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    Claude Emanuellitudes internationales, vol. 23, n 4, 1992, p. 723-743.

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    Introduction au droit international applicable dans les conflits arms (droit international

    humanitaire)

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    Introduction au droit applicabledans les conflits arms

    Claude EMANUELLI*

    Il ne se passe gure de jour sans que les mdias rapportent desnouvelles de combats en quelque point du globe. Invariablement, lercit fait tat des victimes et de leurs souffrances : civils crass sousles bombes, prisonniers de guerre victimes de svices, dlgus d'or-ganismes humanitaires tus dans une embuscade, etc.

    Parfois, fort heureusement, les nouvelles sont meilleures : changede prisonniers de guerre, rapatriement de blesss, distribution devivres et de mdicaments aux populations assiges, vacuation decivils menacs par les combats, rassemblement de familles disperses,etc.

    Qu'ils s'inspirent de sentiments belliqueux ou, au contraire, desentiments d'humanit, ces actes, et d'autres commis par les bellig-rants, sont rglements par le droit international dans le but deprotger les victimes des conflits arms. La connaissance de cetterglementation est essentielle son application efficace et lapropagation des ides nobles qui l'inspirent.

    Nous dfinirons dans cette tude les grandes lignes du droitapplicable lors des conflits arms. Au dpart, il faut dire qu'il est deplus en plus courant de rfrer au droit applicable dans les conflitsarms en termes de droit international humanitaire, de sorte qu'il estimportant de dfinir cette notion.

    Il s'agira ensuite de retracer l'volution historique du droit inter-national humanitaire et d'en envisager les dveloppements futurs.Suivra une discussion sur la nature et le champ d'application du droit

    international humanitaire. Enfin, les sources du droit internationalhumanitaire feront l'objet d'une brve analyse.

    * Professeur, Facult de droit, section de droit civil, Universit d'Ottawa.Revue tudes internationales, volume xxm, n 4, dcembre 1992

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    A Dfinition du droit inte rnat iona l hum an it ai re et re ma rq ue sterminologiques

    L'expression droit international humanitaire est relativement

    rcente. Elle a t propose par J. Pictet1 et a t adopte par le Comitinternational de la Croix-Rouge (CICR) qui la dfinit ainsi :

    Par droit international humanitaire applicable dans les conflitsarms, le CICR entend les rgles internationales d'origine conventionnelle ou coutumire, qui sont spcialement destines rglerles problmes humanitaires dcoulant directement des conflits arms, internationaux ou non internationaux, et qui restreignent,pour des raisons humanitaires, le droit des parties au conflit d'uti

    liser les mthodes et moyens de guerre de leur choix ou protgentles personnes et les biens affects, ou pouvant tre affects, par leconflit2.

    De son ct, I'ONU utilise l'expression droit international des conflits arms qui a t reprise et dfinie l'article 2 du Protocole addi-tionnel aux Conventions de Genve du 12 aot 1949 relatif la protec-tion des victimes des conflits arms internationaux (Protocole I) (1977)3.Selon cet article, il s'agit de l'ensemble des rgles nonces dans lesaccords internationaux auxquels participent les parties au conflit ainsi

    que des principes et rgles du droit international gnralement reconnus qui sont applicables aux conflits arms. Cette dfinitiontautologique ne prend tout son sens qu' travers la lecture des dispositions du Protocole. On s'aperoit alors que le droit international desconflits arms rgit la protection des victimes des conflits arms demme que la conduite des hostilits.

    Les expressions droit international humanitaire et droit international des conflits arms ont le mme objet. Cependant, l'expression

    droit international humanitaire souligne mieux l'objectif profond dela rglementation des conflits arms: protger les victimes de cesconflits. En pratique, les rgles applicables lors des conflits armsrefltent de plus en plus cet objectif.

    Par ailleurs, l'expression droit de la guerre est dmode. Pourcommencer, la guerre est interdite par le droit international et enparticulier par l'article 2 (4) de la Charte de I'ONU. Comment pourrait-on ainsi parler d'un droit de la guerre ? cet gard, on peut rappeler

    qu'au dbut de son existence, la Commission du droit international

    1. J. PICTET, Le droit international humanitaire : dfinition dans Les dimensions interna-tionales du droit humanitaire, Paris, Pdone, Genve, Institut Henry Dunant, UNESCO,1986, p. 13. V. aussi D. SCHINDLER, Human Rights and Humanita rian Law:Interrelationship of the Laws, 1982, 31 American University Law Review 935.

    2. d., note 1.3. 1977, 16 J.L.M. 1391.

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    avait pens inclure la rglementation des conflits arms parmi lessujets codifier. Finalement, ses membres n'ont pas retenu cette ide.Ils craignaient en effet, que les travaux de la Commission dans cedomaine ne discrdite le rle de I'ONU en insinuant que l'Organisationn'avait pas les moyens de prvenir les conflits arms4. On sait maintenant combien ce raisonnement tait naf.

    Il faut ajouter que traditionnellement en droit international laguerre implique un conflit entre tats. Or, depuis la fin de la DeuximeGuerre mondiale la majorit des conflits arms sont des conflits internes5.

    Finalement, toujours selon le droit international classique, l'ouverture des hostilits est ncessairement prcde d'une dclaration deguerre6. Cette exigence est de plus en plus mconnue7, de sortequ'aujourd'hui c'est le recours effectif aux armes qui marque le pointde dpart des hostilits et l'application du droit international humanitaire : voir l'article 2 commun aux quatre Conventions de Genve etl'article 1 (3) du Protocole i. Pour toutes ces raisons, la notion deguerre est dpasse en droit international. On parle plutt de conflitarm.

    B Dveloppements historiques du droit internationalhumani ta i re

    De tout temps dans l'histoire connue du monde et sous l'influencede cultures trs diffrentes, des efforts ont t faits pour humaniser lesconflits arms8. Toutefois, dans sa forme moderne, le droit international humanitaire trouve son origine au 19e sicle, notamment par unconcours de circonstances, sous l'impulsion d'un homme d'affaires

    4. Cf. F . Kalshoven, Constraints on the Waging ofWar, Geneva, I.C.R.C., 1987, p.18 .5. Is tvn RENDE, ber die Kriege seit 1945, Bonn, DGFK, 1983, p. 24. Voir aussi World

    Military andSocial Expenditures 1989, 13th dition, p. 23 ; World Military and SocialExpenditures 1991, 14th dition, p. 20et seq. ;K. LINDGREN, B. HELDT, K.-A. NORDQUIST, P.

    WALLENSTEEN, Major Armed Conflicts in 1990, SIPRI Yearbook 1991, World Armamentsand Disar-marnent, Oxford University Press 1991, pp. 345, 347-348, 351 et seq.

    6. Cett e exigence se trouve codifie l'article 1 de la Convention relative l'ouverture deshostilits (La Haye, 1907): texte dans Droit international rgissant la conduite des

    hostilits, Genve,C.I.C.R.,

    1990, p. 13.7. Dans certains cas, les bellig rants s'affrontent san s mm e considrer qu'un tat de guerreexiste entr e eux : hostilits ent re les tat s-Un is et la Rpublique dmocratique du Vietnamdurant la seconde guerre du Vietnam : Ph. BRETTON, Le droitde la guerre, Coll. U. 2, Paris,A. Colin, 1970, p. 12. Voir aussi R.R. BaxTER, Comportement des combattants et conduitede s hostilit s (Droit de La Haye) dans Les dimensions internationales du droit humanitaire, supra, note 1, pp . 117, 120.

