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1502213 IRP Action en justice d’un syndicat L’abandon de poste : 3 idées à retenir avant de se lancer Prise en compte de l'exercice du droit de grève pour l'intéressement et le treizième mois - Absence de discrimination L’indemnité pour violation du statut protecteur est soumise aux cotisations sociales et d’assurance chômage Salariées enceintes : 5 conseils d’un avocat pour bien vous défendre. LA CITATION QUI TUE Avant d’être nommé ministre, Emmanuel Macron a eu de jolies phrases : « Aujourd’hui, je ne suis pas prêt à faire les concessions qu’imposent les partis, c’est-à-dire à m’excuser d’être un jeune mâle blanc diplômé, à m’excuser d’avoir passé des concours de la République qui sont ouverts à tout le monde. » (Rue Saint Guillaume, avril 2010) « [Il faudrait] sortir de ce piège où l’accumulation des droits donnés aux travailleurs se transforme en autant de handicaps pour ceux qui ne travaillent pas. » (Le Point, août 2014) Action en justice d’un syndicat Les syndicats professionnels ne sont pas recevables à agir pour demander communication de documents qui devraient être transmis au CE. Les faits

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1502213 IRP Action en justice d’un syndicat L’abandon de poste : 3 idées à retenir avant de se lancer Prise en compte de l'exercice du droit de grève pour l'intéressement et le treizième mois - Absence de discrimination L’indemnité pour violation du statut protecteur est soumise aux cotisations sociales et

d’assurance chômage Salariées enceintes : 5 conseils d’un avocat pour bien vous défendre.

LA CITATION QUI TUE

Avant d’être nommé ministre, Emmanuel Macron a eu de jolies phrases :

« Aujourd’hui, je ne suis pas prêt à faire les concessions qu’imposent les partis, c’est-à-dire à m’excuser d’être un jeune mâle blanc diplômé, à m’excuser d’avoir passé des concours de la République qui sont ouverts à tout le monde. » (Rue Saint Guillaume, avril 2010)

« [Il faudrait] sortir de ce piège où l’accumulation des droits donnés aux travailleurs se transforme en autant de handicaps pour ceux qui ne travaillent pas. » (Le Point, août 2014)

Action en justice d’un syndicat

Les syndicats professionnels ne sont pas recevables à agir pour demander communication de documents qui devraient être transmis au CE.

Les faits

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Une banque signe un accord sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences aux termes duquel il est prévu que la banque fournirait, chaque année, aux représentants du personnel des données sociales faisant apparaître les rémunérations hommes/femmes pour chaque métier-repère.

Estimant que la direction manquait à son obligation de délivrer des informations loyales et pertinentes, un syndicat saisit le tribunal de grande instance pour qu'il soit ordonné à la banque, sous astreinte, de communiquer au comité d'entreprise la grille des rémunérations ventilées par métier-repère.

Ce qu’en disent les juges

La cour d’appel juge l'action du syndicat recevable, estimant que le syndicat a qualité et intérêt à ce que le comité d'entreprise bénéficie des informations qui lui sont destinées.

Rappelons qu’un syndicat a le droit d'agir en justice au titre de la défense de l'intérêt collectif de la profession

(Code du travail, art. L. 2132-3).

Cet article lui permet d'exercer devant toutes les juridictions tous les droits concernant les faits portant un intérêt direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'il représente.

Mais la Cour de cassation n’est pas de cet avis.

Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, 16 décembre 2014, n° 13-22308

Elle rappelle que « si les syndicats professionnels peuvent, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent, notamment en cas de défaut de réunion, d'information ou de consultation des institutions représentatives du personnel lorsqu'elles sont

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légalement obligatoires, ils ne sont pas recevables, pour autant, à agir pour demander communication de documents qui, selon eux, auraient dû être transmis au comité d'entreprise ».

Dans cette affaire, le CE n'avait rien demandé.

Il n’avait pas sollicité la communication desdits documents et ne s'était pas associé à la demande du syndicat.

L'action du syndicat doit en conséquence être déclarée irrecevable.

Cour de cassation, chambre sociale, 16 décembre 2014, n° 13-22308

(les syndicats ne peuvent pas agir en justice pour demander des documents qui doivent être remis au CE)

L’abandon de poste : 3 idées à retenir avant de se lancer

Sources: Le coin du salarié

Vous partez du jour au lendemain ?

Vous désertez votre bureau sans prévenir ?

Vous ne donnez aucune nouvelle à votre employeur ?

Vous n’apportez aucun justificatif à vos absences ?

Conclusion : Vous êtes en situation d’abandon de poste.

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Plus précisément, l’abandon de poste est la situation par laquelle vous prenez la décision de vous absenter de votre poste de travail sans tenir au courant votre employeur et sans même vous justifier.

Une telle situation n’est pas sans conséquences. Aussi, voici 3 idées auxquelles réfléchir avant de vous lancer.

Le principe veut que lorsque vous vous absentez de votre travail, vous avez l’obligation de le justifier auprès de votre employeur et de l’informer.

Par voie de conséquence, lorsque vous êtes en situation d’abandon de poste vous manquez alors à vos obligations légales.

Votre comportement est fautif et vous pouvez être lourdement sanctionné par votre employeur.

En effet, l’employeur dispose de différents moyens de vous sanctionner.

Il peut prononcer à votre encontre des sanctions disciplinaires comme un avertissement ou une mise à pied.

Par ailleurs, il peut suspendre le versement de votre salaire jusqu’à ce que vous repreniez votre poste.

Il peut vous demander de lui verser des dommages et intérêts pour le préjudice qu’il aura subi du fait de vos absences non-justifiées.

Il pourra également vous mettre en demeure de justifier vos absences et de reprendre votre poste.

À défaut de réponse de votre part à cette mise en demeure, l’employeur pourra lancer une procédure de licenciement pour faute grave à votre encontre.

Le licenciement pour faute grave est alors ici la sanction disciplinaire la plus grave.

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Alors que vous êtes fautif en manquant à vos obligations légales, vous pouvez toutefois percevoir le bénéfice de certaines indemnités.

