DES FORAGES A LA SIMULATION MECANIQUE DES MASSIFS …

13
JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 1 DES FORAGES A LA SIMULATION MECANIQUE DES MASSIFS ROCHEUX, L’APPORT D’UNE APPROCHE PROBABILISTE 3D DES RESEAUX DE DISCONTINUITES. FOUCHÉ Olivier 1 , ALFONSI Pietro 1 , CHANTRON Laurent 2 , DURVILLE Jean-Louis 3 1 Laboratoire Central des Ponts et Chaussées (www.lcpc.fr), division Mécanique des sols et roches & Géologie de l’ingénieur, 58 bd Lefèbvre, 75732 Paris cedex 15, [email protected] et [email protected] 2 Centre d’études des Tunnels, 25 av. François Mitterrand, 69674 Bron cedex, [email protected] 3 Centre d’études techniques de l’Equipement de Lyon, 25 av. François Mitterrand, 69674 Bron cedex, [email protected] . RESUME : La prévision des déformations et des écoulements dans un massif rocheux au voisinage d’un ouvrage souterrain nécessite une reconnaissance géostructurale aussi complète que le permet l’équilibre entre incertitude et coût et que le justifient les concepts de modélisation et les outils de simulation numérique disponibles. L’utilisation de logiciels pour la génération des réseaux de discontinuités et leur interprétation hydrogéologique et géomécanique apparaît prometteuse pour anticiper les difficultés d’insertion de l’ouvrage au sein du massif et son évolution. Cependant, avant de leur donner un rôle dans le dimensionnement, il reste à déterminer la sensibilité de ces outils à la variabilité des solutions géométriques pour un degré de reconnaissance donné. On propose des pistes pour estimer et discuter cette sensibilité et l’incertitude de la prévision dans le cas des calculs par éléments distincts. MOTS-CLEFS : fracturation, modèle stochastique, anisotropie, sensibilité, éléments distincts. ABSTRACT : Forecasting of deformation and flow in a rock mass around an underground excavation requires a geological and structural survey as much complete as allowed by the balance of cost and uncertainty, and as justified by available modelling concepts and simulation tools. Using software for discontinuity network generation and their hydrogeological and geomechanical interpretation shows promise for anticipating the difficulties raised by the insertion of an opening in the rock mass and its evolution. However, before giving to these tools a part in the practical design process, it is needed to determine their sensitivity to the variability of the geometrical solutions at a specified exploration intensity. Here a process is proposed in order to estimate and discuss this sensitivity and the uncertainty in the anticipation, in the case of computations using the DEM (Distinct Element Method). KEY-WORDS : fracture, stochastic model, anisotropy, sensitivity, distinct elements. 1. Introduction Les forages sont un moyen de reconnaissance coûteux mais sont en général le seul accès possible à l’intérieur d’un massif rocheux. Une fois l’investissement décidé, encore faut-il se réserver le temps nécessaire pour le valoriser : des méthodes issues d’une vingtaine d’années de recherche dans le domaine minier ou pétrolier (Cacas, 2001) peuvent être adaptées facilement aux besoins du génie civil (tunnels, pentes) et mises en œuvre en routine afin d’optimiser l’interprétation des données de forages. La description géotechnique des massifs rocheux fracturés peut et doit inclure aujourd’hui non seulement la caractérisation par des indices empiriques et l’analyse statistique des divers

Transcript of DES FORAGES A LA SIMULATION MECANIQUE DES MASSIFS …

Page 1: DES FORAGES A LA SIMULATION MECANIQUE DES MASSIFS …

JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 1

DES FORAGES A LA SIMULATION MECANIQUE DES MASSIFS ROCHEUX, L’APPORT D’UNE APPROCHE PROBABILISTE 3D DES RESEAUX DE DISCONTINUITES.

FOUCHÉ Olivier1, ALFONSI Pietro1, CHANTRON Laurent2, DURVILLE Jean-Louis3 1Laboratoire Central des Ponts et Chaussées (www.lcpc.fr), division Mécanique des sols et roches & Géologie de l’ingénieur, 58 bd Lefèbvre, 75732 Paris cedex 15, [email protected] et [email protected] 2Centre d’études des Tunnels, 25 av. François Mitterrand, 69674 Bron cedex, [email protected] 3Centre d’études techniques de l’Equipement de Lyon, 25 av. François Mitterrand, 69674 Bron cedex, [email protected] .

RESUME : La prévision des déformations et des écoulements dans un massif rocheux au voisinage d’un ouvrage souterrain nécessite une reconnaissance géostructurale aussi complète que le permet l’équilibre entre incertitude et coût et que le justifient les concepts de modélisation et les outils de simulation numérique disponibles. L’utilisation de logiciels pour la génération des réseaux de discontinuités et leur interprétation hydrogéologique et géomécanique apparaît prometteuse pour anticiper les difficultés d’insertion de l’ouvrage au sein du massif et son évolution. Cependant, avant de leur donner un rôle dans le dimensionnement, il reste à déterminer la sensibilité de ces outils à la variabilité des solutions géométriques pour un degré de reconnaissance donné. On propose des pistes pour estimer et discuter cette sensibilité et l’incertitude de la prévision dans le cas des calculs par éléments distincts. MOTS-CLEFS : fracturation, modèle stochastique, anisotropie, sensibilité, éléments distincts. ABSTRACT : Forecasting of deformation and flow in a rock mass around an underground excavation requires a geological and structural survey as much complete as allowed by the balance of cost and uncertainty, and as justified by available modelling concepts and simulation tools. Using software for discontinuity network generation and their hydrogeological and geomechanical interpretation shows promise for anticipating the difficulties raised by the insertion of an opening in the rock mass and its evolution. However, before giving to these tools a part in the practical design process, it is needed to determine their sensitivity to the variability of the geometrical solutions at a specified exploration intensity. Here a process is proposed in order to estimate and discuss this sensitivity and the uncertainty in the anticipation, in the case of computations using the DEM (Distinct Element Method). KEY-WORDS : fracture, stochastic model, anisotropy, sensitivity, distinct elements.

