108 - Le point de bascule émotionnel de la religion à la secte

20
1 1) Le point de bascule émotionnel de la religion à la secte Pierre LE COZ .…..……...........….….........................P 2 2) REVUE DE PRESSE Evangéliques, Islam radical, REVE et SVI -La grande mutation, Islamisme, Santé et dérives sectaires, Scientologie, Témoins de Jéhovah….......................P 6 3) Bibliographie………………………………P17 Voir page 17 Manuel d’auto défense intellectuel……………………………P18 Association des victimes de l’islam radical……………….P19 DECOUVERTES SUR LES SECTES ET RELIGIONS Trimestriel n° 108 1 er octobre 2015 PAF du numéro : 2,50 € Abonnement papier : 10 Abonnement Internet : 3 € Editeur : GEMPPI BP 30095 13192 Marseille Cedex 20 Tel. 04 91 08 72 22. [email protected] www.gemppi.org Impression : Cité des associations de Marseille. Commission paritaire : 73373 Directeur de publication : Didier Pachoud Reproduction interdite Les informations et articles de presse repris dans cette publication n’engagent que leurs auteurs. G.E.M.P.P.I. Groupe d’Etude des Mouvements de Pensée en vue de la Protection de l’Individu

Transcript of 108 - Le point de bascule émotionnel de la religion à la secte

Page 1: 108 - Le point de bascule émotionnel de la religion à la secte

1

1) Le point de bascule émotionnel

de la religion à la secte Pierre LE COZ .…..……...........….….........................P 2

2) REVUE DE PRESSE

Evangéliques, Islam radical, REVE et SVI -La grande mutation, Islamisme, Santé et dérives sectaires, Scientologie, Témoins de Jéhovah….......................P 6

3) Bibliographie………………………………P17

Voir page 17

Manuel d’auto défense intellectuel……………………………P18 Association des victimes de l’islam radical……………….P19

DECOUVERTES

SUR LES SECTES

ET RELIGIONS

Trimestriel n° 108

1er octobre 2015

PAF du numéro : 2,50 €

Abonnement papier : 10 €

Abonnement Internet : 3 €

Editeur : GEMPPI BP 30095 13192 Marseille Cedex 20 Tel. 04 91 08 72 22. [email protected] www.gemppi.org

Impression : Cité des associations

de Marseille.

Commission paritaire : 73373

Directeur de publication : Didier Pachoud Reproduction interdite

Les informations et articles de

presse repris dans cette publication

n’engagent que leurs auteurs.

G.E.M.P.P.I.

Groupe d’Etude des

Mouvements de Pensée en vue

de la Protection de l’Individu

Page 2: 108 - Le point de bascule émotionnel de la religion à la secte

2

1) Le point de bascule émotionnel de la religion

à la secte

Conférence donnée lors du colloque international de la FECRIS à Marseille le 16 mai 2015 www.fecris.org

Pierre Le Coz Professeur des Université en philosophie Directeur du département des sciences humaines de la Faculté de médecine de Marseille Espace éthique méditerranéen et UMR 7268 ADES/CNRS/EFS Aix-Marseille université - [email protected] Auteur de « Le gouvernement des émotions. Et l’art de déjouer les manipulations » Albin Michel. 2014.

Introduction

La manipulation est un critère majeur de distinction entre sectes et religions. Hormis le cas où précisément elle devient elle-même sectaire, une religion n’a pas besoin de recourir à des stratégies manipulatoires ; elle intègre ses fidèles essentiellement par voie de tradition familiale. En revanche, une secte oblige le nouvel adhérent à rompre avec sa tradition et sa famille. Cette rupture avec le passé, avec ses proches et ses amis est un processus coûteux pour une nouvelle recrue. C’est pourquoi le leader d’une secte aura besoin de lui « forcer la main » en exploitant l’arsenal des techniques manipulatoires (captation émotionnelle, amorçage, « pied dans la porte », emphase…).

Nous avons tous une idée intuitive de ce qu’est la manipulation mais peu d’entre nous en possèdent une connaissance conceptuelle et objective. Il nous arrive d’avoir le sentiment d’être manipulés mais il se passe du temps avant que nous ayons une idée claire de la manière dont le piège s’est refermé sur nous. Identifier et répertorier les stratégies d’influence et de persuasion demandent un effort réflexif, un recul critique pour mettre à jour les pièces du mécanisme manipulatoire.

Cette difficulté à objectiver les rouages de l’emprise sectaire fait partie intégrante des raisons du succès des affabulateurs. Afin d’aplanir cette difficulté et mieux comprendre comme opère le pouvoir de domination sectaire, les philosophes et hommes de pensée d’hier et d’aujourd’hui peuvent nous apporter des grilles d’analyse et des outils conceptuels.

1. Platon : la critique rationaliste de la manipulation des Sophistes

Aussi loin qu’on remonte dans les écrits philosophiques du passé, nous trouvons témoignage des préoccupations suscitées par les phénomènes de manipulation des foules. Dès le Vème siècle avant Jésus-Christ, Socrate s’interroge sur la manière dont les orateurs arrivent à tromper la vigilance du peuple en les entrainant dans des guerres contreproductives (1). Beau-parleur, Alcibiade a convaincu Athènes de livrer une bataille qui se révélera in fine désastreuse contre son ennemi spartiate lors de la guerre du Péloponnèse. La malédiction qui s’attache à l’usage démagogique de la parole explique l’attaque récurrente de Platon contre les sophistes qui sont les pires usurpateurs de son temps. Platon distingue le philosophe, qui recherche le savoir (philo-sophia), et le sophiste qui prétend posséder le savoir. Les sophistes ont ceci en commun d’avoir réponse à tout. Ils sont dépeints par Platon comme des experts en « mouvements instinctifs et appétits de cet animal grand et robuste » à quoi ressemble un peuple lorsqu’il est manipulé par des leaders d’opinion. Le sophiste excelle dans l’art démagogique de brosser le public dans le sens du poil : « Qu’est-ce qui l’irrite ? », « Qu’est-ce qui l’adoucit? » « Comment l’approcher et le toucher » ? (2).

Tandis que dans le dialogue philosophique, il s’agit de partager un questionnement avec autrui pour cheminer avec lui en direction de la vérité, dans le dialogue sophistique, le but est de produire de l’effet sur autrui pour le séduire et le convaincre d’adhérer à ses propres opinions. Le sophiste se demande : « Qu’est-ce que l’autre a envie d’entendre ? », « Que pourrais-je lui dire pour lui faire plaisir ? ».

La première caractéristique de la manipulation est donc d’être un discours étranger au souci de la vérité, quoiqu’il se réclame de cette finalité. La parole vise prioritairement à rallier les suffrages, à attirer l’approbation de la foule et capturer des cibles. Persuader ce n’est pas simplement convaincre d’une idée, comme si l’on se situait sur le terrain de la rationalité. Persuader, c’est vaincre des résistances psychologiques, flatter l’amour-propre, nourrir les passions, enchanter l’oreille par des promesses de lendemains qui chantent (3).

Page 3: 108 - Le point de bascule émotionnel de la religion à la secte

3

Pour le manipulateur, l’essentiel sera, dans un premier temps, d’amorcer la conversation, de trouver un point d’accroche, de disposer d’une rampe de lancement. Quelques mots balbutiés par sa proie suffiront au départ. L’essentiel est d’arracher des lèvres de son interlocuteur un simple « oui », ou mieux encore, plusieurs « oui » consécutifs (« oui, effectivement, il fait beau », « oui, c’est vrai, il y a beaucoup de circulation », etc.). L’habileté du manipulateur consiste à susciter chez son interlocuteur une disposition d’esprit propice à l’acceptation. Le manipulateur ne fait pas appel à la raison et aux idées générales, mais s’adresse à l’imagination. Il s’agit de faire adhérer et non de faire réfléchir. L’adhésion, dans le processus de manipulation, n’est pas réfléchie, elle est affective. La rhétorique dévoyée devient l’art de « prendre par les sentiments ».

Tandis que le philosophe s’adresse à l’esprit, le sophiste travaille au corps ; il joue sur le registre des émotions qu’il manipule par les artifices de l’éloquence (4). Il sait tromper la vigilance de son auditoire en usant de formules frappantes et imagées. Le sophiste sera capable d’emporter la conviction là où échouera un honnête orateur. C’est ainsi qu’un homme sage, tel Socrate, a pu défendre des opinions « droites », objectivement valables, et pourtant n’être ni entendu ni pris au sérieux par la foule. Il n’avait pas l’art de véhiculer des émotions à travers ses allocutions (5).

2. Troeltsch : la différence entre adhésion à une Eglise et adhésion à une secte

A l’époque moderne, les premiers sociologues des religions tels que Max Weber (6) ou Ernst Troeltsch (7) ont opéré des distinctions conceptuelles entre sectes et religions qui peuvent encore nous servir pour distinguer les modalités d’adhésion à des groupes spirituels. La religion recrute ses adeptes par un système d’affiliation. Pour le dire schématiquement, la secte propose la rupture là où la religion préconise la continuité. Ainsi, le type « Eglise » correspond à une institution de salut qui assure pour tous les hommes la transmission d’une histoire fondatrice, telle la crucifixion et la résurrection du Christ. Elle n’est pas tournée vers l’innovation ou l’exotisme. Une religion se situe au contraire dans la fidélité à un héritage, à la parole d’un prophète ou un Messie (8). Le fidèle est intégré au groupe par immersion au sein d’une tradition qui lui préexiste. Le présent est placé sous l’autorité du passé. Les nouveaux membres sont incorporés dès leur naissance. Par le baptême, l’individu fait l’objet d’un rituel d’incorporation à la communauté. Il est de facto assimilé à la religion avec le concours de sa famille d’origine. A aucun moment, le nouvel adepte n’a fait l’objet d’une opération de recrutement personnalisée. La manipulation psychique n’a pas lieu d’être.

Pour accuser sa spécificité vis-à-vis de la secte, Troeltsch attribue à la religion un mode d’action en extension. Il est significatif que « catholique » signifie étymologiquement « universel ». Le nombre d’adeptes a plus d’importance que la manière dont ils vivent leur foi. À l’inverse, la secte se situe dans une logique d’intensité. Elle requiert un engagement conscient et personnel ; le vécu qualitatif prime sur la quantité d’adeptes. L’entrée dans le groupe sectaire se fait, en théorie du moins, par un choix individuel, le cas échéant, en rupture avec sa religion d’appartenance.

Du fait que la religion se place sous le signe de l’extension, qu’elle vise à embrasser toutes les sociétés et toutes les cultures (quitte à passer des compromis avec les croyances et particularismes locaux), elle n’exprime envers ses fidèles que des attentes éthiques minimales. Il est clair que si la religion était exigeante, elle ne pourrait pas s’étendre au-delà d’un cercle étroit d’initiés. Soit on demande beaucoup et on aura peu, soit on demande peu, et on peut espérer avoir beaucoup. Le but d’une religion n’est pas de changer la vie ordinaire de l’adepte. C’est la modération réaliste de ses ambitions qui explique que la religion n’ait pas besoin de recourir aux artifices de la manipulation. L’entrée dans la secte est beaucoup plus coûteuse car elle réclame une conversion, une rupture vis-à-vis des autres et de soi. Le leader demande une allégeance sans réserve et un investissement sans demi-mesure. La secte est « un engagement radical, au service d’une cause radicale » (9). Les stratagèmes manipulatoires sont indispensables au gourou pour inciter l’individu à faire le deuil de sa vie actuelle, renier ses attaches historiques et familiales.