    8. Voir G.I.A.D Draper, Le dveloppement du droit international humanitaire dans Lesdimensions internationales du droit humanitaire, supra, note 1, p. 90.

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    suisse : Henry Dunant. En juin 1859, la bataille de Solfrino (Italie duNord ) oppose les Franais et les Sardes, d'un ct, aux Autrichiens, del'autre. En 15 heures, cette bataille fait 38 000 morts et blesss. L'insuffisance des services de sant de l'arme de l'poque fait que la

    plupart des blesss sont abandonns sans soins sur le champ de bataille.Par le jeu d'un hasard, Dunant traverse le champ de bataille au

    soir de celle-ci. Frapp par l'insuffisance des soins prodigus auxblesss, il entreprend lui-mme, avec l'aide des femmes du villagevoisin, de secourir les blesss sans distinction d'uniforme9.

    la suite de cette exprience, Dunant va crire un opusculeintitul : Un souvenir de Solfrino dans lequel il raconte les souffrancesdes blesss de Solfrino et met deux vux :

    - cration dans chaque pays, ds le temps de paix, d'une socit desecours volontaire pour aider les services de sant de l'arme secourir les blesss en temps de guerre ;

    - adoption par les tats d'un principe conventionnel et sacr assurant la protection des hpitaux militaires et du personnel sanitaire.

    L'opuscule de Dunant est publi en 1862. Il est bien accueilli dansles milieux intellectuels genevois et en 1863 un Comit internationalet permanent de secours aux militaires blesss se constitue Genve.Ce comit compos de cinq citoyens genevois, dont Dunant, est l'anctre du CICR.

    Sous l'influence de ce comit et l'invitation du gouvernementsuisse, la Convention de Genve du 22 aot 1864 pour l'amliorationdu sort des militaires blesss dans les armes en campagne10 est signepar douze Etats. Elle contient dix articles qui noncent des principesnovateurs :

    - Les mdecins et infirmiers militaires ne sont pas des combattants.Ils ne doivent pas tre capturs (articles 2 et 3) ;

    -Les civils qui portent secours aux blesss doivent tre respects(article 5) ;

    - Les soldats malades ou blesss doivent tre soigns quel que soit leuruniforme (article 6) ;

    - Les hpitaux militaires et les ambulances sont neutres (article 1). Ilssont identifis au moyen d'une croix rouge sur fond blanc (article 7),

    ce qui correspond aux couleurs fdrales suisses interverties.

    9. H. COURSIER, La Croix-Rouge internationale, coll. Que sais-je? no. 831, Paris, P.U.F., 1959,p. 15 et seq.

    10. Texte dans Manuel de la Croix-Rouge internationale, douzime dition, Genve, Comitinternational de la Croix-Rouge, Ligue des Socits de la Croix-Rouge, 1983, p. 19.

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    Un projet de convention visant adapter les rgles de la Convention de 1864 la guerre sur mer est labor en 1868. Il ne seracependant pas ratifi. Cette adaptation aura lieu sous l'effet des Conventions de La Haye en 1899, puis en 1907.

    Paralllement aux rgles visant protger les victimes de laguerre (Droit de Genve), des rgles visant rglementer la conduitedes hostilits (Droit de La Haye) font leur apparition et se dveloppent11 :

    - En 1856, est adopte la Dclaration de Paris sur la guerre navale;

    - En 1868, la Dclaration de Saint-Ptersbourg12 interdit l'utilisationde certains projectiles en temps de guerre (projectiles d'un poidsinfrieur 400 grammes qui seraient soit explosifs, soit inflamma

    bles) ;- E n 1874, la Dclaration de Bruxelles est adopte l'issue d'une

    confrence dont on esprait, l'origine, qu'elle verrait la conclusiond'un trait rglementant la guerre sur terre. Cette dclaration ainfluenc les travaux ultrieurs sur la question, notamment traversle Manuel d'Oxford prpar par l'Institut de Droit international.

    - En 1899, puis en 1907, les Confrences de la Paix runies La Hayeadoptent un certain nombre de conventions qui rglementent la

    guerre sur terre et la guerre sur mer, y compris en ce qui concerne lesquestions relatives la neutralit13.

    Dans l'intervalle, la Convention de Genve de 1864 est rvise etdveloppe par une nouvelle convention conclue en 1906. Cette convention contient 33 articles. Ses principes seront adapts la guerremaritime par la Convention x de La Haye en 1907.

    la suite du premier conflit mondial (1914-1918), le Droit de LaHaye s'enrichit du Protocole prohibant l'utilisation des gaz asphyxiants,

    empoisonns ou similaires de mme que des armes bactriologiques14 .De son ct, la Convention de Genve de 1906 est rvise en 1929.

    S'y ajoute une convention relative au traitement des prisonniers de

    11. Ph. BRETTON, supra, note 7, p. 16 et seq.12. Dclaration l'effet d'interdire l'usage de certains projectiles en temps de guerre. Texte

    dans Manuel de la Croix-Rouge internationale, supra, note 10, p. 331 ; Droit international rgissant la conduite des hostilits, supra, note 6, p. 167.

    13 . Voir la liste complte des textes adopts lors de la seconde Confrence de la Paix (1907)

    dans Ph. BRETTON, supra, note 7, pp. 25-26. Le texte de certaines des Conventions de LaHaye de 1907 se trouve dans Droit international rgissant la conduite des hostilits, supra,note 6. Des extraits de certains des textes adopts La Haye se trouvent galement dansle Manuel de la Croix-Rouge internationale, supra, note 10, p. 333 et seq.

    14. Protocol e de Genve du 17 ju in 1925 concernant la prohibi tion d'emploi, la guer re , degaz asphyxiants, toxiques ou similaires et de moyens bactriologiques, Texte dans

    Manuel de la Croix-Rouge internationale, supra, note 10, p. 350 . R. BAXTER, T. BUERGENTHAL,Lgal Aspects of the Geneva Protocol of 1925, 1970, 64 A.J.I.L. 853.

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    guerre, galement conclue Genve en 1929. Cette convention interditles reprsailles l'gard des prisonniers de guerre, rglemente leurtravail de mme que leur assujettissement des sanctions pnales.Elle ins taure de plus un systme de contrle du respect de la convention

    qui est confi aux puissances protectrices15

    et au CICR.

    Une confrence devait tre organise afin d'adopter des rglesrelatives la protection de la population civile, mais cette confrencen'a pu tre runie avant que dbute le second conflit mondial (1939-1945). Cependant, lors de ce conflit le CICR a obtenu des belligrantsqu'ils appliquent certaines dispositions du projet de convention concernant les civils ennemis prsents sur le territoire d'une partie au conflit. En consquence, quelques 160 000 civils in terns ont pu profiterdu mme traitement que les prisonniers de guerre16 .

