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ACCOMPAGNER LA FIN DE VIE & PRINCIPAUX REPèRES DES SOINS PALLIATIFS Godefroy Hirsch L’Esprit du temps | « Études sur la mort » 2010/2 n° 138 | pages 133 à 144 ISSN 1286-5702 ISBN 9782847951875 DOI 10.3917/eslm.138.0133 Article disponible en ligne à l'adresse : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- https://www.cairn.info/revue-etudes-sur-la-mort-2010-2-page-133.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour L’Esprit du temps. © L’Esprit du temps. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. Powered by TCPDF (www.tcpdf.org) © L?Esprit du temps | Téléchargé le 17/06/2022 sur www.cairn.info (IP: 65.21.228.167) © L?Esprit du temps | Téléchargé le 17/06/2022 sur www.cairn.info (IP: 65.21.228.167)

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ACCOMPAGNER LA FIN DE VIE & PRINCIPAUX REPèRES DES SOINSPALLIATIFS

Godefroy Hirsch

L’Esprit du temps | « Études sur la mort »

2010/2 n° 138 | pages 133 à 144 ISSN 1286-5702ISBN 9782847951875DOI 10.3917/eslm.138.0133

Article disponible en ligne à l'adresse :--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------https://www.cairn.info/revue-etudes-sur-la-mort-2010-2-page-133.htm--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

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DÉFINITION DES SOINS PALLIATIFS

En France, les soins palliatifs sont définis par la loi du 9 juin 1999 commeétant :

« des soins actifs et continus pratiqués par une équipe interdisciplinaireen institution ou à domicile. Ils visent à soulager la douleur, à apaiser lasouffrance psychique, à sauvegarder la dignité de la personne malade et àsoutenir son entourage ».

Leur objectif principal est de chercher à préserver la qualité de vie despatients et de leur famille, face aux conséquences d’une maladie grave etpotentiellement mortelle.

Il s’agit de soins actifs et continus s’appuyant sur un « prendre soin »basé sur des compétences, un corpus de savoirs et d’expérience, maisouvert à la singularité de l’histoire de la personne, considérant celle-cicomme un vivant et potentiellement désirant jusqu’au bout de sa vie.Les éléments de la définition des soins palliatifs peuvent servir de trame

pour en préciser les principaux repères:

• Soulager la douleur :

C’est une dimension fondamentale, car la douleur est un carcan quiemprisonne la personne dans son corps souffrant et altère ses possibilitésd’échange avec autrui.

Traiter la douleur est une obligation morale et réglementaire et relèvedonc de la responsabilité de chaque soignant. La prise en charge de la

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Études sur la mort, 2010, n° 138, 133-144.

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douleur nécessite une formation, des compétences et s’appuie sur destechniques et un savoir-faire clinique. De très nombreuses recommandationsou outils d’aide sont maintenant à la disposition des soignants médicaux etnon médicaux 1.

D’incontestables progrès ont été effectués ces dernières années, mais ilpersiste encore des réticences voire des résistances, rendant nécessaires lapoursuite des efforts de formation et de sensibilisation des professionnelsde santé dans ce domaine. C’est un des enjeux du développement des soinspalliatifs.

Par ailleurs, soulager les autres symptômes d’inconfort est un corollaireobligatoire au traitement de la douleur. De nombreux symptômes d’inconfortpeuvent émerger au cours des maladies graves ou en fin de vie et doiventêtre correctement pris en charge : inconforts digestifs (nausées, vomisse-ments,…), respiratoires, neurologiques (confusion) ou psychiques (angoisse,anxiété, dépression,…).

• Apaiser la souffrance :

Il s’agit tout d’abord de reconnaître la souffrance de l’autre et sesmultiples dimension : souffrance physique, mais aussi psychique, relation-nelle, sociale et existentielle, à l’image du « total pain » élaboré par une desfondatrices des soins palliatifs, Dame Cicely Saunders. Le repère de ceprendre soin est une tentative d’approche de la globalité de ce que vit lapersonne, dans une perception et une écoute de ce qu’elle exprime, attentifà la dimension de la parole et du récit, de ce qui est amené de difficultés, dedoutes, d’interrogations sur le sens, d’ambivalence mais aussi de ressourcesintérieures et de désirs.