1. Introduction

Les forages sont un moyen de reconnaissance coûteux mais sont en général le seul accès possible à l’intérieur d’un massif rocheux. Une fois l’investissement décidé, encore faut-il se réserver le temps nécessaire pour le valoriser : des méthodes issues d’une vingtaine d’années de recherche dans le domaine minier ou pétrolier (Cacas, 2001) peuvent être adaptées facilement aux besoins du génie civil (tunnels, pentes) et mises en œuvre en routine afin d’optimiser l’interprétation des données de forages. La description géotechnique des massifs rocheux fracturés peut et doit inclure aujourd’hui non seulement la caractérisation par des indices empiriques et l’analyse statistique des divers

Page 2: DES FORAGES A LA SIMULATION MECANIQUE DES MASSIFS …

JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 2

paramètres tirés des carottes, mais aussi la modélisation géologique et la simulation géométrique 3D, en s’aidant des données d’affleurement, afin de mieux utiliser les codes numériques disponibles pour l’interprétation mécanique (ou hydraulique).

1.1. Nécessité et incertitude d’un modèle du réseau de fractures pour la simulation géomécanique

Le comportement mécanique des massifs rocheux, déformation ou résistance à la rupture, est largement conditionné par les caractéristiques de leurs discontinuités : schistosité, stratification, diaclases, failles… En géotechnique, pourtant, les modèles assimilant le terrain à un milieu continu sont les plus employés. Dans le calcul par éléments finis, les discontinuités peuvent être introduites en très petit nombre à l’aide d’éléments de contact, à condition de se restreindre aux petites déformations. Si l’on s’intéresse aux grands déplacements, il faut prendre en compte un réseau explicite de discontinuités. Le calcul par la méthode des éléments distincts, développée depuis près de trente ans (Cundall, 1987), se révèle alors mieux adapté. L’influence des caractéristiques des discontinuités dans une telle approche, propriétés géométriques (orientation, persistance, espacement) ou mécaniques (raideur, résistance au cisaillement, rugosité et dilatance), a été étudiée à travers diverses applications (Kulatilake et al., 1992 ; Bhasin et Høeg, 1998, Zhang et al., 1999).

En ce qui concerne la géométrie du réseau, elle est le fruit d’une interprétation à partir d’un nombre limité de données qui permet rarement une approche déterministe. Un même jeu de données sur les discontinuités observées sur le terrain peut être interprété selon différents principes de géométrie 3D. Or, une simulation par éléments distincts en 3D serait forcément sensible au principe de construction du réseau et à sa nature aléatoire. A fortiori, c’est vrai pour la simulation en 2D qui est seule couramment praticable à l’heure actuelle et qui dépend en outre de l’orientation du plan considéré. Caractériser et quantifier ces trois niveaux de sensibilité nous semble essentiel pour évaluer la confiance à accorder à la simulation mécanique (ou hydraulique) discrète dans une perspective de dimensionnement du soutènement ou d’analyse du risque d’instabilité.

Un exemple d’application concerne le projet d’un troisième tunnel dans le Lioran, dans le massif volcanique du Cantal. En 2002 doivent débuter les travaux de préparation des accès d’un nouveau tunnel routier conçu pour suppléer l’actuel âgé de 154 ans (le plus vieux tunnel routier de France), qui sera long de 1515 mètres, avec une chaussée large de 9 mètres, et à une distance du tunnel actuel n’excédant pas 150 mètres afin que celui-ci puisse servir de galerie d’évacuation.

1.2. Rapport entre incertitude et coût dans la reconnaissance de site pour les tunnels.

Tout d’abord, dans les projets de tunnel, le volume de la masse rocheuse concernée est vaste et présente une grande variabilité géologique. L’étude doit donc être très étendue, en raison de la linéarité de l’ouvrage et de sa profondeur sous la surface du sol. Selon la longueur du tunnel, plusieurs accès spéciaux peuvent s’avérer nécessaires pour l’exploration. Les forages, qui représentent de 50 à 75 % du coût de la reconnaissance, doivent traverser toute l’épaisseur des terrains de couverture, parfois sans apporter d’informations directement utiles au projet. En effet, le volume critique, dont les propriétés doivent être le mieux connues, comprend le diamètre de terrain à excaver et une enveloppe de deux diamètres au-dessus et un diamètre en-dessous.

La reconnaissance de site pour les projets de tunnels représente de l’ordre de 2 à 3 % du coût total de construction. Pour le tunnel de Toulon, qui est un cas très complexe car dans un massif fortement hétérogène et déformé, ce taux est beaucoup plus fort. Dans le cas du Lioran, réputé assez simple du point de vue du massif, le coût de la reconnaissance est inférieur à six millions d’euros (ce chiffre correspond à la totalité de la maîtrise d’œuvre) pour un coût total prévu de 400 millions d’euros, ce

Page 3: DES FORAGES A LA SIMULATION MECANIQUE DES MASSIFS …

JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 3

qui le situe dans la moyenne. Cependant, même si ce taux peut paraître faible et peu influent, ces études sont budgétées bien avant les travaux de construction et la tentation est grande de limiter la dépense dès les phases préliminaires. La somme disponible au début n’a donc rien à voir avec ce que l’on paiera plus tard.

