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67 DEUXIEME PARTIE LA FORMATION DE L'OFFRE DE SECURITE ROUTIERE.

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DEUXIEME PARTIE

LA FORMATION DE L'OFFRE DE

SECURITE ROUTIERE.

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CHAPITRE V.

L'ETAT ET LA SECURITE ROUTIERE.

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Ce chapitre traite de l'apparition et de la multiplica-tion d'une forme nouvelle de l'intervention étatique dans ledomaine de la circulation routière, intervention caractériséepar :

- sa nature horizontale qui la distingue des actionsverticales traditionnelles des administrations centrales.

- sa personnalisation incarnée par un leader spectaculai-rement mis en scène.

- son utilisation systématique et intensive des tnass-media et des sondages d'opinion.

Après une analyse historique des conditions d'émergencede cette forme nouvelle prise nar l'offre de sécurité routière,une critique des formes de la décision administrative dans cedomaine sera pronosée.

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1. EMERGENCE POLITICO-SOCIALE DE LA SECURITE ROUTIERE.

De 1949 à 1960 la Prévention Routière exerce un quasi-mo-nopole en matière de sécurité routière. Son implantation régio-nale, la diffusion très large de sa revue et une politique d'in-formation bien menée lui assurent une forte image qui conserveencore actuellement la première place dans l'opinion publique.

Durant la même période les administrations centrales n'a-bordent la sécurité routière que sur le plan réglementaire oulégislatif : au sein des Ministères des Travaux Publics, de laJustice, de l'Intérieur, des Armées, des Bureaux de CirculationRoutière élaborent des textes pour l'essentiel réglementaires ;les textes législatifs sont exceptionnels et ne donnent paslieu à des débats parlementaires spectaculaires.

Les activités du type études et recherches sont surtoutaxées sur la construction et l'entretien du réseau routier :projets routiers, normes, comptages de circulation au Serviced'Etudes et de Recherches sur la Circulation (futur S.E.T.R.A.)et le Laboratoire Central des Ponts & Chaussées créé en 1949.

L'U.T.A.C, Union de syndicats fondée en 1949 par l'indus-trie automobile, procède à des recherches, essais et contrôlessur le véhicule.

De 1960 à 1970 s'amorce le processus qui va aboutir àl'inscription politico-sociale de la sécurité routière. Le nom-bre d'accidents connaît un accroissement spectaculaire, en par-ticulier le nombre des tués qui passe de 8.000 à 15.000, phéno-mène dont rendent compte les bilans statistiques désormais cen-tralisés. Confrontés au développement anarchique de la circula-tion routière, à l'exubérance de l'automobile, les représentantsdes Administrations centrales et spécialement les gestionnairesdes routes rêvent d'adapter à la France certains modèles de.cir-culation, Scandinave et Américain notamment. Ce projet impliquela constitution d'un savoir à caractère scientifique, d'unescience de l'"accidentologie".

Ceci entraîne la création en 1961 de l'Organisme Nationalde Sécurité Routière sous l'impulsion principalement du Ministè-re des Transports et des Travaux Publics. Les caractéristiquesstructurelles données à l'ONSER sont représentatives de l'imagedes accidents qui prévaut en 1960 : l'usager est à l'origine de

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la très grande majorité des accidents, mais il est possibled'exercer sur lui une action correctrice dans la mesure où l'onaura compris son "fonctionnement" par des recherches ad hoc.

Le découpage en trois centres : Etudes Psychologiques,Essais de Chocs et Biomécanique, Etudes Statistiques et Enquê-tes, est fonctionnel mais ne reproduit pas la triade homme/véhicule/route, sans doute pour plusieurs raisons. D'abord lesouci de ne pas empiéter sur les prérogatives de Services déjàexistants (Ponts & Chaussées, Mines, Constructeurs) mais aussiparce que l'analyse systémique en est encore à ses balbutiementset que la mise en cause de la conception des véhicules et desroutes est à peu près exclue.

A ses débuts, la recherche en Sécurité Routière s'apparen-te à un épiphénomène administratif à l'écart des circuits degestion et de décision, et revêt certains aspects de la physi-que de salon du XVIIIème siècle. Seul le Laboratoire des Chocss'insère dans le réel en préparant les conditions nécessaires àla généralisation des ceintures de sécurité et à leur homologa-tion, l'implantation des glissières de sécurité mais, là encore,ni l'automobile ni la route ne sont réellement questionnées.

Cependant, la courbe des accidents prend une allure deplus en plus alarmante, les chiffres sont longuement repris etcommentés par les média. Les Cabinets ministériels interrogentalors les Sercices Techniques sur les mesures à envisager.

Le 8 Mai 19-68, les Ministères de l'Intérieur et de l'Equi-pement présentent conjointement au niveau de leurs Ministres(ORTOLI et FOUCHET) le "fîossier Bleu" programme d'action por'-tant sur la sécurité de la circulation routière, classé partype d'intervention.

2. REGULATION, PROGRAMMATION, RATIONALISATION, COMPTABILITE DESCOUTS SOCIAUX : Une analyse technocratique de la sécuritéroutière.

Chronologiquement antérieur aux études pilotes de ratio-nalisation des choix budgétaires, le Dossier Bleu est déjà sen-siblement influencé par les techniques de programmation illus-trées aux U.S.A. par l'administration Mac Namara lors de laguerre du Viêt-nam.

Le Dossier Bleu est composé, de deux parties, une intro-duction générale "Information sur la Sécurité de la CirculationRoutière" et un "Programme d'Action portant sur la sécurité dela circulation routière".

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Dans son approche globale du problème de la SécuritéRoutière, le Dossier Bleu se veut résolument pragmatique, réa-liste, les données du problème sont envisagées sans complaisan-ce, le discours est austère :

"La perte économique et sociale due aux accidents de-viendra à ce point insupportable que la collectivité se verracontrainte d'adopter tôt ou tard les mesures préventives qu'-elle rejette actuellement comme trop coûteuses ou trop contrai-gnantes (liberté de conduire le véhicule de ses rêves, à lavitesse désirée, quelles que soient ses aptitudes et ses con-naissances. . . )

On a fait croire à l'opinion que l'amélioration de l'in-frastructure, qui n'exigerait des usagers que l'effort qu'ilsacceptent actuellement, serait de nature à résoudre les problè-mes de Sécurité Routière...

La limitation de vitesse est probablement inéluctable,seules les modalités d'application restent à préciser..."

Çà et là transparaît comme le désir de mettre le politi-que au pied du mur, de le condamner à l'action.

"Les Pouvoirs Publics ont nettement fait connaître quela page des mesures pas trop coûteuses et pas trop impopulairesallait être tournée avec le dernier train de mesures qui ontreçu l'approbation du Conseil d'Etat. Les prochaines mesuresseront donc soit plus coûteuses, soit plus contraignantes, soitles deux à la fois..."

Le ton utilisé dans le Dossier Bleu a de quoi surprendresi on le compare, par exemple, aux rapports des Commissions dela Table Ronde de Sécurité Routière (cf. infra). Pas de conces-sion aux intérêts de groupes particuliers, les constructeurs etmême l'économie de marché sont directement mis en cause, qu'ils'agisse de la conception même des véhicules ou des effets no-cifs des arguments publicitaires axés sur les performances.

L'usager n'est pas pour autant épargné, les auteurs duDossier Bleu en ont une vision assez pessimiste qui rejointd'ailleurs pour l'essentiel l'image recueillie auprès des usa-gers eux-mêmes dans diverses investigations psychosociologiques.

L'opérateur humain au volant est considéré comme fonc^tionnant selon des schémas simples, des mécanismes "réflexes"non seulement au niveau de la psychomotricité mais aussi enmatière de jugement, décision, apprentissage.

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L'idée d'une prédisposition aux accidents chez certainsindividus est explicitement présente. Elle justifie l'intérêtd'une détection sélective de ces conducteurs, détection quiserait préférée à "une réglementation lourde et aveugle frap-pant uniformément tous les usagers".

De manière assez paradoxale, il semble toutefois que degrands espoirs soient placés dans l'information à laquelle l'u-sager serait sensible et qui lui permettrait de découvrir lesenjeux de la sécurité routière, la nécessité des mesures grâceà un "dialogue" aboutissant à une prise de conscience de sesdevoirs.

La démarche proposée par le Dossier Bleu se veut résolu-ment "moderne" (le terme revient fréquemment), elle introduit àune nouvelle phase du développement de la sécurité routière har-monieusement régulée par la prise en compte de tous les paramè-tres, le recours à l'électronique sophistiquée et à la rechercheopérationnelle. L'ensemble débouche sur un marketing social dela sécurité routière manipulant une demande de sécurité malléa-ble :

"La sécurité est un service comme un autre dont l'offreet la demande s'équilibrent à partir de la motivation desclients et du progrès technologique. Amener l'usager à accroi-tre la demande de sécurité c'est amorcer le processus qui, dé-passant les possibilités de la seule réglementation, conduit làcomme ailleurs au progrès économique et social".

On peut évidemment s'interroger sur le poids des projec-tions fantasmatiques à l'oeuvre dans cette représentation du"fonctionnement" des usagers. L'élément nouveau réside ici dansla perception du r8le du technocrate-décideur comme un arbitra-ge social des forces en présence, arbitrage fondé sur la con-naissance scientifique des paramètres techniques et humainsfondus dans le moule commun de l'ingénierie.

Un an plus tard, en septembre 1969, le Dossier vert pré-senté par le Ministère de l'Equipement et du Logement reprendparmi les propositions du Dossier Bleu celles qui nécessitentune action interministérielle et une prise de position du Gou-vernement.

L'influence de la RCB (voir ci-après) y est sensible :"Les décisions en matière de sécurité doivent être préparéespar une analyse systématique des possibilités d'action et deleur bilan coût-efficacité et suivies par une organisation adhoc des moyens opérationnels adaptée à la mise en oeuvre d'opé-

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rations complexes impliquant plusieurs administrations, l'indus-trie automobile et le grand public".

Le Dossier Vert comporte une fiche consacrée à la limita-tion de vitesse qui rend compte des résultats de l'expérienceen cours sur 1.600 km. Pas de conclusion nette, l'expériencedoit être poursuivie, accompagnée d'une "campagne d'information'.'"A l'aide des résultats de l'expérience, il pourra être fait unbilan coûts/avantages d'une mesure générale de limitation devitesse dans lequel interviendront d'autres éléments tels quedes considérations sur les motivations du progrès technique ousur l'activité économique du pays. De toute manière, il sembleexclu qu'une telle mesure puisse être prise à l'échelon natio-nal. Elle déviait être prise au moins au niveau européen".

Le Dossier Vert prévoit parmi les opérations à lancer,l'adoption d'un taux légal d'alcoolémie de 0,80 g. Contraire-ment à la fiche "limitation de vitesse" tous les éléments né-cessaires sont ici réunis, y compris l'adoption d'appareilsautomatiques, disposition qui, rappelons-le, n'interviendraqu'en Juillet 1978.

3. RCB ET SECURITE ROUTIERE - L'ETUDE PILOTE DE PREPARATIONRATIONNELLE DES DECISIONS ADMINISTRATIVES.

Le Dossier Bleu et le Dossier Vert constituaient desprogrammes d'action proposés au Gouvernement par les Adminis-trations Centrales.

S'intercalant chronologiquement entre les deux dossiers,l'Etude Pilote de Rationalisation des Décisions Administratives(PRDA) traduit une approche différente, celle de la rationali-sation des choix budgétaires. Sous l'impulsion de la Direction .de Prévision au Ministère des Finances, le Ministère de l'Equi-pement et du Logement prenait en charge, dans le cadre du pro-jet de rationalisation des choix budgétaires, trois études pi-lotes :

- Centres urbains,- Urbanisation périphérique,- Sécurité routière.

Il n'est pas indifférent que la sécurité routière ait étéretenue dans ce projet adopté en Conseil des Ministres enAvril 1968.

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Certaines caractéristiques institutionnelles du problèmeperçues par les décideurs justifient l'adéquation d'une analysepar les méthodes issues de la programmation-gestion :

- Ampleur du problème,- Multiplicité des acteurs et des centres de décision,- Prise en compte d'éléments non-marchands,- Possibilité d'un processus continu décision-contrôle-

décision,- Intérêt du public pour le sujet.

Le problème des accidents de la route est en outre consi-déré comme étant en constante évolution et sans cesse remis enquestion.

La pensée rationalisatrice exerce son action sur le fondet sur la forme en d'autres termes, elle analyse dans un espritde réforme d'une part les problèmes d'ensemble que soulèvent lesaccidents de la circulation et d'autre part le fonctionnementdes institutions qui gèrent la sécurité routière.

En ce qui concerne le premier point, elle reprend en par-tie le type d'approche clinique multidisciplinaire (l'équipePRDA intègre des chercheurs de l'Etude Clinique des Accidentsde l'ONSER). L'analyse multicâusale des accidents est présentedans l'ensemble du rapport PRDA mais, selon le thème étudié,des influences plus traditionnelles sont nettement perceptibles.

"En effet, un accident n'est jamais dû à une cause mais àun ensemble malheureux de circonstances. Ainsi, si un accidentse produit dans un virage, cela peut être dû à la fois à l'inat-tention de l'automobiliste, au mauvais état de ses pneus, à lamédiocrité du revêtement routier et à une signalisation défec-tueuse".

Ici encore un grand absent, le facteur "véhicule" excep-tion faite du défaut d'entretien. Qu'en est-il par exemple dela conception du véhicule, sous-vireur ou sur-vireur, de laprécision de la direction, de l'efficacité du freinage, de lapuissance et des performances, des arguments promotionnels uti-lisés par les publicitaires, etc..

Il semble, en ce qui concerne ces divers aspects, quel'on pose a priori (cf. le titre 12 "véhicule") que tout a étéfait ou sera fait par les constructeurs eux-mêmes.

"Le véhicule étant conçu pour le système routier, les pro-blèmes de liaison avec les autres éléments sont évidemment étu-diés dès sa conception : étude de la fatigabilité du conducteuren fonction du confort par exemple" (titre 2 "méthodologie").

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En fait, les espoirs se fondent surtout.sur 1 "'améliora-tion" du conducteur. Il s'agit bien toujours d'adapter l'hommeà la machine par la formation maître mot et panacée de la sécu-rité.

"La connaissance du contenu des textes est nécessaire maisnon suffisante. L'automobiliste doit être informé d'autres con-ditions de la sécurité. Ces informations sont relatives à laphysique (énergie cinétique, force centrifuge, adhérence) à laphysiologie et à la psychologie (fatigue, éblouissement, intoxi-cations) à la météorologie (intempéries). Elles seraient ensei-gnées à un niveau très concret et très pratique" (titre 6, For-mation des conducteurs).

"Tout au long de sa formation, le conducteur doit acquérirles opinions générales sur la circulation et la prévention ainsique les attitudes sociales qui lui donneront l'esprit de sécu-rité et le civisme souhaitable" (idem).

"Il faut lui apprendre à voir et à agir juste et vite".

L'étude PRDA développe un vaste projet pédagogique inté-grant psychologues, pédagogues, moniteurs, dont chacun utilisepour ce qui le concerne, les méthodes de pointe de sa discipli-ne.

Tout au long de l'étude transparaît en filigrane l'imagenébuleuse de l'usager dont on voudrait mettre à jour les méca-nismes secrets : motivations, attitudes, affectivité, comporte-ments. Le PRDA,qui par choix méthodologique fondamental utiliseles valeurs chiffrables rêve d'intégrer dans ses ratios des pa-ramètres psychologiques et mime "humains" : gêne, civisme, cons-cience, réflexes, etc.. Aussi, le programme des recherches pro-posé fait-il largement appel aux sciences humaines et parallèle-ment, reprend le projet d'un gigantesque fichier central où cha-que conducteur serait fiché.

La programmation systématique de la recherche (titre 5)masque en partie la forte hétérogénéité des propositions quantaux possibilités réelles de mise en oeuvre et d'application.Dans certains domaines, la recherche apparaît plutôt comme unsursis à la décision évacuée vers un futur virtuel de la con-naissance.

Ainsi les rédacteurs de l'annexe 8 "limitation de vites-se" reprennent-ils l'argumentation développée par le "DossierVert" mais de manière plus nuancée vis à vis de l'entité "con-ducteur" : "II est également reconnu que tous les conducteursne sont pas doués de la même façon pour la conduite et qu'ungrand nombre ne peut s'adapter aux grandes vitesses... Enfin,

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le système actuel de délivrance du permis de conduire rie ten-dant qu'à contrôler les aptitudes élémentaires à la conduite,la moyenne des conducteurs ne sait adapter sa vitesse à la cir-culation... la catégorie d'usagers visés par une mesure de li-mitation de vitesse est mal connue, qualitativement elle com-prendrait une forte proportion de bons conducteurs qui fontbeaucoup de kilomètres par an.. '.'

A l'issue de l'étude,les coûts et avantages monétaires etnon monétaires furent récapitulés pour toutes les actions envi-sagées.

Ces actions étaient soit de type administratif avec lacréation de structures et de postes, soit de type action direc-.te sur la sécurité routière portant sur l'infrastructure, levéhicule, les usagers, les études et recherches.

Après un tri par la méthode multicritères "Electre" lespriorités apparaissent pour :

- la lutte contre l'alcoolisme,- la limitation de vitesse,- la ceinture de sécurité,- la signalisation horizontale,- la lutte anti-verglas,- l'aménagement des points noirs.

Avec le recul historique il est intéressant de comparerà ce classement l'échéancier réel d'adoption des mesures, notam-ment les plus importantes. La lutte contre l'alcoolisme au vo-lant, seule mesure législative fut adoptée dès 1970 alors quelimitation de vitesse et port obligatoire de la ceinture desécurité, mesures réglementaires, furent adoptées en 1973. Lesautres actions, relevant plus directement de la Direction desroutes, firent l'objet d'un processus continu d'améliorationqui se poursuit encore actuellement.

En fait, la méthode RCB ne prétendait pas accéder à unclassement réellement hiérarchisé des actions à entreprendre ;elle visait plutôt à déterminer les goulots d'étranglement en-travant l'action de l'Etat et à définir des seuils au-delà des-quels le pouvoir politique jugerait l'action inacceptable.

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4. ACCIDENTS DE LA ROUTE ET NOUVELLE SOCIETE : LA TABLE RONDEDE SECURITE ROUTIERE.

Le 3 décembre 1969, Jacques Baumel, Secrétaire d'Etat au-près du Premier Ministre, chargé des Relations Publiques réunit,à la demande du Premier Ministre Jacques Chaban-Delmas, la Ta-ble Ronde sur la Sécurité Routière.

Celle-ci comprend cinq groupes de travail spécialisés :

- Infrastructure,- Véhicules,- Conducteurs,- Secours aux blessés,- Information.

Michel Ternier, responsable de l'étude PRDA "Accidentsde la Route" est rapporteur général de la Table Ronde.

Le 15 mars 1970 les cinq groupes déposent leurs conclu-sions qui sont présentées au Premier Ministre.

L'introduction du rapport général rappelle que "la TableRonde s'est appuyée sur les techniques RCB", et que "son uniquesouci est la défense de l'intérêt général".

En ce qui concerne mobilité et sécurité, le rapport géné-ral précise d'emblée :

"II convient de rappeler que le but d'une politique deSécurité Routière ne doit pas être d'entraver le développementde la circulation pour diminuer le nombre d'accidents mais depermettre aux automobilistes de se déplacer avec le maximum desécurité".

En fait, la Table Ronde, conçue dans le contexte de lapolitique de concertation de la "Nouvelle Société", se démarquedes initiatives antérieures par sa large ouverture à des grou-pes d'intérêts privés tels que constructeurs, pétroliers, as-sureurs, transporteurs. Ceci apparait bien dans la répartitiondes présidences des groupes de travail :

- Infrastructure : M. CUNY, Président de la Prévention Routière.

- Véhicules : M. GALLIENNE, Président de l'Union Routière.

- Conducteurs : M. HAAS-PICARD, Président de la Chambre Syndi-cale du Pétrole.

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- Secours aux blessés : M. CHENOT, Président des AssurancesGénérales de France.

- Information : M. d'ORNHJELM, Président de la Chambre Syndicaledes Constructeurs d'Automobiles.

Le 28 février 1970, Philippe le Corroller écrivait dans"Le Monde" : "Si l'on s'aperçoit en mars prochain que la "TableRonde" a réussi, cela voudra dire que tous ceux qui vivent di-rectement ou indirectement de l'automobile auront accepté deremettre complètement en question un. certain nombre d'idéesacquises. Cela signifiera aussi que le Gouvernement sera prêtà faire plusieurs choix indispensables : décider par exemplede limiter la vitesse sur les routes ou d'affecter davantagede crédits à l'amélioration du réseau routier existant".

Les recommandations émises par les groupes de travail con-cernent presqu'exclusivement les usagers et l'infrastructure.

Il est assez significatif de constater par exemple queles conclusions du groupe "véhicules" portent en fait sur lesusagers : encourager le port de la ceinture, prôner le contrôletechnique volontaire par des campagnes d'information. Le grouperecommande par ailleurs d'augmenter les moyens de l'UTAC (orga-nisme professionnel des constructeurs) la seule mesure concer-nant réellement le véhicule est "l'amélioration du balisagelatéral des véhicules encombrants".

Quel contraste avec l'arsenal des mesures proposées parles groupes réglementation, répression et formation : échellede sanctions, examen médical généralisé, personnalisation desprimes d'assurance, fichier des conducteurs, éducation en mi-lieu scolaire, réforme des permis de conduire, réforme du Ser-vice National des Examens du Permis de Conduire.

Les conclusions et les suites de la Table Ronde présen-tent deux caractéristiques : l'absence de "grande" mesure dutype limitation de la vitesse (le taux légal d'alcoolémie étaitdéjà inscrit à l'ordre du jour de la session parlementaire deprintemps) et la logique du principe énoncé dans le rapportgénéral : ne pas entraver le développement de la circulation.Usagers et réseau routier devront à n'importe quel prix s'adap-ter à l'automobile.

L'intérêt d'une utilisation systématique des mass-médiase précise : "Si des actions partielles peuvent être impopu-laires une politique de sécurité routière efficace sera large-ment approuvée par la majorité de l'opinion qui attend que leGouvernement prenne des décisions dans ce domaine". Les médiavendront la sécurité routière sur un plan plus idéologique quetechnique, comme un tout "clés en main". Et, comme le soulignent

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les rédacteurs du rapport "Information" de la Table Ronde, lescampagnes sont "destinées à faire prendre conscience des devoirsdu conducteur".

Le 18 mars 1970, Jacques Chaban-Delmas prononce le dis-cours de clôture de la Table Ronde. Il constate que "le soucide la sécurité l'a emporté sur les réflexes professionnels oupersonnels. (L'unanimité) confirme s'il en était besoin, leGouvernement dans sa décision de traiter la Sécurité Routièrecomme un problème grave et urgent... Un Gouvernement responsa-ble d'abord des vies humaines doit agir : il y a là un défi,le défi de la Sécurité Routière. Nous le relevons", "...lanécessité d'expliquer et d'illustrer auprès d'un plus largepublic, par la parole, par l'écrit, par l'image, la grande cau-se nationale qu'est la Sécurité Routière, qu'il s'agisse dusoutien de tous les moyens d'information dont la collaborationest capitale ou des actions parallèles entreprises en réunis-sant le Public et le Privé, les diverses administrations con-cernées, les représentants des Assurances, les pétroliers, lesconstructeurs automobiles...".

"C'est pourquoi je tiens tellement à ce que la prioritéque nous accordons à la Sécurité Routière soit visible immédia-tement et que les mesures arrêtées prouvent à tous que nousagissons et que nous continuerons d'agir ..." "j'ajoute que laSécurité Routière va permettre à nos concitoyens de participerà une action en elle-même exemplaire".

Jacques Chaban-Delmas annonce également la création d'uneMission Interministérielle de Sécurité Routière, dirigée parun membre de son Cabinet. La M.I.S.R. sera remplacée en 1972par la Délégation à la Sécurité Routière.

5. LE PROGRAMME FINALISE DE SECURITE ROUTIERE.

A la suite du Conseil Interministériel du 28 avril 1971,la sécurité routière est retenue comme opération pilote dansle Vlème Plan. Celui-ci couvre une période (1971-1975) décisivepour l'institutionnalisation de la sécurité routière. Les propo-sitions du Programme Finalisé de Sécurité Routière proviennentd'un groupe de travail de la Commission des Transports et on yretrouve sans étonnement l'essentiel des Dossiers Bleu et Vertet des rapports de la Table Ronde. Pour les auteurs du rapportl'objectif est, selon une formulation qui laisse rêveur, "d'an-nuler l'augmentation du nombre des tués pour rester en 1975 auniveau de 19.70, soit environ 15.000 au lieu de 18.000 que l'onpourrait atteindre sans actions nouvelles"."

" En fiait l'obj'&ctifi n'était poi txop ambitieux puÂAque. le. bi-lan deA tué.* en 1975 fiut de. 13.17 C. Il eAt vfuti que. la pnévl-iion ava-it totaleme.nt exclu, de. &eA calcula Vkypothue. d'une

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II est remarquable que le Programme Finalisé mette sur lemême plan une mesure déjà existante (taux légal d'alcoolémieadopté en Juillet 1970) et une autre qui ne sera adoptée qu'en1973 (limitation de la vitesse) toutes deux classées dans "l'ex-ploitation de la route en rase campagne".

Par contre le port obligatoire de la ceinture de sécuritén'est envisagé qu'avec circonspection : "une 3ème opérationpourrait être lancée au cours du Vlème Plan concernant les cein-tures de sécurité... Enfin on pourrait mettre à l'étude l'obli-gation du port de la ceinture à certaines ou à toutes les caté-gories d'usagers".

Avec le programme finalisé les techniques de programmationbudgétaire tentent d'imposer un cadre strict fait de priorités,de critères d'efficacité, de responsabilité nominale, à unobjet dont les contours sont parfois très flous. A ne considé-rer par exemple que le critère nombre de tués annuel dans lacirculation que l'on retrouve constamment dans les attendus' duProgramme, on mesure bien le hiatus existant entre les préoc-cupations méthodologiques du Commissariat Général au Plan etde la Direction de la Prévision et les pratiques en matière desécurité routière. .