3. Joule et Beauvois : le sentiment trompeur d’être libre

On sait que le « libre-arbitre » est souvent invoqué par les leaders spirituels et les tenants du libéralisme pour critiquer l’idée de « manipulation mentale ». Il ne serait pas légitime de parler d’ « enrôlement » des esprits dans les sectes car les adeptes seraient libres de leur engagement. Il est permis de se demander si le sentiment intérieur de liberté n’est pas précisément le ressort fondamental de la manipulation. Des psychologues sociaux ont défini la manipulation comme une « soumission librement consentie » (10). Etre manipulé, c’est faire « librement » ce que l’autre attend de nous. Les formules du style « vous êtes libre d’accepter ou de refuser de me suivre », « Je comprendrais très bien que vous refusiez, vous êtes naturellement libre d’agir comme il vous plaira » sont utilisées par n’importe quel gourou ou directeur de conscience pour créer un lien de confiance. L’adepte est rassuré par cette apparente marge de manœuvre qui lui est octroyée (« Je peux avoir confiance en lui puisqu’il me laisse le choix de venir ou non aux séances de méditation de sa communauté».)

Une autre opinion courante consiste à dire que la manipulation s’explique par la vulnérabilité de certains qui seraient plus influençables que d’autres. Là encore, la psychologie sociale nous met en garde contre toute idée préconçue. Elle nous enseigne que ce n’est pas la nature des personnes qui explique leur comportement de sujétion mais leurs

Page 4: 108 - Le point de bascule émotionnel de la religion à la secte

4

actes, les décisions qu’ils ont prises antérieurement (11). Elle montre que lorsque l’on s’est engagé au service d’une cause ou d’un groupe, il existe un risque de se laisser prendre au piège de sa propre initiative. Chacun a tendance à adhérer à sa propre décision selon une sorte d’auto-manipulation. On parlera plutôt d’ « adhérence » (10) pour insister sur le fait que ce n’est pas une adhésion consciente et réfléchie. Quiconque qui a pris une résolution aura tendance à s’en tenir à cette décision et à ne plus en démordre. Cette pente glissante naturelle peut entrainer ce qu’on appelle une « escalade d’engagement » (11) qui procède de cette tendance que nous avons à persévérer dans un processus, même lorsque celui-ci devient déraisonnablement coûteux pour nous. Dans la langue commune, nous désignons ce phénomène par des expressions imagées telles que « mettre un doigt dans l’engrenage », « se prendre les pieds dans le tapis ». Dans les guerres, les belligérants semblent trouver dans chaque défaite les raisons de continuer leur combat. On cherche obscurément une confirmation du bien-fondé d’une décision initiale alors que les faits montrent, à l’évidence, qu’il serait temps de sortir de notre empêtrement. Nous agissons envers et contre toute raison parce que nous avons dépensé de l’énergie et du temps. Il nous répugne d’avoir à défaire ce que nous avons fait, ce qui est l’une des raisons principale du phénomène d’ « acrasie » (4). Ce qui nous répugne, c’est la « dépense gâchée ». Nous voulons sauver le sens de ce que nous avons fait (« Je n’ai quand même pas fait tout ceci pour rien ! »), et peut-être aussi ménager notre amour-propre (12). On imagine les effets de « l’escalade d’engagement » (10) chez une personne attirée par une secte et qui, face aux moqueries ou à l’ironie de certains proches, va persévérer dans son errance pour démontrer qu’elle avait raison de fréquenter ce groupe.

Les psychologues Beauvois et Joule observent, en outre, que la force de notre engagement prétendument « libre » varie en fonction de certaines propriétés de la décision. Ainsi, nous nous sentons plus obligés lorsque nous avons pris une décision en public. Je me suis engagé sous les yeux des autres. Ma liberté se réduit encore lorsque je me suis engagé explicitement. Par exemple, on m’a demandé si j’étais d’accord pour venir aux réunions de la communauté ou pour prendre un abonnement et j’ai dit « oui ». Ma réponse était sans équivoque, elle n’était pas hésitante ou indéterminée ; elle était on ne peut plus claire et explicite.

Ma marge de manœuvre se réduit encore lorsque mon acte revêt un caractère irrévocable. Je me sens d’autant plus engagé par ma décision initiale que j’ai le sentiment de ne plus pouvoir revenir dessus. J’ai promis que je viendrais au stage ou séminaire « demain », ou « ce week-end ». A présent, il me parait difficile de revenir sur ma décision. Si je m’étais engagé vaguement (« dans les deux mois qui viennent », « un de ces jours », etc.), je serais plus libre de mes faits et gestes. Je pourrais plus aisément me raviser en prétextant un changement de circonstances.

Beauvois et Joule font également observer qu’un acte nous engage d’autant plus que nous l’avons réalisé plusieurs fois. J’ai ouvert ma porte à des Témoins de Jéhovah une ou deux fois dans un passé récent. Il me sera plus difficile de ne pas les accueillir la prochaine fois (même s’il ne s’agit que de probabilités et non d’un déterminisme absolu).

Notons encore que j’aurai aussi plus de mal à me délier de mon engagement lorsque les croyances auxquelles le gourou me demandera d’adhérer sont compatibles avec les miennes. La psychologie sociale parle du « caractère non problématique » (10) de la croyance : j’adhère plus volontiers aux croyances qui me sont chères. Par exemple, si je pense que la civilisation moderne est entrée sur la voie de la décadence, que l’homme devrait se tourner vers Dieu, que nous avons besoin d’une régénération spirituelle, j’ai plus de probabilités d’adhérer à la parole d’un chef spirituel qui soutient lui aussi ce genre d’allégations.

Enfin, on relèvera le fait que nous nous sentons plus engagés par une décision dont les conséquences ont de l’importance pour nous. Par exemple, si j’ai déjà fait don à un chef de secte de plusieurs centaines d’euros (alors que je traverse déjà des difficultés sur le plan économique), je me sentirai plus engagé que si je n’ai rien donné de plus qu’un peu de mon temps. J’ai tendance à vouloir que ma décision soit pertinente car elle m’en a coûté, au sens économique du terme.

On voit donc que derrière l’apparente liberté de s’engager dans une secte, on peut mettre en évidence l’existence de six facteurs d’engagement qui créent un terrain propice à la manipulation :

- La visibilité de notre décision sous le regard des autres

- Son caractère explicite

- Son degré d’irrévocabilité

- La répétition de l’acte

- Le caractère non problématique de la croyance

- L’importance des conséquences

Page 5: 108 - Le point de bascule émotionnel de la religion à la secte

5

4. Le rétrécissement du spectre émotionnel

La psychologie sociale s’intéresse aux comportements qu’elle appréhende de façon objective, de l’extérieur, au moyen de probabilités. Pour compléter cette perspective externaliste, il nous reste à caractériser le phénomène de manipulation de l’intérieur. A ce titre, dans notre ouvrage Le Gouvernement des émotions et l’art de déjouer les manipulations, nous avons proposé le concept de rétrécissement du spectre émotionnel (4). De quoi s’agit-il ?

En temps ordinaires, nous éprouvons une grande diversité d’émotions, d’intensité plus ou moins grande. Descartes allait jusqu’à en répertorier 34, tantôt naturelles, tantôt culturelles, tantôt simples, tantôt complexes (13). Le rétrécissement émotionnel désigne la réduction du nombre d’émotions ressenties par l’adepte. Il se traduit par la tendance à éprouver toujours les mêmes émotions, et de façon plus aigüe. Là réside le point de bascule émotionnel de la religion à la secte. Lorsque je vis sous l’emprise d’un gourou, ma vie affective se réduit pour l’essentiel à quatre émotions : admiration, peur, culpabilité, gratification :

- Je serai admiratif de l’aura charismatique d’un gourou, et corrélativement, j’éprouverai moins d’admiration pour des stars de cinéma ou les compétiteurs sportifs.

- L’idée furtive de quitter la secte s’accompagnera de la peur d’être puni par les forces de l’au-delà, de perdre l’estime et la reconnaissance chèrement acquise au sein du groupe.

- Je ressentirai de la culpabilité par impuissance à être à la hauteur des exigences de la secte.

- J’éprouverai aussi la gratification d’être devenu quelqu’un d’important, la satisfaction narcissique d’avoir une mission sur terre, d’être élu parmi les damnés, lucide parmi les aveugles. Gérald Bronner souligne que les mouvements sectaires « proposent aux individus qui y adhèrent des microsociétés où les cartes sont redistribuées, où il est possible d’espérer de nouveau accéder à un statut conforme à leurs attentes » (9).

L’intensité et la récurrence de ces quatre émotions a pour corrélat la perte des autres émotions de la vie ordinaire. La concentration des énergies affectives sur le groupe et son leader entraine la réduction de la gamme habituelle des émotions, donnant souvent aux proches le sentiment d’une « anesthésie du cœur ». Ce qui nous émeut laisse l’adepte indifférent. Ce dernier parait comme « étranger au monde », ce qui est la définition même de l’aliénation (alienus, « étranger »). En langage psychanalytique, on dira que son capital libidinal s’est fixé sur le leader par mécanisme de transfert. L’affectivité de l’adepte n’a pas disparu mais elle a été canalisée dans une seule direction et comme « siphonnée » par le gourou à son profit.

Par conséquent, aider un disciple à sortir d’une secte ne saurait consister à le « ramener à la raison » en invoquant des arguments philosophiques ou scientifiques. Une opposition frontale pourrait même se révéler contreproductive en braquant l’adepte irrité de voir son « savoir » mis en question. C’est davantage par leur bienveillance affectueuse que les proches peuvent espérer relancer la dynamique émotionnelle de la victime d’une secte, en suscitant d’autres émotions que celles que son gourou cultive pour la manipuler.

Conclusion : une voie nouvelle à explorer pour aider les victimes

L’analyse du point de bascule affectif de la religion à la secte permet de comprendre pourquoi des personnes instruites et sensées peuvent aussi être piégées par les stratégies manipulatoires. C’est sur le terrain de l’affectivité que se situe la manipulation. Aussi, en dehors des voies rationnelles, celles de l’enseignement et de la culture, notre attention doit se diriger vers d’autres moyens possibles de prévenir l’emprise sectaire. Nous avons proposé, dans cette optique, la solution qui consiste à élargir la palette d’expressions émotionnelles afin de reconquérir la diversité naturelle des émotions elles-mêmes. L’idée est de réactiver le jeu naturel de pondération mutuelle entre les émotions. En se multipliant, les émotions ont, entre autres, la propriété de s’affaiblir les unes les autres. Seules les émotions peuvent réviser des émotions et faire advenir le doute libérateur dans l’esprit de l’adepte.

Les associations de lutte contre les sectes pourraient, à l’avenir, se pencher sur le phénomène de rétrécissement affectif, dans la perspective de dégager des pistes de relance du processus dynamique de révision émotionnelle chez les adeptes. Dans la mesure où les émotions sont souvent déclenchées par des perceptions sensibles venues du monde extérieur, c’est sans doute en renouvelant le champ des perceptions sensibles de l’adepte que celui-ci pourra retrouver son rythme de croisière affective et voir à nouveau le monde à travers un kaléidoscope émotionnel. Cette démarche pourrait également servir les victimes sorties de secte à mieux s’en libérer mentalement.

