DYSCALCULIE, HABILETES ARITHMETIQUES ET INHIBITION › 2013 › 08 ›...
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UNIVERSITE DE POITIERS Faculté de médecine et de pharmacie
Ecole d’orthophonie
Année 2009-2010 Mémoire N° 2010, 3
MEMOIRE en vue de l’obtention du certificat de capacité d’orthophonie
présenté par
Géraldine BOUAUD
DYSCALCULIE, HABILETES ARITHMETIQUES
ET INHIBITION
Directeurs du mémoire : Monsieur Michel HABIB, neurologue Madame Céline COMMERAIS, orthophoniste
Membres du jury : Madame Nicole CATHELINE, pédopsychiatre
Monsieur Alain POUHET, médecin de rééducation Monsieur Rémy PERDRISOT, professeur de biophysique
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Remerciements
Je remercie Monsieur Michel HABIB, neurologue, et Madame Céline COMMEIRAS,
orthophoniste, pour leur accueil, leur aide, leur soutien et leur confiance,
Charlotte ROSEAU et Elsa DAURES, orthophonistes, qui se sont relayées pour m'accueillir en
stage SESSAD, et m'ont encouragée et soutenue dans mon projet de mémoire,
Madame Séverine LEENARDT et Madame Geneviève CHOUX, pour avoir accepté que je « teste »
leurs petites patientes,
Je remercie également Monsieur Roger GIL grâce à qui notre école existe,
Mademoiselle Léonie LEMBEGE et Monsieur Gabriel BARRIERE pour nous avoir supportées
dans tous les sens du terme pendant quatre ans (au moins).
Merci à Guillaume pour la métacognition,
Erwan pour les statistiques,
Mélissa pour les cours d'informatique,
Martine et Samuel pour les nombreuses et nécessaires relectures et corrections.
Mes parents,
Elisabeth, Jean-Charles et Emmanuelle,
Mathilde et les dix du dernier rang,
Thomas, Juliette, Charlotte, Etienne, Antoine et Joseph, pour leur soutien et leur amour.
Merci à tous les enfants très patients qui m'ont permis cette étude,
Ma gratitude envers toutes les personnes avec qui je me suis entretenue et par qui, de fil en aiguille,
j’en suis arrivée là.
Merci aux membres du jury, Madame Nicole CATHELINE, Monsieur Alain POUHET et Monsieur
Rémy PERDRISOT, pour l'attention qu'ils auront portée à mon mémoire...
Enfin, une pensée pour Antonio.
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Sommaire
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Introduction 1
Partie 1 – Partie théorique
1 - Compétences numériques et dyscalculie 4
1.1 - Développement numérique de l'enfant 4
1.1.1 - La théorie piagétienne 4
1.1.2 - Compétences numériques précoces 4
1.1.3 - Comptage et dénombrement 5
1.2 - Compréhension du système numérique 6
1.2.1 - Lien entre nombre et langage 6
1.2.2 - Fractions et décimales 8
1.3 - Outils arithmétiques 9
1.3.1 - Opérations simples 9
1.3.2 - Résolution de problèmes arithmétiques 10
1.3.3 - Schéma et modèle mental 11
1.4. - A l'école 12
1.5 - La dyscalculie, les dyscalculies ? 12
1.5.1 - Définition 13
1.5.2 - Comorbidité 14
1.5.3 - Neurologie 16
1.5.4 - Génétique 16
1.5.5 - Prévalence 17
1.6 - Les différentes classifications de la dyscalculie 18
1.6.1 - Classifications neuropsychologiques 18
1.6.2 - Classifications anatomo-fonctionnelles 19
1.6.3 - Classifications cognitives 19
1.7 - Nature, cause et évolution des troubles 21
1.7.1 - Manifestations 21
1.7.2 - Facteurs causaux 23
1.7.3 - Évolution du trouble 26
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2 - Inhibition 27
2.1 - Définitions 27
2.1.1 - L'inhibition 27
2.1.2 - Inhibition, résistance aux interférences 27
2.1.3 - Negative priming 28
2.1.4 - Episodic Retrieval 28
2.2 - D'un domaine cognitif de base à un domaine plus spécifique 29
2.2.1 - Inhibition et développement cognitif 29
2.2.2 - D'un domaine général au trouble spécifique 29
2.2.3 - Dyscalculie et attention 30
2.3 - Inhibition et dyscalculie 32
2.3.1 - Rôle de l'inhibition dans la dyscalculie 32
2.3.2 - Récupération en mémoire 33
2.3.4 - Imagerie et localisation 33
2.4 - Épreuves testant l'inhibition 34
3 - Problématique et hypothèses 36
Partie 2 - Partie expérimentale
1 - Présentation du sujet et choix de la population d'étude 39
1.1 - Présentation du sujet 39
1.2 - Population d'étude 40
2 - Procédure 41
3 - Présentation des outils d'évaluation 41
3.1 - Évaluation des habiletés numériques 41
3.2 - Évaluation des fonctions d'inhibition, de planification et d'attention visuelle et auditive 44
4 - Procédure d'analyse 46
4.1 - Recueil et construction de données 46
4.2 - Analyse des données, méthode 47
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5 - Recueil, présentation et analyse des résultats 47
5.1 - Rappel des épreuves 47
5.1.1 - ZAREKI-R 47
5.1.2 - NEPSY 48
5.2 - Présentation des résultats 48
5.2.1 - Scores obtenus au ZAREKI-R 48
5.2.2 - Notes obtenues à la NEPSY 49
5.3 - Analyse des données 51
5.3.1 - Test statistique 51
5.3.2 - Rangs percentiles 54
6 - Discussion des résultats 58
Conclusion 64
Bibliographie 65
Annexes
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Introduction
Trouble du traitement des chiffres et du calcul, la dyscalculie est diagnostiquée lorsque les
performances en mathématiques de l'enfant sont inférieures au niveau attendu pour son âge, son
niveau scolaire et son intelligence.
Ce trouble s'observe dans la durée - et de façon dynamique - puisque par définition l'enfant grandit
et évolue.
La définition de la dyscalculie n'est pas acquise. Elle n'a pas fini de provoquer le débat. En effet, on
peut décrire plusieurs dyscalculies parce qu'on observe différentes manifestations et différentes
causes de celle-ci.
De plus, des dyscalculies d'origines différentes peuvent se manifester de la même façon, ou
l'inverse.
D'un point de vue neuro-anatomique, des zones précises du cortex ont pu être identifiées comme
étant directement reliées aux diverses habiletés arithmétiques plus ou moins innées, faisant plus ou
moins appel au symbolique (verbal).
S'opposent également deux points de vue : l'un qui associe à un trouble spécifique une cause voire
une lésion spécifique ; l'autre qui voit à l'origine de ce trouble spécifique plusieurs causes, à
plusieurs niveaux, affectant des domaines plus ou moins généraux.
C'est cette dernière convention que j'ai retenue en voulant étudier le lien que pouvaient avoir entre
eux l'inhibition et les troubles d'apprentissage en mathématique.
Plus que la dyscalculie encore difficile à définir, ce sont les habiletés en arithmétique dans les
différents domaines qui ont prévalu dans cette étude et leur lien avec l'inhibition.
L'inhibition est une fonction exécutive qui empêche voire bloque une réponse automatique, une
routine motrice ou cognitive, non pertinente dans le contexte pour la tâche demandée.
La mémoire de travail, l'attention, le traitement visuo-spatial, la planification ont été déjà mis en
cause dans la dyscalculie. L'étude de l'inhibition émerge depuis peu.
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Le cerveau présente une plasticité remarquable, encore plus chez l'enfant. En connaître toujours
davantage sur les mécanismes qui sous-tendent une fonction ou une habileté a pour but de mieux
cibler la remédiation.
Les objectifs de mon étude sont de mettre en évidence un lien causal entre les performances en
inhibition et les habiletés arithmétiques, montrer que de faibles scores dans certains domaines
numériques (comptage à rebours, calcul mental, subitizing, répétition de chiffres, résolution de
problèmes arithmétiques) sont corrélés avec de faibles performances dans les épreuves d'inhibition.
Voire même comparer l'inhibition, l'attention visuelle, l'attention auditive et la planification dans le
lien que peuvent avoir ces fonctions avec les habiletés numériques et donc la dyscalculie.
Il a d'abord fallu dresser un inventaire sans doute non exhaustif des articles et recherches menées
concernant la dyscalculie - ou plutôt les dyscalculies - et l'inhibition.
Si mes recherches bibliographiques sur la dyscalculie m'ont servi à tenter de mieux définir les
contours de celles-ci, elles m'auront surtout permis de déduire les différents aspects composant le
domaine numérique.
Ensuite j'ai évalué chez une population d'enfants diagnostiqués comme étant dyscalculiques, ou
rencontrant des difficultés notables dans un ou plusieurs domaines numériques (bien que la note
globale ne se situe pas en-deçà du seuil pathologique) d'une part les compétences numériques, et
d'autre part les fonctions exécutives citées plus haut, afin de mettre face à face les scores des
domaines étudiés et tenter de répondre à mes hypothèses.
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Partie 1 – Partie théorique
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1 - Compétences numériques et dyscalculie
1.1 - Développement numérique de l'enfant
Parlons d'abord des compétences numériques précoces et attendues chez l’enfant. Elles seraient
préverbales. Il y aurait donc un sens inné du nombre.
1.1.1 - La théorie piagétienne
PIAGET (1941, 1959), théoricien de l'« épistémologie génétique », a mis en évidence une
intelligence préverbale chez le bébé. Il a montré la primauté de la compréhension du nombre en soi
sur les simples habiletés arithmétiques que l’on peut observer. Il a en quelque sorte différencié les
capacités des performances.
PIAGET a étudié la genèse du nombre, des habiletés numériques : il voulait montrer par là que la
notion de nombre est indépendante du langage. C’est l’action intériorisée qui, en devenant
réversible au stade opérationnel, permet l’accès au concept de nombre.
Pour lui, le nombre n’est intelligible que dans la mesure où il reste identique quelle que soit la
disposition des unités qui le composent.
Les tâches de conservation valident donc l’acquisition ou pas de ce stade, celui de la pensée
opératoire et logique.
