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Actes des conférences
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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ACTES DES CONFERENCES
Les conférences du salon La Terre est Notre Métier 2014 se déroulent sur 3 journées, du
vendredi 10 octobre au dimanche 12 octobre 2014. Au total 21 conférences de 1h30 sont
programmées sur ces 3 journées.
Ces conférences s'adressent aux agriculteurs, aux techniciens et animateurs du développement
agricole durable, aux étudiants et élèves en formation, futurs ingénieurs agronomes, aux
distributeurs et transformateurs et ainsi qu'aux élus.
Les actes contenus dans ce document sont des résumés des conférences du Salon La Terre est
Notre Métier 2014.
Ce document est publié avant les conférences afin de pouvoir être diffusé directement sur le
salon. Il est donc possible que les présentations orales diffèrent légèrement en fonction des
orientations qu'apportera le public.
Ces actes sont également disponibles sur le site Internet du salon: www.salonbio.fr
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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Table des matières
Nouvelle réglementation bio européenne : ce qui change pour les acteurs de la bio. ..........................4
Nouveaux bio en élevage laitier : de l’intensif à l’extensif. ...................................................................8
Du grain au pain : le projet Pays Blé .................................................................................................. 13
S’installer en maraîchage biologique ................................................................................................. 18
Protéines en alimentation animale bio : disponibilité et perspectives ............................................... 25
Afterres 2050 : Quelle utilisation des terres en 2050 en France ? ...................................................... 30
S’installer ou se convertir en élevage bovin lait bio : les clés de la réussite ........................................ 36
Gérer, c’est décider ! Définir sa stratégie de gestion sur sa ferme ..................................................... 40
Agroforesterie: quels intérêts pour les élevages bretons? ................................................................. 42
L’agriculture biologique: prix Nobel de l`économie ? Zoom sur les pratiques collectives des producteurs bio. ............................................................................................................................... 45
Quand Eau & Bio s’allient pour un développement local durable : 30 bonnes raisons de passer à l’action ! ........................................................................................................................................... 48
Atelier thématique Eau et bio N°1 : Transversalité des politiques territoriales pour des projets structurants de développement de l’agriculture biologique .............................................................. 49
Atelier thématique Eau et bio N°2 : Des outils innovants au service de la maîtrise d’usage des sols... 50
Atelier thématique Eau et bio N°3 : Des initiatives pour rendre l’alimentation bio accessible à tous .. 51
S’installer en ovin : parasitisme, sélection, alimentation, commercialisation ..................................... 52
PAC 2014: quels changements dans vos fermes? .............................................................................. 56
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
4
Nouvelle réglementation bio européenne : ce qui change pour
les acteurs de la bio. Dominique Marion (IFOAM Europe), Juliette Leroux (FNAB).
La Commission européenne a proposé en mars 2014 un projet de nouveau règlement européen
pour l'agriculture biologique. Ce projet a déjà provoqué beaucoup de débats dans les
mouvements bio européens avec des réactions parfois très fortes de la part de certains de nos
collègues.
7 ans après la précédente révision, longuement débattue et critiquée à La Terre est Notre
métier, pour son orientation libérale, qu'en est-il de cette proposition ?
D'où vient-elle, quels sont ses objectifs, dans quel contexte s'insère-t-elle ?
Que contient le projet et quels impacts potentiels pour les producteurs bio ?
Et quels sont les suites possibles ?
1 - Pourquoi un nouveau règlement bio ?
L'une des premières réactions des mouvements bio, y compris français, à l'annonce d'une
nouvelle révision a été la surprise et une forte réticence : le cadre actuel est en application
depuis seulement 5 ans et l'on termine juste de le compléter (Règlement contrôle fin 2012).
Pourquoi encore dépenser une énergie folle à négocier un nouveau texte puis à en fixer
l'application ? N'y avait-il pas d'autres urgences pour la bio ?
Les surfaces bio ont doublé dans l'UE ces 10 dernières années mais le marché a quadruplé.
Pour la Commission européenne, c'est le signe que la politique européenne de soutien de la
bio est déficiente et que le règlement est inadapté. Les récentes affaires de fraudes (en Italie
notamment) et les demandes de divers groupes (associations de consommateurs, de protection
des animaux...) ont aussi joué.
Mais cette nouvelle révision tient également beaucoup à la vision personnelle du Commissaire
Dacian Ciolos (sur le départ), historiquement proche du réseau FNAB, défendant une bio
proche des principes et clairement différenciée du conventionnel. Pour lui, la bio doit être
maîtrisée par les paysans et permettre aux petites fermes, notamment de l'est de l'UE, de se
maintenir.
Une vision qu'il a également tenté de faire passer dans la réforme de la PAC, avec le succès
très mitigé que l'on connaît.
Les lacunes du règlement actuel sont d'autre part assez claires : domaines non couverts,
complexité très importante, nombreuses exceptions, interprétations divergentes d'un État
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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membre à un autre... et la Commission fait également remarquer que la précédente révision ne
s'est pas vraiment attaqué aux pratiques mais uniquement aux règles de commercialisation
(étiquetage, importations, subsidiarité...).
C'est pour toutes ces raisons que la Commission a lancé ce chantier qui a débuté par une étude
d'impact. Celle-ci a duré 2 ans et demi, avec de nombreuses auditions et une consultation
grand public qui a réuni près de 45000 réponses (une chiffre très important pour ce genre
d'exercice), dont la moitié... de France. Mais par manque de données et également en raison
de questions très orientées dans la consultation, cette étude d'impact est bancale et montre une
assez mauvaise compréhension du secteur.
Cette étude a débouché sur 2 textes :
1) un plan d'action européen (équivalent EU de notre plan Ambition bio), qui se
concentre notamment beaucoup sur la recherche (alternatives au cuivre, semences
adaptées à la bio...)
2) un projet de règlement, proposé en mars
2 -Le projet de nouveau règlement de la bio
Argumentaire
La Commission Européenne défend à travers ce premier projet une agriculture bio plus
proche des principes. Parmi ses objectifs figurent :
• l’intégration des « petites fermes » en bio,
• la diminution du poids administratif, la fin des dérogations
• une agriculture biologique proche de la demande des consommateurs
Parmi ses arguments, on peut notamment citer :
− Réduire le décalage entre la vision qu’ont les consommateurs de la bio et son
règlement permettra d'assurer un développement pérenne de la bio
− Il faut mettre fin des dérogations pour permettre le développement des intrants bio et
pour simplifier le texte.
− Le système de certification est trop administratif, trop cher et pas assez efficace, la
certification de groupe et le passage à une certification entièrement basée sur l’analyse
de risque permettront de l'améliorer.
− L’existence de marques privées est « un problème pour le développement de la bio ».
Il faut rendre les règles plus strictes pour qu’elles disparaissent.
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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Contenu
Un texte " unique" avec les principes cadre dans les articles et les règles détaillées en
annexe, mais avec des renvois à des actes délégués. Le texte sera donc complété
ultérieurement par des règles édictées directement par la Commission européenne (avec un
droit de réaction de la part du Conseil et du Parlement), ce qui laisse encore actuellement de
nombreuses inconnues.
L 'abondance d'actes délégués risque de nuire à la stabilité du texte et donne trop de pouvoir à la Commission européenne.
Seules quelques règles plus str ictes(suppression de la mixité, renforcement du lien au sol,
interdiction des mutilations sauf castration…), mais également la suppression à terme de la
quasi-totalité des dérogations (semences, jeunes animaux, ...) et l'apparition d'un principe de
seuil de déclassement des produits sur les pesticides. Des mesures transitoires sont prévues
mais non encore définies.
Certaines dérogations doivent effectivement arriver à leur terme, d'autres nécessitent des mesures transitoires plus ou moins longues et enfin certaines doivent être
conservées. D'autre part certaines règles doivent être renforcées (OGM, fertilisation,
traitements vétérinaires..). Enfin, les seuils de déclassements ne seraient possibles que si
des règles de compensation justes étaient prévues, ce qui n'est pas le cas actuellement.
Des changements de fond sur les contrôles, notamment avec l’apparition de la
certification de groupe de producteurs, sans que l'on sache vraiment comment elle serait
mise en place et le passage a un fonctionnement par analyse de risque (suppression du
contrôle annuel minimum).
La certification de groupe peut être une solution intéressante pour les petits
producteurs à condition qu'elle soit effectivement maîtrisée par les producteurs. Le
contrôle minimum par an est un élément de confiance du consommateur.
3 – Quel processus de décision ?
Le projet de texte a été publié en mars 2014 par la Commission européenne.
Il a été envoyé au Conseil (États membres), qui a commencé à l'étudier. Le Conseil devrait
rendre un rapport avant la fin de l'année, proposant des amendements.
En septembre, il a été également envoyé au nouveau Parlement européen, qui a donc débuté
ses travaux sur le texte. Ils ont désigné un rapporteur, Martin Hausling, député vert allemand
et producteur bio. Le Parlement espère publier son rapport (contenant ses demandes
d'amendements) avant la fin de l'année.
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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Si les amendements proposés par les deux institutions ne sont pas strictement identiques (ce
qui est très probable), on entrera dans une phase de négociation dite « trilogue » entre la
Commission européenne, le Conseil et le Parlement.
Le texte modifié sera ensuite mis au vote au Conseil et au Parlement. Il sera ensuite complété
sur ses parties manquantes via des règlements pris par actes d’exécution (Commission assistée
de représentants des États membres) ou par actes délégués (Commission toute seule).
La Commission européenne espère une application en juillet 2017.
4 – Et maintenant qu'est-ce qu'on fait ?
Les opérateurs bio français se sont évidemment impliqués dans le débat via leurs
organisations nationales mais aussi européennes.
S'il y a globalement une entente sur le fond du texte, les stratégies divergent, entre
négociation et rejet pur et simple du texte.
L'unité bio de la Commission campe aujourd'hui sur ses positions.
Le Conseil s'est montré très critique sur le texte, sans pour autant envisager un rejet.
Enfin, il est difficile de prévoir dès maintenant l'orientation du Parlement mais la personnalité
du rapporteur devrait jouer : à la fois très au point sur le contenu du texte et ses implications
pratiques et naturellement influencé par les positions de ses collègues allemands.
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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Nouveaux bio en élevage laitier : de l’intensif à l’extensif. Guillaume Michel (GAB22)
Engagé en 2010 et piloté par le réseau GAB-FRAB en collaboration avec de nombreux
partenaires (Chambre d’agriculture régionale, Initiative Bio Bretagne, Bretagne Conseil
Elevage Ouest, Cogedis Fideor), le projet d’étude visant à analyser l’évolution des systèmes
d’exploitation bovin lait dits « plus intensifs » entrés en conversion en 2009 s’est achevé en
2014. Retour sur les principales conclusions de ces 5 années d’étude.
Rappel du contexte de l’étude :
La production laitière biologique a connu un « boom » des conversions en 2009-2010. Celui-
ci s’explique principalement en 2009 par un contexte laitier conventionnel peu favorable, un
prix du lait biologique élevé, des aides à la conversion incitatives et un cahier des charges
relatif à l’Agriculture Biologique (AB) plus permissif selon certains paramètres (part
d’ensilage dans la ration, nombre de traitements vétérinaires autorisés notamment). Ainsi, un
nombre conséquent de fermes est entré en conversion sur cette période et cela avec des
systèmes de production qui pour une partie d’entre eux étaient relativement éloignés de
ce qui s’observait usuellement en AB. Le réseau GAB/FRAB a donc suivi le parcours de 14
de ces fermes au cours de leur conversion à l’AB.
Des éleveurs qui ne reviendraient pas sur leur choix
80% des fermes suivies ont développé un système fourrager basé sur l’herbe pâturée
Avant conversion, les fermes suivies possédaient toutes plus de 10% de maïs dans la SFP(3)
(9/14 en avaient plus de 20%). Cinq ans après la conversion, toutes les fermes ont moins de
20% de maïs, 11/14 en ont moins de 10%, 3/14 n’en cultivent plus. Ces surfaces en maïs ont
été compensées par la mise en place de surfaces en prairies. Celles-ci sont exploitées
prioritairement par le pâturage et permettent de constituer les stocks hivernaux.
Une production laitière de 4100 à 7000 L/VL(4)
Observer une diminution de la production laitière lors d’un passage en AB constitue un frein à
la conversion en AB sur le terrain. Le suivi réalisé a montré que l’ampleur de cette diminution
était liée en grande partie au niveau de production initial et à l’importance de l’évolution du
système fourrager lors de la conversion. Concrètement, cette baisse s’échelonne de 1200L à
300L/VL suivant les fermes. Les baisses les plus importantes ont été observées chez les
éleveurs ayant diminué de manière très importante la part de maïs dans la SFP. Enfin, quand
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la surface le permettait, cette baisse de production a été compensée par une augmentation du
nombre de vaches.
Des animaux en meilleure santé et des coûts vétérinaires moyens inférieurs à 40€/UGB
lait
D’après de nombreuses études et les retours de terrain, la gestion de la santé du troupeau
constitue un des freins majeurs à la conversion en AB des élevages laitiers. La réalité est tout
autre et l’étude conduite vient le confirmer avec force. Les 14 éleveurs suivis ont tous vus,
sans exception, une évolution positive de la santé de leurs animaux tout en diminuant leurs
coûts vétérinaires (60€/UGB avant conversion et 40€/UGB en 2ème année bio).
Un coût alimentaire moyen inférieur à 85€/UGB lait
Le développement du pâturage est une des clés d’un coût alimentaire maîtrisé en AB. Les 14
fermes suivies ont vu celui-ci diminuer au cours de la conversion. Au-delà du
développement des surfaces en herbe, d’une taille de cheptel calibrée pour la SFP disponible,
cela s’explique par une autonomie en concentrés renforcée.
Une efficacité économique moyenne renforcée avec la conversion en AB
Comme le montre les éléments présentés ci-dessus, la conversion en AB peut impliquer des
changements profonds du système de production (modification de l’assolement et de la ration,
diminution de la production par vache). Pendant la période de conversion en AB, ces
changements peuvent représenter des charges en plus (semis de prairies, éventuels achats de
concentrés biologiques), des produits en moins (moins de lait produit). Celle-ci est plus ou
moins facile à gérer suivant les situations. Afin de la franchir sereinement, il est donc
préférable d’avoir une situation économique saine, laissant des marges de manœuvre si
nécessaire. Une fois en AB, la rémunération du lait est supérieure et vient compenser ces
éventuelles charges en plus et/ou produits en moins. Concrètement, toutes les fermes suivies
ont vu leur efficacité et leur viabilité économique maintenue voir améliorer avec la conversion
en AB.
Impact de la stratégie alimentaire choisie sur les résultats techniques et
économiques
Comme présentée précédemment, le développement de l’herbe pâturée constitue le socle
commun des évolutions systémiques enclenchées par les fermes suivies lors de leur
conversion bio. Toutefois, selon les cas, le pâturage n’occupe pas toujours la même place et
des orientations nouvelles en AB ont pu être identifiées et caractérisées. Ces stratégies sont au
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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nombre de trois et ont été établies selon la part de la ration annuelle fourni par le
pâturage, par les stocks et par l’affouragement en vert.