    Le second conflit mondial, son tour, rvle l'insuffisance du droitinternational humanitaire en vigueur l'poque, notamment en ce quiconcerne la protection des partisans capturs, la protection de la population civile17, les conditions d'application des conventions existantes .

    Ds lors, sous l'influence du Comit international de la Croix-Rouge, quatre nouvelles conventions de Genve sont adoptes18. Les troispremires rvisent et compltent les Conventions prcdentes. La

    quatrime est de droit nouveau.Il faut noter que ces conventions s'appliquent mme en cas de

    guerre non dclare (article 2 commun) et qu'elles contiennent unarticle 3 commun qui s'applique aux conflits arms non internationaux.Cet article impose toutes les parties ces conflits, y compris auxinsurgs, des rgles minimales d'humanit et confirme le droit d'initiative du CICR dans le cadre de ces conflits.

    Par ailleurs, la suite du second conflit mondial, les guerres

    civiles et les guerres de dcolonisation se multiplient. Ces conflits sontpeu ou pas rgis par le droit international humanitaire de sorte quecelui-ci doit tre de nouveau adapt. Il en va de mme en ce qui

    15. Voir infra, no. 51.16. J. PICTET, Dveloppement et principes du droit international humanitaire, Genve, Insti

    tut Henry Dunant, Paris, Pdone, 1983, pp. 51-52.17. Pour la premire fois dans l'histoire des conflits arms, le nombre des victimes chez les

    civils dpasse le nombre des victimes chez les militaires.

    18. Convention de Genve pour l'amlioration du sort des blesss et des malades dans les

    forces armes en campagne, du 12 aot 1949 (Convention i), 75 R.T.N.U. 31 ; Convention deGenve pour l'amlioration du sort des blesss, des malades et des naufrags des forcesarmes sur mer, du 12 aot 1949 (Convention il), 75 R.T.N.U. 85 ; Convention de Genverelative au traitement des prisonniers de guerre, du 12 aot 1949 (Convention m), 75R.T.N.U. 135 ; Convention de Genve relative la protection des personnes civiles en tempsde guerre, du 12 aot 1949 (Convention iv), 75 R.T.N.U. 287. Le texte des Conventions deGenve se trouve galement dans le Manuel de la Croix-Rouge internationale, supra,note 10, p. 23 et seq.

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    concerne la protection de la population civile qui est de plus en plussouvent la cible d'attaques armes ou qui est victime d'attaquesindiscrimines.

    Cette adaptation du droit international humanitaire aux ralitsde la guerre contemporaine a t ralise par l'adoption en 1977 desdeux protocoles additionnels aux Conventions de Genve19. Ces deuxprotocoles ont t labors dans le cadre d'une confrence diplomatiquerunie l'instigation du Comit international de la Croix-Rouge et l'invitation du gouvernement suisse ds 1974.

    De son ct, le Droit de La Haye s'est enrichi, depuis la fin dusecond conflit mondial, de nouveaux textes :

    - La Convention de La Haye du 14 mai 1954 pour la protection desbiens culturels en cas de conflit arm20 qui s'applique tant aux conflits internat ionaux qu'internes (article 19). Elle interdi t, entre aut res,aux parties contractantes d'utiliser les biens culturels, sis sur leurterritoire ou sur celui d'une autre partie contractante, des finspouvant exposer ces biens une destruction ou une dtriorationen cas de conflit arm. Les parties contractantes s'engagent aussi s'abstenir de tout acte d'hostilit l'gard des biens viss. Il ne peuttre drog ces obligations qu'en cas de ncessit militaire impra-

    tive (article 4) ;- Le Protocole de La Haye pour la protection des biens culturels en cas

    de conflit arm21 (1954) qui vise protger les biens culturels d'unterritoire occup (i) et cre l'obligation de retourner, la fin deshostilits, les biens dposs par une partie contractante sur le territoire d'une autre partie contractante pour les mettre hors dedanger(n ) ;

    - La Convention sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication

    et du stockage des armes bactriologiques (biologiques) ou toxine etsur leur destruction22 (1972) ;

    19. Protocole additionnel aux Conventions de Genve du 12 aot 1949 relatif la protectiondes victimes des conflits arms internationaux (Protocole i) supra, note 3 ; Protocole additionnel aux Conventions de Genve du 12 aot 1949 relatif la protection des victimes

    des conflits arms non internationaux (Protocole n), 1977, 16 I.L.M. 1442. Le texte desProtocoles se trouve galement dans le Manuel de la Croix-Rouge internationale, supra,note 10, p. 224 et seq.

    20. Texte dans Manuel de la Croix-Rouge internationale, supra, note 10, p. 351. S.-E. NAHLIK,Protection des biens culturels dans Les dimensions internationales du droit humanitaire, supra, note 1, p. 237.

    21. Id., p. 378. Voir NAHLIK, ibid.22. Id., p. 382. G. FISCHER, La Confrence d'examen de la Convention interdisant les armes

    bactriologiques ou toxines (Genve, 3-21 mars 1980), A.F.D.I. 89.

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    - La Convention surl'interdiction d'utiliser des techniques de modifi-cation de l'environnement des fins militaires ou toutes autres finshostiles23 (1976).

    - Finalement, en 1980 est conclue sous l'gide de I'ONU la Conventionsur l'interdiction ou la limitation de l'emploi de certaines armesclassiques qui peuvent tre considres comme produisant des effetstraumatiques excessifs ou comme frappant sans discrimination24.Trois protocoles y sont annexs qui peuvent tre ratifis sparment.Ils concernent respectivement l'interdiction de l'emploi de toutearme dont l'effet principal est de blesser par des clats qui ne sontpas localisables aux rayons x dans le corps humain (Protocole relatifaux clats non localisables : protocole i), la rglementation de l'emploi des mines, piges, etc. (Protocole sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi de mines, piges et autres dispositifs : protocole n) etde l'emploi des armes incendiaires dont le napalm (Protocole surl'interdiction ou la limitation de l'emploi des armes incendiaires:protocole m).

    C Dveloppements futurs

    Le droit international humanitaire a souvent t accus d'tre enretard d'une guerre25 . Cette affirmation semble se vrifier la suite dela guerre du Golfe.

    Les dommages causs l'environnement par les troupes irakiennes la fin du conflit26 ont amen les gouvernements s'interroger surl 'aptitude du droit international positif prvenir et rprimer l'utilisation de l'environnement comme moyen de guerre. Depuis, plusieursgroupes d'experts se sont runis sous divers auspices pour tudier laquestion et envisager les moyens de dvelopper le droit internationalen consquence27.

    D'autre part, les ravages causs par les conflits internes qui accompagnent les changements politiques en Europe de l'Est rvlent lescarences du droit international humanitaire l'gard de ce type deconflits, notamment en ce qui concerne la protection de la populationcivile.

    23. Id., p. 387. G. FISCHER, La Convention sur l'interdiction d'utiliser des techniques de

    modification de l 'environnement des fins hostiles, 1977 A.F.D.I. 820.

    24. Id., p. 392. W. FENRICK, New Developments in the Law Concerning th e Use of Conventional

    Weapons in Armed Conflict, 1981, xixAnnuaire canadien de droit international 229.

