Post on 29-Aug-2020
Philipp Henschel et Justina Ray
WCS Global Carnivore ProgramNovembre 2003
Léopardsdans lesforêtspluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
Léopardsdans lesforêtspluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
Léopards dans les forêts pluviales d’Afrique : méthodes de relevé et de surveillance
Photographies des couvertures avant et arrière ã Michael Nichols, National GeographicSocietySauf mention contraire, toutes les autres photographies ã Philipp Henschel
Pour obtenir des exemplaires de ce rapport, faites parvenir un message par courrierélectronique à jray@wcs.org ou visitez le site Web du WCS Global Carnivore Program àl’adresse suivante :www.savingwildplaces.com/swp-globalcarnivore
ou encore le Portail pour l’Ecologie et la Conservation des Carnivores :www.carnivoreconservation.org/largecatsurvey
Philipp Henschel, M.Sc.Principal Investigator, Forest Leopard StudyWildlife Conservation Society GabonStation d’Études des Gorilles et ChimpanzésB.P. 7847, Libreville, Gabon
Justina C. Ray, Ph.D.Associate Conservation ZoologistWildlife Conservation Society Canada et Global Carnivore ProgramFaculté de foresterie, Université de Toronto33, rue WillcocksToronto, Ontario, Canada M5S 3B3
1
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
Table des matières
Résumé
1. Pourquoi faut-il s’inquiéter du sort des léopards des forêts d’Afrique?
2. Objectifs de ce guide
3. Définition des objectifs du relevé
4. Brève introduction aux considérations en matière d’échantillonnage
5. Types de relevés5.1 Relevés ponctuels de présence ou d’absence
5.2 Relevés systématiques de présence ou d’absence
5.3 Abondance relative
i. Utilisation d’indices servant à estimer l’abondance relative
ii. Surveillance
5.4 Densité de population
Encadré 5A. Reconnaissance des signes indiquant la présence de léopards
Encadré 5B. Modèle de relevé ponctuel de présence et d’absence
6. Techniques de relevé permettant l’identification de léopardsindividuels
6.1 Emprintes
6.2 Génotypage des excréments et des poils
6.3 Photographie à distance (piégeage photographique)
Encadré 6A. Consignation et mesure d’empreintes de léopard
Encadré 6B. Prélèvement d’échantillons d’ADN des excréments
7. Analyse exhaustive du piégeage photographique comme méthoded’estimation de l’abondance des léopards7.1 Considérations de plans d’échantillonnage
i. Limites de la zone d’étude
ii. Nombre et emplacement des pièges
iii. Nombre d’occasions d’utiliser des modèles de capture et de recapture
iv. Adaptation du taux d’échantillonnage aux taux réels de capture deléopards sur le terrain
7.2 Quel piège photographique choisir : TrailMaster ou CamTrakker?
i. L’appareil de surveillance active des sentiers TrailMaster (TM)
ii. L’appareil de surveillance passive des sentiers CamTrakker (CT)
iii. Analyse comparative du TrailMaster et du CamTrakker
iv. Autres options
3
4
6
8
10
12
25
12
14
16
16
18
19
12
14
25
25
26
28
20
20
22
24
21
23
28
31
31
32
32
34
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
2
7.3 Installation et programmation des unités
i. Mise sous tension de l’appareil photo
ii. Délai de photographie séquentielle programmé
iii. Nombre d’appareils photos par poste
iv. Hauteur adéquate et distance appropriée du sentier
v. Facteurs établissant l’intervalle de vérification
vi. Utilisation d’appâts
7.4 Enregistrement de données
7.5 Identification de léopards individuels à partir de photographies
7.6 Analyse de données
i. Logiciel CAPTURE
ii. Élaboration d’un historique de capture de chaque léopard individuel
iii. Choix du modèle
iv. Calcul de la densité de population
7.7 Utilisation de pièges photographiques dans l’étude d’autres espèces
i. Carnivores plus petits
ii. Autres espèces
iii. Présence ou absence et abondance relative
Encadré 7A. Répercussions possibles du type de chemin ou de sentier sur laprobabilité de capture de léopards : résultats obtenus de l’étude menée auGabon
Encadré 7B. Mise à l’essai comparative des appareils CamTrakker et TrailMaster
Encadré 7C. Relation entre l’activité des léopards et les perturbations humaines
8. Ce que nous réserve l’avenir
Remerciements
Bibliographie
Annexe 1. Sites Web de logiciels d’analyse gratuits
Annexe 2. Sites Web de fournisseurs d’équipements pour piègesphotographiques
35
35
36
37
38
35
39
40
40
42
42
42
43
43
44
44
46
47
48
49
50
55
29
34
35
56
3
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
Résumé
Aucune étude systématique n’a été menée à ce jour sur les léopards des forêts d’Afrique
et ce, en dépit du rôle écologique potentiellement essentiel qu’ils jouent vu leur statut
d’unique grand mammifère prédateur habitant ces écosystèmes. Étant donné que la
rencontre de léopards est un phénomène rare dans cet habitat et vu le recours difficile
aux techniques de relevé courantes pour évaluer l’abondance relative de ces mammifères
forestiers, les données de base sur l’écologie des léopards et leurs réactions aux perturba-
tions humaines dans les forêts d’Afrique demeurent en bonne mesure inconnues.
Le présent guide technique présente l’expérience acquise sur les léopards au terme d’une
étude ayant duré deux années (2001-2002), sous la direction de Philipp Henschel dans la
région Lopé du Gabon, un pays de l’Afrique centrale. Les résultats de cette étude ont été
complétés par l’expérience acquise par Justina Ray suivant son étude des carnivores dans
le sud-ouest de la République centrafricaine et l’est du Congo (Zaïre). Cet effort avait
pour objectif premier d’élaborer un protocole à l’intention des chercheurs sur le terrain
dans l’ouest et le centre de l’Afrique, qui évaluent actuellement la densité de population
des léopards dans divers types de forêts. Pendant la rédaction de ce guide, Henschel a
mis à l’essai plusieurs méthodes indirectes d’évaluation des populations de léopards,
dans les forêts à la fois exploitées et non exploitées. L’effort visait principalement à
mettre à l’essai de nouvelles méthodes de relevé photographique en régions isolées,
lesquelles avaient été mises au point par Karanth dans le cadre de son étude des tigres
(voir Karanth, 1995; Karanth et Nichols, 1998, 2000, 2002). Ces méthodes ont ensuite été
adaptées pour tenir compte des conditions caractéristiques des forêts d’Afrique.
Ce guide résume les résultats des essais menés sur le terrain et formule des recommanda-
tions sur des techniques d’évaluation de la présence ou de l’absence des léopards, leur
abondance relative et leur densité de population dans les forêts d’Afrique. Nous résume-
rons brièvement la pertinence des diverses méthodes en fonction des différents objectifs
de l’étude et approfondirons notamment la méthodologie de relevé photographique des
régions isolées, laquelle a été adaptée de méthodes antérieures tout en tenant compte des
considérations d’échantillonnage propres aux forêts d’Afrique. Enfin, nous présenterons
brièvement l’utilisation de pièges photographiques dans l’étude d’autres mammifères
forestiers. Il est d’abord nécessaire d’élaborer un protocole de relevé pour les léopards
d’Afrique dans le cadre d’un exercice d’évaluation régionale et d’établissement des
priorités pour les léopards des forêts, tout comme dans l’étude des grands carnivores des
forêts de l’Asie et de l’Amérique du Sud.
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
4
I. Pourquoi faut-il s’inquiéter du sortdes léopards des forêts d’Afrique?
La situation des léopards (Panthera pardus) de l’Afrique suscite des débats depuis 1973,
soit l’année où l’espèce a été inscrite pour la première fois à l’annexe I de la CITES.
Depuis, l’on a tenté à plusieurs reprises de statuer sur la situation des léopards en
Afrique du sud du Sahara, principalement par le biais d’entrevues et de questionnaires.
Martin et de Meulenaer (1988) ont mené des entrevues à l’échelle continentale et élaboré
un modèle de population de léopards à partir de techniques de régression linéaire pour
établir une corrélation entre les densités des populations de léopards et les précipitations
annuelles de même que pour prédire les populations de léopards d’un bout à l’autre de
leur aire de distribution en Afrique. Jusqu’à ce jour, cette étude s’est limitée à une tenta-
tive de dénombrer les populations de léopards d’un bout à l’autre du continent, y com-
pris dans les régions forestières du centre et de l’ouest de l’Afrique n’ayant jamais fait
l’objet de relevés.
Ce modèle a prédit de très fortes densités de population dans la forêt pluviale (où la
densité atteint jusqu’à 40 léopards par 100 km2, y compris les jeunes léopards et les
léopards en dispersion) et mené à des prévisions démographiques pour les pays centrafri-
cains largement considérées comme trop élevées (Jackson, 1989; Norton, 1990). Bailey
(1993) et Jenny (1996) entre autres chercheurs ont avancé que la densité relativement
moins élevée des populations de léopards s’explique par le fait que la biomasse de proies
mammaliennes terrestres dans la forêt pluviale est inférieure à celle dans les savanes.
Plus important encore est peut-être le fait que le modèle conçu par Martin et de
Meulenaer ne tenait pas compte des proies sauvages parmi les facteurs pouvant influen-
cer les densités de population de léopards. En conséquence, il est possible que leur
modèle surévalue exagérément les populations de léopards dans des aires telles que la
zone tropicale de l’Afrique où le déclin de l’abondance de la faune forestière s’explique
par une demande locale et commerciale de viande de brousse continuellement à la
hausse (Angelici et al., 1999; Wilkie et al., 2000).
En raison de la vaste répartition géographique des léopards en Afrique et dans une
majorité de l’Asie, le niveau d’inquiétude quant à la survie de l’espèce est considérable-
ment réduit. Contrairement à d’autres grands carnivores d’Afrique dont la survie est
menacée, par exemple les guépards (Acinonyx jubatus) et les lycaons (Lycaon pictus),
les léopards font preuve d’une remarquable capacité d’adaptation à divers habitats et à
diverses proies, et l’on rapporte qu’ils modifient leur comportement lorsque des humains
se trouvent à proximité d’eux (Bailey, 1993). Dans l’est et le sud de l’Afrique, des léo-
pards sont souvent aperçus près ou à l’intérieur de zones urbaines ou très cultivées
(Hamilton, 1986; voir les références dans Nowell et Jackson, 1996), ce qui ne constitue
qu’une preuve additionnelle de la résilience de cette espèce. Par ailleurs, les connaissan-
ces et les données écologiques sur la situation quant à la conservation des léopards sont
5
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
nettement insuffisantes dans de nombreuses parties de leur aire de répartition. Cette
réalité s’applique particulièrement aux forêts d’Afrique, où les connaissances acquises
sont beaucoup plus étendues que celles acquises dans la savane. Le peu de données
empiriques recueillies sur les léopards des forêts laisserait sous-entendre que ce grand
prédateur n’est déjà plus présent dans certaines zones de son ancienne aire de réparti-
tion. Bailey (1993) souligne que, dès 1945, la plupart des léopards avaient déjà été
déracinés de la ceinture forestière côtière de l’ouest de l’Afrique. Jadis, l’aire de réparti-
tion des léopards s’étendait d’un bout à l’autre du Nigeria (Nowell et Jackson, 1996);
toutefois, les relevés de la partie sud-est du pays indiquaient la présence de léopards
dans seulement deux des 47 parcelles forestières (Angelici et al., 1998). Les chercheurs
rapportent que la situation commence maintenant à ressembler à celle des forêts pluvia-
les du sud du Cameroun. Par exemple, dans la réserve faunique de Banyang-Mbo, cer-
tains signes indiqueraient que des léopards ont déjà été déracinés des forêts (Bennett,
2001). Dans les hautes terres avoisinantes de Bamenda, les léopards des forêts alpestres
de Kilum-Ijim ont été carrément exterminés il y a une vingtaine d’années (Maisels et al.,
2001).
Il est probable que plusieurs facteurs – dont la diminution du nombre de proies, la
chasse directe et la modification des habitats – nuisent aux populations de léopards en
forêt. Toutefois, il est difficile de déterminer les causes précises du déclin des populations
de léopards dans une région donnée. De récentes études ont permis de démontrer que la
diminutiondu nombre de proies peut représenter un facteur plus important que le bra-
connage ou la perte d’habitats lorsqu’il est question d’expliquer la réduction des popula-
tions de grands félidés (Karanth et Stith, 1999; Sunquist et Sunquist, 1989). L’énorme
volume de viande de brousse extraite de certaines forêts centrafricaines est bien docu-
menté (Wilkie et al., 2000). Vu qu’une telle chasse intensive n’est probablement pas
viable et compte tenu du niveau élevé de chevauchement alimentaire entre les félidés des
forêts d’Afrique et les chasseurs humains (Ray, 2001), nous pouvons nous attendre à ce
que les populations de léopards continuent de décliner dans les régions où la chasse à la
viande de brousse est une pratique courante. Les léopards sont également chassés dans
la ceinture forestière de l’Afrique. Par exemple, dans le nord du Congo, 15 peaux de
léopard ont été saisies au cours d’une période de deux semaines l’année dernière
(P. Elkan dans Ray et Quigley, 2001). Au Gabon, il est facile de mettre la main sur des
griffes et des canines de léopards dans tous les grands marchés de la capitale (observa-
tion personnelle de Henschel).
Des influences anthropogéniques peuvent donc constituer une menace de plus en plus
grave pour les populations de léopards dans l’ouest et le centre de l’Afrique (Nowell et
Jackson, 1996). Toutefois, notre piètre connaissance de l’écologie et de la situation quant
à la conservation du plus grand prédateur terrestre à habiter les écosystèmes forestiers
de l’Afrique nuit à notre capacité d’évaluer adéquatement les besoins de gestion ou les
priorités régionales en matière de recherche et d’actions de conservation. Mis à part les
quelques études susmentionnées, la situation des léopards dans la ceinture forestière de
l’Afrique est largement méconnue.
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
6
2. Objectifs de ce guide
Pour pallier le manque de données sur les populations de léopards, le récent plan du
groupe d’action spécialisé dans les félidés de l’IUCN jette les bases d’un projet d’étude de
l’écologie et de la densité de populations de léopards dans les forêts pluviales d’Afrique
afin de produire des estimations précises des populations (Nowell et Jackson, 1996
[Projet 34]). L’écologie des léopards a déjà fait l’objet d’études exhaustives dans les
écosystèmes des savanes de l’est et du sud de l’Afrique, et la densité de population dans
divers types d’habitats de ces régions est déjà connue (Bailey, 1993; Norton et Henley
1987; Bothma et Le Riche, 1984; Hamilton, 1981; Smith, 1977). Malheureusement, en
raison de la visibilité limitée dans les environnements forestiers, les méthodologies
d’étude élaborées pour les habitats ouverts (ex. : dénombrement direct de léopards
individuels et fuyant des véhicules) n’y sont pas efficaces. Bien qu’un certain nombre
de méthodes aient été mises au point ailleurs pour évaluer et surveiller l’abondance des
populations carnivores en milieu forestier au moyen de techniques non invasives
(Karanth et Nichols, 2002; Zielinksi et Kucera, 1995), la plupart de ces méthodes n’ont
pas encore été testées sur les léopards des forêts d’Afrique.
Ce guide a pour but principal de recommander des techniques de relevé de la présence,
de l’abondance relative et de la densité des populations de léopards dans les forêts
d’Afrique. Les méthodes décrites dans ce guide visent principalement des efforts de
relevé à plus court terme (durée de quelques mois) tout en reconnaissant que des études
de plus longue haleine menées sur les carnivores dans une région donnée permettent
souvent de recueillir des données détaillées sur chacune des espèces animales qui y
habitent. De plus, l’accent est mis ici sur des techniques non invasives, ce qui exclut
nécessairement le piégeage d’animaux vivants et la télémétrie, qui demeureront néan-
moins des outils essentiels pour étudier l’écologie et la conservation de carnivores tropi-
caux furtifs.
En plus de formuler des recommandations sur la méthodologie de relevé, nous résumons
brièvement la pertinence de diverses méthodes en fonction de possibles objectifs d’étude.
Ensuite, nous détaillons la méthodologie consistant à prendre des relevés photographi-
ques par télécommande, qui utilise le cadre statistique mis au point pour les grands
carnivores de l’Asie et dont les méthodes et l’échantillonnage ont été adaptés précisément
pour l’environnement forestier de l’Afrique. De plus, nous présentons brièvement l’utilité
du piégeage photographique comme outil de relevé d’autres mammifères en forêt.
Ce guide est le fruit de l’expérience acquise par Henschel au cours de son étude de deux
ans des léopards de la réserve de Lopé au Gabon et de l’expérience de Ray dans le sud-
ouest de la République centrafricaine et l’est du Congo (Zaïre). Sa rédaction a été possi-
ble grâce à l’appui du Global Carnivore Program de la Wildlife Conservation Society, et le
guide représente un premier pas dans l’évaluation régionale de la situation quant à la
conservation des léopards en forêt.
7
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
Cet effort poursuit l’excellent travail accompli par Ullas Karanth et d’autres chercheurs
(ex. : Karanth, 1995; Karanth et Nichols, 1998, 2000, 2002; Franklin et al., 1999; O’Brien
et al., 2003), qui ont élaboré un bon nombre des techniques décrites ici et la base théori-
que du recensement des populations de grands prédateurs. Il n’aborde pas en détail le
cadre conceptuel ou les principes de conception de relevés qui sous-tendent l’évaluation
de l’abondance des populations animales, lesquels se trouvent dans White et al. (1982),
Lancia et al. (1994), Thompson et al. (1998), Nichols et Conroy (1996) de même que
Karanth et Nichols (2002) entre autres. Nous recommandons fortement aux chercheurs
de consulter ces travaux pour mieux se familiariser avec ces concepts. Sur la base de ces
travaux, ce guide constitue un protocole de relevé adapté aux particularités et aux spéci-
ficités des léopards des forêts pluviales d’Afrique. En même temps, nous espérons que ce
guide devienne un outil précieux pour relever les grands carnivores habitant d’autres
forêts pluviales.
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
8
3. Définition des objectifs du relevé
Tableau 1. Objectifs possibles de relevés de léopards en forêt et niveaux de relevés compatibles.
OBJECTIF DE L’ÉTUDE
Niveau de relevé
Présence-absence(ponctuelle)
Présence-absence(systématique)
Abondancerelative
Estimationsde densitéabsolue
Statuer sur la présence ou l’absence de léopardsdans une zone donnée
Établir la carte de répartition régionale des léopards(ex. : dans un pays)
Produire des modèles de relations d’habitats ou deviabilité des populations à référence spatiale
Évaluer le pourcentage d’une zone qui est occupépar des léopards
Comparer l’abondance de léopards entre plusieurszones
Suivre la densité des populations de léopards ou leurabondance relative dans une zone donnée au fil dutemps
Suivre l’évolution de la répartition spatiale régionalede léopards (ex. : dans un pays)
Évaluer la densité absolue de léopards dans unezone d’étude donnée
Évaluer les répercussions de modifications auxproies ou aux habitats sur la présence, l’abondancerelative ou la densité de populations de léopards
O O O O
O O O
O O O
O O O
O O O
O O O
O O
O O
O
Les objectifs spécifiques d’un relevé de léopards doivent tenir compte des réalités logisti-
ques (ressources humaines et financières, délai consenti) lorsque vient le moment de
décider du type de relevé à entreprendre et du niveau de précision requis. Par exemple,
il est beaucoup plus simple d’établir si des léopards sont présents ou absents dans une
région donnée que de tenter d’estimer l’abondance des populations. Moins de ressources
et d’efforts seront nécessaires pour statuer sur la présence ou l’absence d’une espèce.
À l’opposé, un relevé plus complexe sera requis pour estimer l’abondance selon l’appro-
che de recensement par capture et recapture (tableau 1).
9
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
La prochaine étape consiste à définir l’étendue minimale du relevé nécessaire en fonction
des objectifs et du degré de précision, laquelle doit tenir compte des ressources accessi-
bles, selon Karanth et Nichols (2002). Parmi les variables dont il faut tenir compte figu-
rent le personnel (nombre et niveau d’expertise), les dimensions de la zone faisant l’objet
du relevé ainsi que l’accès à cette zone, les ressources matérielles et/ou financières, le
choix du moment et toute autre contrainte logistique (ex. : accessibilité des véhicules).