Bien entendu le Programme Finalisé n'envisage le critère"nombre de tués" ou "nombre d'accidents corporels" que comme uncritère ultime. Mais l'articulation entre l'objectif final etles divers programmes d'action repose essentiellement sur desprésupposés dont certains confinent à l'idéologie.

On pourrait en trouver des illustrations dans la quasi-totalité des actions envisagées qu'il s'agisse d'aménagementroutier, de conception des véhicules ou de formation des conduc-teurs. Nous analyserons préferentiellement le cas de l'infor-mation qui nous paraît exemplaire d'un certain procès d'inter-vention de l'Etat dans la gestion d'une puissance collective.

6. SECURITE ROUTIERE ET MARKETING A.LA CONQUETE DES MASS MEDIA :LES CAMPAGNES D'INFORMATION.

.-*Jusqu'à la fin des années 60 les campagnes d'information

concernant la sécurité routière conservent un caractère "arti-sanal" : slogans très généraux, utilisation quasi-exclusive del'affichage routier, style "traditionnel", elles se démarquentnettement de la oubiicité commerciale.

cxtt>e. de. Vo.neAQ.CQ..

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Lorsque la Mission Interministérielle de Sécurité Routièreest créée à l'issue de la Table Ronde, l'une de ses attributionsest de mettre en oeuvre une politique d'information. Le Chef dela M.I.S.R. est également responsable du sous programme Infor-mation dans le Programme Finalisé. Lorsque la Délégation à laSécurité Routière succède à la M.I.S.R. ce type d'activité sedéveloppe pour atteindre le rythme annuel de trois à quatrecampagnes.

En 1970, au moment de l'adoption du taux légal d'alcoolé-mie, les Pouvoirs Publics décident d'entreprendre une premièreaction d'envergure : la préparation de la loi se double d'unprogramme d'information ambitieux pour lequel les deux plusgrandes agences françaises de publicité sont consultées conjoin-tement. Le but est de concevoir une "vaste"" campagne dont l'o-riginalité principale sera d'être strictement contrôlée du pointde vue de l'efficacité.

Ici apparait l'ambivalence de la démarche de l'Etat. Sé-duits par le mythe de la toute puissance des grands média maisun peu circonspects vis à vis de la "publicité" souvent jugéemercantile et superficielle, les responsables veulent être ras-surés quant au bien fondé de l'investissement des deniers pu-blics dans des campagnes. Aussi ont-ils recours aux scientifi-ques, et plus précisément aux sciences humaines pour quantifierles effets de l'information sur les usagers. ;À cette époque ledébat traditionnel sur les effets de la publicité trouve unenouvelle jeunesse avec les campagnes d'intérêt collectif. Oncrée à l'O.C.D.E. un groupe de recherche sur l'"efficacité descampagnes de sécurité routière" et des programmes expérimentauxaussi ambitieux qu'exigeants sont proposés aux Pouvoirs Publics.Schëmatiquement deux possibilités sont alors offertes aux déci-deurs : soit considérer les campagnes de sécurité routière com-me un domaine particulier qui justifie la constitution d'uncorps de connaissances ad hoc, soit utiliser directement lestechniques de la publicité commerciale.

La première option correspond beaucoup plus aux approchesde type "rationnel" : R.C.B. ou Programme Finalisé, elle permeten particulier d'envisager le chiffrage de l'efficacité desbudgets d'information.

Quel que. i>oi£ lexm budget, le* campagne* d'Intimation* *onttoujoufu "vaste*". Van* ce ca* ptiécÂ* le. budget envisagéétait eiie.ctxveme.nt de l'ouate, de. gnandeusi de* "gtioi" bud-get* pubLLc-ctaôie*.

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En fait c'est une solution mixte qui sera retenue qui ten-tera de concilier les impératifs pratiques d'une politique d'in-formation axée sur l'utilisation intensive des mass média et lesexigences de la planification. Mais le déséquilibre initial en-tre les budgets d'études et les budgets de réalisation au dé-triment des premiers ira en s'accentuant au fil des campagnes.Et, parallèlement, les problèmes théoriques et pratiques quesoulève la mesure de l'efficacité des campagnes seront escamo-tés au profit de considérations plus immédiates : media-strate-gy, groupes-cibles, base lines, jingles, etc.. Au savoir sesubstituent le savoir faire et le faire savoir. Et pour leverles derniers doutes qui pourraient être émis quant à l'effica-cité des campagnes, le sondage d'opinion, outil à tout faire,est pourvu d'un appendice "après campagne" qui permet de mon-trer sans contestation possible que les opinions ont évolué demanière favorable donc que la campagne a été efficace ; qu'enest-il ici du critère "accident" prévu par le Programme Fina-lisé ?

Il faut souligner que certaines caractéristiques des cam-pagnes ne facilitent pas une analyse rationnelle de leurs ef-fets. Le rituel répétitif du slogan, la rareté des données va-lidées et a fortiori d'hypothèses opératoires sur les processusde la communication sociale encouragent les courts-circuitsinterprétatifs.

L'argument le plus répandu est que si la publicité faitvendre, l'information (ou la propagande) doit faire agir. Ilest rare que le principe même d'une influence positive des cam-pagnes soit mis en doute," l'interrogation lorsqu'elle existe,porte sur l'ampleur des effets. Et de même que les budgets pu-blicitaires souvent ne précèdent pas mais suivent la courbe desventes, les campagnes s'ajustent à l'évolution des accidents.

Aussi, les modalités du contrôle font que l'échec avéréd'une campagne est très peu probable sinon impossible. Il n'enserait sans doute pas de même si les actions d'informationétaient précédées d'hypothèses très précises sur les objectifs

!: Exce.ptA.on remarquable, et Kemanquée. : en août 7 97S dam " ixlettre, de la Sécurité Routière.", organe, du Comité. inteAminiA-térieZ cette. inte/uwgation "lei campagnes d'infomotion i,ont-eZJLoM utiles 1 " V article, rend compte, d'une. expérience, menée,aux Etati Unù, montrant qu'une, campagne, de. 9 moii n'avait, euaucun e^et &ur lejt> comportements du automob-iLi&teA. L'auteurde. Varticle conclut : "dette. expérie.nce. a montré que., i,e.lon&eA autewiA, it était iÂZuioiAe. d'eApéAe/i une. modificationpKo^onde. du compontemznt pan. leA ieuleA campagnes d'-in^onma-tion. Ce point de. vue. fie.joint pleA.neme.nt c&luÂ. du Comité..de.la SécwUté.

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visés et le cheminement de cause à effet entre les messages etles comportements réels des usagers. Aux USA, des études por-tant sur les programmes de lutte contre l'alcoolisme des usa-gers (actions SAFETY ACTION PROJECTS) ont montré qu'il existaitune relation inversement proportionnelle entre l'efficacité at-tribuée à une campagne et la qualité méthodologique des contrô-les d'efficacité."

Pourquoi dans ces conditions l'offre institutionnelle desécurité routière a-t~elle depuis 1970 ut.ilisé aussi largementles campagnes d'information ? Sans doute pour diverses raisonsspécifiques ou non spécifiques au thème traité. Le développe-ment des mass^-media et tout spécialement, de la télévision aprovoqué de la part de l'Etat une stratégie de monopolisationet de contrôle de l'information sur laquelle il n'est pas néces-saire de revenir. Il aurait été surprenant qu'un problème desociété reconnu comme tel et accédant à la sphère politiqueéchappât à la mise en scène des média. La "campagne" se distin-gue de la seule utilisation des média en ce sens qu'elle seprésente explicitement comme une stratégie d'action sur lescomportements. Emanant des pouvoirs publics elle s'affiche com-me volonté d'action caractérisée du décideur, bien souventd'ailleurs ces campagnes sont "lancées" par une conférence depresse d'un responsable politique de haut niveau.

Dans le cas spécifique de la Sécurité Routière, chaquecampagne constitue aussi une réponse entièrement encodée selonle système sémiologique du "facteur humain" à la question fon-damentale : qui est responsable des morts de la circulationroutière ? Ce faisant elle relève du principe de la "vaccine"analysé par R. Barthes pour le mythe : dénoncer l'accidentelpour masquer le principiel.

7. OFFRE DE SECURITE ET ENVIRONNEMENT SOCIO-HISTORIQUE - TENTA-TIVE D'ANALYSE DU PROCESSUS DE DECISION.

Les conditions semblaient réunies en 1970 pour que, outrele taux légal d'alcoolémie, soient décidés le port obligatoirede la ceinture de sécurité et la limitation de vitesse sur l'en-semble du réseau.

Les grands dossiers "techniques" étaient sans ambiguïtésur l'opportunité de ces mesures dont l'analyse RCB confirmaitle bien-fondé et la rentabilité.

- ELUNGSTAVE, VS e* SPRIWGER T.J. Analy&li o<$ASAP finkabUlta-tlon counteAm&cUiuAZ e^ec£û>ene4-6, UnÂveAAÂAy ofi South V/xkotaNHTSA izpovt V CF-HS 8 02-044 .

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La Table Ronde met en scène spectaculairement diverspes d'intérêts privés mais on peut admettre que l'influence deces groupes s'est exercée en permanence antérieurement et posté-rieurement à la Table Ronde. D'autre part, si la logique de cer-tains de ces groupes s'opposant à la limitation de vitesse seconçoit assez clairement, il existait par contre un consensusquasi général en faveur de la ceinture de sécurité.

A partir de diverses grilles de lecture des décisions et,plus spécialement de celle proposée par H. JAMOUS " que peut-on décoder du processus décisionnel qui devait aboutir à l'é-chéancier des grandes mesures de sécurité routière ?

Le processus de la Table Ronde présente à la fois destraits propres à la décision autoritaire (personnalité marquan-te d'un homme, le Premier Ministre, entouré de Comités d'Ex-perts, décision apparemment au plus haut niveau politique) etdes traits évoquant le compromis, la négociation entre diversesforces concernées (composition des groupes de travail, décisionsdifférées, accent mis sur la nécessité d'études, d'expérimenta-tions, de campagnes d'information). En fait, la décision radi-cale, "solution à la française" selon Crozier, ne devait inter-venir qu'en 1973 sous la forme typique d'arrêtés ministériels,donc sans débat parlementaire,

JAMOUS'évoque dans le processus décisionnel l'existenced'exigences et de demandes de plus en plus aiguës et générali-sées au sein de la société globale.

Sur ce point qui est central dans notre interrogation, onadmet généralement que l'opinion publique était extrêmement sen-sibilisée à l'accroissement des accidents de la route entreJ9J6O et J97O, Les décideurs ont fait unanimement état, dansleurs déclarations publiques ou privées, de l'existence d'unedemande forte et généralisée de sécurité.

L'analyse du discours relatif aux accidents montre le rô^le moteur du chiffre annuel des tués de la route sur lequel secristallise le débat relatif à la politique de sécurité routiè-re. Nous avons évoqué par ailleurs "" le fonctionnement de cetindice selon deux modalités }

"Eléments pouA une. tkioivLa iocÀolog-cque. dz& dé.cÀJi>JLon&tùqueA", Revue ûwnçcuAe. de t>ocÂx> logée. JX, 19.68, ]SS

"" Re.pti&>eMtcLtLon& SocXaZu de IWction de SzcufuM et de l'ia-cxdent de ta. Route.. A TP SocJ.o-Ec.onomle. d uop. cÀX.

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J. En valeur absolue : le chiffre des tués de la routeatteint une valeur qui paraît constituer la limite de ce quiest tolérable dans un contexte socio-historique donné (dévelop-pement du parc notamment),

2. En valeur relative : les oscillations en hausse ou enbaisse sont considérées respectivement comme un signal d'alar-me ou un constat de succès sans que l'on connaisse réellementles lois qui gouvernent le phénomène.

A la fin des années 60 l'accroissement spectaculaire destués de la route rendait imminente l'atteinte de la valeurseuil que l'on peut estimer à 15.000." Cette valeur "explose"au sein du corps social d'une manière brutale comme si un voilevenait d'être brusquement déchiré et que l'ampleur du problèmeapparaissait tout à coup. Dans ces conditions, il est hasardeuxde tenter d'isoler une "demande" de sécurité unilatérale, spon-tanée de l'opinion publique qui aurait contraint les PouvoirsPublics à l'action, plus précisément à une certaine formed'action.

Il ne faut pas perdre de vue que la sécurité n'étaitqu'un enjeu parmi d'autres et que l'idéologie de la croissanceet du développement de la mobilité individuelle restait extrê"-mement puissante malgré Mai 68.

En considérant l'ensemble formé par les usagers de laroute, les gestionnaires, les producteurs (routes et véhicules)et les décideurs comme un système social, s'agit-il d'un systè-me, ouvert ou auto-entretenu â l'égard des principaux enjeuxmobilité et sécurité ?

Tout semble se passer jusqu'en 1970 comme si ce systèmeétait totalement auto-entretenu, non ouvert en ce sens que lesprincipaux intéressés, les usagers, n'ont pas accès à la rëgu*-lation du système, même indirectement sous la forme nébuleused'une quelconque "opinion publique". En fait, leur seul moded'intervention réside dans leur comportement vis à vis de laréglementation et leur participation directe au fameux bilan -indice de s accidents.

La prise de conscience par les usagers de cet état dusystème était d'autant moins probable que, par le jeu du "fac-teur humain" la responsabilité de l'insécurité leur était tota-lement imputée. On peut y voir une explication à l'étonnantepassivité des usagers vis à vis du système et des modalités dedistribution des enjeux : échec de tous les mouvements fédéra-

!! avec la vale.uA tymbo&tque. deA C ^ ^ A M "n.ondi>". C)J. le. "patù.de.* 10. 0 00 monte" lancé, pan. VGE en 197Î.

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teurs, pas de groupe de pression, aucun accès.à la Table Ronde",élément assez remarquable dans un projet politique de "concerta-tion".

En fait, le mouvement en faveur d'options nouvelles sem-ble avoir trouvé son origine au sein d'un petit groupe directe-ment concerné par la circulation routière. Le modèle de JAMOUSsuppose l'existence d'une catégorie socio-professionnelle quidénonce les dysfonctions du système et propose des solutionsde rechange ; les dossiers Vert et Bleu, l'étude PRDA suggèrentque ce rôle a été tenu par les ingénieurs de l'Equipement etcertains hauts fonctionnaires des Administrations Centralesconcernées.

Ce groupe se distingue du "sous-système administratif"au sens de Crozier en ce qu'il dépasse le traditionnel cloison-nement entre Administrations (comme en témoignait déjà en 1961la création de l'ONSER, Organisme indépendant) et propose desinnovations. Ce groupe est sensible à "l'air du temps".

Il nous est apparu que, par certains aspects, le dossierBleu, le dossier Vert, l'étude P.R.D.A. et même la Table Rondeet le programme finalisé étaient historiquement indissociablesdu climat entourant les événements de Mai 1968. Cette remarqueva au-delà de l'anecdote : nous avons tenté de montrer l'exis^tence de liens directs entre l'Etude Clinique des Accidentsmenée par l'ONSER de 1965 à 1968, l'étude P.R.D.A. dont l'équi-pe formée au cours de l'été 1968 intégrait des chercheurs del'E.C.A., le Dossier Bleu (Mai 1968) Vert (Septembre 1969) etla Table Ronde dont le rapporteur général était le chef de laMission P.R.D.A,

Dans le Rapport Scientifique Final de l'Etude Cliniquedes Accidents, les rédacteurs évoquent la concomitance entrecertaines conclusions relatives à la régulation sociale desaccidents de la route et des thèmes développés en Mai 1968.

"Nous avons aussi estimé qu'il y a des limites à la sécu-rité comme d'ailleurs à la vitesse et à l'agrément des déplace-ments. C'est pourquoi nous pensons qu'on doit aussi tenter unecritique globale et plus radicale du système de la circulationet, au-delà, du phénomène social qu'il manifeste... C'est làun thème à la mode et il eût été plus élégant pour nous de nepas nous y rallier. Mais, voulant rendre compte honnêtement denos travaux nous ne pouvons le passer sous silence".

à Vexception de. l'AAAOdation "Lu V K O À M du. Piéton" ie.pn.z-be.nte\e. à la Table Ronde pat ion Pn.eMi.dent, R. LAPEVRE.

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Les dossiers techniques insistaient sur la nécessité d'undialogue avec les usagers, d'un processus de concertation, d'unepréparation de l'opinion, notions qui paraissent actuellementassez banales mais qui étaient alors nouvelles et tranchaientsur le contexte traditionnel de la décision.

Avec la prise en charge par le politique, le projet dudialogue, de l'information va prendre une orientation particu-lière, celle de la politique d'information par campagnes quenous avons déjà évoquée ; tout se passe comme si après la TableRonde et jusqu'en 1973 l'absence de décision avait été compen-sée par l'utilisation systématique des mass média.

Donc, en 1970, les conditions socio-historiques : état dusystème, existence d'un projet réformateur, exigence sociétaleparaissaient converger vers la prise de décision. En fait, outrel'échappatoire "information" c'est par un retour, un feed backvers le technique que la décision semble avoir été différée.On peut à ce sujet s'interroger sur le rôle tenu par certainesétudes ou recherches dans le processus décisionnel.

Pour les trois mesures alcool, ceinture, vitesse, lestechniciens s'accordaient à penser que les travaux, les expé-riences et la pratique des autres pays industrialisés suffi-saient largement à justifier le bien fondé de la mesure. Enfait, la demande d'études et d'expériences complémentaires éma-ne de l'échelon politique. Peut-on prendre en compte l'hypothè-se d'une utilisation de la recherche comme moyen de diversion,manoeuvre retardatrice ? Certaines conclusions de la Table Ron-de plaident en faveur de cette interprétation pour ce qui con-cerne la limitation de vitesse . Cette thèse est clairementévoquée par C. GERONDEAU dans un livre récent." Dès le débutde 1970 J. CHABAN-DELMAS alors Premier Ministre, était décidéà fixer une limitation généralisée de la vitesse à 100 km/h :"II n'en eût pas la possibilité. Il fallut se résigner une foisde plus à mettre en oeuvre une nouvelle "expérience"... troisannées encore furent donc perdues".""

Ceci nous amène à interroger la 4ème variable de JAMOUS,l'état du pouvoir. Existait-il réellement une volonté politiquedéterminée à la décision ? Il semble que la réponse soit positi-ve mais que les "points d'incertitude" qui échappaient aux dos-siers techniques soient apparus suffisants au pouvoir pour quela décision soit différée. Ces points d'incertitude pensons-nous étaient différents.selon qu'il s'agissait de la limitationde vitesse ou du port obligatoire de la ceinture de sécurité.

" La mont inutile. - Edition!, Pi.flM.7979.

"" op, dite..

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Pour la limitation de vitesse, d'une part le rôle de grou-pes de pression en position favorable au sein du système, d'au-tre part des conflits internes aux instances mêmes du pouvoir.

Selon C. GERONDEAU des interventions auraient différél'examen du dossier de la limitation de vitesse ou altéré sesconclusions ; il attribue en effet en partie la prise de déci-sion de 1973 au fait que "les précautions nécessaires furentenfin priées pour qu'au plus haut niveau de l'Etat le dossiersoit exposé avec toute la netteté qui s'imposait et qu'au moinsla neutralité prévale... malgré l'opposition ouverte de plu-sieurs membres du Gouvernement"."

L'incertitude concernant la décision en matière de cein-ture de sécurité était d'une autre nature"" : elle concernaitl'état de l'opinion et les réactions des usagers à la mesure.Dans ce cas particulier la stratégie du décideur vis à vis del'information est particulièrement nette.

Le 18 janvier 1973 un Comité Interministériel présidépar le Premier Ministre, P. MESSMER, crée un groupe de travailsur l'obligation du port de la ceinture. Les conclusions de cegroupe sont extrêmement intéressantes en ce qui concerne 1'ima-ge des attentes et du comportement de l'usager. Nous nous per-mettons de citer largement :

"D'une façon générale, les mesures coercitives sont assezmal accueillies puis progressivement acceptées par un phénomèned'accoutumance... l'atteinte à la liberté individuelle est d'unpoids insignifiant d'une part par rapport aux restrictions déjàimposées aux usagers de la route, d'autre part vis à vis del'intérêt que l'application d'une telle règle peut apporterpour 1'individu..."

"La contrainte résultant de l'obligation de porter laceinture ne parait pas devoir comporter une incidence d'un or-dre de grandeur comparable à celui des autres facteurs qui in-fluent sur la décision d'accéder à la motorisation".

"Ainsi apparaît donc tout particulièrement l'importancepour le décideur de chercher à vaincre toutes les résistancesà cette contrainte que peut entraîner l'obligation et le moyenle plus élégant pour y parvenir est manifestement d'agir parla persuasion, donc par le biais de l'information, de la propa-gande et de l'instruction du public'-'.

" op. C-tté..

»:: un ]97C, le. pont obtiaatoln.ii de la c&irvtuAe. ne. &ouJLevaÂX au-cune, opposition ipecÂfaque. Le* comtnucteivu, ILU. etaJinntAavohiableA et c'ut bien u.lttnÂ.euAeme.nt que. devait appanal-Vie. le. couMint d'opinion JincaKne pan. J. SPYKET.

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Autre volet de l'information qui, nous l'avons dit, "enro-be" en quelque sorte les campagnes, le sondage d'opinion sembleavoir joué un rôle capital dans la décision de Juin 1973. SelonC. GERONDEAU " les experts pronostiquaient l'échec de la mesuremais les sondages révélèrent qu'une majorité de l'opinion luiétait favorable : "Le Premier Ministre peut donc, fort de laconnaissance du soutien tacite de l'opinion, rendre obligatoirele port de la ceinture de sécurité". Il s'agissait en fait seu-lement du port sur route car "les sondages avaient montré qu'iln'en était pas de même en ville, mesure à laquelle la moitiédes personnes intéressées étaient favorables. C'est pour cetteraison qu'il fut décidé de procéder par étapes et de n'étendrel'obligation aux agglomérations que lorsque l'opinion y seraitprête".""

La "lecture" du processus décisionnel du pouvoir permetdonc d'éclairer le "vide" séparant la Table Ronde des mesuresde 1973. Le principal "out put" de la Table Ronde fut en faitla création de la Mission Interministérielle de Sécurité dontles deux fonctions essentielles, coordination interministériel-le et mise sur pied d'une politique d'information correspon-daient étroitement aux zones d'incertitude du pouvoir en 1970.

" op. c-ôtë":: op.

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CHAPITRE VI.

L'OFFRE TECHNIQUE DE SECURITE.

LA SECURITE DES VEHICULES.

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Ce chapitre a pour objet la.description des catégoriestechniques et administratives globales qui caractérisent laproduction et la gestion de la sécurité des véhicules.

La question de la sécurité des véhicules est d'abord celle'de la technique notamment au plan de la conception, c'est-à-di-re de la dynamique mais aussi de l'incorporation de dispositifsspécifiques de sécurité, tels les systèmes de rétention. Nousanalyserons donc en premier lieu les deux catégories techniquesde la sécurité des véhicules : sécurité primaire et sécurité se-condaire.

La sécurité technique a été récemment articulée à un en-semble de normes définies par l'administration. A l'origine decette normalisation, le Programme Finalisé de Sécurité Routièreet une commission regroupant constructeurs et administration,appelée Commission Coquand, du nom de son président, qui défi-nit avec quelques hésitations, certaines des mesures à prendre.

Enfin, peut-on considérer que la sécurité des automobilesest homogène, quel que soit le véhicule considéré ? On tacherade répondre à cette question eh rendant compte d'une recherchesur la sécurité comparée selon la marque et le type.

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1. LES CATEGORIES TECHNIQUES DE LA SECURITE DES VEHICULES :SECURITE PRIMAIRE ET SECURITE SECONDAIRE.

Dans le domaine de la sécurité du véhicule, les catégoriesadministratives et la réglementation distinguert traditionnelle-ment sécurité primaire et sécurité secondaire. La première con-fère à la conception et à la construction du véhicule ; elle serapporte surtout au comportement dynamique : suspension, freina-ge, direction, pneumatiques, etc.. La sécurité secondaire estla capacité du véhicule à résister au choc en cas d'accident età en amoindrir la gravité (habitacle indéformable, systèmes derétention, etc...).

Les caractéristiques de la sécurité primaire ont d'abordété prises en compte par les constructeurs, parce qu'il estnécessaire qu'une automobile soit capable de rouler dans desconditions acceptables d'adéquation à la route. Les construc-teurs français, en particulier, ont eu le mérite de développerdes secteurs de recherche avancée en dynamique du véhicule. Lesbureaux d'étude de Citroën par exemple ont développé à grandeéchelle la traction avant qui s'oppose à la traditionnelle"propulsion arrière" caractéristique des véhicules américainsmais aussi des Renault, Peugeot et Simca d'il y a vingt ans.La question de la sécurité primaire est celle de la conception ;les constructeurs français conçoivent des véhicules généralementpetits, plutôt rapides, économiques, adaptés au réseau routierfrançais, à la conduite urbaine et aux habitudes de conduitedes conducteurs."

Ailleurs, aux USA par exemple, on préférera les véhiculeslourds et confortables à boite automatique, à propulsion arriè-re et on se satisfera d'un système de suspension à lame et defreins à tambours.

Jusqu'à un certain point, dynamique et sécurité font bonménage : la suspension hydropneumatique et les freins à disquesavec régulateur de freinage améliorent la tenue de route et

" on admet que. LeM condu.ct.ewUi finançait, iont tAe& &-id&?.eA aumodule, ou'-iti LjubLti&ent habitueltement, ce. quÀ. au.gmz.nte. con-hi.deAableme.nt V-LneAtle. du pcuic. En fieva.nc.hu, on a. pu AZ-pnoaheA à C-iXxo'én de. concevoir, d u modzlejs que cAé.aÂ.e.nt anAtyte. de. conduite, ii. paAtA.cviPA.eji auz ".evAi cti.e.ntM ne. pou-vai.ent plui changeA de.

