Construire Une Bonne Gamme Musicale

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CONSTRUIRE UNE BONNE GAMME MUSICALE Léo ZARADZKI TIPE 2011 Lycée A. Daudet (MP) Résumé La Renaissance, marquée par le développement des polyphonies instrumentales et par l'essor de la tierce dans le monde musical, a vu le problème de l'intonation juste susciter de nombreux débats, remettant notamment en question la construction même des gammes employées. Ceci provoqua à l'époque baroque l'apparition de nouvelles gammes, entre autres la gamme de Zarlino, puis le tempérament égal, qui s'opposent à la gamme pythagoricienne alors utilisée depuis l'Antiquité. Le présent exposé cherche à étudier la construction de ces différentes gammes afin de les confronter et d'essayer de déterminer pourquoi on utilise aujourd'hui principalement le tempérament égal. N.B : Tout au long du document, un astérisque renvoie le lecteur butant sur un terme mathématique ou physique non trivial aux annexes, où celui-ci sera davantage expliqué. Toutefois, lorsqu'une courte addition au texte suffirait, elle sera notée entre chevrons.

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  • CONSTRUIRE UNEBONNE GAMME MUSICALE

    Lo ZARADZKITIPE 2011

    Lyce A. Daudet (MP)

    Rsum

    La Renaissance, marque par le dveloppement des polyphonies instrumentales et par l'essor de la tierce dans le monde musical, a vu le problme de l'intonation juste susciter de nombreux dbats, remettant notamment en question la construction mme des gammes employes. Ceci provoqua l'poque baroque l'apparition de nouvelles gammes, entre autres la gamme de Zarlino, puis le temprament gal, qui s'opposent la gamme pythagoricienne alors utilise depuis l'Antiquit. Le prsent expos cherche tudier la construction de ces diffrentes gammes afin de les confronter et d'essayer de dterminer pourquoi on utilise aujourd'hui principalement le temprament gal.

    N.B : Tout au long du document, un astrisque renvoie le lecteur butant sur un terme mathmatique ou physique non trivial aux annexes, o celui-ci sera davantage expliqu. Toutefois, lorsqu'une courte addition au texte suffirait, elle sera note entre chevrons.

  • Sommaire

    I. Quelques notions de physique1. Corde vibrante Spectre harmonique2. Superposition de sons Consonance

    II. Une bonne gamme musicale ?1. Dfinition d'une gamme2. De l'impossibilit de construire une gamme parfaite3. Recherche mathmatique d'un bon modle

    III. Gamme de Pythagore1. Cycle des quintes Gamme de Pythagore2. Quinte du loup et autres dfauts

    IV. Tempraments1. Gamme de Zarlino2. Tempraments ingaux3. Le temprament de J.S. Bach4. Temprament gal

    V. Conclusion

  • I. Quelques notions de physique

    Bien qu'il ne s'agisse pas de l'objet de cet expos, il pourra tre utile de rappeler ici quelques bases d'acoustique.

    Un son est une perturbation se propageant dans un milieu matriel comme l'air ou l'eau, entranant des variations de pressions perceptibles par l'oreille. Les particules du milieu subissent des vibrations qui se rpercutent de proche en proche, de la source jusqu' l'oreille. Ces vibrations sont des fonctions priodiques du temps et de l'espace du moins pour les sons tudis ici, c'est--dire les sons musicaux et peuvent donc tre dcomposes en srie de Fourier*, chaque terme de la srie correspondant un son partiel ou harmonique. On pourra donc tudier les sons musicaux partir de ces sons partiels, chacun ayant sa propre frquence.

    1) Corde vibrante Spectre harmonique

    On considre une corde vibrante (par exemple un monocorde) maintenue ses deux extrmits, de masse linique , de longueur L. On considre que la tension applique la corde ses deux extrmits est de norme T. On suppose la corde sans raideur1. On se place dans un plan (xOy), la corde au repos occupant un segment le long de l'axe des x. On dforme initialement la corde dans la direction y et on la lche. On notera y(x,t) le dplacement de la corde l'abscisse x et l'instant t.

    On a :T 1=T (cos e x+sin e y)

    Si on suppose la dformation petite, est petit, donc on a :cos1

    sintan y x

    ( x , t)

    donc :

    T 1=T (e x+ y x

    (x ,t) e y )

    1 Il s'agit d'un cas idal, qui modlise bien certains instruments comme le violon. D'autres instruments comme le piano n'entrent pas dans ce cadre, du fait de la raideur des cordes. A ce sujet, voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Inharmonicit_du_piano

    Figure I - Corde vibrante

  • De mme :

    T 2=T (e x+ y x

    ( x+dx ,t )e y )

    d'o :

    T 1+T 2=T ( y x

    (x+dx , t) y x

    ( x , t))e y=T2 y x2

    (x ,t )dx e y

    Le Principe Fondamental de la Dynamique appliqu l'lment de corde compris entre x et x+dx donne :

    dx a=T 2 y x2

    (x , t)dx e y

    On fait l'approximation de considrer que le mouvement de l'lment de corde est uniquement transversal. Alors :

    2 y t 2

    (x ,t )=T 2 y x 2

    ( x , t)

    En posant v=T on obtient l'quation d'onde de d'Alembert :2 y x2

    (x , t)= 1v22 y t 2

    (x , t)

    On recherche une solution harmonique de cette quation, en posant y (x ,t )=u (x )cos tL'quation d'onde devient :

    v2 d2 u

    dx2( x)=2u (x )

    ou, en posant k=v :

    d 2 udx2

    +k 2 u=0

    qui est une quation diffrentielle linaire du second ordre dont les solutions sont de la forme u (x )=Acos kx+B sin kx . La corde tant fixe ses extrmits, on a u(0) = u(L) = 0 donc A = 0 et B sin kL=0

    En cartant la solution sans intrt B = 0, on obtient kL = n (avec n ). On trouve ainsi une famille de solutions :

    un(x )=Bnsin (n xL)

    de pulsations =n vL , o les amplitudes Bn sont arbitraires et dpendent de la forme initiale

    de la corde.

