Post on 16-Aug-2015
LES STATUTS DU FRANÇAIS DANS
L'ENSEIGNEMENT PORTUGAIS
Considérations rétrospectives, perspectives
et prospectives
Été Français 2015
José Domingues de Almeida
Passé… (fin XVIIIe – début XXe siècle + parenthèse 1950-1975) – rétrospective
Statut et position particuliers du FLE en vertu du prestige passé
(langue ornementale et monumentale) ;
Indifférence de la position du FLE face aux facteurs démographique,
économique, industriel, technologique et entrepreneurial.
Référence essentielle à la production et à la reconnaissance de
produits symboliques tenus consensuellement pour novateurs,
stimulants et reproduisibles / exportables (plus-value et une
différenciation / distinction sociale) ;
Création de concepts = néologie et terminologie »» emprunts (prêts)
terminologiques ;
Intuition d’un usage mélioratif du français en tant qu’indice
d’authenticité (cosmétique, gastronomie, art de vivre, etc.) et de
fiabilité / précision (diplomatie)
Emprunt généralisé au français, notamment pour
couvrir des zones défectives du portugais (et autres
langues) :
noblesse oblige, tout court, à la rigueur, enfant
terrible, à la carte, soi disant, à vol d’oiseau, protégé,
en passant, malgré lui, parti pris, tête-à-tête, négligé,
crème de la crème, entourage, etc.
Souci et appréciation des subtilités orthographiques et
grammaticales du français :
« La décision que nous avons prise »
« Des concepts banals » ;
Référence éminemment hexagonale et parisienne de l’usage du
français et de ses caractéristiques (idiolecte, sociolecte, etc.)
Minorisation des apports francophones postcoloniaux
et des francophonies originaires, voire régionaux
(intrinsèques à la France) ;
Langue associable à l’idéal républicain (langue
porteuse d’un idéal d’intégration et de liberté-laïcité) ;
Méfiance ou ineptie vis-à-vis d’autres cosmovisions
(capitalisme, islamisme, reviviscence religieuse, etc.)
Statut impérial de la France, unique et éternelle
métropole du français »» tutelle exclusive et politique
sur la langue ;
Stabilité dans l’imagerie populaire, l’imagologie
nationale (« béret et baguette ») ; idée de puissance
internationale, artificiellement maintenue au Conseil
de Sécurité de l’ONU.
Enseignement du FLE basé sur une approche
grammaticale axée sur la traduction et sur les subtilités
linguistiques vs les aspects communicatifs de la langue
;
Manuels centrés sur l’imaginaire hexagonal considéré
« supérieur » ;
Place importante accordée à la lecture intégrale des
œuvres littéraires (« nation littéraire »).
Repères géoculturels uniquement hexagonaux, voire
parisiens ;
Onomastique française « bleu-blanc-rouge » vs
« black-blanc-beur » ;
France comme centre civilisationnel et culturel.
Grammaire-traduction et exercices structuraux ;
Support littéraire et culturel de l’enseignement-
apprentissage du FLE (lire dans l’original) ;
Intuition d’une présence alternative du français dans
la communication internationale.
Aujourd’hui : perspectives
Immersion dans une multiplicité d’options linguistiques
résultant de l’émergence de puissances internationales
moyennes (castillan, portugais, mandarin, arabe, russe, etc.) ;
Perte d’influence française en tant que puissance
internationale ;
Conscience démolinguistique de l’état des lieux du français ;
Redéfinition institutionnelle des espaces francophones (OIF).
Enseignement-apprentissage du FLE en concurrence au Portugal (contraint de démontrer des plus-values, une utilité pragmatique, des atouts didactiques et éditoriaux, un argumentaire) ;
Mutations dans les méthodes didactiques (davantage communicatives et actionnelles, mais avec résistance grammaticale) ;
Nouvelle modalité de formation intégrée des futurs enseignants (2e cycle professionnalisant) ;
Association sporadique de la langue à des produits symboliques en langue française (succès musical, cinématographique, littéraire, cosmétique, etc.) ;
Didacticiels plus performants et en support
numérique ;
Manuels rénovés, mais dans une continuité
taxinomique et nomenclaturale evidente dans le
domaine de la transmission grammaticale ;
Ouverture sur les repères francophones et
onomastique interculturelle s’impose dans le sens
d’une représentativité interculturelle ;
Débats internes sur des questions morphosyntaxiques
et orthographiques (simplification, licence, reforme,
féminisation institutionnelle des noms de métiers, etc.),
mais sous tutelle hexagonale et sans atteindre aux
reformes auxquelles on assiste ailleurs, et sans impact
sur l’enseignement-apprentissage du FLE ;
Grammaire essentiellement normative et descriptive
en FLE, dont les principaux points demeurent
inchangés dans l’ordre et dans la substance.
Profil de l’enseignant FLE en lente, mais évidente mutation (sans considération méliorative ou péjorative) ;
Sortie de scène des enseignants issus d’un contexte de formation et de vécu du français (exposé plus haut), mais aussi émergence de générations issues de processus professionnalisants divers (stage post-licence, filière de formation, master avec stage et rapport-thèse intégrés et supervisés / dirigés) ;
Renouveau associatif et institutionnel au niveau des regroupements d’enseignants de FLE, avec un souci de formation continue et d’interaction.
Actions de promotion / divulgation du français plus
ciblées, agressives et qualitatives ;
Implication plus profonde des enseignants à l’école
en vue de la promotion culturelle de la langue
(journées et semaines françaises ; éphémérides
diverses, etc.) ;
Attention portée à la multiplicité des ressources
audiovisuelles, inexistantes auparavant.
Demain : profil prospectif (mais déjà présent aujourd’hui)
Dans le cas spécifique du professeur FLE, il sera :
Un ambassadeur de la langue dans sa projection sociétale ;
Un médiateur culturel avec les contextes francophones ;
Un habitué des médias francophones, des réalités
francophones et de leurs complexités ;
Un fin connaisseur des différentes expressions de la culture
française contemporaine ;
Un passionné inconditionnel de la langue française ;
Un intéressé par l’intercompréhension des langues et des cultures ;
Un visiteur habituel des espaces francophones ;
Un interessé par les évolutions diachroniques de la langue française, notamment par ses idéolectismes et ses néologismes ;
Un lecteur habituel de la presse francophone ;
Un adepte habituel des pages web en français ;
Un connaisseur des tendances de la chanson française contemporaine ;
Un adepte du cinéma français et francophone contemporain ;
Un curieux de l’art de vivre à la française dans tous ses versants ;
Un défenseur du statut international et symbolique de la langue française dans le monde actuel.
Un critique des méthodologies didactiques, dont il constatera
l’efficace in loco et en contexte ;
Un critique des manuels de FLE qui lui sont proposés sur (et par) le
marché éditorial ;
Un producteur autonome et créatif de matériels didactiques ou
didactisés pour le FLE ;
Un créateur de motivation permanente pour l’apprentissage du FLE,
notamment en motivant le démarrage des cours ;
Un équilibriste dans l’usage des différentes méthodologies
didactiques, notamment dans le dosage correct et approprié des
TICE par rapport aux méthodologies traditionnelles ;
Un promoteur permanent de la civilisation de langue française dans
ses caractéristiques : « La civilisation de langue française est la seule
à proposer un modèle de cité universelle qui se rattache au passé,
tout en n’étant pas fermé à la modernité ni totalement associé au
capitalisme » (Dufour, 2006: 103).
Merci de votre attention!