    25. M.-F. FURET, J.-C. MARTINEZ, H. DORANDEU, La guerre et le droit, Paris, Pdone, 1979, p. 7.

    26 . Voir Conduct of the Persian Gulf War, u.s. Dpartement ofDfense, Final Report to

    Congress, April 1992, Appendice 0-26 et seq.

    27 . Voir notamment la runion d'experts convoque pa r le gouvernement canadien, de

    concert avec le Secrtaire gnral de I'ONU, du 9 au 12 juillet 1991 Ottawa.

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    Ces mmes conflits, et d'aut res, montrent galement que certainescatgories particulires de civils (journalistes) sont insuffisammentprotges contre les attaques.

    Par ailleurs, il faut noter que la plupart des rgles gnralesrgissant la conduite des hostilits sur mer datent du dbut du sicle,soit antrieurement l'utilisation massive du sous-marin comme moyende guerre et l'apparition de la guerre aronavale28 . Dans biens des cas,d'ailleurs, la pratique internationale s'loigne des textes existants29. Onremarque galement, que trs peu de rgles crites concernent laconduite des hosti lits dans les airs30 et qu'aucune n'est applicable laguerre dans l'espace31. Le problme se pose aussi de savoir dans quellemesure le droit international humanitaire s'applique en cas de conflit

    nuclaire32

    .D'autres dveloppements du droit international humanitaire

    pourraient tre envisags33 . Finalement, l'apparition de nouvelles armes, comme les lasers34, ncessitera tt ou tard l'adoption d'une rglementation adquate35.

    28 . Voir les Conventions vi xi de La Haye (1907); la Dclaration de Londres relative audroit de la guerre maritime ( 1909) ; le Manuel d'Oxford de la Guerre Maritime (1913). Laplupart de ces textes se trouvent dans Droit international rgissant la conduite deshostilits, supra, note 6.

    29 . C'est le cas en ce qui concerne le Procs-verbal concernant les rgles de la guerre sous-marine prvues par la Partie iv du Trait de Londres du 22 avril 1930 (1936). Voir Droitinternational rgissant la conduite des hostilits, supra, note 6, p. 125.

    30 . La plupart se trouvent dans le Protocole i, par exemple aux articles 24 30, 42 et danscertaines dispositions de la section H. Ces dispositions s'inspirent des Rgles de la guerre

    arienne fixes par la Commission des juristes charge d'tudier et de faire rapport sur larvision des lois de la guerre (1923) (texte dans Droit international rgissant la conduitedes hostilits, supra, note 6, p. 129), qui ne sont pas entres en vigueur.

    31. En principe, l'espace extra-atmosphrique ne peut tre utilis qu' des fins pacifiques : voirles articles m et iv du Trait sur les principes rgissant l'activit des tats dans le domaine de l'exploration et de l'utilisation de l'espace extra-atmosphrique y compris la luneet les corps clestes (1967).

    32 . Voir notamment E. RAUCH, L'emploi d'armes nuclaires et la raffirmation et le dveloppement du droit international humanitaire applicable dans les conflits arms, 1980,33 Revue Hellnique de droit international 53 ; C. PILLOUD, Les Conventions de Genvede 1949 pour la protection des victimes de la guerre, les Protocoles additionnels de 1977et les armes nuclaires, 1978, 21 Jahrbuch Fur Internationales Recht 169.

    33. Cf. H.-P. GASSER, Quelques rflexions sur l'avenir du droit international humanitaire,1984, 745 Revue internationale de la Croix-Rouge 18.

    34 . Voir Les armes de nature causer des maux superflus ou frapper sans discrimination,rapport sur les travaux d'un groupe d'experts, Genve, C.I.C.R., 1973, p. 75 et seq.

    35 . l'h eure o sont rd ige s ces lignes, il est quest ion de conclure un nouveau tr ai tinterdisant tout emploi des armes chimiques et envisageant la cration d'une organisation internationale charge de sa mise en uvre: cf. Ottawa Citizen, 23/6/1992, A-2.

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    D La nature et le champ d'application du droit internationalhumani ta i re

    a. Nature : Le droit international humani tai re est une branche du droit

    international public.Actualit du droit international humanitaire. l'poque o la

    guerre tait un instrument licite des relations internationales, ondivisait traditionnellement le droit international en deux grandesbranches :

    - le droit de la paix ;

    - le droit de la guerre36 .

    Pendant longtemps, le droit de la guerre tait une branche particulirement importante du droit international dans la mesure o laguerre dominait les relations internationales37.

    Aujourd'hui, les relations internationales ont volu dans le sensd'une plus grande coopration entre les tats, et la guerre est interdite. Le droit international humanitaire n'en a pas pour autant perduson utilit car les conflits arms n'ont pas compltement disparu desrelations internationales.

    De plus, si la Charte de I'ONU interdit le recours la force dans lesrelations internationales, il y a des exceptions :

    - utilisation de la force arme en tat de lgitime dfense dans lecadre de l'article 51 de la Charte de I'ONU38 ;

    - utilisation de la force arme dans le cadre des oprations de maintien de la paix entreprises par I'ONU: Opration Tempte du d-sert39.

    Le droit international humanitaire s'applique dans le cadre de cesdeux exceptions prvues par la Charte de I'ONU. D'autre part, le droitinternational rcent a, tout la fois, cr une nouvelle exception etlargi la notion de conflits arms internationaux. travers I'ONU, ledroit internationa l a reconnu que les peuples peuvent, dans l'exercicede leur droit l'autodtermination, lutter par la force arme contre la

    36 . Cf. D. NGUYEN QUOC, P. DAILLIER, A. PELLET, Droit international public, 3e d., Par is, L.G.D.J.,

    1987, no. 460. Voir no ta mm en t, H. LAUTERPACHT, d., Oppenheim's International Law, 5th.d., London, New York, Toronto, Longmans, Green and Co., 1937, 2 volumes.

    37 . tel point que selon un auteur: il fut un temps o le droit internation al se confondaitavec le droit de la guerre. Ph. BRETTON, supra, note 7, p. 6.

    38. Voir Activits militaires etparamilitaires au Nicaragua etcontre celui-ci (Nicaragua c.tats-Unis d'Amrique), fond, arrt, C.I.J. Recueil 1986, p. 14, no. 193 et seq.

    39 . Voir la rsolution 678 adopte par le Conseil de scurit le 29 novembre 1990: 1990, 94R.G.D.I.P. 1188; 1990, 29 I.L.M. 1565.

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    INTRODUCTION AU DROIT APPLICABLE DANS LES CONFLITS ARMS 733

    domination coloniale, l'occupation trangre et les rgimes racistes40 . Lesconflits arms qui en rsultent taient traditionnellement considrscomme tant des conflits internes largement soustraits l'application

    du droit international humanitaire

    41

    . Ils ont t assimils des conflitsarms inte rnat ionaux par le Protocole I (1977) (ar t. 1 (4)), de sorte qu'ilssont maintenant rgis par les Conventions de Genve et ce protocole.

    De plus, travers l'article 3 commun aux quatre Conventions deGenve de 1949 et travers le Protocole il de 1977, qui dveloppe lesprincipes de l'article 3 commun, le droit international humani ta irergit les conflits arms non internationaux.

