Bulletin de documentation - gouvernement · 2020-06-20 · jnd-Duché de Luxembourg listère d'Etat...

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jnd-Duché de Luxembourg listère d'Etat Bulletin de documentation SOMMAIRE La présentation du projet de budget de l'Etat pour l'exercice 1984 1 Les orientations et les problèmes de la politique finan- cière du Gouvernement 9 Messages de Noël et de Nouvel An de Son Altesse Royale de Grand-Duc et du Président du Gouverne- ment 19 Memorandum du Gouvernement luxembourgeois sur l'adaptation des structures des institutions des Com- munautés européennes 21 Le Luxembourg dans l'Europe communautaire des années 80 - Discours de Madame Colette Flesch, Vice- Président du Gouvernement, Ministre des Affaires étrangères et de l'Economie à l'Université de Lausanne 25 Conférence du Forex Club Luxembourg consacrée aux marchés de l'or 32 La commémoration de la Journée des Droits de l'Homme., 34 L'endettement international et ses répercussions sur le système bancaire - Discours de Monsieur Pierre Werner, Président du Gouvernement, à l'occasion des Journées d'études bancaires 35 Aspect de la politique gouvernementale en matière d'emploi 37 La situation économique au Luxembourg à la fin de 1983 et perspectives pour 1984 39 La situation économique et sociale de l'agriculture... 42 La protection de l'environnement 44 Les problèmes de la télédiffusion 45 La Compagnie Luxembourgeoise de Télédiffusion ... 47 La réunion du Conseil de l'Atlantique Nord à Bruxelles 48 /1983 Décembre Service Information et Presse Luxembourg — 10, boulevard Roosevelt

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jnd-Duché de Luxembourglistère d'Etat

Bulletindedocumentation

SOMMAIRELa présentation du projet de budget de l'Etat pourl'exercice 1984 1Les orientations et les problèmes de la politique finan-cière du Gouvernement 9Messages de Noël et de Nouvel An de Son AltesseRoyale de Grand-Duc et du Président du Gouverne-ment 19Memorandum du Gouvernement luxembourgeois surl'adaptation des structures des institutions des Com-munautés européennes 21Le Luxembourg dans l'Europe communautaire desannées 80 - Discours de Madame Colette Flesch, Vice-Président du Gouvernement, Ministre des Affairesétrangères et de l'Economie à l'Université de Lausanne 25Conférence du Forex Club Luxembourg consacrée auxmarchés de l'or 32La commémoration de la Journée des Droits del'Homme., 34L'endettement international et ses répercussions sur lesystème bancaire - Discours de Monsieur PierreWerner, Président du Gouvernement, à l'occasion desJournées d'études bancaires 35Aspect de la politique gouvernementale en matièred'emploi 37La situation économique au Luxembourg à la fin de1983 et perspectives pour 1984 39La situation économique et sociale de l'agriculture... 42La protection de l'environnement 44Les problèmes de la télédiffusion 45La Compagnie Luxembourgeoise de Télédiffusion ... 47La réunion du Conseil de l'Atlantique Nord à Bruxelles 48

/1983Décembre

Service Information et PresseLuxembourg — 10, boulevard Roosevelt

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La présentation du projet de budget de l'Etat pour l'exercice 1984Exposé budgétaire de Monsieur Pierre Werner, Président du Gouvernement,

fait à la Chambre des Députés, le 9 novembre 1983

Introduction

Le dernier budget de la présente législature posait auMinistre des Finances un problème ardu aussi bien deprésentation que de fond. Ne fallait-il pas d'une partinsérer le plan de finances de l'année 1984 dans lacontinuité d'une ligne budgétaire suivie avec méthodeet succès depuis le début de la législature? D'autre part,cette ligne n'était-elle pas infléchie ou brisée par l'am-pleur exceptionnelle de l'intervention financière dans larestructuration industrielle? Ici intervient en effet la «loidu 1er juillet 1983 concernant des mesures de nature àfavoriser la restructuration et la modernisation de lasidérurgie ainsi que le maintien de la compétitivitégénérale de l'économie», qui, avec son plan bisannuels'étendant sur 1983 et 1984, érigeait à elle seule unsystème équilibré de recettes et de dépenses exception-nelles signifiant un effort global de sauvetage de l'indus-trie sidérurgique.

On pourrait prétendre que le vote de la loi du 1erjuillet 1983 a préjugé dans une mesure non négligeableles débats du budget de 1984. Toutefois, le débat quis'inaugure a le mérite d'associer la Chambre des Dépu-tés à la discussion de l'évolution récente de la questionsidérurgique. Nous arrivons à un moment où les diversdossiers en question s'approchent de leur dénouement,tant par rapport à notre position vis-à-vis de la Commis-sion des Communautés Européennes que par rapport àla coopération avec d'autres sidérurgies au-delà de nosfrontières. Les négociations en cours et les décisions àprendre remodèleront notre sidérurgie dans le sens duconcept étant à la base du projet qui est devenu la loi du1er juillet 1983. Dans ce cadre, diverses alternatives ontété étudiées.

La Chambre des Députés, une fois de plus, aura lapossibilité au cours des débats d'exprimer ses vues ausujet des choix qui s'imposent au pays. J'ai confiancequ'elle saura appuyer ceux qui donneront le maximumde chances de productivité et de résultats aux entre-prises concernées tout en respectant les intérêts supé-rieurs de notre communauté nationale dans son ensem-ble. D'ici à la fin des débats budgétaires plusieurs desinterrogations essentielles sur l'avenir de la sidérurgiepourront avoir reçu des réponses.

Ainsi avec le budget de 1984 arrivons-nous au pointculminant d'un processus pour maîtriser la crise com-mencée en 1975, mais qui de gestion d'une crise écono-mique est devenu au cours des trois dernières années uneremise en cause fondamentale de notre structure économi-que. La dramatisation de la situation des entreprises et desmarchés a dominé pendant ces années le débat public etelle a mis à contribution les énergies et les nerfs de tousceux qui y furent mêlés à un titre quelconque.

La tripartite sidérurgique prendra également con-naissance des dernières négociations entre entreprisesconcernées à partir du 14 novembre. Le Groupe res-treint se prêtera, je l'espère, à une concertation qui parun consensus social accroîtra les chances de réussite desplans retenus.

L'intérêt qu'accapare nécessairement le dossiersidérurgique ne devrait pas mettre au second plan lagestion normale des affaires du pays, l'efflorescence denouveaux espoirs dans le domaine économique etsocial, la recherche de solutions pour les mille conflitsd'intérêt que provoque la marche inexorable du progrèsdans la condition humaine.

C'est à ce propos que la présentation du budget faitepar le Ministre des Finances prend toute sa valeur et jene puis m'empêcher d'exprimer mon étonnement de cequ'on fasse au Ministre des Finances et au Gouverne-ment le reproche d'avoir présenté, en complément autableau sur l'ensemble des recettes et des dépenses ducompte général de 1982, du budget définitif de 1983 etdu projet de budget de 1984, une seconde version quiélimine, tant pour 1983 que pour 1984, les recettes et lesdépenses relatives aux mesures d'exception découlantde la loi du 1er juillet. Ce qui représente en fait un effortde clarification est taxé de tentative de brouiller lesidées et de compliquer le débat au point qu'il devienne«l'apanage de certains rares spécialistes en la matière».Que ceux qui s'opposent à ce qu'on rende comparablesles chiffres, soient au moins logiques avec eux-mêmes etqu'ils rendent hommage au rétablissement rapide d'unesituation positive pour l'exercice 1983 après un déficitglobal dans les comptes en 1983, déficit sortant absolu-ment de l'ordinaire.

L'exercice 1983, année charnière de notre rénovationsidérurgique, est chargé du gros des opérations excep-tionnelles, notamment de capital, ressortissant du plande restructuration, mais devient en contrepartie bénéfi-ciaire des réserves budgétaires affectées ainsi à des finsconcordant avec leur caractère cyclique. Les comptes del'Etat pour 1983 marqueront de ce fait une césure.

Par contre, le projet de budget de 1984 reprend laphilosophie budgétaire suivie antérieurement et pré-sente des prévisions établies selon des critères quirétablissent la continuité de la politique budgétaire et lacomparabilité des budgets antérieurs et postérieurs.

En entamant la reconstitution de réserves budgé-taires par l'exécution du budget de 1984, le Gouverne-ment manifeste sa confiance dans la possibilité de notrepays de surmonter, moyennant les sacrifices acceptés, laplus difficile des épreuves économiques qu'il a dû subirdepuis la deuxième guerre mondiale.

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Le projet de budget pour 1984

Les perspectives coiyoncturelles pour 1984

La discussion du proj et de loi concernant le budget del'Etat pour l'exercice 1984, qui vous occupera dans lesprochaines semaines, doit se dérouler sur une toile defond économique sur laquelle dominent encore les tonsgris et sombres. L'année 1984 ne sera pas pour notrepays, en toute probabilité, l'année de la véritable repriseéconomique.

Certes, une reprise indéniable de la production peutêtre observée depuis plusieurs temps aux Etats-Unis etdans d'autres grands pays industriels, et cette tendancefavorable continue à se confirmer. Il devient donc deplus en plus probable que l'économie mondiale soitenfin, après tant de faux espoirs, à même de sortir peu àpeu de la dépression. Une reprise durable pourraittoutefois encore être mise en échec par le niveau tropélevé des taux d'intérêts, par l'évolution incertaine destaux de change, par le surendettement de nombreuxpays en développement et par différents autres élé-ments perturbateurs. Quoi qu'il en soit, nous devonsreconnaître à la lumière de l'expérience que le cycleconjoncturel à Luxembourg est toujours sensiblementen retard par rapport à l'étranger, et qu'il y a peu dechances que des influences positives venant de l'exté-rieur puissent avoir un impact décisif sur notre écono-mie en 1984.

Celle-ci sera probablement dominée par unedemande interne en régression. Le pouvoir d'achat desménages subira, en 1984 comme en 1983, une ponctionen raison des mesures de solidarité nationale indispen-sables pour la survie de notre appareil productif. Lademande publique accusera un repli en termes nets enraison de la rigueur budgétaire accrue, et ceci bien quel'Etat évite la politique d'austérité excessive que d'au-cuns lui recommandent. Le climat général de l'investis-sement restera sans doute faible, malgré nos mesuresd'encouragement, et en dépit des indéniables succès denotre politique de prospection et de diversificationindustrielles. Après une baisse réelle du P.I.B. de 1,5%en 1983, il faudra s'attendre à une nouvelle variationnégative du P.I.B. Beaucoup dépend à cet égard del'ampleur de la reprise chez les principaux partenairescommerciaux et de la tenue des nouvelles activitésindustrielles et des services.

Dans l'élaboration du projet de budget, le Gouverne-ment a en tout cas jugé prudent de maintenir pour 1984l'hypothèse admise pour les deux projets de budgetantérieurs, à savoir un taux de croissance à moyen termede zéro pour-cent, tant pour le Produit National Brutque pour le Produit Intérieur Brut.

Sur le plan de l'emploi on a assisté, au niveau interna-tional comme chez nous, à une aggravation du chômage.Ce développement des dernières années ne va malheu-reusement pas être renversé décisivement dans unavenir prévisible, et ceci en dépit des mesures éner-giques prises par le Gouvernement, notamment pouraccroître la mobilité de la main-d'oeuvre dans le pays.Que le Luxembourg connaisse en matière de chômageune situation nettement moins dramatique que cellesqui existent dans l'ensemble des pays européens, ne

doit à aucun moment devenir pour les autorités uneraison pour relâcher leur vigilence et pour réduire leursefforts. Aussi le Gouvernement discute-t-il en cemoment des moyens d'améliorer encore l'état du mar-ché du travail.

Pour ce qui est de l'évolution des prix, l'on a puconstater dans l'ensemble des pays de la Communautéune décélération sensible, et nous devrons veillerscrupuleusement au maintien d'une politique cohé-rente et rigoureuse en matière de prix et de revenus,pour ne pas compromettre la compétitivité externe' denos entreprises. Le Gouvernement est déterminé àramener la hausse des prix à la consommation de 8,5%en 1983 à un pourcentage sensiblement inférieur et àcontrecarrer énergiquement les risques de dérapage quisubsistent. Un dialogue sera engagé prochainement ausujet de la structure de l'indice des prix dans le cadre duComité de coordination tripartite.

J'aurais pu m'épargner, et j'aurais pu vous épargner,Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, lerappel de ce panorama bien maussade, puisque les faitssont bien connus. La dernière note trimestrielle duStatec fournit force détails et Madame le Ministre del'Economie a développé ce thème dans différentsdiscours notamment lors de l'inauguration des FoiresInternationales de Luxembourg. Mais j'ai tenu à rappe-ler les grandes lignes de notre situation pour bien situerle cadre général du débat que vous allez mener au coursdes semaines à venir. Il ne faut jamais minimiser unproblème, si l'on est vraiment déterminé à le résoudre.

La restructuration sidérurgique et ses répercussionsbudgétaires

Le projet de budget pour 1984 est profondémentmarqué, je l'ai déjà dit, par les répercussions financièresde la loi du 1er juillet 1983 concernant la restructurationet la modernisation de la sidérurgie. Je ne vais pasrevenir sur le débat qui nous a occupés dans cetteenceinte à la veille des vacances d'été. Aujourd'hui leGouvernement exécute les mesures que vous avezarrêtées à l'époque. Je ne voudrais mentionner que laréduction des indemnités, rémunérations et allocationsbénévoles les plus élevées du secteur sidérurgiqueappliquée entretemps en vertu de l'article 4 de la loi,ainsi que l'organisation du contrôle étatique à l'égarddes sociétés sidérurgiques, sur base d'un cahier descharges et à travers un Commissaire de Gouvernement,en vertu de l'article 21 de la loi.

Lors du dépôt du projet de loi, Monsieur le Ministredes Finances a précisé l'impact budgétaire détaillé de larestructuration sidérurgique et de toutes les mesuresd'accompagnement. L'exposé introductif du projetfournit tous les détails chiffrés, et je laisse au Ministredes Finances le soin d'apporter tantôt d'autres préci-sions qui seraient encore utiles.

Les autres efforts de restructuration économique

Les 2,9 milliards de francs de dépenses pour lesefforts de restructuration de la sidérurgie et pour lesmesures d'accompagnement prévues ont constitué,

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pour les auteurs du projet de budget, une donnée fixe,une contrainte préétablie. Dans le cadre de sa marge demanoeuvre financière de plus en plus réduite, le Gou-vernement a décidé de doubler ce paquet de mesurespar un second paquet, destiné celui-ci à aider notreéconomie dans son ensemble à développer le dyna-misme nécessaire pour combler rapidement le vide créépar le repli de la sidérurgie, qui occupera dorénavantune main-d'oeuvre moins abondante, exportera moinsde produits que par le passé, sera un moins bon clientpour les sous-traitants, pour les commerçants et lesartisans du pays et, de façon générale, créera une valeurajoutée moins importante.

Le Gouvernement, considérant qu'il est indispen-sable de combattre le chômage croissant, d'améliorer labalance commerciale et de combler par des capacitésproductives nouvelles le repli des entreprises sidérur-giques, a décidé de donner la priorité du budget à ladiversification de l'économie dans son ensemble. Cettepriorité se reflète dans les crédits budgétaires prévuspour les aides de diversification générale de l'industrieet pour les subventions dans l'intérêt de la rechercheappliquée et de l'innovation. Elle se traduit égalementdans les mesures fiscales sélectives, le Gouvernementse proposant de reconduire pour 1984 les mesuresd'encouragement de l'investissement privé de la loi-cadre du 28 juillet 1973 et de la loi promouvant lamodernisation de l'agriculture du 30 novembre 1978, etd'améliorer celles de la loi du 25 juillet 1977 en rame-nant de 8 à 6 ans la durée d'utilisation des biens amortis-sables susceptibles de bénéficier de l'aide fiscale àl'investissement. Les dépenses prévues pour l'octroi debonifications d'intérêts sur les crédits à l'exportation etde subventions pour l'expansion commerciale à l'étran-ger, pour les prêts d'Etat à Etat, et pour le renforcementdes moyens de l'Office du Ducroire visent toutes àfavoriser la compétitivité externe de nos entreprises,ensemble avec les mesures de modulation de l'indexa-tion des salaires et de la politique des prix. Nous rele-vons enfin le défi lancé à notre économie par le maintiend'un volume important de dépenses d'investissementspublics, visant à améliorer l'infrastructure du pays surtous les plans. Dans la mesure où les moyens budgé-taires ne suffisent pas à faire face à tous les besoins, nouscontinuerons à utiliser les possibilités offertes par la loide garantie du 13 avril 1970 pour confier à d'autrespromoteurs du secteur public la construction de bâti-ments administratifs importants.

Toutes ces mesures - tout en ayant un effet conjonc-turel anticyclique indéniable, soutenant la demandedans le secteur de la construction particulièrementéprouvé par la crise - contribueront à assurer un aveniréconomique au pays, à mettre nos entreprises enmesure de mieux utiliser les opportunités nouvelles queleur fournira la reprise économique qui se pointe àl'horizon. La question n'est pas de savoir si nous allonsrestructurer notre sidérurgie ou si nous préféronsdévelopper les autres industries existantes et attirer denouvelles industries pour prendre la relève de la sidérur-gie. Nous devons en effet faire l'un et l'autre, et nousfaisons l'un et l'autre. Dans les deux cas, chaque francd'aide publique doit être pleinement justifié, et chaquefranc doit être utilisé au mieux. Ce Gouvernement s'estengagé à préserver nos structures sidérurgiques et ilpersiste dans cette tâche. En même temps il a con-

science de ce que la sidérurgie n'aura plus jamais ladimension d'antan, et qu'il nous faut développer dansles meilleurs délais d'autres activités économiques. Lesdeux volets de cette double tâche ne font que se complé-ter et il est stérile de mener des polémiques sur unprétendu antagonisme entre les deux.

Mais ce gigantesque effort a son prix, et le pays doitpayer ce prix s'il veut survivre et prospérer. Le premier àen subir les conséquences, c'est l'Etat, dans son budgetannuel, dans ses réserves disponibles, dans son endette-ment.

Eviter les rigueurs sociales et contenir la charge fiscale

Qu'on utilise l'expression «austérité» ou qu'on évitescrupuleusement ce vocable, voilà qui importe peu. Cequi est sûr, c'est que nous sommes contraints à unerigueur budgétaire accrue. L'équilibre structurel dubudget de l'Etat est menacé sous les effets combinés dedeux développements négatifs. Il s'agit d'une part desrépercussions défavorables que l'évolution économiquea eues sur les recettes publiques, et d'autre part desdépenses additionnelles que nécessite l'effort de res-tructuration et de diversification économiques. Chaquemillion que nous investissons n'est plus disponible pourla consommation. Le Gouvernement a bien entendupoursuivi ses efforts pour comprimer dans toute lamesure du possible les dépenses de fonctionnement del'Etat. Mais cette politique a ses limites naturelles. Enmatière de subsides et de crédits de nature sociale il fautdès lors devenir, en 1984 et pour les exercices ultérieurs,également plus sélectif.

J'espère qu'au moins les dénonciateurs de la préten-due «politique de l'arrosoir» seront contents. Mais j'aide sérieux doutes à ce propos, car ce slogan ne servaitsouvent qu'à déclarer superflues et injustifiables lesaides destinées aux autres. Conscient des conséquencesregrettables que la politique de rigueur, à pratiquer sousle signe de la solidarité, va avoir pour les revenus et leniveau de vie des moins fortunés, des familles nom-breuses et des jeunes foyers désireux d'accéder à lapropriété de leur logement, le Gouvernement a tenu àinscrire des crédits d'un total de 261 millions de francspour une majoration de l'allocation de vie chère, pourune allocation compensatoire unique pour les famillesayant des enfants à charge, et pour différentes aides aulogement.

A ceux qui considèrent que ces crédits sont insuffi-sants je répondrais avec Jacques Delors: «Tout ce que jefais, je suis forcé de le faire avec une balance de pharma-cien». Mais sans doute que l'opposition dans cetteMaison ne va pas nous accuser d'être trop avares, aprèsnous avoir déjà reproché d'ores et déjà de distribuer, parces crédits de nature sociale, des cadeaux pré-électo-raux.

Le même souci de ne pas dépasser le juste poids dansles indispensables mesures de rigueur a inspiré lesretouches à la législation fiscale contenues dans le projetde budget. La loi du 1 er juillet contient un renforcementsensible - mais passager, comme nous continuons à lesouligner - de la charge fiscale, dont certaines disposi-tions ne prennent leur plein effet qu'à partir du 1erjanvier 1984. Le Gouvernement n'en a pas moins tenu àprévoir des allégements ponctuels. J'en ai cité un tout à

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l'heure, en parlant des aides fiscales à l'investissementqui sont prorogées. Un second allégement, qui intéressel'ensemble des assujettis à l'impôt sur le revenu despersonnes physiques, concerne l'adaptation du barèmeà l'évolution du niveau des prix. Ce geste, ensembleavec les nouvelles dispositions sur le minimum forfai-

taire pour frais d'obtention et sur l'abattement deretraite supplémentaire, témoignera du souci du Gou-vernement de ne pas permettre un accroissementsupplémentaire de la charge fiscale et de réduire dès quepossible les mesures passagères imposées par l'effort desolidarité nationale.

Le bilan politique de la législature

Le projet de budget pour 1984 est le cinquième et ledernier que l'actuel Gouvernement présente à laChambre des Députés. Le débat des semaines à venirfournira de ce fait l'occasion de faire en quelque sorteune rétrospective sur l'activité gouvernementale aucours de la législature qui touche à sa fin. Le Gouverne-ment n'a pas l'intention de se soustraire à cet inventaire.Tout en réalisant ou en mettant en route les projetsessentiels de la déclaration gouvernementale, le Gou-vernement avait à faire face à des données écono-miques, conjoncturelles et structurelles, imprévisibleset imprévues, qui lui ont imposé de surcroît un pro-gramme d'action et de législation venant se greffer surles tâches courantes et le programme gouvernemental.Certes, il y a des thèmes de la déclaration du 24 juillet1979 qui ne sont pas réalisés et qui ne vont pas l'êtreavant l'été prochain. Il y a d'abord une série de mesuresdont la déclaration gouvernementale ne proposait quede faire étudier l'opportunité; dans certains cas, nosréflexions ultérieures nous ont amenés à renoncer auprojet, comme par exemple pour la création del'Ombudsman. Par contre, il y a une série de réformesnon prévues dans l'accord de coalition qui ont étéentreprises et réalisées, comme la création de l'InstitutMonétaire Luxembourgeois. Il est clair que tout pro-gramme gouvernemental doit être vu dans une optiqueévolutive et qu'en cours de route des ajustements, dansdes sens divers du reste, doivent être possibles. Finale-ment nous nous sommes attaqués à des problèmesconsidérés comme particulièrement ardus et conti-nuellement reportés comme la réforme des régimes depension contributifs, la loi sur les loyers, la question desenrôlés de force.

L'évolution des finances publiques

Permettez-moi de vous livrer quelques réflexions surle bilan de la législature en matière de financespubliques. Un certain nombre de commentaires alar-mistes, qu'on a pu lire et entendre ces derniers temps,appellent une mise au point, pour amener un peu plusde sérénité dans le débat. C'est pour la 25e fois quej'assiste en tant que Membre du Gouvernement,Ministre des Finances ou Président du Gouvernement àl'élaboration d'un budget annuel, sans compter les cinqfois que j'y ai participé en tant que député et sans comp-ter mes années de service en tant que fonctionnaire auMinistère des Finances. On me concédera que cetteexpérience me permet de porter un jugement. Monmessage est celui qu'il ne faut pas désespérer et qu'il nefaut pas céder à la panique. Notre situation est certesgrave, et il faut réagir en conséquence, mais elle n'est nidramatique ni absolument inédite.

Ayant connu encore la grande récession des années30, je n'ai jamais partagé la croyance, répandue pendant

les années 60 et 70, au caractère irréversible du booméconomique. Je n'ai jamais accepté la thèse répanduenaguère par des économistes éminents que l'on pouvaitet que l'on devait compter avec une progressionannuelle de 5% du P.N.B. pendant une longue séried'années. D'où la décision d'amasser des réservesbudgétaires, reprise d'ailleurs du Gouvernementd'avant-guerre. Aujourd'hui je suis pareillement étonnéde voir que tant de gens se laissent abattre par un pessi-misme inapproprié. Non, les moments difficiles passe-ront, pour l'économie et pour les finances publiques, àcondition bien entendu que nous ne nous soustrayionspas à la discipline et à la rigueur que la situation exige, etque nous ne perdions pas de vue notre vulnérabilité.

Il suffit de comparer l'état de nos finances publiques àcelui des pays voisins, comme la Chambre des Fonction-naires l'a fait dans son avis, pour voir que nous figuronsencore en bonne position. Il suffit de regarder dans lepassé pour voir que la résorption des réserves liquidesde la Trésorerie est un phénomène qui s'est reproduit àdifférentes reprises depuis la dernière guerre mondialeavec des resserrements de caisse sans que l'Etat ne soitdevenu illiquide. Je serais même tenté de dire que laréserve budgétaire est une invention bien luxembour-geoise, puisque dans d'autres pays les déficits et lessurplus annuels du budget ne font normalement quediminuer et accroître la dette publique, sans que n'appa-raisse jamais de solde positif dépassant les éventuellesencaisses nécessaires aux dépenses courantes.

Par ailleurs, le fait que le budget extraordinairepuisse encore être financé pour plus de 5 milliards parles recettes courantes est le signe manifeste que lesfinances publiques ne sont pas définitivement dété-riorées.

L'évolution budgétaire des dernières années a étéaffectée, comme je l'ai dit tantôt, par deux développe-ments négatifs qui compliquent singulièrement la tâchedu Gouvernement, la croissance ralentie de certainesrecettes et les nouveaux besoins en dépenses de restruc-turation. Sous cette double influence, nous n'avonsévidemment pu éviter des répercussions sur les soldesbudgétaires successifs, sur la liquidité du Trésor et surl'endettement public. Qu'à la fin de la législature, lescaisses de l'Etat soient moins remplies qu'au début de lalégislature, c'est une évidence compte tenu de l'enver-gure des problèmes à résoudre. Mais ceux qui insinuentque cette circonstance prouverait que le Gouvernementn'aurait pas géré la chose publique en bon père defamille vont un peu vite en besogne. Il aurait en revan-che été irresponsable de laisser s'effondrer notre sidé-rurgie et de ne pas poser les jalons pour réorganisernotre économie, simplement pour pouvoir montrer unecaisse bien remplie au terme du mandat. C'est con-

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fondre la fin et les moyens, que de tenir un langagepareil. Je laisse au Ministre des Finances le soin dedévelopper plus en détail ce sujet important, et je melimite à quelques points majeurs.

D'aucuns nous accusent de puiser, au cours desannées de conjoncture défavorable, dans les réservesqui ont été accumulées antérieurement, au cours de laprospérité économique du début des années 1970 etdans les années suivantes, compte tenu du traditionneldécalage que les recettes publiques présentent parrapport au cycle des activités économiques. Les écono-mies en question ont été conservées d'un côté sousforme de réserves liquides des fonds d'investissements,et d'un autre côté sous forme de réserves budgétairesproprement dites, c'est-à-dire comme surplus annuelcumulé. Les dotations exceptionnelles des différentsfonds d'investissements avaient porté leurs avoirsdisponibles à plus de 5,6 milliards, alors qu'en mêmetemps les exercices budgétaires 1968 à 1978 ont dégagéun solde cumulé de 7,5 milliards de francs, permettantde constituer une réserve budgétaire correspondante.

Cette politique n'était du reste pas sans nous attirer àl'époque la critique d'accumuler des réserves stériles aulieu de les dépenser utilement. Souvenez-vous. Cesfameux «Werner-Milliarden», comme ils s'appelaient àl'époque dans la polémique quotidienne, étaient un desgrands thèmes de la campagne électorale de 1974. Maisil faut se rendre à l'évidence: la louable démarcheconsistant à mettre de côté, au cours de la prospérité,une poire pour la soif ne prend son véritable sens qu'à lacondition qu'on soit prêt également à manger cettepoire pendant les années des vaches maigres. Encorefaut-il qu'en la mangeant on rétablisse ses forces pourfaire redémarrer la prospérité. C'est ce qui a été fait.

La voie du juste milieu

Je suis profondément convaincu que notre politiquebudgétaire des dernières années a été la seule possible.Quelles alternatives aurions-nous eues? De maintenirnos réserves disponibles, en nous endettant massive-ment à une époque de taux d'intérêts élevés? Cela nedonne aucun sens. De maintenir les réserves, en équili-brant davantage les budgets successifs? Pour le fairenous n'aurions eu que deux démarches possibles (ouune quelconque combinaison des deux), et les deuxauraient produit des résultats désastreux.

Nous aurions pu renforcer la fiscalité, mais une tellepolitique aurait aggravé la récession, sapant la compéti-tivité externe de nos entreprises, nourrissant l'inflation,décourageant l'effort des agents économiques. Certes,nous n'avons pas pu entièrement éviter, en fin decompte, de prendre certaines mesures fiscales et parafis-cales, mais nous ne l'avons pas fait de gaieté de coeur,nous ne nous y sommes résolus qu'après de très amplesconsultations avec les partenaires sociaux, et nouscontinuerons à souligner le caractère exceptionnel ettemporaire de ces mesures. Nous en réservons le rende-ment aux seuls efforts additionnels de restructurationéconomique.

La seconde voie aurait été celle d'une politiqued'austérité outrancière, amenant à son tour des réper-cussions économiques et sociales inacceptables. Nousavons certes ajusté le train de vie de l'Etat aux nouvelles

données, et des économies considérables ont été réali-sées. Les normes de la croissance budgétaire annuelleont été bien en deçà de celles pratiquées au cours desannées 70. Mais ce n'était pas le moment, et ce n'est pasle moment de renoncer aux indispensables investisse-ments publics. Vous connaissez la situation du secteurdu bâtiment, mais vous savez surtout que la survie et lerenouveau de notre économie reposent sur des inves-tissements et sur une infrastructure valable.

Aurions-nous dû comprimer les dépenses ordinaires?Tout le monde dit oui dans l'abstrait sans s'engager troploin sur les points sensibles. Un démantèlement desdépenses de nature sociale aurait créé des cas de rigueurqui ne sont pas dans la tradition de ce pays, et il auraitmis en danger la paix sociale et par là l'un des atouts denotre politique industrielle. L'on ne peut voter ou fairevoter tous les mois plusieurs lois nouvelles entraînantdes dépenses plus ou moins élevées, et peut-être encoreaccuser ces lois d'être insuffisantes, et continuer àproclamer lors des discussions budgétaires que leGouvernement ne fait preuve d'aucune déterminationde réduire les dépenses.

On nous accuse de mener l'Etat «vers l'asphyxiebudgétaire». Le reproche serait plus crédible s'il nevenait pas de la Fédération des Industriels à un momentoù rien que les entreprises sidérurgiques pèsent pour10,5 milliards de francs de dépenses dans les budgets1983 et 1984. En 1979 les dépenses extraordinaires duDépartement de l'Economie ont été de 154 millions; en1983 elles sont de 3.471 millions, et en 1984 elles sont de2.951 millions, soit en moyenne plus de 20 fois le mon-tant de 1979, alors que le volume budgétaire total n'aprogressé en termes nominaux que de 54%.

Quand les porte-parole de l'opposition affirment quenous vidons les caisses de l'Etat et que nous ruinons lesfinances publiques, je ne puis que leur proposer dediscuter ces affirmations avec M. Hinterscheid, leSecrétaire Général de la Confédération Européenne desSyndicats, qui vient de proposer, pour sortir de la crise,de faire des dépenses d'investissements additionnellesdans les domaines productifs et dans le domaine socialet qui exige qu'on finance celles-ci non pas par denouvelles économies mais si nécessaire par un endette-ment nouveau de l'Etat. Je cite le tageblatt du 22octobre: «Besagte Investitionsprogramme müßtendurch Neuverschuldung, und nicht durch weitereabwürgende Sparmaßnahmen realisiert werden.»

Je vous donne, pour terminer ce sujet, un dernierexemple. Sur les 34 milliards de dette publique, pasmoins de 21 milliards représentent des certificats émisau profit des régimes de pension contributifs pour parerà l'insuffisance des capitaux de couverture. Durant lapériode allant de 1976 à 1982, le volume en a augmentéde 15,3 milliards de francs, soit de 2,2 milliards enmoyenne annuelle.

Pour 1983 et 1984, le montant sera de 7,2 milliards defrancs. Le Gouvernement a reconnu ce développement,il a pris ses responsabilités et il propose une réformeglobale des régimes contributifs. Divers secteurs s'yopposent, pour un motif ou un autre. Mais alors il nefaut pas se lamenter sur l'évolution de la dette publique.

Il arrive qu'on nous accuse de tout et du contraire. LeGouvernement a mené, et mènera jusqu'à la fin de son

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mandat, en matière de finances publiques comme surd'autres plans, une politique du juste milieu, acceptantcertains déficits pour pratiquer une politique conjonctu-relle anticyclique, devenant plus sélectif dans sespropres dépenses et exigeant momentanément unecontribution accrue de tout le monde, mais plaçant au-dessus de toutes autres considérations le redressementet l'amélioration de nos structures économiques, seulmoyen pour accroître et pour consolider l'emploi desLuxembourgeois et pour assurer leur avenir plus loin-tain.

Les nouvelles priorités

Nous devons, comme je l'ai déjà souligné dans monintroduction, rester extrêmement vigilants sur le plande la lutte contre l'inflation, d'une part parce que lessalariés ont un droit d'exiger la limitation de la perte depouvoir d'achat découlant de la modulation de l'indexa-tion, et d'autre part parce que l'inflation à son tourcompromet la compétitivité externe de nos secteursd'exportation dès qu'elle dépasse chez nous le niveauconstaté à l'étranger. Nous devons reconnaître quel'indice des prix à la consommation a évolué moinsfavorablement dans notre pays que chez les voisins. Lanouvelle législation sur l'Office des Prix, que vous avezvotée avant les vacances d'été, doit nous fournir l'instru-ment approprié pour poursuivre l'encadrement des prix,malgré la nécessité d'ajuster les marges en conformitéavec l'avis du 2 décembre 1982 du comité de coordina-tion tripartite.

La politique des revenus pratiquée au cours desdernières années a certes imposé des sacrifices dansl'intérêt de la viabilité générale de notre économie, de lasurvie des secteurs et de la protection sociale des sala-riés touchés par la crise. Mais la ponction en revenu réelpour l'ensemble du pays et notamment pour les'salariésa été extrêmement modeste, par rapport aux problèmesimmenses et complexes à résoudre, et surtout si on lacompare à ce qui se fait dans les pays voisins. En cetteannée 1983, si déprimante et dangereuse, l'adaptationdes salaires à l'indice s'est faite de façon qu'à la fin del'année les revenus sont accrus nominalement de 7,5%.Nous avions estimé, et le législateur avec nous, quel'économie dans son ensemble pouvait supporter'toutau plus 4 tranches réparties sur deux années. Rien dansla situation actuelle et les prévisions pour 1984 n'auto-rise le Gouvernement à changer d'opinion à ce propos.Le P.I.B. évolue toujours négativement. Au contraire, ilappartient à ceux qui critiquent le Gouvernement deprouver comment et par qui pourront être payées destranches supplémentaires pour les secteurs importantsqui sont en déficit.

L'action globale du Gouvernement a été inspirée del'idée de solidarité nationale dans ce domaine. Laprotection sociale contre les aléas résultant de la crise etde la restructuration a été entièrement maintenue etdéveloppée par le présent Gouvernement. Je prie nosdétracteurs de comparer encore une fois avec ce qui sepratique ailleurs. Je n'accepte pas les slogans actuelle-ment diffusés au cours d'une campagne pour les élec-tions sociales, dans la mesure où elles dénigrent l'actionde solidarité sociale du Gouvernement.

