Culture Coréenne - 한국 문화 - N° 86 - Printemps/Été 2013
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7/27/2019 Culture Corenne - - N 86 - Printemps/t 2013
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Directeur de la publication :
Lee Jong-Soo
Comit ditorial :
Georges Arsenijevic,Jeong Eun-Jin, Ryu Hye-in
Ont particip ce numro :
Patrice de la Perrire, Pierre Cambon, Jeong Eun-jin,Pierre-Emmanuel Roux, Bastian Meiresonne, Michel Le Naour,Guillaume Lecaplain, Reynald Mongne, Martine Armand,
Olivier Lehmann, Thibaud Josset
Conception et graphisme :
Yoo Ga-Young
Photo couverture:Han Mook,Amour propreEncre sur toile et ventail (collage)93 X 65 cm, 1991 / Vue partielle
Culture Corenne est une publication du Centre Culturel Coren
2, avenue dIna, 75116 Paris
Tl. 01 47 20 83 86 / 01 47 20 84 15
Tous les anciens numros de notre revue sont consultables surrevue.coree-culture.org
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ditorial
DOSSIER SPCIAL
Le monde artistique de Han Mook
Han Mook, la recherche de labsolu
Regard sur loeuvre de Han Mook
Han Mook : Il tait une fois un jeune Coren qui rvait de Paris...
LA CORE ET LES CORENS
la rescousse des naufrags de lle de Bigeum
Quelques traits caractristiques du cinma coren
Une dcennie corenne fructueuseRegard sur les musiciens corens des concours internationaux
LACTUALIT CULTURELLEPremire dition du Printemps Coren de Nantes
Le public franais dcouvre Cheon Un-yeong et Kim Un-su,deux nouvelles voix de la littrature corenne
Le cinma coren fait ses festivals
INTERVIEW
Association des Jeunes Artistes Corens :30 ans de passion, 30 ans de solidarit
VOYAGES, TOURISME
Gangnam, le quartier de Soul le plus connu au monde
NOUVEAUTS
Livres et CD dcouvrir
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s o m m a i r e
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Le dossier spcial de ce N86 de notre revue,que je vais vous prsenter, est consacr HanMook, peintre renomm et doyen des artistes
corens Paris qui a clbr en avril dernierson 100e anniversaire. Figure emblmatiquede lart contemporain coren, il vit et travailleen France depuis 1961. Il a son actif une trslongue carrire et jouit dans la communautartistique corenne dun grand respect, cequi lui a dailleurs valu de se voir attribuer,en juin dernier, le Prix Culturel France-Core.Une exposition-hommage, prsente enjuin lOCDE, lui a galement t ddie eta remport un grand succs. Notre dossierspcial, publi loccasion du centenaire dupeintre, englobe trois articles. Le premier, quivoque sa vie et son uvre, a t ralis par
Patrice de la Perrire, directeur d Univers desArts qui a, depuis les annes 1990, consacrdans son magazine plusieurs articles lartisteet qui entretient avec lui, depuis plus de vingtans, des relations suivies. Le deuxime articleest un regard original et aiguis port sur lacration de Han Mook par Pierre Cambon,conservateur en chef au Muse Guimet, quiest aussi lun des meilleurs connaisseurs deson uvre picturale. Enn, notre dossierspcial comprend une interview du peintre quinous raconte son parcours...et ses rves dejeunesse dans lesquels la France occupait une
trs grande place...Dans la rubrique La Core et les Corens ,les lecteurs sintressant aux premiers contactsentre nos deux pays, pourront dcouvrirlhistoire du naufrage du Narval, baleinier venuschouer, en avril 1851, sur lle de Bigeum, aularge de la province du Jeolla (cette histoiredonnera lieu, lpoque, une expdition desauvetage haute en couleurs mene par lepremier consul franais de Shanghai, Charlesde Montigny). Puis, dans un tout autre registre,nous vous proposerons un article prsentantquelques traits distinctifs et caractristiques
spciques du cinma coren. Suivra, enn,un texte voquant les nombreux succsremports, ces dernires annes, par lesmusiciens corens dans les grands concoursinternationaux.
Chers amis,
Dans notre rubrique Lactualit culturelle ,nous publions un article consacr laprogrammation corenne de deux grands
festivals franais, les plus importants ddisau cinma asiatique dans lHexagone, savoirle Festival International des Cinmas dAsiede Vesoul et le Festival du Film Asiatique deDeauville, qui ont prsent en 2013 plusieurslms corens particulirement intressants.Puis, suit un texte relatant le voyage enFrance, loccasion de la publication de leurspremiers romans traduits en franais, descrivains Cheon Un-yeong et Kim Un-su, invitsdhonneur de la 30e Foire du Livre de Saint-Louis. Enn, nous vous proposons un articlepanoramique consacr la premire ditiondu festival Printemps Coren de Nantes, qui
fut, de lavis gnral, un trs beau succs.
Quant notre rubrique Interview , nousavons voulu, dans ce numro, donner la parole trois anciens membres de lAssociation desJeunes Artistes Corens, qui clbre cetteanne son 30e anniversaire. Ces trois minentsplasticiens y retracent lhistoire de lAJAC (laplus ancienne association corenne en activiten France) depuis sa cration jusqu nos jours.
Enn, aprs le succs plantaire de Psy et deson Gangnam Style , il nous a paru judicieux,pour achever ce N86, dy faire gurer une
brve prsentation du quartier de Gangnam,qui est devenu, en quelques mois, clbredans le monde entier et a mme donn lieurcemment la cration dun programmespcial de visite touristique.
Jespre que ce numro, que nous avonsprpar pour vous avec enthousiasme, vousplaira et vous souhaite une excellente lecture !
Bien cordialement.
LEE Jong-sooDirecteur de la pulblication
d i t o r i a l
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NDLR : Depuis ses dbuts, Culture Corenne , qui a pour vocation de faire mieux connatre en France la Core et sa culture, sattache lexpression de la diversit des regards et opinions. Cest ainsi que nous publions aussi dans nos colonnes, an que notre revue demeureun espace de libert et de dialogue, des articles dont la teneur ne correspond pas toujours notre sensibilit ditoriale et nos points de vue.
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Han Mook, la recherche de labsolu
Doyen des peintres corens en France, Han Mook, qui a clbr le 15 avril dernierson 100 e anniversaire, jouit dans la communaut artistique corenne dun trs
grand respect. Il vit et travaille Paris depuis 1961, tout en exposant en parallle
beaucoup en Core et aussi dans nombre dautres pays : Japon, Sude, Angleterre,
Etats-Unis, Mexique, Brsil, etc.
Il a expos en Core dans les lieux les plus renomms : Muse national dart
moderne, galerie Hyundai, galerie Hoam... En France, ses uvres ont aussi t
prsentes, dans le cadre dexpositions personnelles ou de groupe, dans divers lieux
et manifestations : Festival international de peinture de Cagnes sur Mer, Bateau
Lavoir, Centre Culturel Coren, OCDE, Galerie Lumen, Maison du Japon, etc.
Les uvres de Han Mook se trouvent dans plusieurs collections et lieux prestigieux,
entre autres au Sige de lUNESCO et la Bibliothque Nationale de France,
Paris, et au Muse National dArt moderne et au Muse Leeum-Samsung, Soul.
Il a reu dans son pays, au long de sa riche carrire, de nombreux prix et distinctions
et vient de se voir dcerner en France le Prix Culturel France Core 2012.
Une exposition-hommage vient de lui tre consacre - en juin 2013 - loccasion
de son 100 e anniversaire la Dlgation permanente de la Rpublique de Core
auprs de lOCDE... Autant de raisons de ddier un dossier spcial ce bel artiste
la longvit exceptionnelle, qui a toujours su faire des modes et des courants.
Par Patrice de la PERRIREDirecteur du magazine Univers des Arts
d o s s i e r s p c i a l
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on peut le voir aux expositions des peintres
de guerre, tmoignages trs forts de ces
temps troubls, avec de nombreux croquis
trs dtaills. Aprs la guerre, en 1955, il
devient professeur lUniversit Hong-Ik
et va y rester jusqu son dpart en France
en 1961.
Ses premires uvres picturales notables
datent de 1952. Il sagit alors dune pein-
ture gurative trs structure, avec ungraphisme labor. On peut dire que ces
tableaux crs entre 1953 et son dpart
en France marquent vraiment les dbuts
de Han Mook en tant quartiste peintre et
quils matrialisent sa recherche autour de
lespace et du mouvement.
Quil sagisse de La Lampe (1953), de
Loeuvre en blanc (1954), ou de La
Femme et le pigeon (1957), les tableaux
de cette premire poque montrent le
grand travail de lartiste visant aller au-
del dune guration classique, vers unepeinture dpouille dj bien structure
gomtriquement et anime dun fort
dynamisme.
Cette approche gomtrique que lon
pressent dans les uvres de la n des
annes 1950, va se transformer en une
armation qui va, au l des ans, permettre
Han Mook darriver aux images hlico-
dales, aux spirales.
N le 6 mars 1914 Soul en Core du Sud,
Han Mook, de son vrai nom Han Baek-Yu,
se destine trs tt la pratique des arts
graphiques. En 1932, il eectue un sjour
dtude en Mandchourie puis devient un
membre actif du groupe dart moderne
Gokakai Tairen, o il prsente ses pre-
miers travaux lors de plusieurs exposi-
tions de groupe. En 1935, il suit les cours
de lEcole des Beaux-Arts de Kawabata
Tokyo. la n de la 2e guerre mondiale,il revient en Core et sinstalle prs du
Mont Geumgangsan. Cest l quil dcide
de se consacrer entirement la peinture,
puis devient professeur au collge et lyce
Geumgang Goseong de 1946 1947.
Cest en 1951 que Han Mook va partir
Busan, lextrme sud de la pninsule,
avec les troupes sud-corennes, et quil
sinstalle sur la colline de Bosu-dong dans
une cabane en planches nomme hakko-
bang . propos de cette hakkobang il
crit : Je fais partie de ceux qui ont pr-fr vivre dignement dans une hakkobang
construite de mes propres mains... . Dans
cette baraque, il fait un deuxime tage,
une petite pice denviron 6m2, son ate-
lier refuge .
Cest ainsi qu Busan, il entre lAssocia-
tion corenne des Beaux-Arts, puis celle
de Soul o il participe de nombreuses
expositions jusquen 1959. partir de 1952,
Loeuvre en blanc, huile sur toile, 72 X 60cm, 1954.
Quartier des usines, huile sur bois, 18 X 22cm, 1952.
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Et lorsque lon admire son Autoportrait
(1958), avec cette profusion dobjets repr-
sents autour du peintre devant son che-valet, on saperoit que la volont de lar-
tiste a t de les sublimer an quils soient
levs au niveau de symboles, et quainsi
ils puissent participer au tmoignage de
Han Mook, en racontant une histoire
quil nous appartient de percevoir et de
comprendre.