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accentuent la confiance du conducteur dans la fiabilité de sonvéhicule. Réciproquement, ces dispositifs sont susceptiblesd'induire le pilote à outrepasser sa compétence de contrôledu véhicule. La sécurité primaire est ambiguë dans la mesure oùelle contribue à améliorer les performances du véhicule et fina-lement, S le faire échapper au conducteur.

Bien comprise elle améliore cependant considérablementle niveau de sécurité " ; c'est le cas notamment du freinage etdes pneumatiques. Dans le domaine du freinage, les recherchesont acquis un haut niveau expérimental et des dispositifs telsles freins anti-bloquants ont pu être mis au point. Ce disposi-tif n'est pas généralisé sur les chaines de production et doncsur les véhicules, les constructeurs y opposant l'argument ducoût. En revanche, des dispositifs adjacents, tels le doublecircuit de freinage sont plus répandus, mais limités en Franceen général aux véhicules haut de gamme ou aux poids lourds.Le problème du pneumatique est une donnée déterminante de ladynamique automobile. Les fabricants, comme Michelin, of-frent du matériel performant au point de vue de l'adhérencelongitudinale (au sol) et de l'adhérence transversale (en vira-ge) ; le phénomène de l'hydroplanage est aussi particulièrementétudié. Mais là encore on peut se demander jusqu'à quel pointces techniques sophistiquées (la carcasse radiale, les pneus àcrampons) servent univoquement la cause de la sécurité. Dans lapublicité, par exemple, la question de l'adhérence de telle outel-le marque de pneumatique est traitée comme une catégorie de

performance, comme un atout supplémentaire apte à aider le con-ducteur à se tirer d'un mauvais pas (freinage d'urgence, déra-page contrôlé). Mais toute l'ambiguité des messages est liéeau spectaculaire du presque accident : à tenter le diable...

Dans un passé encore proche, les constructeurs disso-ciaient volontiers les performances dynamiques des normes desécurité, ces dernières étant plutôt assimilées à une faussesécurité, la vraie étant la dynamique du véhicule. Les cons-tructeurs ont d'ailleurs longtemps refusé d'envisager que leurproduit pouvait être accidenté, A l'heure actuelle, les dispo-sitifs de freinage, de suspension etc,.. sont présentés commesatisfaisant à la fois la dynamique du véhicule, donc ses per-

c' ut, en qu.el.quz hoKte., le. COQJJLH. du débat. Lu conAtruicteuAi,tie-huAznt toujoute d'wvÂAageA ce que LexxK ctie.nt facUX de lean.produit. Il n'y a. pa& pan. exemple, d'école, do. conduite, finan-cée, pan leAcow>tJvxc£euAA, VaphîU^vznte. poKte. ix.nA.queme.nt i>ufiV entKeAJten du véhlcxxJle..

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fonnances, et les besoins de sécurité."

Une marque comme Volvo s'est, en revanche, beaucoup plusintéressée à la sécurité secondaire, et en a presque fait sondomaine réservé, domaine d'ailleurs peu fréquenté, i l y a enco-re quelques années par les constructeurs français. Pourtant,la sécurité secondaire (ou passive) s'inspire d'une préoccupa-tion strictement liée à la protection des usagers en cas dechoc. En principe les dispositifs de sécurité secondaire ne par-ticipent pas à l'univers des performances de l'automobile, niau plan dynamique ni au plan mécanique ; i ls ont pour but d'as-surer la sécurité des passagers et des autres usagers de laroute, surtout les piétons, les cyclistes et motocyclistes.

Une des.règles en ce domaine est l'alliance d'un habita-cle indéformable et d'un système de rétention évitant les chocssur l'habitacle et donc les traumatismes qui s'ensuivent, notam-ment les traumatismes cranio-cérébraux.

En revanche, les parties externes du véhicule, l'avant etl 'arrière, sont réalisées dî manière à amortir, encaisser leschocs. Les pare-chocs doivent être conçus de façon non-agressi-ve vis à vis de l'extérieur, les parties tranchantes ou poin-tues supprimées. Le système de rétention le plus couramment ut i -lisé est la ceinture de sécurité à trois points d'ancrage.A l'heure actuelle la réglementation exige que les automobilessoient équipées de ceintures de sécurité, pas nécessairementà enrouleur sur les sièges avant,et de ceintures de même typeou sous-abdominales pour les sièges arrière. L'idée est d'amar-rer les passagers au siège. D'autres systèmes de rétention sonttestés à l'ONSER, notamment comme le sac gonflable qui n'offre

dailleurs pas toute satisfaction en cas de choc latéral.""

" "11 &aut donc comtateA en France une. quotité. gé.néAale. élevée,de. la tenue, de njoute. et •&'attendue, à une. amtllonatlon KeiaJUL-vemznt faible, à l'avznln., lej> com>tmictexuu> finançali ayantdéjà laKgement utilisé l'am,enal du moye.ni de la tic.kni.que.autamobJJLe. pouh. KépondKe. aux goûtt> et aux buolni du utLll&a-teunj,, ce.cl. i'étant d'aÀJULeuKt, ^ôJjt au pnÀx d'une, iopkiiti-catlon et d'un août plut, élevé, de. la. voltunz".M. SEZNC [Régie. Renault) : SéavUté. pKmaÀJte.. Le* c.om>tn.uc-teunh j$ace aux pJwblzmeA de èécuxité. Revue de. la SI A [Socié-té du ingénleuAi de. l'Automobile.) n" 12; Vécembfte. 1972.

" : : M. PEJ&\MMES, R. QUINCy. la. pn.ote.ctA.on pan. &ac gonflable..0NSER - 'Cahlex d'étude, n" 37. Juin J976. Le6 coni>tA.ucteuA6•4e iont auA&l penché* Aénleuu>eme.nt i>un, la question, le&compte.n.endiiide. ceAtalm de. eu txavauxt>ontdonnée dan& le. n" 12,19.72, de. la ftevuz de la ST\ [op. eût).

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Les dispositifs de sécurité secondaire sont nombreux maisceux qui ne sont pas associés à une réglementation (ceinture desécurité, protection du conducteur par rapport aux organes dedirection, résistance des serrures et charnières des portes,vitrage de sécurité, interdiction des parties pointues ou tran-chantes) sont en priorité installés sur des véhicules hauts degamme, ou sont disponibles en option. C'est le cas notammentdes pare-brise en "verre feuilleté", du renforcement de l'habi-tacle aux chocs latéraux, de la colonne de direction télêscopi-que, du matelassage des dossiers des sièges avant pour protégerles passagers à l'arrière, etc..

Ainsi, ce qui n'est pas inscrit dans la réglementationn'est pas obligatoire pour les constructeurs et en bénéfi:-cient seulement les acheteurs de véhicules haut de gamme.

Il est cependant difficile d'opposer strictement sur leplan de la sécurité, les véhicules haut de gamme aux véhiculesbas de gamme, notamment en ce qui concerne la sécurité primaire.Tout d'abord parce que des véhicules bas de gamme peuvent êtremieux réussis au plan de la dynamique que des véhicules haut degamine. La Renault 5 par exemple, est réputée pour avoir unetrès bonne tenue de route, ce qui n'est pas le cas de la R 30."D'autre part, il est difficile d'opposer sur le plan de la sé-curité une R 4 par exemple à une R 30 parce qu'avec la puissan-ce CV de la R 4 une carosserie de R 30 serait impensable. Lesperformances entre les véhicules haut et bas de gamme sont biendifférentes et appellent des dispositifs différents. Les freinsâ tambours sont sans doute bien adaptés à une R 4 ou à une 2 CVCitroën ; d'autre part, la mise au point de freins à tambourspour les haut de gamme reviendrait beaucoup plus cher auxconstructeurs que l'équipement en freins à disques. On pourraremarquer que le système de suspension de la R 4 est à barre detorsion alors que la R 30 est munie de quatre roues indépendan-tes et de ressorts hélicoïdaux, mais les Porsche ont aussi unesuspension à barre ! Sur les véhicules haut de gamme il estplus facile pour les constructeurs d'augmenter la sécurité se-condaire puisque les structures, d'une manière générale, sontplus solides, le poids plus élevé et la tôle renforcée. Il estdonc probablement plus coûteux, proportionnellement, d'augmen-ter la sécurité des petits véhicules. De même, une ceinture desécurité sur une 604 coûte le même prix qu'une ceinture de 104mais elle est proportionnellement moins chère.

paA exmplz l'Automobile, n" 372 juin ï977.

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Finalement, le point capital est probablement l'àgressivi-té des gros modèles. Effectivement le prix payé va de pair avecune meilleure chance de s'en tirer en cas de collision.(Ce point sera abordé au paragraphe 3).

Quoi qu'il en soit, s'il y a un net progrès en matièrede sécurité des automobiles, ce progrès est distribué relati-vement inégalement en fonction de la catégorie des véhicules.

Mais ce n'est que récemment que l'Administration s'estpréoccupée d'une manière globale et systématique de l'amélio-ration de la sécurité des automobiles : le Programme Finaliséde Sécurité Routière en est à l'origine.

2. LA GESTION ADMINISTRATIVE DE LA SECURITE DES VEHICULES :LA COMMISSION COQUAND.

Le Programme Finalisé de Sécurité Routière (cf. chapitreprécédent) comprend un sous programme consacré à la sécurité duvéhicule." Les opérations envisagées se rapportent à la sécuri-té primaire (éclairage, signalisation, freinage, visibilité) età la sécurité secondaire (aménagement intérieur et extérieur,comportement du véhicule en cas de collision, prévention durisque d'incendie, modification de la réglementation relativeaux pare-brises). Faisant suite à ces orientations, le Minis-tre du développement industriel et scientifique (FrançoisOrtoli) et le Ministre de l'Equipement et du Logement créent aumois de Novembre 1971 une commission sur la sécurité des véhi-cules dont la présidence est confiée à Roger Coquand, IngénieurGénéral des Ponts et Chaussées.

L'objet de la commission est de définir un programme d'é-tudes et recherches destiné à préparer une nouvelle réglementa-tion. La commission est composée des Directeurs des Administra-tions concernées (construction mécanique, routes et circulationroutière, IRT, ONSER, DGRST) et des représentants des construc-teurs et. des compagnies d'assurance.

La commission, dans ses travaux, se heurte d'emblée à unobstacle de taille : le manque d'études et donc de connaissan-ces sur les relations entre la conception des véhicules etl'importance des dommages, résultant des accidents.Le rapport entre conception du véhicule et accident reste in-certain.

:: C omnvc&sivucut Gé.néJicit au Plan - Ptiogwmt TlnodLué. de. Sêcu/ix-ti RouuUèJie.. Vlcmbie. 1971. p. 23.

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Le facteur humain occupe en revanche une position déter-minante dans la représentation que les membres de cette commis-sion se font des accidents de la route."

Les propositions de réglementation et de recommandationssont précédées d'un chapitre faisant le point sur les facteurstechniques de la sécurité primaire et sur les dispositifs desécurité secondaire. Du.coté de la sécurité primaire, la com-mission estime que d'une manière générale les éléments consti-tuant la tenue de route sont efficaces et fiables, le freinagepar le développement des dispositifs répartiteurs et les pneu-matiques par amélioration de l'adhérence. Dans ces conditionsla commission considère que l'amélioration de la sécurité pri-maire n'est pas d'ordre technique mais se rapporte aux condi-tions d'utilisation et d'entretien du véhicule. La question dela sécurité primaire est convertie en problème d'entretien etd'usage et donc déplacée du constructeur à l 'utilisateur.""

Aussi les prescriptions de la commission visent-ellessurtout à une meilleure information des utilisateurs sur lespressions de gonflage, la répartition des charges, les limitesde remorquage. La commission propose en outre l'adjonctiond'aides à la conduite (voyants lumineux de pression d'huile, dedegrés d'usure des plaquettes de freins, e t c . . ) de façon àfaciliter la tâche de conduite.

ss "L'action du pouvoirs pubticA, du industnleLb eX. du on.ga-nlsmu de. prévention s'exeAce. dam divans domatnu : l ln{in.as-tnuctun.e, le. véhicule, V organisation du se.couAS, le. componte-ment du conducteuA. Jnc.ontutableme.nt ce. deAnleA élément utcapital : lu dé^alltancu humaines sont l'un du fiacteuns U~sentlels du accidents et le. KuteAont en dépit de. tous lu ei~ionXs déjà {aljts et. Autant à ^alfie. poun amétlo AeA lu connals-iancu, VhablleX.é. et la monaJULté. du conducteu/u".WÀ.nu>te>ie. du développement induA&ileZ et AclentLfilquz. \hlnu>te.he.de VEquipement et du Logement. Rapport de la commlAAlon AUA laiéuuUté du véhlculu- Juin 1972 - p.).

"Alnàl, e.n ce qui conceAne la tenue de noute. et le ^ gl'améllonation néelte. de. la bécurujté nute. conditionnée pan.une. <t,e.nt>lbULu>atlon acenuz du utLtliateuAA aux nécu&ltéid'entxejtlen et de. iun.veAJULa.nce du véhlculu, qui devn.ale.ntpan. altleWU) eAJie utlti&éA exclusivement dam lu conditions

pn.ucnÂtu pan. lu con&tAucteiMA, et poun. luqueJLlu UU> ontété conçu*". RapponX de. la commission sun. la sécurité duvéhlculu. p. 1 0.

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La position de la commission est différente quant à la sé-curité secondaire. Elle propose en effet d'aménager et de com-pléter la réglementation sur deux points : la structure des vé-hicules et les dispositifs de rétention et de protection desusagers. Elle soumet un projet d'établissement de normes relati-ves à la résistance au choc des véhicules en se référant auxtravaux américains du NHTCA (National Highway Traffic SafetyAgency), en s'inspirant du cahier des charges américain, quifixent les "critères de blessures" qui rendent compte des tolé-rances humaines à un choc frontal à 50 km/h contre un mur.Quant aux dispositifs de rétention, ils devraient obéir auxmêmes normes.

Ces recommandations s'articulent à un programme d'étudeset recherches en biomécanique, mécanique des chocs, dynamiquedes véhicules, ergonomie de la tâche de conduite, psycho-socio-logie des usagers. Une grande partie de ces travaux seront as-surés par l'ONSER et les constructeurs, l'IRT gérant une ATP"sécurité du véhicule". Les dépenses prévues atteignent 99,3millions de francs. L'échéancier prévoit que l'application deces normes aux modèles nouveaux n'interviendra pas avant 1976et une seconde étape importante en 1980 au plus tôt.

Point important, la commission estime que ces mesures deréglementation augmenteraient le prix des automobiles de 4 à8 % pour les petites voitures, de 2,5 à 6 % pour les voituresmoyennes, et 1,7 à 5 % pour les grosses voitures. Les raisonspour lesquelles la mise en place de dispositifs de sécuritépour les petites voitures coûte proportionnellement plus cherque pour les grosses, ne sont pas explicitées.

Dans cet ordre d'idées, la commission considère pragma-tiquement que les bénéficiaires de l'accroissement de la sécu-rité des automobiles seront d'abord et surtout les acheteursappartenant aux classes sociales privilégiées seuls aptes,compte tenu de son coût, d'accéder à la sécurité routière, com-me leurs homologues de classe ou de revenus ont accédé à lasécurité accrue du transport aérien. Le rapporteur est en re-vanche pessimiste sur l'éventualité d'accession des classespopulaires non seulement â la sécurité routière mais à l'auto-mobile même." Finalement, la demande de sécurité est identifiéeà un frein à l'achat, qui pourrait déclencher un processuscatastrophique pour l'industrie automobile bien entendu maisaussi pour la motorisation des ménages.

!! d'une, pcuvt, on a eAtùné. que, la phi* qnande. AzainÂté. d u nou-veaux véhiculer commenceAalt à con&titueA une. -incLtcution d'a-chat paAticutiè.n.eme.nt i,em>-ible, au niveau- d u acketzuA& aù>éA,e.n d'aut/iu te>mu, qu'on a>uiiveAaÂX à "vcndte. la i>écxwl£é.".Pan. conùie., Il u t appanu -inéluctable, que. la. inaction la ,

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Le renchérissement des coûts de construction est supposé déter-miner le ralentissement de la motorisation des ménages à reve-nus modestes, l 'arrêt de l'expansion de la branche automobile,l'orientation des classes populaires vers les deux roues ou lesvéhicules d'occasion.

Les hypothèses pessimistes de la commission ne se sont pasréalisées mais elles mesurent le degré de résistance des cons-tructeurs et les hésitations de l'administration à réglemen-ter la sécurité des véhicules. Menace démesurée par rapport auxenjeux énoncés en termes de coût puisque de toute manière lahausse moyenne annuelle des prix de l'automobile est de l'ordrede 8 % . par ailleurs, pourquoi faire supporter aux petitsvéhicules l'essentiel de la charge financière, alors qu'il sevend de quatre à cinq fois plus de voitures bas de gamme (moinsde 6 CV) que de véhicules haut de gamme (+ 11 CV).""Position d'autant plus curieuse que, comme nous allons le voirdans le paragraphe suivant, les petites voitures sont moinsagressives que les grosses.

molnt> faontunée. du nouveaux acheteuhA potentleZi vefOvalt ionaccu&lon à VautomobiZe. nendue Impoalble ou ie/utit fietandée.du ^alt du KznchoJiUtiemtnt du automobltu {et du hait, peut-atte, de ta disparition du ptuA petltu d'entAe eJULu)."C ommliilon Coquand. op. cit. p. 4S.

"" Estimation du paxc automobiZe au lex janvleA de. chaque annéepan. puissance fil&cate ••

Source : Chambre Syndicale des Constructeurs d'Automobiles.

Voitures particulières— moins de 6 CV— de 6 CV à 10 CV...— 11 CV et plus

TOTAL V.P.C

1960

et com

2.0001.967

983

4.950

1965

mercialc

! 3.9903.2601.070

8.320

1970

S

5.1355.6101.115

11.860

1973

5.0457.6651.210

13.920

1974

4.9208.3201.380

14.620

1975

4.8508.8601.470

15.180

1976

5.0708.9601.490

15.520

Unité

1977

4.9809.6401.610

16.230

: milliers

1978

5.01010.2001.720

16.990

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3. LA SECURITE COMPAREE PAR MARQUE ET TYPE.

Une recherche de l'ONSER," publiée en 1978, montre assezclairement que les taux élevés de gravité externe sont le faitdes grosses cylindrées et que, en revanche les taux de gravitéinterne élevés sont le fait des petites.

Expliquons nous. Une des méthodes de mesure du risque estle calcul du taux de gravité des accidents, c'est-à-dire le nom-bre de conducteurs victimes graves rapporté au nombre de conduc-teurs impliqués dans les accidents. Les victimes graves internesd'une classe de véhicules sont les conducteurs tués ou blessésgraves conduisant une voiture appartenant à une classe ; lesvictimes graves externes d'une classe de véhicules sont lespiétons et les conducteurs extérieurs à cette classe, tués oublessés graves dans un accident impliquant un véhicule de laclasse. Les marques et types retenus sont des modèles de voitu-res de tourisme françaises de grande diffusion. (2 CV, Dyane,4 CV, Dauphine, Renault 4, 5, 6, 8, 10, 12, 15, 17 ; Ami 6 et 8,GS, ID, DS ; Simca 1000, 1100, 1300, 1500 ; Peugeot 203, 403,404, 504). Les données concernant les accidents proviennentdes fichiers SETRA (enquête 1969, 72, 74). Quel que soit letype de route, les véhicules dont le taux de gravité interneest élevé sont des véhicules de faible masse (2 CV, Dyane, R 4,4 CV Dauphine) ; ceux dont le taux de gravité interne est faiblesont des véhicules lourds (ID, DS, R 12, R 15, 504).Réciproquement, les taux de gravité externe sont élevés pourles grosses cyclindrées (ID, DS, 504, R ]6, R 17) et faiblespourles petites cylindrées (R 4, 2CV Dyane, Ami 6, 8 ; 4 CV, Dauphi-ne) .

Par ailleurs, et comme le montre le graphique 1, le tauxde gravité externe est une fonction croissante de la vitessemoyenne sur RNGC. Autrement dit, les voitures de forte cylindréesont plus dangereuses pour les autres usagers alors que cellesde petite cylindrée sont plus dangereuses pour leurs conduc-teurs. On peut en conclure que l'offre de sécurité est forte-ment différenciée selon le type de véhicule et encore ne compte-t-on pas dans ce calcul les voitures d'occasion.

MA . CAM80IS et H. FCX/TAINE.Etude, AUA la ié.cuAÀt& composite, pan. ma/ique. et type..ONSER - Hovembfiz 797S.

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Graphique n° 3 Taux de victimes externe en fonction de lavitesse moyenne sur RNGC (rase campagne etagglomération) pour l'année 1974.

taux de victimesgrave, externesur RNGC

• • 3 0 %

KSimca 1000

X2CV Dyane

_j

RS-R^O

X

104

203-4^)3404

204

Simca

R6

Am16-8

R16>R17

x R12-R15 -

1300-1500Dauphine

—1

iB-DS

n. 504

c0

km/h

60 65 70Vitesse moyenne

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4. CONCLUSION.

La sécurité des véhicules s'est progressivement amélioréeen France sous ,1'influence de la réglementation qui a défini unchamp jusque là relativement laissé à l'écart par les construc-teurs : la sécurité secondaire. Du côté de la sécurité primaire,c'est-à-dire de la dynamique du véhicule, les constructeurs ontsouvent soutenu, notamment à l'occasion des débats de la Com-mission Coquand, que leurs véhicules étaient fiables tant auplan de la tenue de route que du freinage ou de l'adhérence ausol.

Cette opinion s'articule étroitement à celle qui attribueaux utilisateurs des véhicules la principale responsabilitédans la cause des accidents de la route.

Les tentatives de normalisation de la Commission Coquandse sont heurtées à certaines résistances des constructeurs,lesquels, d'une manière générale, considéraient la sécuritécomme une prime, leur offre essentielle s'exprimant en termesde performance. Cette prime se différencie d'ailleurs souventselon les types, plus élevée pour les hauts de gamme elle a-tendance à. diminuer pour les petits modèles. Enfin, la compa-raison de la sécurité selon les types de véhicules démontreassez clairement la plus forte agressivité des gros modèles.

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CHAPITRE VII

L'OFFRE ASSURANTIELLE DE SECURITE.

LA PREVENTION ROUTIERE.

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Le développement de la mobilité automobile et la diffu-sion de masse de son instrument sont scandés jusque récemmentpar l'accroissement concomitant des accidents de la route.Dans ce contexte général, les assurances contre les accidentsd'automobiles permettent de lever un certain nombre de freins àla mobilité liés à la survenue des accidents.

Sur cette action les assurances ont constamment tenu undiscours institutionnel en termes de rôle social, d'agissementmoral et bienfaisant, de promotion de la prévention des acci-dents.

Nous voudrions observer ce qu'il en est de l'offre de sé-curité développée par les assurances, quelles sont les figuresque prend cette offre. Nous faisons l'hypothèse que les motiva-tions de cette action sont à rechercher dans la logique de laproduction et du développement automobile d'une part, et danscelle d'une institution particulière, les assurances, avec sescontraintes de gestion, de fonctionnement, de prospérité et depérennité.

Nous nous demanderons quel type d'inscription sur le corpssocial est réalisé par l'application de certaines figures del'offre. Nous en chercherons la trace différenciante, séparatri-ce, excluante, constitutive de normes sociales.

Après quelques données générales sur les sociétés d'as-surance, nous examinerons à propos de l'assurance obligatoirede la Responsabilité Civile des conducteurs, les encodages ins-titutionnels de la responsabilité et la mise en système ducorps, les bases idéologiques de la tarification, la personna-lisation des primes ou la désassurance, et enfin, un peu à partpuisqu'elle est devenue une institution en tant que telle, unappareil d'action de masse sur le facteur humain, la PréventionRoutière.

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1 - GENERALITES

A. BREVE HISTOIRE DE L'ASSURANCE AUTOMOBILE."

1. Origines.

L'assurance contre les accidents automobiles n'est pasnée avec l'automobile. Son origine plonge dans l'histoire del'assurance contre les accidents en général.

L'année 1819 a vu la création de sociétés modernes d'as-surance contre l'incendie, mais c'est en 1864 que fut créée labranche d'assurance contre les accidents.

Parmi les garanties diverses couvertes se trouve celledes conséquences des accidents de chevaux et voitures.

Quatre types de police décrivent ces garanties :

- La police n° 1, dite "police d'assurance directe" ga-rantit la responsabilité civile du propriétaire devéhicule pour les accidents causés à autrui par seschevaux et voitures.

- La police n°2, de contre assurance simple vise les ac-cidents causés par les tiers et mis à leur charge. Cet-te police sera plus tard abandonnée.

- La police n° 2/2, de contre assurance étendue, ajoute àla précédente les accidents provenant de la faute del'assuré pourvu qu'il y ait eu contact avec un autrevéhicule.

- La police n° 3, dite tierce, garantit tous les domma-ges matériels survenus aux chevaux et voitures.

L'assurance contre les accidents du travail, couverturedu risque professionnel se développe, réglementée par une loi

:: Notamment d'apizi P.J. RICHARP. H-iktolfie. dud'cUiiuACLnce. en France. Ed. de. V \n.gui. 7956.

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du 9 avril 1898, qui impute aux employeurs le paiement des pri-mes.

Le principe du risque professionnel admet que le travail-leur n'est pas responsable des méfaits du machinisme qu'il estobligé de subir et qui fait partie du patrimoine du chef d'En-treprise.

Cette assurance n'est pas obligatoire. Elle ne le devien-dra que par l'ordonnance du 4 octobre 1945 qui crée la SécuritéSociale. La loi du 30 octobre 1946 redéfinit la couverture durisque professionnel, et le 1er janvier 1947 les Sociétés d'As-surances perdent leur portefeuille d'assurances contre les ac-cidents du travail, (cf. p. 115).

2. Naissance de la prévention dans la branche accident.

L'application de la nouvelle loi de 98 entraîne la forma-tion de deux pratiques : la réparation et la prévention des ac-cidents du travail, dont les mécanismes vont s'appuyer sur lerecrutement d'un personnel ad'hoc, jeunes docteurs en droit,élèves des grandes écoles pour les travaux statistiques et comp-tables, jeunes médecins ou chirurgiens.