Le but des soins palliatifs et de l’accompagnement est de tenterd’apaiser la souffrance, au sens d’amener un peu de douceur, plutôt quevouloir supprimer toute souffrance.

Cette confrontation à la souffrance de l’autre, notamment dans ladimension existentielle du questionnement sur le sens (sens de la vie, sensde ce qui arrive, lien avec l’histoire de la personne) est source d’humilité carelle nous renvoie à nos limites de soignants, malgré toute notre visée dubien. Elle nous incite à être particulièrement attentifs à la vulnérabilité del’autre.

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1. Les recommandations, guides ou aides à la réflexion élaborés par la SFAP sonttéléchargeables sur le site www.sfap.org.

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• Sauvegarder la dignité :

Le concept de dignité est fréquemment convoqué autour de la fin de vie,notamment dans les débats médiatiques le plus souvent dans des viséespartisanes. Si l’approche philosophique de ce terme peut être riche, forceest de constater que dans la pratique quotidienne les soignants et accompa-gnants bénévoles se trouvent plutôt confrontés à des vécus d’indignité parles personnes malades. Sentiment ou peur d’être un poids pour ses proches,perte de repères et de sens, peur de la perte d’autonomie (particulièrementmal vécue dans notre société mettant en avant la capacité de faire et d’agirpar soi-même), altération de son image corporelle, peur de l’abandon,…Sont autant de sentiments parfois très violents pouvant traverser lapersonne malade et par ricochet son entourage. Ces vécus d’indignité, demême qu’une mauvaise prise en charge de la douleur, une dépression, unisolement, sont des facteurs maintenant bien identifiés comme pouvantamener à des demandes d’euthanasie 2 (Vinant 2004).

La démarche des soins palliatifs et de l’accompagnement cherche àredonner sa place à la personne, en mettant en avant sa parole, ses souhaits,en essayant de faciliter l’émergence d’un récit, permettant ainsi à lapersonne de se décaler par rapport à ce qu’elle vit, de se replacer dans sonhistoire de vie.

Considérer la personne comme vivante, c’est aussi accueillir ses désirs,sa colère, ses possibles revirements intérieurs, son ambivalence et essayerd’être attentif à la propre temporalité de la personne.

Enfin, c’est aussi pouvoir accueillir et ne pas éluder les questionnementsautour de la mort possible ou des conditions du mourir.

• Soutenir les proches :

Être attentif envers les proches et les soutenir est un axe fondamentaldes soins palliatifs tant la maladie grave ou la survenue possible de la mortconstituent une épreuve pour la famille et les proches. Il faut être conscientdes conséquences physiques et psychologiques pour l’entourage du fait del’irruption de la maladie grave (le choc), de son inscription dans le temps(risque d’épuisement), des périodes d’aggravation et de la phase ultime.

Le glissement des tâches, les changements de rôles, les perturbations durythme de vie, les modifications de l’organisation familiale sont souvent

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2. P. Vinant : «La demande d’euthanasie exprimée par les patients : l’approche clinique selonl’evidence-based medecine » Congrès National de la SFAP, Besançon, juin 2004. Pour les raisonsdes demandes d’euthanasie ou de suicide assisté, consultez les études de Bach, 1996 ; Meier,1998 ; Ganzini, 2000 ; Sullivan, 2000.

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présents mais peu mis en avant et doivent être recherchés.Il y a une nécessité absolue d’accompagnement des familles, tant sur le

plan social, financier, que du soutien relationnel. La mise en place d’aidesdans ces différents domaines est parfois complexe, et la compétence d’uneassistante sociale est précieuse.