Depuis cette théorie, bien que novatrice et ouvrant au-delà de la simple constatation des habiletés,
d'autres observations et analyses contradictoires ont été faites, notamment la critique de la tâche de
conservation (FAYOL, 1990) qui ne relèverait pas de la logique opératoire, base essentielle à
l’acquisition du sens du nombre selon PIAGET.
En effet, dès la maternelle et bien avant les apprentissages scolaires, l’enfant - pourtant loin du stade
opératoire concret (sept ans) - montre des habiletés dans le comptage, le dénombrement et même
dans la résolution de problèmes additifs simples (SIEGLER, 1996).
1.1.2. Compétences numériques précoces
La discrimination de numérosité
Elle a été explorée pour la première fois par STARKEY et COOPER (1980) qui la pensaient
présente chez le nourrisson dès quatre mois. Ils détectent un changement (plus / moins) visuel
(objets, jetons) de 2 à 3 et de 3 à 2 mais à rapport égal. Quand les quantités sont plus importantes
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(4/6), la discrimination ne se fait plus. En revanche, quand le rapport est plus grand (moitié ou
double), le bébé de six mois peut gérer de grandes quantités (18/36).
Ces représentations numériques se feraient sur deux modalités, visuelle et auditive (BIJELAC-
BABIC et coll., 1993) et sur un mode de présentation simultané ou séquentiel (CANFIELD et
SMITH, 1996 ; WYNN, 1996 ; SHARON et WYNN, 1998).
Il y aurait également une intermodalité dans la discrimination des quantités. Les éléments peuvent
ainsi être disposés indifféremment dans l’espace et on n’a pas besoin d’avoir une présentation
homogène pour prouver cette compétence lors des expériences.
La compréhension des relations quantitatives
Elle apparaîtrait autour de l’âge d'un an, la perfection étant à son comble dès deux ans et demi
(conditionnement opérant). Dire "le plus" serait plus facile que donner "le moins". La technique
d’habituation met en évidence que dès dix / douze mois, l’enfant sait distinguer une relation
d’inégalité d’une relation équivalente. Selon COOPER (1984), cette sensibilité naîtrait avec les
premières interactions.
Quant à elles, les capacités arithmétiques partagent les penseurs. Selon WYNN (1992, 2004), le
nourrisson de neuf mois peut calculer des petites additions et des soustractions, évaluer le caractère
réaliste ou non des quantités supérieures à 5 (Mc CRINK et WYNN, 2004) mais les données sont
fragiles et le protocole expérimental semble ne pas avoir convaincu.
Il a été montré récemment que les performances numériques des enfants étaient influencées par
d’autres éléments non numériques.
On peut se poser aussi la question du caractère numérique ou pas des représentations numériques
(WYNN, 1998). Dès le départ, elles seraient numériques, discrètes - système inné - ou
succèderaient à un système traitant d’abord des quantités continues (principe de l’accumulateur).
1.1.3 - Comptage et dénombrement
Acquisition de la chaîne verbale
Il s’agit d’un système verbal dans lequel s’articulent un nom (pour une cardinalité) et une syntaxe
(règles combinatoires). La combinaison est additive (103, c'est 100 + 3 ) et / ou multiplicative (300,
c'est 3 x 100, et 302 c'est [3 x 100] + 2) (POWER et LONGUET-HIGGINS, 1978).
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Dès deux ans, l’enfant commence à acquérir la chaîne numérique verbale orale (FUSON et coll.,
1982). Elle est d’abord stable et conventionnelle (elle s'accroît surtout à partir de quatre ans), stable
et non conventionnelle (jusqu'au CE1) surtout pour les nombres compris entre 10 et 19 - qui sont
illogiques et difficiles à apprendre - puis ni stable ni conventionnelle, changeant d’un essai à l'autre
car elle demande un travail de mémorisation. Cela correspond à un apprentissage mécanique et
sériel car le système verbal occidental comporte de nombreuses irrégularités et un lexique
important.
Les processus de quantification
On en distingue trois :
- L’estimation est vague, elle donne avec approximation la taille d’un ensemble ;
- Le subitizing, ou subitisation - sans passer par le dénombrement - quantifie de façon précise mais
n’est efficace que jusqu’à 4 objets chez l’adulte et l'enfant compétent ;
- Le dénombrement est précis, et ne dépend pas de la taille des collections, même si celle-ci influe
sur la vitesse de traitement. Il implique (BECKWITH et RESTLE, 1966 ; POTTER et LEVY, 1968)
de coordonner à la fois l’énonciation (oralement ou mentalement) et le pointage (avec les yeux ou le
doigt).
On ne sait pas vraiment encore si ces processus sont innés ou acquis par imitation. Selon GELMAN
et GALLISTEL (1978), GELMAN et MECK (1983), les habiletés de comptage sont innées. C’est la
théorie des "principes-en-premier". Il existe cinq principes : la correspondance terme à terme,
l’ordre stable, la cardinalité, l’abstraction et la non-pertinence de l’ordre.
Le dénombrement serait un pré-requis dans l’acquisition des habiletés numériques ("sens" du
nombre, activités numériques). GEARY, BOW-THOMAS et YAO (1992) ont montré des
difficultés en mathématique chez les enfants de sept ans ayant des difficultés dans l’acquisition du
dénombrement.
1.2 - Compréhension du système numérique
1.2.1 - Lien entre nombre et langage
Nous avons vu que, lors du développement des habiletés arithmétiques, les premières stratégies
évoluent. D'autres apparaissent allant du verbal, du gestuel à la récupération en mémoire à long
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terme des données numériques. Le langage a donc un rôle important dans les compétences
arithmétiques.
Alors que l’on affirmait plus haut une compétence préverbale dans l’appréhension des quantités,
BUTTERWORTH (1999) met en évidence la dissociation langage-nombre : lorsqu'un des deux est
touché, l’autre peut fonctionner normalement et indépendamment.
DEHAENE et COHEN (2000) confirment cette indépendance. S’il est nécessaire, le langage n’est
pas indispensable voire suffisant au traitement arithmétique.
Mc CLOSKEY (1992) parle d’une représentation a-modale du nombre, alors que BRYSBAERT et
coll. (1998) voient le langage comme étant la représentation majeure du nombre.
La cardinalité pose deux questions (FAYOL, 2002) :
- le caractère abstrait du codage de l’accroissement des quantités par les dénominations (ENGLISH
et HALFORD, 1995) : l’accroissement des quantités est marqué par une dénomination
conventionnelle.
- le caractère catégoriel de l’emploi des termes du lexique des nombres (MIX, 1999) : MILLES et
PAREDES (1996) l’ont montré avec la difficulté presque universelle qu’ont les enfants à assimiler
les dix premiers nombres.
De même, quand le système numérique verbal est régulier, en Chine ou au Japon par exemple
(37 se dirait "trois dix sept"), les performances de l’enfant sont meilleures (WANG et LIN, 2005),
et ce avant tout enseignement académique.
Ce serait l’apprentissage par cœur - rendu nécessaire dans les pays occidentaux notamment - et les
irrégularités de construction qui retarderaient l’acquisition des premiers cardinaux.
Lors du transcodage verbal / arabe, la notation positionnelle semble poser problème.
De plus la base 10 est faiblement transparente. Le lexique est pauvre (10 chiffres) et recourt au
système positionnel, c'est à dire que le nombre se lit en fonction de la place des chiffres les uns par
rapport aux autres (de gauche à droite, une colonne imaginaire pour l'unité, une pour la dizaine, une
pour la centaine et ainsi de suite).
Les opérations simples (additions, soustractions) se résolvent de façon procédurale ou en recourant
aux faits numériques. Or la résolution de ces opérations est facilitée (HOX et FUSON, 1998) ou
grevée (LEVIN et coll. 1992) par la structure de la dénomination.
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Par définition, le fait arithmétique ne fait pas appel au calcul. Sa récupération est-elle dépendante du
canal ou indépendante (Mc CLOSKEY, 1992) ?
DEHAENE et COHEN (2000) posent que les tables de multiplication et certaines additions sont
stockées sous forme verbale.
L’étude de l’empan (nombre maximal d'items que l'on peut maintenir en mémoire à court terme) de
chiffres - donc de la mémoire de travail - et l’influence de la forme des mots-nombres sur celui-ci,
par la vitesse de prononciation (ELLIS, 1991) montre que le langage a un effet sur la représentation
et le traitement du nombre (CAMPBELL, 1994).
1.2.2 - Fractions et décimales
Fractions
Assez tôt, l’enfant disposerait d’une représentation simple des fractions (MIX et coll., 1999 ;
GALLISTEL et GELMAN, 1992). Le partage du gâteau en parts y est peut-être pour quelque
chose !
Pourtant, l’apprentissage des fractions demeure difficile pour beaucoup d’enfants (CLEMENTS et
DEL CAMPO, 1990).
Et c’est là que le partage du gâteau, comme exemple des façons d’appréhender la fraction, peut ne
pas aider puisqu’il ne permet de concevoir celle-ci que comme un objet - la partie d’un tout - alors
qu’elle est aussi un nombre (WATSON et coll., 1999).
L’opération sur les fractions est donc difficile à concevoir.
Pourtant, STREEFLAND (1957) montre que c’est en passant par la représentation concrète de la
fraction que l’enfant va pouvoir ensuite en construire le concept.
Décimales
Ce concept présenterait trois difficultés selon BROUSSEAU (1983) :
- origine ontogénétique, lors du développement de l’enfant ;
- origine didactique, selon les moyens pédagogiques disponibles et mis à disposition ;
- origine épistémologique, inhérent à l’histoire du concept (codes arbitraires).
Le décimal est trop souvent séparé de la fraction, ce qui rend difficile la comparaison entre
décimaux (8,35 plus grand que 8,275 !), et les équivalences de mesures (1,673 kilogrammes = 1673
grammes).
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1.3 - Outils arithmétiques
Les outils arithmétiques correspondent aux stratégies utilisées afin de résoudre un problème.
Le petit d’homme assimile de façon intuitive les transformations de quantités (ajouts, retraits) que
WYNN (1992) compare aux additions et soustractions.