    Il existe donc une infinit de modes propres de vibration (un pour chaque entier naturel). On obtient donc la dcomposition en srie de Fourier de y :

    y (x ,t )=n=1

    Bnsin (nxL)cos (n v t

    L)

    Chaque terme correspond un son partiel, ou harmonique, de frquence nvL , c'est--

    dire un multiple entier de la frquence fondamentale v

    2L . Le spectre harmonique reprsente

    l'ensemble de ces frquences, ainsi que les amplitudes correspondantes. On pourra dsormais assimiler un son une fonction sinusodale du temps, ce qui simplifiera les calculs de superposition de deux sons.

    Lorsqu'un instrument de musique joue une note, les sons de frquences multiples sont mis

  • avec une amplitude moindre. Il faudra tenir compte de cela pour la construction de la gamme. Le lien suivant permet d'entendre les premires harmoniques d'un do seul jou au piano : http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/6/69/Serie_harmonique.mid

    2) Superposition de sons Consonance

    Intuitivement, on se doute que deux sons de mme frquence superposs donneront un son rsultant encore de mme frquence, mais plus intense. Si en revanche les frquences ne sont pas les mmes, les deux ondes interfreront tantt de manire constructive, tantt de manire destructive, si bien que le son rsultant sera tel que son intensit variera son tour comme une fonction priodique du temps.

    La courbe ci-dessus montre que la priode du son rsultant est d'environ 65 secondes. L'intensit du son est oscillante, ce qui se traduit l'oreille par des battements. Suivant les frquences, ces battements sont plus ou moins audibles. Au-del de quelques Hertz de diffrence, on ne peroit plus que des frottements. Ils peuvent tre dsagrables l'oreille, et on essaiera de limiter ces battements pour produire des sons harmonieux les battements pouvant cependant tre recherchs dans certains genres de musique.

    Le lien suivant permet d'entendre les battements produits par la superposition de deux sons de frquences proches : http://aurelien.dolbecq.free.fr/Memoire/Son/plage%2001.mp3

    Il est vident que la somme de deux fonctions priodiques sera elle-mme une fonction priodique dont la priode est le PPCM* des deux fonctions sommes. L'tude de ce phnomne met en vidence quelques cas particuliers intressants.

    Courbe I -Superposition de deux ondes de frquences diffrentes

  • Si l'on superpose un son de frquence f et un son de frquence 2f c'est--dire la premire harmonique on obtiendra un son rsultant de frquence f (car ppcm(T, T/2) = T), donc trs semblable semblable au premier son, car les maxima du son rsultant concident avec ceux des sons premiers. On appelle octave cet intervalle de frquences [f, 2f]. C'est l'intervalle le plus consonant aprs l'unisson. Une exprience ralise sur des lves de classes prparatoires montre qu'environ 50% des gens n'entendent qu'une seule note lorsqu'on joue un accord d'octave.

    Si l'on superpose un son de frquence 2f et un son de frquence 3f les deux premires harmoniques d'un son de frquence f le son rsultant sera de frquence f (car ppcm(T/2, T/3) = T). Cet accord est lui aussi consonant, car les maxima des trois sons concident relativement souvent. L'intervalle entre ces deux sons est appel quinte.

    Si en revanche on superpose deux sons de frquences 13f et 19f, le son rsultant sera de frquence f (car ppcm(T/13, T/19) = T), donc les maxima concideront rarement. Des battements apparaissent, et les deux sons dissonent.

    On remarque donc que certains intervalles comme l'octave et la quinte sont privilgier pour la construction d'une gamme. En rgle gnrale, les intervalles les plus consonants sont ceux dont le rapport s'crit sous la forme d'une fraction irrductible la plus simple possible.

    II. Une bonne gamme musicale ?

    1) Dfinition d'une gamme

    Suite ces considrations physiques, on est amen dfinir une gamme, c'est--dire un ensemble de notes dont on va se servir pour crire la musique. La hauteur d'une note est dtermine

    Courbe II - Superposition de sons de frquences 3F et 2F

    Courbe III - Superposition de sons de frquences 13F et 19F

  • par sa frquence ; il s'agit donc de slectionner certaines frquences sur une plage continue de valeurs constituant l'audible (i.e. entre 16 20000 Hz). Il est bien sr indispensable de se limiter un nombre fini de notes, d'une part pour faciliter l'criture, d'autre part parce que certains instruments comme le piano ne sauraient comporter une infinit de notes.

    On cherche donc slectionner un ensemble de notes intressant d'un point de vue musical, c'est--dire le plus consonant possible. Or, les consonances les plus fortes s'obtiennent avec les intervalles d'octave et de quinte. Il est donc de grand intrt de conserver ces intervalles au sein de la gamme : si une note fait partie de la gamme, il faudra que les octaves et les quintes suprieures et infrieures en fassent aussi partie. D'un point de vue mathmatique, une gamme parfaite est donc un sous-ensemble discret* de contenant une frquence de rfrence f 0 et stable par multiplication et division par 2 et 3. En passant au logarithme en base 2*, une gamme est un sous-ensemble de stable par addition ou soustraction de 1 et de log2(3)= . De plus, on pourra dterminer la gamme uniquement par son intersection* avec [0;1[ puisque toute frquence d'un autre intervalle s'y ramne en ajoutant ou soustrayant 1 autant de fois qu'il faut.