Pour Han Mook, il y a opposition entre le
monde visible et le monde invisible ; il fait,
travers ses uvres, un rapprochement
trs explicite entre la beaut extrieure
et la beaut intrieure. Pour lui, ces deuxdimensions sont direntes mais compl-
mentaires et il cherche toujours les expri-
mer avec une vitalit spcique.
Ainsi, les annes 1950, entre la n de la
guerre de Core et son dpart en France,
sont trs dcisives et posent les fondations
dune uvre qui va clater, voluer en se
mtamorphosant.
Son arrive Paris en 1961 va tre le point
de dpart dune nouvelle priode et dune
nouvelle perception de lart. Avec une
remise en question totale et un grand int-rt pour une civilisation quil ne connat pas
vraiment, Han Mook accepte de repartir
zro dans ce que lon a coutume dappeler
la Capitale de lArt . Pour lui, cest une
Doyen Des peintres
corens en france, han mook
a clbr le 15 avril 2013
son 100e anniversaire.
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Composition de traits, huile sur toile, 50 X 40cm, 1962.
occasion de dcouvrir les peintres occiden-
taux, peu connus en Core cette poque,
et daccder de nouvelles inspirations
qui vont changer sa faon de penser et de
voir les choses. partir de cette priode, la
guration ne sut plus son expression
et devient trop troite pour toutes les pen-
ses qui lagitent.
Dj en 1958, la toile Amoncellement
annonait ce qui allait se passer plus tard et
symbolisait bien lclatement des formes,lannonciation dun chaos prcdant lhar-
monie et lorganisation des lignes de force.
Tour dabord, Han Mook va travailler des
uvres en matire et taches de couleurs ;
un peu comme si la guration avait explos
pour constituer une nouvelle vision de
lEspace. Ensuite, il ralise des tableaux o
sajoutent des collages aux formes gom-
triques. Enn, la gomtrie nest plus seu-
lement un lment accompagnateur, mais
devient une source essentielle que Han
Mook va commencer exploiter.
partir de 1970, lartiste va faire voluer
encore son travail et aner sa pense,
sattachant dvelopper le dynamisme
des espaces ainsi que les rsonances des
volumes : il a la volont imprieuse dacc-
der une peinture dirente, ne se satisfai-
sant plus dune composition plane et allantvers une approche plus conceptuelle et tri-
dimensionnelle, permettant ainsi sa pein-
ture, partir de 1980, dillustrer une vision
spatio-temporelle.
Cette volution est en partie cause par un
vnement qui va sinscrire dans tous les
esprits et dans le sien de faon ind-
lbile : lhomme marchant sur la Lune, en
1969. Selon la tradition corenne, il y avait
sur cette plante morte un lapin et un arbre
cannelle. Larrive de lhomme dtruit
cette lgende montrant que la Lune nest
pas un monde enchant. propos de cet
vnement, Han Mook crit : Il est pro-
bable que tout ceci a permis de tracer une
ligne bien nette entre la Terre et la Lune. En
dautres termes, un nouvel ordre a t int-gr dans notre sphre de vie. Lartiste veut
toujours ajouter sa ralit une touche du
monde esthtique. Cest pourquoi il essaie
toujours de saventurer au-del des limites.
La vraie esthtique de notre poque ne se
dploie pas au loin comme un mirage mais
rside dans notre ralit bouillonnante de vie.
Un espace en mouvement perptuel, nest-ce
pas la ralit ?
Ce nouveau concept de lespace va le
conduire utiliser un compas et une rgle
an de mettre en place une dimension
que lon va retrouver jusquaux uvres
actuelles. Cette nouvelle perception spatio-
temporelle se concrtise la n des annes
1970 avec une recherche approfondie de la
lumire, en jouant avec les prismes de cou-
leurs, et de lespace en mouvement, annon-
ant les grandes compositions venir.
Ainsi le dsir de Han Mook va se concrti-
ser dans des compositions hlicodales et
spirales, o la spirale devient llment
central de toute volution (cela se retrouve
chez Lonard de Vinci, chez Drer et aussi
dans les cathdrales, ou par exemple auChteau de Chambord...).
Les uvres de Han Mook, mme si
elles semblent limites par les supports
employs, ne reprsentent jamais un
espace clos, mais paraissent se prolonger
lextrieur de ce support. Cest peut-tre
cela sa force : arriver crer des uvres
qui nont pas de limites et qui deviennent
des lments du cosmos.
partir de 1980, le dynamisme des espaces
va senrichir de ce quil appelle le trajet
des constellations . Cela va lui permettredvoquer lespace et le cosmos pour que
les hommes, les terriens, par linterm-
diaire de ses uvres, puissent se situer
dans lUnivers : Je vois dans la ralit, une
innit dondulations, de rythmes ; rythmes
varis qui se succdent et sentrechoquent, se
dvient, se refusent et se dispersent dans un
espace ouvert linni, pour se rejoindre, en
dnitive et former un tout indivisible plac
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Je vois Dans la ralit,
une infinit DonDulations,
De rythmes
sous le signe de linluctable : un essai pour
instituer une forme dynamique permettant
une procration innie. Cette nouvelle esth-tique rime par consquent avec la mise en
place dun ordre nouveau.
partir de 1990, Han Mook emploie des
lments qui semblent plus fantastiques
mais toujours avec une gomtrie centrale.
Souvent les mmes motifs sont traduits
diremment au fur et mesure de sa
rexion sur lespace universel. Cest pour
cela que, plus il avance dans cette rexion
et plus ses tableaux, de grand format, se
trouvent anims de vibrations et de rso-
nances musicales : Des vibrations presque
intangibles nous permettent de sentir la res-piration de lunivers et ses rythmes ; et ces
rythmes, leur tour, nous rvlent lessence
de lunivers rgie par la rgle de purication .
Toujours en mouvement, les uvres de
Han Mook luttent contre limmobilit
linaire. ce propos, il crit : Limmobi-
lit est de lespace mort, de lespace ferm.
La conguration vivante sans cesse ouverte
au monde serait seule digne de son nom.
la moindre vibration, lunivers respire .
Cest cette ide qui fascine Han Mook et qui
lui permet de tmoigner du rythme de les-pace dans lequel il dcouvre la vraie gure
de lunivers, la loi de circularit : Toute la
conguration vivante de lespace y demeure.
Pour nir, disons quun tableau de Han
Mook reprsente une parcelle de lunivers ;
on ny voit quune partie de la spirale conte-
nue sur la toile mais se propageant lext-
rieur du support de faon immatrielle. Un
peu comme si lon regardait la vote toi-
le, le cosmos, avec une lunette astrono-
mique ne nous permettant que de voir une
petite partie de lensemble.
ce titre, Han Mook agit comme une sorte
de prophte, nous indiquant un chemin
suivre, celui dune possible ralisation de
soi si lon accepte limmensment grand,
bien que nous soyons immensment petits.
Du haut de ses 100 ans, Han Mook est le
chef de le des peintres et sculpteurs qui
ont cur daller au-del des toiles an
dy trouver des rponses leurs questions.
- h m -
Croisements dors, huile sur toile, 254 X 200cm, 1990.
Han Mook dans son atelier, dans les annes 1990.
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Regard sur l uvre de
Han Mook
En Core, comme partout en Asie, et enFrance, quelquefois, tout commence parun paysage, mme si le parcours de HanMook le confronte, plus tard, quand il est Paris, lunivers dans sa globalit, sonmystre et ses profondeurs, un autrepaysage aux dimensions cosmiques, auxrsonnances lointaines. Mais, qui disaitdes Corens, il ny a pas si longtemps, quelun de leurs traits de caractre, tait
davoir les pieds sur terre, la tte dans lestoiles? Une telle dnition peut sappliquer Han Mook, dans son itinraire de Soul Paris, quand il traverse le sicle, en qutedun idal, quil cherche toujours plusloin. Un paysage ? Cest dabord, pendantla guerre de Core, une vue de ville, duct de Pusan, dernier lot du sud, balaypar un conit mortel, un paysage modeste, la tonalit ocre, dans un camaeu debrun, de beige, ou bien de rouge, srie demaisonnettes, construites de guingois,dcrites avec un trs grand ralisme,
niche tout au fond dun vallon (aquarellesur papier, maisons-boutiques, 1953).Echo de sa formation Tokyo, dans lesannes 1930, le tableau tmoigne dunattachement profond la terre natale,dans ce quelle a de plus simple et deplus naturel. Lenvie davoir sa propremaison, ne serait-ce quune hakkobang -petite baraque en planches () construitede ses propres mains, dans une valle duquartier de Bosu-dong, surplomb par une
Par Pierre CAMBONConservateur en chef du patrimoine/ Muse Guimet
Amour propre, encre sur toile et ventail (collage), 93 X 65cm, 1991.
lart est pour han mook une m usique intrieure,
la qute Dun paraDis perDu,
Dun iDal touJours plus exigeant...
d o s s i e r s p c i a l
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vgtation luxuriante , et l, une salle detravail, mme la plus exige , une salle nemesurant que deux pyong, soit 6 m2 . Cesera , dit Han Mook, mon atelier-refuge (1953, Lespoir ). Pourquoi peindre toutle temps des hakkobang, lui disaient sesamis ? Par simple dsir de survivre et dereprendre pied dans un monde ravagpar la guerre, par simple lan vital et enviede construire, dans une Core exsangue,ravage par trois ans de conit.
Si les premires toiles voquent le fauvismeou bien lexpressionisme, avec leurs coloristrs sombres, reet du caractre angois-sant de lpoque, pourtant percent djla fascination des couleurs, le got de lagomtrie, lintrt que suscitent chez luile cubisme et la modernit. Lune de ses
toutes premires uvres peint un eetde neige, tout un village avec son gliseaccroch au anc de la colline, dans desteintes rouges et bleues. Mais la plupartde ses toiles dalors sont bien souventbeaucoup plus tourmentes, de tonalits
ou de thmes tte de mort voquant ces volontaires chinois, envoys au com-
bat pour une juste guerre ; paysage au cielbas, lhumanit presque fantomatique.