Des stratégies alimentaires aux caractéristiques bien tranchées
Stratégie maximisation du pâturage (7/14)
Les exploitations de ce groupe sont caractérisées par :
- Une forte augmentation du pâturage (de 47 à 59%)
- Une importante diminution du maïs ensilage (de 33 à 4%)
- Une augmentation des stocks à base d’herbe : ensilage, enrubannage, foin (de 16 à 31%)
En règle générale, les fermes de cette stratégie possèdent un bon parcellaire ou mettent en
œuvre des moyens pour l’optimiser et/ou le développer. Faire du lait avec ce que l’on peut
produire sur l’exploitation est une idée-phare (adéquation sol-troupeau). Le maïs est encore
présent mais en proportion très faible, certains producteurs n’en cultivent plus.
Stratégie mixte, fondée sur les stocks et le pâturage (3/14)
Ce système évolue assez peu depuis l’entrée en conversion :
- Une légère diminution du maïs ensilage (de 29 à 23%)
- Compensée par une augmentation des stocks d’herbe (de 15 à 25%)
- Un pâturage qui évolue peu (de 45 à 48%)
Ces exploitations se place plutôt dans un système de polyculture-élevage, les cultures étant la
variable d’ajustement du système fourrager : vente ou achat suivant le niveau des stocks
fourragers.
Stratégie affouragement en vert (4/14)
Les exploitations de ce groupe se caractérisent par :
- Un développement de l’affouragement en vert (de 12 à 41%)
- Une diminution de la part d’ensilage de maïs (de 44 à 15%)
- Une diminution du pâturage (de 27 à 17%)
- Une augmentation des stocks d’herbe (de 8 à 22%)
La première explication de cette stratégie est la part de surfaces accessible pour les VL.
Généralement, les éleveurs ont opté pour l’affouragement en vert pour valoriser de l’herbe
mise en culture sur des surfaces non accessibles. Aussi, ce sont généralement des exploitants
qui souhaitent maintenir un rendement laitier important. La ration est donc réfléchie en
permanence pour maintenir la production.
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L’ampleur de la perte de production laitière par VL lors de la conversion diffère selon la
stratégie alimentaire choisie
Les fermes de la stratégie affouragement en vert sont celles-qui ont subit la chute de
production laitière la plus importante depuis la conversion. Ce sont également elles qui, une
fois en AB, ont conservé le niveau de production par VL le plus important. Ces fermes ont
généralement conservé une quantité de concentrés par litre de lait plus importante.
La maximation du pâturage induit le coût alimentaire le plus faible
L’étude du coût alimentaire pour ces 3 stratégies confirme avec force que l’herbe pâturée
constitue le fourrage le plus économe. Concrètement, les fermes de cette stratégie ont un
coût alimentaire de 50% inférieur à la stratégie affouragement en vert et de 25% inférieur à la
stratégie stock.
Maximiser le pâturage pour une meilleure efficacité économique
L’ensemble des fermes suivies ont vu leur efficacité économique s’accroître avec la
conversion en AB, et cela quelque soit la stratégie alimentaire choisie. Toutefois, des
disparités apparaissent entre les différentes stratégies. Concrètement, les fermes qui sont sur
des stratégies faisant appel à une part importante de stocks (herbe et/ou maïs) et à
l’affouragement en vert sont moins efficaces que celles-qui ont privilégiées la
maximisation du pâturage.
Que retenir pour mettre en place une conversion bio demain ?
Avant de se convertir, une réflexion autour de l’ensemble de son système exploitation
s’impose. Cette étude a permis d’insister sur quelques éléments à prendre en compte dans une
telle réflexion.
Le passage d’un système très intensif à un système autonome et économe est possible mais
risqué. Dans tous les cas, une conversion doit être accompagnée (agriculteurs bio, conseillers
spécialisés…).
La conversion en AB ne doit pas avoir pour but de redresser une exploitation déjà en
difficultés. Une situation financière saine est donc préférable, d’autant plus que les années de
conversion peuvent être difficiles.
Les contraintes et objectifs différents conduisent à la mise en place de stratégies différentes
lors de la conversion, mais toutes les formes de valorisation de l’herbe peuvent fonctionner
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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(pâturage, stocks, affouragement en vert), à conditions de respecter les fondamentaux. La
gestion de l’herbe et le pâturage sont les clés du bon fonctionnement des systèmes
étudiés. Il est toujours intéressant de valoriser la surface accessible par le pâturage, même s’il
est limité. Privilégier l’autoproduction et limiter les achats permet également de mettre en
place un système autonome. Dans tous les cas, il s’agit d’optimiser son système pour
gagner en efficacité et être résilient face aux aléas extérieurs.
Guillaume MICHEL
Avec l’appui d’Edith CHEMIN (en stage de fin d’étude)
GAB d'Armor
Tel : 02.96.74.75.65
Email : [email protected]
(1) Agriculture Biologique(2) Réseau des Associatifs des Agriculteurs Biologiques Bretons(3) Surface fourragère principale(4) Vache laitière
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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Du grain au pain : le projet Pays Blé Estelle Serpolay et Camille Vindras(ITAB)
Contexte
La demande des consommateurs pour une alimentation saine, diversifiée et locale (notamment
bio) est en augmentation. Soucieux de répondre à cette demande, et plus largement engagés
dans des démarches agroécologiques, des agriculteurs, boulangers et paysans-boulangers
cherchent à optimiser la sélection, la culture et la transformation des variétés de blé qu’ils
cultivent, et notamment des variétés-populations. En effet, les variétés commerciales
modernes (génétiquement très homogènes) n’étant pas toujours adaptées à leurs pratiques
agronomiques ni boulangères, de plus en plus de praticiens se tournent vers des variétés-
populations (génétiquement diversifiées). L’usage de ces variétés-populations soulève de
nombreuses questions quant à leur adaptation aux pratiques agronomiques et boulangères de
ces praticiens, ainsi que sur les qualités organoleptiques du pain. Afin d’explorer ces
questions, des agriculteurs et boulangers de l’association Triptolème (qui travaille sur la
biodiversité cultivée dans l’Ouest de la France) ont participé à un programme de recherche
participatif avec l’INRA de Rennes : PaysBlé. Ce projet a été financé par la Région Bretagne
(2009-2012) et a été complété par des fonds européens dans le cadre du projet de recherche
SOLIBAM (2010-2014). A travers une démarche innovante, participative et
transdisciplinaire, ce projet de recherche a étudié les influences de la variété et du terroir tout
au long de chaîne de production (du grain au pain).Une grande quantité de données a été
récoltée et nécessite un long travail de traitement ; les premiers résultats donnent déjà des
pistes de compréhension des influences des différents facteurs étudiés.
Problématique et objectifs PaysBlé :
Le projet vise à favoriser le développement d’une filière courte de qualité par l’amélioration
de la compréhension des processus en jeu, du champ au produit, afin de faciliter l’adaptation
des pratiques aux objectifs des praticiens. Cette problématique est peu prise en compte par la
recherche institutionnelle qui n’intègre d’ailleurs en général pas ou peu les praticiens dans les
expérimentations. Or, non seulement les praticiens, mais aussi les consommateurs sont de plus
en plus demandeurs d’un rapprochement entre science et société. Les objectifs de PaysBlé
sont donc variés tant sur le plan scientifique que sociétal.
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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PaysBlé a donc étudié les impacts de l’environnement et de la diversité génétique du blé, ainsi
que les interactions entre ces deux facteurs, dans des conditions d’agriculture biologique et de
panification au levain naturel pour que les praticiens puissent mieux comprendre et maîtriser
la qualité de leurs produits. Cette étude a été réalisée de manière globale, transdisciplinaire
(agronomie, meunerie, boulangerie, analyse sensorielle) et participative, ce qui est une
innovation en matière de recherche.
Une démarche expérimentale innovante
Pour répondre aux nombreuses questions posées par la problématique, un dispositif
participatif et en « conditions réelles » a été mis en place. L’équipe de recherche, aux côtés
des praticiens, a organisé la mise en place et le suivi des essais, qui se sont déroulées dans les
champs des agriculteurs et les fournils des boulangers, ainsi que l’évaluation organoleptique
qui a été faite par des consommateurs.
L’expérimentation s’est basée sur l’étude de trois variétés de blé, choisies de manière à
maximiser leurs différences génétiques afin de mieux identifier les facteurs des variations
observées (environnement et pratiques boulangères notamment). Ces trois variétés avaient un
gradient de diversité génétique croissant : Renan (variété commerciale lignée pure,
génétiquement homogène), Sixt sur Aff (une population déjà cultivée par quelques
agriculteurs, génétiquement plus hétérogène que Renan) et la Population Dynamique de
Florent (un mélange de 11 variétés-populations, dont Sixt sur Aff, génétiquement très
hétérogène). Elles ont été évaluées du sol au pain (au champ, en laboratoire pour la farine, au
fournil et dans l’assiette) sur 3 années de cultures (2 pour l’évaluation de la qualité
sensorielle).
3 à 6 agriculteurs ont cultivé les trois variétés côte à côte chaque année, dans des conditions
environnementales diversifiées. De nombreux descripteurs de l’environnement ont été
collectés afin d’essayer d’évaluer leur impact sur le comportement des variétés du grain au
pain. Ils concernaient le sol (mesures physico-chimiques et de la vie du sol), le climat
(ressenti par les agriculteurs) et les pratiques agronomiques.
Au champ, des mesures classiques ont été collectées sur les plantes telles que le rendement et
ses composantes, l’aspect sanitaire, la présence d’adventices, la couverture du sol…
Au moulin, la récolte a ensuite été analysée sur des critères technologiques meuniers
classiques (rendement farine, tailles des particules, protéines, glutens, amidons, alvéomètre de
Chopin, absorption de l’eau, sédimentation, dureté…).
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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Au fournil, les variétés ont été testées par des boulangers et chercheurs. Les observations
effectuées ont été récoltées selon un protocole BIPEA (test de panification normalisé
permettant de comparer les pains d’un laboratoire à un autre) adapté par les partenaires du
projet à la panification au levain naturel. Le comportement de la pâte au pétrissage
(consistance, extensibilité, hydratation…), au pointage (pousse, suintement, tonicité…), au
façonnage (allongement, déchirement…), à l’apprêt (porosité, cloquage…), à la mise au four
(collant, expansion…) et à la sortie du four (aspect du pain et de la mie) a été noté.
Dans l’assiette, la qualité sensorielle a été évaluée par des consommateurs (boulangers et
grand public) à travers une épreuve de Napping®. Ce test, qui est une mesure globale et
spontanée de la qualité sensorielle, permet, sans compétences préalables, de positionner les
pains les uns par rapport aux autres sur un espace sensoriel et d’expliquer qualitativement les
différences constatées.
Différents types d’analyses de ces données nous ont permis et permettront encore par la suite
d’appréhender les interactions entre les variétés testées et leur environnement à chaque étape
de la production et de manière globale.
Résultats
Comportements agronomique et technologique des variétés :
Les résultats des analyses agronomiques et technologiques montrent une tendance
comportementale commune des deux populations (Sixt et la population dynamique) par
rapport à la variété Renan pour certains critères majeurs. Ainsi, il semble que Renan se
caractérise par une plus grande présence d’adventices, un moins bon aspect sanitaire, moins
de verse, des épis plus productifs, un plus faible rendement en farine, moins de glutens et
protéines que les populations. Malgré ces différences sur des critères importants, nous notons
qu’il n’y a pas de différences significatives de rendement entre les 3 variétés sur l’ensemble
des essais. Cependant, Renan montre une variabilité plus importante que les populations d’un
essai à un autre (donc une stabilité moindre). Il y a souvent une interaction forte entre les
facteurs variété et environnement qui reste encore à étudier et qui implique que le facteur
sélection (ou choix de la variété) est un levier pour les agriculteurs pour atteindre leurs
objectifs dans leur environnement particulier.
Qualité finale du pain
Les trois facteurs étudiés (environnement, variété, boulanger) semblent impacter la qualité
sensorielle du pain et le facteur boulanger apparaît dominant, certainement à cause du rôle
important du levain dans la qualité (diversité des microorganismes selon les boulangers).
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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L’environnement semble impacter la texture du pain, et la variété les caractéristiques de
saveurs. Pour les saveurs, l’impact de la variété est cependant peu importante, ce qui
suggérerait la faible pertinence du levier de sélection pour agir sur la qualité. Or, d’autres
projets ont au contraire montré l’importance de la variété dans les saveurs du pain. En effet,
une étude complémentaire à PaysBlé reliant des sources bibliographiques sur la composition
en nutriments des variétés tend à montrer que les caroténoïdes, présents dans les blés dits
« rouges » (caractéristique variétale), pourraient avoir un rôle favorable dans l’expression du
goût du pain car ils en limiteraient l’altération dans le temps. De plus, des observations chez
plusieurs paysans-boulangers du Réseau Semences Paysannes à travers la France ont mis en
évidence une grande proportion d’épis « rouges » dans leurs mélanges-boulanges. Ces
résultats contradictoires avec ceux de PaysBlé peuvent s’expliquer par le choix des variétés
dans notre projet. Elles ne sont pas nombreuses et n’ont pas été choisies pour leurs spécificités
de saveurs. Cela constitue une limite de l’étude.
Cette singularité de la qualité du pain qui varie selon les trois facteurs étudiés se rapproche de
la définition du terroir en viticulture et pourrait contribuer à l’identité des produits de terroir
pour une meilleure valorisation de ces produits. On pourrait parler de terroir « panicole ».
Relations diversité-stabilité :
Si l’on propose comme définition d’une « bonne variété » pour l’agriculture biologique, on
peut répondre que c’est une variété qui a des bonnes performances et des performances
stables dans diverses conditions d’agriculture biologique. Nous avons donc passé les résultats
des trois variétés testées à ce crible et il est apparu que les deux populations appariassent
comme les meilleures variétés de manière globale. Cependant, on remarque une dichotomie
pour la stabilité selon les critères testés. En effet, sur les critères agronomiques et
technologiques, ce sont les populations les plus stables alors que c’est la lignée pure pour la
panification et la qualité sensorielle. Cela confirme les observations empiriques des praticiens
qui ont remarqué que les populations avaient une bonne capacité à tamponner les variations
environnementales et que les lignées pures (et en particulier Renan) avaient une bonne
aptitude à la panification et un goût stable mais qui ne comporte pas d’arôme particulier. Ces
tendances nous montrent que la variété, et donc la sélection, est un levier sur lequel peuvent
jouer les agriculteurs et les boulangers en fonction de la connaissance de leur environnement,
pour atteindre leur objectif de qualité finale.
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Conclusion et perspectives :
Le grand nombre de variables étudiées limite la lisibilité des analyses et la mise en évidence
de corrélations significatives ; de plus nous ne pouvons pas élargir nos conclusions aux types
variétaux car nous n’avons qu’une variété représentative de chaque type variétal testé.
Cependant, les premiers résultats du projet permettent de confirmer les observations des
praticiens.