Les résultats de l’étude n’affectent pas le type de projet et son architecture, mais les méthodes de construction et de soutènement. La dépense doit être justifiée par le bénéfice potentiel en terme de diminution de l’incertitude sur le comportement du terrain, utile au dimensionnement et à la sécurité de l’ouvrage et du chantier. La dépense devrait aussi être comparée au coût des incidents ou accidents susceptibles de se produire à cause d’un manque d’anticipation des conditions géotechniques. À chaque phase de reconnaissance, il faut pouvoir comparer l’information acquise sur le terrain avec celle qui est estimée nécessaire, et évaluer si l’apport d’une exploration supplémentaire vaut vraiment l’investissement.

La modélisation 3D des réseaux de fractures serait un outil puissant pour valoriser au maximum les données acquises et pour guider et estimer le rendement de nouvelles opérations de reconnaissance.

2. La prise en compte des discontinuités dans la pratique actuelle en géotechnique (en France)

On illustre ici les méthodes en vigueur avec l’exemple de la reconnaissance géotechnique conduite dans le cadre du projet du tunnel du Lioran (Source : METL-CETU, Projet d’Ouvrage d’Art). La couverture maximale au-dessus de l’ouvrage n’étant que de 200 mètres, le comportement du massif lors du creusement du tunnel dépendra fortement des discontinuités qui l’affectent.

2.1. La géologie structurale et les familles au sens tectonique

L’étude de la géologie structurale de la région dans laquelle s’insère le site du projet joue un rôle préliminaire important dans l’élaboration de la reconnaissance locale. Dans le Lioran, on dispose d’une synthèse faite dans le cadre de la réalisation de la feuille géologique 1/50000 de Murat (BRGM). Ce massif volcanique actuellement inactif comprend une grande variété de structures : failles héritées des événements tectoniques antérieurs à l’activité volcanique, fractures ouvertes sous la poussée ascendante de magma (dykes), failles produites lors des phases de déstabilisation ou de l’affaissement progressif de l’édifice. La cartographie des linéaments et les rosaces des relevés de fractures sur le terrain dans une dizaine de localités montrent trois directions principales à l’échelle régionale (N045°, N090°, N150°). Les tunnels se situent au nord d’un secteur très fracturé où se croisent deux couloirs majeurs de dykes, celui des grands accidents hercyniens et celui des filons de trachyandésite dans le secteur du Puy Masseboeuf, de directions respectives N140° (traversé par les tunnels) et N090°. À cette échelle, on n’a pas d’information sur le pendage des discontinuités. En complément, la reconnaissance du site a fourni les données d’une vingtaine d’affleurements et de six forages, dont la mesure des pendages de la petite fracturation associée à ces structures majeures. C’est une information qui les différencie, puisqu’on trouve deux familles de petites fractures de direction N045° et N160° à faible pendage, et une de direction N090° à fort pendage (cf. fig. 1).

La description du massif rocheux en vue de la construction d’un tunnel est guidée par les recommandations de l’Association Française des Travaux en Souterrain (AFTES, groupe de travail n°1). On n’illustre ici que les aspects qui concernent directement les discontinuités, sans parler de l’état d’altération du massif, du comportement mécanique et de l’hydrologie.

Page 4: DES FORAGES A LA SIMULATION MECANIQUE DES MASSIFS …

JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 4

2.2. Description des massifs rocheux selon les recommandations de l’AFTES

D’abord, des indices globaux de densité de fracturation sont tirés de la courbe cumulative des longueurs de carottes (quartiles, moyenne, mode). Dans le Lioran, le RQD prend respectivement les valeurs 83 %, 90 % et 77 % pour les laves, les brèches et les tufs. Mais ces valeurs moyennes ne sont pas directement représentatives de l’état de fracturation du massif. En effet, les graphes montrent un découpage en zones à fort RQD (> 90 %) entrecoupées de zones à très faible RQD. Quant à la fréquence de discontinuités FD, elle prend une valeur moyenne entre 2,6 et 4,5 m-1 suivant le forage. Les brèches sont moins fracturées (FD = 3 m-1) que les laves (FD = 4,8 m-1). La densité de fracturation peut finalement être considérée comme « moyenne » au sens de l’AFTES.

Ensuite, la définition des familles dans l’espace s’appuie sur l’analyse statistique des données d’orientation recueillies sur carottes de forage et sur affleurements. Dans le cas des forages du Lioran, l’orientation est traitée à part des autres paramètres car elle est mesurée par imagerie alors que les autres paramètres sont relevés à la main sur les carottes. Le calage a donc été imprécis entre le log descriptif et le log des orientations des fractures. On effectue une classification grossière de la fracturation en familles sur le critère de l’orientation, par l’examen visuel des stéréogrammes. Dans le Lioran cette analyse montre, malgré une proportion non négligeable de discontinuités dispersées, une organisation en deux familles (cf. fig. 1) qui sont associées à deux directions tectoniques majeures. D’après l’attitude de ces familles par rapport à l’axe du tunnel, on les attribue à telle classe (AFTES) selon qu’elles sont plus ou moins favorables à la stabilité des parois et du front.