Notamment l’indemnité de chômage.

C’est d’ailleurs parfois le premier intérêt que vous trouvez pour conforter un abandon de poste plutôt que la démission, par exemple, qui ne donne pas droit au versement des allocations de chômage.

Cela n'est possible que si le juge qualifie ensuite une prise d'acte du licenciement sans cause réelle ni sérieuse.

Vous conservez également l’ensemble de vos heures de formation acquises au titre du CPF (anciennement DIF) lorsqu’elles n’ont pas encore été utilisées.

Enfin, vous pouvez également bénéficier du versement de vos indemnités de congés payés.

En revanche, si un licenciement pour faute grave a été prononcé à votre encontre, vous ne pouvez alors plus prétendre aux bénéfices de vos indemnités de licenciement et de vos indemnités de préavis.

À noter cependant que certaines conventions collectives prévoient que dans de telles circonstances, ces indemnités restent dues malgré tout.

Si votre employeur prend la décision, avant toute mise en œuvre d’une procédure disciplinaire, de suspendre le versement de votre salaire, vous pouvez vous défendre en saisissant la justice et en formulant une demande de prise d’acte de la rupture du contrat de travail.

Il vous faudra alors dans un premier temps envoyer votre demande de prise d’acte à votre employeur, ce qui aura pour effet de rompre le contrat de travail immédiatement.

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Or, il peut arriver que certaines situations n’aboutissent pas à ce résultat, vous prenez alors le risque de voir la situation stagner dans la mesure où rien ne vous garantit que votre employeur vous licenciera.

Si vous avez donc réellement la volonté de quitter votre entreprise, il existe des voies de recours moins contraignantes comme la rupture conventionnelle.

Elle vous permettra de mettre fin à votre contrat de travail d’un commun accord avec votre employeur.

Prise en compte de l'exercice du droit de grève pour l'intéressement et le treizième mois - Absence de discrimination

L'article L. 2511 du Code du travail prévoit que l'exercice du droit de grève ne peut donner lieu à aucune mesure discriminatoire telle que celle mentionnée à l'article L. 1132-2 du même code, notamment en matière de rémunération et d'avantages sociaux.

L'employeur peut cependant tenir compte des absences, même motivées par la grève, pour le paiement d'une prime, dès lors que toutes les absences, hormis celles qui sont légalement assimilées à un temps de travail effectif, entraînent les mêmes conséquences sur son attribution.

Par conséquent, si l'accord collectif d'entreprise prévoit qu'à l'exclusion des absences pour accident de travail, lesquelles sont légalement assimilées à un temps de travail effectif, toutes les absences donnent lieu à réduction ou suppression de congés supplémentaires, la retenue opérée par l'employeur pour absence pour fait de grève ne revêt aucun caractère discriminatoire

(Cass. soc. 26 mars 2014, n° 12-18125, Sté Smurfit Kappa).

RPDS 2014, n° 830, somm. n° 054, comm.

A.L.M.

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L’indemnité pour violation du statut protecteur est soumise aux cotisations sociales et d’assurance chômage

L'indemnité pour violation du statut protecteur, qui n'est pas au nombre des indemnités non imposables au titre de l'impôt sur le revenu des personnes physiques limitativement énumérées par l'article 80 duodecies du code général des impôts dans sa rédaction applicable, est soumise aux cotisations sociales et d'assurance chômage en application des articles L. 242-1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable à la date d'exigibilité des cotisations litigieuses, etL. 5422-20 du code du travail.

[Cass. civ., 2e, 12 février 2015, n°14-10886, F-P+B]

Salariées enceintes : 5 conseils d’un avocat pour bien vous défendre.

Lorsque vous êtes enceinte, vous bénéficiez d’une protection qui limite le champ d’action de la part de votre employeur.

Votre protection sera plus ou moins importante selon la situation dans laquelle vous vous trouvez.

Il donc important de connaître vos droits lorsque vous êtes enceinte.

Ces droits sont synthétisés ci-dessous.

1) Vous n’êtes pas tenue de révéler de votre état de grossesse à votre employeur (ou futur employeur)

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En effet, que cela soit pendant l’entretien d’embauche ou pendant l’exécution du contrat de travail, vous n’êtes pas tenue de révéler votre état de grossesse à votre employeur [1].

L’article L.1225-1 du Code du travail prévoit qu’il est formellement interdit à l’employeur de rechercher ou de faire rechercher toutes informations concernant l’état de grossesse de la salariée.

Ainsi, l’employeur ne peut pas interroger une salariée sur une grossesse actuelle (ou à venir).

En revanche, pour bénéficier de la protection, il vous ait conseillé d’avertir votre employeur le plus rapidement possible, de votre grossesse.

Dans ce cas, vous devez adresser par lettre recommandée avec avis de réception le certificat médical justifiant de votre état de grossesse [2].

2) Vous bénéficiez d’une protection absolue pendant votre congé de maternité

Lorsque vous êtres en congé de maternité, votre employeur ne peut pas vous licencier, et ce quel que soit le motif.

La durée du congé maternité est de 16 semaines

(6 semaines avant la date présumée de l’accouchement et 10 semaines après l’accouchement).

Le congé maternité sera augmenté en cas de naissances multiples.

Sachez que votre convention collective peut prévoir une durée plus longue.

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Ainsi, l’employeur ne pourra pas notifier le licenciement et la rupture du contrat de travail ne pourra prendre effet pendant le congé quand bien même la notification a été faite avant le début du congé de maternité.

Sont également interdites pendant cette période les mesures préparatoires au licenciement, par exemple, le remplacement définitif de la femme enceinte [3].

3) Une protection limitée avant votre congé de maternité et 4 semaines après

Dès lors que vous informez votre employeur de votre grossesse (souvent attesté par un certificat médical), commence une protection pendant laquelle votre employeur pourra vous licencier que dans deux hypothèses :

- en cas de faute grave qui n’est pas liée à votre état de grossesse ;

- en cas d’impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à la grossesse

(dans le cadre d’un licenciement pour motif économique) [4].