    2) De l'impossibilit de construire une gamme parfaite

    Si une telle gamme A existait, elle serait un translat du sous-groupe* additif de engendr par 1 et . Or 1 est rationnel, et est irrationnel*. Les sous-groupes additifs de sont soit de la forme n *, soit denses dans . C'est videmment la deuxime solution qui convient. La gamme A serait donc dense dans , c'est--dire qu'entre deux lments de A, on pourrait toujours trouver un rel, et qu'entre deux rels on pourrait toujours trouver un lment de A. Or A est discret, et est continu. Il est donc absurde que A soit dense dans . A n'existe donc pas.

    On devra donc se contenter d'approximations pour construire des gammes qui se rapprochent au mieux du modle de la gamme parfaite. Eu gard la forte consonance de l'octave, il semble indispensable de conserver la stabilit par 1 , et on se contentera d'approcher la stabilit par intervalle de quinte.

    Une thorie utilisant les fractions continues < tages > introduit la notion de dfaut d'une gamme, ce qui permet de dterminer des gammes optimales. On ne dveloppera pas ici cette thorie, pour une prsentation complte de laquelle on renvoie [1]. On se contentera par la suite de prsenter quelques gammes importantes. On signale toutefois que la thorie des fractions continues arrive la conclusion que les gammes optimales ont une taille de 5, 12 ou 53 notes, rsultat que l'on retrouvera a posteriori.

    3) Recherche mathmatique d'un bon modle

    Ce paragraphe cherche construire ex nihilo une gamme satisfaisant certains critres conventionnels qu'on tablira. On ne dterminera qu'un modle sur les intervalles, sans proposer de note de rfrence. On ne se proccupera pas non plus de la justesse des quintes. Cette construction est totalement artificielle; aucune gamme historique n'a t construite de telle manire. La construction des gammes historiques sera prsente dans les paragraphes suivants.

    Comme il a t dit prcdemment, une gamme est un ensemble fini de frquences comprises entre une frquence de rfrence et son double (l'octave suprieure). Par commodit, nous

  • considrerons que la frquence de rfrence vaut 1. Les frquences de la gamme sont donc comprises entre 1 et 2 (et la frquence 2 fait partie de la gamme, par stabilit par octave). On notera

    f 0 , f 1 , ... , f n les frquences des diffrentes notes de la gamme, dans l'ordre croissant, avec

    f 0=1 et f n=2 . On notera aussi les intervalles : i1=f 1f 0

    ,i 2=f 2f 1

    ,... ,i n=f n

    f n1.

    On rappelle que les intervalles les plus consonants sont ceux qui s'crivent comme des fractions irrductibles les plus simples possibles. On cherchera minimiser le nombre d'intervalles diffrents au sein de la gamme, afin que celle-ci soit la plus quilibre et rgulire possible.

    On a videmment, pour tout k : 1

  • III. Gamme de Pythagore

    On s'intresse prsent aux gammes historiques occidentales. On commencera par prsenter la construction de la gamme de Pythagore, qui est une des plus anciennes utilises en occident.

    1) Cycle des quintes Gamme de Pythagore

    On considre un monocorde de frquence vide f 0 . Si on pince la corde aux deux tiers,

    et qu'on joue la note, celle-ci sera de frquence32

    f 0 , c'est--dire la quinte suprieure. On pince

    maintenant la corde aux deux tiers de cette nouvelle note, ce qui donne une frquence94

    f 0 . Par

    principe d'quivalence des octaves, en divisant par deux, on peut assimiler cette note une

    frquence98

    f 0 (toujours pour se ramener dans l'octave [ f 0 ; 2f 0] ). En rptant ainsi

    l'opration, on se rend compte qu' la douzime itration, la note obtenue a une frquence trs

    proche de la note de dpart :312

    219f 01,01364 f 0 . Comme on sait que les quintes ne concideront

    jamais avec les octaves (c'est ce qui a t montr au II.2), on fait l'approximation de considrer gales la note de dpart et sa douzime quinte. On est donc confront un cycle (imparfait, et c'est ce qui sera source des problmes venir. Le cycle des quintes est en fait une spirale infinie).

    On appelle comma pythagoricien l'intervalle entre la note de dpart et la douzime quinte.

    Le rapport de cet intervalle est donc312

    219.

    La gamme pythagoricienne est alors constitue des douze notes trouves grce au cycle des quintes, dont les rapports par rapport la note initiale, appele usuellement do, sont donns dans le tableau I. Par convention, on prend pour rfrence une frquence de 440 Hz pour la quatrime quinte, ce qui permet de calculer toute les autres frquences de la gamme. On range ces frquences par ordre croissant.

    On commence par remarquer que l'intervalle Do#-R a une valeur diffrente de celle de

    l'intervalle Do-Do#. En effet il vaut1,125

    1,06791,0534 . On appelle alors apotome l'intervalle

    Do-Do# et limma l'intervalle Do#-R. L'intervalle Do-R est quant lui un ton. Un apotome et un

    Figure II - Cycle des quintes

  • limma forment donc un ton. On notera que le ton et le limma correspondent exactement aux valeurs trouves thoriquement au paragraphe II.3, ce qui donne une certaine lgitimit cette gamme. Cependant elle n'obit pas au schma T T D T T T D, puisque Mi-Fa vaut un apotome, et non pas un limma.

    S'apercevant que Si-Do vaut un limma et Si-Si# un apotome, et que Do-Si# vaut un comma pythagoricien, on en dduit qu'un apotome est plus grand qu'un limma d'un comma pythagoricien. On peut dcouper approximativement un apotome en cinq commas (donc un limma en quatre), ce qui conduit une octave d'environ 53 commas2.