Bibliographie :

(1) Platon, Le Sophiste, 231a, trad. d’E. Chambry, Garnier-Flammarion, 1969

Page 6: 108 - Le point de bascule émotionnel de la religion à la secte

6

(2) Platon, La République, Livre VIII, 493c, trad. R. Baccou, Flammarion, GF Paris, 1966.

(3) Mucchielli A., L'art d'influencer : analyse des techniques de manipulation, Armand Colin, 2005

(4) Le Coz P. Le gouvernement des émotions. Et l’art de déjouer les manipulations. Albin Michel. 2014.

(5) Platon, Apologie de Socrate, 34 c. Trad.d’E. Chambry, GF, Paris, 1965

(6) Weber M, Sociologie des religions (choix de textes et traduction par Jean-Pierre Grossein), Gallimard, Paris, 1996.

(7) Troeltsch E., 1991 (réédition), Protestantisme et modernité, Paris, Gallimard.

(8) Hervieu-Léger D., La religion pour mémoire, Éditions du Cerf, Paris, 1993

(9) Bronner G., « Approche sociologique : le terreau favorable à l’emprise mentale » in l’emprise mentale au cœur de

la dérive sectaire: une menace pour la démocratie? , Actes coll. 2013, pp. 14-43

(10) Beauvois J.-L. et Joule R.-V., La soumission librement consentie, Presses Universitaires de France, PUF, 1998

(11) Beauvois J.-L. et Joule R.-V., Petit traité de manipulation à l'usage des honnêtes gens, les psychologues sociaux

français, Éditions Presses Universitaires de Grenoble, PUG, 2002.

(13) La Rochefoucauld, Maximes, coll. « Grands Ecrivains », Paris, 1987.

(12) Descartes R., 1989, [1650], Les passions de l’âme, Œuvres philosophiques, III, Borda

2) REVUE DE PRESSE

EVANGELIQUES

Elles dénoncent une secte : la Mission de l’Esprit-Saint

Michael Nguyen, Dimanche, 5 juillet 2015, Journal de Montréal. La Mission de l’Esprit-Saint : fondée par Eugène Richer dit La Flèche (1871-1925), les membres doivent verser 10% de tout revenu à la secte, les membres sont invités à couper tous les liens avec ceux qui quittent le groupe. Les diverses églises sont indépendantes les unes vis-à-vis des autres. La Mission de l’Esprit-Saint de Montréal-Nord tient ses activités dans un bâtiment du boulevard Henri-Bourassa Est, évalué à 1 643 900 $ par la Ville. Des ex-membres de la Mission de l’Esprit-Saint à Montréal-Nord ont décidé de lever le voile sur un groupe religieux fermé, où les femmes ne sont bonnes qu’à faire des enfants, qui, pour la plupart, ne vont pas à l’école publique. «Tu as quatre ans, tu sais que tu vas être mère de famille, tu sais que c’est juste ça ton destin, tu n’iras pas plus loin dans la vie», a expliqué Marie (nom fictif) lors d’un témoignage au tribunal dans une affaire de crimes sexuels. D’autres anciens membres rencontrés par Le Journal vont encore plus loin. «On n’a pas le droit d’avoir des rêves, déplore pour sa part Sabrine (nom fictif). Les filles doivent se marier entre 14 et 16 ans. On prépare les filles à être de “bonnes épouses”. Huit enfants, c’est la norme.» Tant Marie, dont l’identité est protégée par une ordonnance de la cour, que Sabrine, qui craint des représailles envers ses proches encore dans la secte si son identité est révélée, ont dressé un triste portrait de la condition féminine dans cette secte comptant plus de 300 membres. Cloîtrées - Tant Marie que Sabrine et trois de ses sœurs, maintenant dans la quarantaine, sont nées dans la Mission de l’Esprit-Saint. Selon ces ex-membres, les femmes n’ont pas le droit de travailler ni d’avoir de contacts avec l’extérieur. «(Les gourous) disaient que les gens du monde étaient démoniaques, affirme Marie. La secte parlait beaucoup d’une troisième guerre mondiale.» Sabrine explique que l’homme ramène l’argent à la maison, tandis que la femme est considérée comme une «moins que rien». Juste d’aider sa femme dans les tâches quotidiennes est mal perçu, dit-elle. Pas éduqués - Dans une décision concernant un ex-membre condamné pour des crimes sexuels, la Commission des libérations conditionnelles du Canada s’était aussi penchée sur la Mission de l’Esprit-Saint.

Page 7: 108 - Le point de bascule émotionnel de la religion à la secte

7

«Le mouvement (de la secte) prône le mariage à l’adolescence, de 14 à 17 ans, dans le but d’avoir une famille nombreuse, avait indiqué la Commission dans son rapport. Les mariages se font entre membres du groupe, les membres tendent à s’isoler et à être méfiants face à la société.» Les allocations du gouvernement grâce aux nombreux enfants permettent aussi d’amasser un beau pactole, explique Sabrine. Sauf que la majorité des enfants ne vont pas à l’école publique. Ils recevraient leur éducation à la maison, par des enseignants parfois sans formation. «(Les gourous) briment la vie des jeunes, il n’y a pas de développement normal», déplore une des sœurs de Sabrine. Le gouvernement devrait évaluer les enfants dans la secte. Les enfants ne font pas les tests du ministère, ils sont illettrés.» Simulacre de justice- Selon Marie, si elle refusait de faire son «devoir de femme», elle devait passer devant une sorte de tribunal, devant tous les gourous de la secte. «On te juge, on te demande pourquoi tu ne lui donnes pas des relations sexuelles, décrit Marie. Ça finit avec un genre de jugement de cour, que je n’ai pas le droit de lui refuser.» Si le mari trompe sa femme, le blâme est mis sur cette dernière, ajoute Marie. «Je n’ai pas mon mot à dire, je dois l’accepter et vivre avec ça», dit-elle. Tous les membres ne sont pas à mettre dans le même panier, souligne toutefois Sabrine. «Il y a 90% de fanatiques, ceux qui ont un caractère assez fort, ça leur passe au-dessus de la tête» dit-elle. Mais ça ne l’empêche pas de vouloir dénoncer les pratiques de cette secte. «Ce sont les enfants qui souffrent, conclut une des sœurs de Sabrine. Si mes petits enfants vont à l’école, notre sortie médiatique sera considérée comme une victoire.» Dans les dernières années, au moins quatre membres de la secte ont été traduits en justice pour des crimes sexuels ou des abus sur des enfants de la secte, même si les contacts avec le monde extérieur –dont la police – sont découragés. Deux ont été condamnés, tandis que les deux autres attendent leur procès. La Mission de l’Esprit-Saint de Montréal-Nord nie en bloc les allégations d’ex-membres déplorant la piètre condition féminine dans ce groupe religieux. «Nos femmes sont libres, c’est leur choix», a lancé un des administrateurs du groupe, Daniel Bérubé… Il confirme toutefois que les membres qui ont des problèmes peuvent demander conseil aux dirigeants du groupe, mais il assure que les «jugements» ne sont pas coercitifs, comme l’affirment des ex-membres… «Vous inventez des histoires, a-t-il lancé. Faites des choses importantes, ce serait plaisant. Allez creuser dans les écoles juives. Moi, je suis dans mes souliers, pas dans ceux de tous les gens sur la planète.» Pas responsable - Le président de la Mission de l’Esprit-Saint a pour sa part affirmé que son groupe religieux ne pouvait être tenu responsable des problèmes allégués par ses ex-membres. «Que ce soit la Mission, les témoins de Jéhovah ou les catholiques, il peut y avoir des choses qui se produisent, ce n’est pas nécessairement lié à nos enseignements», a commenté Richer Lacroix…

GREVE ET SVI, LA GRANDE MUTATION

Le gourou d'une secte mis en examen sévit encore à Paris AFP, La Croix 7/8/15 - Plus de quatre mois après la mise en examen de son gourou et de cinq de ses cadres, La grande mutation, une secte faisant miroiter à ses adeptes la vie éternelle, continue de sévir à Paris avec, sous son emprise, plusieurs dizaines de fidèles. Vu de loin, le Groupement de recherche des énergies vibratoires éternelles et Supports vibratoires incorruptibles (Greve et SVI), l'autre nom de La grande mutation, pourrait faire sourire, avec sa communauté aux cheveux longs, son histoire fumeuse du double céleste et ses manipulations de pendule. Mais derrière le vernis pittoresque se cache une puissante entreprise de sujétion, qui pousse ses adeptes au repli, à la coupure avec famille et proches, au don de plusieurs milliers d'euros par an et souvent au refus de la médecine moderne. Au centre, Etienne Guillé, 78 ans, ancien biologiste et chercheur au CNRS qui se présente comme le sauveur, a bâti une théorie extrêmement complexe, appuyée pour partie sur une solide base scientifique qui donne du crédit à l'ensemble. Il propose aux adeptes de renouer avec leur double céleste, condition de l'accession à la vie éternelle, en favorisant les vibrations de leur corps, notamment à l'aide d'un pendule. "La première fois que j'y suis allé, je n'ai rien compris mais j'ai trouvé ça fascinant. Ça parlait d'éternité avec des références scientifiques", se remémore un ancien adepte. Le contact direct entre les cadres de la secte et les adeptes revêt plusieurs formats: séminaires rassemblant jusqu'à 200 personnes, séances en comité restreint ou individuelles. En très mauvaise santé, Guillé est rarement présent. On se rend aux réunions avec un chèque ou des espèces, confiées directement dans une enveloppe aux cadres de la secte. La grande mutation ou le Greve n'ont pas d'existence légale, pas de statuts, et seule une partie des sommes collectées transite par le système bancaire. A raison de quelques centaines d'euros par mois et par adepte, La grande mutation brasserait, selon une estimation basse, plus de 100.000 euros par an. En perquisition, les enquêteurs ont saisi plus de 20.000 euros en liquide aux domiciles de cadres de la secte, selon une source proche de l'enquête. Pour Me Rodolphe Bosselut, conseil de parties civiles, Guillé ne cherche pas tant à s'enrichir qu'à contrôler ses fidèles. "Prendre l'argent des adeptes, il semble que ce ne soit pas la seule finalité. De là à dire que ce n'est pas un moteur...", tempère une proche d'une des membres. Parmi les adeptes, beaucoup de femmes diplômées, souvent la cinquantaine ou la soixantaine, en quête de sens, rabattues par quelques professionnels de santé en région parisienne mais aussi en province. L'implication dans La grande mutation induit un éloignement de la famille, régulièrement un divorce. "L'une des forces de Guillé est d'avoir su théoriser le rejet des proches", explique Me Bosselut. Ainsi, si les disciples font partie d'une race d'élus promis à la vie éternelle, les

Page 8: 108 - Le point de bascule émotionnel de la religion à la secte

8

membres de leur cercle familial et amical sont présentés comme de simples animaux, voire des "prédateurs", à fuir. "Vous avez des dizaines et des dizaines de familles qui ont été disloquées", assure un ancien adepte. Après des signalements en 2012, une information judiciaire a été ouverte en octobre 2013. Fin mars, Guillé et cinq de ses lieutenants, dont son gendre et son petit-fils, ont été mis en examen pour abus de faiblesse et corruption de mineurs. Les rabatteurs, eux, n'ont, pour l'instant, pas été inquiétés. La période visée remonte à 2006, mais plusieurs éléments laissent penser que Guillé sévit depuis le début des années 90, voire les années 80. Bien qu'ils le réfutent, il apparaît que les cadres prônent le rejet de la médecine. La propre fille d'Etienne Guillé, atteinte d'un cancer dont elle devait décéder, avait refusé les traitements conventionnels pour "préserver son être céleste", selon une source proche de l'enquête. Hémorragies, douleur à la jambe, problèmes dentaires, glaucome, voire cancer, sont susceptibles d'être traités par des ondes ou de l'eau "énergétisée". Sur le plan de la santé mentale, La grande mutation fait tout autant de dégâts. Plusieurs cas d'hospitalisation psychiatrique et un suicide ont été recensés chez des adeptes, sans que les causes ne soient établies avec certitude. "On est à l'opposé de manipuler des individus", a soutenu le gendre de Guillé lors de son audition. "On leur offre plutôt un lieu et des moments où ils peuvent s'ouvrir sans doute à leur véritable identité, sans diriger quoi que ce soit, ni dans leurs pensées ni dans leurs actes". De sources concordantes, les mises en examen, pourtant assorties de contrôles judiciaires qui interdisent tout contact avec les adeptes ou les autres mis en examen, n'ont pas interrompu les activités de La grande mutation. Les familles de proches les plus actives contre la secte lancent un appel aux autres et les invitent à consulter le site www.grandemutationsansgourou.wordpress.com. Sollicités par l'AFP, les avocats des principaux mis en examen (à l'exception de Guillé, qui a refusé de se faire assister) n'étaient pas joignables, pas plus que le gendre de Guillé, contacté à son domicile, où séjourne également le gourou.