Figure 1. La fracturation du forage SC 2000-1 dans le Lioran : projection stéréographique et imagerie en lumière visible

Enfin, on cherche à mieux définir les familles en tenant compte des caractéristiques des fractures. Le levé des caractéristiques des discontinuités a nécessité une feuille de saisie spécialement mise au point (Chantron et Zumbo, 2002, ce colloque). En complément ont été pratiqués des essais de résistance au cisaillement des fractures. Les caractères qualitatifs ou quantitatifs de chaque famille sont ensuite présentés sous forme d’histogrammes. Le bilan de l’analyse consiste à définir les familles d’après leurs caractères dominants. Ainsi, pour la famille n°1, les épontes sont planes, avec une surface légèrement rugueuse et légèrement altérée. L’ouverture des discontinuités est inférieure à 1 mm et le remplissage est généralement constitué de roche décomposée. La famille n°2 est divisée en deux sous-familles d’après la présence ou l’absence de remplissage.

Page 5: DES FORAGES A LA SIMULATION MECANIQUE DES MASSIFS …

JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 5

2.3. Classification empirique (RMR, Q)

Depuis peu, sous la pression des entreprises chargées du creusement, on commence à appliquer les classifications empiriques proposées par Bieniawski (RMR) et Barton (Q-system).

La classification de Bieniawski (1989), ou méthode du Rock Mass Rating, a été appliquée aux roches volcaniques du Lioran afin d’estimer leurs caractéristiques mécaniques (cohésion et angle de frottement interne) en vue de contrôler le pré-dimensionnement de la tranchée d’accès au futur tunnel (côté Aurillac), décidé auparavant pour des raisons d’architecture et de topographie.

Les cinq paramètres pris en compte dans cette classification − résistance à la compression simple, indice RQD, espacement des discontinuités, caractéristiques des discontinuités (persistance, ouverture, rugosité, nature du colmatage, état d’altération), et conditions hydrologiques − sont mesurables sur échantillons (sauf les dernières, mesurées sur le terrain). Un ajustement est prévu pour tenir compte de l’orientation plus ou moins défavorable des fractures par rapport à l’axe du tunnel (ou au sens de la pente). Pour appliquer cette classification, le massif rocheux est divisé en domaines structuraux et chaque domaine est analysé séparément. Dans le cas du Lioran, le massif est constitué de trois domaines : une brèche polygénique, un trachyte très fracturé et une brèche trachy-andésitique massive. Le tableau 1 rassemble les notes RMR pour les trois zones : on en conclut que le trachyte est défavorable pour tailler un talus stable, alors que la brèche massive est une très bonne roche et la brèche polygénique est acceptable.

La classification de Barton (1974) offre la possibilité de se référer à des cavités ou des ouvrages analysés et classés, dont le mode de soutènement est indiqué (plus de 200 cas). Elle prend en compte le RQD et le nombre de familles, et, de façon semi-quantitative, la rugosité, l’altération et le remplissage des discontinuités, les conditions hydrologiques et l’état de contrainte du massif. Ainsi, selon la famille de fractures retenue, on peut affecter au massif du Lioran les notes suivantes : pour la première famille, fractures de tension, Q = 2,12 soit une qualité faible (classe 1 à 4) ; pour la deuxième, une sous-famille donne Q = 14,2 soit une bonne qualité (classe 10 à 40), et l’autre sous-famille donne Q = 1,4. Il est à noter qu’une corrélation se vérifie en général entre le RMR et le Q.

Tableau 1. Notation RMR pour les trois domaines structuraux du Lioran

Paramètre Brèche polygénique Trachyte Brèche trachy-andésite

Résistance 2 2 4 RQD 11 3 17

Espacement 10 5 20 Caractéristiques 12 15 30

Hydrologie 7 4 10 Valeur du RMR 48 29 81

3. La modélisation, pour mieux valoriser les acquis et guider la reconnaissance géotechnique

La prise en compte actuelle des discontinuités en géotechnique repose donc sur un schéma très simplifié qui reste essentiellement empirique et qualitatif. Nous pensons qu’avec le même niveau d’investissement dans la reconnaissance, on peut aller plus loin dans l’interprétation en réalisant un modèle structural tridimensionnel qui prenne en compte la totalité des discontinuités ou d’une sous-population significative dans un problème particulier. Un tel modèle peut ensuite être exploité au moyen de logiciels spécialisés dans la simulation de phénomènes hydrauliques ou mécaniques.

Page 6: DES FORAGES A LA SIMULATION MECANIQUE DES MASSIFS …

JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 6

3.1. Identification des familles par classification automatique et caractérisation statistique

Lorsque les données d’orientation sont bien calées avec le log descriptif, il est préférable de commencer par classer les fractures par types géologiques ou morphologiques avant de rechercher des familles sur le critère de l’orientation. L’avantage des algorithmes de classification automatique des fractures, ou analyse en groupes (Cluster Analysis), est que l’appartenance d’une fracture à une famille est enregistrée à chaque niveau du classement sans faire intervenir des procédés manuels. Pour s’affranchir du biais de sondage, on doit utiliser un algorithme de regroupement avec un facteur correctif fonction de l’effectif et de l’angle entre l’axe du sondage et l’orientation moyenne de chaque famille (Fouché et al., 2002).

La méthode d'analyse structurale doit être adaptée au problème posé. L’analyse statistique peut inclure dans la définition des familles une pondération des plans fondée sur des critères importants du point de vue mécanique ou hydraulique. Une méthode mécano-structurale consisterait par exemple à donner plus d’importance aux fractures moins résistantes. De même, une méthode hydro-structurale consisterait à favoriser les fractures épaisses ou conductrices. En outre, le volume de calcul numérique des modèles discontinus est très important : l’échelle d’investigation pour un cas réel est donc assez limitée. Il ne faut considérer, dans un problème pratique, que les discontinuités correspondant à son échelle. Ainsi, le raffinement d’un modèle géométrique n’est justifié que si l’on s’intéresse à la structure de la matrice en-dessous d’une certaine taille de bloc rocheux.