Un avenir pour la jeune génération

L'anxiété des Luxembourgeois

En lisant les différents avis relatifs au projet debudget, on voit transparaître une grande anxiété àpropos des finances publiques - et je vous ai déjàexprimé mon sentiment en la matière - et à propos de lasurvie économique du pays - thème que je voudraisdévelopper davantage dans quelques instants. Onretrouve en même temps, hélas, de nombreuses reven-dications au profit des ressortissants de la Chambreprofessionnelle respective, prouvant que les particula-rismes égocentriques ne sont pas morts et tentent derivaliser avec les impératifs nationaux retenus par leGouvernement. Mais on a également la satisfaction, enparcourant ces documents, de voir que les efforts derestructuration sont jugés positivement, que les succèsobtenus par le Gouvernement sont reconnus, et que desencouragements et des propositions nouvelles sontavancés par les organismes les plus divers. Le ConseilEconomique et Social fournit dans son avis annuel sur lasituation économique, financière et sociale du pays uninventaire des problèmes et des progrès, des moyensmis en oeuvre et des lacunes à combler. La Chambre desFonctionnaires à son tour consacre une bonne vingtainede pages de son avis budgétaire au thème de la diversifi-cation économique, après avoir écrit: «Nous devonsnous tourner vers l'avenir et reprendre confiance».

Voilà précisément ce qu'il convient de faire: ne pasnous laisser abattre par l'adversité bien réelle et par tantde maux imaginaires, mais relever résolument le défiqui nous est lancé, entamer la lutte pour la survie écono-mique du pays et pour l'avenir de la jeune génération. Ily a deux écueils à éviter, celui du pessimisme paralysantet celui de l'optimisme aveuglant.

L'optimisme aveuglant d'abord. Nous devons recon-naître pleinement la gravité de la situation dans touteson ampleur. C'est primordial, sinon nous raisonnonsdans de fausses catégories. Puis nous devons nousdéclarer être prêts à payer le prix, à fournir l'effortrequis. Nous devons réagir vigoureusement et avecimagination. - Le pessimisme paralysant ensuite.Broyer du noir et se complaire dans le défaitisme nepeut mener qu'au désastre. Il faut croire au succès si onveut obtenir ce succès. Mais le succès n'est pas donnégratuitement, ni à la communauté nationale, ni auxindividus.

Une économie en mutation

Les difficultés structurelles du secteur sidérurgique,notre principale industrie depuis cent ans, ont frappenotre pays plus durement que les autres pays indus-

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triels. Nos problèmes se trouvent encore aggravés parleurs incidences multinationales. Mais la récession, enEurope comme au Luxembourg, n'est pas le fait d'unseul secteur; et une reprise générale de la demande auniveau mondial serait loin d'arranger tout. Nous subis-sons dans nos pays à l'heure actuelle les conséquencesdramatiques d'une redistribution des cartes dans legrand jeu de l'économie planétaire. Depuis dix ans,nous avons à payer un tribut plus élevé aux producteursde pétrole, et peu à peu un nombre croissant des jeunesnations développent des secteurs industriels de plus enplus performants et parfaitement à même de rivaliseravec nos entreprises traditionnelles sur un certainnombre de produits. Cette évolution ne peut ques'aggraver dans les années et dans les décennies à venir.Or la lutte est à armes inégales, nos coûts salariaux etnos charges sociales représentant un multiple des leurs.Il y aura donc en toute probabilité de plus en plus de pro-duits que nous devrons successivement délaisser auprofit des concurrents du tiers-monde.

Ce processus de réajustement de la division du travailsur le plan international et intercontinental serait moinsinquiétant et moins dramatique, s'il pouvait s'opérersuccessivement, sans trop de hâte et de heurts. Tel nesera probablement pas le cas. Nous voyons en mêmetemps apparaître des produits nouveaux, aux procédésde fabrication plus sophistiqués et requérant des inves-tissements plus élevés. De sorte que les pays à know howélevé et disposant de ressources financières considé-rables pourront en dernière analyse trouver de nou-velles activités, bien à l'abri de la concurrence du Tiers-Monde. Nous sommes en même temps les témoins d'unglissement de la demande, la consommation de servicesgagnant du terrain aux dépens de la consommation debiens matériels. Et ces domaines d'activité sont moinsmenacés par les pays à main-d'oeuvre bon marché, soitque des qualifications particulières sont requises, soitque la prestation doit se faire sur place.

Voilà des constatations que nous devons avoir à l'espritquand nous préparons l'avenir de notre pays. Mais cetavenir a d'ores et déjà commencé: la production indus-trielle occupait en 1970 encore 45% de notre main-d'oeuvre, aujourd'hui elle n'occupe plus que 38% dutotal. En même temps les services ont progressé de 46%à 56%. Les industries en perte de vitesse, comme l'acier,le textile et d'autres, ont cédé du terrain à de nouveauxproduits et aux services en expansion rapide. S'il y a desforces naturelles, pour ainsi dire occultes, qui sechargent de la funeste tâche de faire régresser certainssecteurs, le chômage croissant dans le« pays industrielsmontre que la genèse d'emplois de substitution estmoins spontanée et nécessite des interventions et desaides publiques.

Des efforts soutenus

Dans notre pays la politique de diversification indus-trielle et celle du développement actif des services ontentretemps une longue tradition. L'actuel Gouverne-ment a particulièrement intensifié les efforts en lamatière, et les résultats sont remarquables. Les indus-tries nouvelles créées par des investisseurs étrangersattirés dans le pays depuis les années 50 occupentaujourd'hui près de 12.000 salariés, sans inclure le

personnel des entreprises du secteur des services. Lesétablissements de crédit emploient environ 9.000personnes, sans compter les collaborateurs des nom-breuses firmes qui commencent à graviter autour desbanques. Ce qui est le plus remarquable, c'est le fait quenous ayons été à même de rester attractifs durant lesannées de récession, où la communauté internationaledans son ensemble a souffert de l'apathie générale desinvestisseurs.

Depuis 1976 le Luxembourg a vu l'implantation de54 nouvelles industries, se proposant de créer 4.400emplois nouveaux; en ce moment actuel 2.900 de cesemplois existent réellement, et le rythme de croissancese situe aux environs de 500 poste's nouveaux par an. Lepersonnel des banques se développe au même rythme.

Nous comptons plus de 2.600 demandeurs d'emploiet près de 1.200 chômeurs complets. Ces chiffres sonttrop élevés, parce qu'il y a presqu'autant de cas derigueur cachés derrière ces chiffres. Mais ils sont remar-quablement modestes si l'on considère qu'il a fallucréer, au cours des 20 dernières années, plus de 18.000emplois additionnels, si l'on considère que la sidérurgieà libéré 8.500 travailleurs et que les industries tradition-nelles ont réduit leurs effectifs de 5.500 unités. End'autres mots, nous assistons à des mutations extrême-ment importantes qui transforment notre économie enprofondeur. Le mouvement est bien engagé, mais il y alieu de l'accompagner et de le canaliser dans la bonnedirection. Nous avons mis en place onze zones indus-trielles nationales d'une surface de 900 ha; nous avonscréé des aides à l'investissement et nous tenons à lesmaintenir et à les développer, comme je l'ai rappelé àpropos des accents du projet de budget pour 1984. Acôté des moyens budgétaires, nous avons les interven-tions financières de la SNCI qui se sont élevées au coursdes cinq dernières années à plus de 11 milliards.

Je voudrais particulièrement mentionner les créditsd'équipement au profit de l'artisanat, de l'hôtellerie, ducommerce et de l'industrie qui ont dépassé les 2,5milliards au cours des cinq dernières années. La régéné-ration du tissu économique luxembourgeois a de mul-tiples aspects, mais les développements au niveau desclasses moyennes sont parmi les plus intéressants.

Parlant des chances d'avenir je ne voudrais pasomettre de mentionner celles que j'attribue à l'agricul-ture et à la viticulture. Par exemple: Les résultats de nosélevages sont susceptibles d'être considérablementaméliorés et à cet égard un projet d'amélioration desraces porcines comme le Kuelbecherhaff prend unedimension nouvelle. Egalement en ce qui concernel'industrie agro-alimentaire, des possibilités de déve-loppement et de diversification subsistent et devraientêtre encouragées.

Le tourisme de qualité est pareillement susceptiblede développement dans notre pays si nous parvenons àenrichir la palette de jouissance des loisirs par la conser-vation et la restauration de nos paysages et sites en yenglobant aussi des réalisations culturelles et en yassociant les métiers d'art.

L'action gouvernementale ne s'est pas limitée à créerdes zones industrielles et d'autres éléments d'infrastruc-ture matérielle, à fournir des incitations fiscales, àdispenser des subsides et à contribuer au financement

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des investissements. Nous avons eu le souci égalementde créer un certain climat d'accueil. Je ne veux pas vousexposer un inventaire de tout ce qui a été entrepris dansce sens. Je cite seulement, à titre d'exemple, les mul-tiples initiatives prises pour consolider la place finan-cière et pour diversifier les activités internationales denos banques. Leur nombre et leur portée profession-nelle sont impressionnants. Elles se dégagent d'unconcept d'ensemble dans le domaine bancaire, commesur d'autres plans. Ces dernières années la place finan-cière a réussi à se départir de son image de «bookingcentre» pour la comptabilisation de crédits en devises,et à devenir une véritable plaque tournante des financesen Europe, en contact direct avec un nombre croissantde clients. Les banques d'origine étrangère ont considé-rablement étendu l'éventail de leurs services. Cetteconsolidation de la place financière nous met désormaisdavantage à l'abri des aléas du futur, puisque nousn'avons plus tous nos oeufs dans le même panier. Il a étéde la sorte possible non seulement de créer de nouveauxemplois bien rémunérés, mais en même temps deconsolider décisivement les postes existants. Mais iciencore, rien n'est définitivement acquis. La concur-rence d'autres places financières devient plus vive etnous nous devons de répondre avec promptitude auxchangements de climat financier.

De nouveaux chantiers à exploiter

Les développements les plus récents en matière dediversification du secteur des services concernent nospremiers succès dans l'établissement à Luxembourg decompagnies d'assurances et de réassurances, et notam-ment des compagnies dites «captives». Ce nouveaucompartiment d'activités renforcera utilement lerayonnement de la place financière de Luxembourg.

D'autres domaines de croissance potentiels existenten matière de prestations de services. L'audio-visuel estun secteur important de notre économie et il faut rendrehommage au dynamisme dont la Compagnie Luxem-bourgeoise de Télédiffusion continue à faire preuve.Mais ici encore tout bouge. Il nous appartient dedéfendre et de développer les positions dans le domainedes ondes hertziennes que nous pouvons tenir sur leplan international. Les négociations avec les action-naires de la C.L.T., et au sujet des aspects politiques

avec le Gouvernement français, se poursuivent. Ellesrépondent à l'offre faite par ce Gouvernement de per-mettre à la C.L.T. de diffuser un programme sur lesatellite de diffusion directe (DBS) français.

Par ailleurs, pour que nous puissions égalementprofiter d'autres technologies en marche, en particulierpar rapport aux satellites de point à point (FBS) qu'ilfaut distinguer des satellites directs comme le LUX-SAT, le Gouvernement a pris l'initiative au mois d'aoûtde notifier à l'Union Internationale des Télécommuni-cations à Genève son intention d'utiliser certainesfréquences en rapport avec la mise sur orbite d'unsatellite de cette espèce. Il a pris ainsi une option impor-tante. Les prospections pour la mise en oeuvre de ceprojet progressent actuellement d'une façon satisfai-sante. Si ces diverses initiatives réussissent, nous auronsun contact plus direct avec les technologies de pointe,comme l'électronique et l'informatique, et nous pou-vons essayer de développer sur notre territoire descentres de recherche et des unités de production.

La construction de nouveaux hôtels de grand stan-ding et la disponibilité d'un centre de conférences auKirchberg sont les moyens de nous lancer désormaisplus activement dans l'accueil systématique de congrèsinternationaux, tout en complétant et en étendant lespossibilités d'accueil du siège européen.

Monsieur le Président,

Mesdames, Messieurs,

Tous ces développements sont largement tributairesde l'éducation et de la formation que nous donnons ànos enfants. Les impulsions des autorités publiques sontvaines si le jeune Luxembourgeois et la jeune Luxem-bourgeoise ne se laissent pas motiver pour l'effort quecette initiation demande, ou s'ils refusent d'accepter leschangements d'attitude que la mutation en cours pos-tule.

J'ai suffisamment de raisons de croire que nos jeunesgens sont conscients de plus en plus de la complexité dumonde dans lequel ils sont placés et de la nécessité deréaliser les meilleurs prestations possibles.

Grâce à la discipline et la solidarité active de tous lesLuxembourgeois, grâce à son propre élan, la jeunesseluxembourgeoise ne sera pas réduite au chômage et àune austérité sans fin.

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Les orientations et les problèmes de la politique financièredu Gouvernement

Discours budgétaire du Ministre des Finances, Monsieur Jacques Santer, prononcé à la tribune de la Chambre desDéputés, le 9 novembre 1983.

C'est par le dépôt du projet de budget que le gou-vernement demande annuellement au législateur de luidonner les moyens de sa politique. Aussi la loi des.finances est et reste-t-elle la pierre d'angle de l'édificed'une démocratie parlementaire qui entend associer à lalibre discussion des affaires publiques le contrôlepolitique des actes du gouvernement.

Dans son rapport, dont je tiens à souligner ici l'excel-lente qualité, pour laquelle je félicite l'honorable rap-porteur Monsieur Pol Wagener, la commission desfinances et du budget expose ses idées quant à unemodification de la procédure budgétaire actuelle. A cestade, je ne voudrais pas me lancer plus avant dans cedébat. Je me contenterai d'observer qu'un accroisse-ment de l'efficacité des discussions ne requiert pasnécessairement une révision de fond en comble de laprocédure actuelle. Des retouches ponctuelles, tout ensauvegardant les aspects positifs indéniables de cettedernière, seraient peut-être plus aptes à en accroîtrel'efficacité.

Quant au gouvernement, il coordonnera au mieux sesinterventions afin d'utiliser à plein les possibilités quilui sont offertes dans le cadre de la procédure existante.Celle-ci constitue en effet un tout qui, du côté de l'exé-cutif, comporte:

- la présentation explicite et fondée du projet debudget lors de son dépôt;

- l'exposé budgétaire de Monsieur le Président duGouvernement qui, comme vous venez de l'entendre,retrace le contexte économique et social du pays;

- l'exposé du Ministre des Finances axé sur lesorientations et problèmes de la politique financière dugouvernement;

- et finalement, l'examen, département par départe-ment, des options politiques essentielles dans le cadregénéral précité.

L'objet de mon intervention d'aujourd'hui sera doncbien circonscrit. Je ne reviendrai sur la présentation dubudget et les problèmes de développement économiqueet social que dans la mesure où une telle référence seraitindispensable à une appréciation correcte des aspectsfinanciers. Ce faisant, je prendrai position sur certainspoints controversés concernant l'évolution réelle desfinances publiques. La gravité de la situation nousoblige en effet à concentrer nos confrontations d'idéessur l'essentiel, c'est-à-dire sur le bien-fondé des optionspolitiques et leur impact sur la situation financièreprésente et future.

Tout en conférant à mon exposé une structure quipermette de dégager des conclusions globales, je tâche-rai de répondre, point par point, aux principales cri-tiques adressées à rencontre de la politique budgétairedu gouvernement. Je démontrerai que la politiquefinancière, économique et sociale poursuivie par le

gouvernement est suffisamment cohérente en soi pourrésister à ces critiques.

J'aurai donc une approche visant à préparer le débatgénéral dans les meilleures conditions possibles etrépondant au souci d'efficacité exprimé par la commis-sion des finances et du budget.

La mise en relief des éléments budgétaires exceptionnelsdécoulant de la loi du 1er juillet 1983

A peine le projet de budget fût-il présenté qu'unepremière série de critiques fusaient en raison du fait quej'avais tenu à présenter, à côté des données brutes, deschiffres corrigés de certains éléments exceptionnelsdécoulant intégralement des dispositions prévues par laloi du 1er juillet 1983. Artifice de présentation, manquede transparence, budget supplémentaire, furent quel-ques qualificatifs employés.

Que mon souci de clarté ait pu être déformé de lasorte présuppose une mauvaise volonté ou un manquede sérieux assez conséquent pour que je m'y attarde.Pour s'en rendre compte, il suffit en effet de relire lepassage afférent de ma note de présentation. Après avoirprécisé que les données brutes étaient bel et bien leschiffres du projet de budget, j'avais poursuivi en expli-quant que:

«C'est dans l'interprétation de l'évolution budgétairequ'il convient de tenir compte de l'incidence de ceséléments qui touchent à la fois au budget des dépenseset au budget des recettes, le financement des dépensesexceptionnelles à caractère économique et social sefaisant en effet non pas par des ressources permanentes,mais par des prélèvements sur la réserve budgétaire oubien encore par des recettes uniques correspondantesdécalées dans le temps. Ces quelques considérationscomplémentaires n'ont donc pas pour but de voiler telleou telle évolution jugée déplorable, mais sont indispen-sables à une appréciation correcte des tendances fonda-mentales en matière de gestion des finances publiques.»

Afin de mettre les choses au point, j'approfondirai iciles arguments avancés en faveur de la présentationretenue et en ferai ressortir les différences avec laméthode employée par mes prédécesseurs immédiats.Nous avons en effet encore en mémoire la scissionpurement gratuite en budget conjoncturel et budgetnormal des projets de budget pour les exercices 75 à 79avec comptabilisation hors-plafond, c'est-à-dire au-delàde la norme, d'éléments prétendument exceptionnels,pour que j'insiste.

L'ensemble de la correction ne porte que sur deséléments exceptionnels liés à une loi déterminée etpoursuivant des objectifs bien précis. La caractéristiqueessentielle de l'impact budgétaire de ces mesures estqu'une part considérable des dépenses est imputable àl'exercice 83, tandis que les recettes correspondantes

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n'atteindront leur rythme de croisière qu'en 85. Cedécalage dans le temps entre recettes et dépenses setraduit fatalement par des découverts budgétairescependant limités dans le temps. Il en résulte unedistorsion des tendances profondes des financespubliques à court et moyen terme, dont on doit tenircompte dans le cadre d'une analyse que je veux, quant àmoi, sérieuse.

Quel contraste aussi avec l'hétérogénéité des élé-ments exceptionnels retenus par mes prédécesseurs! Eneffet, le concept d'élément exceptionnel constituaitpour eux un véritable fourre-tout où l'on comptabilisaithors-plafond tout aussi bien des mesures de politiqueéconomique visant directement la sauvegarde del'emploi et la relance de l'activité - fonds de chômage,lois-cadre, SNCI, commerce extérieur - , que desdépenses diverses telles que l'aide supplémentaire auxCFL, les mesures destinées à atténuer les effets de lasécheresse sur l'agriculture ou encore l'augmentationde notre quote-part au FMI.

C'est d'ailleurs cette dernière dépense qui m'amène àmentionner une deuxième différence essentielle et àrépondre ainsi à une critique souvent répétée. Con-trairement à ce qui était apparemment l'un des objectifsde mes prédécesseurs - inscription hors-plafond dedépenses couvertes par des recettes correspondantes - ,la mise en relief des éléments exceptionnels ne viseabsolument pas à comptabiliser des recettes et desdépenses au-delà de la limite acceptable en vertu desprincipes de politique budgétaire structurelle.

Ai-je besoin de vous rappeler que si on n'exclut pasces éléments exceptionnels, les dépenses budgétairespour 1984 sont en régression par rapport à 1983 de 1,3%en termes nominaux, ce qui correspond en termes réelsà une baisse de l'ordre de 9%? Le gouvernement auraitdès lors pu proposer des dépenses supplémentaires deplus de 5 milliards de francs tout en restant dans lanorme des 6,2% de croissance. Il est pour le moinsparadoxal de voir ceux qui ne cessent d'exiger à cor et àcri une programmation pluriannuelle reculer dès qu'onintroduit des horizons conceptuels dépassant un seulexercice budgétaire.

En optant pour cette présentation des chiffres budgé-taires, le gouvernement a également voulu réaffirmer lecaractère exceptionnel des dépenses et des recettes enquestion. Les nouvelles mesures fiscales visent en effetà financer une opération de restructuration unique tantpar sa nature que par son envergure. Elles revêtent doncun caractère temporaire et devront être réajustées versle bas le moment venu.

Personne d'entre nous ne peut prédire l'avenir. Maprésentation a cependant l'avantage assez évident à mesyeux d'opposer en un seul tableau les dépenses indis-pensables pour la restructuration de la sidérurgie et leurmode de financement public. Je conçois que cette transpa-rence déplaise à certains. Mais, en tant que Ministre desFinances, il est de mon devoir de veiller à ce que toute lalumière soit faite sur ce transfert important de fondspublics qui repose essentiellement sur la solidarité de lanation qui a le droit d'en apprécier l'envergure.

La véridicité budgétaire

Etant donné que le thème de la véridicité budgétairefait d'une façon presque traditionnelle l'objet des débats

portant sur les comptes généraux, je n'avais pas l'inten-tion de m'attarder sur ce point dans le présent contexte.Cependant, il se trouve que plusieurs chambres profes-sionnelles ont repris ce sujet.

C'est ainsi que la Chambre des Fonctionnaires etEmployés Publics estime que le résultat plus favorablede l'exercice 1982 provient d'un très considérabledépassement des prévisions de recettes et donc d'unenette détérioration de l'exactitude des prévisions en lamatière. Elle qualifie par ailleurs le dépassement desdépenses comme étant, «en termes absolus, un des plusimportants que le pays ait jamais connu. En termesrelatifs, une pareille marge d'imprécision n'a plus étéatteinte depuis 1974.»

Dès le départ, je voudrais préciser que je ne remetspoint en cause la validité ni des chiffres, ni des interpré-tations fournis par cette chambre professionnelle. Jereprendrai tels quels ses chiffres en les complétant et enformulant quelques observations supplémentaires àleur sujet.

Les plus-values de recettes et les dépassements dedépenses enregistrées en 82 atteignent effectivement envaleur relative des proportions élevées qui n'avaientplus été atteintes depuis 74, c'est-à-dire depuis que lavéridicité des prévisions budgétaires avait été sensible-ment améliorée. Avant d'exposer les raisons qui setrouvent à la base de ce dérapage, je tiens cependant àélargir l'horizon temporel et à apprécier l'exécution desbudgets au cours des dernières années.

Concernant les exercices 79 à 82, la moyenne desplus-values de recettes s'élève à 5,2% par rapport auxprévisions budgétaires, tandis que la moyenne desdépassements de dépenses atteint 4,5%. Les chiffrescorrespondants pour la période 75-78 s'établissent àrespectivement 7,8 et 4,6%. La véridicité des prévisionsbudgétaires s'est donc améliorée, notamment pour cequi est des recettes.

Comment expliquer maintenant, à l'intérieur decette tendance favorable, le dérapage de 1982?

- Tout en renvoyant aux données détaillées figurantà l'exposé des motifs, je voudrais vous rappeler que lesplus-values de recettes les plus importantes touchentl'impôt sur le revenu des collectivités, la TVA, notreparticipation aux bénéfices de la B.N.B., les intérêts defonds en dépôt ainsi que notre part dans les recettescommunes de l'U.E.B.L. Les incertitudes inhérentesaux prévisions en la matière sont multiples, que ce soitl'évolution des taux d'intérêt en une période agitée surle plan monétaire international ou encore l'enverguredes provisions pour risque de non-recouvrement decréances venant en déduction des bénéfices bancaires.Un handicap essentiel de la prospective réside dansl'absence d'un modèle économétrique qui soit appli-cable aux structures et réalités de notre économienationale.

Ce sont ces incertitudes, souvent liées à l'évolutioninternationale, et le manque d'instruments de prévisionglobale valables qui expliquent, pour l'essentiel, la sous-estimation systématique du côté des recettes. Tout enrappelant les progrès réalisés en la matière, le gouverne-ment entend poursuivre sa politique budgétaire pru-dente en évitant de la fondre sur des hypothèses écono-miques par trop optimistes. Il faut bien voir que la

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prudence observée en la matière par le gouvernementfait partie intégrale d'une politique budgétaire discipli-née.

Par ailleurs je voudrais relever que c'est cette estima-tion prudente mais réaliste des recettes sur la base desdonnées économiques sous-jacentes qui, jusqu'à pré-sent, à empêché que les soldes budgétaires ne secreusent davantage à l'instar de ce qui est observé dansles pays voisins.

— Pour ce qui est de l'important dépassement dedépenses, je voudrais simplement préciser que celui-cis'explique pour près de deux tiers du total par desdépenses compensées par des recettes correspondantesainsi que par des avances pour couverture d'insuffi-sances temporaires des moyens du fonds de chômage.D'autres dépassements importants ont servi au finance-ment de l'aménagement de zones industrielles ouencore à l'alimentation du fonds d'investissements pourles télécommunications.

En période de difficultés économiques graves, l'exé-cutif peut être amené à réagir vite et à pourvoir à desbesoins urgents, tout en respectant scrupuleusement lesrègles régissant la comptabilité de l'Etat. A ce titre, jerappellerai que, par le biais des modifications intro-duites par la loi budgétaire pour 1983, la participationdu pouvoir législatif au contrôle de l'exécution budgé-taire a encore été renforcée.

Un jugement global en matière de véridicité budgé-taire ne peut se limiter aux seuls plus-values de recetteset dépassements de dépenses. Sous l'angle de vue del'évolution dés finances de l'Etat un critère pour lemoins aussi significatif réside dans les variations dusolde global, c'est-à-dire dans l'écart entre solde budgé-taire prévu et solde effectif du compte, exprimées enpourcentage de la masse budgétaire.

Entre 1975 et 1978, la moyenne des variations dusolde global représentait quelque 3,1% de la massebudgétaire. Pour la période 79-82, cette moyenne esttombée à un niveau correspondant à 1% seulement dubudget total. Quant au niveau atteint en 1982, et bienqu'il soit le plus élevé pour la période citée en dernierlieu, il continue à rester en dessous du pourcentage leplus bas jamais atteint avant 1978. Ces chiffres sepassent de tout commentaire supplémentaire!

La Chambre des Fonctionnaires et EmployésPublics, après avoir constaté que la situation de latrésorerie de l'Etat a évolué plus favorablement qu'onne l'attendait du fait que les déficits réels sont restésnettement en dessous des déficits prévus, qualifie cettepolitique de pessimisme injustifié. Quant à moi, je laqualifierai comme découlant d'une politique de pru-dence, prudence qui me semble être de mise en cettepériode de difficultés économiques et de rigueur budgé-taire.

L'évolution de l'équilibre budgétaire et des réserves

J'ai qualifié le projet de budget pour 1984 de budgetstructurellement en équilibre. Ce qualificatif a pro-voqué une véritable levée de boucliers, notamment dela part de l'opposition. D'autres observateurs plus fins

ont tenu à signaler que l'équilibre budgétaire n'était enfait qu'apparent. Qu'en est-il vraiment?

Sans vouloir revenir sur mon argumentation exposéelors du dépôt de budget, je voudrais souligner de nou-veau que le projet de budget se présente dans des condi-tions d'équilibre satisfaisantes et en amélioration parrapport au budget de l'exercice en cours.

J'attire votre attention sur le fait que mon analyse nese limitait aucunement à ces considérations à courtterme. En effet, j'avais poursuivi mes réflexions enprécisant que:

«Une telle approche, essentiellement statique, nesuffit évidemment pas pour se prononcer d'une façondéfinitive sur l'évolution générale des finances de l'Etatet pour dégager les atouts et risques qui lui sont inhé-rents. Pour ce faire, il faut élargir le champ d'examen etenglober dans une analyse dynamique l'ensemble deséléments caractéristiques de la situation financière, àsavoir la réserve budgétaire, les fonds de l'Etat et la dettepublique. C'est à cet exercice que je me suis livré àmaintes reprises depuis septembre 80 pour sensibiliserle pays au revirement de tendance qui caractérisel'exécution des budgets et qui se reflète dans le besoinde financement que l'Etat éprouve sous l'effet combinéde la récession économique et de l'envergure desmoyens d'action publique mis en oeuvre pour en redres-ser les effets.»

Sans avoir recours à ce que la Chambre des Fonction-naires et Employés Publics appelle des pièces definance-fiction, je ne me suis pas lassé de vous rendreattentifs, chiffres à l'appui, à l'évolution globale inquié-tante des finances de l'Etat. Ce sont ces mêmes chiffresqui m'ont empêché de vous annoncer l'heure du crépus-cule, contrairement à certains adeptes du catastro-phisme financier. Ce sont également ces mêmes chiffresqui auraient dû inciter l'opposition à résister à unepoussée de fièvre préélectoraliste pour le moins précoceet à ne pas perdre tout sens de la mesure, perdant par là-même toute crédibilité en tant que force de proposition.

Oui, il est exact que la réserve budgétaire et les réser-ves des fonds d'investissements publics auront pro-bablement diminué de quelque 12,8 milliards de francsentre fin 1979 et fin 1984.

Oui, il est également exact que ces réserves se solde-ront probablement par un avoir cumulé négatif dequelque 800 millions de francs fin 84.

Oui, il est exact que la dette publique aura probable-ment progressé de 88% entre fin 1979 et fin 1984, sonmontant passant de 24,6 à 46,4 milliards.

Oui, il est encore exact que tant les impôts directs queles impôts indirects ont dû être augmentés dans le butd'assurer le financement de la restructuration sidérur-gique.

Mais, et c'est là l'essentiel, est-ce qu'on peut pourautant affirmer que toutes les marges de manoeuvredisponibles ont été consommées et que l'on doits'attendre, comme le croit la Chambre des EmployésPrivés, «à ce que l'Etat ne dispose plus, dans les années àvenir, des moyens nécessaires pour mener une politiqueanticyclique. Que, au lieu de contrecarrer la crise écono-mique, son rôle sera ainsi réduit à gérer celle-ci.»

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Faut-il rappeler que le budget n'est pas une fin en soiet qu'on ne peut donc isoler l'évolution financière deson contexte économique et social? Concrètement, ilfaut rapprocher cette évolution financière des résultatsd'une politique, dont elle a permis la réalisation, et tousceux qui condamnent cette évolution se devraient deformuler des alternatives économiques et financières etd'en comparer les effets avec ceux de la politique gou-vernementale.

Ce n'est qu'au prix de cet effort que l'on peut valable-ment porter un jugement définitif sur l'évolution enmatière de finances publiques. Et c'est précisément à cedébat que je vous invite, chiffres à l'appui.

Concernant l'équilibre des finances de l'Etat, notrepays occupe une place de choix dans les comparaisonsinternationales. En effet, la faiblesse du besoin net definancement de l'Etat, exprimé tant par rapport auxdépenses budgétaires totales que par rapport au produitnational brut n'a, dans le cadre de l'OCDE, d'égal quecelui de la Suisse.

Les prévisions effectuées récemment par les servicesde la Commission de Bruxelles dans le cadre des tra-vaux relatifs au rapport économique annuel font parailleurs apparaître une évolution positive de notre soldenet à financer en 1984.

L'amélioration du solde budgétaire, déduction faitedes paiements d'intérêts, est nette; de 4,9% en 83, cetagrégat tombera en 84 à environ 1% du PIB du faitnotamment de la compensation, en recettes, des chargesadditionnelles pour la sidérurgie. Ces prévisions con-firment mes conclusions au sujet de l'équilibre structu-rel du projet de budget sous examen.

Certains commentateurs prennent un air critiquechaque fois que j'avance la notion de taux de couverturedes dépenses extraordinaires par l'excédent du budgetordinaire. J'espère qu'ils se donneront la peine de jeterun regard sur les comparaisons concernant le rapportentre besoin net de financement et dépenses budgé-taires totales. A la lecture de ces pourcentages, ilspourront apprécier à leur juste valeur les difficultés quela plupart des Etats éprouvent pour respecter le principede l'équilibre de leur budget courant. Un taux de cou-verture de plus de deux tiers ne peut que les laisserrêveurs.

La dette publique

L'élément important de l'évolution des financespubliques que constitue la situation en matièred'endettement n'a fait l'objet que de peu de critiques.Compte tenu des développements exhaustifs faits par legouvernement dans le cadre de l'exposé des motifs duprojet de loi annuel concernant l'emprunt et ceux plusrécents, émanant de la commission spéciale «sidérur-gie», je peux me limiter à formuler quelques observa-tions de fond:

Au sein de l'OCDE, le Luxembourg figure, ensembleavec la France, dans le peloton de queue des Etatsmembres sous l'angle de vue de leur dette exprimée parrapport au PNB. Il en sera encore de même à la fin del'exercice 84, c'est-à-dire après l'opération financièrevisant la restructuration de la sidérurgie.

Exprimée en termes réels, la dette de l'Etat a progres-sivement diminué au cours des années 70. Ce n'est qu'àpartir de 1978 que la tendance est redevenue ascen-dante, et ce n'est qu'à la fin 82 que la dette publique a denouveau dépassé le niveau réel de la fin des années 60.Exprimé par rapport au PNB, le niveau de fin 84 seracomparable au niveau 73, c'est-à-dire à un niveaucaractérisant une période de haute conjoncture.

Pour ce qui est de la dette consolidée ou dette à termedéfini, sa valeur réelle n'a cessé de diminuer au coursdes années 70, de sorte qu'en 1980 elle ne s'élevaitpratiquement plus qu'à la moitié du montant du débutdes années 70. Aussi la dette consolidée telle qu'elle seprésentera probablement fin 84, y compris doncl'ensemble des emprunts nécessaires au financement dela restructuration sidérurgique, équivaut-elle en fait àcelle de 75. Elle restera donc inférieure aux montantsréels caractéristiques de l'évolution à la fin des années60 et au cours de la première moitié des années 70.

L'évolution de la dette à terme non défini est malheu-reusement loin d'être aussi favorable. Ayant presquetriplé en valeur réelle au cours des dix dernières années,et représentant plus de 60% de la dette totale, l'émissionde certificats de la dette publique au profit des diversrégimes de pension contributifs constitue en effetl'élément explosif en matière d'accroissement del'endettement public. Le projet de loi portant réformede l'assurance-pension prévoit les remèdes appropriéset devrait endiguer un accroissement excessif. Je revien-drai sur l'aspect financier de cette réforme au momentde l'examen du budget de la sécurité sociale.

Concernant la marge de manoeuvre disponible enmatière d'endettement public, je peux me rallier auxconclusions dégagées tant par la commission spéciale«sidérurgie» que par le conseil économique et social, cedernier quant à lui ayant estimé que «l'autorisation decontracter selon les besoins plusieurs emprunts pour unmontant global de 4 milliards, tout en touchant à lalimite d'une politique d'endettement prudente, restecompatible avec la sauvegarde du crédit internationalde l'Etat... et avec la capacité d'absorption du marchéde capitaux luxembourgeois».

La charge de la dette publique repose de toute évi-dence essentiellement sur les contribuables. Voilàpourquoi, nous nous félicitons de ce que cette charge,exprimée tant par rapport aux dépenses totales qu'auPNB, reste exceptionnellement peu élevée dans lecontexte international.

Il faut rappeler que, dans lé projet de budget pour1984, la charge de la dette à long terme intérieure repré-sente 2,9% des dépenses totales. On peut se poser laquestion de savoir ce qu'il en sera au cours des annéesprochaines, c'est-à-dire dès le moment où l'ensembledes emprunts contractés en vue du financement de larestructuration sidérurgique sortira ses effets.

Une simulation, sur base des taux et des durées desderniers emprunts émis, fait apparaître que la chargeglobale - intérêts et amortissements - atteindra unmaximum en 1987. Bien que cette charge soit supé-rieure de quelque 500 millions de francs, valeur 84, à lacharge inscrite au présent projet de budget, elle nereprésenterait toujours que quelque 3,7% des dépensestotales.

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Si notre rang privilégié sur le plan international nerisque donc aucunement d'être mis en question, c'est lefinancement d'une telle charge accrue qui doit attirertoute notre attention. En raison du fait que l'empruntéquivaut à une charge à payer dans le futur par l'impôt,le niveau de l'endettement doit également être appréciéen fonction de la charge fiscale et para-fiscale.

Le poids de la fiscalité

«La charge fiscale globale est beaucoup plus pronon-cée chez nous que chez nos pays voisins. En outre, nousconstatons que cette charge s'est accrue de 41% (calculSEC) au cours des années 70, tandis que des payscomme la RFA et la France ont enregistré pour cettemême période des augmentations respectivement de 8et de 7%.»

Ce jugement qui émane de la Chambre des EmployésPrivés est partagé d'une façon diffuse par une partie del'opinion publique. Il se base certes sur des chiffresavancés par la commission spéciale «sidérurgie», ceschiffres ayant cependant été isolés, d'une façon on nepeut plus arbitraire, de leur contexte général.

