondu non de la tête… le soleil de juin glissait un froid polaire dans mes os. Il est tombé comme s’il ne distinguait pas ses bourreaux et si léger, il m’a semblé, que le moindre souffle de vent eût dû le soulever de terre. Je n’ai pas donné le signal parce que ce village devait être épargné à tout prix. Qu’est-ce qu’un village ? Un village pareil à un autre ? Peut-être l’a-t-il su, lui, à cet ultime instant ?

R. Char, Feuillets d’Hypnos, 138.

[Ce texte évoque l’exécution du poète et maquisard Roger Bernard le 22 juin 1944 ; arrêté alors qu’il est chargé de mission de liaison avec le P.C. de Char à Céreste, il a juste le temps d’avaler le message dont il est porteur. Il est fusillé aussitôt sur la route. Char écrit en août 1944 un poème d’hommage très émouvant en son honneur : Affres. Détonations. Silence.]

Dans son refuge de Céreste, à partir de 1943, René Char tient un journal. Il l’appelle le « Carnet d’Hypnos ». Il le cache en 1944 au moment de son départ pour Alger. « Je le retrouvai deux mois après, à mon retour. Je le détruisis mais j’avais pris copie de la partie « Journal » et des notes, l’ensemble devenant Feuillets d’Hypnos. » Après un travail de recomposition réalisé par l’auteur, l’œuvre paraît en 1946.

Doc. 3 « Le clair de lune facilitait le parachutage des armes. En continuelle liaison avec Londres, nous étions impatients de recevoir le signal convenu. Enfin, brusquement à 13h30 nous recevions un avertissement ; à 19h30 nous captions un premier message ; à 20h15 nous recevions confirmation si le temps était favorable. Alors, en silence, nos groupes se formaient et partaient avec d’infinies précautions vers les terrains de parachutage. Les quatre braves gendarmes de Céreste faisaient le guet dans les ténèbres… Longues attentes par des nuits glacées, l’oreille tendue vers le ciel d’où viendront bientôt les armes attendues. Soudain, un bruit de moteur… Nous allumions des feux de position visibles seulement pour les pilotes. L’avion tournait un instant au-dessus de nos têtes, descendait assez bas et lâchait des parachutes avec leur précieuse cargaison. Il fallait faire vite, car les Allemands se méfiaient et disposaient de moyens perfectionnés pour déceler le changement d’altitude des avions. Une équipe était chargée du transport des armes en lieu sûr, une autre faisait disparaître les parachutes qui, souvent, restaient accrochés au sommet des arbres. (…) Nous recevions en zone sud d’importantes quantités d’armes, il fallait les soustraire aux incessantes recherches de la Gestapo. La S.A.P. était la véritable « bête noire » des Allemands. À Céreste, en face de la gendarmerie, nous avions entreposé des armes et munitions sous les toits d’une petite chapelle. Un peu plus loin notre principal dépôt se trouvait dans la cave d’une maison en ruine. D’un commun accord, ce coin de village était devenu un véritable dépotoir : ordures, fumier, chiens crevés formaient parmi les ruines, des monticules nauséabonds. Les Allemands faisaient de nombreuses perquisitions mais évitaient le dépôt camouflé qui gênait leur odorat (…). Ils possédaient des détecteurs qui leur permettaient de déceler les lieux où pouvaient être cachés des objets en acier (armes, munitions). Afin de dérégler et dérouter leurs instruments nous placions un peu partout dans la campagne de Céreste même, des tas de vieille ferraille. La Gestapo n’est jamais arrivée à découvrir nos dépôts, malgré ses laborieuses recherches et ses inutiles efforts pour « faire parler » une population entièrement ralliée à notre cause. Nous n’oublierons jamais l’aide précieuse d’une femme admirable, Marcelle S. et de sa petite-fille qui, défiant le danger, ont assuré de délicates liaisons et aidé à notre ravitaillement. »

Interview du capitaine Alexandre parue dans le journal Franc-tireur, octobre 1944.