A l’issue du congé de maternité, la salariée conserve cette protection pendant une durée de 4 semaines [5].

Si la salariée décide de prendre ses congés payés après son congé de maternité, la Cour de cassation a jugé que le point de départ des 4 semaines de protection est reporté à la date de reprise du travail par la salariée [6].

En cas de non-respect par l’employeur de ces dispositions légales, le licenciement sera atteint de nullité.

En conséquence, vous pouvez solliciter votre réintégration dans l’entreprise, ainsi que le salaire que vous auriez dû percevoir entre votre licenciement et votre réintégration effective.

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Si vous renoncez à la réintégration, vous pouvez solliciter auprès du tribunal une indemnité pour licenciement nul qui sera au minimum l’équivalent de 6 mois de salaire.

4) La protection se poursuit jusqu’à la notification du licenciement

En effet, l’article L.1225-5 du Code du travail prévoit que la salariée dispose d’un délai de 15 jours pour adresser à l’employeur un certificat médical justifiant qu’elle était enceinte au moment de la notification du licenciement.

La Cour de cassation est allée plus loin dans un arrêt récent en considérant que le licenciement était atteint de nullité dès lors que la grossesse, qui avait débuté après le licenciement, a été révélée par la salariée à son employeur dans le délai de 15 jours suivant la notification [7].

5) Une protection contre toutes discriminations liées à votre état de grossesse

L’état de grossesse d’une femme enceinte figure dans la liste des motifs de discrimination prohibés par les articles L.1132-1 et L.1142-1 du Code du travail.

Ainsi, l’employeur ne peut pas prendre en considération l’état de grossesse pour refuser d’embaucher une salariée, refuser une mutation ou d’octroyer un avantage.

L’article L.1225-16 du Code du travail prévoit que durant toute la grossesse, la salariée enceinte bénéficie d’autorisations d’absence pour effectuer les contrôles médicaux obligatoires. Ces absences sont considérées comme du temps de travail effectif et ne peuvent être déduites de votre paie.

Si votre employeur vous prive d’un de ces droits, vous pouvez solliciter auprès du Conseil de prud’hommes, des dommages-intérêts pour discrimination liée à votre état de grossesse.

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Par ailleurs, il est interdit à votre employeur de « prendre en considération l’état de grossesse d’une femme pour résilier son contrat de travail au cours d’une période d’essai » [8].

Pour autant, si vous parvenez à démontrer que la rupture de la période d’essai est en rapport avec votre état de grossesse, vous pourrez solliciter auprès du juge des dommages-intérêts pour discrimination [9] et le cas échéant, votre réintégration dans votre emploi.

Frédéric CHHUM

Notes :

[1] article L.1225-2 du Code du travail.

[2] article R.1225-2 du Code du travail.

[3] Cass. Soc. 15 septembre 2010.

[4] article L.1225-4 alinéa 2 du Code du travail.

[5] article L.1225-4-1 du Code du travail.

[6] Cass. soc. 30 avril 2014, n°13-12.321.

[7] Cass. Soc. 2 juillet 2014, n°13-12.496.

[8] article L.1225-1 du Code du travail.

[9] Cass. Soc. 21 décembre 2006, n°05-44.806.

=========================================================== 1502212 IRP L’expertise CE : un outil pour défendre l’emploi et les salaires La transparence financière et les obligations comptables du comité d’entreprise : principe – trésorier – comptabilité – approbation des comptes Les informations confidentielles de la BDES et l’obligation de discrétion

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L’initiative de la visite médicale de reprise Accident du travail : mise en œuvre de la responsabilité du tiers par la victime

L’expertise CE : un outil pour défendre l’emploi et les salaires

L’affichage économique de l’entreprise est formulé par la direction financière selon le point de vue des actionnaires. Les salariés ayant des intérêts distincts, il est donc nécessaire qu’ils puissent développer une perspective critique sur ce qui leur est présenté. L’expert du CE intervient dans cette optique. Son objectif : - aider le comité d’entreprise et les élus à analyser les comptes et la stratégie de l’entreprise, en vue d’une défense de l’emploi et des salaires. Le comité d’entreprise a pour objectif d’assurer l’expression collective des salariés, pour qu’ainsi leurs intérêts soient pris en compte dans l’ensemble des décisions stratégiques et financières de l’entreprise. Pour exercer pleinement cette prérogative, le CE peut se faire assister d’un expert-comptable de son choix (Code du travail, art. L. 2325-35) dans un certain nombre de missions allant de l’examen annuel des comptes à la procédure de consultation en cas de plan de sauvegarde de l’emploi. Hormis la mission d’analyse des orientations stratégiques financée à hauteur de 20 % par le CE, ces missions légales sont aux frais de l’employeur, ce qui permet à l’ensemble des CE, quels que soient leurs moyens, de pouvoir être assistés. Ce recours à un expert, et la large palette d’intervention qu’il permet, sont parfois ignorés par certains CE qui imaginent que l’intervention potentielle d’un expert sera une simple reformulation des présentations que les directeurs financiers de l’entreprise peuvent leur faire. Pourtant, l’importante jurisprudence concernant le rôle et les droits de l’expert lui permet d’accéder aux mêmes documents que le Commissaire aux comptes et d’en tirer un grand nombre d’analyses pouvant servir utilement les revendications des élus. L’expert peut également déceler des erreurs, volontaires ou non, des directions dans les calculs de la participation, de l’intéressement ou des budgets du CE. Ce droit pour les CE date de la loi du 16 mai 1946 qui a accordé aux comités d’entreprise l’assistance d’un expert-comptable et la communication des documents remis aux actionnaires. Les multiples avancées de cette loi (réduction du seuil d’effectifs de 100 à 50 salariés ;