Aussi voudrais-je réaffirmer à cette occasion que jepartage entièrement les considérations fouillées etnuancées que cette commission parlementaire a émisesà ce sujet. Je les compléterai à la lumière des données lesplus récentes que nous avons pu obtenir à ce sujetdepuis cette date.

L'étude la plus récente élaborée par l'OCDE enmatière de statistiques de recettes publiques fait appa-raître que notre pays occupe un rang plutôt favorabledans le contexte international. Le prélèvement obliga-toire exprimé en pourcentage du PIB est chez nousinférieur à ce qu'il est chez nos voisins et concurrentscommerciaux directs. Ce ne sont que les pays méditer-ranéens et la Suisse, en Europe occidentale, ainsi que lesEtats-Unis et le Japon, qui peuvent se prévaloir d'unprélèvement moindre. Ces chiffres démontrent égale-ment que le Luxembourg est le seul pays à avoir connuune évolution favorable de cet agrégat entre le milieudes années 70 et le début des années 80.

La part relativement élevée des impôts directs, etnotamment des impôts sur le revenu et les bénéfices, nerésulte aucunement de la charge fiscale grevant lesrevenus des personnes physiques, mais il a son originedans la structure particulière de l'économie luxembour-geoise qui prédétermine aussi l'envergure des impôtsprélevés sur les bénéfices des sociétés.

Cette situation positive se vérifie également auniveau du prélèvement obligatoire pesant sur le salairemoyen. Tout en renvoyant aux chiffres présentés à cesujet par la commission spéciale «sidérurgie», je vou-drais retenir ici que les conclusions concernant lescharges fiscales globale et individuelle se rejoignent etsituent la problématique évoquée dans son contexteéconomique et financier.

Plusieurs observateurs ont fait remarquer que l'Etatmettrait de plus en plus les salariés à contribution pourpayer les dépenses budgétaires. Je me dois de nuancerune telle affirmation par des considérations de deuxordres.

Tout d'abord, les chiffres et évolutions concernant lesrecettes fiscales réalisées effectivement au cours des sixpremiers mois de l'année, c'est-à-dire jusqu'au 1erjuillet 1983, sont loin d'être d'une évidence telle qu'onpuisse en tirer des conclusions de ce genre.

Quant aux mesures d'ordre fiscal entrées en vigueur àcette date et visant le financement public de la restruc-turation sidérurgique, elles frappent effectivementdavantage les ménages que les entreprises. Dictée parles contraintes économiques et un souci de maintien del'emploi, cette répartition de la charge a cependantrecueilli un large accord et il serait particulièrement malvenu que de vouloir interpréter maintenant cette orien-tation politique comme une mesure reposant exclusive-ment sur les épaules d'une seule catégorie socio-profes-sionnelle. La prorogation pour l'exercice 84 du prélève-ment spécial dénommé contribution nationale d'inves-tissement et de la majoration de la retenue d'impôt surles tantièmes devrait inciter d'aucuns à nuancer singu-lièrement leur jugement.

D'autres continuent à brandir le spectre de l'étatisa-tion de l'économie et regrettent la pression que, seloneux, l'Etat exercerait sur l'initiative privée. Permettez-moi en passant de vous faire part de mon étonnement,maintes fois éprouvé, en découvrant que ceux quiémettent ces critiques sont ceux-là mêmes, qui, end'autres occasions, n'hésitent pas à appeler l'Etat à leurrescousse.

Une analyse de l'évolution des principaux agrégatsbudgétaires démontre par ailleurs que leurs craintessont totalement injustifiées. En effet, le niveau actueltant des dépenses que des recettes, fiscales et autres,exprimé par rapport au produit national brut est infé-rieur à ce qu'il était au cours de la deuxième moitié desannées 70 et il est à peu près comparable à ce qu'il étaitvers le début de la même décennie. Cette conclusionreste vraie, même si l'on accepte l'hypothèse d'unecertaine sous-estimation des recettes et des dépensespour les exercices budgétaires non clos.

Il faut lui rendre justice; en pleine période de crise,l'Etat n'a pas accru son poids relatif dans l'économie. Jeserais même tenté de dire «bien au contraire!» Il échetde relever ici que la Chambre des Fonctionnaires etEmployés Publics écrit quant à elle au sujet de la part del'Etat dans l'économie:

«Parmi les critiques que certains milieux d'affairesadressent depuis un certain nombre d'années au budgetde l'Etat, on retrouve régulièrement celle qui consiste àaccuser l'Etat de s'arroger sur les ressources disponiblesune part excessive et croissant d'année en année, et dedevenir de plus en plus un fardeau qui écrase le pays etson économie.»

«Si on laisse parler les faits, on constate que lesrecettes et les dépenses globales de l'Etat ont certesconnu, au cours des dernières décennies, une tendanceprononcée à la hausse, mais ce trend est brisé depuis1979 et, au cours des dernières années, la déterminationdu gouvernement de faire des économies a réussi àrenverser la vapeur de façon assez spectaculaire . . . Cequi est remarquable, c'est que le gouvernement ait étéen mesure d'endiguer le mouvement à la hausse sanspouvoir profiter d'une reprise prononcée de la conjonc-ture économique.»

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Permettez-moi de m'arrêter un bref instant dans madémonstration pour dresser un bilan intermédiairesuccinct. Je pense en effet avoir éclairci suffisamment ledébat sur les évolutions financières pour pouvoir procé-der à quelques mises au point.

Quoi que certains en disent, les finances de l'Etatrestent à l'heure actuelle un des grands atouts de notrepays. Certes, la situation n'est plus aussi brillantequ'elle ne l'était il y a quelques années encore, - et quipourrait s'en étonner - , mais elle reste structurellementsaine.

La marge de manoeuvre disponible n'est pas encoreépuisée, loin de là. Il est cependant tout aussi vrai queles réserves de haute conjoncture sont sur le point d'êtreabsorbées et que la marge financière s'est rétrécie enconséquence.

En annonçant la faillite des finances de l'Etat pour fin1984, l'opposition confond intentionnellement évolu-tion et situation en matière de finances publiques. Cefaisant, elle cherche à induire l'homme de la rue enerreur quant aux réalités et aux potentialités de lapolitique économique et sociale et elle sacrifie donc lesintérêts profonds du pays aux dépens d'une approche àcourt terme à caractère essentiellement électoraliste.

Par ailleurs, cette approche n'est pas sans compro-mettre ses auteurs. En effet en réfutant une certaineévolution financière, ceux-ci rejettent en même tempsla politique économique et sociale qui en est la base.Aussi, et après avoir apprécié le contenu et l'impact dela politique gouvernementale, je ne manquerai pasd'esquisser les alternatives possibles et de demander àl'opposition de nous faire enfin connaître ses options enla matière.

Le rôle économique de l'Etat

C'est à travers l'évolution de la structure desdépenses de l'Etat que se reflètent les accents d'unepolitique. Y aurait-il, comme certains l'ont affirmé,immobilisme en la matière, alors que l'environnementéconomique subit de profonds changements? Sansvouloir commenter en détail les tableaux explicitesjoints en annexe, je me dois de retenir quelques ten-dances qui se sont esquissées au cours des dernièresannées. Les regroupements économiques et fonction-nels nous permettent en effet de remarquer que la partrelative des dépenses de consommation de l'Etat est enlégère régression tandis que la part relative des dépensesà caractère économique et social augmente à moyenterme.

Du point de vue de l'appréciation du rôle écono-mique de l'Etat, ce critère de l'évolution de la structuredes dépenses n'est cependant que partiel. Partant del'idée que l'évolution économique se traduit dans leschiffres figurant à la fois du côté des recettes et desdépenses budgétaires, j'estime que l'indicateur global leplus adéquat pour mesurer les effets économiques de larécession sur l'équilibre budgétaire doit porter à la foissur les dépenses visant à promouvoir directement etindirectement l'adaptation de notre économie et surl'évolution des recettes prélevées sur les agents écono-miques. Etant donné que je me suis d'ores et déjà référéà ce critère au cours des années passées, je me passeraide tout commentaire supplémentaire et me limiterai à la

présentation des conclusions qui découlent de cetteapproche.

Sous l'effet de la crise, la part des dépenses visant àpromouvoir le progrès économique dans le total desrecettes liées à l'évolution de l'environnement écono-mique et social est progressivement passée en moyenneannuelle de 25,8% pour la période 70-74 à 29,2% pour lapériode 75-79 et à 36,6% pour la période 80-84. Leprésent gouvernement aura donc réinjecté dans lecircuit économique sous forme de dépenses productivesune part des recettes beaucoup plus élevée que ne l'onfait ses prédécesseurs.

La crise économique ne se répercute cependant passeulement sur l'équilibre budgétaire par le poids desdépenses à caractère économique, mais également àtravers les dépenses à caractère social découlant d'unepolitique active de maintien de l'emploi. En ajoutant cesdépenses à caractère social aux dépenses à caractèreéconomique, leur part relative est passée pour lesmêmes périodes de référence de 40,1 à 47,6% pouraboutir à 60%.

Au cours de la présente législature, l'Etat réinjecteradonc dans le circuit économique 60% de ses recettestotales, déduction faite des emprunts, sous forme dedépenses à caractère économique et social. Par rapport àla législature précédente, cette part aura augmenté demoitié.

Les charges nouvelles à caractère économique etsocial n'ont nullement été financées par un prélèvementaccru de l'Etat sur les autres agents économiques, maispar un recours aux réserves et à l'emprunt. L'évolutiondu rapport entre recettes liées à l'évolution économiqueet PNB en constitue une preuve supplémentaire.D'aucuns reprochent à l'Etat d'avoir accru son poids surles activités économiques, ce qui revient à confondre lacause et l'effet. Il est vrai qu'il y a eu accroissement dupoids, mais cet accroissement s'est fait en sens inverse.En effet, c'est la crise avec ses conséquences écono-miques, financières et sociales, qui a imprimé sa marqueà l'évolution des finances publiques.

Il faut rester conséquent avec soi-même: si l'on nemet pas en cause fondamentalement la politique écono-mique et sociale du gouvernement, on ne peut pasrécuser son impact sur la situation financière de l'Etat.

Et c'est précisément cette dichotomie qui caractérisela plupart des prises de position concernant le projet debudget pour 1984. D'un côté, on met le doigt sur l'évolu-tion défavorable de la situation en matière de financespubliques et, d'un autre côté, on exige du gouvernementde renforcer telle ou telle mesure budgétaire. De deuxchoses l'une, il faut choisir. Ou bien la marge demanoeuvre financière de l'Etat permet encore de cou-vrir ces dépenses supplémentaires, ou elle ne le permetpas. Dès lors il faut renoncer à des actions supplémen-taires aussi utiles ou même nécessaires qu'elles puissentparaître.

Quant au gouvernement, il a fait son choix. Iln'entend ni compromettre la situation financière del'Etat en augmentant par trop ses interventions, niasphyxier l'économie en pratiquant une politiquedéflationniste. Ce choix s'est traduit par la politiquebudgétaire que je viens d'exposer et qu'on peut qualifier

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de sélective, rigoureuse et répondant aux nécessitéséconomiques et sociales de notre temps.

La voie choisie par le gouvernement, et que l'on peutqualifier de médiane, s'inspire de toute évidence del'intérêt général. Les nécessités du moment exigent desautres acteurs de la vie publique, que ce soient les partispolitiques ou les chambres professionnelles, qu'ilss'inspirent de ce même intérêt général et qu'ils situentleurs revendications particulières, pour fondées oulégitimes qu'elles soient, dans le contexte global de lasituation économique, financière et sociale de notrepays. Notre salut est à ce prix!

Les accents de la politique gouvernementale

De façon générale, l'ensemble des initiatives gou-vernementales ancrées dans le projet de budget pour1984 a trouvé un accord favorable auprès des chambresprofessionnelles et du Conseil d'Etat. Il est évident queselon les intérêts en jeu les uns proposent le renforce-ment de telle ou telle action, les autres un ajustement detelle ou telle autre mesure. Ces réflexions serviront debase à la discussion budgétaire qui s'engagera dans lessemaines à venir dans cette enceinte et au cours delaquelle tous les départements et leurs politiques serontpassés au crible. Comme je viens de l'indiquer, il fautcependant que ces débats tiennent compte, à chaqueinstant, du cadre général dans lequel la politique budgé-taire doit s'insérer.

La stratégie budgétaire peut se résumer en troisformules: c'est le budget du redressement et de l'aveniréconomique, c'est le budget de l'effort partagé et de laprise en compte des facteurs sociaux et c'est finalementle budget de la rigueur.

Priorité sera accordée à une politique économiqueactive à composante essentiellement structurelle.

- Cette adaptation structurelle de notre économiepasse en premier lieu par une restructuration de notreappareil sidérurgique d'un point de vue tant écono-mique que social et financier. Récapitulant les différentspostes budgétaires pour établir le montant de l'interven-tion globale de l'Etat dans la sidérurgie pour les exer-cices 83 et 84, nous arrivons à un ordre de grandeur de 16à 17 milliards de francs, soit 12% de la masse budgétairetotale.

- Si la modernisation de la sidérurgie se trouvetoujours, et plus que jamais, placée au centre des effortsà déployer, il n'en reste pas moins qu'un retour à unecroissance équilibrée et à un plein emploi durable esttrès largement tributaire des possibilités de développe-ment des autres branches et secteurs économiques.Aussi convient-il d'englober dans un ensemblecohérent d'autres objectifs de politique économique,tels que la modernisation de l'agriculture, la diversifica-tion de notre appareil productif industriel, le développe-ment du secteur tertiaire et l'amélioration des infras-tructures.

Les crédits budgétaires prévus à cet effet au titre desexercices 83 et 84 - je me réfère en l'occurrence auxdépenses visant à promouvoir le développement écono-mique, abstraction faite des interventions accordées enfaveur de la sidérurgie - ces crédits donc s'élèvent à

quelque 31,5 milliards de francs, soit plus de 23% de lamasse budgétaire correspondante. L'impact de cetteenveloppe se trouve être renforcé par toute une gammede mesures fiscales encourageant l'effort d'investisse-ment des entreprises relevant du secteur privé.

- Consommer moins pour investir plus. Cettenécessité économique ne constitue pas seulement unslogan politique répété à maintes reprises, mais elle estégalement traduite dans les faits. Effectivement, tantl'épargne publique, c'est-à-dire la part relative durevenu disponible du secteur public non utilisée à desfins de consommation, que la formation brute de capitalfixe des administrations publiques sont particulière-ment importantes dans notre pays. Si la propension àinvestir a encore évolué favorablement depuis 1970,c'est essentiellement en raison de l'explosion desinvestissements publics, lesquels représentent prèsd'un tiers de l'investissement total. A l'heure actuelleles pouvoirs publics interviennent directement pourplus de 40%, et peut-être même pour quelque 50% dansles seuls investissements intéressant le secteur de laconstruction.

Je ne voudrais pas m'attarder davantage au sujet durôle que jouent les investissements publics dans l'éco-nomie luxembourgeoise, car il suffit de renvoyer àl'excellent rapport de la Commission du bâtiment dansle cadre duquel a aussi été examinée la contribution queles pouvoirs publics pourront apporter à une relance del'activité dans le secteur du bâtiment. Ces réflexions ontpar ailleurs amené le gouvernement à proposer dans lecadre du projet de budget tout un ensemble de mesuresque la Chambre des Métiers, en tant que principalintéressé, apprécie comme suit:

«Au cours des dernières années, les pouvoirs publicsn'ont cessé d'intensifier leurs efforts financiers enmatière de travaux publics. La Chambre des Métierssalue une telle politique dynamique . . . Elle constateavec satisfaction que les dépenses d'investissementsprogrammés pour 1984, tant ceux du budget que ceuxdes fonds, se maintiennent à un niveau élevé, bien quelégèrement régressif en volume. Ce recul en volumesera néanmoins compensé par les possibilités d'inves-tissements prévues en application de la loi de garantie,qui ouvre une voie de financement subsidiaire par desbailleurs de fonds, soit du secteur privé, soit du secteurparastatal.»

Certaines des mesures visant la relance dans lebâtiment revêtent également un caractère social. Aussis'intègrent-elles dans l'enveloppe globale de près de 260millions réservés à des initiatives nouvelles requises envue d'atténuer les incidences de l'effort de solidariténationale sur les ménages à faible revenu. En inscrivantparmi les objectifs de sa politique budgétaire la consoli-dation du progrès social, nous semblons faire cavalierseul, étant donné que la plupart de nos partenaires,communautaires et autres, prévoient des coupes, sou-vent dramatiques, dans leurs systèmes respectifs desécurité sociale. Ceci d'autant plus que les allégementsfiscaux proposés par le gouvernement, viennent renfor-cer encore les effets de notre politique.

C'est en proposant ces mesures que le gouvernementhonore les engagements contractés lors du vote de la loisur la restructuration sidérurgique. Il entend compenser

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dans le chef de certaines catégories défavorisées unepartie au moins de charges croissantes découlant de lapersistance de la crise économique généralisée.

Tout en modulant ainsi dans l'immédiat l'effort desolidarité nationale indispensable au financement de larestructuration économique suivant des critères dejustice sociale, le gouvernement continue cependant àcroire que, dans une optique à plus long terme, unprogrès social durable a absolument besoin d'un appa-reil de production moderne et compétitif pour le soute-nir.

Le développement des interventions à caractèreéconomique et social va de pair avec un freinage desdépenses de train de vie, freinage imposé tant auxadministrations étatiques qu'aux organismes publicsdans le financement desquels l'Etat intervient. Aussi lesdépenses de consommation proprement dites, c'est-à-dire les achats de biens non durables et de services, neprogressent-elles qu'à raison de 4,5%, soit une évolutionbien en deçà du taux d'inflation. Les modificationsapportées à la procédure d'élaboration du projet debudget, une diminution réelle des prévisions dedépenses et une provision déterminée réservée auxamendements sont quelques-unes des composantesessentielles d'une politique de rigueur sélective.

Voilà pour la politique budgétaire de demain et lesaccents de la politique gouvernementale sous-jacente!Au lieu d'expliciter une fois de plus des actions dontmême les détails sont d'ores et déjà archi-connus, jevoudrais, avant de conclure mon exposé, aborderl'aspect peut-être le plus controversé de la politiquefinancière de l'Etat. Je me propose en effet de projeterles évolutions au-delà de l'horizon 84 et d'examiner dequoi sera fait l'après-demain budgétaire. Le crépusculeprédit par le parti socialiste nous guette-t-il vraiment autournant des prochaines élections?

Les perspectives en matière de finances publiques

Le tableau annexé décrivant l'évolution au cours dela présente législature me servira par la suite de basepour une projection qualitative des perspectives àmoyen terme des finances publiques. Pour ce qui con-cerne les facteurs déterminant l'évolution future, jeretiendrai tout d'abord six atouts fondamentaux.

Premièrement: le niveau tout à fait acceptable de ladette de l'Etat et de sa charge budgétaire actuelle, etplus précisément en ce qui concerne la dette à termedéfini;

deuxièmement: l'équilibre structurel des finances del'Etat qui se caractérise par des besoins nets de finance-ment assez faibles;

troisièmement: le niveau non négligeable des fondsde l'Etat qui s'élèvera à la fin de l'exercice 84 à plus de 3milliards de francs, c'est-à-dire à un niveau réel légère-ment inférieur au niveau atteint à la fin des années 60,période où les réserves de haute conjoncture n'avaientpas encore gonflé les avoirs des fonds;

quatrièmement: un volant de trésorerie encore assezaisé comportant au titre de fonds de tiers plus de 8milliards de francs fin 82, soit le niveau réel le plus élevéjamais atteint. Ce volant pourra être augmenté, en cas

de besoin, par le recours aux lignes de crédit dont l'Etatdispose auprès de la Caisse d'Epargne et auprès de laBanque nationale de Belgique ainsi que par l'émissionde bons de caisse;

cinquièmement: une pression fiscale et une partrelative des dépenses budgétaires de l'Etat qui, malgréla crise, sont comparables aux niveaux atteints enpériode de haute conjoncture;

sixièmement: une restructuration sidérurgique dontle financement a pu être assuré par l'Etat sans que sesinterventions en faveur des autres secteurs en aient étéaffectées.

Pour compléter cette projection, il me faut cependantrendre le pays attentif aux risques de dérapage qui seprésentent et dont il ne faut surtout pas sous-estimerl'importance.

Premièrement: certaines composantes de la situationfinancière de l'Etat - dette à terme défini et pressionfiscale - connaîtront une évolution défavorable à courtet à moyen terme;

deuxièmement: l'épuisement des réserves de l'Etat,et notamment celles des fonds d'investissementspublics exigera à l'avenir, soit un recours continu àl'emprunt, soit des dotations budgétaires sensiblementaccrues afin d'assurer le financement d'un programmed'investissement au moins constant en valeur;

troisièmement: un tassement du volume des recettesfiscales du fait de la stagnation de la demande, ce quiconstituerait une rupture avec la situation actuelle oùnous enregistrons toujours un fort accroissement desrentrées;

quatrièmement: l'existence de problèmes structurelsdu secteur public dont l'impact budgétaire risque d'êtreconsidérable - réforme de l'assurance-pension, assai-nissement des finances communales, déficit des trans-ports publics - ;

cinquièmement: les incertitudes entourant la réus-site de l'opération de restructuration sidérurgiquearrêtée dans le cadre de la loi du 1er juillet 1983 du faitdes aléas inhérents à l'adaptation de ce secteur auniveau européen, voire mondial.

Voilà, Mesdames, Messieurs, un tableau esquissantles perspectives d'avenir de nos finances publiquesd'une manière que j'ai voulue complète, objective etnuancée. Ce tableau est à rapprocher des réflexions àcaractère économique et social développées précédem-ment par M. le Président du Gouvernement. Du fait denotre dépendance particulièrement forte vis-à-vis del'extérieur, l'inconnue principale, à savoir l'évolutionéconomique mondiale, continuera cependant à conférerune marge d'incertitude dirimante à toute prévisionportant sur l'avenir économique, social et financier dupays.

Tout en tenant compte de cet élément de fait et sansvouloir minimiser les difficultés que nous risquons derencontrer encore, surtout dans l'hypothèse probable oùune reprise prolongée des échanges mondiaux feraitdéfaut, je ne peux aucunement partager les visionsapocalyptiques colportées par certains responsables duprincipal parti de l'opposition.

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Il ne suffit en effet pas de critiquer, voire de condam-ner de fond en comble une politique déterminée; encorefaut-il pour qu'un vrai dialogue puisse s'installer danscette enceinte, avoir la volonté et le courage politiquesde définir concrètement des options alternatives à lapolitique déclarée du gouvernement. A ceux quiaccusent ce dernier de recourir d'une façon excessiveaux réserves, à l'emprunt et à la pression fiscale, je mecrois autorisé de demander quels sont les secteurs ouquelles sont les catégories de dépenses qu'ils voudraientvoir réduire par une politique plus draconienne; sont-celes frais de personnel, les dépenses à caractère écono-mique et social ou les transferts aux communes?

Permettez-moi de leur demander par quellesmesures ils entendent réduire les rémunérations desfonctionnaires, employés et ouvriers de l'Etat ou desadministrations parastatales? Au détriment de quelssecteurs économiques ils voudraient enrayer les inter-ventions de l'Etat: l'agriculture, l'industrie existante ouà créer, l'artisanat et le commerce, les chemis de fer!Quelles prestations sociales devraient être freinées etpar quels moyens: les allocations de pension, de maladieou de chômage, les aides en faveur des personnes âgées,les allocations familiales? Entendent-ils diminuer lapart des communes dans les impôts de l'Etat ou quellesautres subventions spécifiques visent-ils? Quelles sonten fin de compte les victimes qui feront les frais d'unetelle politique déflationniste?

De deux choses l'une: ou bien on a effectivementdéniché les milliards de francs que nous pourrionséconomiser et améliorer de cette façon notre marge demanoeuvre, mais alors nous sommes lancés dans unengrenage économique déflationniste et dans unepolitique de démantèlement de l'acquis social. Ou biennous avons l'honnêteté intellectuelle de reconnaître lenon-sens économique, social et aussi financier de cetteapproche, et nous devons finir par nous rallier auxoptions fondamentales du gouvernement. Qu'on pré-sente des alternatives budgétaires, chiffres à l'appui, etnous sommes prêts à en discuter; si non, qu'on cessed'induire le pays en erreur! Notre crédibilité à tous est àce prix.

Certains ont introduit dans le débat budgétairel'adjectif de crépusculaire, terme à la mode il est vrai.Mais ceux-là se trompent à la fois de politique et dedestinataire. Ce n'est point la politique financière dugouvernement qui revêt un caractère crépusculaire,mais c'est bel et bien la politique économique et socialeque ceux-là mêmes suggèrent à travers leurs critiquesqui mérite d'être qualifiée comme telle.

La politique gouvernementale, telle qu'elle se trouveconcrétisée dans le présent projet de budget, vise laconsolidation et la relance de l'économie ainsi que lepartage équitable des sacrifices requis en vue d'adapterles structures à un environnement économique mondialchangeant. Certes, elle porte déjà ses premiers fruits;mais ce ne sont ni les programmes, ni les décisions, niles mesures des autorités qui assureront à eux seuls lesmutations nécessaires. Une politique ne peut qu'initier,accompagner. Pour qu'elle réussisse et pour que sesimpulsions soient transmises à travers les rouages del'économie nationale, il faut que l'ensemble des agents

économiques réagissent positivement et de concert avecles pouvoirs publics. Ce n'est qu'à ce prix que sera créé,dans un effort conjoint de longue durée, le climat pourque s'épanouissent et s'exercent les conditions néces-saires en faveur de la prospérité durable du pays.

Nous nous trouvons confrontés au pari le plus fantas-tique auquel notre collectivité a à faire face depuis lareconstruction de l'après-guerre. Un secteur clé de notreéconomie, le pilier de notre industrie, l'une des sourcesde notre richesse nationale, a été frappé de plein fouetpar la crise et se trouve engagé dans un processus lent,pénible et douloureux de reconversion. Les consé-quences immédiates, à moyen et à long terme, en sontgraves; nous devons en être conscients même si l'on al'impression que de larges couches de la population neveulent pas se rendre à cette évidence.

L'exposé introductif de M. le Président du Gouverne-ment a fait clairement ressortir que si notre économienationale présente d'autres points faibles, la main gardecependant de très bonnes cartes et ce sont celles-ci qu'ilconvient de bien jouer.

La crise économique que nous traversons doit êtrepour nous un défi, un défi à notre imagination et à notrecourage. Pour y répondre nous devons d'abord rejeterune fois pour toutes l'idée que l'avenir sera une simplerépétition du passé. Nous devons refuser le rôle degestionnaire passif de la crise et rejeter l'immobilisme ettoute forme de découragement qui relève du défaitisme.Nous devons continuer à développer des incitants àl'innovation, à la valorisation de nos atouts, à l'aide auxinitiatives créatrices de débouchés nouveaux. Nousserons dès lors obligés d'affronter avec succès l'intensi-fication de la concurrence sur les marchés mondiaux etde renforcer la base structurelle de notre économie. Lemaintien de la compétitivité de nos entreprises est etreste la condition indispensable de la sauvegarde del'emploi et des acquis sociaux.

Les reconversions industrielles et économiques nousimposent un vaste effort d'investissement dans tous lessens du terme: c'est la seule réponse valable au défi de lacrise économique. Traduite, en termes budgétaires,cette nécessité prend un relief tout particulier si onprend en compte les évolutions qui risquent de mettreen cause l'équilibre budgétaire à moyen terme. Leschiffres que je n'ai cessé de citer depuis 1980 au sujet desbesoins de financement de l'Etat et qui au bout de troisans se trouvent être confirmés, ces chiffres sont parfaite-ment éloquents. Ils le sont d'autant plus si l'on tientcompte de facteurs structurels tels que la rigidité de laplupart des dépenses de consommation, l'inéluctabilitédes dépenses de restructuration économique et leniveau atteint d'ores et déjà par la pression fiscale.

Depuis plus de trois ans je n'ai cessé, à cette tribune,de mettre en exergue les graves déséquilibres d'ordrestructurel qui vont affecter les finances publiques. Lesconsidérations et réflexions que j'avais faites à l'époquedemeurent valables et gagnent même en actualité au furet à mesure que nous entrons dans une période préélec-torale, particulièrement propice à des pressions et à desmouvements divers. Je voudrais en reprendre quelques-unes.

Dans une économie de petite dimension, obligée parsa structure de compter sur son talent de transformateur

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pour assurer son bien-être matériel, dépendant del'extérieur pour ses approvisionnements comme pourses ventes, on peut certes se demander comment ladépense intérieure a pu se développer au-delà de ce quepermettraient le rythme de croissance dans le monde etles difficultés spécifiques des activités exportatrices dupays.

Ce processus lent, mais irréversible, est sans doute dûà la pression de comportements tant individuels que pargroupe qui deviennent homogènes, malgré la diversitédes situations qui les inspirent. Pression de tous ceux -et les exceptions sont rares - qui considèrent les con-sommations physiques, qui doivent satisfaire leursexigences, comme étant a priori légitimes, toujours tropchichement dispensées, sans s'inquiéter de savoir àcombien se montera l'addition générale et comment lecoût sera supporté. Pression de tous ceux - et ils sontnombreux - qui demandent le développement desactivités produisant des services collectifs, sans sepréoccuper des ressources nécessaires. Pression de tousceux qui exigent de l'Etat qu'il subventionne le fonc-tionnement de producteurs de services du secteur privé,sans qu'il puisse se soucier d'éviter le gonflement de ladépense mise à charge de la collectivité.

Trop longtemps les parties prenantes au budget del'Etat se sont, globalement, alloué une manne de plus enplus généreusement distribuée. Il faudra bien qu'ellesadmettent désormais que des priorités s'établissent enfaveur des plus démunis. Il faudra, une fois pour toutes,se rendre à l'évidence que l'ensemble des ménages nepeut pas exiger plus longtemps que leurs revenus et leurconsommation augmentent toujours plus vite que leproduit national. Il y a les faits dont il faut bien tenircompte et les faits, dans une période moins facile,doivent faire écarter des exigences devenues excessiveset des luxes devenus exagérés.

Manifestement l'heure n'est pas à l'interprétationabusive, voire à la manipulation des chiffres dans unsens ou dans l'autre, mais à la prise de conscience desdures réalités auxquelles notre collectivité est confron-tée et de la marge de manoeuvre très réduite dontdisposent les pouvoirs publics. En termes clairs, celaveut dire en matière de finances publiques que ceux quicroient l'heure opportune d'exiger des dépenses supplé-mentaires indiquent les impôts à augmenter ou lesdépenses à supprimer en contrepartie.

Pour ma part, je reste persuadé que la situationactuelle et les perspectives à moyen terme de notreéconomie continuent d'exiger une politique financièreet budgétaire rigoureuse et disciplinée. Tous nos parte-naires européens, sans aucune exception et quelle quesoit la coloration politique de leurs gouvernements, ontdécidé et mis en place des politiques économiques etfinancières restrictives. Notre pays, dépendant plus quetout autre de l'extérieur, est confronté aux mêmesexigences de rigueur et de discipline.

Les déséquilibres que nous enregistrons aujourd'hui,mais qui étaient sous-jacents depuis des années, ne sontpas tenables à la longue. Ils portent en eux les germes dedifficultés essentielles. Or, laissées à elles-mêmes, les

choses ne peuvent qu'aggraver. C'est pourquoi legouvernement avait l'impérieux devoir, tout au long deces années, de procéder à des choix équilibrés, deconcilier et de trancher dans l'optique d'une justerépartition des sacrifices et dans l'intérêt de la commu-nauté nationale toute entière. Certes, ces remises enordre ont impliqué un effort collectif et solidaire; maiselles n'ont jamais été agencées de façon telle que lepartage des efforts sollicités ait accentué ni même aitentériné des inégalités sociales. Nous n'avons retenuque les options indispensables à la restructurationéconomique et la défense des couches les plus défavori-sées de la population. Nous ne voulons pas non plusnous départager de cette ligne de conduite à l'avenir.Nous avons la ferme volonté - et l'action gouvernemen-tale en témoigne - de résoudre nos problèmes enplaçant l'intérêt général au-dessus des revendicationsparticulières pour justifiées qu'elles puissent paraître.

Car en définitive, ce n'est pas la défense intransi-geante, par chaque groupe, de points de vue particuliersqui assurera le maintien et le progrès de la prospériténationale. Dans une période moins faste, un peuple nepeut défendre son bien-être général qu'en mesurantsans aveuglement les difficultés, en s'imposant un effortsolidaire de travail et en répartissant équitablement lepoids, d'ailleurs tolerable, de cette discipline de modé-ration qui le garde du pire.

J'ai cru utile de devoir rappeler quelques lignes deforce de la philosophie budgétaire qui est à la base del'élaboration du projet de budget pour 1984, budget quis'inscrit dans la continuité de ses prédécesseurs. Lesdébats qui vont s'ouvrir devront constituer une dernièrechance pour ramener la discussion budgétaire sur desbases saines avant que ne commencent les premièresescarmouches préélectorales.

Le gouvernement a saisi et saisira l'occasion que luioffrent les derniers débats budgétaires de la présentelégislature pour poursuivre le dialogue avec les repré-sentants de tous les partis politiques. Le sens des res-ponsabilités exige de notre part cet esprit d'ouverture.

Je suis convaincu que le débat général concernant leprojet de budget pour 1984 ne sera vraiment utile que sinous réussissons à avoir une confrontation d'idées,franche et sincère, permettant au pays de mieux appré-cier les options budgétaires et les réalités économiqueset sociales qui les sous-tendent.

Sachons saisir la chance qui nous est offerte!

En ce qui concerne les annexes statistiques jointes àl'exposé du Ministre des Finances, le lecteur est prié de seréférer au Compte rendu des séances publiques de la Chambredes Députés (No 5/83-84, pages 514-530). L'ensemble desdonnées chiffrées visant à retracer l'évolution et les caractéris-tiques budgétaires ne pouvait malheureusement pas êtrereproduit dans le cadre de notre bulletin.

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Messages de Noël et de Nouvel An de Son Altesse Royalele Grand-Duc et du Président du Gouvernement

Un message de Noël et de Nouvel An de Son AltesseRoyale le Grand-Duc a été diffusé dans la soirée du 24décembre 1983 au cours des programmes en langueluxembourgeoise de Radio Luxembourg, dans le cadredu Journal de Télé-Luxembourg ainsi que le 25décembre au début de l'émission «Hei Elei - KuckElei.»

Le 31 décembre 1983 un message de Nouvel An deMonsieur Pierre Werner, Président du Gouvernement,a été diffusé au cours des émissions du soir en langueluxembourgeoise de Radio Luxembourg et au cours duJournal de Télé-Luxembourg ainsi que le 1er janvier1984 au début de l'émission «Hei Elei - Kuck Elei».Nous reproduisons ci-après le texte de ces messages.

Message de Noël et de Nouvel An de Son Altesse Royale leGrand-Duc

Léif Matbierger,Et geet ait nées a schwéiert Jor op en Enn, e Jor dat an

d'Geschicht vum Land agoe wäerd als eent aus engerlaanger a schwéierer Kris vun onser Wirtschaft.

Nach kenne mer net soen, datt mer d'Kris hannerunons hun, mä aus Amerika an och aus gewëssen euro-päesche Länner komme méi optimistesch Téin. Sëcheras, datt heiheem de Staatsapparat villes um Plang vunder Hëllef ënnerholl huet, fir d'Betrieber an d'Mëns-chen; et bleift over nach vill zu maachen, esoulaang wéiNout um Mann as.

Gewëss, mir hun nach zevill Chômage, och wann etës manner as wéi an anere Länner; ower esoulaang wéimir Chômage hun - besonnesch ënnert de jonke Leit -soulaang musse mer äis mat alle Mëttelen drugin, firdeer Situatioun opzehëllefen. Op deem Plang mussenall Ustrengungen weiderlafen fir méi e breede Fächervun Industrien ze schaafen, déi eng Productioun vunhéigem Wäert brengen.