Doc. 4

La fouille de Céreste eut lieu le 29 juin 1944. Le boulanger n’avait pas encore dégrafé les rideaux de fer de sa boutique que déjà le village était assiégé, bâillonné, hypnotisé, mis dans l’impossibilité de bouger. Deux compagnies de SS et un détachement de miliciens le tenaient sous la gueule de leurs mitrailleuses et de leurs mortiers. Alors commença l’épreuve. Les habitants furent jetés hors des maisons et sommés de se rassembler sur la place

centrale. Les clés sur les portes. Un vieux, dur d’oreille, qui ne tenait pas compte assez vite de l’ordre, vit les quatre murs et le toit de sa grange voler en morceaux sous l’effet d’une bombe. Depuis quatre heures j’étais éveillé. Marcelle était venue à mon volet me chuchoter l’alerte. J’avais reconnu immédiatement l’inutilité d’essayer de franchir le cordon de surveillance et de gagner la campagne. Je changeai rapidement de logis. La maison inhabitée où je me réfugiai autorisait, à toute extrémité, une résistance armée efficace. Je pouvais suivre de la fenêtre, derrière les rideaux jaunis, les allées et venues nerveuses des occupants. Pas un des miens n’était présent au village. Cette pensée me rassura. À quelques kilomètres de là, ils suivraient mes consignes et resteraient tapis. Des coups me parvenaient, ponctués d’injures. Les SS avaient surpris un jeune maçon qui revenait de relever des collets. Sa frayeur le désigna à leurs tortures. Une voix se penchait hurlante sur le corps tuméfié : « Où est-il ? Conduis-nous », suivie de silence. Et coups de pied et coups de crosse de pleuvoir. Une rage insensée s’empara de moi, chassa mon angoisse. Mes mains communiquaient à mon arme leur sueur crispée, exaltaient sa puissance contenue. Je calculais que le malheureux se tairait encore cinq minutes, puis, fatalement, il parlerait. J’eus honte de souhaiter sa mort avant cette échéance. Alors apparut jaillissant de chaque rue la marée des femmes, des enfants, des vieillards, se rendant au lieu de rassemblement, suivant un plan concerté. Ils se hâtaient sans hâte, ruisselant littéralement sur les SS, les paralysant « en toute bonne foi ». Le maçon fut laissé pour mort. Furieuse, la patrouille se fraya un chemin à travers la foule et porta ses pas plus loin. Avec une prudence infinie, maintenant des yeux anxieux et bons regardaient dans ma direction, passaient comme un jet de lampe sur ma fenêtre. Je me découvris à moitié et un sourire se détacha de ma pâleur. Je tenais à ces êtres par mille fils confiants dont pas un ne devaient se

rompre. J’ai aimé farouchement mes semblables cette journée-là, bien au-delà du sacrifice. R. Char, Feuillets d’Hypnos, 128

Page 14: effondrement et refondation républicaine (1940-1946)

3) soit lire une partie du récit que Georges-Louis Roux a fait des années de résistance de Char à Céreste (= mise en contexte) et demander ensuite aux élèves d’analyser en détail un ou deux passage(s) des Feuillets d’Hypnos (53, 128, 138…)

« (…) Quand il était à Céreste, il venait chez nous écouter la radio anglaise et nous parlions des événements et