À l’aide du comptage et du dénombrement qu’il maîtrise, l’enfant de cinq ans (alors qu’il n’a pas
encore appris le calcul ni appréhendé vraiment le nombre à l’école) peut manipuler celui-ci quand il
est à un chiffre et comprendre les ajouts / retraits (SIEGLER et JENKINS, 1989).
SAXE (1982) a montré aussi des différences interindividuelles liées à la culture d’une part et au
sexe d’autre part, dans les stratégies de calcul même si l’on a observé également des similitudes
dans le développement de l’arithmétique (GEARY, 1994).
1.3.1 - Opérations simples
Concernant les additions simples, cinq stratégies ont pu êtres décrites : l’utilisation d’objets investie
dès trois ans (FUSON, 1982), le comptage sur les doigts et le comptage verbal apparaissant vers
quatre / cinq ans (SIEGLER et SHRAGER, 1984). Ensuite l’enfant utilisera la décomposition et la
récupération en mémoire du résultat (CARPENTER et MOSER, 1983 ; SIEGLER, 1987).
Le passage du comptage sur les doigts au comptage verbal est permis par le contrôle mental du
déroulement du calcul, par la conservation en mémoire à court terme des étapes successives du
calcul.
Dans les stratégies verbales, on distingue le "tout compter", le "surcompter" et enfin la stratégie du
minimum (Min Model) qui, elle, apparaît dès le primaire (GROEN et PARKMAN, 1972).
Quand une situation-problème similaire se présente, la procédure de comptage (acquise de façon
précoce et mise en mémoire à long terme) permettrait de donner le résultat correspondant sans avoir
à recompter (ASHCRAFT, 1992). Il s’agit de récupération en mémoire - qui, d’ailleurs, est
davantage sollicitée pour les additions que pour les soustractions - des faits numériques qui font
appel encore au comptage.
La soustraction requiert les mêmes stratégies que l’addition, avec l’addition indirecte en plus
(BARRODY, 1984 : pour résoudre 7 - 3, l’enfant pose 7 - ? = 3).
Dès quatre / cinq ans, on observe trois stratégies (CARPENTER et MOSER, 1983) : "séparer de",
"ajouter à partir de", "apparier". Le choix de la stratégie à utiliser dépendrait du type d’énoncé, du
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type de question (CARPENTER et MOSER, 1983 ; MILEY et coll., 1983 ; DE CORTE et
VESCHAFFEL, 1987). Les enfants fonctionneraient donc - et cela assez tôt - par analogie.
Ces stratégies sont mises en places en dehors de tout apprentissage scolaire (SIEGLER et
JENKINS, 1989).
Les opérations complexes, avec des nombres à plusieurs chiffres, ont fait l’objet de peu d’études.
Elles font appel à la notation positionnelle et l’erreur principalement observée est celle de
l’utilisation de la retenue ("bugs" selon VANLEHN, 1990).
1.3.2 - Résolution de problèmes arithmétiques
Elle repose sur la connaissance des concepts d’accroissement, de diminution, de combinaison et de
comparaison.
Plusieurs types de problèmes
VERGNAUD (1982) a procédé à un classement conceptuel : en fonction de trois concepts (la
mesure, les transformations temporelles et les relations statiques), il a défini six catégories de
relations (partage égal, vitesse constante, produit de mesure, proportions multiples, division par les
multiplicateurs, division par les multiplicandes).
RILEY et coll. (1983) distinguent trois types de problèmes :
- les problèmes de changement : l'opération mise en jeu est la transformation, l'inconnue concerne
l'état initial, l'état final ou la transformation ;
- les problèmes de combinaison : il s’agit de situations statiques, l'inconnue peut représenter le total
ou une des parties ;
- les problèmes de comparaison : dans une situation statique, on compare (plus que / moins que).
D’un point de vue stratégique, le sujet doit alors se représenter le problème soit en particularisant un
schéma nouveau ou déjà préexistant, soit en construisant mentalement la représentation d’une
situation (RICHARD, 1990).
Les situations-problèmes
La vie quotidienne (courses, comparaisons, mesures) nous pousse à une "arithmétisation du monde"
(NUNES et BRYANT, 1996).
Durant les apprentissages de l'enfant, la manipulation des chiffres est plus ou moins sollicitée selon
l'environnement social et économique, ce qui influe sur ses performances futures.
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Par l’action extériorisée, manipulée, répétée puis intériorisée, la situation-problème permet de
développer des représentations et des procédures de résolution.
L’expérience et son renforcement positif (résultats bons) permet donc l’acquisition de savoirs et
d’habiletés dans le calcul.
Ainsi on construit une représentation quantifiée du réel. Puis on manipule les symboles numériques
correspondant aux quantités. Inspiré d’une situation concrète, le problème est énoncé verbalement.
On se le représente mentalement : on abstrait le problème.
Il semblerait que ce soit davantage cette étape qui mette en difficulté l’élève dans la résolution d’un
problème que le traitement de l’opération elle-même (FAYOL, 1991).
1.3.3 - Schéma et modèle mental
Les schémas de problèmes se construisent au fil des situations rencontrées. Ils sont renforcés par les
expériences positives puis stockés en mémoire à long terme. Ils constituent ensuite un guide à la
procédure du traitement, rendant celui-ci alors plus rapide et plus efficace (KINTSCH et GREENO,
1985 ; RUNETHART, 1980 ; SCHAUKL, 1975 ; SCHAUKL et ABLESON, 1977).
On extrait les caractéristiques invariantes définissant chaque catégorie de problème pour donner un
cadre, une structure de résolution correspondant au problème-type rencontré. Les données
spécifiques du problème seraient "entrées" (mémoire de travail) dans le "programme" qui – lui - est
stocké en mémoire à long terme.
Par cette théorie, KINTSCH et GREENO expliquent la plus ou moins grande difficulté à résoudre
un problème car dépendant de la présence ou non d’un schéma fiable correspondant.
L’impact positif de la question placée en début d’énoncé confirme cette idée (DEVIDAL et coll.,
1997).
Le modèle est une représentation qui se construit et se stocke en mémoire de travail lorsqu’il n’y a
pas de schéma disponible pour la situation-problème. On parle alors de modèle de situation
(KINTSCH, 1979) ou de modèle mental (JOHNSON-LAIRD, 1983).
Les divers éléments sont mis en relation et intériorisés dans le modèle (VAN DIJK et KINTSCH,
1983).
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Fournir une aide à la construction d’une représentation adéquate, en s’appuyant sur du matériel
concret (JASPERS et VAN LIESHOUT, 1994) ou en apprenant à représenter les relations entre les
différents éléments du problème (WILLIS et FUSON, 1988), améliorerait les performances.
1.4 - À l’école
Le "World Problem Schema" (WPS) est un schéma qui guide la lecture de l’énoncé.
Il est acquis vers l’âge de huit ans et dépendant des schémas sémantiques et relationnels (DE
CORTE et VERSCHAFFEL, 1985 ; BRISSIAUD, 1988 ; COQUIN-VIENNOT, 1996, 2000). Il
permet l’interprétation pragmatique du texte, s’adaptant le plus souvent au contexte (cours de
mathématiques).
L’école enseigne l’arithmétique appliquée et non la résolution des problèmes de la vie quotidienne,
deux choses bien différentes (GEROFSKY, 1996).
Les problèmes à énoncés verbaux présentent une forme stéréotypée. Cela correspond au "classroom
climate", c’est-à-dire le plan didactique visant à atteindre l’objectif fixé par le programme et
l’enseignant lui-même formé avec ces mêmes cadres (VERSCHAFFEL et coll., 1997).
La résolution d’un problème peut dépendre des caractéristiques de l’énoncé (THEVENOT et coll.,
2004), des caractéristiques du sujet qui doit le résoudre, de la capacité de celui-ci à comprendre le
texte (DE CORTE et VERSCHAFFEL, 1985 ; CUMMINS et coll., 1988), et de ses performances
concernant la mémoire de travail (SWANSON, 1994 ; PASSOLUNGHI et SIEGEL, 2001).
Le contexte de résolution du problème est important lui aussi : les énoncés proposés à l’école
peuvent parfois montrer des incohérences ou des aberrations logiques (CARPENTER et coll., 1983
; DE CORTE et VERSCHAFFEL, 1985).
1.5 - La dyscalculie, les dyscalculies ?
La dyscalculie est un trouble de l’apprentissage de l’arithmétique que l’élève rencontre en dehors de
d'un déficit intellectuel ou sensoriel, d'une carence affective, d'un trouble psychiatrique ou d'une
lésion cérébrale.
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Selon le DSM IV (Diagnostic and Statistical Manual), les aptitudes arithmétiques de l’enfant
dyscalculique sont en-deçà du niveau attendu pour son âge, son intelligence et son niveau de
scolarité. De plus, le déficit de l’enfant doit interférer de manière significative dans sa vie et ne pas
résulter d’un déficit sensoriel ou neurologique.
Nous allons tenter de définir ce trouble spécifique, ses critères diagnostiques, ses caractéristiques
cliniques, ses éventuelles causes, son évolution possible et les liens qu’il peut avoir avec les autres
troubles "dys-" (dyslexie, dyspraxie...).
1.5.1 - Définition
La terminologie elle-même n’est pas stable : KOSC (1974) a parlé en premier de dyscalculie de
développement. BADIAN (1983), SHALEV et GROSS-TSUR (1993, 2001) puis
BUTTERWORTH (2005) l’ont repris. Aujourd'hui encore, les anglo-saxons disent - traduit
littéralement - "dyscalculie développementale".
LEWIS et coll. (1994) emploient l’expression "arithmetic difficulties". GEARY et HOARD (2005)
écrivent "learning disabilities in mathematics" et "mathematic disabilities" ou "mathematic disabled
children" comme JORDAN (2003) parle de "mathematic difficulties".
KOSC la qualifie de "trouble structurel des habiletés mathématiques dont l’origine est génétique ou
liée à un problème congénital affectant les aires cérébrales qui sont le substrat anatomo-
physiologique direct de la maturation des habiletés mathématiques sans trouble simultané des
fonctions mentales plus générales".