    2 Le comma de Holder, qui est l'exacte 53me partie de l'octave, donne naissance un temprament gal dit de Holder. Nous n'aborderons pas ici ce temprament et renvoyons : http://fr.wikipedia.org/wiki/Temprament_par_division_multiple#Temp.C3.A9rament_.C3.A0_53_intervalles_.C3.A9gaux_.28ou_de_Holder.29Le comma de Holder n'est pas un rationnel, puisqu'il vaut racine cinquante-troisime de deux.

    Tableau II - Gamme de Pythagore complte

    Do 1 260,74074071,053497942 274,6898338

    Do# 1,067871094 278,43751,125 293,3333333

    1,185185185 309,02606311,20135498 313,2421875

    Mi 1,265625 329,9999999Fa 1,333333333 347,6543209

    1,404663923 366,2531118Fa# 1,423828125 371,2499999Sol 1,5 391,1111111Lab 1,580246914 412,0347507Sol# 1,601806641 417,6562499La 1,6875 440

    1,777777778 463,5390946La# 1,802032471 469,8632812Si 1,8984375 494,9999999Do 2 521,4814814

    Gamme complte Rapports dcimaux Frquences

    Rb

    RMibR#

    Solb

    Sib

    Tableau I - Gamme de Pythagore

    Do 1 260,7407407Do# 1,067871094 278,4375

    1,125 293,33333331,20135498 313,2421875

    Mi 1,265625 329,9999999Fa 1,351524353 352,3974609Fa# 1,423828125 371,2499999Sol 1,5 391,1111111Sol# 1,601806641 417,6562499La 1,6875 440La# 1,802032471 469,8632812Si 1,8984375 494,9999999Do 2 521,4814814Si# 2,02728653 528,5961913

    Gamme Valeurs dcimales Frquences

    RR#

  • En calculant les rapports, on se rend compte qu'il y a un apotome entre chaque note et sa dise suprieure (sauf pour Fa-Fa#), et un ton entre chaque note et la premire note au-dessus portant un nom diffrent (sauf pour Mi-Fa et Si-Do, ainsi que pour Fa-Sol). L'intervalle Do-Fa vaut 1,3515, ce qui est trs proche de la quarte pure 1,3333... On ajuste alors le Fa en donnant Do-Fa cette valeur de 4/3. Mi-Fa vaut alors un limma. On se retrouve avec le schma de la gamme diatonique : T T L T T T L.

    Pour finir, on dfinit de nouvelles notes (les bmols) en abaissant les notes de la gamme diatonique d'un apotome. La gamme complte, avec le Fa corrig, est donne par le tableau II.

    2) Quinte du loup et autres dfauts

    Si l'on s'intresse aux quintes de la gamme pythagoricienne, on s'aperoit qu'elles sont presque toutes justes. En effet, la gamme est construite de telle faon que les rapports de quinte valent 1,5. Cependant, la dernire quinte (Fa-Do) est fausse, puisque la quinte juste est en ralit Fa-Si#. La quinte Fa-Do est donc infrieure d'un comma pythagoricien une quinte juste. Son rapport vaut 1,4798. Elle est nomme quinte du loup cause du son hurlant qu'elle produit.

    Le lien suivant permet d'entendre une quinte du loup prcde d'une quinte juste : http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/7/74/Quinte_Loup.ogg

    De par son caractre extrmement dissonant, cette quinte est inutilisable en musique. Ceci rend les modulations au sein d'un morceau dlicates, puisque si les notes Do et Fa sont peu utilises dans certaines tonalits comme R majeur, elles le sont beaucoup dans d'autres (Do majeur). Ainsi, il faudrait raccorder son instrument chaque modulation, pour que la quinte du loup se retrouve dans un autre intervalle. Le fait qu'on ait abaiss le Fa d'un comma pythagoricien ne rsout en rien le problme, puisque la quinte du loup est seulement dcale.

    Tableau III - Tierces et quartes dans le systme pythagoricien. NB : les intervalles sont donns par

    rapport leur note la plus basse

    Gamme complte Tierce majeure Quarte

    Do 1,265625 1,333333333Rb 1,265625 1,333333333Do# 1,248590154 1,333333333R 1,265625 1,333333333Mib 1,265625 1,333333333R# 1,248590154 1,333333333Mi 1,265625 1,333333333Fa 1,265625 1,333333333Solb 1,265625 1,351524353Fa# 1,265625 1,333333333Sol 1,265625 1,333333333Lab 1,265625 1,333333333Sol# 1,248590154 1,333333333La 1,265625 1,333333333Sib 1,265625 1,333333333La# 1,248590154 1,333333333Si 1,265625 1,333333333

  • L'autre gros dfaut de la gamme pythagoricienne est la justesse de ses tierces. En effet, celles-ci ont un rapport de 81/64, qui diffre lgrement de la tierce juste 5/4. Toutes les valeurs des intervalles de quarte et de tierce sont donns dans le tableau III.

    Toutes les quartes sont justes, excepte la quarte Solb-Si (qui n'en est pas vraiment une).

    La plupart des tierces sont d'un rapport81641,2656 . C'est cette fausset des tierces qui a

    conduit, partir de la Renaissance, au foisonnement des diffrents tempraments tentant d'approcher au mieux la tierce pure dans la qute de justesse absolue.

    IV. Tempraments

    Les raisons pour lesquelles la Renaissance a vu l'apparition de nombreux systmes musicaux rivalisant avec la gamme de Pythagore sont diverses. A contre-courant du mouvement humaniste, de nombreux thoriciens de la musique ont remis en question le systme antique. Nous l'avons dit : les tierces sont dans la gamme pythagoricienne plutt fausses, ce qui pose problme l'poque de la polyphonie instrumentale. Si la tierce tait jusqu'alors peu usite car considre comme un intervalle paen, sa place dans la musique grandit, devanant la quarte, et il devient important de lui assurer une certaine consonance.