des hommes. Un écrivain qui, quelque temps après la défaite, s’était répandu en poèmes exaltés sur la France déchirée, excitait particulièrement son ironie et ses sarcasmes. (…) Dieu sait si Char vomissait l’ignominie dans laquelle nous étions plongés, mais, pour lui, la dignité commandait de se taire et d’agir, ce qu’il fit jusqu’à la Libération ; d’autre part, ce n’était pas seulement la France qui comptait, mais quelque chose d’universel et de fondamental : le sens même de la vie et le destin des hommes, sur qui pesait un effroyable danger d’asservissement et de dégradation. (…) La France vichyste de la zone non occupée que nous habitions pesait sur nos consciences rebelles. Au système d’hypocrisie, de délation, d’oppression et de crétinisation mis en place par le régime, nous résistions comme nous pouvions, en confidences chuchotées, en prises de bec, en propagande pour la France libre ; (…) Char, nous ne le sûmes que plus tard car il était très discret sur ce chapitre, commençait à établir des contacts, sonder les cœurs et tisser un réseau pour le temps de fusils. La première fois que nous comprîmes que Char serait le centre d’une activité clandestine, ce fut le jour où, en 1941 je crois, Mme Char alla inciter à plus de discrétion un antivichyste qui avait eu une altercation publique avec un collaborationniste. « Nous aurons besoin de vous plus tard », lui dit-elle. Mais dans l’ensemble, la vie se poursuivait calmement dans notre petit village maintenant garni de réfugiés qui venaient chercher surtout la tranquillité et de quoi manger. La situation changea totalement pour nous lorsque, après le débarquement américain en Afrique du Nord, le 8 novembre 1942, la zone sud fut envahie par les troupes nazies. La nausée d’avoir maintenant la présence physique des armées hitlériennes, les craintes, l’indignation et la haine que suscitèrent leurs rafles et leurs cruautés durcirent les volontés et provoquèrent le réveil de nombreuses consciences assoupies. Une énorme maladresse de l’occupant vint étoffer les effectifs jusqu’alors bien faibles de la Résistance : ce fut l’instauration du S.T.O., qui créa de toutes pièces une armée de réfractaires obligés de se débrouiller illégalement. (…) Il se créa dans la région des maquis de l’Armée Secrète (A.S.), Char travaillait avec eux. Inquiété cependant par le manque d’armes et dons le manque d’efficacité de ces groupements, il chercha autre chose et c’est ce qui l’amena à rentrer en contact avec la S.A.P. (Section Atterrissage et Parachutage) des Forces Françaises Combattantes dont il fut nommé, sous le pseudonyme de capitaine Alexandre, chef départemental. Cette organisation était chargée essentiellement d’assurer la réception du matériel parachuté, de la cacher et de la distribuer. À partir de ce moment les activités de Char furent conditionnées par ses obligations de chef de réseau. Il lui fallut mettre sur pied, dans des conditions précaires, toute une infrastructure ; je me souviens par exemple de la recherche de terrains de parachutages qui devaient répondre à des conditions strictes de sécurité pour les avions obligés de voler bas la nuit ; il fallait des caches sûres, créer des équipes de parachutistes, trouver des transporteurs, établir des liaisons. Nous le voyions maintenant beaucoup moins car il était toujours en route pour quelque mystérieuse destination, par toutes sortes de moyens de transports. Que de kilomètres à bicyclette n’a-t-il pas fait ! Cet avatar du poète en organisateur clandestin et en meneur d’hommes de la nuit éclairait toute une part insoupçonnée de Char. Sous son impulsion Céreste nocturne se mit à l’œuvre, Christol l’épicier aux côtés de Bassanelli le bûcheron, Gardiol le braconnier avec Cabot le gendarme ou Nervi le camionneur, Manuel, militaire en congé d’armistice, Marcelle Sidoine-Pons, et d’autres encore. Des gens simples aux réactions directes et saines qui ne pouvaient supporter l’avilissement de leur pays et qui trouvaient auprès de Char –un responsable qui était aussi un ami- l’occasion d’agir dont ils avaient besoin pour sublimer leur honte et leur colère. (…) Il était la conscience du village. Les quelques individus qui auraient pu être dangereux se trouvaient isolés, neutralisés. Char, d’ailleurs, fit savoir à certains qu’ils devaient se tenir tranquilles. (…) Nous connaissions ses responsabilités départementales et constations son sens de l’organisation sur le plan local, mais ce n’est que plus tard que nous sûmes les situations de danger mortel dans lesquelles il se trouva à plusieurs reprises au cours de ses déplacements. Par exemple un jour, alors que sa valise était pleine d’explosifs et de détonateurs en vue d’un attentat, les Allemands arrêtèrent le car pour examiner les bagages des voyageurs, les firent sortir et les alignèrent, chacun devant son bien. « Je sentais la sueur me couler dans le dos, nous raconta-t-il, mais j’étais prêt à vendre chèrement ma peau. » Miraculeusement il passa à travers, à d’autres reprises également où le danger était aussi grand. Nous le voyions pourtant toujours assuré et communiquant la confiance, prêt à assumer jusqu’au bout, jusqu’à la mort dans un combat sans merci, la charge d’espérance dont il était porteur. (…) »

Georges-Louis Roux, « René Char, hôte de Céreste », R. Char, Les Cahiers de l’Herne, 1971, p. 134-136.