La réparation était inscrite dans les termes de la loi.La prévention ne s'imposait pas mais les assureurs y ont trouvédeux intérêts : "la prévention améliore le risque et elle lemoralise"."

Le patronat avait dès 1867 mis sur pied une premièreassociation pour la prévention des accidents du travail. Etvers 1900 de nombreuses associations tant régionales que natio-nales regroupaient plusieurs milliers d'industriels. Ces ins-titutions procédaient à des contrôles périodiques et récompen-saient les employeurs ayant contribué à réduire le nombre desaccidents dans leurs entreprises.

Les compagnies d'assurance trouvèrent dans ces instituétions le moyen naturel pour améliorer le risque professionnel.Elles incitèrent donc leurs assurés à s'affilier à ces insti-tutions de prévention.

On reviendra plus loin sur l'intérêt porté par les as-surances aux pratiques de prévention et sur l'action régulatri-ce qu'elles ont,

" P.J. RICHARD. Op.

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111

3. Création de l'assurance des véhicules automobiles.

Il n'y avait pas, à proprement parler, de nouveaux modèlesde contrats à établir : les assureurs accidents étaient habituésà l'assurance des chevaux et des voitures. Les Conditions Géné-rales des quatre contrats usuels s'appliquaient parfaitement àl'assurance des automobiles. La police de contre assurance sim-ple (police 2) fut bientôt abandonnée comme insuffisante, aussibien d'ailleurs pour la circulation hippomobile que pour la cir-culation automobile.

La jurisprudence en matière de responsabilité civile (art.1382-1384 du Code civil) était à peut près fixée.

L'intensité de la circulation ainsi que la vitesse des vé-hicules n'augmentèrent que progressivement et le tarif de l'as-surance de responsabilité civile des propriétaires de chevauxet voitures servit de base, au début, pour l'établissement dutarif correspondant s'appliquant aux véhicules automobiles.

Vers l'année 1903 furent publiés les premiers tarifs"automobiles" et les compagnies encouragèrent leurs agents àdévelopper cette production.

A l'intérieur de chaque compagnie d'assurances accidents,un service de statistique fut organisé pour recueillir les ré-sultats de l'expérience propre de la Société, mais contraire-ment à ce qui s'était passé pour les accidents du travail, onn'envisagea à aucun moment la mise en commun de ces premièresstatistiques.

C'est ce qui fit qu'au début, jusque vers 1906, les tarifsfurent assez différents les uns des autres. Mais bientôt certai-nes compagnies publièrent des tarifs très voisins les uns desautres, en tenant compte davantage des résultats financiers desderniers exercices. Signalons pour mémoire qu'en 1907 le nombrede véhicules immatriculés en France est d'environ 40.000."

4. Bases de la tarification.

Quelques années avant la guerre.de 1914, le Syndicat desCompagnies accidents avait réussi à obtenir l'accord de sesadhérents pour un tarif que chacun s'engageait à respecter dansla mesure du possible. Ce tarif établi par quelques statisti-ciens des Compagnies du Syndicat a été calculé avec les résul-tats d'expérience disponibles. Les bases de la classification

" la lévolation auutomobÂZe.. op. cet.

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adoptée (zone de circulation, usage, puissance du moteur) n'ontpas beaucoup changé jusqu'à ce jour.

"Depuis qu'on fabrique des voitures en série, la classifi-cation par marques et types de voitures serait de beaucoup laplus rationnelle, malheureusement des raisons d'ordre commercials'y opposent et il est à prévoir qu'il en sera toujours ainsi'!"Lorsque le commerce impose sa raison il n'est plus question demoraliser le risque.

(Ce n'est qu'en 1929 que le Bureau Central Français desSociétés d'Assurances contre les accidents d'automobiles seraorganisé et entreprendra de recueillir et d'utiliser les ren-seignements statistiques fournis par une vingtaine de sociétésdes plus importantes, auxquelles se joindront par la suite laplupart des autres).

L'augmentation progressive de la circulation automobile de1905 à 1914 entraîne un accroissement proportionnel du porte-feuille d'assurances "automobiles" mais les résultats annuelssont irréguliers, l'évaluation des réserves pour sinistres à ré-gler donne lieu à des mécomptes, la jurisprudence, encore malfixée, en l'absence de tout Code de la Route laisse une largemarge à l'appréciation des tribunaux, ce qui entraîne des sur-prises et ne facilite pas les évaluations. Les tarifs sontrelevés à plusieurs reprises ; la situation, encore très confu-se en 1912, commence à s'améliorer au moment de la déclarationde guerre,

5. Après 1914/1 ai 8.

Le développement industriel de la France s'est ralenti dès1920 ; l'exportation française défavorisée par la dépréciationde la monnaie, s'est heurtée à une vive concurrence étrangèredans presque tous les secteurs.

Cependant, entre les deux guerres, l'industrie automobilefrançaise se place et se maintient à la tête de l'industrie au-tomobile européenne.

En conséquence, et contrairement aux pronostics des assu-reurs accidents, l'assurance des risques de la circulation au-tomobile reçoit, après 1920, un développement plus rapide etplus important que l'assurance accidents du travail qui pour-suit normalement sa carrière en profitant de l'extension pro-gressive de la loi de 1898 à toutes les professions.

P.J. RICHKRD : hàito-Oiz d&s lni>tÂMxtiûYU> d'cuauAance..op. eût.

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Mais tandis que le tarif accidents du travail était adé-quat au risque, il n'en était pas de même du tarif de responsa-bilité civile automobile.

Le risque augmente d'année en année avec le nombre de voi-tures en circulation et l'accroissement de leur vitesse, maisles augmentations successives du tarif se révèlent toujours in-suffisantes pour les assureurs et n'ont d'ailleurs pas d'effetsur le portefeuille ancien dont beaucoup de contrats étaientsouscrits pour dix années. L'équilibre, qui n'a pu être atteintavant 1914, s'est trouvé encore beaucoup plus compromis aprèsla guerre. Chaque année le rapport des sinistres aux primesest en sensible augmentation : le maximum est atteint en 1923,première année de forte production de voitures de tourisme,avec une moyenne voisine de 125 % pour l'ensemble des compagnies.

Le syndicat des compagnies d'assurances contre les acci-dents décide que les contrats seront dorénavant tous résiliablesannuellement, ce qui supprime les commissions escomptées encoreen usage dans cette branche, et permet à l'avenir d'appliqueraux anciens contrats les modifications de tarif nécessaires.D'autre part, un tarif commun en forte augmentation est adoptéet son effet se fait sentir aussitôt. L'afflux d'affaires nou-velles permet de compenser en partie l'insuffisance de tarifi-cation du portefeuille ancien, et, dès 1924, le pourcentage dessinistres par rapport aux primes tombe en dessous de 100 %.

Vers 1930 l'équilibre commercial est atteint, c'est-à-direque la moyenne annuelle du rapport sinistres sur primes s'éta-blit dans le voisinage de 60 % ; la branche automobile peutalors se suffire à elle-même, accusant en général un léger bé"-néfice industriel, ce qui est inscrit dans la logique capita-liste de l'institution des assurances.

Le Secrétariat Général du groupement automobile commenceà recueillir les données des sociétés adhérentes pour entrepren-dre une statistique permanente, constamment tenue à jour, desaccidents de circulation et de leur coût. Le tarif est, en con-séquence, remanié périodiquement.

A partir de 1934, une statistique commune est entreprise.Les tarifs mis en vigueur après cette date résulteront des tra-vaux effectués par le Bureau Commun de Statistique.

6. La garantie illimitée.

Sous la pression de la concurrence étrangère et après delongues discussions, les Compagnies de l'Entente automobileadoptent en 1933 une nouvelle formule qui accorde ce que l'onappelle une garantie illimitée. La police "accidents du travail"a toujours accordé cette garantie totale des indemnités dues en

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vertu de la loi du 9 avril 1898. "L'industriel est garanti sanslimite de somme quand il s'agit d'accidents survenus à ses ou-vriers. Pourquoi ne jouirait-il pas de la même garantie quand ilcause un accident à un tiers au cours d'un déplacement en auto-mobile ?" "

En réalité les assureurs craignaient qu'en l'absence d'uneloi spéciale de réparation forfaitaire analogue à la loi du9 avril 1898 (loi que les assureurs "automobile" ont jusqu'iciréclamée en vain), les Tribunaux ne se montrent trop généreuxen fixant les indemnités dues en vertu des articles 1382 et 1384du Code Civil, quand le responsable serait assuré en "illimité".

Certains juristes, persuadés qu'en l'absence de textes li-mitatifs (dans certains pays étrangers il en existe), la répara-tion totale peut atteindre des montants dépassant les possibili-tés des Sociétés les plus puissantes et de leurs réassureurs,s'efforcent en vain de démontrer que "la promesse d'une garantieillimitée est non seulement impossible, mais illicite".

En vérité, ce qui peut se produire et ce qui s'est nro-duit, c'est que les appréciations diffèrent d'un Tribunal àl'autre, d'une Cour à l'autre. Mais une longue expérience amontré que peu â peu une jurisprudence s'établit à laquelletous les Tribunaux se réfèrent, et les bases d'appréciation(taux d'invalidité, salaires) s'uniformisent.

Aujourd'hui le mot "illimité" n'effarouche plus personne.L'adoption, à peu près générale dès 1934, de la clause dont ils'agit, n'a rien changé aux habitudes des juges et n'a entraînéaucune catastrophe financière. L'article 35 du décret du 12janvier 1939 a formellement autorisé l'octroi de la garantieillimitée et a mis fin par suite à toute polémique.

Pour calmer les appréhensions et permettre à tous sesmembres d'accorder cette garantie, l'Entente automobile a orga-nisé en 1933 un Consortium de réassurance réciproque, ou poolde garantie illimitée, qui, pour tout sinistre automobile à lacharge d'un adhérent, paie le surplus de 500.000 Francs. Le sys-tème de réassurance fonctionne au-dessus de cette somme, lestranches successives, y compris la dernière qui comporte l'il-limité, étant réassurées par des groupements de Compagnies dupool et par des Sociétés de réassurances.

En 1934, la Préservatrice inaugure l'assurance au kilo-mètre. L'assuré achète une garantie qu'il oaie en proportiondu nombre de kilomètres parcourus. "Celui qui roule peu, paie

:: P.J. RlckoAd. op. cit.

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peu".

Le contrôle de l'assurance automobile, réclamé par lesSociétés, depuis plusieurs années, est entré en vigueur en 1936,au moment où une amélioration des résultats avait été obtenue,par l'application du tarif commun, et aussi en raison de la di-minution d'intensité de la circulation due aux effets de la cri-se économique.

7. Après la Libération.

A la Libération l'Assemblée Constituante vote un ensemblede réformes de structure répondant à un programme établi par leConseil National de la Résistance. Ainsi se réalise la nationa-lisation des grands moyens de production. La loi du 25 avril1946 nationalise certaines Compagnies d'Assurances.

Mais déjà l'ordonnance du 4 octobre 1945 créant la Sécu-rité Sociale a enlevé aux Sociétés privées la gestion du risqueprofessionnel à partir du 1er jenvier 1947, ce qui réduit de40 % le total des encaissements des Compagnies d'assurancescontre les accidents.

Dix groupes de Compagnies anonymes et un groupe de Socié-tés à forme mutuelle sont nationalisés, tous groupes dont l'en-caissement dépassait le milliard de francs.

La même loi créée également un Conseil National des Assu-rances et une Caisse Centrale des Assurances.

Les sociétés du secteur resté libre sont tenues de verserune part de leurs primes à la Caisse Centrale des Assurances.

Le Conseil National des Assurances parmi d'autres attri- •butions doit étudier et proposer toutes mesures propres à dimi-nuer la gravité des risques et à organiser la prévention.

La perte de l'assurance contre les accidents du travail(accidents agricoles exceptés) et, à peu près à la même époque,la renaissance de l'industrie automobile française et l'augmen-tation rapide du nombre des véhicules en circulation, ont en-trainë une réorganisation des Sociétés d'assurances contre lesaccidents, dont la branche automobile est devenue de beaucoupla plus importante.

C'est à ce moment que fut créée la Prévention Routièredont nous parlerons plus loin (cf. paragraphe : La réduction dufacteur humain par la Prévention Routière, p.161 )

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Le fonds de_garantie :

En 1951 eurent lieu diverses tentatives pour instaurerl'assurance de responsabilité civile des automobilistes, obliga-toire, pour éviter que des victimes d'accidents soient dansl'impossibilité d'obtenir réparation en raison de l'insolvabili-té des responsables non assurés.

Mais c'est finalement un fonds de garantie qui fut créé,applicable le 30 juin 1952. Le fonds se charge de payer lesindemnités allouées ou convenues dans le cas où le responsabledes dommages demeure inconnu ou se révèle totalement ou partiel-lement insolvable.

La carte_verte :

Le développement international des déplacements automobi-les se heurte au problème de la couverture des risques lorsquel'automobiliste se trouve à l'étranger. Les organismes d'assu-rance mettent au point un réseau de correspondants étrangersqui répondent des assurés lorsqu'ils sont sur leur territoire.

L'assurance de responsabilité civile est rendue obliga-toire par la loi du 27 février 1958.

On notera encore que les faits marquants des dernièresannées ont été l'établissement en 1968 d'un système de conven-tions entre les sociétés d'assurances dont celle d'Indemnisa-tion Directe des Assurés (IDA) qui a vu l'introduction et lagénéralisation du Constat Amiable pour les accidents matériels.C'est en 1970 que fut imposé un système de Bonus-Malus destinéà personnaliser les primes de l'assurance. Cette imposition avu naître différentes modalités de Bonus-Malus, selon les com-pagnies d'assurance. En 1976 les pouvoirs publics intervinrentà nouveau en introduisant une clause-type définissant un seulet unique régime de Bonus-Malus valable pour toutes les compa-gnies d'assurance.

B. QUELQUES DONNEES SUR LES SOCIETES D'ASSURANCES.

Le secteur des assurances occupe une place non négligea-ble dans l'économie nationale. Nous avons noté dans le paragra-phe précédent la place qu'il occupait avant le conflit de 39-45.

On peut situer sur des données plus récentes la positionque ce secteur occupe maintenant. Si l'on compare la productionintérieure brute et les primes émises par les assurances entre19-60 et 1977, on constate d'abord que partant d'un indice 100en 19-60, les assurances atteignent l'indice 943 en 1977, tandisque la PIB est à 688. Le développement des assurances est plus

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rapide que la PIB sur cette période.

On peut également observer la placëSd'è.-ia branche automo-bile dans le secteur assurances. Elle s'esf accrue sensiblementplus vite que l'ensemble du secteur. Vers 1973 elle est rempla-cée par la branche Vie, dans l'accroissement continuel du sec-teur.

Tableau n° 11 : Evolution du P.I.B et des assurances entre 1960et 1977.

Base 100 en 1960

ANNÉE

196019611962196319641965196619671968196919701971197219731974197519761977

ASSURANCE(primes émises)

Ensemble

100112124142169195219247277317364409472541615716824943

dontautomobile

100111119145179211241273306355394434493562615674752842

PRO-DUCTIONintérieure

brute

100109121136150161176190206237264293329374430IIIIIIII!

PRODUITintérieur

brut

IIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIII

288321361410470534614688

II est intéressant de comparer en valeur absolue le mon-tant des primes émises par les assurances avec la P.I.B. et leschiffres d'affaires de quelques branches.

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En milliardsde francs courants

1970 1975 1977

variationmoyenneannuelle

75770 77/75

Produit intérieur brut..

Consommation finale desménages

782,6

469,1

1.450,9

895,8

1.870,3

1.157,1

13,1

13,8

13,5

13,6

CHIFFRE D'AFFAIRES DE QUELQUES BRANCHES D'ACTIVITE (hors taxes)

Construction automobile (ycompris pièces détachées)..

Construction électrique etinformatique

33,4

30,6

64

65

,3

,3

95

85

,6

,7

14

16

,0

,4

21,9

14,5

ASSURANCE (primes directes émises en France nettes d'annulation)

Ensemble

Dont automobile.

26,3

11,3

51,8

19,3

67,9

24,1

14,5 14,5

11,3 ! 11,8

Tableau n° 12 : Comparaison du P.I.B., du C.A. de quelques bran-ches d'activité et des assurances.

De 1970 à 1977 le PIB est passé de 782,6 à 1870,3 MF,le chiffre d'affaire de la construction automobile passe de33,4 à 95,6 MF. Quant aux primes de la branche assurance auto-mobile, elles ont augmenté de 11,3 à 24,1 MF. Ces chiffres con-firment le poids économique important du secteur assurance.

Si l'on s'intéresse maintenant aux grandes masses inter-nes aux assurances automobiles on peut considérer la réparti-tion des primes émises selon les statuts juridiques des socié-tés d'assurances, ou bien encore selon les types de garanties.

Les sociétés d'assurances se distinguent en quatre sta-tuts juridiques : les sociétés nationalisées, les sociétésanonymes, les sociétés à forme mutuelle et mutuelles, rémuné-rant des intermédiaires ou n'en rémunérant pas. Le tableau sui-vant indique la répartition des primes entre les différentesformes de sociétés et leur évolution de 1966 à 1977 selon lescatégories.

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Tableau 1 3: PROPORTION % DU MONTANT DES PRIMES ÉMISES EN AUTOMOBILE SUIVANT LA FORME JURIDIQUEDES SOCIÉTÉS DE IKt A 1174 (Mutuelles Agricoles comprises).

Source : Direction dis Assurances du Ministère de l'Économie et des

ANNÉE

196619671968196919781971197219731974197519761977

19661967196819691S701971197219731974197519761977

196619671968196919701971197219731974197519761977

SOCIÉTÉSNATIONALES

25,824,324,924,725,526,026,226,025,825,724,6 •24,8

22,527,527,027,325,825,926,627,127,226,726,026,4

25,125,125,425,425,626,026,326,426,326,125,225,4

SOCIÉTÉSANONYMES

38,437,735,234,535,935,135,435,935,234,633,932,6

35,335,638,337,636,735,034,234,233,232,831,930,5

Finances.

SOCIÉTÉS A FORME MUTUELLE ET MUTUELLES

Rémunérant

RESPON11,611.811,411,010,010,210,110,310,110,210,310,7

Ne rémunérant pasd'intermédiaires

Mutuelles Agricoles

5ABILITÉ CIVIL5,57,17,67,66,86,46,26,06,25,85,95,9

DOMMAGES9,69,5

10,310,011,211,411,311,210,810,710,911,4

9,14,62,82,76,86,66,46,26,15,85,65,6

Autres

E10,711.813,615.315,416.116,015,616,617.419,120,1

16,416,314,916,213,715,615,916,117,418,520,220,8

RESPONSABILITÉ CIVILE + DOMMAGES37,737,236,035,336,235,135,035,334,533,933,131,8

11.211,211.110,8

10,410,610,510,610,410,410,510,9

6,36,56,36,36,86,46,36,16,15,85,85,8

11,912,914,015.514,815,916,015,816,917,819,520,4

SOCIÉTÉSÉTRANGÈRES

8,07,37,36.96.46.26,16,26,16.36,25,9

7.16,56,76.25,85,55,65,25,35,55,45,3.

7,87,17.26.76,26,05,95,85,86,05,95,7

TOTAL

100,0100,0100,0100,0100,0100,0100,0100,0100,0100,0100,0100,0

100,0100,0100,0100,0100,0100,0100,0100,0100,0100,0100.0100,0

100,0100,0100,0100,0100,0'100,0100,0100,0100,0

•100,0100,0100,0

Ces longues séries de chiffres nous révèlent plusieurséléments intéressants. La part du marché de l'assurance autooccupée par les sociétés étrangères se réduit sensiblement, del'ordre de deux points, sur la dernière décade pour venir àenviron 5,7 %.

Pour ce qui concerne les sociétés françaises, les socié-tés nationales maintiennent leur position à environ 25 % dutotal. Les sociétés anonymes sont en nette régression, passantd'environ 37 % à 32 %. Parmi les mutuelles, celles qui rémunè-rent les intermédiaires se tassent légèrement autour de 11 %,de même la mutualité agricole tourne un peu en dessous de 6 %.Il reste les autres mutuelles qui ne rémunèrent pas d'intermé-

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diaires qui voient leur position passer d'environ 12 % à un peuplus de 20 %.

Cette période récente de 10 années est donc marquée parun développement important des mutuelles pures et au détrimentd'abord des sociétés anonymes et ensuite des sociétés étrangè-res.

Les garanties offertes par les assurances comportent laresponsabilité civile, les dommages collision, les dommagestous accidents, le vol, l'incendie et le bris de glaces. Lesparts prises par chacune de ces garanties sont indiquées dansle tableau suivant. La comparaison des répartitions en 1971 et1975 nous indique que la responsabilité civile diminue de 74,7à 71,2 %, et les dommages collision de 10 à 7,8 %. En revanche,les dommages tous accidents s'accroissent de 10,5 à 14,5 %. Lastructure des montants payés par les assurances révèle donc undéport vers le "tous risques". On remarquera également l'ac-croissement du poste "vol" qui passe de 1,5 % en 1971 à 2,9 %en 1975.

Tableau n° 14 : Montants payés par les assureurs du GTA selonles garanties (1975).(sondage automobile 1975).

GARANTIE SINISTREE

Responsabilité civile

Dommages collision

Dommages tous accidents

Vol

Incendie

Bris de glaces

TOTAL

Montant

EN FRANCS

47.814.053

5.220.432

9.763.011

1.932.830

342.537

2.080.780

67.153.643

: payé

EN %

71,2

7,8

14,5

2,9

0,5

3,1

100,0

RAPPEL1971EN %

74,7

10,0

10,5

1,5

0,6

2 >J

100,0

Deux indices d'activité des assurances nous sont encoredonnés, d'abord par le nombre de dossiers de sinistres ouvertsqui est à 3,5 millions en 1961, s'accroit et culmine à 10,8 mil-lions en 1969, chute à 9,8 millions en 1970 puis semble se si-tuer autour de 9,3 millions dans les dernières années, ensuitepar le rapport des sinistres aux primes qui oscille de 73 à 99%.

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Tableau n° 15

121

Primes acquises, nombre de dossiers, montant dessinistres et rapport des sinistres aux primesde 1961 à 1977.

EXERCICEde survenanc»

19611962196319641965

19661967196819691970

19711972

1973197418751S7t1977

PRIMES ACQUISES•n millitr» de francs

2.742.6253.112.0833.774.9904.715.6115.633.254

6.162.7767.064.0748.037.7959.320.535

10.265.001

11.360.75512.795.708

14.973.18416.503.39518.191.19220.368.16222.435.386

NOMBRE DE DOSSIERSde sinistres ouvert*

par le*Sociétés d'Assurances

3.592.8014.502.0835.395.7546.035.7197.029.487

8.264.2408.907.865

10.021.09610.801.9449.872.309

9.514.1479.472.108

9.541.6939.112.2009.260.8849.437.6159.373.274

MONTANTDES SINISTRES

an milliers de francs

2.006.8042.609.5973.289.1464.012.248 •4.694.548

5.062.0935.772.4986.927.4888.333.3079.163.662

10.492.03711.588.507

12.411.12713.495.57615.935.19619.785.89122.228.807

RAPPORT (•)des sinistresaux primes

73,283,987,185,183,3

82,181,786,289,489,3

92,4 r90,6

82,981,887,697,199,1

Source : Direction des Assurances du Ministère de l'Économie et des Finances.

Note : Le montant des sinistres est donné brut de recours (paiements + provisions pour sinistres en cours d'unexercice donné).

Les renseignements de ces tableaux sont ceux observés à fin 1965 pour les exercices 1961 à 1965, à fin1970 pour les exercices 1966 à 1970, à fin 1972 pour les exercices 1971 et 1972, à fin 1977 pour lesexercices 1973 à 1977.

C. L'ORGANISATION DES SOCIETES D'ASSURANCES.

Dans la ligne de nos préoccupations on relève dans l'or-ganigramme des sociétés d'assurances plusieurs services intéres'sants.

- Un département financier qui a pour fonction de gérer lestrès importants capitaux de la société. Ces capitaux, place-ments mobiliers et immobiliers, représentent la solvabilitéde la société.

Un département des études statistiques pour la prévision dessinistres à venir, le calcul du montant des réserves nêcessai^res, la fixation du taux de primes pour préserver l'équilibrefinancier, prévoir les liquidités nécessaires.

Un département production qui a pour rôle de rechercher etétablir les nouveaux contrats.

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- Un département d'expertises.

a) médicales : la réparation des dommages corporels suppo-se l'évaluation de ceux-ci. Ce soin est confié à un réseau demédecins experts. Ce service médical dépend de la direction dupersonnel de la société d'assurance.

b) Techniques : pour l'évaluation des dommages matérielsles sociétés disposent d'un réseau d'experts techniques exté-rieurs, dont les avis peuvent être soumis au chef du serviced'expertises de la société.

- Un département surveillance du portefeuille : Lorsqu'un assurédéclare un nombre anormal de sinistres, une décision peut êtreprise de résiliation ou d'augmentation de prime, "nécessitéepar la bonne gestion de la société"."

- Un système de réassurance qui répartit sur l'ensemble des so-ciétés d'assurance les risques couverts, consolidant l'équi-libre de chaque société.

Les sociétés d'assurance contre les accidents automobilesont connu en gros deux époques :

. Avant 1945 elles ont vécu de la prospérité de la brancheaccidents du travail, tout en s'organisant par l'établissementprogressif d'organismes, de doctines et de savoirs communs.

. Après 1945 et la perte des accidents du travail, labranche automobile se retrouve seule et contrainte d'élaborerdes instruments destinés à prendre en compte le problème desaccidents, hiatus grave dans le développement de la mobilité.Ainsi se succèdent la création de la Prévention Routière, laresponsabilité civile obligatoire, la convention d'indemnisationdirecte des assurés, la personnalisation des primes.

