BOULINGUEZ Matthieu IUT B Tourcoing

ES2A DUT Carrires Sociales

Option ducation spcialise

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DOSSIER DE PRATIQUES PROFESSIONNELLES

Introduction

mon entre en formation, jai pu dcouvrir plus en dtails ce qutait laccompagnement

ducatif. Cette notion qui semble vidente lorsquon lentend est en ralit des plus complexes

apprhender. Jai donc profit de ce premier stage pour toffer ma rflexion et tenter de cerner les

mcanismes de laccompagnement ducatif et de la relation avec lusager qui en mane.

Cette relation nexiste pas partir de rien, il faut llaborer, tenter de la conserver, lvaluer et la

nourrir pour tendre le plus possible rduire la fragilit de lautre.

Lducateur doit parvenir viser lautre sans lcraser, sans le manquer, ni lignorer. La relation doit

tre respectueuse de lusager.

Selon moi, accompagner quelquun, cest dabord laccueillir et lcouter avant mme dintervenir,

il sagit daccepter lautre tel quil est, le comprendre. Cest ensuite participer avec lautre, mettre

du sens dans ce quil vit et ce quil recherche pour finalement avancer ses cts afin de laider

sapproprier ce nouveau sens et la voie dans laquelle il sengage.

Cerner le cadre de cet accompagnement spcialis est une chose mais il en dcoule de nombreuses

pratiques et rflexions qui mnent souvent un questionnement sur sa propre faon de faire. Lors

de cette premire exprience professionnelle, llment qui ma paru le plus pertinent et le plus

vident daborder en premier lieu est celui relevant de la distance professionnelle. Cest peut tre l

que se trouve le point de dpart dune relation ducative efficace et prolifique.

Jai effectu mon stage au sein dun ESAT . Il sagit dtablissements protgs qui accueillent des 1

personnes en situation de handicap sur dcision de la CDAPH. Ils ont pour finalits de permettre 2

une personne en situation de handicap, par des conditions de travail amnages et un suivi ducatif,

daccder une vie professionnelle et sociale.

Au sein de ce type dtablissement, les usagers ont tendance ne pas toujours cerner la fonction de

lducateur et comprendre la distance que celui-ci instaure avec eux. A partir de l, il convient de

se demander comment instaurer une relation ducative efficiente tout en construisant et en

prservant la distance professionnelle.

Je mnerai ma rflexion en partant de deux observations vcues sur mon terrain de stage qui

mamneront me questionner sur ma pratique et celle des autres professionnels pour enfin tenter

dapporter un regard critique, une analyse pertinente de celle-ci.

Etablissements et Services dAide par le Travail1

Commission des Droits et de l'Autonomie des Personnes Handicapes2Page sur 2 17

Prsentation de ltablissement

Les lois et dcrets qui rgissent les ESAT :

- Le dcret du 31 dcembre 1977, modifi par le dcret du 26 mars 1993, et le dcret du 9 mai 1995 relatif aux centres d'aide par le travail

- La loi du 10 juillet 1987, en faveur de l'emploi des personnes handicapes - La loi du 2 janvier 2002 rnovant l'action sociale et mdico sociale - La loi du 4 mai 2004 relative la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue

social

- La loi du 11 fvrier 2005 pour l'galit des droits et des chances, la participation et la citoyennet des personnes handicapes

- Le dcret du 16 juin 2006 relatif aux tablissements et services d'aide par le travail - Le dcret du 20 mai 2009 relatif la formation, la dmarche de reconnaissance des savoir-faire

et des comptences et la validation des acquis de l'exprience des travailleurs handicaps

accueillis en tablissements ou services d'aide par le travail

L'ESAT doit, du fait de son statut mdico-social, rpondre une double finalit :

- Offrir aux personnes handicapes des possibilits d'activits caractre professionnel diverses

- Offrir des soutiens mdico-sociaux et ducatifs, notamment le maintien des acquis en vue de

favoriser leur panouissement personnel et social

La loi du 2 janvier 2002 a pour principaux objectifs d'articuler l'innovation sociale et mdico-

sociale en adaptant les structures et services aux besoins et la promotion du droit des usagers.