COHN (1968), en définissant la dyscalculie développementale comme étant "l'échec de la
reconnaissance ou la manipulation des symboles de nombres, dans une culture avancée”, dit que le
sens du nombre ne fait pas défaut dans la dyscalculie dévelopementale. C’est le symbole
(transcodage) qui pose problème.
TEMPLE (1992) décrit “un trouble des compétences numériques et des habiletés arithmétiques qui
se manifeste chez des enfants d’intelligence normale qui ne présentent pas de déficits neurologiques
acquis”.
-
- 14 -
On différencie également les enfants rencontrant des difficultés en mathématique, associées à
d'autres difficultés qui peuvent être causales (lecture, praxies, traitement visuo-spatial, attention...)
des enfants purement dyscalculiques, répondant littéralement au terme (troubles du calcul).
BRISSIAUD (2003) dit que “calculer c’est mettre en relation des quantités, directement à partir de
leurs représentations numériques”. De là sont exclues la lecture / écriture et la résolution de
problèmes numériques.
En 2004, LANDERL et coll. demandent un recentrage du concept de dyscalculie sur le calcul.
BUTTERWORTH (2005) a introduit le critère qualificatif, selon le UK Department for Education
and Skills : “un état qui affecte la capacité à acquérir des habiletés arithmétiques. Les élèves
dyscalculiques peuvent avoir des difficultés à comprendre les concepts numériques simples,
présenter une absence de compréhension intuitive des nombres. Ils manifestent des difficultés pour
apprendre les faits numériques et les procédures. Même s’ils produisent la réponse correcte ou
utilisent une méthode correcte, ce serait de manière mécanique et sans confiance en eux-mêmes.”
Cette définition offre une approche étiologique du trouble.
Le critère d’inclusion est le niveau de performance minimal (en écarts-type).
Le critère d’exclusion est le niveau intellectuel minimal (QI supérieur à 80-85 selon…)
1.5.2 - Comorbidité
La dyscalculie peut s’associer à d’autres troubles spécifiques d’apprentissage notamment la
dyslexie, à des anomalies organiques ou chromosomiques, ou encore à des lésions neurologiques.
VON ASTER et SHALEV (2007) distinguent la dyscalculie développementale avec comorbidité
(retard de parole, retard de langage, troubles de l’attention, de la mémoire de travail qui constituent
un obstacle à l’acquisition d'un concept de nombre) et la dyscalculie liée à un trouble du sens du
nombre (déficit précoce dans le système numérique de base, voire dans le traitement visuo-spatial).
Dyscalculie isolée
Elle se différencie de la dyscalculie associée par son importance et son étendue.
Les difficultés seraient moindres quand le trouble est isolé que lorsqu’il y a comorbidité.
2,7 % des dyscalculies seraient isolées.
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- 15 -
Dyscalculie et dyslexie
Cette association est la plus fréquente selon les auteurs : 17 à 64% des enfants dyscalculiques
présenteraient également des difficultés d’apprentissage de la lecture (BADIAN, 1999 ; GROSS-
TSUR et coll., 1996 ; LEWIS et coll., 1994).
Selon LANDERL et coll. (2004), l’observation poussée d’enfants dyscalculiques montre très
souvent des difficultés associées en dyslexie.
La question est de savoir s'il existe une cause commune à ces deux troubles, s'il s'agit d'une zone
cérébrale sous-tendant à la fois l'une et l'autre habiletés ou si cela est dû à un facteur de
développement général (WILSON, 2005)
OSTAD (1988) observe un lien entre la capacité générale, “general ability” (évalué au WISC-R) et
l'importance du trouble.
Le niveau intellectuel serait plus faible quand des déficits sont associés (LEWIS et coll., 1994 ;
GROSS-TSUR et coll., 1996 ; ALARCON et coll., 1997 ; FUCHS, 2002).
Il y aurait donc un facteur de risque commun entre la dyslexie et la dyscalculie.
D’après l’étude MANER et coll. (2000), les enfants ayant des troubles du langage écrit et / ou oral
obtiennent de plus faibles performances même quand le facteur QI est contrôlé.
La dysgraphie pourrait causer la persistance du trouble (SHALEV et coll., 2005).
Dyscalculie et troubles développementaux
Selon SHALEV, le trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) est le plus
représenté des troubles développementaux associés.
On observerait cette association chez 17 à 26% des enfants dyscalculiques (LINDSAY et coll.,
2001).
Selon l’étude GROSS-TSUR et coll. (1996), 26% des dyscalculiques étaient probablement des
enfants souffrant de TDAH (questionnaire de CONNERS). Ici, on ne considère pas la présence d'un
TDAH comme étant un critère d'exclusion dans le diagnostic de dyscalculie.
En outre, les troubles attentionnels seraient un facteur de persistance du trouble (SHALEV et coll.,
2005) et s’aggravent avec la persistance de la dyscalculie (SHALEV et coll., 1998).
Le traitement médical du trouble d’attention / impulsivité peut améliorer les performances en
mathématiques. Mais peut-être est-ce aussi parce que ce traitement agit sur la mémoire également…
-
- 16 -
De la même manière, s'agit-il d'un "double déficit" ou sinon lequel - du trouble TDAH ou de la
dyscalculie - est la cause de l’un ou de l’autre ?
1.5.3 - Neurologie
Le syndrome de l’hémisphère droit (WEINTRAUB et MESULAM, 1983 ; GROSS-TSUR, 1993)
débute tôt dans l’enfance. On observe des difficultés émotionnelles, interpersonnelles, des troubles
visuo-spatiaux, des signes de dysfonctionnement de l’hémisphère droit (tomographie à émission de
positrons), et des difficultés d’apprentissage en arithmétique.
ROURKE (1993) parle de “Non verbal Learning Disabilities syndrom” (NLD) syndrome de
déficience des apprentissages non verbaux.
Le syndrome de GERSTMANN (1940) : on y trouve une agnosie digitale, une dyscalculie, une
agraphie sans alexie, des troubles d’orientation visuo-spatiale, des troubles de la latéralité. Ce
syndrome s’expliquerait par la proximité des aires cérébrales correspondant aux différentes
fonctions citées (zone occipito-pariétale, gyrus angulaire gauche en particulier).
Chez l’enfant né prématurément, on a pu observer une dyscalculie développementale et une zone
pariétale gauche moins étendue que celle de droite (ISAAC et coll.).
On peut citer également l’épilepsie (PENNINGTON, 1991), la spina bifida myéloméningocole
(WILLS et coll., 1990 ; BARNES et coll., 2005). Ici, les troubles de la lecture isolée sont beaucoup
plus rarement isolés que les troubles d’apprentissage en arithmétique, accompagnés ou non de
troubles de la lecture. Quand les troubles en arithmétique sont isolés, ils s’accompagneraient le plus
souvent de troubles visuo-spatiaux. L’atteinte des lobes pariétaux entraîne une difficulté dans la
planification motrice, la motricité fine. C’est d’ailleurs celle-ci qui expliquerait en fait les difficultés
procédurales (poses d’opérations) plus que les troubles visuo-spatiaux (BARNES et coll., 2005).
1.5.4 - Génétique
Les syndromes de TURNER et de l’X fragile s’accompagnent de déficits d’apprentissage en
arithmétique. Le syndrome de TURNER est caractérisé par l’absence partielle voire complète d’un
des X dans le caryotype.
Le QI verbal est supérieur de 8 à 24 points au QI performance (BALLOTIN et coll., 1998).
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- 17 -
Les difficultés s’observent dans les opérations, les résolutions de problèmes et la compréhension de
concepts (ROVET et coll., 1994).
MAZZOCCO et Mc CLOSKEY (2005) notent que ce syndrome s’accompagne d’un trouble des
fonctions exécutives et du traitement de l’information en mémoire de travail, et de troubles visuo-
spatiaux, perceptifs, moteurs.
Le syndrome de l’X fragile rend compte d’un retard mental chez tous les garçons et chez la moitié
des filles. Le QI est relativement homogène.
Chez la population de filles qui ont une intelligence dans la moyenne, la clinique les rapproche du
syndrome de TURNER.
Ici, les troubles en arithmétique ne seraient pas liés à un déficit spatial.
Le syndrome de WILLIAM inclut aussi des troubles spécifiques en arithmétique (ANSARI et
KARMILOFF-SMITH, 2002).
Le syndrome d'alcoolisme foetal peut également inclure une dyscalculie.
1.5.5 - Prévalence
Elle varie d'une étude à l'autre parce que les critères d'inclusion sont rarement les mêmes.
Aujourd'hui, la recherche se base sur deux principes (SHALEV et VON ASTER, 2008) :
- l'échantillon doit être important pour être représentatif de la population ethnique et socio-
économique ;
- les tests arithmétiques utilisés doivent être normalisés et vérifier plusieurs domaines du
fonctionnement arithmétique ;
Ainsi en dix ans, on est passé d'une prévalence de 1% à une prévalence située entre 3 et 14%.
L'utilisation d'un seul critère diagnostique donnant une prévalence de 45% et celle du score basé sur
les divergences, trouvent une prévalence à 21% : ce qui montre que l'utilisation d'un seul critère
n'est pas valide.
Par exemple, l'étude menée par DESOETE et coll. (2004) exigeait la réunion de trois critères
d'inclusion de la dyscalculie :
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- 18 -
- le critère de divergence comparé au niveau intellectuel ou scolaire ;
- le critère de gravité (scores inférieurs d'au moins 2 écarts-types à la norme) ;
- le critère de résistance au traitement (orthopédagogie de l'école).
Les résultats de cette étude concordent avec ceux d'une autre étude menée - avec la même batterie
ZAREKI-R - dans plusieurs pays (Grèce, France, Suisse, Brésil) et traduite en plusieurs langues. On
y a trouvé une prévalence d'environ 6%, avec plus de garçons qui sembleraient touchés par ce
trouble.
D'autres chercheurs (MAZZOCCO et MYERS, 2003) ont démontré que l'utilisation de deux
batteries de tests arithmétiques différentes était nécessaire au diagnostic sérieux d'une dyscalculie. Il
fallait aussi avoir observé une persistance du trouble au-delà d'une année scolaire.
Cette façon de voir (élargissement du concept sur les caractéristiques démographiques, sur les
facteurs de risque et sur les troubles co-existants) a permis d'ouvrir de nouvelles perspectives
cliniques, éducatives et décisionnelles.