An deem Zesummenhank as et vläicht en Encou-ragement festzehalen, och fir spéider Zäiten, datt beions, am Jor 1983, Dausende vu Männer a Frae méi under Aarbecht waren wéi am Jor 1974, wou d'Kris ugefan-gen huet. Och wa vill Ustrengungen gemaach si gin,bleift ower de Problem, datt nach zevill jonk Leit kengrichteg Formatioun hun. D'lescht Jor schons hu mer opdësem Dag, wou ee méi un d'Wuel vun de Kannerdenkt, dowéint gesot, datt eng gutt Léier op eng guttAarbechtsplatz feiert.

Am Gedanken un de Bilan vum leschte Jor géif echgär e puer Wuert iwwert en anere Problem soen, deendéif mat der Politik a mat der Wirtschaft vun onsemLand zesummenhänkt: an dat as d'Kris vun der euro-päescher Konstruktioun.

Mir, als Land an als Bierger, maachen ons Suergeniwer dat, wat elo schons zënter Joren op deem Gebittvirgeet. Et däerf nët sin, an et kann och nët geschéien,datt et an der Welt erëm lassgeet mat dem nationalen

Egoissem, dem Protektionissem, a mat dem Ausernee-liewen vun den europäesche Länner. D'Wirtschafte vundëse Länner si glécklecherweis esou staark verbonnen,datt se nun emol musse matenee liewen a schaffen.Grad elo an der europäescher Kris hale mer drop ze son,datt mir Lëtzebuerger hannert Europa stin, genee wéimer fest hannert onsem Land stin. Et as héich Zäit, dattd'Jor 1984 dat vun engem neien Ufank fir Europa gët.

Nieft de Gedanken iwer de Bilan vu gëschter an deProgramm vu muer, as um Enn vum Jor, an op der Dirvun engem neien, de Moment, wou d'Familjen sechwënschen. Vu menger Familje könnt ech lech matFreed soen, datt de Stoot vum Prënz Henri sech um Ennvum Fréijor vergréissert.

Mat menger Fra a mat eise Kanner wënschen echlech schei Feierdeeg an e glécklecht neit Jor.

Mes voeux de Noël et de Nouvel An vont égalementvers toutes les familles étrangères qui vivent et tra-vaillent parmi nous; ils s'adressent aussi à toutes lesfamilles qui m'écoutent au-delà des frontières du pays.

Message de Noël et de Nouvel An de Son Altesse Royale leGrand-Duc

Chers compatriotes,

Cette année qui touche à sa fin entrera dans l'histoirecomme l'une de celles d'une longue et lourde crise denotre économie.

Nous ne pouvons pas encore dire que nous avonsmaîtrisé cette crise, mais d'Amérique et de certains payseuropéens nous percevons des échos un peu plus opti-mistes. Il est certain que chez nous l'appareil de l'Etat abeaucoup fait sur le plan de l'aide aux entreprises et auxhommes, mais il reste encore beaucoup à faire aussilongtemps que les difficultés perdureront.

Certes, nous avons encore trop de chômage, mêmes'il y en a moins que dans d'autres pays, et aussi long-temps que nous aurons ce chômage, surtout celui desjeunes, nous devons nous battre pour mettre un terme àcette situation.

A cette fin tous les efforts doivent se poursuivre pourcréer un éventail industriel plus large avec une produc-tion de haute valeur.

Dans ce contexte il est peut-être encourageant deretenir pour les temps à venir qu'au Luxembourg il y aen cette année 1983 des milliers d'hommes et femmesde plus au travail qu'en 1974 quand la crise débuta. Unde nos problèmes est celui d'avoir trop déjeunes n'ayantpas encore une formation adéquate, malgré les effortsaccomplis dans ce domaine. Aussi avons-nous déjà ditl'année dernière, en ce jour de fête où l'on pense àl'avenir des enfants, qu'une bonne formation est la clefpour un emploi solide.

Pensant au bilan de l'année dernière je voudrais direquelques mots sur un autre problème profondément lié

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à la politique et à l'économie de notre pays: je pense à lacrise de la construction européenne.

En tant que pays et comme citoyens nous noussoucions de ce qui se passe déjà depuis quelques annéesdans ce domaine. Il n'est pas possible que le monde soità nouveau en butte à Fégoïsme, au protectionnisme et àla désintégration des relations entre les pays européens.Dieu soit loué, les économies de ces pays sont liées aupoint d'être condamnées à vivre et à travailler ensemble.Je tiens à dire en ce moment de crise européenne quenous, les Luxembourgeois, nous tenons à l'Europe avecla même fermeté que nous tenons à notre pays. Il estgrand temps que l'année 1984 soit pour l'Europe celled'un nouveau départ.

La fin de l'année et le début de la prochaine suscitentdes réflexions sur le bilan du passé et le programme del'avenir, mais c'est surtout le moment où les familleséchangent leurs souhaits. Quant à ma famille, j'ai puvous faire savoir avec joie que le ménage du PrinceHenri s'agrandira à la fin du printemps prochain.

Avec mon épouse et avec nos enfants je vous souhaitede bonnes fêtes et une bonne et heureuse année.

Usprooch vum Präsident vun der Regirong, dem HärPierre Werner, zum Neijoersdag 1984

Meng léif Matbierger,Meng Neijoersusprooch vum leschte Joer ass ausge-

klongen an dësem Wonsch: Loosse mer hoffen a mat-wirken datt um Enn vum Joer 1983 mer soe kennen:«Muenech Konfliktfeier ass erlosch, d'Mënscherechtergoufe besser geuecht, méih Honger gouf gestellt. Anaanere Wierder, d'Welt ass an dém Joer méihmënschlech gin.»

Wann een ronderëm séch kuckt an d'Nouvellenlauschtert, kann e wirklech da soen, dat Joer hätt desWönsch erfêllt? Leider muss e feststellen, datt mervillfach mat denen nämlechten an esouguer ausgeweite-ten Konfliktherden weiderliewen, e kaale Want bléist dobaussen an der Weltpolitik. D'Mënscherechter gin nachop ville Piaatzen mat Féiss getrëppelt a Milliounen vunKanner sin a bleiwen ënnererniert.

Mer hun allerdings eng Tendenz fir hannert démspektakulär Schlechten nët emmer dat rouegt wuessendGudds ze erkennen, d'Efforen ze verkennen vun dénevillen anonymen Leit mat guddem Wellen, déi ënnerperseinlechem Asatz an net ouni Geforen, deen Mise-ren op onsem Globus entgéint trieden.

Hinnen, sief et eenzel Mönschen, sief et Vereenegon-gen a Gruppen, sief et Regierongen soll duerfir gedanktsin. All deenen déi an dësem Joer méih Menschlechkét,Verstesteméch a Gerechtegkét bruecht hun, gëllt onsenéischte Gedanken haut den Owend, mat der Hoffnonkdatt d'Liicht wat se brengen endlech durch d'Deischtertdréngt.

Bei ons dohém schleefe mer och ons reell a groussProblemer mat an dat neit Joer. Dest Joer huet onsbruecht eng weider Verschlechterung vun den Ofsaatz-méiglechkéten am Stohl, eng méih prekär finanziellSituation vun onse Stohlgesellschaften, Zwäng vunindustriellem Planning, déi vu baussen op ons zouge-droen gin. Op déi hu mer missen äntweren mat gréisse-

rem Realismus an der Bewertong an de Pläng, matfinanziellen Affer vun der nationaler Communautéit amat delikate Verhandlongen no alle Seiten, mat derKommissioun wei och mat zwou vun onse Nopeschregi-rongen.

Fir d'Letzeburger Land ass e fundamentalen Upas-songsprozess am Gang, deen ons aus agesiessenenGewunnegkéten erausrappt a jiddferén beréihert arëselt: d'Politiker, d'Entreprisen, d'Korporatiounen and'énzel Bierger. Duerfir ass keng Plaatz fir Egoismen anonser aktueller Politik, déi sech Léisongen entgéintstei-pen déi dem Wuehl vum Land als Ganzt dénge sollen.

Deen unerkannte Kredit deen onst Staatswiesen do-baussen genéisst, muss valoriséiert gin duerch engPolitik vun Solidariteit an Erneierong, duerch Fleiss anugeégent Können (Kennschaft).

Wann ech daat soen, da setzen ech direkt derbei, datno menger Erkenntnis déi Viraussetzongen an déWellen bei villen hei am Land bestin, op verschiddenenGebitter si mer staark an d'Innovatioun schons age-spaant.

D'Erkenntnis muss sech nëmmen weider verbreden,wéi eng Well och déi matreissen, déi zëcken oderd'Klöppel an d'Rieder geheien.

Mat deern Erneieronsprozess um Bockel gët daat neitJoer mat de Wahlen fir d'Chamber innenpoliteschbesonnesch bedeitungsvoll. Et kann een nëmmenwënschen datt dës démokratesch Schluecht an engerFairness geschloe gét déi dem Ausmoos vun den Proble-mer, déi déi jëtzeg an déi kënfteg Regirong ze léisenhun, gerecht gët. An domat ass jidferén, de Kandidat,esou gutt wéi de Militant an de Wiehler ugesprach.

Eng vun den Tromp, déi mer an der Hand hun, ass ableift absëns datt mer et bis elo ferdeg bruecht hun, anonsem nationale Liewen ideell a reell Gegesätz duerchmënschleche Kontakt, Dialog a Konzertéierong ofze-bauen.

Daat gëlt souwuehl fir d'Ausenanersetzongentëschen de Sozialpartner wéi um Gebitt vun der rengerPolitik.

Et muss séch weiderhin eppes wéi eng nationalStrategie fir d'Vertédegong vun den héiheren wirt-schaftlechen a sozialen Interessen vum Land no bannena baussen erausschielen können.

Mée iwer ons national Interessen eraus ass ons groussSuerg am Ufank vum neie Joer den Zoustand vun deneuropäeschen Institutionen an d'Konfusioun iwertd'Politiken déi ze befolegen sin. Letzebuerg hängt méiwéi irgend en aaneren Partner um Opbauwierk vun derEuropäescher Enegong.

Et ass méih wéi e Wonsch deen ech well aussprie-chen, et ass eng absolut Noutwendegkeet nët nëmmenfir d'Partnerstaaten énzel geholl oder als Ganzes, firséch aus dem Gerangel ërem méih oder wéinegererauszerappen an d'Vertragswierk a séngem Bestandwéi a senger Inspiratioun nés voll zur Geltong kommenze loossen. Natirlech gëlt et do virun allem, datt déinéideg Koordinatioun fir t'alleréischt am Schouss vunde nationale Regirongen selwer strikt durchgefeiert gët.Nët nëmmen mir, d'Welt dobaussen rifft no engemeuropäesche Partner, dee weess wat e wëllt.

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Meng léif Matbierger,Ech haat als Chef vun der Regirong zwanzégmol

d'Geléenhét lech d'Wënsch vun der Regirong a mengperséinlech Wënsch fir d'neit Joer virzedroen. LaschtenEnns klengt all Message, ofgesin vun Zeitstréimongen,emmer dorop eraus, datt ee sech an d'Haut vun jiddfe-rengem Nolauschterer versetzt an eem daat wënschtwaat d'Glëcksstriewen vun all Mönsch ausmecht: enggudd Gesondhét, Fortkommes am Beruff, Satisfaktiounan der Familjen, mönschlechen a géschtegen Trouscht

bei Krankhét, Alter a Misère. Bei deene Wönsch denkenech besonnesch och un déi jong Leit déi an eng kompli-zéiert Welt erawuessen an heiansdo Méih hun sech dranzurecht ze fannen.

Ech schléissen an deem ech mech zum Spriecher vunIech alléguer maen fir H.K. A. dem Grand-Duc Jean, derGrande-Duchesse an hirer ganzer Familjen mat demAusdrock vun onser Unhänglechket ons waarm Wënschfir d'neit Joer duerzebrëngen.

Memorandum du Gouvernement luxembourgeoissur l'adaptation des structures institutionnelles des

Communautés européennesA l'occasion du Conseil Européen qui s'est déroulé à

Athènes du 4 au 6 décembre 1983, Monsieur PierreWerner, Président du Gouvernement, a remis aux Chefsd'Etat et de Gouvernement des Etats membres desCommunautés Européennes un memorandum surl'adaptation des structures institutionnelles des Com-munautés Européennes ainsi qu'un exposé succinct surla situation légale actuelle en matière de siège et delieux de travail. Nous reproduisons ci-après le texte dece memorandum et de son annexe.

1. A l'occasion du Conseil Européen de Stuttgart lePrésident du Gouvernement du Grand-Duché deLuxembourg a annoncé que le Gouvernement Luxem-bourgeois présenterait prochainement un dossier sufcertains aspects des relations entre les Institutions de laCommunauté.

2. Alors que le Conseil Européen de Stuttgart aadopté la Déclaration Solennelle sur l'Union Euro-péenne, que le Parlement Européen a j été les bases d'unTraité instituant l'Union Européenne et propose l'éla-boration d'une Constitution européenne et que laCommunauté dans son ensemble se trouve confrontée àdes choix fondamentaux devant être opérés lors duConseil Européen d'Athènes l'heure semble venue deréexaminer ses conditions de fonctionnement.

3. Plus d'un quart de siècle après sa création, plus dedix ans après son premier élargissement, dans la pers-pective d'une adhésion prochaine de deux importantsEtats européens et démocratiques, la Communautés'apprête à entamer sa «deuxième génération». AuConseil Européen de Stuttgart, les Chefs d'Etat ou deGouvernement ont dressé un premier programme deréformes, rendues nécessaires par un besoin urgentd'adaptation à des situations qui ont évolué plus vite quen'ont été adaptés nos politiques communes et nosmoyens d'action. D'autres aménagements seront sansdoute encore nécessaires après le Conseil Européend'Athènes.

4. Les Institutions qui ont gouverné et orientél'effort d'unification, auquel nos peuples restent profon-

dément attachés en dépit de l'expression d'une inquié-tude et d'une lassitude compréhensibles, ont fait leurspreuves, nonobstant les imperfections que révèle lagestion des affaires de l'Europe au jour le jour.

5. Malgré toutes les mises en cause, les Institutionsse sont avérées efficaces et toutes les réflexions menéesau cours de ces dernières décennies, concernant unéventuel réaménagement du système institutionnel dela Communauté, n'ont suscité aucun projet qui puisseprétendre remplacer l'acquis des années 50. C'est, aucontraire, selon les lignes tracées par les auteurs desTraités qu'un certain nombre d'évolutions se sontopérées et se poursuivent.

6. Mais face à nombre d'exigences nouvelles, ellesont également fait preuve de flexibilité et ont donnélieu, surtout au cours des dix dernières années, à desdéveloppements importants.

Les Gouvernements des Etats membres se sontrendus compte que leur engagement dans le processuscommunautaire avait atteint un degré d'intensité telqu'il est indispensable que les responsables politiques àl'échelon le plus élevé interviennent personnellementet directement - sans pour autant supplanter les Institu-tions existantes - dans l'orientation et la définition despolitiques communes, sous forme d'un Conseil Euro-péen.

Le Parlement Européen est désormais élu au suffrageuniversel direct. Les implications de cette innovationfondamentale n'apparaîtront dans leur totalité que dansles années à venir.

7. L'Europe, aujourd'hui constate que les temps deréflexion, les détails de procédure et les arcanes de ladiscussion détaillée peuvent présenter des inconvé-nients au regard d'une situation économique et socialequi évolue plus rapidement et qui tend à échapper àl'emprise des pouvoirs publics, communautairescomme nationaux.

C'est donc vers une adaptation des structures institu-tionnelles aussi que les Gouvernements des Etats

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membres - en tant que tels ou à travers les Institutionscommunes - doivent tendre. Les mécanismes décision-nels doivent permettre de garder le contact avec uneréalité mouvante, d'appréhender le changement et decontribuer à le susciter.

8. Une telle démarche ne conduirait certainementpas vers les objectifs recherchés si elle était accompliedans la méconnaissance du droit de la Communauté etdu respect des compétences. Les Traités et les déve-loppements qu'ils ont connus continuent à tracer la voied'une action future. L'unification européenne ne peutêtre que la résultante d'un effort systématique et sou-tenu de chacun des pouvoirs dont la coopération estnécessaire pour atteindre l'objectif souhaité. Si lesInstitutions - à commencer par l'Institution parlemen-taire - doivent être consolidées, les Gouvernements desEtats membres et les Parlements nationaux ne sont paspour autant déchargés de leurs responsabilités. Cettedouble légalité est à la base du système communautaire.La multiplication, par contre, des domaines dans les-quels l'action individuelle des Etats et des Gouverne-ments ne peut désormais plus donner le résultatescompté conduit nécessairement à conférer au«domaine communautaire» une étendue accrue. Plutôtque de confiner le Parlement Européen dans un rôle decontestation systématique, il convient de renforcer sescompétences réelles. Législateur par vocation, le Parle-ment devrait avoir, dans les années à venir, un rôle plussubstantiel dans l'adaptation de l'aspect européencommun de nos systèmes économiques et sociaux, denos réglementations et, somme toute, de nos conditionsde vie en commun.

9. Il est difficilement concevable que la Commu-nauté puisse entrer dans cette nouvelle phase de sonexistence sans qu'elle réexamine en profondeur sesconditions de fonctionnement. L'Acte européen signé àStuttgart en est un début. Cette démarche doit êtrepoursuivie.

10. Dans ce contexte le Gouvernement luxembour-geois ne peut manquer de faire part de sa préoccupationà l'égard de la tendance qui se manifeste dans certainesInstitutions, visant à mettre en cause l'autorité desGouvernements des Etats membres en matière de siège.Il est en effet apparu clairement au cours des dernièresannées, particulièrement depuis les premières électionsdirectes du Parlement Européen en 1979, que le droit etla pratique établis en application des décisions enmatière de siège et de lieux de travail par les Gouverne-ments des Etats membres, sont régulièrement remis enquestion.

Ceci crée entre le Parlement d'une part, et Etatsmembres et Conseil d'autre part une querelle d'autantplus regrettable que des problèmes autrement impor-tants pour l'avenir de l'Europe requièrent l'attention desInstitutions.

11. Aussi le Gouvernement luxembourgeois, con-vaincu qu'il est malsain qu'après 30 ans d'histoireeuropéenne commune, des Institutions communau-taires et Etats membres se voient contraints de faire dela Cour de Justice l'arbitre de leurs différends, s'adresse-t-il par le présent mémorandum à l'autorité légalementcompétente, à savoir les Gouvernements des Etatsmembres, afin qu'ils conviennent sans tarder d'une

solution durable en matière de siège qui soit de nature àpermettre un développement futur conforme à leurdécision et, en particulier, à éliminer toute insécuritédans son application.

12. Le Gouvernement luxembourgeois rappelle àcet égard que la présence à Luxembourg de certainesInstitutions communautaires et de leurs services depuisles origines de construction européenne a amené lesautorités et le peuple luxembourgeois à consentir desinvestissements considérables pour assurer le fonc-tionneiîient des institutions dans des conditions satisfai-santes. Cette présence est d'une importance vitale pourle pays en ce qu'elle souligne, d'une part, son rôlehistorique dans l'entreprise d'unification européenne etqu'elle a, d'autre part, un impact socio-économiqueconsidérable. Reconnaissant cette réalité historique, lesEtats membres ont, au fil de l'évolution, assumé àl'égard du Luxembourg des engagements particuliers.

13. C'est en tenant compte de toutes ces considéra-tions, que le Gouvernement luxembourgeois lance unappel aux Chefs d'Etat ou de Gouvernement réunis àl'occasion du Conseil Européen d'Athènes, de définirdès à présent les grandes lignes d'une solution juri-diquement non-équivoque et durable en matière desiège.

14. Si cette solution devait se limiter à préciser lestatu quo confirmé lors du Conseil Européen de Maas-tricht dans un accord formulé de manière claire etinattaquable, le Gouvernement estime qu'elle devraitse baser sur la Décision du 8 avril 1965 et porter notam-ment sur les points suivants:

- L'équilibre existant à l'heure actuelle entre lesdifférents lieux de travail tant en ce qui concerne lepoids politique des Institutions, leurs lieux de réunionet l'implantation de personnel à leurs lieux de travail,doit être défini de façon qu'il puisse être respecté àl'avenir également dans le contexte du développementfutur des activités communautaires.

- L'amélioration des conditions de fonctionnementpour les Institutions dans les lieux de travail respectifset le développement des communications entre ellesdoivent être entrepris sans tarder et en étroite associa-tion avec les Institutions concernées. A cet égard leGouvernement luxembourgeois renvoie au mémoran-dum qu'il a remis vers la mi-juin 1983 à ses partenairesainsi qu'aux Présidents du Conseil des Ministres, duParlement Européen et de la Commission.

Il considère que ce domaine offre à la Communautéla possibilité de faire la démonstration visible de l'effica-cité de la technologie avancée proprement européenne.Une telle action pourrait de ce fait revêtir un caractèresymbolique et s'inscrire favorablement dans l'élabora-tion des nouvelles politiques communautaires.

- A l'instar de la solution retenue dès 1965 pour lesréunions du Conseil des Ministres et étant donné que latenue régulière de sessions du Parlement européen àLuxembourg entre 1967 et 1981 a créé une situationdont il n'est plus possible de faire abstraction, le prin-cipe même de la tenue à Luxembourg, de trois sessionsordinaires du Parlement européen par année parlemen-taire doit être formellement arrêté. Dans le cadre d'unetelle solution, le Parlement européen pourrait disposer

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d'antennes ou de bureaux de liaison dans les autreslieux de travail des institutions européennes.

- La définition, l'envergure, la composition et lefonctionnement des antennes et bureaux de liaisondoivent faire l'objet d'un accord formel entre les Etatsmembres et les Institutions concernées. Une procédureappropriée de contrôle du respect des dispositionsprises doit être assurée étant entendu que, conformé-ment à l'arrêt de la Cour de Justice du 10 février 1983,une antenne ne peut jamais constituer le centre degravité d'un service et ne devrait donc pas atteindre desproportions injustifiées tant en ce qui concerne lenombre que le rang du personnel y détaché.

- Les règles existantes en ce qui concerne les lieuxde réunion des Ministres doivent être confirmées et leurapplication fidèle doit être assurée eu égard à la prolifé-ration des réunions ministérielles de tout genre (infor-melles, spéciales et mixtes) qui s'est produite depuis1965.

- De même en ce qui concerne le FECOM les règlesexistantes doivent être respectées et appliquées.

15. Au cours des réflexions qu'il a entreprises ausujet de ce qui précède, le Gouvernement luxembour-geois a une nouvelle fois pris conscience (et l'annexehistorique à ce mémorandum en témoigne à suffisance)que les décisions et arrangements antérieurs en matièrede siège et de lieux de travail provisoires des Institutionscommunautaires ont toutes été prises au moment mêmeoù une nouvelle étape dans le rapprochement despeuples européens et l'intégration des Etats européensétait franchie: entrée en vigueur du Traité CECA,entrée en vigueur des Traités CEE et CEEA, signaturedu Traité de Fusion.

16. Si les Etats membres devaient décider de s'enga-ger plus loin dans la voie européenne et de dépasserpour le fonctionnement des institutions les limites dustatu quo défini en 1965 et confirmé 1981, le Luxem-bourg demeure candidat au siège unique.

17. Le Gouvernement luxembourgeois est disposé àdoter la zone d'implantation des Institutions et organescommunautaires et de leurs services, géographique-ment délimitée, d'un statut juridique et administratifparticulier dont les caractéristiques précises devraientêtre définies ultérieurement après consultation detoutes les parties concernées. Ce statut aurait un carac-tère évolutif de façon à pouvoir se développer parallèle-ment aux progrès réalisés sur la voie de l'unificationeuropéenne.

18. Le Gouvernement luxembourgeois est pleine-ment conscient des implications qu'une telle solutionest susceptible de comporter à long terme, tant pour laCommunauté dans son ensemble que pour les Etatsmembres. Si elle devait être acceptée par les Gouverne-ments de tous les Etats membres, elle viendrait s'insérerparfaitement dans l'ensemble des efforts et initiativespris et lancés ces derniers temps pour permettre àl'Europe communautaire de faire face aux défis de cettefin de siècle par «une union sans cesse plus étroite entreles peuples européens» et le renforcement c"e «l'unité deleurs économies.».

19. En annexe au présent mémorandum les Chefsd'Etat ou de Gouvernement voudront bien trouver un

exposé succinct sur la situation légale actuelle enmatière de siège et de lieux de travail ainsi que surl'insécurité juridique qu'elle a fait naître au fil desannées.

Annexe au Mémorandum présenté par le gouvernementdu Grand-Duché de Luxembourg aux gouvernements desEtats membres des Communautés Européennes à Athènes

le 4 décembre 1983

A) La situation légale1. Les articles 77 CECA, 216 CEE et 189 CEEA

disposent que «le siège des institutions de la Commu-nauté sera fixé du commun accord des Gouvernementsdes Etats membres.»

2. En application d'une déclaration des Ministresdes Affaires Etrangères, réunis à l'occasion de l'entréeen vigueur du traité CECA, les 24 et 25 juillet 1952, laHaute Autorité et la Cour de Justice ont commencéleurs travaux à Luxembourg, l'Assemblée a tenu sesréunions (sauf deux) à Strasbourg, tandis que sonSecrétariat Général a commencé à travailler à Luxem-bourg, lieu où le Conseil se réunissait et où étaientprésents la Haute Autorité et ses services ainsi que lesecrétariat du Conseil.

Quant à la décision définitive sur le siège, lesMinistres prévoyaient qu'elle serait prise à la lumièredes résultats des négociations à entreprendre sur leStatut de la Sarre, laissant ainsi ouverte l'«option sar-roise» au cas où la population sarroise se prononceraitpour un statut de large autonomie.

3. Après l'entrée en vigueur des traités CEE etCEEA, les Ministres des Affaires Etrangères ontdéclaré, le 7 janvier 1958, dans un communiqué depresse, sous l'intitulé «siège» qu'ils «sont convenus deréunir dans le même lieu l'ensemble des organisationseuropéennes des six pays, aussitôt que cette concentra-tion sera effectivement réalisable en conformité avec lesdispositions des Traités«. En attendant, et tout enlaissant un large pouvoir d'appréciation aux Présidentsdes différentes institutions, ils ont recommandé auxCommissions de tenir leurs réunions soit à Bruxellessoit à Luxembourg, «en fonction de raisons d'ordrepratique et de facilités matérielles». L'Assemblée,quant à elle, a continué à tenir ses réunions plénières àStrasbourg, son Secrétariat général continuant à fonc-tionner à Luxembourg.

Par la suite, ses commissions ont commencé à seréunir de plus en plus fréquemment à Bruxelles, oùétaient présents les membres des Conseils et des Com-missions des deux Communautés ainsi que leurs appa-reils administratifs.

4. Le 8 avril 1965, à l'occasion de la signature duTraité instituant un Conseil unique et une Commissionunique des Communautés Européennes, le premier endate des accords sur le siège des institutions, négocié etconclu en bonne et due forme et qui de ce fait, tranchesur tous les arrangements antérieurs, a été entériné parla «Décision des Représentants des Gouvernements desEtats membres relative à l'installation provisoire decertaines institutions et de certaines services des Com-munautés.»

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Elle dispose, entre autres, ce qui suit:«Article 1: Luxembourg, Bruxelles et Strasbourg

demeurent des lieux de travail provisoires des institu-tions des Communautés.»

«Article 4: Le Secrétariat général de l'Assemblée etses services restent installés à Luxembourg.»

Outre ces dispositions, cette Décision concernenotamment les réunions du Conseil, l'implantation dela Cour de Justice et des organismes juridictionnels etquasi-juridictionnels, l'installation de la Banque Euro-péenne d'Investissement, des services d'interventionfinancière de la Haute Autorité de la CECA et d'autresorganismes et services communautaires, le transfert desservices de gestion du marché du charbon et de l'acierde la Commission, ainsi que le transfert ou le maintien àLuxembourg de certains services de la Commission.

Son but était, sans préjudice de la fixation du siègedes institutions, de régler certains problèmes particu-liers au Grand-Duché de Luxembourg résultant de lacréation d'un Conseil unique et d'une Commissionunique.

5. Sur base de la Décision du 8 avril 1965, et notam-ment de son article 10 qui prévoit à son alinéa 1 que «lesGouvernements des Etats membres sont disposés àinstaller ou à transférer à Luxembourg d'autres orga-nismes et services communautaires, particulièrementdans le domaine financier, pour autant que leur bonfonctionnement soit assuré», les Représentants deGouvernements des Etats membres ont, par leur déci-sion du 24 juillet 1973, fixé à Luxembourg le lieu detravail provisoire du Fonds européen de Coopérationmonétaire. Ils en ont fait de même, par leur décision du5 avril 1977, en ce qui concerne le lieu de travail provi-soire de la Cour des Comptes.

6. Le contenu de la Décision de 1965, les décisionssubséquentes prises en son application, ainsi que lapratique qui s'en est suivie ont été confirmés à plusieursreprises et notamment par les Chefs d'Etat ou de Gou-vernement qui, les 23/24 mars 1981, réunis à l'occasiondu Conseil Européen à Maastricht, «ont décidé à l'una-nimité de confirmer le statu quo en ce qui concerne leslieux de travail provisoires des institutions euro-péennes.»

7. A peine trois mois plus tard, la Conférence desGouvernements des Etats membres convoquée à lasuite du mémorandum présenté le 16 octobre 1980 parle Gouvernement français aux Gouvernements desautres Etats membres aux fins «d'engager sans tarderdes conversations pour dégager, en application desarticles 77 CECA, 215 CEE et 189 CEEA, une solutionsatisfaisante à cette question» du siège des institutionsde la Communauté, s'est terminée sur les conclusionssuivantes:

«1. Les gouvernements des Etats membres cons-tatent que conformément à l'article 216 du traité, lafixation du siège des institutions de la Communautérelève de leur compétence exclusive.

2. La décision des gouvernements des Etatsmembres, réunis à Maastricht les 23/24 mars 1981, demaintenir le statu quo en ce qui concerne les lieux detravail provisoires, relève de l'exercice de cette compé-

tence. Elle ne préjuge pas la fixation du siège des institu-tions.»

B) L'insécurité8. Mais cette notion de «statu quo», dont la portée

n'a jamais été précisée dans un texte d'ensemble, adonné lieu dans la pratique à des interprétations diver-ses engendrant une grande insécurité que même l'arrêtde la Cour de Justice du 10 février 1983 ne semble pas enmesure de faire cesser. L'insécurité provient des pra-tiques de la Commission en matière d'antennes et debureaux de liaison installés à Bruxelles dont certainsont tendance à atteindre des proportions injustifiées parrapport à leur raison d'être, de discussions concernant lelieu de réunion des Ministres ainsi que de la non-appli-cation de l'alinéa 2 de l'article premier de la Décision du24 juillet 1973 relative à l'installation provisoire duFonds européen de coopération monétaire, dont lesséances du Conseil d'Administration ne se tiennent pas,en règle générale, au lieu de travail provisoire du Fondset dont les tâches administratives sont assurées par uneinstance extérieure à la Communauté européenne.L'insécurité provient également, et surtout, de l'attitudedu Parlement européen.

9. Le 19 juillet 1967, à la suite d'une décision prisepar son Bureau élargi, le Parlement européen, qui avaittenu jusqu'à lors toutes ses sessions (à l'exception de 2,en 1956 - Bruxelles et en 1957 - Rome) à Strasbourg,siégeait pour la première fois à Luxembourg, pour desraisons de consultations urgentes du Conseil.

10. Par la suite il a tenu généralement toutes sessessions de courte durée à Luxembourg. En 1970 lesautorités luxembourgeoises ont entrepris la construc-tion d.'un nouveau bâtiment administratif pour lesservices du Parlement, qui contenait, à la demande duParlement lui-même toutes les installations nécessairesà la tenue de réunions de l'assemblée plénière ainsi quede ses commissions et groupes politiques. Elles n'ontpas non plus hésité à donner satisfaction aux demandesultérieures du Parlement européen, notamment cellesformulées en vue des premières élections au suffrageuniversel direct en 1979 et de l'augmentation considé-rable du nombre de ses membres en résultant. Ainsi leParlement européen a-t-il pu tenir, entre juin 1980 etfévrier 1981, quatre sessions à Luxembourg où venaitd'être achevée la construction du nouveau grand hémi-cycle, qui d'ailleurs est actuellement le seul à pouvoiraccueillir la totalité des parlementaires une fois laCommunauté élargie à 12 pays.

11. De la sorte une pratique est venue se greffer sur laDécision de 1965 qui a amené le Grand-Duché deLuxembourg à faire face à des demandes régulièresd'amélioration et d'agrandissement des infrastructuresnécessaires au bon déroulement de ces sessions, luiimposant des obligations auxquelles il s'est plié dans lerespect fidèle de la vocation historique de lieu de travaildes institutions européennes qui est la sienne. Légitime-ment il a cru pouvoir en déduire des droits correspon-dants aux efforts consentis.

12. Aussi le Gouvernement luxembourgeois a-t-ilobservé avec beaucoup de circonspection l'évolution del'attitude du Parlement européen dans ce contexte,d'autant plus qu'elle risquait d'empiéter sensiblement

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sur des prérogatives que les Traités ont expressémentréservées aux Gouvernements des Etats membres.

13. Dès le 15 décembre 1980 le Parlement européena adopté une résolution «sur le siège du Parlement euro-péen» aux termes de laquelle il exprime sa détermi-nation à se substituer aux Gouvernements des Etatsmembres si ces derniers ne mettent pas fin au régimeprovisoire concernant ses lieux de travail avant le 15juin 1981. Dès avant cette échéance, il a rejeté, le 12janvier 1981, le calendrier des sessions prévu par sonbureau, qui comprenait deux sessions plénières àLuxembourg en 1981 et le 13 mars 1981 il a adopté unerésolution comportant exclusivement des sessions àStrasbourg durant le second semestre 1981. Depuis lorsle Parlement européen n'a tenu plus aucune session àLuxembourg.

14. Le 7 juillet 1981 le Parlement européen a adopté,après avoir rejeté une question préalable lui demandant«de ne pas se substituer dans des responsabilités quidemeurent réservées aux Gouvernements des Etatsmembres» - une résolution sur «le siège des Institu-tions de la Communauté européenne et notamment duParlement européen par laquelle il décide que le fonc-tionnement de son Secrétariat Général et de ses servicestechniques doit être revu pour répondre aux exigencesde tenir toutes ses sessions plénières à Strasbourg et lesréunions de ses commissions et groupes politiquesgénéralement à Bruxelles.

15. Saisie d'un recours en annulation de cette résolu-tion par le Gouvernement luxembourgeois la Cour deJustice a rendu le 10 février 1983, un arrêt qui, bienqu'apportant des clarifications sur un certain nombre depoints litigieux (notamment la compétence exclusivedes Gouvernements des Etats membres en matière de

fixation du siège et des lieux de-travail provisoires desInstitutions communautaires), laisse néanmoins duchamp à des interprétations divergentes sur une ques-tion fondamentale, à savoir l'étendue exacte des pou-voirs d'organisation interne au Parlement européen, quitrouve ses limites juridiques dans l'interdiction qui luiest faite de procéder à un transfert complet ou partiel, endroit ou en fait, du Secrétariat Général et de ses services.

16. Le jour même de l'arrêt de la Cour de Justice, leParlement européen a décidé de tenir à Bruxelles lasession spéciale sur le chômage mettant ainsi en causel'équilibre des décisions et arrangements existants enmatière de siège et de lieux de travail des Institutions.

17. Moins d'un mois plus tard, le 9 mars 1983, ledéputé von Hassel déposa un projet de résolution, quipeut être considéré actuellement comme adopté envertu de la procédure spéciale prévue à l'article 49 duRèglement Intérieur du Parlement européen, et qui, sefondant sur la résolution du 7 juillet 1981, décide deprocéder à une répartition plus rationnelle du personneldu Secrétariat Général entre ses lieux de travail deBruxelles et Strasbourg, écartant ainsi implicitementLuxembourg. Estimant que par cette résolution leParlement européen brave une nouvelle fois la compé-tence exclusive des Gouvernements des Etats membresen la matière, faisant ainsi fi des principes affirmés dansl'arrêt du 10 février 1983, le Gouvernement luxembour-geois a introduit, le 10 juin 1983, un nouveau recours enannulation devant la Cour de Justice.

18. Depuis lors d'autres initiatives ont été prises etde nouvelles propositions de résolution et projets derapport continuent à être élaborés au sein du Parlementeuropéen en matière de siège et de lieux de travail.