Par manque de matriaux, les toiles sont
petites, et les coloris rares. Mais, Han Mookna pas perdu pour autant sa vision, sa joie
de vivre, son nergie latente, et sa vitalitclate ds limmdiate aprsguerre. Il est
lun des premiers crire sur Picasso ds
1953 et lun des rares en Asie comprendretoute limportance du peintre. Sil reste
marqu longtemps par le guratif, il volueprogressivement vers labstraction de faon
naturelle et la toile intitule Luvre en
blanc (1954) fait la synthse de cet itin-raire. Lensemble peut se lire comme un jeu
de volume, un jeu sur la matire ; il peut se
lire aussi de faon raliste, un personnageassis, ct de la table, et sur celle-ci unenature morte rduite lessentiel. Toute la
matrise de luvre provient de cette sim-
plication des formes, de cette architecturedes plans, combine avec la subtilit des
innies nuances de la gamme du blanc paysage intrieur, curieusement apais,fait de simplicit et de stabilit, comme unpome au simple fait de vivre, une mdita-tion sur les choses et sur la permanence.De cette inuence du cubisme, ses toilessen ressentent de faon vidente, mmesil en joue alors avec une libert de ton
qui lui est personnelle. Le poisson danslassiette se fond dans larrire-plan, avecun soupon dironie, par un curieux eetde mimtisme, dans un joyeux bouquet decoloris trs vifs o le bleu et le rouge le dis-putent au jaune ou bien au blanc. Si parfoisla veine parat plus sombre comme cetteglise qui se dtache en noir, sur un fondde cauchemar presque comme une bles-sure, ou peut-tre comme une plainte, lapalette toutefois peu peu sclaircit et sesuvres retent une foi dans la vie et unegaiet croissantes, comme en tmoignelautoportrait de 1958. La vision de lartiste
au cur de latelier reste empreinte dunegrande humanit et, malgr la dconstruc-tion schmatise des formes, tmoin dunesensibilit qui adoucit le ct thorique, etparfois un peu raide, de bien des uvresoccidentales relevant de cette mouvance.
Sans titre, encre sur papier coren, 51 X 38cm, 1993.
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la vision D e lartiste au cur De latelier reste
empreinte Dune granDe humanit
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Mais, Han Mook est lhomme des rup-
tures, des remises en cause radicales, par
exigence et par temprament. Alors quil
semble dnitivement install sur la placede Soul, professeur luniversit Hongik,fondateur reconnu de lassociation dart
moderne (1957), il dcide de poursuivresa qute et daller Paris, comme dautres
lavaient fait, Kim Whanki ou Nam Kwan.
Mais, la dirence de ses prdcesseurs,il ne reviendra pas, sinstallant dnitive-
ment en France, en 1961, et ce, alors queNew-York cherche, progressivement,
dtrner Paris, comme lieu de rfrence de
lart contemporain.
Cette priode le voit, coup de ses racines,
se confronter lavant-garde occidentale,avec toute la fougue dun artiste coren.
Abandonnant le cubisme, et toute rf-
rence lart guratif, il plonge dans labs-traction et dans lart conceptuel, sinspire
de Rothko dans la franchise avec laquelleil traite de la couleur et joue de la matire.
Au dbut des annes 1960, ses toiles sontdes plages colores, aux harmonies trs
chaudes, du blanc, du noir, du rouge, du
vert ou bien du jaune, une combinaison deformes gomtriques, aux champs quasi
mathmatiques, carr ou bien rectangle,
soit des volumes tranchs, trs simples, ettrs directs, dont la juxtaposition chante
de faon harmonieuse par lart de la ren-contre , et par lart du contraste, par la
gnrosit des matriaux, la richesse despigments.
la n des annes 1960 toutefois, lagamme se fait plus froide, les teintes plus
acryliques, comme un cho du mouvement
cintique qui dominait alors, lapprocheintellectuelle tendant prvaloir sur lap-
proche plus sensible, comme si le lyrismenaturel, la force et la violence taient cana-
lises dune faon consciente, presque dli-
bre, et ce, jusqu larrt brutal, et uneplage de silence, o il sarrte de peindre
pendant quelques annes...Lexplorationspatiale (1969) est le catalyseur de cette
introspection qui lamne revoir sa vie et
son parcours, le sens mme de lart dans lemonde daujourdhui. La vraie esthtique
de notre poque , crit-il, ne se dploiepas au loin comme un mirage, mais rside
dans notre ralit bouillonnante de vie. Unespace de mouvement perptuel, nest-cepas en fait la vraie ralit ? (1976, Pour
un autre ordre potique ). Cette red-nition, cette nouvelle approche lentranevers de nouvelles frontires, vers une nou-velle manire, o le paysage prend desdimensions cosmiques. Aux formes gom-triques, au sens de la couleur des annesprcdentes, il allie dsormais lespaceet le mouvement, tendant son monde lunivers entier. Utilisant le compas, il creun vocabulaire original et neuf, habit parle cercle, la sphre et la spirale, se lanantdans des compositions parfois de grandformat, qui ne reculent pas devant leet
optique. Alliant lesprit de gomtrie et lesprit de nesse , il fait sienne la for -mule de Pascal, qui dnissait la natureen ces termes : Cest une sphre inniedont le centre est partout, la circonfrencenulle part. Comme il lcrit lui-mme, Laloi de la circularit. Toute la congurationvivante de lespace y demeure (1990, Lasonorit de lespace ). Curieusement, sonapproche, quoique trs dirente, prend,comme chez Rhee Seund-ja, une dimen-sion spatiale qui va au-del de lil humain.Mais, chez lui, cet espace est prtexte unearchitecture cleste qui voque Piranse(huile sur toile, Pyramide , 1989). Lescouleurs y sont vives et leet hypnotique. la dirence dun Pascal, qui recule,presque involontairement, devant le videstellaire ( Le silence ternel de ces espacesinnis meraie , note-t-il sobrement), HanMook, en revanche, nen a cure et se lance corps perdu la conqute dun territoireimmense et quasiment sans n o, pourlui, la dynamique des formes est une rgledor. Comme lcrivait Pascal, Le mouve-ment inni. Le point qui rgle tout. Le mou-vement est repos . En ce sens, Han Mook
est la fois un artiste pionnier, le chantrede lart moderne, le dfenseur des mouve-ments les plus avant-gardistes.
Il est aussi un artiste lettr, comme lemontrent ses calligraphies en caractreschinois, qui tmoignent dune approchecrbrale, mais en mme temps vitale.Lclat de son regard, o se mlent lamu-sement, une extrme gentillesse, une trsgrande courtoisie, ne peut laisser prvoir la
force qui lhabite, lnergie sous-jacente etpresque sans barrire. Celle-ci clate dansla force du trait ou la puissance du chant,dans le got des couleurs, des espaces in-nis. Han Mook est un artiste. Han Mook estun pote, qui a fait de sa vie une vraie po-sie, tmoignant dun engagement sans faille un idal et une esthtique auxquels il atout sacri, cherchant dnir une voiede la modernit, proprement corenne, quirenvoie la Core actuelle.
Il est aussi rveur et toujours trs humain,malgr une libert, une honntet pro-fonde, qui fait des modes et des cou-rants. En ce sens, il apparait dnitivement coren , les pieds sur terre, la tte dansles toiles, en qute sans cesse de paysagesnouveaux, alliant la posie et les mathma-tiques, un optimisme quasiment viscral,une foi dans lexistence, et dans llan vital,par-del les doutes et les questionnements,par-del les remises en cause bien souventradicales, eectues toujours sans aucuneconcession, parce que lArt est pour lui unemusique intrieure, la qute dun paradisperdu, dun idal toujours plus exigeant, etquil est avant tout mouvement.
Sans titre, encre sur papier coren,73 X 36cm, 1991.
un espace De mouvement perptuel,
nest-ce pas en fait la vraie ralit ?
- h m -
-
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c c : m. h m, - d ?
Han Mook : On me classe gnralementen Core comme un avant-gardiste. Cest
un qualicatif qui remonte aux dbuts
de ma carrire, largement d toutes
les connaissances que javais pu acqurir
durant mon sjour au Japon. Mon uvre
a par ailleurs volu au l des vnements
qua connus mon pays, comme la Libra-
tion cest--dire la n de loccupation japo-naise en 1945 , la guerre de Core bien sr,
qui a dchir la pninsule de 1950 1953,
le soulvement contre la dictature en 1960,
le coup dEtat de Park Chung-hee en 1961,
et bien dautres choses encore. chaque
fois, je me suis senti atteint au plus profond
de moi-mme. la sortie dune exposition
qui sest tenue Soul en 2003, le peintre
Lee Ufan a dclar que mon uvre retait
un demi-sicle de lhistoire contemporaine
de la Core.
c.c. : v 1914, d c d, J d 1910. c j - d -, dJ d .
H.M. : Mon environnement familial taitimprgn la fois par la culture de lOrient
et par celle de lOccident. Cest sans doute
en ces termes que lon peut le mieux
caractriser mon enfance. Ma mre tait
chrtienne ce qui ma valu dtre bap-
tis trs tt. Quant mon pre, c tait un
enseignant qui avait reu une ducation
confucenne axe sur ltude des grands
classiques chinois, mais il pratiquait aussi
langlais, les mathmatiques, la gomtrie,
voire la gologie. Cette ouverture desprit a
jou un rle dcisif dans la suite de ma vie.
c.c. : c - ?
H.M. : Jai commenc trs jeune auprsde mon pre qui peignait lui aussi, mais
il sagissait bien sr dune peinture tradi-
tionnelle. Par ailleurs, le jeune colier que
jtais tait fascin par un magazine nip-
pon intitul Kinggeu, dformation du motanglais king (roi), qui avait comme parti-
cularit davoir en ouverture de chacun de
ses numros une tude sur un tableau qui
se trouvait au Louvre. Je me rendais alors
pied de chez moi, Chongno, jusqu
Myeongdong, quartier de Soul trs pros-
pre o vivait la communaut japonaise
ce qui reprsentait une belle trotte ! Avec
largent des tickets de tramway ainsi cono-
mis, jachetais de vieux numros de cette
revue. Quand jy trouvais des textes int-
ressants, je les traduisais en coren pour
mes camarades. Cest cette poque quejai commenc rver de Paris. Vous pou-
vez intituler cette interview : Paris, le rve
dun jeune Coren !
c.c. : s- d d d ?
H.M. : Pas du tout. Jai fait la connaissancepar hasard dun jeune peintre venu du
Japon, qui sinstallait en pleine rue pour
10
Han Mook :
i l tai t une foisun jeune Coren
qui rvait de Paris
En ce temps o plusieurs vnements clbrent son centenaire et luvre quil a accomplie,
Han Mook a accept de raconter son parcours Culture Corenne . Lhomme qui a vcu tant
de choses, nous accueille avec un sourire qui exprime la joie la plus sincre et la plus innocente
Han Mook
Un grand peintre qui a traverstoute lhistoire rcente de la Core.
d o s s i e r s p c i a l
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dessiner. Le matriel quil utilisait et que
je navais jamais vu, comme le chevalet et
la palette, mintriguait. Je retournais le voir
tous les jours et je lui rendais de menus
services, comme par exemple nettoyer
ses pinceaux. Quand il est reparti pour
le Japon, ce peintre ma fait cadeau de sa
palette. Cest vraiment trs tt que je me
suis lanc dans la peinture, mais aussi dansla calligraphie. Ce que je faisais ne devait
pas tre trop mauvais, car mes travaux
taient rgulirement exposs dans une
cole japonaise, alors que les lves japo-
nais et corens ne frquentaient pas les
mmes tablissements.
c.c. : e- d d md d d- ?
