Consommation collaborative Alexandra Penel french

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La consommation collaborative est un nouvel espoir économique dans un contexte où la production trouve de moins en moins de destinataires. Mais au delà de ses vertus commerciales, certains y voit la possibilité d’un mode d’organisation plus sociale, plus environnementale et plus juste. Elle serait un nouvel étendard contre l’individualiste libéralisme et l’immoral capitalisme. Alors, oui ou non, la consommation collaborative amorce-t-elle la fin de notre monde ?

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POINT DE VUE SUR LA CONSOMMATION COLLABORATIVE__ __

Réflexion découlant du mémoire La location entre particuliers ou la remise en cause d’un modèle de consommation fondé sur la propriété - Alexandra Penel - Master Information & Communication - CELSA-Paris IV - Juillet 2014

La consommation collaborative a de quoi effrayer les marques tant elle semble

remettre en cause notre modèle de société.

Elle serait le signe d’une prise de « conscience de l’essoufflement du

modèle économique mondial actuel »Tout se loue sur Internet, mais à quel prix - Le Figaro - 09.02.2012

Dont elle amorcerait la fin :« ce n’est pas une crise,

c’est un changement de monde. »Michel Serres

Les entreprises y perdraient leur pouvoir : « un style de vie qui replace l’initiative de l’activité économique entre les mains de la

société civile »La révolution du partage - Le Monde - 20.09.2013

Et les marques leur sex appeal :« On cherche le fonctionnel »

Question de choix - France Info - 20.12.2013

D’un autre côté, elle apparaît aussi comme une solution à la crise du pouvoir d’achat

à la détérioration de notre environnement : « la consommation collaborative va également

de pair avec une consommation durable. »Kiwizz

voire même à l’immoralité du système actuel : « les pratiques collaboratives illustrent la

gestation d’un monde où l’entraide a remplacé l’égoïsme »

La révolution du partage - Le Monde - 20.09.2013

Peut-être parce qu’elle réconcilierait notre système capitaliste avec des valeurs marxistes.

“ Perhaps what is the most exciting about Collaborative Consumption is that it fulfills

both the hardened expectations on both sides of the socialist and capitalist ideological spectrum

without being an ideology in itself. ”What is mine is yours - Rachel Botsman & Roo Rogers

Qu’elle séduise ou qu’elle effraie, la consommation collaborative

ne laisse pas indifférent, tant elle semble bouleverser le monde tel que nous le

connaissons.

Dans quelle mesure la consommation collaborative propose

un nouveau modèle de société ?

La consommation collaborative n’a pas de limites,

et touche l’ensemble des catégories.

Elle se présente par conséquent comme une évolution du système d’hyperconsommation

La fin de l’hyperconsommation ?

« On n’est pas toujours heureux d’hyperconsommer »The Age of Acces - Jeremy Rifkin

La consommation collaborative

permettrait« de continuer à

hyperconsommer » L’avènement de la consommation collaborative

- Edouard Dumortier

Si « hyperconsommation » est un terme ambigu, « pouvoir d’achat » est une notion qui met tout le

monde d’accord.

Source : Site Ilokyou - avril 2014

L’objectif de la consommation collaborative reste l’abondance et la consommation de masse.

À la différence qu’elle revendiquedes valeurs qui manqueraient à notre système actuel.

Parce qu’elle remettrait en cause la propriété, pour lui préférer l’accès, l’usage et l’utilité.

La fin de la propriété et l’avènement de l’ère du partage?

Prenons l’exemple de la location entre particuliers

qui semble questionner le plus la propriété.

Redistibution market Collaborative lifestyleProduct service system

What is mine is yours - Rachel Botsman & Roo Rogers

Même si le mot « propriétaire » disparaît du vocabulaire comme Airbnb qui l’a remplacé

par « hôte », la propriété reste au cœur d’une location entre particuliers.

Système d’assurance

Garantie Sécurisation des paiements

La location entre particuliers reste un échange interpersonnel marchand, garanti par un tiers.

$

Location

Start-up

Start-up

Ce modèle, où la propriété est bel et bien présente, est aussi celui d’autres activités collaboratives.

La reventePropriétair

eAcheteur

Le financementPropriétaire d’une

idéesupporter

Propriétaire

Propriétaire

Le troc

La propriété n’est remise en cause que pour une seule partie de l’échange : le consommateur,

qui n’a plus besoin de posséder pour utiliser.

Du côté du propriétaire, il s’agit de rentabiliser l’objet en prolongeant son utilisation

par sa location, la revente, le troc…

La consommation collaborative n’est donc pas une mise en commun des biens,

mais une rentabilisation de la propriété.

D’où le malentendu sur l’usage du mot « partage » : ni dans le troc, ni la revente, ni la location, ni le crowdfunding ou crowdsourcing, ce qui est à moi n’est à toi.

Plutôt qu’une révolution du modèle, la consommation collaborative est une évolution des modes d’accès.

Avec ces nouvelles possibilités d’accès apparaît une nouvelle sophistication des arbitrages et un

consommateur de plus en plus expert.