À ce titre, la mise en œuvre d’une indemnisation du congé d’accompa-gnement constitue une reconnaissance par la société de l’importance de laplace des proches auprès de la personne malade.

EN 2009, DES SOINS PALLIATIFS POUR QUI ?

Historiquement, notamment lors de l’émergence des soins palliatifsdans les années 70-80, les personnes accueillies dans les (rares) structuresde soins palliatifs étaient les patients cancéreux en phase terminale ou lesmourants.

Des évolutions considérables sont survenues au cours des 20 dernièresannées.

D’une part, les incontestables progrès du traitement des maladiesgraves, et en particuliers des cancers, ont fortement modifiés la vie et leparcours des patients, avec des périodes de remissions, des périodesd’aggravation parfois accessibles à un traitement, générant ainsi des évolu-tions potentiellement longues de la maladie.

De même, une prise en charge plus efficiente des maladies chroniquesou des situations de grand handicap, s’est accompagnée de survieprolongées, mais au prix parfois d’altérations non négligeables de la qualitéde vie et de perte d’autonomie.

Les repères actuels pour savoir qui peut et doit bénéficier de soinspalliatifs et d’un accompagnement sont moins la proximité de la mort que laprésence d’une maladie grave, potentiellement létale, et la menace sur lavie.

Il n’est plus légitime de nos jours, et cela peut être même délétère pourla qualité de vie du patient et sa famille, d’opposer les soins curatifs et lessoins palliatifs. L’approche actuelle est de favoriser un continuum des soins,dans une démarche cherchant à prendre toujours en compte la qualité devie.

En affirmant un droit à bénéficier de soins palliatifs pour « toutepersonne dont l’état le requiert », la loi de juin 1999 met bien en avant lesbesoins de la personne et non pas les phases d’une maladie ou la proximitéde la mort.

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PAR QUI ET OÙ ?

Tous les soignants, médicaux et non médicaux, sont concernés. Il est dela responsabilité de chaque professionnel de santé de pouvoir mettre enœuvre des soins palliatifs et un accompagnement, avec l’aide si nécessaired’équipes ou de structures spécialisées.

Ceci implique un développement des soins palliatifs dans tous les lieuxde vie ou de soins, que ce soit le domicile, les établissements de santé, lesétablissements médico-sociaux (en particulier les maisons de retraites typeEHPAD).

Il ne faut pas oublier la place des bénévoles d’accompagnement, forméset encadrés par des associations, et qui par leur présence auprès de lapersonne malade et de sa famille sont les témoins de l’importance de lapersonne malade aux yeux de la société, porteurs d’un message d’humanitéet de solidarité.

Enfin, les questions relatives à la fin de vie concernent tous les acteursde notre société.

COMMENT :

La mise en œuvre des soins palliatifs repose sur les notions d’équipe etde pluridisciplinarité. Cette approche soignante ne se conçoit en effet qu’ausein d’une démarche commune d’élaboration du soin, où chaque compétence(infirmière, médecin, psychologue, assistante sociale,…) va apporter larichesse de son regard, de sa formation, de son rôle. L’élaboration de soinsadaptés à la singularité et à la complexité de chaque situation de vienécessite une pluralité des regards et des expériences professionnelles.

Les équipes ou structures spécialisées de soins palliatifs, qui sont pardéfinition pluri professionnelles, peuvent être sollicitées par les acteurshabituels du soin (médecins généralistes, services hospitaliers,…) pouraider à bâtir des actions de soins et un projet adapté aux besoins et auxsouhaits de la personne malade et de son entourage.

Le repère est alors non pas une modalité de travail verticale ou hiérar-chique, mais une complémentarité entre les différents acteurs du soin, dansle respect des rôles et des compétences de chacun. Il s’agit d’abordd’apprendre à travailler ensemble.

Il est évident que la place de la formation est primordiale. La formationen soins palliatifs s’est accrue ces dernières années dans les différents cursusdes professionnels de santé (tant au niveau de la formation initiale que postuniversitaire), mais elle doit encore être développée.