Il reste encore beaucoup de travail car la masse des données est importante. Des analyses
permettant d’étudier plus en détail les liens entre les caractéristiques environnementales et le
comportement des variétés à chaque étape de la production sont notamment prévues. Cela
permettra d’affiner les possibilités d’utiliser les leviers techniques du grain au pain.
Des pistes concernant des marqueurs morphologiques de la qualité ont été formulées (épis
« rouges »). Une démarche plus analytique permettrait d’approfondir cet aspect ou encore
l’étude d’un plus grand nombre de cas serait susceptible de compléter cette réflexion.
D’autre part, l’adaptation des pratiques des boulangers pour atteindre une qualité particulière
n’a pas été étudiée dans ce projet (dont ce n’était pas l’objet) et cela reste encore un champ
important de gestion de la qualité.
La démarche mise en place est globale et innovante, elle rapproche recherche et pratique, et
combine différentes disciplines pour étudier tout un système alimentaire. Elle répond à une
demande sociétale et est un premier succès. Nous espérons que cette démarche sera utilisée
par d’autres collectifs, enrichie et transposée à d’autres espèces, afin que chercheurs,
praticiens et consommateurs puissent travailler ensemble à élaborer les produits de
l’agriculture bio et locale demain, contribuant à une mutation collectivement choisie des
systèmes alimentaires.
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S’installer en maraîchage biologique Luc Bienvenu (conseiller en maraichage bio) et des maraichers bio
L’installation en maraichage biologique n’est pas anodine, et ce , bien au-delà du parcours à
l’installation ( formation, PPP, établissement d’un PDE, capacité agricole, obtention du
statut d’agriculteur ect..). Elle requiert, dans tous les cas, un maximum de préparation et
d’anticipation dans le choix de son système de production : choix judicieux du site et
appréciation de la qualité agronomique des sols, formes de commercialisation, choix
techniques ( pas simples, face, souvent, à une multiplicité des productions ) et logiques
d’investissements qui en découlent., réflexion permanente sur l’organisation de travail ...
Bref ! Comment prévoir au mieux son outil de production, avant de démarrer ses premières
mises en culture ?
En maraichage biologique, plus que dans toute autre production, les candidats à l’installation
sont souvent issus de milieux sociaux-professionnels relativement éloignés du milieu agricole.
Les projets agricoles qui se réalisent sont souvent, de ce fait, empreints d’une forte
motivation, et en lien étroit avec le projet de vie : qualité de vie (approche environnementale
et sociale…), fort désir d’indépendance et de liberté d’entreprendre, volonté de vivre
économiquement de son activité, maitrise du temps consacré au travail et de sa relative
pénibilité… ?... Sur les deux derniers points( revenu et travail) il s’avère que sur un certain
nombre d’installations et ce, après 4 ou 5 années de fonctionnement, des disparités (parfois
importantes…) peuvent apparaitre entre les projets, et à l’analyse, il ressort assez nettement
que les fermes qui se sont le mieux « préparées » à un démarrage dans de bonnes conditions,
se retrouvent assez rapidement en phase avec leurs objectifs de départ ( « vitesse de
croisière »…), sur le plan humain et économique… ?
Définir le plus précisément possible son système de production est la première étape concrète
de la mise en place de l’exploitation. Quelle type de ferme je veux développer ?: plus
l’expérience professionnelle , acquise chez les producteurs avant son installation, est
importante et diversifiée , plus les choix de départ sont facilités .
Le choix du système de production (cultures légumières plus ou moins diversifiées ou
spécialisées, vente directe ou circuits longs, cultures sous-abris ou de plein-champ, travail seul
ou à plusieurs …ect… ) conditionne en premier , quelques paramètres incontournables :
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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- Taille de l’exploitation et disposition du parcellaire
- Multiplicité des espèces cultivées
-Rapprochement de certains bassins de consommation ou proximité grossistes ou autres
producteurs…
• Organisation de travail et logiques d’équipement
La commercialisation :finalité autour de laquelle tout s’organise ?
Le système de production ( même si évolutif dans le temps…) , est conditionné en premier
lieu par les formes de commercialisation que l’on veut développer :
• Vente directe uniquement : marchés de plein-vent , systèmes paniers ou AMAP,
ventes par internet, vente à la ferme, libre-cueillette ect…
• Systèmes mixtes : par exemple vente directe marchés + vente en « semi-gros » sur
magasins ou biocoops pour quelques productions plus dimensionnées. Autre exemple,
système paniers qui s’équilibre avec vente spécialisée sur quelques légumes, en
contrat avec un groupement de producteurs ect….
• Systèmes plus spécialisés ( serre ou plein-champ) avec seulement 2 à 10 cultures, sur
surfaces plus importantes, répondant à demande plate-forme Biocoop, ou grossistes,
ou restauration collective ou tout autre circuit long…
• Ect…
Tous les schémas sont possibles au départ, selon ses envies de producteur, voire les
possibilités, les offres et les évolutions des marchés. Dans tous les cas, avant le démarrage de
la production, une étude de marché, en local ou sur les circuits plus longs disponibles à
proximité, peut-être un très bon outil d’appréciation sur les possibilités de commercialisation.
D’une façon générale les formes de vente, parfois démultipliées en maraichage diversifié , ont
tendance à se simplifier au cours du temps ( on ne garde que les débouchés commerciaux
« valables » et susceptibles de développement…). En effet il faut assez rapidement se rendre à
l’évidence, que le temps passé à la commercialisation ne doit pas excéder 20 à 25 % du temps
de travail global, si ion ne veut pas impacter sur le temps passé à la production( encore plus
vrai pour système diversifié - 1 seul UTH sur l’exploitation !..)
La vente directe implique généralement une diversité optimale de légumes, toute l’année , et
notamment sur les périodes hiver-printemps , où la clientèle est très présente et demandeuse
de produits frais ( en système AMAP ou paniers, au vu du « non-choix » des consommateurs
sur leurs achats, l’exigence du producteur doit être encore plus constante sur la quantité, la
qualité et la diversité des produits… ?..). Par contre il n’est pas inéluctable, en système de
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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vente directe, de devoir produire le panel complet des productions maraichères : la répartition,
par exemple, des différents légumes sur plusieurs exploitations, qui se complémentent au
niveau des ventes, peut simplifier de façon radicale l’organisation de travail sur chaque ferme,
mais également réduire et cibler les investissements spécifiques, et en conséquence accroître
forcément la maitrise technique des productions.
S’assurer de la faisabilité de son projet sur les terres choisies
Dans tous les cas le choix de la terre doit être mûrement réfléchi et même si l’accès au foncier
n’est pas toujours aisé pour le futur maraicher ( plus difficile même sur les projets à petite ou
moyenne surface..), il faut prendre le temps ( qui ne sera jamais perdu !..) d’user de toute
l’information disponible ( annonces agricoles, Safer, Adasea, groupements bio, Civams, Terre
de liens, mairies, communautés de communes, agriculteurs …) pour accéder à un site de
qualité, qui peut répondre à un certain nombre d’attentes :
-Quelle surface cultiver ? Si en théorie 1,5 ha (dont 10% sous abri), sont suffisants pour se
lancer seul, en maraichage biologique, il est préférable de prévoir le double, à l’installation,
pour deux raisons principales : 1° - tout projet se développant ( une personne salariée, un
associé… ?..) va exiger naturellement, à l’avenir, une certaine augmentation de la surface de
production…2°- très rapidement ou dès le départ, le producteur manque de surface, pour
intégrer efficacement dans ses blocs de rotation , des engrais verts longs, qui sont pourtant
centraux dans la maitrise des itinéraires techniques maraichage biologique ( fertilisation,
maitrise de l’herbe, ruptures sanitaires, ect…). Point très souvent négligé en maraichage
diversifié !
-Quelle parcellaire, situation et exposition des terres ?: Plus les terres sont groupées autour de
la ferme, sur des parcelles bien dimensionnées, mieux c’est.. ! Une exposition ( plein
soleil)des parcelles sur légère pente sud ou sud -est , ou sur terrain sans déclivité, est
forcément la plus favorable, surtout pour les cultures où on recherche forcément un effet
« primeur » ( les serres notamment ! )… L’existence de haies brise-vents ( ou à défaut leur
installation future…), surtout en bordures sensibles froid ou vents dominants, améliore
forcément le « microclimat » maraichage, recherché …
Quelles qualités agronomiques pour mon sol ? : Les cultures légumières réclameraient « les
meilleures terres ». Eviter en tout cas de vous installer sur des terres au potentiel trop limitant
: profondeur de sol trop faible, gros cailloux, tendance au dessèchement ou à des
hydromorphies marquées, sols très lourds (forts taux d’argile), humides, froids et peu réactifs.
Des analyses de sol, en pré installation sont possibles , surtout si elles sont suivies de
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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préconisations judicieuses agronomiquement( approche Hérody intéressante), mais aussi
classement des terres, conseils de voisins avisés ou des anciens agriculteurs, profils de sol à
faire soi-même, aspect de la végétation spontanée ou cultivée ect…
Une homogénéité agronomique des parcelles est évidemment idéale, notamment dans
l’établissement des rotations de culture. D’une façon générale, une terre de valeur moyenne
est toujours améliorable par de bonnes pratiques agronomiques ( fertilisation, engrais verts,
travail de sol…), mais une terre de qualité médiocre( trop de limites physiques ou
agronomiques…) pour le maraichage, ne peut pas être raisonnablement « modifiée », et reste
une contrainte omniprésente, pour la réussite des productions., au long des années ( ?)
Autres qualités pour un site retenu ?
Présence ou non de logement et de bâtiments d’exploitation. Au niveau de la production, la
présence de bâtiments préexistants évite certains investissements( du moins au démarrage…),
dans l’aménagement des zones de conditionnement, lavage et stockage des légumes, qui
donnent rapidement beaucoup de confort au maraicher, dans la préparation des ventes (
surtout à la mauvaise saison…) . Des locaux disponibles pour le rangement des matériels de
culture et des outils est également très appréciable.
La présence naturelle d’eau ( sources, mares existantes…)à proximité des parcelles de
production, peut permettre de diminuer en partie, l’investissement sur le système d’irrigation (
indispensable pour les serres, fortement conseillé pour le plein-champ !...)
La qualité environnementale et paysagère du lieu, a souvent également son importance dans le
choix du site de production…
Choix techniques et logiques d’investissement : cà marche ensemble !
En terme de fonctionnement les systèmes plus spécialisés (serres ou plein-champ), , sont en
général mieux organisés et de meilleure maitrise technique, que les systèmes en maraichage
diversifié, par définition même, car dans tous les cas il est plus aisé de conduire un nombre
restreint de légumes sur des surfaces importantes que de démultiplier le nombre d’espèces
cultivées, sur des surfaces parfois réduites . Il faut bien avoir en tête que chaque espèce
cultivée correspond à un itinéraire technique spécifique ( implantation, soins aux cultures et
désherbage, sanitaire, récolte ect…) et que la multiplicité des opérations sur chaque culture,
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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Trouver des techniques adaptées et spécifiques: par exemple, on ne résout pas toute la
problématique désherbage avec un seul outil : faux-semis, désherbage mécanique, thermique,
manuel,paillages plastiques sont des techniques à envisager comme complémentaires…
Produire ses plants semble pour beaucoup une évidence à l’installation, mais cela demande du
temps , de la maitrise, et certains investissements spécifiques .Est-ce raisonnable quand on
démarre ? L’achat de plants peut-être également un vrai outil organisationnel ? à bien étudier
en tout cas ?
Autre solution très intéressante : la répartition des légumes entre plusieurs producteurs, pas
trop éloignés géographiquement, et désireux de travailler sur une mise en commun des
moyens de commercialisation( transport, salariés vendeurs, points de vente…). Elle peut être
un choix de démarrage. Si elle est bien préparée ( voire accompagnée : Gab, technicien…),
elle peut permettre une simplification importante des moyens de production et des itinéraires
techniques sur chaque ferme concernée. Besoins de moins d’outils différents car certaine
spécialisation ( serre- plein champ ; légumes frais – légumes de conservation ; ect…).
Il est en tout cas évident que dans un système de production un peu spécialisé, ou le
dimensionnement des cultures est réel et les itinéraires techniques simplifiés , on peut
recentrer de façon très intéressante ses prévisions d’investissement et amortir plus
efficacement un matériel investi.
.
Etre organisé au mieux, au niveau des cultures et au niveau du travail : c’est la clef de voûte de l’ensemble.
Une fois réalisé le choix de ses productions ( en privilégiant encore une fois la
simplification ?) , l’on établit avec le plus de précision possible une planification des cultures,
en groupant au maximum les dates de semis ou de plantation des cultures, quand il n’est pas
obligatoire de les implanter sur un logique de séries. Par contre pour les cultures à cycle
rapide ( ex : salades, épinard, radis) un calendrier très précis de plantations successives est à
établir en fonction de la saison, des pics éventuels de vente… et/ ou de l’abondance dans la
variété des légumes de saison.
L’établissement de la planification et des prévisions de vente, conduit à définir des
assolements :( surfaces de chaque légume à produire).
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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complexifie fortement le système, avec souvent une forte incidence sur la charge de travail (
le temps de travail étant souvent « la variable d’ajustement » du maraicher diversifié !..)
Face à une certaine diversité de légumes à produire, il faut trouver en permanence des outils,
des techniques, des méthodes de travail qui permettent de simplifier le système Et trouver une
certaine cohérence dans les investissements à privilégier, car l’équipement optimal pour 40
cultures différentes, est impossible en terme d’investissement ! Certains outils simples( outils
à dents, planteuses…) peuvent être achetés en occasion et d’autres plus précis ou spécifiques
exigent des achats neufs( herse étrille, désherbage thermique, outils animés de travail de
sol ??...). Tout est une histoire de priorités, de types de terre, d’organisation de travail…
Dans un système diversifié, vente directe, l’outil serre + irrigation est à privilégier, car c’est
l’outil qui sécurise en premier la production. Le choix des serres( en neuf ou occasion ? ) n’est
pas anodin : en terme de taille, de modèles, de qualités climatiques et thermiques, de solidité,
de praticité ect… L’irrigation doit être prévue avant la mise en culture des serres( et du plein-
champ éventuellement), en optant pour un matériel fiable, efficace et pas sous-dimensionné
au départ..
Avoir un matériel adapté à ces besoins. Exemple : Sur dimensionner un tracteur, en taille et en
puissance , n’est pas forcément judicieux, si 50-55cv suffisent pour les outils de travail du sol
, sur un tracteur assez compact, l et passer sous les barres de culture des serres.
Disposer d’outils polyvalents simplifie le système : exemple herse étrille qui peut répondre à
des binages « en plein » pour de nombreuses cultures.