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création du droit de consultation et non plus seulement d’information sur l’organisation et la marche générale de l’entreprise, etc.) ont permis de concrétiser en partie, et contre l’avis du patronat, l’une des idées du programme du Conseil national de la résistance, qui souhaitait que les salariés participent à la direction de l’économie. Le rôle de l’expert a par la suite été étendu par les lois Auroux du 28 octobre 1982. Sa mission n’est depuis cette date plus limitée à une analyse comptable: - elle est étendue à l’appréciation de la situation économique, financière et sociale de l’entreprise. La jurisprudence précise que l’expert du CE est seul juge des pièces qui lui sont nécessaires pour l’exercice de ses fonctions et que le chef d’entreprise est obligé de les lui communiquer. L’expert n’a pas qu’un rôle pédagogique L’accès à l’information permis par la loi n’est pas uniquement là pour que ces informations soient rendues intelligibles par l’intermédiaire de l’expert et ainsi comprises par tous les élus. L’expert a certes un rôle pédagogique, d’explications des comptes de l’entreprise aux représentants des salariés, mais sa mission ne s’arrête pas à cela. L’expert doit utiliser l’ensemble des informations transmises par la direction pour y déceler ce qui peut soutenir les argumentations et les revendications des représentants des salariés. Il ne doit pas se contenter d’une analyse comptable, mais doit également analyser la stratégie de l’entreprise et les interrogations qu’elle suggère. La possibilité d’avoir accès à l’ensemble des données sociales (fichier du personnel, DADS, tableaux d’entrées-sorties, etc.) lui permet par exemple d’étudier concrètement l’impact de la stratégie de l’entreprise sur les rémunérations des salariés, d’analyser si le principe d’égalité de traitement est respecté par l’employeur ou encore de s’assurer que la convention collective de l’entreprise est bien appliquée. De nombreuses directions manient habilement le double discours. Tandis que les actionnaires vont être inondés de propos triomphant, les représentants des salariés vont quant à eux subir des analyses alarmistes et fatalistes justifiant la prétendue impossibilité d’augmenter les salaires et l’emploi. L’expert est donc là pour donner un autre éclairage aux chiffres, pris sous l’angle des intérêts des salariés. Les intérêts des salariés et des actionnaires sont distincts. Il faut donc que les CE soient suffisamment armés pour crédibiliser leurs revendications par l’argumentation et ne pas se laisser enfermer par les discours patronaux. Perte comptable ne veut pas forcément dire difficulté financière Lorsqu’une entreprise est en perte comptable, il est facile pour l’employeur de tirer prétexte de cette situation économique pour refuser les augmentations de salaire voire diminuer l’emploi.

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Or, d’une part, l’expert peut démontrer, quand c’est le cas, que la perte comptable d’un exercice ne pose pas de difficulté particulière immédiate, et que la situation financière de l’entreprise permet tout à fait de dégager les marges de manœuvre suffisantes pour favoriser l’emploi. En analysant la situation financière de l’entreprise, sur laquelle les directions s’étendent rarement, et qui peut être plus complexe à appréhender pour les élus, l’expert peut aider le CE à contre-argumenter face à la direction. En effet, une perte comptable peut tout à fait être soutenable si la situation financière de l’entreprise le permet transitoirement. Une entreprise en perte peut avoir parfois tout intérêt à poursuivre les recrutements et les investissements pour rebondir plutôt que de couper dans les dépenses et n’avoir ainsi plus aucune chance de retrouver la croissance de son chiffre d’affaires. Par ailleurs, la perte comptable peut résulter d’ une construction, en particulier dans les grands groupes multinationaux qui vont parfois utiliser des mécanismes comptables visant à vider les bénéfices de leurs filiales françaises pour les transférer dans les filiales situées dans des pays où l’impôt sur les sociétés est plus faible. Les groupes multinationaux peuvent par exemple utiliser le mécanisme des prix de transfert qui permet de surfacturer aux filiales françaises des services ou des marchandises que leur vendent les filiales étrangères. Ces transferts représentent aujourd’hui un volume très important. On estime qu’un tiers des échanges de la France correspond à un commerce entre filiales d’un même groupe. Par exemple, plus de la moitié du déficit commercial de la France vis-à-vis de l’Allemagne est due à une manipulation des prix de transferts. L’expert peut analyser ces transferts qui viennent dégrader fictivement les comptes de l’entreprise qu’il analyse. Il peut, plus globalement, analyser l’ensemble des managements fees, c’est-à-dire des redevances que la filiale reverse à la holding en échange de prestations administratives, du loyer, etc. Sans ce travail d’expert, les élus du CE restent prisonniers de l’affichage économique voulu par la direction financière, soumise aux ordres et aux intérêts des actionnaires, et qui n’a donc pas intérêt à dévoiler la stratégie qui sous-tend son compte de résultat. Une baisse du bénéfice : la faute aux salaires ? Mais même lorsque l’entreprise n’est pas en perte comptable, beaucoup de directions bloquent les salaires et l’emploi. Par exemple, lorsque le bénéfice d’un exercice a baissé par rapport à l’année précédente, certaines directions vont se servir de ce fléchissement pour refuser d’octroyer des augmentations de salaire lors des Négociations Annuelles Obligatoires. L’expert du CE peut alors démontrer que la baisse du bénéfice n’a rien à voir avec les frais de personnel, mais est liée par exemple à des charges financières.