Cette loi s'articule autour de quatre grands axes :

- Renforcer le droit des usagers

- Elargir les missions de l'action sociale

- Amliorer lorganisation et la coordination des diffrents acteurs

- Amliorer la planification

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L'article 7 de la loi aborde les droits gnraux garantis l'usager dont les principaux sont :

- Le respect de sa dignit, de sa vie prive, de son intimit - Le libre choix de ses prestations - Une prise en charge et un accompagnement individuel favorisant son dveloppement, son

autonomie et son insertion

- La confidentialit des documents et informations le concernant - La participation directe ou avec laide de son reprsentant lgal la conception et la mise en

oeuvre de son projet individuel

Enfin, jai pu identifier les documents essentiels au sein dun ESAT :

- Un livret daccueil qui permet lusager de connatre les services sa disposition - Une charte des droits et liberts sur les principes thiques et dontologiques, la non

discrimination, le droit la prise en charge, linformation, au respect des liens familiaux,

la protection, lautonomie

- Un rglement de fonctionnement qui dtermine les droits et obligations de la personne - Un contrat de soutien et daide par le travail qui spcifie la nature des prestations offertes - Un projet dtablissement qui dfinit les objectifs de ltablissement ou du service

Pour rsumer, les ESAT offrent aux adultes handicaps des possibilits d'activits professionnelles,

un soutien mdico-social et ducatif et un milieu de vie favorisant leur panouissement personnel et

leur intgration sociale.

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Observations

Avant de prciser le thme de cet crit, jaborderai deux observations relatives mon

exprience qui seront utilises dans ltayage de ma rflexion. Je tiens illustrer la complexit

instaurer un espace, un loignement vis vis de lusager tout en parvenant mettre en place une

relation ducative de confiance. Je souhaite comprendre si la nature de ces relations pourrait

mempcher dexercer mon mtier dans une dmarche thique et professionnelle acceptable.

1) La situation de Martine

La premire situation est celle de Martine, dficiente intellectuelle moyenne ge de 54 ans

prsentant des troubles affectifs et souffrant de dpression. Elle est arrive lESAT il y a 20 ans.

Elle vit en appartement avec son conjoint, na pas denfant et dispose dune mesure de protection

sous tutelle. Elle est bien intgre au sein de ltablissement mais est rgulirement sujette des

disputes et des crises dangoisse. Elle fait souvent lobjet de remarques ou dinjures lies sa soit-

disant mauvaise odeur . Elle est trs exigeante dans ses relations avec autrui.

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Les faits relats se passent le jour de mon arrive et quelques semaines plus tard afin de faire

ressortir lvolution de la situation. Dans un souci danonymat, les prnoms utiliss sont choisis au

hasard. Jean-Marc tant lducateur spcialis et Chlo, la monitrice ducatrice.

Lors de mon premier jour lESAT, alors que la plupart des usagers me serrent la main et

paraissent plutt distants et mfiants, le comportement et lapproche de Martine mon gard

minterpelle. Je lui tend la main comme jai pu le faire avec le reste du groupe mais elle me fait

spontanment la bise. Je ne my oppose pas. Elle discute tout de suite avec moi afin de faire

connaissance. Je remarque quelle sert la main Jean-Marc et le salue brivement. Elle sapproche

ensuite de la monitrice en criant Bonjour ma petite Chlo! et la sert dans ses bras longuement.

Elle lui touche les cheveux et lui demande si elle peut la voir en entretien laprs-midi.

De retour au service ducatif, je fais part de mon interrogation vis vis de Martine. Chlo

mexplique les difficults de Martine, son profil, son parcours et me fait part de la relation

privilgie quelle a pu mettre en place avec elle. Jean-Marc, quant lui, me fait remarquer que la

distance quil a instaur en prfrant lui serrer la main et viter les contacts physiques, lui est

essentiel pour travailler de faon objective, il tient maitriser ses motions et son comportement vis

vis de lusager; il me confie nanmoins que cela lempche dobtenir une entire confiance dans

sa relation avec Martine.