1.6 – Les différentes classifications de la dyscalculie
1.6.1 - Classifications neuropsychologiques
HECAEN et coll. (1969) distinguent:
- les acalculies spatiales par atteinte des parties postérieures de l’hémisphère droit : confusions dans
la pose d’opération, inversion des chiffres ;
-les acalculies accompagnées d’une agraphie / alexie des nombres, par atteinte de l’hémisphère
gauche le plus souvent ;
-les anarithméties avec lésion de l’hémisphère gauche.
D’après cette classification, BADIAN (1983) distingue cinq dyscalculies:
- les dyscalculies résultant d’une aphasie avec alexie ou d’une agraphie des nombres ;
- les dyscalculies résultant de difficultés visuo-spatiales avec mauvais alignement des nombres ;
- les anarithméties, c’est-à-dire une bonne connaissance des faits numériques mais avec une
confusion entre les algorithmes de calcul ;
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- 19 -
- les dyscalculies liée à des troubles attentionnels se manifestant par des oublis lors de l’exécution
des algorithmes de calcul ainsi que des difficultés à mémoriser les tables. On notera avec intérêt que
ce sous-type est identifié par BADIAN comme le plus fréquent ;
- les dyscalculies résultant d’une combinaison de ces catégories.
KOSC (1974) décrit:
- les dyscalculies verbales (nommer les objets et les relations mathématiques) ;
- les dyscalculiques practognosiques (dénombrement, sériation) ;
- les dyscalculies lexicales (lecture de symboles) ;
- les dyscalculies graphiques (écriture des chiffres et des nombres) ;
- les dyscalculies idéanosiques (compréhension des relations mathématiques) ;
- les dyscalculies opérationnelles, ou anarithméties
1.6.2 - Classifications anatomo-fonctionnelles
ROURKE (1978, 1993, 1997) distingue dyscalculie / dyslexie, qui relèverait d'un déficit de
l'hémisphère gauche (traitement verbal) et dyscalculie seule, correspondant à un déficit
hémisphérique droit (traitement non-verbal).
Cette classification, remise à jour plusieurs fois mais jugée trop simpliste, n'a finalement pas été
retenue.
En plein développement, l'imagerie fonctionnelle pourrait préciser le sous-typage en montrant un
lien entre les habiletés numériques et les réseaux neuronaux qui les sous-tendent.
1.6.3 - Classifications cognitives
On se base ici sur les processus cognitifs qui sous-tendent les activités numériques.
TEMPLE (1992), d’après les études de Mc CLOSKEY et coll. (1985), propose trois modules :
- module de compréhension des nombres : passage d’une entrée verbale ou en chiffres arabes à une
représentation sémantique ;
- module de production : passage d’une représentation sémantique du nombre à une sortie verbale
ou en chiffres arabes ;
- module de mécanisme des calculs : faits arithmétiques, procédures de calcul et algorithmes.
-
- 20 -
De là, il décrit trois dyscalculies correspondantes :
- une dyscalculie du traitement numérique : lire et écrire les nombres ;
- une dyscalculie des faits numériques : assimilation des tables d’addition et de multiplication
(trouble de la mémoire sémantique, difficulté de récupération des faits numériques en mémoire,
cette dernière étant aussi lente et sujette aux interférences) ;
- une dyscalculie procédurale : planifier, exécuter les étapes des algorithmes de calcul surtout quand
ils sont complexes.
À sa suite, GEARY (1993) voit la dyscalculie procédurale comme un retard de développement dû à
un dysfonctionnement de l’hémisphère gauche (compréhension laborieuse des concepts sous-
tendant le comptage qui lui-même est laborieux).
Il décrit également une dyscalculie visuo-spatiale : alignement des chiffres dans la pose d’une
opération, mauvais traitement de l’écriture en base 10.
DEHAENE et COHEN (1997) mentionnent le “sens du nombre” que l’on peut estimer par la
capacité à représenter spatialement la taille du nombre sur une ligne numérique orientée. Il
existerait aussi un déficit à ce niveau.
Ils ont élaboré le modèle du "triple code" (DEHAENE, 1992, 1997) :
- le code analogique : représentation sémantique du nombre sur une ligne numérique mentale
orientée (comparaison des nombres, estimation des quantités, calculs approximatifs) ;
- le code verbal : activités de comptage puis assimilation et mémorisation des faits numériques ;
- le code visuel, pour la notation en chiffres arabes : calculs complexes, jugements de parité.
VON ASTER (2000) s’est basé sur ce modèle pour donner une classification. Ces trois codes,
comme connectés entre eux, fonctionneraient en réseau pour ainsi passer d’un code à l’autre plus ou
moins directement. Ainsi, trois dyscalculies ressortent :
- une dyscalculie verbale (comptage, stockage et récupération des faits numériques) accompagnée
dans la moitié des cas par un déficit de lecture ;
- une dyscalculie “sous-type arabe”: lire et écrire les nombres en chiffres arabes ;
- une dyscalculie “type général”: le code analogique est touché et donc le “sens” du nombre s’en
trouve atteint. Or il se trouve à la base des aptitudes numériques. On observe aussi la plupart du
temps une atteinte de la lecture donc du domaine verbal.
-
- 21 -
1.7 - Nature, cause et évolution des troubles
1.7.1 - Manifestations
Ils touchent les principes de base du dénombrement, les stratégies de résolution des opérations
simples.
Ce sont les aspects procéduraux, conceptuels (calcul et comptage), la mémorisation des faits
numériques qui sont touchés.
Concernant les procédures, les enfants dyscalculiques utilisent plus souvent et plus longtemps les
stratégies primitives de comptage (OSTAD, 1997).
On observe également une plus grande lenteur dans la résolution des calculs simples.
La mise en œuvre des procédures (comptage sur les doigts, comptage verbal) est laborieuse de
même que la récupération des résultats en mémoire (GEARY, 1990).
Leur stratégie est souvent immature (méthode du “tout compter”). On n’observe pas du tout non
plus de changement dans les stratégies utilisées, du fait de la difficulté à mémoriser et retrouver les
résultats en mémoire (GEARY et coll., 1991). On note toutefois un passage, mais tardif, du
comptage sur les doigts au comptage verbal.
Plus récemment, on a distingué les dyscalculies isolées des dyscalculies associées à une dyslexie.
Dans les deux cas, l’enfant utilise des stratégies primitives mais les “dyscalculiques-dyslexiques”
commettent plus d’erreurs (surtout pour la pose de retenues, la manipulation de grands nombres
(BRYANT et coll., 2000) que les dyscalculiques seuls. Dans celles-ci, les stratégies utilisées sont
les mêmes, et c’est bien la récupération en mémoire des faits arithmétiques qui est touchée
(JORDAN et MONTANI, 1997) Pour les premiers, le temps ne change rien alors qu’il est bénéfique
aux deuxièmes (HALISH et coll., 2001 ; GEARY et coll., 2000). Aussi, les stratégies de comptage
deviennent plus élaborées au fil du temps dans les dyscalculies isolées. Le même auteur observe des
difficultés dans la compréhension du nombre chez les dyscalculiques-dyslexiques alors qu’elles
sont absentes quand le trouble est isolé : cela prouverait que cette difficulté n’est pas caractéristique
de la dyscalculie mais sous-tendue par d’autres troubles spécifiques.
GELMAN et GALLISTEL (1978) décrivent les contraintes liées au comptage :
- le principe de correspondance terme à terme ;
- le principe d’ordre stable ;
- le principe de cardinalité, de la collection ;
-
- 22 -
- le principe d’abstraction (hétérogénéité des objets comptés) ;
- le principe de non pertinence de l’ordre sur le résultat.
Les trois premiers principes seraient innés et constitueraient la base des connaissances futures.
Selon BRIAS et SIEGLER (1984), les enfants se créent des “pseudo-principes” à partir de ces
contraintes. Et justement, GEARY et coll. (1992) montrent que les enfants dyscalculiques ont du
mal à distinguer les principes essentiels des pseudo-principes.
GROSS-TSUR et coll. (1996) pointent les faiblesses en dyscalculie sur le calcul complexe et sur la
connaissance des faits arithmétiques. En revanche, l’enfant dyscalculique maîtrise la comparaison
de quantités / nombres, le comptage, le transcodage, même s’il met relativement plus de temps que
ses pairs à effectuer ces tâches. Le subitizing est plus difficile aussi.
DEHAENE et coll. (2003) décrivent les lobes pariétaux et le sillon intra-pariétal comme étant les
aires responsables de la représentation et du traitement de l’information numérique, qui serait
déficitaire chez le dyscalculique.
GEARY (2004) montre que la difficulté réside dans la récupération des faits arithmétiques en
mémoire. Celle-ci perdure jusqu’à la fin du primaire au moins (JORDAN et MONTANI, 1997 ;
OSTAD, 1997, 1999 et 2000). Bien que retrouvées en mémoire, les réponses sont erronées. Ce
déficit s’amenuise peu avec le temps (SHALEV et coll., 1998, 2005).
En revanche, l’enfant montre un développement anormal dans la résolution de problèmes à énoncés
verbaux ou dans la résolution d’opérations quand il peut utiliser ses doigts pour compter.
Selon DEHAENE (1992), les faits arithmétiques sont stockés sous forme verbale. Peut-être les
difficultés de récupération et de lecture seraient dues à un trouble du traitement phonologique
(GEARY, 1993 ; HANISH et coll., 2001).
Pourtant des études comparant les performances des dyscalculies isolées, des dyscalculies-dyslexies
et des dyslexies seules, ont montré que ce trouble est indépendant des difficultés en lecture
(JOHAN et coll., 2003).
BAROUILLET et coll. (1997) montrent que les difficultés de récupération des faits arithmétiques
pourraient être liées à une incapacité à inhiber les résultats non pertinents présents en mémoire
(effet de proximité des chiffres). Cela serait dû à de faibles capacités en mémoire de travail, au
moment de la sélection de la réponse (CONWAY et ENGLE, 1994 ; GEARY, 1990 ; OSTAD,
1998).