Par exemple, un seul chercheur sans l’aide d’équipement coûteux pourra procéder à un
relevé ponctuel de la présence ou l’absence (voir la section 5.1), mais ce relevé sera celui
qui fournira le moins d’information parmi toutes les méthodes présentées dans ce guide.
Pour recueillir des données plus détaillées, davantage de ressources et d’efforts devront
être investis. Dans tous les cas, il sera inutile d’entreprendre un relevé sans avoir claire-
ment établi les objectifs et les ressources disponibles pour les atteindre.
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
10
4. Brève introduction auxconsidérations en matièred’échantillonnage
Dans le présent guide, la notion de répartition spatiale d’individus dans une population
est définie de telle sorte à comprendre l’occurrence et l’organisation spatiale des léopards
dans une zone donnée à un moment donné. Au minimum, nous nous intéressons à
établir la présence ou l’absence de léopards dans une zone donnée. Toutefois, dans
l’intérêt d’évaluer la situation d’une population, nous souhaiterions souvent connaître
le nombre approximatif d’individus qui s’y trouvent (abondance relative ou densité).
Pour produire une mesure valable de la répartition spatiale, de l’abondance relative ou
de la densité de léopards, il est nécessaire de procéder à un relevé (dénombrement partiel
des individus dans une zone donnée) ou encore à un recensement (dénombrement de
tous les individus dans une zone donnée pendant une période de temps donnée). Toute-
fois, il est pratiquement impossible de recenser de grands carnivores furtifs qui habitent
des forêts denses.
Évidemment, un relevé se limite à une zone donnée, laquelle doit être soigneusement
délimitée au préalable. Les dimensions éventuelles de la zone couverte par le relevé (la
zone d’échantillonnage) seront établies selon la méthode de relevé employée. Pratique-
ment toutes les inférences sur les populations animales reposent sur des statistiques de
dénombrement. Pour plusieurs espèces animales, de telles statistiques peuvent être
recueillies en procédant au dénombrement des animaux eux-mêmes à partir de photogra-
phies. Dans d’autres situations, les statistiques de dénombrement seront dérivées de
signes indirects (ex. : excréments ou empreintes). Selon Karanth et Nichols (2002:24),
les biologistes et les gestionnaires qui veulent se servir de statistiques de dénombrement
pour estimer et inférer la taille d’une population animale seront confrontés à deux pro-
blèmes fondamentaux : l’observabilité et l’échantillonnage spatial […] L’observabilité
concerne l’incapacité caractéristique de déceler et d’énumérer l’ensemble des animaux
[…] ou plus généralement l’iniquité qui existe entre les statistiques de dénombrement et
le nombre véritable d’animaux. Par ailleurs, l’échantillonnage spatial concerne le fait que
nous nous attaquons à des zones si étendues qu’il ne nous est pas possible de recueillir
des statistiques de dénombrement dans l’ensemble de la zone. Nous devons plutôt
sélectionner des zones plus petites que nous croyons représentatives de l’ensemble du
territoire et tenter de dénombrer les individus dans les zones échantillonnées pour en
déduire le nombre total d’animaux habitant la zone.
11
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
∧
Devant des problèmes d’observabilité et d’échantillonnage spatial dans l’établissement
de la présence ou l’absence de léopards ou encore leur abondance relative ou absolue,
il s’avère utile de garder à l’esprit un cadre conceptuel tel que celui proposé par l’équa-
tion suivante :
N = C’ / p α
Dans cette équation, N représente l’abondance estimative, C’ représente la statistique de
dénombrement dans les zones échantillonnées, p représente la probabilité estimée de
détection de léopards tandis que α représente le pourcentage de l’ensemble de la zone
d’où provient la statistique de dénombrement. Diverses méthodes présentées dans ce
modèle s’inscrivent dans ce cadre général, lequel ne doit toutefois pas être considéré
comme une équation permettant d’estimer avec précision l’abondance des léopards.
Au lieu de considérer que p = 1 et que α = 1, il est possible d’estimer les deux paramè-
tres à l’aide de statistiques et ce, peu importe le but visé par le relevé.
∧
∧
∧
∧
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
12
5. Types de relevés
suite à la prochaine page ➤
Encadré 5A. Reconnaissance des signes indiquant la présence de léopards.
Contrairement à la situation qui prévaut dansles forêts tropicales de l’Asie et de l’Amériquedu Sud, les forêts d’Afrique sont habituelle-ment habitées par un seul grand mammifèrecarnivore, en l’occurrence le léopard. Lesléopards adultes résidents circulent souventle long des chemins ou des sentiers etlaissent leurs excréments dans des endroitsvisibles pour marquer leur territoire. Ce sontainsi les signes les plus souvent trouvés etsont difficiles à confondre avec ceux d’autresespèces. La taille des empreintes et desexcréments de jeunes léopards peut toutefoisêtre confondue avec celle de petits félidésadultes tels que le chat doré (Profelis aurata),le caracal (Caracal caracal) ou le serval(Leptailurus serval). Ces deux dernièresespèces se tiennent dans la bande limitropheentre la forêt et la savane. De plus, danscertaines zones de forêt pluviale telles que leparc national Nouabalé-Ndoki du Congo ou leparc national Ivindo du Gabon, des hyènestachetées (Crocuta crocuta) commencent àpénétrer dans les forêts. Elles empruntent leschemins d’exploitation, ce qui augmente lerisque d’erreurs d’identification par les chercheurs n’ayant pas été formés dans la reconnaissance de signes.Nous vous incitons fortement à ne pas considérer les signes ambigus comme des preuves témoignant de laprésence de léopards. Seules les traces évidentes laissées par des léopards adultes doivent être prises enconsidération.
Figure 1a. Diagramme des empreintes des pattes avantet arrière du léopard (Stuart et Stuart, 1994); 1b.
Photographie de traces de léopard (J. Ray).
5.1 Relevés ponctuels de présence ou d’absence
Selon l’ampleur des activités d’exploitation de viande de brousse, l’intensité des activités
directes de chasse ou la modification des habitats dans une zone donnée, la répartition et
l’abondance des léopards risquent d’en souffrir, pouvant même aller jusqu’à la dispari-
tion locale. Dans le cas où l’étude est limitée à une zone discrète (ex. : une zone protégée
ou une parcelle forestière) et que l’objectif se limite à établir la présence ou l’absence
de l’espèce, un relevé ponctuel suffira. Le moyen le plus facile et le moins coûteux de
procéder à ce type de relevé consiste à marcher le long des sentiers ou des chemins
qu’empruntent les animaux dans la zone pour y chercher des signes laissés par les
léopards tels que des tracetraces ou des excréments (voir l’encadré 5A). Normalement,
en présence de léopards, l’on peut s’attendre à retrouver un grand nombre d’excréments
et de traces, car c’est ainsi que les léopards marquent leur territoire à l’intention de leurs
congénères. Dans plusieurs zones protégées du Gabon, de la République centrafricaine et
du Congo (Zaïre) où la chasse est interdite, il est possible de trouver des signes indiquant
la présence quotidienne de léopards. Toutefois, dans les zones où les léopards doivent se
protéger contre une chasse directe, il peut s’avérer difficile de déceler tout signe de leur
13
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
suite de la page précédenteFigure 2a. Illustration des empreintes avant et arrière
de l’hyène tachetée (Stuart et Stuart, 1994);2b. Photographie d’une empreinte d’hyène
(www.safaricamlive.com)
Figure 3. Excréments deléopard (P. Henschel).
Figure 4. Excrémentsd’hyène (G. Balme).
EmpreintesLes empreintes de félidés ont une formegénérale circulaire et sont d’une longueur etd’une largeur à peu près équivalentes(figures 1a et 1b). Un léopard adultelaissera une empreinte mesurant de 7,5 cmà 11 cm en largeur et en longueur, et lecoussin principal se trouvera à entre 4 cmet 7,5 cm. Les dimensions de l’empreinted’une hyène tachetée adulte sont compara-bles, mais l’empreinte a une forme généra-lement ovoïde (figures 2a et 2b). Lesempreintes d’hyène sont toujours assortiesde traces floues des griffes tandis que lebord postérieur du coussin principalmanque trois lobes. Ces lobes caractérisentd’ailleurs l’empreinte du léopard. ConsulterRabinowitz (1997) et Parnell (2000) pourplus d’information sur la mesure del’empreinte et de la démarche.
ExcrémentsLes excréments du léopard ont une formeallongée et l’une de leurs extrémités estsouvent conique. Le léopard défèquehabituellement plusieurs selles à la fois,chacune mesurant de 6 cm à 13 cm enlongueur et de 2,5 cm à 4 cm en diamètre(figure 3). Bien que les excréments deléopard puissent mesurer moins de 2,5 cmen diamètre, il ne faut jamais arriver à laconclusion qu’il s’agit d’excréments de léopard à moins que des traces de léopard adulte aient été trouvées àproximité. De façon intéressante, les excréments de la civette africaine (Civettictis civetta) ont un diamètre qui serapproche de celui des excréments de léopard. Toutefois, il est habituellement possible de les différencier enfonction de leur contenu (exosquelettes d’arthropodes, fruits et noix), de leur odeur (sucrée) et de l’endroit où ilssont trouvés (près des mares d’eau). Les excréments d’hyène ont habituellement une forme moins allongée queceux du léopard et une teneur en matière osseuse plus élevée, ce qui explique leur blanchissement rapide (figure4). Les excréments de félidés, dont la teneur en calcium est élevée, blanchissent également, notamment sous lesoleil; toutefois, ils sont habituellement d’un blanc davantage sale comparativement aux excréments d’hyène d’unecouleur se rapprochant davantage de celle du plâtre de Paris. De plus, les hyènes tendent à déféquer dans desendroits plus visibles, ce qui n’est pas le cas des léopards. Cependant, aucune preuve de ce comportement deshyènes n’a été rapportée dans les habitats forestiers. Voir Ray (2000) pour connaître les méthodes d’analysealimentaire.
présence, car ils évitent souvent d’emprunter les chemins et les sentiers empruntés parles chasseurs humains à intervalles réguliers. En conséquence, un chercheur qui nequitte pas les sentiers battus pour procéder à ses relevés aura de la difficulté à trouverdes signes dénotant la présence de léopards dans la zone. Il est important de soulignerque ces relevés de présence et d’absence reflètent un succès ou un échec dans la détec-tion de signes de présence. En effet, l’absence de signes peut parfois s’expliquer parl’incapacité de détecter la présence de léopards. Donc, bien qu’il puisse être impossiblede statuer sur l’absence de léopards avec un degré absolu de certitude, il est relative-ment peu probable qu’ils se trouvent dans une zone donnée si aucun signe n’est trouvéaprès quelques semaines de travail sur le terrain (encadré 5B).
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
14
Dans le cas où une région devant faire l’objet d’un relevé est fréquentée par des popula-
tions humaines locales, ces populations représentent souvent une précieuse source de
renseignements, à la fois avant même de procéder au relevé et après le travail sur le
terrain, permettant de valider les résultats d’étude. Un avantage des grands carnivores est
le fait que les rencontres avec de tels animaux (ou des signes indiquant leur présence)
sont assez rares et considérées suffisamment mémorables pour que les gens se rappellent
quand et où elles ont eu lieu. Ce sont souvent les chasseurs qui en connaissent le plus à
cet égard, car ils couvrent de grandes distances pendant leurs activités de chasse. Il
importe de garder à l’esprit le grand écart entre l’information recueillie dans le cadre de
conversations informelles et pendant l’interrogation de personnes locales et les méthodes
d’entretien officielles. Enfin, les chercheurs doivent s’efforcer de demeurer impartiaux
pendant les interrogatoires de sorte à ne pas biaiser les réponses fournies (voir les détails
dans Rabinowitz, 1997; White et Edwards, 2000).
L’utilisation d’appareils de détection tels que des pièges photographiques peut également
permettre de confirmer la présence de léopards. Si ces appareils sont installés de façon
ponctuelle plutôt que systématique (voir la section 5.2), ils ne doivent servir qu’à confir-
mer la présence et non à statuer sur l’absence. Ils doivent être utilisés pour complémen-
ter les méthodes d’établissement de la présence de léopards et les entrevues et non pas
pour remplacer l’une ou l’autre méthode.
5.2 Relevés systématiques de présence ou d’absence
Il est possible d’atteindre des objectifs d’étude plus complexes tels que l’évaluation de la
répartition spatiale ou l’évaluation de la proportion d’une zone donnée qui est habitée
par des populations de léopards (« occupation de parcelles »; MacKenzie et al., 2002,
2003) en recourant à des études de présence ou d’absence, pourvu que ces études soient
menées de manière systématique plutôt que ponctuelle. Les connaissances acquises sur
la répartition spatiale des léopards ou l’occupation des parcelles sont tout aussi impor-
tantes que l’estimation du nombre d’individus présents pour statuer sur la situation des
léopards (Thompson et al., 1998). Une attention particulière doit être portée au plan
d’échantillonnage pour assurer le systématisme de l’étude. D’abord, la zone d’intérêt doit
être répartie dans une grille où la taille de chaque cellule est raisonnable. Aucune règle
ne dicte la taille des cellules formant la grille; toutefois, elle ne doit pas être supérieure à
Encadré 5B. Modèle de relevé ponctuel de présence et d’absence.
Entre 2001 et 2003, Philipp Henschel a étudié plusieurs régions du sud du Gabon afin d’y déterminer la présenceou l’absence de lions et de léopards. Dans le cadre de chaque étude, il a consacré entre 4 et 6 semaines sur leterrain et procédé à l’installation de jusqu’à 12 pièges photographiques. Dans une région où la chasse étaitprévalente, il n’a pas pu statuer sur la présence de grands félidés. De plus, les pièges photographiques n’ontcapté aucune image de grands félidés. Des entrevues menées auprès de chasseurs locaux ont permis deconfirmer l’absence de grands félidés dans cette région. Au cours d’une étude ayant duré quatre semaines dansune région adjacente, où la chasse était moins prévalente, des excréments et des traces de léopards ont ététrouvés à quatre et à trois reprises respectivement, et les pièges photographiques ont capté deux images deléopards mâles. Cette étude est arrivée à la conclusion que de faibles populations de léopards étaient présentesdans cette région, laquelle conclusion a été corroborée par les chasseurs locaux rencontrés en entrevue.
15
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
celle du domaine vital minimal de l’animal à l’étude. Toutefois, le niveau de précision
des données recueillies sera dicté par la taille des cellules, et il importe donc d’établir un
équilibre entre la résolution que commande l’étude et le niveau d’effort à fournir. Aucune
règle ne dicte la forme que doit prendre la grille : des grilles carrées et hexagonales sont
des exemples d’unités d’échantillonnage spatial qui s’agencent bien, ne laissant aucun
jeu entre chaque cellule.
Dans le cas où chaque cellule de la grille représente une unité d’échantillonnage, l’étude
aura pour objectif d’établir la présence ou l’absence de léopards dans chaque unité soit
par la recherche de signes indiquant la présence de léopards soit par le recours à des
appareils de détection. Moyennant un effort d’échantillonnage adéquat et représentatif,
il sera possible d’établir la carte de répartition spatiale des léopards dans une zone plus
étendue. Il ne sera habituellement pas possible d’échantillonner toutes les grilles dans
une zone à l’étude. Une attention particulière devra donc être portée au plan d’échan-
tillonnage. Par exemple, il importe de maintenir une distance minimale entre les cellules
d’échantillonnage, sans quoi il risque d’être impossible de confirmer la présence ou
l’absence de léopards dans les espaces laissés entre les cellules. Il existe de nombreux
plans d’échantillonnage (par ex., échantillonnage systématique, échantillonnage aléatoire
simple stratifié), mais la méthode considérée la plus adéquate à la répartition typique des
grands carnivores dans une population donnée est l’échantillonnage adaptatif par grap-
pes (Karanth et Nichols, 2002). Cette méthode utilise un plan d’échantillonnage aléatoire
simple ou stratifié pour échantillonner toutes les cellules à la limite de celles où la pré-
sence de léopards a été documentée dans le cadre de l’étude initiale et ainsi, jusqu’à ce
que la grappe est entourée de cellules où il n’a pas été possible de détecter la présence de
léopards.
Bien que la détection de la présence de léopards est présumée être sans erreur, la même
présomption ne s’applique pas dans le cas où aucune présence n’est détectée. Le cas
échéant peut indiquer soit l’absence de léopards soit l’absence de détection d’une pré-
sence (Karanth et Nichols, 2002). En conséquence, présumer que l’absence de détection
de léopards se traduit par l’absence de léopards aurait pour effet de biaiser l’estimation
du taux d’occupation des sites (MacKenzie et al., 2003). La prochaine étape consisterait
alors à évaluer la probabilité de détection ou encore la probabilité de l’absence de détec-
tion d’animaux présents (Karanth et Nichols, 2002). Il est possible d’évaluer la probabi-
lité de détection soit en ayant plusieurs observateurs qui visitent indépendamment la
même cellule où aucune détection n’a été rapportée soit en demandant au même obser-
vateur de visiter la même cellule à plusieurs reprises. Les données statistiques ainsi
recueillies pourront ensuite servir à réajuster l’estimation du nombre de cellules où la
présence de léopards a été détectée, laquelle évaluation pourra fournir des renseigne-
ments quant à la proportion habitée de la région (voir Karanth et Nichols, 2002).
MacKenzie et al. (2002, 2003) ont poussé l’élaboration de ce concept plus loin à partir de
modèles utilisés pour évaluer les taux d’occupation de sites où la probabilité de détection
était inférieure à 1. Ces chercheurs ont mis au point un programme nommé PRESENCE,
qui permet la saisie et l’analyse automatiques des types de données présentées dans cette
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
16
section en vue d’estimer les taux d’occupation des parcelles et des paramètres connexes.
Ce programme ainsi que des logiciels d’analyse démographique peuvent être téléchargés
du U.S. Geological Survey Patuxent Wildlife Research Center à l’adresse
www.pwrc.usgs.gov/monitoring2/.
5.3 Abondance relative
i. Utilisation d’indices servant à estimer l’abondance relative
Il est possible d’estimer l’abondance relative à partir d’indices quantitatifs d’abondance
en lien direct avec les densités absolues. Des exemples de tels indices peuvent inclure le
nombre de signes de présence de léopards détectés par distance unitaire ou encore le
nombre de photographies de léopards prises dans chaque unité. Dans le cas où il n’est
pas possible d’évaluer la densité absolue, des programmes de surveillance qui utilisent
des données d’abondance relative – pourvu qu’elles soient recueillies de façon cohérente
et moyennant un effort d’échantillonnage adéquat dans le cadre de chaque étude –
permettent de savoir si une population de léopards est en croissance, en décroissance ou
relativement stable (voir la section 5.3ii). L’évaluation de l’abondance relative des léo-
pards dans une région donnée peut constituer un bon indice de l’abondance relative de
possibles espèces de proies (mammifères de taille moyenne [de 5 à 70 kg; Hart et al.,
1996; Henschel, 2001; Ray et Sunquist, 2001]), car ces proies peuvent constituer une
mesure fidèle de l’abondance des léopards. Cependant, si le léopard est chassé par
l’homme dans la zone d’étude, une variation dans l’abondance des léopards peut plutôt
refléter des écarts dans la pression exercée par les chasseurs et non pas des écarts dans
l’accessibilité des proies (pour autant que les proies domestiquées [chèvres, moutons,
chiens, etc.] ne s’y trouvent pas en grands nombres).
Le moyen le plus efficace pour estimer l’abondance relative des léopards est d’aller au-
delà des études de présence et d’absence pour quantifier les empreintes ou les excré-
ments laissés le long des sentiers naturels ou des chemins construits tout en tenant
compte de la distance des déplacements au moyen d’un système de positionnement
mondial (GPS) ou d’un topofil de ceinture. Une étude menée sur les grands carnivores
en Namibie a révélé une forte corrélation entre les empreintes dénombrées le long des
sentiers et des chemins et la densité de population absolue (Stander, 1998). Il est ensuite
possible d’exprimer l’abondance relative sous la forme d’un taux de rencontre (ex. : le
nombre d’empreintes/d’excréments par distance de 100 kilomètres marchée). Cela
permet de comparer différentes zones d’un site plus étendu ou de procéder à des compa-
raisons entre les années ou les saisons d’échantillonnage. Tel que mentionné ci-dessus,
les variations dans l’abondance des léopards peuvent s’expliquer par une variation
naturelle de la disponibilité des proies selon la saison, l’habitat ou le taux de reproduc-
tion d’une année à l’autre. L’abondance des léopards peut également être le résultat
direct ou indirect de la pression exercée par la chasse des léopards eux-mêmes ou de
leurs proies par l’humain. Il importe donc d’analyser soigneusement de tels résultats
d’étude afin de tenir compte de ces variables avant de statuer sur toute menace existante
ou potentielle à la population de léopards à l’étude.