Lorsque Martine revient au bureau laprs-midi , elle souhaite parler seule avec Chlo et refuse de

communiquer lobjet de sa demande Jean-Marc. Chlo sisole donc avec elle en salle dactivits et

aprs 30 minutes dentretien, nous relate les problmes que Martine lui a expos. Jean-Marc

comprend la situation et ne souhaite pas changer ses pratiques pour autant. Il mexplique que le

relais de linformation entre lui et sa collgue permet de pallier cette diffrence de positionnement

envers cet usager.

Quelques semaines plus tard, ma relation avec Martine a volu, elle me demande souvent

conseil et parle rgulirement avec moi, jchange avec elle et lui fait part quelque fois de mes

expriences personnelles afin de laider trouver des rponses ses questions. Elle me dit quelle a

confiance en moi et que mon soutien est important pour elle. Je continue de lui faire la bise et il

arrive quelle me prenne dans ses bras comme lors du dernier entretien que jai pu avoir avec elle.

Elle est arrive panique, en pleurs suite une altercation dans le bus qui amne le groupe au matin.

Il a t difficile de lapaiser et de la motiver reprendre le travail dans de bonnes conditions, Chlo

tant absente ce jour l, cest spontanment vers moi quelle est venue. Ses rgulires effusions de

tendresse mon gard mont toujours beaucoup tonn. Pour exemple : il arrive souvent quelle me Page sur 6 17

prenne la main et me demande daller sisoler afin de discuter, cest dans ses moments que je ne sais

plus de quel ct se trouve lempathie, laccompagnement et le transfert. Lquipe ducative me

laisse me positionner comme bon me semble tout en me rappelant que le cadre doit tre instaur.

Jean-Marc trouve que la relation que jai avec Martine est certes moins distance que la sienne mais

cela nenlve rien au respect de ma fonction par rapport elle, il me dit que ce positionnement sest

avr efficace dans la mesure o je parviens obtenir certaines informations importantes quant la

rsolution des problmes quelle rencontre.

2) La situation de Johnny

La seconde situation est celle de Johnny. Il est g de 24 ans et est arriv lESAT en

Janvier 2014. Johnny souffre dune psychose infantile caractre autistique. Dficient intellectuel

lger, il a un bon niveau de comprhension. Il sait lire, crire et compter. Trs ritualis, il a besoin dvoluer au calme, dans un lieu o il se sent scuris, avec peu de

stimulis extrieurs. Cest un adulte plutt rserv, qui fait preuve de discrtion. Il sest bien intgr

au sein des groupes de travail o il a exerc. Il dispose dune mesure de protection sous curatelle renforce. Il a besoin dtre assist dans les

actes de la vie civile, tant en ce qui concerne lexercice de ses intrts patrimoniaux que la

protection de sa personne. Il est clibataire.

La situation de Johnny est diffrente de celle de Martine. Johnny a t sujet de nombreuses

altercations durant mon stage, il peut devenir violent tant verbalement que physiquement lorsquil a

le sentiment dtre agress. Afin de vous livrer les faits de faon objective et comprhensible au

regard du thme abord, jai choisi de faire un constat de la relation que jai pu instaurer avec lui en

rappelant succinctement les vnements forgeant sa construction.

Johnny a souvent fait lobjet de disputes avec les autres travailleurs de son atelier. Il a fallu

grer ces situations dans lurgence afin quil ne mette pas en danger le groupe ou lui mme. Le

psychiatre et le psychologue ont longuement discut avec lui aprs ces vnements afin dessayer

de comprendre ce qui lamne ce genre de raction. Johnny reste souvent abstrait dans ses

explications, il ne rentre pas dans les dtails et parait craintif. Johnny apprcie le calme, il prfre

attendre devant ou dans le bureau du Service ducatif pendant les pauses car il y a trop de monde

la caftria et cest trop bruyant pour lui. Il vient souvent discuter avec moi, il me parle de sa