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ACCOMPAGNER, UNE AUTRE DIMENSION INTRINSÈQUEMENTLIÉE AU SOIN

L’approche de la personne atteinte de maladie ou en fin de vie et de safamille ne peut cependant pas se résumer à des actions de soin.

Dans l’accompagnement (étymologiquement « partager le pain » et parextension « être à coté de ») il est d’abord question de présence à l’autre,d’un accueil, d’une écoute.

Il est aussi question de la rencontre entre deux personnes, de laconstruction d’une relation.

Le respect de ce que vit l’autre, de son cheminement et de son histoire,est une des conditions de cette relation. De même, dans l’accompagnement,il s’agit d’« être avec » et pas « à la place de ».

Pour le soignant, accompagner l’autre s’est aussi se confronter à sespropres limites (et en particulier les limites de son savoir), au doute, àl’incertitude.

Il est souvent déroutant pour les soignants, et en particulier les médecinsdont la formation est basée sur la décision et l’action, d’accepter de ne paspouvoir faire, de ne pas avoir de réponse à tout, de se départir d’un rôlecentré sur l’action pour occuper une place d’être humain auprès de l’autre.

C’est un champ difficile, la pratique clinique invite à une postured’humilité en matière d’accompagnement. Il n’y a pas de formation, pas derecette miracle, car il s’agit d’oser prendre le risque de la relation avecl’autre.

Dans cette démarche d’accompagnement, face à la mobilisation desaffects, des mouvements intérieurs et des émotions, il y a nécessité àpouvoir prendre du recul : c’est un des autres intérêts majeurs de pouvoirtravailler en équipe.

LE DISPOSITIF NATIONAL DES STRUCTURES DE SOINS PALLIATIFS

La caractéristique française des structures spécialisées de soins palliatifsest qu’elles prennent place dans un dispositif national gradué.

Les objectifs, missions, compositions et organisations des différentesstructures sont dorénavant bien définis par les textes réglementaires 3.

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3. Circulaire N° DHOS/02/2008/99 du 25 mars 2008 relative à l’organisation des soins pal-liatifs.

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Il faut distinguer :

�• Les Unités de soins palliatifs (USP), services hospitaliers uniquementdévolus à l’accueil de patients relevant de soins palliatifs, dans dessituations particulièrement complexes. Les USP ont par ailleurs aussides missions de recherche et d’enseignement.

��• Les Équipes Mobiles de Soins Palliatifs (EMSP), intra ou extrahospitalières, dont la mission principale est d’apporter une expertiseclinique, des conseils, une aide, un soutien pour les soignants quiprennent en charge des malades dans les différents services.

��• Les Lits Identifiés Soins Palliatifs (LISP) : mobilisation de ressourcesau sein d’un service hospitalier dont l’activité n’est pas exclusivementpalliative.

��• Les Réseaux de soins palliatifs : ils aident à la coordination des diffé-rentes actions et des structures, en particulier pour les patients àdomicile, en maintenant les liens entre les différents acteurs autourd’un projet de soin commun.

��• Sans oublier les Associations de Bénévoles d’Accompagnement, quiinterviennent dans ces différentes structures mais aussi à domicile etdans d’autres lieux de vie (Unités de Soins de Longue durée, maisonsde retraites,…).

Il s’agit d’un dispositif gradué car du fait des missions respectives de cesstructures, elles peuvent être sollicitées pour répondre à des problématiquesou des besoins différents de la part des patients, de ses proches ou deséquipes soignantes. L’intérêt réside dans la complémentarité entre cesstructures afin de permettre une prise en charge la plus adaptée possibleaux besoins du patient et à ses souhaits, tout au long de son parcours dans lamaladie.

En 2009, les chiffres globaux au niveau du territoire national sont lessuivants : 89 USP représentant 937 lits d’hospitalisation, 340 EMSP, 3075LISP, 213 réseaux.

