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Bruit et fluctuations dans les écoulements de fluides complexes
Université de Lyon, Laboratoire de Physique, Ecole Normale Supérieure de Lyon, CNRS,
46 allée d’Italie, 69364 Lyon Cedex 07, France.
- Soutenance de thèse de doctorat -
23 juin 2009
Thibaut Divoux
Sous la direction de
Jean-Christophe Géminard
[2] Comment un fluide newtonien s’écoule-t-il au travers d’un fluide non-newtonien ?
[1] Comment déplacer des grains au moyen de variations de température ?
Bruit et fluctuations dans les écoulements de fluides complexes
• Induire un écoulement à l’aide d’un bruit.
• Déduire des informations sur l’écoulement à partir de l’étude des fluctuations d’observables simples.
[1] Fluage d’une colonne de grainsinduit par des variations contrôlées de température
Thibaut Divoux, Hervé Gayvallet,
& Jean-Christophe Géminard.
T. Divoux, H. Gayvallet & J.-C Géminard, Creep motion of a granular pile induced by thermal cycling, Phys. Rev. Lett. 101, 148303 (2008).
T. Divoux, I. Vassilief, H. Gayvallet & J.-C Géminard, Ageing of a granular pile induced by thermal cycling, Proceeding of the P & G conference (2009).
Un tas de sable: un ensemble de particules athermiques…
Cependant, cet ordre de grandeur masque la fragilité d’un empilement de grains.
© Guillaume Reydellet
• J.B. Knight et al. Phys. Rev. E 51, 3957 (1995).• P. Philippe & D. Bideau, Europhys. Lett. 60, 677 (2002).• O. Pouliquen et al., Phys. Rev. Lett. 91, 014301 (2003).…
Un tas de sable est piégé dans un état métastable.
Pour induire une réorganisation,on doit injecter de l’énergie : secousses, cisaillements,…
H. A. Makse, J Brujic and S. F. Edwards, Statistical Mechanics of Jammed Matter, WILEY-VCH Verlag Berlin (2004)
… mais aussi une construction fragile !
Un empilement ‘lâche’ de grains est essentiellement:
hypostatique isostatique hyperstatique
• M.E. Cates, J.P. Wittmer, J.P. Bouchaud and P. Claudin, Jamming, Force Chains, and Fragile Matter, Phys. Rev. Lett., 1841 (1998).
• J.-N. Roux, G. Combe, Quasistatic rheology and the origins of strain, C. R. Physique 3, 131–140 (2002).
• J. Kurchan, Jamming vs. Glass transitions, Lyon (2008): http://www.pmmh.espci.fr/~jorge/talk_jamming.pdf
© Guillaume Reydellet
A l’instar d’une table sur trois pieds, un empilement de grains est très sensible aux perturbations extérieures.
C.F. Moukarzel, Isostatic phase transition … granular materials, Phys. Rev. Lett., 1634 (1998).
Quelles sont les signatures d’une telle fragilité ?
P. Claudin & J.-P. Bouchaud, Static Avalanches and Giant Stress Fluctuations in Silos, Phys. Rev. Lett. 78, 231 (1997).
Quelles sont les signatures d’une telle fragilité ?
Comment générer de faibles perturbations ? Avec des variations de température !
P. Claudin & J.-P. Bouchaud, Static Avalanches and Giant Stress Fluctuations in Silos, Phys. Rev. Lett. 78, 231 (1997).
• Considérer un tas :
• soumis à des variations de température :
• conduit à des variations :
• pour lequel :
= rugosité des grains
Effets de la température sur une assemblée de grains ?
C. Liu & S.R. Nagel, Sound in a granular material: disorder and nonlinearity, Phys. Rev. B 48, 15646 (1993).
Effets de la température sur une assemblée de grains ?
Fluctuations de la masse apparente d’un empilement de grains :
• L. Vanel & E. Clément. Pressure screening and fluctuations at the bottom of a granular column, Eur. Phys. J. B 11, 525 (1999).
• E. Clément et al. Fluctuating aspects of the pressure in a granular column, Powders and Grains 97, Behringer & Jenkins (1997) Balkema, Rotterdam.