17
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
Selon la composition du sol, il peut s’avérer plus difficile d’identifier des empreintes que
des excréments. En effet, les excréments constituent souvent un meilleur indicateur de la
présence de léopards dans les forêts d’Afrique. Nous recommandons néanmoins de faire
le relevé d’empreintes et d’excréments simultanément afin de produire un index com-
biné. Dans le cas où un chemin ayant déjà fait l’objet d’un relevé doit faire l’objet d’un
nouveau relevé, il est important de prévoir un intervalle adéquat entre les deux relevés
pour laisser le temps aux signes du premier relevé de disparaître avant de dénombrer
les signes dans le cadre du relevé suivant. La durée de l’intervalle variera selon la saison
(les excréments se décomposent plus rapidement pendant les saisons de pluie), mais
nous recommandons de laisser passer une période d’au moins un mois. Il est important
de souligner que le nombre de signes recueillis ne représente que la « récolte sur pied »
(Wemmer et al., 1996) et non pas la quantité de signes accumulés au cours du mois
entier (certains signes auront inévitablement disparu). Une autre option consiste à
éliminer tous les signes après chaque relevé dans le cas où les relevés se feront à des
intervalles plus rapprochés. Toutefois, dans ce cas, il est important de s’assurer que les
intervalles sont de durée plus ou moins égale et que tous les signes sont éliminés à un
intervalle semblable avant le premier relevé. Les données doivent alors être exprimées
sous la forme N/L (nombre de signes par longueur d’unité marchée), où L représente le
nombre total de kilomètres marchés.
Pour accroître la taille d’échantillon des excréments, il est possible de procéder à l’instal-
lation de surfaces de prélèvement artificielles dans des emplacements stratégiques où la
présence de léopards a été confirmée ou est soupçonnée. L’utilisation d’odeurs ou d’em-
preintes artificielles préparées à partir de formulations qui imitent la composition du sol
des sentiers tout en permettant de meilleurs prélèvements a permis d’augmenter le
nombre de prélèvements dans le cadre d’une étude menée sur des jaguars (Miller, 2001).
Toutefois, l’entretien de ces zones peut poser problème, selon la composition du sol dans
la zone d’étude. Le sol d’argile qui tapisse nombre de zones d’étude dans les forêts
pluviales d’Afrique (y compris les zones d’étude des deux auteurs) a tendance à durcir
rapidement après à peine quelques heures au soleil. Sans l’utilisation d’un sol différent
(par ex., un sol sablonneux) et/ou d’un agent humidifiant à intervalles réguliers, la
qualité des empreintes laissées sur ces surfaces se détériorera rapidement. Un tel système
nécessite un entretien considérable et, bien qu’il puisse s’avérer utile d’assurer un entre-
tien adéquat des surfaces de prélèvement d’empreintes, nous ne recommandons pas
l’utilisation de cette technique dans les zones d’étude isolées ou dans le cadre d’études
employant une petite équipe sur le terrain. L’utilisation d’attractifs pour attirer les félidés
à ces surfaces de prélèvement d’empreintes a connu un certain succès dans les zones
néotropicales (Miller, 2001; Harrison, 1997), mais, à notre connaissance, de telles subs-
tances n’ont jamais été utilisées sur des léopards.
Des appareils photos à déclenchement télécommandé peuvent également être utilisés
pour estimer l’abondance relative (Carbone et al., 2001; O’Brien et al., 2003), à partir
d’une carte de photographies de léopards prises pendant une période de 100 nuits de
piégeage photographique. Toutefois, cette méthode repose sur l’hypothèse que les proba-
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
18
bilités de prise de photographies sont constantes dans le temps et d’un emplacement à
l’autre, ce qui est rarement le cas (Jenelle et al., 2002). De plus, compte tenu du coût
élevé des pièges photographiques, le personnel et les autres ressources nécessaires pour
dériver des indices à partir des taux différeraient très peu des ressources requises pour
estimer les probabilités de prise de photographies, l’abondance et la densité de popula-
tion des léopards (voir la section 5.4). Il y a peu de raison de ne pas utiliser un cadre
d’évaluation des populations, étant donné que l’utilisation des méthodes de marquage et
de recapture a déjà amplement fait ses preuves en théorie. Bien que la méthode d’étude
préférable soit l’obtention d’évaluations utilisant les méthodes de marquage et de
recapture, notamment là où il est possible d’identifier les léopards individuellement, les
indices d’abondance selon les taux s’avéreraient utiles dans certaines circonstances, par
exemple : 1. dans les nouvelles zones d’étude où les chercheurs ne savent peut-être pas
nécessairement où installer leurs appareils photos et où il peut s’avérer difficile d’établir
un plan d’étude de marquage et de recapture approprié; 2. là où des programmes de
piégeage photographique sont déjà en place sans que les léopards forment l’espèce
ciblée; et/ou 3. là où le nombre d’appareils photos ne suffit pas à identifier les individus
à un degré de précision adéquat.
ii. Surveillance
L’évolution de la situation des léopards peut être suivie dans l’espace et le temps à partir
de statistiques sur la présence ou l’absence ou encore de statistiques sur l’abondance
relative. La surveillance se différencie des études plus simples par l’évaluation à répéti-
tion de la situation dans une zone définie au cours d’une période de temps donnée par
opposition à un cliché statique (Thompson et al., 1998). Étudier la variation dans l’abon-
dance relative des léopards dans une zone d’étude au fil du temps représente un moyen
d’évaluer comment ces animaux réagissent à certaines menaces. Du même coup, la
capacité d’identifier tout déclin dans les populations de léopards sur le territoire peut
contribuer à mieux comprendre les effets des modifications apportées aux plans d’amé-
nagement du territoire, lesquelles peuvent varier considérablement dans une zone éten-
due (Zielinski et Stauffer, 1996). L’évaluation d’hypothèse nulle, c’est-à-dire l’absence de
variation de l’abondance relative entre un moment a et un moment b, soulève une
question importante : Dans le cas où une population est manifestement en déclin, quelle
est la probabilité que l’étude menée identifie ce déclin (Kendall et al., 1992; Zielinski et
Stauffer, 1996)? L’efficacité statistique, laquelle doit être invoquée a priori au moment de
concevoir et de planifier un schéma de surveillance, consiste à rejeter l’hypothèse nulle
et à accepter l’alternative.
La taille de l’échantillon et la variance sont les facteurs les plus importants qui dicteront
l’efficacité de la démarche d’identification de toute modification dans la situation des
léopards. Si les unités d’échantillonnage sont trop petites et/ou si la variance est trop
grande, le programme de surveillance mis au point risque de joindre les rangs de nombre
de programmes antérieurs jugés « inadéquats pour détecter des déclins même catastro-
phiques dans les populations sur de courtes périodes » (Zielinksi et Kucera, 1995:8).
Dans l’élaboration d’un plan d’échantillonnage pour suivre l’évolution de la situation
19
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
d’une population, il sera essentiel d’établir a priori la probabilité de détecter des varia-
tions considérables d’échantillons de diverses tailles. Ainsi, le chercheur sera en mesure
d’opter pour un échantillon de taille adéquate qui lui permettra de détecter, selon une
probabilité acceptable, toute modification dans l’occurrence ou l’abondance.
5.4 Densité de population
Il est toujours préférable de concevoir des études qui permettront d’évaluer l’abondance
absolue (le nombre de léopards présents dans la zone d’étude) ou la densité de popula-
tion (le nombre de léopards présents par aire unitaire) ainsi que le taux de variance de
ces estimations. Les taux de collecte d’excréments et d’empreintes varient souvent en
fonction de l’habitat et/ou de la composition du sol; ainsi, des écarts apparents dans
l’abondance relative à plusieurs sites dont l’habitat diffère peuvent en fait être attribua-
bles à des écarts de détectabilité. Les estimations de densité tiennent compte des varia-
tions d’habitats, et elles doivent donc être préconisées.
La densité de population se définit comme le nombre d’individus (N) par aire unitaire
d’une zone d’étude prédéfinie. La collecte de données statistiques de capture et de
recapture dépend de la capacité de différencier les léopards individuels. Vu que le léo-
pard a tendance à fuir, il est fort peu probable qu’un chercheur puisse identifier (à partir
de photographies) tous les léopards individuels qui habitent une zone donnée. Toutefois,
il est possible d’évaluer les probabilités de capture et la taille des populations par des
méthodes mathématiques pourvu que les animaux puissent être identifiés individuelle-
ment et recapturés périodiquement (White et al., 1982).
Il est important d’identifier tous les individus capturés au cours d’une période d’échan-
tillonnage. Les données recueillies dans le cadre de l’ensemble des périodes d’échan-
tillonnage sont utilisées pour calculer le nombre total d’individus formant une population
dans la zone d’étude en fonction de la population d’échantillonnage (les individus
identifiés ainsi que le nombre moyen d’individus qui apparaissent occasionnellement,
c’est-à-dire les individus transitoires; voir la section 7.1i pour les détails). Une fois que le
nombre total d’individus a été calculé, ce total est divisé par les dimensions de la zone
d’étude afin d’estimer la densité de population des léopards. Ce résultat représente une
valeur absolue pouvant être comparée aux densités estimées dérivées de toute autre
étude, nonobstant la taille et/ou le type d’habitat. De plus, la variance estimée peut
servir de mesure du degré de probabilité ou du niveau de précision d’une estimation de
densité donnée. Le calcul des densités de léopards déterminées dans les zones protégées
constitue un premier pas dans la détermination de la viabilité à long terme d’une popula-
tion donnée en fonction du nombre d’individus qu’elle compte. Dans une certaine me-
sure, cela dépendra du degré de protection assurée aux léopards à l’extérieur des zones
protégées. La comparaison des densités de populations de léopards entre zones apparte-
nant à une région plus étendue dont le niveau de protection et/ou de menace varie
fournit aux gestionnaires de conservation des données de référence contre lesquelles ils
peuvent mesurer les impacts de la modification des forêts et des pressions humaines sur
les populations de léopards en forêt.
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
20
6. Techniques de relevé permettantl’identification de léopardsindividuels
La capacité d’identifier des léopards individuels est un préalable essentiel à l’obtention
d’estimations robustes des densités de population. Bien que les modèles de marquage et
de recapture traditionnels aient été mis au point en partant du principe que les individus
devaient être physiquement capturés et marqués, l’identification non invasive d’individus
par leur pelage ou d’autres marques permet d’arriver exactement au même but (Karanth
et Nichols, 2002).
6.1 Empreintes
Plusieurs auteurs ont fait la démonstration qu’il est possible d’identifier individuellement
de grands félidés dans une population en mesurant soigneusement leurs empreintes
(Smallwood et Fitzhugh, 1993; Grigione et al., 1999; Lewison et al., 2001; Miller, 2001).
À partir d’une série de mesures développées spécialement pour les empreintes des
membres postérieurs, il est possible, en théorie, d’identifier des individus au moyen
d’une analyse discriminante (Smallwood et Fitzhugh, 1993). Cette méthode a toutefois
un inconvénient : il est nécessaire de recueillir un grand nombre d’empreintes (idéale-
ment, jusqu’à 20 empreintes laissées par la même patte) de chacun des individus afin
de déterminer les variables discriminantes d’une population donnée. Pour obtenir des
empreintes permettant la prise de mesures précises, ces empreintes doivent d’être préle-
vées d’une surface dure recouverte de poussière ou de sable. Si le sol est meuble ou
boueux, les empreintes prélevées seront déformées (voir Karanth et al., 2003). La compo-
sition du sol varie beaucoup dans les forêts pluviales et, notamment pendant les saisons
humides, les sentiers et les chemins sont souvent trop boueux pour permettre le prélève-
ment d’empreintes dans un état utilisable. Si le sol est profond, l’empreinte laissée par les
doigts de patte est souvent évasée, ce qui fausse les mesures. Outre le problème posé par
la qualité des empreintes, il peut s’avérer difficile de trouver des empreintes. Au cours
des 10 mois de travail mené sur le terrain dans le cadre de cette étude, Henschel n’est
tombé que sur deux bonnes traces de membres postérieurs de léopards. Bien qu’il soit
certainement possible de collecter un grand nombre d’échantillons de empreintes d’ani-
maux individuels résidents au fil du temps, dans bien des cas, il n’est pas possible de le
faire dans le cadre d’études de durée plus courte. Karanth et al. (2003) ont récemment
contesté la validité de la méthode par « recensement des traces » (pugmark census)
utilisée en Inde pour estimer la densité des populations de tigres. Ils ont fait valoir que
bien qu’il soit statistiquement possible de différencier des empreintes individuelles, la
prochaine étape essentielle consistant à dériver des estimations de populations dans le
contexte d’un cadre d’échantillonnage général n’a pas été menée.
21
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
Nous recommandons de consigner toute empreinte de léopard de qualité rencontrée.
Au minimum, de telles données pourront complémenter les autres méthodes d’étude
décrites dans ce guide. Plus longtemps demeurent les chercheurs dans une zone d’étude,
plus utile sera cette technique au fil du temps pour identifier des léopards individuels.
De plus, la collecte de mesures d’empreintes s’avérera utile dans le cas où de nouveaux
moyens sont mis au point pour traiter ces données. Idéalement, le chercheur doit tracer
ou photographier les empreintes qu’il rencontre sur le terrain et consigner des données
sur des paramètres connexes en vue de produire une base de données utile (encadré 6A).
En résumé, bien que les empreintes constituent des sources de données très importantes,
loin de nous d’affirmer qu’elles représentent le seul moyen d’estimer les densités de
population étant donné qu’il est peu probable qu’elles puissent servir à identifier les
individus dans le cadre d’études de durée relativement courte. L’exception se trouverait
dans les sites où les conditions de sol sont favorables et où il serait facile de prélever des
échantillons de empreintes suffisamment nombreux pour tenir compte de la variabilité
des individus fréquentant la zone. Dans certaines régions centrafricaines, par exemple,
les chemins d’exploitation peuvent offrir une surface adéquate sur de longues distances;
cette surface, pendant la saison sèche, produira peut-être des conditions se rapprochant
de celles des études menées auprès des pumas, où cette méthode a produit de bons
résultats (Smallwood et Fitzhugh, 1993). Peu importe la fréquence à laquelle des em-
Encadré 6A. Consignation et mesure d’empreintes de léopard.
Puisque les grands félidés ont une démarche où les membres postérieurs chevauchent les traces laissées parles membres antérieurs, les empreintes laissées par les membres postérieurs sont habituellement de meilleurequalité. Ainsi, ce sont habituellement les empreintes des membres postérieurs qui sont mesurées. L’empreinte dumembre postérieur se différencie par sa taille plus petite et la forme légèrement courbée vers l’intérieur (et nondroite) du coussin de talon. (1) Le doigt de patte le plus long, soit le deuxième doigt qui se prolonge le plus loin ducoussin (2), permet de différencier le membre gauche du membre droit. Dans le cas du membre gauche, ce doigtse trouve à droite et, à l’inverse, à gauche dans le cas du membre droit.
membre antérieur gauche membre antérieur droit
Les deux options de recueil et de consignation d’empreintes consistent à tracer ou à photographier les empreinteslaissées sur le terrain. L’empreinte peut être tracée au moyen d’un marqueur soluble à l’eau sur un plexi-verrerectangulaire suspendu juste au-dessus de l’empreinte, puis transférée sur un acétate. Une autre méthodeconsiste à prendre une photographie au moyen d’un appareil photo numérique ou 35 mm, préférablement priseà l’aide d’un objectif macro ou de très près (Miller, 2001).
Il est possible de prendre jusqu’à 48 mesures d’une même empreinte, dont les suivantes : longueur et largeurde l’empreinte, coussin, doigts, ratios des caractéristiques et mesures d’angles entre autres (voir Smallwood etFitzhugh, 1993; Riordan, 1998; Grigione et al., 1999; Miller, 2001). Carolyn Miller (2001, 2003) a mis au pointun logiciel de mesure des empreintes de jaguars qui pourrait également s’avérer utile à l’étude des léopards.D’autres renseignements sur l’empreinte qui doivent être consignés sur le terrain incluent l’emplacement, lacomposition de la surface, s’il s’agit d’un membre antérieur ou postérieur et d’un membre gauche ou droit ainsique l’âge relatif de l’empreinte.
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
22
preintes sont rencontrées, nous recommandons au chercheur de consigner soigneuse-
ment les données d’empreintes et les autres paramètres recueillies dans le cadre de son
étude des léopards.
6.2 Génotypage des excréments et des poils
Le génotypage de l’ADN des selles est une technique mise au point récemment et utilisée
pour identifier les individus d’une espèce donnée. Des lions de montagne individuels
(Ernest et al., 2000) et des coyotes (Kohn et al., 1999) ont pu être identifiés au moyen
de marqueurs par microsatellite dans l’ADN prélevé d’excréments sur le terrain. Toute-
fois, il faut souligner que ces études, et bien d’autres encore, ont été menées dans des
zones tempérées. Collecter une grande quantité d’excréments de carnivores peut s’avérer
un énorme défi à relever dans les forêts tropicales, où les excréments ont tendance à se
décomposer beaucoup plus rapidement. Cette décomposition accélérée s’explique par le
taux d’humidité et la température plus élevés ainsi que l’action des termites, des bousiers
et d’autres invertébrés. Il arrive parfois que des vertébrés sont attirés par des matières
non digérées (surtout à base de viande) et dévorent rapidement toute trace de chair
résiduelle sur les poils et les os. Par exemple, au cours des 10 mois de travail de terrain
mené dans le cadre de cette étude, à peine sept des 61 excréments recueillis n’avaient
pas été attaqués par des insectes ou recouverts de champignons. Dans quelques cas, les
selles exposées à la lumière directe du soleil (ex. : sur un chemin d’exploitation) faisaient
exception à la règle : dans le cas où la selle tout entière se dessèche rapidement, elle n’a
plus d’attrait pour la plupart des organismes, hormis les termites, et peut ainsi demeurer
intacte pendant plusieurs jours, selon la quantité de pluie reçue.
La taille des échantillons d’excréments est également déterminée par les conditions
climatiques et la méthode utilisée pour collecter les excréments. Dans les zones ayant
une longue saison sèche, il est courant de retrouver deux ou trois fois plus d’excréments
pendant la saison sèche que pendant le reste de l’année. (Henschel, obs. pers.; Ray et
Sunquist, 2001). Bénéficiant d’un minimum d’assistance pendant son étude, Henschel
a collecté 61 selles au cours d’une période de 10 mois. Lorsque plusieurs personnes
participent à la recherche d’excréments, comme ce fut le cas dans le cadre des études sur
l’alimentation des léopards menées en République centrafricaine (Ray et Sunquist, 2001)
et au Congo (Zaïre) (Hart et al., 1996), il est possible de collecter de grandes quantités
d’excréments. Au cours des deux études, une modeste prime monétaire ou autre a
été offerte aux collecteurs d’excréments pour les inciter à intensifier leurs efforts de
recherche.
Pourvu qu’il soit possible de trouver des excréments de léopard frais à intervalles régu-
liers, leur génotypage peut représenter une excellente option d’identification des indivi-
dus. Toutefois, la pertinence de cette technique et de son potentiel comme méthode de
recensement n’a pas encore été évaluée pour ce qui est des grands carnivores des forêts
pluviales. Puisque l’ADN est digéré par les bactéries plus rapidement dans les environne-
23
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
ments chauds et humides, il est possible que le génotypage des excréments soit moins
efficace dans les forêts tropicales que dans les environnements tempérés. Il est fort
probable que cette technique ne s’avère efficace que sur des selles qui sont relativement
fraîches et qui ont desséché rapidement (ex. : celles laissées sur une route; G. Mowat, in
litt.). De plus, il existe le problème courant de trouver un laboratoire de génétique de la
faune sauvage qui sera en mesure de mener les analyses et d’engager les coûts supplé-
mentaires (parfois élevés) que demandent de telles analyses. De surcroît, puisque l’iden-
tification d’ADN comporte un certain risque d’erreur (Creel et al., 2003), il est impossible
de statuer sur l’identification positive des individus avec une certitude absolue. Cette
incertitude peut, à son tour, produire de fausses estimations de capture et de recapture.