    On peut aussi raisonner d'une autre manire, et supposer que la tierce tait considre comme un intervalle paen justement cause de sa faible consonance. Les thoriciens auraient alors tent d'habiliter le rapport 5/4 dans le systme musical, ce qui expliquerait l'usage grandissant de la tierce.

    Ce dbat n'entre pas dans le cadre du prsent expos. Pour une prsentation plus fine d'un point de vue musical et historique de ce sujet, nous renvoyons l'essai [2]. Nous nous contenterons ici d'une prsentation mathmatique de certains de ces tempraments.

    Un temprament est une modification d'une gamme dj existante en l'occurrence la gamme de Pythagore dans le but de crer un nouveau systme. Une prsentation thorique et gnrale des tempraments est dveloppe dans [1].

    Les objectifs des tempraments sont simples : Amliorer la justesse des tierces Amliorer ou faire disparatre la quinte du loup, sans pour autant fausser les autres quintes Ne pas entraver les possibilits de modulations

    1) Gamme de Zarlino

    Ce temprament, aussi appel gamme naturelle ou gamme des physiciens, est semble-t-il improprement attribu Gioseffo Zarlino (cf. [2]). Il se peut qu'il ait en fait t labor plus tard par le physicien Hermann von Helmholtz.

    On appelle comma syntonique ou zarlinien l'intervalle entre une tierce pure et une tierce

    pythagoricienne. Les valeurs de ces tierces tant respectivement54=1,25 et

    81641,2656 , le

    comma syntonique vaut81801,0125 . Du fait de son rapport simple, la tierce pure est

    videmment bien plus consonante que la tierce pythagoricienne. On s'loigne certes de notre recherche initiale puisqu'on essayait uniquement d'obtenir des quintes justes, sans aucun gard pour les tierces.

  • La gamme de Zarlino consiste donc remplacer le Mi pythagoricien par un Mi plus bas tel que la tierce Do-Mi soit pure. Comme la quinte Mi-Si serait alors fausse, on modifie aussi le Si pour qu'elle soit juste, ainsi que le La pour que la quarte Mi-La ait un rapport 4/3. Par suite, on modifie d'autres notes pour que les tierces, les quintes et les quartes soient pures. Cependant, on ne peut par atteindre la perfection, puisqu'on finit par devoir ajuster le Do initial, ce qui fausserait la tierce Do-Mi. On se contente donc d'ajuster Mi-Si et Mi-La, puis les autres frquences sont calcules de la manire suivante : pour obtenir Do# depuis Do, on ajoute deux tierces et on retranche une quinte.

    L'intervalle Do-Do# vaut donc ( 54)

    2

    23=

    2524

    , et ainsi pour chaque note. On obtient donc la

    gamme :

    Figure III - Cycle des quintes et commas

    Tableau IV - Gamme de Zarlino

    Do 1 264Do# 1,041666667 275

    1,066666667 281,61,125 297

    1,171875 309,3751,2 316,8

    Mi 1,25 330Fab 1,28 337,92Mi# 1,302083333 343,75Fa 1,333333333 352Fa# 1,40625 371,25

    1,422222222 375,4666667Sol 1,5 396Sol# 1,5625 412,5Lab 1,6 422,4La 1,666666667 440La# 1,7578125 464,0625

    1,8 475,2Si 1,875 495Dob 1,92 506,88Si# 1,953125 515,625Do 2 528

    Gamme Rapports dcimaux Frquences

    RbRR#Mib

    Solb

    Sib

  • Compars ceux de la gamme de Pythagore, les intervalles de la gamme de Zarlino sont d'une simplicit donc d'une consonance extrme. Ceci est flagrant sur le tableau comparatif suivant :

    Une tude de la gamme diatonique nous montre qu'elle est constitue non plus de deux intervalles fondamentaux, mais de trois : le ton majeur (9/8), le ton mineur (10/9) et le demi-ton (16/15). Ceci rend l'utilisation de cette gamme beaucoup plus difficile. Son schma est T t D T t T D

    Les intervalles principaux sont donc plutt consonants, mais sitt qu'on essaiera de moduler, on sera confront un gros problme, puisque tous se retrouveront faux, comme le montre le tableau VI (on rappelle que la tierce mineure correspond un rapport de 6/5).

    Tableau V - Intervalles dans les gammes de Pythagore et de Zarlino

    Note Rapport pythagoricien Rapport zarlinien

    Do 1 1R 9/8 9/8Mib 32/27 6/5Mi 81/64 5/4Fa 4/3 4/3Sol 3/2 3/2Lab 128/81 8/5La 27/16 5/3Sib 16/9 9/5Si 243/128 15/8Do 2 2

    Tableau VI - Tierces, quartes et quintes dans la gamme de Zarlino

    Gamme Tierce mineure Tierce majeure Quarte Quinte

    Do 1,2 1,25 1,333333333 1,5Do# 1,2 1,25 1,35 1,5Rb 1,2 1,25 1,333333333 1,5R 1,185185185 1,25 1,333333333 1,481481481R# 1,2 1,333333333 1,5Mib 1,185185185 1,25 1,333333333 1,5Mi 1,2 1,25 1,333333333 1,5Fab 1,25 1,5Mi# 1,2 1,35 1,5Fa 1,2 1,25 1,35 1,5Fa# 1,185185185 1,25 1,333333333 1,481481481Solb 1,265625 1,35 1,5Sol 1,2 1,25 1,333333333 1,5Sol# 1,2 1,25 1,333333333 1,5Lab 1,2 1,25 1,333333333 1,5La 1,2 1,25 1,35 1,5La# 1,185185185 1,333333333 1,481481481Sib 1,185185185 1,25 1,333333333 1,481481481Si 1,2 1,25 1,333333333 1,5Dob 1,25 1,333333333 1,481481481Si# 1,2 1,333333333