Le Luxembourg dans l'Europe communautaire des années 80Discours de Madame Colette Flesch, Vice-Président

du Gouvernement, Ministre des Affaires Etrangères etde l'Economie, à la tribune de l'Ecole HEC de l'univer-sité de Lausanne le 23 novembre 1983.

En abordant le rôle de l'avenir du Luxembourg dansl'Europe des années 80, je pose en fait la questionfondamentale pour mon pays. En la plaçant dans lecadre communautaire, j'entends marquer la préférenceque ressentent normalement mes compatriotes dès lorsqu'il s'agit de trouver au-delà des frontières nationalesun cadre dans lequel ils peuvent situer leurs activités.Toutefois, à un moment où l'Europe en construction setrouve une nouvelle fois remise en cause, les négocia-tions d'Athènes en témoignent, à ce moment il apparaîtaussi difficile de se limiter à ce seul cadre. De façongénérale lorsque les Luxembourgeois entendent définirleur rôle et leurs possibilités dans l'Europe du futur, ilsont tout intérêt à commencer leur analyse par un exa-men des événements dans le monde.

Est-il besoin de préciser que toute politique étran-gère - surtout dans un pays comme le mien - ne sauraitse limiter à l'action à l'extérieur proprement dite, mais

commence nécessairement par l'analyse des influencesdu dehors, telles qu'elles sont ressenties à l'intérieur desfrontières nationales.

Il appartient ainsi, je pense, aux responsables de lapolitique étrangère d'expliquer la portée de cesinfluences à leurs compatriotes alors que trop souventles citoyens ont tendance à vouloir ignorer ce qui sepasse au-delà des frontières nationales. Il s'agit enquelque sorte de préparer le terrain pour un consensusnational sur une politique réaliste, c'est-à-dire unepolitique adaptée à l'évolution dans le monde tant sur leplan politique proprement dit que sur le plan écono-mique, social et culturel.

Ce n'est qu'à partir de cette analyse de départ, ainsique sur la base de ce travail d'explication qu'une poli-tique étrangère efficace peut être édifiée. Une tellepolitique aura alors pour objectif de présenter à l'exté-rieur le pays en question, de préparer et de mettre enoeuvre la défense de ses intérêts ainsi que de propager etde promouvoir ses atouts auprès de ses partenairesinternationaux.

Ces considérations sont certainement vraies dans lecas du Luxembourg. Peut-être sont-elles plus vraies à

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l'égard du Luxembourg qu'à l'égard d'autres pays alorsque nous sommes parmi les plus petits de tous les payset que donc notre environnement international estparticulièrement vaste. Le Luxembourg ne constituepas une île mais une entité indépendante, liée à sesvoisins et partenaires dans une relation d'interdépen-dance et en même temps un des pays du monde bénéfi-ciant d'un niveau de vie parmi les plus élevés.

Le Luxembourg dispose aujourd'hui d'une structureindustrielle en voie de transformation mais baséeencore sur l'industrie lourde et sur un secteur de PMEqui a su particulièrement bien résister à la crise. Il aaussi connu au cours des dix ou vingt dernières annéesune véritable explosion du secteur des services et sacapitale est devenue un centre financier important et, nel'oublions pas, un des lieux de travail des Institutionseuropéennes.

Toutefois en ce qui concerne tant les services que lesactivités industrielles ou même les fonctions adminis-tratives, le Luxembourg dépend de façon très large ettrès directe de l'étranger. En effet, le marché national estlimité à une population d'au maximum un demi-millionde personnes, en comptant un certain nombre de fronta-liers. Ni l'industrie sidérurgique, ni les activités finan-cières, certes localisées à Luxembourg ne constituentcependant des activités orientées vers la vie luxembour-geoise proprement dite. Il en est de même pour lesInstitutions européennes.

Le Luxembourg ne saurait donc vivre en autarcie et sià ce jour son aisance matérielle est indéniable, il estcertainement exact de dire que celle-ci est le résultat del'ouverture vers l'étranger du Luxembourg.

Depuis très longtemps en effet, les Gouvernementsluxembourgeois et les citoyens ont compris que lesactivités limitées au territoire luxembourgeois nesauraient faire vivre le pays et lui garantir son avenir.

Si ceci est vrai dans le domaine économique, tel estégalement le cas dans le domaine de la sécurité exté-rieure. A travers le réseau des traités et accords intra-européens, la sécurité du Luxembourg à l'égard de sesvoisins se trouve assurée. Ce n'est que par l'existence del'Alliance atlantique et de l'OTAN que se trouve garan-tie la sécurité du Luxembourg vis-à-vis de la super-puissance de l'est européen. Notre expérience, dans cedomaine, a été différente de celle de la Confédérationhelvétique et c'est pourquoi nous avons abandonnéaprès la deuxième guerre mondiale notre neutralité, pardeux fois violée dans l'histoire récente.

Il est évident que le Luxembourg ne doit pas seleurrer sur sa marge de manoeuvre mais qu'au contraireil a tout intérêt à être en permanence à l'écoute del'étranger. Ce n'est qu'à cette seule condition que monpays a une chance et garde une chance de placer sespions sur l'échiquier européen et mondial et de sauverpour l'avenir le bien-être qui le caractérise actuelle-ment.

Tel est d'autant plus le cas que l'industrie du fer quipendant plus d'un siècle a fait notre richesse se trouveprise dans le tourbillon de la crise sidérurgique euro-péenne et que nous devons limiter progressivementnotre dépendance à son égard et modifier le monoli-thisme traditionnel de notre économie.

Depuis toujours le Luxembourg est terre d'accueil enmatière économique et même notre grande industrie

nationale, la sidérurgie trouve son origine au siècledernier dans le know how, la force de travail et le capitalétranger. Pour assurer notre reconversion industrielle,nous devons aujourd'hui être plus rapide que d'autrespour détecter dans le monde les créneaux, les activitésnouvelles et plus souples pour savoir accueillir celles-cichez nous. Ce ne serait que par hasard qu'une produc-tion nouvelle pourrait trouver son origine à Luxem-bourg. Certes, nous devons aider le hasard et favoriserles concours de circonstance qui pourraient entraîner lacréation d'activités au Luxembourg. Cependant nousdevons avant tout garder l'oeil sur ce qui se passe ail-leurs et, à la lumière des atouts dont nous disposons,approcher les milieux concernés pour valoriser auprèsd'eux les avantages que peut offrir dans leur domaine leLuxembourg.

La politique étrangère du Luxembourg ne peutévidemment se limiter à cette présentation commer-ciale de notre pays. Nous devons en effet aussi etd'abord assurer au niveau supérieur des relations nor-males avec nos voisins et nos partenaires dans le monde.Ce n'est qu'à cette condition en effet que nous pouvonsespérer faire entendre notre voix et contribuer à canali-ser le cours des événements tant dans la super-structurepolitique que dans les réalités concrètes de la vie écono-mique. Nous retrouvons ici la question de la sauvegardedes intérêts luxembourgeois sur le plan de la sécuritéextérieure, sur le plan des relations politiques entreEtats et sur le plan des arrangements économiquesconcrets.

Mais abandonnons maintenant les préoccupationsproprement luxembourgeoises pour nous tourner versune description rapide du monde 1983.

A l'heure actuelle nous pouvons regrouper les paysdans le monde en trois groupes d'Etats, à savoir les paysoccidentaux hautement industrialisés et à économie demarché, les pays de l'est européen connaissant uneéconomie planifiée ainsi que les pays du Tiers Monderegroupant essentiellement les états non-alignés con-frontés à des problèmes angoissants qu'ils essayent derésoudre tant bien que mal dans un monde qui nesemble guère se soucier de leurs préoccupations.

Le monde occidental est loin de constituer un blochomogène. Au contraire, il devient de plus en plusévident qu'il se départage en trois sous-blocs qui sont lesEtats-Unis d'Amérique, le Japon et l'Europe. L'Europeelle-même comprend le noyau de l'Europe des Dix,c'est-à-dire l'Europe des Communautés européennes,autour duquel gravitent ceux des Etats qui réussissent àse passer d'une intégration plus poussée dansl'ensemble européen.

Un examen superficiel de la situation en Europe etplus particulièrement dans nos pays au coeur même ducontinent, pourrait nous amener à considérer quemalgré la crise, le maintien du niveau de vie ne constituepas un véritable problème. Cette conclusion, à très courtterme, se trouve cependant démentie à partir dumoment où nous analysons les problèmes de façon plusapprofondie et où nous situons notre point de référencenon plus près de nous, mais au-delà de l'Europe auprès/des centres de décision mondiaux.

Pour mener correctement notre analyse, il est préfé-rable de chercher un point de référence non tout prochemais qui puisse au contraire nous permettre de saisir la

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globalité des problèmes et son incidence dans notreenvironnement immédiat. Un examen même rapidenous apprendra qu'une mutation considérable est encours dans le monde et qu'elle ne manquera pasd'influencer profondément la vie de tous.

Mon propos étant de parler du Luxembourg dansl'Europe des années 80, je voudrais examiner d'un peuplus près le rôle de l'Europe dans l'ensemble de cettemutation mondiale. L'Europe, puissance commercialeimpressionnante, bénéficiant d'un héritage culturelexceptionnellement riche et d'un patrimoine artistiqueunique au monde sera-t-elle en mesure de tenir tête àses adversaires principaux que sont les Etats-Unisd'Amérique et le Japon?

Au moment où je parle les indicateurs économiquestendent à indiquer que l'Europe est en train de perdre lapartie alors que la reprise se confirme aux Etats-Unis,que la balance extérieure du Japon est toujours large-ment excédentaire et qu'en Europe même la dépressioncontinue, le chômage augmente et le déficit extérieurn'est toujours pas véritablement comblé. Certes, il n'estpas possible de généraliser et dans certains pays lasituation conjoncturelle est plus positive. Je parle de laRépublique Fédérale d'Allemagne ou encore de paystels la Suède, la Norvège ou la Suisse également. Dans laplupart des pays cependant, les perspectives ne sont pasencourageantes.

Il est à noter également que tant au Japon qu'auxEtats-Unis le dynamisme de l'industrie se manifestenotamment de façon frappante dans le domaine destechnologies nouvelles. Je vise évidemment l'électro-nique, la biogénétique et les télécommunications. EnEurope par contre nous devons reconnaître que lesefforts entrepris dans ces différents domaines restent endeçà de ceux accomplis par nos principaux concurrents.Le fait que cette avance de leur part se concrétise dansdes domaines qui consomment peu d'énergie et quiconstituent certainement des créneaux d'avenir,devraient nous amener à réfléchir.

Ainsi que Michel ALBERT l'a brillamment décritdans son récent «Pari pour l'Europe», l'Europe connaît àl'heure actuelle encore l'aisance matérielle. La majoritéd'entre nous considère cet état de chose comme un dû,ce qui explique les rigidités qui caractérisent la sociétéeuropéenne par rapport aux Etats-Unis et au Japon.Toutefois les éléments de tous les jours nousapprennent à chaque fois un peu plus que cet état dechose n'a rien d'automatique et que si l'Europe désireéviter la chute, elle ne pourra plus échapper à la recon-naissance du fait qu'il est vain de se cramponner auxproductions désormais désuètes. Il serait illusoire pourl'Europe de croire qu'elle pourrait redevenir compéti-tive et qu'elle pourrait rééquilibrer durablement sabalance extérieure dans la mesure où elle se concentre-rait sur les domaines dans lesquels le facteur travail, auprix élevé en Europe, reste prédominant. Il seraitégalement illusoire de croire qu'il sera possible deréduire considérablement les charges salariales etsociales, c'est-à-dire de faire régresser la roue de l'his-toire. L'Europe n'a pas d'autre choix que celui de seconcentrer progressivement sur des activités où laproductivité est la plus importante, la valeur ajoutéeplus élevée, où l'expertise constitue le facteur détermi-nant. En ce moment les Japonais, les Américains ou

d'autres sont en train de s'approprier les marchés enexpansion. L'Europe, elle, n'a pas encore réussi àvéritablement trouver les créneaux dans lesquels ellepeut surclasser ses concurrents. Dans ces conditions, ilest nécessaire de reconnaître que toute politique quiconsisterait à engager des moyens considérables dansune production constituant en fait un programmed'emploi déguisé et désormais incapable de créer de larichesse serait une approche à courte vue et irrespon-sable.

Certes, il convient dans les industries en perte devitesse d'organiser le repli dans l'ordre pour éviter desrigueurs excessives dans le domaine social. Mais nousne devons pas méconnaître le fait que les moyens ainsiengagés feront défaut au redressement économiqueindispensable et que leur absence retardera considé-rablement le retour à la prospérité. Une fois que nousaurons renoncé à nous raccrocher aux modes de produc-tion du passé, des moyens considérables en hommes eten capital pourront devenir disponibles pour êtreinvestis dans notre avenir.

L'Europe qui indéniablement a eu du génie dans lepassé en conserve-t-elle suffisamment de nos jours pourmaîtriser cette tâche?

La Communauté européenne sera-t-elle à même defournir le cadre dans lequel s'organisera l'avenir del'Europe?

La réponse à ces questions doit être circonstanciée.Quelle est donc la véritable cause qui est à l'origine

de la mutation industrielle que connaît le monde àl'heure actuelle? Si nous nous en tenons à la chronologiedes événements nous sommes amenés à conclure que lefacteur qui a déclenché cette mutation a été le renché-rissement du prix de l'énergie et plus précisément duprix du pétrole. En effet, le commencement de nosdifficultés se situe au début de la crise économique qui,elle, remonte à 1973, moment du premier choc pétrolieroù à la faveur d'un conflit local au Proche Orient les plusgrand producteurs mondiaux de pétrole ont choisi derenverser les rapports de force dans le monde écono-mique. Certes, le progrès technologique est la causevéritable de la mutation industrielle. Toutefois, c'est lacrise du pétrole qui a été en quelque sorte le révélateuret a entraîné une accélération exceptionnelle et extraor-dinaire du rythme des progrès technologiques.

En effet, le renchérissement du prix de l'énergie etdes matières premières a encouragé la recherche d'alter-natives aux solutions connues jusqu'alors et désormaistrop chères. Parallèlement à ce besoin de remplace-ment, les sources alternatives d'énergie ont pu êtredéveloppées à des prix désormais compétitifs et c'estdonc la combinaison de la volonté de réduire la dépen-dance vis-à-vis de l'extérieur et de la rentabilité accrue,voire acquise, des solutions alternatives au pétrole, quiont constitué un des points de départ de l'évolution quenous connaissons actuellement.

La révolution technologique qui s'est engagée depuisune dizaine d'années a révélé d'ores et déjà qu'il serapossible à l'avenir d'avoir une production importantedans le domaine de la haute technologie nécessitantmoins de matière première au départ et en ayant recoursà beaucoup moins de main-d'oeuvre.

Plus économiques et plus performantes, les technolo-gies nouvelles ne sauraient donc être évitées. Toutefois,

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leurs conséquences sont d'ores et déjà claires sur la vieéconomique de la majorité des pays dans le monde. Lechômage ne pourra qu'augmenter à moins que le mondedu travail ne réussisse lui aussi sa mutation. D'autrepart, les conséquences que cette évolution ne manquerapas d'avoir sur les pays du Tiers Monde, exportateurs dematières premières, sont elles aussi facilement calcu-lables. Elle risquera d'avoir un impact désastreux et dedéclencher en fin de compte la déstabilisation profondeavant tout des pays du Tiers Monde mais aussi de nom-breux pays du monde développé.

A partir du moment en effet où il est possible de pro-duire des biens de consommation à partir de sable ouencore de cellules capables de se reproduire à une trèslarge échelle, de très nombreuses activités sont mises encause et les moyens de subsistance de larges couchessociales risquent d'être compromis.

Il y va ici véritablement des chances d'avenir du TiersMonde ce qui est un problème d'une actualité brûlanteet angoissante. Je n'ai néanmoins pas l'intention del'aborder aujourd'hui alors que j'ai choisi de me concen-trer sur l'Europe et plus particulièrement sur le Luxem-bourg.

L'Europe elle-même, a-t-elle des chances de faireface au défi?

Il faudrait d'abord qu'elle reconnaisse la réalité et laportée du défi et qu'ensuite elle soit à même de prendreles mesures qui seraient de nature à lui permettre d'yrépondre. En apparence il s'agirait donc d'un processusdont l'évidence elle-même devrait suffire à garantir sondéroulement régulier et sans accroc. Pourtant nousconnaissons tous les problèmes auxquels se trouventconfrontés actuellement les Gouvernements européensdès lors qu'ils essayent de réussir le transfert en moyenset en personnes d'un secteur vers un autre. Les milieuxde la sidérurgie, de la construction navale, du textile etd'autres encore ne sont pas prêts à reconnaître sansautre forme de procès que leur secteur ne doit plusconstituer une priorité nationale.

Depuis la deuxième guerre mondiale, la conceptionde justice sociale a considérablement évolué en Europeet le progrès social est devenu un élément indispensablede la politique de tous les Gouvernements, qu'ils soientde gauche ou de droite. Une préoccupation qui a été à cepoint à Pavant-plan des politiques et qui fait partie de latradition politique européenne ne saurait être oubliéeou négligée du jour au lendemain. Aucun gouverne-ment européen ne peut ni ne veut se permettre derenverser la barre et de s'engager dans une directionrésolument différente même s'il est conscient de lanécessité de réadapter les structures de l'économie.

Un gouvernement agissant de la sorte se trouveraitconfronté à l'incompréhension, à l'hostilité voire à larévolte de larges couches de la population. Il s'agit làd'une donnée qu'aucun gouvernement démocratiquene peut ignorer et à laquelle il ne saurait passer outre.

Les raisons de cette incompréhension sont claires. Enpremier lieu il est malheureusement un fait que lefonctionnement des mécanismes économiques resteinconnu de la plupart de nos citoyens en raison de leurcomplexité. Par ailleurs, il existe généralement dans nospays des relais constitués parles associations profession-nelles, les syndicats ou les groupes d'intérêt qui onttendance à fonctionner à sens unique et à augmenter les

rigidités des mécanismes de la protection sociale. Cephénomène se retrouve dans tous les domaines.

Dans ces conditions, les gouvernements n'ont pasd'autre choix que d'expliquer inlassablement leurpolitique tant d'une façon directe que de manièreindirecte à travers les groupements professionnels afinque, le temps aidant, le message passe.

L'évolution des négociations entreprises au sein de laCEE depuis le sommet européen de Stuttgart en juin1983 illustre la difficulté de l'entreprise. Elle a en toutcas démontré qu'il est extrêmement difficile pour lesgouvernements de négocier suivant une forme globale.A ce stade, les différents problèmes abordés n'ont pasencore pu être fusionnés dans une négociationd'ensemble et dans les différents domaines examinés lasituation reste largement bloquée. Une des consé-quences de cet état de chose est que l'examen d'alterna-tives et la définition de politiques nouvelles ont jusqu'àprésent été largement sacrifiés et que la Communautécontinue à donner l'impression de se pencher sur sonpassé au lieu de se tourner vers l'avenir.

Pourtant ce n'est qu'à la condition de mettre en placeune coordination communautaire des politiques natio-nales dans les domaines de pointe que l'Europe pourrapleinement mettre à profit les effets positifs que l'onpeut encore attendre dans les années 80 de l'effet multi-plicateur de la dimension européenne.

A l'heure actuelle des efforts souvent parallèlesmobilisent en différents pays des moyens multiplespour arriver à un résultat proche ou identique. Biensouvent la taille des Etats européens et des marchésnationaux est trop réduite pour justifier l'ampleur d'uninvestissement jugé nécessaire dans un domaine donné.Or, dans certaines technologies un véritable épanouisse-ment n'est envisageable qu'à très large échelle.

Si donc les Etats européens choisissent de procéderen ordre dispersé, il est à craindre que l'impact de leursactions ne sera pas à la mesure de leurs efforts et qu'àdéfaut de pouvoir s'organiser ils auront renoncé à unrythme de croissance qui autrement eût été possible.

Les Etats européens auront-ils le courage de jouervéritablement la dimension européenne et accepteront-ils en fin de compte la coordination d'une instancecommunautaire? Ainsi que je l'ai déjà brièvementévoqué la Communauté européenne s'est consacrée cesdernières années essentiellement aux domaines d'acti-vités traditionnelles. L'intégration des marchés setraîne, le système monétaire européen piétine, lesmontants compensatoires monétaires mettent en causele marché commun agricole. L'enthousiasme etl'engagement qui caractérisaient la Communauté audébut des années soixante n'existent plus. L'élaneuropéen semble désormais quelque peu à bout desouffle.

Or, il me paraît évident que sans cet élan nous n'arri-verons pas à inverser un phénomène qui, depuis plu-sieurs années, caractérise les politiques des Etats-membres de la CEE.

Il se trouve que depuis un certain nombre d'années etsans doute depuis le début de la crise économiquemondiale les tendances au protectionnisme se font deplus en plus sentir. Dans la mesure où ce phénomène neserait qu'une réaction de défense, certes à courte vuemais néanmoins limitée à la protection provisoire de la

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politique commerciale traditionnelle, il ne serait pasvéritablement inquiétant. Sans doute faudrait-il leregretter et sans doute faudrait-il le combattre.

Toutefois le phénomène va au-delà d'une réactionconservatrice alors qu'il concerne non seulement lesbranches traditionnelles de l'économie mais surtout lesdomaines nouveaux.

Le secret le mieux gardé du monde est dorénavant lesecret industriel. Désormais les résultats de la rechercheet les recettes des nouvelles technologies sont extrême-ment bien protégés. S'il est légitime de veiller à laprotection des secrets de la recherche et de l'industrienationale il ne l'est plus du tout de fermer les frontières àl'importation de produits à haute technologie venant del'étranger. Le phénomène semble assez général. On lerencontre en effet tant aux Etats-Unis qu'au Japonqu'en France ou ailleurs en Europe. Les pouvoirspublics ne sont pas innocents à cet état de chose alorsque par le biais des adjudications publiques ils cau-tionnent souvent ces manoeuvres protectionnistes.Pour ma part, je voudrais stigmatiser de tels procédésdoublement pernicieux puisqu'ils empêchent la concur-rence de jouer et que, partant, ils freinent le progrèstechnique.

Il n'en reste pas moins que la plupart des gouverne-ments recourent à ces méthodes. Est-il concevable quedans une telle atmosphère de méfiance et de mesquine-rie un nouvel état d'esprit des Européens puisse voir lejour? Si les Européens ne réussissent pas à créer unvéritable marché intégré et cela aussi pour les activitésnouvelles nous ne pourrons pas échapper à une parcelli-sation progressive de ce que nous avons coutumed'appeler aujourd'hui encore le Marché Commun. Il estclair que cela ne signifie peut-être pas la fin de l'Europecommunautaire mais du moins la fin de son avenir.

La coincidence dans le temps du double phénomènede la rigidité dans les relations entre les partenairessociaux et du protectionnisme industriel crée ainsi enEurope une situation figée et sans doute dangereuse.

Il ne sert à rien d'être alarmiste et je ne pense pas quel'on doive craindre qu'un quelconque pays succombe àla tentation d'instaurer une autarcie complète. Toute-fois, point n'est besoin d'aller jusque là pour créer desproblèmes. Le simple fait que désormais l'évolutionparallèle selon un rythme comparable des différenteséconomies européennes est rompue, suffit en lui-mêmeà remettre en question l'avenir communautaire del'Europe. Nous en arrivons à ce que Michel Albertdésigne d'une image frappante, la non-Europe.

Car que risque-t-il de se passer? Je n'aimerais pas melancer dans le domaine des conjectures mais je croispouvoir dire que la réussite plus ou moins grande desdifférents pays à surmonter les problèmes que leurcause la mutation économique ne manquera pasd'accentuer les distorsions existant d'ores et déjà entreeux.

Il est à craindre que les pays européens ne saurontsurmonter avec le même talent et le même succès lesdifficultés qui les attendent. L'enseignement que nouspouvons tirer des tentatives de projets communs effec-tués en France, en RFA, en Italie, en Grande-Bretagne,n'incite pas à l'optimisme. Il est à craindre que l'échec

de telles tentatives solidaires ne suscite un phénomènede reflux qui se manifestera au détriment du phéno-mène d'intégration communautaire.

Cet état de choses, ces inquiétudes ont suscité denombreuses analyses de l'avenir, plus ou moins com-plètes, plus ou moins pessimistes. Parmi les hypothèsesqui reviennent sous la plume des différents prophètesou journalistes il en est une particulièrement intéres-sante mais aussi préoccupante développée récemmentpar Bruce Nussbaum. Elle comprend notamment deuxéléments.

1. Il serait un pays en Europe qui aurait au moins lesmoyens technologiques d'aller de l'avant. Il s'agit enl'occurrence de la France qui dispose grâce à un marchénational relativement important et à une centralisationpoussée dans le domaine de la recherche des moyenssensiblement plus élevés et sans doute mieux dirigésque les autres pays européens.

2. La RFA qui à l'heure actuelle constitue le géantéconomique européen, ne serait plus à même à l'avenirde concentrer suffisamment son attention sur la néces-sité de reconstruire son économie en raison de la pré-pondérance de l'industrie lourde traditionnelle, desrigidités sociales, de la distraction causée par un certainnombre de phénomènes de sociétés (on pourrait citer lepacifisme, le squatérisme, l'action des écologistes) ainsique de la décentralisation traditionnelle de l'Alle-magne. A cela s'ajoute l'éternel souci d'une majoritéd'Allemands de se rapprocher progressivement de laRépublique Démocratique Allemande de même que lefait que l'Union Soviétique reste sans doute pour uncertain nombre d'années encore un excellent acheteurpour les productions de l'Allemagne d'aujourd'hui.

Nous pourrions, certes, essayer d'analyser mainte-nant à tour de rôle les chances des différents pays euro-péens. Ce serait cependant un exercice fastidieux etdont l'intérêt ne serait certainement pas à la hauteur dela comparaison esquissée entre la France et l'Alle-magne. En effet, la relation entre ces deux pays est sansdoute la seule qui soit véritablement déterminante pourl'avenir européen. Tel fut déjà le cas au cours de lalongue période historique qui a été caractérisée par unerivalité parfois féroce entre ces deux pays, tel fut encorele cas au lendemain de la 2e guerre mondiale où grâce àl'oeuvre d'hommes issus de régions frontalières tels queKonrad Adenauer, Robert Schuman, pour ne citer queceux-là, l'entente fut réalisée entre les deux pays sous lesigle du rapprochement franco-allemand.

Cette entente a consacré le rattachement de la RFAaux autres pays européens. Ce rattachement a permisune évolution paisible et prospère en Europe depuisplus d'une trentaine d'années. Nous ne devons cepen-dant pas méconnaître le fait que cette évolution ne sepoursuit pas de façon particulièrement harmonieuse(bien que l'unité de vues entre le Chancelier Kohi et lePrésident Mitterrand en matière de sécurité puissefournir à l'amitié franco-allemande une base aussi solideque la convergence de vues du Chancelier Schmidt et duPrésident Giscard d'Estaing en matière économique).

L'échéance du Conseil Européen d'Athènes consti-tue un rendez-vous important, il doit non seulementnous fournir l'occasion de réorganiser la communautéexistante, ce qui constitue certes l'objectif officiel et

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primordial de la réunion mais doit encore - et c'est plusimportant - nous apporter la preuve qu'il est possibled'envisager un avenir pour une Europe véritablementcommunautaire.

De manière plus concrète il s'agira de bien com-prendre que l'enjeu de la réunion d'Athènes ne doit pasprincipalement consister dans la mise au point d'unaccord technique sur la refonte des structures desCommunautés actuelles, qui, nous l'avons vu, se con-tente essentiellement d'administrer le passé, mais doitessentiellement nous permettre de nous rendre comptequ'il sera possible d'assurer un avenir à la Communauté.

Il s'agira ainsi de manifester la détermination euro-péenne, de rééquilibrer profondément les institutionsactuelles pour allouer désormais des moyens, plusélevés que par le passé, au domaine de la recherche, del'innovation et sans doute également à des programmesen matière d'enseignement spécialisé dans lesdomaines de pointe.

J'ai déjà eu l'occasion de vous indiquer mes craintesque jusqu'ici les négociations sur le mandat de Stuttgartne semblent pas aller dans cette direction. La questionsera à nouveau posée à Athènes. J'espère sincèrementque de ce point de vue, Athènes ne soit pas une décep-tion pour tous les Européens convaincus.

Quelle serait la situation si cette hypothèse optimistene devait pas se réaliser?

Deux scénarios sont possibles, l'un modérémentl'autre franchement pessimiste. Dans une premièrehypothèse l'on pourrait concevoir que la Communautése mettrait finalement d'accord non pas sur de nouvellespolitiques, mais sur un rééquilibrage à terme de ce quiexiste actuellement. Il s'agirait dans cette hypothèse dene pas augmenter les ressources propres de freiner danstoute la mesure du possible les dépenses agricoles etd'allouer les quelques moyens qui pourraient ainsi êtredégagés à des programmes sociaux ou régionaux quiseraient à inscrire dans un programme d'ensemble de laCommunauté européenne. La Communauté ne serait,dans ce cas, pas menacée dans son existence, mais elleaurait implicitement admis qu'elle ne croit plus à sonpropre développement. Sur le plan de l'équilibre inté-rieur de l'Europe, cette solution aurait pour consé-quence que celui-ci ne changerait pas dans le courtterme et que, théoriquement du moins, la relationétroite entre la France et l'Allemagne ne changerait pasde nature étant donné que les structures et les procé-dures resteraient en place et continueraient à êtreutilisées.

Dans une deuxième hypothèse la Communautéaprès avoir fait elle-même le constat de son incapaciténon seulement à aller de l'avant mais encore de réorga-niser ce qui existe, serait ensuite la victime du désinté-ressement progressif de plus en plus important desdifférents Etats-membres qui la composent. Ceux-cipourraient être tentés de l'orienter vers une renationali-sation des politiques communautaires existantes et au-delà ne seraient plus enclins à considérer, ne serait-ceque comme hypothèse, une collaboration véritablementintégrée et communautaire dans les domaines d'actionnouveaux. Dans cette hypothèse il est fort à craindreque les réflexes communautaires qui d'ores et déjàsemblent en régression ne disparaissent complètementpour faire place à des positions strictement nationales. Il

y a quelques jours un vieux routinier des mécanismescommunautaires m'a décrit la réalité européenned'aujourd'hui par l'image suivante: il y a dix ans lesministres rentrant d'une réunion des Dix déclaraient àl'intention des journalistes: «L'accord qui vient de sefaire au niveau européen est dû au fait qu'à un certainmoment j'ai personnellement lancé la proposition decompromis qui a été acceptée et qui a permis à la négo-ciation d'aboutir.» De nos jours les ministres qui ren-trent d'une réunion communautaire auraient plutôttendance à faire le commentaire suivant: «Je viens desauver la situation. Je n'ai rien lâché à nos partenairescommunautaires. Heureusement l'accord a ainsi pu êtreévité.» Certes l'image est déformée et caricaturale, maismalheureusement il y a un fond de vérité dans ce constatdésabusé. Dans la mesure où il apparaît que la Commu-nauté n'abordera guère de nouveaux domaines, cet étatd'esprit sera de plus en plus fréquent et sans doute dansl'ordre des choses.

Les conséquences sur l'équilibre intra-européen sontrelativement faciles à imaginer. En effet, les procédureset les mécanismes se réduiront progressivement à leurenveloppe formelle, le marché commun deviendra zonede libre échange, et, en ce qui concerne la relation,fondamentale pour l'Europe, entre la France et l'Alle-magne, il est à prévoir que la France se renfermera deplus en plus sur elle-même alors que la RFA dévelop-pera progressivement ses relations avec la RDA. Aterme, l'équilibre institué au début des années 50 enEurope n'existera peut-être plus et il pourra s'ensuivreune situation qui aura des répercussions au-delà de laconstruction communautaire également sur la cohésionde l'Alliance atlantique.

Ces deux hypothèses, l'une modérément optimisteou pessimiste selon le cas, l'autre franchement pessi-miste nous démontrent donc à quel point il est essentield'orienter les débats au sommet au cours de la réunion àAthènes et sans doute au cours des mois qui suivrontvers une troisième hypothèse, optimiste celle-là, quiserait la réaction positive et volontariste de l'Europe envue d'organiser son propre avenir.

Il y à déjà eu au cours de l'histoire de la constructioncommunautaire des moments où les choix essentielsont été posés, ceci notamment à la suite d'une périodede découragement profond. Souvent les historiensévoquent l'époque des années 50 où, après l'échec de laCommunauté européenne de défense et à la suite durevers subi par l'Europe dans la crise de Suez, les gou-vernements ont cependant été à même de se ressaisirpour tomber d'accord sur un projet de société à portéerévolutionnaire. La conférence de Messine a constituéune date dans l'histoire de l'Europe.

Actuellement l'Europe se trouve à nouveau confron-tée à un certain nombre de choix. Réussira-t-elle latroisième révolution industrielle ou au contraire lais-sera-t-elle courir les choses comme nous le vivonsactuellement? Acceptera-t-elle donc la suprématieaméricaine et nippone et de même l'infériorité et sansdoute aussi l'appauvrissement européen pour l'avenir?

En tant que membre d'un gouvernement je ne veuxpas éluder mes responsabilités. Je n'hésiterai donc pas àvous faire part de mon appréciation personnelle duproblème. Responsable politique, je conçois mon action

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en termes constructifs et positifs. Il est donc inconce-vable à mon sens que les gouvernements abordent ladiscussion sans la ferme volonté d'aboutir. De ce faitnous pouvons nous attendre de leur part à des prises deposition relativement optimistes. Ces communicationsne sont pas à considérer comme de simples voeux pieux,voir comme faisant partie d'un traitement psycholo-gique selon la méthode Coué.

Ma ferme conviction est que la détermination desgouvernements européens sur les principes ne fait pasde doute. Je ne suis pas convaincue que cette détermina-tion couvre le détail des politiques particulières et desarrangements techniques. En effet, il est impossibled'ignorer le fait que les gouvernements des Etats démo-cratiques ne peuvent faire que la politique que leurscitoyens exigent de leur part. Un homme d'Etat doitexpliquer l'intérêt large et à long terme de l'Etat à sonopinion publique et les gouvernements des Etats-membres de l'Europe communautaire ne faillissent pasà cette tâche.

Cependant ils ne peuvent aller à rencontre de lavolonté majoritaire de leurs populations exprimée demanière démocratique. L'épreuve sera donc non passeulement constituée par le Conseil européend'Athènes et peut-être les suivants mais par les pro-chaines élections des membres du Parlement européenen juin 1984 lors desquelles les citoyens des Etats-membres de la Communauté européenne auront lemoyen et la possibilité de faire connaître leurs visionsd'avenir.

Chers amis,Peut-être vous souviendrez-vous que le titre de mon

exposé aujourd'hui est le Luxembourg dans l'Europecommunautaire des années 80 et vous me le rappellerez.Il semblerait que j'ai un peu perdu de vue le cas de monpays dans cet exposé sur l'avenir européen. Il n'en estrien, son sort étant irrémédiablement lié à celui del'Europe. Mais j'ai maintenant l'intention d'examinerd'un peu plus près les choix qui s'offrent au Luxem-bourg dans cette situation que je viens de décrire.

Tout à l'heure j'ai déjà eu l'occasion d'attirer votreattention sur le fait que le Luxembourg est largementouvert sur l'étranger et qu'il ne peut bien vivre qu'enharmonie avec ses voisins. La marge de manoeuvre quiest celle du Gouvernement luxembourgeois, est en finde compte très étroite. Toute une série de choix lui sont,sinon imposés, du moins inspirés par des contingencesextérieures. C'est là une vérité peut-être difficile àreconnaître pour un ministre, mais néanmoins indé-niable et je pense qu'il n'y a pas de fausse honte à le direouvertement. Il serait en effet vain de la part d'un gou-vernement d'un pays de 350 000 habitants de prétendrepouvoir résoudre en solitaire les problèmes de la criseéconomique alors que des pays bien plus grands n'ontpu réussir à y trouver des solutions malgré tout leuracharnement.