En tout cas, en présumant que de tels problèmes peuvent être résolus comme ce fut le
cas dans les environnements tempérés, le recours au génotypage des excréments comme
technique de recensement est néanmoins prometteur dans une certaine mesure pour
l’avenir. Dans cette optique, il vaut probablement la peine de prélever des échantillons
d’ADN des excréments collectés pour utilisation future (encadré 6B).
Encadré 6B. Prélèvement d’échantillons d’ADN des excréments.
Pour prélever un échantillon d’ADN d’une selle, il faut d’abord gratter environ 1 cm3 de matière molle de la surfacede la selle à l’aide de gants en caoutchouc et d’une tige stérilisée. Les échantillons de selles de carnivorespeuvent être utilisés pour identifier à la fois l’espèce et l’individu. Il existe un certain nombre de méthodes deconservation humide et sèche pouvant être utilisées, y compris une solution à 90 % d’éthanol, diverses solutionstampons, le séchage à la silice ou au four (entreposage à la température ambiante ou au congélateur dans lesdeux derniers cas). Murphy et al. (2001) ont découvert que la méthode de conservation et la durée d’entreposageinfluençaient les taux de succès de l’amplification PCR. Les taux de succès les plus élevés sont associés auxéchantillons conservés dans l’éthanol. Ils recommandent de conserver les échantillons d’ADN fécaux recueillisdans une solution à 90 % d’éthanol (rapport de volume 4:1, 12 mL d’éthanol:2-3 mL de matières fécales). L’alcoolstoppe immédiatement la décomposition, un problème de premier ordre dans les environnements chauds ethumides.
Aussi, les poils peuvent être recueillis au moyen d’un dispositif et génotypés pour établir
l’identité des individus. Cette technique est d’ailleurs largement utilisée sur les félidés
des forêts tempérées et boréales (McDaniel et al., 2000); toutefois, à notre connaissance,
cette méthode n’a pas encore été testée sur les carnivores tropicaux. L’utilisation de
grillage en fil de fer barbelé ou le recours à des tapis imbibés d’une substance attractive
(ex. : l’herbe à chat) sont deux méthodes qui méritent d’être testées. Cette méthode
mérite d’être mise à l’essai; une première étape essentielle sera de vérifier comment les
léopards réagissent à l’odeur. Les mêmes problèmes vécus avec le prélèvement d’ADN
des excréments risquent de nuire aux efforts d’échantillonnage des poils dans les régions
tropicales, mais dans une moindre mesure. En évitant de recourir à la méthode de col-
lecte de poils pendant la saison des pluies, les chercheurs s’assureraient probablement
que les poils collectés contiennent suffisamment d’ADN pour fins de génotypage quel-
ques jours ou une semaine plus tard (G. Mowat, in litt.).
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
24
6.3 Photographie à distance (piégeage photographique)
L’identification de léopards individuels est relativement facile, car chaque individu est
tacheté de façon différente. Puisque les rencontres directes de léopards sont excessive-
ment rares dans les forêts tropicales, l’identification des individus n’est possible qu’au
moyen de la photographie à distance. Les premières estimations de l’abondance de
grands félidés obtenues par capture photographique concernaient les tigres de l’Inde
(Karanth, 1995). Beaucoup de travail a été réalisé par la suite pour pousser le développe-
ment de cette technique afin d’estimer les densités de populations de félidés en forêt.
La plupart des chercheurs sont depuis arrivés à la conclusion que cette méthode est la
plus prometteuse pour estimer l’abondance absolue de grands carnivores furtifs. Tout
comme les tigres, les léopards en forêt empruntent régulièrement des sentiers naturels et
des chemins d’exploitation pour se déplacer, et l’installation de pièges photographiques à
des emplacements stratégiques le long de ces sentiers et chemins permettra de capter sur
pellicule des léopards individuels dans la zone d’étude.
Dans le cadre de deux exercices distincts sur le terrain en 2001 et 2002, Philipp Henschel
a installé des pièges photographiques dans le but de recueillir des statistiques de capture
et de recapture devant servir à l’estimation des densités. Il a adapté aux forêts d’Afrique
certains aspects du plan d’échantillonnage et de la méthode de piégeage photographique
élaborés pour l’Asie. Au cours de sa première saison sur le terrain, Henschel a mené une
première évaluation des densités de léopards en forêt d’Afrique dans une région de
18 km2 du parc national Lopé du Gabon. Dans un deuxième temps, il a estimé les densi-
tés dans quatre zones d’études de 100 km2 chacune, caractérisées par différents types
d’habitats. L’analyse de la méthode de piégeage photographique qui suit repose en bonne
mesure sur cette expérience. Pour obtenir les estimations les plus robustes à l’aide de
cette méthode, il est essentiel d’avoir un taux de capture de léopards assez élevé pour
être en mesure d’appliquer les statistiques de capture-recapture. Les sections qui suivent
vous indiqueront ce qu’il faut faire pour obtenir des taux de capture élevés, en fonction
de la délimitation de la zone d’étude, de l’équipement, de l’installation et de l’emplace-
ment des pièges entre autres facteurs.
25
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
7. Analyse exhaustive du piégeagephotographique comme méthoded’estimation de l’abondance desléopards
7.1 Considérations de plans d’échantillonnage
i. Limites de la zone d’étude
Les choix sont parfois limités pour établir les limites d’une zone d’étude. Ces limitespeuvent être dictées par des limites de compétence, la division des habitats ou encoredes questions de logistique. En règle générale, plus la zone d’étude est étendue, plusexacts seront les résultats. L’exactitude des estimations de la densité varie proportionnel-lement à la taille de la population, puisque plus la zone d’étude est grande, moins l’effetde « lisière » est prononcé (c’est-à-dire les risques de surévaluer la densité étant donnéque certains individus dénombrés aux limites de la zone d’étude n’y résident qu’à tempspartiel ou, autrement dit, ils ne résident pas dans la zone d’étude 100 % du temps; Whiteet al., 1982). La proportion de résidents partiels diminue de façon inversement propor-tionnelle à la taille de la zone d’étude. Toutefois, le travail investi dans l’établissementd’une plus grande zone d’étude doit être contrebalancé par la nécessité d’optimiser lesprobabilités de recapture des individus et de tenir compte de certaines hypothèses inhé-rentes aux modèles de marquage et de recapture. L’omission de tenir compte de la ferme-ture de la population (la période d’échantillonnage est assez courte de sorte à exclure lesnaissances, les décès ou encore les phénomènes d’émigration et d’immigration) au coursdes études de marquage et de recapture peut également produire une surévaluation de lataille des populations. L’installation de pièges et le nombre de pièges installés (voir lasection 7.1iii) peuvent contribuer à optimiser la probabilité de recapture.
En conséquence, la meilleure stratégie consistera à optimiser la zone d’étude en fonctionde l’effort devant être déployé dans le temps requis pour tenir compte de l’hypothèse dela population fermée. Des considérations logistiques telles que le nombre de piègesphotographiques, la distance pouvant être couverte chaque jour et les effectifs dicterontl’effort qui pourra être déployé. Il est important de souligner qu’il n’existe aucune règled’or pour déterminer le temps maximal alloué tout en tenant compte de l’hypothèse de lapopulation fermée. Alors que ce temps serait idéalement déterminé par une connaissancerelativement détaillée des paramètres démographiques de la population de léopards àl’étude, ces paramètres ne sont habituellement pas connus. Karanth et Nichols (2002)recommandent de limiter la période d’échantillonnage à un maximum de 8 à 12 semai-nes (réf. : leur étude menée sur les tigres), mais les paramètres peuvent varier considéra-blement entre les espèces et même entre les zones d’étude. Il importe d’utiliser la périoded’échantillonnage la plus courte possible. Cependant, le logiciel CAPTURE (voir la sec-tion 7.6) permet de mettre les données à l’essai tout en tenant compte de la fermeture dela population. Des modèles ouverts sont également offerts, bien qu’il soit moins préféra-ble d’y recourir (Karanth et Nichols, 2002).
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
26
Comme tous les autres grands carnivores, les léopards choisissent d’habiter des domai-
nes vitaux qui sont suffisamment grands afin de s’assurer d’une provision de proies
suffisante à longueur d’année. Bien qu’il existe une pléthore de données sur la taille des
domaines vitaux des léopards d’Afrique habitant la savane, des colliers émetteurs n’ont
été posés que sur trois individus en forêt. Jenny (1996) a réussi à poser un collier émet-
teur sur un léopard mâle et deux léopards femelles dans le parc national Taï en Côte
d’Ivoire, ce qui lui a permis d’établir que le domaine vital du mâle était de 86 km2 tandis
que celui des femelles était de 29 km2 et de 22 km2 respectivement. Les domaines vitaux
des deux sexes peuvent se chevaucher (Jenny, 1996), et un certain degré de chevauche-
ment peut même exister entre le domaine vital d’individus du même sexe (Rabinowitz,
1989; Grassman, 1999). Idéalement, la zone d’étude doit être suffisamment grande pour
inclure au moins une partie du domaine vital de plusieurs individus. Dans le cadre de
leur étude des tigres en Inde, Karanth et Nichols (1998) ont installé leurs pièges photo-
graphiques dans des zones s’étendant sur les superficies variant de 49 à 142 km2 et
identifié un minimum de cinq individus dans chaque zone.
ii. Nombre et emplacement des pièges
Le nombre de pièges accessibles représente habituellement le facteur contraignant dans
les études utilisant des pièges photographiques. Le plan d’échantillonnage doit toutefois
prévoir l’installation de pièges uniformément dans toute la zone d’étude pour éviter les
situations où il sera impossible de piéger certains individus (Karanth et Nichols, 2000,
2002). Dans une population de léopards, ce sont les femelles adultes qui ont le domaine
vital le plus restreint. Dans les habitats où les proies sont abondantes, la femelle adulte
pourra se contenter d’un domaine vital couvrant à peine 9 km2 (Grassman, 1999). Il est
donc nécessaire de s’assurer d’installer un minimum de 2 ou 3 pièges dans une zone de
cette superficie, dans le cas où la densité de proies dans la zone d’étude est jugée élevée
(Karanth et Nichols, 2002). Ainsi, les pièges seront installés à une distance d’environ
deux kilomètres l’un de l’autre et, en conséquence, quelque 25 pièges devront être
installés pour assurer une couverture uniforme d’une zone de 100 km2. Il est important
de souligner que plus la zone d’échantillonnage est grande, plus efficace sera l’échan-
tillonnage, une fois la zone tampon ajoutée (voir la section 7.6iv).
Dans le cas où moins de pièges photographiques sont disponibles, la solution consiste à
subdiviser la zone et de prélever les échantillons dans chaque subdivision individuelle-
ment (Karanth et Nichols, 2002). Par exemple, si une zone de 100 km2 doit être échan-
tillonnée et que seulement 10 pièges photographiques sont disponibles, la zone d’étude
pourra être subdivisée en quatre blocs de taille identique, et les blocs seront échantillon-
nés l’un après l’autre. Toutefois, cette technique a pour effet de prolonger le temps total
requis pour faire le relevé. Si la zone est divisée en trois blocs, il est logique de conclure
que l’échantillonnage de la zone tout entière nécessitera au moins trois fois plus de
temps que si les chercheurs avaient disposé de suffisamment de pièges photographiques
pour couvrir toute la zone d’un seul coup. Par contre, l’échantillonnage complet de
toutes les subdivisions devra être accompli dans le cadre temporel dicté par l’hypothèse
de population fermée (de 2 à 3 mois). À son tour, cela dictera les décisions qui devront
être prises eu égard à la période pendant laquelle les pièges demeureront sur le terrain
27
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
ainsi qu’au nombre d’occasions de capture et de recapture souhaitées ou planifiées.
Pendant l’analyse des données, toutes les subdivisions sont traitées comme si elles
formaient une grande zone (voir la section 7.1iii).
Étant donné qu’un des aspects théoriques les plus importants du piégeage photographi-
que est la saisie du plus grand nombre possible de clichés par individu et la saisie photo-
graphique du plus grand nombre possible d’individus différents (Karanth et Nichols,
2000, 2002), il est essentiel d’installer les pièges aux meilleurs endroits possibles afin
d’optimiser les chances de capture de léopards. Comme nous l’avons mentionné ci-
dessus, il est démontré que les léopards – tout comme d’autres grands félidés – se dépla-
cent le long des chemins et des sentiers; en conséquence, nous recommandons fortement
d’installer des pièges le long de sentiers empruntés régulièrement par des éléphants ainsi
que le long de chemins d’exploitation. Idéalement, les chercheurs devraient procéder à
quelques semaines de travail de reconnaissance en parcourant toute la zone d’étude à
la marche et ce, afin d’évaluer la présence relative de léopards en fonction des signes
recueillis et d’y installer des pièges en conséquence, c’est-à-dire le long des chemins où
des signes indiquant la présence de léopards ont été trouvés. Les chasseurs locaux
peuvent également faire une contribution utile à un tel effort de définition de ces zones.
Les points d’intersection de sentiers et de chemins ainsi que les lits de rivières et de
ruisseaux ou tout endroit où les proies se rassemblent naturellement peuvent constituer
de bons sites potentiels, même dans le cas où aucun signe patent n’indique la présence
antérieure de léopards.
Le principal facteur qui dicte la probabilité de capture de léopards semblerait être l’acces-
sibilité aux chemins permettant les déplacements dans les différentes zones d’étude
(encadré 7A). S’il existe de nombreux sentiers de largeur comparable, les léopards béné-
ficieront d’un plus grand choix dans leurs déplacements et, en contrepartie, il sera plus
difficile de prévoir les déplacements de ces léopards et de décider du bon emplacement
pour installer les appareils de détection. Au contraire, dans les zones traversées par un
nombre relativement bas de chemins (ex. : les concessions d’exploitation forestière),
les déplacements des léopards seront davantage limités, et les probabilités – et donc les
taux – de capture seront plus élevées le long de ces chemins. L’approche de capture et
de recapture devrait être en mesure de tenir compte de l’écart dans le taux de capture,
car elle permet d’estimer les probabilités de capture prévalentes des individus dans la
zone respective et produit une estimation de population assortie de limites de confiance.
Toutefois, la probabilité de capture dans une zone peut être tellement faible qu’il soit
impossible d’obtenir un nombre suffisant de captures (encore moins de recaptures) pour
produire une estimation robuste de la densité. De plus, les limites de confiance sont très
larges. Cependant, même dans le cas où aucun léopard n’est recapturé, pourvu que
plusieurs individus aient été capturés au moins une fois, certains modèles de recapture
pourront servir à estimer la densité. Autrement, la seule véritable option offerte est de
déployer un effort plus intense (voir la section 7.1iv). Toutefois, il est également possible
que le faible taux de captures soit en fait indicateur d’une densité de léopards trop faible
pour produire une estimation fiable de la densité, nonobstant l’effort de piégeage photo-
graphique déployé (Karanth et Nichols, 2000).
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
28
iii. Nombre d’occasions d’utiliser des modèles de capture et de recapture
Dans le cadre d’études de capture et de recapture, la même zone doit être échantillonnée
de la même façon à plusieurs reprises. Chaque échantillonnage de la zone se définit
comme une « occasion de piégeage » (Karanth, 1995; Karanth et Nichols, 1998). Le fait
d’augmenter le nombre d’« occasions » de capture et de recapture produira habituelle-
ment des résultats plus précis. Comme toujours, plus est mieux, mais une dizaine d’occa-
sions de capture et de recapture devraient produire de bons résultats dans le cadre
d’études de capture et de recapture de tigres (Karanth et Nichols, 1998). Au moment de
planifier une étude, il s’avère utile de tenter de trouver un compromis entre le nombre de
jours consacrés à l’installation des pièges et le nombre d’occasions de piégeage souhaité.
Dans les zones faciles d’accès, il peut être possible de déplacer chaque piège après
chaque prélèvement d’échantillons; toutefois, dans les régions plus isolées, il est préféra-
ble de laisser tous les pièges en place pendant un certain nombre de jours pour ensuite
considérer chaque journée comme une occasion de piégeage différente. Donc, si la
décision est prise de laisser tous les pièges en place pendant dix jours dans une zone
donnée, tous les animaux photographiés le premier jour sont considérés comme ayant
été capturés pendant la première occasion, tous les animaux photographiés la deuxième
journée sont considérés avoir été capturés pendant la deuxième occasion et ainsi de
suite. Dans les cas où une plus grande zone est subdivisée, la somme est faite de toutes
les captures au cours de la première journée de piégeage pour représenter le nombre de
captures pendant la première occasion. Le nombre de captures et de recaptures obtenues
au cours de la deuxième occasion sera ensuite calculé en faisant la somme du nombre
de captures et de recaptures au cours de la deuxième journée de piégeage dans chaque
subdivision et ainsi de suite.
iv. Adaptation du taux d’échantillonnage aux taux réels de capture de léopardssur le terrain
Selon les taux de capture de léopards obtenus au cours des premières semaines de
l’étude (en quelque sorte, une étude pilote), l’on devrait être en mesure de modifier les
unités de temps qui restent ou encore le nombre de journées par occasion d’échantillon-
nage, le cas échéant. Dans le cas où le nombre total de captures est très bas, il faut
s’attendre à une capacité d’enquête des sources de variation dans la probabilité de
capture, et ainsi de sélection du modèle d’estimation de l’abondance approprié (voir la
section 7.6iii), plutôt limitée (Karanth et Nichols, 1998). Afin de recueillir suffisamment
de données pour accroître le niveau de précision de l’estimation de la taille de la popula-
tion, il peut être efficace d’intensifier les efforts en augmentant le nombre d’unités de
temps alloué à un site puis en regroupant plusieurs journées pour former une occasion.
Par exemple, si seulement trois images du même léopard ont été prises au cours d’une
étude ayant duré dix jours, où tous les pièges photographiques ont été installés dans une
seule zone, cela peut indiquer qu’il s’agit du seul individu qui fréquente la zone. Cepen-
dant, une autre explication possible du fait qu’aucun autre individu n’a été photographié
est que les probabilités de capture de léopards individuels sont extrêmement faibles dans
cette zone. Cela peut parfois être attribuable à un réseau élaboré de pistes d’éléphants
dans la zone, ce qui complique la tâche de prévoir les sentiers que les léopards emprun-
29
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
Encadré 7A. Répercussions possibles du type de chemin ou de sentier sur la probabilitéde capture de léopards : résultats obtenus de l’étude menée au Gabon (Henschel).
Dans le cadre d’une étude pilote sur les léopards menée dans la réserve de Lopé en 2001, j’ai installé des piègesphotographiques dans une petite zone d’étude de 50 km2, formée d’une mosaïque de forêts et de savanes dans lenord et d’une forêt de marantacées (Marantaceæ) dans le sud. J’ai choisi 30 emplacements pour installer mespièges, dont la moitié se situait le long des nombreux chemins de terre dans la forêt et la savane et l’autre moitié,sur les pistes d’éléphants dans la forêt du sud, où aucun chemin n’avait été construit. Au cours d’une période de72 jours, les cinq unités ont été périodiquement déplacées de site en site, et j’ai pu capter 16 photographies deléopards : seulement trois ont été saisies dans une piste d’éléphants tandis que les autres captures provenaientde pièges installés le long des chemins de terre. Afin de comprendre la raison expliquant cet écart considérabledans le taux de succès des captures, j’ai mené une autre étude dans quatre sites représentant différents habitatset différentes perturbations.
1. Forêt de marantacées : Une forêt secondaire naturelle au sous-bois très dense, sans chemin et parseméede quelques pistes d’éléphants et d’un réseau élaboré de pistes d’alimentation d’éléphants. Aucuneperturbation autre que les chercheurs et d’occasionnels touristes empruntant certaines parties du réseau desentiers.