  • En particulier, la quinte R-La et la tierce mineure R-Fa sont fausses. Or ces deux intervalles sont trs utiliss dans la gamme de Do majeur3. La solution est d'instaurer une nouvelle note, appele R bas , de sorte que l'intervalle entre ce nouveau R et le La soit une quinte juste, et qu'il forme une tierce mineure juste avec le Fa. Mais ceci soulve de nouveaux problmes : quelle R utiliser lorsqu'on passe de manire mlodique de Do Mi ou de Mi Do ? De plus, on serait amen crer une note basse pour chaque tonalit, ce qui amnerait une gamme de 28 notes. Autrement dit, nul ne s'y retrouverait.

    Le systme de Zarlino apparat donc inutilisable dans une musique labore prsentant des modulations (il faudrait raccorder son instrument chaque fois). De plus, s'il propose des tierces justes, le problme de la quinte du loup n'est pas rsolu puisqu'il en contient cinq. On ne peut donc pas dire qu'il prsente de rel avantage sur la gamme de Pythagore.

    D'autres tempraments, appels msotoniques (du grec milieu ), consistent rduire d'une fraction de comma syntonique toutes les quintes de la gamme de Pythagore (sauf une), et d'augmenter la dernire pour fermer le cycle des quintes. Cependant, les rsultats ne donnent pas plus de satisfaction que la gamme de Zarlino. C'est pourquoi nous n'entrerons pas dans le dtail de ces tempraments.

    2) Tempraments ingaux

    Dans la ligne des tempraments msotoniques, on rencontre les tempraments ingaux, plus fins en gnral. Effectivement, il s'agit de retrancher des fractions de commas syntonique ou pythagoricien (ou les deux) quelques quintes, de manire ce que le cycle des quintes soit ferm. Bien sr, aucun ne rpond entirement aux buts fixs au dpart, mais tous les approchent plus ou moins. L'poque baroque constitue l'ge d'or de ce genre de tempraments, puisque la plupart des compositeurs avait constitu le sien (on citera notamment Rameau, Kirnberger, Vallotti, etc.)

    On notera que contrairement aux gammes prsentes jusqu'ici, les tempraments ingaux ne sont pas construits sur des intervalles fondamentaux : si la gamme pythagoricienne reposait sur des tons et des limmas, l'cart entre deux notes successives n'est pas constant ici. Pourtant, cela n'empche pas les modulations, mais donne chaque tonalit une couleur propre4 (les intervalles tant tous diffrents, un accord parfait ne sonnera pas exactement de la mme manire dans toutes les tonalits).

    Citons C.P.E. Bach propos des tempraments ingaux : Les deux sortes d'instruments doivent tre bien temprs : en accordant les quartes et les quintes, avec les tierces majeures et mineures et les accords complets pour preuves, il faut affaiblir un tant soit peu la justesse des quintes, en sorte que l'oreille la peroive peine et que les vingt quatre tons soient tous utilisables.

    L'article [3] se charge d'une prsentation minutieuse de plusieurs de ces tempraments ingaux. Quant nous, nous n'exposerons que celui de Johann Sebastian Bach, que nous jugeons intressant d'un point de vue musical.

    3) Le temprament de J.S. Bach

    Ce temprament n'est mentionn explicitement dans aucun ouvrage de Bach. Il est le fruit d'une hypothse cryptographique mise par B. Lehman (Cf. [4]). Cependant, ce temprament, qu'il

    3 Il s'agit de la gamme gnrique prsente ici, par opposition aux modulations dont elle peut tre l'objet.4 Cf. http://www.musebaroque.fr/Documents/tonalites.htm

  • ait t invent par Bach, Lehman, ou un autre, n'en demeure pas moins intressant.Le principe est simple : cinq quintes sont raccourcies d'un sixime de comma syntonique.

    Quatre autres sont prserves pures. Ces neuf quintes compltes par trois quintes justes occupent

    donc un intervalle de ( 32)

    4

    ( 32 6 8081 )

    5

    1,003204 . Il reste trois quintes modifier pour pouvoir

    fermer le cycle des quintes. En rpartissant 1,003204 sur trois intervalles gaux, on trouve que les trois quintes restantes sont diminues d'un intervalle de 31,0032041,00107 .

    Les frquences du temprament de Bach sont donns dans le tableau VII. On notera que les bmols n'y sont pas dfinis, soit inutilit, soit enharmonie5.

    L'tude des intervalles de tierce, quarte et quinte (Tableau VIII) nous permet de dterminer si les critres recherchs sont atteints. Presque tous les intervalles sont deux deux distincts, ce qui assure d'ores et dj une couleur propre chaque tonalit. Toutes les quintes sont comprises entre 1,496 et 1,500 : elles sont donc trs justes, voire parfaitement justes (on rappelle que la quinte du 5 L'enharmonie dsigne le fait d'assimiler les dises aux bmols : par exemple La# = Sib

    Figure IV - Cycle des quintes dans le temprament de Bach

    Tableau VII - Temprament de J.S. Bach

    Rapports

    Fa 1 350,5418491Fa# 1,05689 370,4841749Sol 1,120356922 392,7319871Sol# 1,18772 416,345565La 1,255199632 440La# 1,33333333 467,389131Si 1,40918 493,9765629Do 1,496901414 524,7265896Do# 1,58533 555,7245096

    1,67706386 587,88106651,77968 623,852318

    Mi 1,878910104 658,6366221

    Gamme Frquences

    RR#

  • loup vaut 1,4798 dans la gamme pythagoricienne). Il en est de mme des quartes, comprises entre 1,333 et 1,336. On ne peut pas dire autant des tierces, mais elles sont tout de mme plus justes que les tierces de Pythagore. Enfin, les modulations sont rendues possibles par l'absence de valeur aberrante pour les intervalles.