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passion voire son obsession pour James Bond. Je lcoute avec attention et cela semble lui faire

plaisir. Si je ne met pas un terme la conversation en lui rappelant lheure laquelle il doit tre

dans son atelier, il a tendance ne plus pouvoir sarrter. Cest le seul sujet quil aborde avec les

autres. Avec Jean-Marc et Chlo, il reste distant, il leur sert simplement la main pour leur dire

bonjour et ne discute pas avec eux sils ne forcent pas la chose. Jean-Marc essaye souvent

dinstaurer le dialogue sous le ton de la plaisanterie mais Johnny ne comprend pas et se braque

rapidement. Jai russi instaurer avec lui une relation privilgie en partie du fait de nos ges

rapprochs. De plus, je parviens comprendre son histoire dans la mesure o certaines expriences

quil a vcu me rappelle certaines expriences personnelles. Je lui en fait part. Je madapte, ne lui

pose pas de questions, je lcoute et vite de le regarder dans les yeux car cela le dstabilise. Peu

peu, il ma accord sa confiance. Jai pu obtenir des informations le concernant que lquipe

pluridisciplinaire ne connaissaient pas. Il me dit quil ne comprend pas ce quil fait ici, quil ne se

sent pas sa place. Le jour de mon dpart, son comportement ma sembl trange. Je me suis

approch de lui et pour la premire fois depuis le dbut de mon stage je lai vu pleurer. En fin de

journe, nous avons accompagn les usagers au bus et Johnny est parti. Je suis surpris, moi qui

pensait mtre prserv de tout attachement trop personnel, de ressentir une sensation

darrachement et de tristesse.

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Rflexion

La premire question qui est venue minterpeller est celle concernant lattitude diffrente

des deux professionnels formant lquipe ducative. Nest-il pas prfrable dhomogniser les

pratiques afin quelles reprsentent un repre pour la personne? Quelles divergences cela engendre

t-il dans laccompagnement ducatif? La relation ducative est-elle aussi efficace dune faon de

faire lautre? Est-ce normal que les usagers aient des prfrences et un comportement diffrent

envers tel ou tel professionnel?

En observant mon comportement, je me suis souvent demand sil avait t judicieux

daccepter ce contact particulier avec Martine Accepter un contact rapproch est-il lgitime? Ne

peut-il pas engendrer une raction de jalousie ou de rejet pour les autres usagers? La neutralit est-

elle obligatoire?

Se surprendre prouver certaines motions dans la relation ducative, est-ce franchir les

limites de la bonne distance? Comment parvenir matriser ces affects? Sagit-il de la question

du transfert? Mettre en jeu et se servir de son vcu dans la relation lautre est-il un danger, une

faute professionnelle? Quest-ce que cela engendre?

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En conclusion, y a t-il une bonne distance? Par quoi est-elle influence? Quels sont les

lments prendre en considration pour linstaurer efficacement avec lusager?

Avant dentamer lanalyse et de trouver des rponses ces questions, je prendrai comme

point dancrage, une dfinition de la distance que je caractriserais de logique voir scientifique pour

dboucher sur une dfinition plus spcifique de ce quest la distance professionnelle.

Au sens strict du terme, la distance se dfinit comme la sparation de deux points dans

l'espace, de deux objets loigns l'un de l'autre par un cart mesurable . De cela dcoule certaines

expressions comme garder ses distances , rester distance , se tenir distance de

quelquun . La notion de distance renvoie donc la fois la possibilit de proximit et celle

d'loignement. Il sagit dune notion trs complexe dans la mesure o elle sous-entend qu'il existe

un lien troit entre distance physique et distance motionnelle. On conclura donc que deux

personnes trs proches physiquement auront tendance tablir un lien motionnel trs fort.

La distance professionnelle, quant elle, peut tre dfinie, selon le philosophe Mike W.

MARTIN, comme la limite morale et psychologique l'expression des valeurs personnelles dans

le cadre de l'activit professionnelle . galement appele carapace professionnelle par E.