H.M. : lpoque, tous les jeunes Corensde bonne famille rvaient daller voir le
pays moderne qutait le Japon. Mais ma
famille tait pauvre, car aprs avoir parti-
cip la grande manifestation du 1er mars
1919 contre la colonisation japonaise, mon
pre avait d quitter la capitale en y laissant
les siens, an de fuir la rpression. Il a par-
couru le pays au gr des opportunits den-
seigner. Je me suis donc content, aprs
avoir mis au clou mon unique costume, dun
voyage en Mandchourie, laquelle tait alors
galement occupe par les Japonais. Dalian
tait une ville moderne, avec des routes
et des buildings, o les Japonais avaient
install une succursale de la Socit des
chemins de fer, avec des vues expansion-
nistes sur le reste du continent. Jy ai ren-
contr des artistes japonais qui ont appr-
ci ce que je faisais en tant que peintre et
calligraphe. Cest ainsi que jai obtenu une
lettre de recommandation pour la maison-
mre de la Socit des chemins de fer et
que je me suis donc rendu au Japon. Jai t
engag comme calligraphe par cette com-
pagnie, ce qui ma permis dtudier lcole
des Beaux-arts Kawabata, trs clbre
lpoque, dont je devais sortir en 1940.
cette poque, jai par ailleurs lu norm-
ment de livres occidentaux.
c.c. : c c ?
H.M. : Ce fut une aaire complique. Leconit mondial sintensiait et les bom-
bardements amricains risquaient dinter-
rompre tout moment les liaisons mari-
times entre le Japon et la Core. La ville de
Tokyo tait aussi souvent bombarde. Par
ailleurs, les B-29 survolaient galement
Soul et on avait conseill sa population
de fuir dans dautres parties du pays. Ce
nest quen 1944 que jai pu retourner en
Core. Jai retrouv ma famille Onjeon-
gri, prs du mont Kumgang, dans lactuelleCore du Nord donc, o elle stait rfugie.
Ce nest quen janvier 1951, suite la contre-
oensive mene par les Nord-Corens et
les Chinois contre les troupes de lONU qui
avaient atteint la frontire de la Chine, que
jai pu embarquer sur un bateau de troupes
sudistes qui battaient en retraite, avec ma
sur et son mari qui tait mdecin et dont
la prsence avait t juge utile.
c.c. : a, - d nd ?
H.M. : Oui. Quand jai quitt mes proches,je nai pas pens un seul instant que je ne
les reverrais plus. Je pense encore beau-
coup ma mre
c.c. : v d j d k.f- d ?
H.M. : Les sept annes durant lesquellesjai parcouru le mont Kumgang ont jou
un rle essentiel dans mon travail, notam-
ment pour ma conception de lespace, lechoix de couleurs plutt crues. Il y avait sur
cette montagne des temples et des grottes.
Je my rendais avec des vivres et jy passais
plusieurs jours. Jaimais particulirement
dessiner les lignes de crte sur de longues
bandes de papier que jenroulais ensuite,
mais toutes mes uvres de cette priode
sont perdues.
c.c. : p , sd.
H.M. : Jai dabord atteint Busan o jaifailli mourir de la vre typhode ! La ville
grouillait de rfugis et il y rgnait une
agitation incroyable. lpoque, ma pein-
ture tait gurative et tmoignait de ce
quotidien et de latrocit de la guerre. Je
suis revenu Soul en 1954. Cest cette
poque-l que je me suis li damiti avec
le peintre Lee Jung-seop, dj trs malade,
que jai hberg dans ma chambre et qui
jachetais des mdicaments avec ce que
me rapportaient des articles sur lart que
jcrivais pour la presse. En 1956, jai cr
lAssociation de lart moderne. En 1957, Jai
organis avec quelques amis une contre-
exposition pour contester le choix de lex-
position nationale et jai crit cette occa-
sion un manifeste.
c.c. : e- , , d ? q linuence sur votre peinture des
l cd 1960 ?
H.M. : Cette priode a marqu un tour-nant dans mon univers artistique, car
ma peinture est devenue abstraite. Je me
suis alors livr une qute obsession-
nelle des formes les plus pures, tout en
tant dsespr devant le spectacle dune
ralit marque par labsurdit des struc-
tures sociales, les violations des droits de
lhomme et la rpression exerce sur les
mdias. En avril 1960, alors que jtais pro-
fesseur lUniversit Hongik, jai particip
aux manifestations anti-gouvernementales.
La dtermination des manifestants ma
impressionn. Cest cette poque quap-
paraissent dans mes toiles les diagonales
et les thmes de la croix et du chardon.
c.c. : v d rest fdle votre rve de jeunesse,
f ?
H.M. : Ce vieux rve sest enn ralis. Monuvre avait t remarque par un spcia-
liste allemand qui voulait me faire venir
en Allemagne, mais je nai pas trahi ce vieil
amour et jai choisi la France.
c.c. : v , . v d - . m .
H.M. : Jcris aussi des pomes, cequi est moins connu. En fait, en toutes
choses, je me sens un peu dans ltat des-
prit du chercheur, qui a besoin de laisser
mrir ses rexions avant de les concrti-
ser et de les rendre publiques. Dans nim-
porte quel domaine artistique, il y a des
artistes qui recherchent lessence. Sans
doute suis-je de ceux-l.
Propos recueillis par JEONG Eun-Jin
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Par Pierre-Emmanuel ROUXAttach temporaire
denseignement et de recherche lUniversit Paris VII
Peinture du baleinier Le Narvalralise par Frdric Roux (1805-1870) en 1836 (Muse du Vieux Granville).
Qui a dit que les premiers
contacts entre la France
et la Core au XIXe sicle
se rsument lhistoire
de quelques missionnaires
perscuts ? Ou encore cette
fameuse invasion manque
de la pninsule, en 1866, et
ce pillage des manuscrits
royaux nalement restitus par
le gouvernement Sarkozy auprintemps 2011 ?
Lhistoire dun naufrage
permet de revisiter ces ides
largement admises.
del le de Bigeum la rescousse des naufrags
On oublie trop souvent quenos navires baleiniersfrquentrent eux aussiles mers dAsie orientaleet plus particulirement
les ctes corennes au milieu du XIXe
sicle. Les ctacs taient en eet priss lpoque non seulement pour leur graisse,dont on extrayait une huile dclairage,mais aussi pour leurs fanons souples etlastiques qui jouaient un rle prpond-rant dans lindustrie du corset, du fouet, du
faux col ou du parapluie.
Toute personne un peu curieuse deschoses de la Core connat, parfois incon-sciemment, lun de ces baleiniers. Navi-guant au beau milieu de la mer de lEst (merdu Japon), Le Liancourt dcouvrit les lotsDokdo en janvier 1849, sans savoir quildonnerait bien du grain moudre tant auxnationalistes corens que japonais, dontles revendications territoriales font rguli-
rement la une des actualits. Ces lots sontencore dnomms aujourdhui RochersLiancourt sur de nombreuses cartes occi-dentales dont celles de Google Maps.
Un baleinier moins clbre aujourdhui, LeNarval, connut pour sa part une n tragiqueau dbut du mois davril 1851 en schouantsur Bigeum, une le situe au large de laprovince du Jeolla. Du 20 avril au 8 mai sui-vant, le premier consul franais de Shan-ghai, Charles de Montigny (1805-1868), pritle commandement dune expdition desauvetage qui lamena dans le sud-ouest dela Core. la dirence de la dcouvertede Dokdo, passe largement inaperue lpoque, cette aventure connut un grandretentissement, au point dtre relate avecforce dtails dans la correspondance diplo-matique franaise, la presse britannique etla paperasserie administrative corennedont nous allons maintenant reconstituerla teneur.
l a c or e et l es c or en s
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le naufrage Du narval
Le Narvaltait un navire de 495 tonneauxplac sous les ordres du capitaine Riva-lan et pourvu dun quipage de vingt-neufhommes, essentiellement Franais, maisaussi avec quelques Portugais, un Chilienet un Canaque. linstar de ses semblables,il accusait non seulement la longueur des
campagnes dans le Pacique, mais rpon-dait en tout point lide quon peut se fairedun enfer ottant. Cest dailleurs dans uneatmosphre de rvolte que, le 24 fvrier1851, le vaisseau mit le cap sur la mer delEst, au dpart des les Mariannes. Cestnanmoins en mer Jaune quil fut aperuun mois plus tard. Le 29 mars, il fut reprpar un fonctionnaire coren au large delarchipel de Gogunsan, tandis quil barraiten direction du sud-ouest. Dans les jourssuivants, deux reprises, les autorits vou-lurent interroger par crit les passagers du
navire aux formes tranges (iyangseon),sans succs. Ces derniers avaient en eetrpondu dans une criture semblable ausanskrit , avant de poursuivre leur route.Finalement Le Narval, dj en piteux tat,quoique bravant encore les vents et lescourants, schoua dans la nuit du 2 au 3avril sur lle de Bigeum.
peine extraits de lpave, les naufragsfurent questionns par le fonctionnairelocal grand renfort de dessins sur lesable, de gestes et mimiques, sans que lemystre de leur identit ne ft nalement
perc. Lesdits trangers, pour leur part,comprirent tant bien que mal quils taient Tiosane ou Tiosang , autrementdit Joseon. Les autochtones avaient eneet coutume dannoncer aux trangersaccostant en Core quils se trouvaient auroyaume du Joseon, bien que le terme nept forcment pas trouver grande signica-tion pour des oreilles occidentales.
Simaginant que Tiosang tait le nom delle, et courir les pires dangers en restantsur place, neuf membres de lquipageschapprent bord dun canot dans lanuit du 9 avril, sans mme en avertir leurcapitaine. Aprs une traverse prilleusede la mer Jaune, ils dbarqurent prs deShanghai, do des vaisseaux britanniqueschargs dopium les conduisirent jusquMontigny, le 19 avril. Le consul prit sanstarder la dcision de se porter au secoursdes malheureux. Son dpart intervint ds lelendemain, malgr les moyens de fortunedont il disposait : une lorcha1 de moins decent tonneaux, une boussole, un sextant
et une carte, sans oublier assez de fusils etde sabres pour armer tout son monde. ses cts guraient son interprte, Michel-Alexandre de Kleczkowski, le directeurdune maison de commerce britannique Shanghai, James MacDonald, un procheparent du capitaine Rivalan rsidant luiaussi Shanghai, Monsieur Bidet ; se joi-
gnirent encore eux cinq matelots duNarvalainsi quune vingtaine dautres per-sonnes, Chinois, Lascares et Tagales , quicomposaient lquipage.
lexpDition De sauvetage
Aprs cinq jours dune navigation pnible,de vents contraires et de pluies, la lorchaarriva en vue de terre, le 25 avril, sanssavoir quil sagissait de Jeju. Accostant ausud-ouest de lle, Montigny y rencontraun mandarin cheval qui, assist de sessubordonns, et sous lil de centaines de
badauds venus dvisager les mystrieuxtrangers, se prsenta comme le Gnralprotecteur des frontires . Ce dnomm YiHyeongong ntait en fait que le petit fonc-tionnaire local en charge de ce district delle, celui de Daejeong.