    Cependant, certainement dans le but d'unifier la musique occidentale autour d'un mme systme, ces tempraments ingaux ont t progressivement abandonns pour laisser place au temprament gal que nous employons encore aujourd'hui. Les tempraments ingaux ne sont plus utiliss que pour jouer la musique en gnral baroque compose pour ces tempraments.

    4) Temprament gal

    C'est l'poque classique que s'est dvelopp le temprament gal, ou gamme tempre. Il s'agit de diviser l'octave en douze parties gales, au mpris des considrations harmoniques mentionnes plus haut. En effet, l'intervalle fondamental est alors un irrationnel en l'occurrence

    122 et n'est donc pas une fraction irrductible simple. De plus, on sait dj qu'aucun intervalle ne sera juste, puisque tous les intervalles justes sont des fractions irrductibles, et aucune puissance de l'intervalle fondamental autre qu'un multiple de 12 ne saurait tre rationnelle.

    Tableau VIII - Tierces, quartes et quintes dans le systme de J.S. Bach

    Gamme Tierce majeure Quarte Quinte

    Fa 1,255199632 1,33333333 1,496901414Fa# 1,26156301 1,333327026 1,499995269Sol 1,257795594 1,336093333 1,496901413Sol# 1,260315069 1,334767454 1,498400296La 1,263010249 1,336093333 1,496901414La# 1,257797898 1,334760003 1,500000004Si 1,262918861 1,333335773 1,500007096Do 1,255199632 1,336093333 1,496901414Do# 1,261566992 1,333337539 1,498388348R 1,260405194 1,336093334 1,496901414R# 1,259054349 1,33475681 1,498396712Mi 1,26426485 1,336093333 1,499997256

    Tableau IX Gamme tempre

    Rapports

    Do 1 261,6255661 1,259921048 1,334839852 1,498307073Do# 1,059463094 277,1826317 1,259921048 1,334839852 1,498307073

    1,122462048 293,6647686 1,259921048 1,334839852 1,4983070731,189207114 311,1269844 1,259921048 1,334839852 1,498307073

    Mi 1,259921048 329,6275575 1,259921048 1,334839852 1,498307073Fa 1,334839852 349,2282319 1,259921048 1,334839852 1,498307073Fa# 1,414213559 369,9944231 1,259921048 1,334839852 1,498307073Sol 1,498307073 391,9954362 1,259921048 1,334839852 1,498307073Sol# 1,587401048 415,3046977 1,259921048 1,334839852 1,498307073La 1,681792825 440 1,259921048 1,334839852 1,498307073La# 1,78179743 466,1637614 1,259921048 1,334839852 1,498307073Si 1,887748618 493,8833009 1,259921048 1,334839852 1,498307073

    Gamme Frquences Tierce Quarte Quinte

    RR#

  • Le seul intervalle fondamental tant le demi-ton, il y a enharmonie6. Tous les intervalles sont gaux, mais aucun n'est juste. En revanche, cela fait videmment disparatre la quinte du loup. Les quintes et les quartes sont assez proches de la justesse. Les tierces sont plutt fausses, mais moins que dans le systme pythagoricien.

    Eu gard l'galit des tons, les modulations sont rendues possibles, mais et c'est un des principaux reproches faits cette gamme on perd toutes les couleurs propres aux tonalits, puisque celles-ci sont toutes gales. Si dans les tempraments ingaux, l'intervalle Do-R tait par exemple lgrement diffrent de l'intervalle R-Mi ce qui assurait une diffrence certaine entre Do majeur et R majeur par exemple il n'y a plus de distinction ici.

    Cette gamme est utilise de nos jours pour l'accordage des pianos, des orchestres, etc. pour sa simplicit. Mais il s'agit d'une aberration harmonique : elle est entirement fausse. C'est pourquoi elle est de plus en plus controverse, et de nombreux artistes baroques lui prfrent les tempraments ingaux, lorsque c'est possible.

    V. ConclusionComme nous l'avons dit, une gamme conservant la fois quintes et octaves n'existe pas. Les

    gammes tudies ici approchent toutes plus ou moins cette gamme idale, mais ont obligatoirement des dfauts : quinte du loup, modulations impossibles, tierces fausses, etc. On trouvera dans le tableau suivant des lments comparatifs des gammes cites dans cet expos, savoir Pythagore, Zarlino, Bach, et le temprament gal.

    Gamme idale Pythagore Zarlino Bach7 Temp. galNb. d'intervalles fondamentaux

    Non dfini 2 3 Non dfini 1

    Quinte 1,5 1,5 1,5 1,4990 1,4983Quinte du loup Non 1,4798 1,4815 Non NonQuarte 1,333... 1,333... 1,333... 1,3345 1,3348Tierce 1,25 1,2656 1,25 1,2599 1,2599Modulations Oui Non Non Oui OuiHomognit8 Parfaite Moyenne Mauvaise Bonne Parfaite

    Tableau IX - Tableau comparatif final

    Il serait tentant d'adopter la gamme tempre (ce qui est d'ailleurs le cas gnralement). En effet, elle rpond la plupart de critres attendus, ses intervalles approchant beaucoup les intervalles parfaits. De plus son accordage est beaucoup plus simple que celui d'un temprament ingal. Mais son principal dfaut est l'unicit de l'intervalle fondamental : il est alors irrationnel, ce qui pose problme ; et le caractre gal de ce systme rend les tonalits majeures ou mineures identiques, ce qui peut tre considr comme un atout ou comme un dfaut.