    Ainsi, il est clair que le droit international humanitaire conserve

    toute son importance comme branche du droit international public.Caractristiques particulires du droit international humanitaire.

    Il est intressant de souligner que si le droit international humanitaire fait partie intgrante du droit international public, il prsentecertaines caractristiques qui le distinguent d'autres branches de cesystme juridique.

    Le droit international humanitaire n'est pas limit aux rapportsentre tats, en l'occurrence aux conflits intertatiques. Il s'applique

    aux conflits internes42

    et aux conflits dans lesquels un peuple luttepour son autodtermination43.

    L'un des acteurs principaux en ce qui concerne l'laboration etl'application du droit international humanitaire est un organisme nongouvernemental national : le Comit international de la Croix-Rougequi est une association de droit priv suisse44.

    40. Voir not amm ent les rsolu tions 26 21 (xxv) (1970) (droit in hr ent des peuples coloniaux delutter contre les puissances coloniales), 2625 (xxv) (1970) (devoir des tats de ne pasentraver la lutte des peuples coloniaux), 3103 (xxvm) (1973) (statut des combattants de lalibert) de l'Assemble gnrale.

    41 . Tradition nellement, le droit intern ation al huma nit air e ne s'appliquait au x conflits in ternes que dans la mesure o les insurgs faisaient l'objet d'une reconnaissance debelligrance de la part du gouvernement au pouvoir. L'article 3 commun aux quatreConventions de Genve a limin cette condition l'application des rgles les plusfondamentales du droit humanitaire ces conflits. Toutefois, en l'absence d'une dfinition prcise du conflit arm non international dans l'article 3 commun et d'une procdureautonome de constatation, qui revient-il de constater l'existence d'un tel conflit? R. ABI-

    SAAB, Droit humanitaire et conflits internes, Paris , Pdone, Genve, Institu t Henry Duna nt,1986, pp. 68-69. En pratique, il semble que cette tche revienne bien souvent au gouvernement en place : M. TORRELLI, Le droit international humanitaire, 2e d., Coll. Que sais-j e? , no. 2211, Paris, P.U.F., 1989, p. 32. Sommes-nous bien loin de la reconnaissance debelligrance ?

    42. Voir l'article 3 commun aux quatre Conventions de Genve et le Protocole n (1977).43. Voir l'article 1 (4) du Protocole i (1977).44. Voir l'article 2 des Statuts du Comit international de la Croix-Rouge (21 ju in 1973 tels

    qu'amends), Manuel de la Croix-Rouge internationale, supra, note 10, p. 437.

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    734 Claude EMANUELLI

    Plus que dans n'importe quelle autre branche du droit international, les individus sont directement impliqus dans l'laboration etdans l'application du droit international humanitaire. Ainsi, la rglementat ion des conflits arms trouve sa lointaine origine dans la pratiquedes combattants et le droit international humanitaire tient compte desproccupations des militaires, de sorte qu'il exprime souvent un compromis entre les exigences humanitaires et les ncessits militaires45 .Par ailleurs, le droit international humanitaire confre directementdes droits l'individu46.

    Les conflits arms et le droit. L'une des questions qui se poselorsqu'on tudie la nature du droit international humanitaire consiste savoir, s'il est possible de rglementer les conflits arms par le droit.

    premire vue, l'ide parat paradoxale parce que la guerre voque un tat de non-droit dans lequel la force fait loi47. Ainsi, pour desraisons diffrentes certains auteurs militaires comme Clausewitz oucertains pacifistes comme F. Nightingale ont ni qu'il soit possible oumme souhaitable de rglementer la guerre.

    Pour Clausewitz, il tait absurde de rglementer la guerre. Laguerre est un acte de violence dont le but est de dtruire l'adversaire.Ds lors, introduire un principe modrateur dans la philosophie de la

    guerre est une absurdit48

    .Pour F. Nightingale, rglementer la guerre c'tait la lgitimer or,

    il fallait avant tout concentrer ses efforts liminer la guerre desrelations entre tats49.

    Pour la Commission du droit international, rglementer la guerrec'tait risquer de discrditer le rle de I'ONU en tant qu'organisationvoue au maintien de la paix et de la scurit internationales50.

    F. Nightingale, on peut rpondre qu'il faut tre raliste etpratique. Tant que la guerre n'a pas compltement disparu des relationsentre tats, il faut la rglementer pour en attnuer les horreurs. Deplus, mme en tat de guerre, il faut prvoir la paix qui lui succderainvitablement. Il est plus facile de normaliser les rapports entreanciens ennemis, si les excs ont t contenus. Cette rglementation

    45. Cf. les artic les 5 1 (5) b) et 57 (2) a) iii, b), du Protocole i (1977), supra, note 3. L'volutiondu droit interna tional hum anit aire , reflte dans le deux articles cits, semble toutefois

    favoriser le s exigences humanitaires plutt que les ncessits militaires.46. Voir les commentaires de J. PICTET au sujet de l 'article 7 commun aux quatre Conven

    tions de Genve : Dveloppement etprincipes du droit international humanitaire, supra,note 16, p. 111 .

    47 . Cf. la citation de Leaut dans BRETTON, supra, note 7, p. 5.48. Cf. M. TORRELLI, Le droit international humanitaire, supra, note 41, pp. 3-4.49. Cf. COURSIER, supra, note 9, p. 17.50 . Voir supra, no. 4.

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    INTRODUCTION AU DROIT APPLICABLE DANS LES CONFLITS ARMS 735

    n'exclut pas d'entreprendre des efforts pour liminer la guerre desrelations entre tats. Loin de s'exclure, ces efforts se compltent.

    Par ailleurs, pour satisfaire les proccupations des militaires, le

    droit international humanitaire a souvent exprim un compromis en-tre la volont d'humaniser les conflits et celle de tenir compte desexigences militaires51 .

    Caractre juridique du droit international humanitaire. L'autrequestion que pose la nature du droit international humanitaire, c'estde savoir si ses rgles ont vritablement un caractre juridique ou s'ilne s'agit pas simplement de rgles de morale sans effet contraignantCette question est lie celle de savoir s'il existe des mcanismesassurant le respect des rgles du droit international humanitaire.

    Le premier lment de rponse qu'on peut donner cette interro-gation rside dans l'ide que l'existence de violations, mme impunies,n'enlve pas au droit international humanitaire son caractre juridi-que. Le phnomne est connu galement en droit interne.

    Par ailleurs, la violation du droit international humanitaire en-trane des consquences qui sont rgies par le droit international.

    Tradit ionnellement, le principe de rciprocit servait de ga ra nt au

    respect des rgles du droit international humanitaire. Si une partie un conflit infligeait de mauvais traitements aux prisonniers ennemis,ses propres soldats tombs aux mains de l'adversaire pouvaient s'at-tendre des reprsailles : dans son livre Le troisime combattant52, leDr. M. Junod raconte qu'en juin 1940, une rumeur circulait Berlincomme quoi les Franais excutaient les parachutistes allemands pa-rachuts derrire les lignes franaises. Les Allemands menaaient defusiller dix prisonniers de guerre franais pour chaque parachutisteallemand tu. Le Dr. Junod a d vrifier sur place que cette rumeurtait fausse pour que les Allemands renoncent mettre leur menace excution.