On pourrait croire que ces arbitrages se jouent dans l’opposition entre rationnel et émotionnel

« On cherche le fonctionnel »1

« On réalise des économies concrètes et immédiates »3

« Optimiser ses ressources »2

Sources : 1Question de choix - France Info - 20.12.2013, 2Je loue ta voiture, tu loues mon costume, on sauve la planète - Rue 89 Le Nouvelobs - 18.08.2011, 3 site Sharewizz, 4 site Zilok

« le besoin de praticité »4 Préférence de marque

Achat Plaisir

Investissement

PRIX

UTILITÉ

PRATICITÉ

QUALITÉ

PLAISIR

STATUT

CONSOMMATION MALIGNE

PLAISIRCONSOMMATION

PLAISIR

Pourtant la consommation collaborative

exacerbeles attentes sur la

qualité et le service.

Parce qu’elle permet l’accès à

des marques, considérées comme

plus qualitatives que le low-cost.

« ça te donne accès à pleins de choses que tu n’achèterais pas »

« meilleur rapport qualité-prix » 

« Pour des travaux ponctuels, un bricoleur n’ira jamais investir dans des outils performants en raison de leur coût. La location entre particuliers permet justement

d’éviter cela. La différence d’usage et de résultat entre une meuleuse à 15€ et une meuleuse à 100€ est pourtant clairement

notable ».

Source : groupe qualitatif organisé en avril 2013, et échange avec un e-loueurs.

Et parce que le mode de

fonctionnement peer-to-peer

exige un niveau de service garantissant

l’échange.

« il y a quand même un degré d’emmerdes »

« Je trouve que le fais que ce soit entre particuliers, c’est plutôt un

handicap parce que tu as un risque sur la qualité. »

Source : groupe qualitatif organisé en avril 2013, et échange avec un e-loueurs.

« Tiers de confiance »

Plutôt que la recherche du plus bas prixou le signe du désamour des marques,

les pratiques « collaboratives » sont vécues comme un mode d’accès plus

économique à la qualité.

En ce sens, la consommation collaborative menace sans doute davantage les produitslow-cost que les marques plus premium.

Des arbitrages de plus en plus conscients et sophistiqués.

L’utilité n’a pas anéanti les attentes

émotionnelleset de statut.

Des arbitrages de plus en plus conscients et sophistiqués.

Parce que les systèmes

collaboratifs sont valorisants,

et bénéficient d’une image plus

moderne, plus incarnée, sociale et environnementale.

« un modèle de consommation meilleure pour la société »

Source : Les français et les pratiques collaboratives. Qui fait quoi ? Et pourquoi ? - Ipsos - janvier 2013.

« un acte militant »

Des arbitrages de plus en plus conscients et sophistiqués.

Parce que ces solutions révèlent

nos rapports émotionnels à

certains objets, plus qu’elles ne les

remettent en cause.

« Moi je préfère avoir une robe pas chère, limite Zara ou H&M, mais

que ce soit ma robe »

Source : groupe qualitatif organisé en avril 2013, et échange avec un e-loueurs.

« J’aime bien avoir mes bouquins, alors que mon mec, quand il achète un bouquin, après il le

jette. »

« Il y a des gens qui ont un rapport qui est pratique à la

voiture. Et puis il y a des gens pour qui c’est du statut. »

Au delà d’un usage purement rationnel, nos choix de consommation restent

vecteurs de statut et révélateurs de notre rapport aux objets.

Au final, les pratiques collaboratives ne révèlent pas

un « anti-consommateur » haïssant les marques, mais un consommateur expert, fort de solutions toujours plus variées pour satisfaire ses besoins

en qualité et statut.

La consommation collaborative n’est ni la fin du capitalisme et de la propriété,

ni la fin d’un modèle basé sur la consommationni l’avènement d’un consommateur sceptique.

Au contraire, on peut la considérer comme la généralisation du rapport marchand à l’échelle

de l’individu, une société d’hyper libéralisme où chaque propriétaire devient un commerçant,

et où le capitalisme a investi jusqu’à nos garde-

meubles.

Ce qui, bien loin d’une menace, dessine pour les marques établies des opportunités.

1Garantir les échanges entre particuliers.

1C’est à direProposer des plateformes facilitant l’échange

entre particuliers et se porter ainsi garant de la qualité de la transaction et des biens

échangés.

À l’image du Trocathlon qui permet de revendre ou d’acheter du matériel Decathlon d’occasion.

Et de façon plus indirecte, Habitat vintage qui rachète

et revend du mobilier d’occasion de la marque.

2Étendre la cible d’utilisateurs au-delà de la cible d’acheteurs.

2C’est à direproposer non plus seulement l’achat, mais aussi la location de son stock.

DriveNow et la mise à disposition d’un parc de BMW en location dans les villes.

3Partager la conception de ses projets.

3C’est à direpasser du « client » au « co-actionnaire ».

En proposant à tout un chacun de financer une partie du projet.

Ou plus simplement, en utilisant les plateformes existantes de crowdsourcing comme Popularise

ou Quirky pour concevoir son projet ou ses produits.

4Rentabiliser son réseau en imaginant des services

au profit de cette économie.

4C’est à diremettre à disposition des zones d’échange dans

son réseau, ce qui constitue un nouveau service, autant qu’une raison de venir en point de vente.

À quand la possibilité chez La Poste, chez les buralistes, chez les distributeurs de déposer ou

retirer des objets loués, troqués, revendus ?

5Étendre l’expérience de sa marque à de nouveaux services.

5C’est à direproposer des services complémentaires à l’achat et ainsi offrir des solutions globales à ses clients.

Par exemple, à quand la possibilité de louer sa décolleuse à papier peint ou sa ponceuse chez

Ikea ?

Voilà seulement 5 applications parmi de nombreux modèles à venir…