ISLAMISME

Béthune : une jeune femme sous l’emprise de Daesh pendant 1100 jours

www.lavoixdunord.fr , 23/09/2015 - 23/09/2015, PAR STÉPHANE DEGOUVE. Les yeux maquillés, quelques percings sur le visage, Sonia* n’a pas le look d’une terroriste. C’est pourtant pour apologie d’un acte de terrorisme que cette femme de 29 ans a été jugée lundi au tribunal de Béthune. Pour avoir diffusé les messages des terroristes de Daesh et de l’État islamique (EI) et lancé des appels au djihad. Rien ne la prédestinait à ça, elle qui a grandi dans une petite commune du Béthunois. Rien jusqu’à une dépression, en 2012, suite à la perte de son travail et un viol quelques années plus tôt. Sonia se retrouve seule et cherche une porte de sortie sur Internet, sur des blogs de discussion. Elle communique souvent avec un Algérien vivant a priori à Marseille qui lui dit que l’islam va régler tous ses problèmes, puis avec un autre homme à Lyon, un en Syrie, etc.

Serment d’allégeance - Au bout de quelques mois, elle se convertit à l’islam dit authentique, en juillet 2014, et fait même serment d’allégeance à l’EI. « De fil en aiguille, il m’a dit qu’il fallait que j’aille en Syrie faire de l’humanitaire », explique Sonia. Ou faire exploser une synagogue à Marseille. Un départ en Syrie aurait même été évoqué, insiste la présidente, Stéphanie Ménard (l’itinéraire a été trouvé dans son ordinateur). Et il n’y avait pas que ça : des photos et des vidéos de décapitations, de la propagande djihadiste, de drapeaux de l’EI ou de Daesh, tout ce que Sonia a partagé sur sa page Facebook. Des incitations à « faire couler le sang », des hommages aux actes barbares de Merah ou des frères Kouachi. Même un message disant « Tuez les maires dans nos villages, comme ça on déstabilisera le pays », avec la photo du maire de Béthune. « Avec le recul, avec tout ce qu’ils m’ont fait voir, je trouve que c’est des barbares. Mais si je ne relayais pas leurs infos, ils me disaient qu’un châtiment m’attendait », explique Sonia.

« Un lavage de cerveau » - C’est quand elle a reçu un niqab par la Poste que sa mère, inquiète, a alerté les autorités pour être aidée. C’était en juillet dernier. Depuis, Sonia s’est réveillée et a pris ses distances avec ses « amis » virtuels. Son avocat, Me Darras, explique attendre « un rempart » de la justice pour la protéger. Pour aider une femme « happée par une forme de prédateur qui va surfer sur son intérêt pour l’islam et sur sa fragilité ». Isolée socialement, elle n’avait de liens avec le monde que via les réseaux sociaux. Pour Me Darras, c’est là qu’elle a subi « un lavage de cerveau […] Elle n’avait plus son libre arbitre ». Mais depuis la mi-juillet, sa cliente « victime d’un endoctrinement » n’a été sur aucun de ces réseaux sociaux et s’est tournée vers des psychiatres, vers sa famille et vers le Centre national d’accompagnement familial et de formation face à l’emprise sectaire (CAFFES) dont les membres étaient au tribunal pour la soutenir. Tous sont conscients que le chemin reste long pour que Sonia se désengage de cette emprise. « On commence seulement à s’éveiller d’un mauvais cauchemar », conclut Me Darras.

Page 9: 108 - Le point de bascule émotionnel de la religion à la secte

9

Les juges ont condamné Sonia à un an de prison dont 8 mois avec sursis et mise à l’épreuve, avec un aménagement de la partie de prison ferme possible. Elle devra suivre des soins, a l’interdiction d’entrer en contact avec les personnes qu’elle côtoyait sur Facebook et a l’interdiction de quitter le territoire sans autorisation.

« Elle avait conscience de ce qu’elle diffusait » - Sans faire de discours alarmiste, le procureur Julien Michel, a insisté sur le danger de cette forme de propagande sur Internet. « C’est un fonctionnement très établi, où des personnes comme Daesh ne veulent que renforcer leur présence et leur pouvoir par des actes terroristes. Les démarcheurs cherchent des enfants ou des personnes fragilisées. Première phase, ils prennent ces cibles pour les amadouer, les mettent en confiance et enjolivent. Deuxième phase, de déconstruction, en cassant la psychologie de la personne. Troisième phase, faire faire ce qu’ils souhaitent : diffusion de messages sectaires voire passage à l’action. » S’il reconnaît que Sonia est « victime d’une emprise sectaire », il estime qu’elle « avait conscience des conséquences de ce qu’elle diffusait. Au fur et à mesure, des images de barbarie ». Assez pour requérir « une peine d’assistance ». L’essentiel de la peine doit, pour lui, être l’obligation de « soins et le soutien d’une association pour se détacher de cette emprise. Il faudra un temps assez long pour détruire ce lien. »

* Prénom d’emprunt.

Pour s’informer : Centre national d’assistance et de prévention de la radicalisation : 0 800 005 696 (nº vert) ou stop-djihadisme.fr

Un centre de déradicalisation va ouvrir à Bordeaux

Par Yassine Khelfa M'Sabah, France Bleu Gironde et France Bleu - Mardi 22 septembre 2015 Le centre s’appellera "CAPRI". Il s'agit d'un centre d'action et de prévention contre la radicalisation islamiste. La Préfecture préfère rester discrète pour le moment mais prévoit courant Janvier, un an après les attentats de Charlie Hebdo de dévoiler ses premières analyses… Le centre de déradicalisation agira de manière indépendante. Son objectif : aider les familles et les proches de personnes embrigadées dans l'islam radical. Un numéro vert existe déjà pour ces familles depuis avril 2014. Cette plateforme téléphonique avait été mise en place par le ministère de l'Intérieur. Elle donnera des signalements au centre de déradicalisation à Bordeaux comme l'explique Simon Bertoux, directeur de cabinet du Préfet de la Gironde. Selon nos informations sept girondins auraient déjà pris le départ pour la Syrie. Cet été une famille entière est soupçonnée d'être partie elle aussi rejoindre les rangs de Daesh en Syrie. … Le centre de déradicalisation sera composé de différents acteurs. Des psychologues, des spécialistes des dérives sectaires ou encore des représentants de la religion musulmane seront présents. Ils travailleront à partir de signalements, des alertes données par les familles via le numéro vert lancé par le ministère de l'Intérieur mais aussi grâce aux informations des renseignements généraux. En France d'autres initiatives locales ont vu le jour. A Marseille, Strasbourg ou encore en Ile-de-France. Récemment à Mulhouse, le Tribunal de Grande Instance a lancé des «stages de déradicalisation» pour les individus poursuivis pour des infractions en lien avec l'Islam radical. Un des premiers centres du genre avait ouvert à Paris courant 2014, lancé par l'anthropologue Dounia Bouzar, spécialiste des dérives sectaires liés à l'Islam radical. Des centres qui s'inspirent notamment du Danemark. Le pays avait été le premier à lancé en 2013, des organismes de réhabilitation pour s'occuper des djihadistes de retour de Syrie. https://www.francebleu.fr/infos/faits-divers-justice/un-centre-de-deradicalisation-va-ouvrir-bordeaux-1442852244

A Marseille : Association des victimes de l’islam radical et de pratiques anachroniques, tél. : 07 83 69 08 13 [email protected] - http://victim-islam-radical.monsite-orange.fr/

SANTE ET DERIVES SECTAIRES

La Miviludes signe un accord avec médecins et infirmiers pour lutter contre les dérives sectaires

D’après la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes), le champ thérapeutique est en tête de ses sollicitations, avec près de 40 % de signalements reçus. La Croix 23/9/15 avec AFP - « LA RECHERCHE DE DÉVELOPPEMENT PERSONNEL PEUT PRÉSENTER LES MÊMES DANGERS » La Miviludes, présidée par un ancien médecin, l’ex-député socialiste Serge Blisko, va donc signer pour la première fois des « conventions de partenariat » avec des ordres professionnels : jeudi avec celui des infirmiers, vendredi avec celui des médecins. La première vise à « sensibiliser les infirmiers au risque de dérives thérapeutiques à caractère sectaire », la seconde à « mieux informer les médecins et améliorer la prise en charge des patients victimes ».

Page 10: 108 - Le point de bascule émotionnel de la religion à la secte

10

Marseille : maladie ou mal-être, une vraie manne pour les gourous

Dimanche 04/10/2015 - LaProvence.com Delphine Tanguy. Un colloque « les détournements sectaires du psychosomatique » a réuni hier, à Marseille, des experts des dérives sectaires. C'est un quinquagénaire plutôt débonnaire, le rire et la parole facile, un léger accent belge - normal, il l'est. D'ailleurs, on entend des rires fuser lorsqu'il lance : "Le cancer en soi n'a rien de destructeur. Le fait d'avoir quelques milliards de cellules en plus dans votre organisme, ça ne va pas vous tuer". Ces mots-là, aberrants, prononcés par un disciple de la "biologie totale", tant de gens en détresse ont envie de les entendre, d'y croire. Au sein du Centre fédéral belge d'information et d'avis sur les organisations sectaires nuisibles (CIAOSN) - l'équivalent, à Bruxelles, de notre Miviludes (1) française - la psychologue Sandrine Mathen, elle, tente de les combattre. Elle est venue témoigner hier, avec ces images chocs à l'appui, du poids de certaines dérives des médecines non-conventionnelles, lors du colloque national contre Les détournements sectaires du psychosomatique. Organisé par le Gemppi, en partenariat avec la Fédération européenne des centres de recherche et d'information sur le sectarisme (Fecris), il s'est déroulé à l'Espace éthique méditerranéen, à l'hôpital de La Timone de Marseille. Soignants, experts, les intervenants se sont succédé à la tribune pour évoquer des nouvelles thérapies ambiguës, telles l'EMDR, les ravages des faux souvenirs et de la mémoire manipulée en thérapie, etc. Des cas concrets ont été évoqués, des discours déconstruits. Promettre aux malades qu'ils guériront de leur cancer avec du jus de légumes, une cure constituée "d'air et de soleil" ou, comme les adeptes de la biologie totale, en réglant seulement "le conflit interne à l'origine" de leurs maux, mais surtout en substituant ces approches à celle de la médecine traditionnelle : pour Serge Blisko, à la tête de la Miviludes, c'est bien ainsi que l'on pourra identifier le gourou dogmatique, dangereux. Une secte n'est pas à chaque fois en embuscade. Il y aurait, pour la mission interministérielle, vraiment urgence. "Les mouvements sectaires s'abritent derrière l'engouement des Français pour toutes les médecines dites alternatives, naturelles ou complémentaires." Parmi les 3 000 signalements reçus par la Miviludes en 2013, la part de la santé était en hausse, jusqu'à représenter plus de 30 % des cas, 50 % cette année à Marseille, selon le Gemppi. Bien évidemment, une secte n'est pas à chaque fois en embuscade. "Mais le danger demeure, 10 à 20 % des cas présentent vraiment un risque", assure Didier Pachoud, président du Gemppi, présente dans la cité phocéenne depuis 1988. Sans non plus jeter l'opprobre sur les pratiques alternatives, dont la complémentarité peut être bénéfique dans certains traitements, apporter un vrai mieux-être au malade, les participants se voulaient pédagogues. "Car la maladie et la douleur peuvent rendre vulnérables même les esprits les plus informés et rationnels", rappelle d'ailleurs aussi le Gemppi sur son site internet. www.gemppi.org (1) Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires.