La caractérisation statistique d'un réseau de fractures est une étape indispensable à sa modélisation. Chaque grandeur géométrique (direction, pendage, épaisseur, espacement, taille) est modélisée comme une variable aléatoire. Pour chacune d’elles, on recherche par famille une distribution de probabilité de loi simple dont la distribution de fréquence expérimentale peut être une réalisation (test d’ajustement). Par exemple, selon l’analyse statistique des données de la base DATAROC (LCPC), le choix de la distribution exponentielle pour représenter l’espacement des discontinuités le long de sondages est raisonnable, donc le processus de Poisson est réaliste pour simuler la répartition des discontinuités en 3D (Serratrice et Durville, 1997).

3.2. Modélisation géométrique

Les paramètres fondamentaux d’un réseau sont l’intensité de fracturation, le poids relatif des familles directionnelles, et le processus de construction. Les paramètres résultant sont la connectivité et l’anisotropie. Plusieurs types de géométrie de réseau 3D peuvent être proposés pour interpréter des données de terrain (fractures ou joints décrits à l’affleurement, sur carottes, ou par des outils géophysiques) et simuler des réseaux représentatifs.

Les premiers modèles stochastiques furent développés par Matèrn (1960), Matheron (1965), et Miles (1972). La plupart des modèles de base sont décrits par Serra (1982). Une revue du point de vue de la mécanique des roches a été faite par Dershowitz et Einstein (1988). Tous les modèles aléatoires ont en commun les hypothèses suivantes. Les fractures sont planes, car leur épaisseur et leur ondulation sont négligeables devant leurs dimensions. Les positions des fractures sont également probables. Les orientations sont indépendantes des positions, les réseaux de fractures sont généralement des réalisations de familles aléatoires. On classe les modèles suivant que les fractures sont infinies (leurs dimensions dépassent de beaucoup celles du domaine d’étude) ou finies. Dans le dernier cas, on distingue les modèles de partition aléatoire de l’espace (Voronoï, Veneziano, Dershowitz), et les modèles d’implantation aléatoire d’objets : modèles booléens (ponctuel ou de salves, à processus de Poisson homogène ou régionalisé). On distingue aussi des

Page 7: DES FORAGES A LA SIMULATION MECANIQUE DES MASSIFS …

JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 7

modèles hiérarchiques, fractals… La construction d’un réseau de discontinuités planes produisant un modèle 3D de blocs est actuellement réalisable par une assez grande variété de logiciels.

Par exemple, le logiciel FRACA (développé par l’IFP et commercialisé par le Beicip) propose une chaîne d’opérations (analyse statistique et simulation, cf. fig. 2) dans un environnement convivial et conçu pour un objectif proche de celui qui intéresse le géotechnicien. La fonction de ce logiciel est ensuite de caler la conductivité du réseau de fractures sur des essais hydrauliques et d’interpréter le massif fracturé sous forme d’un paquet de sucres dont chaque volume élémentaire contient un ellipsoïde de perméabilité, ce qui permet de caractériser l’anisotropie du massif.

Figure 2. Un domaine de simulation dans un massif stratifié, cube d’arête 50 mètres, avec deux familles de fractures (rectangles) vues en perspective (image créée par le logiciel FRACA, IFP-Beicip)

Pour simplifier l’étude, le modèle de massif rocheux que l’on considère par la suite est un volume partagé en blocs jointifs délimités par des surfaces de discontinuité planes dans le milieu rocheux et formant un réseau totalement connecté en 3D, c’est-à-dire que l’intégralité des surfaces contribue aux glissements et/ou aux écoulements potentiels. Pour obtenir, à partir d’un réseau quelconque, un réseau totalement connecté, il faut éliminer les portions de surface de discontinuités qui n’interviennent pas dans la délimitation de blocs. Par exemple, le logiciel SIMBLOC (CGI-ENPC, Xu, 1992) pratique l’analyse topologique 3D nécessaire à cette transformation. Il permet ensuite de réaliser l’analyse blocométrique du domaine simulé.

3.3. Apports directs d’un modèle stochastique des fractures à la reconnaissance géotechnique

On peut en tirer des courbes de blocométrie dans le volume d’influence du tunnel, la probabilité d’occurrence aux parois ou en voûte des blocs inférieurs à une taille donnée, la distribution le long du tunnel des zones critiques car très fracturées, la probabilité de rencontrer une zone de faille dans une certaine longueur de tunnel… On obtient de plus des indices d’anisotropie géométrique caractéristiques du massif, essentiels car ils permettent de prévoir les directions de concentration des contraintes, des déplacements ou bien des écoulements, avant même de recourir à une simulation numérique (Fouché, 1999).

On peut utiliser la méthode déterministe proposée par Goodman et Shi (1985), qui consiste à identifier les blocs-clés par dissection du réseau réel de toutes les discontinuités mesurées sur une

Page 8: DES FORAGES A LA SIMULATION MECANIQUE DES MASSIFS …

JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 8

série de lignes ou de surfaces d’échantillonnage. Dans une réalisation du modèle stochastique 3D du réseau de discontinuités, une fois évidé le volume associé au tunnel, on peut identifier les blocs-clés. Elle permet d’utiliser directement un logiciel d’étude de stabilité de dièdre ou de glissement plan. Le logiciel RESOBLOC (INERIS, Heliot, 1988) fait ce type d’analyse.