« Standardiser » un certain nombre de postes de travail peut permettre de gagner beaucoup de
temps et simplifier les itinéraires techniques légumes : prévoir par exemple toutes les
implantations de culture après le même itinéraire travail de sol, avoir des écartements entre
rangs identiques pour les opérations de désherbage en plein-champ ( mêmes outils, mêmes
réglages, planches regroupées sur la même parcelle, même moment d’intervention…ect…),
disposer de paillages plastiques réutilisables et pré perforés sur des écartements standard pour
plusieurs cultures, grouper des cultures différentes sous des voiles de protection biologique
bien dimensionnés , ect ect…
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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En pleine terre, une fois les assolements connus, on peut organiser les productions sur la base
de blocs de rotation , si possibles de dimension identiques, à l’intérieur desquels, les cultures
sont regroupées sur la base de vrais critères de rotation : logiques de fertilisation, saisonnalité,
itinéraires implantation et désherbage proches, logiques sanitaires ect… Dans ces blocs il
serait essentiel d’y glisser un ou deux blocs d’engrais verts longs ( sur 6 ou 7 ans) , qui créent
des ruptures sanitaires et « salissement »(adventices) , et régissent la logique de fertilisation.
En serre, l’organisation des cultures est plus intensive et très précise, car elle doit répondre à
la mise en place optimale de trois groupes de cultures principales, qui sont d’égales
importance économique, dans un système de maraichage diversifié, notamment : cultures
fruits d’été, cultures feuilles d’automne-hiver , cultures primeur de printemps ( surtout
cultures bottes) …
D'une façon générale, les systèmes de maraichage diversifié intègrent très mal ces notions
précises de rotation, pour des raisons souvent de temps, de surface, voire de lisibilité de la
ferme, à son démarrage ( blocs de cultures par exemple) , On installe les cultures, où il y a de
la place !
Autres solutions pour mieux s'organiser : travailler à 2 sur une ferme ( salarié ou associé, ou
conjoint...) offre rapidement des solutions dans certaines situations ( commercialisation et
gestion de la production au quotidien, outils tractés demandant 2personnes, pénibilité de
certains travaux...) ; emploi de saisonniers pour compenser des pics de travail saisonniers (
plantations longues, désherbages manuels, récoltes de conservation, ect...) ; faire intervenir
une entreprise agricole ou CUMA pour gros travaux ( épandage fumier, semis engrais verts,
aménagements fonciers...)
Comme vu plus haut, il existe aussi des solutions d'organisation de travail, entre maraîchers :
se répartir les production et éventuellement mettre en place une structure collective simple(
type GIE) pour assurer la commercialisation ; acheter du matériel en commun si situation
géographique assez proche ; organiser des chantiers collectifs ( bourse d'échange de temps de
travail...).
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Protéines en alimentation animale bio : disponibilité et perspectives
Article rédigé par :
Stanislas Lubac 1 et Frédéric Pressenda2
1 Initiative Bio Bretagne, 33 avenue W. Churchill – BP 71612 – 35 016 Rennes Cedex2 Céréopa, 16 rue Claude Bernard –75231 Paris Cedex 05
Intro
Le marché de l’alimentation animale biologique est marqué par un important déficit en
protéines, particulièrement crucial en production porcine et avicole en raison des prochaines
échéances réglementaires concernant l’alimentation 100% AB.
Une offre déficitaire en proteines biologiques, un potentiel de développement des surfaces de légumineuses à graines
En 2012, ce déficit est estimé à 12 000 tonnes de Matière Azoté Totale, qui correspond à 20%
des besoins du cheptel.
En fonction des hypothèses de travail retenues (rendements bas, moyens ou hauts), ce déficit
présente une forte variabilité de +/- 2 500 t qu’il est important de souligner. Ce déficit
correspond en « équivalent-surface » à 20 000 ha de féverole, 23 000 ha de pois ou 16 300 ha
de soja, avec également une forte variabilité liée aux hypothèses (+/- 5 000 ha pour le soja).
Une forte hétérogénéité entre régions
Les deux principaux bassins de production animale biologique, Grand Ouest (environ 50 %
du cheptel biologique national) et Sud-Est (15 % des besoins, dus principalement aux
volailles) sont déficitaires en protéines bio. En revanche la zone Sud-Ouest est excédentaire
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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grâce à l’importante production d’oléagineux de l’Aquitaine et de Midi-Pyrénées, qui
équilibre une demande du cheptel pourtant importante.
Les deux régions qui produisent le plus de légumineuses à graines sont les Pays de la Loire
(féverole et mélanges céréales-protéagineux) et Midi-Pyrénées (soja, tournesol et féverole).
Des besoins en croissance, tirés notamment par l’aliment pondeuse
Les besoins en protéines augmentent rapidement entre 2009 et 2012, en particulier pour les
poules pondeuses, pour lesquelles il y a eu beaucoup de conversions.
En 2012, les volailles (pondeuses et chair) représentent 60% des besoins totaux en MAT. Le
cheptel porcin ne représente quant à lui qu’une faible part des besoins en protéines
biologiques (11%). Notons qu’à partir de 2011, les vaches laitières ont des besoins en MAT
(concentrés uniquement, donc hors fourrages) supérieurs à ceux des volailles de chair.
Une offre en protéines en progression, mais insuffisante
L'offre en protéines augmente entre 2009 et 2012, mais ne parvient pas à compenser l’écart
avec les besoins. Les principales ressources en MAT biologiques végétales, en volume, sont
les mélanges céréales-protéagineux et les céréales. Les oléo-protéagineux ne couvrent qu’une
faible partie des besoins en raison de leur faible sole et, pour le cas du soja, de la concurrence
avec l’alimentation humaine.
Pour compenser le déficit protéique, environ 17 400 t de tourteaux de soja, 7 500 t de graines
de soja, 6 200 t d’équivalent en tourteau de tournesol et 950 t de tourteaux de colza ont été
importées en 2011-12 (Coop de France, 2013).
Les légumineuses à graines pour répondre à ce déficit ?
Les légumineuses à graines sont caractérisées par la très forte variabilité de leurs rendements.
Si ces cultures présentent des atouts d’ordre environnementaux (réduction des consommations
d’énergie et des émissions de GES par ha), agronomiques (apport d’azote atmosphérique,
allongement de la rotation), ou encore économiques (sécurisation des approvisionnements en
matières premières riches en protéines et abaissement du coût des rations, notamment dans le
cas de la fabrication d’aliment à la ferme), elles demeurent techniquement difficiles à cultiver
en pure. Les principaux freins pénalisant les rendements sont l’enherbement, la gestion des
maladies et ravageurs, et la forte sensibilité aux aléas climatiques. Il existe une forte
variabilité d’adaptation de ces différentes espèces en fonction des différentes régions
françaises. Les 3 années d’évaluations variétales de ProtéAB mettent en avant une
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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amélioration dans le matériel génétique disponible pour les agriculteurs, mais pointe plus
encore l’importante nécessité d’intensifier le travail de sélection.
Quel potentiel de développement pour les légumineuses à graines biologiques ? Approche économique et marché
Dans des exploitations types nommées « cas-types », des rotations en grandes cultures
biologiques incluant des Légumineuses à Graines (LG) ont été construites avec des experts
régionaux. Leurs impacts techniques, économiques et environnementaux ont été évalués. Puis,
des modifications des rotations ont été proposées (ajout ou substitution de LG) en vue de
produire des protéines pour l'alimentation animale, et évaluées.
Des marges nettes correctes, voire intéressantes (soja), des coûts de production variables
A l'échelle de la culture, en fonction du cas-type et de la rotation, les LG peuvent avoir une
marge nette égale ou supérieure à celle de la rotation. Bien qu’elles soient souvent introduites
dans les rotations pour des raisons agronomiques plutôt que pour leurs bénéfices
économiques, les LG peuvent donc être rentables.
Peut-on augmenter la part de LG pour l’alimentation animale dans les rotations ?
Les modifications de rotations proposées dans les cas-types de ProtéAB montrent qu'il est
possible d'augmenter la part des légumineuses à graines dans les rotations, sans forcément
pénaliser les résultats techniques, environnementaux et économiques des rotations.
La substitution d'une LG par un mélange céréales-LG a peu d'effets sur les indicateurs
techniques et environnementaux. En revanche, la substitution par du soja, dont le rendement
et le prix sont plus élevés, peut entraîner une amélioration des performances économiques.
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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Quels leviers pour développer les légumineuses à graines dans les systèmes de grandes
cultures ?
Plusieurs leviers peuvent être envisagés pour développer la part des LG dans les rotations des
systèmes de grandes cultures :
- La diminution des coûts de production, qui pourrait passer par une diminution des
charges de mécanisation et de main d'œuvre (ex : simplification des itinéraires
techniques, mise en commun du matériel), et par l’augmentation et la stabilisation des
rendements (matériel végétal plus adapté, une meilleure maîtrise des bio-
agresseurs…).
- L’augmentation du prix de vente des LG.
- La contractualisation permettrait à la fois d'augmenter la traçabilité de la filière
française, d'assurer un prix de vente minimum à l'agriculteur et un prix d'achat
maximum à l'éleveur ou au fabricant d'aliment du bétail.
Utilisation et perspective des protéagineux en alimentation animale
Actuellement sous-utilisées par les FAB à cause d’une faible disponibilité, le passage au 100
% AB devrait encore plus favoriser le tourteau de soja au détriment des pois et féverole qui
conservent cependant de gros atouts en termes de traçabilité et de sécurisation des
approvisionnements (en qualité).
Des protéagineux globalement peu utilisés en alimentation animale
L’utilisation de protéagineux pour l’alimentation animale est globalement faible en France.
Sur la campagne 2012/2013, l’utilisation de féverole et de pois par les fabricants d’aliment du
bétail était respectivement de 8 320 et 3 328 tonnes (France Agri Mer) en lien avec une faible
disponibilité sur le marché français. Par ailleurs, les variétés les plus cultivées ne permettent
pas une utilisation maximale car la présence de FAN (facteurs antinutritionnels) ou de tanins
limitent leur taux d’incorporation dans les aliments volailles, qui représentent 80 % de la
fabrication nationale d’aliment composé (pour la campagne 2012/2013 ; CDFNA/SNIA).
La graine de soja extrudée (l’utilisation crue n’est pas intéressante) d’origine française est peu
disponible sur le marché, à cause de la concurrence avec l’alimentation humaine.
Des fabricants d’aliments pourtant demandeurs
Dans un contexte d’alimentation 95 % AB et de prix de marchés actuels pour les matières
protéiques biologiques, le potentiel d’utilisation des protéagineux (pois et féverole) se
situerait aux alentours de 40 000 tonnes (CEREOPA). Habituellement présent dans les
formules porcines, le pois pourrait trouver sa place dans les aliments volailles, espèces
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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valorisant par ailleurs très bien la féverole d’un point de vue économique. Les aliments
volailles sont également consommateurs de matières premières riches en protéines très
diversifiées, et constituent un concurrent sérieux des aliments porcins dans la captation des
ressources protéiques mises sur le marché.
Le passage au 100 % AB diminuerait l’intérêt technico-économique des protéagineux (modèle
prospective aliment, CEREOPA)
L’impact du passage du passage au 100 % AB sur les utilisations en ressources protéiques
biologiques a été simulé via ce modèle. Les matières premières conventionnelles seraient
majoritairement remplacées par du tourteau de soja afin d’obtenir un apport suffisant en
acides aminés essentiels dans les formules. L’augmentation de l’utilisation du tourteau de soja
ne laisserait que peu de place pour les protéagineux dans les formules dans le contexte de prix
considéré (celui du 95 % AB).
Conclusion
Bien que le passage au 100 % AB diminuerait l’intérêt technico-économique des
protéagineux, la baisse de leur utilisation par les FABs peut être nuancée. En effet, les
protéagineux constituent une ressource produite localement et très bien tracée, ce qui offre des
garanties importantes pour les FABs en termes de sécurisation de l’approvisionnement. Par
ailleurs, une orientation de la production vers des variétés plus intéressantes en alimentation
animale ou le développement de procédés technologiques améliorant leur intérêt zootechnique
(extrusion en particulier) à un prix acceptable peuvent permettre de favoriser l’utilisation du
pois et de la féverole dans la fabrication d’aliment composé. Enfin, l’impact potentiellement
négatif du 100 % AB sur le prix du tourteau de soja et le souci de sécurité des
approvisionnements (tant en qualité qu’en volume) pourrait permettre de maintenir
l’utilisation des protéagineux.
Pour en savoir plus : L’ensemble des documents issus du programme ProtéAB sont
disponibles sur le site d’Initiative Bio Bretagne http://www.interbiobretagne.asso.fr/,
rubrique « recherche », « grandes cultures » et sur www.biobretagne-ibb.fr à partir de 2014
(taper « résultats ProtéAB » dans le moteur de recherche).
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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Afterres 2050 : Quelle utilisation des terres en 2050 en France ? Philippe Pointereau (Solagro)
Le constat
La France est-elle capable de subvenir à ses besoins d'aujourd'hui et à ceux de demain ? Elle
importe aujourd'hui la plus grande partie de son énergie, de ses métaux, 60% des pêches.
Qu'en est-il aujourd'hui de notre nourriture? Nous faisons face à une équation sans solution si
ce n'est d’en modifier ses paramètres. La population française va croitre contrairement à la
plupart des pays européens (+206.000 hab/an en moyenne d’ici 2050) alors que ses surfaces
agricoles ne cessent de diminuer (-90.000 ha/an) soit 5,7 millions d'ha de terres perdues
depuis 1960 (date du pic d'extension des surfaces agricoles). Et les rendements agricoles ont
cessé de croitre depuis la fin des années 90. Nous devons donc à la fois changer notre
alimentation et stopper la perte de nos terres agricoles.
Contrairement à ce qui se dit, la France avec son vaste territoire agricole et ses 16 millions
d’hectares de forêts, n’est pas exportatrice nette en terme de surfaces si l’on prend en compte
l’important flux de bois, de soja, de café, de thé, de coton, de fruits et de légumes, …En fait
elle importe l’équivalent de 8, 4 millions d’ha et exporte l’équivalent de 7 millions d’ha. Avec
une meilleure exploitation de notre forêt, nous serions tout juste à l’équilibre.
Et demain nous allons exiger plus à la terre dans le cadre de la transition énergétique et de
substitution des ressources fossiles par des ressources renouvelables. Si la sobriété, l’efficacité
et la réduction des pertes seront les maitres mots, nous devrons fonder une partie de nos
ressources sur la biomasse.
Afterres2050, pourquoi et comment ?
En 2050, l’agriculture et la forêt devront nourrir en France 70 millions d’habitants, le bétail,
fournir énergie et matériaux tout en préservant la fertilité des sols, la qualité des eaux, la
biodiversité sans oublier le climat, l’objectif en la matière étant de réduire d’un facteur 4 nos
émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2050.
Disposerons-nous des surfaces nécessaires pour satisfaire à tous ces besoins et ces
contraintes? Comment analyser les visions parfois opposées sur le devenir de notre
agriculture?
L’objectif de la démarche, soutenue par la Fondation Charles Léopold Mayer, est de :
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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• Se donner les moyens de baliser les chemins du possible vers une agriculture viable et
désirable en construisant un scénario agricole et alimentaire durable, crédible,
compréhensible et quantifié physiquement pour la France à l’horizon 2050.
• Fournir un cadre et une base cohérente au volet biomasse du scénario négaWatt 2011
(présenté publiquement le 29 septembre 2011) dont nous partageons les objectifs de
sobriété, efficacité et durabilité.