2. Forêt primaire : Forêt au sous-bois clairsemé, sans chemin mais parsemée de très grands pistes d’élé-phants. Zone touchée par la chasse de subsistance et une faible chasse commerciale.
3. Concessions d’exploitation forestière abandonnées : Réseau de chemins d’exploitation abandonnés dansune forêt primaire exploitée au sous-bois clairsemé. Chemins en friche dans une certaine mesure, mais plusimposants que les pistes d’éléphants. Aucune présence humaine depuis au moins les six dernières années.
4. Concessions d’exploitation forestière actives : Réseau de chemins d’exploitation actifs dans une jeune forêtprimaire au sous-bois relativement dense. Chemins plus ou moins achalandés. Présence de peu d’éléphantscompte tenu des perturbations causées par les activités de récolte du bois (très peu de pistes d’éléphantsévidents).
Ces habitats et ces perturbations figurent parmi les plus courants des forêts tropicales d’Afrique. Bien que la forêtde marantacées représente une variété locale, sa structure peut néanmoins être comparée à celle d’autres typesde forêts secondaires à couvert clair, dont le sous-bois est très dense, dominées par différentes familles deplantes herbacées. Pour cette raison, ces sites ont été choisis pour mener cette étude comparative visant àestimer les densités de léopards dans les divers types de forêts d’Afrique. Dans chacun des quatre sites, despièges ont été installés dans les sentiers accessibles jugés les plus empruntés par les léopards, en fonction de lafréquence à laquelle des signes de présence de léopards y ont été trouvés : 1. dans le cas des forêts demarantacées et primaires, les principales pistes d’éléphants accessibles, souvent ceux longeant les rivières ou lescrêtes; 2. dans les anciennes concessions d’exploitation, les principaux chemins d’exploitation accessibles; 3.dans les concessions d’exploitation actives, dans tous les chemins d’exploitation à l’exception de ceux qui sonttrès achalandés puisque, pendant l’étude, aucune trace ni aucun excrément n’a été trouvé à proximité de ceschemins très achalandés. Dans tous les sites à l’exception de la forêt primaire, la chasse n’était pas un facteur etl’accessibilité des proies (probablement le principal facteur influençant le nombre de grands carnivores) étaitcomparable d’un site à l’autre. Cela se reflétait également dans les taux de capture combinés de tous les mammi-fères (tableau 2).
site jours de piégeage
463
46
251
139
119.02
20.63
72.97
34.84
aucune
chasse
aucune
récolte de bois
389
223
344
399
captures taux de capture1 perturbation
1 captures/jour de piégeage x 100 (facteur d’uniformisation)
Tableau 2. Taux de capture photographique de tous les mammifères.
Forêt de marantacées
Forêt primaire
Concession abandonnée
Concession active
suite à la prochaine page ➤
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
30
site jours depiégeage
7
4
17
24
389
223
344
399
captures taux decapture1
nombred’individus
1 captures de léopards/jour de piégeage x 100 (facteur d’uniformisation)2 km de sentiers/km2
Tableau 3. Comparaison des taux de capture photographique de léopards entre sites.
densité desentier2
1.8
1.79
4.94
6.02
4
1
7
5
3898
1498
764
357
Forêt de marantacées
Forêt primaire
Concession abandonnée
Concession active
suite de la page précédente
Une importante question à laquelle cette étude a tenté de répondre est la suivante : Quelle est la relation quiexiste entre la densité des sentiers de léopards et la probabilité de capture photographique? Dans chaque site àl’étude, j’ai estimé la longueur totale du meilleur sentier de léopards en consignant des « journaux de trace » lelong de chaque sentier et ce, au moyen d’une unité GPS Garmin 12 XL. J’ai ensuite exprimé la densité de sentiersous la forme de « kilomètres de sentiers/chemins par km2 » pour chaque site à l’étude.
La forêt de marantacées affiche le taux de capture le plus élevé tandis que le taux le plus bas est rapporté dans laforêt primaire, la plus perturbée par les activités de chasse. Les animaux capturés dans tous les sites représen-tent majoritairement de potentielles espèces-proies pour les léopards, surtout des céphalophes et des cochons.En partant de l’hypothèse que les écarts dans les taux de capture reflètent de réels écarts dans la densité despopulations animales, il est possible d’arriver à la conclusion que la biomasse accessible était de loin supérieuredans la forêt de marantacées. Il serait logique que la disponibilité de proies potentielles se reflète par les densitésde populations de léopards les plus élevées dans cet habitat, mais cela ne se reflète pas dans les taux de capturede léopards (tableau 3, figure 5). Les taux de capture de léopards étaient bas dans la forêt de marantacées, oùles taux de capture de proies potentielles les plus élevés ont été enregistrés. Il n’est toutefois pas conclu que cestaux de capture faibles reflètent la faible densité de populations de léopards dans cet habitat, ce qui est corroborépar le nombre relativement élevé d’individus identifiés (tableau 3, figure 5). Il a été possible d’identifier quatreléopards différents dans sept clichés photographiques tandis que, dans la concession active où la chassereprésentait une certaine perturbation et où le nombre de léopards était probablement plus bas, il n’a été possibled’identifier que cinq individus dans un total de 24 clichés photographiques. Des taux de capture élevés ne reflètentdonc pas nécessairement une population de léopards nombreuse mais plutôt un nombre élevé d’occasionsfavorables à la capture de léopards le long d’un type de sentier ou de chemin donné.
0.00
1.00
2.00
3.00
4.00
5.00
6.00
7.00
marantaceafores t
primaryforest
abandonedconces sion
activ ec oncession
capt
ure
rate
050010001500200025003000350040004500
trail
dens
ity
capture rate
trail dens ity
Figure 5. Comparaison des taux de capture photographique de léopards entre sites.
forêt demarantacées
forêt primaire concessionabandonnée
concessionactive
taux
de
capt
ure
dens
ité d
e se
ntie
rs
taux de capture
densité de sentiers
31
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
teront (voir l’encadré 7A). Un moyen de surmonter ce problème est d’augmenter le
nombre de journées de piégeage (c’est-à-dire le nombre total de journées pendant les-
quelles chaque piège demeure en service) dans la zone. Lors du prochain échantillon-
nage de la zone, une période de trois journées consécutives pourrait être définie comme
constituant l’occasion d’échantillonnage, et tous les pièges photographiques demeureront
en service pendant une période totale de 30 jours (vérification requise après 15 jours
pour remplacer les pellicules et les piles, au besoin). Ces 30 journées de données peuvent
ensuite être subdivisées pour former dix occasions de piégeage distinctes, chacune
comptant son propre ensemble de données. Il est logique d’extrapoler que cette période
d’étude prolongée produira trois fois plus de captures et augmentera la probabilité de
photographier d’autres individus qui passent par la zone.
7. 2 Quel piège photographique choisir : TrailMaster ou CamTrakker?
Bien que les choix offerts dans le marché ne cessent d’augmenter, les marques TrailMas-
ter et CamTrakker dominent actuellement le marché des produits utilisés dans le cadre
d’études de marquage et de recapture des carnivores habitant en forêt.
i. L’appareil de surveillance active des sentiers TrailMaster (TM)
L’appareil TM 1550 comporte un émetteur et un récepteur et projette un rayon invisible
d’un côté à l’autre du sentier (figure 6). Cette unité est compatible avec divers accessoi-
res, dont le plus important est la trousse d’appareil photo TM35-1 qui permet de photo-
graphier les espèces visées. Une fois que le rayon a été ajusté à la hauteur de la poitrine
de l’animal surveillé et que le délai d’obstruction du rayon
qui déclenche l’enregistrement de l’événement a été réglé, il
devient en effet possible de viser certaines espèces, même si
d’autres espèces qui ont à peu près le même gabarit risquent
également de déclencher l’appareil. Chaque fois qu’un
animal franchit le rayon à infrarouge, la date et l’heure (à la
minute près) sont enregistrées et l’appareil peut ainsi stoc-
ker jusqu’à 1000 événements. Il est possible de programmer
l’unité de telle sorte à faire déclencher l’appareil photo
chaque fois aux mêmes moments. Par exemple, si les espè-
ces à l’étude sont exclusivement des animaux nocturnes,
l’appareil TM peut être programmé pour ne fonctionner que
pendant la nuit pour ainsi réduire l’utilisation de pellicules
et de piles à la fois. Dans le cas où des véhicules parcourant le chemin pendant le jour
risquent de déclencher les unités pendant les heures de clarté, elles peuvent être pro-
grammées de sorte à ne fonctionner que la nuit pour ainsi réduire l’utilisation de pellicu-
les. Il est également possible de programmer un délai pendant lequel l’appareil demeure
inactif après avoir été déclenché. Cela prévient la prise de photographies multiples d’un
groupe d’animaux passant devant l’unité ou d’animaux en quête de nourriture à proxi-
mité du piège pendant des périodes prolongées. Le délai peut être réglé de 6 secondes
à 98 minutes et programmé par incréments de deux secondes au début, puis de deux
minutes par la suite à partir de 40. Vous pourrez prendre connaissance plus loin dans ce
Figure 6. Installation de l’appareil photo TM.
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
32
Figure 7. Unité CamTrakker.
document (section 7.3) de recommandations sur la programmation sur mesure de
l’appareil TrailMaster en fonction des habitudes de vie des léopards. Pour commander
des unités de cet appareil photo, rendez-vous à www.trailmaster.com.
ii. L’appareil de surveillance passive de sentiers CamTrakker (CT)
L’unité CT combine un appareil photo 35 mm et un détecteur de mouvement passif à
infrarouge qui détecte la chaleur dégagée par les êtres en mouvement à l’intérieur d’une
zone conique (figure 7). L’unité est fixée à un arbre d’un côté du sentier à sur-
veiller. Elle doit être installée à la hauteur de la poitrine de l’espèce visée pour
ainsi optimiser les probabilités de capture. Cependant, cet appareil de sur-
veillance passive de sentiers capte habituellement un large éventail d’espèces
différentes. En temps normal, lorsqu’un animal marche dans le sentier, le capteur
détectera le mouvement et déclenchera l’appareil photo. Tout comme dans le cas
de l’appareil TM, l’unité peut être programmée pour fonctionner 24 heures par
jour, seulement le jour ou encore seulement la nuit. Il est également possible de
programmer un délai d’inactivité de l’appareil photo suivant son déclenchement.
Par contre, l’appareil n’offre que six délais possibles, depuis 20 secondes jusqu’à
45 minutes, ce qui peut représenter un inconvénient comparativement aux
possibilités accrues des unités TM. Il est possible de passer une commande de ces unités
depuis le site www.camtrakker.com.
iii. Analyse comparative du TrailMaster et du CamTrakker
L’unité TM offre davantage d’options de recueil de données que l’unité CT. En plus de
l’appareil photo 35 mm qui indiquera la date ou l’heure de la photographie, le récepteur
enregistrera la date et l’heure de tous les événements captés. Ainsi, dans le cas où une
unité demeure en place pendant plusieurs semaines et que l’appareil photo a été pro-
grammé de telle sorte à enregistrer l’heure, le récepteur enregistrera à la fois la date et
l’heure et, en comparant l’heure enregistrée par l’appareil photo à celle du récepteur,
il sera possible d’obtenir la date à laquelle chaque photographie a été prise. Il est néces-
saire de consulter les pellicules développées cadre par cadre tout en parcourant les
événements enregistrés par le récepteur, de ne pas tenir compte d’événements enregistrés
pendant la période d’inactivité de l’appareil photo (voir ci-dessous) et de prendre en note
la date inscrite sur chaque cadre. Outre les captures photographiques ainsi obtenues, ces
images fourniront des données sur les habitudes diurnes de l’espèce visée. Il est égale-
ment possible de régler la sensibilité de l’unité TM. Les réglages en usine se sont avérés
appropriés à l’étude de léopards, mais dans le cas d’espèces visées plus petites, la sensi-
bilité pourra être augmentée de sorte à accroître les taux de capture. La plage élargie de
délais programmables de l’appareil photo et la possibilité de procéder à un réglage plus
pointu de ce délai ont déjà été décrites ci-dessus.
33
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
L’unité CT est beaucoup plus simple à installer, plus léger et moins encombrant à trans-
porter. Enfin, elle coûte environ 120 $ (US) de moins que l’unité TM. Donc, dans le cas
où le budget est plus serré et/ou que le travail sera mené dans une région relativement
isolée, où l’accès aux véhicules n’est pas possible et où les unités devront être transpor-
tées dans des sacs à dos sur de longues distances, l’unité CT est toute désignée. De plus,
les unités CT sont plus faciles à installer et leur utilisation requiert une formation mini-
male comparativement aux unités TM. L’installation d’une TM 1550 est beaucoup plus
complexe et nécessite plusieurs étapes, contrairement aux unités CT, qu’il suffit de fixer
à un arbre en direction du sentier et de mettre en marche. Dans les régions où le risque
de vol d’unités peut devenir problématique, il est bon de savoir que les unités CT sont
livrées avec une bride à verrouillage permettant de verrouiller l’unité à un arbre ou à
un poteau et d’ainsi prévenir le vol. Toutefois, plusieurs des unités CT que nous avions
commandées pour cette étude ont été reçues endommagées. En effet, sur les 24 unités
CamTrakker que nous avions commandées, un total de six unités (ou 25 %) n’ont jamais
fonctionné. Ces unités défectueuses ont fini par être remplacées par CamTrakker, après
une certaine négociation toutefois, et nous avons eu de la difficulté à nous faire payer les
frais de port entre les États-Unis et l’Afrique. Nous recommandons donc de commander
les unités bien à l’avance pour éviter de devoir reporter le travail sur le terrain. Les unités
TM peuvent se remplir d’eau pendant de fortes pluies et, parfois, les appareils photos
déclenchent sans raison, c’est-à-dire sans qu’un événement soit enregistré. Les unités CT
produisent moins de clichés vides (encadré 7B), et les unités TM déclenchaient parfois
l’appareil photo lorsque le rayon était bloqué par des insectes sur le boîtier de l’unité ou
la chute de feuilles d’arbres sur le sentier. Pour comparer les pour et les contre des deux
marques de pièges photographiques, consultez le tableau 4.
Unité TrailMaster
550 $ (US)
1700 g
oui
réglage de précision, de 6 sec à 98 min
certaine formation requise
peut se remplir d’eau
non
0 %
29 %
52 %
CamTrakker
Tableau 4. Analyse comparative des pièges photographiques TrailMaster et CamTrakker.
429,59 $ (US)
900 g
non
six incréments, de 20 sec à 46 min
installation très facile
à l’eau
oui
25 %
11 %
12 %
prix courant
poids approximatif (piles comprises)
sensibilité réglable
option de délai de l’appareil photo
processus d’installation
étanchéité
possibilité de verrouiller l’unité
endommagée en sortant de la boîte
taux de défaillance sur le terrain
taux de clichés vides
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
34
Afin de tester le rendement des deux marques sur le terrain, j’ai installé des unités CamTrakker et TrailMaster àdes emplacements identiques dans quatre zones d’étude différentes et dans différents types de sentiers. Je n’aiconstaté aucune différence considérable entre les taux de capture de léopards ou d’autres mammifères peuimporte l’unité utilisée (tableau 5).
Encadré 7B. Mise à l’essai comparative des appareils CamTrakker et TrailMastersur le terrain (Henschel).
unité espèce
1110
1110
1110
245
245
245
742
44
12
157
8
1
66,85
3,96
1,08
64,08
3,27
0,41
tous les mammifères
léopard
chat doré
tous les mammifères
léopard
chat doré
jours de piégeage captures taux de capture1
1 captures/jour de piégeage x 100 (facteur d’uniformisation)
Tableau 5. Comparaison des taux de capture des deux marques de pièges photographiques.
CamTrakker
CamTrakker
CamTrakker
Trailmaster TM 1500
Trailmaster TM 1500
Trailmaster TM 1500
Malgré le taux de défaillance initiale des unités CT relativement élevé que j’ai connu, les unités CT se sontprouvées plus fiables que les unités TM en utilisation normale (tableau 6).
unité jours depiégeage
jours dedéfaillance
taux dedéfaillance (%)
clichésphotographiés
Tableau 6. Comparaison des taux de défaillance des deux marques de pièges photographiques.
CamTrakker
Trailmaster TM 1500
clichésvides
clichésvides (%)
1110
245
139
98
11.13
28.57
844
327
102
170
12.09
51.99
iv. Autres options
Une autre option consisterait à exploiter les avantages de l’unité TM (horodatage de
chaque événement enregistré et plage élargie de délais d’appareil photo) sans l’inconvé-
nient du rayon à infrarouge (production de 50 % de clichés vides au cours de cette
étude). L’appareil de surveillance de sentiers TM 550 est un détecteur de mouvement
passif à infrarouge qui enregistre les mouvements de tous les animaux à sang chaud qui
passent devant son capteur. Toutefois, il n’est pas déclenché par les insectes, la pluie ou
les feuilles d’arbres. L’appareil TM 550 offre les mêmes capacités de stockage de données
et les mêmes options de réglage du délai que l’unité TM 1550. Toutefois, cette unité n’a
pas été mise à l’essai dans le cadre de cette étude, et son rendement sur le terrain n’a pas
encore été vérifié dans les forêts pluviales. Il est également possible de se procurer cette
unité à l’adresse www.trailmaster.com.
CamTrakker offre également une unité munie d’un appareil photo numérique au prix de
650 $ (US). L’avantage de cette technologie est qu’elle permet le téléchargement d’images
prises sur le terrain à un ordinateur portatif, ce qui évite donc les coûts élevés (et parfois
difficiles à prévoir) engagés pour faire traiter les pellicules. L’inconvénient est le prix
35
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
d’achat plus élevé, ce qui peut poser problème lorsqu’il est nécessaire de remplacer des
unités ayant été détruites ou endommagées. Par exemple, dans le cadre de l’étude de
Henschel, cinq unités ont été endommagées par des éléphants et il hésiterait donc à
payer le prix plus élevé à l’achat au risque de perdre plus d’argent en fin de compte.
Dans les régions où les risques d’endommagement des unités par des éléphants ou des
humains sont faibles, le recours à l’unité CamTrakker numérique peut s’avérer une
bonne option. Comme c’est le lot de tous les appareils photos numériques, il est possible
de modifier la résolution des captures photographiques. À la résolution la plus basse
(1024 x 768), l’unité aura une capacité de saisie de 65 images.
Outre les unités CT et TM décrites dans ce guide, de plus en plus de pièges photographi-
ques de différentes marques font leur apparition dans le marché, mais la plupart de ces
nouveaux pièges n’ont pas encore été mis à l’essai par les biologistes de la faune (annexe
1). Les chercheurs qui travaillent dans des régions moins isolées de l’Amérique du Nord
commencent à évaluer d’autres systèmes : le Global Carnivore Program de la WCS met
actuellement à l’essai deux systèmes de rechange, et les résultats de ces essais seront
divulgués une fois qu’ils auront fait l’objet d’une évaluation adéquate.
7. 3 Installation et programmation des unités
i. Mise sous tension de l’appareil photo
La décision de mettre les appareils photos sous tension 24 heures par jour ou seulement
pendant la nuit dépendra des cycles d’activité de l’espèce visée. Dans cette étude, les
cycles d’activité des léopards variaient en fonction de l’intensité des perturbations hu-
maines dans la zone d’étude (encadré 7C). Cette observation va à l’encontre de la per-
ception courante que les léopards sont principalement nocturnes ou crépusculaires, et
nous recommandons donc de laisser les unités sous tension pendant le jour et la nuit.
Encadré 7C. Relation entre l’activité des léopards et les perturbations humaines (Henschel).
Pendant l’étude de Lopé, des pièges photographiques ont été placés à quatre emplacements différents, chacuncaractérisé par un niveau variable de perturbations humaines. Tous les pièges ont été mis sous tension pendant lejour et la nuit, mais il a été trouvé que les déplacements de léopards dans les sentiers variaient en fonction del’intensité relative des perturbations humaines (tableau 7).