Le premier contact se borna quelquesmimiques changes sous une pluie tor-rentielle. Le consul, prfrant poursuivrecette conversation par crit sous unendroit abrit, saisit son homme par le braset le mena jusqu sa monture sur laquelleil le t monter, pendant quun matelot rete-
nait la bride de son cheval. Mais Yi senfuit,avant de senfermer dans le fortin voisin.Au bout de quelques heures, le consultremp jusquaux os se rsolut en enfon-cer les portes, pensant que ctait la cou-tume en ce pays de les ouvrir soi-mme , etaperut bientt son interlocuteur. Les deuxhommes entamrent alors un dialogue parcrit, avec le secours de MacDonald et deKleczkowski, qui crivaient les demandesde Montigny en chinois et traduisaient lesrponses de Yi en franais. Tout cela fut depeu de secours et le consul ne tira rien deson hte. Bien entendu, celui-ci navait pas
connaissance du naufrage et navait jamaisentendu parler de lle de Tiosang Il neresta plus Montigny qu proposer unnouvel entretien pour le lendemain, cettefois avec la hirarchie de Yi Hyeongong.
La seconde audience eut lieu bord dela lorcha, sur une mer dmonte, et souslil grand ouvert dune vingtaine de fonc-tionnaires corens. On ritra les ques-tions dj poses la veille, sans obtenir des
Portrait du consul Charles de Montigny, tir deJean Fredet, Quand la Chine souvrait : Charles deMontigny consul de France, Shanghai, Imprimeriede Tou-S-W, 1943.
rponses plus satisfaisantes. Loctroi imm-diat dun pilote fut mme refus aux tran-gers. Ce quentendant, Montigny rponditaux Corens avec beaucoup de sang-froidet de fermet que notre vie tait en danger,que par consquent et sur leur refus, je lesen rendais responsables ; quils pouvaient se
considrer comme mes prisonniers et que jal-lais remettre sous voiles et chercher un meil-leur mouillage . Leet de cette menace futaussi prompt que dcisif, puisque le consulobtint sur-le-champ pas moins de quatrepilotes pour continuer sa route.
larrive sur lle De bigeum
La lorcha mouilla encore deux jours sur lesctes de Jeju en raison dune mer agte.Montigny prota de cette occasion pourobtenir la certitude quil se trouvait bien surlle de Quelpaert2 et recueillir des vivres,
pays au moyen dtoes anglaises, de vinset surtout de liqueurs fortes (les Corens ensont trs avides ainsi que de tabac) largentayant t refus .
1. Terme dorigine portugaise. Il sagissait duneembarcation coque europenne et au grementchinois.
2. Quelpaert resta pour les Occidentaux le nomde Jeju jusqu la n du XIX e sicle. Il sagissait en faitdune contraction du mot quelque part!
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Ne pouvant sterniser sur place, lquipagereprit la mer en direction du nord. Traver-sant le bras de mer sparant Jeju du conti-nent, lembarcation se retrouva bienttau milieu de ce chapelet dles constituantlarchipel de Core, au large du Jeolla. Aumilieu de ce labyrinthe insulaire, le consulne tarda pas perdre espoir, dautantque les marins du Narvalcroyaient recon-natre lle de Tiosang ds lors quils aper-cevaient le moindre morceau de terre. Lesrecherches se poursuivirent sans succspendant deux jours et une nuit.
Lle du naufrage fut enn aperue le soirdu 1er mai, et lquipage foula le sol aprsavoir jet lancre et tir trois coups decanon. Montigny y trouva les vingt balei-niers quil imaginait condamns la servi-
tude puisquils taient, aux dires de Mac-Donald, emprisonns dans deux cellulestroites o ils manquaient compltementdair. Ce que le consul ne savait pas, cestquaprs lvasion des neuf autres marins,le gouverneur du Jeolla, Yi Yuwon, avaitaect quatre fonctionnaires la surveil-lance du reliquat des naufrags. Leur nomtant incomprhensible aux Corens, onles avait donc aubls dun numro penduautour du cou. Montigny ne fut pas long se persuader que sa venue salvatrice vitaitaux infortuns un dpart pour le continent
coren o ils auraient certainement pri defaim et de misre .
Cette crainte franaise tait conforme auxclichs vhiculs sur la Core depuis le XVIIesicle. Ce bric--brac thorique sinscrivaitgalement dans le droit l du sort connupour tre rserv aux marins choussur les ctes japonaises. La Core, per-ue comme davantage hostile aux tran-gers que larchipel nippon, la chose allait
presque de soi, en dpit du fait que lesautorits pninsulaires traitaient gnra-lement les rescaps bien mieux que lad-ministration japonaise. Depuis plusieurssicles, l assistance aux peuples venus deloin (yuwon) tait mme le point central dela politique corenne face aux naufrags.Toujours est-il que cette politique garantis-sant tout le ncessaire aux marins choussur les ctes tait totalement ignore desOccidentaux.
Au lendemain de son dbarquement surBigeum, Montigny adressa une missive auxautorits corennes pour les remercier deleur humanit envers ses 29 compatriotes ,mais il les avertit que leur gouvernementtait coupable davoir ni plus ni moins manqu de respect envers le grand royaumede France en se permettant de faire enfermer
des Franais pour les envoyer en Core son
souverain . Il alla mme jusqu dire que si dautres Franais prouvaient encore enCore la moindre insulte, la moindre atteinte leurs droits dhommes libres, jen seraisaverti dans les six jours et que le Tonnerredes canons Franais pourrait faire trembler la
capitale de ce Royaume elle-mme .
Montigny nbranla pourtant gure lemagistrat et sa lettre ne fut jamais ache-mine Soul. On sait par contre que legouverneur du Jeolla projetait de traiter
au mieux les baleiniers et quil avait prvudarter un navire an de les ramener enChine. Cette mesure semblait correspondreaux dsirs mis par les intresss, lesquelsavaient t dduits daprs leurs mimiqueset, semble-t-il, leurs maigres rudiments dechinois. Toutefois, la chambre de Dfensedes frontires (Bibyeonsa) ayant, depuisSoul, donn son aval le jour de larrivede Montigny sur Bigeum, le rapatrie-
ment par les Corens perdit de fait touteraison dtre.
Au terme dun festin copieusement arrosau champagne et aux alcools corens, leconsul et son quipage reprirent la mer, le3 mai, pour Shanghai o ils mirent le piedcinq jours plus tard. Lhistoire du Narvalsepropagea rapidement au sein de la com-
munaut occidentale de Chine, et le consulsarrogea tout le mrite avec son interprte.Son autoportrait hroque fut galementrelay par tous les Franais de passage Shanghai. Nous tenons par exemple ducomte Alfred de Moges un portrait dithy-rambique sur le compte du consul quileut loccasion de croiser en 1857 : Cestlhomme comprenant le mieux la Chine quenous ayons jamais rencontr. Il apprend
quun baleinier franais sest perdu sur la cte
de Core et que les quinze hommes dqui-page sont retenus en captivit. Il na point de
btiment de guerre franais sa disposition(notre escadre est occupe ailleurs) ; il prend
une lorcha portugaise et part avec son inter-prte. Il essuie en mer de trs gros temps, ilmanque lui-mme de faire naufrage, mais
rien ne le rebute. Il dbarque malgr les auto-rits corennes, il savance dans lintrieur,nayant pour se guider que des renseigne-ments incomplets. Il parvient enn jusquaux
prisonniers quon allait conduire dans lesmines, il les arrache la plus dure captivit, etramne Shang-ha les quinze Franais dli-vrs, ne devant cet admirable rsultat qu saseule nergie !
Laaire du Narvalfut une vritable aubainepour Montigny. Pendant prs de dix ans, ilt valoir au Quai dOrsay que la questionbaleinire redonnerait un dynamisme co-nomique toute lAsie orientale, insistantsur la ncessit de pouvoir relcher enCore, de manire y obtenir des vivres etun soutien logistique en cas de naufrage,sans pour autant risquer, comme on lecroyait, une rduction en esclavage. Fortde son exprience, Montigny se prsentacomme le seul homme capable de mener bien une nouvelle expdition dans la
pninsule, mais Paris rejeta nalement sespropositions. Toujours est-il quavec sonexpdition sur Bigeum, Montigny resteracertainement le premier consul tranger avoir jamais foul le sol coren.
Le lecteur curieux de lhistoire du Narval pourrase reporter, pour plus de dtails, notre ouvrage,La Croix, la baleine et le canon : La France
face la Core au milieu du XIXe sicle
(Le Cerf, 2012).
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Quelques traits caractristiques
du cinma corenDans le cadre de notre cycle de
confrences Culture et civilisation
corennes , qui se droule chaque anne
de mars mai, M. Bastian Meiresonne,
excellent connaisseur du cinma coren,
a donn une confrence visant en
prsenter quelques traits distinctifs et
caractristiques spciques.Cette confrence a beaucoup intress le
public de notre Centre. Cest pourquoi nous
avons dcid den prsenter un rsum
prenant la forme de larticle ci-contre.
Vedettes internationales, ralisateurs prims dans des festivals dumonde entier (Cannes, Venise, Berlin...), grand cart entre petits lms
dauteur et gros blockbusters commerciaux. Visuels hors pair, savoir-fairetechnique indniable. Excs de violence, des meurtres au marteau pardizaines, noirceur absolue, une incroyable mise en abme de personnages
borderline. Comdies romantiques au dnouement inattendu, multiplesdestins croiss et mlodrames tire-larmes hyper-ecaces Lnumrationdes caractristiques du cinma coren est sans n et constitue sans doutela plus belle preuve de son extraordinaire richesse. En voici quelques-unes -peut-tre pas si videntes au premier regard - qui puisent leurs racines auxsources mme de lhistoire corenne.
Par Bastian MEIRESONNEAuteur, consultant et programmateurde festivals ddis au cinma asiatique
Le bon, la brute et le cingl deKim Ji-woon :un dtonnant western kimchiplein de folles chevauches.
l a c or e et l es c or en s
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Au bonheur
de ces drAmes
Lune des principales caractristiques delactuel cinma coren est la part levede drames produits chaque anne, quislve prs de 70% (et au moins autant
la tlvision) !!! Une donne spcique-ment locale, qui puise ses origines dans lesdbuts du 7e Art coren.
Les premires projections font leur appa-rition en Core ds 1897, deux ans peine aprs la naissance du cinma le 28dcembre 1895 Paris. Parmi dautres, onpeut voquer la raison du orissant com-merce maritime qui facilitait limportationde nouvelles technologies de lpoque, ainsique la rapide mise en place dun rseaude diusion par la communaut chinoise.Les lms franais, italiens et amricains
inondent alors les crans et font le bon-heur dun public de plus en plus nombreuxdans les salles. En revanche, il ne se tourneaucun lm coren avant 1919, retard engrande partie d loccupation nipponne etrattrap en partie partir des annes 1920.Les Japonais sont, lpoque, parmi les pre-miers producteurs au monde et voient unavantage certain - la fois conomique etidologique - investir le champ culturel,an de propager leurs lms qui vhiculentpresque toujours des lments de propa-gande.
