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TER BORCH GERARD (1617/18-1681) Cet article est signé par : Jacques FOUCART, conservateur des Musées nationaux, service d'études et de documentation, département des Peintures, musée du Louvre Né à Zwolle et mort à Deventer, Gerard Ter Borch reprit les scènes de genre inaugurées par des peintres comme Codde, Duyster et les ennoblit en les plaçant dans des intérieurs bourgeois, en s'attachant à décrire des scènes intimistes raffinées, pleines de retenue et tout en nuances psychologiques. Ter Borch fréquenta l'atelier de Pieter Molyn à Haarlem où il fut membre de la Gilde en 1635, puis voyagea beaucoup, notamment en Espagne, en France et en Italie. Il se rendit à Münster à l'époque du congrès diplomatique où il fut employé comme portraitiste et exécuta La Ratification du traité de Münster (National Gallery, Londres). En 1654, il se fixa à Deventer où il mena une activité de portraitiste très appréciée tout en prenant part à la vie politique de sa ville. Gerard ter BORCH, La Ratification du traité de Münster, 1648, huile sur cuivre. National Gallery, Londres.

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TER BORCH GERARD (1617/18-1681)Cet article est signé par :

Jacques FOUCART, conservateur des Musées nationaux, service d'études et de documentation, département des Peintures, musée du Louvre

Né à Zwolle et mort à Deventer, Gerard Ter Borch reprit les scènes de genre inaugurées par des peintres comme Codde, Duyster et les ennoblit en les plaçant dans des intérieurs bourgeois, en s'attachant à décrire des scènes intimistes raffinées, pleines de retenue et tout en nuances psychologiques.

Ter Borch fréquenta l'atelier de Pieter Molyn à Haarlem où il fut membre de la Gilde en 1635, puis voyagea beaucoup, notamment en Espagne, en France et en Italie. Il se rendit à Münster à l'époque du congrès diplomatique où il fut employé comme portraitiste et exécuta La Ratification du traité de Münster (National Gallery, Londres). En 1654, il se fixa à Deventer où il mena une activité de portraitiste très appréciée tout en prenant part à la vie politique de sa ville.

Gerard ter BORCH, La Ratification du traité de Münster, 1648, huile sur cuivre. National Gallery, Londres.

Crédit :The Bridgeman Art Library

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Ses premiers dessins — personnages pris sur le vif, paysages, scènes de la vie quotidienne —, exécutés lors de son apprentissage chez son père, Gerard Ter Borch le Vieux (1584-1642), révèlent un talent précoce et son goût pour le réalisme. Dès 1640, et peut-être influencé par Velázquez, Ter Borch s'impose par ses portraits dépouillés où il neutralise le fond pour arriver

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à une extraordinaire vérité psychologique, tels le Portrait d'homme (musée de Richmond) ou Le Vieux Violoncelliste (Ermitage, Saint-Pétersbourg). À partir de 1660, il acquiert une formule plus enrichie où il insiste davantage sur le rendu des vêtements et les accessoires, place les personnages dans une pièce, un peu au détriment de l'intensité de la vie intérieure (Portrait d'une dame, Sorbonne, Paris). Plus intéressant chez Gerard Ter Borch est son rôle d'introducteur des scènes intimistes qui apparaissent avec la génération née entre 1610 et 1620. Un petit groupe d'artistes, formés dans l'atelier de Hals, est à l'origine de la peinture de genre hollandaise, et les premières œuvres de Ter Borch, représentant des figures de soldats mangeant, fumant ou jouant aux cartes (Corps de garde, Victoria and Albert Museum, Londres), ne diffèrent pas des sujets de genre de Pieter Codde. Très vite, Ter Borch laisse les sujets militaires (un exemple précoce au musée de Rouen) pour peindre des intérieurs, des scènes de la vie quotidienne : jeunes femmes à leur toilette, à leur lecture, concerts de famille, galants tête-à-tête. Ter Borch oscille entre un intimisme familial tout en nuances et en simplicité comme dans La Leçon de lecture (Louvre, Paris), Les Soins maternels (Mauritshuis, La Haye) — où il dépasse le réalisme, l'étude prise sur le vif en faveur d'une psychologie délicate, d'une ambiance intime vraie, d'une atmosphère de parfait silence — et des scènes galantes plus sophistiquées telles La Leçon de musique (Louvre, Paris) ou L'Admonestation paternelle (Rijksmuseum Amsterdam), où il ennoblit le thème, extrêmement fréquent dans la première moitié du siècle, du militaire séduisant la jeune fille en rendant le sujet avec une délicatesse jusqu'alors inconnue.

Les scènes familières de Ter Borch séduisent par leur silence et le velouté du clair-obscur : geste reposé, vie intérieure atteignant parfois le recueillement. Les personnages ne posent pas mais sont réservés, presque absents ; ils gardent leur secret : leur milieu ne communique pas avec le nôtre, on a l'impression de surprendre la scène. Et Ter Borch présente très souvent le personnage féminin de dos, forçant le spectateur à deviner ce qu'il ne voit pas, procédé qui, loin de bannir l'analyse psychologique, la renforce. Il joue sur le rendu des tissus, sur le raffinement de la gamme colorée ; pas de tons heurtés, mais une harmonie discrète des bruns et des gris, parfois relevée par le blanc d'une robe, par une note vermillon comme dans Le Concert (Louvre) ou par le jeu subtil des rouges des rideaux, de la chaise, de la table dans L'Admonestation paternelle. Il se complaît à décrire les jeux d'une lumière délicate sur les visages et les tissus (La Lettre, Buckingham Palace, Londres) ou la dirige sur le groupe principal pour l'isoler. Ter Borch fait à peine intervenir le décor dans ses intérieurs, se contentant souvent d'un simple fond pour mettre en valeur un groupe, un portrait ; il accorde peu d'attention aux accessoires mais insiste parfois sur quelques objets familiers qui apportent une note poétique, sur un premier plan démesurément grossi (La Lecture de la lettre, Wallace collection, Londres), un peu à la façon de Vermeer.

Gerard ter BORCH, Concert, huile sur bois. Musée du Louvre, Paris.

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Crédit :Peter Willi/ The Bridgeman Art Library

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Ces comédies de salons, que l'on appelait « sujets de mode », plurent à la bourgeoisie raffinée de l'époque par la description d'une vie élégante, par la grâce des attitudes, mais la répétition des sujets est parfois ennuyeuse. Ces scènes de genre seront reprises par la génération suivante avec Mieris, Metsu — qui possède le même goût pour les scènes intimistes, pour les jeux de lumière, pour le rendu précieux des étoffes ; elles seront enrichies par Hooch qui se plaira à les charger de décorations et de perspectives. Cette poésie du silence, si nouvelle avec Ter Borch (Femme pelant une pomme, Kunsthistorisches Museum, Vienne), sera poursuivie, avec d'autres moyens, par Vermeer.