Médecines douces : méfiez-vous des dérives sectaires

Top Santé, 15 septembre 2015. Certaines pratiques peuvent s'avérer peu conventionnelles, certaines peuvent même être dangereuses. Et d'autre peuvent encore dériver dans le domaine sectaire. De quoi faut-il absolument se méfier? Il est indispensable de rester vigilant face aux méthodes de pseudo-thérapeutes qui exercent une véritable emprise mentale sur les malades, mais aussi celles de distributeurs de produits complémentaires de santé. Le nombre de concepts et de méthodes s'avérant dangereux est en augmentation. Bien souvent ils sont protégés par des droits d'auteurs, des droits de marques ou des droits de propriété intellectuelle. Outre leur dangerosité, ces pratiques de soins ou de bien-être non conventionnelles et à visée thérapeutique ont en commun de permettre à leurs concepteurs d'obtenir des revenus très confortables. Elles peuvent conduire à des dérives, soit en raison de leur dangerosité propre, soit en raison de l'absence de formation réglementée et/ou validée des praticiens qui les mettent en œuvre.

La liste noire du ministère de la Santé Elle met en avant une quarantaine de pratiques potentiellement dangereuses, notamment : Le biomagnétisme, qui prétend débarrasser une personne de toutes les énergies usées, stagnantes, qui perturbent sa santé L'éleuthéropédie, imposant aux enfants une alimentation composée exclusivement de produits crus, ce qui peut entraîner des retards de croissance La fasciathérapie, une thérapie manuelle centrée sur le patient qui dit le traiter dans toute sa globalité et le rend acteur de sa santé. Elle sollicite les forces d'autorégulation somatique et psychique La gemmothérapie, une méthode de soins utilisant des tissus embryonnaires végétaux en croissance (bourgeons, radicelles). Le figuier serait par exemple un analgésique et un antidépresseur La méthode Hamer, prônant que chaque type de cancer trouve son explication dans le psychisme. Cette méthode prône également l'arrêt de tout traitement conventionnel par les malades atteints de cancer La kinésiologie, basée sur des tests musculaires pour trouver l'origine des blocages et sur des exercices permettant au corps de s'autoguérir

Page 11: 108 - Le point de bascule émotionnel de la religion à la secte

11

La médecine énergétique qui permet d'équilibrer les énergies du corps pour atteindre une santé, une joie et une vitalité optimale La naturopathie, englobant l'étude, la connaissance, l'enseignement et l'application des lois de la vie afin de maintenir, retrouver et optimiser la santé par des moyens naturels La psychobiologie, qui consiste à étudier le rapport entre psychisme et fonctions biologiques Le reiki, prônant la guérison par imposition des mains, le praticien servant de canal pour faire passer l'énergie La méthode Simonton, qui prétend prendre en charge psychologiquement les malades du cancer avec pour objectif d'apprendre à maîtriser la dimension psychologique et émotionnelle et favoriser ainsi des transformations en profondeur face aux difficultés, aux situations de crises, aux maladies. En cas de doute sur une pratique, n'hésitez pas à consulter les sites Internet : www.sante.gouv.fr, rubrique «Dossier», et «pratiques de soins non conventionnelles» à la lettre P, ou le site www.derives-sectes.gouv.fr

Les nouveaux gourous de la santé inquiètent

Le Soir (Belgique), 30/09/2015, Ludivine Ponciau. Sectes. Le nombre de questions liées à ces pratiques augmente. Kinésiologie, biologie totale,… ces pratiques peuvent mener à des abus des thérapeutes. Le Centre d’information sur les organisations sectaires nuisibles (CIAOSN) traite de plus en plus de dossiers. Atteinte d’un cancer du sein, la patiente devait subir au plus vite une mastectomie. Une opération que lui déconseillait vivement son thérapeute en biologie totale. Son oncologue, lui, avait été clair : sans cette opération, il lui restait un an à vivre, tout au plus. Tiraillée entre l’avis de son médecin et celui de son gourou, la patiente s’est adressée au Centre d’information et d’avis sur les organisations sectaires nuisibles. Elle a finalement opté pour la mastectomie… Ces derniers temps, on a vu émerger une série d’alternatives à la médecine traditionnelle, axées sur le bien-être physique et mental. Dans certains cas, des praticiens exercent une emprise sur leurs « disciples-patients ». « Cela peut concerner l’acupuncture, la méditation, la kinésiologie, la braingym (mouvements du corps permettant de doper les capacités intellectuelles, NDLR) ou même le tai-chi et la fish pédicure. Des pratiques pour lesquelles notre rôle est plutôt d’informer », illustre Sandrine Mathen, psychologue au Ciaosn. « Mais il peut aussi arriver qu’une personne, manipulée par son thérapeute, en vienne à se détourner de la médecine classique et que ce choix soit préjudiciable pour sa santé. Ça peut aller jusqu’à la mort. » Dans le collimateur de l’organisme de lutte contre les sectes mais aussi de la justice (lire ci-dessous) : la biologie totale. Pratique selon laquelle la plupart des maladies résultent d’un stress ou de conflits psychologiques. Ce n’est donc, estiment les thérapeutes qui la pratiquent, qu’en soignant les causes que l’on peut soigner le mal. Problème : comment prouver que le thérapeute abuse de sa position, joue de son influence ? « On ne peut parler d’abus de faiblesse que s’il est prouvé que le thérapeute avait connaissance de la vulnérabilité de la personne, de sa fragilité physique ou psychologique. Et que cette faiblesse a été utilisée soit pour s’approprier ses biens ou son argent, soit pour exercer un pouvoir sur elle. » Comme c’était sans doute le cas pour cette patiente atteinte d’un cancer du sein et qui hésitait à se faire soigner. « Attention », tempère la psychologue, « certains de ces thérapeutes qui représentent un danger pour leurs patients sont intimement convaincus d’avoir raison, que leur méthode marche. Tous ne recherchent pas le pouvoir ou le gain. Il n’y a pas de profil type. » Il n’y a pas que les médecines alternatives qui posent question. La pratique religieuse peut, elle aussi, entrer en conflit avec la médecine générale. « On a par exemple eu le cas d’un pasteur protestant qui s’immisçait dans le traitement d’un patient atteint du sida. Qui voulait le détourner de la trithérapie », relate Sandrine Mathen. « Le problème est le même avec les témoins de Jéhovah et la transfusion sanguine. La justice a réglé le problème des enfants en donnant la possibilité de prononcer une déchéance parentale temporaire, le temps que la transfusion soit accomplie. Mais en ce qui concerne les adultes, on se heurte à nouveau au droit du patient. » Un procès emblématique en 2011 - En septembre 2011, un praticien de la biologie totale a été condamné en justice pour pratique illégale de la médecine, coups et blessures involontaires, et escroquerie. Louis Vliegen avait promis à Maria Schommers, atteinte d’un cancer de l’estomac, qu’il viendrait à bout de sa maladie. Il lui avait prescrit un suivi psychologique et de la poudre de zinc. Après sa première visite chez le psychothérapeute, Maria avait abandonné son traitement médical. Quelques semaines plus tard, elle succombait à la maladie. Au procès, l’époux de Maria avait expliqué comment le praticien s’y était pris pour détourner la patiente du corps médical : « La première fois que nous sommes allés chez lui, c’était pour guérir le cancer. Au bout d’une heure de discussion, nous étions convaincus qu’elle allait guérir. » Avant de se rendre chez Louis Vliegen, qui leur avait été recommandé par leur fils qui avait vaincu le cancer quelques années plus tôt bien qu’il ait arrêté sa chimio, les Schommers avaient pris un rendez-vous à l’hôpital. Mais ils ne se sont jamais présentés à la consultation. « Il nous a dit que selon lui, ce n’était pas nécessaire. Il nous a garanti 80 % de chances de guérison. » « Il nous disait que le cancer c’était quelque chose qu’on a dans la tête », avait ajouté l’époux. Louis Vliegen a écopé de six mois de prison avec sursis et d’une amende de 5.500 euros. Ce signal que la justice a adressé à ceux qui s’improvisent guérisseurs a-t-il été bien reçu ? Sandrine Mathen n’en est pas convaincue. « Disons que depuis le procès, certains sont passés dans la clandestinité. On voit bien que le ménage a été fait sur les sites internet pour gommer les références à la biologie totale. » Plus récemment, un nouveau courant aurait causé la mort de plusieurs personnes en Australie, en Grande-Bretagne, au Canada, en Allemagne et en Autriche. Le « respirianisme », qui propose tout bonnement de se passer de nourriture solide. Un jeûne de 40 à 60 jours durant lequel l’adepte puise son énergie dans l’air et la lumière…

Page 12: 108 - Le point de bascule émotionnel de la religion à la secte

12

SCIENTOLOGIE

Scientologie: information judiciaire ouverte pour harcèlement moral et abus de faiblesse 16/09/2015. Une information judiciaire pour harcèlement moral, abus de faiblesse, abus de biens sociaux, banqueroute et recel, visant la scientologie ainsi qu'une société de bâtiment, a été ouverte par le parquet de Versailles, a-t-on appris mercredi de sources judiciaires. La justice avait été saisie en juin 2014 par une douzaine de salariés d'une société spécialisée dans l'aménagement de combles, Arcadia, basée à Voisins-le-Bretonneux (Yvelines), au sud-ouest de Paris, qui estimaient que la direction de leur entreprise avait été "infiltrée" par des membres de la scientologie. L'équipe comparée à des "enfants gâtés" ou des "pisseuses en chaleur". Les plaignants affirment notamment avoir été forcés de suivre des formations dispensées par des membres supposés de la scientologie, "omniprésente" selon eux dans la société depuis plusieurs années. Dans leur plainte, les salariés avaient évoqué une "sujétion psychologique", un "dénigrement de l'équipe commerciale" comparée à des "enfants gâtés" ou des "pisseuses en chaleur". "Déstabilisés et constamment sous pression, les salariés doivent coopérer ou sont définitivement écartés de l'entreprise", avaient-ils encore expliqué, en estimant que "l'infiltration" avait pour but de "piller financièrement" l'entreprise. Au total, selon eux, entre 1 et 2 millions d'euros auraient été détournés. Par la rédaction avec AFP, Source : http://www.bfmtv.com/societe/scientologie-information-judiciaire-ouverte-pour-harcelement-moral-et-abus-de-faiblesse-915366.html#