• Ouvrir sur cette base, un débat transversal sur les territoires, en milieu agricole, auprès
des citoyens, sur l’orientation de notre agriculture en vue d’une interpellation des
instances politiques pour permettre la mise en place effective des conditions
nécessaires aux évolutions.
Afterres2050 : premiers résultats
Les premiers ordres de grandeur des résultats produits suscitent débats et réflexions.
Un mix 50 % agriculture biologique/ 50 % agriculture intégrée peut nourrir la France et
quelques voisins en 2050 mais notre assiette et nos paysages sont vraiment différents :
• La ration alimentaire contient plus de céréales, de fruits et légumes, et beaucoup moins
de viande, de sucre et de lait.
• Les sols ne sont jamais nus et une parcelle délivre jusqu’à 6 « productions » - céréales,
engrais verts, fruitiers, bois d’œuvre, .. -, contre une aujourd’hui.
• Les troupeaux ont fortement réduit leurs effectifs.
• Ces évolutions libèrent aussi des surfaces pour satisfaire d’autres besoins : production
de biomasse pour l’énergie, la chimie verte ou les matériaux de construction, …
Les émissions de gaz à effet de serre de la filière agricole et alimentaire ne sont toutefois
divisées que par 2 (et non par 4).
Ce travail fournit un cadre indispensable aux exercices de prospective en cours ou à venir. Il
met en évidence l’ampleur des changements ou ruptures à préparer et permet de mettre en
interrelation et en cohérence les approches partielles effectuées par différents acteurs.
Comprendre Afterres2050
Agriculture et gaz à effet de serre : un facteur 2
L’agriculture émet des gaz à effet de serre principalement sous forme de protoxyde d’azote
(N2O) et de méthane (CH4) et secondairement sous forme de dioxyde de carbone (CO2). Le
protoxyde d’azote est constitutif du cycle de l’azote. Le méthane est quant à lui
principalement lié à la digestion des végétaux par les ruminants, il est émis principalement par
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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fermentation entérique (le rot des vaches) et le stockage des déjections animales. Le dioxyde
de carbone est lié au carburant consommé par les tracteurs et à la fabrication des engrais.
En comptabilisant les intrants agricoles (engrais, énergie, phytosanitaires…), les émissions
actuelles sont de l’ordre de 105 MteqCO2 dont 40 MteqCO2 de N20, de 40 MteqCO2 de
méthane, et 25 MteqCO2 de gaz carbonique.
Les différentes simulations Afterres2050 arrivent au mieux à une réduction d’un facteur 2.
Cette division par 2 des émissions de GES suppose pourtant une modification des régimes
alimentaires et des systèmes agricoles et induit une importante réflexion sur l’utilisation des
terres.
La sobriété et l’efficacité du champ à l’assiette
Les principes de sobriété et d’efficacité sont appliqués sur toutes les étapes de la chaîne
alimentaire : réduction des pertes et des gaspillages dans l’agro-alimentaire, dans la
distribution et dans la cuisine, recyclage des déchets organiques.
Une meilleure nutrition passe par une réduction des surconsommations, notamment en sucre,
en protéines et en lipides, ce qui contribue par ailleurs à réduire l’indice de masse corporelle
et à lutter contre le surpoids, dans une démarche de santé publique.
Un régime alimentaire moins carné et moins lacté
L’assiette en 2050 contient donc moins de viande et moins de lait, et beaucoup plus de fruits,
de légumes, de céréales, de fruits à coque (amandes, noix…). La viande ne disparaît pas pour
autant, sa consommation n’est réduite que de 50 %, mais elle ne sera pas à tous les menus, ni
tous les jours de la semaine.
Aujourd’hui, 60 % des protéines consommées sont d’origine animale (viande, lait, œufs,
poisson). Or, la production d’un kilo de protéine animale nécessite une consommation bien
supérieure de protéines végétales, d’un facteur 4 à 10 selon le type d’animaux.
Si l’ensemble des humains suivait ce régime carné/lacté, la totalité des céréales consommées
dans le monde ne suffiraient pas, et de loin, à nourrir les animaux.
Par ailleurs, nos recherches bibliographiques indiquent que sur le plan nutritionnel, rien ne
s’oppose à la diminution de notre consommation de viande et de lait, bien au contraire.
Il paraît tout à fait possible de diviser par 2 nos consommations de viande et de lait sans aucun
problème de santé publique et d’inverser ainsi la proportion entre protéines animales et
protéines végétales. Selon les nutritionnistes, le fait de diminuer la consommation de viande
permettrait de faire baisser les besoins en calcium et donc de diminuer la consommation de
lait.
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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Figure 2 : Évolution de la répartition des protéines dans l’alimentation des français entre 2010
et 2050
Il est également probable que la consommation de poissons chutera fortement, si les
ressources halieutiques ne sont pas reconstituées. Le poisson d’élevage prendra, en partie
seulement, la relève des poissons pélagiques.
Figure 3 : Description d’une assiette du consommateur en 2050, en g/j/personne
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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« Une parcelle = 6 produits » : moins d’intrants et plus de biodiversité
En 2050, l’agriculture conventionnelle est devenue une agriculture écologiquement intensive.
Elle optimise la production de biomasse dans le temps et dans l’espace.
Le principal mode de production agricole relève des principes de la production intégrée :
• Rotations longues, assolement intégrant des légumineuses.
• Lutte biologique.
• Travail très simplifié du sol (voire semis direct) permettant de reconquérir la fertilité
des sols.
• Cultures intercalaires qui maintiennent un couvert végétal permanent.
• Présence massive d’infrastructures agro-écologiques comme les haies, arbres épars,
zones humides.
Ce mode de production réduit fortement la consommation d’intrants chimiques. On estime par
exemple une division par 4 de la consommation d’engrais et de pesticides par rapport à
l’agriculture conventionnelle d’aujourd’hui avec la moitié des productions en « intégré » et
l’absence de tout traitement sur les surfaces en agriculture biologique.
L’agroforesterie (1/5 des surfaces en 2050) comme les associations culturales (récolte sur la
même parcelle et à la même saison de deux cultures, typiquement une céréale et une
légumineuse) sont généralisées.
Moins d’animaux mais mieux traités
La quantité d’animaux d’élevage est globalement divisée par 2, tant pour les bovins et caprins
que pour les porcs et les volailles. Le seul cheptel inchangé est celui des ovins, qui valorisent
des espaces spécifiques, inexploitables par ailleurs.
L’élevage bovin reste assez proche des pratiques actuelles, avec un recours encore important à
la pâture. Il est déterminé essentiellement par la production de lait, qui est divisée par deux.
Le cheptel bovin viande est réduit plus fortement encore, mais conserve néanmoins une place
significative compte tenu de ses qualités gastronomiques et de sa valeur patrimoniale.
La moitié de la production de porcs et de volailles passe sous le régime « label », avec une
extensification importante : allongement de la durée de vie des animaux, augmentation de la
surface par tête, passage en mode plein air… L’élevage intensif diminue globalement d’un
facteur 3 par rapport à aujourd’hui, il est néanmoins conservé pour fournir des protéines
animales bon marché, dans un souci d’équilibre entre les exigences sociales et
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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environnementales, afin que la viande ne soit pas réservée aux catégories sociales les plus
fortunées.
Un équilibre avec le reste du monde
Les exportations de denrées alimentaires destinées à l’alimentation humaine - principalement
le blé, le lait et la viande - sont confinées à l’espace européen, élargi vers l’espace
méditerranéen, Moyen-Orient compris, pour tenir compte du rapport entre la densité de
population de ces régions et de leur potentiel de production agricole.
La France exporte actuellement de grandes quantités de denrées agricoles, mais elle en
importe également, notamment les produits tropicaux (café, cacao…), des fruits et légumes, et
surtout des tourteaux pour l’alimentation animale.
En 2050, les importations de soja et des tourteaux dérivés en provenance des Amériques, sont
totalement supprimées. Les exportations de céréales destinées à l’alimentation animale sont
elles aussi réduites, sans pour autant être supprimées, car la France conserve malgré tout une
certaine vocation exportatrice, dans un monde qui globalement voit la part de l’alimentation
carnée augmenter, la réduction de celle-ci dans les pays riches ne compensant pas son
augmentation dans les pays en développement.
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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S’installer ou se convertir en élevage bovin lait bio : les clés de la réussite David Roy (Agrobio35)
David Roy - Autobiographie
Technicien à Agrobio 35 depuis 2009, conseille les agriculteurs en projet et en cours de
conversion. Il conduit des programmes de recherche en bio. Il conseille les agriculteurs
conventionnels sur le désherbage mécanique du maïs. Il est également animateur de différents
groupes de formation d’éleveurs biologiques.
Avant de se spécialiser dans le bio, il était animateur à l’ADAGE (Agriculture Durable par
l'Autonomie, la Gestion et l'Environnement). Il a également été salarié agricole et agriculteur
bio pendant plusieurs années.
Résumé de l’intervention :
L’agriculture biologique : « Une agriculture n'utilisant pas de produits chimiques de
synthèse » ; pour beaucoup, l’agriculture biologique se résume à cette définition donnée dans
la loi d'orientation agricole du 4 juillet 1980. Ce n’est pas faux, mais en réalité cela ne suffit
pas à définir les pratiques de la production biologique. L’agriculture biologique est définie par
un cahier des charges européens (règlement CEE 834/2007 et CEE 889/2008). L’ensemble
des pratiques doit respecter cette réglementation et être contrôlé par un organisme
indépendant agrée par l’état. Mais, pour sa mise en pratique, l’agriculture biologique ce n’est
pas qu’un cahier des charges. L’agriculture biologique est un mode de production respectueux
des équilibres naturels, des organismes vivants, une agriculture durable, avec des objectifs
environnementaux, économiques et sociaux. S’engager dans la bio, ne consiste pas à revenir à
une agriculture « traditionnelle », c'est-à-dire celle d’avant guerre, ce n’est pas non plus semer
et laisser faire. L'agriculture biologique s'appuie sur les facteurs naturels de production. Elle
oriente au mieux les mécanismes du vivant vers un objectif de production. Elle doit aussi
trouver les équilibres et la cohérence propres aux objectifs des hommes qui la pratiquent et de
leur projet de vie.
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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Raisonner globalement son système : trouver l’optimum
Le plus délicat dans une conversion, c’est de réussir à penser son futur système avec encore
dans la tête des références propre au conventionnel. Lors des conversions les producteurs
s’inquiètent beaucoup de la maîtrise sanitaire et du salissement des terres, mais les
témoignages après conversion laissent apparaître que la gestion du nouveau système fourrager
et de l’alimentation est en faite le point le plus complexe à maitriser. Le passage en bio
impose une autre vision que le simple objectif de réaliser le quota. L’inadéquation entre le
potentiel fourrager des terres et les références laitières, ainsi que les difficultés rencontrées
dans la maitrise des systèmes fourragers expliquent dans la majorité des cas les sous-
réalisations de quotas. Mais atteindre son quota n’est pas forcément indispensable pour
améliorer ses résultats technico-économiques. L’important, mais aussi le plus compliqué est
de parvenir à une cohérence entre l’économie et la gestion alimentaire. Il convient de
raisonner sur une approche globale et non sur des performances techniques par poste. Il est
nécessaire de trouver de nouveaux équilibres entre litres de lait/ha de SAU ; litres de lait /
vaches et chargement/ha de SFP. Les références absolues deviennent caduques. Ainsi, dans le
grand ouest, la production de lait par hectare peut varier de 3500 l à 6000 l/ha avec un
chargement de 0.8 à 1.2 UGB/ha. Une des premières erreurs à éviter lors d’une conversion est
de mal estimer le potentiel des terres. En bio, ce potentiel est un facteur très difficile à
réajuster. De même, les objectifs de productions par vache sont à envisager sans exagération.
Tout est possible, en étant conscient qu’une vache en bio qui produit 6500 l de lait est déjà
une « haute » productrice. Certes, le cahier des charges européens n’impose pas de limite dans
l’utilisation de l’ensilage ou sur le lien au sol qui est peu limitant (l’alimentation du bétail doit
provenir à 50% de la ferme pour les herbivores). Mais à long terme la logique de recherche de
« l’autonomie » sur la ferme sera profitable économiquement et sécurisera le système.
Autonomie, équilibre de ration et santé animale
En lait, il existe un recul important sur les systèmes bio. Dans tous les groupes laitiers bio,
nous constatons que l’autonomie est un facteur de réussite technique et économique.
L’autonomie, n’est pas synonyme de zéro achat, mais il signifie bien qu’il est nécessaire
d’adapter les objectifs de production aux potentiels réels des terres, et non l’inverse. La
cohérence du système à mettre en place lors d’une conversion réside à trouver les équilibres
entre productions des fourrages et en particulier la gestion de l’herbe, le mode de distribution
et l’équilibre des rations. Afin de nourrir le troupeau avec le silo de maïs fermé de 150 à 170
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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jours par an minimum, il est nécessaire de suivre rigoureusement la productivité de l’herbe et
sa qualité tant pâturée que stockée. L’éleveur devra veiller au renouvellement des prairies et à
la composition des associations graminées-légumineuses. En production laitière bio, dans le
grand ouest, l’herbe constitue l’aliment de base et les légumineuses prairiales la première
source de protéine. Le maïs est rarement distribué à plus de 6-7 kg de MS dans la ration. La
qualité de la ration de base, qu’il s’agisse de foin, d’ensilage d’herbe ou de maïs, est
primordiale. Une fois en bio, l’amélioration des fourrages et leur mode de distribution
représentent les premiers leviers d’amélioration des performances.
L’alimentation des animaux et leur santé doivent être considérées comme deux facteurs
indissociables. En bio, où les pratiques préventives doivent primer sur le curatif, ces deux
facteurs vont de paire. De nombreuses pathologies sont en relation avec l’alimentation. Il est
par conséquent nécessaires des les appréhender conjointement.
La conversion à l’agriculture biologique ne s’improvise pas, il est nécessaire de respecter un certain nombre d’étapes :
• La première étape pour bien démarrer votre conversion est de demander une visite
d’information gratuite et sans engagement au GAB de votre département ou dans un autre
organisme indépendant de toute vente de produit ou de collecte. Ceci afin d’être orienté dans
vos démarches de conversion. Un technicien spécialisé se déplace, vous écoute, répond à vos
interrogations, vous explique le cahier des charges et vous suggère des pistes techniques pour
lesquelles le seul intérêt est celui de l’éleveur.
• Profiter aussi de l’expérience des agriculteurs bio proches de chez vous. Rencontrer les
agriculteurs biologiques de votre région, participer à des journées portes ouvertes. La plupart
des agriculteurs bio sont d’anciens producteurs conventionnels. Ils ont vécu personnellement
les appréhensions et réticences à la bio. Ils ont découvert et construit la bio sur leur ferme. La
seul limite est que chaque ferme est différente et que les objectifs de chacun sont variables.
Ceci conditionne la mise en place de sa propre bio.
• La formation est une étape importante, elle permet de se familiariser avec les nouvelles
techniques, mais aussi avec des nouveaux cadres de référence. Des groupes de formation et
d’échanges existent sur l’ensemble du département du grand ouest.