La premire ralisation corenne date de1919.Juste vengeance est un cin-drame,qui sert dinterlude lmique une reprsen-tation thtrale shimpa. Sous occupationjaponaise, les spectacles de pansori et detalchum ont t progressivement interditspour laisser place la nouvelle cole japo-naise, aux sujets contemporains ralisteset foncirement dramatiques. Les histoiresmettaient gnralement en scne des per-sonnages se heurtant limmuabilit dela socit et qui nissaient en gnral parmourir en martyrs. Une ide fataliste forc-ment encourage par loccupant japonais
pour saper le moral au peuple coren, maisqui faisait galement cho un sentimentprofondment national: le han.
Impossible de rsumer en un seul mot cetteexpression profondment corenne, rsul-tant dun mlange de sentiments de regret,de rancur, damertume, de nostalgie et defatalisme, engendr par les sacrices sansrcompense et les soubresauts du destin...Une sorte de lointain cousin du spleen fran-
ais, qui sest forg petit petit, au l dunehistoire corenne qui fut particulirementmouvemente. Si loccupant japonais adonc trs certainement contribu impo-ser le (mlo)drame comme genre majeur(130 lms sur 200 produits entre 1919 et1953), son succs, jamais dmenti depuis,prouve galement une certaine fascination
inhrente au public coren pour ce genre.
bon chic,
bons genres
En revanche, mme si les drames repr-sentent toujours la majeure partie de laproduction totale, le cinma coren secaractrise galement par une formidableprolifration des genres souvent au seindun seul et mme lm.
Ce nest dailleurs pas une spcicit typi-
quement corenne. Alors que lOccidentveut tout prix cantonner un lm (ouun ralisateur) un seul genre, lOrientnhsite pas, au contraire, multiplier lesgenres au sein dune mme uvre, poursouvrir au plus grand nombre. En eet, lecinma asiatique est avant tout un cinmade divertissement, pens et conu pourattirer le plus grand nombre de spectateursdans les salles et engranger un maximumde bnces. La bande-annonce du der-nier succs coren en date, Miracle in cell
N7en est un trs bel exemple : dmarrantcomme un thriller sombre (pour titillerles hommes), elle vire rapidement vers lacomdie potache (pour rassurer femmeset enfants) avant de prendre un ton beau-coup plus dramatique (pour un public plusmature), et avant un dnouement (visible-ment) heureux sur lair du tube du dernier
boys band la modeLes producteurs ontmanifestement ratiss large et ne sy sontdailleurs pas tromps : 12 millions de spec-tateurs (soit prs dun Coren sur cinq de lapopulation totale !) sont alls voir ce lm,faisant de ce drame multi-genres le 3 eplus gros succs de tous les temps !
La Core a pourtant t pendant long-temps un cas part dans la cinmatogra-phie asiatique. Le genre mlodramatiquey a dabord t favoris sous occupationjaponaise, puis sous les rgimes natio-nalistes qui ont empch la prolifration
dautres genres. Ce nest nalement quaucours de lge dor des annes 1960, et sur-tout durant le renouveau de la secondemoiti des annes 1990 (rendu possiblepar la dmocratisation du pays), que lesproducteurs ont cherch diversier, puis rinventer leur cinma.
Le dveloppement de ce processus a eupour consquence une diversication desgenres, le cinma coren daujourdhui pr-sentant de ce point de vue-l une grandevarit. Le box-oce des quatre premiers
Le cinaste Kim Ji-woon / Photo Laurent Koel Le cinaste Bong Joon-ho / Photo Laurent Koel
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mois de lanne 2013 est ce titre une bellepreuve de son actuel clectisme: les six pre-miers succs corens sont ainsi respective-ment une comdie dramatique (Miracle incell N7), un thriller (The Berlin le), un polar(New world), une comdie (Man on the edge),un lm-catastrophe (The tower) et uneromance (Very ordinary couple).
Par ailleurs, lune des grandes spcicitsdu cinma coren serait aussi de sarro-ger le droit de faire des conventions:lms dhorreur sans une goutte de sang, actioners ultra bavards et comdies(romantiques) au dnouement tragiqueLindustrie cinmatographique corenne semoque totalement des schmas convenus.Le ralisateur Kim Ji-woon en est un belexemple. Changeant de registre comme dechemise, il ralise une premire comdiehorrique A quiet family (1998), enchaneensuite avec un drame social Foul King
(2000), puis tourne un thriller crbral Deuxsurs (2003), suivi dun western kimchiLe bon, la brute et le cingl (2007) et dunmoyen mtrage de science-ction Heavenlycreature (seconde partie du lm sketchesDoomsday book, tourn entre 2006 et2008 et sorti en2012). Pour son dernier
lm coren en date, Jai rencontr le diable(2010), il repense carrment le genre du revenge movie (lm de vengeance), quilavait contribu forger avec son propreBittersweet life en 2005.
Vritable sous-genre en Core depuis lesannes 1950 et rvl au monde la suitedu succs dOld boyen 2003 le revenge
movie ne stait nalement renouveljusque-l que par une accentuation dela violence. Kim Ji-woon, lui, rinvente legenre en brouillant totalement les fron-tires entre le Bien et le Mal, et en faisantprogressivement passer son hros pourun tortionnaire et le psychopathe pour lavictime. Dmarrant comme une histoireclassique dun policier qui cherche vengerlassassin de son pouse, lhomme ne vapas, comme on pourrait sy attendre, arr-ter ou tuer le meurtrier. Il va le pister tout letemps, en continu, et le retrouver chaquefois (juste avant quil ne svisse) pour lepasser lourdement tabac.
Dans le second plus gros succs de tousles temps The host (2006), Bong Joon-hose rapproprie totalement le monstermovie (lm de monstre) pour en faireune mtaphore politique la fois contre
loccupant amricain (coupable de la cra-tion du monstre en dversant des produitstoxiques dans la rivire Han) et contre lepouvoir coren (la squence nale rappe-lant le soulvement de Gwangju de 1980).Le cinma coren sarroge donc le droit defaire totalement des conventions habi-tuelles rgissant les genres pour mieux se
les rapproprier.Historiquement, le cinma coren sestdonc construit sous inuence des pre-mires importations europennes et am-ricaines avant celles de loccupant japo-nais. Il en a digr les principales qualitspour petit petit forger sa propre iden-tit. Semployant dabord appliquer desschmas convenus aux spcicits de leurpropre pays (dans les histoires racontes,par exemple), scnaristes et producteursont ensuite cherch sen aranchir pourcrer une identit qui leur est propre et
unique au monde. Un rare cas (dcole) dintgration russie . Et cest assur-ment dans cette capacit russir sur-prendre les spectateurs en partant pour-tant de schmas con(ve)nus, que rsideaujourdhui une bonne partie du succsmondial du cinma coren.
Scne du lm The hostde Bong Joon-ho :un monster moviespectaculaire et mtaphorique.
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ccder la scne internatio-
nale est la proccupation de
tout musicien lissue de son
cursus dans un Conserva-
toire ou une Ecole Suprieure de Musique.
Nagure, notre vieux continent faisait main
basse sur le monde de la musique clas-sique et exportait ltranger son savoir-
faire. Certaines volutions sont le reet
invitable des changements de civilisation.
La mondialisation apparat aujourdhui
comme un facteur dcisif en ce troisime
millnaire qui restera sans doute comme
une priode particulirement fructueuse
avec lirruption soudaine de jeunes artistes
venus dAsie. Aprs lentre fracassante de
musiciens japonais sur la scne interna-
tionale dans les annes 1980-1990, plus
rcemment, les Corens de la seconde
gnration se sont installs sur les plushautes cimes, prolongeant une tradition
dinterprtation hrite de leurs grands
ans au rang desquels : la famille Chung
(la violoncelliste Myung-Wha, la violoniste
Kyung-Wha, et le clbre chef dorchestre
Myung-Whun Chung la tte de lOrchestre
Philharmonique de Radio France et de la
Philharmonie de Soul), le pianiste Kun-
Woo Paik, les violoncellistes Sung-Won
Yang, et Han-Na Chang nomme directrice
musicale du Qatar Philharmonic Orches-
tra, les sopranos Sumi Jo, Youngok Shin et
Hei-Kyung Hong, le baryton- basse SamuelYoun, invit du Festival de Bayreuth.
les raisons ncessaires et suf-fisantes De cette proDigieuseeffervescence
Un tour dhorizon rapide sur la participation
des artistes corens aux concours interna-
tionaux atteste quune pliade de talents
venus du Pays du Matin Calme a russi se
hisser de manire stupante au plus haut
niveau. La raison en revient sans douteaux qualits de chacun, mais surtout ce
que lon dnit comme le mystre musi-
cal coren . Dans ce pays dynamique, les
institutions se chargent en eet dapporter
un soutien des instrumentistes en herbe
en vue de les prparer psychologiquement,
techniquement et artistiquement aux plus
redoutables comptitions. Il va de soi que
le dveloppement conomique constitue
un facteur dterminant dans la prise en
compte de la culture comme lment de
reconnaissance artistique. Les conserva-
toires, les universits, apportent ainsi uneaide ecace au parcours de ces jeunes.
LInstitut National de Recherche pour les
lves dous a t fond en 2008 an dof-
frir un programme pdagogique spcialis
avec le soutien du gouvernement. LUniver-
sit Nationale des Arts de Core, depuis
plus de vingt ans, seorce de prodiguer
un enseignement de qualit et de favoriser
lmergence dun vivier au fort potentiel. De
nombreux concours nationaux organiss
dans tout le pays permettent galement
de se mesurer dautres compatriotes
avant de se perfectionner ltranger. Syajoutent lencouragement et limplication
des parents dans le soutien aux enfants
dots de dons artistiques prcoces. Ainsi, la
Korean Children Association a-t-elle permis
lmergence de musiciens tel Dong-Hyek
Lim, lu lge de neuf ans meilleur jeune
pianiste de lanne par la Korean Children
Association.