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Le discours patronal dominant a tendance à toujours voir la cause des difficultés chez les salariés, alors que ce sont ces derniers qui créent la valeur, et qu’une diminution du bénéfice est le plus souvent liée à des charges sans rapport avec la masse salariale. Par ailleurs, lorsque le bénéfice augmente et que les frais de personnel progressent également, l’employeur aura souvent tendance à prétendre que les salariés ont donc été intéressés à cette croissance de la profitabilité. L’expert peut là encore démontrer que ce n’est pas le cas, en analysant les frais de personnel en proportion de la valeur ajoutée de l’entreprise. On observe souvent qu’ils progressent moins vite que la profitabilité dégagée et que d’importants gains de productivité ont été demandés aux salariés sans hausse proportionnelle de leur rémunération. La rémunération du capital augmente souvent plus fortement que celle des salaires, et l’expert peut le démontrer en détaillant notamment le partage de la valeur ajoutée. En analysant le coût du capital, il peut identifier : - le « vrai » coût du capital, qui correspond au financement des investissements nécessaires à la fabrication et à l’acquisition des moyens de production (usines, brevets, logiciels, machine, etc.) ; - le surcoût du capital, c’est-à-dire le coût financier (dividendes et intérêts) prélevé sur les revenus de l’entreprise, qui ne correspond à aucun service économique rendu, et qui constitue une rente pour les actionnaires. Des actionnaires subventionnés par l’Etat De nombreuses entreprises bénéficient des aides de l’Etat à travers les exonérations de cotisations sociales, les niches fiscales et des mécanismes de crédit d’impôt comme le CIR (Crédit impôt recherche) et le CICE (Crédit impôt compétitivité emploi). L’expert peut faire l’état des lieux de ces subventions de l’État qui sont parfois directement versées en dividendes. Par exemple, le CICE doit, selon le législateur, être utilisé par les entreprises pour le financement de l’amélioration de leur « compétitivité ». Il n’est pas censé financer une hausse des bénéfices distribués ni une augmentation des rémunérations des personnes exerçant des fonctions de direction. Mais aucune sanction n’est prévue si c’est le cas. Et depuis qu’il a été mis en place en 2013, de nombreuses entreprises en ont, de fait, versé une partie à leurs actionnaires. L’expertise CE peut permettre de démontrer que les crédits d’impôt ont été mal utilisés à travers l’analyse des comptes et des rémunérations. L’expert peut aider le CE à rédiger un rapport qui sera remonté au comité national de suivi du CICE. Le CE pourra se servir de cette analyse pour demander à la direction de l’utiliser pour les salaires et l’emploi. L’expert doit travailler en lien direct avec l’avocat du CE

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L’avocat-conseil du comité joue un rôle primordial dans la mise en œuvre de l’expertise et des prérogatives économiques : - toute expertise suppose au préalable la détermination du cadre juridique et le contrôle du respect de la légalité de l’opération expertisée ; - l’expertise, à l’origine purement comptable est devenue au fil du temps également économique, financière, juridique et sociale ; - l’argumentaire construit par l’expert-comptable au profit du comité nécessite l’intervention de l’avocat pour peser sur les décisions de l’employeur et : - voter les délibérations et rendre les avis adaptés en fonction des conclusions de l’avocat et de l’expert-comptable ; - débattre et négocier utilement avec la direction en s’appuyant sur les arguments juridiques et économiques définis avec l’avocat et l’expert ; - le cas échéant, agir en justice. Pour être pleinement utile aux revendications des représentants des salariés, l’expert du CE doit donc travailler en lien direct avec l’avocat du CE, et leurs travaux être guidés par une stratégie commune. L’avocat peut conseiller utilement les élus, dès la rédaction de la lettre de mission, en particulier en ce qui concerne les questions de rémunération, de périmètre de l’entreprise et de lien avec son groupe d’appartenance et du respect du statut collectif. Le travail commun est une nécessité absolue en cas de plan de sauvegarde de l’emploi.

La transparence financière et les obligations comptables du comité d’entreprise : principe – trésorier – comptabilité – approbation des comptes

L’article 32 de la Loi 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale a modifié des dispositions du Code du Travail a instauré des nouvelles dispositions sur la transparence financières des comptes des comités d’entreprise. Les comités d’entreprise ou les comités centraux d’entreprise devront modifier leur règlement intérieur pour tenir compte des nouvelles règles de transparence financière, désigner un trésorier et satisfaire aux critères de présentation de comptabilité exigées selon des seuils déterminés. Ces dispositions sont entrées en vigueur depuis le 1er janvier 2015. Dispositions législatives Les principales dispositions législatives et règlementaires qui déterminent les obligation comptables des comités d’entreprises sont :

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- Loi 2014-288 du 5 mars 2014 – article 32 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale a modifié des dispositions du Code du Travail sur la transparence financières des comptes des comités d’entreprise - Articles L2325-45 à 58 du Code du Travail sur l’établissement et le contrôle des comptes du comité d’entreprise Le trésorier du CE – les obligations comptables du comité d’entreprise Le comité d’entreprise aura l’obligation de désigner un trésorier. Le comité d’entreprise est soumis aux obligations comptables et ses comptes annuels sont établis selon les modalités définies par un règlement de l’Autorité des normes comptables. Ainsi, le comité d’entreprise doit : - procéder à l’enregistrement comptable des mouvements affectant le patrimoine de son entreprise. Ces mouvements sont enregistrés chronologiquement - contrôler par inventaire, au moins une fois tous les douze mois, l’existence et la valeur des éléments actifs et passifs du patrimoine de l’entreprise - établir des comptes annuels à la clôture de l’exercice au vu des enregistrements comptables et de l’inventaire. Ces comptes annuels comprennent le bilan, le compte de résultat et une annexe, qui forment un tout indissociable. Le comité d’entreprise fournit des informations sur les transactions significatives qu’il a effectuées. Ces informations sont fournies dans l’annexe à ses comptes ou dans le rapport pour la comptabilité chronologique. Les comptes annuels et, le cas échéant, les documents ainsi que les pièces justificatives qui s’y rapportent, sont conservés pendant 10 ans à compter de la date de clôture de l’exercice auquel ils se rapportent. Les seuils pour les obligations de comptabilité Les obligations comptables des comités d’entreprise varient en fonction de trois critères : - le nombre de salariés dans l’entreprise - le niveau de ressources annuelles du comité d’entreprise - le total du bilan à la clôture d’un exercice financier Les obligations de comptabilité du comité d’entreprise varient selon des seuils et critères fixés par décret : - comptabilité chronologique : pour les comité d’entreprise qui ont des ressources annuelles inférieures à 153.000 € - comptabilité simplifiée : pour les comité d’entreprise n’excédant pas 2 des 3 critères suivants – 50 salariés, 1,55 millions d’€ et 3,1 millions de ressources à la clôture d’un exercice