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- 23 -
Cela pourrait aussi être lié à un déficit de représentation et de récupération des faits numériques,
indépendamment de la mémoire de travail ou sémantique (BUTTERWORTH, 1999 ; TEMPLE et
SHERWOOD, 2002).
1.7.2 - Facteurs causaux
Deux théories s’opposent : la dyscalculie serait la conséquence d’un déficit cognitif général,
élémentaire (faibles capacités mnésiques notamment mémoire de travail, trouble des habiletés
visuo-spatiales), ou bien le trouble serait lié au dysfonctionnement d’un système neuro-anatomique
spécialisé dans les traitements numériques.
Mémoire de travail
Selon GEARY (1993), l’enfant dyscalculique rencontre deux grandes difficultés:
- l’utilisation des procédures de calcul qui, de plus, sont immatures ;
- la stockage, le maintien et la récupération en mémoire des faits numériques.
La faible mémoire de travail entraîne une vitesse de traitement moindre, donc une procédure de
comptage plus lente avec des erreurs et un maintien laborieux des valeurs en mémoire à court terme
(oubli des opérants: THEVENOT et coll., 2001) et enfin un stockage difficile des faits numériques
en mémoire.
Or il y a un lien entre mémoire de travail et récupération des faits numériques (BAROUILLET et
LEPINE, 2005).
À QI égal, les enfants dyscalculiques ont une mémoire de travail (empan envers) et à court terme
(empan endroit) moins performante que celles des enfants sans trouble du calcul (GEARY et coll.,
1999, 2000, 2004).
Cependant BULL et coll. (1999) montrent que les plus faibles résultats en empan de chiffres, de
mots et de comptage disparaissent quand on a comme critère d’exclusion de la population une
difficulté en lecture.
Aussi, de récentes études montrent le lien essentiel entre la vitesse de traitement et la mémoire de
travail, à différencier de la mémoire à court terme (BAROUILLET et coll., 2004).
L'enfant dyscalculique présente de moindres capacités à inhiber les réponses non pertinentes lors de
la récupération en mémoire (BAROUILLET et coll., 1997, 2000 ; GEARY et coll, 2004).
-
- 24 -
CONWAY et ENGLE (1994) tiennent à différencier l’empan endroit (mémoire à court terme) de
l’empan envers – complexe - de comptage (mémoire de travail).
Or c’est la mémoire de travail qui influerait le plus sur les performances scolaires à venir
(DANEMAN et CARPENTER, 1980).
GERSTEN et coll. (2005) se demandent si la résistance au traitement, ainsi que le délai de
récupération, ne pourraient pas être considérés comme un critère de diagnostic de difficultés
d’apprentissage en arithmétique.
Habiletés visuo-spatiales
BADIAN (1983), GEARY et HOARD (2005) donnent l’idée que les difficultés dans ces habiletés
spatiales peuvent gêner la résolution des opérations posées, la transcodage (écriture positionnelle).
Comme celles des procédures arithmétiques, les fonctions visuo-spatiales seraient situées dans
l’hémisphère droit. Peut-être les troubles correspondants seraient plus associés que consécutifs
(ROURKE).
DEHAENE mentionne la ligne numérique, orientée, donnant la magnitude du nombre et son sens.
Or cette représentation est aussi spatiale. Ce trouble aurait donc un impact notable sur les activités
numériques et leur apprentissage, sur les procédés de comptage (VON ASTER, 2000 ; JORDAN et
coll., 2003).
Selon ROURKE, les enfants dyscalculiques ont de plus faibles performances dans les subtests de la
WISC-R (74) “complètements d’images”, “arrangements d’images”, “cubes” et “assemblages
d’objets”.
Pour autant, quand le QI est contrôlé, GEARY et coll. (2000) n’observent plus de différence sur une
épreuve de labyrinthes entre des enfants dyscalculiques et non dyscalculiques.
Au Trail Making Test, l’enfant doit alterner deux sens. L’enfant dyscalculique semble avoir des
difficultés dans cette tâche (WHITE et coll., 1992).
Quand elles sont aussi importantes en version verbale qu’en version non verbale, cela signifie que
le déficit se trouve plus au niveau de l’alternance des deux tâches qu’à celui de l’intégration visuo-
motrice (Mc LEAN et HITCH, 1999).
-
- 25 -
Atteinte d’un module numérique
On a étudié plus haut la capacité élémentaire à comprendre les nombres (BUTTERWORTH, 2005)
innée à reconnaître et manipuler mentalement les nombres et les quantités.
Il existerait des circuits neuronaux spécialisés dans le traitement numérique.
D’après leurs expériences basées sur le phénomène d’habituation, SHARKEY et COOPER (1980)
ont montré qu’à cinq mois bébé pouvait comparer des quantités (2 / 3), voire “calculer” (WYNN,
1992). D’autres expériences ont montré les mêmes capacités chez le nourrisson (ANTELL et
KEATING, 1983).
Nous partageons avec l'espèce animale deux systèmes élémentaires et innés de traitement des
nombres partagés (DEHAENE, FEIGRENSON et coll., 2004) :
- la représentation des grandes quantités de façon approximative : cortex parietal (contrôle des
doigts et sens du nombre), sillon intrapariétal (représentation des grands nombres) ;
- la reconnaissance et discrimination précises des petites quantités (3 - 4 items).
Ces deux systèmes se trouveraient à la base de la compréhension du nombre et de l’apprentissage
des habiletés numériques.
.
Métacognition
La métacognition est la connaissance que nous avons de notre propre cognition, des capacités et des
limites de celle-ci.
Il semblerait que l'enfant rencontrant des difficultés en mathématiques fasse fréquemment des
erreurs de jugement dans la prédiction (vais-je réussir à résoudre ce problème ?) et dans l'évaluation
(ma solution est-elle la bonne ?). On parle d'”offline métacognition”. Alors que l'évaluation est
toujours plus difficile pour le dyscalculique, qu'elle soit positive (ma solution est la bonne) ou
négative (je me suis trompé), la prédiction négative (je n'y arriverai pas) est aussi recevable chez
l'enfant dyscalculique que chez l'enfant non-dyscalculique.
Il ne parvient pas à définir son fonctionnement, à mesurer ses capacités, à prédire ses performances
et à réévaluer celles-ci. Il a donc un déficit métacognitif (MONTAGUE, 1992 ; GEARY, 1993 ;
ROURKE, 1993 ; BUTLER, 1990 ; VAIDYA, 1999 ; BOUDAH et WEISS, 2002).
Il a du mal à programmer les opérations qu'il va utiliser, à contrôler (feed-back) ses démarches, à
évaluer le choix de stratégies, ses calculs et ses résultats au fil de l'exercice voire à les corriger
(LUCANGELI et coll., 1997 ; VAN HANEGHAN et BAKER, 1989).
-
- 26 -
De façon générale, l'enfant ayant un trouble des apprentissages a tendance à avoir du mal à auto-
évaluer ses propres capacités, dans le sens de la sous-estime (MELTZER et coll., 1998).
Selon ROEYERS (2002), il s'agirait d'une métacognition immature et non pas absente. Cependant,
il a observé que lorsque l'exercice est difficile (au dessus du niveau attendu des différents groupes
d'enfants testés), les enfants plus jeunes non dyscalculiques et les enfants plus âgés dyscalculiques
font preuve d'une meilleure métacognition que les enfants du même âge que les derniers, mais non
dyscalculiques. Ce serait dû au fait que les problèmes abordés n'aient jamais été vus précédemment
en cours.
Ces différences de performance dans la métacognition ne concernent pas seulement la résolution de
problèmes arithmétiques mais aussi d'autres domaines comme la connaissance du système
numérique ou les procédures arithmétiques.
1.7.3 - Évolution du trouble
D’après les études déjà menées par GROSS-TSUR et coll. (1996), SHALEV (1998), on a voulu
observer l’évolution de la dyscalculie.
En prenant comme critères d’inclusion un QI supérieur à 80, des performances arithmétiques
inférieures d’au moins deux ans au niveau attendu de l’enfant, les auteurs de l'étude ont pu observer
une persistance du trouble au bout de trois ans, pour 47% des enfants ; au bout de six ans, pour
40%. Au-delà, et sans parler de dyscalculie, 95% des enfants ont toujours des difficultés en
mathématiques.
Un QI plus faible, ainsi que des troubles attentionnels, pourraient être des facteurs de persistance du
de la dyscalculie. On observe également, chez ces enfants dont les troubles persistent, des
difficultés en test d’écriture mais le lien avec la lecture n’est pas fait.
Selon JORDAN et coll. (2002), le développement est plus rapide quand la dyscalculie est isolée que
quand elle est associée.
D’ailleurs, les difficultés spécifiques en arithmétiques sont plus instables dans les temps que celles
en lecture.
Alors que la dyslexie isolée se caractérise à peu près de la même façon que la dyslexie associée à
une dyscalculie, la dyscalculie isolée ne se présente pas de la même façon qu'une dyscalculie
associée à une dyslexie.
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2 - Inhibition
2.1 - Définitions
2.1.1 - L'inhibition
On ne s'intéresse à l'inhibition que depuis le début des années 90, d'abord en Amérique du Nord
puis en Europe.
Nous parlons ici de l’inhibition en tant que processus cognitif. C’est l'une des fonctions exécutives
(les autres sont la planification, la flexibilité, le contrôle). C'est un système sous-tendant le
raisonnement et les comportements dirigés vers un but. Elle nous permet ainsi de « supprimer,
différer ou éviter une réponse prédominante préalablement activée » (CATALE C. et coll., 2009).
Il s'agit d'une réponse automatique, routinière, prégnante, une structure, un schème concurrent
présent en mémoire, à disposition mais non-pertinent pour la tâche demandée. Tandis qu’on active
une stratégie de résolution, on inhibe la ou les autres. Inhiber, c’est être capable de mettre de côté
un processus acquis, une routine (d’apprentissage) pour ensuite intégrer les nouvelles données
pertinentes.
2.1.2 - Inhibition, résistance aux interférences
Pour certains, il faut différencier ce concept de celui de résistance aux interférences : ici l'on doit
diriger notre attention sur les informations pertinentes pour la tâche demandée.
Ainsi, le Go / No Go éprouverait la réponse inhibitrice alors que le Stroop testerait la résistance aux
interférences (pour la description de tests, voir la partie 2.5).