J’ai visé le lieutenant et Esclabesang le colonel. Les genêts

en fleurs nous dissimulaient derrière leur vapeur jaune

flamboyante. Jean et Robert ont lancé les gammons. La

petite colonne ennemie a immédiatement battu en retraite.

Excepté le mitrailleur, mais il n’a pas eu le temps de devenir

dangereux : son ventre a éclaté. Les deux voitures nous ont

servi à filer. La serviette du colonel était pleine d’intérêt. R. Char, Feuillets d’Hypnos, 121.

121

J’ai visé le lieutenant et Esclabesang le colonel. Les genêts en fleurs nous dissimulaient derrière leur vapeur jaune flamboyante. Jean et Robert ont lancé les gammons. La petite colonne ennemie a immédiatement battu en retraite. Excepté le mitrailleur, mais il n’a pas eu le temps de devenir dangereux : son ventre a éclaté. Les deux voitures nous ont servi à filer. La serviette du colonel était pleine d’intérêt.

121

J’ai visé le lieutenant et Esclabesang le colonel. Les genêts en fleurs nous dissimulaient derrière leur vapeur jaune flamboyante. Jean et Robert ont lancé les gammons. La petite colonne ennemie a immédiatement battu en retraite. Excepté le mitrailleur, mais il n’a pas eu le temps de devenir dangereux : son ventre a éclaté. Les deux voitures nous ont servi à filer. La serviette du colonel était pleine d’intérêt.

Le mistral qui s’était levé ne facilitait pas les choses. À mesure

que les heures s’écoulaient, ma crainte augmentait, à peine

raffermie par la présence de Cabot guettant sur la route le

passage des convois et leur arrêt éventuel pour développer une

attaque contre nous. La première caisse explosa en touchant le

sol. Le feu activé par le vent se communiqua au bois et fit

rapidement tache sur l’horizon. L’avion modifia légèrement son

cap et effectua un second passage. Les cylindres au bout des

soies multicolores s’égaillèrent sur une vaste étendue. Des

heures nous luttâmes au milieu d’une infernale clarté, notre

groupe scindé en trois : une partie face au feu, pelles et haches

s’affairant, la seconde, lancée à découvrir armes et explosifs

épars, les amenant à port de camion, la troisième constituée en

équipe de protection. Des écureuils affolés, de la cime des pins,

sautaient dans le brasier, comètes minuscules.

L’ennemi nous l’évitâmes de justesse. L’aurore nous surpris plus

tôt que lui. R. Char, Feuillets d’Hypnos, 53.

Page 15: effondrement et refondation républicaine (1940-1946)

4ème heure

La Résistance (2)

Comment l’ action de la France résistante prépare-t-elle la Libération ?

• Objectifs

- présenter la Résistance dans ses différentes composantes

- expliquer ses objectifs militaires et politiques

• Notion Vocabulaire

Résistance FFL - FFI – maquis - CNR

• Démarche envisagée

Le programme invite à une mise en perspective pour expliquer la place et le rôle de la France libre.

1) Présentation du rôle de J. Moulin à partir de la projection d’extraits de la video « Jean Moulin, l’homme de l’ombre » (sur le site : memorialjeanmoulin-caluire.fr) (10’)

offre un aperçu d’ensemble de l’organisation la Résistance française

Page 16: effondrement et refondation républicaine (1940-1946)

On demande aux élèves de produire un court texte pour expliquer le rôle essentiel de J. Moulin dans la

Résistance :

établir des liens entre la France libre et la Résistance intérieure

faire reconnaître l’autorité du général de Gaulle

coordonner les différents mouvements de la Résistance intérieure

créer le CNR (1943)

2) Lecture et analyse du programme du CNR

Qu’est-ce que le CNR ? Quelles organisations

regroupe-t-il ?

D’après son programme, quels sont les deux

grands objectifs qu’il se fixe ?

Pour quel régime politique se bat-il ?

