Post on 04-Jul-2015
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LE BARRAGE DE ZIGA : L’EAU POTABLE POUR TOUS ?
Comment la construction du barrage de Ziga a constitué une révolution dans le domaine de la gestion de
l’eau ? Quels en ont été les effets sur la vie quotidienne des ouagalais ?
LE CONTEXTE : Les besoins et les ressources
Afin de juger les conditions d’accès à la ressource en eau, un indicateur
hydrique a été mis en place par les autorités. Ce dernier se définit par le rapport
entre la ressource en eau du pays et sa population. Au Burkina Faso, il était en
1996 de 1683 m3/hab pour une population de 10,4 millions or d’après les
prévisions de forte croissance démographique que connaît le pays, il sera
environ diminué de moitié en 2025 pour environ 20 millions d’habitants,
dépassant alors largement le seuil hautement critique de rareté de 1000m3/hab .
Même si des problèmes de pénurie d’eau se posent et se sont posés auparavant
– plus gravement qu’aujourd’hui - la région de la capitale ne manque pas de
ressources en eau mais avant tout d’infrastructures. En effet, cette région
compte plusieurs grands lacs, et une nappe phréatique importante. Mais
comme souvent en Afrique subsaharienne, c’est l’accès à l'eau qui pose
problème.
Les besoins en croissance à cause de la croissance démographique et de
l’industrialisation sont donc avant tout des besoins en infrastructures, et pour
l’instant il n’y a pas directement de pression sur la ressource.
AVANT ZIGA Rappelons le contexte historique : en 1947, les français
reprennent le contrôle du territoire burkinabè, alors appelé
Haute-Volta. La reconstitution par les français de leur
ancienne colonie s’accompagne d’un changement de
capitale : Bobo-Dioulasso est écartée en faveur de
Ouagadougou. Cela profite grandement à Ouagadougou,
qui connait une nouvelle vie : plus de crédits, plus de
travail, plus d’activité ; et donc une démographie qui
explose.
Afin de fournir en eau cette population en pleine
croissance, les marigots situés au nord de la ville sont
transformés et utilisés comme réservoirs d’eau potable.
De plus, les autorités investissent dans un réseau
d’adduction de l’eau (réseau de distribution, de stockage
intermédiaire, pompage, etc) qui continue aujourd’hui à
servir.
On se retrouve ainsi, jusque dans les années 90 avec un
système de réservoirs en cascade : différentes retenues
et réservoirs sont aménagés et utilisés afin d’alimenter la
ville. Cependant plusieurs problèmes se posent : les
habitations s’avancent jusqu’aux réservoirs, qui sont
utilisés afin de pêcher, de se laver, ou tout autres
utilisations domestiques.
L’eau est donc extrêmement polluée, voire contaminée,
de manière bien visible (déchets charriés par les canaux).
Certains bassins s’étendent jusqu’en pleine ville, ce qui
provoque des inondations en période de crue, que la
construction de canaux de détournement n’empêche que
partiellement. De plus, ces réservoirs s’assèchent chaque
année pendant la saison sèche, à cause de l’évaporation et
du tirage intensif de l’eau tout au long de l’année.
Au niveau des infrastructures importantes, citons la retenue
de Loumbila, créée en 1947, encore aujourd’hui le
principal support en eau de la région, qui communique
avec la station de Paspanga puis le réseau de distribution.
Après des travaux en 1970, sa capacité de stockage a été
poussée à 36 millions de m3, pour une superficie de 17
km2 et une profondeur moyenne de 2m.
D’autres aménagements, impliquant des barrages sur le
Nakambé, ont été mis en place, mais les capacités
disponibles sont faibles.
C’est pour toutes ces raisons, ces limites, que le projet
Ziga a été mis en place et que les autres projets ont été
abandonnés : l’amélioration des installations existantes
ou le forage profond n’étant pas viable à long terme.
LA « REVOLUTION ZIGA »
200 millions de m3 d’eau
une station de traitement de 4500 m3/h
8 châteaux d’eau de 2000 m3
149,7 milliards de FCFA (230 millions d’euros)
« L’arrivée de l’eau de Ziga
constitue un moment
historique important pour
Ouagadougou dans son
processus d’urbanisation » (Simon Kompaoré, maire de
Ouagadougou)
LA SITUATION HYDRIQUE, SIX ANS APRES : QUELLES
CONSEQUENCES POUR LA VIE ET LA SOCIETE ?
Les travaux pour le barrage de Ziga ont commencé en 1998, et se sont achevés en 2004 avec l’ouverture des vannes. Cela a
constitué une révolution, au moins technique, mais comment cela s’est-il ressenti dans la vie quotidienne, les pratiques des ouagalais?
L’objectif principal de l’ONEA, l’entreprise qui gère les ressources en eau de la région est l’approvisionnement en eau du plus grand
nombre des ouagalais. Le barrage de Ziga les a amené a revoir complétement leur politique de distribution. Une part importante de ses
objectifs concerne les quartiers extrêmement pauvres, et c’est donc tout d’abord ces zones qui ont été privilégiées lors de la
constitution du nouveau système de distribution. A la suite d’une étude sur les solutions d’amélioration des conditions de vie réalisée
en 2005 par la ville de Ouagadougou, les autorités locales, main dans la main avec l’ONEA, ont donc décidé de se concentrer sur cinq
quartiers périphériques non alimentés en eau potable.
La solution retenue par l’ONEA a été l’installation d’un réseau de fontaines (photo à droite). Le critère actuel d’accessibilité à
l’eau potable est la présence d’un point d’approvisionnement à moins d’un kilomètre du foyer. Ce critère peut sembler modeste
mais étant donné la pauvreté et le dénuement extrême des zones concernés, il constitue un premier objectif dont les conséquences sont
déjà très bénéfiques pour les habitants.
Mais L’ONEA cherche en parallèle à développer son réseau d’eau courante, à destination des classes plus aisées, par des mesures
incitatives. Ainsi, après la livraison du barrage de Ziga, pas moins de 50 000 branchements promotionnels ont été réalisés. Ce marché
est encore très restreint toutefois, avec seulement 355 abonnés en 2009 !
Nous sommes donc arrivés à une situation où l’ONEA a établi des politiques de distributions très différentes entres les quartiers
riches et pauvres, ceci afin de réduire les inégalités d’accès à l’eau entre riches et pauvres, et avant tout de résoudre les énormes
problèmes de pénurie, et de maladie, en particulier infantile, due à une eau polluée. En parallèle, des efforts très importants sont
fournis par les autorités afin d’assainir ces quartiers.
Notons que la politique tarifaire de l’ONEA, qui peut parfois sembler contestable, vu l’effet de seuil des 1km, est harmonisée,
parfois détournée par les habitants eux-mêmes. Ainsi certains Ouagalais se font de l’argent en achetant dans les quartiers très
pauvres et en revendant dans d’autres quartiers moins pauvres.
Pour aller plus loin, une suggestion de bibliographie :
• Gleick P.H., 1998 - The Human right to water. Water Policy.
• P. Cecchi, L’alimentation en eau de la ville de Ouagadougou
• oneabf.com (site très complet de l’ONEA)
Lia SIEGELMAN, Alexandre COMBESSIE, Adrien MAZEAU
Source :The human right to water
Nous tenons à remercier les techniciens de l’ONEA pour leur temps,
leur compétence et leur explications.
Nous remercions également M. El Allame pour l’usage de ses
photographies
Source : Google Maps
Distribution de l’eau potable – Document interne de
l’ONEA