Effets de la température sur une assemblée de grains ?
Compaction lente d’un empilement de grains
induite par des variations de température :
J.-C. Géminard, HDR: Quelques propriétés mécaniques des matériaux granulaires immergés, UJF Grenoble I, p 32 (2003).
Caméra
Flux d’airCâble chauffant
Alimentation
Effets de la température sur une assemblée de grains ?
T=107 °C
T= 41 °C
‘‘Packing grains by thermal cycling’’ :
K. Chen, J. Cole, C. Conger, J. Draskovic, M. Lohr, K. Klein, T. Scheidemantel, P. Schiffer, Packing grains by thermal cycling, Nature, 442 (2006).
Effets de la température sur une assemblée de grains ?
- Peut-on mener une étude résolue en temps de la dynamique d’un empilement soumis à des cycles de température (dynamique au cours d’un cycle) ?
- Peut-on dissocier la contribution de la dilatation des grains de celle du récipient lors du processus de compaction ?
- Quel est le comportement d’un empilement de grains dans la limite des cycles de température de faible amplitude (< 40 °C) ?
Les questions auxquelles nous souhaiterions répondre:
Comment réaliser la ‘trempe’ d’une colonne de grains ?
Protocole expérimental :
• J. Brujic et al. Granular Dynamics in Compaction and Stress Relaxation, Phys. Rev. Lett. 95, 128001 (2005).
• A. Kabla & G. Debrégeas, Contact Dynamics in a Gently Vibrated Granular Pile, Phys. Rev. Lett. 92, 035501 (2004).
Cycles de haute amplitude : T > 3°C [la dynamique]
• Les cycles de température induisent la lente compactionde la colonne [1%: 7 jours].
• Deux régimes distincts :
- exponentiel - logarithmique
• La colonne se compacte
à chaque cycle.
• La compaction n’est probablement pas le résultat de la différence entre le coefficient de dilatation thermique des billes
et celui du récipient.
Cycles de haute amplitude : T > 3°C [les dilatations]
10.8 °C
16.2 °C
27.1 °C
L’amplitude des dilatations croit avec le logarithme du nombre de cycles
appliqués.
Cycles de haute amplitude : T > 3°C [le C. L. D. T.]
• Toute la hauteur H de la colonne est impliquée dans les dilatations.
• Quelle fraction de la hauteur de la colonne est impliquée dans les
dilatations ?
• Estimation du coefficient de dilatation thermique de
l’empilement:
Cycles de haute amplitude : T > 3°C [régime exponentiel]
Régime exponentiel
Vers les cycles de faible amplitude : T < 3°C
Dans la limite des cycles de faible amplitude
(T < 3°C), la colonne se compacte par sauts d’amplitude variable,
espacés dans le temps de façon irrégulière
Cycles de faible amplitude : T < 3°C [la dynamique]
= amplitude des sauts verticaux, n = nombre de cycles entre deux sauts successifs.
Vitesse de compaction constante
Cycles de faible amplitude : T < 3°C [les statistiques]
Distribution de probabilité cumuléedu nombre de cycles entre deux
effondrements successifs:
Distribution de probabilité de l’amplitude des effondrements:
Dans le limite des cycles de faible amplitude:
• les sauts sont espacés aléatoirement dans le temps;• l’amplitude des effondrement suit une loi gaussienne (largeur =1/10 taille de grain).
Un scénario possible pour la transition à ‘T = 3°C’
• D. Bonamy, L. Laurent & F. Daviaud, Electrical conductance of a thermally perturbed packing: on the origin of granular fragility, P&G (2001).
• W.L. Vargas & J.J. McCarthy, Thermal expansion effects and heat conduction in granular materials, Phys. Rev. E 76, 041301 (2007).