    Pour des interprtations plus riches, notamment dans la musique baroque, on emploiera les tempraments ingaux appropris. Cependant, la majeure partie des uvres postrieures l'poque classique ayant t crite pour le temprament gal, il est tout fait lgitime d'en faire l'usage.

    6 Voir note 57 Toutes les valeurs pour cette gamme sont des valeurs moyennes8 Sous-entendu l'homognit des valeurs des diffrents intervalles. Par exemple, l'homognit de la gamme de

    Zarlino est mauvaise car, si les intervalles atteignent la valeur thorique pour certaines notes, ils sont faux pour nombres d'autres : cinq quartes et cinq quintes sont fausses, notamment la quinte R-La.

  • Annexe 1 : Glossaire scientifique

    Fonction priodique Srie de Fourier : On qualifie de priodique toute fonction f telle qu'il existe une valeur T (appele priode) telle que pour tout x appartenant au domaine de dfinition, f(x+T) = f(x). Au bout d'un certain temps, la fonction atteint nouveau les mmes valeurs, ce qui donne un cycle. On dfinit la frquence comme l'inverse de la priode. Parmi les fonctions priodiques, on retrouve notamment les fonctions trigonomtriques sinus et cosinus, de priode 2.

    En analyse, on montre que certaines fonctions priodiques (en particulier les fonctions continues) sont dcomposables en sries de Fourier, c'est--dire qu'elles peuvent s'crire comme la somme infinie de fonctions trigonomtriques, ce qui les rend plus faciles tudier.

    PPCM : Plus Petit Commun Multiple. Le PPCM de deux nombres est le plus petit multiple qu'ont en commun ces deux nombres. Si les deux nombres sont premiers entre eux, leur PPCM est gal leur produit. Ex : ppcm(3, 5) = 15 ; ppcm(6, 4) = 12 ; ppcm(, 2/5) = 2.

    Ensemble discret : Un ensemble discret est le contraire d'un ensemble continu. Alors qu'un ensemble continu, lorsqu'il est muni d'une relation d'ordre, comporte toujours un lment entre deux lments pris au hasard (c'est le cas de ), un ensemble discret comporte des trous . L'ensemble des entiers naturels est discret : entre 1 et 2, il n'y a aucun chiffre.

    Logarithme en base 2 : C'est la fonction telle que pour tout x : log2(2x)= x . Les

    fonctions logarithmes possdent la proprit suivante : pour tous x, y :

    log2( x y )=log2( x)+log2( y) et log2(xy)= log2(x)log2( y )

    On a videmment log2(2)=1

    Intersection : L'intersection de deux ensembles est l'ensemble form par les lments qui appartiennent la fois aux deux premiers ensembles. On note AB l'intersection entre A et B.

    Groupe : Un groupe est une structure mathmatique sur un ensemble. Les groupes additifs possdent la proprit suivante : pour tous x, y appartenant au groupe, x+y et x-y appartiennent encore au groupe. Un groupe engendr par un ou plusieurs lments est un groupe qui contient uniquement ces lments et tous ceux qui rsultent de la stabilit additive dfinie ci-dessus. Ainsi, le sous-groupe de engendr par 1 et est l'ensemble

    Courbe reprsentative de la fonction sinus

  • des rels qui s'crivent k1+k ' avec k et k' entiers. Un translat de ce sous-groupe par la frquence de rfrence log2( f 0) est l'ensemble des rels de la forme

    log2( f 0)+k1+k ' . Il contient par exemple log2( f 0)+3+2 .

    Rationnels Irrationnels : On divise l'ensemble des nombres rels en deux catgories. Les nombres rationnels sont ceux qui peuvent s'crire sous la forme p/q, avec p et q entiers (par exemple 1/3, 485729849/2247). Les irrationnels sont les nombres qui ne possdent pas cette proprit (par exemple ,2 , log2 3 ).

    nZ : Si n est un entier naturel, n dsigne l'ensemble des nombres multiples entiers de n (par exemple : 0, n, 2n, 3n, -n, -2n, etc.). On voit bien que notre gamme parfaite n'est pas de cette forme.

    Dcomposition en produit de facteurs premiers : Tous les entiers peuvent se dcomposer, de faon unique, en un produit de nombres premiers. Par exemple : 30=532 , 3=3ou 13200=222235511=2435211 . Ainsi, toute fraction irrductible s'crit aussi de faon unique comme un produit de nombres

    premiers :83=2331

  • Annexe 2 : Rsolution du systme#include #include #include

    int main (int argc, char *argv[]){

    long i,j,k;char k2=0, k3=0, k5=0, l2=0, l3=0, l5=0;char p=2.0;char n=7.0;

    for(i=-10;i

  • Rfrences

    [1] : Xavier Caruso, Application des fractions continues la construction des gammes, http://webmath.univ-rennes1.fr/irmar/pampers/documents/musique.pdf

    [2] : Olivier Bettens, Intonation juste la Renaissance : idal ou utopie ?,http://virga.org/zarlino/index.html

    [3] : http://fr.wikipedia.org/wiki/Temprament_ingal

    [4] : Bradley Lehman, Bach's extraordinary temperament : our Rosetta, http://em.oxfordjournals.org/content/33/1/3.full.pdf+html?ijkey=73MxPzizT73iI&keytype=ref