    Aujourd'hui, l'lment de rciprocit a perdu de son importance,au moins thoriquement. En effet, les reprsailles contre des person-nes protges par le droit international humanitaire sont spcifiquementinterdites par les quatre Conventions de Genve et par le Protocole i(art. 46: Convention i; art. 47 : Convention n; art. 13 : Convention m;art. 33 : Convention iv ; art. 20,51(6): Protocole i)53. Les reprsailles sont

    contraires au but du droit international humanitaire qui est de prot-ger les victimes des conflits arms.

    51. Voir supra, note 45.52. 2e d., Paris, Payot, 1963, chap. 12.53. Voir aussi les dispositions interdisant les reprsailles contre les biens de caractre civil :

    art. 52 (1), 53 c), 54 (4), 55 (2), 56 (4).

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    736 Claude EMANUELLI

    Par contre, les Conventions comme le Protocole i prvoient certains procds visant assurer le respect de leurs dispositions entablissant un contrle de leur application par les parties contractantes54.

    Figure d'abord l'institution des puissances protectrices, tats neutres ou autres tat s non parties au conflit qui sont dsigns et acceptspar les belligrants pour grer leurs intrts auprs de l'adversaire :protestation des civils interns, protection des btiments diplomatiques ferms pendant le conflit, acheminement des protestations relatives aux violations du droit international humanitaire, etc.

    Les conventions prvoient qu'elles seront appliques avec le concours et sous le contrle des puissances protectrices charges de sauve

    garder les intrts des parties au conflit (art. 8 : Conventions i, n et ni ;art. 9 : Convention iv).

    Le Protocole i, pour sa part, dfinit la notion de puissance protectrice aux fins de son application (art. 2 (c)) et rglemente en dtail ladsignation des puissances protectrices. Les reprsentants des puissances protectrices disposent, sous les Conventions et le Protocole i, dedroits qui leur permett ent de vrifier l'application du droit international humanitaire par les parties au conflit (art. 126 : Convention ni ;

    art. 143 : Convention iv). En cas de dfaut de puissance protectrice, unorganisme humanitaire, dont le Comit international de la Croix-Rouge, peut agir en qualit de substitut (art. 10 : Conventions i, n, ni etart. 11 : Convention iv; ar t. 2 (D) et 5 (4) : Protocole i).

    En pratique, le systme des puissances protectrices a donn desrsultats peu concluants55 .

    D'autre part, le CICR dispose d'un droit d'intervention en vertuduquel, il peut contrler le respect des Conventions et du Protocole i

    par les part ies (art. 126 : Convention m ; art. 143 : Convention iv ; art. 5(4)et 81(i): Protocole i).

    Le Comit international de la Croix-Rouge dispose galement d'undroit d'initiative qui lui permet avec l'accord des parties au conflitd'entreprendre certaines tches humanitaires pour la protection desblesss, des malades et des membres du personnel sanitaire et religieux (art. 9: Conventions i, n, m; art. 10: Convention iv; art. 3 commun; art . 81 (1): Protocole i)56. Dans le cadre de son droit d'initiative,

    le Comit international de la Croix-Rouge peut aider les parties se54 . Y. SANDOZ, Mise en uvre du droit international dans Les Dimensions internationales

    du droit humanitaire, supra, note 1, p. 299 .55. On note quatre applications depuis 1949: Suez (1956), Goa (1961), Bengladesh (1971),

    Malouines (1982). Cf. notamment D. P. FORSYTHE, Who Guards the Guardians: ThirdParties and the Law of Armed Conflict, 1976, 70 American Journal of International Law41, pp. 46-47.

    56. V. FORSYTHE, id. pp. 47-48.

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    INTRODUCTION AU DROIT APPLICABLE DANS LES CONFLITS ARMS 737

    conformer au droit international humanitaire et peut en surveillerl'application. Notons qu'en vertu des statuts du CICR57, ce droit d'intervention s'tend aux troubles intrieurs (art. 5 (2) d)) et aux situationsde tension interne (art. 3).

    De plus, les Conventions prvoient qu' la demande d'une partieau conflit, une enqute doit tre ouverte au sujet de toute violationallgue de ces textes (art. 52 : Convention i ; art. 53 : Convention il ; art.132 : Convention m ; art. 149 : Convention iv).

    Sous le Protocole i, une Commission internationale d'tablissement des faits est cre58. Elle se compose de quinze membres dehaute moralit et d'une impartialit reconnue59 Elle peut enqutersur tout fait dont on allgue qu'il constitue une violation grave des

    Conventions de Genve et du Protocole i et prter ses bons offices afinde faciliter le retour l'observation des Conventions de Genve et duProtocole (art. 90). La Commission est devenue oprationnelle avec lavingtime dclaration d'acceptation, celle du Canada, le 20 novembre199060.

    Sous les Conventions et le Protocole I, les parties contractantessont tenues d'adopter, par voie lgislative, des sanctions pnalesapplicables aux personnes ayant commis ou donn l'ordre de commet

    tre ce que les Conventions et le Protocole i appellent des infractionsgraves (art. 49 : Convention i ; art. 50 : Convention n ; art. 129 : Convention ni ; art. 146 : Convention iv)61.

    Ces infractions graves sont dfinies par ces textes. Elles comprennent l'homicide intentionnel, la torture, les traitements inhumains, ycompris les expriences biologiques, etc. (ar t. 50 : Convention i ; art. 51 :Convention n; art. 130: Convention m; art. 147: Convention iv).

    Chaque partie contractante est galement sous l'obligation de

    rechercher les personnes accuses de ces infractions et de les juger,quelle que soit leur nationalit, ou de les remettre une autre partiecontractante qui voudrait s'en charger (art. 49 : Convention i ; art. 50 :Convention n; art. 129 : Convention m; art. 146 : Convention iv).

    De plus, la responsabilit internationale de l'tat peut tre engage relativement la commission de ces infractions graves (ar t. 51 :Convention i ; art. 52 : Convention n ; art. 131 : Convention m ; art. 148 :Convention iv; art. 91 : Protocole i).

    57 . Voir supra, note 44.58 . ce sujet, cf. le Bulletin du CICR, no. 195, avril 1992, p. 4.59 . Le Canada y est reprsent par le Dr. J. M. Simpson.60 . Voir R.T.C. 199 1, no. 2 p. 183.

    61 . En ce qui concerne le Canada, voir Loi sur les conventions de Genve, L.E.C. 1985, ch. G-3,telle qu'amende, (art. 3) et Code criminel, L.R.C. 1985, ch. C-46, tel qu'amend, (art. 7(3.71) 3.77)).

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    738 Claude EMANUELLI

    En ce qui concerne les violations aux Conventions et au Protocolei, autres que les infractions graves, chaque partie contractante s'en-gage prendre les mesures ncessaires pour faire cesser ces violations(art. 49 : Convention i; art. 50 : Convention n; art. 129 : Convention m;

    art. 146: Convention iv; art. 86 (1): Protocole i).De son ct, le Protocole i consacre une section (titre v, section n)

    la rpression des infractions aux Conventions ou au protocole. Danscelle-ci, il reprend son compte les dispositions des Conventions sur laquest ion (art. 85 (1) et (2)) et ajoute de nouvelles infractions spcifiques la liste dj existante : mutilations, prlvement de tissus oud'organes non justifi (art. 11); soumettre la population civile ou unepersonne hors de combat une attaque, utiliser perfidement le signede la Croix-Rouge, etc. (art. 85 (3))62.