Les sociétés d'assurances occupent dans l'activité natio-nale un rôle important. Le montant des primes émises par labranche automobile est en 1977 le quart du chiffre d'affaire dela construction automobile ; ce sont des sociétés financièreset commerciales, destinées finalement à l'exception des mutuel-les, à faire du profit comme toute entreprise capitaliste.

J.P. BMUER. L'cniu-fianaz automobile.. L'A-t/joi 196H.

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2 - LES BASES IDEOLOGIQUES DE LA TARIFICATION

Pour reprendre la définition donnée dans l'étude RCB de1969, l'objet de la tarification de l'assurance automobile estde définir le prix, certain, d'un service dont la livraison estincertaine puisque liée à la survenance d'un sinistre.

Au départ le rôle des assurances est bien de réaliser unecompensation générale des charges des accidents entre tous lesassurés groupés en mutualité. La tarification opère une mise ensystème de cette mutualité. On définit un espace probabilistedans lequel sont repérées des catégories d'assurés et de ris-ques. Ce repérage procède par différenciation des fréquencesd'accidents.

Les assurances ne réalisent donc ni une mutualisation desrisques, ni non plus une adaptation des primes aux risques ré-els, mais par le biais du tarif, elles disposent un relief in-termédiaire où les assurés sont placés.

Les critères qui président à la constitution de ce reliefsont très hétérogènes. Il s'agit :

- de la commune de résidence,- du véhicule,- de l'usage,- du conducteur.

La commune :

II est tenu compte de la commune habituelle de résidencedu conducteur selon des catégories de zones géographiques àl'intérieur desquelles plusieurs crans de tarif sont donnés se-lon la taille de commune. C'est ainsi que les résidents en zonerurale bénéficient des tarifs les plus favorables et que lesconducteurs résidant dans la région Lyonnaise ou Marseillaisesont frappés des tarifs les plus forts, les uns se trouvantdans une zone à risque faible et les autres dans les zones oùles risques sont les plus élevés selon les calculs opérés.

Le véhicule :

II est exclu depuis longtemps pour des raisons commercia-les de prendre en compte la marque et le type des véhicules.Aussi les automobiles sont-elles réparties en neuf groupes.Ces groupes ventilent les véhicules selon les modèles en circu-lation.

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Tableau n°16 : Montant moyen des primes selon la garantie couverte etle groupe du véhicule.

5S005400

5300

5200

5100

50004 900

4800

4700

460C

45004400

4300

4200

4100

4000

3900

. 3800

3700

3600

35003400

3300

3200

3100

30002900

2800

2700

260025002400230022002100

20001900

igoo17001600

1500140013001J001100

1000900eoo700

^=-A7^7 / -

~z~

=< ^ ^/ 7̂ ~

V /s /

JJ^- =* u. 2*

s9* C

:/ /

* , , s •— -^ \-^^

-+ ^» -^ — *

/ /

/ / .X

s _</\s

Responsabilitécivile

Tiares collisionavec franchi»*

Tierce cols, franc- Tous risquesou tout risquas av. franc, uns franchisa

• 2 cv Citroën elFranchise 200 F.

GROUPE Aspéciale

GROUPE B• Dyane 6 et Méhari • Renault 4L et5L • Fiat 600 et 126.Franchise 200 F.

GROUPE C• Peugeol 104 Berlino • Renault 5 TL.6 11100) et 8 • Simca 1000 et LX •Fiat 650 • VW 122. 1300 et 1302.Franchise 250 F.

GROUPE D.•Austin 1000 • Autobianchi A 112 •Oaf 55 et 66 Berline • Citroën GS 1015• Peugeol 204 • Renault 12 • Sim-ca 1100 • Fiat 127 el 128 • FordEscorl 1100 • Opel Kadett 1100 •VW 1303 et 1302 S.Franchise 250 F ou 500 F selon lesvéhicules.

GROUPE E• Simca 1307 GLS • Renault 5 LS etTS, 12 TS el 16 L et TL, 15 TL • Simca1100 S. GLS. 1301. 1501 • CitroenGS 1220. ID 19 • Peugeot 304 et 404• Fiat 124, 128 coupé • Opel Ka-dett 1200 et Ascona 7. Mania • Ford Gra-nada 1700, 17 M et 1500, Cortina 1500.Consul • Auslin 1300 et 1300 GT • VWPassai 1300.Franchise 350 F ou 500 F selon les vé-hicules.

GROUPE F• Simca 1307 S et 1308 GT • CitroënOS 19. 10 20 • Peugeot 304 S et 504• Ford Escorl 1300 GT • VW Golf.S. L et LS • Opel Ascona LS el GLS• Fiat 124 S.Franchise 350 F ou 500 F selon lesvéhicules.

GROUPE G, • Cilroén D Super • Peugeol 504 injec-

tion • Renault 15 TS el 17 TL • Simca160 GT et 180 • Fiat 132 • Ford Tau-nus 1600 GT • VW Passât 1500 TSFranchise 500 F.

GROUPE HB Peugeot 604 • Renault 30 • CitroenDS 23 carb. • Renault 17 TS • Audi100 GT el GL • Ford Capri 2300.Franchise 750 F.

GROUPE I• BMW 320 et 2002 Tl • DS 21 inj.• Peugeot 504 coupé el cab. • Alla-Ro-méo 1750 • Ford Granada 2600.Franchise 1.000 F.

Le montant de la franchise correspondà chaque groupe de voitures.

Source : Traffic n° 18 - Mars 1976

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Sur le graphique précédent on a mis en ordonnée le montantdes primes et en abscisse quatre types de garanties rangées selonleur étendue. Les groupes classant les véhicules sont indiquéspar des lettres de A à I. La légende montre que les véhiculessont rangés des moins puissants (2 CV Citroën) en A, aux pluspuissants (Ford Granada 2600) en I. Les montants des primesd'un mime groupe sont joints. On note que la hiérarchie desprimes se conserve à travers les garanties.

L'usage :

Les catégoreis d'usage sont scindées en deux classes :L'une réfère à la finalité des déplacements : promenade, trajetdomicile-travail, affaires.L'autre classe mélange des données géographiques : rural/urbainet des données socio-professionnelles : salariés/agriculteurs...

Derrière cette catégorisation ancienne se profile unevolonté d'isoler des groupes sociaux et de respecter la hiérar-chie sociale. On ne mélange pas les travailleurs, les hommesd'affaires et les paysans.

Le conducteur :

II est introduit par plusieurs variables : âge, sexe, si-tuation matrimoniale, ancienneté du permis de conduire, antécé-dents. Ces variables entraînent un tarif plus élevé lorsqu'ellesprennent isolément certaines valeurs ou lorsqu'elles se combi-nent entre elles.

Le tableau suivant" donne une idée de l'incidence desdifférentes hypothèses aggravantes sachant qu'un point repré-sente une augmentation d'environ 25 % du tarif de base le plusfaible.

a3<D

-sH

Conducteurs

Conducteurs n'ayantpas été assuréau cours des 2années précédentes

Age

+ 25 ans- 25 tins- 25 ans- 25 ans- 25 ans- 25 ans

25 ans- 25 ans- 25 ans

+ 25 ans

Anciennetédu permis

- 2 ans+ '2 ans+ 2 ans* 2 ans-i- 2 ans- 2 ans- 2 ans- 2 ans- 2 ans

+ 2 ans

Sexe

saMFMFMFHF

Marié

s Incideoui

ouiouioui

Célibataire

ice

ouioui

ouioui

sans Incidence

•• ••> •• • •• •• ———

SouAce. : >izvu.z Tna^lc. n" 77. T-é.\)hl<LH 1976.

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On note déjà quelques aspects curieux de ce système des-tiné selon les assureurs à pénaliser les plus hauts risques.

Le conducteur débutant sur. l'échiquier automobile en pas-sant avec succès les épreuves du permis de conduire à l'âge mi-nimum requis, ne fait que se conformer à une pratique sociale-ment indispensable. Si de plus notre conducteur se trouve êtrecélibataire, chose fréquente à cet âge, et de sexe masculin,son affiliation obligatoire (responsabilité civile) à une as-surance, fait de lui un élément à haut risque, un conducteurparticulièrement dangereux. Avant même de prendre le volantil est repéré. Et lorsqu'on verra, à prooos du Bonus-Malus, lafusion opérée entre conducteurs ayant des accidents et conduc-teurs "infractionnistes" on aperçoit bien le mécanisme qui isolecette population à points supplémentaires et qui en fait des dé-linquants sociaux.

Dans ce registre de solidarités artificielles, ce sont lescatégories qui paient au Moloch automobile le plus lourd tribuen vies humaines qui sont l'objet d'une pression culpabilisanteet paranoïde.

Dans le graphique ci-dessous indiquant la répartition pourmille des victimes indemnisées (ce qui minore un peu les chif-fres réels) suivant l'âge de la victime (J977), le taux estd'environ 150 °/oo pour les 15/25 ans alors qu'il est d'environ50 °/oo au delà de 25 ans.

Graphique A : RÉPARTITION<»/„, DES VICTIMES INDEMNISÉES SUIVANT L'AGEDE LA VICTIME EN 1977.

%oBLESSÉS GRAVES DÉCÉDÉS

150

100

50

150

100

50

10 20 30 40 50 60 70 Age 10 20 30 40 50 60 70 Age

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Par ailleurs les rapporteurs de l'étude RCB de 1969 souli-gnent que l'adéquation des risques aux primes présente des dis-parités de significativité selon le cas. Ils notent en particu-lier que les aptitudes les connaissances le comportement desconducteurs, les qualités des véhicules, la durée d'expositionau risque, sont difficiles à appréhender directement et objec-tivement. Les assureurs cherchent alors à oercevoir d'autresgrandeurs qu'ils supposent liées aux précédentes : lieu d'habi-tation, catégorie socio-professionnelle, âge pour les conduc-teurs, puissance fiscale, vitesse de pointe, prix, mode de trac-tion et de freinage, pour le véhicule. La difficulté apparaîtà ce point : ces grandeurs sont très fortement liées, statis-tiquement, entre elles, et il est difficile de distinguer leursliens spécifiques avec les accidents. Les liens entre niveau devie, CSP et âge sont évidents de même qu'entre puissance fisca-le, vitesse de pointe et prix du véhicule, mais il y a aussisemble-t-il des liens beaucoup plus faciles à définir entre ca-tégories socio-professionnelles et âge d'une part, et las typesde véhicules d'autre part.

Dans une étude sur le sondage automobile de 1975 réaliséepar l'AGSAA, les auteurs font valoir que la fréquence annuelleest relativement forte pour les voitures qui parcourent trèspeu de kilomètres au cours d'une année puisque cette fréquences'améliore au fur et à mesure que le nombre de kilomètres nar-courus augmente, pour atteindre un minimum entre 4000 et 5000kilomètres par an. Ensuite, la fréquence annuelle croit linéai-rement en fonction du kilométrage annuel de 5000 à 35000 kilo-mètres. Au delà la fréquence annuelle ne varie pratiquementplus quel que soit le nombre de kilomètres parcourus. On relèveégalement dans cette étude que ce sont les véhicules qui par-courent le plus de kilomètres qui empruntent le plus les auto-routes.

On pourrait ainsi contourner une population qui possèdedes véhicules puissants et rapides, dont la fréquence annuellesuivant en cela le kilométrage parcouru est élevée, qui a unepropension à ne pas utiliser la ceinture de sécurité aussi bienqu'à rouler habituellement au-dessus des vitesses limites,"dont les véhicules se rangent dans les groupes ayant les acci-dents les plus graves.

"C&. qh.a.phlqu.<i pagz auvayvtz.

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Graphique 5 : Proportion % des conducteurs habituels dépassant 140 km/h sur autoroutedans chaque catégorie socio-professionnelle

(1) Femmes au foyer (et non déclaré)(Z) Artistes, Clergé, patrons pêcheurs (et non déclaré)

Cadres SupérieursIngénieur*Professions Libérale

Industriels

Gros Commerçants

Cadres Moyens

Petits Coanerçants

Techniciens

Araée Police

Professeurs

Employés Conmerce

Contreaattres

Autres Actifs (2)

Artisans

Ouvriers Qualifiés

Autres Inactifs (I)

Employés BureauInstituteurs

Etudiants

Aide Familial

Ouvriers Spécialisas

Services Médicaux A 1

Personnel de Service

Autres Ouvriers

Agriculteurs Exploitant

Apiculteurs Salariésjjji

Retraité

20.

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Quelle belle cible ! Mais lorsqu'on voit que cette popula-tion là recoupe assez bien les catégories socio-professionnellessuivantes : professeurs, cadres moyens, petits commerçants, groscommerçants, cadres supérieurs, industriels et enfin professionslibérales on comprend qu'elle ne figure pas au hit parade desgroupes dangereux, et que seuls y demeurent les jeunes, figuresymbolique du désordre, de la mouvance, de l'aléatoire, du no-made.

Il faut mentionner encore la diversité des prix à laquelleaboutit l'application des tarifs et en particulier l'écart im-portant entre les tarifs des mutuelles et celles des autrescompagnies. Il est clair que le choix d'une clientèle triée surle volet, peu sujette aux accidents, et le jeu de clauses trèsrestrictives, l'absence d'un réseau de commercialisation, ontpour contre-parti'e des prix très bas. La coexistence sur lemarché de l'assurance automobile a pour conséquence une anti-sélection jouant à 1'encontre de la collectivité des assurés.Les meilleurs risques se trouvent attirés par les mutuelles.Les risques les moins bons sont concentrés sur les autres formesde sociétés. (Cf. page suivante la comparaison du prix des assu-rances . effectuée par la revue 50 Millions de Consommateurs enSeptembre 1973.)

Quoi de plus "naturel" que cette tarification dont lescatégories furent établies dès avant la guerre de 1914/18 !

C'est tout un système social qui se reproduit dans lesmailles de ce système de tarification, qui n'a jamais été soli-dement établi sur ses propres critères," qui permet d'isolerdes brebis galeuses, qui place aux avant-postes le facteur hu-main de la cause des accidents et masque délibérément d'autresfacteurs commercialement nuisibles.

Il est symptomatique de rencontrer dans un rapport récentdes sociétés d'assurances"", deux propositions presque carica-turales. La première propose de retenir comme nouveau critèrede tarification l'utilisation de parking ou de garage parl'assuré. "Il faut voir là un excellent critère de tarification

11 y a que.lqu.u année* le* AocÂété* natÂ.onaLuée* et anonyme*pouA combattAe. l'acCioÂAiement de* mutueZte*, ont élang-l con-iZdVia.blme.yvt l'accè* à la. caté.gosu.e. &onctÂ.onnaÂAe.. Vo-Ut éga-lement le. panaamiphe hll

Etude. &UA V utilisation de. l'automobile, pan. lu ménage*^l\GS\\ 197i. op. cit.

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130

LES PRIX DE QUATRE MUTUELLESET DE QUATRE GROUPES NATIONALISÉ^

(mu tue l l es : MAIF. GT1F. MAAF. MACIFJ.

ENSEIGNANTS

FONCTIONNAIRESET ASSIMILÉS

E.D.F. G.D.F.et leur personnel

MAIFAGF

GANMGFUAP

GMFAGFGANMGFUAP

576r//////////> 850IIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIINIIIIIIIII945

IIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIINIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIII920••amHHHBD 1025

1973groupe 9RC + défense recours+ vol incendie •sans franchisePlus de 25 ansPermis + de deux ansRégion parisiennePromenade, t ra jet domi-c i le t rava i l , exerciceprofession.

ARTISANS

MAAFAGF

GAN(5/6cv)GANC7cv)

MGF

TRAVAILLEURSINDÉPENDANTSPROFESSIONS

LIBÉRALES

COMMERÇANTS <»INDUSTRIELS

et leur personnel

MEDECINS

(J) Le C.A.N. applique letarif artisans aux commer-çants en boutique n'effec-tuant pas de livraison.

MAAF

MACIFAGF

MGFUAP

MAAFAGF

GAN(5/6cv)GAN(7cv)

MGFUAP

1025

IIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIHIIII1483iiiiiiifiii1197

IIIIIIIIIIIIIIII1IIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIII1IIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIII1IIIIIIIIII1I1I1IIIII205O

Q92

IIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIII1760

. 1715

E£ 861

IIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIII2O88

11907

. 33/sEPTEMBRE 73 5 0 m i l l i o n s de Consommateurs .

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qui mesure en fait les soins apportes au bon traitement des vé-hicules. Le conducteur soigneux qui entretient bien sa voitureconstitue un bon risque". La seconde, émise au sujet des person-nes qui n'ont pas pu être rencontrées par les enquêteurs ou quin'ont pas voulu répondre vaut d'être citée : "Les ménages ab-sents pour une longue période et les ménages dont l'adresse esterronée ou qui ont déménagé sans possibilité pour l'enquêteurde trouver la nouvelle adresse constituent une population d'as-surés qui présente une fréquence de sinistres supérieure à lamoyenne de 20 à 30 %".

A partir de cette soi-disant objectivité statistique onpropose un nouvel élément pathologique : "il y a là une popu-lation instable qui coûte cher tant sur le plan technique quesur le plan de la gestion ; cette population devrait être péna-lisée".

La logique propre des assurances ne s'accommode que de cequi peut se contrôler. La chasse à l'instable est ouverte.

Dernier élément, mais non le moindre, le refus de répon-dre. "Les assurés qui ont refusé de répondre à l'enquêteur del'I.N.S.E.E. ont également une fréquence d'ensemble supérieureà la moyenne".

3 - LES ENCODAGES INSTITUTIONNELS DE LA RESPONSABILITE ET LA .MISE EN SYSTEME DU CORPS.

A. LE TRAITEMENT DE LA RESPONSABILITE.

Le sentiment immédiat de responsabilité en matière d'ac-cident de la route s'articule sur les représentations induitespar la connaissance du Code de la Route et probablement sur desmécanismes d'ordre non-cognitif ayant trait au partage de l'es-pace et à son "appropriation dynamique"." Ces représentationss'organisent fortement autour de la notion de faute. Bien en-tendu, il ne s'agit certainement pas d'une représentation mono-lithique, mais susceptible d'adaptations selon les circonstan-ces, selon les acteurs, selon le moment. Laissant ici de côtél'approfondissement du travail d'encodage qui passe par le Codede la Route et par l'expérience des pratiques dominant le com-portement routier, nous voulons retenir l'idée que ceux-ciorientent l'appréhension et l'appréciation des situations acci-dentelles.

g ende i>a.n.cALont>, CNSER - M. MCGET - 1179.

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C'est ainsi que les conducteurs accidentés répondent com-munément à la question de savoir qui est responsable par lepartage entre celui qui est dans son droit et celui qui estdans ses torts. Le Code de la Route et les usages se transfor-ment en réfèrent d'attribution des responsabilités.

Mais selon que l'accident est matériel ou corporel ilsubit d'autres encodages. Les faits accidentels vont êtreplies à la logique et aux contraintes des institutions qui lesrecueillent," assurance, gendarmerie ou justice, par l'entremi-se de productions adaptées, constat amiable ou procès-verbal.

Pour l'accident matériel faisant l'objet d'un constatamiable, l'encodage se fait par l'application d'un barème deresponsabilité dont nous allons parler. Et dans le cas de l'ac-cident corporel,sauf règlement amiable entre l'assureur etl'assuré, celui-ci reçoit un autre encodage appliqué par l'ins-titution judiciaire à partir du code civil et sur lequel nousnous pencherons ensuite.

1. L'encodage "amiable" des faits par l'institution des assu-rances.

Une convention dite d'indemnisation directe des assurés(IDA) a été passée entre la plupart des compagnies d'assurances.Elle est appliquée depuis le 1er mai 1968.

Cette convention prévoit que, à la suite d'une collision,c'est la société d'assurance responsabilité civile de l'acciden-té qui évalue les dommages et qui l'indemnise. Les responsabi-lités sont évaluées forfaitairement suivant le barème de respon-sabilité en vigueur, à partir des éléments figurant sur le cons-tat amiable d'accident signé des deux parties, (cf. p. suivantefeuille de constat amiable).

C'est à un double titre que le constat amiable nous inté-resse ici. C'est d'abord la pratique de la forfaitarisation dela responsabilité et tout le travail d'encodage des situationsmatérielles de collision, qui la sous-tend. Ensuite le sys-tème du Bonus-Malus repose sur l'attribution de responsabilitédans les accidents, attribution qui relèvera dans bon nombre decas (accidents matériels seulement)du barème de 1'IDA et nousen parlerons dans le paragraphe : La personnalisation des primesou la désassurance, p.

à ce. iujeX : \ApzctA juAA.cLLqu.te eX. -iwbtiXiVtionneJii de. la.KOuubièJie.. OMSER - M. C. JWET - 7979.

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constat amiable d'accident automobileNe constitue pas une reconnaissance de responsabilité, mais un relevédes identités el des laits, servant a l'accélération du règlement.

é signer obligatoirement par let DEUX conducteurs

2. Heu (pays, n* depl. localité)1 . date de I accident; heure 3. blessés même légers|non| | [oui | ! •

4. dégàtt matériels autres S. témoins noms, adresses et tél. fa souligner s'il s'agit d'un passager de A ou 8)

qu'aux véhicules A et 6

I oui I U

12. circonstancesMettre une croi» (a) dan»chacun* des c*Ms utilespour préciser le croquis

6. assuré souscripteur (voir ainsi, dassur) souscripteur f voir attesl. a assur)

N" tél. (de 9 h. a 17 h.)N* tél. (de 9 hé 17 h.)

L'Assuré peut-il récupérer la T.V.A. altèrent»au véhicule? Inonl I | oui | |

L'Assuré peut-il récupérer la T.V.A. afférente

au véhicule? |non| | | oul| Is t'engageai! dan* un parking,

iltu Drivé, un chemin d* 1er 7. véhiculeMarque, type

7. véhiculeMarque, type 6 «engageait sur une plaça a sens 6

giratoireN° d'immatr. {ou du moteur) N° d'immatr (ou du moteur)

roulait sur une place a sensglratoir. 8. «té d'assurance8. sté d assurance

8 heurtait a l'arriéra, tn roulant dan* e!• même Mru *t sur un* même lit*

Agence fou buroeu ou courtier) Agence fou bureau ou courtier)

(Pour les étrangers)A l t e * ' o u 'valable jusqu'au

Les dégâts matériels du véhicule sont-ils as- Les dégâts matériels du véhicule sont-ils as-surés? |non| | | ou) I

B. conducteur (voir permis de conduire) 9. Conducteur (voir permis de conduire}

Nomfmajuic•mplétall sur ta parti* d* chaui«*«

15 réMrvé* a la circulation en tant \blnv*rf*

Permis de conduire n

Catégorie (A, 8....) Délivré par

Permis de conduire n

Catégorie (A. B. ...) Délivré par

(Pour les catégories C. D, E et les taxis) Indiquer la nombre de (Pour les catégories C. D. £ el (es taxis)

cases marquées d une erol»13. croquis de l'accident10. MiqiKr par tint flécha

h point de choc initial1 0 . Indiquer par une flèche

ta point de choc initialPréciser : 1. le tracé dea voies - 2. la direction dei véhicules A. B - 3. leur positioau montant du choc-4 les signaux routisrt'5 le nom des rues (ou routes)

11. dégât* apparents 11. dégâts apparents

15. signature des conducteurs

A B

in CM ùm bi*«*w«t ou «n CM d« dégllt m«ltlrl«tt aulrvi qu auavéhlcutt. A tl B. r*l«vtf Itt IndscaUont ditftntilt. d«dratM. «te.

N* rté>n modlll*r eu constat «prêt In tignalurta tt ' Voir déclaration dela Mpafation daa tiamplairca d«i 2 coftowclwirv lAtsuro au verso '

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Le système d'attribution de responsabilité est d'abord uncompromis de répartition de charges entre les assureurs. Le suc-cès du barème repose sur l'économie réalisée en termes de ges-tion : les accidentés gèrent eux-mêmes la phase de constat ; leconstat doit donc être extrêmement simple à comprendre et à rem-plir, ne comporter qu'un nombre réduit de constatations élémen-taires, a priori peu sujettes à discussion.

Le barème ne doit pas s'embarrasser des conditions del'espèce tellesqu'elles sont examinées par les cours civiles.Il ne comporte donc qu'un très petit nombre de cas de figures,(cf. pages suivantes la reproduction des cas de figures du ba-rême).

Dans ces cas de figures, des critères présents dans lessituations réelles n'apparaissent pas : conditions de circula-tion (trafic, météo...) existence ou non de singularités duesà la voirie, ou à la réglementation (panneaux, feux, flèches...)situation "infractionniste" éventuelle du déplacement des véhi-cules, défectuosités techniques ou autres des véhicules.

Les critères dont il est tenu compte s'appellent :

- point de choc : ainsi un véhicule de tourisme est divisé entrois zones de chocs, tiers avant, tiers médian et tiers ar-rière.

- déplacement relatif des véhicules au moment du choc : mêmesens ou sens opposé, même chaussée ou chaussées différentes,sens giratoire, stationnement, arrêt, et enfin cas spéciaux.Intervient également la position des véhicules par rapport àl'axe médian des chaussées. La responsabilité est partagéepar quarts, la somme totale faisant un, entre les protago-nistes.

Ce qui ressort de cette pratique c'est d'une part l'exor-cisme de la violence de l'accident et le transfert sur un modeamiable, là encore rabattement de la brutalité de l'événementdans les cases à cocher, dans les catégories de l'ordre. En ex-purgeant l'aspect fautif de la constatation de la matérialitédes faits, le constat amiable est l'instrument rêvé qui replacele "bon père de famille" dans sa bonne conscience, et bien queles situations réelles n'atteignent pas souvent un ton de civi-lité aseptisée. La représentation des "torts" en fonction desrègles du code de la route nourrit des colletages fréquents.

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Graphique n° 7.

*Pour tous les N» offact*»d'un astérisque. » • raportsraux N " 90 et 91. si l'un desvéhiculée est orrôtô. ï

POINT DE CHÛC

Hklcalt I UUcdt1 1 T

PART OERESPON-SABILITE

Mk.|«k.

BAREME DE RESPONSABILITEapplicable aux accidents survenus à compterdu 1er FÉVRIER 1972

VEHICULES CIRCULANT DANS LE MEME SENS SUR LA MEME CHAUSSEE

VéUcatat I t t t HTM•IntBf.