Les bourses octroyes aux meilleurs
dentre eux doivent aussi tre prises
en compte et favorisent rencontres et
changes avec dautres pays. De plus en
plus nombreux sont les lus qui confortent
leur savoir et le confrontent aux person-
nalits musicales du monde entier. Les
coles trangres les plus rputes : Juil-liard School de New York, Curtis Institut de
Philadelphie, Conservatoire Tchakovski de
Moscou, CNSMD de Paris, Hochshle de
Munich, Berlin, Hanovre, Royal Academy of
Music de Londres ou dIrlande, constituent
le terreau providentiel pour parfaire leurs
connaissances auprs de grands matres
avant daborder la redoutable jungle des
concours internationaux les plus porteurs.
lmergence Dun riche vivier
La prolifration des coles de musique dans
toute la Core a t le levain sur lequel sestdvelopp ce que lon a appel le raz-de-
mare coren . Plus quailleurs, le dvelop-
pement sest fait de manire exponentielle
en juger par la cration des orchestres
en une courte priode (50 orchestres
Soul et dans les rgions). Paralllement,
sest arme une monte en puissance
dinterprtes de niveau international pre-
nant le relais des Europens, des Amri-
cains et des Japonais. titre dexemple,
entre 2011 et 2012, parmi les laurats des
concours internationaux de piano les plus
importants, on dnombre trente-cinq pia-nistes corens. Dans ce registre, plusieurs
instrumentistes connaissent une renom-
me qui dpasse largement les frontires
nationales. Sunwook Kim, n en 1986, dj
Prix Clara Haskil en 2005 Vevey, est le
plus jeune laurat avoir remport le
Concours de Leeds en 2006 ; il est aussi le
premier asiatique victorieux de cette com-
ptition internationale lgendaire. Kun
Exister, cest oser se jeter
dans le monde.
- simone De beauvoir -
Par Michel LE NAOURCritique musical
Une dcennie corennefructueuse
Regard sur les musiciens corensdes concours internationaux
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l a c or e et l es c or en s
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Woo Paik avec lequel il a jou Soul, la
immdiatement invit au Festival de Dinard
dont il est directeur artistique. La jeune
Hyun-Jung Lim, 24 ans, a dj enregistr
les 32 Sonates de Beethoven pour le label
EMI. Cette surdoue, qui a quitt son pays
natal au seuil de ladolescence, a tudi
au Conservatoire National de Musique
de Rouen avant de rejoindre le CNSMD Paris dans la classe de Jacques Rouvier o
elle obtient brillamment un 1er prix. Dote
dune prodigieuse technique, dune apti-
tude dchirer les partitions les plus
ardues, son jeu impressionne mme ses
confrres les plus chevronns. En 2007, HJ
Lim remporte Paris le Concours interna-
tional Flame. Elle fait sensation Ble deux
ans plus tard lors dun concert mmorable
consacr lintgrale des Etudes de Chopin
et des Etudes-tableaux de Rachmaninov,
lme sur You Tube. En 2012, 26 ans,
Soo-Jung Ann, aprs un 4e Prix HongKong, remporte face quatre-vingt neuf
candidats le Concours Maria Canals de
Barcelone, en interprtant avec matrise
en nale le Quatrime Concerto pour piano
de Beethoven. Da Sol Kim, n Busan en
1989, dcouvre le piano lge de 11 ans
et intgre lEcole Suprieure des Arts de
sa ville natale avant de se perfectionner
Soul, puis Leipzig et Hanovre. Son
cursus est impressionnant : hormis les prix
remports en Core (Concours Isang Yun
de Gyeongnam), il simpose Nagoya,
Genve, et surtout Bruxelles, Munich et
Zrich o il obtient un 2e prix au Concours
Geza Anda en 2012. Il a t, dans la foule,
invit au Festival de La Roque dAnth-
ron. Autre personnalit, Yekwon Sunwoo
(25 ans) qui, en 2011, remporte coup sur
coup le Piano Campus dOr 2012 de Pon-toise, et aux Etats-Unis le Concours William
Kapell. Il fait son apprentissage lInstitut
de Musique Curtis en Core, puis poursuit
ses tudes la Juilliard School de New York
avec Robert McDonald. Il dbute en 2009
au Carnegie Hall, en 2010, est laurat Reine
Elisabeth et Interlaken Classics en Suisse.
Il faudrait citer aussi Jeung Beum Sohn, 2e
prix (et 1er nomm) au Concours George
Enesco de Bucarest, ou encore Hyo-Joo Lee
(25 ans), 2e prix Genve.
Sur le plan vocal, de plus en plus de jeunes
chanteurs corens accdent des postesde choristes ou se distinguent dans le
rpertoire de lopra. En 2010, en nale
du Concours Paris Opera Competition, la
basse Kihwan Sim (26 ans) obtenait le 2e
prix, tandis quau Concours international
de chant du Capitole de Toulouse, le jury
couronnait en 2012 dun 1er et 2e Grand
prix les barytons Jootaek Kim (26 ans) et
Dong-Hwan Lee (31 ans). Gloire montante
de linterprtation baroque, David DQ Lee
(n Dong-Qyu Lee), form en Core puis
repr Vancouver par le Metropolitan
Opera de New York, sarme dores et dj
comme lun des grands contre-tnors de
demain. En juin dernier le tnor Boo Sung
Kim, membre du Chur dAngers Nantes
Opra, a camp le rle de Giuseppe dans
La Traviata de Verdi au Thtre Graslin.
cette occasion, dans la fosse dorchestre,ociait comme violon super-soliste de
lOrchestre National des Pays de Loire,
Ji-Yoon Park (ne en 1985), 1er Grand Prix
du Concours Tibor Varga de Sion (Suisse)
en 2004 et 4e Prix Paris du Long-Thibaud,
en 2005. Parmi les musiciens dorchestre
actifs dans lHexagone, il faut citer aussi la
violoniste Hae Sun Kang qui a remport le
Concours de violon solo de lOrchestre de
Paris, et occupe lheure actuelle la mme
fonction auprs de lEnsemble Intercon-
temporain fond par Pierre Boulez, et dont
on connat les exigences en matire de pr-cision musicale ; ou encore la violoncelliste
Kyung-Ok Park qui vient dtre nomme
lOrchestre Lyrique dAvignon-Provence.
la participation glorieuse Desartistes corens au concoursreine elisabeth De belgique
Plus que toute autre comptition, le
Concours Reine Elisabeth de Bruxelles est
signicatif de la russite corenne. Long-
Le pianiste Dong-Hyek Lim Le pianiste Sunwook Kim
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temps, les pays de lEst, en particulier
lancienne URSS, en dominaient de trs
haut les preuves, ne rencontrant que peu
de concurrence en piano et violon avec
quelques exceptions venues de France, duDanemark, du Canada. chaque session,
depuis 1976 o Dong Suk Kang remporta
un 3e prix de violon, les instrumentistes
corens ont t prsents lors des preuves
nales sans pour autant participer en
nombre au Concours proprement dit.
Depuis les annes 2000, on note une vri-
table explosion au niveau de linscription
des candidats. En mai 2013, sur soixante-
trois candidats prsents, quinze taient
dorigine corenne (soit presque 1/5e),
tmoignage la fois de laura du concours,
mais aussi de lintrt rencontr auprsdes jeunes Corens. En nale, Sangyoung
Kim (29 ans), sans remporter de Prix, nen
a pas moins fait preuve, selon la presse
belge, de moyens techniques impression-
nants (Concerto n 2 en sol mineur de Pro-
koev). En 2003, Dong-Hyek Lim (19 ans
lpoque), encore tudiant au Conser-
vatoire Tchakovski auprs du professeur
Lev Naoumov, fait polmique en refusant
le 3e prix du concours, alors quil avait, en
2001, t le plus jeune vainqueur du 1er
Grand Prix de lHistoire du Concours Mar-
guerite Long/Jacques Thibaud 17 ans. Il
sera, en octobre 2005, 3e prix du Concours
Frdric Chopin Varsovie, partageant cettercompense avec son frre Dong-Min Lim,
vnement dans lHistoire de la Core. En
juin 2007, il obtiendra galement le 4e prix
ex aequo de la treizime dition du
Concours Tchakovski. Trs rvlatrice est
cet gard la nale piano 2010 Reine Eli -
sabeth o sont slectionns cinq Corens,
parmi lesquels un 5e prix : Tae-Hyung Kim
(28 ans) form Munich par Elissa Vir-
saladze et dj victorieux en 2008 du
Concours Animato Paris, ainsi quun 6e prix
Da Sol Kim (21ans). Avec le 1 er Grand Prix
remport 25 ans par la soprano HaeranHong en 2011, la Core attire plus encore
les feux des projecteurs. Forme par Sang-
ho Choi lUniversit Nationale des Arts de
Core puis la Juilliard School de New York,
cette artiste au timbre clair et pur et dune
technicit vocale hors pair, mne depuis
une carrire remarque. Lanne suivante,
la violoniste Hyun Su Shin ne en 1987,
aprs avoir triomph Paris au Concours
Long/Thibaud (1er Grand Prix) en 2008,
obtient un 3e prix Bruxelles qui lui ouvre
des horizons prometteurs. Elle reprsente
un exemple dune musicienne entirement
forme dans son pays natal : ds lge de 4
ans, elle entamait son apprentissage avantdintgrer le programme prscolaire de
lUniversit Nationale des Arts de Core,
sous la direction de Nam Yun Kim. La com-
position a mis aussi les Corens lhonneur
suivant une tradition quIsang Yun a porte
son apoge. En 2010, Minje Jeon devient,
23 ans, la plus jeune laurate du Grand
Prix depuis la naissance du Concours. Elle
succdait une autre Corenne, Eun-Hwa
Cho ne en 1973, dont le Concerto pour
violon avait t remarqu par le jury ; elle
enseigne depuis la Hochshle Hans-Eisler
de Berlin. Une preuve clatante de la qua-
lit de la pdagogie prodigue en Core.
Ainsi, depuis une dcennie, les musiciens
du Pays du Matin Calme occupent de plus
en plus une place de premier plan dans dif-
frents genres instrumentaux et vocaux. Ils
se mesurent aux quatre coins du monde
une aventure humaine sans gal qui leur
assure un viatique pour accder aux portes
de la gloire.
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Depuis une Dcennie, les musiciens Du pays Du matin calme occupent De plus en plus une place De
premier plan Dans Diffrents genres instrumentaux et vocaux..
La soprano Haeran HongLa violoniste Hyun Su Shin
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Nantes et la Core. LExtrme-Occidentet lExtrme-Orient dun mme continent,lEurasie , selon le mot du grand poteKo Un. Pendant trois semaines, le pre-mier a vibr au rythme du second. Et cestune slection particulirement riche de lapalette de lart coren qui tait lhonneurde la cit bretonne loccasion du premierfestival du Printemps Coren. Il y a 10 000km de distance qui nous sparent, mais jailimpression davoir vcu avec vous commeavec des voisins , a encore appuy Ko Un loccasion dune lecture mmorable de sesuvres, au tout dbut du festival. Plaantdemble celui-ci sous le signe de la posieet de la fraternit.
Premire dition du
Printemps Corende Nantes
Concerts, expos, confrences,
lms, ateliers : du 27 mai au
16 juin 2013, le premier
Printemps Coren de Nantes
a dploy un large panel des arts
de la Core. Devant le succs de
cette premire, et la belle curiosit
des Nantais, lvnement compte
bien se prenniser. Compte rendu.