• Réaliser un diagnostic changement de système avec un organisme spécialisé en bio. Un bon
diagnostic se repères par le fait qu’il contient une partie de simulation qui est prépondérante.
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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• Rencontrer ses partenaires économiques. Se sont vos futurs clients il est nécessaire de les
associer à votre démarche.
L’engagement en bio, demande aussi des démarches administratives obligatoires…
• S’engager auprès d’un organisme certificateur. Au niveau national, vous avez le choix entre
dix organismes certificateurs, auprès desquels il vous est possible de demander un devis. La
signature d’un contrat avec l’un d’entre eux marque le début de la conversion (à condition que
le mode de production bio soit respecté dès cette date).
• Notifier son activité à l’Agence bio. Tout producteur qui fait référence au mode de
production biologique, tant sur l’étiquetage que sur la publicité ou les factures, est tenu de
notifier chaque année son activité à l’Agence Bio (dans les 15 jours suivant l’engagement
auprès d’un organisme certificateur la première année). Attention le non respect de cette
notification peut occasionner un retard de conversion et la perte des aides.
• Demander les aides à la conversion le 15 mai suivant l’engagement.
La conversion à l’agriculture biologique correspond à la phase de transition entre l’agriculture
conventionnelle et l’agriculture biologique, cette période implique souvent une modification
du système de production, des pratiques, parfois de la vision de son métier. Elle entraine des
charges induites (coût des semences, travaux…), provoque des baisses de rendement sans
valorisation supplémentaire. Même si des aides existent, la conversion est une période qu’il
convient de bien préparer techniquement mais aussi économiquement car les baisses de
revenu dans les deux voire trois première années sont régulièrement constatées. Devant les
changements techniques économiques, la précision de la réglementation l’accompagnement et
les échanges sont indispensable.
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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Gérer, c’est décider ! Définir sa stratégie de gestion sur sa ferme François Berrou (AFOC53 - Association formation collective à la gestion de la Mayenne,
Membre du réseau interface)
Les AFOC (association de formation collective à la gestion) sont nées à la fin des années 70,
de la volonté d’agriculteurs et d’agricultrices de s’engager et de choisir leur avenir dans un
environnement de plus en plus complexe. Il s’agit au sein de ce réseau de développer
l’autonomie de gestion des agriculteurs, c’est-à-dire leur capacité à choisir leurs orientations
dans un contexte agricole et social en évolution.
La présentation de la conception de la gestion présentée ci-après est le fruit du travail réalisé
au sein de ce réseau. Elle n’a d’autre prétention que d’alimenter la réflexion et l’action de
ceux qui s’intéressent à ce sujet
GERER POUR VIVRE
Une des visions de la gestion est « gérer pour gagner »La vision développée ici est « gérer
pour vivre »Dit autrement, une « bonne gestion de ferme « doit permettre aux personnes qui
en vivent d’être à l’aise psychologiquement, financièrement et d’envisager l’avenir avec
confiance (ce qui ne veut pas dire avec naïveté)
Cette manière d’aborder les choses est d’autant plus importante dans le cadre de fermes
familiales où ce sont les mêmes personnes qui sont à la fois apporteurs de capitaux, dirigeants,
et qui réalisent la plupart des tâches et où privé et professionnel sans être réductible l’un à
l’autre s’entrelacent
Cela veut dire aussi que chaque agriculteur peut trouver ses solutions, élaborer des projets qui
lui conviennent
GERER : DES CHOIX A FAIRE DANS L’INCERTITUDE
Tenir compte des personnes, ce qu’elles veulent, ce qu’elles sont, de la réalité de leur ferme
(agronomique, financière….) de l’environnement (climat, politique, règlementaire, social …)
est quelque chose de difficile ; il est illusoire de croire que tout tire dans le même sens. Et
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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donc gérer c’est choisir, privilégier certains éléments par rapport à d’autres, accepter les
pertes qui accompagnent les choix que l’on fait. Et que l’on découvre chemin faisant.
Les schémas normés (à tel problème, telle solution) sont de moins en moins adaptés dans
notre monde complexe .Il existe une multitude de solutions …que l’on élabore de plus en plus
au fur et à mesure. Cette complexité est alimentée entre’ autres par les évolutions
technologiques, la mondialisation des échanges, l’individualisation des comportements, la
montée de l’immatériel, la surabondance de l’information, la restructuration des relations
sociales…
Gérer c’est anticiper mais aussi prendre en compte ce que l’on rencontre au quotidien ;suivre
à la lettre un plan préparé d’avance ou évaluer l’action par la mesure des écarts prévision
réalisation apparait aujourd’hui peu pertinent(et pourtant encore bien dominant…)A l’inverse
naviguer sans boussole (sans ligne directrice)est prendre le risque de s’échouer au moindre
imprévu, ou de devenir l’esclave de ceux qui vocifèrent "il faut vous adapter » et vous
expliquent comment vous devez faire .
LES CRITERES D’EVALUATION DE GESTION
Les expertises propres à chaque domaine (production, commercialisation, gestion financière,
ressources humaines…) restent utiles mais elles ne servent à rien si elles ne sont pas reliées
entre elles et ne sont pas mises au service des intentions des personnes et de leur vision de
l’avenir.
Les ressources (terres, travail, finances…) ne sont pas illimitées et sur le long terme leur
« préservation » est nécessaire pour pouvoir se construire un avenir, d’où l’importance de les
évaluer sur la durée et non pas sur le seul court terme.
CONFIANCE EN SOI ET INTELLIGENCE COLLECTIVE
Gérer nécessite une certaine confiance en soi .Cette confiance s’acquiert en échangeant avec
d’autres, ayant différents point de vue (il y a plus d’idées dans plusieurs têtes), ne vous
jugeant pas. .Et pour autant chacun doit prendre ses décisions, ne pas remettre sa vie entre les
mains des autres aussi compétents et sympathiques soient-ils, pour pouvoir les assumer et ne
pas être détruits par ses projets.
Pouvoir être auteur de ses projets est l’enjeu de cette approche de la gestion.
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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Agroforesterie: quels intérêts pour les élevages bretons? Antoine Marin (SCOP Agroof)
Autobiographie : Antoine Marin, Chargé de projet territoire, SCOP Agroof.
La SCOP Agroof est un bureau d’étude de 7 travailleurs créé en 2000 par Fabien Liagre et
qui se focalise sur l’agroforesterie, ou plutôt sur les agroforesteries... Nous tenons à travailler
à l’interface entre développement et recherche. Réunir ces deux approches nous semble
important pour rétablir un lien entre des métiers qui se sont séparés, on parle de recherche
participative. Cela nécessite de nouveaux partenariats (agriculteur-chercheur) et de nouvelles
méthodes de travail qui avancent à tâtonnement. Par ailleurs nous donnons des formations
professionnelles et produisons des documentaires.
Personnellement, après des études d’ingénieur en agroécologie et de brèves expériences
professionnelles dans le pastoralisme, je rejoins la SCOP Agroof en janvier 2013 et m’installe
à Beauvais en Picardie. Je travaille plus particulièrement sur les approches territoriales du
développement agroforestier. Mon objectif est de mettre en place avec des agriculteurs et des
groupes des parcelles et des réseaux expérimentaux qui fassent progresser la connaissance en
agroforesterie mais aussi dans les pratiques qui peuvent la compléter : AB, conservation des
sols…
A Guichen je présenterai les opportunités (et les questions) que représente l’agroforesterie
pour une exploitation de polyculture élevage biologique. J’aborderai les enjeux auxquels
l’arbre peut répondre sous de nombreuses formes à imaginer pour une exploitation moderne.
Résumé de l’intervention :
Introduction : Historique et pratiques traditionnelles de l’arbre agricole
L’agroforesterie n’est pas une innovation, elle a toujours existé. Si la modernité, la
mécanisation, l’industrie chimique, ont largement chassé l’arbre de nos champs, ce dernier a
subsisté chez certains agriculteurs, dans certains pays, sur certains sols ou dans certains
système de production, pourquoi ? L’étude des systèmes traditionnels nous renseigne !
Il y a 100 ans on comptait plus de 600 000 ha de pré vergers en France, aujourd’hui il en
resterait moins de 100 000 ha. C’est malgré tout le système agroforestier le plus représenté en
France.
Source Liagre, Dupraz. 2008
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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Performances agroécologiques de l’agroforesterie moderne
Dans les années 1990, des agronomes français se posent la question de la réintroduction de
l’arbre dans les cultures et découvrent que des agriculteurs pionniers ont déjà enclenché le
pas. L’INRA de Montpellier (UMR System), notamment, commencent à évaluer les
performances de ces systèmes. On montre dans quelles conditions une la parcelle
agroforestière produit plus et mieux.
L’association arbres et cultures (prairies comprises) implique des phénomènes de compétition
pour le partage des trois ressources fondamentales aux plantes (lumière, eau, nutriment)
cependant les phénomènes de facilitation et de complémentarité entre espèces sont plus
intenses. Nous aborderons les interactions entre arbres et cultures pour les trois ressources
fondamentales et nous verrons comment concevoir et piloter une plantation agroforestières
pour que la complémentarité soient la plus efficace.
Une parcelle agroforestière bien conçue produit 10 à 60 % plus de biomasse, qu’une parcelle
agricole classique. Source Liagre, Dupraz. 2008
Nous verrons également que l’avancée des connaissances en agroforesterie permet
aujourd’hui de piloter une plantation au service d’un système de culture ou d’élevage.
L’arbre, au-delà d’une diversification devient un outil au service du système de production:
refuge pour auxiliaires, conservation des sols, compléments fourragers, amélioration du cycle
de l’eau…
Intérêt pour l’élevage
Apports zootechniques et services…
Plusieurs thématiques seront abordées et illustrées par des projets d’agriculteurs ou des
résultats de recherche: l’impact des arbres sur la disponibilité fourragère, la capacité
fourragère de diverses essences et de différents modèles agroforestiers, l’intérêt pour le bien
être animal. Nous verrons aussi la faisabilité technico-économique.
Elevage ruminants : Projet Villarceaux, Projet Oasys,…
Plusieurs types d’aménagements agroforestiers d’agriculteurs seront présentés et un focus sera
fait sur le projet expérimental de l’INRA Lusignan (86). Sur cette exploitation laitière bovine,
une réflexion globale a été menée sur la capacité du système laitier à résister au dérèglement
climatique. Un ensemble très varié d’aménagements agroforestiers a été planté pour
finalement constituer le plus important dispositif expérimental liant agroforesterie et élevage
en France.
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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Aménagement des parcours Volaille
Le CASDAR Parcours Volaille a pris fin cette année, ce programme de recherche et de
développement multi partenarial a pu cerner davantage les performances zootechniques et
environnementales des parcours volailles arborés en rapport aux parcours nus. Des guides
pour la conception d’aménagements ont aussi pu être produits et seront présentés.
Comment raisonner son projet ?
Parce qu’un projet agroforestier est conçu sur le long terme, il doit être raisonné avec minutie.
Pour conclure l’intervention, nous présenterons la démarche nécessaire à la concrétisation
d’un projet. Nous aborderons aussi les points économiques, juridiques et réglementaires.
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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L’agriculture biologique: prix Nobel de l`économie ? Zoom sur les pratiques collectives des producteurs bio.
Table ronde avec, notamment, la participation d’Alain Delangle, administrateur FNAB,
Jacques Chiron, administrateur Biolait, Guillaume Hery, administrateur APFLBB et Jean-
Marie Morin, Animateur Recherche Formation du réseau Formabio. Animation Claire Touret
Les acteurs bio ont mis en place de façon empirique des pratiques et un mode de relation qui
permettent d’accompagner le développement de la bio et de contribuer à développer une
économie durable, solidaire et relocalisée. Deux témoignages permettront de découvrir
quelques unes de ces pratiques déployées par des organisations de mise en marché ou de
commercialisation de producteurs bio. Conclusion par Jean-Marie Morin sur ces démarches et
leurs voies de diffusion et d'appropriation.
Concilier intérêts privés et plus value sociale et environnementale
Développer la bio tout en préservant ses principes fondateurs qu’ils soient écologiques,
sociaux, humanistes et économiques est un défi dans un monde où la compétitivité prix et le
calcul économique priment. Les plus-values environnementales et sociales sont hors du
champ de ce calcul. Elles sont alors au mieux minimisées, souvent niées dans ce qu’est
devenu le principal mode d’échange de biens et services : les marchés.
Dans un marché en expansion, où la concurrence s’accentue, comment les producteurs et les
acteurs pionniers du bio peuvent-ils apporter un renouveau à l’économie ? La Fédération
nationale d’agriculture biologique des régions de France a animé une recherche-action pour
penser une telle économie à partir des expériences existantes en bio. Ce travail a conduit à
l’identification d’innovations organisationnelles mises en place par les acteurs bio.
Ces innovations regroupent des pratiques pour faire vivre une gouvernance interne et ouverte
aux partenaires extérieurs. Cette gouvernance a pour objectif de gérer la diversité des
productions, des partenaires, des échelles territoriales dans lesquelles s’inscrivent les
échanges. Ces échanges ne sont pas qu’économiques et commerciaux mais intègrent les
préoccupations environnementales et sociales et s’inscrivent dans un partenariat de long terme
en faisant coopérer l’ensemble des acteurs d’une filière, des producteurs aux consommateurs.
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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Ce travail fait écho et a nourri la participation de la FNAB aux travaux menés par la Plate-
forme pour le commerce équitable (PFCE) sur les relations « Nord Nord ». Ainsi le 27 juin
2014 à Paris, la PFCE et le réseau d’Initiatives pour une agriculture citoyenne et territoriale
(INPACT National), associés à la Fédération Nationale d’Agriculture Biologique (FNAB)
officialisaient la Charte du « Commerce Equitable Local » : un projet innovant qui s’attache à
décliner les principes fondamentaux du commerce équitable pour défendre et promouvoir une
agriculture citoyenne et durable en France.
Faire vivre la concertation au sein de l’organisation
Intervenant : Jacques Chiron, administrateur Biolait
Biolait, créée en 1994, est une organisation économique de producteurs laitiers bio, chargée
de la collecte sur l’ensemble du territoire national. Avec plus de 600 exploitations laitières
adhérentes pour plus de 100 millions de litres de lait produits annuellement, Biolait réalise
aujourd’hui la plus importante collecte de lait biologique de vache de France et approvisionne
une cinquantaine de transformateurs.
Pour accompagner les différentes phases de changement d’échelle de l’organisation, les
producteurs ont mis en place des dispositifs permettant l’implication des adhérents dans les
orientations et principales décisions politiques et stratégiques de l’organisation. Structures
locales, AG et CA sont organisés avec le souci de répondre à cette préoccupation. Faire
partager le projet aux nouveaux adhérents par un contact direct avec un administrateur ou
adhérent-référent est également un enjeu fort pour Biolait. Celui de faire ressentir aux
adhérents que malgré la dimension nationale de la structure et le nombre important de
salariés employés, Biolait reste avant tout une organisation de producteurs, qui a pour
engagement de redonner aux éleveurs laitiers bio leur place au sein de la filière.