Que peut- on dire succinctement du développement de ce dispositif aux coursdes 10 dernières années et de la situation actuelle?

Les points forts

Remarquons tout d’abord que depuis une quinzaine d’années unensemble cohérent de circulaires, de loi et de textes réglementaires a étémis en place pour enraciner progressivement les soins palliatifs dans le

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système de santé français.De manière concomitante, des plans successifs ont amenés des moyens

indispensables pour développer les structures spécialisées de soins palliatifssur le territoire national.

Il faut aussi noter l’importance du dynamisme et de l’engagement desacteurs de terrain.

1998-2008 : 10 années de croissance du dispositif national (source :Rapport Atémis, janvier 2009). L’exemple des EMSP:

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Points faibles

Malgré cet indiscutable développement des structures, un certain nombrede rapport et d’enquêtes objectivent des éléments préoccupants 4, 5, 6.

Il existe une très grande inégalité territoriale dans la répartition desstructures, déjà sensible au niveau des régions, mais plus encore des dépar-tements. Les Unités de Soins Palliatifs, par exemple, sont très inégalementréparties sur le territoire national.

Par ailleurs, la fragilité structurelle de certaines équipes ou dispositifs(comme les EMSP ou les réseaux) incite à un renforcement substantiel desmoyens mis à leur disposition.

Les soins palliatifs à domicile ou dans les établissements type maisonsde retraite (EHPAD) restent largement en dessous des besoins de lapopulation.

Certaines populations vulnérables sont en outre peu prises en charge :les enfants, les personnes âgées, les personnes accueillis dans les établisse-ments médico-sociaux et notamment les polyhandicapés.

L’effort est indiscutablement à poursuivre pour que comme le stipule laloi, « toute personne dont l’état le requiert puisse bénéficier de soinspalliatifs et d’un accompagnement ».

Mais peut-on limiter la place des soins palliatifs au seul dispositif desstructures ?

Dans le champ sociétal de la maladie grave et de la fin de vie, les soinspalliatifs et l’accompagnement sont d’indiscutables facteurs de mutations etde questionnements.

Ils viennent remettre en cause la place habituellement reconnue à lapersonne malade, en mettant en avant l’importance du « sujet », enpromouvant une approche de l’autre non pas seulement centrée sur lamaladie mais sur la personne. Dans une société plutôt portée par la perfor-mance et l’action, ils sont porteurs d’une philosophie humaniste et devaleurs de solidarité.

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4. Rapport relatif à la réalisation d’un état des lieux du dispositif de soins palliatifs au niveaunational. ATEMIS, janvier 2009.

5. Étude sur les perceptions et les attentes des professionnels de santé, des bénévoles et desfamilles des malades dans le cadre de la prise en charge palliative : les établissements médico-sociaux. DRESS, juin 2008.

6. Vingt ans après les premières unités, un éclairage sur le développement des soins palliatifsen France : le secteur hospitalier et les soins à domicile. DRESS, juin 2008.

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Ils viennent aussi réinterroger notre société sur la place que celle-ciaccorde aux grands malades, à la vulnérabilité, à la mort et au mourir.

Dans une société qui met en avant l’autonomie, l’individu, un besoinexprimé d’immédiateté, les soins palliatifs et l’accompagnement témoignentde la complexité des situations, d’une nécessité d’un autre rythme, d’uneautre temporalité pour la personne malade et ses proches, de l’ambivalencedes affects et des sentiments au cours de l’épreuve de la maladie grave et dela fin de vie.

Ce « prendre soin », s’appuyant sur des compétences et une pratiqueclinique rigoureuse, animé par une visée étique du bien, ne prêtant pasavoir réponse à tout et peut parfois laissé la place au doute.

DES PERCEPTIONS SOCIALES EN PLEINE ÉVOLUTION

Les soins palliatifs ont été pendant longtemps associés à la mortprochaine et à l’échec.