MALLEM, on peut la comparer un bouclier qui permettrait de se protger des motions de la

personne que lon accompagne.

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Analyse

- Concernant le positionnement professionnel de Jean-Marc vis vis de Martine, cet

exemple montre bien que la distance choisie par lducateur ne doit pas sinscrire dans un ordre

unilatral. Lducateur doit prendre en considration le sujet qui se tient en face de lui. On pourrait

caractriser cette distance comme fige, immobile. Le mode relationnel sopre selon des principes

de respect mutuel mais engendre une inadaptation aux situations de lusager et sa singularit. Le

problme tant que le professionnel est persuad davoir instaur la bonne distance dans la

mesure o celle-ci a t pr-rgle, acquise. Jean-Marc sattache exercer une parfaite maitrise de

ses affects . Cela lempche de comprendre que lusager demande lui aussi du respect mais au

regard de sa propre distance, celle qui lui convient. Lducateur est auto-centr sur sa faon de faire

et pense tre objectif dans sa dmarche alors quil se rfre son propre cadre.

La consquence est quil cre directement une distance trop prononce entre lui et lusager,

ce dernier doit donc en supporter les effets et sen accommoder mais cela nest pas sans

consquences. On remarque bien dans la situation de Martine que Jean-Marc a rompu quelque

chose, le respect est entier mais la confiance est partielle. Pour que la confiance sinstalle, il faut un

change, un retour, une relation se cre grce une certaine rciprocit; lautre doit nous renvoyer

quelque chose, un signe, une marque de confiance. Et nous devons faire de mme condition,

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comme la remarqu J. ROUZEL, que cela se fasse au service dune cause qui est extrieure et

quon professionnalise ses actes .

De plus, le fait que la monitrice adopte une posture radicalement diffrente entrane immdiatement

une relation dune tout autre nature avec Martine. Chlo parvient se faire respecter tout en ayant

instaur une relation de confiance entre elle et Martine. On observe ici limportance du tiers dans la

relation ducative dans la mesure o Chlo reprsente le relais entre Martine et Jean-Marc, cest

grce la relation entre sa collgue et lusager que lducateur possde lensemble des informations

lies aux difficults de ce dernier. On peut souligner aussi limportance des runions dquipe.

Il semble possible de pallier au positionnement de Jean-Marc condition quil ne sagisse

pas dune faon de faire rpandue lensemble des professionnels; nanmoins, de tels carts dans

les pratiques obligent lusager se positionner diffremment et sadapter au comportement des

professionnels alors quil devrait en tre autrement. Cest lducateur de sadapter, la personne

ayant des difficults na pas forcment les possibilits de comprendre et cela brouille ses repres et

loblige refouler la faon dont on est entr en relation avec elle.

- Concernant mon propre positionnement, je me suis donc demand si mon choix avait t

judicieux ou sil aurait fallu tre plus distant ds le dpart.

Mes recherches mont conduit une premire dfinition de la relation ducative, cette dernire

apportant un clairage intressant.

J. ROUZEL propose une approche singulire inspire de la psychanalyse : Si la relation engage

par un ducateur avec une personne en souffrance obit aux alas de toute relation humaine, cette

rencontre singulire prend, en revanche, une toute autre dimension quune relation damiti ou de

camaraderie. Dune part, elle prend en compte la demande singulire des personnes. Dautre part,

elle sinscrit dans un projet, obit une mission, est garantie et contrle par une institution, tant

elle-mme sous la tutelle dun organisme dEtat ou dune collectivit locale (). Du coup, la

relation ducative est au service de ces diffrents niveaux dobjectifs (). La relation ducative est

le moyen dagir dans le sens dun changement des personnes en vue dune meilleure insertion pour

elle dans la communaut des citoyens.

Ce que J. ROUZEL met ici en vidence, cest limportance de prendre en considration les finalits

de la relation ducative. Ce sont ces objectifs qui diffrencient selon lui une relation ducative

dune relation damiti ou damour ordinaire. Dans notre vie personnelle, nos relations ne sont pas

rgies selon les mmes codes, le cadre est diffrent et par consquent, la relation est toute autre.