Inventer de nouvelles relations commerciales
Intervenant : Guillaume Hery, administrateur APFLBB
L’Association de Fruits et Légumes Biologiques de Bretagne (APFLBB) est aujourd’hui une
des principales organisations économiques de producteurs bio de fruits et légumes en France.
Elle réunit 63 adhérents et commercialisait 10 000T de produits en 2013, pour un chiffre
d’affaire de 9.5 M d’euros.
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
47
L’APFLBB regroupe des exploitations de typologies très diverses (en taille et type de
production). Afin de respecter et favoriser cette diversité, l’OEPB s’ouvre à divers types de
marchés : gros, demi-gros, détail, ainsi qu’à divers types de partenaires. Cette diversité de
débouchés est encadrée et gérée par la structure pour garantir une complémentarité et éviter
des concurrences destructurantes.
Des partenariats de long terme avec des expéditeurs conventionnés basés sur la confiance et
l’échange régulier autour des préoccupations de chacun des acteurs structurent l’essentiel de
la mise en marché de l’APFLBB. Avec la démarche « Ensemble, Solidaires du producteur au
consommateur », les différents acteurs de la filière sont reliés : producteurs via l’APFLBB,
expéditeurs partenaires, distributeur et consommateurs via Biocoop.
Des outils pour repérer, valoriser, diffuser ces bonnes pratiques
Ces outils sont disponibles en téléchargement sur le blog
http://nouvelleeconomiebio.blogspot.fr/
Un recueil de fiches : « L’agriculture biologique : Prix Nobel de l’économie ? » , explicite
la démarche de réappropriation par les producteurs bio de l’économique de leur secteur. Il
donne à voir les pratiques déployées par les organisations de mise en marché collective de
producteurs bio qui contribuent à une économie agroalimentaire relocalisée, solidaire et
durable !
Ces fiches sont destinées aux agriculteurs, organisations collectives de mise en marché, agents
de développement agricole, formateurs. L’objectif n’est pas de faire une présentation
exhaustive des différents dispositifs mis en place par les organisations économiques de
producteurs bio, mais bien d’en illustrer certains pour permettre leur réappropriation par
d’autres acteurs.
Un outil « bilan des pratique s » des OEPB
C’est un outil à disposition des organisations économiques pour:
• faire le point sur leurs pratiques, prendre du recul,
• mobiliser les adhérents autour du projet de la structure, mesurer l’implication et
l’appropriation du projet par les adhérents,
• valoriser et communiquer sur les dispositifs innovants.
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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Quand Eau & Bio s’allient pour un développement local durable : 30 bonnes raisons de passer à l’action !
Regards croisés d’acteurs impliqués sur des bassins versants… élus, usagers, acteurs
économiques, scientifiques
En présence de :
π Josette GARNIER et Gilles BILLEN, directeurs de recherche au Centre National de la
Recherche Scientifique
π Yannick NADESAN, président du Syndicat Mixte de Production du Bassin Rennais
π Un(e) représentant(e) des professionnels bretons de la mer
π Stéphane ROZE, agriculteur à Erbrée (35)
π Julie PORTIER et/ou Sylvain ROUMEAU, chargés de mission à la Fédération Nationale
d’Agriculture Biologique
Les Directives Européennes (Cadre sur l’eau, Baignade, Stratégie pour le Milieu Marin) et
l’ambition nationale qui s’expriment notamment au travers des "captages prioritaires et/ou
Grenelle" et des bassins versants incitent règlementairement les collectivités à agir pour la
préservation de la qualité de l’eau. Mais ce sont aussi des mesures volontaires via des
politiques territoriales innovantes qui font le succès de cette préservation. Aujourd’hui, ces
multiples expérimentations – dont certaines atteignent leur stade de maturité – démontrent la
faisabilité de politiques publiques favorables à la fois à la reconquête de la qualité de l’eau, au
développement de l’agriculture biologique et au dynamisme économique local.
Cette table-ronde sera aussi l’occasion de présenter la parution du guide méthodologique
"Agriculture biologique et développement local" Elle sera suivie de trois ateliers thématiques
pour découvrir ces expérimentations locales, mais surtout pour partager des points de vue, des
retours d’expériences, des pistes d’actions et de réflexions.
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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Atelier thématique Eau et bio N°1 : Transversalité des politiques territoriales pour des projets structurants de développement de l’agriculture biologique
Parler de transversalité, cela semble bien souvent incantatoire : afficher une volonté, mais
se heurter au cloisonnement des dispositifs, des services, des acteurs. Sur ce point, les
projets de développement territorial de l’agriculture biologique ont un gros avantage : la
capacité à aller vite, à apporter rapidement des résultats concrets qui touchent à plusieurs
politiques publiques, et à les incarner sur le territoire. Comment tisser ensemble les fils du
foncier et de l’intervention économique, une méthode commune et deux récits de territoire.
π En présence de Jacky BONNET, adjoint au maire de la Couronne (Charente)
Situé sur le bassin versant de la Charente, le territoire de La Couronne est marqué par des
structures à forte empreinte écologique (usine d’incinération des ordures ménagères, centre
d’enfouissement technique, ligne à grande vitesse, cimenterie, carrières et industrie papetière).
Le déclin progressif des activités industrielles a entraîné une forte diminution du nombre
d’emplois, faisant de La Couronne une ville en prise avec le chômage et les difficultés
sociales. Face à ces difficultés et afin d’engager le territoire dans une nouvelle dynamique
tournée vers le développement durable, La Couronne s’est engagée en 2008 dans une
démarche Agenda 21, reconnue "Agenda 21 local". La réforme de la gestion par les services
municipaux des espaces verts et de la restauration collective vers le zéro phyto et l’agriculture
biologique a servi de point d’ancrage à cette démarche.
π En présence de Yannick NADESAN, président du Syndicat Mixte de Production du Bassin
Rennais (Ille et Vilaine)
Le SMPBR regroupe 37 communes et produit l’eau pour les 400 000 habitants de son
territoire, soit 45% des besoins en eau d’Ille et Vilaine. Le SMPBR a décidé d’agir
différemment en investissant sur deux leviers d’action publique : la maîtrise foncière et la
valorisation économique des productions, en partenariat étroit avec les élus locaux et la
profession agricole. Un zoom particulier sera réalisée sur la démarche de dialogue territorial
entamée sur le bassin versant (BV) de la Haute- Rance - un des principaux territoires
"producteurs" situé à 40km de Rennes - dans le cadre du renouvellement du contrat de BV
(2014-2018), aune d’un projet agricole de territoire innovant ayant pour objet de reconquérir
et protéger la qualité des eaux et des milieux aquatiques.
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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Atelier thématique Eau et bio N°2 : Des outils innovants au service de la maîtrise d’usage des sols
Avec 2/3 des candidats à l’installation (notamment les hors-cadre familial) souhaitant
s’engager en bio, l’opportunité serait formidable si la concurrence foncière et les logiques
d’augmentation des surfaces des exploitations n’interféraient pas dans les choix de la
collectivité. Deux témoignages de collectivités donneront à voir des solutions pour faciliter
l’accès au foncier agricole, l’un des rôles privilégiés des collectivités pour accompagner le
développement de la bio.
π En présence de Louis DUBREUIL, vice-président en charge de l’agriculture au Conseil
général d’Ille et Vilaine
Trouver le foncier, le mobiliser et constituer des unités viables pour des projets agricoles,
réunir le capital... voici quelques-uns des éléments de l’équation que doivent résoudre les
collectivités. En Ille et Vilaine, 3600 hectares de terres agricoles sont artificialisés chaque
année. Pour remédier à la pression qui s’exerce sur le foncier agricole et faciliter l’accès à la
terre des porteurs de projets agricoles "hors-cadre familial", le Conseil général d’Ille et vilaine
(CG 35) a lancé en 2008 un dispositif de portage foncier. Retour sur image sur ce dispositif
qui a permis d’installer près d’une trentaine de jeunes agriculteurs ayant des projets agri-
ruraux innovants…
π En présence d’Anne GALLO, présidente du syndicat intercommunal d’alimentation en eau
potable Saint-Avé- Meucon (Morbihan)
Le territoire des communes de Saint-Avé et de Meucon est alimenté par deux sites de
production d’eau potable. En 2005, un arrêté préfectoral établit les périmètres de protection de
ces captages d’eau souterraine (492 hectares). Ces derniers sont en grande partie boisés, mais
le Syndicat Intercommunal d’Alimentation en Eau Potable (SIAEP) reste soucieux de
préserver une activité agricole. Conventionnement SAFER, échanges parcellaires, installation
d’agriculteurs bio… Zoom sur la démarche mise en oeuvre par SIAEP et les collectivités
locales pour protéger l’eau et l’agriculture
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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Atelier thématique Eau et bio N°3 : Des initiatives pour rendre l’alimentation bio accessible à tous
L’alimentation bio est-elle réservée aux classes les plus aisées ? Si l’accessibilité des produits
biologiques peut être limitée par différents facteurs (financiers, socioculturels, etc.), de
nombreux territoires ont soutenu ou mis en place des dispositifs adaptés. Quelques uns seront
présentés dans cette table ronde : le Défi "Familles à alimentation Positive" en Rhône-Alpes
qui accompagne des familles pour "augmenter leur consommation bio sans augmenter leur
budget", des approvisionnements bio et locaux d’épiceries solidaires et des paniers de
légumes bio à prix adaptés aux revenus. La FNAB apportera un éclairage global sur les
travaux menés sur les impacts transversaux - et souvent insoupçonnés ! - de telles initiatives.
Autant de témoignages qui vous permettront d’échanger sur les opportunités et perspectives
pour vos territoires.
En présence d’Olivier CORDEAU, administrateur en charge des circuits courts à la FNAB et
Violette STRICOT, chargée des projets d’accessibilité à la bio à la FNAB; Maud ROUSSEL,
chargée du projet « Défi Famille à Alimentation Positive » à Corabio (Groupement des
agriculteurs bio de Rhône-Alpes) ; Jérémie CREPEL élu de la mairie Lille impliqué dans le
projet des "BiocABas Accessibles" ; une Épicerie Solidaire s’approvisionnant en Bio.
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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S’installer en ovin : parasitisme, sélection, alimentation, commercialisation Sabrine Ponthieu BVB : présentation de la filière ovine avec ses débouchées
Julien Brothier éleveur ovins lait et ovins viande à la vraie-croix (56)
Anthony Civel éleveur ovins viande à Molac (56 )
Animation : Christophe Lefèvre
1) Présentation de la ferme de Julien Brothier
2008 : installation sur 20 ha avec 30 brebis lait et 30 brebis viandes.
Race: croisement charolais /ile de France /romanof / Lacaune pour les laitières
2009 : aménagement bâtiment : 100 m 2 bergerie. Salle de traite 32 places
Silo à céréales de 25 T – bâtiment de stockage de 120 m² (15 x 8).
2010 : 10 brebis viandes et 50 laitières
Achat Thones et Marthod pour reconstituer le troupeau viande.
2013 : 31 ha et 10 ha de forêt – 50 laitières et 20 viandes
Le système en 2013
Intrants Système Sortants
Pas d’achat aliments 1.5...........UTH
Semences :
Auto produite ou
fermières pour céréales
.....31 ha de SAU
12 ha de culture : blé
féverole, orge pois, orge
lupin
Vente céréales à d'autres
producteurs ou alimentation
petits cheptels
Animaux :
Achat 20 brebis croisées
vendéennes
Achat bélier tous les 3
ans
40 brebis laitières
40 brebis viandes
20 renouvellement
8 000 litres de lait valorisé
entre 3,5 et 5 euros
Maerl tous les 2 ans sur
25 ha = 1 T / ha
Compost : 8 T / ha –fin
février
Autre :
commercialisation
3 magasins de producteur +
1 marché 1 amap et 1 dépôt
vente + bvb + caissettes
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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DONNEES ECONOMIQUES 2013
CA: 42 000 € dont 5 000 en viande et 5000 en céréales, 26 300 en lait
Aides totales : 5700 euros (dpu+ aide au maintien et conversion)
EBE : 20 000 annuité 5 000
MONTANT DES INVESTISSEMENTS pour l’installation en 2008 : 45 000 €
Cheptel:1700 Matériel:8000
Bâtiment : 25000+10000
Fromagerie auto construite
+ 10 000 € d’investissement en 2013
PATURAGE : plus haut pour les viandes (22 cm feuilles tendues)
Finition à l’herbe uniquement – vente à 4 mois pour les plus jeunes (18 kg de carcasse)
TEMPS DE TRAVAIL / semaine et temps libre
35 h annualisées en 2014 – beaucoup plus à l’installation : autoconstruction + clôture
4 à 5 semaines de vacances dans l’année
Quel conseil donnerais-tu à un porteur de projet qui souhaite s’installer en ovin ?
Faire attention au parasitisme : ne pas hésiter à utiliser du chimique
Faire à attention aux rations
Adapter le chargement au potentiel des terres, Se former (GAB)
2) Présentation de la ferme d’Anthony
HISTORIQUE
2008 : 55 ha et 350 brebis (roussin 2/3 + rouge de l’ouest 1/3 et romane)
2008 : Transfo bâtiment vl en bergerie + parc de contention + clôture électrique
2009 : Problème de toxoplasmose (vaccination des agnelles)
2010 : Croissement avec béliers vendéens (plus adaptés au système herbager / conformation
agneau)
Construction 2ème bergerie + stockage céréale + atelier
2011 : Achat tapis d’alimentation
Montant des aides à l’installation (cr+dja)27000
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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2012 : Installation de Mathilde avec passage en GAEC et atelier brebis lait transfo – passage
au forfait.
Création du labo et de la salle de traite
2013: Conversion bio
LE SYSTEME en 2011 (clôture compta 30sept)
CHIFFRES : (compta 2011)
CA : 90 000 dont 7000 de SFEI, 7350 de primes brebis et 12 000 dpu vente animaux 63650
EBE : 33 500 Annuité 11 000
Investissements pour l’installation en 2008
125 000 € (dont 100 000 d’emprunt)
50 000 cheptel 25 000 matériel
15 000 aménagement bâtiment
10 000 clôture
25 000 parc de contention, matériel ovin (petit matériel, claie d’agnelage, barrière),
implantation prairie, chien de troupeau, matériel de bureau
RATION DES BREBIS
Intrants Système Sortants
Alimentation :
Achat de 20 T de correcteur azoté
1...........UTH
Semences :
1100 € semences céréale
1000 € semences fourragères
Trie des céréales par Pocréau
.....55.......ha de SAU
40,3 ha de prairie temporaire
(RGA /TB/Fétuque élevée)
3,2 ha de prairie permanente
7.5 ha triticale /avoine /pois
4 ha d’orge
céréales
autoconsommées à
100%
Animaux : 3 béliers vendéens à
350 € pièce
350..........Brebis
70 agnelles
8 béliers
1,18 UGB/ha
34 Brebis de réforme
490 agneaux
Carbonate: 55 T tous les ans: 1 T /
ha
Aides: 26 300 DJA + CG + CR
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
55
2 repas par jour identique. 100 g de paille 400 g de concentré (MC 60 % + 40 % de
correcteur)
Foin : 1 kg
PARASITISME
Prévention par coprologies, pâturage tournant, minéraux, sélection génétique, renouvellement
des pâtures, compostage du fumier
TEMPS DE TRAVAIL par semaine et temps libre
Période creuse : mars avril : 8 h X 6 - Aout à décembre : 6 h par jour
Pointe de travail ; fin janv févr avril : 12 h / jour X 7
15 j de vacances par an + quelques we
Quel conseil donnerais-tu à un porteur de projet qui souhaite s’installer en ovin ?