NUcates I i t t w m•4aaMa.*ikkattXUtir-put pair •aaruttr I Hcuiiiét Uttrali h *t«»M à IMIal.«iatulit i m w «anlUntiNirulMlInntantun (kugiatit N H».

ViUulM I M Y ur Hafilas iflffémtM. liklnla T

N Dit >«if

I tt T ur ' t u(Un dIHémtn. «tkiculaT kifirqitit dm m c»r-

fihlcili T Mtotlut ftnqalttar m ititionmaut.

«iklcoli T «punit II•tblealt I lanqu'll irlltf•• ••Mt» d'iiliriflttlcioil <épiinr.

VEHICULES CIRCULANT EN SENS INVERSE

«ihlcalM X i t Y aai iUUl tl'iit «I l'antra i t r l'ait mi-Aia , aa iool !• poilttaw tar

i f rapport à cetno pMt Atrs a*é>Briain4a.

Kahlcalt T aaialétaal tutl 'ait ai4dlaa ta la dépst-M i t Intma poor ampreatarana cnMitiia à gaactta).Vtbkala » drealaat itetton couloir <t BUftha.

VEHICULES PROVENANT DE DEUX CHAUSSEES DIFFERENTESleurs directions devant se couper ou se rejoindre

lékltalilpriifiutrtlidr.1-tt clrcalaat uraat chaînâtt taakl» t iai tt aaialtuattar r«i» BédltB n la t'épia-n a t Véaicalt T clitaUalëaat Ma Malolr 4a aiarcla.

Hkleala E arlirltaln Uêntot clntbat topa mutlglr U aurebo.

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Graphique n° 7 (suite)

POINT DE CHOC

VialntsX

Véhicula

PART DERESPON-SABILITE

Mb. Mb.

VEHICULES CIRCULANT OU DEBOUCHANT SUR UNE PLACE A SENS GIRATOIRE

Mkteibn X al T nantititn la u n tkataln.

41*

42*

Tlara arrière Titra amot

I M en eitnt aitl« (•• priva as

tmatm 411/2 1/2

43 btUfenatMklcaki T l a p i l ton I Iu n (kiujlra. Mblcsli XMbtacBtat tt» la plaça.

44 baitlénat

Hors a iu laa

Titrt lattral

Tlcresniaro 1/4 3/4

VEHICULES EN STATIONNEMENT

MakaleXeaitatftaMaiat

Malcili X ta tintent-«iil lnlBillu ita * l'arrtlbriialitrl li lui «"m trtt-ttlr ta tiilMiratiaa.

«ébkatalaiitatliMamatM t larrlt t t aotblt liliar aecttaintlti.

Mblcale X ea autirau-Biit|nJ||Ui[lsa i l'irrltImlatUtrl wr U cbinutkart iiiloaériUH.

50

SI

52

53

laéltfirul

(MUnértat

Unirait

fasKfireat

baifftrtat

ItdlHéreat

Mitlinat

laaiffé'rtet

0

0

1/4

1/2

1

1

3/4

1/2

CAS SPECIAUX

(«MciItTclrctlttt liraitcuiuit i l t in iittrfltt'| itgtitiit • • la e,trRait

Véblcilt T aynt fini nbirr>H it |;llct. tt l'tf artaai nipietA n ilgaal STOP,tat tallit U ptioritl a*ai tliul MBIIIII.

Vibkila T «trait a aaanèeba m*. «éHcik Xpunit aa fia >wl

HUcilaTtlmhitiaaiar-cbi arrUn ta Itt ictuit tafral-taar.

«itlctla T Mtncuat l"uace<i ng tnirt à la tiret-litlu nUlsee. l"«i cktiMii* ttrra aa ë'eae airi UiUU»Mmat aa l'y aaga-lui t i l <imt k tiacai Ita• i trirwl à l'rotli i»e tbia-HWH Jljllo).

Vililcila Xl'iagaitaatfinkt Ilin (ri«n os t u i lta «Init > droits, ta annaataa itatiiiiunait i l aircbimat, u n cluaimiat Um».

Omrtsrt a"m ptrtltntirait* aa tiicbi laviblcaU T.

61

62

63

65

66

67

68

MHfértit

MHfintt

IMtfftffMt

•Wttfijfst

llftifféfMt

TUrtarrttrt

DttffifMt

Wlflém»

ImHHtrttt

Mlffénat

taaifftrttt

|-J|#fla-*^tiHJntflll

haW<mt

nrani

0

0

0

0

0

1/4

0

1

1

1

1

1

3/4

1

IV i ! VEHICULES ARRETES

Vibicalt X irrlU a~an Int u 71-7J 7HMHJ-44.

Hhlcila T trr«U tut ItaUt 7MML

1

90

91

PART DERESPON-SABILITE

Vab.I

0

1

Véh.T

1

0

. DEFINITIONS •Chauaiie : partie de la route normalement utilisée pour la cir-

culation des véhicules.

Vola : l'une quelconque des subdivisions de la chaussée ayantune largeur suffisante pour permettra la circulation d'unafile da véhicules.

Axa médian : - la ligne Jaune continua.• le milieu de la chaussée ou da la partie de chaus-

sée laissée disponible par une file de véhiculéeen stationnement lorsqu'il n'y a pas de ligneJaune continua.

Point de choc : point du véhicula où s'ait établi le PREMIERCONTACT avec le véhicule adverse.

Tlera avant. Tiers latéral, Tlara arriéra :

VÉHICULES DE TOURISMETIERS LATÉRAL : portier.i IMtri lu du vihlculi.TIERS AVANT i partis liluie M ivanl d«a portlirli latlVilii.TIERS ARRIERE : panl* aitué* «n irrltr» d«a portlèraa lataralaa.

VÉHICULES UTILITAIRESL M tlara avant; tlara .latéral al titra arriéra aont établit anDIVISANT PAR 3 U LONGUEUR du vénlcula. tfg para-choeayant au para-choe arriéra.

VÉHICULES ATTELÉS D U N E REMORQUÉSEUL LE VÉHICULE TRACTEUR « i l pria an conaldératlon : tout chocA la remorqua aat conaldéré comma un choc au TIERS ARRIERE.

• NOTE IMPORTANTE •Pour l'utilisation de ce barème. • • rapoHer au R*fjle>

raenl d'Application Prat iqua.Les conditions dans lesquelles chaque cas doit être ap-

pliqué y sont précisées et commentées.

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On a mentionné que la responsabilité établie par le barèmepartage les charges des compagnies d'assurance respectives desparties impliquées. Il résulte de l'établissement de fut-ce unquart de responsabilité, l'application d'un cran entier de maluspour l'automobiliste concerné. La "personnalisation" des primesqu'ont instaurée les promoteurs du système Bonus Malus, et pource qui concerne les seuls accidents matériels, résulte doncd'un enserrement de situations, accidentelles toujours complexessur un réseau de figures forfaitaires dont la logique internegit dans les nécessités de gestion propres aux compagnies d'as-surance.

Le mécanisme de l'IDA fait des assurés les huissiers deleurs sinistres matériels, livrés aux contraintes de cette con-vention inter-assureurs.

L'assuré n'est pas obligé d'accepter le règlement suivantla convention. Mais s'il le refuse, c'est, en conséquence de laconvention, l'obligation de faire un procès contre l'assureurdu responsable, procès engagé soit par lui-même, soit, s'il asouscrit une garantie "défense et recours", éventuellement parsa société d'assurances. Les contrats prévoient une procédured'arbitrage entre l'assuré en "défense et recours" et sa socié-té d'assurances, en cas de désaccord sur l'opportunité d'enga-ger un tel procès. En tout état de cause, l'assureur "responsa-bilité civile" de l'autre automobiliste n'aura rien à régler au-delà des indemnités résultant du jeu de la convention.

"il est donc à prévoir que de pareils procès seront rares1.'"Le barème de resnonsabilité a été modifié au premier janvier1977. Nous reproduisons page suivante les nouveaux cas de figu-re. Plusieurs points sont intéressants à constater. C'est d'a-bord la réduction du nombre de cas par fusion de situations voi-sines. Cette fusion s'opère par suppression du critère de point ,de choc. La simplification est importante pour la gestion descompagnies d'assurance. C'est ensuite l'état d'esprit de cettesimplification. Il apparaît que raison reste toujours au véhi-cule en circulation.

Le véhicule perturbateur, celui qui quitte un stationne-ment, qui change de file, qui vire, est déclaré totalement res-ponsable. Pas de circonstances atténuantes. Ici encore c'estl'élimination de l'aléatoire, du désordre, et le bon droit re-connu au conducteur qui roule, pourvu qu'il roule droit.

j$ L'J.P. 8UO. - 196$ - op. cJX.

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• Laa andana caa 74 è 77 aont regroupa* aou» la numéro 19

AVANT Point da choc X Y

I tir a»

Ht Un

téMato I et I m ton

f Wlranet «m n tu-

74

75"

76

77'

Ihnti

tan MM

Iknti

IkiWl

1/4

1/4

1/4

3/4

viii1;/.: w

MAINTENANT X Y

15 Véhicule Y changeant de file.

• La* ancian* cas 7B et 79 aont rapri* «ou* la numéro 16

AVANT Point da choc X Y

n

79" 1/4 3/4

MAINTENANT X Y

16 Vétiicula Y quittant un stationnement.

I* L M anclans ea* 31 et 32 *ont regroupé* sou* la caa n* 30

AVANT Point de choc X Y

MAINTENANT X Y

30Véhicula X prioritaire da droite circulant dans soncouloir da marcha.

j s o l j_ «g)H frj.--:|Hir "I . i " J ~\M

0 1

* L'ancien caa 30 eat remplacé par la n* 31

AVANT Point da choc X Y

MUR• ex 30 1/2 1/2

MAINTENANT X Y

31

Véhicula X prioritaire De droita circulant surune cnausaea à doubla «mu al empiétant sur l'a«amédian ou la dépassant lorsque cet *xa n'est pasconstitué par una ligna continua.Véhicule Y circulant dans son couloir de marche.

1/4 3/4

• La* anciens caa 60. 61 et 62 aont rassemblés sous la cas S0. On y a aiouté la non respect d'und'Interdiction de virer é droita ou * gauche ou d'une ligne continua X Y

50

, Véhicule Y ne respectant pas :

. • un barrage de police• un* signalisation de priorité (balise.. signalisation au sol. STOP) (4)• un feu de signalisation

• un panneau de sens interdit• un panneau d'interdiction de dépasser• un panneau d'interdiction de virer à droite

ou à gauche• une ligne continue

Graphique n° 8. Traff ic n° 27. Févr ier 77.

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2. L'encodage "civil" de l'accident corporel par l'institutionjudiciaire.

Ce qui fonde la responsabilité dans le domaine automobilecomme ailleurs, ce sont principalement trois articles du codecivil :

Art. 1382 : Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autruiun dommage, oblige celui par la faute duquel il estarrivé, à le réparer.

Art. 1383 : Chacun est responsable du dommage qu'il a causé nonseulement par son fait, mais encore par sa négligen-ce ou par son imprudence.

Art. 1384 : On est responsable non seulement du dommage que l'oncause par son propre fait, mais encore de celui quiest causé par le fait des personnes dont on doitrépondre, ou des choses que l'on a sous sa garde.

On pourrait penser simplement au vu de ces articles que lepropre de la responsabilité civile est de replacer la victimedu dommage dans la situation où elle se trouvait antérieurementà l'accident sans qu'elle réalise un enrichissement, ainsi quel'estiment souvent les tribunaux. ïïais on peut voir que les si-tuations rencontrées sont beaucoup plus complexes et nuancées.Nous tirons nos principaux éléments d'analyse de l'étude duprofesseur Tune sur la Sécurité Routière, et de l'étude de so-ciologie juridique de E. Bertrand : La circulation routière.

La recherche des responsabilités, du ou des responsablesse fonde sur la nécessité de réparer les conséquences de l'ac-cident. Cette recherche suppose qu'il y a un coupable autourd'une faute.

Mais on voit en réalité que la responsabilité n'a plus deconsistance. En effet à la réparation individuelle des consé-quences d'une faute, est substitué un mécanisme de réparationcollective. "Sur le plan civil le conducteur d'un véhicule àmoteur est totalement irresponsable du dommage qu'il cause àautrui"." La subrogation déplace physiquement le conducteur,et lui transpose l'assureur.

On est donc bien loin du sens commun qui s'attendrait àce que le droit fasse justice entre deux personnes : dans cecas l'auteur du dommage est, de toutes manières, hors de cause.

:: TUHC , op. cit.

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"L'Assurance de Responsabilité^fonctionne donc en donnant l'as-surance de l'irresponsabilité"'.'

Il reste l'autre partie en cause, la victime. Doit-elleêtre et de quelle manière indemnisée ? La loi du 31 décembre1951 a créé un fonds collectif nommé fonds de garantie (cf. para-graphe historique).

Mais là non plus rien n'est simple. Le nombre des cas oùune personne qui n'a commis aucune faute peut se voir privée detoute indemnité est assez important, alors surtout qu'il estconstant que d'autres victimes sont indemnisées des conséquencesde leur faute.

Les conditions de la circulation multiplient les accidentsoù il n'est pas possible d'établir les responsabilités respec-tives. "Un piéton descend du trottoir : pour l'éviter un automo-biliste donne un coup de volant et tue le conducteur d'un vélo-moteur qui le dépassait. A qui la faute ? Le conducteur du vélo-moteur roulait-il trop près de l'automobile ? Peut-être mais ilest normalement impossible de le savoir. L'automobiliste a-t-ileu une réaction excessive ? Peut-être mais là encore on n'ensaura jamais rien. Le piéton est-il en faute ? sans doute. Amoins que ce ne soient les membres du groupe d'adolescents qui,venant en face de lui, ont négligé dn s'effacer et l'ont obligéà descendre du trottoir au dernier moment. L'incertitude suscitedes discussions, la victime croit avoir droit à une indemnité,et l'assureur trop souvent s'efforce purement et simplement dene lui rien verser"."

Par ailleurs, la faute étant le fondement de la responsa-bilité, la victime d'un accident n'est pas indemnisée si l'au-teur de celui-ci n'a pas commis de faute. Celui qui est victimede sa propre faute n'est pas non plus indemnisé.

Mais plus encore, ce qui prive de réparation la victimed'un accident, en dehors de sa faute, c'est également son faitnon fautif. Ceci apparaît clairement dans les accidents "de pié-ton". Le mécanisme causal de l'accident est démonté dans toutesses circonstances de manière à pouvoir porter un jugeme'nt surle comportement, sur le fait personnel du piéton. On recherchelors du procès quelles étaient les circonstances exactes del'accident. On restitue toute la complexité du milieu de la cir-culation routière. Dans le cas du piéton on confronte l'obliga-tion générale de prudence à laquelle il est soumis aux condi-tions particulières de l'espèce : il est rare qu'une faute àl'égard du piéton ne résulte pas de ce duel inégal.

" C($. TUMC. op. cit.

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Parfois même ce ne sont pas les conditions subjectivesc'est-à-dire liées aux agissements du piéton, qui sont à l'ori-gine de sa responsabilité mais uniquement la prise en considéra-tion de circonstances objectives, telles que le temps et le lieude l'accident.

On a ainsi pu relever sur 37 accidents survenus la nuità des piétons, huit.décisions qui déclarent l'automobilistepleinement responsable. Ces résultats montrent que l'obligationde prudence du piéton se trouve renforcée simplement parce qu'ilfait nuit. Dans cet échantillon, limité certes, c'est le piétonqui supporté l'incidence de ce fait objectif et non l'automobi-liste.

Les cas où le piéton circule soit sur la chaussée soitsur le bord du trottoir suivent la même tendance. Dans un échan-tillon de 1.17 cas, les juges ont estimé 81 fois que le piétonavait manqué à son obligation de prudence.

On peut donc affirmer que "le piéton a tort d'être là"est une réalité judiciaire mime si quelques décisions sontallées en sens contraire. On voit ainsi dans ces cas que leprincipe juridique fondé sur la présomption de responsabilités'efface dans la majorité des hypothèses devant la preuve dela faute du piéton.

Un aspect encore de la notion de faute nous frappe. Lefonctionnement judiciaire fait l'hypothèse que le conducteurest par essence un "bon père de famille" c'est-à-dire un con-ducteur sans faute et sans reproche. Des juristes voient aussila question sous cet aspect : pour eux la notion même de fautes'évanouit "comment qualifier de fautif le comportement qui esttous les jours celui des gens honnêtes, prudents, soucieux deleurs responsabilités ? Ce qui se produit ce sont des accidents:des malheurs qui tombent sans qu'on les ait voulus et sans qu'onait pu ou su les éviter"." "Le plus souvent l'accident se pro<-duit sans que les parties aient eu conscience du risque qu'ellescréaient ou qu'elles couraient"."" On pourrait résumer d'un mot:"fatalitas".

Mais plus qu'à un encodage systématique c'est plutôt àdes encodages multiples qu'on a affaire.

Dès que l'on aborde la pratique judiciaire on quitte ledomaine des grands balisages, taux, barèmes, clauses-types,

:: c{,. TUNC op. cit.

"•"• c£. BERTRAM? Oo. cit.

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grilles, et on touche à celui des distortions, des cas particu-liers, des contradictions voire de la loterie.

Ces distorsions se manifestent d'abord dans la politiquedes assureurs. Certains sont très processifs, tandis que d'au-tres préfèrent transiger plutôt que de plaider. "L'option entrela voie civile et la voie pénale est une décision prise, leplus souvent, par le conseil des victimes: En effet le plusgrand nombre des dossiers fait l'objet d'un classement sans sui-te par les parquets tout au moins dans les juridictions itnpor̂tantes et encombrées ; l'action publique n'est exercée d'officeque pour les accidents graves ou très graves, dont les circons-tances révèlent une faute grave. Les tribunaux de moindre im-portance peuvent avoir exceptionnellement une politique pluslaxiste de l'opportunité des poursuites. L'action pénale estdonc souvent introduite par citation directe ou plainte avecconstitution de partie civile, lorsque le conseil de la victimeestime cette voie préférable"."

L'autre champ de distortion résulte du principe de la sou-veraineté des juges. L'appréciation doit se faire concrètementdans chaque affaire, pour chaque victime. Ceci aboutit à desvariations étonnantes pour un même accident : "la chambre cri-minelle a estimé qu'une manoeuvre perturbatrice aurait pu rece-voir la qualification des violences volontaires, alors que lacour d'appel avait relaxé l'auteur de l'accident en considérantque la manoeuvre n'était pas imprudente. La cour d'Amiens avaitjugé que la circulation d'un piéton sur une autoroute était unefaute extrêmement grave, la deuxième chambre civile a cassél'arrêt en exigeant que soient recherchées les circonstancesde l'accident".""

Le principe interdit que les juges ne se lient eux-mêmespar les règles pratiques de réparation qu'ils auraient établies.Toutefois, la pratique est constante : chaque juge ou chaquejuridiction ou chaque formation d'une même juridiction créé sespropres règles ; celles-ci demeurent occultes et ne sont révé-lées par les magistrats que dans des études doctinales excep-tionnelles.

L'encodage assurantiel transporte les circonstances del'accident dans quelques catégories, sans doute ignorées dela plupart des automobilistes, aisément gérables par l'appareildes assurances. Ce système détermine forfaitement les responsa-bilités et alimente le Bonus-Malus. Ceci pour les accidentsmatériels.

" zt "'•'• : BERTRAND. La cÀJicuJLouU.on nauutièAH.op.

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L'accident corporel, lorsqu'il passe par l'appareil judi-ciaire, subit en réalité un traitement variable, affronté à desproblèmes de fonctionnement ou de régulation propres aux coursde justice, affronté à une construction juridique qui tourne au-tour de normes vagues telles que "bons pères de famille" "ordrepublic". "Ces termes n'acquièrent leur sens précis que dans lecontexte concret de la vie sociale"."

La porte est ainsi ouverte aux schémas dominants : mobi-lité automobile, facteur humain.

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B. LA MISE EN SYSTEME DU CORPS.

Dans un recoin de l'assurance on découvre une opérationproprement fabuleuse. C'est la transmutation des corps, enargent.

Le problème qui est ici posé est la réparation des attein-tes corporelles. Les assureurs couvrent ces risques et proposentdes barèmes d'indemnité selon les atteintes. Nous donnons un peuplus loin une présentation d'un tel barème, faisant apparaîtrela trace de cet autre codage sur le corps même.

Bien entendu toutes les atteintes corporelles ne peuventêtre schématisées aussi simplement et comme le note E. Ber-trand"" les experts judiciaires reprochent à ces barèmes leursinsuffisances et leurs pauvretés.

Pour les infirmités multiples les assureurs posent unerègle arithmétique ; ils appliquent à chaque infirmité le tauxdu barème, les additionnent en posant la limite nécessaire afinque le total ne puisse dépasser 100 %. Enfin pour les assureursles invalidités doivent être calculées sans tenir compte de laprofession de l'assuré.

Le corps médical joue ici un rôle indispensable. D'unepart on a vu que les compagnies d'assurances s'assurent lesservices de médecins dont le rôle consiste à réaliser matériel-lement le rabattement du corps meurtri sur les cases du barème.D'autre part les tribunaux ne pouvant admettre de tels barèmesont recours à des médecins experts judiciaires pour apprécierl'atteinte corporelle. Dans les deux cas les balises de ce re-pérage sont la perte, l'aliénation, l'ablation, l'amputation,la paralysie, la fracture.

E. MKCKAAV. Laô notion* ilomu en dnoit. langage* 53.M<m 7979"- E. BEWKANV. la tiJiauJtiublon KOUUÂM<I. op. cvt.

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Dans cet espace où le corps humain se débite en morceaux,les prix ne sont pas les mêmes partout. On peut ainsi releverque les indemnités varient avec le sexe et avec l'âge. On montredans le graphique suivant que pour un taux d'invalidité évaluéau-dessus de 50 %, entre 20 et 40 ans, la valeur du point d'in-demnité est supérieure pour les femmes, et au delà de 60 ansaprès une baisse en valeur absolue c'est pour les hommes que lepoint est supérieur. Dans cette topographie macabre la divisioninternationale de la valeur joue probablement comme elle jouepour le prétium vitae" :

Etats UnisSuèdeAllemagne FédéraleFranceGrande Bretagne

1 .140.000 F750.000 F470.000 F380.000 F290.000 F

Graphique 9 : Valeur du point d'indemnité selon le taux d'inva-l id i té , le sexe et l'âge (données sur l'assurance1976).

Taux d'i.P.

" M. LE MET. StcjjJuJtz Routi&ie. 197 4.

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146

Le corps humain vu par Cranach.(Adam et Eve. Musée des Offices. Florence),

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14 7

Infirmité permanente totale.

- Cécité complète 100 %- Perte totale des deux bras ou des deux mains 100 %- Perte totale des deux jambes ou des deux pieds 100 %- Perte totale d'un bras et d'une jambe, d'un bras

et d'un pied, d'une main et d'une jambe, d'une mainet d'un pied 100 %

- Quadriplegie, hémiplégie ou paraplégie complète(grabataire) 100 %

- Aliénation mentale totale et incurable excluant touttravail rémunérateur 100 %

Infirmité permanente partielle (extraits).

DROITE

Amputation bras60 %

ou mainou paralysie totale

mouvement du poignet 20%-"

Amputation de la cuisse1/3 supérieur : 60 %2/3 inférieure : 50 %

Amputation de la jambe40 %

Amputation du pied35 %

urdité incurable et absolue10 % une oreille40 % deux oreilles

GAUCHE

Amputation bras50 %

ou mainou paralysie totale

Pertes mouvement :25% Epaule (D = 30 %)20% Coude (D = 25 %)15% Poignet

HancheGenouCheville

Positionfavorable

30 %20 %10 %

MauvaiseAttitude

40 %40 %20 %

Graphique n° 10,

Le corps humain vu par les assurances.(Barème visé par la direction des assurances, Ministère desFinances).

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14 £

Perte complète dela vision d'un oeil(.avec ou sansénucléation)

25 %

Perte de substance du crâne dans toute son1, épaisseur

Perte de toutesles dents 10

Les trois :

25% 20%

surface d'au moins 12 cm2

surface de 6 à 12 cm2surface de 3 à 6 cn)2surface inférieur à 3 cm^

50 %30 %16 %10 % au maximum.

Pouce30%

Index2 phalanges1 phalange

Médius B % B

Annulaire 6 % 4

Phalange

0 = 5 % G = 3

Pouce

0 = 20 % I G = 10

Main

0 = 60 %

G = 50 %

Auriculaire 5% 3%

un orteil : 1%

Les quatre6 ».

Pied.

Totale'..: 35 \Sous astragalienne : 30 % .Médio-tarsienne : 30 %Tarso métatarsienne : 25 %

Raccourcissement d'un membre inférieur :

- au moins 8 cm : 15 %- de 5 cm : 9 %- de 3 cm : 4 %

Gros orteil : 7 %

Tous les orteils : 15 %

Graphique n° I I•

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L'arithmétique de ces barèmes offre quelques points biensinguliers. C'est ainsi qu'en raison du principe du taux totalde 100 %, une invalidité telle que la cécité complète se voitappliquer le même taux que l'accumulation de cécité, perte desbras, des mains, des jambes, et aliénation mentale.

Si l'on veut compter sur ses doigts, appelons les doigtsde la main : P pouce, I index, M majeur, An annulaire, Au auri-culaire ; On obtient les formules suivantes en cas d'ablationtotale, pour la main droite d'un droitier, gauche d'un gaucher

P = 2 0 % 1 = 1 2 % M = 8 % A n = 6 % A u = 5 %

P + I = 3 0 %

fM

P + i ou An = 25 % M + An + Au = 25 %^ ou Au

(M M + An 1

ou An = 20 % ou M + Au V = 15ou Au ou An+ Au J

- LA PERSONNALISATION DES PRIMES OU LA DESASSURANCE.