Selon J. ROUZEL, mme si une relation ducative est empreinte dmotions et se veut parfois

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moins distance, elle reste une relation ducative et non une relation amicale, familiale ou

amoureuse. On rpond ce quoi on sest engag, cest notre responsabilit qui est en jeu. Pour

revenir ma raction concernant Martine, je dirais donc dans un premier temps quil sagissait de

ne pas entraver la confiance quelle pourrait maccorder en lui montrant que je pouvais dplacer

certaines barrires afin daccueillir sa faon dtre et quelle pouvait compter sur moi.

Concernant lhypothse du sentiment de jalousie ou de frustration que pourrait ressentir les

autres usagers, je nen ai pas t tmoin. Je pense qu partir du moment o lon sadapte

correctement lautre, o lon cre notre relation bonne distance, celui-ci ne doit pas se sentir

rejet ou frustr de constater que la relation instaure avec un autre nest pas la mme. Il sagit de

comprendre soi mme et de faire comprendre lautre que chaque relation est unique du fait de la

singularit de chaque usager.

Je me posais la question de savoir si la neutralit tait obligatoire ou non. Selon J. ROUZEL,

elle est tout simplement impossible. Il avance que : dans sa relation, lducateur nest pas neutre.

Il met en jeu sa personne, sa personnalit, ses sentiments, ses gots, ses opinions, ses passions, ses

reprsentations de lui mme, des autres, du monde, mais il le fait au service dune cause qui lui est

extrieure et il professionnalise ses actes. Par consquent, on peut dire quinstaurer la juste

distance passe galement par le fait de simpliquer personnellement, on y met de ce que nous

sommes et cest assez pour abolir toute neutralit. On peut tout de mme parler de neutralit si lon

fait rfrence tout traitement de faveur; il est essentiel de sadapter aux difficults propres aux

usagers mais de rester sur un pied dgalit dans la mise en place de laccompagnement et donc de

bannir toutes prfrences ou considration privilgie pour telle ou telle personne. Lducateur doit

avoir la mme envie, la mme motivation aider et accompagner lautre, seule la faon de procder

varie; il en va de sa lgitimit. En psychologie, on parlerait de neutralit bienveillante. Cette

bienveillance qui peut tre dans l'esprit de lducateur ne se trouve pas forcment dans le vcu de

lautre qui peut au contraire percevoir dans l'attitude rceptive et non active de son interlocuteur une

marque de dsintrt voire une hypocrisie professionnelle. Ce qui peut s'additionner aux blessures

narcissiques existantes et venir alimenter la pathologie dj prsente (cest le cas pour Johnny et

Martine qui chacun dans un contexte particulier nont pas reu assez dattention).

Accepter un contact physique peut donc savrer lgitime si on le fait efficacement. Il faut

sattacher soigner ses expressions du visage, mettre laccent sur la qualit du contact tactile, les

manires concrtes de communiquer.

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- Abordons maintenant la question de laffect. Etroitement li la notion de distance

professionnelle. Selon LE BRETON, la relation ducative suscite des motions, qui leur tour

vont nourrir la relation. Concernant ma raction vis vis de Johnny je comprends quil maurait t

difficile de trouver la bonne distance en me coupant de mes affects ou simplement en les matrisant.

Je comprends aussi pourquoi Chlo est parvenue trouver la juste distance avec Martine. Lmotion

ne se reoit pas de manire passive, elle est aussi ce qui permet de se positionner par rapport

lautre, ce qui permet lautre de cerner nos limites ainsi que didentifier les frontires de la relation

aidant-aid, accompagnant-accompagn.

Cette relation ne peut saccomplir que si lducateur accepte le risque du transfert daffects. La prise

de distance ne se fait pas par labolition des sentiments et des ressentis mais par leur transformation.