Formation théorique indispensable
Acquérir suffisamment d’expérience avant de passer en bio
Réfléchir en amont au système et à sa cohérence avant de le mettre en place
00.5
11.5
22.5
33.5
4
Janv Fév Mars Avril Mai Juin Juil Août Sept Oct Nov Déc
Ensi Mais
concentré
Foin
Pâtures
Paille
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
56
PAC 2014: quels changements dans vos fermes? Mary Henry (Chambre d’Agriculture de Bretagne)
Après près de trois années de négociation au niveau européen puis en France, la réforme de
la PAC est presque finalisée. Fin 2013, le gouvernement français a présenté les principaux
choix qu’il retenait pour la mise en œuvre nationale, à l’issue de nombreuses réunions de
concertation qui associaient les organisations professionnelles agricoles. Pour s'adapter, les
éleveurs bretons n'ont d'autres choix que d'optimiser leurs marges.
Réduction du budget et refonte des aides directes obligent, la mise en œuvre de la nouvelle
PAC va entraîner des changements significatifs pour les exploitations agricoles. Adieu DPU,
PMTVA… il va falloir désormais parler des DPB, paiement vert, paiement redistributif… S’il
n’y avait qu’un changement de langage, ce serait finalement assez simple. Mais ce n’est pas le
cas ! Derrière ces nouveaux intitulés, il y a de nouvelles modalités d’attribution des aides
directes du premier pilier de la PAC, qui vont avoir des conséquences plus ou moins
importantes sur le niveau des aides versées selon les systèmes de production. Globalement, les
estimations faites par le service veille étude et prospective de la Chambre régionale
d’agriculture de Bretagne prévoient une baisse d’au moins 40 millions d’euros par an pour la
Bretagne (sur un total de 540 M€). Cette baisse ne sera pas compensée par la hausse des aides
prévue pour les mesures de développement rural du second pilier de la PAC…
Une nouvelle architecture des aides directes à partir de 2015
Jusqu’en 2014, les agriculteurs perçoivent des DPU (Droits à Paiement Unique – aide
découplée non conditionnée à une production spécifique) auxquels s’ajoutent quelques aides
couplées, notamment pour le maintien du troupeau de vaches allaitantes (PMTVA).
A partir de 2015, l’architecture des aides sera complètement nouvelle. L’aide découplée sera
scindée en 3 parties :
• Un DPB (droit au paiement de base),
• Un paiement vert,
• Un paiement « redistributif ».
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
57
A cela s’ajoute un paiement JA pour les nouveaux installés. Les aides couplées sont
également revues pour soutenir la production de lait et les plantes riches en protéines
notamment.
Les aides directes avant et après réforme. Source : CRAB
Trois grands principes sous-tendent les évolutions des aides directes du 1er pilier de la PAC :
la convergence, le verdissement et la redistribution.
Convergence pour réduire les écarts entre les agriculteurs
Jusqu’à présent, les agriculteurs bénéficient de DPU de valeurs unitaires très variables d’une
exploitation à l’autre, car fonction des aides historiquement perçues sur les années 2000-2002.
L’objectif est désormais de rapprocher (faire « converger ») le DPB de toutes les exploitations
vers un montant moyen national pour atténuer les écarts entre les agriculteurs. La France a
retenu un taux de convergence de 70%, ce qui signifie que pour les droits inférieurs à la
valeur moyenne du DPB national, l’écart entre la valeur unitaire du droit et la moyenne
nationale devra être réduit de 70% en 2019. La convergence se fera progressivement entre
2015 et 2019.
Ce processus aboutit inévitablement à faire des perdants, ceux dont les DPU en €/ha étaient
les plus élevés, et des gagnants, ceux qui avaient des DPU faibles, voire pas du tout pour
certaines productions (arboriculture,…).
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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Un paiement vert pour prendre en compte les problématiques environnementales
Le paiement vert consiste à rémunérer les agriculteurs en contrepartie de la mise en œuvre de
pratiques agricoles bénéfiques au climat et à l’environnement. Pour l’obtenir, l’agriculteur
devra mettre en œuvre 3 mesures :
• Diversification des cultures
• Maintien des prairies permanentes
• Maintien d’une « surface d’intérêt écologique » équivalente à au moins 5 % des terres
arables (7 % à partir de 2019) : bordures de champs, haies, arbres, jachères, murets, bandes
tampons, surfaces boisées.
A noter que les agriculteurs engagés en agrobiologie sont automatiquement bénéficiaires du
paiement vert.
Un paiement redistributif pour atténuer la baisse pour les systèmes intensifs
Afin de mieux prendre en compte l’emploi dans les exploitations, et corriger l’un des biais du
processus de convergence qui pénalise les systèmes de production les plus intensifs, un
paiement supplémentaire, dit «redistributif», s’ajoutera aux DPB des 52 premiers ha de
chaque exploitation agricole.
Sans entrer dans l’explication des nouvelles modalités de calcul du montant des aides directes,
voici deux illustrations concrètes. L’exploitation A, dont le montant unitaire des aides
actuellement (350 €/ha) est supérieur à la moyenne nationale va subir une baisse : en 2019, le
montant de l’aide passera à 295 € sur les 52 premiers ha, à 195 € ensuite. L’exploitation B en
revanche a aujourd’hui un montant d’aide unitaire inférieur à la moyenne nationale : avec la
réforme, ce montant va progressivement progressé pour atteindre 254 € sur les 52 premiers ha
en 2019 et 154 € ensuite.
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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Evolution des aides découplées entre 2013 et 2019
A noter qu’à ces aides dites « découplées » pourront s’ajouter des aides « couplées ». Les
aides couplées sont des aides conditionnées à une production particulière, à l’inverse des aides
découplées précédemment présentées. Les aides couplées permettent d’aider davantage
certaines productions, soit parce qu’elles sont plus fragiles sur le plan économique, soit parce
qu’elles jouent un rôle important pour l’économie et l’entretien d’un territoire. La France a
choisi de soutenir spécifiquement l’élevage de ruminants, mais aussi d’encourager la
production des protéines par l'octroi d'aides couplées.
Conséquences pour la Bretagne
Avec la mise en œuvre de cette réforme de la PAC, globalement la Bretagne sera perdante car
le DPU moyen breton se situe aujourd’hui au-dessus de la moyenne française (315 € contre
258 €). Compte tenu de nos hypothèses, au lieu des 542 millions € d’avant réforme, la
Bretagne recevrait en 2019 moins de 500 millions € ce qui équivaut à une baisse au moins
égale à 7%.
Les agriculteurs vont une nouvelle fois devoir s’adapter à cette réforme qui renforce
l’importance du marché et donc du prix de leurs productions sur la rentabilité de
l’exploitation. Si sur le principe, cette orientation peut être considérée comme positive, tout
agriculteur préférant naturellement vivre de la vente de ses produits plutôt que des aides, il
n’en reste pas moins que l’impact risque d’être brutal et déstabilisant pour certaines
exploitations. Les conditions de marchés, les prix de vente des productions agricoles vont être
de plus en plus déterminants.
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
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Le commerce équitable Nord-Nord, une avancée pour la filière bio française. Marcel DELAUNAY - Président de l’association Bretagne CENS, Émilie DUROCHAT -Animatrice nationale de la Plate-Forme Pour le Commerce Équitable (PFCE), Alain DELANGLE - Administrateur de la FNAB
Le 27 juin 2014 à Paris, la Plate-Forme pour le Commerce Equitable (PFCE) et le réseau d’Initiatives pour une Agriculture Citoyenne et Territoriale (INPACT National), associés à la Fédération Nationale d’Agriculture Biologique (FNAB) officialisent la Charte du « Commerce Equitable Local » : un projet innovant qui s’attache à décliner les principes fondamentaux du commerce équitable pour défendre et promouvoir une agriculture citoyenne et durable en France.
La Charte du « Commerce Equitable Local » est le fruit de 3 ans de partenariat entre les acteurs du commerce équitable et les organisations françaises des agricultures alternatives et durables. Convaincus de la pertinence et de l’efficacité des outils mis en place par les acteurs traditionnels de commerce équitable afin de renforcer les agricultures familiales dans les pays du Sud, les signataires de ce projet inédit ont entrepris de les adapter aux réalités et au contexte français. Ainsi rassemblées autour de valeurs communes, la PFCE et INPACT, en association avec la FNAB, ont fait émerger 14 principes fondamentaux pour bâtir des relations commerciales équitables au service d’une agriculture paysanne et agro-écologique. Sa signature intervient à la veille de la nouvelle loi ESS qui étend la définition du commerce équitable aux échanges locaux.
Cette charte entend défendre et promouvoir des agricultures innovantes respectueuses de la nature et des hommes, qui s’appuient sur des pratiques agro-écologiques paysannes. A travers des pratiques agricoles durables, économes et autonomes, des organisations de producteurs à taille humaine et démocratique, des productions basées sur les ressources et spécificités locales, les signataires de la charte souhaitent soutenir des agricultures qui participent pleinement au développement durable et citoyen des territoires. La Charte du « Commerce Equitable Local » a vocation à rassembler les initiatives déjà existantes et qui se développent chaque jour sur les territoires (la gamme « Ensemble Solidaires avec les producteurs » de Biocoop, le label « Bio Solidaire » de l’association Bio-Partenaire, la gamme « Paysans d’ici » d’Ethiquable, le label Ecocert Solidaire, etc.) en leur offrant à la fois visibilité et cohérence. En cette année 2014 où l’agriculture familiale est à l’honneur, les signataires de la charte œuvrent ensemble pour garantir aux consommateurs des produits, à forte valeur ajoutée sociale et environnementale, et aux producteurs les moyens de développer des agricultures d'avenir.
Actes des conférences / La Terre est notre métier 2014
61
Pour ce qui concerne plus spécifiquement l'agriculture biologique, cette charte doit-être l'occasion de formaliser et d'améliorer des comportements qui existent déjà souvent au sein des filières. Le cahier des charges européen de l'agriculture biologique (très complet sur les modes de production, l'étiquetage et sur les contrôles) ne prévoit rien sur les relations entre les acteurs de la filière. Pourtant, ce sujet préoccupe très directement les agriculteurs et nombre d'opérateurs aval, qui ont la volonté de ne surtout pas reproduire les schémas connus dans le conventionnel. Pour les organisations de producteur bio réunis au sein de la FNAB, il s'agit dans un premier temps de repérer les acteurs avec lesquels il est immédiatement simple d'avancer et de commencer avec eux la mise en application concrète de la charte du commerce équitable local.
14 principes de la charte :
Une relation commerciale équitable et responsable
• Un prix transparent et rémunérateur• Un partenariat commercial sur du long terme• Une relation non-exclusive qui préserve l’autonomie des producteurs• Un projet de développement partagé• Une filière éco-responsable• Des conditions de travail respectant la dignité humaine
Pour une agriculture citoyenne et durable
• Une agriculture citoyenne et territoriale• Des pratiques agricoles durables, autonomes et transparentes, qui s’appuient sur des
modes de production biologique et/ou agro-écologique paysans• Une organisation de producteurs démocratique• Une production basée sur les ressources et les spécificités locales
Pour changer les pratiques commerciales
• Transparence et communication vis-à-vis des consommateurs• Sensibilisation et éducation des consommateurs• Plaidoyer à destination des décideurs économiques et politiques
NOTES
• Fédération Régionale des Agrobiologistes de Bretagne (FRAB)
17 rue du Bas Village / CS 37725 35577 Cesson Sévigné Cedex T. 02 99 77 32 34
www.agrobio-bretagne.org
• Fédération Nationale d’Agriculture Biologique des régions de France (FNAB)
40, rue de Malte 75011 Paris T. 01 43 38 38 69
www.fnab.org
«La reproduction des informations contenues dans ce document est autorisée sous réserve de la mention des auteurs des textes»
• Conception et création : Agrobio 35 / Réseau GAB / FRAB
• Crédit photographique : Matthieu Chanel (Agrobio35)
• N° ISBN : 978-2-915631-26-5
Le réseau FNAB est présent dans les 22 régions françaises. En Bretagne, Pays de la Loire et Basse Normandie, il est représenté par la Fédération régionale des agriculteurs bio et 4 GAB ; la Coordination Agrobiologique des Pays de la Loire et 5 GAB ou organisations bio ; le GRAB Basse Normandie et 2 GAB.
Dans chaque région, le réseau est né et perdure grâce à la volonté et l’engagement des producteurs bio. Au-delà de son objectif de défense et de représentation des agriculteurs biologiques, le réseau FNAB promeut un développement cohérent, durable et solidaire du mode de production biologique. Pour préserver l’environnement et la Terre, être en accord avec ses convictions profondes, offrir des produits sains.
En Bretagne, le réseau GAB / FRAB agit pour le développement de l’agriculture biologique, la représentation et l’accompagnement des producteurs bio et en conversion. Grâce à la FRAB et aux 4 groupements départementaux : Agrobio35, le GAB du Morbihan, le GAB Penn ar bed et le GAB d’Armor, le réseau apporte des conseils techniques en bio, organise des formations et des échanges, et, agit pour la structuration des filières.
Le réseau agit notamment dans :• Le développement et l’accompagnement de la production• Le transfert des pratiques biologiques vers les agriculteurs non bio• La formation• La recherche et l’expérimentation• Le développement des filières• La promotion de l’agriculture bio, de ses techniques et de ses produitsEn 2011, le Réseau GAB-FRAB, c’est :• 60% de producteurs bio bretons adhérents• 40 producteurs bio bénévoles actifs : administrateurs, mandatés, responsables de commission
Une présence sur le territoire breton• 1 fédération régionale, la FRAB • 4 groupements départementaux d’agriculteurs bio, les GAB.Des compétences transversales 32 salariés dont• 10 techniciens• 6 chargés de mission Filières et Restauration collective• 3 chargés de missions Réglementation, Observatoire et Structuration des Filières• 4 chargés de communication
Un réseau, des valeurs, des hommes
emmanuelle deraeveMaraîchère | PPAM | ille-et-vilaine
un réseau, des valeurs, des hommes
www.agrobio-bretagne.org
Adhérer au réseau FNAB c’est : Défendre une filière bio, cohérente, dynamique et ambitieuse ≈ Construire un projet de société ≈ Promouvoir une rechercher participative et coopérative ≈ Promouvoir la spécificité de filières créées par et pour les producteurs ≈ S’unir et se mobiliser pour la profession agrobiologiste ≈ Mieux travailler ensemble ≈ Partager nos connaissances ≈ Des valeurs exigeantes, responsables, humanistes.