En quoi s’oppose-t-il ainsi au régime de Vichy ?

Appuyez votre réponse sur trois éléments relevés

dans le texte.

Quels types de réformes envisage-t-il pour

l’après-guerre ?

Née de la volonté ardente des Français de refuser la défaite, la Résistance n’a pas d’autre raison d’être que la lutte quotidienne sans cesse intensifiée. Cette mission de combat ne doit pas prendre fin à la Libération (…). Aussi les représentants des organisations de la Résistance, des centrales syndicales et des partis ou tendances politiques groupés au sein du C.N.R., délibérant en assemblée plénière le 15 mars 1944, ont-ils décidé de s’unir sur le programme suivant (…).

I - PLAN D’ACTION IMMÉDIATE

Ils proclament leur volonté de délivrer la patrie en collaborant étroitement aux opérations militaires que l’armée française et les armées alliées entreprendront sur le continent, mais aussi de hâter cette libération, d’abréger les souffrances de notre peuple, de sauver l’avenir de la France en intensifiant sans cesse et par tous les moyens la lutte contre l’envahisseur et ses agents, commencée dès 1940. (…)

II - MESURES À APPLIQUER DÈS LA LIBÉRATION DU TERRITOIRE

Unis quant au but à atteindre, (…) ils sont décidés à rester unis après la libération :

1) Afin d’établir le gouvernement provisoire de la République formé par le Général de Gaulle pour défendre l’indépendance politique et économique de la nation, rétablir la France dans sa puissance, dans sa grandeur et dans sa mission universelle ;

2) Afin de veiller au châtiment des traîtres et à l’éviction dans le domaine de l’administration et de la vie professionnelle de tous ceux qui auront pactisé avec l’ennemi ou qui se seront associés activement à la politique des gouvernements de collaboration (…)

3) Afin d’assurer : l’établissement de la démocratie la plus large en rendant la parole au peuple français par le rétablissement du suffrage universel ; la pleine liberté de pensée, de conscience et d’expression ; la liberté de la presse, son honneur et son indépendance (…) ; la liberté d’association, de réunion et de manifestation ; l’inviolabilité du domicile et le secret de la correspondance ; le respect de la personne humaine ; l’égalité absolue de tous les citoyens devant la loi ;

4) Afin de promouvoir les réformes indispensables : a) Sur le plan économique (dont) le retour à la nation des grands moyens de production (…)

fruits du travail commun, des sources d’énergie, des richesses du sous-sol, des grandes banques ;

b) Sur le plan social (dont) le droit au travail et le droit au repos, (…) la reconstitution d’un syndicalisme indépendant, (…) un plan complet de sécurité sociale, visant à assurer à tous les citoyens des moyens d’existence, dans tous les cas où ils sont incapables de se le procurer par le travail (…), une retraite permettant aux vieux travailleurs de finir dignement leurs jours (…).

Ainsi sera fondée une République nouvelle qui balaiera le régime de basse réaction instauré par Vichy (…) En avant pour le combat, en avant pour la victoire afin que VIVE LA FRANCE !

LE CONSEIL NATIONAL DE LA RÉSISTANCE

Page 17: effondrement et refondation républicaine (1940-1946)

Comment la République est-elle refondée après la guerre ?

• Objectifs

- évoquer le contexte et le climat de la Libération

- exposer les étapes de la refondation républicaine

• Notion Vocabulaire

République - démocratie GPRF – épuration – constitution

État de droit Sécurité sociale - nationalisation -

État-providence

• Démarche envisagée

1) Une fiche de travail, donnée éventuellement à préparer préalablement, permet de mettre en évidence le climat politique français à la Libération.

5ème heure

La Libération et la refondation républicaine 1944-1946

Page 18: effondrement et refondation républicaine (1940-1946)

Fiche de travail 3 La Libération

Le 26 août 1944, Charles de Gaulle descend triomphalement les En 1945, R. Char retrouve son ami Francis Curel, déporté revenu de camp. Il lui adresse Champs-Elysées, entouré des membres du CNR. Il installe à Paris par la suite plusieurs billets qui sont pour le poète l’occasion d’évoquer le contexte de le Gouvernement Provisoire de la République Française (GPRF) la Libération et son état d’esprit après les années de guerre. qui rassemble toutes les tendances de la Résistance. Celui-ci doit rétablir les lois de la République et l’État de droit.