Autrement dit, il ne sagit pas de nier son implication, mais de lassumer auprs de la personne accompagne pour que cette dernire puisse son tour simpliquer. Cela rejoint la notion dempathie, d'aprs J. DECETY, les deux composantes de l'empathie

sont une rponse affective envers autrui qui implique un partage de son tat motionnel et la

capacit cognitive de prendre la perspective subjective de l'autre personne . Ainsi, le concept

d'empathie est intimement li avec la notion d'affects et d'motions, ce qui peut expliquer la

difficult tre empathique sans se laisser envahir, que ce soit par ses propres motions ou par

celles de lusager. De ce fait, je comprends quil faut tre lcoute, cerner les motions de lusager

mais ne pas les assimiler sa propre individualit.

Simpliquer motionnellement et mobiliser son propre vcu nest donc pas ngatif ou

proscrire, il faut en faire un outil de travail quil faut modeler afin de le rendre efficace. Le fait de

livrer une certaine part de soi favorise la confiance mutuelle dans la mesure o cela engendre une

certaine vulnrabilit, on se met nu. GOLEMAN appelle cela la sensibilit ducative, la capacit

comprendre ce que lautre recherche pour lui apporter une certaine scurit et un soutien la

hauteur. Selon lui, il sagit dune sensibilit qui ncessite pour l'ducateur daccepter de se laisser

mouvoir par lautre, pour en retour laffecter . Il avance que () toutes les choses sociales ont

une dimension affective forte (), se reprsenter le monde, cest avant tout s'en mouvoir, accepter

d'tre mu par lautre .

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Conclusion

En conclusion, concernant la bonne distance professionnelle mettre en place, on peut dire que

cela revient tre bienveillant envers lautre, le soutenir et le valoriser sans le rendre dpendant

affectivement ni soi mme se sentir dpass par ses motions et ne plus parvenir discerner la

nature de la relation ducative mise en place. Lducateur doit pouvoir agir sur cette distance quil

instaure. Pour ce faire, il doit se connatre et connatre son interlocuteur sans hsiter remettre en

question sa faon de faire. Il peut sappuyer sur linstitution, lquipe, les runions et sur lcrit qui

jouent alors le rle de tiers. La question de la distance professionnelle loblige se questionner sur

ses motions et celles de lusager, il doit savoir faire preuve dempathie sans tomber dans la

compassion, mobiliser ses expriences personnelles afin de simpliquer professionnellement. Je

pense que pour trouver la bonne distance professionnelle afin de s'impliquer dans la relation

ducative, il faut s'en expliquer. Cela ne veut pas dire sen justifier, cest tout simplement savoir

pourquoi on ressent telle ou telle motion. Ce sont tous ces lments qui rentrent en jeu afin de

jauger lespace ncessaire pour que la relation ducative soit efficiente. Selon moi, la bonne

distance professionnelle est une distance en mouvement. Elle oscille entre la proximit et

lloignement, le tout tant dtre suffisamment proche lorsque cest ncessaire, suffisamment

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distanc aussi. Nanmoins, pour jauger cela, il faut parfois tre trop proche ou trop loign au

regard du cadre et de la morale, il faut alors tre capable de rajuster.

Jai donc essay de faire le lien entre la thorie et ma pratique ainsi que celle des professionnels,

lobjectif tant dapporter un regard critique sur mon positionnement et donc de me servir du stage

suivant pour corriger les erreurs commises et exprimenter dautres pistes danalyses.

Bibliographie

Christine Dorme Questions de distance dans la relation ducative d. LHarmattan, 2005

Jean-Frdric Dumont Article motions et relation ducative Publi dans Empan 2010/4 (n 80) d. Ers

Philippe Gaberan La relation ducative d. Ers, 2003

Joseph Rouzel Le travail dducateur spcialis d. Dunod, 2000

Jean Decety Article L'empathie, une spcificit humaine ? Publi dans Le Monde, 2003

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Le Breton Les passions ordinaires : anthropologie des motions d. Armand Colin-Masson, 1998

Goleman Lintelligence motionnelle d. Batam Books, 1995

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