On peut ensuite en tirer une probabilité d’occurrence d’un bloc-clé de taille inférieure à une taille T0 (Mauldon, 1995) : ceci permettrait de déterminer la densité de clouage minimum nécessaire pour assurer la stabilité des parois dans les segments sensibles. Il serait pratique de pouvoir corréler l’occurrence d’un bloc-clé avec un aspect directement observable du réseau de fractures, par exemple sa densité de fracturation locale, ou tout autre indice empirique. Ainsi, on pourrait optimiser la densité de clouage d’après la densité de fracturation au fur et à mesure qu’on avance.

Le relevé structural au front de taille, qui s’effectue couramment sans préoccupation d’en faire une analyse quantitative, pourrait apporter une plus-value s’il était fait pour être comparé à des coupes virtuelles dans le modèle (cf. fig. 3). Son apport serait alors de nature à économiser des sondages à l’avancement. La connaissance apportée par le modèle 3D sur la variabilité du réseau de discontinuités est un guide pour déterminer les besoins en reconnaissance supplémentaire et les caractéristiques d’éventuels nouveaux forages (nombre, orientation, longueur, carottés ou non).

Figure 3. Un domaine de simulation dans un massif homogène, cube d’arête 10 mètres, avec les traces des fractures (disques) intersectant ses faces (image créée par le logiciel SIMBLOC, CGI, ENPC, avec six familles)

4. Perspectives de simulation mécanique explicite des milieux discontinus

Les logiciels de modélisation et de simulation mécanique tridimensionnelle, tels CESAR 3D (LCPC), FLAC 3D ou TRIDEC (Itasca) ne sont pas encore des outils opérationnels dans les applications, parce qu’ils sont complexes d’apprentissage et de mise en œuvre, d’autant plus que les étapes précédentes ne sont pas encore devenues des pratiques habituelles. Ils resteront donc encore pour plusieurs années du ressort de la recherche (Alfonsi et al., 1998). En revanche, certains d’entre eux sont adaptés ou adaptables en 2D aux besoins courants du génie civil. Par exemple, CESAR et FLAC sont largement utilisés en 2D pour les calculs de géotechnique. Dans une coupe à travers un massif

Page 9: DES FORAGES A LA SIMULATION MECANIQUE DES MASSIFS …

JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 9

rocheux construit comme ci-dessus, les blocs sont représentés par des polygones qui réalisent un pavage complet du plan. Ce type de pavage peut être traité avec le logiciel aux éléments distincts UDEC (société Itasca), qui en prévoit le comportement en termes de déplacements ou d’écoulements calculés en 2D. On explore ici les difficultés et on propose des pistes pour faire entrer UDEC dans la phase d’application courante.

4.1. Limites dans l’étude des simulations en 2D par les éléments distincts

La fracturation doit être analysée en réseaux hiérarchisés, dont certains sont suffisamment denses à l’échelle de la cavité pour être traités par homogénéisation mécanique, mais d’autres, vraisemblablement de fractures plus grandes, doivent entrer explicitement dans la simulation. Le modèle discontinu et anisotrope produit a priori un comportement différent d’un modèle continu (Alfonsi et Durville, 2002) : pour avoir une perception plus claire de son apport à l’étude géotechnique, la variabilité des simulations discontinues est à comparer à une simulation par un code d’éléments finis d’usage courant comme CESAR (LCPC). Il peut aussi exister un seuil de densité de fracturation, au-dessus duquel il y a équivalence entre les prévisions des deux modèles (notion de volume élémentaire représentatif). Dans ce cas, on peut faire l’économie de l’analyse proposée avec les éléments distincts.

L’utilisation d’un code comme UDEC appliqué à un massif rocheux encore inconnu, sur lequel on n’a que les informations acquises par les forages, pose de nombreux problèmes, à commencer par celui de déterminer les paramètres des discontinuités elles-mêmes d’après les mesures faites par des tests de cisaillement sur les joints des carottes au laboratoire. Les simulations par éléments distincts sont évidemment sensibles aux caractéristiques mécaniques (ou hydrauliques) attribuées aux joints, qui seront considérées constantes dans cette approche méthodologique. On se focalise ici sur le problème posé par la variabilité géométrique du réseau de discontinuités, en laissant de côté le problème des paramètres mécaniques. Pour caractériser la variabilité des simulations UDEC, on dispose de cartes des déplacements de l’ensemble des blocs ou d’historiques pour des blocs choisis. Dans le logiciel UDEC, on ne peut simuler une famille de traces de joints que par une série de droites segmentées définie par la valeur moyenne et l’écart-type de quatre paramètres de loi statistique uniforme : son orientation, l’espacement entre deux droites consécutives, la longueur des segments tracés et celle des segments lacunes. Cet outil géométrique simple permet d’étudier l’influence de l’orientation et de l’espacement des traces dans un plan de coupe. On souhaite analyser des pavages, c’est-à-dire des réseaux sans extrémité morte : cet outil n’autorise que des pavages réguliers, à l’exception du pavage Voronoï qui est irrégulier mais isotrope. Avec des réseaux réguliers, on limite le nombre de degrés de liberté. Par exemple, on compare deux coupes figurant des réseaux de joints (trois familles) de même densité surfacique mais d’anisotropie différente (cf. fig. 4) : chaque réseau est consolidé sous la même charge imposée en surface, puis un tunnel est excavé et un nouvel équilibre s’installe (simulation dans un matériau homogène).