D'autres considèrent la résistance à l'interférence pro-active comme relevant de l'inhibition.
On distingue également l'inhibition verbale / sémantique de l'inhibition motrice, tout comme
l’inhibition "automatic" de l’inhibition "effortfull". La première met de côté les schèmes non
pertinents présents en mémoire de travail pour une tâche relativement simple (épreuve de barrage).
En situation de résolution plus complexe, les schèmes non pertinents sont en compétition directe
avec ceux pertinents, et c’est dans ce cas qu’intervient l’inhibition "effortfull".
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2.1.3 - Negative Priming
Le "negative priming" ou amorçage négatif, est l’ « observation du ralentissement du temps de
réaction lorsqu'une réponse est demandée à un stimulus que l'on a enjoint au sujet d'ignorer dans
une phase antérieure » (TIPPER, 1985).
C'est la relative lenteur de réponse que l'on observe lors d'un nouvel exercice, lorsque les éléments
cibles à éliminer (distracteurs) dans l'exercice précédent deviennent les éléments cibles à relever.
Finalement, traiter une consigne inédite est plus facile que de traiter une consigne ressemblant à une
déjà vue précédemment mais remaniée. On attribue l'effet du Negative Priming à l'inhibition.
2.1.4 - Episodic Retrieval
Ce concept est basé sur la théorie de l'automatisation de LOGAN'S (1988). L'intérêt du contrôle
cognitif dans la mémoire épisodique n'est pas réduit à l'encodage et à la construction de celle-ci,
mais montre son intérêt aussi dans l' "episodic retrieval", c'est-à-dire retrouver en mémoire les
détails contextuels d'un épisode vécu précédemment via la reconnaissance d'un stimulus déjà apparu
dans cet épisode et qui nous apparaît alors familier bien que présenté dans la nouvelle situation.
Dans le cas précis d'une épreuves à consignes contraires, l' "episodic retrieval" va intervenir
lorsqu'une nouvelle tâche présentera des éléments rencontrés dans la tâche précédente. Mais la
consigne ayant changé, ces éléments enregistrés comme étant des distracteurs deviennent des cibles,
ou enregistrés comme des cibles deviennent distracteurs. C'est là que l'inhibition, par définition
flexible, s'adapte à la nouvelle consigne et agit sur les éléments inédits ou déjà vus qui sont
maintenant des distracteurs, omettant de supprimer les éléments autrefois distracteurs et maintenant
cibles.
Alors que l'inhibition consiste, après le repérage d'un élément distracteur, dans l'évitement de celui-
ci puis dans le maintien de cet évitement tout au long de la tâche, sans tenir compte d'un éventuel
retournement de situation (le distracteur devenant cible) dans une exercice ultérieur, l' "episodic
retrieval" intervient a posteriori. C’est-à-dire qu'il permet de repérer un élément rencontré
précédemment, et les fonctions qui lui étaient attribuées (distracteur ou cible) selon le contexte.
L' "episodic retrieval" se "souvient", alors que l'inhibition prévient.
L'inhibition n'a pas pour rôle de sélectionner ou d'identifier tel item comme étant distracteur (à
écarter) ou cible (à relever). Elle intervient après cette analyse, obéissant à la règle établie pour
l'exercice.
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Du point de vue de l' "episodic retrieval", la présentation d'un item en tant que distracteur n'a
aucune conséquence à moins que cet item réapparaisse comme cible. A ce moment-là, sa
représentation comme distracteur est recherchée en mémoire. Si cette recherche fonctionne bien, le
délai de réponse n'est pas perturbé.
L'inhibition n'agit que dans la mesure où l'on a pour but d'éliminer l'item considéré comme
distracteur, sans considérer le fait que ce même distracteur puisse devenir une cible.
L'inhibition a pour rôle de bloquer un premier distracteur d'une future réponse, alors que l' "episodic
retrieval" opère en arrière : la présentation d'un item dans le test induit le retour d'un épisode vécu
précédemment et contenant cet item. La réponse qui en découle automatiquement vient en
contradiction avec la nouvelle consigne, ce qui cause le « NP effect ».
2.2 - D'un domaine cognitif de base à un domaine plus spécifique
2.2.1 - Inhibition et développement cognitif
Le développement cognitif se fait par l'inhibition de schèmes ou de structures concurrentes, ce n'est
pas seulement la coordination et l'activation d'unités structurelles (HOUDE, 2000). Dans l'étude en
question, on a exploré l'inhibition via la construction de l'objet, le nombre, la catégorisation et le
raisonnement. La recherche se centre sur la compétition cognitive dans le traitement de
l'information et sur la résistance à l'interférence. Un déficit d'inhibition motrice entrainerait un
déficit d'inhibition cognitive chez l'enfant en plein développement et en pleine période d'acquisition
et d'assimilation implicite des connaissances à travers les objets et l'espace, stockées ensuite en
mémoire. Un déficit d'inhibition peut également expliquer pourquoi, encore à l'âge adulte, on donne
de mauvaises réponses lors d'une épreuve piagétienne (inclusion : on additionne ou on soustrait au
lieu de faire appel au schème acquis correspondant à la tâche demandée) alors que l'étape testée est
censée avoir été acquise depuis longtemps : il s'agit donc davantage d'un problème d'inhibition que
de connaissances.
2.2.2 - D'un domaine général au trouble spécifique
Les habiletés arithmétiques sont sous-tendues par les fonctions cognitives telles que la mémoire à
court terme (mémoire de travail : boucle phonologique, calepin visuo-spatial, administrateur
central) et long terme (faits arithmétiques, stratégies et schèmes de résolution), l’attention
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(sélective, divisée, soutenue), le langage oral / écrit (transcodage, symboles numériques) et les
fonctions exécutives telles que la planification, la flexibilité et l’inhibition cognitive / motrice.
L'idée qu'un domaine plus général soit touché à la base n'est pas à écarter. Il a largement été
question de la mémoire de travail (verbale et visuo-spatiale), de la mémoire à long terme ou des
fonctions exécutives (attention) au sujet de la dyscalculie.
Ainsi, un trouble spécifique concernant un domaine spécifique pourrait trouver son origine dans un
déficit plus général, un domaine plus large (KARMILOF-SMITH, 2006), mais se différencie et se
"spécialise" au fil du développement par, entre autres, le jeu des compensations. De même,
l'hypothèse selon laquelle le trouble comporte une part de génétique ne permet pas d'affirmer qu'un
gène serait responsable d'une fonction cognitive particulière, quand on sait que chacune est
dynamique et en interaction avec les autres fonctions. Seul un domaine reste principalement touché
et provoque des difficultés dans les apprentissage chez l'enfant.
Concernant l'attention, on a identifié une zone - le cortex cingulaire antérieur- qui correspondrait à
la maitrise, au maintien de l'attention sélective lors d'une tâche conflictuelle (consignes
contradictoires par exemple) (KAUFFMAN et coll., 2005). Le cortex latéral pré-frontal, lui,
permettrait le maintien d'une consigne et l'inhibition des réponses non pertinentes.
Aussi, le subitizing semblerait être touché chez le dyscalculique. Or il semblerait qu'il soit
dépendant de l'attention (RAILO et coll., 2007). Aussi, un entraînement centré sur l'attention
permettrait l'amélioration des performances du subitizing.
2.2.3 - Dyscalculie et attention
On a effectué peu de recherches sur les troubles de l'attention dans la dyscalculie. Une étude récente
(ASKENAZI et HENIK, 2010) a voulu remédier à ce manque en étudiant les liens que pouvaient
avoir trois sortes d'attention (alerte, orientation, inhibition) avec ce trouble spécifique, et aussi entre
eux. Un test novateur, ANT-I a été utilisé à la suite du ANT (Attention Network Test) ; il ne teste
plus isolément les trois sortes d'alertes mais les teste aussi en interaction (CALLEJAS et coll.,
2004). L'article a été trouvé récemment, alors que j'avais terminé les passations et que j'en étais à
l'analyse des résultats. Mes choix s'en sont heureusement trouvés confortés, bien que la qualité de
mon travail s'en soit également trouvée complexée ...
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Ce que l'on peut retenir de cette étude, le plus transmissible surtout, est qu'il y a donc trois grandes
sortes d'alertes :
- L'orientation (exogène ou endogène) dirige l'attention vers un point précis dans l'espace. Elle
implique les lobes supérieurs pariétaux, dont le sillon intrapariétal, le colliculus supérieur et le
thalamus ;
- L'alerte (ou état d'éveil) qui active et préserve l'attention. Ce sont les régions frontales et pariétales
droites qui jouent leur rôle ici ;
- Le contrôle exécutif de l'attention intervient dans les situations conflictuelles. Comme vu plus
haut, ce sont les aires frontales moyennes et le cortex préfrontal latéral qui sous tendent ce système.
A noter une proximité anatomique entre les fonctions d'alerte et d'orientation, cette dernière étant a
priori déjà décrite comme en lien avec les difficultés d'apprentissage en mathématiques. On peut
penser facilement que l'alerte se voit également impliquée.
Finalement, à l'issue de cette étude, on trouvait chez l'enfant dyscalculique ne présentant pas d'autre
trouble tel qu'un TDAH - même si ces deux pathologies ont en commun une atteinte de la région
frontale, ils ne présentent pas les mêmes causes, les mêmes caractéristiques concernant un éventuel
trouble des apprentissages en arithmétique chez cette dernière population - une moindre efficience
des fonctions d'alerte et d'inhibition, alors que l'orientation restait à peu près la même d'un groupe
(contrôle) à l'autre (dyscalculiques).
Un exemple d’application, inhibition et dyslexie
D'après un article de la revue A.N.A.E. (novembre et décembre 2007), intitulé « Impact de le
rééducation des troubles de l'inhibition sur le langage écrit. », D. POTELLE et coll. montrent que
les troubles attentionnels, associés ou non à une hyperactivité (TDAH), joueraient un rôle dans les
troubles de l'apprentissage de la lecture chez l'enfant. On décrit dans cet article une étude de cas où
l'on tente de mesurer l'impact d'une rééducation centrée sur l'inhibition sur les progrès en lecture
(déchiffrage, compréhension écrite et expression écrite). A l'issue de cette expérience, les
chercheurs ont effectivement pu constater une amélioration du langage écrit grâce à l'amélioration
des fonctions d'inhibition.