Ces dernières années, la perception des soins palliatifs par nosconcitoyens a très largement évolué, comme le montre une récente enquêtegrand public 7. Celle-ci révèle que les Français ont maintenant une visiontrès positive des soins palliatifs.

Ainsi, 9 Français sur 10 (89%) considèrent que les soins palliatifs sontaujourd’hui une réponse nécessaire à la souffrance des personnes gravementmalades ou en fin de vie.

De même, ils sont 88% à considérer que les soins palliatifs permettentaux personnes gravement malades de vivre le plus sereinement possible lafin de leur vie.

Enfin, 87% des Français pensent également que les soins palliatifspermettent aux personnes gravement malades ou en fin de vie de mourirdans la dignité.

Mais près de deux sur trois (63%) ont néanmoins le sentiment d’êtremal informés sur les soins palliatifs et seule la moitié d’entre eux (47%)pensent que toutes les personnes gravement malades ou en fin de vie ont lapossibilité d’accéder à des soins palliatifs.

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7. Enquête Fondation de France-SFAP, relative à la perception des soins palliatifs parles Français, Juin 2009. Téléchargeable sur le site www.sfap.org.

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Le programme de développement des soins palliatifs 2008-2012 :

Annoncé par le Président de la République en juin 2008, il comporte 19mesures et est doté d’un budget de 238 M d’euros. Son objectif annoncé estde développer une véritable culture des soins palliatifs, et il se déclineautour de trois grands axes :

• Développer l’offre de soins- poursuite du développement de l’offre hospitalière (doublementdes prises en charge en soins palliatifs entre 2008 et 2012),- essor des dispositifs extrahospitaliers,

• Élaboration d’une politique de formation et de recherche, • Accompagnement offert aux proches.

Un comité National de suivi de développement des soins palliatifs,présidé par la Dr Régis Aubry, a pour mission de suivre la mise en placeeffective des mesures de ce Plan.

La mission d’évaluation de la loi du 22 avril 2005, présentée endécembre 2008 par Jean Leonetti, met en avant des propositions complé-mentaires :

• Mieux faire connaître la loi relative aux droits des malades et à la finde vie

• Renforcer les droits des malades• Aider les médecins à mieux répondre aux enjeux éthiques du soin• Adapter l’organisation du système de soins aux problèmes de la fin devie

POUR CONCLURE, QUELS SONT LES ENJEUX POUR DEMAIN?

Le principal défi reste celui de l’accès aux soins palliatifs. Il n’y atoujours pas d’estimation précise du nombre de personnes qui devraientrelever tous les ans d’une prise en charge palliative. L’ordre de grandeuractuellement évoqué est de 150 à 200 000 personnes par an. Face à cebesoin, le nombre effectif de prises en charge palliatives reste insuffisant.Malgré d’indiscutables progrès ces dernières années, les conditions de la finde vie en France ne sont pas encore satisfaisantes 8 (Ferrand 2008). La placedes soins palliatifs dans le système de santé doit encore être renforcée.

gOdefROY hiRsch • AccOmpAgneR lA fin de vie & pRincipAUx RepèRes des sOins pAlliATifs

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8. E. Ferrand : «Circumstance of death in hospitalized patients and nurses’ perceptions ».Arch Intern Med. 2008 ; 168(8) : 867-875.

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L’information auprès du grand public reste à développer de même quela formation des professionnels de santé. La loi relative aux droits desmalades et à la fin de vie n’est toujours pas assez connue.

Enfin, alors que les media mettent surtout en avant des situations dedemande d’euthanasie, un autre discours sur la fin de vie, basé sur lesattentes et besoins de la population, devrait être tenu. Il en est de la respon-sabilité des pouvoirs publics.

Colloque du 24 septembre 2009 : Apprendre à mourir

Godefroy HIRSCHSociété Française d’Accompagnement et de soins Palliatifs (SFAP)

144 ÉTUdes sUR lA mORT

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