4.2. Variabilité des éléments distincts au processus aléatoire de simulation 3D

Mais il est impossible de déterminer à quel réseau 3D correspondrait un pavage simulé directement en 2D. On perd donc dans cette méthode tout contact avec la réalité 3D d’un massif. Pour que la coupe choisie ait un sens, il faut avoir au préalable une image de la structure tridimensionnelle du massif. On doit donc envisager la sensibilité au caractère équivoque des données, un échantillon pouvant être interprété comme une réalisation de différents types de processus stochastiques.

Page 10: DES FORAGES A LA SIMULATION MECANIQUE DES MASSIFS …

JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 10

Figure 4. Les couleurs indiquent l’échelle des déplacements verticaux (base du schéma fixée). On met ici en évidence le rôle de la forme des blocs (critère d’anisotropie) hors de toute autre influence.

Page 11: DES FORAGES A LA SIMULATION MECANIQUE DES MASSIFS …

JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 11

Un premier problème serait donc d’identifier l’influence du principe géométrique de construction du réseau, toutes choses étant équivalentes par ailleurs. Pour estimer la sensibilité du comportement 2D d’un modèle discontinu au type de géométrie 3D, on devrait envisager plusieurs réseaux construits selon des principes 3D différents et vérifier s’ils ont la même anisotropie (celle-ci est quantifiée de différentes façons : grand axe moyen des blocs, tenseur des surfaces). Si cette sensibilité s’avérait forte, cela inciterait à porter une grande attention à l’interprétation des données de terrain sur les discontinuités et à investir dans les moyens de reconnaissance. Par exemple, une préoccupation est de vérifier s’il est justifié de se contenter des données de diagraphies ou de caméra en forage à la place du relevé descriptif systématique des fractures sur carottes.

4.3. Variabilité des éléments distincts due au caractère aléatoire intrinsèque du modèle

Ensuite, un processus 3D stochastique étant choisi, on propose d’envisager des réseaux irréguliers, toujours en imposant qu’ils soient totalement connectés, et en fixant les familles et l’intensité de fracturation. On doit d’abord étudier la sensibilité à la variabilité spatiale du processus, qui s’exprime, pour une coupe d’orientation donnée, en changeant sa position dans le domaine de simulation. Ainsi, dans un domaine assez grand pour contenir toute la variabilité intrinsèque du modèle choisi, il suffit d’implanter le tunnel en un endroit quelconque si sa longueur est à l’échelle du domaine, mais il faudra des endroits multiples s’il est d’échelle inférieure. On pourrait réaliser, à espacement régulier le long du tunnel, une série de coupes transversales (toutes parallèles) soumises à un traitement UDEC afin d’identifier les segments affectés par un bloc-clé apparent de premier ordre, puis de deuxième ordre, et ainsi de suite. Le nombre de ces segments nous donnerait une probabilité d’occurrence apparente d’une instabilité de type chute de bloc et de sa propagation.

4.4. Variabilité du diagnostic par éléments distincts due à l’anisotropie d’un modèle donné

On considère parfois que la connaissance de l’anisotropie globale du massif permet de choisir judicieusement les directions de coupes planes qui fourniront le support géométrique d’un modèle UDEC réaliste. Cette démarche entre facilement en contradiction avec une autre, qui consiste à travailler dans la coupe transversale à l’ouvrage. En admettant même que le tracé d’un tunnel soit rectiligne, ce qui est de moins en moins le cas, il faudra renoncer à trouver un schéma de traces 2D typique de la situation globale à analyser. Globalement, on peut affirmer que l’usage direct de UDEC conduit à surestimer l’instabilité : en effet, les familles de discontinuités sont excessivement simplifiées, la représentation 2D ne prend pas en compte le blocage cinématique fréquent en 3D.

Ainsi, pour chaque segment identifié comme instable, on doit étudier la variabilité propre à l’anisotropie, qui s’exprime en un point donné par l’influence de l’orientation du plan de coupe. On peut procéder à une série de coupes de directions multiples soumises à un traitement UDEC. Ainsi, on pourrait situer la représentativité de la coupe transversale employée par défaut dans la gamme des comportements apparents possibles. Une alternative idéale à cette démarche serait d’utiliser le logiciel TRIDEC directement sur ces segments de tunnel.

5. Conclusions

Les principales raisons qui freinent l’introduction de ce type de modélisation dans le génie civil sont jusqu’ici le nombre trop réduit de projets où l’acquisition des données nécessaires à la modélisation soit suffisant, et le manque de convivialité des logiciels disponibles, non conçus spécialement pour

Page 12: DES FORAGES A LA SIMULATION MECANIQUE DES MASSIFS …

JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 12

répondre aux besoins du génie civil. On a tenté de donner ici un aperçu des avantages que l’on peut en retirer dès aujourd’hui ou à court terme. À titre indicatif, une fois le mode opératoire défini et maîtrisé, on considère qu’un mois de travail est nécessaire pour obtenir des résultats utiles à un projet : réaliser l’analyse statistique permettant de caractériser la géométrie stochastique des familles, trouver le principe géométrique le plus adapté et l’échelle de simulation, et faire l’analyse des réseaux simulés suivant les critères prédéfinis comme pertinents pour une étude de tunnel, comme par exemple identifier les blocs-clés. Grâce à l’élaboration d’un modèle stochastique 3D du réseau de fractures, le réalisme comparé de plusieurs configurations géométriques et hydro-mécaniques peut être discuté à la lumière du modèle géologique. Le temps de travail et l’investissement logiciel seraient largement justifiés par l’accroissement de connaissance sur le massif cible, l’aide à la programmation optimisée de nouvelles reconnaissances, et éventuellement par l’économie faite en matériel de confortement grâce à la meilleure estimation des risques d’instabilité et de leur localisation probable. Le problème du hors-profil et de la sécurité du chantier pourraient être traités avec plus de rigueur. L’approche présentée permettrait d’aider à préparer la panoplie adéquate de techniques de déroctage et de soutènement. Dans l’exemple du Lioran, en anticipant les déformations ou les écoulements qui seront provoqués ou accélérés dans le massif rocheux par le percement d’un troisième tunnel à proximité des deux autres (modification de l’état de contrainte local), on pourrait aussi envisager un dispositif de surveillance de l’évolution future du massif, utile pour planifier la sécurité de l’ouvrage à long terme.