Dans les zones de chasse, les léopards n’empruntaient les sentiers que pendant la nuit tandis que dans lesconcessions d’exploitation actives, où des activités de chasse se déroulaient également, ils limitaient leursdéplacements aux heures d’obscurité (de 18 heures à 6 heures). Toutefois, dans la concession abandonnée,aucunement perturbée par les activités humaines au cours des six années précédant l’étude, plus de 60 % desdéplacements de léopards dans les sentiers ont été enregistrés pendant le jour.
site nombre de capturesde léopards
28,6 %
0 %
64,7 %
8,3 %
aucune
chasse
aucune
coupe de bois et chasse
7
4
17
24
pourcentage de capturespendant le jour
perturbation humaine
Tableau 7. Heure du jour des captures de léopards.
Forêt de marantacées
Forêt primaire
Concession abandonnée
Concession active
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
36
ii. Délai de photographie séquentielle programmé
Il est toujours recommandé d’utiliser les réglages photographiques les plus rapides (délai
le plus court possible) pourvu que les caractéristiques de la zone d’étude le permettent
(O’Brien et al., 2003). Autrement, plus le délai de photographie séquentielle est long
(maximum de 45 minutes dans le cas de l’unité CT et de 98 minutes dans le cas de
l’unité TM), plus vous augmentez le risque de données manquantes dans votre grille de
piégeage si l’appareil photo est en mode inactif pendant le passage de léopards devant le
piège, résultant ainsi en une probabilité de capture de zéro et contrevenant au modèle
sous-tendant les études de capture et de recapture (voir la section 7.1ii). Toutefois, dans
certaines régions, il n’est pas possible d’utiliser les réglages les plus rapides en raison des
densités et des traits comportementaux des animaux qui fréquentent la zone d’étude.
Notre expérience nous démontre qu’il n’est pas rare de prendre une pellicule entière de
photographies de groupes d’éléphants ou de cochons en l’espace de quelques heures
lorsque l’appareil photo est réglé à son délai le plus court. O’Brien et al. (2003) ont laissé
en place des appareils photos pendant environ 30 jours, et 84 % des pellicules n’avaient
pas été entièrement prise au terme de cette période. Par ailleurs, durant l’étude pilote de
Lopé, des appareils photos ont été installés et réglés au réglage le plus rapide. Ils ont été
vérifiés tous les deux jours et, malgré cette période relativement courte, toute la pellicule
avait été prise dans 10 % des cas, un résultat qui se rapproche de celui obtenu par
O’Brien et al. (2003) après 30 jours. Si le taux de prise de la pellicule dans l’étude de
Lopé est utilisé pour calculer le pourcentage de cas où la pellicule n’aurait pas été entiè-
rement prise au réglage le plus rapide, ce pourcentage s’élèverait à 21 % après 30 jours.
Ainsi, environ 80 % de tous les pièges ne seraient plus fonctionnels vers la fin de la
période d’échantillonnage, ce qui laisserait de grands vides dans la grille de piégeage et
créerait de grandes sections où la probabilité de capture serait de zéro. Encore une fois,
cela irait à l’encontre du modèle sous-tendant les études de capture et de recapture. Il est
donc conseillé d’utiliser des délais d’appareil photo plus longs dans le cas où il n’est pas
possible de vérifier les unités à intervalles réguliers et où les pellicules risquent d’être
prises rapidement en raison du grand nombre d’éléphants et de cochons qui fréquentent
la zone d’étude. La pluie et la présence d’insectes sur le boîtier de l’unité peuvent égale-
ment poser problème en bloquant le rayon à infrarouge des unités TM à répétition,
résultant ainsi en la prise de 36 impressions en très peu de temps. La décision concer-
nant le réglage du délai doit donc viser à établir un équilibre entre le risque de ne pas
photographier un léopard qui passe devant l’unité peu de temps après qu’elle a été
déclenchée par l’un des nombreux animaux habitant la forêt et celui de perdre l’équiva-
lent de plusieurs jours de données si le délai programmé est trop court et la pellicule est
prise trop rapidement. Sur la base de notre expérience, nous recommandons d’opter pour
le réglage le plus long dans les régions isolées où la faune est la plus abondante, car des
éléphants très curieux ou de grands groupes d’animaux à la recherche de nourriture
(surtout des singes terrestres et des cochons) pourront flâner autour de l’unité pendant
plusieurs heures à la fois. Dans certaines concessions d’exploitation et d’autres régions
où la densité de populations d’éléphants est moindre, le réglage le plus court possible
sera de rigueur. Il importe toutefois de régler tous les appareils photos selon le même
délai à l’intérieur de la zone d’étude.
37
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
iii. Nombre d’appareils photos par poste
L’identification complète d’un léopard (voir la section 7.5) dépend habituellement de la
prise de photographies des deux flancs. Chaque flanc est tacheté différemment de telle
sorte qu’une photographie du flanc gauche de l’animal ne donnera aucune indication
quant à son flanc droit. Il est donc fortement recommandé d’installer deux appareils
photos, l’un de chaque côté du sentier, et ce, à chaque poste. Toutefois, dans le cas où les
contraintes sont très restrictives en raison de coûts élevés, d’un manque de personnel et
ou de la nature très isolée de la région et que le nombre d’appareils photos pouvant être
installés est par conséquent limité, il pourra s’avérer nécessaire de considérer d’autres
options. Bien que nous ne préconisions pas de couper inutilement les coins, nous savons
fort bien qu’il est parfois nécessaire d’adapter l’étude aux conditions qui règnent sur le
terrain. Nous souhaitons simplement faire valoir que s’il doit composer avec une étude
conçue de façon moins qu’optimale, le chercheur devra garder à l’esprit en tout temps les
risques inhérents à l’adoption de certaines approches, notamment en ce qui concerne la
non-conformité aux hypothèses de marquage et de recapture.
Une solution possible peut être de recueillir deux jeux d’identification distincts, par
exemple un des flancs gauches et l’autre des flancs droits. Les analyses sont ensuite
menées sur le flanc dont le plus de photographies auront été prises (O’Brien et al., 2003).
Une autre méthode pour assurer l’identification complète de léopards individuels qui
fréquentent la zone d’étude peut être d’installer des appareils photos de part et d’autre
du sentier à un sous-ensemble de postes (O’Brien et al., 2003). Évidemment, l’idéal serait
de procéder ainsi pour chaque site, mais cette méthode comporte malheureusement par
un processus d’installation plus coûteux et plus laborieux, donc plus long. De plus, si le
nombre d’appareils photos disponibles est limité, la réserve sera rapidement épuisée.
Quant aux léopards résidents, la probabilité d’obtenir une identification complète par un
piège comptant deux appareils photos installés au même site pourra être élevée, et il sera
par la suite possible d’identifier ces individus depuis d’autres postes où un seul appareil
photo a été installé et ce, peu importe le flanc photographié. Nous devons cependant
préciser que les résultats produits par un tel système relèvent davantage du hasard que
lorsque deux appareils photos sont installés. C’est pour cette raison que certains experts
le déconseillent.
L’effort requis pour installer des appareils photos de part et d’autre du sentier varie
considérablement entre les deux marques de pièges photographiques mises à l’épreuve
dans le cadre de cette étude. Dans le cas où l’équipement TM est utilisé, il est possible
d’acheter deux appareils photos TM 35-1 par trousse ainsi que l’appareil TM Multi-
Camera Trigger II, qui permet l’utilisation des unités TM de concert avec un maximum de
trois appareils photos (Karanth et Nichols, 2002). Le cas échéant, l’inconvénient est que
le câble qui relie les deux appareils photos devra être protégé des animaux, particulière-
ment des éléphants. Habituellement, l’on installe un appareil photo à proximité du
récepteur de sorte à pouvoir fixer le câble de l’appareil photo au même arbre ou poteau
que le récepteur et l’appareil photo. La tâche devient toutefois un peu plus complexe en
ce qui a trait à l’appareil photo installé de l’autre côté du sentier. Le câble ne doit pas
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
38
traîner dans le sentier puisque les animaux risquent de trébucher ou de l’enlever inten-
tionnellement. La solution la plus sûre consiste à creuser une tranchée sur la largeur du
sentier, d’insérer le câble dans un tuyau et d’enterrer ce tuyau dans la tranchée. Si vous
avez l’intention de retirer le câble à la fin de l’étude, vous pourrez attacher une corde à
une extrémité du câble pour ainsi le récupérer. Dans le cas où le site devait faire l’objet
d’une autre étude, il suffirait de réinsérer le câble de la même façon. Par contre, creuser
une tranchée – et transporter les tuyaux ou un autre dispositif de protection du câble –
peut s’avérer une tâche ardue dans les régions plus isolées. L’installation d’une unité CT
de chaque côté d’un sentier s’avère à peu près aussi coûteuse mais beaucoup plus simple
que l’installation des unités TM décrite ci-dessus.
iv. Hauteur adéquate et distance appropriée du sentier
Le rayon à infrarouge des appareils de surveillance active de sentier doit être installé à
une hauteur d’environ 40 cm du sol. Ainsi, vous vous assurerez que le rayon sera bloqué
par tout le corps, et non seulement les membres, d’un léopard ayant une démarche
normale. Le rayon sera donc bloqué pendant suffisamment de temps pour permettre au
récepteur de déclencher l’appareil photo. Dans le cas d’un appareil de surveillance
passive, le détecteur de mouvement par la chaleur doit être fixé à environ la même
hauteur. Dans le cas de ces détecteurs, il est tout aussi essentiel de les orienter de sorte
à ce qu’ils visent le centre du corps, là où la chaleur corporelle de l’animal est beaucoup
plus élevée qu’au niveau de ses extrémités. Il est également important de ne pas orienter
ces détecteurs vers des objets qui pourraient se réchauffer au soleil (par ex., des pierres
ou des troncs d’arbres exposés), sans quoi le détecteur ne pourra repérer un animal à
sang chaud si la température ambiante est supérieure à celle de l’animal. Les zones
découvertes peuvent également s’avérer problématiques à cet égard pendant les heures
de clarté.
Que des appareils de surveillance active ou passive de sentiers soient utilisés, l’appareil
photo lui-même doit être installé à une distance d’environ deux mètres du centre du
sentier. Si l’appareil photo est installé trop près du sentier, il sera difficile de prendre des
photographies du léopard en entier. Au contraire, si l’appareil photo est installé à une
distance de plus de trois mètres, les images prises pendant la nuit seront sombres puis-
que le flash intégré de l’appareil photo est plus ou moins efficace.
v. Facteurs établissant l’intervalle de vérification
Dans un environnement tropical, le facteur limitatif n’est pas la durée de vie des piles.
Les piles des unités CT ont une autonomie d’un ou de deux mois, après quoi le voyant
lumineux de commande s’affaiblit et les piles doivent être remplacées. Dans le cas des
unités TM, un jeu de piles aura une autonomie de jusqu’à six mois. La DEL du récepteur
s’allumera lorsque la capacité des piles aura diminué.
Habituellement, le facteur qui détermine l’intervalle de vérification des appareils photos
est le temps requis pour prendre toute la pellicule. En règle générale, les appareils photos
doivent être vérifiés chaque fois que la logistique de l’étude le permet. Dans le cas où la
39
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
logistique est facile, le délai de l’appareil photo peut être programmé à son réglage le plus
rapide (voir ci-dessus) et l’unité devra être vérifiée quotidiennement. Cela permettra
d’obtenir les meilleurs résultats puisque l’unité sera toujours en fonction et la probabilité
que toute la pellicule soit impressionnée en une seule journée est faible. Ainsi, la proba-
bilité de capture d’un léopard passant devant le site de piégeage ne sera jamais de zéro,
et le modèle de capture et de recapture sera respecté (voir ci-dessus).
Toutefois, dans la plupart des régions, la logistique sera plus complexe et commandera
des vérifications des pièges à intervalles plus espacés. Tel que présenté ci-dessus, l’utili-
sation du délai programmable le plus long économisera l’utilisation de pellicules et
contribuera ainsi à éviter des vides dans la grille de piégeage. Henschel a eu du succès
dans son étude en vérifiant les unités à intervalles moyens de 10 jours. Même sur les
sentiers très fréquentés par les animaux, il n’est jamais arrivé qu’une pellicule a été
entièrement prise pendant cette période, pourvu que l’appareil photo ait été programmé
à son délai le plus long. Par ailleurs, dans les zones très fréquentées par les chasseurs ou
rendues improductives pour d’autres raisons, aussi peu que cinq clichés ont été pris en
l’espace de deux semaines. Dans une zone d’étude donnée, s’il est évident que le sentier
est rarement emprunté par des animaux, il est possible de réduire le délai de déclenche-
ment de l’appareil photo et de prolonger l’intervalle de vérification tout en s’assurant de
prévenir le risque d’épuiser les pellicules installées dans les unités.
vi. Utilisation d’appâts
Les chercheurs travaillant dans un environnement tempéré installent souvent des appâts
à proximité de leurs pièges photographiques afin d’y attirer des carnivores (par ex.,
Zielinski et Kucera, 1995). Ils cherchent ainsi à offrir un incitatif supplémentaire à des
individus très dispersés qui ne passeraient autrement pas devant le piège photographique
passif. En effet, l’utilisation d’appâts peut contribuer à accroître l’efficacité d’un nombre
donné de pièges photographiques. Une autre circonstance où l’utilisation d’appâts peut
s’avérer de rigueur est lorsque les appareils photos sont installés à une certaine distance
des sentiers. Bien que nous ne le recommandions pas, il peut néanmoins s’avérer néces-
saire d’installer les appareils photos en retrait lorsque les sentiers empruntés par les
animaux sont également très fréquentés par les humains.
Pourvu que les appâts soient installés en respectant un protocole uniforme, l’utilisation
de tels attractifs n’aura probablement pas de répercussions marquées sur l’échantillon-
nage et ne posera aucun problème statistique pour ce qui est de l’estimation des taux de
capture et de recapture. Dans le cas des félidés, c’est habituellement l’herbe à chats qui
sert d’appât. L’herbe à chat est vendue sous forme sèche dans les animaleries nord-
américaines (G. Mowat, in litt.). Kitchener (1991) rapporte que les léopards sont attirés
par l’herbe à chat. Vu que les félidés n’ont pas le sens de l’odorat très développé, il est
peu probable que l’appât soit efficace au-delà d’une certaine distance. Par ailleurs, si le
félidé est attiré par l’appât, il y a toujours un risque mineur qu’un comportement rituel
de frottement du front soit stimulé, faisant en sorte que l’animal demeure en place plus
longtemps, voire y revienne (G. Mowat, in litt.). L’utilisation d’appâts n’a pas encore été
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
40
Figure 8. Exemple de l’identification non ambiguë du même léopard mâle àpartir des photographies prises par un piège photographique des taches
caractéristiques sur les flancs.
testée dans le cadre d’études de léo-
pards habitant les forêts humides, et il
est donc impossible de se prononcer
sur l’efficacité à plus long terme de ces
appâts dans un tel environnement.
Mettre la main sur des sources d’appâts
dans les forêts tropicales d’Afrique est
très difficile en raison de la faible
disponibilité des animaux d’élevage et
des difficultés de transport. Le rythme
de décomposition accéléré dans ces
environnements ne fait que compliquer
davantage la tâche à un point tel que
l’exercice n’en vaut même pas l’effort
dans la plupart des cas.
7.4 Enregistrement de données
Il est essentiel que les chercheurs sur le
terrain attribuent un numéro d’identifi-
cation unique à chaque appareil photo
et à chaque pellicule en bobine avant
d’installer les pellicules dans les appa-
reils photos. Ces numéros doivent être
vérifiés tout le long du traitement. Les
pièges photographiques doivent égale-
ment porter un numéro d’identification
ainsi qu’un emplacement correspon-
dant sur la carte, et il est essentiel
d’établir la correspondance entre les
bobines de pellicule, les dates et les
appareils photos et ces emplacements
cartographiés. Les photographies
individuelles de léopards seront peu utiles sans la tenue méticuleuse de tels dossiers de
correspondance. La mise en place d’un tel système permettra à différentes personnes de
vérifier l’état des appareils photos. Karanth et Nichols (2002) formulent d’autres recom-
mandations concernant les protocoles sur le terrain.
7.5 Identification de léopards individuels à partir de photographies
Les photographies prises sont habituellement d’une qualité adéquate à l’identification de
léopards individuels, même dans les cas où seule une partie du corps est visible. L’étape
suivante, celle de la confirmation, dans l’identification de léopards individuels est l’iden-
tification des traits caractéristiques du pelage. Initialement, la tâche peut sembler impos-
sible si le chercheur tente d’identifier les individus à partir d’une série d’images. L’identi-
fication des individus à partir de taches caractéristiques ne repose pas sur un examen de
41
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
Figure 9. Exemple de l’identification non ambiguë de deux léopards différents.tout l’animal. La façon la plus facile
d’y arriver, à notre avis, est de numé-
riser chaque image pour ensuite créer
des cartes d’identification numériques
pour chaque individu. À l’aide d’un
logiciel informatique tel qu’Adobe
Photoshop, il devient possible de faire
un zoom sur certaines parties des
flancs à la recherche de traits caracté-
ristiques tels que des grappes de
rosettes aux formes inhabituelles.
Le grand mâle illustré à la figure 8
a été capté à plusieurs reprises par
Henschel pendant son étude. Dès le
premier coup d’œil, un groupe de
taches dans la partie postérieure du
flanc supérieur gauche permet une
bonne identification : on y trouve une
série de petites taches encerclée de
rosettes plus grosses dans différentes
positions, une caractéristique facile à
retenir qui s’avère utile pour comparer
cet individu à d’autres individus. Dans
le cas de nouvelles captures photogra-
phiques de mâles, il suffira d’agrandir
la même région du flanc afin de
confirmer ou non que la nouvelle
capture représente le même individu
en fonction de l’apparence des roset-
tes. Voir la figure 9 pour un exemple
d’identification non ambiguë de deux
individus différents. Il est également
possible d’utiliser un scanner ordi-
naire pour numériser des portions de
négatifs, de diapositives ou de tirages
photographiques et d’analyser les
images à partir de tirages en noir et
blanc (A. Noss, in litt.).
Dans une nouvelle photographie,
simplement à partir de la taille et des
proportions de l’animal qui y figure, il est habituellement possible d’identifier l’animal
parmi ceux ayant déjà été identifiés. Après avoir numérisé la nouvelle image, le cher-
cheur doit faire un zoom sur les parties du flanc où apparaissent les traits caractéristi-
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
42
Figure 10. Différences dans la taille et les proportions d’une femelle adulte(photo du haut) et d’un mâle adulte (photo du bas).
ques des individus déjà identifiés (voir ci-
dessus) et sera habituellement en mesure
de déterminer rapidement s’il s’agit d’un
animal connu ou d’une nouvelle identifi-
cation. De plus, il est souvent possible de
déterminer s’il s’agit d’un léopard jeune
ou adulte à partir des proportions des
léopards photographiés et, dans le cas
d’adultes, de déterminer le sexe de l’indi-
vidu (figure 10).
Nous savons que ce ne sont pas toutes les
personnes sur le terrain qui auront accès
à un ordinateur ou aux logiciels requis
pour traiter des images numérisées. Dans
de telles circonstances, il ne sera toutefois
pas impossible d’identifier des individus,
car les mêmes principes que ceux décrits
ci-dessus pourront être appliqués à des
tirages photographiques. Le cas échéant,
une loupe et une source d’éclairage
intense devront être utilisées.
7.6 Analyse des données
i. Logiciel CAPTURE
Le logiciel CAPTURE (White et al., 1982, version mise à jour par Rexstad et Burnham,
1991) a été mis au point pour permettre la mise en œuvre des modèles de capture et de
recapture de populations fermées. Dans le cas de deux cycles de capture et de recapture,
il demeure relativement simple de calculer la taille de population résultante, mais il est
conseillé d’utiliser ce logiciel lorsque plus de deux cycles de données ont été recueillis.