Petit pays, pris entre les deux grands de l'Europe, leLuxembourg se doit de se préoccuper en premier lieu dela relation qui existe entre ces deux puissants voisins.Les perspectives de cette relation nous paraissentabsolument essentielles et nous sommes vivementattachés à la fois au maintien et à l'approfondissementdes relations entre la France et l'Allemagne et au main-

tien de l'ancrage de l'Allemagne à la Communautéeuropéenne et à l'Alliance atlantique.

La tendance au bilatérisme et à la parcellisation nepeut que nous causer de graves soucis. Dans l'envi-ronnement protectionniste qui est celui de l'Europe de1983, un petit pays comme le Luxembourg ne peut detoute façon subsister que s'il arrive à maintenir ouvertesles frontières avec ses pays voisins. Dans ces conditionsil a fait le choix d'avoir de bonnes relations avec tous sesvoisins et une relation privilégiée avec l'un de ses troispartenaires.

A la fin du Zollverein, le Luxembourg est, en 1922,devenu membre de l'Union économique belgo-luxem-bourgeoise. Cette union - indispensable conséquencedes événements de la fin de la première guerre mondialeet de la période de l'entre-deux-guerre - a fait sespreuves et tend à devenir de nouveau plus importante àla lumière des tendances centrifuges au sein de laCommunauté. Cela est d'autant plus vrai que l'évolu-tion de la Belgique, qui il y a peu de temps encore nemanquait pas d'inquiéter profondément l'ensemble dela nation luxembourgeoise, se trouve désormais enga-gée dans la bonne voie, celle de la reconvalescence etque le Luxembourg peut, sans pour autant devoirsacrifier ses intérêts essentiels, compter sur une évolu-tion parallèle des deux économies.

Au plan communautaire proprement dit mon pays atoujours mis l'accent sur l'importance et l'urgence dessolutions véritablement européennes. Eu égard à lasituation que j'ai esquissée tout à l'heure, une telleattitude est la seule possible alors que l'accentuation destendances centrifuges ne pourrait avoir que des réper-cussions négatives sur mon pays mais aussi sur l'Europe.

Il est donc évident que le Luxembourg veut croire etplace tous ses espoirs en une deuxième renaissance dusentiment européen qui naîtrait de la prise de cons-cience du blocage présent. Il est prêt, pour sa part, à fairel'effort qu'il convient pour arriver à des solutions cons-tructives et ouvertes sur l'avenir.

Quel serait en effet le sort du Luxembourg dans lesdeux autres hypothèses?

Les deux hypothèses auraient des conséquencescatastrophiques pour notre pays. Ceci vaut pour l'hypo-thèse dans laquelle la France et l'Allemagne pourraients'écarter lentement l'une de l'autre et a fortiori pour ladeuxième hypothèse, franchement pessimiste celle-làbasée sur la disparition du lien communautaire commedes liens franco-allemands et à laquelle je n'ose mêmepas penser. Dans cette dernière hypothèse tout rede-viendrait ouvert et à terme le problème de la sécuritéextérieure se trouverait à nouveau posé. Une tellehypothèse serait entièrement négative pour le Luxem-bourg et pour un certain nombre d'autres pays euro-péens qui quoique nettement plus grands que mon paysne manqueraient cependant pas de ressentir sévère-ment les effets d'un climat d'instabilité en Europe. Elleserait également, à mon avis, entièrement négative pourl'Europe dans son ensemble et pour le rôle que notrecontinent peut jouer, qu'il doit jouer, à l'avenir dans lemonde.

Le Gouvernement luxembourgeois, aussi limités sesmoyens soient-ils, n'épargnera pas ses efforts pour

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éviter qu'une telle éventualité ne se produise. Nonseulement il ne manquera pas d'attirer l'attentionchaque fois qu'il le jugera nécessaire sur les dangersd'une telle dérive, mais encore n'oubliera-t-il pas demiliter constamment contre le protectionnisme crois-sant. Non seulement parce qu'en tant que petit pays il sedoit de garder le contact avec l'évolution des méthodesde production et de la technologie moderne mais encoreparce qu'il importe que l'ensemble des Etats membresde la Communauté puissent participer à l'évolutiontechnologique et à l'ouverture de l'Europe vers les nou-velles productions pour renforcer ses structures etcontribuer ainsi au plan mondial, au maintien de laliberté des échanges et de l'ouverture des frontières.

Il va de soi qu'à l'avenir également le Luxembourgpréférera toujours dans toute la mesure du possible lessolutions multilatérales aux solutions bilatérales. Cettedétermination ne nous épargnera malheureusement pasla tâche de devoir défendre les intérêts du pays en tenantcompte des réalités concrètes de la vie économiqueinternationale.

En conclusion de cet exposé, qui à la veille d'uneimportante réunion européenne a pris peut-être uncaractère plus incantatoire qu'il n'eut été normalementmon propos, j'aimerais souligner que l'avenir duLuxembourg ne peut qu'être en Europe et que l'avenir

de l'Europe ne peut que résulter d'un effort commun. Ladimension européenne sera à l'avenir plus indispen-sable que jamais et je place mes espoirs dans l'intelli-gence à la fois des dirigeants et des majorités del'Europe pour que se fasse la prise de conscience indis-pensable basée sur le constat de la nécessité de placerles accents plus courageusement, en direction de l'ave-nir et sans regrets pour le passé.

L'Europe vivra-t-elle sa déchéance dans l'auto-suffi-sance ou choisira-t-elle plutôt de souffrir pour garantirson aisance de demain? Ma conclusion aujourd'hui estoptimiste, car je crois pouvoir attendre des Européensune réaction intelligente. Cependant nous ne devonspas oublier que l'histoire suit son cours et que si unmouvement politique peut diriger et gagner une cam-pagne électorale, les hommes politiques qui peuventprétendre avoir infléchi le cours de l'histoire ne sont paslégions. Chaque siècle en connaît quelques-uns disper-sés entre différents pays. L'Europe a heureusement pucompter sur de grands hommes d'Etat au cours destrente dernières années. Puissent les chefs d'Etat et deGouvernement participant au Conseil européend'Athènes se rendre compte qu'ils assument une tâchehistorique, qu'ils sont porteurs des espoirs de milliersd'Européens et que pour pouvoir y répondre il n'y aqu'une seule voie, ils doivent agir ensemble, ils doiventagir en tant qu'Européens!

Conférence du Forex Club Luxembourg consacrée auxmarchés de l'or

A l'occasion d'une conférence du Forex ClubLuxembourg consacrée aux marchés de l'or, MonsieurPierre Werner, Président du Gouvernement, a prononcéle 10 novembre 1983 un discours sur le rôle monétairede l'or. Nous reproduisons ci-après, le texte de ce dis-cours:

C'est un grand plaisir et un honneur pour moi que depouvoir m'adresser à un auditoire aussi nombreux etaussi distingué, réuni aujourd'hui pour cette conférencedu Forex Club Luxembourg consacrée aux marchés del'or. Quand il y a quelques années les autorités luxem-bourgeoises ont pris, en étroite collaboration avec laprofession bancaire, des mesures concrètes, tant sur leplan juridique que sur le plan fiscal, pour permettre etfavoriser la création d'un véritable marché de l'or àLuxembourg, personne n'a osé espérer que le succès decette initiative serait aussi prononcé et aussi rapide qu'ilne l'a été en réalité.

Le développement des opérations sur or, sous lesformes les plus diverses, constitue un élément fonda-mental de la politique de diversification des activitésbancaires, poursuivie par nos établissements et active-ment soutenue par le Gouvernement. En quelquesannées la place financière a fait des progrès remar-quables pour se départir pas à pas de son image de«booking centre» utilisé pour la comptabilisation

d'eurocrédits, et pour devenir de plus en plus une placefinancière à part entière, aux contacts directs et intensifsavec une clientèle croissante, reposant sur différentspiliers qui lui donnent désormais une stabilité accrue etqui témoignent d'une maturité plus grande.

En misant résolument sur l'or comme support d'unenouvelle activité intéressante, les banquiers et lesautorités ont eu pleinement conscience des risques quecomporte la perspective de fluctuations importantes,non seulement du prix du métal jaune, mais égalementdu volume des transactions. Nul ne doute que desmoments d'une activité débordante alterneront avecdes périodes de dépression générale des échanges, maisles perspectives d'ensemble ont été considérées commeintéressantes au point de justifier les investissementsnécessaires sur le plan des immobilisations matériellesrequises et sur celui de la formation d'un personnelqualifié. Aussi le Commissariat au Contrôle des Ban-ques a-t-il dénombré dès 1981 plus de 50 établissementsbancaires engagés dans le commerce de l'or.

J'ai eu l'occasion, il y a moins de quinze jours, lorsd'une conférence qu'on m'avait demandé de donner surle thème de l'évolution et des perspectives du marché del'or sur la place financière de Luxembourg, de soulignermon attachement et l'attachement du Gouvernementluxembourgeois à la défense de la place financière en

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général et du marché de l'or à Luxembourg en particu-lier.

Vous n'ignorez pas que l'exemption des opérationssur or de placement de la taxe sur la valeur ajoutéeconstitue une dérogation temporaire au régime normalde la législation communautaire et peut dès lors êtreremise en discussion périodiquement. J'estime pour mapart que la directive de 1977 ne constitue pas une solu-tion très heureuse, étant donné que l'or à usage non-industriel et non-artisanal n'est pas un bien de consom-mation et d'usage et aurait dû être laissé en dehors duchamp d'application de la TVA, au même titre que lesvaleurs mobilières ou les monnaies. Tant qu'il n'existepas d'harmonisation des taux de TVA dans la Commu-nauté, il ne me semble pas urgent ou opportun d'envisa-ger une abolition de notre exemption, d'autant plus quetoute harmonisation des législations notamment fis-cales au sein de la CEE doit en premier lieu éviter deprovoquer des migrations de capitaux qui se feraient audétriment de l'ensemble des pays de la Communauté.

*

Vous aurez l'occasion, dans quelques instants,d'entendre les explications d'éminents experts sur lesdéveloppements récents et sur les prévisions du futur,sous l'angle des différentes places, comme Londres,Zurich et Luxembourg, et en tenant compte de nou-veaux instruments et de nouvelles techniques. Il y a unbon mois, j'ai lu dans le Financial Times à propos duprix de l'or:

«Present forecasts range between $ 250 to $ 2000 anounce within the next few years.» En lisant cela j'ai unpeu envié les professionnels du marché de l'or, puisquedans ma profession à moi les prévisions financières pourl'exercice à venir doivent être considérablement plusprécises.

*Quand on voit autour de la table tant de hauts-prêtres

du culte de l'or, on hésite, en tant que laïc, à contribuer àson tour au débat. Permettez-moi toutefois de vouslivrer quelques idées au sujet du rôle monétaire de l'or,qui me fascine depuis très longtemps.

A cet égard nous avons pu assister au cours desquinze dernières années à des mutations profondes. Enanalysant le résultat de ces développements, nousfaisons la constatation que si l'éclat de l'or en tantqu'instrument financier provient, dans une proportionnon négligeable, de son passé monétaire, les efforts etles mesures pour le démonétiser en ont paradoxalementencore considérablement rehaussé l'attrait.

Si son rôle monétaire est vieux de plusieurs millé-naires, le métal jaune a rivalisé et cohabité longtempsavec l'argent avant de supplanter celui-ci définitivementau cours du siècle dernier. Le système de l'étalon-or quis'est installé vers 1850 a connu des hauts et des bas etdes éclipses passagères et a été modifié à différentesreprises pour se maintenir jusqu'il y a quinze ans. Lesaccords de Bretton Woods ont codifié le statut de l'or enfaisant de lui le premier instrument de réserve, alors quele dollar pleinement convertible en or devenait leprincipal moyen de payement international. Les paritésde toutes les monnaies étant à exprimer en une certainequantité d'or, le système comportait implicitement unprix officiel de l'or. La rigidité des taux de change a créédes tensions vers la fin des années 1960 et a fait éclater lesystème pour nous plonger dans un régime de changesflottants.

L'offre et la demande pour l'or en tant qu'actif financiermettaient depuis longtemps en danger le prix officiel. Lepool de l'or formé en 1961 par les Etats-Unis et sept payseuropéens pour intervenir sur le marché a cessé ses opéra-tions le 15 mars 1968, et quinze jours plus tard un marchélibre de l'or s'est organisé à Londres. La convertibilitécomplète du dollar était mise en brèche et a été définitive-ment suspendue par le Président Nixon le 15 août 1971.

Tandis que les taux de changes flottaient, on multipliaitles conférences consacrées au système monétaire, et lesaccords de la Jamaïque de 1976 ont décrété l'abolition duprix officiel de l'or, la mise au ban des opérations sur orentre banques centrales à des prix autres que ceux dérivésdu marché, l'interdiction des parités définies en or, leremplacement du métal jaune au centre du système par lesDroits de Tirage Spéciaux, ce fameux or-papier inventé en1969, et enfin la restitution aux Etats-membres d'unepartie de l'or du Fonds Monétaire International et la venteaux enchères d'une autre partie du même stock.

Détrôné de sa royauté monétaire, l'or - grâce notam-ment à son prix libéré - a pu se développer comme actiffinancier. Mais il est bien loin d'être complètement etdéfinitivement privé de toute importance monétaire.Les banques centrales continuent à détenir 950 millionsd'onces, accordant à l'or une place de choix dans leursréserves de change. Si elles ne sont guère enclines à s'endésaisir, elles ont trouvé des moyens pour le mobiliseren cas de besoin, par des mises en gage ou par des opéra-tions swap. Dois-je rappeler que la quantité globale desécus officiels que les banques centrales de la commu-nauté détiennent auprès du FECOM varie régulière-ment en fonction du prix de marché de l'or, étant donnéque la création de ces écus résulte d'opérations swapimpliquant des dépôts d'or auprès du FECOM?

Nos amis américains, après avoir arrêté leurs ventesaux enchères de l'or du trésor, ont commencé à réfléchirsur l'avenir de l'or dans le système monétaire. L'annéedernière la US Gold Commission a formulé un certainnombre de recommandations qui détermineront sansdoute la position officielle des Etats-Unis pour lesannées à venir. Les conclusions en question sont lessuivantes: II ne faut pas accorder à l'or une nouvellefonction centrale au sein du système monétaire, natio-nal et international, il ne faut pas retourner à des taux dechange fixes, le Trésor américain ne doit plus vendred'or mais doit conserver son stock pour des cas de forcemajeure, les Etats-Unis doivent s'opposer à de nou-velles distributions du stock d'or du Fonds MonétaireInternational et ils doivent étudier le moyen de rééva-luer formellement leur réserve d'or à un prix inspiré dumarché. Bref: les Américains ne veulent pas confier denouvelles missions officielles à l'or, qui réduiraient lerôle-clef du dollar, mais ils ne sont pas non plus prêts àdémanteler l'or des fonctions qu'il a su conserver.

Il me semble dès lors clair que les millénaires pen-dant lesquels l'homme a vu dans l'or sa seule monnaieou une de ses principales monnaies ne s'oublieront pasdu jour au lendemain. Un retour à un quelconqueétalon-or est hautement improbable, mais l'or ne ces-sera à mon avis de garder voire de développer certainesfonctions dans le système monétaire, surtout en tantqu'instrument de réserve des banques centrales. Cesperspectives sont peut-être de nature à réconforter ceuxqui se questionnent, comme vous, sur l'avenir de l'orcomme actif financier, comme instrument de l'épargneet comme objet de spéculation.

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Journée des Droits de l'HommeA l'occasion du 35e anniversaire de la Déclaration

Universelle des Droits de l'Homme par les NationsUnies, un message de Monsieur Pierre Werner, Pré-sident du Gouvernement, a été diffusé dans la soirée du10 décembre 1983 au cours des émissions en langueluxembourgeoise de Radio Luxembourg. Nous repro-duisons ci-après le texte de ce message.

Haut feiere mer weltweit den Dag vun de Mënsche-rechter, a gleichzeiteg de 35sten Joresdag vun der«Déclaration Universelle des Droits de l'Homme». Desfeierlech Erklärung iwert d'Mënscherechter ass den 10.Dezember 1948 vun der Generalversammlung vun derUNO ugeholl gin. Bei der Ofstömmong gouf et 48 Jo-Stëmmen, dorenner och déi vu Letzeburg, an 8 Entha-longen, virun allem déi vun den osteuropäische Länner.Schons d'Charta vun de Vereente Natiounen vum 24.Oktober 1945 bezeechent als eent vun den Objektivervun der UNO de Respekt vun de Mënscherechter a vunde Grondfreihéten fir ail Leit, ouni Ennerschéd vun derRass, dem Geschlecht, der Sprach an der Relioun. Firdesem Ziel gerecht ze ginn, huet d'Organisatioun schokurz no hirer Grennong beschloss, eng Mënscherechts-Charta auszeschaffen, déi sech zesumme setzt: ausengerseits enger feierlecher Erklärung mat de groussePrinzipien vun de Mënscherechter, an aanererseitsengem Vertragswierk mat völkerrechtlicher Verbind-lichkeet fir déi Staaten déi et ratifizéieren.

D'Menscherechtserklärong vun 1948 beschränktsech démno op déi allgemeng Grondprinzipien, déi analler Welt fir all Mensche gelle sollen. Si huet an devergangene 35 Joer ouni Zweifel eng grouss moraleschAusstrâlong kannt, an si huet zu sou muncher Verbesse-rung an de Verfassungen, de Gesetzer an den anereBestëmmongen vu ville Länner beigedroen. Mä si huetleider net dee juristesch verbindliche Charakter, de géiferlaben, sech bei Gericht wirksam ob si ze beruffen. Anesou musse mer feststellen, datt d'Prinzipien vun derMenscherechtserklärong och haut nach laang netiwerall ganz respektéiert gin. A mir hu villfach erlieft,datt an de vergangene 35 Joer an esou muenchem Landbestehend Rechter a Fräiheten erem ofgeschâft gin sin,trotz der Menscherechtserklärung.

No der Proklamatioun vun der «Declaration Univer-selle» huet d'UNO sech dru ginn déi allgemeng Prinzi-pien ëmzesetzen a Vertragstexter mat klore juristischeVerflichtongen fir déi eenzel Länner. Zwé Pakten an eeProtokoll goufen ausgeschafft, an de 16. Dezember 1966könnt d'Generalversammlong vun de Vereente Natiou-nen déi Texter unhuelen. 1976 sin déi zwé Pakten aKraft getrueden nodeem de Minimum vun Ratifika-tioune erfollecht woren. Mä och haut nach huet netemol d'Halschecht vun de Memberstaaten déi zwéPakte ratifizéiert. D'Menscherechtserklärong ass owernet nëmmen en Acquis, mä virun allem eng Verflich-tong.

Déi zwé Pakten betreffen deen een déi zivil an déipolitesch Rechter, deen aaneren déi wirtschaftlech,sozial a kulturell Rechter. All Land, daat de Pakt iwertdéi zivil a politesch Rechter ënnerzeechent, garantéiertsengen Awunner de gesetzleche Schutz geint grausam

an onmënschlech Behandlung, erkennt all Menschd'Recht zou op Liewe, Freihét, Sëcherhét vun derPersoun a Respekt vun sengem Privatliewen, verbittd'Sklaverei, garantéiert eng fair Gerichtsuerdnong aléisst keng willkürlech Verhaftung oder Détentioun zou.Gedanke-, Gewëssens- a Reliounsfreiheet mussegesechert si, grad ewei d'frei Menungsäusserong,d'Recht op fridlecht Versammelen, d'Auswanderen and'Recht sech zu Verénegongen zesummen ze schléis-sen. De Pakt iwert déi wirtschaftlech, sozial a kulturellRechter verflicht déi eenzel Länner derzou d'Liewens-bedingongen vun der Bevölkerung ze begönschtegen,an en erkennt d'Recht un vun all Persoun op Arbecht,gerechte Loun, sozial Secherheet, e genügende Lie-wensstandart, Gesondheet a Schoulbildong. D'Lännererkennen ausserdem all Persoun d'Recht zou, engGewerkschaft ze grënnen oder frei enger Gewerkschafthirer Wiel beizetrieden.

Mir duerfe menger Ménong no awer d'Mënscherech-ter nët ausschliesslech aus der Sicht vun den Texter vunde Vereente Natiounen betruechten. An Europa si mërop muenchem Plang méi weit gaang mat der Europäis-cher Konventioun iwert d'Mënscherechter an d'Gron-freiheeten, déi bei ons durch d'Gesetz vum 29. August1953 gutgeheescht gin ass. Si ass tëschen de Länner vumConseil de l'Europe ofgeschloss gin an si erlabt esou-gour dem Enzelnen bei der Cour vun de Mënscherech-ter zu Stroosburg Klo ze erhiewen. Am Kontext vun deMënscherechter kënnt een och nët derlaanscht, deSchlussakt vun der Konferenz vun Helsinki vum 1.August 1975 ze erwähnen, an deem Europäesch Länneraus Ost a West präzis Verflichtongen agange sinn, déiawer trotzdem an de kommunistesche Länner kaumnennenswert Verbesserongen a Bezug op d'Mënsche-rechter bruecht hunn.

Wa vun Mënscherechter Rieds ass, dann denke meran éischter Linn dorun datt an enger Majoritéit vun deStaate vun der Welt um politische Plang guer keng oderganz wéineg demokratesch Verhältnesser bestin, an datverschidde vun deene schlëmmste Verstéiss géintd'Mënscherechter vun de jeweilige Machthaber ausgin,vun der Uewerschicht déi si vertrieden, vun den Een-heetsparteien an de Militärjuntaen. Mir mussen urnDag vun de Mënscherechter un déi Zoustänn erënne-ren, mä leider kenne mir an all déi freihétlech Natiou-nen nëtt vun engem Dag op deen aaneren dëss Skanda-ler aus der Welt schaafen. Meng Unerkennung a meinEncouragement geet op alle Fall un all déi Organisatiou-nen bei ons, déi sech weltweit oder an bestëmmteLänner fir d'Mënscherechter asetzen, d'Verstéissdergéint uprangen oder humanitär wirken.

Ech wollt awer op dëser Plaats virdrun warnen, an deVerstéiss géint Mënscherechter nëmmen eng Saach vupolitischen Autoritéite, vu Militär an Terroristen zegesin. All Mëssuechtong vun de Gesetzer déi jo do sinfir d'Rechter vum Enzelnen a vun der Allgemenghét zegarantéiren kann domatt zu enger Mëssuechtong vun deRechter vum Mattmënsch ginn. D'Recht op Liewen, opGesondheet an op Eegentom gëtt nët nueren gebrachvun de Mierder an den Déif, mä och vun deem, dee secham Verkéier rücksichtslos opféiert, deen ouni Noutwen-

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degkeet d'Emwelt verschmotzt oder seng Fliehten alsStaatsbierger verkennt.

Dir Dammen an dir Hären, grad iwert deen Aspektvun der Fro ass et derwäert, émoi nozedënken.

An nach eng lescht Iwerléong. Den Artikel 23 vunder Mënscherechtskonventioun betount d'Recht opArbecht an op Schutz geint de Chômage. Dat verflichtonse Staat derzou, sei Méichlechst ze machen fir neiArbechtsplatzen ze schaafen oder ze verschaafen, and'Härten vum Chômage ze milderen. Mä implizeiertdaat Recht op Arbecht net och vun der Säit vun deBetraffenen eng Verflichtong, fir ee Beruff zu leieren, firsech ëmschoulen ze lossen, fir eng gewëss Mobiliteit zeweisen? All Rechter implizéieren Fliehten. Wann echdaat Beispill vum Recht op Arbecht fir jiddereen uféie-

ren, dann ass et awer virun allein fir drop hinzeweisendatt et do ee Menscherecht gett, dat och bei ons amLand enner Emstänn an der Zoukonft nach méi mena-céiert ass. Sech fir d'Mënscherechter asetzen bedeit alsobei ons vleicht an éischter Linn dat mir déi néidegSolidariteit opbrengen, déi et erlabt der nächster Gene-ratioun hirt Recht op Arbecht ze secheren.

Léif Nolauschterinnen a Nolauschterer, um Dag vunde Mënscherechter denke mer un Polen an un Afganis-tan, un de Libanon an un Nordirland, un Zentral- aSüdamerika, un Afrika an un Asien, mä vergiesse mernëtt och émoi un d'Rechter vun onse Mattmönschen heiam Land ze denken, an un de Respekt vun dese Rechteram dagdeegleche Liewen.

L'endettement international et ses répercussions sur lesystème bancaire.

Les 1er et 2 décembre 1983 ont eu lieu à Luxembourgles Journées d'Etudes Financières organisées parl'Institut Universitaire International de Luxembourg.Lors de la séance d'ouverture de ces Journées d'étudesbancaires consacrées cette année-ci à l'endettementinternational et ses répercussions sur le système ban-caire, un discours a été prononcé par Monsieur PierreWerner, Président du Gouvernement. Nous reprodui-sons ci-après le texte de ce discours:

C'est un privilège et un grand plaisir pour moi depouvoir, une fois de plus, souhaiter la bienvenue à unauditoire aussi compétent et aussi nombreux, venuassister à nos Journées d'Etudes Financières organiséesannuellement par l'Institut Universitaire Internationalde Luxembourg. La 14e édition de ces journées estconsacrée, comme celles qui l'on précédée, à un thèmed'une actualité brûlante, l'endettement international etses répercussions sur la santé de notre système bancaire.

Les éminents spécialistes qui ont pu être engagéspour les exposés du colloque, et les nombreux hommesdu métier qui se trouvent dans l'auditoire représententune garantie pour le succès de cette rencontre qui vouspermettra de faire le point sur la question.

Il revient à Monsieur ROBICHEK du Fonds Moné-taire International d'introduire le sujet dans quelquesinstants. Pour ma partje voudrais me limiter à quelquesobservations d'ordre général.

En premier lieu je voudrais souligner l'évolutionconsidérable dans la perception des marchés internatio-naux des capitaux et des monnaies. Il y a dix ans, leseuromarchés se trouvaient au banc des accusés. Lesautorités gouvernementales de certains pays et diffé-rentes banques centrales les représentaient et les consi-déraient comme un phénomène hautement regrettable,qu'il fallait exterminer si possible et qu'il fallait aumoins freiner et faire reculer. A cette époque on n'auraitpu imaginer qu'un jour des voix officielles mettent engarde les banques contre un retrait rapide de ce marché.

Depuis lors, les euromarchés sont certes restés unobjet de souci particulier pour les autorités de surveil-lance bancaire, mais leurs indéniables mérites dans lerecyclage des pétrodollars et dans le maintien du com-merce international à un niveau élevé sont aujourd'huireconnus par tous. Leur nécessité étant admise, leseuromarchés sont devenus dignes du soutien public.Ces dernières années nous avons assisté à un grandeffort pour maintenir le bon fonctionnement des mar-chés internationaux, un effort qui a englobé les débi-teurs et les créanciers, les banques commerciales et lesbanques centrales, les Gouvernements et les orga-nismes internationaux comme le Fonds Monétaire et laBanque des Règlements Internationaux. Si cette com-plicité générale ne s'était pas réalisée, l'on ne poseraitprobablement plus la question que les organisateurs dece colloque ont choisie, le système ayant craqué. Lecomportement responsable de tous les concernés, quicontraste tellement avec tout ce qu'on a vu au cours desannées 1930, est en revanche une source de réconfortvoire d'optimisme.

Pour juger de la situation, il faut essayer de la com-prendre dans toute sa complexité, et il ne faut pas verserdans la facilité, pour trouver des causes simplistes, pourchercher des coupables auxquels il faudrait, au fond,faire payer la note. Certains ne voient que ces banquiersqui auraient accordé des crédits trop abondants;d'autres ne voient que le manque de discipline budgé-taire et économique dans les pays touchés. La réalitén'est-elle pas plus nuancée?

L'endettement excessif des pays en voie de déve-loppement a de nombreuses origines. La premièrehausse du prix du pétrole a aggravé le déficit extérieurde ces pays, qui a quadruplé de 1973 à 1975. Le recyclagedes pétrodollars par le système bancaire a fonctionnéadmirablement, et les économies occidentales pou-vaient continuer à exporter vers les pays en développe-ment. L'endettement de ceux-ci augmentait rapide-ment mais sans créer de grands problèmes, puisque d'uncôté les taux d'intérêts restaient modérés et que d'un

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autre côté le maintien du niveau de l'activité satisfaisantdans les pays industriels valait aux pays en voie dedéveloppement une expansion rapide de leurs exporta-tions, qui profitaient en plus d'une évolution favorabledes prix des matières premières.

Le second choc pétrolier a entraîné une dégradationrapide de la situation. L'ajustement des économies auxdonnées nouvelles n'était pas réalisé dans beaucoup depays en développement et leur endettement étaitmaintenant bien plus élevé. Les politiques d'assainisse-ment résolument anti-inflationnistes dans certains paysindustriels, notamment aux Etats-Unis, ont provoquéune hausse spectaculaire des taux d'intérêt et leurmaintien prolongé à un niveau très élevé, et par là unalourdissement des charges financières. Elles ont enmême temps réduit les recettes d'exportations endevises des pays en développement affectées par larécession mondiale. De surcroît les prix des matièrespremières se sont écroulés, détériorant en deux ans de50% environ les termes d'échange de ces pays.

En évoquant sommairement ces faits - que vousaurez l'occasion, aujourd'hui et demain, d'analyser bienplus en détail et de chiffrer avec précision - je ne veuxnullement expliquer les événements comme étant lefruit d'une quelconque fatalité, et je ne veux pas suggé-rer que des erreurs n'aient pas été commises de part etd'autre, chez les débiteurs et les créanciers, et au niveaude la communauté internationale. Au contraire, il fautabsolument tirer les leçons du passé, moins pour fixerles responsabilités que pour éviter la répétition desmêmes erreurs. La distance dans le temps est sans doutedéjà suffisante pour voir plus clair et pour se former unjugement préliminaire sur l'ensemble des causes et surles facteurs d'aggravation.

Quoi qu'il en soit, ces développements ont créé, dansde nombreux pays situés surtout dans le Tiers Monde eten Europe de l'Est, une situation préoccupante, et pourcertains d'entre eux, une incapacité d'assurer le servicede la dette externe, et donc la nécessité de procéder àune renégociation de la dette, ou du moins à un réamé-nagement des échéances ou à un moratoire temporaire.Des procédures ont été développées pour venir à boutde ces opérations complexes, coûteuses et fort longuesentre partenaires aux structures très différentes, autori-tés politiques, firmes commerciales et organismesinternationaux, ou encore pour aligner sur une positioncommune jusqu'à 1.400 établissements bancairesvenant des quatre coins du monde. Pour traiter desdettes contractées vis-à-vis d'instances officielles on amême ressuscité le Club de Paris créé, faut-il le rappe-ler, pour négocier le réaménagement de la dette exté-rieure argentine . . . en 1956.

Même s'il s'agit normalement de résoudre plus unproblème de liquidité qu'un problème de solvabilité, iln'en reste pas moins vrai que la situation comporte desrisques non négligeables pour les banques individuellesque pour le secteur bancaire dans son ensemble. Ilsuffit, pour s'en rendre compte, de comparer le volumedes fonds propres des établissements de crédit à celui deleurs engagements en faveur des continents concernés.

Les risques ne sont cependant pas seulement finan-ciers, et je voudrais vous inviter à ne pas vous braquertrop exclusivement sur les intérêts immédiats du ban-

quier, mais à tenir compte également des composanteséconomiques. Les possibilités d'exportation des paysindustriels vers les pays en développement se sontconsidérablement contractées suite aux impassesfinancières de ces pays, lesquelles sont ainsi devenuesun des facteurs de récession dans nos pays. Il y a ensuitel'aspect purement humain: un nombre non négligeabledes pays dont nous parlons, compte en effet parmi lesplus démunis dans le monde, et des mesures deredressement excessives mettraient en danger le mini-mum existentiel des populations en question. Il fautenfin tenir compte de la composante politique, touteaustérité outrancière pouvant devenir un élément dedéstabilisation du pays, de la région ou du continentconcerné. Il ne faut pas oublier, dans ce contexte, quel'on a affaire en principe à des Etats souverains; lacommunauté bancaire semble bien l'avoir comprispuisque l'approche choisie, celle du dialogue et desnégociations, vise à éviter les menaces d'une répudia-tion pure et simple de la dette par le débiteur et cellesd'un cartel des débiteurs.

Je ne veux nullement préjuger des conclusions aux-quelles vous aboutirez demain, mais il me semble àpremière vue que les professionnels sont divisés sur laportée réelle, au moment actuel, du risque encouru parles banques. Les uns estiment que le danger est nette-ment moins aigu qu'il ne l'a été il y a un an, et certainssemblent même suggérer qu'il suffise d'attendre pourvoir se résoudre la question. D'autres en revanchesoulignent que les remèdes utilisés visent dans une plusgrande mesure les symptômes de la maladie que sescauses profondes et ils s'attendent à ce que le mondedoive encore vivre avec une persistance du risque desurendettement durant des décennies.

Certes, nous assistons actuellement à une indéniablereprise de l'activité économique, qui est assez pronon-cée aux Etats-Unis, et dont on peut espérer qu'elles'accélère peu à peu dans les autres pays industriels etensuite dans les pays du Tiers-Monde.

Certes, un nombre croissant de jeunes nations,comme le Mexique et le Brésil, mais également laplupart des pays de l'Europe de l'Est, accusent d'ores etdéjà une nette amélioration de leur balance courante etprouvent par là qu'ils ont été capables d'opérer lesajustements qu'on leur a demandés.

Certes, les prix des matières premières se sont entre-temps stabilisés et raffermis, et l'on n'exclut pas pourdifférentes d'entre elles des hausses dans le procheavenir.

Certes, les taux d'intérêt, nominaux et réels, sontdescendus des sommets qu'ils avaient atteints, et lacharge financière des débiteurs s'en trouve allégée.

Mais fondamentalement, la dette de ces pays resteélevée et leurs structures économiques souvent trèsmonolithiques, tandis qu'au niveau mondial, l'avenirreste plein d'incertitudes. Avons-nous une assurancequelconque quant à l'évolution du niveau des intérêtsdans les mois et les années à venir? Le protectionnisme,si funeste pour les économiquement faibles, ne reste-t-ilpas une tentation à garder sous surveillance étroite?Depuis de longues semaines, la presse ne cesse-t-ellepas d'évoquer régulièrement l'importance du détroit

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d'Ormuz, nous rappelant ainsi les risques politiques quihypothèquent l'approvisionnement en énergie et par là,entre autres, le coût des importations des pays en voie dedéveloppement? Mais tous ces risques-là auraient desconséquences non moins funestes sur nos économieseuropéennes, et sur les crédits bancaires accordés à nosentreprises et nos ménages!

Le sujet qui vous réunit aujourd'hui et demain estloin d'être un thème académique et théorique. Vousavez devant vous un colloque instructif et une discus-sion passionnante. Je vous souhaite un bon travail, et àtoutes celles et tous ceux venus de l'étranger, je souhaiteencore un agréable séjour à Luxembourg et un bonretour dans leur pays de résidence.

Accents de la politique gouvernementale en matière d'emploi

Le chômage n'a certes pas adopté dans notre pays desdimensions dramatiques. Toujours est-il qu'à l'heureactuelle plus de 2.600 personnes se trouvent à larecherche d'un emploi dont la moitié constituée par desjeunes âgés de moins de 25 ans.

Outre les souffrances humaines engendrées par lechômage, les coûts indirects qui en résultent pourl'économie sous la forme d'un manque à produire sontconsidérables. Les dépenses sociales liées à la montéedu chômage et du sous-emploi constituent une lourdecharge grevant la collectivité nationale.

Le chômage constitue une lourde menace égalementpour nos institutions et pour la cohésion du corps social.

Aussi la politique de l'emploi se trouve-t-elle aucentre des préoccupations du Gouvernement.

Notre société, secouée par les deux chocs pétrolierssuccessifs, se trouve en proie à une crise de mutationprofonde de son appareil productif. Les secteurs tradi-tionnels tel celui de la sidérurgie se trouvent en régres-sion, d'autres secteurs connaissant des difficultés.

Le chômage n'est pas acceptable pour notre société etconstitue un défi à la fois économique et social lancé ànos institutions démocratiques.

Tout d'abord il est impératif de jeter les bases d'unecroissance plus riche en emplois.

Il faut résolument réorienter notre appareil productifvers des secteurs d'avenir porteurs d'emplois.