L'attention englobe plusieurs fonctions et sous-fonctions, les fonctions attentionnelles et exécutives,
dont l'inhibition.
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Selon STURN et coll. (1997), l'attention se décompose ainsi :
- l'alerte phasique : capacité à répondre rapidement à un stimulus ;
- l'attention soutenue : capacité à rester en alerte durant un laps de temps relativement long afin de
détecter des stimuli pertinents, fréquents ou non fréquents (vigilance) apparaissant à des intervalles
réguliers ;
- l'attention sélective : capacité à se focaliser sur certains aspects d'une tâche, tout en inhibant les
aspects non-pertinents. Elle serait la composante de base (COOLEY et MORRIS, 1990) ;
- l'attention divisée, pour les tâches doubles : capacité à surveiller l'apparition simultanée de stimuli
provenant de deux sources différentes.
Dans son modèle de l'attention et des fonctions exécutives, KORKMAN (2000) met à part
l'inhibition qui relèverait à la fois de la fonction attentionnelle et de la fonction exécutive.
HOFFMAN et coll. (1995) ont mis en évidence un lien entre les saccades oculaires nécessaires lors
de la lecture et les fonctions attentionnelles, alors que la lecture et l'attention visuelle d'une part
(TOUZIN, 1999), et la compréhension en lecture et l'attention visuelle d'autre part (SOLAN et coll.,
2003) sont également liées entre elles.
2.3 - Inhibition et dyscalculie
2.3.1 - Rôle de l'inhibition dans la dyscalculie
La dyscalculie est souvent liée à un déficit d’inhibition (PASCAL, 2009), et s’observe dans la
difficulté à gérer les interférences lors de la récupération des faits arithmétiques stockés en mémoire
à long terme. Le temps de réponse est plus long, quand celle-ci est bonne.
L’association dyscalculie - trouble de l’attention avec ou sans hyperactivité est fréquente.
Selon MYAKE (2000), trois facteurs exécutifs entrent en jeu : inhibition, mise à jour et shifting
(changement de consigne).
On observerait donc une difficulté à inhiber une stratégie acquise et à "switcher" vers une nouvelle
stratégie (Wisconsin Card Shorting Test), une difficulté à inhiber les réponses numériques sur-
apprises qui persistent plus longtemps en mémoire (BULL et SCERIF, 2001).
C’est l’inhibition endogène, c’est à dire l’inhibition non pertinente pour la tâche d’une information
présente dans la consigne ou l'exercice, ou le contrôle de l’information disponible en mémoire qui
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semble être difficile. L’inhibition exogène, celle de l’information externe, qui apparaît en dehors de
l'exercice numérique ou pas, n’apparaît pas touchée.
2.3.2 - Récupération en mémoire
On définit la dyscalculie comme étant un trouble des apprentissages des habiletés mathématiques,
qui serait dû à un déficit cognitif localisé et spécifique. Ainsi, on ne peut incomber la faute à une
dyslexie, un trouble de l'attention ou un déficit plus général d'ordre intellectuel.
La dyscalculie se manifeste de différentes manières, les causes supposées sont multiples, d'où la
mise au pluriel : « les dyscalculies ». Ainsi on observe des difficultés dans la récupération en
mémoire des faits arithmétiques, dans la mise en application des procédures apprises et dans la
résolution de problèmes arithmétiques.
Récemment, on s'est davantage concentré sur la base, les pré-requis à l'apprentissage tels que la
magnitude (sens du nombre) et le subitizing.
On met en évidence chez l’enfant dyscalculique un déficit de récupération en mémoire des faits
numériques et des résultats mémorisés. Elle ne se fait pas, sinon elle est laborieuse, lente ou
mauvaise (GEARY et HOARD, 2001). Dans cette moindre performance lors du processus de
récupération, on met en cause un déficit d’inhibition d’une information ou d’une réponse non
pertinente, ce qui pèse donc par la suite sur la mémoire de travail. C’est pour cela, entre autres, que
la mémoire de travail est mise en cause dans les processus sous-tendant les habiletés arithmétiques.
2.3.3 - Imagerie et localisation
D'un point de vue neuro-anatomique, ces difficultés correspondraient à un développement moindre
ou anormal des lobes pariétaux, notamment le sillon intrapariétal. Une réduction de la matière grise
au niveau du sillon intrapariétal gauche aurait été observé (ISAAC et coll, 2001) chez l'enfant
prématuré présentant des difficultés en mathématiques. Le sillon intrapariétal droit serait lui
impliqué dans la magnitude, quand elle n'implique pas la symbolique (PRICE et coll., 2007 ;
KADOSH et coll., 2007). Partant de ce point de vue, on est amené à penser que la dyscalculie (les
anglo-saxons disent - traduit littéralement - « dyscalculie développementale ») est un trouble bien
spécifique et isolé, et que ses causes sont tout aussi précises et spécifiques.
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2.4 - Epreuves testant l’inhibition
Tâches de génération aléatoire, comme le « trail making test »
On teste la flexibilité cognitive, en deux parties :
- partie A : 25 nombres sont disposés dans le désordre sur une feuille. Le sujet doit relier le plus vite
possible, à l'aide d'un crayon, les nombres dans l'ordre croissant ;
- partie B : 25 nombres et lettres. Le sujet doit les relier, toujours dans l'ordre croissant et le plus
vite possible, en alternant chiffre-lettre. C'est dans cette partie que l'on teste la flexibilité.
L'évaluation se fait d'après le temps total et le nombre d'erreurs.
Le test du « Wisconsin Shorting Card » est utilisé pour éprouver la flexibilité
Là aussi, on teste la flexibilité mentale, les capacités de déduction.
Matériel : 4 cartes stimulus, 48 cartes réponses, 3 catégories (forme, couleur, nombre).
Le sujet doit identifier les différentes façons de classer ces cartes, d'abord de façon libre puis
dirigée. On refuse une catégorie proposée pour l'amener à déduire le changement de critère et
trouver alors une autre façon de classer, inhiber la stratégie en cours pour en trouver une nouvelle.
On calcule ensuite le nombre de séries corrects puis le nombre d'erreurs (persévérations).
Apprentissage AB-AC
Le sujet doit apprendre une première liste de 12 paires de mots appariés (voleur-crime, lion-
chasseur), puis une deuxième liste de 12 paires, contenant le même premier mot de chaque paire de
la première liste, mais apparié à un nouveau mot (voleur-bandit, lion-cirque). On observe alors un
interférence pro-active.
L’empan d’écoute (DANEMAN et CARPENTER, 1980) implique aussi l’inhibition :
Le sujet doit deviner le dernier mot d'une phrase.
L'épreuve du Tapping
Elle ne met pas en jeu la lecture. L'enfant doit s'empêcher de reproduire un geste effectué par
l'examinateur.
Test de Hayling (SHALLICE et coll., 2002)
Capacité d'inhibition des réponses verbales sur-apprises.
Dérivé du test pour adulte (BURGESS et SHALLICE, 1996) lors de lésions frontales.
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Test de Stroop (STROOP, 1935)
Capacité à inhiber une réponse automatique dominante et à résister à une interférence induite
(GOLDEN et coll., 1987 : 7 à 80 ans ; ALBARET et MIGNIERE, 1999 : 8-15 ans).
Dénomination, lecture puis interférence :
- score de réussite = nombre d'items correctement lus ou dénommés en 45 minutes (temps de
réalisation de la planche) ;
- score d'erreurs = auto-corrigées, non corrigées, hésitations ;
- score d'interférence = (dénomination – interférence).
Plus le score est élevé, plus la sensibilité à l'interférence est grande.
Entre 7 et 19 ans, on observe une réduction de l'effet d'interférence (COMALLI et coll., 1962 ;
KOENING, 1986 ; SEVINO, 1998).
Une seule étude de validité : 32 enfants TDAH.
Tests proches de Stroop, pour les enfants plus jeunes et non lecteurs
- test des fruits (ARCHIBALD et KERNS, 1999) ;
- test des animaux (WRIGHT et coll., 2003) : corps / tête ;
- le « Real Animal Size Test » (5 - 9 ans).
Tâches Go / No Go
Testent l'inhibition au sens propre : répondre ou s'abstenir de répondre selon le stimulus,.
Cogner et Frapper
Apprentissage d'une réponse contradictoire, inhiber une réponse (ne rien faire).
Test de la Statue (KORKMAN, KIRK et KEMP, 2003)
Inhibition de distracteurs et contrôle du comportement.
Il y existerait un niveau plafond dès 6 ans même si le test est étalonné jusqu'à 12 ans.
Tâches de réponses contrariées
Selon le paradigme de LURIA - conditionnement simple (faire la même chose) / conditionnement à
conflit (faire le contraire) - on observe un apprentissage des réponses contradictoires.
[test (PASSLER et coll., 1985), test jour et nuit, test des mondes contraires (ZIMMERMAN et
coll.), réponses associées (KORKMAN et coll., 1998)]
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3 - Problématique et hypothèses
L'inhibition fait partie des fonctions exécutives qui permettent la planification, l'exécution et le
contrôle d'une action dirigée vers un but. Par ce processus, on supprime ou on évite une réponse,
une routine intégrée en mémoire procédurale ou déclarative, non pertinente pour la tâche demandée.
Les habiletés arithmétiques requièrent l'inhibition, notamment lorsqu'il s'agit de récupérer un
résultat en mémoire à long terme (faits numériques, tables), en mémoire de travail (calcul mental
complexe), ou de choisir la stratégie, le schéma ou le modèle mental adéquat pour la résolution d'un
problème.
On peut se demander donc si, dans une dyscalculie où domine notamment un déficit de récupération
des faits numériques, l'inhibition entre en jeu ou pas.
Pour éviter de trop fermer la question, la problématique sera : « Existe-il un lien entre l'inhibition et
certaines habiletés arithmétiques »?
La mémoire de travail étant largement mise en cause, on peut se demander également si la mémoire
en général n'est pas amoindrie par une inhibition déficitaire qui viendrait entraver la récupération en