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- comptabilité normale : pour les comité d’entreprise excédant 2 des 3 critères suivants – 50 salariés, 1,55 millions d’€ et 3,1 millions de ressources à la clôture d’un exercice Une comptabilité adaptée au comité d’entreprise 1) comptabilité chronologique Toutefois, par dérogation, le comité d’entreprise dont les ressources annuelles n’excèdent pas un seuil de 153.000 euros peut s’acquitter de ses obligations comptables en : - tenant un livre retraçant chronologiquement les montants et l’origine des dépenses qu’il réalise et des recettes qu’il perçoit - établissant, une fois par an, un état de synthèse simplifié portant sur des informations complémentaires relatives à son patrimoine et à ses engagements en cours. 2) comptabilité simplifiée De même, le comité d’entreprise dont le nombre de salariés, les ressources annuelles et le total du bilan n’excèdent pas, à la clôture d’un exercice, pour au moins deux des trois critères, des seuils fixés par décret peut adopter une présentation simplifiée de ses comptes et n’enregistrer ses créances et ses dettes qu’à la clôture de l’exercice. Dans ce cas, la mission de présentation des comptes annuels du comité d’entreprise est confiée à un expert-comptable. Le coût de la mission de présentation de ses comptes est pris en charge par le comité d’entreprise sur sa subvention de fonctionnement. 3) comptabilité consolidée Lorsque l’ensemble constitué par le comité d’entreprise et les entités qu’il contrôle, dépasse, au moins deux des trois critères mentionnés des seuils fixés par décret, le comité d’entreprise doit établir des comptes consolidés. Dans ce cas, le comité d’entreprise tenu d’établir des comptes consolidés nomme deux commissaires aux comptes. De plus, lorsque le comité d’entreprise dépasse, pour au moins deux des trois critères des seuils fixés par décret, il est tenu de nommer au moins un commissaire aux comptes et un suppléant, distincts de ceux de l’entreprise. Le rapport d’activité du comité d’entreprise Le comité d’entreprise doit établit, selon des modalités prévues par son règlement intérieur, un rapport présentant des informations qualitatives sur ses activités et sur sa gestion financière, de nature à éclairer l’analyse des comptes par les membres élus du comité et les salariés de l’entreprise.

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Lorsque le comité d’entreprise établit des comptes consolidés, le rapport porte sur l’ensemble constitué par le comité d’entreprise et les entités qu’il contrôle. Le contenu du rapport varie selon que le comité d’entreprise relève des critères de comptabilité. Ce rapport est présenté aux membres élus du comité d’entreprise lors de la réunion en séance plénière. L’arrêté des comptes – l’approbation par le comité d’entreprise Les comptes annuels du comité d’entreprise sont arrêtés, selon des modalités prévues par son règlement intérieur, par des membres élus du comité d’entreprise désignés par lui et au sein de ses membres élus. Les documents ainsi arrêtés sont mis à la disposition, le cas échéant, du ou des commissaires aux comptes. Les comptes sont approuvés par les membres élus du comité d’entreprise réunis en séance plénière. La réunion au cours de laquelle les comptes sont approuvés porte sur ce seul sujet et cela fait l’objet d’un procès-verbal spécifique. Le comité d’entreprise doit porter à la connaissance des salariés de l’entreprise, par tout moyen, ses comptes annuels ou, le cas échéant, les documents accompagnés du rapport de gestion.

Les informations confidentielles de la BDES et l’obligation de discrétion

En tant que représentant du personnel, vous avez accès à la base de données économiques et sociales (BDES). L’employeur ou ses représentants sont parfois amenés à faire figurer dans la BDES des informations qui ont un caractère confidentiel. Vous êtes alors tenu à une obligation de discrétion. Quelles sont les informations de nature confidentielle ? À quoi vous oblige ce devoir de discrétion ? Le caractère confidentiel des informations : définition Plusieurs décisions de justice ont été rendues sur le caractère confidentiel des informations. En pratique, est considérée comme confidentielle une information : •dont la divulgation peut nuire à l’intérêt de l’entreprise ; •et qui n’est connue ni du grand public, ni des salariés.

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Ainsi, une information qui a été divulguée antérieurement n’est pas considérée comme confidentielle. Illustration d’informations non confidentielles : La cour d’appel d’Aix-en-Provence (CA Aix-en-Provence, 9e ch. 3 nov. 1997, n° 94/7207) a précisé qu’une information donnée, à un comité d’entreprise, sur la part des rémunérations les plus importantes dans la masse salariale globale de la société ne pouvait être considérée comme revêtue du caractère confidentiel. Cette information intéresse directement les salariés, tant au regard des négociations annuelles dans l’entreprise que compte tenu des termes d’une note de service déjà diffusée et qui envisageait une réduction de la masse salariale. La divulgation de cette information n’est donc pas de nature à compromettre gravement le devenir de l’entreprise, il s’agit de la seule répartition des salaires dans la société. Récemment, la Cour de cassation a rappelé que pour se prévaloir de la confidentialité, l’employeur doit : - non seulement déclarer l’information comme confidentielle ; - mais aussi justifier, par des éléments objectifs, le caractère confidentiel des informations. C’est-à-dire prouver en quoi elles peuvent nuire aux intérêts légitimes de l'entreprise si elles sont divulguées. Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, 5 novembre 2014, n° 13-17270 Dans cette affaire, l’employeur avait, dans le cadre d’une procédure d’information-consultation liée à un projet de restructuration, remis un « projet de réorganisation et d'adaptation » intégralement classé comme confidentiel. Mais il n’avait pas justifié de la nécessité d'assurer la protection de l'ensemble des données contenues dans ces documents. Du coup, la Cour de cassation a jugé qu’il avait porté une atteinte illicite aux prérogatives des membres du comité d'entreprise et qu’il fallait reprendre depuis le début la procédure d'information-consultation. Certaines informations sont déclarées confidentielles par la loi. Dans ce cas, même en l’absence de déclaration de votre part, l’obligation de confidentialité doit être respectée. Il est toutefois plus prudent de rappeler leur caractère confidentiel. Sont réputées confidentielles : - les informations relatives à la situation de l’actif réalisable et disponible, et du passif exigible ; - le compte de résultat prévisionnel, le tableau de financement, le bilan annuel et le plan de financement prévisionnel ;