TEMOINS DE JEHOVAH

Australie : les Témoins de Jéhovah ont caché de nombreuses plaintes pour pédophilie

Le Parisien G.L. | 28 Juil. 2015 - Ces soixante dernières années, les Témoins de Jéhovah australiens ont détruit de nombreuses notes faisant état d'abus sexuels sur mineurs, selon des auditions recueillies lundi par une commission d'enquête à Sydney. Devant la commission, l'avocat principal Angus Stewart a expliqué que les accusations visant, depuis 1950, quelque 1006 pédophiles présumés dans cette communauté, ont été traitées en interne plutôt que d'être rapportés à la police. Les victimes qui se plaignaient étaient confrontées à leurs abuseurs puis laissées avec le sentiment d'avoir pêché, précise Associated Press qui cite notamment l'une des victimes présumées. Agressée à partir de 15 ans - A la fin des années 1980, cette femme, connue sous le nom de BCB, a ainsi été interrogée sur sa relation avec un doyen, Bill Neill. Lundi, elle a témoigné comment cet homme, aujourd'hui décédé, l'aurait agressée à partir de l'âge de 15 ans et épié quand elle était sous la douche. Âgée aujourd'hui de 47 ans, elle était à l'époque très amie avec la fille de Neill, précise le «Guardian». L'homme profitait de ses passages à son domicile pour l'embrasser avec la langue, selon les affirmations de BCB. Lorsqu'elle s'est plainte des faits, il lui a été demandé de participer à des réunions avec des doyens. Au cours de l'une d'entre elles, Neill aurait plaisanté à propos de ses actes présumés, qu'il a par ailleurs niés. BCB se souvient avoir ressenti de la culpabilité et de la difficulté à évoquer les abus dont elle se disait l'objet. Lorsque la commission lui demande si des notes ont été prises au cours des réunions avec BCB, un doyen, Max Horley, explique que c'est possible mais qu'elles ont probablement été détruites. «Nous ne voulons pas garder de notes en dehors de ce qui est conservé dans les dossiers de la congrégation», afin qu'elles ne «tombent pas dans de mauvaises mains», a-t-il tenté de justifier. «Quelles sont ces mauvaises mains ?», a alors interrogé le président de la commission, Peter McClellan. « Et bien, nous ne voulions pas que nos épouses connaissent nos trucs - de quels genres de trucs nous nous occupions». Doyen depuis plus de 30 ans dans la congrégation de Narrogin, Max Horley a affirmé qu'il n'était pas dans la pratique de son mouvement, qui compte 68 000 membres en Australie, de rapporter les allégations de pédophilie à la police. Bien que l'église ait expulsé 401 membres après avoir eu connaissance d'abus internes, elle a permis 230 autres à rentrer au bercail, selon des chiffres cités par Reuters. Trente-cinq ont même été accueillis à de multiples occasions.

Commission Royale d'Australie : un membre du collège central convoqué Mis à jour : 17 août 2015 Pédophilie, Watchtower, jw.org, Témoins de Jéhovah. Geoffrey Jackson, membre du collège central des Témoins de Jéhovah, a été convoqué ce vendredi 14 août devant la Commission Royale d’Australie dans le cadre de l'enquête sur la pédophilie au sein de l'organisation. Après avoir révélé que plus de 1000 cas de pédophilie ont été délibérément cachés par l'organisation des Témoins de Jéhovah en Australie, la Commission Royale chargée d'évaluer les réponses institutionnelles aux abus sexuels sur mineurs a décidé de convoquer Geoffrey Jackson afin qu'il puisse témoigner sur ce sujet. L'objectif est de statuer sur le relatif laxisme des Témoins de Jéhovah envers les pédophiles "repentants" et de faire pression sur l'organisation pour qu'elle signale systématiquement aux autorités tous les cas de pédophilie. Il sera également fait mention des

Page 13: 108 - Le point de bascule émotionnel de la religion à la secte

13

règles "bibliques" appliquées par les Témoins lors de leurs comités judiciaires, notamment la règle controversée des "deux témoins" (voir le livre des anciens)… Audience du vendredi 14 août 2015. Voici quelques commentaires par ordre chronologique : -Première partie

Présentation du rôle et du fonctionnement du collège central Les 20 premières minutes sont consacrées à expliquer ce qu'est le collège central, son rôle, son fonctionnement, le choix de ses membres. On notera l'expression "Gardiens de la doctrine", utilisée par Jackson à plusieurs reprises. Lorsqu'on lui demande (20ème min) si le collège central croit être le porte parole de Dieu sur terre, celui-ci répond que "ce serait présomptueux" (pour eux de le croire). C'est pourtant ce qui ressort de nombreuses publications et les implications de cette fausse affirmation sont très graves car elles concernent les croyances de plus de 8 millions de personnes. Steward : "Est-ce que vous vous considérez comme les porte paroles de Jéhovah Dieu sur terre ?" Jackson : "Je pense que cela serait assez présomptueux de penser que nous sommes les seuls porte paroles que Dieu utilise" S'en suit une discussion sur les relations entre les filiales et le collège central. Les filiales sont-elles indépendantes ? Suivent-elles Jéhovah ou le collège central ? Jackson affirme que l’allégeance des Témoins de Jéhovah revient à Jéhovah et que le collège central n'a qu'un rôle de "gardien de la doctrine". Toutefois les filiales ont quand même des compte à rendre au collège central (26è minute) et les congrégations rendent des comptes à la filiale de leur pays. Vient ensuite le sujet des publications et des différents manuels tels que le livre "organisés", le livre des anciens et le livre pour l'organisation des filiales. Jackson affirme que le collège central n'est pas à l'origine de ces publications mais qu'elles sont écrites par d'autres personnes. Le collège central a pour rôle de vérifier la conformité des publications avec la Bible et vérifier que ces publications sont "traduisibles" en de nombreux langages. Toutefois lorsque Steward demande si le collège central endosse la responsabilité de tout ce qui est écrit dans les publications, Jackson répond que c'est bien le cas (31ème minute). Par contre, Jackson a dégagé la responsabilité du collège central dans les lettres envoyées par les filiales aux collèges d'anciens. Ce à quoi Steward répond en citant une lettre envoyée par la filiale d'Australie en 1998 aux collèges d'anciens concernant la "confidentialité" des affaires de pédophilie ainsi qu'une autre lettre du collège central envoyée dans le même temps pour apporter d'autres détails (concernant la mention de cette lettre dans une réunion de la congrégation). Cela tend à prouver que le collège central est impliqué dans les décisions prises par les filiales.

La question de l'interprétation biblique A partir de la 39ème minute, le sujet de l'interprétation biblique du collège central est abordé. Steward met en évidence les changements de doctrine au fil des années, par exemple concernant l'usage du sang (les fractions sanguines). Jackson répond que les techniques relatives aux fractions sanguines sont assez récentes et qu'il s'agit d'une volonté du collège central de ne pas aller "au delà de l'écriture". La volonté exprimée par Steward est de démontrer que l'interprétation biblique du collège central peut être adaptée en fonction des époques. Jackson répond que c'est le cas sur des points mineurs. Le juge prend ensuite la parole (44ème min) pour signaler que les règles sociales et politiques ont évolué au cours des dernières années, particulièrement en matière d'abus sexuels sur mineurs. Ce à quoi Jackson répond que les publications des Témoins sont à jour sur les conseils et règles en rapport avec la pédophilie. Le juge prend ensuite 1 Timothée 3:4 à propos de "tenir les enfants dans la soumission" puis Éphésiens 6:4 sur la "discipline de Jéhovah" et Proverbes 13:24 sur le "bâton de la discipline" et demande à Jackson ce qu'il en pense. Celui-ci affirme que bien qu'il soit possible que la punition corporelle ait été le premier sens de ces versets, ce n'est plus le cas actuellement. Finalement le juge en vient à la conclusion que le collège central interprète bien la Bible en fonction du contexte social de notre époque. Vient ensuite la question du juge "Est-ce que votre église accepte la punition corporelle ?". Réponse évasive de Jackson, la question est posée une deuxième fois. Nouvelle réponse évasive. Le juge pose une troisième fois la question. Jackson répond que l'organisation n'accepte pas la punition corporelle sur les enfants. "L'interdisez-vous ?" Jackson répond que les publications encouragent la discipline par l'enseignement.

La place des femmes dans l'organisation des Témoins de Jéhovah Vient ensuite le sujet de la place des femmes dans l'organisation (51ème minute). Le juge souligne le fait que la société actuelle place désormais la femme à la même place que les hommes. Il met ensuite en évidence les cas d'abus sexuels au sein de l'organisation. Dans le cas des victimes féminines, le fait de témoigner devant un comité judiciaire uniquement composé d'hommes peut être traumatisant. "Est-ce que l'organisation est disposée à changer sur ce point ?". Ce à quoi Jackson répond, références bibliques à l'appui, que les femmes ne pourront jamais être "ancien" dans les congrégations tout en soulignant qu'elles ne sont pas considérées comme des "citoyennes de seconde zone". Il prend l'exemple d'un pilote et d'un copilote ce à quoi le juge répond qu'à notre époque, les femmes aussi peuvent être pilotes, la société ayant évolué sur ce point. A la 56ème minute Steward reprend la parole pour développer l'idée qu'il peut être traumatisant pour une victime féminine de comparaître devant un comité d'hommes afin de raconter et de détailler ce qu'il s'est produit lors de son