    De plus, le Protocole i oblige les parties informer les membresdes forces armes de leurs obligations sous les Conventions et leProtocole en vue d'empcher que des infractions soient commises et deles rprimer (art. 87 (2)).

    Il prvoit en outre que les parties coopreront dans la rpressiondes infractions graves (art. 88). En pratique, ces mcanismes de coopration visant rprimer les infractions graves prvues par les Conventions de Genve et le Protocole i n'ont t gure appliqus.

    Final ement , l'ducation est l'un des procds les plus efficacespour assurer le respect du droit international humanitaire. En effet, ilsemble que dans la plupart des cas les auteurs de violations ne saventpas que leurs actes sont interdits. C'est pourquoi les Conventions deGenve comme les protocoles crent l'obligation pour les partiescontractantes de diffuser aussi largement que possible les dispositionsde ces textes (art. 47: Convention i; art. 48: Convention n; art. 127:Convention m ; art. 144 : Convention iv ; art. 82-83 et 87 (2) Protocole i ;

    art. 19 : Protocole n)63.

    On peut ainsi voir qu'il existe des rgles et des mcanismes quivisent contrler l'application des Conventions de Genve et du Protocole I, prvenir, faire cesser et rprimer les violations du droitinternational humanitaire. En comparaison, le droit international dela protection des droits de la personne parat moins contraignant.

    62 . I. P. BLISHCHENKO, Responsabilit en cas de violations du droit international humani

    taire, dans Les dimensions internationales du droit humanitaire, supra, note 1, p. 327.

    63. Sur la diffusion du droit in te rn at iona l hu ma ni ta ir e, cf. S.-S. JUNOD, La diffusion du droit

    international humanitaire, dans Les dimensions internationales du droit humanitaire,

    supra, note 1, p. 359 ; J.-J. SURBECK, La diffusion du droit international humanitaire,

    condition de son application, id., p. 537.

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    INTRODUCTION AU DROIT APPLICABLE DANS LES CONFLITS ARMS 739

    b. Champ d'application

    Selon les auteurs, le champ d'application du droit internationalhumanitaire peut tre plus ou moins large :

    - Selon la conception la plus large, le droit international humanitairecomprend non seulement les dispositions du droit international quivisent protger les victimes des conflits arms, mais aussi cellesqui concernent la protection des droits de la personne en toutesituation et en tout temps. Il s'appliquerait ainsi non seulement auxconflits arms, mais aussi aux cas d'meutes et de troubles internes 64 .

    - Selon une conception plus troite, le droit internat ional humani ta ireet le droit international des conflits arms ont le mme objet65. Ilsvisent assurer la protection des victimes des conflits arms (Droit

    de Genve) et rglementer la conduite des hostilits (Droit de LaHaye).

    - Finalement, selon une conception tr s troite, le droit internationalhumani ta ir e est limit au Droit de Genve. Il est donc une branchedu droit international des conflits arms, lequel comprend aussi leDroit de La Haye66.

    La conception la plus large parat trop large dans la mesure o ledroit international humanitaire ne s'applique pas aux situations de

    troubles internes qui ne correspondent pas un conflit arm noninternat ional au sens de l'article 3 commun aux Conventions de Genve67

    et de l'article 1 (1) du Protocole n de 1977. Ainsi, le paragraphe 2 dumme article indique que le Protocole H ne s'applique pas aux situations de tensions internes, de troubles intrieurs, comme les meutes,les actes isols et sporadiques de violence et autres actes analogues quine sont pas considrs comme des conflits arms. Ces exceptionsrelvent du droit international relatif la protection des droits de lapersonne, quand celui-ci est applicable68.

    La conception la plus restreinte correspond une distinction entrele Droit de Genve et le Droit de La Haye. Cette distinction traditionnelle s'est estompe sous l'influence des Protocoles de 1977 (surtout le Protocole i) dont les dispositions visent non seulement la protection des victimes des conflits arms, mais aussi la conduite des oprations militaires69 .

    64 . L. C. GREEN, note bibliographique, 1989, 19 RDUS pp. 495-496.65. Voir supra, no. 3-5.66 . Voir J. PICTET, supra, note 1, pp. 14-15.67 . Il semble que pour plusieurs tats, l 'article 3 ne s'appliquerait qu'aux guerres civiles ;

    voir R. ABI-SAAB, supra, note 41, p. 69.68. Voir SCHINDLER, supra, note 1, pp. 938-939.69 . La dfinition qu'offre le C.I.C.R. du droit international humanitaire reflte d'ailleurs cette

    volution: supra, no . 3.

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    740 Claude EMANUELLI

    E Les sources du droit international humanitaire

    Les sources du droit international humanitaire correspondent auxsources traditionnelles du droit international public : traits internationaux, coutumes, principes gnraux de droit, jurisprudence internationale, doctrine des publicistes les plus qualifis, rsolutions desorganisations internationales70.

    La source principale du droit international humanitaire consistedans les quatre Conventions de Genve de 194971 et dans leurs deuxprotocoles addit ionnels de 197772.

    Actuellement, 170 tats (soit la presque totalit des tats de lacommunaut internationale) sont parties aux Conventions de Genve ;

    113 sont parties au Protocole i et 103 au Protocole n. Le Canada estpartie aux Conventions de Genve ; il a ratifi les Protocoles i et n le27/11/90.

    Dans la mesure o ni les Conventions de Genve, ni leurs protocoles additionnels ne l'interdisent, les parties contractantes, en ratifiantces textes ou en y adhrant, y ont apport certaines rserves quiaffectent l'application de leurs dispositions73. Le Canada a fait desrserves aux articles 11 et 39 du Protocole i74. Il a mis aussi plusieursdclarations d'interprtation concernant d'autres dispositions du Protocole i75 et une dclaration relative la Commission internationaled'tablissement des faits76. Le Canada n'a pas mis de rserve relativement au Protocole n, mais a mis une dclaration d'interprtation l'gard de celui-ci77.

    Conformment au droit internationa l des tra it s, ces rserves sontlicites en autant qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'objet et lesbuts des textes qu'elles concernent78. Elles affectent l'application desdispositions qu'elles visent dans la mesure o les autres parties

    contractantes ne sont pas opposes ces rserves79 .Par ailleurs, plusieurs dispositions contenues dans les Conven

    tions et leurs protocoles codifient des rgles coutumires (obligation de

    70. Cf. C. EMANUELLI, Droit international public, tome 1, Montral, Wilson et Lafleur, 1990,Premire partie.

    71. Voir supra, note 18.72 . Voir supra, note 19.

    73 . Cf. C. PILLOUD, Les rserv es aux Conventions de Genve de 1949, 1976, 687 et 688 Revueinternationale de la Croix-Rouge 131 et 195.74 . R.T.C. 199 1, no. 2, p. 177.

    75 . Id., pp. 177, 179, 181, 183.76 . Id.,p. 183.