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- les informations concernant l’entreprise, communiquées dans le cadre de la procédure du droit d’alerte économique. Le respect de l’obligation de discrétion En tant que représentants du personnel, vous êtes les porte-paroles des collaborateurs. Vous avez pour rôle de les informer sur la situation de l’entreprise et sur les projets en cours. Pour cela l’employeur va parfois vous divulguer des informations qui, pour l’intérêt de l’entreprise, devront rester confidentielles. Le Code du travail prévoit le respect du devoir de discrétion des représentants du personnel. Sont visés les membres du comité d'entreprise, les représentants syndicaux et les membres du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Vous êtes tenu à une obligation de discrétion à l'égard des informations revêtant un caractère confidentiel et présentées comme telles par votre employeur ou ses représentants. De plus, vous êtes tenu au secret professionnel pour toutes les questions relatives aux procédés de fabrication. Cette obligation de discrétion vous interdit de divulguer aux salariés de l’entreprise ou aux personnes ne faisant pas partie de l’entreprise, les informations présentées comme étant confidentielles. Si vous ne respectez pas cette obligation de discrétion, des sanctions disciplinaires pourront être prises à votre encontre, telle qu’un blâme ou une mise à pied disciplinaire. Aucune sanction ne peut être prise si l’information ne remplit pas les conditions de confidentialité. Dans le cadre de la BDES, la question de la confidentialité risque de se poser de plus en plus souvent car les RP vont avoir accès à davantage d’informations. Juliette Lorthoy

L’initiative de la visite médicale de reprise

A l’issue d’un arrêt de travail, le salarié doit normalement réintégrer ses fonctions. Dans certains cas, il doit au préalable bénéficier d’une visite médicale de reprise auprès de la médecine du travail. La visite médicale de reprise est obligatoire : - Après une absence pour maladie professionnelle ou pour congé de maternité, quelle qu’en soit la durée ; - Après une absence d’au moins 30 jours pour maladie ou accident du travail.

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Lorsqu’une visite de reprise est obligatoire, la fin de de l’arrêt de travail ne marque par la fin de la suspension du contrat de travail. Seule la visite médicale de reprise met fin juridiquement à la suspension de la relation de travail, et ce même si le salarié a, en pratique, réintégré ses fonctions. Le médecin du travail est le seul compétent pour procéder à cet examen : ni l’avis du médecin traitant, ni celui du médecin conseil de la sécurité sociale ne saurait affranchir l’employeur de son obligation d’organiser une visite médicale de reprise. L’initiative de la visite médicale de reprise incombe en principe à l’employeur. Mais la jurisprudence reconnaît au salarié le droit de prendre cette initiative sous certaines conditions. 1. L’initiative de la visite médicale de reprise incombe à l’employeur Aux termes de l’article R 4624-23 du Code du travail, l’employeur à l’obligation d’organiser la visite médicale de reprise dès qu’il a connaissance de la date de fin de l’arrêt de travail du salarié. A. Visite médicale de reprise : de quel délai dispose l’employeur pour l’organiser ? Lorsque le salarié adresse son arrêt de travail à l’employeur, ce dernier est informé de la date théorique de sa reprise de travail. Néanmoins, il n’est pas tenu d’organiser une visite de reprise dès la réception de l’arrêt de travail, même s’il porte sur une période d’au moins 30 jours. Cependant, dès que le salarié a manifesté la volonté de reprendre ses fonctions, l’employeur doit organiser un examen médical de reprise. L’article R 4624-23, alinéa 5 du Code du travail prévoit que l’employeur doit organiser la visite médicale de reprise dans un délai précis. En principe, l’examen médical doit intervenir, au plus tard, dans les 8 jours qui suivent la reprise effective du travail par le salarié. Ce délai de 8 jours se décompte en jours calendaires. Lorsque le non-respect de cette obligation par l’employeur découle d’un manquement de sa part, il peut s’exposer à des conséquences lourdes Toutefois, le retard dans l’organisation de la visite médicale de reprise n’est pas fautif lorsqu’il est imputable à un motif indépendant de sa volonté, tel que l’encombrement du service de la médecine du travail.

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Dans ce cas-là, l’employeur doit établir qu’il a bien pris l’initiative de faire bénéficier au salarié d’une visite médicale dans le délai prescrit. Dès qu’il a pris contact avec le médecin du travail, l’employeur doit convoquer le salarié afin qu’il se présente à la visite médicale de reprise au jour fixé par le service de médecine du travail. L’employeur peut convoquer le salarié à cette visite par tous moyens à sa convenance, la jurisprudence a précisé qu’il n’était pas obligé de passer par une lettre recommandée avec AR. B. Sanction en cas d’absence de visite médicale de reprise Le non-respect de l’employeur de son obligation d’organiser une visite médicale de reprise constitue, selon la jurisprudence, un manquement à son obligation de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des salariés de l’entreprise. Le fait de laisser un salarié réintégrer ses fonctions à l’issue d’une période d’arrêt de travail sans lui faire bénéficier d’une visite médicale de reprise, au plus tard dans les huit jours, expose l’employeur à des sanctions pénales et à sa condamnation à des dommages et intérêts. Il résulte d’une jurisprudence constante, que ce manquement cause nécessairement au salarié un préjudice qu’il convient d’indemniser. Par ailleurs, la Cour de cassation a précisé que ce manquement peut justifier une prise d’acte de la rupture du contrat de travail ou une résiliation judiciaire du contrat aux torts de l’employeur. 2. La visite médicale de reprise peut-être provoquée par le salarié Le Code du travail prévoit pour le salarié de demander n’importe quand une visite médicale auprès du médecin du travail. A. Visite médicale de reprise : sous quelles conditions le salarié peut-il la demander ? La Cour de cassation a admis, dans le cas où l’employeur n’organise pas de lui-même la visite médicale de reprise, que le salarié puisse la provoquer, soit en lui demandant, soit en sollicitant directement le médecin du travail. Cette possibilité offerte au salarié n’a pas pour objet d’exonérer l’employeur de son inaction mais de préserver la santé du salarié en cas d’inertie de l’entreprise. De même, en cas de défaillance de sa part, l’employeur ne peut reprocher au salarié de ne pas avoir été réactif en déclenchant lui-même une visite médicale de reprise afin de minimiser sa responsabilité.