Page 14: 108 - Le point de bascule émotionnel de la religion à la secte

14

agression, d'autant plus si son agresseur est également présent lors du comité. Jackson reconnaît qu'il s'agit là d'une question difficile et qu'il n'est pas la personne la plus qualifiée pour répondre à ce genre de questions. Steward demande ensuite si les Témoins de Jéhovah seraient prêts à faire évoluer leurs règles pour interdire clairement la réunion de l'agresseur et de sa victime lors du même comité judiciaire. Jackson répond que oui ("absolutely", 59ème minute). Steward revient ensuite sur la dépendance des filiales au collège central concernant l'évolution des règles de gestion des cas d'abus sexuels. Là encore Jackson répond qu'il n'est pas capable de répondre sur ces points. Steward demande à Jackson ce qui se passerait si la filiale d'Australie était encouragée par le gouvernement à changer ses règles pour inclure les femmes dans le processus judiciaire, est-ce que le collège central approuverait ? Jackson répond que la filiale d'Australie devrait d'abord en parler au collège central afin qu'il puisse approuver cette décision et la rendre identique pour toutes les filiales. Steward demande alors ce qu'il se passerait si la filiale de Nouvelle-Zélande ou la filiale des Philippines par exemple voyait les choses autrement ? Est-il possible d'avoir des standards différents selon les pays ? La réponse de Jackson est oui (1h02). Le juge reprend ensuite la parole pour revenir sur la présence souhaitable des femmes dans le processus d'enquête lors d'un abus sexuel chez les Témoins. "Y a-t-il une interdiction biblique sur ce point ?" Jackson répond que ce n'est pas le cas. "Y a-t-il une interdiction biblique au sujet de la présence de femmes dans les comités judiciaires ?". Jackson répond que c'est une bonne question mais que le rôle de "juges" chez les Témoins de Jéhovah revient aux anciens, des hommes. Lorsque le juge lui demande les références bibliques appuyant la règle des juges exclusivement masculins, Jackson cite 1 Timothée 3:1-3 (les surveillants / anciens) mais est incapable de citer un verset à propos des juges exclusivement masculins. Le juge essaie ensuite de faire comprendre à Jackson que la présence de femmes lors du processus d'enquête pourrait être une évolution souhaitable dans les règles des Témoins de Jéhovah. Après une longue discussion sur ce sujet, la question clairement posée à Jackson est la suivante (1h15'30") : "Pourriez-vous avoir une structure dans laquelle la décision judiciaire de la véracité ou non des allégations pourrait être tranchée par un comité incluant des femmes, la décision de l'excommunication ou non revenant aux anciens seuls ?" "Est-il possible de faire ce changement ?" Jackson répond à côté de la question. La question lui est donc posée à nouveau. Nouvelle réponse évasive de Jackson, on lui demande de répondre à la question. Nouvelle réponse évasive, on lui repose la question (1h18). Jackson s'excuse et affirme qu'il y a une possibilité pour le collège central de considérer cette question. "Pourriez-vous avoir une structure dans laquelle la décision judiciaire de la véracité ou non des allégations pourrait être tranchée par un comité incluant des femmes, la décision de l'excommunication ou non revenant aux anciens seuls ?" Jackson : "Une telle situation vaudrait la peine que l'on s'y intéresse, que l'on fasse des recherches et que l'on vérifie les Écritures oui. La possibilité de considérer ce point existe." Steward reprend la parole (1h19) pour mettre l'accent sur la règle des deux témoins évoquée dans le livre des anciens pages 71 et 72. "Qui décide que le péché ("wrongdoing") est établi ?" Jackson répond que ce sont deux anciens qui décident cela après quoi un comité judiciaire est formé. "Est-il nécessaire bibliquement que ce rôle soit joué par deux anciens, plutôt que, par exemple, par une femme nommée par eux ?" Jackson répond à côté de la question, nouvelle tentative de Steward demandant une référence biblique sur ce point. Jackson cite 1 Corinthiens 11:3 ("le chef de la femme c'est l'homme"). Steward demande ensuite à Jackson de considérer 1 Corinthiens 14:33-35 ("que les femmes se taisent dans les congrégations") et constate que ce verset n'est pas appliqué par les Témoins de Jéhovah puisque les femmes sont autorisées à parler dans leurs congrégations. Jackson répond en expliquant que ce texte doit être remis dans son contexte (verset 28) et qu'une interprétation littérale de ces versets n'est pas appropriée dans ce contexte. Steward demande ensuite à Jackson (1h28) comment se fait le choix entre l'interprétation littérale d'un texte et l'interprétation selon le contexte. Après être longuement revenu sur l'explication biblique à propos de la place des femmes dans la congrégation (1 Timothée 2:11, 12 et 1 Pierre 3:1), Jackson veut démontrer que la Bible doit être considérée comme un ensemble ("la Bible explique la Bible").

Le report des cas de pédophilie aux autorités M. Steward enchaîne avec la pratique relative au signalement des cas de pédophilie aux autorités du pays (1h32). "Y a-t-il une base biblique à ce règlement voulant que les cas de pédophilie ne soient pas signalés aux autorités sauf si ces dernières le demandent explicitement ?". Jackson répond que ce serait plus facile pour l'organisation que les pays rendent obligatoire ces signalements. En effet, selon lui, dans la situation actuelle les anciens sont dans une situation de "dilemme spirituel" entre respecter la confidentialité des confessions et accusations (Proverbes 25:8-10) et ne pas s'ingérer dans ces affaires pour ne pas "commander en maître" et influencer les personnes dans ce domaine pour respecter les droits de l'accusé (1 Pierre 5:2, 3). Steward prend l'exemple d'une enfant qui signale aux anciens qu'elle est abusée par son père. "Le respect de la confidentialité est-il plus important que la protection de cet enfant et de ses frères et sœurs ?". Jackson répond vaguement que ce n'est pas le cas et que dans ce cas les anciens devraient encourager les autres membres de la famille responsables de l'enfant à alerter les autorités. "Serait-il bibliquement possible pour les Témoins de Jéhovah d'adopter un règlement spécifiant que dans le cas ou d'autres personnes (que la victime) sont potentiellement en danger un signalement soit fait aux autorités ?". Réponse de Jackson : "C'est une chose que nous pouvons considérer" ce à quoi il rappelle que la conscience des anciens devrait dans ce genre de situation les pousser à reporter le cas aux autorités. Il déclare également pour la troisième fois qu'une obligation légale provenant des autorités du pays rendrait la situation plus simple.

Page 15: 108 - Le point de bascule émotionnel de la religion à la secte

15

"Serait-il bibliquement possible pour les Témoins de Jéhovah d'adopter un règlement spécifiant que dans le cas ou d'autres personnes (que la victime) sont potentiellement en danger un signalement soit fait aux autorités ?" Jackson : "C'est une chose que nous pouvons considérer"

La règle des deux Témoins Steward enchaîne avec le sujet de la "règle des deux témoins" (1h39) qui veut qu'en l'absence de confession deux témoins soient obligatoires pour établir la réalité d'un mauvais agissement conduisant à un comité judiciaire. Il demande à Jackson les références bibliques à ce sujet. Ce à quoi Jackson répond volontiers en citant Matthieu 18:16 ("pour que sur le dire de deux ou trois témoins toute affaire soit établie") mais il nuance en rappelant que ce n'est pas parce qu'il n'y a qu'un seul témoin que le "suspect" est totalement blanchi. Lorsque Steward demande des précisions sur ce point Jackson répond que le témoignage des enfants est pris très au sérieux et que dans ce cas les anciens prendront des mesures de protection à son égard. "Est-ce que c'est ce que les anciens du monde entier sont censés faire ?" "Ils le devraient car les principes chrétiens indiquent que si ils se rendent compte qu'un enfant est dans une situation dangereuse une action devrait être décidée". Steward revient ensuite sur le texte de Matthieu et montre que Jésus reprend ici une loi mosaïque que l'on retrouve en Deutéronome 19:15 (1h43). "Pourquoi appliquer cette règle aux agressions sexuelles quand manifestement dans la Bible ce n'est pas le cas ?". Jackson répond qu'il s'agit d'un principe et que la congrégation chrétienne impose une pureté en son sein. Steward demande ensuite à prendre Deutéronome 22:23-27 (un homme qui couche avec une vierge fiancée, les deux lapidés si la fille n'a pas crié...). Il signale à Jackson que dans ce cas deux témoins ne sont pas requis pour juger de la culpabilité de ces personnes. Jackson est mis en difficulté et déclare maintenant que la règle des deux témoins dépend des circonstances. Steward insiste en demandant si Jésus, dans le cas d'une agression sexuelle n'aurait pas pu faire référence à cette loi ? Jackson avoue qu'il n'a pas de réponse à cette question. "Y a-t-il une base biblique à maintenir de manière rigide la règle des deux témoins ou le collège central peut-il reconnaître qu'il y a de la place pour un aménagement dans le cas des agressions sexuelles ?" (1h49) Jackson affirme vaguement que les circonstances peuvent parfois faire office de second témoin. Steward insiste et Jackson répond que cette règle est bibliquement fondée dans le cas des agressions sexuelles. Steward met ensuite en évidence le fait que dans le cas d'un adultère il n'y a pas forcément besoin de deux témoins de l'acte en lui-même pour établir le péché (référence au livre des anciens page 61 §11) mais que les circonstances (un homme et une femme passant la nuit seuls ensemble) peuvent faire office de preuve. "Cela ne pourrait-il pas être appliqué dans le cas des abus sexuels sur enfants ?". "C'est une chose que l'on aurait besoin de considérer attentivement", répond Jackson. Steward insiste pour que la règle des deux témoins en cas de pédophilie ne soit pas restreinte aux témoins de l'acte en lui-même mais que les circonstances soient prises en compte pour appuyer le témoignage. Par exemple le traumatisme évident de la victime devrait être considéré comme une preuve. Jackson acquiesce et montre sa volonté de coopérer avec la Commission sur ce point. "Y a-t-il une base biblique à maintenir de manière rigide la règle des deux témoins ou le collège central peut-il reconnaître qu'il y a de la place pour un aménagement dans le cas des agressions sexuelles ? (...)" Jackson : "C'est une chose que l'on aurait besoin de considérer attentivement"

-Deuxième partie

L'excommunication et la liberté de religion Cette deuxième partie est intéressante car elle entre dans les détails de la politique d'excommunication / dissociation. L'avocat A. Steward essaie de comprendre comment un membre de l'organisation peut officiellement ne plus être considéré comme Témoin de Jéhovah sans perdre tous ses amis et sa famille Témoins. G. Jackson essaie de montrer qu'un Témoin est tout à fait libre de cesser de prêcher et d'aller aux réunions (devenir "inactif"). Toutefois lorsque Steward, se référant au manuel "Organisés pour faire la volonté de Jéhovah", insiste à plusieurs reprises et lui demande si cette personne est toujours soumise aux règles de l'organisation (7ème min) la réponse de Jackson est étonnamment évasive (selon lui un inactif qui fête Noël ou un anniversaire ne subira pas forcément de comité judiciaire alors que le livre des anciens affirme le contraire). La question devra lui être posée plusieurs fois et de plusieurs manières différentes pour qu'il reconnaisse enfin, au bout de plus de 15 minutes passées à tourner autour de la question, qu'une personne "inactive" est toujours soumise aux règles de l'organisation et qu'à ce titre elle est considérée comme Témoin et peut toujours être excommuniée. Steward mentionne ensuite le fait qu'un excommunié ou un Témoin qui quitte l'organisation de manière formelle perd toute sa famille et ses amis Témoins. Là encore Jackson est très mal à l'aise avec cette question et ne répond pas clairement aux questions. Steward cite le cas d'une victime d'abus sexuel qui souhaite quitter l'organisation. Dans ce cas la perte des relations avec sa famille ou ses amis toujours témoins peut être dévastatrice. "Acceptez-vous que mettre les gens devant ce choix est contraire à la croyance des Témoins de Jéhovah en la liberté de religion ?" Jackson n'est pas d'accord mais "comprend qu'on puisse avoir cette opinion" (20ème min) puis il insiste sur le fait qu'un Témoin de Jéhovah qui se fait baptiser n'est pas forcé à le faire et qu'il n'est pas non plus forcé à rester Témoin de Jéhovah. Ce à quoi Steward répond que de nombreux Témoins de Jéhovah se font baptiser très jeunes et qu'ils ne sont pas forcément conscients des conséquences de cette décision sur le reste de leur vie. Jackson répond que dans certains cas les jeunes sont suffisamment matures pour prendre cette décision et que beaucoup restent fidèles à cet

Page 16: 108 - Le point de bascule émotionnel de la religion à la secte

16

engagement. Steward affirme que certains le font peut-être par crainte de perdre tout leur entourage s’ils quittent l'organisation. Jackson répond que "tout est possible" (22ème min). A propos de l'excommunication : "Acceptez-vous que mettre les gens devant ce choix est contraire à la croyance des Témoins de Jéhovah en la liberté de religion ?" Jackson : "Non je n'accepte pas cela (...) mais je comprends que vous ayez cette opinion" "Acceptez-vous que mettre les gens devant un tel choix fait apparaître votre organisation, sous de nombreux aspects, comme une organisation captive ?" Jackson : "Je n'accepte pas cela du tout" "Y a-t-il une base biblique sur laquelle vous voyez une évolution possible de votre organisation sur ce règlement ?" Jackson : "Non" Steward revient ensuite sur le cas d'un Témoin qui voudrait changer de religion. Celui-ci serait confronté aux conséquences néfastes de l'excommunication. L'avocat affirme à nouveau que cela "est contraire à la croyance des Témoins de Jéhovah en rapport avec la liberté de religion". Jackson nie. "Acceptez-vous que mettre les gens devant un tel choix fait apparaître votre organisation, sous de nombreux aspects, comme une organisation captive ?». A nouveau Jackson nie. "Y a-t-il une base biblique sur laquelle vous voyez une évolution possible de votre organisation sur ce règlement ?". La réponse est non (25ème min).