Par Guillaume LECAPLAINJournali ste
Le grand crivain a dailleurs interprt- plutt que lu - ses pomes courts et sai-sissants, qui parlent de choses profondes partir danecdotes simples. Le tout enquelques mots. Il tait artistement secondpar lacteur Laurent Maindon pour la ver-sion franaise.
Encore assez peu connu en France, o
dailleurs la lecture de posie reste margi-nale, Ko Un est en revanche considr en
Core comme un gant de la littrature
nationale. Pour sa visite exceptionnelle Nantes, sa premire dans cette vie , a-t-
il tenu prciser, Ko Un tait accompagnpar cinq dputs corens, rien de moins, et
Rayonnante Cho Joo-Seon, qui a initi un publiccaptiv lart du pansori, cet opra-conte traditionnel.Photo : leraf.com
l ac tu al it c u l tu r el l e
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dambulations. Mon premier est coren,et mle la tradition de son pays uneinuence des fanfares afro-brsiliennes.Mon second a fait la renomme de Nantesavec sa Galerie des Machines, son Carrou-sel des Mondes Marins mais surtout vi-
demment son Grand lphant.
Les membres de Noridan, entre deuxparades dans les rues par miracle enso-leilles ces aprs-midis ont eu droit unevisite prive des ateliers des Machines etune discussion avec le directeur, un PierreOrce visiblement charm par loriginalitdes Corens djants. changes de savoirsdun bout lautre du continent.
Alors, bien entendu, il ne faut pas oublierla fte de clture, avec les artistes multim-dia de Joyul, encore une fois inconnus enFrance mais aduls en Core. Si bien que
dans la salle du Stereolux, des tudiantescorennes, venues en groupe, taientravies de pouvoir enn les approcher de siprs.
Dans un registre moins sonore, le Prin-temps Coren comprenait galement uncycle de confrences trs suivies (sur la BD,la mdecine, lhistoire du pays, le jeu dego...) et une exposition, Notre histoire,qui a rassembl pas moins de 7 artistescontemporains autour des questions de lammoire.
pas une granDe Diaspora nantes, mais Des tuDiants
Linitiative de ce large festival revient MeeRa Baudez, dorigine corenne mais deculture franaise , comme elle se dnit.Cette inrmire et thrapeute sest instal-le en 2008 avec la musicienne E Joung-ju Trentemoult, petit village de pcheurs quitouche Nantes et qui est dsormais habitpar des artistes.
et les artistes locaux. Ainsi, La chanteuse a,
ds le lendemain de son concert, particip un atelier ouvert tous o elle a pu expli-
quer son art. Et quelque jours aprs, elle
gurait lache de la soire Nant / Co .
bientt un cD pour la cration nant / co
Il sagit l de lun des autres vnementsmajeurs du festival. Nant / Co est lenom de code dun projet qui runissait desartistes nantais dhorizons divers et desmusiciens corens. A savoir : Cho Joo-Seon,la chanteuse de pansori, avec Simon Mary(contrebasse), Daniel Givone (guitare),Gustave Ovalles (percussion), FranoisRipoche (saxophone) et lune des organisa-trices du festival, E Joung-ju, au geomungo.
Moment symbolique entre tous des liensentre Nantes et la Core, Nant / Co amix les cultures devant la salle comble duPannonica. Un vritable melting-pot musi-cal entre le jazz et la musique traditionnelle. Ce mlange tait incroyable, a a trs bienfonctionn , senthousiasme E Joung-ju. Le public avait une trs bonne coute .Et les musiciens ont tellement apprcilalchimie quils ont dcid de continuerlaventure. Nant / Co devient en eet unprojet long terme, avec une tourne envi-sage dici deux ans... et enregistrement
dun CD en vue. Une belle russite, et unbeau symbole, aussi, des liens tisss entrela scne locale et les artistes corens.
noriDan la rencontre DugranD lphant
De mme, sil y en avait qui devaient serencontrer, ctaient bien eux : Noridanet Les Machines. Les deux ont le got desgros engins ludiques et mcaniques et des
par le directeur du Centre culturel corenen France, Lee Jong-Soo. Ctait trs beau,trs profond , a rsum Lise-Marie, unetrentenaire nantaise, aprs avoir assist la soire Et particulirement les pomeszen . La jeune femme sest mme promis
daller acheter les uvres du pote dispo-nibles en franais.
les nantais scotchs par lepansori
Parmi les autres perles de la culturecorenne encore peu connues dans lHexa-gone, il y a videmment le pansori. Ce spec-tacle musical mi-chemin entre le conteet lopra est interprt par une seulechanteuse (ou un chanteur), uniquementaccompagne par un percussionniste. Cosmopolis, lespace nantais o sestdroule la majeure partie de ce premierfestival, Cho Joo-Seon a interprt Sim-cheongga. Pas toute la pice, non, qui faitplus de 4 heures dans sa totalit ! Mais lemoment-cl, cette dernire partie au coursde laquelle le pre aveugle recouvre lavue grce la voix de sa lle.
La chanteuse a littralement scotch les
nombreux spectateurs prsents, qui ontapplaudi plusieurs fois durant la reprsen-
tation, la saluant debout son issue. Etpourtant, ce ntait pas gagn car la salle
tait essentiellement compose de Nan-
tais qui ne comprenaient pas le coren. Le visage de la chanteuse est tellement
expressif ! On suivait lhistoire malgr tout... ,rsume Ewen, un Nantais qui sest dplac
par curiosit Cosmopolis ce soir-l.
Mais Cho Joo-Seon ntait pas venue pour
jouer et repartir. Le Printemps Coren a eulintelligence de proposer aux artistes de
participer des rencontres avec le public
Le grand crivain Ko Un, ici avec lacteur Laurent Maindon, a demble plac le festival sous le signe de la posie et de la fraternit. Photo : GL
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Pendant plusieurs annes, les deux jeunesfemmes ont organis des soires consa-
cres la culture corenne, chez elles, puisdans les bars, les restaurants, les maisonsde quartier. E Joung-ju faisait dcouvrir auxNantais plutt bahis linstrument dontelle est matresse, ce fameux geomungo.Il faut dire que lobjet est imposant : cestquasiment un petit arbre (1,65 mtres) surlequel on aurait plant des cordes.
On a connu beaucoup de succs , seremmore Mee Ra. Le public de ces soirestait constitu en majorit de personnesde la rgion , analyse-t-elle. Il ny a pasune grande diaspora corenne Nantes,
mme sil y un important va-et-vient dtu-diants .
Les soires des deux Nanto-corennes sesont en tout cas imposes dans le paysageculturel local. A tel point que lide dunfestival a germ, puis grandi. Linitiative aveill lintrt du Centre culturel coren.Avec le rseau des uns et des autres, grceaux liens tisss par E Joung-ju et Mee Raavec les artistes locaux, il sest vite avr
que ce Printemps Coren serait un v-nement fort. Il a dailleurs t repr par
lUnesco et promu sur le site de lorganisme.Il est vrai que ctait la premire fois quunfestival de cette envergure, avec une tellediversit de propositions, tait organis enFrance , se flicite Mee Ra.
obJectif, participer lanne Dela core en france
Le but ntait pas de faire un show et derepartir. Mais bien de crer des liensculturels entre Nantes et la Core . Parigagn pour beaucoup dartistes invits lorsde lvnement, on la vu.
Mais ce nest que le dbut. Au regard dusuccs de cette premire dition, MeeRa et E Joung-ju voient dj plus loin. Lesdeux jeunes femmes imaginent faire duPrintemps Coren de Nantes un relaisimmanquable de lanne de la Core enFrance, qui aura lieu en 2015. On esprebien que tous les vnements ne se drou-leront pas qu Paris , sourit Mee Ra. Dicil, il faut prparer cet vnement dam-
pleur, et par exemple prparer des rsi-
dences dartistes, ds lanne prochaine ,dont les crations pourraient tre au menudes festivits de 2015.
Et en 2016 ? Cette fois ce sera lanne de laFrance en Core. Et de mme, il se pourraitbien quune dlgation de Nantais sinvitedans cette nouvelle aventure.
Le programme complet du PrintempsCoren de Nantes 2013 est consultable surwww.printempscoreen.com
La compagnie Noridan a dambul, avec sa fanfare loufoque et ludique, dans les rues de Nantes. Photo : Joo Shin.
Joyul a clos le festival, le 15 juin, par un nalmlant hip-hop et multimdia. Photo : leraf.com
E Joung-ju, par ailleurs co-organisatrice du festival, a confront les notes de songeomungo avec celles des artistes de la scne locale. Photo : Joo Shin
Lespace Cosmopolis Nantes, accueillait une exposition runissant 7 artistes con-temporains, nous parlant, travers leurs uvres, du monde daujourdhui. Photo : GL
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Comme un murmure coren
Le printemps tarde sinstaller en Europe
en cette anne 2013, bien que lon soit
dj au dbut du mois de mai. Le temps
et le calendrier jouent avec les nerfs desFranais Ce premier week-end de mai,
cest mme un violent orage qui sabat sur
Saint-Louis, dernire ville franaise avant
les frontires suisse et allemande, alors
que son salon du livre ouvre ses portes.
Bien que de proportions modestes avec ses
vingt mille habitants, Saint-Louis accueille
depuis trente ans un salon du livre o se
mlent les grands noms de la scne litt-
raire nationale et internationale ainsi que
quelques mconnus accueillis tout aussi
chaleureusement soit deux cent cinquante
auteurs rgionaux et nationaux, voireinternationaux, plus de cent diteurs et
plus de trente mille visiteurs avides de
rencontres culturelles.
Le salon du livre, la foire du livre, les ren-
contres littraires et autres dnominations
dune spcicit bien franaise qui tonne
toujours nos amis trangers.
Une fte du livre, pas une librairie, mais
un lieu trange o un public vient la ren-
contre dcrivains sagement aligns. Pour
dcouvrir, discuter souvent, rcuprer une
signature ou, tout simplement pour voir,sentir et repartir avec un ou plusieurs livres
et un peu de lauteur.
Cest donc Saint-Louis, que nos deux
auteurs corens frachement dbarqus
de Soul grce limplication du Centre
Culturel Coren et du KLTI (Institut coren
pour la traduction littraire) qui ont per-
mis ce voyage, vont faire connaissance
avec cette drle de coutume (un salon du
livre) et dcouvrir les lecteurs franais. Et,
le plus trange, cest que cette rencontre
sest faite, le plus simplement et naturelle-
ment du monde, par la grce de cette petite
musique universelle de la littrature.
Aprs un petit pas entre la France et le
Royaume-Uni, la Belgique, lAllemagne et la
Suisse bien sr, un saut vers les tats-Unis,
Saint-Louis a os faire une grande enjam-
be vers la Core du Sud en comptantparmi ses invits, Cheon Un-yeong et Kim
Un-su, auteurs respectivement de Adieu
le cirque ! paru chez Serge Safran diteur
et Le Placard aux