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L’action du salarié en cas de manquement de l’employeur demeure facultative, l’obligation incombant exclusivement à l’entreprise. Lorsque le salarié sollicite directement auprès du médecin du travail une visite médicale de reprise, il doit nécessairement en informer son employeur. Cette obligation d’information constitue une formalité substantielle qui conditionne l’opposabilité de l’avis rendu par le médecin du travail à l’employeur. Les conséquence de la visite médicale déclenché par le salarié diffère en fonction de l’information ou pas de l’employeur. Effets de l’initiative du salarié en cas d’information de l’employeur La visite sollicitée par le salarié ne peut être considérée comme une véritable visite médicale de reprise, avec toutes les conséquences qui en découlent, que si le salarié a dument informé l’employeur de son initiative. A partir du moment où le salarié a avisé l’employeur de son action, l’employeur est tenu par l’avis émis par le médecin du travail. Même si le salarié prend l’initiative de solliciter une visite médicale de reprise alors que l’employeur était toujours dans le délai pour l’organiser, ce dernier ne peut considérer que l’avis rendu par le médecin du travail ne lui est pas opposable, et mettre en œuvre une nouvelle visite médicale. Dans un arrêt en date du 26 janvier 2011, la Cour de cassation a considéré que l’employeur avait gravement manqué à ses obligations suite à un avis d’inaptitude rendu par le médecin du travail dans le cadre d’une visite médicale de reprise déclenchée par le salarié. Dans cette affaire, le salarié avait été en arrêt de travail pendant de nombreuses années suite à un accident du travail. Au terme de son dernier arrêt, il avait informé son employeur par courrier recommandé qu’il avait « pris rendez-vous à la sécurité sociale de la médecine du travail » afin d’y être examiné. Lors de cette visite médicale, le médecin du travail avait considéré que le salarié était inapte à réintégrer ses fonctions dans le cadre d’une seule visite en raison d’un danger grave et imminent. A l’issue du délai d’un mois à compter de la date de la visite médicale de reprise demandée par le salarié, l’employeur ne l’avait ni reclassé, ni licencié, ni reprise le versement du salaire. Plus de deux ans après, l’intéressé qui n’avait jamais reprise son travail, intenta une action en résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur en invoquant son manquement à ses obligations.

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Quand bien même, l’employeur, de bonne foi, avait invoqué le fait qu’il n’avait pas compris la lettre que lui avait adressé le salarié comme étant l’information selon laquelle ce dernier provoqué une visite médicale de reprise, la Cour de cassation n’en a pas tenu compte. « Mais attendu, d’abord, qu’après avoir exactement rappelé que la visite de reprise, dont l’initiative appartient normalement à l’employeur, peut être sollicitée par le salarié auprès du médecin du travail en avertissant l’employeur de cette demande, la cour d’appel, ayant relevé, par motifs propres et adoptés , que le médecin du travail avait , le 15 mars 2007, rendu un avis d’inaptitude totale et définitive en visant l’ existence d’ un danger immédiat et l’article R. 241-51-1 du code du travail lui permettant de déclarer l’inaptitude du salarié après un seul examen, a pu déduire de ses énonciations que cet examen correspondait à une visite de reprise ;Attendu, ensuite, qu’ayant constaté que l’employeur n’avait procédé à l’issue du délai d’un mois à compter de la date de l’examen médical de reprise ni au reclassement du salarié, ni à son licenciement ni au paiement des rémunérations échues à partir du 16 avril 2007, elle a souverainement apprécié la réalité et la gravité des manquements de l’employeur à ses obligations » Effets de l’initiative du salarié en l’absence d’information de l’employeur Selon une jurisprudence constante, l’employeur ne peut se voir opposer un examen médical, sollicité directement par le salarié, alors que ce dernier ne l’en a pas informé. Dans ce cas-là, quelles que soient les conclusions émises par le médecin du travail à l’occasion d’une telle visite, celles-ci n’entraîne pas pour l’employeur les obligations liées à un véritable examen de reprise. La déclaration d’inaptitude rendue dans de telles circonstances ne contraint pas l’employeur à mettre en place une procédure de reclassement. Dans un arrêt récent, du 7 janvier 2015, rappelle avec rigueur que l’absence d’information de l’employeur par le salarié de son initiative de demander un examen auprès du médecin rend les conclusions de la visite médicale de reprise inopposable à l’entreprise. Sources : Cass. soc, 26 janvier 2011 ; Cass. soc, 7 janvier 2015 Houria KADDOUR

Accident du travail : mise en œuvre de la responsabilité du tiers par la victime

Les dispositions propres à l’indemnisation des victimes d’infractions sont applicables aux victimes d’un AT imputable à la faute d’un tiers (Cass. 2e civ., 5 févr. 2015, n° 13-11.945, P+B).

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Ainsi, la Cour de cassation a censuré une décision qui avait rejeté la demande d’une victime d’un AT résultant de l’infraction d’un tiers, client de l’entreprise utilisatrice pour laquelle travaillait la victime. Pour la Haute juridiction, les dispositions de l’article L. 454-1 du Code de la sécurité sociale et de l’article 706-3 du Code de procédure pénale, visant l’indemnisation des victimes d’infractions sont applicables aux victimes d’un accident du travail imputable à la faute d’un tiers. La victime a donc droit à une indemnité complémentaire aux prestations de sécurité sociale si le montant de l'indemnité de droit commun à laquelle elle aurait pu prétendre est supérieur à celui des prestations de sécurité sociale. Dominique Jullien Cass. 2e civ., 5 févr. 2015, n° 13-11.945, P+B