• Gradient de température:
• qui produit un cisaillement sur une échelle de taille L :
• pour un cisaillement à l’échelle de la rugosité des grains
L = rayon du tube; transition = effet de taille finie
Pour fixer les idées, le cisaillement à l’échelle de 2 grains:
Conclusions & perspectives
• Un empilement de grains est une collection de particules athermiques qui constitue une construction fragile; la rugosité de surface des grains est la plus petite échelle pertinente permettant d’induire des réorganisations macroscopiques;
• Nous avons mené une étude résolue en temps de la dynamique de compaction d’un empilement induite par des variations de température;
• A faible amplitude, la colonne se compacte par saut; à haute amplitude la colonne se compacte à chaque cycle (toute la hauteur de la colonne est mise en jeu); la transition est un effet de taille finie;
• La différence de coefficient de dilatation thermique des grains et des parois n’est pas la cause principale de la compaction;
• Des variations de température induisent le vieillissement naturel du tas.[Silos à grains, phases ‘oignon’: S. Mazoyer, L. Cipelletti & L. Ramos Phys. Rev. E 79 011501
(2009) ]
- “Take home messages” -
- Perspectives plus générales -
Conclusions & perspectives
• Confirmer le scénario de la transition en changeant la fréquence des cycles de température (profondeur de pénétration);
• Localiser les effondrements qui ont lieu à faible amplitude de chauffe; [localisation acoustique en développement]; Amplitude et étendue spatiale des réarrangements [Corrélation d’image en développement].
- Qu’aimerions-nous savoir de plus ? -
• Nous venons de voir essentiellement une méthode pouvant être utilisée pour induire des perturbations très douces au sein d’une assemblée de grains.
• Pertinent pour l’étude: - des champs de déplacement dans les milieux amorphes;
- des propriétés des matériaux à seuil (existence du seuil ?).
[2] Dégazage intermittent à travers une colonne de fluide complexe
Thibaut Divoux, Valérie Vidal, Eric Bertin
& Jean-Christophe Géminard
Stromboli, Italie
Kilauea, Hawai’i
T. Divoux, E. Bertin, V. Vidal & J.-C Géminard, Intermittent outgassing through a non-Newtonian fluid, Phys. Rev. E 79, 056204 (2009).
Intermittence et géophysique
Activité intermittente observée au sommet des volcans basaltiques H.M. Gonnermann & M. Manga,
Annu. Rev. Fluid Mech., 39, 321-356 (2007).
Bulles Fontaines de lave
- Eruptions hawaïennes -
E.A. Parfitt, J. Volcanol. Geotherm. Res. 134, 77-107 (2004).
- Eruptions stromboliennes -
M. Ripepe, A.J.L. Harris & R. Carniel, J. Volcanol. Geotherm. Res. 118, 285-297 (2002).
Différents styles d’explosionsde bulles (‘puffing’).
“Par quel mécanisme un volcan passe-t-il d’un mode de dégazage à
un autre ?”
Activité intermittente : un scénario potentiel
Insistons tout de même sur le fait que :
(i) l’intermittence du dégazage est ici la conséquence de la variation du débit et de la géométrie particulière de la chambre.
(ii) le magma présente une rhéologie non-newtonienne qui n’est pas prise en compte ici.
Différents régimes de dégazage peuvent être obtenus :
C. Jaupart & S. Vergniolle, Nature 331, 58-60 (1988); J. Fluid. Mech. 203, 347-380 (1989).
(i) Un écoulement de bulles dans le conduit;
(ii) La création de larges poches de gaz piégées sous la surface et qui viennent exploser en surface dès que leur taille est suffisante;
(iii) Un écoulement de mousse partiellement coalescée.
QCette expérience rend compte des effets de la géométrie de la chambre magmatique et/ou du conduit
De la rhéologie non-newtonienne du magma
Le magma présente un comportement non-newtonien :
• le magma présente un seuil à l’écoulement; de petites bulles peuvent rester piégées.
• S.L. Webb and D.B. Dingwell, J. Geophys. Res. 95, 15695 (1990) and references therein;• Y. Lavallée, K.-U. Hess, B. Cordonnier and B. D. Dingwell, Geology 35, 843 (2007).
• le magma est rhéofluidifiant.
Quel est le rôle de la rhéologie complexe de la lave sur les changements d’activité erratiques des volcans
basaltiques ?