Il faut ensuite que notre politique de l'emploi setourne vers l'avenir en s'associant étroitement auxprofondes mutations de notre appareil productif.

L'adaptation de la formation à la transformation desprocessus de production conditionne très largement lesuccès de la bataille contre le chômage. Il est indispen-sable en effet que l'enseignement et la formation pré-parent en même temps utile les jeunes aux nouvellesprofessions qui apparaissent sous l'effet du changementstructurel et de la diffusion des technologies nouvelles.

Dans son avis consacré à la situation économique,financière et sociale du pays en 1983, le Conseil écono-mique et social conclut «qu'il faut résolument s'atteler àla tâche de préparer les jeunes gens à maîtriser le pro-grès technique et ses effets sociaux.»

Il est utile de rappeler à cet égard que la politique del'emploi et du marché du travail menée par le Gou-vernement depuis 1979 a privilégié la formation initialeet continue comme élément fondamental de la politiquede l'emploi en tant qu'instrument permettant de mieuxsatisfaire les aspirations des individus et d'assurer unmeilleur fonctionnement du marché du travail.

S'emparant des conclusions formulées par le rappor-teur général du budget pour l'exercice 1984, le Gou-vernement envisage de faire adopter dans le cadre de laloi budgétaire des mesures spéciales en faveur del'insertion des jeunes dans la vie active.

Ces mesures prendront la forme notamment destages de préparation en entreprise, à l'intention desdemandeurs d'emploi, d'une aide à la créationd'emplois d'utilité socio-économique et d'une adapta-tion de la loi du 27 juillet 1978 portant diverses mesuresen faveur de l'emploi des jeunes en ce qui concernenotamment le contrat de stage-initiation et la divisiond'auxiliaires temporaires.

Il est intéressant également de noter que le Gou-vernement, dans l'intérêt d'une plus grande flexibilitéde notre marché du travail, a adopté, sur la base del'habilitation lui conférée à cet effet par la loi du 8 avril1982, des aides spécifiques à la mobilité de la main-d'oeuvre.

Un règlement grand-ducal du 25 août 1983 fixe eneffet les modalités et conditions d'attribution d'uncertain nombre d'aides à la mobilité géographique desdemandeurs d'emploi, d'une prime d'incitation àl'embauche des chômeurs de longue durée et de deman-deurs d'emploi particulièrement difficiles à placer etd'une aide forfaitaire au réemploi.

En ce qui concerne les aides à la mobilité géogra-phique, elles peuvent prendre la forme d'une indemnitémensuelle forfaitaire pour frais de déplacement, d'uneindemnité mensuelle forfaitaire de double résidence oud'une indemnité unique et forfaitaire de transfert dedomicile et de réinstallation.

Toutes ces aides sont réservées au demandeurd'emploi inscrit depuis plus de six mois à l'administra-tion de l'emploi et se trouvant classé ou reclassé dans unemploi durable à plein temps en territoire luxembour-geois, rémunéré à un niveau inférieur au triple du salairesocial minimum de référence (73.534,- francs au 1erseptembre 1983).

L'indemnité mensuelle forfaitaire pour frais dedéplacement est accordée pour une durée maximale dedouze mois au demandeur d'emploi classé ou reclassédans un emploi salarié distant de plus de 30 km du lieude sa résidence habituelle.

Le versement de l'aide est conditionné par une duréed'occupation minimale de quatre mois.

Le niveau de l'indemnité, fonction du kilométrage àparcourir varie entre 900,- francs et 1.300,- francs parmois.

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V'indemnité mensuelle forfaitaire de double résidenceest accordée au demandeur d'emploi ayant charge defamille, classé ou reclassé dans un emploi salarié distantde plus de 50 km du lieu de la résidence habituelle dufoyer, lorsque les moyens de communication lui inter-disent, en raison de leur fréquence et de leur commo-dité, de regagner chaque soir sa résidence habituelle.

La deuxième résidence ne doit pas être éloignée deplus de 30 km du nouveau lieu de travail.

L'indemnité de double résidence est égale à 30% dusalaire social minimum de référence (7.353,- francs au1er septembre 1983); son versement est subordonné àune durée d'occupation minimale de trois mois.

V indemnité unique et forfaitaire de transfert de domi-cile et de réinstallation est attribuée au demandeurd'emploi classé ou reclassé dans un emploi dans unelocalité située à une distance supérieure à 35 km du lieude sa résidence habituelle, lorsqu'il déplace à cet effet sarésidence dans l'année qui suit sa mise au travail.

L'indemnité, fixée à 50% du salaire social minimumde référence (12.256,- francs au 1er septembre 1983),est subordonnée à une durée d'occupation minimale detrois mois.

Une prime d'incitation à l'embauche est attribuée parle fonds de chômage aux employeurs du secteur privéqui procèdent à l'embauche de chômeurs indemnisés delongue durée et de demandeurs d'emploi particulière-ment difficiles à placer.

Les textes réglementaires considèrent commechômeur indemnisé de longue durée, le chômeurindemnisé au titre d'une décision de prorogation del'indemnisation au-delà de douze mois adoptée par lacommission nationale de l'emploi.

Les mesures réglementaires considèrent commedemandeur d'emploi particulièrement difficile à placer,le demandeur d'emploi inscrit à l'administration del'emploi depuis au moins quinze mois, le demandeurd'emploi âgé de 55 ans accomplis, le demandeurd'emploi atteint d'une incapacité de travail de 30% aumoins et le demandeur d'emploi difficile à placer enraison d'une circonstance particulièrement graveinhérente à sa personne.

La prime d'embauché est fixée à deux fois le salairesocial minimum de référence (à savoir 49.023,- francsau 1er septembre 1983).

Son versement est subordonné à une durée minimaled'occupation de douze mois.

Enfin, le règlement grand-ducal du 25 août 1983accorde au travailleur reclassé dans un nouvel emploiune garantie de rémunération égale à 87,5% de la rému-nération perçue avant le reclassement, cette dernièreétant toutefois plafonnée à trois fois le salaire socialminimum de référence (73.534,- francs au 1er sep-tembre 1983) pour le calcul de la garantie.

L'aide forfaitaire au réemploi est subordonnée à unedurée d'occupation minimale de six mois.

Elle est versée pour une durée maximale de douzemois. L'aide forfaitaire au réemploi est réservée autravailleur occupé, avant son reclassement, dans uneentreprise déclarée en difficultés économiques d'ordrestructurel ou dans une entreprise relevant d'un secteurou d'une branche économique déclarée en difficultés

structurelles par arrêté du Gouvernement en Conseil,adopté sur proposition du comité de conjoncture. Il fautpar ailleurs que ce travailleur accepte d'être reclassédans un emploi relevant d'une branche économique,d'un secteur économique ou d'un métier caractérisé parun déficit structurel de main-d'oeuvre, également déter-miné par arrêté du Gouvernement en Conseil, surproposition de la commission nationale de l'emploi.

Il est utile de rappeler que ce dispositif d'aide à lamobilité a été complété par un règlement grand-ducaldu 21 septembre 1983 qui a instauré, pour l'année 1983,une prime spéciale de promotion de l'apprentissage dansl'hôtellerie, la restauration et l'artisanat.

Cette prime est égale à 7.560,- francs pour l'apprentide première année, à 6.180,- francs pour l'apprenti dedeuxième année et à 5.040,- francs pour l'apprenti detroisième année.

A noter enfin que cet important dispositif de mobili-sation volontaire des personnes sans emploi ou risquantde perdre leur emploi se trouve assorti par une redéfini-tion de la notion de l'emploi approprié inscrite à l'article13 de la loi du 30 juin 1976 pour autant qu'elle régit lesindemnités de chômage complet.

La définition de l'emploi approprié retenue par cetexte ne constitue pas, contrairement à ce que d'aucunsestiment devoir prétendre, un instrument de régressionsociale, mais plutôt un apport juste et équitable audynamisme et au bon fonctionnement de notre marchédu travail.

Elle est de nature par ailleurs à contrecarrer certainsrisques de perversion et de dénaturation du système decouverture sociale des personnes à la recherche d'unemploi.

Dans le but de réaliser une meilleure adéquationentre les offres et les demandes d'emploi, le Gouverne-ment envisage l'informatisation des services de place-ment de l'administration de l'emploi.

A cet effet le centre informatique de l'Etat effectuera,dès le mois de janvier 1984, une analyse de conceptionsuivie d'une réalisation partielle selon les prioritésfixées par l'administration de l'emploi (constitution desfichiers des demandeurs d'emploi et des emploisvacants).

Dans la suite le programme de travail pour l'année1984 sera soumis à la commission interministérielle àl'informatique.

L'achat des équipements nécessaires (terminaux àécran et éventuellement imprimante) sera prévu dansles propositions budgétaires pour l'exercice 1985.

Au cas exceptionnel où ces équipements pourraientdéjà servir avant la fin de 1984, le centre informatique del'Etat se propose de les prendre en location à charge deson budget.

Il est prévisible que l'informatisation de l'administra-tion de l'emploi sera opérationnelle à partir du 1erjanvier 1985.

(Source: Extrait de l'exposé, présenté par Monsieur JacquesSanter, Ministre du Travail et de la Sécurité Sociale, lors desdébats parlementaires sur le projet de budget de l'État pourl'exercice 1984, à la Chambre des Députés, en novembre1983).

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La situation économique au Luxembourg à la fin de 1983et perspectives pour 1984

Rappelons que la vie économique au Luxembourg aété marquée au premier semestre par le problème de larestructuration sidérurgique, qui a débouché sur la loidu 1er juillet 1983 concernant des mesures de nature àfavoriser la restructuration de la sidérurgie ainsi que lemaintien de la compétitivité de l'économie. En ce quiconcerne l'évolution conjoncturelle, la faiblesse de lademande extérieure a persisté au premier semestre eten été et s'est doublée de tendances récessives égale-ment au niveau de certains éléments de la demandeintérieure.

Signalons quelques éléments d'appréciation chiffréssur l'évolution de notre économie au cours des 3 pre-miers trimestres de 1983, ainsi qu'une esquisse del'évolution probable pour l'ensemble de 1983 et en1984.

Commerce extérieur

Exportations

La demande extérieure est restée très déprimée, cephénomène ayant été d'autant plus prononcé quel'élément sidérurgique demeure prépondérant dans nosexportations et qu'à cet égard les marchés internatio-naux ont connu au premier semestre de 1983 un véri-table effondrement.

Au cours des 5 premiers mois les exportations totalesde biens vers les pays tiers à l'UEBL ont été inférieuresde 1.4% en valeur à leur niveau de 1982.

Les exportations sidérurgiques ont accusé au coursdes 9 premiers mois de 1983 un recul important aussibien en volume qu'en valeur.

Exportations de produits sidérurgiquesSource: GISL

9 mois

1982

million de t

2.75.

milliard de F

31.8

1983

million de t

2.48

milliard de F

26.3

Variation en %

Volume Valeur

- 9.8 - 17.3

Pour l'ensemble de l'année 1983 les perspectives dela demande extérieure ne sont guère meilleures. En cequi concerne plus particulièrement le marché sidérur-gique, la dégradation au cours du premier semestre avaitété à l'origine de plusieurs décisions prises par lesinstances communautaires, quant aux plans de restruc-turation sidérurgique des pays membres devant amenerl'assainissement à moyen terme de l'industrie commu-nautaire, et les mesures conjoncturelles d'accompagne-ment de cette restructuration que sont les programmesprévisionnels «acier» et la prolongation jusqu'au 31janvier 1984 du système des quotas de production prévuà l'article 58 du traité CECA. Malgré une légère amélio-ration de la demande au 4ème trimestre de 1983, lessurcapacités sur le plan européen et mondial demeurentà l'origine de prix sidérurgiques très peu rémunérateurs.Par ailleurs, les prix de revient en hausse et l'utilisationlargement insuffisante des capacités font qu'une amé-lioration quantitative du marché n'aurait guère d'effetpositif sur la rentabilité et la situation financière desentreprises. On peut donc aussi être sceptique quantaux chances d'un assainissement à moyen terme dumarché sidérurgique. Au regard de la poursuite de lacroissance des capacités, notamment dans les nouveauxpays industriels et les pays en voie de développement, etde l'intervention croissante des pouvoirs publics dansles pays industriels pour maintenir en vie des installa-tions obsolètes, l'équilibre à moyen terme de l'offre etde la demande d'acier semble menacé, à moins d'uneexpansion imprévue des besoins d'acier dans le monde.

Compte tenu de leur structure, à fort contenu sidérur-gique, l'ensemble de nos exportations de biensdevraient donc connaître en 1984 une évolution assezdéfavorable. Les exportations des autres produits tanten 1983 qu'en 1984 risquent d'être tout au plus sta-gnantes.

Le degré exceptionnel d'ouverture de notre écono-mie et, le poids particulier de la sidérurgie, qui de plusest engagée dans un processus de réduction des capaci-tés, font que les perspectives d'avenir demeurent trèsincertaines.

On peut donc prévoir qu'en 1984 les impulsionsémanant de la demande extérieure sur l'activité écono-mique au Luxembourg seront très faibles.

Importations

On ne dispose que de peu de chiffres sur l'évolutiondes importations au cours de 1983, mais l'évolution de lademande interne, de la consommation intermédiaire,de la consommation finale et des investissementssemble indiquer un recul en volume des importationsqui est appelé à se poursuivre tout au cours de 1983. Onnote cependant depuis le début de l'année de forteshausses des cours des matières premières et du dollar,qui ont pour conséquence un renchérissement sensibledes importations. Cette tendance devrait se poursuivreen 1984 sous l'effet de la reprise de la conjoncturemondiale.

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Niveau d'activité

Rappelons qu'en 1982 le produit intérieur brut aenregistré un recul de l'ordre de 0.8% en volume (dans laversion harmonisée du Système européen de compteséconomiques intégrés). Cette récession était essen-tiellement tributaire du recul de la production indus-trielle. En ce qui concerne l'activité économique en1983, les évolutions sectorielles ont été fort diverses:

- Au cours des 8 premiers mois de 1983 la produc-tion industrielle a baissé de 4.6% dans son ensemble parrapport à la même période de 1982. L'indice de la pro-duction sidérurgique a reculé de 13.8%. Les autresindustries par contre ont enregistré une légère progres-sion de leur activité (+ 1%).

- L'activité de la construction est demeurée régres-sive au cours des 8 premiers mois de 1983 ( - 5.6% parrapport à la période de référence en 1982).

- Dans les services l'évolution est demeurée trèsvariée. La récession s'est poursuivie dans les transportsterrestres, alors qu'on a pu assister à une stabilisation,voire à un léger redressement de tendance dans lestransports aériens et fluviaux. Le chiffre d'affaires ducommerce semble avoir été affecté par l'évolutionnégative du pouvoir d'achat intérieur et les perspectiveséconomiques générales moroses. La saison touristiquepar contre a été bonne. Les services financiers ontencore bénéficié d'un niveau d'activité satisfaisant maistendant à plafonner. On ne peut nier cependant que lesrisques inhérents à la situation financière internationalecommencent à peser lourdement sur l'évolution decette branche. En effet, depuis quelques années, lesbanques luxembourgeoises ont constitué d'importantesprovisions relatives à certains risques géographiques.Ainsi les nouvelles provisions constituées pour l'année1982 ont été supérieures à l'ensemble des provisionspour créances douteuses constituées au cours des 9années précédentes. S'y ajouteront en 1983 les provi-sions constituées sans doute au regard des risquesreprésentés par certaines industries indigènes. En cas deréalisation de l'un ou de l'autre de ces risques, les résul-tats commerciaux de notre système bancaire dans sonensemble seront affectés, par conséquent également lacontribution de la branche à l'économie luxembour-geoise.

Les perspectives de l'activité dans les différentesbranches n'indiquent pas de changement de tendanceproche, ne fût-ce qu'en raison du problème sidérur-gique. Dans ces conditions on assistera à un nouveaurecul du PIB pour l'ensemble de 1983, recul qui risqued'être plus sévère que celui connu en 1982. Il serait del'ordre de 1.5% contre 0.2% en 1982 (dans la version dusystème européen des comptes économiques intégrés).Si l'on tient compte des services bancaires exportés, lePIB (en version nationale) accuserait une stagnation envolume après une croissance relativement dynamiqueen 1982 (+ 3.6%).

Evolution des prix et des revenus

PrixAprès la nette accélération de l'inflation en 1982

(9.4% en moyenne annuelle), l'évolution des prix en1983 a été marquée par une série d'influences contradic-toires. Un exposé à part est consacré à cette évolution.

Relevons ici simplement qu'on a noté au premiersemestre de 1983 une décélération régulière, suiviemalheureusement par un revirement marqué dès juillet,à la suite, entre autres, des effets du paquet fiscal con-tenu dans la loi du 1er juillet 1983. De la sorte la hausseintra-annuelle des prix a été de 8.4% en octobre. Enmoyenne annuelle, la hausse des prix risque de dépasserles 8.5% contre 9.4% en 1982.

Pour 1984, on peut s'attendre au mieux à une légèredécélération, les risques de dérapage étant prévisibles.Certes là politique de revenus pratiquée devrait contri-buer à limiter les pressions inflationnistes internes.Néanmoins, et en dépit de l'actuelle décélération desprix sur le plan international, il demeure le risque d'unehausse des prix à l'importation à plus longue échéance,notamment si la reprise des pays industriels devait seconfirmer. L'indice des prix à la consommation pourraitdonc accuser en 1984 une hausse de l'ordre de 7 à 8% parrapport à 1983.

Evolution des revenus et des salaires

Sur le plan de l'évolution des rémunérations signalonsl'impact tant en 1983 qu'en 1984 des lois du 24décembre 1982 et du 1er juillet 1983 fixant la progres-sion automatique de la masse salariale du fait del'échelle mobile à 7% en 1983 et à 5.9% en 1984. On n'anoté par ailleurs que de très faibles progressions réellesde rémunérations, même dans les secteurs en bonnesanté économique, tandis que dans d'autres branches, lasidérurgie notamment, des réductions progressives partranche de revenu, mais de 6% en moyenne de la massedes salaires.

La faiblesse de la progression des salaires réels dansde nombreuses branches, les réductions salariales dansla sidérurgie et la limitation des adaptations indiciaires àun taux inférieur à celui de la hausse des prix sont peut-être à l'origine d'une évolution négative en termes réelsde la masse salariale dans son ensemble.

L'année 1984 devrait se situer dans le prolongementde ces tendances à la modération des revenus salariaux.

La loi du 1er juillet 1983 concernant les mesures denature à favoriser la restructuration de la sidérurgie ainsique le maintien de la compétitivité de l'économieprévoit en effet pour 1984 une indexation automatiqueinférieure à celle réalisée en 1983.

EmploiRappelons que malgré la faiblesse conjoncturelle et

les problèmes structurels dans la sidérurgie, l'emploisalarié total avait encore connu en 1982 une croissancede 0.6%, localisé essentiellement dans les servicesmarchands et les services publics, alors que l'emploisalarié dans l'industrie et la construction a été en recul.Au premier semestre de 1983, l'expansion de l'emploisalarié a pris fin. D'après les statistiques des affiliationsaux caisses de maladie, la population active salariéeaurait reculé au cours des 7 premiers mois de 1983 (parrapport à la même période de 1982) de 0.4%, soit d'envi-ron 500 à 600 personnes. La population active salariéedevrait donc s'établir en moyenne en 1983 à environ138 200 personnes contre 138 700 personnes en 1982.Les indicateurs sectoriels dans l'industrie et la construc-tion confirment la baisse des effectifs dans ces branches.

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L'embauche semble cependant s'être poursuiviedans les services et notamment dans le secteur bancaire.

Au premier semestre de 1983 on a assisté à une pour-suite de la montée lente mais tendancielle du chômagesous toutes ses formes: chômage complet, chômagepartiel et persistance d'excédents structurels et conjonc-turels de main-d'oeuvre dans la sidérurgie. Des pres-sions ont été exercées sur le marché de l'emploi du faitd'un nombre croissant de faillites, de cessation d'activi-tés et de licenciements collectifs. Les problèmes del'emploi demeureront posés en 1984, encore qu'il nefaille pas s'attendre à un taux de chômage de mêmeimportance que dans les grands pays voisins.

Rappelons à cet égard l'important dispositif légal etréglementaire mis en oeuvre par le Gouvernement pourlutter contre le chômage tant dans sa politique dediversification de l'économie que dans ses efforts pourfavoriser une plus grande mobilité géographique etprofessionnelle des chômeurs ou de ceux qui sontmenacés de le devenir.

Equilibre 'extérieur

En ce qui concerne l'équilibre extérieur, rappelons lesolde négatif de la balance commerciale de 22.6 mil-liards de francs en 1982.

Pour le premier trimestre de 1983 on peut déjàrelever une détérioration de ce solde. Ces chiffres nepermettent cependant pas encore de conclusion concer-nant le résultat pour l'ensemble de 1983. On peutestimer cependant que la tendance à la dégradation sepoursuivra. En effet, les exportations, au vu des indica-tions d'activité, ont accusé tout au long de 1983 unebaisse sensible tant en volume qu'en valeur. Les impor-tations par contre tout en reculant quelque peu envolume, ont sans doute renchéri davantage en raison dela force du dollar et des hausses sur les marchés desmatières premières.

Les perspectives pour 1984 sont donc affectées à lafois par la persistance de la faiblesse de la demandeétrangère, qui ne se ressent encore guère du redresse-

Balance commerciale du LuxembourgUnité: Milliard de francs

Exportations de biens (FOB)Importations de biens (CAF)

Solde de la balance commerciale (FOB/CAF)

1980

87.9105.6

- 17.7

1981

88.6111.3

- 22.7

1982

102.0124.6

- 22.6

1ertrimestre

1982

25.630.9

- 5.3

1ertrimestre

1983

25.130.7

- 5.6

Variation en %1er trimestre 19831er trimestre 1982

- 2 . 0-0 .6

ment de l'environnement international et par le recul dela demande intérieure sous l'effet de l'érosion du pou-voir d'achat, des problèmes budgétaires de l'Etat et descollectivités locales et finalement du manque de dyna-misme des investissements.

Le financement du programme de restructuration dela sidérurgie, y compris l'important volet social, a amenéle législateur à mettre en oeuvre une série de mesures enmatière de fiscalité directe et indirecte et de politiquedes revenus pour 1983 et 1984. L'effet cumulé de cesmesures risque en 1983 et peut-être encore plus en 1984d'opérer une ponction du pouvoir d'achat susceptibled'avoir un certain effet déflationniste.

Au cours du premier semestre de 1983 on a décelé lespremiers indices d'une telle évolution, le chiffre d'affai-res réel du commerce commençant à reculer, évolutionqui risque encore de s'amplifier en 1984. On peutcraindre dès lors que les mesures mises en oeuvre

ne risquent d'avoir en 1984 un effet de freinage sur laconsommation privée et en même temps sur l'assiettedes impôts indirects et des revenus imposables decertaines catégories de contribuables.

Les perspectives de l'économie luxembourgeoisepour 1984 restent donc défavorables. D'autre part, dupoint de vue conjoncturel, l'économie luxembourgeoisea peu de chances de sortir en 1984 de la dépressionactuelle. Par ailleurs, le processus d'adaptation structu-relle dans lequel elle est engagée, risque encore de créerde fortes tensions sur le marché de l'emploi.

(Source: Extrait de l'exposé, fait par Madame Colette Flesch,Vice-Président du Gouvernement, Ministre de l'Economie etdes Classes Moyennes, lors des débats parlementaires sur leprojet de budget de l'Etat pour l'exercice 1984, à la Chambredes Députés, en novembre 1983).

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La situation économique et sociale de l'agricultureL'agriculture se trouve au seuil d'une période très

difficile. La réforme de la politique agricole commune,dont la discussion est engagée au sein de la Commu-nauté Européenne, risque d'aboutir, pour l'agricultureluxembourgeoise aussi, à des contraintes nouvelles quipèseront sur la formation du revenu agricole. Plus quejamais il s'agira donc de mobiliser les réserves de pro-ductivité qui existent encore au sein de l'agricultureluxembourgeoise, d'agir sur le niveau du coût de pro-duction par une meilleure valorisation de la productionfourragère à la ferme, de tirer un meilleur profit destechniques de production et des possibilités d'entraideet de coopération. Vulgarisation agricole et formationprofessionnelle agricole resteront donc nécessairementau centre des préoccupations de la politique agricole duGouvernement.

Les comptes économiques de l'agriculture

Les résultats globaux définitifs de 1982

Les résultats définitifs confirment l'exceptionnelleréussite de 1982. Dans la longue série des années pourlesquelles le Ministère de l'Agriculture a tenu la comp-tabilité globale de l'agriculture, très rares sont celles oùil y a eu un tel concours de circonstances favorables.Politique des prix, conjoncture des marchés, conditionsde la croissance végétative, toutes ont contribué à fairede l'année 1982 une année exceptionnellement bonne.

La politique des prix: Pour le Luxembourg, la haussedes prix en ECUs de 10,5% est devenue une hausse de16,1% en francs luxembourgeois, par l'effet de l'élimina-tion partielle des montants compensatoires monétairesnégatifs.

La conjoncture des marchés a permis aux prix à laproduction de s'aligner sur les hausses décidées àBruxelles. Pour les viandes bovine et porcine, leshausses des prix ont même été nettement supérieuresaux pourcentages de Bruxelles.

Les bonnes conditions climatiques ont favorisé toutau long de l'année la croissance végétative. Les céréalesont connu des rendements record, les productionsfourragères ont été très abondantes et d'excellentequalité. La plus grande disponibilité en fourrages à laferme a permis des économies substantielles sur lesaliments de bétail achetés dans le commerce.

Le résultat de ce concours de circonstances extraordi-nairement favorables a été que la production finaletotale de l'agriculture a augmenté, en 1982, de 16,1% envaleur par rapport à l'année précédente. Comme lacroissance du coût de production s'est maintenue dansdes limites relativement étroites - 6,5% en 1982 contre10% en 1981 - , le revenu agricole a fortement progressé.Par rapport à 1981, le revenu agricole augmente de31,8%. Pour le revenu agricole rapporté au nombred'exploitations entre lesquelles il se répartit, la progres-sion est même de 36,1%. Pendant cette même année1982, les revenus non-agricoles, dont la progression estmesurée par l'évolution du salaire de référence servant àfixer les facteurs d'ajustement des rentes, n'ont aug-menté que de 5,4%. L'indice du coût de la vie a aug-menté de 9,5%.

Il y a donc eu pour l'agriculture, en 1982, une netteamélioration de son pouvoir d'achat. De même, elle a purattraper une grande partie de son retard par rapport auxrevenus non-agricoles. Une grande partie des pertes derevenu subies dans les années précédant 1981, et notam-ment en 1980, a pu être épongée.

Pour l'agriculture, 1982 est donc une année pleine desatisfaction. Cette satisfaction ne doit pas faire oublier lecaractère nettement exceptionnel du résultat obtenu. Ils'en suit que 1982 ne peut guère servir de témoin pourapprécier l'évolution des revenus agricoles dans lesannées à venir.

L'année 1982 dans les résultats comptables

L'année comptable, qui va de mai à avril, ne coïncidepas avec l'année civile qui sert de base aux comptesglobaux. Résultats comptables et comptes globaux nesont donc pas entièrement comparables. Les différencespeuvent quelquefois être très importantes, lorsqu'il y ainversion dans le court terme des tendances de marché.Les différences sont minimes et négligeables en périodede stabilité des prix du marché. Tel a été le cas pourl'année comptable 1982/83, où l'évolution favorable desmarchés en 1982 s'est poursuivie sur 1983.

La comptabilité confirme les résultats favorables descomptes globaux. La comptabilité montre, pour1982/83, une très forte progression des revenus. Toutesles exploitations participent à cette progression. Destaux de croissance nettement supérieurs à la moyennesont notés pour les orientations qui comprennent laproduction de viande porcine. Ce sont d'ailleurs cesmêmes exploitations, où la production porcine prendune part importante, qui ont les revenus effectifs les plusélevés.

Le tableau 1 ci-après rend compte des taux de pro-gression réalisés dans les différentes orientations deproduction.

Tableau 1:Taux de progression du revenu des exploitations

comptables en 1982/83 par rapport à 1981/82

Orientation

LB + VB + PPA - GToutes exploitationscomptables agricoles

Nombred'exploitations

comptables

20362333417

364

Tauxde progression

en%

38,539,477,761,652,1

43,1

L = orientation dominante laitB + V = bovins (lait + viande) et production végétale

commercialisableB + P = bovins (lait et viande) et production porcineP = orientation dominante porcsA - G = agriculture générale combinant productions ani-

males et végétales, sans dominance de l'une oul'autre de ces productions.

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Les pourcentages de progression des revenus dutableau 1 sont des pourcentages moyens pour toutel'orientation donnée. Ce qu'il importe de savoir est ladispersion des résultats individuels autour de cesmoyennes. Pour les années antérieures à 1982/83, cettedispersion a été très grande. D'où l'intérêt de savoir si leconcours des circonstances favorables aura permis derapprocher les extrêmes.

Le tableau 2 montre que ce n'est pas le cas. Les écartsne se sont guère estompés, et la distribution autour de lamoyenne n'a pas fondamentalement changé par rapportaux années antérieures. Cela prouve une nouvelle foisque les écarts entre exploitations ont des causes pro-fondes se situant au niveau de la qualité de la gestion,donc de la qualification professionnelle du chefd'exploitation. La grande dispersion des résultatséconomiques atteints souligne une fois de plus que levéritable problème agricole est celui des bas revenus et

Tableau 2:Variation de revenu à l'intérieur des différentes

orientations de productionExercice comptable 1982/83

Moyenne de chaque orientation =100

Orientation M Q

L 171,7 100B + V 176,6 100B + P 154,9 100P 191,5 100A - G - O 100Toutes exploitations 176,7 100

36,935,246,331,8- 0)

34,0

(1) pour l'agriculture générale, l'échantillon comptable esttrop restreint pour une ventilation entre exploitations detête et de queue.T = 25% des exploitations de têteM = Moyenne de toutes les exploitations pour l'orienta-

tion donnéeQ = 25% des exploitations de queue.

des causes qui provoquent ces bas revenus. Si, indépen-damment des conditions économiques et climatiquesgénérales il existe des exploitations qui arrivent tou-jours à réaliser des revenus au moins satisfaisants, alorsque d'autres échouent, la politique agricole, par lavulgarisation et la formation professionnelle adéquates,doit aider les retardataires à suivre la marche du progrèsdes revenus.

Le tableau 3 montre que les mêmes écarts existent àl'intérieur des différentes classes d'étendue. Il confirmedonc les conclusions tirées ci-dessus.

Tableau 3:Variation des revenus à l'intérieur des différentes

classes de grandeurExercice comptable 1982/83

Moyenne de chaque classe = 100

Classe de grandeur T M

15-29,9 ha30-34,9 ha35-39,9 ha40-44,9 ha45-49,9 ha50-64,9 ha65-84,9 ha85 ha et plusToutes classesde grandeur

--

195,9161,8141,2160,2166,4188,6

O0

100100100100100100100100

--5,5

42,259,339,729,40,3

- aO

176,7 100 34,0

(1) = échantillon trop réduit pour effectuer la ventilation surexploitations de tête et de queue.

(Source: Extrait de l'exposé, fait par Monsieur Ernest Mühlen,Ministre de l'Agriculture, de la Viticulture et des Eaux etForêts, lors des débats parlementaires sur le projet de budgetde l'Etat pour l'exercice 1984 à la Chambre des Députés endécembre 1983).

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La protection de l'EnvironnementLa pollution est un problème mondial car elle n'est pas

arrêtée par les frontières. Ceci est particulièrement vraipour notre territoire national exigu entouré par trois paysdifférents. La politique de la protection de l'environne-ment et de la nature exige une collaboration au niveauinternational. Elle est focalisée sur la collaboration au seinde la Communauté Economique Européenne (CEE) envue d'une harmonisation des législations.

Le premier programme d'action pour l'environnementa jeté en 1973 les bases de la politique communautaire enmatière d'environnement. Ce programme a été actualiséen 1977. A ce jour, plus de 50 directives et décisions ont étéformulées; elles recouvrent presque tous les domainesessentiels de la protection de l'environnement et doiventêtre incorporées dans les législations nationales. Ellesservent tant à protéger et améliorer l'état de l'environne-ment qu'à éviter les distorsions dans la concurrence et lesobstacles aux échanges commerciaux.

Le Gouvernement luxembourgeois a jeté au cours de ladécennie écoulée les fondements d'une politique del'environnement cohérente et conséquente. Elle s'estdotée d'une législation déjà bien avancée dans ce domaine.

D'importants programmes ont été mis en oeuvre, quiont permis en partie d'obtenir des résultats considérables.Mais l'expérience a aussi montré que les efforts doiventêtre renforcés dans bien des domaines.

En effet, les problèmes d'environnement de la premièregénération, à savoir ceux de la fin des années soixante etdu début des années soixante-dix, période marquée parune forte croissance économique et industrielle, consis-taient essentiellement à réduire et à limiter les pollutionset nuisances grâce à la mise en oeuvre d'actions spécifiquessouvent de caractère ponctuel.

Aujourd'hui, nous devons considérer les problèmesd'environnement de la prochaine décennie sous uneoptique plus globale et plus universelle, plus interdé-pendante et plus multisectorielle:

- C'est pourquoi, nous devons être conscients, toutd'abord, qu'une solution à ces problèmes ne pourraêtre trouvée que dans le cadre d'une coopérationinternationale accrue; cette coopération devra, bienentendu, être réalisée dans les enceintes appropriées ets'effectuer au niveau le plus adéquat, c'est-à-dire, soitau niveau interrégional, régional, national ou bilatéral,en fonction des problèmes en cause.

- Le seconde exigence me paraît résider dans la mise enoeuvre d'une approche multisectorielle en introduisantles impératifs de l'environnement dans les différentespolitiques telles que les politiques de l'agriculture, del'énergie, des transports, de l'aménagement du terri-toire, etc. Cette nouvelle approche intégrée devraégalement prendre en compte l'importance fondamen-tale des relations entre la population, les ressources,l'environnement et le développement, ainsi que celledes interactions réciproques entre les différents élé-ments constituant notre biosphère, c'est-à-dire l'atmo-sphère et des écosystèmes terrestres.

- Enfin, la troisième exigence me paraît être la nécessitéd'une action préventive en matière d'environnement.C'est pourquoi il importe de prendre en considérationles nécessités de la protection de l'environnement tant

pour des raisons d'efficacité que de coût, le plus enamont possible dans les processus de conception et dedécision du développement socio-économique.

L'ensemble de ces exigences représente sans aucundoute un défi supplémentaire pour tous ceux qui ont encharge les questions de la protection de l'environnement.Ces exigences nouvelles se heurteront, ne nous le cachonspas, à de nombreux obstacles et réticences de toute nature,psychologique, institutionnelle, financière tant au niveaulocal que national ou international.

Au moment où la situation économique de notre payss'aggrave encore, la question se pose de savoir s'il convientou non d'infléchir la politique de l'environnement. LeGouvernement a déjà tenu compte des conditions éco-nomiques nouvelles notamment par le développement demesures préventives et d'une coordination au sein d'uncomité de l'environnement qui s'articule dans le contextegénéral de l'aménagement du territoire. Toutefois, lapolitique de l'environnement est une politique structurellequi doit être poursuivie indépendamment des aléas de laconjoncture, afin de ne pas sacrifier les potentialités dudéveloppement de demain et d'éviter une dégradationparticulièrement grave des ressources naturelles. De plus,les préoccupations de l'environnement demeurent trèsvives dans l'opinion publique qui continue d'apporter,malgré des difficultés économiques actuelles, son soutienaux mesures de protection de l'environnement.

Pour l'avenir, il importe de consolider et d'étendrel'acquis. L'essentiel est de ne pas gaspiller les ressourcesnaturelles, et de les ménager. Plus que jamais, il convientd'étudier les incidences à long terme des interventionsdans l'équilibre naturel et d'en tenir compte. L'équilibrenaturel est à prendre comme un tout, qui peut souvent êtreatteint là où il n'y a pas forcément eu intervention directe.

La préservation et l'amélioration de l'environnementaux plans national et international constituent un objectifpartagé par toutes les forces politiques et sociales détermi-nantes. Nos concitoyens accordent une grande importanceà la protection de l'environnement: l'action des associa-tions de protection de l'environnement et des groupe-ments de citoyens en est une preuve.