Le système du Bonus-Malus est très souvent présenté commela production interne aux assurances propre à inciter le con-ducteur à une plus grande prudence. Mais on doit y voir égale-ment le primat accordé au facteur humain dans les causes d'acci-dents et la volonté de faire peser sur l'individu conducteur lepoids des dysfonctionnements du système de circulation automo-bile par la désignation d'une catégorie cible : les mauvaisconducteurs.

On trouve une première apparition d'un tel système lors-qu'en 1958 le ministère des finances imposa l'application d'unBonus-Malus en échange d 'une majoration des tarifs réclamée parles assureurs. Les taux envisagés étaient un maximum de + 25 %de Malus et de - 10 % de Bonus (cf. extrait donné page suivante)En réalité ce système ne fut pas appliqué.

Le second épisode dans cette histoire apparaît en ] 964au cours de la table ronde des assurances. Il faut rappeler quel'instauration de l'obligation de l'assurance de responsabilitécivile en 1958 avait été suivie de difficultés. Les assureursinvoquent le déséquilibre des opérations et de la gestion dessinistres, affirment que les tarifs sont inadaptés aux risques

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Ait. 22. — Bonifications. Pénalisations. — Les dispositions duprésent article sont applicables a la prime relative a la garantie A survéhicules autres que les véhicules k deux roues (avec ou sans side-car) et Ici triporteurs.

Bonification pour non-sinistre. — Si, au cours de la période deréférence ci-après définie il n'est survenu aucun sinistre entraînantle paiement d'une indemnité le souscripteur bénéficiera, à titre debonification, d'une réduction de 10% sur la prime de l'annéed'assurance suivant la période de référence et sur les primes desannées subséquentes.

Tout sinistre entraînant le paiement d'une indemnité supprime labonification à partir de la première échéance annuelle suivante.

Cette bonification ne sera rétablie qu'après une nouvelle périodede référence.

Si un sinistre survenu au cours de la période de référence peutengager la responsabilité de l'usure sans que l'indemnité ait étépavée, l'attribution de la bonification correspondante se trouvedifférée.

Pénalisation. — Si, au cours de la période de référence ci-aprèsdéfinie, sont survenus deux sinistres qui peuvent engager la respon-sabilité civile de l'assuré, la prime sera majorée de 10%, majorationportée a 25% si l'un des deux sinistres au moins a occasionné desdommages corporels aux tiers.

Cette majoration de prime sera exigible k partir de la date dusinistre qui met en jeu la majoration et ensuite k chaque échéance.

Le* majorations perçues par l'assureur a ce titre ne lui demeurentacquises en totalité ou en partie que si deux sinistres au moinssurvenus dans la période de référence ont entraîné le paiementd'indemnités.

La majoration sera supprimée après un nombre d'années d'assu-rance sans sinistre égal a la moitié de la période de référence.

Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle au droit derésiliation pour sinistre de l'assureur (art. 112 du décret du 30 déc1938).

Disposition* communes. — La période de référence comprend lenombre d'années consécutives d'assurance prévu aux conditionsparticulières.

Par année d'assurance, on entend la période comprise entre deuxéchéances annuelles consécutives au cours de laquelle la garantien'a pas été suspendue pendant six mois ou plus.

Une année d'assurance au cours de laquelle la garantie a été sus-pendue pendant six mois ou plus n'est pas prise en considérationpour le décompte des années consécutives.

L'article de Bonifications Pénalisations extraitdu modèle d'assurance établi par la Directiondes Assurances en 1959.

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assurés. Des retraits d'agrément sont prononcés par applicationdu décret-loi du 14 juin 1938 sur le contrôle de l'état sur lesentreprises d'assurances. Des liquidations sont ordonnées. Lesinquiétudes des assureurs provoquent la réunion de la table ron-de sur l'assurance à la demande de MM. Giscard d'Estaing, Minis-tre des Finances et Poniatowski, directeur des assurances, pour"réduire les charges qui pèsent sur les assurés".

C'est au cours de cette table ronde que sera présentéeune étude sur "la discrimination des mauvais conducteurs" etavec en sous-titre "en vue d'alléger les charges de l'assuranceautomobile"."

Les arrière-pensées de la rue de Rivoli doivent pouvoiren cette matière être pesées en termes de grands équilibresmacro-économiques et du rôle inflationniste que doivent y jouerles assurances. Nous ne nous aventurerons pas sur ce terrain,et nous voulons nous contenter d'examiner les dispositions quifurent imaginées par les assureurs.

L'étude a pris pour modèle les pratiques appliquées dansplusieurs états américains. Le principe est d'adapter les pri-mes payées aux "performances" des assurés. A la question desavoir sur quel critère modifier la tarification, comment éva--luer ces performances, la réponse de plusieurs états américainsest d'établir une classification des conducteurs en catégoriesselon le nombre et le degré de gravité des infractions commisesau code de la route.

Ce type d'ordonnancement repose sur deux idées : il y aun lien statistique entre les accidents survenus à un individuet les infractions qu'il commet, et, d'autre part, il est indis-pensable de conserver la notion de responsabilité pour faute.

Ainsi que nous le notons dans l'étude de la responsabili-té, la détection d'un comportement fautif du conducteur estsouvent malaisée, voire impossible, Les responsabilités sontdonc bien souvent contestables. Elles peuvent être encore par-tagées ou bien inexistantes. L'énorme intérêt de l'exenrole amé-ricain est doncd'établir un détour qui fournirait une base "ob-jective" et surtout irréfutable à l'accroissement des primes.Irréfutable parce que le critère de modification relèverait dudomaine judiciaire, de la chose jugée.

Le projet clairement exprimé des assureurs est de fairede la personnalisation des tarifs une extension de l'action pé-nale. "La classification dans la catégorie mauvais conducteuraura deux conséquences : elle entrainera, pour le délinquant

" V. LECV. La dLUcAÂ.mi.ywution du maavaû, conductoiiHA. Ronéo 1964

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invétéré de la route un surcroît de prime qui sera perçu par luiconnue une sanction à la fois psychologique et économique ; etelle fera peser sur lui, et ce d'autant plus lourdement que safiche sera plus chargée, la menace du retrait du permis de con-duire"."

On voit que le système imaginé décalquerait le fossépénal établi entre les conducteurs respectueux du code et les"infractionnistes" et le poserait sur la population des "acci-dentables" pour en dégager les mauvais conducteurs, les délin-quants, des bons conducteurs.

Bien entendu comme chaque fois qu'il est question de sé-parer les bons d'avec les mauvais, l'image ancienne de la sépa-ration de l'ivraie et du bon grain masque le problème de l'éta-blissement de la frontière et du sort des frontaliers et toutce qui est extérieur au facteur humain.

Pour le cas où l'on prétendrait contester les bases d'éta-blissement du relevé des infractions, l'étude dont nous parlons,n'hésite pas à citer la position des assureurs américains :"faut-il présumer que le conducteur s'est révélé médiocre oufaut-il présumer que l'agent qui a dressé le procès-verbals'est comporté avec arbitraire ? Présomption pour présomption,laquelle est la plus utile pour la prévention des accidents ?Nous préférons la première"."" Voilà une prise de position quifait bon marché, entre autres choses, du rapport de force quis'établit entre les acteurs de l'infraction constatée : l'auteurde la faute et l'agent qui en établit la constatation. Sans ledire, nous pensons que l'agent verbalisateur est sensible àl'entregent du contrevenant, à ce qui témoigne de son statut so-cial. Sans le dire, nous savons que les réseaux de relationsexercent un effet bénéfique au profit des contrevenants vir-tuels par la pratique du "faire sauter". La difficulté étantbien entendu de disposer d'un réseau de relations adéquat, cequi circonscrit le groupe social des bénéficiaires.

L'étude RCB de 1969 reprend et développe à sa manièrel'idée de personnalisation des primes par Bonus-Malus commemoyen d'aboutir à une tarification plus juste c'est-à-diremieux adaptée à la probabilité réelle de risque de chaque as-suré. D'entrée de jeu les auteurs soulignent trois faiblessesdu système :

- Un comportement dangereux n'entraine pas nécessairement laresponsabilité de son auteur en cas d'accident.

:: V. LECA op.. dit."" fiappo>ité. peut V, IECA op. cit.

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- Le système ne tient pas compte du coût ni de la gravité de1'accident.

- En raison des limites précédentes les pénalisations doiventrester faibles.

Les auteurs pensent également que l'introduction de cesystème n'entraînera pas de surcharge dépassant les possibilitésinformatiques des assurances. Ils insistent sur la nécessité queles changements d'assureurs n'entraînent pas le retour à la pri-me de base, et que les effets du système suivent de près lesaccidents survenus aux assurés. Ils font par ailleurs l'hypothè-se que l'application de cette méthode de personnalisation desprimes pourrait entrainer un phénomène de rétention des décla-rations de petits sinistres, ce qui serait certes de nature àdiminuer les dépenses des sociétés, mais fausserait l'objectifde personnalisation des primes.

Le 8 janvier 1970, Monsieur Giscard d'Estaing alors Minis-tre des Finances, exige des assureurs, en échange d'une miseen liberté de leurs tarifs qu'ils avaient réclamée, l'insertiondans les polices d'assurance d'une clause de réduction et demajoration des primes. Les assureurs contraints appliquèrentchacun leur propre système.

Le sondage automobile des assurances de 1975 donne quel-ques indications sur les effets produits par cinq années d'ap-plication du régime.

Graphique n° 12Répartition des conducteurs en % selon les tauxde bonus ou malus dont ils bénéficient :

+ 10 20 30 40 50

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On peut donc constater que 80 % des conducteurs bénéfi-cient d'un bonus, tandis que 7 % sont frappés de malus. La partdes conducteurs classés en malus s'accroit en fonction du grou»-pe, des petites voitures lentes (0 à 4) aux grosses voituresrapides (13 et +).

Groupe

Bonus

Prime Base

Malus

81

13

4

4

,6

,6

,8

5 +

80

13

5

6

,7

C> -

7

82,

12,

5,

1

3

6

8

77,

16,

7,

0

0

0

9

79,

12,

7,

7

9

4

10

79,

12,

7,

9

7

4

1

79

12

8,

1

,3

,5

2

12

78,8

12,1

9,1

13

77,

H,

10,

5

9

6

Total

79

13

6

,8

,3

,9

C'est au mois de juin 1976 qu'est pris un arrêté imposantune clause type de Bonus Malus valable pour l'ensemble des so-ciétés d'assurance pour les véhicules. Cette clause type re-prend le principe de personnalisation des primes en vigueurdepuis 1970, et il définit des modalités uniques d'application.Voici quelles sont les modalités.

Lorsqu'un conducteur veut s'assurer pour la première foisauprès d'une société, il est classé d'après la propositiond'assurance dans une catégorie du tarif. La prime qu'il doitpayer est celle de référence pour cette catégorie (P.). Aprèsun an sans sinistre (sans accident dont l'assuré soit respon-sable par exemple) la prime est diminuée de 10 %. Après deuxans sans sinistre, la prime est de nouveau diminuée de 10 % dela prime "R". (l'assuré paie alors la prime R moins 20 % ) .Après trois ans sans sinistre, la diminution est de 25 % (tou-jours par rapport à la prime R). Chaque année suivante sanssinistre entraîne une réduction de 5 % de la prime R, jusqu'àce que la réduction atteigne 50 % de la Drime R.

Mais si un sinistre survient la première année d'assuran-ce, la prime est majorée de 10 % de la prime R. Si l'automobi-liste est responsable d'un deuxième accident la même année,cette prime est majorée de 40 %, de 100 % au troisième, de200 % au quatrième, 300 % au cinquième, etc.. toujours pourla même année.

Le montant des primes peut ainsi augmenter et baisser suc-cessivement au cours des années. Si la prime est inférieure ouégale à 80 % de la prime de référence, chaque réduction annuel-le ne sera plus que de 5 %. Inversement, on peut considérer(bien que cela ne figure pas dans l'arrêté) que si la primeest supérieure à 80 % de la prime de référence, la réductionannuelle sera de 10 %, même s'il ne s'agit pas des deux pre-mières années.

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D'autre part, après deux années consécutives sans sinistre,la prime ne peut dépasser la prime de référence. Inversement,après deux années consécutives pendant lesquelles se sont pro~duits au total deux sinistres au plus, dont un au moins au coursde chacune de ces deux années, la prime ne peut être inférieureau tarif de référence."

Ce système offre le mérite d'être simplifié, il n'en estpas pour autant limpide, c'est pourquoi la direction des assu-rances et plus largement les sociétés, ont diffusé des cas defigures.

Premier exemple :

10

Graphique n° 13 :

Assuré n'ayant pas de sinistre

1 I2 3 ! 4 ! 5 ! 6 ] 7 J 8 J 9 ^

e>©coiaa

_~J BONUS

i i i MALUS

B © AccidentsTraffic n° 33. Sept. 77

C)J. loM cakLvu do. l'aA&uAance.. "Vl\ - 1977.

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C'est l'exemple type du conducteur parfait. Il lui fauthuit ans sans aucune responsabilité dans un accident pour lemaximum de la bonification, situation aussi inconfortable quedigne de fierté. Il n'y a plus de gain à espérer, mais gare àla chute elle risque d'être vertigineuse.

Deuxième exemple :

Graphique n° 1A. Assuré ayant 1 sinistre en année 1et 2 sinistres en année 3

4O

20

10.

10

?0

25

10

35

4O

45

5O

| Après 2 ons sans sinistre, le malus est annulé en année 6

i p i i I I

1

-

-

-

3

§11•• il

III7 . 8 9

; 1

I

_

Le mécanisme se voit bien : un accident = plus 10 %, deuxaccidents = + 40 %. Puis application du principe du "retour ra-pide" : après un an sans sinistre - 10 % puis deuxième annéesans sinistre retour à la prime de base. De même un conducteurqui aurait la même année cinq sinistres responsable verrait saprime monter à plus 300 %, redescendre l'année suivante sanssinistre de - 10 % et pour une deuxième année consécutive sanssinistre de - 290 %.

NB : Ce graphique extrait d'une brochure du service d'informa-tion du ministère des finances, laisse croire après la 8èmeannée à une descente de bonification de - 20 % à - 50 %. Iln'en est rien et il faut se reporter au premier exemple.

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Troisième exemple :

Graphique n° 15. Même cos que l'exemple 2mais le bonus de départ est de 35%

15

10

10

20?5

30V i

4045.

50

Le taux de réductionou lieu de 10%

-

3

!

WmM 5

est de 5 % en année 3comme précédemment

j ; '

6

• • ' . : - i

7 ! 8

-

9

I!

Voilà bien un des "trous noirs" de l'espace de la person-nalisation des primes, c'est la parabole moderne du malusienrepenti. En effet la bonne conduite du bonusien en 2 après unaccident en 1 lui vaut - 5 %, tandis que la conduite repentiedu malusien en A après deux accidents en 3 lui apporte - 10 %.

Quatrième exemple :

Graphique n° 16. Assuré ayant 2 sinistres en 2ans

15

10

10

?0

30

4045

50

1

II perd son bonus

... . _..

3

en année

4 ! 5 ! 6 7 8

3i

i9 ;

i

i

il

l

ii

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C'est le principe du "retour rapide" mais appliqué cettefois dans la remontée vers la prime de référence. C'est l'épéede Damoclès suspendue au dessus de l'assuré parfait du premierexemple.

En dehors du mécanisme que nous venons ainsi de rappeler,il faut remarquer que le taux de bonus-malus d'un assuré se con-serve lorsqu'il change de véhicule aussi bien que lorsqu'ilchange de compagnie d'assurance.

Les accidents qui sont retenus pour le calcul des bonifi-cations et majorations, sont ceux survenus pendant l'année écou-lée précédent de deux mois l'échéance de prime et dans la mesu-re où ils sont susceptibles de faire jouer l'une des garantiesdu contrat à l'exception

- des accidents dont est totalement responsable un tiersidentifié,

- de vol, incendie, bris de glace, défense et recours,- des accidents survenus lorsque le véhicule est en sta-

tionnement régulier, même si le responsable n'est pasidentifié.

Lorsqu'un assuré dispose d'un véhicule supplémentaire, iln'est pas tenu compte du bonus ou du malus de la première voi-ture pour l'assurance de la nouvelle.

La nouvelle réglementation du bonus malus a fait l'objetd'une présentation par Monsieur Guy Delorme, directeur des as-surances au ministère de l'économie et des finances en mars1977. Dans cette présentation les objectifs du système sont in-diqués. Il s'agit concurremment d'être conforme à la justice,et d'inciter à la prudence. De quelle justice s'agit-il ? Nousserions tenté de dire qu'il s'agit de celle qui se fonde ens'énonçant dans un discours d'autorité. L'argument utilisé con-siste à indiquer que seulement 0,5 % des automobilistes sontresponsables de trois sinistres ou plus en un an, soit 80.000personnes sur 16 raillions de conducteurs. La nécessaire solida-rité mutualiste du partage de la couverture des risques s'esteffacée au profit d'une équité constituant en réalité un méca-nisme d'exclusion.

Guy Delorme déclarait également : "Le Bonus Malusapparaît ainsi comme une contribution de l'assurance à la pré-vention des accidents de la route". Il s'agit là d'une affirma-tion tout à fait problématique. Dans cette conférence de presseapparaît également le langage du consumérisme. Après le conduc-teur, l'automobiliste, 1'assuré, 1'impliqué, le sinistré, voiciune nouvelle casquette, celle du consommateur. Le discours tenuest une pure pétition de principe : "le consommateur sera clai-rement informé".

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Comme le notait l'auteur de la circulation routière" lescontrats d'assurances sont toujours obscurs dans leur rédactionet jusque dans les caractères typographiques de leur imnression,et que des gens avertis dans le domaine du droit peuvent éprou-ver des difficultés à les interprêter. Le Bonus Malus va-t-ilapporter un ilôt de clarté dans un océan d'obscurités ? On peuten douter car la seule information certaine c'est l'apparitionsur l'échéance de prime de l'assuré du résultat du système deBonus Malus sous forme d'un pourcentage positif ou négatif, etson effet sur la prime à payer. Mais derrière cette information,claire, voilà ce qu'il faut payer, l'obscurité c'est : ou bienle manque de lien avec les sinistres, ou bien la géométrie cu-rieuse de l'espace bonusien-malusien.

- Le manque de lien avec les sinistres. Nous avons signa-lé que la responsabilité, issue du codage des faits dans lesaccidents par le barème de l'IDA, diffère sensiblement de lareprésentation que l'accidenté a des responsabilités. Lorsqu'àl'échéance de prime tombe le verdict de l'année écoulée l'assu-ré ignore le résultat des responsabilités qui lui ont été im-putées.

- La géométrie curieuse de l'espace bonusien-malusien.Nous avont montré dans ce chapitre le fonctionnement particu-lier de déclenchement des bonifications ou des pénalisations.Nul doute que ce système variable selon la position ne déroutefortement bon nombre d'assurés habitués à ce que les mêmes cau-ses produisent les mêmes effets.

Quelques points méritent encore d'être examinés. Nousavons déjà indiqué précédemment que le système de Bonus Malusqui a été imposé ne tient aucun compte du degré de gravité desaccidents survenus. Il est ainsi notable de constater qu'unaccident anodin donnant lieu à un léger accroc de tôle ou depeinture et qu'un accident très sérieux impliquant plusieursvéhicules et entrainant décès et blessures graves, entrainerontchacun pour l'assuré concerné l'application du même malus.Une conductrice particulièrement prudente, faisant l'essentielde ses trajets en ville, ayant éraflë l'aile d'une voiture cequi arrive à peu près inévitablement, supporte la même pénali-sation qu'un conducteur doublant sans visibilité à pleine vi-tesse et provoquant un grave accident corporel.

La justification de cette égalité de traitement tientdans la probabilité d'accident grave dans le futur qui seraitplus grande pour les automobilistes ayant déjà eu dans le passé

" E. Vtz.njjia.nd. la cÂAculcutlon noixAÂ.o.h.0.. Voame.yvta£ijonop. cit.

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des accidents même bénins. Dans un champs qui repose sur la vo-lonté d'individualiser et personnaliser les primes en fonctiondes risques réels on voit réapparaître un flux statistique glo-bal intégrant des accidents non-survenus. Il est probable quela gestion des petits sinistres coûte relativement cher et quene pas les prendre en compte pour le déclenchement d'un maluscompromettrait l'équilibre du système.

La pratique du malus s'est aggravée après le décret de1976 par rapport aux taux pratiqués auparavant. Cette aggrava-tion a comme conséquence de décourager les assurés de déclarerles sinistres dont le montant risque d'être inférieur à celuidu malus qui leur serait appliqué en cas de déclaration. Commel'indique le professeur Jean Bigot::"ce système aboutit indirec-tement à une franchise ou auto-assurance déguisée". C'est-à-di-re que le mécanisme rejette sur l'assuré la part des sinistresingérable par les sociétés.

Le libéral capitalisme, par la place qu'il donne ici aufacteur humain, renvoie aux assurés un système social complète-ment contrôlé tout en leur accordant l'illusion de s'y mouvoirlibrement.

Le développement de l'automobile est favorable au déve-loppement des affaires. Toutes les voitures (ou presque) sontassurées. Les sinistres graves (décès) sont dès affaires coû-teuses à régler et des clients en moins. Ainsi les assurancesont perdu, bien que cela n'ait pas beaucoup de sens, environ250.000 clients entre 1960 et 1977, de même que la réserved'invalidités à réparer s'accroit constamment.

On le voit chaque fois que de nouvelles pratiques sontintroduites dans le fonctionnement des assurances, il se pro-duit des cris, des à-coups, des remises en ordre. L'industriede l'assurance redoute par dessus tout les déséquilibres. Toutrepose sur un mécanisme régulateur du rapport sinistres/primes.En période de croissance régulière de l'automobile le volumedes primes s'accroit. Le volume des sinistres s'accroit égale-ment. L'amélioration du risque par l'instauration de la préven-tion a comme effet de réduire le volume des sinistres et d'amé-liorer le rapport s/p. Situation favorable pour les assurancesdans les limites où il devient commercialement intéressant dediminuer les tarifs.

La politique de prévention des assurances répond avanttout à des nécessités internes.

:: l'Aigu* 3.12.76.

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La fonction de l'assurance et de sa spécialité, l'actua-riat c'est le traitement de l'aléatoire, de l'accidentel, du si-nistre et sa traduction en du certain, échelonné, ordonné, barê-mé et tarifé. A un monde chaotique parsemé d'événements acciden-tels de dommages irréparables, se substitue l'harmonie des thé-ories de primes, d'échéances, de constats amiables.

De même que le crédit masque le coût de l'automobile,l'assurance masque le coût de l'accident. Elle transmute descorps ou parties du corps morts en argent.

Nous avons montré comment se déploient des réseaux, desreliefs, des codes qui enserrent le corps social des conduc-teurs. Nous avons dit que ces dispositifs repèrent tout ce quidévie, tout ce qui bouge. "L'accident occulté dans ses signifi-cations est une forme de réaffirmation de l'ordre : la figurede la révolte est absorbée par celle du malheur"."

L'assurance transmute la vie en chose, absorbe l'aléatoi-re, le délaie en état de sécurisation permanent.

5- LA REDUCTION DU FACTEUR HUMAIN PAR LA PREVENTION ROUTIERE.

A. CONTEXTE DE CREATION DE LA P.R. •

On peut légitimement se demander ce qui a bien pu pousserles sociétés d'assurances à créer une offre de sécurité, con-crétisée par l'institution de la Prévention Routière en 1949-On peut penser que le développement de l'industrie automobileet de la mobilité automobile concomitante , trouvait là un élé-ment de remède aux disfonctionnements mortifères du systèmeautomobile.

La recherche des intérêts bien compris du commerce del'assurance automobile, convergeant avec ceux des autres par-ties prenantes dans la fondation de la P.R. serait cependantincomplète. C'est à l'intérieur même des assurances qu'il fautchercher les ressorts des initiatives prises dès 1946 qui vontpréfigurer la police de la route, avant que ne soit créée laPrévention Routière. :

.0. QUERCU1L eJtC. HXMEILE. La tepKl&ewtatiqn *o,<UaZe. de. l'ac-clde.nt. Un mj'eu de. pouvoir. C.E.R.F.I. 1978.

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Quelle est la situation des assurances en 1946 ? On peutdire qu'elle n'est guère florissante. On a vu que l'industriedes assurances est très sensible aux fluctuations monétaires.Et l'issue de la guerre voit la puissance financière des assu-rances au plus bas.

En 1914 les placements réalisés par les sociétés d'assu-rances représentaient les 8/10 des dépenses budgétaires publi-ques de la France. En 1946 ils n'en représentent plus que le1/10. Et ce phénomène est propre aux assurances françaises.Jusqu'en 1946 l'assurance accidents malgré la réduction énormedes affaires automobiles était soutenue par la revalorisationautomatique des affaires d'accidents du travail et de risquesexceptionnels.

"L'assurance accidents du travail a été la "bête de somme"de l'assurance française de 1940 à 1946 et a pallié l'effondre-ment de l'assurance auto"."

La dévalorisation monétaire amenuise la solidité finan-cière des assurances de plusieurs manières :

- elle diminue le pouvoir d'achat des réserves,- elle oblige à puiser dans ces réserves pour payer les

frais de gestion,- elle accroit les charges de commercialisation (agents

et courtiers).

Sur ce dernier point on note que les commissions d'acqui-sition versées aux agents et courtiers sont fixées à un tauxélevé : en 1945 il se situe à 16,3 %, alors qu'on trouve dansla période d'avant guerre des taux moyens de 7 à 8 %."" Lesmenaces de disparition des entreprises d'assurance entraînéespar la dévaluation monétaire imposent ce taux élevé.

La libération en 1945 voit la mise en application d'uncertain nombre d'idées directement issues du Conseil Nationalde la Résistance.

Cette mise en application se traduit par un profond bou-leversement pour les assurances. C'est d'abord la création dela Sécurité Sociale le 25 octobre 1945 qui nationalise les as-surances accidents du travail. Cette amputation porte un couptrès dur aux entreprises d'assurances. On a déjà signalé plus

:: J. FOURASTIE. Lte cumAanceA. LLb. S-ôtet/. 19 48 .::"Ce taux QMt d'wvlmon 1 4 § en 7977.(AGSM. 797S ).