Remerciements Les auteurs remercient ici Marcel Rat (LCPC) pour ses remarques constructives, et toute l’équipe Géologie-Géotechnique-Dimensionnement du CETU pour l’intérêt porté à ce travail et l’accès donné aux résultats des études du POA (Projet d’Ouvrage d’Art) sur le tunnel du Lioran.

6. Bibliographie

Alfonsi P., Durville J.-L. Numerical Study of the Failure of a Pillar of an Underground Mine. Colloque NUMGE, septembre 2002

Alfonsi P., Durville J.-L., Rachez X. Quelques applications de la méthode des éléments distincts en mécanique des roches. Bulletin des laboratoires des Ponts et Chaussées, no 214, 31-43, 1998

Barton N., Lien R., Lunde J. Engineering classification of rock masses for the design of tunnel support. Rock Mechanics, Vol. 6/4, 189-236, 1974

Bhasin R., Høeg K. Parametric Study for a Large Cavern in Jointed Rock Using a Distinct Element Model (UDEC-BB). Int. J. Rock Mech. Min. Sci., Vol. 35, No. 1, 17-29, 1998

Bieniawski Z.T. Engineering Rock Mass Classification. Wiley, New-York, 1989

Cacas M.C., Daniel J.M., Letouzey J. Nested geological modelling of naturally fractured reservoirs. Petroleum Geoscience, Vol. 7, S43-S52, 2001

Chantron L., Zumbo V. Formalisation des critères descriptifs d’un massif rocheux – mise au point d’une feuille de saisie des discontinuités. JNGG, A05, Nancy, 2002

Cundall P.A. Distinct element models of rock and soil structure. In : Brown E.T. Analytical and Computational Methods in Engineering Rock Mechanics, George Allen & Unwin, London, 129-163, 1987

Page 13: DES FORAGES A LA SIMULATION MECANIQUE DES MASSIFS …

JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 13

Dershowitz W. S., Einstein H. H. Characterizing Rock Joint Geometry with Joint System Models. Rock Mechanics and Rock Engineering, vol. 21, no 1, 21-51, 1988.

Fouché O. Caractérisation géologique et géométrique et modélisation 3D des réseaux de discontinuités d'un massif granitique reconnu par forages carottés (Charroux – Civray, Vienne). Thèse de doctorat en Géologie de l'ingénieur, ENPC-ENSMP, 1999

Fouché O., Wright H., Diebolt J. Describing the Geometry of 3D Fracture Systems by Correcting for Linear Sampling Bias. Mathematical Geology, accepted, 2002

Goodman R.E., Shi G. Block theory and its application to rock engineering. Prentice-Hall, New Jersey, 1985

Heliot D. Generating a Blocky Rock Mass. Int. J. Rock Mech. Min. Sci., Vol. 25/3, 127-138, 1988

Kulatilake P.H.S.W., Ucpirti H., Wang S., Radberg G., Stephansson O. Use of the distinct element method to perform stress analysis in rock with non-persistent joints and to study the effect of joint geometry parameters on the strength and deformability of rock masses. Rock Mechanics and Rock Engineering, Vol. 25, No. 4, 253-274, 1992

Matèrn B. Spatial variation. Stochastic Models and their Applications to some Problem in Forest Surveys and other Sampling Investigations. Meddelande fran Statens Skogsforskninginstitut, vol. 49 (5), Almaenna Foerlaget, Stockholm, 144 p., 1960

Matheron G. Les variables régionalisées et leur estimation. Une application de la théorie des fonctions aléatoires aux sciences de la Nature. Masson, Paris, 306 p., 1965

Mauldon M. Keyblock Probabilities and Size Distributions: A First Model for Impersistent 2-D Fractures. Int. J. Rock Mech. Min. Sci., Vol. 32, No. 6, 575-583, 1995

METL-CETU (Ministère de l’Equipement, des Transports et du Logement, Centre d’Etudes des Tunnels). Nouveau tunnel du Lioran − Projet d’Ouvrage d’Art, 2002

Miles R. E. The Random Division of Space. Special Supplement to : Advances in Applied Probability, 243-266, 1972

Serra J. Image Analysis and Mathematical Morphology. Academic Press, London, 628 p., 1982

Serratrice J.-F., Durville J.-L. Description des roches et des massifs rocheux: exploitation de deux bases de données. Bulletin des Laboratoires des Ponts et Chaussées, 211, 73-87, 1997

Xu J., Cojean R., Arnould M. Simulation tridimensionnelle de la blocométrie naturelle de massifs rocheux. Rev. Franç. Géotech., no 58, 31-40, 1992

Zhang X., Last N., Powrie W., Harkness R. Numerical modelling of wellbore behaviour in fractured rock masses. Journal of Petroleum Science and Engineering, Vol. 23/2, 95-115, 1999