Pourquoi ce défilé est-il symboliquement important ? D’après ce texte, quel est l’état d’esprit de R. Char au sortir de la guerre ? Expliquez la phrase soulignée.

Recherchez le sens du mot « épuration ». À l’égard de qui s’exercent les « déferlements de haine » évoqués par le texte ? Comment les expliquer ? Face à cela comment le général de Gaulle et le GPRF ont-ils réagi ? Pourquoi ?

« Les mois qui ont suivi la Libération, j’ai essayé de mettre de l’ordre dans ma manière de voir et d’éprouver qu’un peu de sang avait tachée, à mon corps défendant, et je me suis efforcé de séparer les cendres de feu dans le foyer de mon cœur. Ascien, j’ai recherché l’ombre et rétabli la mémoire, celle qui m’était antérieure. Refus de siéger à la cour de justice, refus d’accabler autrui dans le dialogue quotidien retrouvé, décision tenue enfin d’opposer la lucidité au bien-être, l’état naturel aux honneurs, ces mauvais champignons qui prolifèrent dans les crevasses de la sécheresse et dans les lieux avariés, après le premier grain de pluie. (…) Tu le sais, toi, qui demeuras deux ans derrière les barbelés de Linz, imaginant à longueur de journée la dissémination de ton corps en poussière ; toi qui, le soir de ton retour parmi nous, voulus marcher dans les prairies de ton pays, ton chien sur tes talons, plutôt que de répondre à la convocation du commissaire qui désirait mettre devant tes yeux la fiente qui t’avait dénoncé. Tu dis pour t’excuser ce mot étrange : « Puisque je ne suis pas mort, il n’existe pas. » (…) Nous sommes partisans, après l’incendie, d’effacer les traces et de murer le labyrinthe. On ne prolonge pas un climat exceptionnel. Nous sommes partisans, après l’incendie, d’effacer les traces, de murer le labyrinthe et de relever le civisme. (…) À mon peu d’enthousiasme pour la vengeance se substituait une sorte de d’affolement chaleureux, celui de ne pas perdre un instant essentiel, de rendre sa valeur, en toute hâte, au prodige qu’est la vie humaine dans sa relativité. Oui, remettre sur la pente nécessaire les milliers de ruisseaux qui rafraîchissent et dissipent la fièvre des hommes. (…) »

R. Char, 4e billet à Francis Curel, 1948.

« On assistait à des déferlements de haine. Cette réaction était compréhensible car la collaboration avait été ressentie comme une persécution et un abaissement national par un grand nombre de Français. Il fallait que justice soit faite. Mais le gouvernement devait garder la tête froide. Il dut à plusieurs reprises réprimer les excès dans les condamnations. Les 2071 condamnations à mort me furent ensuite soumises. Rien ne me parut plus triste que l’étalage des meurtres, des tortures, des délations et des trahisons qui venaient ainsi sous mes yeux. J’ai accordé la grâce à 1303 condamnés, en particulier à tous les mineurs, à toutes les femmes et à tous les hommes qui avaient agi d’après un ordre formel et en exposant leur vie. »

Ch. de Gaulle, Mémoires de guerre, Le Salut (1944-1946).

Page 19: effondrement et refondation républicaine (1940-1946)

2) L’étude du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 permet d’aborder :

- la refondation républicaine et le renforcement de la démocratie française (droit de vote des femmes en 1944)

- les grandes réformes économiques (Etat-providence, nationalisations) et sociales (création de la Sécurité sociale), inspirées du programme du CNR, qui l’accompagnent.

[Prolongement éventuel : travail portant sur le discours de Bayeux et un organigramme des institutions de IVe République].

Page 20: effondrement et refondation républicaine (1940-1946)

« À tous les repas pris en commun, nous invitons la

liberté à s’asseoir. La place demeure vide mais le couvert

reste mis. »

R. Char, Feuillets d’Hypnos, 131.