Tel que mentionné ci-dessus, afin de se conformer à l’hypothèse d’une population fer-
mée, le chercheur doit limiter la durée de son étude à une période de 8 à 12 semaines
(Karanth et Nichols, 1998). Dans le cas où la période d’étude doit être prolongée afin de
couvrir l’ensemble de la zone d’étude sans savoir si l’hypothèse de population fermée a
été respectée, le logiciel CAPTURE offre la possibilité de mener un essai statistique de
l’hypothèse de fermeture. Il est possible de télécharger le logiciel ainsi que de la docu-
mentation pertinente du site www.cnr.colostate.edu/~gwhite/software.html.
ii. Élaboration d’une historique de capture de chaque léopard individuel
Une fois que toutes les données ont été recueillies, il importe d’élaborer un « historique
de capture » pour chaque individu identifié dans le cadre de l’étude. Ces historiques de
capture peuvent être entrés dans le logiciel CAPTURE pour l’ensemble des individus sous
la forme d’une matrice. Cette matrice, nommée « matrice X », contient une série de
rangées où chaque rangée représente un léopard individuel et chaque colonne, une
43
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
occasion d’échantillonnage. La matrice
peut être complétée rangée par rangée
(c’est-à-dire individu par individu) en
entrant soit « 1 » soit « 0 » selon si l’indi-
vidu a été capturé ou non au cours de
l’occasion en question (figure 11). Le
nombre d’occasions et le nombre total de
captures peuvent également être entrés
dans la matrice. Le chercheur peut ensuite
sélectionner un modèle pour procéder au
calcul de la taille de population.
iii. Choix du modèle
Le logiciel CAPTURE offre sept options
différentes d’estimation de la taille de population. Le modèle le plus simple, soit le
modèle nul (M0), fonctionne selon l’hypothèse qu’il n’existe aucun écart dans la probabi-
lité de capture des différents individus et entre les occasions d’échantillonnage. Le
modèle Mh permet de vérifier les écarts entre les probabilités de capture des différents
individus et le modèle Mb tient compte des écarts dans les probabilités de capture des
individus récemment capturés et les animaux capturés antérieurement. Ainsi, le logiciel
est en mesure de modéliser les données en tenant compte de la probabilité qu’un animal
photographié une première fois soit photographié une deuxième ou plusieurs autres fois;
autrement dit, si l’animal en question évite de circuler dans le site où un piège photogra-
phique a été installé. Le modèle Mt prend pour l’hypothèse que chaque occasion
d’échantillonnage comporte sa propre probabilité de capture, et le logiciel CAPTURE
permet au chercheur de combiner les trois modèles précédents pour créer trois autres
modèles d’estimation, notamment Mbh
, Mth et M
tb. Le chercheur se voit également offrir la
possibilité de sélectionner l’ensemble des modèles d’estimation de la taille de population
et de laisser le soin au logiciel CAPTURE de choisir le modèle le plus probable parmi
ceux-ci. Karanth et Nichols (2002) recommandent le modèle Mh puisqu’il intègre des
probabilités de capture hétérogènes. Ce choix est logique compte tenu du fait biologique
que les grands félidés sont des animaux territoriaux, dont l’étendue du domaine vital et
l’accès aux pièges varient selon leur position sociale et le lieu où l’animal se trouve dans
le territoire (U. Karanth, in litt.). Ce logiciel offre plusieurs avantages : il tient compte de
la non-conformité des logiciels de capture et de recapture antérieurs des hypothèses de
départ (par ex., que l’individu puisse éviter les pièges, que la probabilité de capture
puisse varier selon le sexe ou la saison).
iv. Calcul de la densité de population
Pour produire une estimation robuste de la densité de population de léopards à partir de
la taille de population obtenue du logiciel CAPTURE, il est essentiel d’estimer les dimen-
sions de la zone d’étude avec le plus d’exactitude possible. Dans le cadre d’études utili-
sant une grille de piégeage, il est reconnu que la zone de capture des animaux ne corres-
pond pas à la zone circonscrite par les pièges extérieurs (Otis et al., 1978). Il est donc
Figure 11. Saisie de données dans le logiciel CAPTURE. À ce stade-ci,les historiques de capture sont entrées pour l’ensemble des
individus identifiés.
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
44
courant d’ajouter une bande limitrophe à la zone définie par les pièges extérieurs puis-
que les animaux sont également capturés dans cette zone (Otis et al., 1978). Dans le
cadre de leur étude sur les tigres, Karanth et Nichols (1998) ont calculé la largeur de la
bande limitrophe en utilisant la « distance maximale moyenne de déplacements » de
l’ensemble des tigres capturés à plus d’une occasion. La largeur de cette bande limitro-
phe a ensuite été définie comme correspondant à la moitié de la distance maximale
moyenne des déplacements (Karanth et Nichols, 1998), pour donner l’équation suivante :
W = (Σ d / m ) / 2,
où W représente la largeur de la bande limitrophe résultante, d la distance maximale des
déplacements et m le nombre de distances maximales ayant été comparées. Ensuite, la
bande limitrophe de largeur W doit être ajoutée au périmètre de la zone couverte par
des pièges photographiques pour obtenir les dimensions de la zone d’échantillonnage.
La densité de population des léopards peut être estimée à l’aide de la formule
D = N / A(W),
où D représente la densité de population des léopards ainsi calculée, N la taille de
population calculée par le logiciel CAPTURE et A(W) la zone d’échantillonnage résul-
tante, y compris la bande limitrophe.
Silver et al. (sous presse) ont récemment utilisé une variante légèrement modifiée de
cette approche dans le cadre de leur travail d’estimation des densités de populations
de jaguars. Plutôt que d’inclure une bande limitrophe, la zone d’échantillonnage réelle
intégrait une zone tampon circulaire autour de chaque site extérieur de pièges photogra-
phiques, dont le rayon avait été calculé pour correspondre à la moitié de la distance
maximale moyenne des déplacements des jaguars individuels capturés à plusieurs repri-
ses au cours de la période d’échantillonnage.
7. 7 Utilisation de pièges photographiques dans l’étude d’autres espèces
i. Carnivores plus petits
Au total, sept espèces de carnivores ont été photographiées par les pièges photographi-
ques installés par Henschel. Malgré le fait que les unités avaient été installées en fonction
des léopards, une espèce beaucoup plus grande, les appareils de surveillance passive CT
notamment ont photographié un large éventail de carnivores plus petits. Les espèces
ainsi capturées étaient le chat doré (Profelis aurata), la genette servaline (Genetta
servalina), la civette d’Afrique, la civette palmiste (Nandinia binotata), la mangouste des
marais (Atilax paludinosus) et la mangouste à pattes noires (Bdeogale nigripes) (figure
12). Toutes ces espèces ont été capturées à intervalles réguliers, hormis la civette pal-
miste – une espèce davantage arboricole – qui n’emprunte probablement pas les sentiers
aussi souvent. Pour des raisons évidentes, des espèces davantage aquatiques telles que la
loutre à cou tacheté (Lutra maculicollis) n’ont jamais été capturées. L’absence de captu-
res de la mangouste rouge (Herpestes sanguinea) s’explique probablement par sa très
petite taille. Deux autres carnivores présents dans toutes les zones d’étude n’ont jamais
été capturés : le ratel (Mellivora capensis) et la genette tachetée (Genetta maculata).
45
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
c
Figure 12. Photographies d’autres carnivores capturées par hasard pendant l’étude photographique des léopards dans lecentre du Gabon : A. genette servaline (Genetta servalina); B. hyène tachetée (Crocuta crocuta); C. civette palmiste d’Afrique
(Nandinia binotata); D. chat doré d’Afrique (Profelis aurata); et E. mangouste à pattes noires (Bdeogale nigripes).
a b c
d e
Il importe toutefois de souligner que plusieurs de ces espèces (chat doré, genette et
mangouste à pieds noirs) n’ont jamais été physiquement piégées pendant deux années
d’efforts dans le sud-ouest de la République centrafricaine (Ray et Sunquist, 2001), et il
existe très peu de données sur ces espèces outre les vieilles notes de collecteurs de
musée. Plusieurs espèces, en particulier les genettes et les civettes, ont un pelage aux
caractéristiques distinctes, ce qui permet l’identification d’individus à partir de photogra-
phies de qualité. Puisque l’objectif principal de cette étude était de recueillir des images
entières de léopards plus grands, les pièges ont été installés à une distance d’environ
deux mètres du milieu des sentiers. Ainsi, d’autres carnivores apparaissent relativement
plus petits dans les images. Toutefois, si l’étude vise les carnivores plus petits et que les
pièges sont installés plus près des sentiers, une étude visant ces carnivores plus petits
devrait pouvoir être menée à l’aide de captures photographiques et du modèle de capture
et de recapture sans contrainte. D’ailleurs, il serait intéressant de mener une telle étude
dans un avenir rapproché. En effet, des chercheurs en Bolivie ont utilisé les techniques
de marquage et de recapture pour estimer les densités de petits carnivores qu’ils avaient
réussi à identifier individuellement tels que des ocelots (A. Noss, in litt.). Même s’il n’est
pas possible de procéder à des identifications individuelles, il peut néanmoins être
possible d’utiliser des appareils photos aux fins d’estimer l’abondance relative (voir ci-
dessous). Dans le cas de petits carnivores, nous recommandons de délimiter une zone
d’étude beaucoup moins grande (entre 1 et 5 km2), de réduire considérablement l’espace
entre les unités et d’installer les appareils photos le long des sentiers qu’emprunte le petit
gibier en plus des chemins d’exploitation et des plus grandes pistes d’éléphants.
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
46
ii. Autres espèces
Les espèces d’ongulés habitant la forêt pluviale d’Afrique dont le pelage présente des
marques caractéristiques sont rares, ce qui rendra impossible l’identification individuelle
de la plupart de ces espèces. Le tragélaphe rayé (Tragelaphus scriptus) fait toutefois
exception à la règle : Dans la zone limitrophe entre la forêt et la savane dans le nord de
la réserve Lopé, cet animal a été photographié fréquemment et il est facilement identifia-
ble par son pelage rayé. En effet, les densités ont pu être calculées à partir des captures
photographiques obtenues (Lopé, données non publiées). Des sitatungas (Tragelaphus
spekei) sont présents dans toute la région, mais aucune photographie de cette espèce
n’a été prise pendant cette étude, un résultat qui s’explique probablement par sa préfé-
rence pour les zones marécageuses. Le pelage distinctif et la grande taille des bongos
(Tragelaphus euryceros) et des okapis (Okapia johnstoni) en font une cible facile dans le
cadre d’une étude utilisant des pièges photographiques. Cette méthodologie a déjà
permis l’étude des bongos d’ailleurs (Elkan, 2003).
Durant son étude, Henschel a recueilli des images de qualité de gorilles (17) et de chim-
panzés (14). Il pourrait toutefois s’avérer relativement difficile de constituer un catalogue
d’identification uniquement à partir de ces images étant donné que, dans certains cas,
seules certaines parties du visage peuvent être visibles (le trait le plus caractéristique des
anthropoïdes) et il n’est pas possible d’obtenir une carte d’identification complète avec
description de tout le visage. Cependant, dans les régions où des études sur les gorilles et
les chimpanzés sont en cours et où plusieurs individus ont déjà été identifiés, la réparti-
tion uniforme des pièges photographiques dans la zone peut permettre le recueil de
données supplémentaires sur les déplacements des individus ainsi identifiés.
Outre des céphalophes et des cochons, l’éléphant a été l’espèce la plus souvent capturée
sur pellicule photographique pendant l’étude de Henschel. Toutefois, la plupart des
images recueillies ne montrent que les pattes et une partie du ventre. Dans l’identifica-
tion d’éléphants, les structures veineuses ainsi que les trous et les déchirures dans les
oreilles et la taille et la forme des ivoires sont des caractéristiques très importantes.
Lorsque l’appareil photo est installé à environ 1,5 mètre au-dessus du sol, des images de
qualité de cette partie du corps peuvent être prises. Quant aux gorilles et aux chimpan-
zés, l’identification à partir de photographies uniquement peut s’avérer difficile, selon la
position des oreilles dans différentes photos. De plus, si un projet d’étude des éléphants
est en cours dans un site, des données supplémentaires pourront être recueillies sur les
déplacements des individus identifiés.
47
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
iii. Présence ou absence et abondance relative
Même s’il n’est pas possible d’identifier les animaux individuellement, le piégeage
photographique demeurera un outil utile dans l’évaluation de la présence ou l’absence
et/ou l’abondance relative de ces animaux. Dans le cas de mammifères plus mobiles
(c’est-à-dire ceux qui se déplacent sur plus de 1 km par jour), les indices de taux photo-
graphiques pourront servir à quantifier leur abondance relative. Cette donnée statistique
pourra être obtenue pour chaque espèce à partir de la somme du nombre de journées
(période de 24 heures) de piégeage photographique par photographie pour l’ensemble
des appareils photos installés aux fins de l’étude (Carbone et al., 2001). Il importe toute-
fois de calibrer les taux photographiques en fonction des estimations indépendantes de
la densité des populations animales dans les sites représentatifs (O’Brien et al., 2003).
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
48
8. Ce que nous réserve l’avenir
Il n’est pas possible d’utiliser les techniques de recensement standards visant les prima-tes et les ongulés – deux groupes spécifiques communément étudiés en raison de l’intérêtqu’ils suscitent pour la recherche et la conservation dans le biome forestier de l’Afrique –pour étudier les léopards efficacement. En conséquence, les données sur l’histoire natu-relle ou la situation quant à la conservation des léopards en forêt sont rares. Le léopardreprésente le plus grand mammifère prédateur et le seul grand carnivore qui habite cetécosystème en péril. Le peu de données recueillies à ce jour permet d’en arriver auxconclusions suivantes : A. Il existe beaucoup de chevauchement entre les principalesespèces-proies des léopards et les chasseurs humains (ongulés et cochons en forêt); B.Les peaux continuent de faire l’objet de commerce dans certaines régions; et C. Malgréla capacité d’adaptation bien documentée des léopards, les preuves démontrent que despopulations entières de léopards ont disparu de plusieurs des forêts de l’ouest de l’Afri-que et les populations habitant aux limites du bassin du Congo commencent à montrerdes signes de vulnérabilité (Angelici et al., 1998; Bennett, 2001).
Ce document est le fruit d’efforts appuyés par le Global Carnivore Program de la WildlifeConservation Society visant à élaborer un protocole d’étude efficace pour les léopardsdes forêts d’Afrique. À notre avis, il représente un premier pas nécessaire dans le cadred’un exercice d’évaluation régionale et d’établissement des priorités en rapport avec lesléopards habitant en forêt, semblable à ceux menés sur les tigres (Wikramanayake et al.,1998) et les jaguars (Sanderson et al., 2002). Malgré l’argument invoqué par certainespersonnes que les léopards des forêts ne sont pas confrontés aux mêmes menaces que lesdeux autres espèces de félidés, nous soutenons que l’adoption d’une approche axée surla coordination régionale dès le départ comporte de nombreux avantages.
Dans le cadre d’une évaluation régionale de la situation des léopards, il sera importantd’estimer la densité de population dans les zones caractérisées par une certaine couver-ture végétale et certaines perturbations d’ordre humain (chasse et coupe à blanc d’habi-tats), préférablement dans un contexte « d’expérimentation naturelle » contrôlée, afin dequantifier les répercussions de telles variables sur les populations de léopards. Lorsqueles densités de populations de léopards représentatives des principaux types de forêtssont connues, il est possible de mieux évaluer les répercussions des modifications d’habi-tats à la suite d’activités d’exploitation forestière, par exemple. En comparant les popula-tions de léopards de plusieurs sites touchées par des perturbations humaines différentes,par exemple, il est possible d’identifier et de quantifier les menaces auxquelles les léo-pards sont confrontés. Les enquêtes initiales représenteront le premier pas crucial dansl’élaboration des priorités en matière de conservation et de recherche ainsi que dans lasurveillance des léopards des forêts du bassin du Congo et des forêts très fragmentées del’ouest de l’Afrique (Abernethy et al., 2001). En fonction des résultats obtenus dans lecadre de tels exercices, il pourra s’avérer utile à l’avenir de tenir un séminaire où deschercheurs travaillant sur le terrain dans le centre et l’ouest de l’Afrique pourront, ensem-ble, procéder à l’évaluation des données disponibles, former les chercheurs en matièredes techniques de surveillance des carnivores et mettre en place un centre d’informationsur les carnivores forestiers.
49
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
Remerciements
Nous tenons tout particulièrement à remercier la Michael Cline Family Foundation pour
son généreux financement du travail de terrain et de la rédaction de ce guide. Sans le
précieux apport d’Alan Rabinowitz, de Howard Quigley et de Kathleen Conforti du Global
Carnivore Program de la Wildlife Conservation Society, ce guide n’aurait tout simplement
pas été publié. Nous voulons également témoigner notre sincère appréciation à Luke
Hunter, Ullas Karanth, Boo Maisels, Garth Mowat, Andrew Noss, Tim O’Brien, Alan
Rabinowitz et Scott Silver, qui nous ont formulé de précieuses suggestions nous aidant à
améliorer les versions préliminaires de ce document et ainsi la qualité du produit final.
Quant au travail mené sur le terrain dans le cadre de ce projet, Philipp Henschel aimerait
remercier MM. Emile Mamfoumbi-Kombila et Adrien Noungou, directeurs de la faune et
de la chasse du Ministère des Eaux et Forêts du Gabon, pour lui avoir accordé la permis-
sion de travailler dans le parc national Lopé pendant l’étude; Jean-Daniel Moukengi-
Ikapi, directeur de la Brigade de la Faune de Lopé, pour son aide et l’intérêt qu’il a
démontré pendant l’étude; Kate Abernethy, Lee White et WCS Gabon pour leur soutien
pendant son étude sur le terrain; ainsi que Raoul Niangadouma et Dieudonné Madanou
pour leur aide et leur accompagnement sur le terrain. Le Centre International de Recher-
ches Médicales de Franceville a accordé la permission de travailler au SEGC, et NSG
Gabon a contribué au travail sur le terrain dans l’une de ses concessions d’exploitation.
Liz Bennett, Bryan Curran, James Deutsch, Paul et Sarah Elkan, Jefferson Hall, Peter
Howard, Monica Wrobel et Joanna Zigouris ont tous contribué à un stade ou à un autre
du projet. Nous remercions spécialement Michael Nichols, qui a fait preuve d’une grande
générosité en nous accordant la permission d’utiliser les belles photographies de léopards
imprimées sur les couvertures avant et arrière, ainsi que Green Living Communications,
responsable de la conception graphique et de la production du rapport. Enfin, nous
remercions Sébastien St-François pour la traduction française de ce guide et Guillaume
Chapron pour sa précieuse contribution.
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
50
ABERNETHY, K., PARNELL, R. & HENSCHEL, P. 2001. A Preliminary Outline of ResearchIssues Relating to the Development of a Regional Conservation Strategy for Central AfricanForest Felids. Unpublished concept paper, Wildlife Conservation Society-Gabon.
ANGELICI, F.M., AKANI, G.C., LUISELLI, L. 1998. The leopard (Panthera pardus) in south-eastern Nigeria: status, ecological correlates of occurrence and conservation implications.Italian Journal of Zoology 65: 307-310.
ANGELICI, F.M., LUISELLI, L., POLITANO, E, AKANI, G.C. 1999. Bushmen and mammalfauna: A survey of the mammals traded in bush-meat markets of local people in the rainfor-est of south-eastern Nigeria. Anthropozoologica 30: 51-58.
BAILEY, T.N. 1993. The African Leopard: Ecology and Behaviour of a Solitary Felid. ColumbiaUniversity Press, New York.
BENNETT, E. 2001. Report on trip to Central African (Gabon, Congo, and Cameroon), Pro-gram for the Conservation of Harvested Wildlife, Wildlife Conservation Society, New York.
BOTHMA, J. Du P., LE RICHE, E.A.N. 1984. Aspects of the ecology and the behaviour of theleopard (Panthera pardus) in the Kalahari desert. Koedoe (Suppl.) 27: 259-279.
CARBONE, C., CHRISTIE, S., CONFORTI, K., COULSON, T., FRANKLIN, N., GINSBERG, J.R.,GRIFFITHS, M., HOLDEN, J., KAWANISHI, K., KINNAIRD, M., LAIDLAW, R., LYNAM, A.,MACDONALD, D.W., MARTYR, D., McDDOUGAL, C., NATH, L., O’BRIEN, T.,SEIDENSTICKER, J., SMITH, D.J.L., SUNQUIST, M., TILSON, R., WAN SHAHRUDDIN, W. N.2001. The use of photographic rates to estimate densities of tigers and other cryptic mam-mals. Animal Conservation 4:75-79.