La question à laquelle nous souhaiterions répondre:
http://volcanoes.usgs.gov/images/pglossary/basalt.php
Rhéologie des solutions de gel pour cheveux
• Fortement rhéofluidifiant
• Existence d’un seuil à l’écoulement
Dispositif expérimental & Protocole
À débit constant
Solutions de gel coiffant (+ 10%, eau)
T. Divoux, V. Vidal, F. Melo and J.-C. Géminard, Phys. Rev. E 77, 056310 (2008).
Dégazage intermittent à débit constant
“Bulles”
On observe une activité intermittente entre deux régimes, à débit constant :
• un “régime bulle”: bulles indépendantes,
Combien de temps le système passe-t-il dans
chaque régime ?
“canal ouvert”• un “régime canal ouvert”: un canal connecte la buse émettrice à la surface libre du fluide.
Le système alterne spontanément entre ces 2 régimes !
I.L. Klikhandler, Continuous chain of bubbles in concentrated polymeric solutions, Phys. Fluids 14, 3375 (2002).
Fraction du temps passé dans le “régime bulle” ?
On se focalise sur les statistiques associées à chacun des deux régimes, à débit constant
Durée de vie du “canal ouvert”
•Distribution de probabilité cumulée:
temps viscoélastique
.
temps viscoélastique
Durée de vie du “canal ouvert”
• L’exposant ne dépend que de la rhéologie du gel;
• La durée de vie du canal ne présente pas de valeur moyenne (sous le temps viscoélastique).
• Interprétation: entre la création du canal et le tempsviscoélastique du fluide, on ne peut pas prédire lemoment d’effondrement du canal.
•Distribution de probabilité cumulée:
temps viscoélastique
,
La distribution de probabilité de la durée de viedu canal ouvert suit une loi de puissance:
Durée de vie du “canal ouvert”
•Distribution de probabilité cumulée:
temps viscoélastique
Combien de temps pour créer un “canal ouvert” ?
La distribution de probabilité des intervalles de temps passés à faire des bulles est une exponentielle :
- les propriétés non-newtoniennes conduisent aussi à :
• des statistiques non-triviales de durée de vie du canal (loi de puissance, exposant proche de 1.2).• l’exposant ne dépend que des propriétés rhéologiques du fluide.
• On comprend comme le ratio de 2 temps caractéristiques du fluide.
Conclusions & perspectives
*
Que retenir de cette expérience de coin de table ? 3
- A débit constant, les seules propriétés non-newtoniennes du fluide suffisent à induire une activité intermittente entre deux régimes différents (bulles et canal ouvert).
Application: les statistiques associées aux changements d’activité pourraient être une façon non intrusive d’accéder aux propriétés rhéologiques (de la lave).
3
Interprétation: les propriétés non-newtoniennes de la lave pourraient être (partiellement) responsables des changements d’activité constatés sur le terrain.
Conclusions & perspectives
Qu’aimerions-nous savoir de plus ?
• Physique3
- Dissocier les différentes contributions des composantes non-newtoniennes (seuil, effet rhéofluidifiant, effets viscoélastiques…).
• Géophysique- Est-ce que les résultats présentés dans cet exposé ont une contrepartie pour les volcans basaltiques ? [Collaboration avec M. Ripepe, Univ. Firenze (Italie)]
- Estimation de la contribution d’autres paramètres pertinents sur le terrain: la température, les inhomogénéités du magma…
Q
Perspectives ?
Tous mes remerciements à Sylvie Vergniolle (IPGP).
Conclusion Générale
-Bruit et fluctuations dans les écoulements de fluides complexes -
[1] Induire un écoulement à l’aide d’un bruit.
[2] Déduire des informations sur l’écoulement à partir de l’étude des fluctuations d’observables simples.
Rôle de la fréquence des cycles de température ?
Rôle de la fréquence des cycles de température ?
T. Scheller, C. Huss, G. Lumay, N. Vandewalle & S. Dorbolo, Precursors to avalanches in a granular monolayer, PRE 74, 031311 (2006).
Compétition glissement - effet Janssen