Les "mensonges d'apostats" Dans cette partie Geoffrey Jackson reconnaît aussi (25ème min) que les problèmes de pédophilie dans l'organisation, contrairement à ce qu'affirmait Stephen Lett il y a quelques mois sont une réalité et ne sont pas des "mensonges d'apostats" (27ème min, voir également cet article de presse (anglais)). Le sujet des excuses et des compensations financières auprès des victimes a ensuite été soulevé (29ème min). Jackson a affirmé la possibilité de ces choses mais il a refusé de confirmer quoi que soit puisqu'il doit avant tout en parler aux autres membres du collège central. S'en suit une discussion avec le juge sur l'aide apportée par l'organisation aux victimes (33ème min). Jackson met l'accent sur l'aide "spirituelle". Il répète également dans cette discussion que la déclaration des cas de pédophilie aux autorités dépend de la "conscience des anciens". A partir de la 40ème minute des questions relatives à des cas précis de pédophilie en Australie lui sont posées mais, n'ayant pas eu le temps de considérer le dossier, il n'apporte pas de réponses particulièrement intéressantes. Conclusion Cette audition de Geoffrey Jackson, membre du collège central des Témoins de Jéhovah, s'est révélée très instructive. Si M. Jackson s'est montré ferme sur certains points tels que les femmes nommées anciens ou les règles d'excommunication, il s'est montré prêt à coopérer avec la Commission Royale pour faire évoluer certaines règles dans la gestion des cas de pédophilie au sein de l'organisation. Citons par exemple l'implication de femmes dans le processus d'enquête, la déclaration systématique aux autorités des cas "suspects" ou encore la règle des "deux témoins". Ces paroles resteront-elles lettre morte ou seront-elle bientôt suivies d'effets dans les congrégations ? L'avenir le dira. En attendant, il y a un bon espoir pour les victimes de se voir prochainement dédommagées financièrement, peut-être même auront-elles droit à des excuses officielles de la part de l'organisation. Même si Jackson n'a pas voulu confirmer ces points, il ne fait aucun doute que la Commission se battra pour défendre au mieux ces victimes. Malheureusement il y a fort à parier que l'immense majorité des Témoins de Jéhovah n'entendront jamais parler de cette audition, ni de cette enquête en cours. Pour beaucoup en effet, les affaires de pédophilie dans leur organisation resteront des accusations mensongères et des idées néfastes répandues par les media et les apostats manipulés par Satan. On peut cependant espérer que la multiplication de ces affaires dans de nombreux pays obligera le collège central à communiquer sur ces sujets au moyen de lettres envoyées aux congrégations ou par l'intermédiaire de leur site de vidéo broadcasting. Mais peut-être suis-je en train de rêver éveillé... Pour tous les non-Témoins, cette Commission est une opportunité "royale" d'exposer au grand jour les dirigeants et surtout certaines pratiques très discutables des Témoins de Jéhovah, telles que les secrets "comités judiciaires" ou encore les règles d'excommunication, contraires au principe de liberté de religion. Paradoxalement, c'est un principe que les Témoins de Jéhovah sont souvent prompts à défendre quand cela va dans leur sens.

Source : http://jw-verite.org/actualite-des-temoins-de-jehovah/80-commission-royale-australie-college-central-temoins-de-jehovah-pedophilie.html

Page 17: 108 - Le point de bascule émotionnel de la religion à la secte

17

3) BIBLIOGRAPHIE

Sortie du livre "Histoire insolite et secrète des Témoins de Jéhovah"

Après Adieu Les Dettes, paru en octobre 2014, l'auteur de ce site, Alexandre Cauchois, vous propose de découvrir l'histoire mouvementée, voir chaotique, des Témoins de Jéhovah.

L’adepte, on lui a appris, rabâché que le fondateur

des Témoins de Jéhovah, un certain Charles Taze

Russell, a vendu ses entreprises pour donner sa

vie à Dieu. Pourtant à sa mort il était propriétaire

de sociétés dans le pétrole, la construction,

l'immobilier, les cimetières, etc. Il ignore que cet

homme est une personnalité qui a compté dans la

création d'Israël, qu'il était Franc-maçon, qu'il a

été condamné pour escroquerie plusieurs fois

(dont en 1914, année où Dieu devait détruire tous

les non-fidèles)... Et si Russell était pro-Sionisme,

le fidèle ignore généralement que son

successeur, Rutherford, a tenté un pacte

incroyable avec Hitler, à travers la filiale

allemande. Le texte de ce courrier, comme de

nombreux autres, est lisible dans le livre Histoire

Insolite et Secrète des Témoins de Jéhovah...

L'adepte ignore également que les 2 premiers

présidents du mouvement étaient

particulièrement racistes, ce que l'on retrouve

pourtant dans les écrits originaux en plusieurs endroits.

Bref, le Témoin de Jéhovah que vous rencontrez ignore beaucoup de choses, croyant aveuglément

ce que son culte lui dit de croire. En 200 pages, j'ai condensé 564 événements qui ont fait le mouvement

actuel. Il y a ainsi pas moins de 53 prophéties citées, des preuves de l'appartenance de Russell à la franc-

maçonnerie, des dossiers également la pédophilie. Ce livre, j'aurais aimé qu'il m'ait été offert alors que

j'étais moi-même Témoin de Jéhovah, il y a 14 ans. Il m'aurait alors complètement ouvert les yeux.

Si vous êtes sur Le Havre, nous pouvons nous retrouver pour en discuter ensemble ou vous

permettre d'acquérir le livre, en me contactant au 06 62 01 65 80 - [email protected]

Page 18: 108 - Le point de bascule émotionnel de la religion à la secte

18

Parution : 10 Septembre 2015 Format : 135 x 215 mm Nombre de pages : 270 Prix : 18,00 € ISBN : 2-221-15680-3

MANUEL D’AUTODÉFENSE INTELLECTUELLE Sophie MAZET

Comment préparer nos esprits, et plus encore ceux des jeunes générations, à lutter contre toutes les formes d'endoctrinement ? En commençant par penser par nous-mêmes, ainsi que le préconise avec humour ce Manuel d'autodéfense intellectuelle.

Jeune enseignante, Sophie Mazet a dû se fabriquer un profil « tout-terrain » pour faire face au niveau très variable des élèves de son lycée de ZEP (qui va de la classe de « remobilisation » − composée d'adolescents sortis du système scolaire − à l'hypokhâgne). Très vite, elle se trouve confrontée à des jeunes gens capables de croire sans réserve aux informations les plus farfelues, voire les plus effroyables. L'actualité récente l'a souligné, on ne peut compter uniquement sur l'école pour former des citoyens éclairés et, face à la complexité du monde, des repères sont plus que jamais nécessaires. En 2011, puisant son inspiration dans une déclaration du célèbre linguiste Noam Chomsky, selon lequel un « cours d'autodéfense intellectuelle devrait être obligatoire dans tout système d'éducation qui se respecte », elle se lance et invite les élèves de son lycée à s'initier avec elle à l'« esprit critique ». Le cours est un succès qui déborde les frontières de l'établissement. Des intellectuels tels que Tzvetan Todorov, Caroline Fourest, Abdelwahab Meddeb et Catherine Kintzler acceptent d'y participer. France Inter lui consacre une émission. Son adaptation sous forme de livre grand public s'impose alors naturellement. Composé de neuf chapitres thématiques, assortis d'une « alerte paranoïa » et d'une « boîte à outils », ce manuel propose d'apprendre à décrypter toutes les formes de discours dont la visée est trop souvent de nous manipuler : qu'il s'agisse du discours politique ou du discours publicitaire, en passant par le discours conspirationniste, des séries télé, des pseudo-sciences ou des extrémistes de tout poil. Original, drôle, accessible et intelligent, cet ouvrage à l'usage des jeunes générations est aussi un formidable outil pédagogique destiné aux adultes, parents ou enseignants qui souhaitent combattre efficacement propagande, langue de bois, intox, raccourcis, amalgames, fausses rumeurs et psychoses en tout genre.

http://www.laffont.fr/site/manuel_d_autodefense_intellectuelle_&100&9782221156803.html

Née en 1980 dans le sud de la France, Sophie Mazet a fait ses classes préparatoires littéraires à Toulouse avant d'intégrer l'École normale supérieure de Cachan. Agrégée d'anglais, elle choisit de se consacrer à l'enseignement secondaire et donne des cours depuis 2007dans un lycée de Seine-Saint-Denis classé ZEP. Le 8 mars 2015, le ministère de l'Éducation nationale salue la création de ce « cours d'autodéfense intellectuelle » et lui remet les Palmes académiques.

Page 19: 108 - Le point de bascule émotionnel de la religion à la secte

19

Association des victimes de l’islam radical et de pratiques anachroniques

TURQUOISE FREEDOM

Cette association a pour but de faire de la prévention, de la formation, de l’information, accueillir, assister en toute confidentialité et promouvoir la cause des personnes morales et physiques confrontées ou victimes des dérives sectaires ou autres liées au radicalisme islamique ou à des pratiques coutumières anachroniques et dommageables. L’association est laïque, humaniste et politiquement neutre et s’interdit de faire la promotion directe ou indirecte d’un parti politique et de toute religion ou croyance qu’elle aborde de manière rationnelle. Cette association a une vocation internationale. L’association est neutre politiquement et religieusement. Les membres de cette association sont tenus à cette même neutralité dans le cadre de l’association. http://victim-islam-radical.monsite-orange.fr/

Accueil sur rendez-vous à Marseille - Contact: 07 83 69 08 13 - [email protected] Adresse postale : Turquoise Freedom 35, rue Saint-Sébastien 13006 Marseille

Page 20: 108 - Le point de bascule émotionnel de la religion à la secte

20

Les textes des conférences seront publiés dans les prochains bulletins du GEMPPI (Voir conditions d’abonnement ci-dessous)

ABONNEMENT AU TRIMESTRIEL DU GEMPPI

« Découvertes sur les sectes et religions » Le bulletin du GEMPPI contre un abonnement participatif (frais de port inclus) de 10 € sur support

papier ou 3 € par Internet. Libellez votre chèque à l’ordre de « GEMPPI » en joignant vos coordonnées à :

GEMPPI BP 30095 13192 Marseille Cedex 20 Tel. 04 91 08 72 22 - 06 98 02 57 03 - [email protected] - www.gemppi.org

ADHESIONS AU GEMPPI Bienfaiteur : à partir de 30 € - Soutien : à partir de 16 € - Sympathisant : à partir de 3 €

Membre actif : 10 € (Prendre contact avec nous, possibilité de participer à nos activités)