CREEL, S., SPONG, G., SANDS, J.L., ROTELLA, J., ZEIGLE, J., JOE, L., MURPHY, K.M.,SMITH, D. 2003. Population size estimation in Yellowstone wolves with error-pronenoninvasive microsatellite genotypes. Molecular Ecology 12: 2003-2009.
ELKAN, P.W., Jr. 2003. Ecology and conservation of bongo antelope (Tragelaphus euryceros)in lowland forest, northern Republic of Congo. Ph.D. Dissertation, University of Minnesota.
ERNEST, H.B., PENEDO, M.C.T., MAY, B.P., SYVANEN, M., BOYCE, W.M. 2000. Moleculartracking of mountain lions in the Yosemite Valley region in California: genetic analysis usingmicrosatellites and faecal DNA. Molecular Ecology 9: 433-441.
FRANKLIN, N., BASTONI, SRIYANTO, SISWOMARTONO, D., MANANSANG, J., TILSON, R.1999. Last of the Indonesian tigers: A cause for optimism. Pp. 130-147 In: Riding the Tiger:Tiger Conservation in Human-Dominated Landscapes, (Seidensticker, J., Christie, S., Jackson,P., eds.). Cambridge University Press, Cambridge.
GRASSMAN, L.I. Jr. 1999. Ecology and behaviour of the Indochinese leopard in KaengKrachan National Park, Thailand. Natural History Bulletin of Siam Society. 47: 77-93.
GRIGIONE, M.M., BURMAN, P., BLEICH, V.C., PIERCE, B.M. 1999. Identifying individualmountain lions (Felis concolor) by their tracks: refinement of an innovative technique.Biological Conservation 88: 25-32.
HARRISON, R.L. 1997. Chemical attractants for Central American felids. Wildlife SocietyBulletin 25: 93-97.
Bibliographie
51
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
HART, J. A.; KATEMBO, M., PUNGA, K. 1996. Diet, prey selection and ecological relations ofleopard and golden cat in the Ituri Forest, Zaire. African Journal of Ecology 34:364-379.
HAMILTON, P.H. 1981. The leopard (Panthera pardus) and the cheetah (Acinonyx jubatus) inKenya. Ecology, status, conservation and management. Unpublished Report for the U.S. Fishand Wildlife Service, the African Wildlife Leadership Foundation, and the Government ofKenya.
HAMILTON, P.H. 1986. Status of the leopard in Kenya, with reference to sub-Saharan Africa.Pp 447-459 In: Cats of the World: Biology, Conservation and Management (Miller, S.D.,Everett, D.D. eds.). National Wildlife Federation, Washington D.C.
HENSCHEL, P. 2001. Untersuchung der Ernährungsweise und der Populationsdichte desLeoparden (Panthera pardus) im Lopé Reservat, Gabun, Zentralafrika. MSc-Thesis, Universityof Göttingen, Germany.
JACKSON, P. 1989. The status of the leopard in sub-Saharan Africa: A review by leopardspecialists. Unpublished Report of the Cat Specialist Group, IUCN.
JENNELLE, C.S., RUNGE, M.C., MACKENZIE, D.I. 2002. The use of photographic rates toestimate densities of tigers and other cryptic animals: a comment on misleading conclusions.Animal Conservation 5: 119-120.
JENNY, D. 1996. Spatial organization of leopards (Panthera pardus) in Taï National Park,Ivory Coast: is rainforest habitat a ‘tropical heaven’? Journal of Zoology (London) 240: 427-440.
KARANTH, K.U. 1995. Estimating tiger (Panthera tigris) populations from camera-trap datausing capture-recapture models. Biological Conservation 71: 333-338.
KARANTH, K.U., NICHOLS, J.D. 1998. Estimation of tiger densities in India using photo-graphic captures and recaptures. Ecology 79:2852-2862.
KARANTH, K.U., STITH, B.M., 1999. Prey depletion as a critical determinant of tiger popula-tion viability. Pp. 100-113 In: Riding the Tiger: Tiger conservation in Human-DominatedLandscapes (Seidensticker, J., Christie, S. Jackson, P., eds.). Cambridge University Press,Cambridge, U.K..
KARANTH, K.U., NICHOLS, J.D. 2000. Ecological status and conservation of tigers in India.Final Technical Report to the Division of International Conservation, U.S. Fish & WildlifeService, Washington, D.C. and Wildlife Conservation Society, NY. Centre for Wildlife Studies,Bangalore, India.
KARANTH, K.U., NICHOLS, J.D. 2002. Monitoring Tigers and their Prey: a Manual forResearchers, Managers, and Conservationists in Tropical Asia. Centre for Wildlife Studies,Bangalore, India. Editors’ Note: this book contains numerous multi-authored chapters, a goodproportion of which are cited in this manual.
KARANTH, K.U., NICHOLS, J.D., SEIDENSTICKER, J., DINERSTEIN, E., SMITH, J.L.D.,McDOUGAL, S., JOHNSINGH, A.J.T., CHUNDAWAT, R.S., THAPAR, V. 2003. Science defi-ciency in conservation practice: the monitoring of tiger populations in India. Animal Conser-vation 6:1-10.
KENDALL, K.C., METZGAR, L.H., PATTERSON, D.A., STEELE, B.M. 1992. Power of signsurveys to monitor population trends. Ecological Applications 2:422-430.
KITCHENER, A. 1991. The Natural History of the Wild Cats. Comstock Publishing Associ-ates, Ithaca, New York.
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
52
KOHN, M.H., YORK, E.C., KAMRADT, D.A., HAUGHT, G., SAUVAJOT, R.M., WAYNE, R.K.1999. Estimating population size by genotyping faeces. Proceedings of the Royal Society ofLondon B 266:657-663.
LANCIA, R.A., NICHOLS, J.D., POLLOCK, K.N. 1994. Estimation of number of animals inwildlife populations. Pp. 215-253 in: Research and Management Techniques for Wildlife andHabitats (Bookhout, T., ed.). The Wildlife Society, Bethesda, Maryland.
LEWISON, R., FITZHUGH, E.L., GALENTINE, S.P. 2001. Validation of rigorous track classifi-cation technique: Identifying individual mountain lions. Biological Conservation 99:131-321.
MACKENZIE, D.I., NICHOLS, J.D., LACHMAN, G.B., DROEGE, S., ROYLE, J.A., LANGTIMM,C.A. 2002. Estimating site occupancy when detection probabilities are less than one. Ecology83:2248-2255.
MACKENZIE, D.I., NICHOLS, J.D., HINES, J.E., KNUTSON, M.G., FRANKLIN, A.D. 2003.Estimating site occupancy, colonization and local extinction when a species is detectedimperfectly. Ecology 84:2200-2207.
MAISELS, F., KEMING, E., KEMEI, M, TOH, C. 2001. The extirpation of large mammals andimplications for mountain forest conservation: the case of the Kilum-Ijum Forest, NorthwestProvince, Cameroon. Oryx 35:322-331.
MARTIN, R.B., de MEULENAER, T. 1988. Survey of the status of the leopard (Pantherapardus) in sub-Saharan Africa. CITES Secretariat, Lausanne.
McDANIEL, G. W.; McKELVEY, K. S.; SQUIRES, J. R., RUGGIERO, L. F. 2000. Efficacy of luresand hair snares to detect lynx. Wildlife Society Bulletin 28:119-123.
MILLER, C.M. 2001: Measurements of jaguar tracks: a promising means to identify individu-als. Track Collection Protocols. Wildlife Conservation Society, Bronx New York.
MILLER, C.M. 2003. Jaguar track measurements: Investigation of a potential surveymethod. Final Report for the Wildlife Conservation Society, Bronx, NewYork.
NICHOLS, J.D., CONROY, M.J. 1996. Techniques for estimating abundance and speciesrichness. Pp. 177-234 in: Measuring and Monitoring Biological Diversity: Standard Methodsfor Mammals (Wilson, D.E., Cole, F.R., Nichols, J.D., Rudran, R., Foster, M.S., eds.).Smithsonian Institution Press, Washington, D.C.
NORTON, P.M., HENLEY, S.R.1987. Home range and movements of male leopards inCedarberg wilderness area, Cape Province. South African Journal of Wildlife Research 17: 41-48.
NORTON, P.M. 1990. How many leopards? A criticism of Martin and De Meulenaer’s popula-tion estimate for Africa. South African Journal of Science 86: 218-220.
NOWELL, K, JACKSON, P. 1996. Wild cats: Status Survey and Conservation Action Plan.IUCN, Gland, Switzerland.
O’BRIEN, T.G., KINNAIRD, M.F., WIBISONO, H.T., 2003: Crouching tigers, hidden prey:Sumatran tiger and prey populations in a tropical forest landscape. Animal Conservation 6:131-139.
OTIS, D.L., BURNHAM, K.P., WHITE, G.C., ANDERSON, D.R. 1978. Statistical inference fromcapture data on closed animal populations. Wildlife Monographs 62: 1-135.
53
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
PARNELL, R.J. 2000. Information from animal tracks and trail. Pp. 157-190 in: ConservationResearch in the African Rain Forests: A Technical Handbook (White, L., Edwards, A., eds.).Wildlife Conservation Society, Bronx, New York.
RABINOWITZ, A.R. 1989. The density and behaviour of large cats in a dry tropical forestmosaic in Huai Kha Khaeng Wildlife Sanctuary, Thailand. Natural History Bulletin of theSiam Society 37:235-251.
RABINOWITZ, A.R. 1997. Wildlife Research and Conservation Training Manual. WildlifeConservation Society, Bronx, New York.
RAY, J. 2000. Carnivore scat analysis. Box 10C, Pp. 165-166 in: Conservation Research in theAfrican Rain Forests: A Technical Handbook (White, L., Edwards, A., eds.). Wildlife Conser-vation Society, Bronx, New York.
RAY, J. C. 2001. Carnivore biogegraphy and conservation in the African forest: a communityperspective. Pp. 214-232 in: African Rainforest Ecology and Conservation (Weber, W.; White,L.; Vedder, A., Naughton-Treves, L., eds.). Yale University Press, New Haven.
RAY, J.C., QUIGLEY, H.B., 2001: Trip report Central Africa (Congo and Gabon), WCS GlobalCarnivore Program (Science and Exploration Division). Wildlife Conservation Society, Bronx,New York.
RAY, J. C., SUNQUIST, M. E. 2001. Trophic relations in a community of African rainforestcarnivores. Oecologia 127:395-408.
REXSTAD, E., BURNHAM, K.P. 1991. User‘s guide for interactive program CAPTURE. Abun-dance estimation for closed animal populations. Colorado State University, Fort Collins,Colorado, USA.
RIORDAN, P. 1998. Unsupervised recognition of individual tigers and snow leopards fromtheir footprints. Animal Conservation 12:252-262.
SANDERSON, E. W.; REDFORD, K. H.; CHETKIETICZ, C. L. B.; MEDELLIN, R. A.;RABINOWITZ, A. R.; ROBINSON, J. G., TABER, A. B. 2002. Planning to save a species: thejaguar as a model. Conservation Biology 16:58-72.
SILVER, S.C., OSTRO, L.E.T., MARSH, L.K., MAFFEI, L., NOSS, A.J., KELLY, M.J., WALLACE,R.B., GOMEZ, H., AYALA, G. In press. The use of camera traps for estimating jaguar(Panthera onca) abundance and density using capture/recapture analysis. Oryx.
SMALLWOOD, K.S., FITZHUGH, E.L. 1993. A rigorous technique for identifying individualmountain lions (Felis concolor) by their tracks. Biological Conservation 65: 51-59.
SMITH, R.M. 1977. Movement patterns and feeding behaviour of leopard in the MatoposNational Park, Rhodesia. Arnoldia 13: 1-16.
STANDER, P.E. 1998. Spoor counts as indices of large carnivore populations: the relationshipbetween spoor frequency, sampling effort and true density. Journal of Applied Ecology 35:378-385.
STUART, C. & STUART, T. 1994 A Field Guide to the Tracks and Signs of Southern and EastAfrican Wildlife. Southern Book Publishers, Halfway House.
SUNQUIST, M.E., SUNQUIST, F.C. 1989. Ecological constraints on predation by large felids.Pp. 283-301 in: Carnivore Behavior, Ecology, and Evolution, (Gittleman, J.L., ed.). CornellUniversity Press, Ithaca.
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
54
THOMPSON, W.L., WHITE, G.C., GOWAN, G.C. 1998. Monitoring Vertebrate Populations.Academic Press, San Diego.
WEMMER, C., KUNZ, T.H., LUNDIE-JENKINS, G., McSHEA, W.J. 1996. Mammalian sign.Pp. 157-176 in: Measuring and Monitoring Biological Diversity: Standard Methods for Mam-mals (Wilson, D.E., Cole, F.R., Nichols, J.D., Rudran, R., Foster, M.S., eds.). SmithsonianInstitution Press, Washington, D.C.
WHITE, G.C., ANDERSON, D.R., BURNHAM, K.P., OTIS, D.L. 1982. Capture-Recapture andRemoval Methods for Sampling Closed Populations. Los Alamos National Laboratory, LA8787-NERP, Los Alamos.
WHITE, L., EDWARDS, A. (eds.). 2000. Conservation Research in the African Rain Forests: ATechnical Handbook. Wildlife Conservation Society, Bronx, New York.
WIKRAMANAYAKE, E. D.; DINERSTEIN, E.; ROBINSON, J. G.; KARANTH, U.;RABINOWITZ, A.; OLSON, D.; MATTHEW, T.; HEDAO, P.; CONNER, M.; HEMLEY, G., andBOLZE, D. 1998. An ecology-based method for defining priorities for large mammal conser-vation: the tiger as case study. Conservation Biology. 12:865-878.
WILKIE, D., SHAW, E., ROTBERG, F., MORELLI, G., AUZEL, P. 2000. Roads, development,and conservation in the Congo Basin. Conservation Biology 14: 1614-1622.
WILSON, K.R., ANDERSON, D.R. 1985. Evaluation of two density estimators of smallmammal population size. Journal of Mammalogy 66:13-21.
ZIELINSKI, W. J., KUCERA, T. E. 1995. American Marten, Fisher, Lynx, and Wolverine:Survey Methods for their Detection. General Technical Report PSW-GTR-157. Pacific South-west Research Station, Forest Service, U.S. Department of Agriculture, Albany, CA.
ZIELINSKI, W.J., STAUFFER, H. B. 1996. Monitoring Martes populations in Calfornia: surveydesign and power analysis. Ecological Applications 6:1254-1267.
55
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
(mise à jour de l’annexe 6.0 dans Karanth et Nichols, 2002)
Les logiciels CAPTURE et PRESENCE peuvent être téléchargés du site Web de l’USGSPatuxent Wildlife Research Center, Laurel, Maryland.www.mbr-pwrc.usgs.gov/software.html
Les logiciels CAPTURE, MARK, JOLLY, JOLLYAGE, etc. ainsi que le Widlife Monographsépuisé d’Otis et al. (1978) peuvent être téléchargés du site Web de Gary White de ColoradoState University, Fort Collins, Colorado. Ce site est entretenu par Gary White, qui s’occupeégalement du groupe de discussion du serveur de liste MARK pour le site du Colorado.Ce groupe de discussion est voué aux questions touchant la méthode de capture-recapture.http://www.cnr.colostate.edu/~gwhite/mark/mark.htm
Les logiciels DISTANCE 3.5 et DISTANCE 4.0 BETA 3 ainsi que le livre épuisé de Bucklandet al. (1993) peuvent être téléchargés du site Web du Centre for Research into Ecological andEnvironmental Modelling (CREEM). Ce site est géré par Len Thomas de Research Unit forWildlife Population Assessment, University of St. Andrews, Écosse, R.-U.http://www.ruwpa.st-and.ac.uk/distance/
Annexe 1. Sites Web de logicielsd’analyse gratuits
Léopards dans lesforêts pluvialesd’Afrique :méthodes derelevé et desurveillance
56
Annexe 2. Sites Web de fournisseursd’équipement pour piègesphotographiques
(mise à jour de l’annexe 6.0 dans Karanth et Nichols, 2002)
CamTrakker – système de surveillance des grands daims• clientèle ciblée : chasseurs de cervidés• appareil photo intégrant un détecteur de mouvements à infrarouge qui détecte les déplace-
ments en fonction de la chaleur• appareils 35 mm et numériques offertshttp://www.camtrakker.com/
Appareils-photos fauniques Critter-Getter• clientèle ciblée : chasseurs professionnels et sportifs• appareil photo intégrant un détecteur de chaleur/mouvements à infrarougehttp://www.critter-getter.com
Crow Systems• clientèle ciblée : biologistes de la faune professionnels et chercheurs sur le terrain• conception et fabrication sur mesure de dispositifs électroniques de recherche sur le terrain
qui conviennent à pratiquement toutes les applications de recherche• La page du site Web consacrée aux produits dresse les pour les contre de l’utilisation de
chaque type de système : à pellicule, numérique fixe et vidéo (analogique et numérique)• Crow Systems offre également aux chercheurs sur le terrain un large éventail d’outils de
recherchehttp://www.crowsystems.com/cameras.htm
Appareils photos Hawk-eye et Hawk-eye Jr. de Game Country• clientèle ciblée : chasseurs de cervidéshttp://www.game-country.com/
Game-Vu – système d’appareil photo numérique de sentier• clientèle ciblée : chasseurs de gibier• appareil photo numérique intégrant 16 rayons à infrarouge non visibleshttp://www.gamevu.com/
Highlander Photoscout• clientèle ciblée : chasseurs de gibier• appareils photos numériques et 35 mmhttp://www.highlandersports.com
Kalimar Photo Tracker• entreprise offrant un large éventail de produits photographiqueshttp://www.tiffen.com/
Moultrie Got-cha• clientèle ciblée : chasseurs de gibierhttp://www.moultriefeeders.com/
Appareils photos fauniques non typiques DeerCam• clientèle ciblée : chasseurshttp://www.nontypicalinc.com/
57
Léopards dans lesforêts pluviales
d’Afrique :méthodes de
relevé et desurveillance
Système de dépistage numérique Snapshot Sniper• clientèle ciblée : chasseurs de gibier• appareil photo numériquehttp://www.snapshotsniper.com/
Appareils-photos fauniques Stealth Cam• clientèle ciblée : chasseurs de gibierhttp://www.stealthcam.net/
TrailMAC• clientèle ciblée : chasseurs de gibier• modèles numériques et 35 mm offertshttp://www.trailsenseengineering.com/
TrailMaster – systèmes de surveillance de sentiers• clientèle ciblée : chercheurs sur le terrain, photographes, chasseurs• moniteurs à infrarouge actifs et passifs et moniteur vidéo de sentier à déclenchement à
distancehttp://www.trailmaster.com/
Trail Timer – appareils de surveillance de la faune• clientèle ciblée : chasseurs de gibier• appareil photo 35 mm à infrarouge• aussi, système permettant d’utiliser son propre appareil photohttp://www.trailtimer.com/
Vigil – appareil de surveillance de sentiers à infrarouge• clientèle ciblée : chasseurs de gibier• appareil photo 35 mmhttp://www.roc_import.com/gb/monitor/vigil_gb.php
WoodsWatcher• clientèle ciblée : chasseurs de gibier• appareil photo 35 mmhttp://www.woodswatcher.com/
Fabriquez vos propres pièges photographiques
The Home Brew Game Trail Camera Project• site Web indiquant comment fabriquer son propre piège photographiquehttp://www.jesseshuntingpage.com/homebrew-cams.html
Systèmes d’appareils photos fauniques Field Pix• Field Pix offre des systèmes complets ou partiaux ou encore des cartes de circuits pour
ceux et celles souhaitant fabriquer leur propre piègehttp://www.fieldpix.com/
Jesse’s Hunting Page• site Web indiquant comment fabriquer son propre piège photographiquehttp://jesseshuntingpage.com/homebrew-cams.html• présente également une comparaison des marqueshttp://jesseshuntingpage.com/cams.html
PixController• fournisseur de cartes de circuits pour les appareils photos 35 mm, les commandes d’obtu-
rateurs électroniques des appareils photos numériques et des caméscopes• les cartes intègrent un circuit de commande de mouvement par infrarouge passif qui
commande l’obturateur de l’appareil photo. Ainsi, l’appareil se déclenche suivant ladétection de chaleur et de mouvements corporels
http://www.pixcontroller.com/