Aucune nation ne peut résoudre seule les problèmesévoqués. Qu'elles concernent des régions données oul'ensemble du monde, c'est en effort commun qu'il fautrechercher des solutions et les mettre en pratique. Notreaction doit être à la mesure de nos consciences.

Un vaste programme de protection de l'environnementdoit être axé sur la prévoyance à long terme. Un nouveaudroit à l'environnement doit être institué, la consultationpublique étendue et les conditions de sa mise en applica-tion améliorées. Les dépenses engagées par le trésorpublic et le secteur privé pour la protection de l'environne-ment vont se multiplier. Le Comité National de la Protec-tion de l'Environnement fut créé aux fins de conseiller leGouvernement et de lui fournir des propositions de natureà l'aider à prendre ses décisions.

(Source: Extrait de l'exposé, fait par Monsieur Josy Barthel,Ministre de l'Environnement, lors des débats parlementaires surle projet de budget de l'Etat, à la Chambre des Députés endécembre 1983).

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Le Projet de télédiffusion directe par satellite

Le projet de télédiffusion directe par satellite (TDS)de la Compagnie luxembourgeoise de télédiffusion,pourtant conçu en application des dispositions desActes finales de la Conférence administrative mondialedes radiocommunications réunie à Genève en 1977, acontinué à rencontrer, au cours de la période sous revue,certaines résistances du côté de nos pays voisins, préoc-cupés par le fait notamment qu'un satellite luxembour-geois devrait avoir recours à leurs marchés publicitairesen vue de la réalisation de ses programmes de naturecommerciale et aurait une zone de couverture normaledépassant son cadre national et donnant lieu à desdébordements des. programmes diffusés dans leurslangues respectives.

Les appréhensions ressenties du côté de la RFA sesont heureusement fortement estompées ces dernierstemps suite notamment aux nombreux efforts d'expli-cation que le Gouvernement luxembourgeois a entre-pris auprès du Gouvernement allemand à l'occasion desvisites à Luxembourg du Chancelier Kohi le 5novembre 1982 et du Ministre des PTT M. Schwarz-Schilling, le 10 février 1983.

Les inquiétudes du Gouvernement français n'ontcependant pas pu être entièrement apaisées. Aussi desnégociations bilatérales ont-elles été officiellemententamées depuis le 23 novembre 1982 afin de trouverdes solutions mutuellement satisfaisantes aux pro-blèmes soulevés par le projet de satellite luxembour-geois. A la suite d'une proposition formulée par ladélégation française, et reprise par le Ministre françaisdes Relations extérieures, lors de sa visite officielle àLuxembourg les 11 et 12 avril 1983, ces négociationss'attachent actuellement à examiner les possibilités decoopération sous forme d'exploitation conjointe par laCLT et la France d'un ou deux canaux du satellitefrançais TDF1, définir la structure juridique etréglerlesaspects financiers d'une telle coopération.

Au cours de ces négociations la délégation luxem-bourgeoise n'a pas cessé de se montrer extrêmementsoucieuse de préserver les droits souverains de l'Etatluxembourgeois, dans tous ses aspects, en matière deradiodiffusion. De même le Gouvernement n'a jamaismanqué d'invoquer ces mêmes droits ainsi que lecaractère européen du projet luxembourgeois et sonattachement à la liberté d'information et d'expression(active et passive) au cours des discussions menées dansles enceintes internationales dont le Luxembourg faitpartie.

Le 19 août 1983 le Gouvernement a envoyé lesrenseignements pour la publication anticipée relative àun système à satellites selon les dispositions des Nos1042,1043 et 1044 du Règlement des radiocommunica-tions au Comité international d'enregistrement desfréquences de l'Union Internationale des Télécommu-nications (UIT). Le système à satellites en question, quifera usage de bandes de fréquences attribuées au servicefixe par satellite, est destiné à la mise en oeuvre deservices de télécommunications permettant la distribu-tion télévisuelle ainsi que la mise à disposition decapacités de transmission à d'autres administrationsintéressées.

L'initiative du Gouvernement, qui se situe dans laligne d'une longue tradition établie depuis 50 ans, tend àpréserver le rôle du Luxembourg dans le secteur del'audiovisuel, vital pour le pays, à l'âge de la communi-cation par satellite. Dans son esprit, le projet est conçu,tant dans sa réalisation que dans son utilisation, dansl'optique d'une large coopération européenne aussi bienaux niveaux privé que public. Aussi le projet ne doit-ilaucunement remettre en cause la bonne coopérationque le gouvernement entretient, dans le domaine del'audiovisuel, avec les gouvernements des autres pays,notamment les pays voisins qu'il a informés indivi-duellement et sans retard.

Le Gouvernement entend évidemment respecterscrupuleusement les règles et procédures en vigueurdans le cadre de FUIT.

La Conférence intergouvemementale sur l'espaceeuropéen de coopération audiovisuelle

Les trois groupes de travail créés par cette conférenceà laquelle ont participé, les 19 et 20 juillet 1982 à Paris, laFrance, la RFA, l'Autriche et les trois pays du Benelux,se sont réunis respectivement:

- le groupe I: Politique Générale des médias, les 9 et10 décembre 1982 à Bruxelles

- le groupe II: Télédiffusion directe par satellite etpublicité, les 2 et 3 novembre 1982 à La Haye

- le groupe III: Télévision et Cinéma, les 28 et 29octobre 1982 à Berlin et le 8 décembre 1982 àBruxelles.

Les travaux de ces groupes, auxquels le Ministère aactivement participé, n'ont pas permis de faire dispa-raître des divergences parfois profondes des positionsdes différentes délégations, de sorte qu'une secondeConférence intergouvernementale élargie à tous lesGouvernements des pays membres du Conseil deCoopération culturelle du Conseil de l'Europe, initiale-ment prévue pour fin novembre 1982, puis pour les 20 et21 janvier 1983 a dû finalement être reportée sine die.

Les Communautés Européennes

Donnant suite à une résolution du Parlement euro-péen en date du 12 mars 1982, la Commission a publié le25 mai 1983 un «rapport intérimaire sur les réalités ettendances de télévision en Europe: perspectives etoptions», destiné à jeter les bases politiques et juri-diques nécessaires à la création d'un programme télé-visé européen.

Convaincue que la réalisation d'un service européende télévision est de nature à contribuer considérable-ment à la création et au maintien d'une conscience de ladimension européenne dans la vie des citoyens euro-péens et à permettre ainsi d'atteindre le premier objectifdu Traité de Rome: «établir les fondements d'une unionsans cesse plus étroite entre les peuples européens», laCommission se déclare disposée à donner son appui

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politique et matériel à l'initiative entreprise au sein del'Union Européenne de Radiodiffusion en vue de mettresur pied un programme de télévision commun enplusieurs langues pouvant atteindre 300 millions detéléspectateurs en Europe occidentale. Selon les vues dela Commission un organe, composé de représentantsdes organismes professionnels participants, des Gou-vernements des pays concernés, et, le cas échéant, desInstitutions de la Communauté, devrait veiller à lapromotion des intérêts de ce public et à la sauvegarde del'indépendance des responsables des programmes.

Par ailleurs la Commission se propose de présenterprochainement un livre vert sur les conditions juri-diques pour l'établissement progressif d'un marchécommun en matière de télévision en étudiant plusparticulièrement les aspects de la libre prestation desservices de télévision à l'intérieur de la Communauté etdu libre accès aux émissions à travers les frontièresintracommunautaires.

Le Conseil de l'Europe

Dans le cadre du Conseil de l'Europe les travauxintergouvernementaux relatifs à la télévision directe parsatellite (TDS) sont principalement du ressort duComité Directeur sur les moyens de communication demasse (CDMM) et des deux comités qui lui sont subor-donnés, le Comité d'experts sur la politique en matièrede média (MM-PO) et le Comité d'experts sur la protec-tion juridique (MM-JU).

A la suite d'une décision du Comité des Ministres du29 avril 1982 et sur base d'un mandat du CDMM, leMM-PO a adopté, lors de sa 4e réunion (du 21 au 24septembre 82) un rapport «sur les possibilités de parve-nir à un instrument juridique dans le domaine de laTDS». Sur base de ce rapport, le Comité des Ministresdu 10 novembre 1982 a estimé non seulement possible,mais urgente, la conclusion d'un accord européen dansle domaine de la TDS, et a chargé le CDMM de pour-suivre ses travaux à cette fin.

Aussi le CDMM a-t-il demandé lors de sa 5e réunion(du 8 au 11 février 1983) au MM-PO d'examiner lesquestions de la publicité, de la cession de canaux TDS,des contacts entre les pays concernés par la TDS, de lacoopération entre radio-diffuseurs et programmeseuropéens, de la protection de l'individu et de la concer-tation industrielle.

Ces différents sujets sont traités dans des groupes detravail spéciaux qui feront rapport au CDMM lors de saréunion d'automne.

En ce qui concerne plus particulièrement le pro-blème de la publicité, l'Assemblée Parlementaire duConseil de l'Europe a adopté le 2 octobre 1982 unerecommandation «relative aux mesures à prendre auniveau international pour protéger la liberté d'expres-

sion par une réglementation de la publicité commer-ciale». Un groupe d'experts nommé par le CDMM aprésenté au MM-PO, dans sa réunion du 21 au 25 mai1983, un rapport «sur les principes relatifs à la publicitépar satellite».Ce rapport contient notamment un avant-projet derecommandation, dont les dispositions de fond, présen-tées sous forme de principes groupées dans deux cha-pitres (I. forme et présentation; II. contenu) ne font pasl'unanimité. C'est surtout le principe no 5 sur la partadmissible de publicité dans le temps d'antenne quidonne lieu à controverse.

L'Organisation des Nations Unies

Le Comité des utilisations pacifiques de l'espaceextra-atmosphérique de l'ONU et son Sous-Comitéjuridique ont mis au point après plus d'une décennie detravail un projet de résolution définissant les «principesrégissant l'utilisation par les Etats de satellites artificielsde la terre aux fins de la télévision directe internatio-nale.»

La résolution, qui a été adoptée par l'AssembléeGénérale de l'ONU le 10 décembre 1982, avec 107 voixen faveur, 13 contre et 13 abstentions, prévoit entre-autres que «tout Etat qui si propose d'établir un servicede télévision directe internationale par satellite ou d'enautoriser l'établissement, doit notifier immédiatementson intention à l'Etat récepteur et entrer rapidement enconsultation avec cet Etat si celui-ci en fait la demande»et ne saurait le faire que «sur base d'accords et/oud'arrangements.»

Le Luxembourg a voté contre cette résolution, toutcomme les autres pays de la Communauté européennesauf la France, la Grèce et l'Irlande qui se sont abste-nues.

Organisation européenne de télécommunications parsatellite (EUTELSAT)

La convention intergouvernementale pour lacréation d'Eutelsat a été signée le 28 septembre 1982 àParis, par 12 pays européens dont le Luxembourg, etreste ouverte à la signature de tous les 26 pays membresde la Conférence européenne des Administrations desPostes et Télécommunications (CEPT).

La mission d'Eutelsat est la création et la gestion d'unsystème de télécommunications par satellite pour lestransmissions intra-européennes et nationales.

(Source: Extrait du mémoire, présenté par Madame ColetteFlesch, Vice-Président du Gouvernement, Ministre desAffaires Etrangères, du Commerce Extérieur et de la Coopéra-tion, à la Chambre des Députés, lors des débats parlementairessur le projet de budget de l'Etat pour l'exercice 1984, enoctobre 1983).

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La Compagnie Luxembourgeoise de TélédiffusionLe 4 avril 1973 fut signé à Luxembourg entre le

Gouvernement grand-ducal et les mandataires de laCompagnie Luxembourgeoise de Télédiffusion, sociétéanonyme établie à Luxembourg, un contrat ayant pourobjet de prolonger jusqu'au 31 décembre 1995 lescontrats de concession accordant à la compagnie sur labase de la loi du 19 décembre 1929 concernant lesstations radioélectriques établies ou à établir dans leGrand-Duché, le droit exclusif d'établir et d'exploiterdes stations de radio-télédiffusion sur le territoire duGrand-Duché de Luxembourg. A l'occasion de l'accordde prolongation, le cahier des charges imposé à lacompagnie pour l'exploitation de la concession, futprofondément modifié et adapté aux nouvelles circons-tances de fait et de droit.

La première décennie révolue, il paraît intéressant dedépasser le cadre traditionnel de rapport annuel et dejeter un regard sur certaines prescriptions de natureinstitutionnelle du cahier des charges à observer par laCLT.

Aux termes du cahier des charges à respecter par laCompagnie Luxembourgeoise de Télédiffusion, lesmembres du conseil d'administration doivent être enmajorité Luxembourgeois et résider dans le Grand-Duché de Luxembourg. Le conseil qui doit, d'après lesstatuts de la CLT, compter au moins neuf administra-teurs, est actuellement composé de vingt-cinqmembres, dont quinze sont de nationalité luxembour-geoise et résident au Grand-Duché. A part huitmembres luxembourgeois qui ont été nommés auconseil en raison de leurs compétences et qualitéspersonnelles, une tradition s'est établie depuis unedizaine d'années d'y faire entrer les chefs de fraction destrois partis politiques luxembourgeois les plus représen-tatifs. Enfin, en exécution de la législation de 1974organisant la représentation des salariés dans les socié-tés anonymes, quatre membres du conseil y repré-sentent le personnel de la CLT. Par ailleurs, la garantiede la sauvegarde des intérêts luxembourgeois est encoreassurée par le fait que le président du conseil, ainsi quele directeur général de la compagnie, doivent être denationalité luxembourgeoise.

Le capital de la CLT appartient presque exclusive-ment à quelques importants groupes belges et françaisauxquels sont réservés les dix sièges restants du conseild'administration. Pour tenir compte du rapport desforces du capital, la vice-présidence du conseil revientau groupe belge, tandis que l'administrateur-délégué estde nationalité française.

Compte tenu de la particulière sensibilité qui carac-térise le domaine audiovisuel depuis une vingtained'années dans tous les pays, le pouvoir politique luxem-bourgeois a eu le souci lors de la négociation, en 1973,avec la CLT de la prolongation de la concession, d'agen-cer les dispositions du cahier des charges de manière àstabiliser les liens de mutuelle confiance qui s'étaientétablis entre-temps entre l'Etat et les détenteurs ducapital. Cette préoccupation explique une particularitétrès significative des actions représentant le capital: 70%des actions sont et doivent rester au nominatif, tandis

que 30% seulement revêtent la forme d'actions auporteur librement cessibles de négociables.

La cession des actions nominatives n'est permise quesi le Gouvernement luxembourgeois n'y oppose pas sonveto. Par ailleurs les cessions de ces actions nominativesrequièrent l'agrément du conseil d'administration.Grâce à ce mécanisme, le Gouvernement a la possibilitéde surveiller entre quelles mains figurent 70% desactions. Le droit de veto du Gouvernement entre enligne de compte dans les trois cas suivants:

Si la cession projetée met en péril la neutralité poli-tique de la station ou le caractère privé de la société, dufait notamment que le cessionnaire serait une puissancepolitique étrangère ou une organisation à vocationpublique;

- si la cession projetée aboutit à transférer des titres àune entreprise ou à un groupe d'entreprises susceptiblesd'exercer des activités dans un domaine concurrentielavec celui du concessionnaire et de nature, de ce fait, àporter une atteinte grave aux intérêts du concession-naire;

si la cession projetée risque de modifier sensiblementla composition du capital ou l'équilibre entre les action-naires possédant au moins un pour cent du capital de lasociété.

Il découle de la configuration des droits et obligationsprédécrits, que le pouvoir politique luxembourgeois aentendu conclure, en 1973, la prolongation du contratde concession avec la CLT, intuitu personae, c'est-à-direeu égard à la personnalité du concessionnaire, aveclequel les autorités luxembourgeoises avaient eu, aucours d'un passé relativement long, des relations qui,somme toute et dans leur ensemble, pouvaient êtrequalifiées de bonnes.

Il va sans dire que le respect par la CLT des clauses ducontrat de concession et, surtout, du cahier des charges,requiert de la part de l'Etat une surveillance de tous lesmoments. A cette fin, le cahier des charges institue àl'égard de la CLT un contrôle du Gouvernement qui estexercé par un commissaire et par deux commissions,l'une technique et l'autre des programmes. Le commis-saire du Gouvernement veille à la sauvegarde desintérêts de l'Etat et assure l'observation du cahier descharges. A cette fin il assiste avec voix consultative auxassemblées générales de la société ainsi qu'aux réunionsdu conseil d'administration et du comité de direction. Ila droit à la communication de tous les documentsnécessaires à l'accomplissement de sa mission.

Pour clore cette partie signalons encore que la CLTexerce une activité semi-publique en ce que la compa-gnie est chargée de la gestion d'un service public, c'est-à-dire d'une activité qui tend à satisfaire un besoind'intérêt général. Cette nature particulière de l'activitéde la CLT, affirmée par les travaux préparatoires de laloi du 19 décembre 1929, a été reconnue par la jurispru-dence du Conseil d'Etat (arrêts Eurolux du 4 octobre1965 et Mignot du 10 juillet 1981).

Malgré la persistance de la crise économique quirisque d'entraîner une compression non seulement

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passagère des budgets promotionnels auprès des clientsen publicité de la CLT, cette dernière a clôturé l'exer-cice social avec un chiffre d'affaires en augmentation de13,15% par rapport à l'exercice précédent. La pressionconcurrentielle, déjà ressentie l'année précédente, s'estnettement confirmée lors de l'exercice écoulé. L'expli-cation en est que les stations allemandes ont élargi leurréseau en modulation de fréquence pour offrir unconfort d'écoute excellent en qualité stéréophonique,tandis que la couverture monophonique du programmeallemand de RTL en modulation de fréquence a unrayon d'action limité à environ 100 km.

Les émissions en langue française de RTL restent lefleuron de la compagnie, malgré l'âpre concurrence deEurope 1 et des postes de la radio-télédiffusion fran-çaise. De toutes les grandes stations de langue françaiseémettant sur ondes longues, RTL apparaît la moinsatteinte par la concurrence réciproque grâce sans douteau fait que RTL jouit d'un auditoire très fidèle quiapprécie la volonté d'adaptation constante et sansheurts des programmes aux goûts de son vaste public.

Les émissions en langue luxembourgeoise peuventse réjouir d'un nombreux et fidèle auditoire, bien que cedernier soit multilingue et se voit offrir en provenancede la France, de la Belgique et de la République Fédé-rale une palette d'émissions attractives et variées enlangues française et allemande.

A la télévision, la CLT a réussi à étoffer ses programmesde plus de 6% par rapport à l'année précédente. Cettedurée d'émission a permis à la compagnie, grâce à latechnique de dédoublement des écrans vers la France et laBelgique, la diffusion de 34.426 messages publicitairescontre 31.273 au cours de l'année précédente.

En ce qui concerne les projets de la CLT en matièrede télédiffusion directe par satellite de radiocommuni-cation, des contacts suivis ont eu lieu en 1982/83 entrele commissaire du Gouvernement, assisté de manda-taires de la CLT et les autorités françaises qui ont offertau Luxembourg des fréquences sur le satellite françaisde radiodiffusion, dont l'exploitation serait confiée à laCLT et financée moyennant des messages publicitairesdont la CLT disposerait du monopole en France. Cette

offre présente l'avantage de faire bénéficier la CLT del'ellipse de couverture française qui est bien plus favo-rable que l'ellipse des fréquences attribuées au Grand-Duché et permettrait à la CLT d'aligner en conséquencele tarif de ses messages publicitaires. Compte tenu del'enjeu, pour les deux Etats, de ce projet, les négocia-tions s'avèrent délicates, car elles mettent enjeu d'épi-neux problèmes de nature politique, juridique, écono-mique et technique.

D'autre part, dans le même domaine de la télédiffu-sion par satellite, les négociations de la CLT se pour-suivent avec le Gouvernement luxembourgeois en vued'obtenir la concession des fréquences de radiodiffusionpar satellite attribuées au Grand-Duché à la conférencede Genève de 1977.

Il y a de sérieuses raisons d'espérer que les négocia-tions franco-luxembourgeoises ainsi que celles entrenotre Gouvernement et la CLT pourront être clôturées,sur le plan des principes du moins, fin de l'année encours ou dans les premiers mois de l'année 1984.

En contrepartie de la concession de radiodiffusion,dont l'Etat a attribué le monopole à la CLT, le Trésorpublic a perçu de la part de la CLT à début octobre 1983 :

1) en impôts (avances)420,0 mio fr. d'impôt sur le revenu,120,0 mio fr. d'impôt commercial,12,8 mio fr. d'impôt sur la fortune,

soit 552,8 mio fr. au total,

2) en redevances 360 mio fr.A fin 1983 le Trésor touchera encore prévisiblement:140,00 mio fr. d'impôt sur le revenu,40,00 mio fr. d'impôt commercial,

4,28 mio fr. d'impôt sur la fortune,soit 184,28 mio fr. au totalet 360,00 mio fr. en redevances,soit un grand total pour toute l'année 1983 de552,8 + 360 + 184,28 + 360 = 1.457 mio fr.

(Source: Extrait du rapport de Monsieur Pierre Werner,Président du Gouvernement, Ministre d'Etat, à la Chambredes Députés, lors des débats parlementaires sur le projet debudget de l'Etat pour 1984.)

La réunion du Conseil de l'Atlantique Nord à Bruxelles

Les 8 et 9 décembre 1983, le Conseil de l'AtlantiqueNord s'est réuni à Bruxelles en session ministérielle.Nous reproduisons ci-après le texte du communiquéfinal publié à l'issue de la réunion.

Le Conseil de l'Atlantique Nord s'est réuni en ses-sion ministérielle à Bruxelles les 8 et 9 décembre 1983.Les Ministres ont déclaré ce qui suit:

1. Dans l'esprit de cohésion et de solidarité qui lesanime, les Alliés restent déterminés à sauvegarder leurliberté et leur indépendance, à prévenir la guerre et àconstruire les bases d'une paix et d'une sécuritédurables dans la zone de l'OTAN. Ils maintiendront un

potentiel militaire propre à garantir leur sécurité collec-tive. Aucune de leurs armes ne sera jamais utiliséeautrement que pour répondre à une agression. Ilsrestent fermement attachés à la recherche d'une maî-trise des armements équilibrée et verifiable au niveaude forces le plus bas possible et ils oeuvreront pour uneplus grande stabilité et pour des progrès vers unedétente véritable dans les relations Est-Ouest.

2. Les Alliés restent décidés à décourager l'agressionet les tentatives d'intimidation. Ils répondront à leursimpératifs légitimes de sécurité en maintenant les forcesclassiques et nucléaires nécessaires. Ils consacreront les

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ressources et l'énergie voulues à la modernisation desforces classiques, en cherchant à rendre plus efficace etplus équilibrée la coopération transatlantique dans ledomaine des armements. Les Alliés notent avec unevive préoccupation que l'Union soviétique continue àdévelopper son potentiel militaire qui excède largementses besoins de défense, tout en avançant une conceptioninacceptable de sa sécurité, dans la mesure où celle-cisuppose le maintien d'une inégalité à son avantage (1).

3. Les Alliés appellent l'Union soviétique à fairepreuve de modération et de sens des responsabilitésdans son comportement international et à coopérer avecles pays occidentaux pour promouvoir un dialogue Est-Ouest plus constructif visant à réduire les tensionsinternationales. Rejetant tout esprit de confrontation,les Alliés réaffirment leur volonté de développer lescontacts et la coopération avec les pays du Pacte deVarsovie sur la base de l'intérêt mutuel. Gardant uneattitude ferme et réaliste, ils accueilleraient favorable-ment toute proposition sérieuse tendant à restaurer laconfiance entre l'Est et l'Ouest. Les Ministres ontchargé le Conseil Permanent de procéder à une évalua-tion approfondie des relations Est-Ouest, en vue deparvenir à un dialogue Est-Ouest plus constructif, et luiont demandé de présenter un rapport à la réunionministérielle du printemps de 1984.

4. L'Union soviétique porte une lourde responsabi-lité dans l'état actuel des relations internationales. Parson comportement, comme en Afghanistan et à l'égardde la Pologne, par le recours à la persécution de ceux quidéfendent les droits de l'homme, elle a créé des obs-tacles sérieux au développement normal des relationsavec elle (2).

5. La situation en Pologne reste un motif de gravepréoccupation. Certaines des mesures prises par lesautorités polonaises, telles la levée de la loi martiale etl'amnistie de la plupart des détenus politiques, con-trastent avec d'autres mesures, qui consolident ledispositif de répression. Les Alliés appellent les autori-tés polonaises à respecter les aspirations de la popula-tion à une réforme, ainsi que les engagements souscritsdans l'Acte Final d'Helsinki et le Document de Clôturede la réunion de Madrid, notamment en ce qui concernela liberté syndicale et les droits civils. Ils sont prêts àrépondre à des mesures offrant des possibilités derelations politiques et économiques constructives avecl'Ouest.

6. Les Alliés condamnent la poursuite et l'intensifi-cation de l'agression soviétique contre l'Afghanistan enviolation de la Charte des Nations Unies et au méprisflagrant des appels répétés de l'Assemblée générale desNations Unies. Ils déplorent les terribles souffrancesinfligées à la population civile par les forces soviétiques.Le retrait de ces forces est indispensable à un règlementpolitique qui rétablira l'Afghanistan dans son indépen-dance, sa souveraineté et son statut de pays non aligné,permettra le retour volontaire des réfugiés et donnera aupeuple afghan la possibilité d'exercer librement sondroit à l'autodétermination.

7. Des échanges menés sur une base commerciale-ment saine et mutuellement avantageuse, de façon àéviter d'accorder un traitement préférentiel en faveur del'Union soviétique, concourent à l'établissement de

relations Est-Ouest constructives. Dans le même temps,il convient que les rapports économiques bilatérauxavec l'Union soviétique et les pays d'Europe de l'Estdemeurent compatibles avec les préoccupations géné-rales des Alliés en matière de sécurité. Celles-ci com-portent la nécessité d'éviter de créer une dépendance àl'égard de l'URSS ou de contribuer à son potentielmilitaire. Il convient donc d'encourager le développe-ment à l'Ouest de ressources énergétiques. Afin d'éviterque l'Union soviétique continue d'utiliser certainesformes d'échanges pour renforcer sa puissance militaire,l'Alliance demeurera vigilante dans son examen régu-lier des aspects de sécurité des relations économiquesEst-Ouest. Ses travaux contribueront ainsi à éclairer lesgouvernements alliés dans la conduite de leur politiquedans ce domaine. (3)

8. La conclusion positive de la réunion de Madrid estde nature à contribuer au renforcement du processus dela CSCE. Bien que le Document de Clôture qui y a étéadopté reste quelque peu en deçà de ce que les Alliésavaient proposé, il est néanmoins substantiel et équi-libré. Les Alliés attachent une égale importance à lamise en oeuvre par l'ensemble des pays participant à laCSCE de toutes les dispositions convenues tant dansl'Acte Final d'Helsinki que dans le document deMadrid, y compris leurs aspects humanitaires. Unrésultat important a été obtenu à la réunion de Madridavec l'adoption d'un mandat de négociation précis pourla Conférence sur les mesures de confiance et de sécu-rité et sur le désarmement en Europe (CDE), qui doits'ouvrir à Stockholm en janvier 1984.

9. En même temps que par l'équilibre des forces, lapaix peut et doit être mieux assurée grâce à des accordséquitables et véritables de désarmement et de contrôledes armements, en vue desquels les Alliés ont présentéune large série de propositions. Leur volonté d'assurer lasécurité au niveau de forces le plus bas possible a étérécemment démontrée par le fait que les pays membresdu Groupe des plans nucléaires ont annoncé à Monte-bello le retrait d'Europe de 1.400 têtes nucléaires, aprèsla réduction de 1.000 têtes opérée en 1980. Le niveau dustock restant sera ainsi le plus bas que l'Europe auraconnu depuis une vingtaine d'années. Les Alliésdemandent instamment à l'Union soviétique de contri-buer de façon concrète aux efforts de désarmement et dene pas substituer aux actes des propositions de caractèredéclaratoire.

10. Les Ministres soulignent que la double décisionprise en décembre 1979 par les Alliés concernésdémontre la volonté de l'Alliance de préserver la paix etla stabilité au niveau de forces le plus bas possible. LesAlliés concernés réaffirment leur volonté de rechercherun équilibre des forces nucléaires à portée intermé-diaire par des négociations sur la maîtrise des arme-ments avec l'URSS. Le rapport de situation établi par leGroupe consultatif spécial rend compte d'une façon trèscomplète de l'action menée par les Etats-Unis, sur labase de consultations étroites avec les autres Alliésintéressés, pour parvenir à un accord à ce sujet.

Malheureusement, les négociations de Genève n'ontpas encore abouti à des résultats concrets à cause desefforts de l'Union soviétique pour garder le monopoledes missiles FNI à longue portée basés à terre. Aussi les

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déploiements de Pershing-2 et de missiles de croisière àlanceur terrestre se déroulent-ils conformément à ladécision de décembre 1979. En mettant à profit lesprogrès déjà réalisés à Genève, il demeure possibled'arriver à un accord éliminant l'ensemble des armesaméricaines et soviétiques de cette catégorie ou, auminimum, les limitant au niveau le plus bas possible.Les Alliés concernés soulignent qu'ils sont disposés àpoursuivre la négociation et à arrêter, modifier ouinverser le processus de déploiement en cours, sur labase d'un tel accord. Ces Alliés continueront à se con-sulter étroitement sur les actions devant permettred'atteindre cet objectif.

Les Alliés prennent note avec regret de la décisioninjustifiée de l'URSS de quitter la table de négociation àGenève. Pendant les deux années écoulées, les Etats-Unis ont négocié alors même que l'Union soviétiquepoursuivait ses déploiements de SS-20, dont le nombrede têtes nucléaires a augmenté de plus de 300. Les Alliésestiment que la réduction des armements nucléaires pardes accords négociés est dans l'intérêt de l'Union sovié-tique aussi bien que des Etats-Unis. Ils lancent donc unappel pour que les négociations bilatérales sur les forcesnucléaires à portée intermédiaire reprennent dès quepossible (4).

11. Les Alliés appuient pleinement les efforts desEtats-Unis aux conversations sur la réduction desarmements stratégiques (START) et ils accueillent avecsatisfaction les récentes initiatives américaines quiposent les bases d'une diminution significative desarsenaux stratégiques américains et soviétiques. LesEtats-Unis ont notamment indiqué qu'ils étaient dispo-sés à étudier des compromis dans les domaines aux-quels s'attachent un intérêt et un avantage particulierspour chaque partie afin de parvenir à un accord équi-table qui favorise la stabilité. Les Alliés appellentl'Union soviétique à répondre à ces initiatives dans unesprit positif. A cet égard, ils notent avec regret que, toutrécemment, l'Union soviétique s'est refusée à convenird'une date précise pour l'ouverture de la prochainesession des conversations.

12. La Conférence sur les mesures de confiance et desécurité et sur le désarmement en Europe (CDE) est unélément important du processus de la CSCE et offre despossibilités nouvelles d'accroître la sécurité dansl'ensemble de l'Europe. Les pays alliés y proposeront unensemble complet de mesures concrètes, conformes aumandat agréé à Madrid, destinées à promouvoir latransparence militaire afin d'accroître la confiance et lasécurité et de réduire les risques d'attaque par surprise.Ils sont déterminés à négocier activement en vue d'obte-nir un accord rapide sur des mesures politiquementcontraignantes, militairement significatives et véri-fiables qui couvriront l'ensemble de l'Europe. Pourmarquer cette détermination, les Ministres participe-ront eux-mêmes à la Conférence.

13. Les Alliés qui participent aux conversations surles réductions mutuelles et équilibrées de forces(MBFR) réaffirment leur détermination de rechercherune solution mutuellement acceptable aux problèmesqui font encore obstacle à des progrès. Le projet de traitéqu'ils ont présenté l'an dernier constitue une base pourun bon accord. Ces Alliés espèrent que les déclarationsles plus récentes de l'Est dénotent une disposition

nouvelle à aborder les problèmes fondamentaux qui seposent depuis longtemps aux négociations de Vienne etils examinent l'état de ces négociations à la lumière deces déclarations notamment.

14. Au Comité du désarmement, les participantsoccidentaux continuent à rechercher activement desaccords concrets de désarmement. Ils considèrentcomme une tâche prioritaire de ce Comité l'élaborationd'une convention verifiable d'interdiction de la mise aupoint, de la production et du stockage de toutes lesarmes chimiques.

Les Alliés demeurent gravement préoccupés par defortes présomptions établissant qu'au mépris du droitinternational, des armes chimiques continuent d'êtreemployées en Asie du Sud-Est et en Afghanistan et quel'Union soviétique est impliquée dans l'utilisation detelles armes (5). Ils notent avec satisfaction la poursuitepar les Nations Unies de l'élaboration de procéduresd'enquête sur les allégations concernant l'emploid'armes chimiques.

Dans le cadre des efforts visant à prévenir une courseaux armements dans l'espace extra-atmosphérique, lesAlliés ont également proposé au Comité du désarme-ment qu'il soit procédé à l'examen du droit internatio-nal existant concernant l'usage pacifique de l'espaceextra-atmosphérique.

15. Le maintien d'une situation calme à Berlin etalentour demeure d'une importance fondamentale pourles relations Est-Ouest. Ceci suppose en particulier quel'accord quadripartite du 3 septembre 1971 continuerad'être strictement respecté et pleinement appliqué. LesAlliés espèrent que la poursuite et le développement dela coopération entre la République Fédérale d'Alle-magne et la République démocratique allemandebénéficieront à Berlin et à la population des deux Etatsen Allemagne et renforceront la paix en Europe dansl'état actuel des relations internationales.

16. Les Alliés demandent instamment que soientpartout respectés la souveraineté des Etats et le non-alignement authentique. Ils reconnaissent que desévénements se produisant en dehors de la zone duTraité peuvent affecter leurs intérêts communs en tantque membres de l'Alliance. Des consultations serontorganisées en temps opportun sur de tels événementss'il est reconnu que ces intérêts communs sont affectés.Des moyens militaires suffisants doivent être dispo-nibles dans la zone du Traité pour maintenir un disposi-tif de défense adéquat. Les Alliés qui en ont la possibi-lité s'efforceront d'apporter un soutien aux Etats souve-rains demandant une aide face à des menaces dirigéescontre leur sécurité et leur indépendance. Ceux desAlliés qui sont en mesure de faciliter le déploiement deforces hors de la zone du Traité pourront le faire sur labase de décisions nationales.

17. Les Alliés condamnent les actes de terrorisme,qui constituent une menace pour les institutions démo-cratiques et pour la conduite de relations internatio-nales normales. Rappelant les termes pertinents de ladéclaration de Bonn, ils réaffirment leur déterminationde prendre des mesures efficaces pour prévenir etéliminer ces actes criminels.

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18. Les Alliés rappellent leur attachement à l'article 2du Traité de l'Atlantique Nord et réaffirment l'impor-tance des programmes conçus au bénéfice des écono-mies des pays membres moins favorisés.

19. Les Ministres ont pris note avec regret de l'inten-tion du Secrétaire général M. Joseph Luns de quitter sonposte. Ils ont invité Lord Carrington à assumer lesfonctions de Secrétaire général de l'Organisation à daterdu 25 juin 1984 et ont pris note avec satisfaction de laréponse positive de Lord Carrington.

20. La réunion du printemps de 1984 du Conseil del'Atlantique Nord en session ministérielle se tiendra àWashington au mois de mai.

Le Ministre des affaires étrangères de l'Espagne ainformé le Conseil de l'Atlantique Nord de l'examen

entrepris quant à la participation de l'Espagne àl'Alliance et en conséquence réservé la position de songouvernement sur le présent communiqué.

1) La Grèce a exprimé son avis sur la seconde partie de ladernière phrase de ce paragraphe.

(2) La Grèce a exprimé son avis sur le contenu de ce para-graphe.

(3) La Grèce rappelle sa position sur différents aspects de ceparagraphe.

(4) Le Danemark et la Grèce réservent l'un et l'autre leurposition sur ce paragraphe.

(5) La Grèce rappelle sa position, telle qu'elle a été expriméelors des précédentes sessions ministérielles.

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