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haut le rôle que jouait cette assurance dans la branche acci-dents. L'assurance accidents du travail représentait en 1938 le1/3 du chiffre d'affaires total des assurances accidents et ris-ques divers. C'est ensuite la nationalisation d'une trentainede sociétés d'assurance privées le 25 avril 1946, bien que leprojet à la Libération ait été la nationalisation de l'ensembledes assurances.

Pour les sociétés d'assurances automobiles, même si l'ave-nir est devant eux, la situation n'est pas brillante. Pour amé-liorer cette situation, il y a d'une part la hausse des tarifs.Ceux-ci ont été augmentés de 500 % pour l'automobile de 39 à 46alors que ceux des autres accidents n'augmentaient que de 20 %.D'autre part il y a la réduction des frais de gestion et ladiminution des sinistres.

Car la reprise de la circulation routière se fait dans desconditions difficiles : mauvais état des véhicules, inexpérien-ce générale des conducteurs, mauvais état des infrastructures.La fréquence des accidents croit d'une manière inquiétante, enparticulier pour les assureurs cela se traduit par la multipli-cation des sinistres.

C'est dans ce contexte général que les assureurs sontpoussés à appliquer au domaine automobile ce qui s'était imposédans le domaine des accidents du travail après la loi de 1898.La pratique de prévention.

Cette pratique devait voir le jour le 2 mars 1946 avec lelancement par l'association générale des sociétés d'assurancescontre les accidents de l'assistance routière des assurances(A.R.A.). Ce jour là 30 motocyclistes équipés par l'ARA prirentle départ pour exercer une surveillance sur les grandes routesaboutissant à la capitale. Leur programme était le suivant ;prévenir les accidents en se plaçant aux carrefours dangereux,secourir les blessés, assister les automobilistes en détresse,se tenir toujours en liaison étroite avec la gendarmerie.

Après trois ans de fonctionnement l'Association décide defaire mieux encore. Les assurances mobilisèrent autour d'ellesce que Sauvy appellerait le lobby automobile : Fédération Na-tionale des clubs Automobiles, Union Routière de France, Fédé-ration Nationale des Transports Routiers, Union des Usagers desVéhicules de Transport Privé. Tous ensembles ils firent uneextension à l'ARA. Ainsi naquit la Prévention Routière. Les mo-tocyclistes de l'ARA, devenus les "Anges gardiens de la circula-tion" furent mis à sa disposition ; leur nombre s'accrut et leurrayon d'action fut étendu. Mais l'Etat devait bientôt reprendrele flambeau et le 17 juin J953 la Prévention Routière remettaitses 43 motocyclettes à la Gendarmerie Nationale.

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Dans cette création on doit mentionner le rôle clé del'Union Routière, réunissant les principaux intérêts économiquesliés à la route. Le président de l'Union routière prend la pré-sidence de la Prévention Routière et reste simultanément à cesdeux postes jusqu'en 1974. Il créera également en 1948 la Fédé-ration Routière Internationale avec le concours des grands pé-troliers et la Prévention Routière Internationale en 1955.

Dans cette association les Assurances apportent le finan-cement, et l'Union Routière, qui oeuvre pour le développementde l'usage automobile considéré comme socialement bon et éco-nomiquement excellent, la doctrine.

B. STRUCTURES ET HISTOIRE DE LA P.R.

A sa création la Prévention Routière fonctionne comme unpetit bureau d'études qui dans les premières années couvre laFrance entière de panneaux indiquant : "ici tant de morts l'andernier" matérialisant ce qu'on appelle les points noirs.Et jusqu'en 1958 elle poursuit des campagnes de sensibilisationaux prolbèmes de sécurité, elle édite des tracts, des films,des affichettes, en réalisant des petites études.

Dès le départ trois règles sont fixées : la P.R. est unorganisme privé distinct de l'Etat. Cependant, cet organismene se veut ni un syndicat de défense, ni une structure de con-testation, très Dara-public, son ambition est de coller de fa-çon très étroite avec la fonction publique.

Par ailleurs il s'appuie sur une structure de comités im-plantés dans les départements. Cette structure d'origine estdéveloppée après 1958 en trois activités parallèles.

Le bureau d'étude a poursuivi son développement de plusen plus sur contrats d'Etat en particinant aux campagnes de sé-curité, et auprès de certains organismes tels que l'armée, EDF,etc.. L'association la Prévention Routière compte, en 1978327.000 membres qui versent une cotisation minimum de 70F.

L'école de la Prévention Routière, forte de 80 moni--teurs traite en moyenne 300 élèves par jour.' Par ailleurs, laPR a développé son réseau de comités dënartementaux. Chaque co-mité est sous "la présidence d'honneur du préfet". Le présidenteffectif est en général un notable bénévole, grand chirurgien,gros garagiste, patron d'un cabinet d'assurance, lequel estassisté toujours d'un directeur appointé à plein temps qui estun ancien de la Fonction Publique Routière, commandant de gen-darmerie, commissaire de police, ex-fonctionnaire de l'Equipe-ment, tous ayant été impliqués, dans la Sécurité Routière quandils étaient en activité.-; ;; çj'apn.è.6 R. ?X4S.\R0, S(>CA.UcuA.e.

êl de. la VnAvuyvtion V.oujtièJin.

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II faut y ajouter 1200 délégués correspondants et 7500 corres-^pondants municipaux pour une action en profondeur.

La question de la "nationalisation" de la Prévention Rou-tière s'est posée vers la fin des années 60 lorsque sous l'im-pulsion de Jacques Baumel la sécurité routière fit ses premiè-res apparitions socio-politiques. Il est alors sérieusementenvisagé de faire de cet organisme un établissement public,sorte de comité national de la sécurité routière. Finalementla P.R. a réussi à conserver son statut privé auquel elle étaittrès attachée, et en même temps s'est imposée l'idée de créerun organe interministériel."

C. PREVENTION DES ACCIDENTS OU DEFENSE DE L'AUTOMOBILE.

La doctrine de la Prévention Routière se fonde sur lanécessité de réguler l'usage de l'automobile en rendant la cir-culation plus sûre par une action pédagogique en profondeur etune large information de la population. Cette action passe parla diffusion massive de normes de comportement adéquates à l'u-sage automobile.

Mais lorsque le besoin s'en fait sentir l'organisme saitmarquer face à l'action des pouvoirs publics les limites audelà desquelles l'usage automobile, trop contraint, est compro-mis .

"La réglementation et la répression ont atteint deslimites. Il y a un phénomène de "ras le bol" vis à vis de laréglementation. Il n'y a rien de plus dangereux pour un gouver-nement que d'imposer une loi que l'on ne peut faire respectercar elle n'est pas acceptée par le public.""

Lorsque le CISR a voulu imposer la ceinture en ville, lescodes allumés de jour pour les voitures "j'ai fait un ëdito :pas de zèle, on a du mal à digérer les limitations, n'en rajou-tez pas pour le plaisir !"."::::

Une analyse des campagnes de propagande de la P.R. a étéfaite par le Cerfi.""""

:c CjJ. chapitre VI.:::: M. CALLIENE ancien président de l'Union RovJjJèxe o£ de la

Prévention RoutlèAe. (Interview)

"""R. B.NSARV [Interview)

"""" C QUERQU1L etC. H ARME JE op. cit.

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Le discours de la prévention enjoint aux usagers, piétonsdeux ou quatre roues de se soumettre aux impératifs de la circu-lation automobile. "Ici se signale pour une part la spécificitéinstitutionnelle de la P.R. qui est d'être fondamentalement unorganisme de défense de l'automobile".

La Prévention Routière contribue certes pour sa part àl'offre de sécurité.

Mais elle développe, en mobilisant un réseau de notableset d'anciens cadres de la gestion routière, en formant les ca-dres des auto-écoles, en intervenant sur les jeunes dans lesécoles, une véritable prophylaxie des comportements inadaptésà l'usage automobile.

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CHAPITRE VIII.

CONCLUSION.

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Le développement de l'usage de l'automobile et la mise enplace d'institutions et d'actions de sécurité routière ont étéprofondément influencés par la politique de l'Etat, dont untrait dominant est le souci constant de la préservation et del'expansion du secteur industriel automobile.

On ne peut comprendre ce qui s'adresse à nous comme unphénomène naturel, "1'automobilisme", sans se rapporter auxgrandes options et aux intérêts souvent conjugués de la hauteadministration, de l'appareil d'Etat et du secteur industriel.

On ne peut non plus comprendre la tardive intervention del'Etat dans le champ de la sécurité routière sans faire réfé-rence aux enjeux socio-économiques liés au secteur et aux mul-tiples sous-secteurs d'intérêts qui lui sont associés. C'estpourquoi, il est important de considérer le "besoin de mobilitéautomobile" et "la demande de sécurité" comme des faits sociauxc'est-à-dire étroitement articulés à une écologie sociale et àun système d'enjeux socio-économiques.

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1. ECOLOGIE SOCIALE ET ENJEUX SOCIO-ECONOMIQUES DU BESOIN DEMOBILITE ET DE LA DEMANDE DE SECURITE.

L'écologie sociale dont il est question ici est principa-lement celle dés modèles sociaux, ayant force de normes, quiont conduit les planificateurs et, dans une certaine mesure,l'appareil d'Etat dans son ensemble, à la justification répétéede l'usage de l'automobile, à la légitimation des priorités etdes décisions accordées à son développement, à l'instaurationd'un relatif consensus entre les décisions administratives etles incitations du secteur industriel. Cet environnement socialse spécifie en environnement institutionnel dès lors qu'il s'a-git de décrire les conflits d'institutions entre territoiresadministratifs, les représentations sociales des décideurs tou-jours plus rigides à l'égard du facteur humain des causes del'accident de la route et les manières de faire de l'administra-tion, à la fois par compromis institutionnel et par promulgationde décrets et de réglementations, dont le volontarisme est sup-posé être compensé par la croyance aux vertus pédagogiques etdémocratiques de campagnes d'information et de jeux télévisésédifiants.

Il est probable que la formulation des besoins de mobilitétrouve son origine dans cette écologie qui échappe et qui estrelativement extérieure aux sujets qui les formulent. Le besoin,comme fait social, s'élabore et se construit d'une manière rela-tivement autonome des acteurs sociaux qui en sont les sujets :l'aménagement du territoire, les politiques urbaines, la plani-fication et la distribution spatiale des zones d'activité ren-forcent et cristallisent les orientations administratives et lesséparent d'autant des sujets de l'administration. Le système degestion des besoins sociaux impose l'automobile à la ville, quidoit s'en accommoder avec ses rues, ses quartiers, ses habi-tants, ses piétons ; des budgets énormes sont investis dans larénovation et l'extension de la voirie urbaine '• boulevardspé-riphériques, rocades, pénétrantes, voies express, structurentl'espace urbain, accentuent les oppositions entre le centre et.la périphérie, normalisent les migrations alternantes quotidien-nes, définissent un nouveau style de déplacement domicile/tra-vail, attribuent un nouveau sens aux déplacements de loisir deplus en plus dépendants et orientés par la motorisation, modi-fient les rythmes et les modes de vie. Dans le même temps, alorsque le secteur industriel s'accroit, les mécanismes d'achat del'automobile sont grandement facilités par le crédit à la con-

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sommation, la politique des transports de l'Etat fondée sur laconcurrence entre les modes occasionne le ralentissement del'effort d'expansion des transports collectifs et la réductionde la qualité du service.

Par ailleurs, le domaine de la sécurité routière est ra-pidement balisé puis catégorisé par l'appareil administratif quiintroduit son mode de pensée systémique, son système de repré-sentation des causes de l'accident de la route, ses idées sur la"psychologie" de l'usager, son système d'information du public,son code de sanctions et de gratifications, ses dispositifs derépression et de punition. '

Le processus de catégorisation sociale de la sécuritéroutière est considérablement renforcé par l'appareil productifqui introduit par de multiples canaux de communication et déve-loppe par des campagens publicitaires répétées sa propre concep-tion de la sécurité routière fondée princinalement sur la sécu-rité primaire des véhicules, conception ambiguë qui transformeadroitement les qualités dynamiques des véhicules en autant decaractéristiques de sécurité.

Ce processus est enfin fortifié par l'appareil assurantielqui convertit les figures de la mort et de la blessure en descatégories bureaucratiques et monétaires, caricatures ironiqueset marchandes du corp humain.

La mobilité des citoyens et leur sécurité, c'est-à-direles garanties de protection et de prévention des accidents,sont devenus les objets de la gestion de la société administra-tive qui leur a imprimé une orientation particulière et qui adéfini les catégories légitimes d'application de la sécuritédans le système de circulation. Ces catégories d'action trouventleur origine et leur légitimation dans une modalité spécifique :l'intervention régulatrice.

2. INTERVENTION REGULATRICE, MODELES DE REGULATION ET REGULATIONDES RAPPORTS SOCIAUX.

Dans le domaine de la prévention des accidents de la rou-te considérés comme un output fatal et inéluctable du système decirculation, les modalités d'intervention de l'Etat sont tyni-ques tant dans leurs formes que dans leurs finalités. L'inter-vention requiert des préliminaires administratifs pour la pré-paration des nouvelles réglementations : consultation des grou-pes socio-professionnels impliqués, réunions de commissions re-groupant les agents de l'Etat et les renrësentants de ces grou-pes. Puisqu'il s'agit de sécurité routière, les constructeursautomobiles, les pétroliers, les compagnies d'assurance, laPrévention Routière, seront en priorité consultés. Leurs inter-

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locuteurs sont d'une manière générale les agents d'un grandcorps de l'Etat : les Ponts et Chaussées. Ces commissions re-groupent donc des techniciens. Cependant, et comme on a pu leconstater, la rationalité technique qui est supposée commanderla prise de décision dans ces groupes n'est pas exempte de di-mensions idéologiques, systèmes de représentation relativementcommuns aux agents de l'Etat et aux groupes socio-profession-nels. Les points de consensus les plus avancés sont : la nonremise en cause de l'automobile comme moyen de transport indi-viduel dominant, l 'attribution de la cause des accidents de laroute au conducteur. Ce faisant, le contenu des échanges estpresque toujours de tonalité réformiste, sauf sur quelquesquestions de principe. L'une des raisons est probablement l 'ab-sence d'organisation représentative des usagers (il n'en existepas) ou d'organisation syndicale là encore représentative, com-me c'est le cas par exemple au Conseil Economique et Social.

Ce processus est typique des habitudes de la haute administra-tion française qui a tendance à choisir ses interlocuteurs lé-gitimes parmi les groupes socio-professionnels et à exclure lesregroupements d'usagers ou les organisations syndicales soup-çonnées d'obéir à "des principes malthusiens"-" dans la défini-tion des objectifs politiques; l'harmonie -plus ou moins con-flictuelle- entre les groupes socio-professionnels et l'adminis-tration étant supposée en revanche refléter l ' intérêt général.Dans le cas de la préparation d'un dossier technique tel lalimitation de vitesse ou la sécurité des véhicules on peut direque les débats avaient pour fonction secondaire -sinon primaire-de convaincre ces groupes, notamment constructeurs et pétroliersde 1'inéluctabilité technique et de l'opportunité sociale de

"Au nlvzau du pouvolx czntnal, Voppo&ltlon zntxz pKlnclpu"dynamlquu" zt "malthuAlznt," iemblz dlt>cAÂmlneA lu gnoupuIzgltimu zt HlzgltÀmz* : "Chaque. admlnLt,tn.CLtlon de.cA.do. poun.zllz-mêmz avzc quzli gnoupu zULz auxa du contacta apph.o^on-dÂj, zt quzli anaupu éZKont phii ou molni Icujxb&l, à V zca/vt.ikaÀM qu'ZAt-cz quÂ. diitlnguz lu gfiou.p<it, dynanu.qu<Us du gfiou-pu matthuAicviA 1 Lu gh.ou.pu dynamlquu ioyvt ceux dont la.^oKce. économique, e&t teJULz qu'on ne. pzuX. lu ignoteA. Hac6,huKJtout, JUUi kont conA<LdéAéA comme. lé.gÂJJmu pax.cz quz leu/u,izvzndiccutionA coïncident avzc la polltlquz gouveAnementalz.LZA gfwupu maUikvJilznii d'autsiz poAt, comme Iz soulignait

un dhtzctzuh. du mlnlî>tZKz du Finance*, t>ont ceux dont IziJizvendlccutionA vont à Vzncontxe dz la. polltlquz gouveAnz-mzntatz".Ezfia M. Sulzùnan. lu hauti ^onctlonnaÂAU et la. polùtlquz.Le Szull - 1976.

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l'institution de mesures de sécurité routière. On peut en toutcas faire l'hypothèse que le consensus sur la rationalité tech-nique, l'accord sur l'usage et l'avenir de l'automobile, l'ab-sence d'organisation représentative des usagers ou d'organisa-tions syndicales ont défini, en grande mesure, la nature "régu-latrice" des actions envisagées, c'est-à-dire de contrôle de lamobilité des usagers.

La définition de la politique de sécurité routière a re-quis la mise en place d'une structure administrative horizonta-le; la Mission Interministérielle, l'application du programmefinalisé de sécurité routière, et l'intervention d'un "chefcharismatique", c'est-à-dire au moins trois niveaux d'interven-tion institutionnelle. Ce dispositif est probablement .là encoreassocié aux habitudes de travail des ministères, cabinets etdirections centrales dont les modes de fonctionnement, décritsnotamment par Ezra N. Suleiman s'appuient souvent sur des rè-gles de concurrence et des codes de discrétion. Or, mise à partl'influence des groupes de pression, l'environnement institu-tionnel de la sécurité routière est complexe. Plusieurs minis-tères sont concernés, Intérieur, Défense, Equipement, Santé ...dont les orientations, les objectifs et les modus operandi con-vergent difficilement. Ce qui explique peut-être certaines dif-ficultés rencontrées par le Délégué à la Sécurité Routière-certaines "pesanteurs sociologiques"-/ le rattachement de laDélégation au Premier Ministre et l'importance de l'impulsionde Jacques Chaban-Delmasr

Les gestionnaires de la sécurité routière emploient lavoie réglementaire et législative. Dans la mise au point de laréglementation (limitation généralisée de la vitesse, tort obli-gatoire de la ceinture de sécurité) ou de la législation (tauxlégal d'alcoolémie) ils s'appliquent à convaincre ou à obtenirl'accord des groupes socio-professionnels concernés (viticul-teurs, constructeurs). En revanche, la communication avec lesusagers démarre le plus souvent avec ou après la mise en placede la mesure. La nature de cette communication est généralementformelle ; elle est médiatisée par la télévision, la radio, lapresse et se manifeste sous la forme de messages publicitairesou de jeux. Le feed-back est opéré par le biais des institutsde sondage d'opinion, véritables et seuls interlocuteurs desPouvoirs Publics, qui assument un rôle social de substitut géné-rique des usagers. Les gestionnaires de la sécurité routièrefont en général confiance à la publicité, dont ils contrôlentd'ailleurs les thèmes et les formulations, pour persuader lesusagers du bien fondé de leurs interventions et ils accordentbeaucoup d'importance aux sondages d'opinion pour orienter leuraction et pour mesurer son impact. Le "marketing social", nou-velle catégorie technico-marchande du monde de la publicité fi-gure probablement, dans cette communication à sens unique, ce"supplément d'âme" accordé à la rigueur objective de la régie-

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mentation, au même titre sans doute que la représentation pater-nelle et bon-enfant du Gendarme aux jeux télévises.

L'intervention par les mass média obéit vraisemblablementà un modèle de régulation : l'influence sur les opinions et lesattitudes à l'égard des actions de sécurité vise à réduire ledécalage objectif entre les exigences de mobilité et les con-traintes de sécurité. Elle ouvre sur une double démonstration :celle de l'attention que porte le pouvoir à la protection desusagers, celle de la mesure, de la modération et même de la pré-caution dont cette attention est marquée. Action, donc, de régu-lation des rapports sociaux. Le modèle de régulation est ainsiprésent à différents niveaux, économique, social, institution-nel, de la réalité sociale que constitue l'action de sécuritéroutière,

3. MODELES DE REGULATION DE LA MOBILITE ET REPRODUCTION DESRAPPORTS SOCIAUX.

Si la forme que prend l'intervention de l'Etat témoignede la prégnance de ce modèle de régulation, la finalité des ac-tions de sécurité en porte aussi fidèlement le sceau.

Dire que la sécurité routière intervient comme instrumentde régulation de la mobilité est insuffisant. C'est, d'une cer-taine manière, le coût social des accidents et la comptabilitéqui en est faite, qui ont une fonction régulatrice." Le systèmeest complexe et le rôle des compagnies d'assurance est impor-tant. L'assurance obligatoire, et parmi celle-ci l'assurancetous risques est sans aucun doute aussi un facteur de régula-tion. Si l'assurance est un facteur de sécurité -sécurité ob-jective d'ailleurs- elle n'accroit pas obligatoirement le niveaude sécurité du système dans son entier et le principe du bonus-malus ne renverse pas cette tendance, sauf à ses marges. L'as-surance est, d'une certaine manière, le garant du système. Cefaisant, elle tend à le reproduire. On peut ainsi concevoirl'offre de sécurité assurancielle comme un dispositif de repro-duction sociale dont les principes se rapportent bien entenduau paiement des primes, à la représentation des causes de l'ac-

" Vldo.oloqi.il de Vaato-Kégulation du iy-itème, ponJtée â ion com-ble., tnouve. ion expnui-ion dam, un antlcle de. John V. Williamide. la Rand C oKponation : "1'abiun.diXé de. la. conduite, iûn.e".[Foitune., -be.pt. 196 4) "Je i>uù.t> convaincu qu'iZ existe, en e.^-£et, un niveau iouhaltxblz du taux dej> acd.de.nti d'automobiZei

-de.iln.abZe. entendons-noui- d'un po-int de vue. qe.nen.aJi ; en ceie.ni qu'il eMt une. conséquence nécznaixe déchoies qui., poun.la iociété, iont d'une plus gnande vatzun." Cité pan. R, fxanck.le iavo-CA et leh opi.ni.om. i.n Vi.déologi.0. de./dam la ici.en.ce.Seui£ 1177 p. 24S.

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cident, à la doctrine de la responsabilité, au code de la route.Mais l'essence même de la reproduction sociale se lit dans lesystème des échanges symboliques qu'elle impose, inscriptiondans le corps des hommes des valeurs marchandes en usage dans lecorps social.

Sur un plan comparable, la mise en place du programme fi-nalisé de sécurité routière à partir des méthodes RCB.la dif-fusion sélective de l'automobile et la distribution inégale desdispositifs de sécurité sur les véhicules obéissent sans douteaussi à la logique générale de reproduction des rapports sociaux.

Le programme finalisé édifié à partir d'une problématiquecoût/efficacité, n'obêit-il pas à un principe de conversion mar-chande ou de l'équivalence monétaire du risque et de sa réalisa-tion dans la blessure ou la mort ? Ce phénomène trouve probable-ment son origine dans le fait que "bon nombre d'opérations pu-bliques de rationalisation tendent à rechercher un équivalentmonétaire à des avantages ou à des coûts non marchands (ex:RCB).La production hors marché n'est-elle pas évaluée par ses coûtsdans la comptabilité nationale ?""

Rationalité technico-administrative, régulation et repro-duction des rapports sociaux, telles semblent être les catégo-ries générales par lesquelles sont traités, planifiés, les be'-soins sociaux de mobilité et de sécurité.""

4. BESOINS DE MOBILITE ET DEMANDES DE SECURITE. SUITES AL'ETUDE.

La seconde phase de la recherche en contrepoint à la lec-ture de cette "offre" institutionnelle de sécurité, aura pourobjet de mettre en évidence certaines attentes caractéristiquesémises par les acteurs sociaux impliqués à divers titres, parla problématique de l'insécurité routière.

- Btuino JOBER et Bfux.no REI'ESZ VolitiqueA_ néi>idueJULei> et pla.nl-faication. C ahieM inteAnationaux de. sociologie..Vol. LXIII, 1977, p. 257.Voix également deA mêmu auteuu : la planification et la pro-duction sociale du besoin. Sociologie, et iociétu.Vol. VI, n° 2, 7973, pp 35-5/.

:::: cai.egohA.eM du planification ou 'pnoctdti de. pouvoit" qui,comme, le. iouliqne. UickeZ Foucault, "fonctionnent non pa& audwit maii à la technique., non peu à la loi maii, à la noAma-IL&ation, non paj> aux châtiment maii au contnôle.". Hiitoine.de. la sexualité.. I. La volonté de &avoin. GaULunaAd 1976.p. 11 S.

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Selon notre plan de recherche, l'analyse de la demande desécurité succède à celle de l'offre. Cette démarche peut appa-raître linéaire et dualiste. Elle se veut analytique et ce fai-sant, elle opère une partition, un découpage du réel. Elle pré-suppose à titre d'hypothèse générale, que l'objet de l'analyseest lui-même séparé, conflictuel. Elle postule ainsi un décalageentre les principes, les objectifs et les modes d'action desadministrateurs du système et les attentes des administrés quien sont les utilisateurs.

La question que nous voudrions poser est la suivante :devant la normalisation progressive de la sécurité routière,existe-t-il des attentes venant des utilisateurs, ces attentespeuvent elles être réduites à la simple reproduction de l'offrede l'administration et des diverses institutions de gestion ou,au contraire revêtent-elles un aspect plus spécifique et cri-tique ?

Le premier moment de cette phase de la recherche consis-tera à établir le corpus des instances (organisations, groupes,personnalités) et des conjonctures (mise en place de nouvellesinfrastructures ou de nouveaux espaces de déplacement) suscep-tibles de recueillir ou de favoriser l'émergence d'une "deman-de" de sécurité. On procédera ensuite à une analyse historiqueet socio-économique de l'élaboration de ces "demandes" de sécu-rité, de façon à statuer sur les enjeux qui ont amené leur émer-gence ; on cherchera ensuite à définir les articulations entrele processus d'élaboration de la "demande" de sécurité et ledispositif des normes et des modèles sociaux d'imposition del'usage de l'automobile.

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