    77 . Id., p. 211.78 . Voir notamment l 'article 19 de la Convention de Vienne su r le droit des t ra i ts .79 . Id., article 21(1).

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    INTRODUCTION AU DROIT APPLICABLE DANS LES CONFLITS ARMS 741

    distinguer les combattants des civils, interdiction d'utiliser des armesempoisonnes, etc.) ou sont l'origine de rgles coutumires. Ainsi,selon le Tribunal militaire international de Nuremberg, les rglesannexes la Convention iv de La Haye concernant les lois et coutu

    mes de la guerre sur te rre (1907) liaient les belligrants lors du secondconflit mondial en tant que rgles coutumires80 .

    Ces rgles non crites cres par la pratique des tats s'appliquent tous les tats indpendamment des textes conventionnels etles tats ne peuvent y apporter de rserves81 .

    D'autre part, la Cour internationale de Justice a reconnu l'application de certaines rgles de droit international human itai re en tant queprincipes gnraux de droit qui viennent complter les rgles conven

    tionnelles et coutumires lorsque celles-ci sont inapplicables82

    . Cesprincipes trouvent leur source dans les lois de l 'humanit et lesexigences de la conscience publique dont l'importance tait dj affirme dans le prambule de la Convention iv de La Haye concernant leslois et coutumes de la guerre sur terre (1907) (Clause de Martens) etqui est raffirme par les Conventions de Genve (art. 63 : Conventioni; art. 62 : Convention n; art. 142 : Convention m; art. 158 : Conventioniv) et les protocoles art. 1 (2): Protocole i; prambule : Protocole n).

    Il faut noter que selon plusieurs auteurs, certaines rgles du droitinternational humanitaire seraient des normes impratives auxquelles on ne saurait droger (jus cogens)83. Cette notion demeure toutefoisimprcise.

    De plus, de nombreuses rsolutions de I'ONU ont t consacres larglementation des conflits arms internationaux et non internationaux : par exemple, la rsolution A/37/98 D de l'Assemble gnrale deI'ONU insti tuant des procdures provisoires d'enqute visant maintenir l'autorit du Protocole sur les gaz asphyxiants de 1925 (1982)84.

    La force contraignante de ces rsolutions, ou son absence, dpendde l'organe qui les adopte, des dispositions en vertu desquelles elles

    80. Voir extraits du jugement dans L. C. GREEN, International Law through the Cases, 4th. d.,Toronto, Carswell, 1978, pp. 707, 716.

    81. Voir Plateau continental de la mer du Nord, (R.F.A. C. Danemark) ; R.F.A. C. Pays-Bas),arrt, 1969 C.I.J. Rec. 3, para. 63.

    82. Affaire du dtroit de Corfou, (R.U. C. Albanie), arrt, 1949 C.I.J. 4, p. 22 ; Activits militaires etparamilitaires au Nicaragua etcontre celui-ci, supra, note 38, no. 215 et 218, 219.

    83 . Cf. J. PICTET, Le droit humanitaire et la protection des victimes de la guerre, Institut HenryDu na nt , Genve , 1973, p. 18 ; L. CONDORELLI/L. BOISSON de CHAZOURNES, Quelques re-

    marques propos de l'obligation des ta ts de respecter et faire respecter le droitinternational humanita ire en toutes circonstances, C. SwiNARSKJ, d., tudes et essaissur le droit international humanitaire et surles principes de la Croix-Rouge en l'honneurde J. Pictet, La Haye, Nijhoff, 1984, p. 17.

    84. Voir texte dans 1984 A.F.D.I. 108 et commentaire par S. SUR, id., p. 93 . Voir aussi larsolution A/39/65E (1984) su r le mme sujet, id., p. 109.

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    742 Claude EMANUELLI

    sont adoptes ainsi que du nombre et de l'ventail des tats qui lesappuient85.

    Finalement, la doctrine et la jurisprudence occupent une placeimportante parmi les sources du droit international humanitaire. La

    doctrine sur le sujet est abondante86

    . La rglementation de la guerreest, en effet, l'un des premiers sujets sur lequel la doctrine s'estpenche87 . Cette doctrine sert interprter88, critiquer les rgles dudroit international humanitaire et aide le faire progresser.

    D'autre part, quelques dcisions judiciaires internationales ontcontribu au dveloppement du droit international humanitaire89 : lesarrts des tribunaux militaires internationaux de Nuremberg et deTokyo, la dcision de la C.I.J. dans Y Affaire du dtroit de Corfou (1949)90

    et celle rendue dans l'affaire des Activits militaireset

    paramilitairesau Nicaragua etcontre celui-ci (1986)91.

    Conc lus ion

    Les dveloppements prcdents se veulent tre une introductiongnrale au droit international humanitaire. Ils montrent que depuisle milieu du 19e sicle, le droit international humanitaire s'est dve

    lopp sans commune mesure avec les vux formuls par Henry Dunant.Rappelons, en effet, que ces vux visaient essentiellement susciterdans chaque pays, la cration d'une socit de secours aux blesssmilitai res susceptible, en cas de conflit, d'aider les services de sant del'arme s'acquitter de leur tche92. Comme on l'a vu auparavant, nonseulement cette ide a trouv cho dans la Convention de Genve de1864, mais celle-ci l'a dpasse.

    Depuis, le droit international humanitaire est devenu, partentire, une branche du droit international public. Il s'est greff sur le

    85. Cf. C. EMANUELLI, supra, note 68, pp. 102-103.86 . Voir Bibliography of International Humanitarian Law Applicable inArmed Conflicts, 2nd.

    d., Geneva, I.C.R.C. and Henry Dunant Institute, 1987.87 . Voir notamment le clbre ouvrage de Grotius: De jure belli ac pacis (1625) comment

    dans NGUYEN QUOC, DAILLIER, PELLET, supra, note 36, pp. 48-49.

    88 . ce sujet, voir les Com men tai res quasi officiels publ is pa r le C.I.C.R. su r les Conventionsde Genve et leurs protocoles additionnels.

    89 . Par ailleurs, il existe une abondante jurisprudence nationale su r le sujet. Cettejurisprudence illustre la pratique des ta ts et participe sa formation. En ce quiconcerne la jurisprude nce canadienne, voir notamm ent L. C. GREEN, Le rle du Canadadans le dveloppement du droit en matire de conflit arm, 1980, xi tudes internationales, p. 489.

    90 . Voir supra, note 81.91. Voir supra, note 38.92 . Voir COURSIER, supra, note 9, p. 16.

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    INTRODUCTION AU DROIT APPLICABLE DANS LES CONFLITS ARMS 743

    droit de la guerre, qui lui-mme s'est progressivement humanis, pourfinalement l'absorber et le remplacer.

    Dans sa forme actuelle, le droit international humanitaire n'estpas parfait; il est incapable d'empcher que des abus soient encorecommis contre les victimes de conflits arms. Cependant, son utilitpratique de mme que celle du CICR ne sont plus dmontrer. Qui plusest, la diffusion du droit international humanitaire favorise le rayonnement des principes humanitaires qui le sous-tendent et participe la cration d'un monde plus humain, plus gnreux et donc plus pacifique.